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SOMMAIRE Éditorial : Mais où sont les Noëls d'antan ? Un héritage "problématique" ( Jean Claude BRUNELIN) page 2 Les dossiers "Noirs" 1972-1975 (suite) … ( Jean Claude BRUNELIN) pages 3 à 9 Les ministres sous la 5 ème : Michel Cointat et Jacques Chirac (Jean Claude BRUNELIN) pages 10 à 18 Différend entre les habitants de Châteauneuf et Jean François Fornier, procureur au bailliage d’Allègre - septembre 1759 (René BORE) pages 19 et 20 L’élevage médiéval (Gilbert DUFLOS) pages 21 et 22 L’élevage ovin au Moyen Âge (Gilbert DUFLOS) pages 23 à 25 Le droit de pâturage dans la coutume d’Auvergne (René BORE) pages 26 à 32 Aux temps des restrictions : le soja (Jean Claude BRUNELIN) pages 33 à 36 Les gens d'ici : Victor Espérandieu (suite) (Jean Claude BRUNELIN) pages 37 à 39 Maison Espérandieu, rue Saint Esprit (Marie-Andrée MOUTOUNET) pages 40 et 41 De l'Océan au Velay : portrait (Gilbert DUFLOS) pages 42 à 45 Le sablier de la vie : la chapelle enchantée (Yvette MAURIN) pages 46 à 49 Lo caion, la chabra e lo moton Revirada de Joan de La Font (Henri OLLIER) page 50 A propos de Velay (suite) (Hervé QUESNEL-CHALELH) pages 51 à 54 Plasèr de la revirada : La chata transformada en femna (Hervé QUESNEL-CHALELH) page 55 Mais où sont les Noëls d'antan ? Lorsque nous étions enfants, il nous arrivait de passer les fêtes de fin d'année dans un hameau de la monta- gne. C'était la maison de ma grand-mère maternelle, vieille femme vêtue de noir, ridée comme une pomme oubliée, rude et tendre à la fois. La famille était nom- breuse et joyeuse, cousins, cousines, parents, oncles et tantes. Le sapin à décorer était une fête. Dans un de nos bois, nous allions couper un beau sapin vert som- bre au port bien étalé. C'était en même temps une leçon de choses. Nos aînés nous montraient les "boules", sor- tes de pierres rondes marquant les limites de parcelles. Ils racontaient des anecdotes de bornes déplacées par des riverains indélicats. Le sapin prélevé devait être en surnombre pour ne pas enlever du potentiel à la planta- tion et favoriser un arbre plus fort. Malgré son faible poids, nous le débardions à plusieurs imitant les paysans évacuant du bois avec leurs attelages. Parvenu et installé dans la salle commune, il s'agissait de le dé- corer : guirlandes multicolores, boules fragiles en verre soufflé, petits personnages, friandises, bougies au bout des branches sur leur support muni d'une pince. Et puis la crèche au pied du sapin, grotte-étable sculptée dans du papier rocher. Les santons prenaient ensuite place dans cet habitat rustique : l'Enfançon presque nu, pour marquer sa naissance toute fraîche. Et puis à Bethléem il faisait plutôt chaud ! De toute façon, l'âne et le boeuf enveloppaient le divin enfant de leur souffle chaud. Marie et Joseph veillaient aussi au confort de l'Enfant Roi. Le petit peuple des santons affluait pour offrir leurs modestes cadeaux. Les Rois Mages cheminaient en suivant l'étoile pour rendre hommage à cet Enfant annoncé et célébrer sa gloire future avec l'or, la myrrhe et l'encens. Il y avait de la neige à Noël en ce temps là et parfois en abondance. La messe de Noël se déroulait à minuit et nous y allions en bande joyeuse, chaude- ment vêtus et chaussés pour affronter la neige parfois épaisse. Je n'ai point connu de trajet sous la tourmente pourtant fréquente, une accalmie, un moment de paix, un petit miracle d'une nature exceptionnellement bien- veillante. Les enfants les plus grands ouvraient la route et faisaient la trace, entre les gros rochers bordant les "coursières". La messe était solennelle, les gens endi- manchés. Il faisait froid mais bien vite l'atmosphère de l'église bondée se réchauffait. Les chants s'élevaient à pleine voix. "Il est né le divin enfants, jouez hautbois résonnez musettes…" Nous ne comprenions pas trop les paroles. Ces instruments anciens évoquaient confu- sément nos bois familiers et les sacs de toile contenant les encas des balades en forêt. Peu importe le sens, nous nous laissions emporter sur les ailes du chant sa- cré dans la ferveur ambiante et l'intrigante odeur d'en- cens que nous prenions pour odeur de sainteté. La messe terminée nous visitions la crèche. Puis c'était le retour dans le froid et la neige sur la trace parfois re- DECEMBRE 2013 N° 52 ISSN : 1774 - 7597

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SOMMAIRE ���� Éditorial : Mais où sont les Noëls d'antan ? ���� Un héritage "problématique"

( Jean Claude BRUNELIN) page 2

���� Les dossiers "Noirs" 1972-1975 (suite) … ( Jean Claude BRUNELIN) pages 3 à 9

���� Les ministres sous la 5ème : Michel Cointat et Jacques Chirac

(Jean Claude BRUNELIN) pages 10 à 18 � Différend entre les habitants de Châteauneuf et Jean François Fornier, procureur au bailliage

d’Allègre - septembre 1759 (René BORE)

pages 19 et 20 ���� L’élevage médiéval (Gilbert DUFLOS) pages 21 et 22 ���� L’élevage ovin au Moyen Âge (Gilbert DUFLOS) pages 23 à 25 � Le droit de pâturage dans la coutume d’Auvergne (René BORE) pages 26 à 32 ���� Aux temps des restrictions : le soja (Jean Claude BRUNELIN) pages 33 à 36 ���� Les gens d'ici : Victor Espérandieu (suite) (Jean Claude BRUNELIN)

pages 37 à 39 � Maison Espérandieu, rue Saint Esprit (Marie-Andrée MOUTOUNET) pages 40 et 41 ���� De l'Océan au Velay : portrait (Gilbert DUFLOS) pages 42 à 45 ���� Le sablier de la vie : la chapelle enchantée (Yvette MAURIN) pages 46 à 49 ���� Lo caion, la chabra e lo moton Revirada de Joan de La Font (Henri OLLIER) page 50 ���� A propos de Velay (suite) (Hervé QUESNEL-CHALELH) pages 51 à 54 ���� Plasèr de la revirada : La chata transformada en

femna (Hervé QUESNEL-CHALELH) page 55

Mais où sont les Noëls d'antan ?Lorsque nous étions enfants, il nous arrivait de passer les fêtes de fin d'année dans un hameau de la monta-gne. C'était la maison de ma grand-mère maternelle, vieille femme vêtue de noir, ridée comme une pomme oubliée, rude et tendre à la fois. La famille était nom-breuse et joyeuse, cousins, cousines, parents, oncles et tantes. Le sapin à décorer était une fête. Dans un de nos bois, nous allions couper un beau sapin vert som-bre au port bien étalé. C'était en même temps une leçon de choses. Nos aînés nous montraient les "boules", sor-tes de pierres rondes marquant les limites de parcelles. Ils racontaient des anecdotes de bornes déplacées par des riverains indélicats. Le sapin prélevé devait être en surnombre pour ne pas enlever du potentiel à la planta-tion et favoriser un arbre plus fort. Malgré son faible poids, nous le débardions à plusieurs imitant les paysans évacuant du bois avec leurs attelages. Parvenu et installé dans la salle commune, il s'agissait de le dé-corer : guirlandes multicolores, boules fragiles en verre soufflé, petits personnages, friandises, bougies au bout des branches sur leur support muni d'une pince. Et puis la crèche au pied du sapin, grotte-étable sculptée dans du papier rocher. Les santons prenaient ensuite place dans cet habitat rustique : l'Enfançon presque nu, pour marquer sa naissance toute fraîche. Et puis à Bethléem il faisait plutôt chaud ! De toute façon, l'âne et le bœuf enveloppaient le divin enfant de leur souffle chaud. Marie et Joseph veillaient aussi au confort de l'Enfant Roi. Le petit peuple des santons affluait pour offrir leurs modestes cadeaux. Les Rois Mages cheminaient en suivant l'étoile pour rendre hommage à cet Enfant annoncé et célébrer sa gloire future avec l'or, la myrrhe et l'encens. Il y avait de la neige à Noël en ce temps là et parfois en abondance. La messe de Noël se déroulait à minuit et nous y allions en bande joyeuse, chaude-ment vêtus et chaussés pour affronter la neige parfois épaisse. Je n'ai point connu de trajet sous la tourmente pourtant fréquente, une accalmie, un moment de paix, un petit miracle d'une nature exceptionnellement bien-veillante. Les enfants les plus grands ouvraient la route et faisaient la trace, entre les gros rochers bordant les "coursières". La messe était solennelle, les gens endi-manchés. Il faisait froid mais bien vite l'atmosphère de l'église bondée se réchauffait. Les chants s'élevaient à pleine voix. "Il est né le divin enfants, jouez hautbois résonnez musettes…" Nous ne comprenions pas trop les paroles. Ces instruments anciens évoquaient confu-sément nos bois familiers et les sacs de toile contenant les encas des balades en forêt. Peu importe le sens, nous nous laissions emporter sur les ailes du chant sa-cré dans la ferveur ambiante et l'intrigante odeur d'en-cens que nous prenions pour odeur de sainteté. La messe terminée nous visitions la crèche. Puis c'était le retour dans le froid et la neige sur la trace parfois re-

DECEMBRE 2013

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couverte. Nous accélérions le pas malgré la montée. Une de nos tantes, prenait subrepticement de l'avance pour illuminer le sapin et disposer les cadeaux. Quel bonheur d'arriver dans la cour éclairée doucement par les lueurs dansantes des bougies. Vêtements jetés en désordre et vite la répartition des cadeaux bien modes-tes par rapport à l'avalanche actuelle : des livres de la collection Rouge et Or, des poupons réalistes pour les filles, des tenues de Zorro ou de Cow-boy pour les garçons, des boites de Meccano, des petites voitures Norev, des soldats miniatures… et joyeux vacarme des papillotes à pétard. Un réveillon nous attendait dressé sur la vaste table paysanne avec ses immenses tiroirs : traditionnelle bûche de Noël décoré de petits lutins, 13 desserts provençaux, célébrant les 12 apôtres et le Christ, composés de fruits secs, confitures, biscuits et sucreries, châtaignes et pompes… Et puis il fallait se coucher en rêvant aux jeux du lendemain… enfouis en-tre matelas bruissant de feuilles de faillard et édredon épais de plumes, une brique vernissée chaude près des pieds… Gentil ce Père Noël affrontant la neige avec son attelage de rennes volants pour distribuer des ca-deaux aux enfants sages, et rudement malin pour se glisser dans les maisons fermées à double tour ! JCB

Un héritage problématique… Le froid et la neige de ce rude mois de décembre avaient eu raison de ses faibles forces. Il ne passe-rait pas Noël. Sentant ses forces décliner et la "grande faucheuse" le frôlant déjà de ses ailes, Jeantou prit la décision de partager son petit trou-peau de brebis noires entre ses trois fils. Il savait bien qu'ils ne se disputeraient pas son maigre héritage mais il préférait prendre les devants. Il avait été toute sa vie berger communal dans le même petit village du Velay. A force d'écono-mies, il avait pu y acheter une modeste maison. Il avait épousé une brave femme qui lui avait donné trois beaux et vigoureux garçons qui avaient pas si mal réussi dans la vie. C'était sa fierté et son bâton de vieillesse. Il avait presque l'âge de la retraite quand le trou-peau communal s'était disloqué, les paysans du village préférant travailler chacun de leur côté et abandonner ces pratiques archaïques. Il avait alors récupéré ses brebis siennes. Il lui en restait maintenant dix sept, de belle race, fines et vives, le poil brillant. Il décida d'attribuer la moitié du troupeau à l'aîné, le tiers au cadet et un neuvième au plus jeune. Un délai convenable après qu'il ait rendu son âme au Grand Berger du Ciel, ses fils décidèrent de mettre à exécution ses dernières volontés.

Ses fils avaient bien l'habitude de compter les moutons et de calculer de tête le prix de vente de leurs agneaux au marché pour ne pas se faire rou-ler par les maquignons roublards. Mais cette fois-ci, les chiffres s'embrouillaient dans leurs têtes. Leur chagrin n'y était pas pour rien. Sauf à dépecer les bêtes et à se partager les mor-ceaux, façon de parler, car ils n'auraient pas fait cette injure à la mémoire de leur père, leurs comp-tes ne tombèrent jamais justes. Ces maudites frac-tions ! En désespoir de cause, un peu gênés, ils décidè-rent de demander conseil à leur vieil instituteur qui avait pris sa retraite dans le village et possé-dait lui aussi quelques jolies brebis noires. Le plus jeune se dévoua, se rendit chez l'institu-teur, tournant son béret dans ses mains calleuses. Comme il s'y attendait, l'instituteur commença par lui passer un bon savon sur son manque d'assidui-té à l'école quand il était gamin et préférait aller dénicher les oiseaux dans les arbres et les remises plutôt que de venir s'instruire à l'école commu-nale. Comme l'instituteur était un brave homme, malgré son fichu caractère, il prit sa canne, ordonna sans ménagement au jeune homme de charger sur ses épaules l'une de ses propres brebis et de le suivre à la bergerie du Jeantou pour régler le "pro-blème". Arrivés sur place, le jeune fils mit la brebis avec les autres, ce qui en porta le nombre à 18 bêtes. L'instituteur en attribua la moitié soit 9 au fils aî-né, un tiers soit 6 au cadet et un neuvième soit 2 au plus jeune. Et il demanda au jeune fils de rapa-trier sa brebis qui, perdue chez des étrangères, bê-lait désespérément. Les fils de Jeantou furent épatés et commencèrent à regretter leur manque d'assiduité à l'école mais c'était bien manqué maintenant. L'instituteur était assez satisfait de la "leçon" à re-tardement qu'il leur avait infligée ! Pour sa peine, ils ne lui proposèrent pas un canon de rouge, car ils savaient qu'il ne buvait pas d'al-cool, mais un café qu'ils auraient bien eux baptisé avec un peu de "gnole" de leur fabrication. Le vieil homme s'éloigna, appuyé sur sa canne, sentant sur lui le regard admiratif et affectueux de ces grands bougres de fils du Jeantou, du brave monde même si, gamins turbulents, ils lui avaient donné bien du fil à retordre.

Jean Claude Brunelin

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LES DOSSIERS NOIRS (suite)

La fin d'un monde… - La Loi sur l'Élevage du 28 décembre 1966 est une des grandes lois dans le domaine de l'éle-vage. Souvent appelée Loi Poly, du nom de Jacques Poly, généticien de l'INRA et conseiller d'Edgar Faure, cette loi est remarquable par l'organisation qu'elle a mise en place dans le domaine de: la sélection animale et de l'amé-lioration génétique des espèces animales. Elle a organisé et développé tout un réseau d'acti-vités : identification animale, contrôles des filiations et des performances, indexation gé-nétique, agrément et choix des géniteurs, monte publique et insémination artificielle. Le Département de Génétique Animale de l'INRA

devenait le pivot de l'organisation, avec ses relais : les Instituts Techniques d'Élevage, les Centres d'élevage et d'insémination artificielle(CEIA), les unités de sélection animale (UPRA), les Établissements Départementaux de l'Éle-vage (EDE) et les éleveurs eux-mêmes engagés dans le travail de choix de géniteurs et d'amé-lioration génétique.- Au niveau régional, la SOMIVAL (Société pour la mise en valeur de l'Auvergne et du Limou-sin), possédait alors une division agricole. Au niveau ovin, elle est chargée par le Ministère de l'agriculture d'étudier les différentes races rustiques du Massif Central. Entre 1967 et 1972, un protocole expéri-mental est mis au point avec l'INRA. Les observa-tions seront menées à la ferme expérimentale de Laroue située en Haute-Loire près de Langeac. La SOMIVAL met aussi en place un réseau de fermes contractuelles ovines pour créer des références. Une organisation de commercialisation voit le jour : des groupe-ments de producteurs (COPA HAUTE AUVERGNE

pour la Haute-Loire et le Cantal) associés au sein d'une structure régionale FRANCE-

AGNELLE. - Au niveau départemental, l'EDE (Etablisse-ment départemental de l'élevage) est chargé de la mise en place des contrôles de performan-ces. En Haute-Loire, l'EDE est créé fin 1969 au sein de la Chambre d'agriculture et agréé en juillet 1970. Il lui faudra quelques mois pour

monter en charge. Je suis moi-même embauché en juillet 1972 pour constituer un service ovin. Je travaille avec M. Espenel, Moniteur d'éle-vage ovin qui me met le pied à l'étrier. Ces années-là sont des années de transition où cohabitent, non sans heurts d'ailleurs, l'ancien système représenté par les syndicats d'élevage, les livres généalogiques ovins, les flock-books les foires et marchés traditionnels sur le dé-clin, et un nouvelle organisation héritée de la loi sur l'élevage. C'est dans ce contexte contrasté que la Noire du Velay va tenter d'en-trer dans la modernité.

Une réunion d'information sur les UPRA se déroule le 8 août 1972. M. Ducrot, salarié de France-Agnelle, est chargé de la mise en place d'une UPRA régionale, chaque race constituant une section. Un point sur la race est fait à cette occasion : mévente des agnelles, approvision-nement par des troupeaux qui se démontent. La Noire du Velay n'a plus que de faibles effec-tifs, une dizaine d'élevages en race pure. Sa pigmentation pose de gros problèmes d'identi-fication pour rendre fiables les enregistre-

ments. Rendez-vous est pris à l'automne. Etaient présents à cette entrevue : MM. Gau-thier, directeur de l'EDE ; Brunelin, ingénieur EDE ; Perrin, technicien contrôle de croissance ; Laborde, ingénieur à la DDA ; Espenel, moni-teur d'élevage ovin ; Teissèdre, président de Copa-Haute-Auvergne ; des éleveurs, MM. Bros Gaston; président de la FDO ; Chalendard Aimé, Marrel Paul, Leydier Maurice, Itier Hyppolite, tous éleveurs de brebis Noires. En octobre 1972, se déroule une première foire aux agnelles à Brioude. C'est une foire aux enchères, sur une idée de M. Michel Souvi-

MM. Espenel Marc, Bros Gaston, Marrel Paul, Dr Filleton

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gnet, directeur de Copa Haute Auvergne. Ce système lui était apparu comme plus économi-que que des visites d'élevages avec les clients potentiels. Des agnelles Noires du Velay sont au catalogue. La presse locale publie, à l'automne 1972, un article intitulé : "De l'or noir en Velay ?""La richesse potentielle des éleveurs de mou-tons du Velay est sans conteste la race ovine locale Noire du Velay (Noire de Bains). Mal-gré une sélection à rebours et une politique anarchique de croisement avec les races à viande (Berrichon, Ile de France, et plus ré-cemment Charollais, races anglaises) dictées par l'ignorance et le souci d'un profit à court terme, la Noire du Velay peut encore être sau-vée et exploitée par les éleveurs du cru misant sur l'avenir. Ce regain d'intérêt est fondé car cette race possède de remarquables qualités recherchées à l'heure actuelle où l'on s'efforce d'intensifier la production ovine : - adaptation parfaite au milieu, - besoins alimentaires réduits du fait de son format, - bonne conformation, - prolificité et surtout faculté de produire en toutes saisons (désaisonnement) et à un rythme accéléré. Dans la perspective d'une concurrence au sein de la CEE par des pays gros producteurs d'agneaux, mais à des moments fixes du fait du "saisonnement" de leurs animaux, la posses-sion de telles races est un atout important. En-core faut-il savoir utiliser ce potentiel sur place et éviter que sa sélection échappe à la profes-sion. Devant cette situation, quelques éleveurs ex-ploitant la Noire du Velay, conscients de ses qualités et désireux de la faire connaître, se sont réunis à l'Etablissement départemental de l'élevage de la Haute-Loire. Il s'agissait d'une première réunion d'approche et d'information. Tous se montrèrent fermement décidés à agir pour la sauvegarde et l'exploitation rationnelle de la Noire du Velay. Ils s'accordèrent égale-ment pour dire qu'il fallait structurer cette ac-tion pour qu'elle ne s'arrête pas au niveau des intentions. La récente loi sur l'Elevage avait mis l'accent sur l'amélioration génétique du cheptel et fournissait un outil parfaitement adapté aux éleveur : l'UPRA, Unité de sélection et de promotion de race. Cette organisation doit regrouper l'ensemble des éleveurs intéres-sés à l'amélioration de la race, les éleveurs sélectionneurs, les éleveurs-utilisateurs et les

organismes de commercialisation et de trans-formation. L'UPRA a trois missions : - étudier la race sous un aspect plus économi-que que descriptif, - à partir de cette étude définir le modèle d'animal que l'on peut produire en ayant soin d'ajuster ce modèle à la demande des utilisa-teurs, - définir et mettre en place un programme de sélection afin que cette dernière reste aux mains de la profession. Une UPRA régionale a été créée au niveau de l'Union des groupements de producteurs de France-Agnelle, pour les races rustiques du Nord Massif Central. Chaque race constituera une section de l'UPRA

régionale. L'UPRA semble être un moyen de choix pour mettre en valeur la Noire du Velay, et une section Noire du Velay devrait vraisem-blablement voir le jour cet automne. Elle est ouverte à tous les éleveurs désireux d'agir en faveur de cette race, dans un premier temps, pour la sauver et constituer une base de sélec-tion, et dans un deuxième temps; l'exploiter au mieux de ses possibilités. Les éleveurs intéressés par cette action sont priés de se faire connaître à l'Etablissement départemental de l'élevage de la Haute-Loire." "La Noire du Velay. Dernier sursaut ou renouveau." C'est le titre d'un autre article paru dans la presse locale en novembre 1972. "La Noire du Velay, race ovine locale, mode-lée au cours des temps par l'action conjuguée du milieu et de nombreuses générations de moutonniers, arrive à un point critique. L'évolution récente de l'agriculture lui a porté un rude coup. D'abord la pratique anarchique du croisement industriel a rendu pratiquement introuvable un troupeau de race pure. Le mor-cellement des parcelles, la raréfaction de la main d'œuvre (berger) ont décimé les trou-peaux de village. Cette même évolution de l'agriculture lui ouvre pourtant des voies nouvelles. En effet, pour rentabiliser un élevage dans le contexte actuel, il faut des animaux fortement productifs et peu fragiles. Des éleveurs ont vu l'intérêt de leurs races locales dans une telle optique d'intensifi-cation. La Noire du Velay représente le type même de brebis productive capable de rentabi-liser un élevage moderne : - La Noire du Velay est parfaitement adaptée à son rude milieu. Elle s'adaptera d'autant mieux dans des conditions plus favorables.

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- Ses besoins alimentaires sont réduits du fait de son format. - Sa bonne conformation en race pure ne la pénalise pas, par rapport au croisement indus-triel. - La Noire du Velay est prolifique. - Elle est capable de produire toute l'année (désaisonnement) et permet ainsi de mettre sur le marché des agneaux aux périodes tradition-nellement creuses. - Elle peut soutenir un rythme accéléré d'agne-lage (trois agnelages en deux ans). Conscients de ces qualités et du point critique qu'a atteint cette race, des éleveurs décidés à agir se réunissent à l'Etablissement départe-mental de l'élevage de la Haute-Loire, Coubon, le vendredi 1er décembre 1972 à 9 heures. Si vous êtes intéressés par le devenir de cette race, vous êtes cordialement invités à cette réunion." La presse locale publie le compte rendu de

cette réunion : "Du nouveau en Noire du Velay". Des éleveurs de cette race ovine locale se sont réunis à l'Etablissement départemental de l'élevage de Haute-Loire, le vendredi 1er

décembre 1972. Cette assemblée avait pour but la mise en place d'une section de l'UPRA régionale des races ovines du Massif Central Nord, association destinée à mettre en place la sélection des races ovines et leur promotion au niveau régional. En Noire du Velay, après un rappel des carac-téristiques de la race, il fut décidé de sélection-ner les brebis sur les caractères suivants : - qualité laitière conditionnant le bon dévelop-pement de l'agneau, - désaisonnement, aptitude à prendre le bélier en toutes saisons, permettant de produire des agneaux et de les mettre en marché aux mo-ments traditionnellement creux,

- prolificité, aptitude à produire des doubles, - productivité, aptitude à produire un nombre maximal d'agneaux et à les mener jusqu'à la vente. La Noire du Velay devrait répondre facilement à une telle sélection. Une spécialisation des éleveurs devrait se dé-gager peu à peu : - des troupeaux souches, seuls producteurs de béliers et produisant aussi des agnelles, - des troupeaux multiplicateurs utilisant les béliers issus des troupeaux souches pour pro-duire des agnelles Noire du Velay, - des utilisateurs exploitant les agnelles de race pure en croisement industriel avec un bélier de race à viande. Ces objectifs définis, les participants procédè-rent à l'élection du collège des éleveurs du Conseil d'administration et du bureau : - M. Itier Hyppolite, Séjallières, Saint-Jean-Lachalm, Président - M. Marrel Paul, Ligouzac, Bellevue-la-Montagne, Vice-Président - M. Chalendard Aimé, l'Herm, Saint-Julien-Chapteuil, Trésorier - M. Leydier Maurice, Limagne, Siaugues-Saint-Romain, Secrétaire - M. De Bourdeille Henri, Lorlanges, Membre - M. Crespy Marcel, La Queille, Le Monastier, Membre - M. Fayet Jacques, Versilhac, Yssingeaux, Membre - M. Brun Jean, Palhaire, Saint-Etienne-Lardeyrol, Membre. Les représentants des autres collèges (Organi-sation économique, EDE, Utilisateurs) seront désignés prochainement. La mise en place d'une telle structure et le dy-namisme des éleveurs qui la constituent de-vraient permettre un renouveau de la race Noire du Velay. Tous renseignements peuvent être pris auprès des éleveurs membres du conseil d'administra-tion et auprès de l'Etablissement départemental de l'élevage à Coubon. En ce début 1973, l'Etablissement départe-mental de l'élevage fait un gros travail de pros-pection et entre des élevages en contrôle de reproduction : Leydier Maurice de Siaugues-Saint-Romain, Chalendard Aimé de Saint-Julien-Chapteuil, Bros Gaston de Cohade, de Bourdeille Henri de Lorlanges, Marrel Paul de Bellevue-la-Montagne, Pascal Roger de Saint-Jean-de-Nay, Leyre Louis de Ceyssac. La prospection continue en même temps : Maitre

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Joseph de Beaune, Torrillon René de St-Victor-sur-Arlanc, Rousson Georges de Saint-Paulien, Fayet Jacques d'Yssingeaux, Liabeuf Jean-Louis d'Arlempdes, Defix Eugène de Chantuzier, Gerbier d'Ouïdes, Blachère et Itier de Saint-Jean-Lachalm, Fargier René à Freycenet-Latour, Rocher Sylvain de Saint-Jean-de-Nay… Il faut identifier les animaux avec des procédés fiables : tatouage à l'encre verte et boucle plastique plus visible. Les pre-miers essais de boucles donnent lieu à bien des déboires. Il faut essayer de monter un groupe avec des éleveurs traditionnels assez indépen-dants et d'autres plus engagés dans le mouve-ment coopératif, avec les tensions et les luttes d'influence que cela génère. Le 16 mars 1973, se déroule une réunion régionale UPRA. Trois sections sont pratique-ment constituées : Limousine, Rava, Noire du Velay. Il s'agit de dégager un peu d'autofinan-cement et donc fixer les cotisations d'adhésion. Les statuts de l'UPRA Nord Massif Central se-ront prochainement examinés par la CNAG,

Commission nationale d'amélioration généti-que. Déjà se font jour des problèmes de finan-cements ! Une réunion de la section Noire du Velay a lieu le 24 mars 1973. Il y est fait un compte-rendu de la réunion régionale. Le travail de prospection a permis le repérage d'une ving-taine d'éleveurs soit 2 500 à 3 000 brebis. Un seul troupeau est en race pure. Le travail d'identification concerne 1 500 brebis. Il faut aussi faire le point sur l'état sanitaire des trou-peaux, notamment au niveau de la prophylaxie de la brucellose. 1 300 femelles sont déjà en contrôle de croissance. La section procède à une demande de subvention auprès du Conseil général. On ressent déjà des tensions entre l'EDE et l'organisation régionale. Pour le dépar-tement, la section doit avoir l'autonomie la plus large possible. Le travail technique aurait avantage à se faire par les techniciens en place. Un secrétariat au niveau régional serait bien suffisant. Sinon, le technicien régional "man-gera des kilomètres" et aura peu d'efficacité. La coordination pourrait se faire par réunions de présidents de section. La région maintient sa ligne de centralisation. Le 29 mars 1973, une réunion régionale à Rochefort-Montagne établit un règlement inté-rieur et la répartition du temps du technicien. On évoque aussi le devenir de la ferme expé-rimentale de Laroue, devant se mettre au ser-vice de la race la plus productive, la Rava en

l'occurrence. Des tensions apparaissent et cette orientation ne fait pas l'unanimité. Le budget 1973 est serré. On procède à une certaine har-monisation des cotisations. Le Flock Book Bizet fait de la résistance et refuse de se consti-tuer en section UPRA. C'est le lycée de Bonne-fond qui en assure l'animation et il verrait d'un bon œil une fédération plutôt qu'une UPRA

régionale. Le 8 avril 1973, Brioude accueille une Foire aux agnelles aux enchères organisée par France Agnelle et ses groupements adhérents. Elle est un peu conçue comme un spectacle, avec défilé des animaux et enchères montantes. Le succès est au rendez vous et la totalité des animaux présentés est vendue. Des agnelles Noires du Velay sont en vente. La Foire aux agnelles de Brioude, le 30 sep-tembre 1973, marche nettement moins bien. Il y a peu d'acheteurs et seulement 30 % des animaux sont vendus. M. Royer du départe-ment de la Loire acquiert des Noires. Une réunion se tient au Puy le 4 octobre 1973, en présence de M. Ducros, financé pour moitié par l'UPRA, moitié par France-Agnelle. L'EDE est représenté par son directeur M. Gau-thier et deux techniciens, MM. Perrin et Brune-lin. On liste les adhérents. Une tournée d'iden-tification est programmée en novembre. On

convient du tatouage du monogramme RNV

dans l'oreille des animaux reconnus. M. Du-cros évoque la possibilité d'intégration dans l'UPRA de la race Blanche du Massif Central. Il annonce aussi que les "vivres" ont été coupés au Flock Book Bizet pour le contraindre à re-joindre l'UPRA régionale. La foire aux agnelles de Saint-Haon a sans doute encore perduré quelques années. Ainsi, le 10 octobre 1973, 5 éleveurs présentaient environ 35 agnelles, 3 lots de noires et 4 de blanches. M. Marrel Paul de Bellevue-la-Montagne exposait 2 lots de noires et M. Avit

A droite, M. Gauthier Augustin, direc-teur de l'EDE

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Michel de la Pinède de Rauret 2 de lozérien-nes. Le jury était composé de MM. Brun et Espenel. L'Association des Moutonniers tente dans les années 2000 de lancer une foire concours aux agneaux. Le 11 avril 2006, elle réunit une centaine d'agneaux à dominante BMC. Marcel Dubois de La Fargette de St-Paul-de-Tartas présente un lot de croisés Noire du Velay.Le 26 octobre 1973, le technicien UPRA se concerte avec l'EDE pour l'organisation d'une commission de marquage en novembre avec les visites suivantes : MM. Crespy Marcel au Monastier, Marrel Paul à Bellevue-la-Montagne, Maitre Joseph à Beaune ; Pascal Roger à Saint-Jean-de-Nay, Defix Eugène à Chantuzier ; Liabeuf Jean-Louis à Arlempdes, Itier Hyppolite et Blachère à Saint-Jean-Lachalm ; Brun Jean à Saint-Etienne-Lardeyrol, Chalendard Aimé, Ginhoux et Brioude à Saint-Julien-Chapteuil ; Fargier René à Freycenet-La-Tour ; Leydier Maurice à Siaugues-Saint-Romain ; Fayet Jacques à Ver-silhac; Bernard Roger à Cussac, Masseboeuf et Saby à Goudet, Rocher Sylvain à Saint-Jean-de-Nay ; Jarlier Roger à Chaniat et Bros Gas-ton à Cohade. Le conseil d'administration de l'UPRA a lieu le 20 décembre 1973. Les sections font le point sur leurs effectifs : Noire du Velay 2 000, Rava 1 600, Limousine 13 000, Bizet 4 500. Il est question d'une participation au Concours général à Paris. Les Limousins disposent de 10 cases et les Bizets de 4. Les organisateurs n'ont plus de disponibilités. En attendant, Li-mousins et Bizets cèdent 3 cases pour permet-tre une présence Rava et Noire du Velay. L'UPRA fait une demande de cases supplémen-taires pour l'an prochain. Un bras de fer s'éta-blit entre l'UPRA et les races à viande disposant d'une rente de situation et ne voulant aucune-ment y renoncer. Une commission de mar-quage Noire du Velay est constituée avec deux éleveurs MM. Itier et Marrel, Folléas, techni-cien UPRA. Le compte-rendu financier est pré-senté. M.Cantin de SOMIVAL présente un pro-gramme génétique élaboré par M.Desvignes. La section Noire du Velay tient son assem-blée générale le 21 décembre 1973. 1800 animaux ont été inscrits. On procède à un rappel des finalités de l'UPRA et à son finance-ment. On parle aussi de la participation au Concours général de Paris. On évoque les pro-blèmes sanitaires et notamment les maladies abortives, brucellose et chlamydiose. Un bu-

reau est constitué avec MM. Leydier Maurice, Itier Hyppolite, Marrel Paul, Brun Jean et Chalendard Aimé. Le 3 janvier 1973, une commission constituée de MM. Itier, Marrel, Folléas, Perrin, Brunelin, fait une tournée de repérage des animaux pour Paris. Elle visite les élevages de MM. Marrel, Chalendard, Leydier. Elle procède non sans difficultés au choix d'animaux à confirmer ultérieurement. M. Itier, très pris par ses man-dats de maire et conseiller général, évoque la possibilité de son départ de la présidence. De janvier à mars 1974, se déroulent des

tournées d'élevages : MM. Sanial Robert de Malrevers, Chalendard Augustin de Montus-clat, Brenas de Saint-Jean-Lachalm ; Leyre Louis de Ceyssac, Leydier Maurice de Siau-gues-Saint-Romain ; Soleilhac de Vernassal, Charbonnier de Darsac, Gros Frères à Saint-Pierre-Eynac, Gagne Guy à Lantriac ; Masse-boeuf et Saby de Goudet ; Maitre Joseph de Beaune ; de Bourdeille Henri de Lorlanges ; Dumas de Taulhac, Durand Jean-Baptiste de Dolaizon ; Brenas, Aboulin, Itier de Saint-Jean-Lachalm ; Philibert André de Beaux ; Roiron d'Ours-Mons, Boyer et Testut d'Ar-lempdes ; Pradier et Crespy du Monastier. Un bureau de la section se tient 29 janvier 1974. MM. Itier, Crespy, Pascal sont retenus pour la commission de choix des animaux pour Paris. La section compte 20 élevages, soit 2500 environ Noires sur un effectif de 5 000 ani-maux. La fourniture de béliers est problémati-que malgré les primes de conservation attri-buées par le Conseil général. On évoque la

M. Espenel Marc

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tenue d'un Concours départemental et une par-ticipation à l'importante foire de la Toussaint. Lors d'une réunion de travail, le 13 février 1974, est élaborée une demande de subven-tions de la section à l'UPRA régionale et au Conseil général (20 000 francs). Le choix des animaux pour Paris sera effectivement réalisé par MM. Crespy, Folléas, Ducrot, EDE. Sont finalement retenus : un bélier chez M. Chalen-dard Aimé et 4 brebis chez M. Leydier Mau-rice. Le 4 avril 1974, ont lieu Conseil d'adminis-tration et assemblée générale de l'UPRA ré-gionale. Les éleveurs lozériens, emmenés par M. Bouniol, ne souhaitent pas rejoindre l'UPRA

Nord mais plutôt constituer une UPRA propre à la race Blanche du Massif Central à Mende. La race Bizet aurait préféré une fédération. Finalement, ses financements coupés, elle in-tégrera l'UPRA en mai. Pour Paris, l'UPRA ré-itère sa demande de cases supplémentaires et revendique une meilleure signalisation. Les sections font le point sur leurs activités. On procède au compte rendu financier et au bud-get prévisionnel. On évoque l'éventualité d'ou-vrir les foires aux agnelles aux non adhérents des groupements mais UPRA, sous réserve d'une participation aux frais économiques. M. Gilbert décrit le cheptel français et ses 26 ra-ces. Trois UPRA sont à ce jour constituées. On s'inquiète (déjà !) pour le financement des han-dicaps de la montagne. La section Noire tient son assemblée générale le 26 avril 1974 sous la présidence de M. Leydier Maurice. Il évoque la mise en place du fichier racial. Les Foires aux agnelles pour-raient être ouvertes aux adhérents UPRA sous conditions : contraintes techniques et sanitaires identiques, retenue par agnelle, adhésion grou-pement au bout d'un an. On parle aussi d'une éventuelle introduction de brebis Noires à La-roue, ce qui semble peu probable. Le 27 septembre 1974, une réunion est orga-nisée pour préparer une exposition à l'impor-tante foire de la Toussaint au Puy. Elle se limi-terait aux adhérents en contrôle de croissance, bien connus sur le plan sanitaire à savoir MM. Leydier Maurice, Chalendard Aimé, Marrel Paul . Un repérage des animaux sera effectué du 14 au 19 octobre. (Par manque d'animaux, l'exposition sera finalement annulée). Un concours départemental doit avoir lieu fin avril-début mai. Le 20 décembre 1974. l'UPRA régionale tient son conseil d'administration. Le point est fait

sur chaque section. La Noire du Velay re-groupe 27 éleveurs et 3000 animaux reconnus. Le problème d'approvisionnement en béliers est général. La Rava vient d'organiser une foire aux béliers. Un schéma de sélection Rava est progressivement mis en place à Laroue. Le Limousin met la dernière main à un projet de ferme pépinière avec regroupement des meil-leures femelles de la race. Le compte rendu financier montre une couverture des charges. Il n'y aura pas de cases supplémentaires à Paris. De janvier à mars 1974 se déroulent des com-

missions de marquage dont une avec le DDA, M. Marty. La section Noire organise une assemblée géné-rale le 24 février 1975. Le compte rendu d'ac-tivités met en évidence un gros travail d'épura-tion. Il est question à nouveau d'une présenta-tion à la foire de la Toussaint au Puy et à Paris (3 femelles). Le 8 mars 1975, 3 béliers d'origine Chalen-dard, Leydier, Marrel sont exportés au Maroc.L'assemblée générale de l'UPRA régionale a lieu à Brioude 4 avril 1975. Chaque section fait le point sur ses activités. La section Noire évoque le travail de terrain : répartition des taches avec l'EDE sur le terrain, mise en place de plannings de bergeries, problèmes d'identi-fication et coût supplémentaire du bouclage. Il ne faut pas encore espérer de cases supplémen-taires à Paris ! A Laroue, le schéma de sélec-tion Rava est axé sur le désaisonnement et la mise en place d'un système de familles pour éviter une trop importante consanguinité. Le problème financier des UPRA est évoqué : le personnel technique absorbe toutes les dispo-nibilités financières, malgré un fort bénévolat

M. Chauvel Guy

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des éleveurs. De plus les reproducteurs ne sont pas actuellement valorisés comme il le fau-drait. L'assemblée se termine par une visite de l'élevage Bizet de Bonnefond et Noire du Ve-lay de M. Bros Gaston à Cohade. Le concours-exposition départemental des animaux d'élevage de la Haute-Loire se tient au Puy les 10 et 11 mai 1975. Les moutons sont en exposition. La race Bizet est représen-tée par les élevages de MM. Bruhat Lucien de Javaugues, Chauvel Guy de Sainte-Florine, Domaine du lycée agricole de Brioude ; la Blanche du Massif Central par MM. Chardon Lucien de Chanaleilles, Guillemot Jacques de Mazeyrat-d'Allier, Pagès Frères de Paulhac, Torrillon Henri de Jullianges. La délégation Noire du Velay est la plus importante : MM. Bernard Roger de Cussac-sur-Loire, Brun Jean de Saint-Etienne-Lardeyrol, Chalendard Aimé de Saint-Julien-Chapteuil, Chalendard Augus-tin de Montusclat, Durand Jean-Baptiste de Saint-Christophe-sur-Dolaison, Fayet Jacques de Versilhac, Leydier Maurice de Siaugues-Saint-Romain, Marrel Paul de Bellevue-la-Montagne, Pascal Roger de Saint-Jean-de-Nay, Philibert André de Beaux, Rocher Sylvain de Saint-Jean-de-Nay, Roiron Joseph d'Ours-Mons. Le domaine expérimental de Laroue expose des Bizets, Blancs du Massif Central et des croisées races rustiques/Romanov. Le 30 mai 1975, se déroule un conseil d'ad-ministration de l' UPRA, avec à l'ordre du jour : en Limousine le regroupement pépinière chez un éleveur de 50 brebis ; les projet de haras de béliers en Rava, Bizet, Noire du Velay. Le 4 novembre 1975, lors d'une réunion, l' UPRA travaille sur les centres d'élevages de béliers : mise au point des modalités techni-ques et sanitaires. Elle commence aussi à concevoir des plaquettes de promotion de ra-ces. La section Noire se réunit le 9 décembre 1975. Il est question de la mise en place d'un haras de béliers et d'accouplements raisonnés dans les élevages. Le travail de terrain pourrait être confié à l'EDE sous la responsabilité de l'UPRA. Des tournées de repérage de béliers sont effectuées les 12 et 13 décembre 1975 dans les élevages suivants : MM. Bros Gaston, Jarlier Roger, Leydier Maurice, Pascal Roger, Rocher Sylvain, Roiron Joseph, Durand Jean-Baptiste, Marrel Paul, Maitre Joseph, Fayet Jacques, Chalendard Aimé, Brun Jean. Une quinzaine de jeunes béliers sont retenus.

A l'UPRA régionale, 18 novembre 1975, on parle du départ du technicien, Philippe Folléas et s'amorce une discussion animée. Trop de fonctions administratives occupent le techni-cien au détriment du travail de terrain. Se fait jour la solution d'un technicien UPRA et des relais locaux. Le point est fait sur chaque sec-tion. En Noire et Bizet, on recherche des solu-tions pour les haras de béliers : éleveur de cha-que race, site de Laroue ou Centre d'insémina-tion de Coubon pour les deux centres. Enfin, l'UPRA obtient des cases pour Paris dont 3 pour la Noire.

(à suivre)

M. Pierre Chambon

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Les ministres de l'agriculture sous la 5ème République

Notice biographiqueMichel COINTAT

Michel Cointat est né à Paris, le 13 avril 1927, décédé le 17 novembre 2013 à Saint-Mandé (Val de Marne). Il est ministre de l’Agriculture du 7 janvier 1971 au 5 juillet 1972 (Chaban-Delmas) et revient aux affaires comme ministre du Commerce extérieur du 2 octobre 1980 au 13 mai (Raymond Barre 3). Ses fonctions électives Il est maire de Fougères de 1971 à 1983, battu lors des élections municipales de 1983 par le candidat socialiste Jacques Faucheux.Lors des élections législatives d'avril 1967, il est élu député de la circonscription de Fougères, alors cinquième circonscription d'Ille-et-Vilaine, sous l'étiquette gaulliste Union démocratique pour la Ve République. Successivement membre de l'UDR puis du RPR, il reste député jusqu'aux élections législatives d'avril 1993 au cours desquelles il est battu par Marie-Thérèse Boisseau, son ancienne suppléante, qui se présente comme UDF dissidente. Il représente par ailleurs la France au Parlement européen de 1968 à 1971. Un spécialiste de l'agricultureMichel Cointat est ingénieur agronome et ingénieur des Eaux et Forêts. En 1948, il est directeur général adjoint puis président-directeur général de la Société d’aménagement des friches et taillis de l’Est. Il est directeur de cabinet d’Edgar Pisani lors de son passage au ministère de l’Agriculture. Il devient, le 7 janvier 1971, ministre de l'Agriculture et Bernard Pons conserve le secrétariat d'Etat. Bernard Pons avait été nommé secrétaire d'État auprès du ministre de l’Agriculture le 22 juin 1969 dans le gouvernement Jacques Chaban-Delmas. Il fut confirmé dans ces fonctions dans le gouvernement Pierre Messmer le 6 juillet 1972 jusqu’au 28 mars 1973. Son action Le 13 janvier 1971 est créé le ministère de la Protection de la nature et de l'environnement avec Robert Poujade, délégué du premier ministre chargé de la protection de la nature et de l'environnement. C'est une prise de conscience du fait écologique.

La commission européenne, réunie le 10 février, propose une nouvelle orientation de la PAC : politique de structure plus diversifiée, modulation des aides sous la forme de complément de revenu, aides aux zones défavorisées, diversification régionale du FEOGA. La notion de zone agricole défavorisée correspond à un découpage territorial lié à l’émergence d’une politique européenne en matière de structures agricoles à partir des

années 1970. Préalablement aux premières directives de la commission européenne concernant ces zones, une définition de zone de montagne avait déjà été élaborée en France et donnera naissance à la création d’une aide spécifique, l’indemnité spéciale montagne (ISM) par décret du 4 janvier 1972. Une nouvelle délimitation sera ensuite établie dans l’arrêté ministériel du 20 février 1974. La directive communautaire du 28 avril 1975 permettra de reprendre le classement en zone de montagne établi en 1974 et de replacer la zone de montagne dans un cadre plus vaste de zone défavorisée. Elle autorise les Etats membres à instaurer un régime particulier d’aides destiné à favoriser les activités agricoles et à améliorer le revenu des agriculteurs. Les soutiens financiers peuvent être de trois types : aides à l’investissement, formation professionnelle, indemnités compensatoires d’handicaps naturels permanents (ICHN). Sur la base de critères qualitatifs définis par la directive européenne, la France a défini quatre types de zones défavorisées : les zones de haute-montagne, les zones de montagne, les zones de piémont, des zones défavorisées simples. La délimitation de ces zones est basée sur la notion d’handicaps naturels pour la zone de montagne (et haute montagne) mesurés par l’altitude et la pente du

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territoire et sur des critères plus socio-économiques pour les autres zones. Elles sont composées de communes entières ou de parties de communes. Une commune peut être ainsi en partie en zone de montagne et en zone défavorisée simple. Les procédures de classement en zones défavorisées ne sont pas figées : depuis leur création, les zones se sont agrandies par additions successives. La notion de zone défavorisée concerne les deux-tiers des départements français et couvrent environ 45 % du territoire national. En Auvergne, sur les 1310 communes, 1122 sont classées en zone défavorisée dont 826 en zone de montagne.

La politique agricole européenne se cherche non sans heurts. Ainsi les 15-16 février, lors d'un Conseil européen des ministres de l'agriculture présidé par Michel Cointat à Bruxelles, 60 Jeunes agriculteurs belges envahissent la salle de réunion… avec trois vaches ! Ils manifestent contre l'immobilisme de la Commission en proie à de profondes divergences. France, Belgique et Luxembourg sont assez favorables aux orientations de la Commission, tandis qu'Italie, RFA et Pays-Bas sont plutôt réticents. Sous la pression des milieux professionnels, priorité est donnée à une garantie du revenu agricole par une augmentation des prix. Le 23 mars, de violentes manifestations éclatent à Bruxelles, organisées par le COPA, Comité des organisations professionnelles agricoles, estimant que le relèvement des prix doit être accompagné d'une politique des structures. 100 000 agriculteurs dénoncent l'immobilisme de la PAC. Le rassemblement tourne à l'émeute et l'on dénombre 1 mort et

160 blessés. (Le COPA, première organisation européenne représentative a vu le jour le 6 septembre 1958. A sa création, il comptait 13 organisations membres pour les six États membres d’alors. Aujourd’hui, le COPA se compose de 60 organisations issues des pays de l’Union européenne et de 36 organisations partenaires d’autres pays d’Europe, comme l’Islande, la Norvège, la Suisse et la Turquie. Ce nombre élevé de membres lui permet de représenter les intérêts à la fois généraux et spécifiques des agriculteurs dans l’Union européenne. Dès sa création, le COPA a été reconnu par les autorités communautaires comme le porte-parole de l’ensemble du secteur agricole européen ). Sicco Mansholt déclare que cette dramatique situation est due " au manque de courage des ministres et responsables professionnels qui, depuis longtemps n'ont pas dit la vérité aux agriculteurs". Des manifestations sont organisées dans les 6 pays de la Communauté, 50 000 agriculteurs allemands marchent sur Bonn. La politique agricole française ne s'en développe pas moins. Ainsi le 22 mai une loi relative à l'amélioration des structures forestières est adoptée. Le chef de l'Etat, Georges Pompidou est très sensible aux questions agricoles. Le 26 juin, il prononce un discours à Saint-Flour, sur le thème du maintien de l'agriculture familiale et de la régionalisation. Le 15 juillet est approuvé le VIème plan (1971-1975) de développement économique et social qui met en avant l'aménagement de l'espace rural, la protection et la mise en valeur du milieu naturel. Une commission de l'espace rural est créée pour proposer une politique volontariste en faveur du monde rural. La première conférence annuelle de l'agriculture se déroule les 15-17 juillet, vaste concertation entre les organisations professionnelles agricoles et le gouvernement. Le 16 juillet est promulguée une loi sur l'organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l'éducation permanente et sur l'apprentissage. Le champ d'activité du Crédit agricole est élargi par un décret du 11 août, notamment en faveur des zones de rénovation rurale et d'économie montagnarde. Le 5 octobre, Michel Debatisse est élu président de la FNSEA, suite à la démission de Gérard de Caffarelli le 8 septembre.

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Des mesures législatives particulières sont prévues en faveur de l'agriculture de montagne et pour limiter le démembrement des exploitations, le 3 janvier 1972. Le 22 janvier a lieu la signature du traité d'adhésion à la CEE

pour le Royaume-Uni, le Danemark, l'Irlande et la Norvège. Cette ouverture n'empêche pas les escarmouches et la France menace d'opposer son droit de veto si la Commission ne soumet pas au Conseil la création d'OCM, Organisation commune de marché destinée à organiser les échanges et leur régulation, dans le secteur ovin et alcool. Le 23 avril, trois directives communautaires sont prises en vue de la modernisation de l'agriculture européenne. Le même jour a lieu le référendum sur l'élargissement de l'Europe des 6 au Royaume-Uni, Norvège, Irlande et Danemark. Ce référendum surprend tout le monde puisque l'ensemble des partis politiques sont d'accord. Pompidou espèrait une large victoire du oui au référendum qui effacerait les difficultés qui s'accumulent pour son gouvernement. Dénonçant une manœuvre électorale, les socialistes décident d'appeler les électeurs à s'abstenir. Le oui l'emporte avec 68 % des voix mais l'abstention n'a jamais été aussi élevée. Près de 40 % des inscrits ne se sont pas déplacés, et 7 % ont voté blancs ou nuls. En d'autres termes, la moitié des Français a refusé de répondre à la question. Le 4 mai, une conférence de presse de Georges Pompidou à Luxembourg, aborde le dossier de l'Europe, le prix des céréales. Il accorde le 10 mai, une interview au Times, sur le thème de la coopération franco-britannique et de la PAC. Le 10 juin, il est dans l'Orne : à Bellême, il parle de modernisation de l'agriculture ; à Pin-la-Garenne, d'exode rural, de politique des structures et du revenu agricole ; à Mortagne-en-Perche, d'élevage et d'agriculture familiale. La loi relative aux SICA (Sociétés coopératives agricoles) et aux SMIA (Sociétés mixtes d'intérêt agricole) est adoptée le 7 juin. Après le demi-échec au référendum, la tension monte un peu plus entre le président de la République et le chef du gouvernement Jacques Chaban-Delmas dont la politique est de plus en plus contestée et dont l'image de marque a été ternie par un scandale à propos d'exonérations fiscales. Se sentant affaibli, le premier ministre cherche à légitimer son action en demandant un vote de confiance au parlement en mai 1972. Cet acte est perçu par

Pompidou comme une volonté de lui forcer la main. Lors du vote de confiance, Jacques Chaban-Delmas obtient bien une majorité de voix au parlement mais le président de la République ne peut accepter que l'Assemblée Nationale lui impose le maintien du gouvernement. Pompidou pousse donc Chaban-Delmas à la démission le 5 juillet 1972. Michel Cointat est évincé du nouveau gouvernement et c'est Jacques Chirac qui devient ministre de l'agriculture et du développement rural. Bernard Pons demeure secrétaire d'Etat jusqu'en avril 1973.

Notice biographique Jacques CHIRACIl est né à Paris, le 29 novembre 1932. Il devient ministre de l’Agriculture et du Développement rural du gouvernement du 6 juillet 1972 au 2 avril 1973 ( gouvernement Pierre Messmer 1) puis du 5 avril 1973 au 27 février 1974 (gouvernement Pierre Messmer 2). Il quitte ce ministère pour celui de l’Intérieur du gouvernement Pierre Messmer (3) du 27 février au 27 mai 1974. Il est Premier ministre du 27 mai 1974 au 25 août 1976 et du 20 mars 1986 au 11 mai 1988. Ses fonctions électives sont importantes : membre du Conseil de Paris et maire de Paris (1977-1995) ; Président du Conseil Général de Corrèze (1970-1979) ; Député de la 3ème circonscription de Corrèze (1967-1995) ; membre du Parlement européen, démissionnaire (1979-1980) ; Président de la République (1995-2007). Une biographie sommaire Jacques Chirac naît le 29 novembre 1932 dans le 5ème arrondissement de Paris. Arrière petit-fils d’agriculteurs corréziens, petit-fils d’instituteurs, son père deviendra cadre dans l’industrie aéronautique française. Après son mariage avec Bernadette Chaudron de Courcel, le 17 mars 1956, il se porte volontaire et prend la tête du 3ème escadron du 11ème Régiment des chasseurs d’Afrique, qui part pour l’Algérie. A la frontière marocaine, Jacques Chirac et ses hommes vivent 29 mois difficiles, avec une succession d’opérations militaires qui lui vaudront la médaille de la valeur militaire. De retour d’Algérie, il intègre la promotion Vauban de l’Ecole nationale d’administration dont il sort auditeur à la cour des Comptes en 1959, avant de repartir, à sa demande, en

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Algérie comme " renfort administratif ". En 1967, à trente-quatre ans, Jacques Chirac est le plus jeune ministre de l’avant-dernier gouvernement du général de Gaulle. Secrétaire d’Etat à l’Emploi, il jouera un rôle crucial dans l’aboutissement des accords de Grenelle, le 25 mai 1968. Dans les gouvernements nommés par le président Pompidou, il occupera des postes de responsabilité qui témoignent de la grande confiance que lui accorde le Président de la République : Secrétaire d’Etat au budget, Ministre délégué chargé des relations avec le Parlement, Ministre de l’agriculture, Ministre de l’intérieur. De 1974 à 1976, il devient Premier Ministre de Valéry Giscard d’Estaing, poste dont il démissionnera le 25 août 1976.Le 5 décembre 1976, il crée le Rassemblement pour la République (RPR). Il est député de la Corrèze de 1967 à 1995. Au cours de la campagne de 1967 et pendant près de 30 ans, Jacques Chirac sillonnera en tous sens les routes sinueuses de sa circonscription d’Ussel. Il entretient avec la Corrèze et les Corréziens

une relation privilégiée, faîte d’estime et de fidélité. Il déclare en mars 1993 : « En 1967, je suis devenu député d’un département rural, la Corrèze, terre peuplée de gens humbles, courageux, honnêtes et travailleurs ». Le 20 mars 1977, Jacques Chirac est élu Maire de Paris après une campagne de terrain menée tambour battant. Il sera élu et réélu Maire de Paris jusqu’à son élection de Président de la République en 1995. Après la victoire aux élections législatives de mars 1986, Jacques Chirac est nommé Premier Ministre par le Président François Mitterrand. Cette longue période de cohabitation, ne sera pas toujours un long fleuve tranquille.Après une campagne de proximité où il fera partager ses fortes convictions, Jacques Chirac est élu président de la République le 7 mai 1995 avec 52,6 % des voix. Son premier mandat est marqué par

le plan Juppé de 1995, la troisième cohabitation avec Lionel Jospin à la suite de la dissolution manquée de l'Assemblée nationale, des affaires judiciaires dans lesquelles il est directement mis en cause par des enquêtes journalistiques ou encore le référendum de 2000, qui ramène la durée du mandat présidentiel à cinq ans. Lors de l'élection présidentielle de 2002, il est réélu au second tour avec 80 % des suffrages face au candidat du Front national, Jean-Marie Le Pen. Pendant son second mandat, il s'oppose notamment à la guerre d'Irak. Il quitte le palais de l'Élysée le 16 mai 2007, après l'investiture de Nicolas Sarkozy à la présidence de la République. Il siège ensuite au Conseil constitutionnel, dont il est membre de droit en tant qu'ancien Président de la République, jusqu'au 9 décembre 2010, date à partir de laquelle il se met en retrait du fait de son état de santé et de ses ennuis judiciaires. En 2011, il est condamné à deux ans de prison avec sursis dans le cadre de l'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris. Le tremplin du ministère de l'Agriculture Avant son accession au ministère de l'Agriculture, Jacques Chirac traverse une mauvaise passe. Cassant, gaffeur, sa volonté d'en découdre le fait qualifié de vorace et même cupide. Il est le mal-aimé et n'apprécie pas cette situation. Il a une mauvaise image de marque chez les députés ; il subit le handicap d'être le jeune que Pompidou pousse. Son passage au ministère des Relations avec le Parlement est un désastre. Son travail administratif est irréprochable mais c'est un échec avec les élus. Au baromètre SOFRES-Figaro, il n'obtient que 4 % d'opinion favorables, loin derrière Jacques Chaban-Delmas ou VGE qui sont autour de 50 %. Lorsque Jacques Chaban-Delmas démissionne le 5 juillet 1972, Jacques Chirac ne fait pas partie des "premiers-ministrables ". Pierre Messmer, autre candidat du conseiller Pierre Juillet, entre à Matignon. Georges Pompidou, dans son projet de liste de gouvernement, aurait oublié Jacques Chirac. Pierre Juillet, pour réparer cet oubli fâcheux, propose l'attribution du ministère de l'Industrie. Chirac reconnaît ce ministère comme prestigieux mais en fait complètement honorifique, sans administration. Au final, ce sont les Finances qui prennent les décisions notamment en matière d'allégements fiscaux. Chirac déclare alors : "A tout prendre, je

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préférerais encore l'Agriculture". C'est chose faite et Michel Cointat rayé in extremis est renvoyé à Fougères. Jean Charbonnel, autre élu de Corrèze, hérite du ministère de l'Industrie. Jacques Chirac va donner toute sa mesure dans ce ministère, redorer son blason et acquérir une popularité qui ne se démentira jamais. Franz-Olivier Giesberg, dans sa biographie de Jacques Chirac (Seuil Octobre 1987) le qualifie alors ainsi : "Le ministre aux pieds crottés". Le ministre aux pieds crottés Arrivé à bout de souffle, il repartira ragaillardi et avec le sentiment d'avoir réussi. En 1978, lors d'un entretien accordé au Quotidien de Paris, à la question d'où il avait le sentiment d'avoir été le plus utile à la France, sans hésiter il répond : "Quand j'étais ministre de l'agriculture…" Il y a effectivement servi la France mais aussi sa propre image. Le 14 novembre 1972, il présente son budget de l'agriculture. Les observateurs sont déçus par son manque d'ambition. Le projet du ministre est de renforcer l'exploitation de type familial, à responsabilité personnelle. Ce langage n'est pas dépourvu de vues électorales, car les législatives se profilent à l'horizon. Il déplore l'exode rural et plaide en faveur d'une politique d'animation rurale afin de préserver la richesse de l'agriculture française. Ce sont ses fibres paysannes et corréziennes qui parlent bien sûr mais aussi le pari que la croissance va continuer sur sa lancée, qu'il faut continuer à augmenter la production agricole. Il prend le contre-pied de la Commission de Bruxelles qui prône la réduction de certaines productions et la limitation des excédents par une mise en jachère de millions d'hectares. Jacques Chirac est un peu seul en Europe sur ce positionnement. Il revendique cet accroissement continu de la production pour ne pas aller vers une crise alimentaire mondiale et ne pas se mettre en situation de dépendance alimentaire. Il juge la paysannerie familiale indispensable dès lors que la production s'oriente vers des produits de qualité non industrialisés. Une exploitation de ce type est aussi utile à l'environnement, à la préservation du sol et des paysages et à l'équilibre social et régional. Il appelle de ses vœux un sorte d'OPEP alimentaire des pays producteurs de richesses agricoles pour imposer leurs prix aux grands pays consommateurs. Les excédents éventuels pourraient être écoulés vers les pays sous-développés. C'est une véritable contre

politique des quotas que la Commission essaie d'imposer. Cette politique est menée en toute concertation avec les dirigeants agricoles, dont Jacques Chirac s'est fait des amis personnels, lors des Conférences annuelles et les réunions moins formalistes des "mardis mensuels" avec les organisations professionnelles. Les arguments sont massue et ne s'embarrassent pas de détails : pour répondre à la demande en matière d'alimentation il faudrait doubler la production agricole mondiale et comme la population doit doubler d'ici l'an 2000, il faudrait quadrupler la population agricole en moins de 30 ans. C'est le Monsieur anti-quotas. Il attaque la Commission de Bruxelles quand elle envisage

de réduire la production de sucre de la CEE. Il part en guerre contre le rapport Thiede qui pour en finir avec les excédents propose de laisser en friche de 5 à 11 millions d'ha cultivables, reprenant le plan Mansholt de 1968 et le rapport de la Commission Vedel en 1969. La conférence présentée par Gûnther Thiede en mai 1971, devant l'Agrarsoziale Gesellschaft (Association de sociologie agraire), a eu un grand retentissement dans l'opinion publique aussi bien que dans les milieux spécialisés. L'auteur y défend cette idée personnelle : pour l'agriculture, les conceptions du passé n'ont plus aucune valeur. Une nouvelle orientation s'impose. Limiter les capacités, afin d'éviter une surproduction d'une ampleur insoupçonnée, deviendrait le thème principal de la politique agricole. C'est pourquoi une très grande partie des terres agricoles devrait être soustraite à l'exploitation.La mobilité du sol qui s'instaurerait, faciliterait considérablement la réorganisation de l'agriculture. En fait les paysans sont victimes

Pierre Juillet, Jacques Chirac, Marie-France Garaud

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du progrès agricole. Des aides de l'Etat surviendraient pendant la période de transition. Chaque agriculteur opterait pour assurer sa subsistance à un niveau convenable : exclusivement dans une agriculture modernisée, combinaison d'activités agricoles et non agricoles, nouveau métier non agricole ou rente convenable pour l'abandon de la terre. Jacques Chirac est dans son élément. Il affectionne les marathons européens, les crises au bord du gouffre, les nuits blanches à griller des cigarettes. Il se démène lors des Conseils des ministres européens de l'agriculture. Son homologue allemand, Josef Hertl, lui conseille même un jour de se faire psychanalyser et déclare "Chirac est un fou". Certains marathons agricoles durent deux voire trois jours. Le rapprochement est en effet difficile entre les différents points de vue et se réalise après échanges, concessions, dosages progressifs. A son premier marathon, son directeur de cabinet, François Hellbronner, lui avait indiqué deux productions spécifiques dont il fallait défendre les prix. Novice et sûr de lui, il avait été intraitable et finalement avait obtenu gain de cause. Ce n'était sans doute pas une bonne méthode sur la durée et Jacques Chirac sut le comprendre. Dans un article du Monde, le 6 janvier 1973, Pierre-Marie Doutrelant, alors spécialiste des questions agricoles constate : " Jamais -c'est vrai- le revenu agricole n'a progressé deux ans de suite aussi fortement… Jamais aucun gouvernement n'a autant fait pour la paysannerie actuelle depuis 1960. Jamais, depuis M. Pisani, un ministre de l'Agriculture n'est apparu aussi pressé d'agir et aussi efficace. Jamais la concertation avec les organisations paysannes et le gouvernement n'ont été aussi radieuses". Pourtant un vent de révolte n'en souffle pas moins dans les campagnes. "Quels qu'aient été les efforts méritoires du gouvernement, l'écart persiste entre les revenus de la plus grande partie des paysans et les ressources des autre français". Ces prises de position comblent les instances agricoles. Michel Debatisse, président de la FNSEA déclare même : "Un syndicaliste ne s'avoue jamais satisfait. Eh bien, moi, je le ferai". Marcel Bruel, le patron des éleveurs, y va aussi de son éloge : "Jacques Chirac est le meilleur ministre de l'Agriculture depuis Sully". Cette attitude n'est pas du tout artificielle. Il éprouve un grand intérêt pour les questions

agricoles, est émerveillé par la richesse et la beauté des campagnes françaises. L'agriculture pour lui est un véritable atout pour notre économie. C'est le rural qui sommeille sous le politique, les odeurs de son enfance et des vacances d'été en Corrèze. Il crotte ses chaussures, tâte l'arrière des vaches, estime le veau blanc à l'œil, ouvre la bouche du cheval pour en déduire son âge. Il est accueilli avec des fleurs et non des tomates dans les foires et concours agricoles. Il développe un certain clientélisme et même un favoritisme avec les agriculteurs. C'est une religion qu'il partage avec Juillet et Pompidou. Avec eux, il peut parler des heures et sur le ton de la passion. Il est incollable sur le prix européen de la viande bovine, les exportations de soja, les excédents de pomme ou de poudre de lait. Ils aiment les paysans, les exploitants familiaux que Pompidou célèbre régulièrement au Conseil des ministres. Il faut dire que c'est le noyau dur de leur électorat, la base du tissu social et l'animation des campagnes. Il est certainement le ministre préféré de Pompidou qui ne lui marchande pas sa confiance et lui laisse la main en particulier dans les marathons agricoles européens. Pompidou n'hésite pas à lui donner raison, le 3 novembre 1973 contre VGE. Le ministère des Finances avait publié un arrêté à propos de taxes sur les marges bénéficiaires des détaillants de fruits et légumes. VGE est en Malaisie pour 15 jours, officiellement pour participer au forum de Kuala Lumpur, officieusement à la chasse au tigre. A la publication de l'arrêté, c'est la révolution sur les marchés, les halles et épiceries. Le 15 novembre, les détaillants ferment boutique. Pompidou s'inquiète et confie le dossier à Chirac. Il réunit les organisations avec cigarettes, boissons, bonnes paroles. Puis il leur donne satisfaction. Pour ne pas humilier VGE, l'arrêté est maintenu mais les contrôles seront diligentés dans la plus grande souplesse. La grève des fruits et légumes n'aura pas lieu. VGE rentre reposé mais furieux. Il parle de démagogie et bat froid à Chirac pendant un mois. Pas plus longtemps car Chirac se range derrière lui contre Chaban-Delmas. Le 4 janvier 1973, Chirac déclare à la presse agricole : "M. Giscard d'Estaing est l'un des rares hommes d'Etat actuels". Il porte aussi la bonne parole pendant la campagne des législatives dans les circonscriptions giscardiennes. Le 13 août, il déclare au Point

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"Si M. Pompidou venait à disparaître, je serai giscardien". Il pense Matignon à sa portée et ne désespère pas de succéder à Pompidou en 1976, après avoir écarté Chaban-Delmas. Pompidou est de plus en plus mal : bouffissures au visage, démarche hésitante, irritabilité croissante, grippes à répétition. Les élections législatives de 1973 sont médiocres pour la majorité. Pierre Juillet propose de remplacer Messmer par Chirac qui a redoré son blason à l'agriculture. Pompidou le trouve trop tendre. Juillet revient à la charge et propose pour en faire l'homme fort du gouvernement de lui attribuer le ministère des Finances. Avec l'appui de Michel Poniatowski, promu au gouvernement pour faire cesser ses attaques virulentes contre les gaullistes, il suggère de faire glisser VGE au quai d'Orsay. VGE ne veut rien entendre dans un premier temps. Juillet revient à la charge et revendique pour Chirac le ministère de l'Intérieur. Pompidou refuse de se séparer de Raymond Marcellin qui le sécurise. VGE finalement se laisserait bien séduire par les Affaires étrangères mais trop tard car le poste vient d'être affecté à Michel Jobert. Plus tard, Raymond Marcellin confirmera la stratégie de

Pierre Juillet sur le positionnement de Chirac : un grand ministère puis le remplacement de Messmer comme premier ministre, pour être le moment venu candidat à la présidence de la République. Jacques Chirac avait confié à Marie-France Garraud, une autre conseillère de l'ombre, son désir de partir de l'Agriculture après les législatives : " Sortez-moi de là. J'ai tout promis. Je ne pourrai plus rien tenir". En avril 1973, Pompidou rongé par la maladie se refuse à désigner un successeur. Pierre Juillet a été supplanté par le clan Jobert. On assiste à la montée d'Edouard Balladur nommé secrétaire général de l'Elysée à la place de Michel Jobert promu aux Affaires étrangères. Les rumeurs sur la gravité de la maladie de

Georges Pompidou enflent lors de son voyage le 1er juin 1973 à Reykjavik en Islande pour rencontrer Richard Nixon. La classe politique prépare déjà les élections. VGE s'est mis en marche. Pompidou est de plus en plus faible. Jacques Chaban-Delmas et Pierre Messmer entrent en lice. Un remaniement ministériel est rendu public le 1er mars 1974. Messmer est maintenu comme premier Ministre et Chirac passe à l'Intérieur. Contre Chaban-Delmas et VGE, la présidence a désormais un nouveau recours en la personne de Jacques Chirac. Chirac à l'Intérieur s'impose d'entrée de jeu comme l'anti-Marcellin et affiche un profil libéral. Raymond Marcellin, relégué à l'Agriculture, parle de chasse aux sorcières et de poudre aux yeux. Georges Pompidou décède le 2 avril 1974. Chirac perd son mentor et montre un profond chagrin. Il entre en campagne contre Chaban et pousse Messmer. Il se ralliera finalement à VGE. Quelques points forts de son ministère Le 29 septembre 1972 se déroule la 2ème

conférence agricole annuelle. Elle lance en particulier le Service de remplacement agricole. L'idée de faire appel à un remplaçant pendant des absences de courte durée germe dans les années 60. Les premières réalisations voient le jour dans quelques départements à l'initiative d'agriculteurs : Haute-Saône, Doubs, Aveyron… A partir de 1970, se déroule une expérimentation, financée par le FORMA, Fonds d'orientation et de régulation des marché agricoles, dans le cadre des conventions d'équilibre lait-viande des régions Basse-Normandie, Poitou-Charentes et Bretagne. Il s'agit d'améliorer les conditions de travail et de vie. Face au succès de l'expérimentation, le CNJA propose début 1972 d'officialiser l'organisation du remplacement agricole.. Dans l'été, l'initiative est appuyée par les autres organisations professionnelles sous conditions : "Le Service de remplacement doit être utilisé en priorité par les agriculteurs s'absentant pour des motifs de formation ou de maladie". Dans une lettre adressée au Ministère de l'Economie et des finances en septembre 1972. Jacques Chirac déclare : "S'il est probable qu'au cours de la période de démarrage, les demandes de remplacement pour cause de maladie seront les plus nombreuses, il n'en demeure pas moins qu'il faudra évoluer le plus possible vers des remplacements pour cause de formation ou de vacances des agriculteurs". Ce souhait ne s'est

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pas encore totalement réalisé, même si le remplacement est devenu chose courante actuellement. Toujours dans le prolongement des décisions de la conférence est créé le 1er décembre l'ONIBEV, Office national interprofessionnel du bétail et des viandes. Les offices sont des organes d’exécution de la politique d’organisation de l’économie agroalimentaire ou de la gestion des marchés qui agissent par délégation et sous la tutelle de la puissance publique. Les offices sont des établissements publics industriels et commerciaux (EPIC)

exerçant leur compétence sur l’ensemble de la filière correspondant aux produits ou groupes de produits agricoles et agroalimentaires dont ils sont chargés. Ils ont pour mission générale de contribuer à réunir les conditions du relèvement des revenus des agriculteurs, à la réduction des inégalités, à l’emploi optimum des facteurs de production et à la régularisation des marchés dans l’intérêt de tous les opérateurs et salariés de la filière ainsi que des consommateurs. Le 1er janvier 1973, c'est la naissance de l'Europe des 9. Un décret est publié le 4 janvier portant création d'une Commission nationale et de commissions régionales de l'orientation de l'élevage. Georges Pompidou prononce une allocution le 10 janvier à l'occasion du cinquantenaire des Chambres d'agriculture. Le 24 février est annoncé la création d'une ISM, Indemnité spéciale montagne destinée à compenser les handicaps des zones difficiles, et la mise en place des plans de développement agricole. En mars c'est l'échec du marathon pour fixer les prix institutionnels de la campagne 1973/1974 malgré une forte pression professionnelle. A Bruxelles, Chirac réclame une augmentation des prix des produits laitiers en faveur des producteurs français malgré l'opposition de la Grande-Bretagne. Finalement une majoration de 5% est concédée avec une revalorisation de 10% pour les bovins viande pour stimuler la conversion lait/viande. En avril la situation européenne est toujours confuse. La 3ème conférence agricole annuelle se déroule le 3 juillet avec une annonce du premier ministre Pierre Messmer concernant une organisation du secteur laitier, la mise en

œuvre de réformes foncières et une politique d'aides directes aux zones de montagne. C'est la création de la DJA, Dotation jeunes agriculteurs, une aide à la trésorerie destinée à financer la reprise ou la création d'une exploitation agricole. Elle concerne aussi bien le jeune exploitant à titre principal que celui à titre secondaire quelque soit la forme d'installation (individuelle ou sociétaire). Le montant est fixé dans les limites prévues par zones géographiques (plaine, défavorisée et montagne) et des critères suivants : montant du revenu prévisionnel et proportion tirée des activités de production agricole, difficultés à s’installer rencontrées par le candidat lors d’une reprise hors cadre familial, critères d’appréciation adaptés aux spécificités de l’économie agricole locale, le cas échéant, l’engagement du candidat à réaliser un suivi économique, technique et financier. Le montant de la DJA est modulé sur la base de critères fixés par la CDOA, Commission départementale d'orientation de l'agriculture. Actuellement son montant moyen est de 26 200 € en zone de montagne. En août, Jacques Chirac envenime le débat en stigmatisant l'Allemagne et la Grande-Bretagne, leur reprochant de ne pas jouer le jeu communautaire. L'esprit communautaire est effectivement en berne. Chirac va encore plus loin, en accusant le commissaire français Claude Cheysson d'avoir négligé les intérêts de la France dans les discussions au sein de la commission. Le 21 septembre, Georges Pompidou tient une conférence de presse à l'Elysée sur le Sommet de Paris et la PAC. Le Sommet de Paris des chefs d'Etat de la CEE se déroule du 19 au 21 octobre. Pompidou fait une déclaration sur les déséquilibres régionaux et l'agriculture. En novembre 1973, soutenu par le président, Jacques Chirac revient sur des décisions de Valéry Giscard d’Estaing, alors en voyage, en annonçant le retrait du projet de loi de finance d’une nouvelle taxe sur la vente des fruits et légumes qui, dans un contexte de hausse des prix, s’était attirée la grogne des détaillants. Une fois de retour, le ministre des Finances ne peut qu’avaliser les promesses faites par son homologue de l’Agriculture. En automne, le calme revient sur la scène européenne malgré une politique de marchandages de prix entre partenaires. Des compromis permettent cependant le fonctionnement des OCM, Organisations

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communes de marché, pour les céréales et les produits laitiers et même la création de nouvelles modalités pour l'alcool, la viande ovine et les pommes de terre. Ses passages en Haute-Loire A notre connaissance Jacques Chirac a fait plusieurs incursions en Haute-Loire. En 1975, Premier ministre de VGE, il visite à Brioude une entreprise fromagère. En mars 1999, il passe par Yssingeaux et Le Puy où il visite la cathédrale. Sortant du Centre culturel sis à cette époque tout près de la Préfecture où nous cherchions de la documentation pour le livre "100 ans d'agriculture en Haute-Loire", avec mon collègue et ami Jean Bost, nous avons la surprise de le croiser. Jacques Chirac sortait au même moment de le Préfecture, échappait à son service d'ordre et venait serrer la main à la cinquantaine de personnes qui l'attendaient dont nous qui passions par hasard. Le 8 juillet

2004, au Chambon-sur-Lignon, en présence de Jacques Barrot et de Simone Veil, il prononce un émouvant discours sur la Résistance et la tradition d'accueil de cette région.

Et pour conclure Jamais la popularité de Jacques Chirac ne se démentira dans les milieux agricoles. En 2012 et pour la première fois depuis sa nomination en 1972 au ministère de l'Agriculture, à la seule exception de l'année 1979 où il était hospitalisé à la suite de son accident de voiture sur les routes de Corrèze, Jacques Chirac ne se rendra pas au salon de l'Agriculture. Un véritable déchirement car il

s'y sentait comme un poisson dans l'eau et mesurait la persistance de sa grande popularité. Le corrézien, si emprunté en ville, si allergique aux mondanités, aura passionnément aimé les paysans, les agriculteurs, les éleveurs. Des hommes qu'il aura, par tous les temps, constamment soutenus et encouragés, de Paris à Bruxelles, voire à Washington. En 2011, appuyé sur l'épaule de son ami Christian Jacob, ancien président des Jeunes Agriculteurs, actuellement président du groupe UMP à l'Assemblée nationale, Jacques Chirac s'était encore rendu porte de Versailles. Il y avait été acclamé mais sa visite avait été moins longue que d'habitude. Son état de santé ne lui avait pas permis d'aller arpenter les stands, d'aller trinquer ou de déguster les produits de terroir des régions de France. François Hollande s'est essayé à l'exercice, battant même le record de la plus longue visite au Salon de l’agriculture, établi par Jacques Chirac. "C’est un Corrézien qui remplace un Corrézien", remarque une visiteuse au passage du candidat socialiste à l’Elysée. Elu d’un territoire rural depuis trente ans, Hollande n’a pas boudé son "plaisir personnel" de ce long

contact avec le monde agricole, pourtant traditionnellement ancré à droite. "Je ne crois plus du tout aux concepts de clientèle [électorale] captive", déclare-t-il à ce propos. François Hollande a commencé son marathon par la traite des vaches et un steak de viande parthenaise, évité quelques jets d’œuf et huées de militants UMP sur son passage, posé un agneau dans les bras "je suis le berger !"

Cette prestation n'effacera pas l'image de Jacques Chirac qui plane sur la porte de Versailles, image du meilleur ministre de l'agriculture que le monde paysan ait connu.

Jean Claude Brunelin

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L’élevage médiéval. Pris globalement le Moyen Âge est une grande période d’élevage. Outre les animaux domestiques courants on élève le ver à soie et plusieurs insectes qui entrent dans la composition de colorants. A la fin de la période dite Antique, il n’y a déjà plus d’élevage nomade en Europe occidentale mais on pratique la transhumance normale et inverse. L’animal est source de nourriture, mais aussi de produits tels la laine, les soies ou le crin,

la peau (vélin, parchemin), le cuir, le boyau, la corne. Il apporte la traction sur les chemins et dans les champs et la force motrice dans les moulins et le déplacement des charges (noria et « cage à écureuil » servant d’ascenseur). Il est la seule source de fumure. L’art vétérinaire médiéval est fort mal connu. Les progrès de l’archéologie démontrent depuis peu que les variations du poids moyen des animaux a été une adaptation aux conditions de vie, aux techniques et aux réalités économiques et politiques du moment. La taille et le poids

augmentent de l’âge du fer à l’occupation romaine. Puis ils diminuent pendant la période médiévale pour de nouveau croître dès le XVIe siècle. Ces fluctuations pourraient bien avoir été des adaptations novatrices, propose Georges Comet. Vers l’An Mil un porc adulte pèse de 70 à 80 kg ; un mouton de 20 à 30 kg ; un bovin de 200 à 250 kg. D’une région à une autre on observe de grandes variations. En moyenne, la moitié de l’élevage est consacré à l’ovin. La place du cheval est limitée. Dans l’Europe méditerranéenne ovins et caprins viennent en première place et les porcs ensuite. Plus au Nord et à l’Est ovins, caprins, porcins et bovins sont à égalité. En Gaule le porc a supplanté l’ovin jusqu’à représenter la moitié du cheptel. En Angleterre au contraire c’est l’ovin qui représente presque la moitié. Dès le XIIIe s les prix augmentent. Le prix du bœuf double. Un ovin triple. A la fin du Moyen Âge l’élevage ovin augmente et l’élevage porcin diminue. La production lainière et textile est alors la seule à pouvoir être qualifiée d’industrielle au XIVe siècle. En Angleterre le cheptel ovin est estimé à huit millions de

têtes. L’industrie textile flamande en dépend. Aux XIV et XVe siècle l’élevage bovin diminue alors que l’élevage ovin augmente, notamment les races à laine longue. Les urbains se groupent pour investir dans des troupeaux ovins lainiers. Dès le XIIe siècle, en Espagne, le roi de Castille attribue à ses vassaux des terres à condition qu’elles servent à l’élevage. Les grands propriétaires s’unifient en une mesta unique reconnue par le roi et qui entretient des centaines de milliers d’ovins. La race locale est abandonnée au profit du merino mieux doté en laine. Burgos et Segovia prospèrent grâce au commerce de la laine. L’élevage du cheval était réservé à un rôle presque uniquement guerrier, en monte et pour la traction. Dans l’Europe du Nord, à partir du XIe siècle il se

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pratique aussi en vue de son utilisation dans le travail de la terre. Il remplace alors peu à peu la traction bovine. En Flandre il se généralise dès le XIIe s. La France des plaines cultivées adopte le cheval et fait venir de loin des étalons réputés. Au XIVe s l’usage du bœuf est encore très répandu dans de larges provinces françaises et en Angleterre. Les évolutions de l’élevage s’accompagnent de variations des cultures. Ainsi l’avoine est cultivée là où s’est répandu le cheval. En Normandie la glandée disparait et les porcs sont de plus en plus souvent élevés en porcherie. L’illustration est en général en retard par rapport aux pratiques, ce qui fait soupçonner que l’imaginaire puisse être un peu passéiste. En effet les livres d’heures représentent encore la glandée alors que son usage a disparu. Les techniques de dressage et d’attelage se développent et se diversifient selon les régions. Contrairement à une idée répandue, l’usage du collier d’épaule ne révolutionne pas l’attelage ou l’agriculture. Son implantation est lente et régulière depuis l’Antiquité. L’usage du cheval accompagne l’enrichissement des régions plutôt qu’il en est la cause. Dès les XIV et XVe siècles l’élevage devient un secteur économique reconnu à part entière.

Gilbert Duflos

Références. Le paysan et son outil. Georges Comet. Ecole française de Rome. 1993. L’élevage médiéval. Actes du colloque de mai 1997. Paris. Société d’ethnozootechnie. Le livre de l’olivier. Georges Comet. Edisud. 2000. Dictionnaire du Moyen Âge. PUF. 2002. L'Outil agricole au Moyen Age. Pascal Reignez. 2002. L’outillage agricole (…). Georges Comet. 2003. Jeux d’eau, moulins, meuniers (…). Georges Comet. Chercheur associé PREM. P. Université de Provence. 2008. Autres articles de Georges Comet et Jean-Pierre Barraque.

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L’élevage ovin au Moyen Âge (1ère partie) Au Moyen Âge est la production lainière est le moteur de l’élevage ovin. La sélection des

races ovines a comme but de choisir et sélectionner les races dotées de la laine la plus abondante ou la plus fine. L’illustration médiévale en tient grand compte et ce n’est pas un hasard si beaucoup d’enluminures montrent la tonte. L’Angleterre tient alors la première place pour l’industrie lainière et son exportation. L’élevage ovin lainier y tient une place importante et s’y pérennisera. Les autres régions essaieront de prendre pied sur ce marché. Peu à peu les races ovines lainières prendront le pas sur des races locales moins riches en laine en tous pays. Prémices de mondialisation… Des conflits existent entre les tenants du mouton et les personnes intéressées à d’autres productions. Notamment les exploitants forestiers et l’élevage porcin. De nos jours l’élevage ovin vise principalement la production de viande. Les races ovines tendent à

être choisies et sélectionnées dans ce sens. On devine que s’est présentée une obligation de choix de race ovine ici ou là, à un moment ou un autre. De même un choix entre l’ovin et d’autres productions. Eternels balancements. Chronologie médiévale ovine En gaule souveraine comme sous domination romaine la production lainière est importante. L’artisanat familial de la laine tient une grande place pour la fabrication de vêtements, dans les actuelles France et Belgique. Considérant que l’élevage des moutons nuit à la forêt et à l’élevage porcin, les peuples d’origine germanique arrivant en Gaule prennent des mesures pour le faire régresser. Des indemnités sont prévues pour réparer les dégâts causés par les animaux aux cultures et aux forêts. L’indemnité pour un agneau est de 7 deniers et de 100 à 120 deniers pour une brebis de 1 à 2 ans. Mais elle va de 120 à 600 deniers pour un porc de lait. Durant le haut Moyen Âge, seuls les grands établissements religieux conservent d’importants troupeaux ovins pour couvrir leurs besoins en laine. A l’autre extrémité de la société les familles conservent quelques bêtes pour leurs besoins propres. Les hommes tondent. Les femmes filent et transforment la laine. Le tricot existe déjà, en provenance d’Afrique du Nord. Au XIIe siècle l’élevage ovin se développe avec l’augmentation de la population urbaine. Les jachères, plus nombreuses, sont propices à l’élevage caprin-ovin. Les observateurs jugent qu’entre un tiers et la moitié des terres sont en landes et vaines pâtures. De plus les chaumes et les terrains pentus ou accidentés sont eux aussi favorables à l’élevage ovin, ce qui n’a pas changé.

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Au XIIIe siècle les abbayes cisterciennes assurent la promotion des races ovines d’Angleterre et Ecosse à la laine fine. Les comtés de l’Est, Suffolk, Norfolk, Yorkshire et Lincolnshire sont les principaux exportateurs. Flandres et Artois sont les plus grands centres de l’industrie textile et drapière, importateurs des laines qui arrivent directement par bateau. Nous sommes au début des Guerres de Cent Ans pour la succession entre les couronnes anglo-françaises. Au XIVe siècle, en plein conflit, l’Italie importe les laines britanniques qui transitent par Saint-Omer, Calais, Amiens et Bruges, puis cheminent par voie terrestre ou par voie maritime de Southampton jusqu’à Gênes. Au milieu du XIVe s, c’est près de 7500 tonnes qui proviennent d’Angleterre. Le mouton envahisseur. Dès la fin du XIIe s, spéculation et demande de laine augmentent. De plus en plus de régions se livrent à l’élevage ovin.

Dès le XIIe s, en Espagne, le roi de Castille avait attribué à ses vassaux et aux chevaliers des ordres militaires des privilèges et des terres à condition qu’elles servent en priorité à l’élevage, notamment à l’élevage ovin. Les syndicats de grands propriétaires (mestas) de Castille, du Léon et d’Estrémadure s’unifient en une mesta unique reconnue par le roi. A la fin du XIIIe s les plus riches seigneurs et monastères ont tant investi que la mesta entretient des centaines de milliers d’ovins et impose sa loi sur des territoires immenses. La race locale, le churro1 (churro-navajo), est abandonnée au profit du merino2 dont la laine, plus fournie et plus fine, convient mieux au marchés européens. Des villes comme Burgos et Segovia prospèrent grâce au commerce et à l’exportation de la laine. C’est dès les XIII et XIVe s que l’Espagne affronte l’Angleterre sur le marché lainier et que le mérinos concurrence les races anglaises pour la qualité de

sa laine. Les centres textiles et drapiers se tournent de plus en plus vers l’Espagne. C’est pourquoi l’Angleterre se lance elle-même dans la transformation. Elle entend compenser la perte de marchés et profiter du succès de l’industrie textile. L’export diminue des deux tiers en 50 ans et les comtés du Nord-Est se livrent eux aussi à l’élevage ovin. Cette situation voit croître la spéculation lainière et la désertification des campagnes anglaises… comme des campagnes espagnoles dont les vastes terres légères conviennent aux moutons. Les chroniques de l’époque disent que « ce sont de véritables fleuves de moutons » qui transhument à travers les plateaux castillans, depuis le nord vers l’Andalousie. En 1350 1 500 000 brebis transhument… et 2 700 000 en 1467 ! L’Italie du Sud-Est évolue de la même manière. Les immenses terres des Pouilles et de la Capitanate ainsi que la Sardaigne se reconvertissent à l’élevage ovin.

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Même des régions céréalières se vident de leurs agriculteurs, y compris aux abords de Rome. En France des régions, d’abord autour des centres drapiers, suit les modèles européens. La Bourgogne pour l’abbaye de Saint-Germain d’Auxerre. L’Aube, avec l’abbaye de Clairvaux qui tient 3 000 moutons, fait prospérer Troyes. Les terrains crayeux de Champagne font prospérer les drapiers de Reims. De même en Normandie, Artois, et en Berry dont les moutons mangent les chaumes. Provence, Alpes, Cévennes, Pyrénées et Auvergne développent des transhumances sur des centaines de km. Les grands seigneurs de Savoie, du Dauphiné possèdent d’importants troupeaux. L’élevage, les marchés lainiers et les transhumances, génèrent des foires dont les revenus sont considérables et font la fortune de familles bourgeoises des villes marchandes3. Les hautes terres sont louées pour les étés. D’immenses troupeaux montent des bas-

pays de Bigorre, Médoc et Agenais. Margeride, Causses et Aubrac vivent au rythme des transhumances qui créent aussi des conflits entre communautés ecclésiastiques ou laïques. Les ovins, et les caprins qui souvent les accompagnent, ont besoin de grands espaces. Ils mangent les friches. Le recul des Paysans vers les villes créent de nouvelles terres désertées où viennent les moutons…

En Europe occidentale, du début du XIVe à la fin du XVe s, c’est entre 10 et 20% des terres qui passent de l’agriculture à l’économie pastorale4. En plein XIVe siècle, un homme est au cœur de l’épopée ovine. Un tout jeune berger. Un garçon tout de finesse, observateur, qui apprend si vite que, de berger à 16 ans, il devient secrétaire du roi Charles V et se reçoit commande royale d’un traité du métier de berger et de l’élevage des brebis. Il a trente ans quand est publié ce manuel, en 1379 ! Nous vous présenterons l’ouvrage et son auteur dans le prochain Souffle de La Neira !

Gilbert Duflos Bibliographie.

o Jehan de Brie et les bergers d’autrefois. G. Gassies. Brie et Gâtinais. 1909. o La Ferme de Nolongues et le bon berger Jehan de Brie. F. Lebert. Bulletin de la

société littéraire et historique de la Brie. 1934. o L’agriculture au Moyen Âge (…). Raymond Delatouche et Roger Grand. 1950.

Raymond Delatouche, médiéviste. 1906-2002. o Les mutations agricoles des XIVe et XVe siècles. Robert-Henri Bautier. 1967. o Le Paysan d’Occident au Moyen Âge. Guy Fourquin. Mort en 1988. Médiéviste,

professeur à l’université de Lille. Nathan. 1989.

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AUX TEMPS DES RESTRICTIONS

Le soja. Le terme de soja peut prêter à confusion. Le soja vert, vigna radiata, ou soja de régime, originaire de l'Inde, est cultivé pour ses grai-nes non huileuses. C'est une des rares légumi-neuses, avec le pois, à pouvoir être consommé cru. Il est utilisé en alimentation humaine sous forme de purées, soupes ou de pousses ger-mées crues ou blanchies, en salade ou cuisi-nées. Nous traiterons uniquement du vrai soja, gly-cine max, cultivé comme engrais vert, four-rage, mais surtout pour ses graines oléagineu-ses fournissant huile et tourteaux très riches en protéines et acides aminés. A l'état cru, il contient des facteurs antinutritionnels, inhi-bant l'action des enzymes digestives de l'homme et provoquant des intoxications gra-ves. L'introduction du soja en France.Originaire de Chine, il serait issu de Glycine ussuriensis avec lequel il donne des hybrides fertiles. Il fut introduit par Buffon au Jardin des Plantes de Paris en 1739. Benjamin Fran-klin, ambassadeur des Etats-Unis à Paris de 1778 à 1785, devint ami de Buffon et ils échangèrent des plants et des semences. C'est ainsi que le soja fut envoyé à Philadelphie où le climat de la Pennsylvanie lui convint fort bien. L'extension de sa culture en Amérique ne fut effective qu'au début du 20ème siècle. Elle prit un nouvel essor en 1940, avec la fermeture du marché chinois. Progrès dans la sélection et recherches en alimentation animale, ont per-mis l'utilisation du tourteau utilisé auparavant comme engrais. Les exportations américaines, grâce en particulier au plan Marshall, ont contribué à répandre en Europe le modèle alimentaire maïs-soja et la suprématie jalou-sement gardée des Etats-Unis, premier pays producteur et exportateur mondial. Le prix bas du soja et l'absence de variétés adaptées au climat européen, n'ont pas poussé l'Europe à rechercher son autonomie. Une augmentation des prix, suite à une mauvaise récolte en 1973, provoque une crise. Les Etats-Unis obtiennent des conditions tarifaires exceptionnelles pour leurs exportations de soja et une limitation de la production européenne d'oléagineux. En France, une diversification des sources d'ap-provisionnement tente de réduire cette dépen-dance. Une intensification de la recherche

variétale a aussi permis une progression des surfaces cultivées en soja et surtout en colza et tournesol. Le soja occupait 1500 ha en 1975, 7500 en 1980, 28000 en 1985 et actuellement 100 000 ha, principalement en Midi-Pyrénées et Aquitaine. Le travail de sélection du soja a commencé vers 1920 à la station de Clermont-Ferrand où il a été poursuivi longtemps. Avant guerre, de nouvelles tentatives de culture ont lieu sous l'impulsion de MM. Rouest, Brioux, de Guer-pel, Chéron… dans les Centres de recherches agronomiques de Versailles, Dijon, Colmar, Clermont-Ferrand, Antibes. Ces pionniers sélectionnent des variétés adaptées aux diffé-rents climats de France et certaines portent même leurs noms. M. Blanchard, en région parisienne, travaille sur Lisbonne, Vilnensis, Illini, C.S.S., Ile de France. Pour les régions méridionales, il préconise Rouest 250. Pour de

Guerpel, Soja vilnensis de Pologne à grains bruns semble plein de promesses. Chéron cite soja vilnensis à grains bruns et à grains jau-nes, soja hispida à grains jaunes et soja àgrains hâtifs de Chéron. Mais ce n'est vrai-ment qu'en 1974 que de nouveaux moyens sont mis en œuvre dans plusieurs laboratoires publics et privés. Le principal objectif est l'adaptation aux conditions climatiques fran-çaises : tolérance à la sécheresse et au froid, amélioration du rendement et de sa régularité. Description du soja.Le soja est une plante annuelle, herbacée, de 1 à 1,5 m de hauteur, semblable à un grand ha-ricot. Toutes ses parties sont couvertes d'une pilosité blanche à brune. La feuille est trifoliée et les fleurs petites de couleur variable, du blanc au violet foncé. Les gousses contiennent

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de 2 à 4 graines arrondies de la taille d'un pois. La germination du soja est épigée, graine poussée vers la surface du sol, ce qui impose un semis superficiel. Le soja réalise une sym-biose avec une bactérie et développe sur ses racines des nodosités. La bactérie, rhizobium japonicum, absente des sols de France, doit donc être inoculée à la semence pour permet-tre la nodulation assurant l'alimentation azotée de la culture. Le semis a lieu au printemps, 60 à 80 kg de semence à l'ha, au semoir de préci-sion. Les rendements peuvent varier de 15 à 30 quintaux. Les plus grosses graines fournissent après traitement du "lait de soja" transformé en lait concentré ou en poudre. Sa composition est voisine du lait de vache, mais plus riche en protéines et plus pauvre en lipides. Mais la principale transformation s'effectue en vue d'obtention d'huile (20 %) et de tourteaux (80 %). Du soja en Haute-Loire ? En septembre 1940, une lettre, émanant d'un agriculteur de Monistrol-sur-Loire est adres-sée au Président de la Chambre d'agriculture. C'est une demande de documentation com-plète sur la culture du soja, qui serait déjà entreprise dans le Var et pourrait se faire sur une grande superficie. Avant de se lancer dans l'entreprise, le cultivateur désirait connaître : le mode de culture, la main d'œuvre néces-saire, le rendement, le coût de production, les cours actuels, les acheteurs potentiels … Le secrétaire administratif de la Chambre d'agri-culture lui répond séance tenante : "L'intérêt agricole relatif, du point de vue local, de la culture du soja, ne nous permet-trait que de vous communiquer des rensei-gnements de seconde main, fragmentaires et inadaptés au milieu de culture envisagé, le département du Var. Je crois donc opportun de vous conseiller de vous mettre en relation avec le spécialiste français le plus qualifié, vraisemblablement, propagandiste convaincu en outre de cette introduction, et susceptible de répondre de la façon la plus pertinente à vos questions : M. Léon Rouest, agronome, notamment direc-teur du Laboratoire du soja en Russie (Cau-case du Nord), 110, rue Grande, Châteauroux (Indre). D'autre part, en vue de la parfaite adaptation aux conditions toujours indispensables en matière d'agriculture, je ne puis que vous

recommander d'entrer en relation, tant dans l'intérêt présent qu'avenir avec M. Arnal, Directeur des Services agricoles du Var…" Le dossier fait aussi état d'un Syndicat des producteurs de soja des Alpes et de la Pro-vence à Marseille, d'un Comptoir agricole du Centre et Syndicat des producteurs et amis du soja et d'un Groupe spécialisé du soja de la Commission nationale d'Organisation Corpo-rative. "Si l'on avait écouté plus tôt un agronome français, le soja serait aujourd'hui cultivé partout". C'est un article de A. Simond, paru dans La Tribune du 24 octobre 1940 :"Il y a deux ou trois mois, le soja était au premier plan de l'actualité. Tous les journaux consacraient de longs articles à "la Plante magique" et demandaient que la culture en fût introduite en France. A qui la faute si cette culture est encore pratiquée sur une si petite échelle que beaucoup de gens ignorent ? C'est ce que nous voulons rechercher à la lumière de certains documents parvenus à notre connaissance. La France a dû de connaître le soja à un agronome, aujourd'hui décédé, M. Léon Rouest, qui avait séjourné en Extrême-Orient. Pendant une trentaine d'années, il a étudié, sélectionné la légumineuse asiatique, de façon à en permettre la culture dans les diverses régions de notre pays, aux climats si différents. En 1935, alors qu'il était parvenu à une connaissance parfaite du soja, Léon Rouest et son ami et continuateur H. Roudet, publièrent une feuille que nous avons sous les yeux et qui portait le titre :" Le Soja Français. Pour la propagation du Soja en France". Dans un premier article intitulé : "Qu'est-ce que le soja ?", Léon Rouest donnait les détails les plus précis sur la plante, sur son grain et sur les produits qu'on en pouvait tirer. Le Soja, disait-il, est une légumineuse d'origine asiatique, dont le grain ressemble au haricot mais ses tiges, ses feuilles et ses gousses sont velues et sa résistance à la sécheresse est très grande. Il forme, de ce fait, un très intéressant fourrage aussi riche que la luzerne. Son grain contient 17 % d'huile servant aux usages industriels et le résidu peut servir encore à l'alimentation des bestiaux. Son grain, après trempage et germination préalable peut très bien servir à l'alimentation humaine. Il peut servir aussi à faire une sorte de lait végétal duquel on extrait de la caséine, ayant les mê-mes propriétés que la caséine du lait animal. Le soja renferme dans son grain toutes les

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substances nécessaires à la vie des animaux et des hommes, aussi est-il très employé en Ex-trême-Orient sous la forme d'innombrables préparations culinaires. Son huile peut être transformée en glycérine, et c'est pour cette raison que les Allemands, manquant de matiè-res grasses pour la fabrication des explosifs à base de glycérine, ont passé un traité avec le Japon pour la fourniture annuelle d'un million de tonnes de soja en échange de matériel mili-taire.

Dans un autre article intitulé : "L"Allemagne et le soja", et avec une véritable prescience des événements qui depuis se sont déroulés, L. Rouest insistait sur tout ce que le soja japo-nais allait permettre à l'Allemagne. A cette époque, octobre 1935, M. Rouest pos-sédait, production de la récolte de sa proprié-té de l'Ardoise dans le Gard, un certain nom-bre de collections de semences de soja, sélec-tionnées suivant leur emploi dans telle ou telle région. Quatre années vont s'écouler pendant lesquelles il ne sera plus parlé du soja. Nous voici en mai 1939. "L'Agriculteur de Provence et du Languedoc" informe ses lecteurs que le gouvernement français commence enfin à s'intéresser à la culture du soja. "Un Comité national provisoire pour le développement et l'utilisation des huiles végétales", a été créé. M. Mathé, député de la Côte-d'Or, en est le vice-président. Le but du Comité est fixé en ces termes : "Engager le plus grand nombre possible d'agriculteurs de France à procéder à des ensemencements de soja, afin de colla-borer au renforcement de notre Défense Na-tionale". C'est un peu tard. Nous sommes au mois de mai, et c'est dans le courant de ce mois que doit se faire l'ensemencement. L'avis est tardif et c'est encore une année de perdue. Réjouis-sons-nous tout de même de ce commencement

d'action, écrit le rédacteur du journal paysan, et il ajoute. "Pourquoi ne pas utiliser pour le soja, les Chambres d'agriculture, les Direc-tions des Services agricoles, les professeurs et les ingénieurs agricoles, les Syndicats agrico-les déjà existants et tout désignés, semble t'il, pour la propagande, aussi bien que pour la culture du soja, pour l'entrepôt de la graine appropriée à chaque région, enfin pour l'achat et la vente de ses graines. Tout cela placé sous le contrôle des Services agricoles de l'Etat ainsi qu'il s'est fait pour la graine de betterave. C'était là langage de bon sens, mais les évé-nements qui allaient se précipiter eurent tôt fait de renvoyer le soja à des calendes lointai-nes. On n'en devait reparler que lorsque la guerre battait son plein, que les restrictions s'annonçaient. Il n'était plus temps de jeter la graine de soja sur la terre de France. Et comme l'on comprend toute la tristesse de la conclusion donnée par l'auteur : "Par un tra-vail opiniâtre, M. Rouest était parvenu à sé-lectionner 180 variétés de soja. Il avait com-pris l'avenir formidable de cette culture. Il avait tenté des démarches dans tous les mon-des pour y intéresser les pouvoirs publics. Ce fut en vain ! Comme un apôtre ou un inven-teur, il est mort dans la misère. Mais la flamme de son cœur est passée dans celle de deux de ses amis, ses collaborateurs, qui ont hérité de sa science et de sa foi. Ce sont deux paysans du Vaucluse, MM. Roudet et Batail-let, d'Aubignan. Ils ont créé de leurs deniers " la Maison du Soja" dans ce département. Ils poursuivront inlassablement cette tache avec une modestie inégalable, un courage désinté-ressé, un esprit de sacrifice incomparable. Ils sont parvenus lentement à fournir des grains de soja aux agriculteurs du pays, et ils ont sauvé les 180 variétés découvertes par leur maître Rouest. Et maintenant une brève énumération de ce que peut donner la graine de soja, en dehors de son huile végétale. L'emploi de la graine de soja est multiple : huile, caséine, caout-choucs factices, linoléum, café, farine pour pain et biscuits de troupes, conserves de grai-nes en boites, avec certaines variétés hortico-les. Il peut être encore employé dans les pâtés de viande, le saucisson, les confitures… Au-cune plante n'a autant de diversité dans ses emplois industriels et culinaires. Son époque de semis est le printemps comme le haricot commun. Il demande 110 jours de

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végétation pour les variétés les plus hâtives, et au dessous de 160 jours pour les plus tardi-ves. Sa culture est simple et peu coûteuse. Un semis au printemps avec 30 kg l'hectare, dans une bonne terre à blé, un ou deux binages suivant l'état du terrain, c'est tout. On a récol-té sur de grandes surfaces, en Russie, une moyenne de 15 à 18 quintaux. En bonnes ter-res on peut récolter jusqu'à 30 quintaux. Et maintenant, peut-on espérer que nos cultiva-teurs, mieux renseignés, aidés par le gouver-nement de l'Etat français, vont hardiment se livrer à la culture du soja. Ce faisant, ils tra-vailleront pour la Défense Nationale et ils nous éviteront dans l'avenir les dures restric-tions que présentement nous devons subir". En octobre 1940, L'Union de la Haute-Loire y consacre un article : Le soja. "Les Chinois cultivent depuis des milliers d'années une fève appelée soja, qui sert à tout : à faire vivre l'homme, car on en tire du pain, du fromage, de l'huile, du macaroni, aussi bien qu'à le tuer, car elle entre dans la com-position de certains explosifs, ou à le vêtir, puisque dans la laine artificielle inventée par l'italien Ferrotti, la caséine du soja peut rem-placer celle du lait. Ses tourteaux sont excel-lents pour le bétail. On l'emploie encore dans l'industrie de l'encre, des couleurs, des conserves et de la chocolaterie. Enfin elle est d'un usage universel. Ses déchets donnent un engrais riche, avec lequel les Japonais font de la culture intensive si nécessaire dans leurs îles surpeuplées. L'Allemagne et l'Europe centrale ont importé cette légumineuse qui leur rend de grands services. Acclimatée aux Etats-Unis, elle a produit en 1936 un million de tonnes. Avant de cultiver le soja, il faut défoncer le terrain. Le semis a lieu au printemps, dès qu'on ne craint plus les gelées matinales. Par hectare, on emploie 100 à 120 kg de semence à la vo-lée. Au semoir, 6 à 8 grammes par mètre. En poquets 25 à 30 kg par hectare, en laissant 40 cm sur la ligne et 70 cm entre les lignes. On récolte 1 500 à 2 000 kg par hectare. La fu-mure comporte 300 à 400 kg de super, 150 à 200 kg de chlorure et 400 à 500 kg de plâtre. Le fourrage de soja est de bonne qualité et ne météorise pas les ruminants. Les graines sont distribuées au bétail entières ou moulues ou macérées. On doit s'attendre à un échec lors-qu'on sème pour la première fois cette légu-mineuse, parce que les microbes du sol ne lui conviennent pas comme ils conviennent à

celles de nos climats. On lui apportera donc ceux dont elle a l'habitude, en répandant par exemple, sur le champ qu'on prépare de la terre prélevée sur un champ de soja, ou par tout autre moyen. Voilà un obstacle qui a dû décourager souvent les débutants, mais qui n'a pas arrêté les Américains, ni les Alle-mands, ni les agriculteurs balkaniques. La valeur alimentaire et industrielle de cette graine mérite bien qu'on cherche à l'acclima-ter en France dans les circonstances critiques où nous sommes. Comptons sur la compétence de nos services agricoles pour nous rensei-gner et nous guider dans cette voie nouvelle, et sur l'activité du ministre de l'agriculture, pour nous procurer la semence nécessaire, en temps utile. Car le soja peut être pour nous plus utile que la pomme de terre. Ajoutons que cette fève est depuis quelques années cultivée en certaines parties de la France, dans n'importe quel terrain convenant bien aux céréales. La farine de soja convient aux diabétiques et à la pâtisserie".

Et aujourd'hui ? La France cultive actuellement environ 2,4 millions d'hectares d'oléagineux. Le colza en représente 60 %, le tournesol 35 %. Les 5 % restants sont occupés par le soja, 100 000 ha environ, le lin oléagineux, 20 000 ha. Les autres oléagineux sont devenus des pro-ductions marginales avec 700 ha. La région Auvergne produit 16 500 ha de colza : 14 100 dans l'Allier, 2 000 dans le Puy-de-Dôme et 400 en Haute-Loire. Les 15 180 ha de tournesol sont localisés pour 8 900 ha dans l'Allier, 6 000 dans le Puy-de-Dôme et 280 dans notre département. L'essentiel de la production est trituré aux huileries locales de Lapalisse et de Lezoux. Elles produisent 40 000 tonnes d'huile de col-za et 57 000 de tournesol pour l'alimentation humaine. Dans un marché très concurrentiel, la région a développé des variétés de tourne-sol riche en acide oléique dont elle produit 20 000 tonnes. Les tourteaux approvisionnent les firmes locales d'aliment du bétail.

( à suivre…)

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Les gens d'ici

Victor Adrien Espérandieu

Grâce à l'Almanach de Brioude, nous avons pu obtenir quelques précisions sur Victor Espérandieu. Gustave Héraud et Roger Richard, sociétaires de l'Almanach de Brioude, ont fait une communication le 25 mai 2002 à Moulins dans l'Allier, sur cet artiste lors du 61ème Congrès de la Fédération des Sociétés Savantes du Centre de la France sur le thème "Les auteurs oubliés, œuvres méconnues, éditées ou non". Les auteurs rappellent que Victor Espérandieu s'est établi à Brioude suite à son mariage avec Marie Ernestine Espinasse. Ses qualités furent reconnues rapidement et en 1924, il reçut le Grand diplôme d'honneur à l'Exposition interdépartementale du Travail à Vichy. Pierre Mamet dans l'édition 1924 de l'Almanach de Brioude lui rend hommage : "… monsieur Espérandieu, salonais d'origine, brivadois par son mariage, pétrit le fer comme s'il n'était que pâte. Et de ses mains, dont la souplesse nous émerveille, sortent les chimères et les landiers gothiques, les rosaces Renaissance, les ornements les plus divers, jusqu'à des lustres magnifiques dont nos lecteurs pourront apprécier la valeur d'art par le dessin ci-joint. Monsieur Espérandieu s'est formé lui-même par l'observation intelligente et patiente…" En 1925 à Paris, à la première exposition du Travail, il est distingué comme un des meilleurs ouvriers de France. Ses œuvres connurent le succès et ornent encore des maisons de Brioude. Il est encore distingué à de nombreuses occasions : médaille d'argent à l'exposition coloniale internationale de Paris en 1931, diplôme d'honneur à l'exposition de Reims en 1932, la même année diplôme d'honneur au conservatoire national des Arts et métiers de Paris, 1941, 1950, 1951 et 1953 juste avant da disparition. L'Almanach de Brioude en 1925, fait état de l'obtention du grand prix d'honneur à l'exposition régionale du Travail organisée à Vichy, par une décision unanime de tous les jurys des diverses sections réunies. La même revue en 1951, revient sur l'exposition 1950 de Vichy où Victor Espérandieu a encore été distingué : "… M. Espérandieu est connu depuis 25 ans dans la région et l'on vient de loin pour visiter son atelier et examiner les

œuvres dont il est rempli. C'est un musée du travail du fer et l'on est surpris et charmé de voir les chefs-d'œuvre qui y sont accumulés. M. Espérandieu est un créateur d'une virtuosité extraordinaire. Il s'est formé lui-même, par l'observation intelligente des choses d'abord, ce qui lui a fourni des sujets de composition, puis par l'acquisition d'une dextérité qui lui permet d'assouplir une matière élémentairement rebelle et de lui faire exprimer des délicatesses très fines ou des forces robustes sans cesser de donner l'impression d'un labeur consciencieux et fouillé dans les moindres détails. Espérandieu est classé au nombre des meilleurs ouvriers de France. On peut dire qu'il est aussi un artiste en son genre, qui rejoint les maîtres marteleurs de jadis travaillant pour les siècles simplement et sans ambition autre que de livrer du travail bien fait." La famille Espérandieu n'a pas eu de descendants directs. C'est sa nièce, Madame Poloni, domiciliée à Nantes qui apporte son témoignage et décrit le portail acquis par la ville de Brioude et encore dans un local municipal, l'ancienne caserne des pompiers, en attendant sa mise en valeur dans un lieu approprié. Nous avons publié cette description dans notre précédent numéro, reprenant un article de presse n'indiquant pas ses sources. Cette œuvre a été achetée lors d'une adjudication par la Mairie de Brioude le 26 avril 1997 pour la somme de 60 000 francs. Les auteurs de la communication précisent qu'il n'y a pas de répertoire de ses œuvres disséminées dans des musées, dans ses anciennes propriétés, dans sa famille ou chez ses clients. Le musée du Vieux Salon possède un "Mistral et la Provence", une œuvre de 2,30 m sur 1 m. Ils indiquent aussi une construction de style médiéval appelée la "Tour de Neilles". C'est une construction en pierres. Il maçonnait et taillait la pierre de Volvic. Il y a aussi des réalisations à Vichy, Nantes, Saint-Etienne et dans le Brivadois. L'année de sa mort, en 1953, un film documentaire projeté à Brioude en salle publique, n'a pas été retrouvé.

Les auteurs de la publication livrent une série de planches. Nous en reprenons quelques-unes.

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V. Espérandieu en fumeur de pipe. Il s'efforçait de ressembler à Mistral, qu'il révérait, jusque dans ses attitudes

Sa signature reproduite à l'identique en fer forgé, sur le portail de son

domicile.

Buste de Frédéric Mistral. Une cigale grimpe sur le revers de la veste. En bas

est gravé : "F. Mistral, 1830-1914"

La Provence aux olives. "La Provence" était le nom de sa maison à Brioude. Cette œuvre était accrochée à la façade. Les lettres sont exécutées par un assemblage de feuilles d'olivier parsemées d'olives et agrémentées de deux papillons. Deux tiges de rose avec leurs boutons agrémentent le blason sur lequel repose une cigale.

La Provence aux oiseaux. VE avait un amour profond de sa Provence natale et

de Frédéric Mistral

Ce soleil de fer forgé décore le fronton de sa maison de Brioude, peinte dans des tons de rose. Noter l'oiseau et le portrait

de Mireille.

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Le bouclier, pièce avec deux épées d'un ensemble avec armure et

casque.

Une sellette destinée à recevoir son buste. Elle était dans son salon

d'exposition à Brioude. Toutes les têtes d'animaux et les figurines sont de formes différentes. Toutes les soudures des fers

sont réalisées avec des angles à 45 °, contrainte supplémentaire que l'artiste

s'était imposée. L'artiste à Brioude tenant son profil en

fer forgé.

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Maison Espérandieu, rue Saint Esprit

Quesaco ? Encore une originalité, un sujet imprévu, peut-être un jeu de mots pour un nouvel article dans cette curieuse petite revue : le Souffle de la Neira ? Il en a fallu du "souf-fle" justement, à notre petite brebis noire et à ses ardents défenseurs, pour parvenir vaillam-ment au 52ème numéro ! Les lecteurs les plus attentifs et les plus minu-tieux se souviennent peut-être d'un article du dernier numéro, sous le titre "les gens d'ici'" et le mystérieux sigle MOF : il évoque les "Meil-leurs Ouvriers de France" et bien sûr ceux de la Haute-Loire. Parmi les lauréats, certains noms sont bien connus actuellement au Puy. Mais c'est en 1925, la toute première année où les prix furent attribués, que Victor Adrien Espérandieu, ce Méridional au nom flamboyant, reçut le beau titre de "Meilleur Ouvrier de France" en Fer-ronnerie d'Art. Méridional certes puisque né en 1878 à Salon de Provence. Mais le voici parti pour son Tour de France. Il devient Brivadois auprès de son épouse Marie Lespinasse. Et c'est là, à Brioude, dans son atelier de la rue Saint Esprit, qu'il travaille avec ardeur, crée de nombreuses œuvres d'art récompensées par de nombreux prix. C'est aussi à Brioude que s'achèvent sa vie et son œuvre, le 2 août 1952. Ce mois d'août 2013, s'est tenue à Brioude la Biennale d'Aquarelle, maintes expositions douces ou colorées, parsemées au fil des rues et des places. C'est alors que j'ai sillonné Brioude et que maints souvenirs ont afflué à ma mémoire. Je me suis revue, vers 1954-55, petite fille de 11 ans entrant en 6ème au Collège de Jeunes Filles du boulevard Desaix. "Descendant" de mon hameau natal, voisin de Chavaniac-Lafayette, jusqu'à la "plaine" plus riante et ouverte, j'étais enchantée de découvrir le large boulevard bordé de grands arbres et de grandes demeures, l'atmosphère tiède de l'automne commençant. Impressionnée aussi par l'im-mense cour d'honneur du Collège dominée par le double escalier et le haut bâtiment classique dressé tout au fond. Qu'allais-je vivre en ces lieux si différents de tous ceux que j'avais côtoyés jusqu'à présent, modestes et familiers? Curieux hasards de la vie, c'est en ces lieux que ma mère avait été pensionnaire, étudiant jusqu'au Brevet et ne rentrant chez elle qu'à

Noël, Pâques et l'été. C'est là aussi que ma demi-sœur, de vingt ans plus âgée que moi, fit ses études, avant de gagner l'Ecole Normale du Puy et de devenir institutrice. C'était alors l'Ecole Primaire Supérieure de Jeunes Filles. De mon temps c'était devenu un Collège de Jeunes Filles, les bâtiments immenses s'éten-daient sur plusieurs niveaux, avec des cours intérieures, des escaliers, jusqu'au plateau où se déroulaient les cours d'Education Physique. Le réfectoire, lui, se trouvait tout en bas, il fallait descendre jusqu'à une grande salle voû-tée et peu éclairée, remplie de grandes tables et de bancs… Les salles de classe et les dortoirs étaient nombreux, tout un dédale à découvrir, bientôt familier. De la 6ème à la terminale, en blouses roses ou bleues selon les semaines, de 10-11 ans à 17-18 ans, les tailles, les morpho-logies, les centres d'intérêt étaient variés ! Bientôt les amitiés, les études, les professeurs, les jeux, toute une vie. Mais on ne rentrait à la maison pour une "grande sortie" que toutes les cinq semaines environ. C'était long pour les pensionnaires dont j'étais ! C'est alors que la Rue Saint Esprit prit une grande place dans ma vie ! Cette petite rue montant vers le plateau juste au coin de l'Hôtel de la Poste, à deux pas du collège, était celle où habitaient des cousins que je ne connaissais pas jusque là. Leur petite maison jouxtait l'hô-tel, elle comportait un "cuvage" bien frais et un étage à la fenêtre donnant sur la rue. Là, ma cousine était assise sur une petite estrade (son "trône"), penchée sur son ouvrage (c'était une brodeuse hors pair) ou jetant des coups d'œil sur les passants. Elle venait avec fidélité nous chercher au collège (une fille d'amis et moi) et nous ramener à 17 h les jeudis après-midi et les dimanches après-midi. (Sinon c'étaient les longues promenades un peu ennuyeuses des pensionnaires, en rangs je crois bien !). Chez mes cousins, avec leur fille de quelques années plus âgée que moi, raisonnable et déjà bonne ménagère, et leur fils plus jeune (gamin un peu turbulent et galopin), c'étaient les après-midi au jardin, vaste terrain sur le plateau, avec les légumes, les fruits et toujours les gâteaux mai-son ! A la saison aussi, les vendanges à leur vigne m'enchantaient. Les jours de froid ou de pluie, dans leur maison bien chaude, avec un livre, c'était bien aussi. Pour "monter" au jar-din, nous "remontions" la rue Saint Esprit, pour gagner un petit chemin et arriver sur le plat ; à la saison cerises et prunes nous réga-

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laient, la cave de mon cousin, creusée dans le sol, m'étonnait, et son vin aussi ! Grâce à cette famille, les longues semaines de pension étaient ensoleillées, je ne l'ai jamais oublié... En "remontant" la rue Saint Esprit, au n° 20, une grande maison imposante avec un haut portail en fer forgé me frappait à chaque fois par son allure et ses décorations inhabituel-les… Passèrent les années… L'internat s'assouplit, vint l'adolescence, les amitiés, le Brevet. Le Baccalauréat se passait alors en deux parties, l'une en 1ère, l'autre en Terminale. J'avais dès la Seconde choisi la section littéraire, quoi qu'on ait pu me dire ! Mais voilà, le Bac Philo ne se préparait pas au Collège de Jeunes Filles, qui ne possédait que la section Sciences Expérimentales (je crois). Il se préparait au Lycée Lafayette ( qui était en tout différent du Collège) : vieux bâtiments en mauvais état, longue entrée sombre et décré-pite, grande vieille porte délabrée portant un graffiti ironique: "Voi qu'entrate, lasciate ogni speranza !" (du poète italien Dante "Vous qui entrez, abandonnez toute espérance"). Les bâtiments s'organisaient autour de deux gran-des cours, théoriquement l'une pour les gar-çons, l'autre pour les filles pour les récréations, mais à tous les cours nous étions tous ensemble ! Car ce lycée était mixte ! une nouveauté totale pour nous. De plus, il comportait des dortoirs pour les garçons, mais pas pour les filles. Alors, nous, les filles, nous devions être "in-ternes externées", c'est à dire avoir une cham-bre en ville, juste pour dormir. Le matin, dès le lever et la petite toilette effectuée, nous filions au vieux " bahut" prendre le petit déjeuner et nous y restions jusqu'au repas du soir compris. Alors un surveillant était chargé de raccompa-gner le groupe de filles ( pas très nombreuses il me semble) à leurs chambres. En fait, quelques rues plus loin,, il "lâchait" tout le groupe et nous étions… libres ! Que de changements ! Comment la chambre fut-elle trouvée ? Je ne m'en souviens pas ; je sais que le la partageais avec une camarade, mais surtout elle se trouvait… MAISON ES-PERANDIEU, 20, Rue SAINT- ESPRIT ! et "ce jeu de mots" me ravissait, c'était donc l'adresse où l'on m'écrivait ! (puisqu'à l'époque la correspondance était importante !), sous l'égide de Dieu, du Saint Esprit, et de l'Espé-rance, rien moins que ça !

On accédait à la maison par un très grand por-tail en fer forgé (qui figure en illustration sur le N° 51 du Souffle), d'élégantes volutes portant bien visible en lettres cursives le nom "Espé-randieu" et à hauteur des mains une magnifi-que tête de lion. Ce qui me plaisait n'était pas la qualité du travail, mais que mon courrier entre dans la boite aux lettres par la gueule du lion… La maison est grande, précédée d'une belle terrasse enherbée je crois. Quant à nous, petites lycéennes, nous montions l'escalier qui longeait la maison et la contournait pour trou-ver à l'arrière une petite pièce qui comportait un lit à deux places, un lavabo, pas grand chose d'autre, je pense, elle donnait de plain-pied sur un assez grand jardin! Cette maison, je ne l'ai jamais vraiment regar-dée, ni bien vu les détails originaux, mais elle est liée pour moi à cette année de liberté et de découverte : les amies, les copains, la philo, les chansons et les poèmes que nous aimions, les grandes discussions, les longues balades dans Brioude le soir, les petites soirées chez l'une ou chez l'autre, la vie que nous découvrions… En cet été 2013, avec ma cousine amie des nouveaux propriétaires, j'ai pu revoir la Maison Espérandieu, nous avons observé la grande bâtisse qui a conservé son caractère et presque tous ses ornements extérieurs : outre le haut portail, les charmants petits lézards sur les piliers, sur la façade les oiseaux, un grand so-leil rayonnant et encadrant un portrait de Mi-reille, l'héroïne de Mistral… J'ai appris que le rez de chaussée avait été oc-cupé par l'atelier de M. Espérandieu, c'est là qu'il a œuvré, travaillé, forgé à l'ancienne (avec les seuls outils du forgeron : enclume, marteau, tenailles, soudure à la forge). Tout était resté en l'état, jusqu'à ce qu'elle soit vendue. Le nouveau propriétaire nous a montré la mai-son, réaménagée en respectant tout son cachet et ses belles décorations provençales. Je suis heureuse de l'avoir vue. Merci à lui. Espérons que la mairie de Brioude parviendra prochainement à exposer, il le mérite bien, le grand portail, le "chef d'œuvre" de Maître Es-pérandieu, dans un endroit digne de ce nom.

Marie-Andrée Moutounet

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De l’Océan au Velay…

Il n'est pas habituel de rencontrer en Haute-Loire des hommes de mer. Comment l'ami Gilbert Duflos en est il venu à jeter l'ancre dans notre petit pays loin des embruns et pourquoi est-il tombé raide amoureux de la Noire du Velay ? J'ai d'abord pensé qu'un vaste troupeau de bêtes à laine lui rappelait les moutonnements de la mer, les vagues roulant et déferlant sous la houle, écumantes. Mais de l'écume noire et une mer fort démontée…?! Un peu court comme explication. Puis je me suis souvenu de cette légende de l'ancien lac du Mont Bar reprise d'ailleurs par George Sand. Selon ces dires, les Romains auraient organisé des naumachies, spectacle naval habituellement dans des amphithéâtres inondés à cet effet, trouvant là un bassin propice et entouré de gradins naturels. Notre homme, sans doute un peu archéologue, n'aurait-il pas rêvé de trouver là birème, trirème ou quadrirème romaine bien conservée dans les sédiments de la tourbière ? Des indices concordants appuyaient notre hypothèse. Gilbert s'intéressait de près au CPIE, organisme en charge de la mise en valeur de la tourbière et en particulier au géologue Jean-Noël Borget. On l'a vu aussi souvent au bord de l'ancien lac, l'air bien interrogatif, sous le fallacieux prétexte de cueillir des champignons. Il y a même fait monter les brebis noires lors d'une fête. Il interroge aussi les gens âgés du pays, mémoire vivante du passé. Je me perds en conjectures... Mais le Breton a la tête dure et de la suite dans les idées. Et il s'accroche, depuis dix ans à Allègre et aujourd’hui à la retraite ! Finalement, le connaissant mieux, et par le biais du Souffle, je me suis décidé à l'attaquer de front et à lui demander de nous parler de son métier. architecte naval. En espérant qu'au cours de ce dialogue, nous pourrions percer le mystère planant sur l'antique Mont Bar. Alors en route pour un voyage dans un monde inconnu de la plupart d'entre nous, marins d'eau douce… 1973-2003-2013, c’était le moment.

Question. Gilbert Caroff-Duflos, vous étiez architecte naval. Dessiner des bateaux à Allègre, en Velay, c’est un peu surréaliste ? Réponse. C’est vrai, on peut le voir comme ça ! Quand j’ai choisi de venir à Allègre en 2003, je m’en suis rendu compte et ça m’a bien amusé ! D’autant que, justement cette année-là, le lac de Malaguet a été vidé… Pour que je n’y mette pas de bateau …? Je plaisante !

Q. Qu’est-ce qu’un architecte naval ? R. C’est une personne ou une équipe, qui conçoit, calcule et dessine non pas des maisons, mais des bateaux. Carène, voilure, motorisation, aménagements, détails intérieurs et sur le pont, sécurité, tout doit être prévu dans les plans. Encore plus que pour une maison car les meubles, couchettes, tables, placards, sont solidaires de la coque et doivent être dessinés. C’est d’ailleurs pourquoi l’architecte doit beaucoup écouter le futur propriétaire lors du dessin d’un bateau pour un client particulier. Quand j’ai débuté, en 1973, il n’y avait pas d’école pour apprendre le métier. En France nous étions une petite trentaine, tous autodidactes. Certains avaient appris sur le tas, en naviguant. C’est mon cas. D’autres avaient travaillé chez un architecte naval plus âgé ou

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étaient architectes DPLG. Aujourd’hui il existe des formations en France et à l’étranger. Je ne suis pas sûr que tous puissent vivre du métier. Q. Comment êtes-vous devenu architecte naval ? R. Je suis né au bord de l’Océan, en Bretagne, à Brest. Ici dans chaque famille il y a des Paysans. Là-bas dans chaque famille il y a des Marins. Marins pêcheurs ou de commerce. Ce sont des manières d’être qui forgent de fortes personnalités. Par nécessité. Il faut s’adapter au milieu, au temps, aux ressources. Chaque année on refait le même travail, mais jamais de la même façon. S’adapter, résister… Paysans et Pêcheurs nourrissent le monde. Respect et fierté ! Mes grands-parents m’ont inscrit dans une école de voile pour occuper mes abattis pendant l’été. En un mois ou deux me voici chef de bord puis moniteur. A 14 ans je faisais manœuvrer des élèves adultes et ça les amusait ! Une question revenait : pourquoi un voilier avance plutôt qu’aller n’importe où ? Aïe ! Je me suis documenté, puis de plus en plus. Bac en poche je suis monté à Paris « à Claude Bernard » une super école où on entrait sur concours de réputation nationale pour devenir prof avec une solide formation en arts plastiques, histoire de l’art, architecture, urbanisme et même optique. Lors d’un concours de plans, dans une revue nautique, je propose un bateau. Sélectionné! Un bureau d’études me repère et me prend avec deux autres jeunes et un architecte chevronné pour superviser. Service militaire et prof d’arts plastiques. En 1973 je me lance tout seul. Sans clientèle, je crée deux ou trois modèles selon mes idées et les présente dans la Presse spécialisée. Pouf, ça marche ! Avec un des premiers clients, nous nous constituons un catalogue de modèles et une clientèle de passionnés. 35 heures, connais pas ! A cette époque d’émancipation, des jeunes partent élever des brebis (gardarem lou Larzac !) D’autres achètent une coque pontée de bateau, l’aménagent eux-mêmes et partent découvrir les peuples du monde, inspirés par des aventuriers tels que Moitessier, puis, plus tard, Antoine, Renaud… José Bové. Certains construisent tout le bateau par leurs propres moyens. C’est pourquoi il leur fallait des plans super détaillés. Ce sont les Trente Glorieuses. Mille petits chantiers naissent et construisent des coques à aménager. Je dessine pour l’acier et l’alu car ma clientèle vise des côtes dangereuses en Arctique, en Afrique ou en Patagonie. Cela va me porter jusqu’aux années 2000. Entre temps Maurice Duflos, mon Père, s’est mis à mes côtés, m’a fait connaître Allègre, le Velay et les brebis noires dès 1985. Il disparaît en 2001. Il avait une approche nautique proche de celle de ma clientèle. Ce fut très utile, riche de moments intenses et passionnés. Après lui je n’ai jamais retrouvé le goût de ce travail. En 2003 je viens poser mon sac de marin dans son pays natal… Q. C’est pour cette raison familiale que vous êtes venu exercer en pays terrien ? R. Oui, bien sûr, mais pas seulement. Une petite cachotterie généalogique m’a rendu la Bretagne plus lointaine, impersonnelle. Quand la mer me manque, je regarde Bar, la Potence, mes amis du Velay, les brebis noires, et je sais pourquoi j’aime cette région méconnue alors que ses volcans et ses habitants trop modestes sont exceptionnels ! Au début les gens du pays me demandaient pourquoi j’avais quitté Paris pour Allègre. Je répondais que mon Père y était né et que mon grand-père y avait été percepteur de 1905 à 1911 environ… et eux de conclure « Ah bon ! Alors vous avez une raison d’être ici… » L’hiver, à Allègre, on est bien ! Mon grand-père n’aimait guère pelleter la neige,

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moi je trouve que ça crée de bons liens entre voisins. Il arrive que des néoruraux me disent qu’ils trouvent froids les gens de chez nous. Je vois peut-être nos concitoyens avec des lunettes roses, mais leur accueil m’est toujours allé droit au cœur. Les Jeunes disent bonjour et les Anciens racontent à merveille une fois en confiance. Je leur dois beaucoup. Ici les gens oublient ce qui nous est propre. C’est là. On ne le voit même plus. C’est banal. Pas de quoi être fiers. Erreur ! Ce que nous avons vaut bien ce que d’autres ont chez eux. J’ai gardé de ma Bretagne natale la fierté du « Pays de mes Ancêtres », le « Bro gozh ma zadou ». Ici on n’a pas cette fierté, me dit-on. Je crois qu’on en a les racines, mais qu’on n’ose pas en montrer les branches tendues vers le ciel. C’est vrai, ce sont les circonstances de l’Histoire qui la nourrissent. Interdire l’Occitan en Catalogne a fait naître « L’Estaca » (Lluis Llach) et Pau Casals s’est tapé le luxe de jouer le « Cant dels ocells » devant le gratin de la Maison Blanche. Un joli petit chant de Noël élevé au niveau d’un hymne d’une Nation ! La fierté est en nous, il y a juste à la laisser prendre son vol. Pour quoi faire ? parce qu’elle est une force qui aide. Comme l’épaule d’un copain… Q. Quels genres de bateaux avez-vous dessinés ? R. Par goût j’ai dessiné des voiliers pour ces « fous de mer » qui partaient autour du monde. La réglementation imposait pour cela des voiliers longs de 10 mètres ou plus, mais bien des gens n’ont pas les moyens de se payer un bateau de cette taille. Alors j’ai dessiné un modèle de 9,80m en 1974, rien que pour protester… Il s’en est construit pas loin de 1000 qui ont sillonné tous les océans ! Malgré mon côté frondeur, j’ai été appelé dans la Commission Nationale de Sécurité qui autorisait la mise sur le marché des voiliers, puis je me suis trouvé aux premières loges lors du passage aux directives européennes actuelles. J’ai dessiné des bateaux à une, deux ou trois coques, de 4 à 30 mètres, et aussi des bateaux à moteur pour un grand réseau de location basé à Digoin… ce qui nous rapproche de l’Auvergne ! 6000 unités ont été construites sur mes plans dans 35 pays de 1973 à 2012. C’est moins que bien des confrères.

Q. Pourquoi la voile ? R. Sous voiles, le passage de la coque dans l’eau est parlant. Elle chuchote quand l’eau est plate et le vent régulier. Elle tonne quand le bateau a escaladé une vague et retombe dans le creux qui suit. La voile, c’est la liberté mais pas le n’importe quoi ! On est libre de sa route dans les limites fixées par le vent et la mer contre lesquels le bonhomme ne peut rien ! La voile est une formidable école de responsabilité, de respect des autres et de la nature. En haute mer un voilier a le droit de couper la route

d’un bateau de pêche, par exemple. Le respect est de passer derrière parce qu’il travaille pour gagner son pain. C’est pareil quand on croise un tracteur sur une petite route. On le laisse passer et travailler. Même si on a la priorité. Et on se fait un petit signe de la main qui veut dire granmerchi, coratze, menadza te. Il y a la loi et l’esprit de la loi. Q. Durant votre carrière il a dû se passer des événements marquants, des anecdotes. R. En vrac, alors… En 1979 des clients revenaient d’avoir réalisé une grande première sur la côte Ouest du Groenland. Nous les attendions au Havre dans le crachin et la nuit. On est tombé dans les bras les uns des autres. On a pleuré de joie. Ils sont repartis plus tard sur Vagabond 2 et ce bateau réalise des expéditions polaires depuis 1980 : ça en fait des

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coups de fil angoissés ou joyeux au milieu de la nuit… Valéry a écrit « Il y a trois sortes d’hommes : les vivants, les morts et ceux qui vont sur la mer. » Un jour ou l’autre on apprend au téléphone qu’un copain est passé par-dessus bord, comme Eric, Georges, comme Tabarly… On vit avec ça… Heureusement il y a eu aussi plein de moments joyeux ! Des équipages ont réalisé des premières sur des bateaux que j’avais dessinés. Premier Tour de l’Arctique par un équipage français. Premier Tour de l’Arctique en sens inverse par un équipage irlandais. On a gagné quelques courses. J’ai été lauréat du concours de la revue américaine Cruising World. On me dit inventeur des voiliers à double gouvernail, ce qui a révolutionné les formes des voiliers. J’ai été essayeur de bateaux pour la presse nautique, j'ai écrit des articles techniques pendant 30 ans et un bouquin de 400 pages sur la construction métallique. Plus je travaillais dans ce milieu… moins je naviguais ! C’est pas drôle : vous êtes sur un bateau et « ah, justement mon beau-frère voulait vous demander ci ou ça… » Même ici ça arrive encore… Q. Elle se passe comment, la retraite ? R. Pas le temps de m’ennuyer. Chaque jour j’apprends la vie d’ici, les gens, le rythme du temps. Aux Archives Départementales et à travers l’association des Amis d’Allègre et son site internet (www.amisdallegre.org), j’essaie d’être profitable à Allègre. Quand j’ai fait relever une ruine en haut d’Allègre, mon voisin était un vieux monsieur qui m’a merveilleusement parlé de ses brebis noires du Velay, au Monteil de Vernassal. Il toussait. Des bronchites, ou pire, non soignées. « Par les trous du toit on voyait passer les avions… » Il est décédé en 2008. La même année m’offrait de connaître un autre

grand arbre. Avec modestie et la douceur affectueuse d’un père, il m’aida à mieux comprendre la rudesse de la vie de Fermier et Berger en notre région de montagne. Une époque en train d’être révolue… Combien de mains, de dos, en gardent encore le souvenir ? Oui, fierté et respect… auxquels « on » devrait mieux penser là où on fixe le prix du lait payé aux éleveurs. On ne devrait jamais oublier de mettre des majuscules à Paysan, Fermier, Berger, Marin Pêcheur. Et à d’autres encore. Avec Stéphane, un jeune berger, et toute une bande de copains, nous avons lancé la fête de La Neira et son site internet (brebis-noire-velay.org). Le but est de venir renforcer les autres fêtes de même but, comme Lou Pastre de la Neigre. Il est de contribuer à faire connaître cette jolie brebis noire qui est de chez nous comme la lentille verte, la tomme aux artisous, la dentelle du Puy, la verveine et notre Patois d’Oc que je vous recommande de continuer à parler… mais que je prononce comme une vache bretonne ! La Neira est un hommage à des vieux Bergers et elle veut montrer à nos visiteurs la modernité du métier des jeunes Bergers ! C’est pourquoi elle a été fixée pendant les congés d’été. C’est le moment où les

visiteurs sont chez nous. Nous voulons leur montrer (gentiment et joyeusement) notre fierté d’être ce que nous sommes en Velay. La fête marche du tonnerre. A qui dire merci ? A tous et d’abord à tous les bénévoles ! Un regret vis-à-vis des Allegras : n’avoir pas été en situation, au conseil municipal, de leur apporter ce que ma formation eut permis. Je participe avec plaisir à la fête médiévale et à l’office de tourisme depuis 2004, et j’ai été élu au bureau du Parc Naturel Régional Livradois Forez ainsi qu’auprès du Conservatoire Botanique national d’Auvergne. Vous savez quoi ? Ce Velay, qui n’est ni pays de très haute montagne, ni capitale de toutes les modernités, ni bord de mer, est une délicieuse terre de sagesse, de mesure et d’accueil. Il faut mouiller le maillot pour lui ! Vaï davant nostre Velai nosautres maï !

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Le sablier de la vie : La Chapelle enchantée

Il est, tout près de mon village, une chapelle désaffectée, toute proche d’un château de style Renaissance, mais bâti au dix-neuvième siècle. Il est habité un mois par an, tout au plus. J’ai eu la chance d’obtenir l’autorisation de pénétrer dans la chapelle. L’intérieur est tout simple : un modeste autel, quelques bancs, un sol de pierres, une solide charpente. Une Vierge à l’Enfant, sculptée dans un bloc de lave, est posée tout à côté de l‘autel. Un rayon de soleil fait étinceler les deux seuls vitraux, petits et colorés. Quelques statues de saints en plâtre sont posées ça et là : j’ai reconnu le Curé d’Ars, sainte Thérèse de l’Enfant Jésus, sainte

Anne… Une petite sacristie jouxte la chapelle. Une immense armoire devait servir à suspendre les habits sacerdotaux du prêtre qui officiait là, il y a bien longtemps. L’ensemble est un peu poussiéreux, quelques araignées ont tissé leurs fines toiles entre les poutres, mais, curieusement, on n’a pas une sensation d’abandon. La Bonne Dame avait utilisé une ferme abandonnée pour la construction, et on voit encore au fond de la chapelle un énorme bloc de granit, occupant une bonne moitié du mur, sur lequel elle est solidement arrimée. J’ai ressenti, à l’intérieur de ce bien modeste édifice, un sentiment difficile à définir : paix ?

bien-être ? présence de je ne sais quelle entité bienveillante ? L’aimable propriétaire m’a conté son histoire. Dans la première moitié du dix-neuvième siècle, une riche, très riche Américaine était tombée amoureuse d’un Lozérien de bonne souche, mais sans fortune. Elle l’épousa. Ils vivaient à Paris, mais lui avait la nostalgie de son pays natal. C’est alors que son épouse eut l’idée d’acquérir un vaste terrain et de faire bâtir un château au cœur du pays de son époux. Ils étaient tous les deux de fervents chrétiens, une chapelle à proximité de leur demeure paraissait indispensable. C’est ainsi qu’elle acheta une ferme en mauvais état, fit refaire le toit, mais garda les murs, et installa sa chapelle. Le couple passait les étés au château, emmenant avec eux leurs domestiques et leur chapelain. Dans mon village, on l’appelait « la Bonne Dame ». Elle n’était pas avare, finançant une école pour les filles, aidant ceux qui en avaient besoin sans ménager ni sa peine, ni son argent. Elle embauchait nombre de femmes des alentours pour aider les domestiques à l’année. Une seule chose leur manquait : un enfant. Ils moururent sans descendance directe et le domaine échut à des neveux. La visite terminée, je remerciai la propriétaire et m’empressai d’aller raconter ma visite à mes voisins les plus proches. Je devrais plutôt dire mes amis. C’est un couple âgé, qui nous avait pris en amitié dès notre installation, et nous avait bien aidés à être adoptés par les habitants du village. Lui était un grand et beau vieillard, avec beaucoup de prestance et un humour délicieux. Elle, une adorable vieille dame, menue, délicate, douce, avait élevé vaillamment ses sept enfants. Elle avait eu son compte de travail entre le travail de la ferme, les repas, les lessives qu’il fallait aller rincer à l’eau de la rivière, été comme hiver, en poussant la lourde brouette. - " Mon plus beau cadeau, m’avait-elle dit un jour, a été la machine à laver que mes filles m’ont achetée avec leur première paye !" Cher Papé, chère Mamée, que de bons moments j’ai passés auprès de vous à vous écouter me raconter les histoires du village, parfois tristes, parfois drôles, mais sans jamais égratigner l’un ou l’autre de vos personnages. La plus belle histoire que vous m’ayez dite est sans conteste celle qui a suivi mon récit de ma visite à la chapelle. Vous vous êtes regardés, cherchant l’approbation dans le

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regard de l’autre, et vous vous m’avez conté une bien belle histoire dont vous étiez les héros. Marie, la mamée et Antonin, le papé, habitaient deux hameaux de la même paroisse, pas très éloignés du château. La Bonne Dame était morte depuis bien longtemps, et ses nouveaux propriétaires n’occupaient guère le château que deux ou trois semaines par an. La chapelle ne servait plus depuis des décennies, elle était fermée à clé, abandonnée. Mais on construit solide par chez nous et le temps ne semblait pas avoir de prise sur elle. Marie et Antonin s’aimaient, mais leurs deux familles étaient brouillées, à cause d’une borne délimitant leurs champs respectifs et qui avait été déplacée. L’affaire n’était pas récente, elle datait bien de trois ou quatre générations, mais la brouille résistait aux années. Un 24 décembre, les deux amoureux décidèrent de parler de leur amour, de leur désir de se marier. Les deux familles réagirent de même : non et non, sans discussions possibles. Le père de Marie dit qu’il n’était pas question qu’elle épouse ce vaurien d’Antonin ! Et si elle s’obstinait, c’était le couvent qui l’attendait ! Celui du garçon déclara qu’il refusait de marier son fils avec une moins que rien. Une "moins que rien", la jolie et si sage Marie ! Alors, la jeune fille mit sa grosse cape de bergère et quitta la maison en courant. Son père lui lança : "Va courir la campagne, ça te remettra les idées en place ! " Les deux amoureux avaient convenu de se retrouver à la croix du Faou, en cas de refus de leurs familles. Antonin l’attendait. Elle faisait pitié, la petite Marie, avec son visage couvert de larmes. Antonin l’a prise dans ses bras, a séché ses larmes de ses baisers. Puis il lui a proposé de fuir avec lui. La petite ville voisine n’était qu’à quinze kilomètres, il y avait une gare et un train qui partait tous les matins pour Clermont, puis Paris. Arrivés à destination, ils trouveraient du travail : jeunes et courageux, rien ne leur semblait impossible… sauf de se marier au pays avec la bénédiction de nos parents.

La nuit n’allait pas tarder à tomber, mais Antonin connaissait le pays comme sa poche, y compris les raccourcis, ils devraient arriver à destination sans encombre. C’était bien le diable s’ils ne trouvaient pas une grange pour passer la nuit. Ils cheminèrent une bonne heure sans encombre, la main dans la main. Jusqu’au moment où la neige commença à tomber, d’abord en petits flocons, puis de plus en plus gros et drus. Le brouillard s’était mis de la partie, et ils ne tardèrent pas à perdre leurs repères. Ils étaient perdus. Impossible de s’arrêter au risque de mourir de froid, ensevelis sous la neige. Il fallait marcher, marcher, en espérant trouver une habitation, la moindre bâtisse pouvant les abriter. Courageuse, la petite Marie, luttait bravement contre le mauvais temps. Il la serrait contre lui, ils ne faisaient plus qu’un face aux éléments. Et puis, miracle : ils aperçurent la masse sombre d’une construction. Elle devait être habitée, une petite lueur s’échappait par ce qui semblait être une fenêtre. En s’approchant, ils comprirent que c’était une chapelle, la

lumière ne brillait pas à travers un simple carreau, mais un vitrail coloré. Ils ont alors poussé la porte, timidement, car ils ne savaient pas ce qui les attendait à l’intérieur. L’édifice semblait vide, et pourtant une douce chaleur régnait à l’intérieur. La chapelle ne semblait attendre que l’assemblée des Chrétiens et l’officiant pour la messe de Noël. Les chandeliers de cuivre de l’autel luisaient, reflétant la flamme des cierges ; sur la nappe

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d’autel richement brodée trônaient deux vases garnis de houx. Pas un grain de poussière sur le sol, pas plus que sur les bancs cirés de frais attendant les fidèles. Figés par l’étrangeté du lieu ils entendirent alors une voix douce leur dire : - " Finissez d’entrer, mes enfants, fermez la porte, le froid et la neige vont entrer. Quittez vos manteaux mouillés, et venez près de moi. " Ils ont vu alors une vieille Dame assise dans

un fauteuil, près de l’autel, qui leur faisait signe de s’asseoir sur un banc, à côté d’elle. Ils ont obéi, muets de timidité. Malgré les rides, le visage de la Dame était beau, comme illuminé de l’intérieur. Ses cheveux blancs étaient coiffés en chignon, à peine dissimulés par une mantille de dentelle noire. Elle portait un chemisier de baptiste blanche, orné de petits plis verticaux et de fleurs brodées, avec un col montant retenu par un camée. Sa robe de soie grise moirée s’étalait autour d’elle. Un châle de cachemire couvrait ses épaules. Ses mains reposaient sur ses genoux. Elle ne portait pas de bague, seulement une simple alliance d’or. - " Vous fuyez, n’est-ce pas ? Mais quoi ? a-t-elle interrogé. Racontez-moi votre histoire. " Ils ne lui ont rien caché de leur amour, de leur fuite pour avoir le droit de vivre ensemble. Elle a écouté le récit, un sourire flottant sur ses lèvres. Puis elle a dit, de sa voix douce : - " Vous défendez votre amour, c’est bien. Rien n’est plus précieux que ce sentiment entre un homme et une femme. C’est un sentiment éternel, il ne s’éteint jamais. Lorsque nous nous sommes rencontrés, mon époux et moi, nous avons su tout de suite que nous étions faits l’un pour l’autre. J’étais riche, lui pas ; mes parents ont protesté, je n’en ai pas tenu compte. Comme toutes les jeunes filles, je désirais un grand mariage : robe blanche somptueuse, grandes orgues, nos familles et nos amis autour de nous en grande toilette. Finalement, nous étions seulement tous les

deux à la mairie et à l’église, avec pour seuls témoins ma femme de chambre et mon chauffeur. Dieu merci, ma fortune m’appartenait, mes parents n’avaient aucun droit de regard dessus. Mon mari a repris son travail de notaire, il avait sa fierté et ne voulait pas être entretenu par son épouse. Nous avons été tellement heureux. Au point de ne pas trop nous chagriner de notre impossibilité à avoir des enfants. Lorsque mon époux a cessé ses activités, nous sommes venus nous installer ici une grande partie de l’année. Nous avons vieilli paisiblement, toujours aussi amoureux l’un de l’autre. Nous avons quitté cette terre à une semaine d’intervalle : impossible de continuer de vivre l’un sans l’autre. Voilà mon histoire, mes enfants. Même s’il faut rompre avec vos parents, quitter notre cher pays, mariez-vous, aimez-vous. L’amour vaut tous les sacrifices. Mais pour ce soir, vous allez rester dans la chapelle, à l’abri de la tempête. Vous repartirez demain. Allongez-vous chacun sur un banc, et dormez. Ce n’est guère confortable, mais plus que reposer dans la neige. Je veillerai sur vous." Ils lui ont obéi, après s’être enveloppés dans leurs capes. Le sommeil est venu tout de suite.

Leurs parents s’étaient aperçus de leur disparition, tard dans l’après midi. Sans se concerter, chacun de leur côté, les deux pères avaient fait appel à leurs amis, pour battre la campagne et retrouver les fugitifs. Les heures passaient: la neige, le brouillard avaient transformé leur colère en angoisse. Les amis abandonnaient les recherches un à un, conscients qu’il faudrait un miracle pour retrouver les jeunes gens dans une pareille tourmente. Seuls les deux pères espéraient encore. Inévitablement, ils se rencontrèrent ;

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oubliant leurs querelles, c’est ensemble qu’ils continuèrent à chercher. Rien, toujours rien… Lorsqu’ils entendirent les cloches de leur église sonner minuit, l’un dit : - " Nous ne les retrouverons pas ce soir, nos pauvres petits ! " - " Tu as raison, répondit l’autre, nous repartirons à leur recherche demain, mais ensemble cette fois. Que Dieu fasse qu’ils aient trouvé un abri !" A leur arrivée au village, la messe de minuit n’était pas terminée. Ils entrèrent côte à côte dans l’église pour retrouver amis et parentèle. Le curé était encore en chaire. Lorsqu’il les aperçut tous les deux, il interrompit son prêche et les apostropha, les mains cramponnées au rebord de la chaire, le corps penché en avant, au risque de tomber. -" Vous osez entrer dans la maison du Seigneur, deux sans vergogne, alors que par la faute de votre haine tenace l’un pour l’autre, vous avez refusé de laisser se marier vos enfants ? Qu’à l’heure qu’il est, ils sont peut-être morts de froid, ou dévorés par les loups ? Marie et Antonin s’aiment, mais l’amour, vous ne connaissez-pas ? La rancune est bien plus importante pour vous ! J’ai bien perdu mon

temps, lorsque vous veniez au catéchisme, de vous seriner les paroles du Christ : aimez-vous les uns les autres, apprenez à pardonner. Sortez de mon église, vous y rentrerez de nouveau seulement au bras de vos enfants pour les mener à l’autel où je les marierai. Dehors ! Vous attendrez la fin de la messe sous le porche. Je souhaite que vous ayez bien froid, comme vos pauvres petits. Et que vos femmes

vous servent une soupe à la grimace en guise de réveillon ! " Ce qu’il advint, naturellement ! C’est un rayon de soleil coloré passant à travers le vitrail qui réveilla Marie et Antonin. La tempête de neige, calmée, avait fait place au soleil et au ciel bleu. A la grande surprise des amoureux, la Dame avait disparu. Le fauteuil où elle était assise était bien là, mais il était couvert de poussière. Tout le reste de la chapelle était à l’avenant : les cierges avaient disparu, la nappe d’autel ressemblait à un chiffon plein de trous, les chandeliers ne brillaient pas plus que le bois des bancs. Des araignées avaient tissé leurs toiles au plafond. Ils se sont regardés, passablement ahuris d’un tel changement. Avaient-ils rêvé ? Mais non : Marie serrait dans sa main le camée que portait la Dame. La jeunesse n’est pas loin de l’enfance, ils ont cru au merveilleux de l’histoire : la Bonne Dame était revenue sur terre pour leur offrir l’abri de sa chapelle, pour les conforter dans leur amour. A ce moment là, la porte de la chapelle s’est ouverte. Sur le seuil se tenaient les deux pères. En les voyant, les deux amoureux se sont étroitement enlacés, tremblants, mais déterminés : non, rien ni personne ne pourrait les séparer. Mais ce n’était ni la colère, ni la réprobation qui se lisaient sur le visage des pères, seulement un immense soulagement. L’un a dit: - " Enfin, nous vous avons trouvés sains et saufs. Nous avons eu si peur que vous ayez péri dans la neige ! " - " Soyez rassurés, nous ne nous opposerons plus à votre mariage. Il scellera la paix entre nos deux familles ! " Voilà l’histoire de la petite chapelle que j’aime tant. Je la crois vraie, Marie m’a montré le précieux camée de la Bonne Dame. Mes chers amis du Souffle, que durant le temps de Noël, notre sablier de la vie laisse couler un peu de cet amour dont nous avons tant besoin !

Yvette Maurin

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À PROPOS DE VELAY

-II-

Comme nous le disions plus haut, le versant méditerranéen est proche, soit directement, soit par la vallée du Rhône, ce qui explique à la fois les mouvements de populations du sud vers le nord comme par la suite les relations avec la Méditerranée déjà attestées au néolithique.

Par ailleurs, selon certains auteurs, le début du néolithique final (3800 à 2000 av. J.C.)1 et le début de la période suivante (âge des métaux) sont marqués par une forte montée démographique 2 amenant quelques chercheurs à deux conclusions en apparence opposées : d’une part, la détermination de grandes zones culturelles sédentaires ; d’autre part et parallèlement à ces zones, des déplacements apparentés à un nomadisme à grandes distances sans que l’on puisse affirmer actuellement que ces migrations aient été motivées, par exemple, par une activité commerciale naissante des premiers produits métalliques 3.

À ces populations est en outre associée le mégalithisme. Leurs nombreux vestiges non seule-ment dans le département, mais aussi largement hors de notre domaine d’observation, montrent combien il serait imprudent d’y voir l’expression particulière d’un groupe humain répondant à une civilisation localisée, voire à une ethnie identifiable, un phylum génétique conduisant à un vellave type, une race vellave pour peu qu’une telle définition soit possible et tolérable ; nous avons heureusement dépassé l’époque 4 où l’« anthropologue » mesurait sous tous les angles les populations d’Afrique ou du Massif central 5. Il est par conséquent préférable de parler de l’expansion d’un modèle culturel.

En somme, des périodes antérieures, on doit retenir que des voies auxquelles se sont plus ou moins superposées les drailles, ont établi des circuits trans-

La recherche archéologique en Haute-Loire, CNDP-CRDP- Cl.-Fd. –1983

mis de générations en générations à des hommes parmi lesquels, au final, certains se sont installés le long des cours d’eau où ils trouvaient de quoi se nourrir tant sur le plan halieutique que cynégétique ; le climat, particulièrement au sortir de la partie haute des gorges de l’Allier et de la Loire, fournissait d’ailleurs une végétation variée offrant à nos prédécesseurs un vaste et riche espace de cueillette pré-cédant une période de nomadisation contenue dans ces contrées autour de moins 6000 / 5000 av. J.C.

Il existe donc depuis des millénaires des voies naturelles de circulation de populations diverses le long de nos cours d’eau ou parallèlement à ceux-ci.

Enfin, il est difficile de parler, pour l’heure, de sédentarisation affirmée avant 4000 ans B.C.���

��������������������������������������������������������1 — Cette époque couvre ce qu’on appelle la civilisation « chasséenne » opérante en fait sur une grande partie

de la France et pays limitrophes. 2 — « Dans l’état actuel de nos recherches, nous ne pouvons que donner quelques dates obtenues au C 14 […] :

Salettes (céramiques), -2700 av. J.-C. ; La Baume de Solignac, pointe de flèche à face plane, -2200 av. J.C. et céramique chalcolithique, -1700 av. J.-C. Ces datations […] ne sont données qu’à titre indicatif. Il semble que l’expansion néolithique dans notre région, dont cette note n’est qu’un témoin parmi d’autres, se dessine nettement du milieu du III e millénaire au début du IIe. Il reste à en préciser les courants.» Une station néolithique dans la Région de Borne, -1972, BHHL-48, p. 71.

Cette période située entre le Néolithique moyen et final a trouvé une confirmation dans l’exploration d’autres stations préhistoriques (par ex. le site de Ceyssac / Espaly-St.-Marcel ; cf. BHHL-48, 1982, p. 100). Le musée Crozatier du Puy possède une belle pointe en silex de typologie néolithique recueillie sur le Mont Brunelet, non loin du sommet, on observe des débris de silex et de céramiques, peu datables, néolithiques ou protohistoriques. Cf. GOUNOT (Roger), Archéologie gallo-romaine en Haute-Loire[CHL - 1989].

3 — Cf. J.-L. VORUZ, article Les Chronologies néolithiques dans le Bassin rhodanien dans Chronologies néolithiques, Éd° Société Préhistorique Rhodanienne, Ambérieu-en-Bugey, 1995, p. 388 sq.

4 — Pas complètement cependant. Il suffit de lire comment P. BEC donne sa définition du nord-occitan (La Langue Occittane, Que sais-je nº 1059, 1967, p. 37 sq.) en insistant sur des différences de races opposant d’un côté les populations d’origine brachycéphales (altaïques) qui expliqueraient les palatisations, aux popu-lations dolichocéphales (pyrénéo-méditérranénnes) qui les ignoreraient. C’était oublier que l’évolution phonétique est universelle et touche diachroniquement toutes les langues.

5 — Voir à ce sujet la notice fournie par le commandant Victor PARRON (1823-1870) concernant la Physionomie générale des Vellauniens (ASA, t. 28, 1866-1867, p. 387). Nous donnons en annexe un extrait de cette notice.

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— À cette période, la pression démographique est assez importante pour développer un élevage moins nomade, prélude à une véritable agriculture outillée. Pour certains, la poussée démographique serait due au contraire à une nourriture plus abondante fournie par des modes agriculturaux plus effi-caces. Quoi qu’il en soit, il faut en retenir que nos territoires n’étaient pas vides d’hommes et que des échanges se sont produits et développés tout au long de la dernière période néolithique.

Dans ce contexte, les rapports avec le monde méditerranéen sont les plus importants : ils expliquent à l’évidence le développement et le maintien des différentes civilisations dans cet espace géogra-phique, et parmi ces civilisations, ce que sera l’ensemble occitan.

La toponymie atteste parfois de ces temps reculés. Dans son ouvrage Toponymie du Velay, Jean Arsac révèle plus de 200 thèmes préindoeuropéens entrant dans la composition de plus d’un millier de noms de lieux. Comparativement, les thèmes celtiques (gaulois) sont au nombre de trente-deux pour quasiment autant de toponymes (mais très souvent doublonnés). Il ne faut pas s’en étonner puisque les populations préindoeuropéennes étaient déjà présentes depuis plusieurs milliers d’années.

Citons quelques uns de ces noms de lieux : Arzon, Bolène, Banne, Bar, Chamalières, Chalm, Charentus, Chirel, Corneille, Ranc, Suc, etc.

— Une grande partie du Massif central conserve, ainsi que nous le laissions entendre, des témoignages du néolithique « récent » (Chasséen) tels que les très nombreux menhirs et dolmens. Le Velay n’échappe pas à ce constat 6 ce qui confirme un établissement humain très ancien et permanent bien longtemps avant l’arrivée des premiers Celtes, de passage, vers moins 500 et bien évidemment avant la venue et la sédentarisation de la seconde vague autour de moins 200 en ce qui concerne globalement la France, probablement plus tard pour ce qui est de notre secteur.

Les peuples de cette dernière vague sont d’abord des agriculteurs et il n’y avait pas de raisons particulières pour qu’ils aient eu envie de s’établir de préférence dans les zones ingrates et froides qui caractérisent notre région d’altitude d’autant qu’il y avait déjà là des populations installées, comme nous l’avons vu, depuis des millénaires qui devaient bien vouloir protéger les prairies, leurs territoires de chasse, leur espace d’exploitation du sol, quand bien même les nouveaux venus aient été mieux armés 7 et mieux outillés.

En revanche, on aurait tort de ne pas penser que des échanges fructueux de techniques ne se se-raient pas produits ; enfin, rappelons-le, les voies de communications ont facilité, à l’évidence, l’éta-blissement de ces nouveaux arrivants.

Période celte

« Les Celtes se situent à l’intersection de la Préhistoire et de l’Histoire » affirme Régine Pernoud 8.Cela ne signifie pas que dans notre espace local leur arrivée ait complètement couvert la présence humaine antérieure assez forte pour avoir laissé dans la toponymie quelques traces jusqu’à nos jours comme nous venons de le voir.

Certes, les témoignages dispersés en Europe montrent que les Celtes s’y sont partout répandus, depuis « les montagnes de Bohême jusqu’aux rives du Tage, depuis les Alpes jusqu’à la Baltique et que leur présence dans cette Europe est certaine, à cet âge qu’on appelle le premier âge de fer ou époque de Hallstatt, soit environ l’an mille avant notre ère » 9. Parallèlement à cette dispersion, les Celtes, en somme nomades à ce stade de leur histoire, ne formaient pas en fin de compte un peuple attaché à une terre. De fait, ils ne constituaient point d’États mais des groupes plus ou moins im-portants, indépendants les uns des autres, néanmoins unis par la religion. On a fait de ce constat, une caractéristique mentale des Gaulois et dans le projet d’une « race » commune aux Français, une sorte d’estampille héréditaire. Non seulement, affirmer aujoud’hui que les Français prennent racine d’un même peuple est une absurdité, mais en plus ces Celtes ont occupé une très grande partie de l’Europe.

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!6 — PHILIBERT (Myriam), avec prudence en dénombre 43 ; cf. Bull. hist. 1977, t. LIII, p. 36. Selon Jean ARSAC, on

compterait au total, en Velay, 175 mégalithes dont 11 dolmens, 71 menhirs, 8 trilithes (ou enceintes circulaires) ; cf. Bull. hist. 1980, t. LII, p. 12.

7 — « Les Celtes du second âge de Fer ont rapidement conquis un très vaste territoire, grâce à la supériorité de leur armement et peut-être aussi à la qualité de leur organisation sociale. La rapidité de leur expansion au IVe siècle av. J.C. permet de supposer la rémanence de disparités locales, culturelles ou ethniques. […]L’Italie du nord a été le carrefour de plusieurs courants des migrations celtiques. L’extension géographique[à partir] des Gaulois vers la Haute-Provence, le Languedoc, l’Aquitaine, est aussi récente que celle qui a eu lieu dans la Plaine du Pô (IVe - IIIe siècle av. J.-C.) » LAMBERT (P.-Y.), La Langue Gauloise, 1997, p. 9.

8 — Régine PERNOUD Les Gaulois, Le Seuil, 1979, p. 19.9 — Régine PERNOUD Les Gaulois, Le Seuil, 1979, p. 21.

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Les expéditions de pillage des Celtes contre Rome (387 av. J.C.) puis contre Delphes (278) n’ont eu, au final, comme influence que l’effroi que ces peuples guerriers inspirèrent aux autres. Cependant, les Gaulois établiront l’empire des Galates 10 en Asie, avec lesquels on doit encore compter au premier siècle de notre ère. À l’autre bout du monde ancien, l’Irlande conserve les plus nombreux et les mieux conservés des vestiges d’une civilisation celtique dont on peut dire, comme du reste les autres civilisations, qu’elle a continué de se différencier de son premier état tout en se prolongeant jusque dans le Moyen-Âge. Une partie — qui s’ajoutera à l’apport romain et byzantin — de cette culture passera dans l’art roman lorsque les moines d’Irlande 11 se feront les acteurs de la seconde christia-nisation de l’Europe occidentale.

Tout pourrait cela donner une impression de puissance et de permanence, et l’histoire des Gaulois en Gaule, ne manque pas de témoignages, particulièrement dans la moitié nord du pays ; néanmoins, leur quantité, pour le moment, ne fournit pas assez de certitudes concernant les dates de leur établissement en Velay, leurs rapports avec les populations autochtones, et autres éléments permettant d’apprécier plus nettement le contenu de la civilisation qu’ils apportaient. En fait, cette puissance qu’on leur attribue aujourd’hui est apparente, ayant été surtout entretenue en France comme outil identitaire après la défaite de 1870 face à la Prusse 12.

Pour ce qui regarde notre département, il n’y a pas eu jusqu’à présent une grande quantité de découvertes qui montreraient une forte implantation celtique comme il y en a eu ailleurs en France ou dans quelques endroits d’Europe (Bavière, ex-Tchécoslovaquie). Rappelons que la période de la Tène 13 est celle de la grande expansion celte en Europe. Souvenons-nous également qu’en dehors des expéditions de saccage (Tène I) qui ne pouvaient être dirigées que vers les cités populeuses et riches, les incursions celtiques furent sans conséquences culturelles à ce moment-là ; la pénétration de la Tène II et III sont plus pacifiques : il s’agit en fait de déplacements de populations agricoles à la recherche de meilleures terres ou plus simplement d’une sorte d’essaimage consécutif à la pression démographique interne. Cela sera encore manifeste au moment où César pénètre en Gaule.

Par ailleurs, ces hommes, devenus essentiellement agriculteurs, n’avaient pas intérêt à choisir denouvelles terres moins favorables que celles qu’ils quittaient.

Ainsi, les zones montagneuses du Massif central avec leurs mille mètres d’altitude moyenne n’offraient pas le meilleur terrain d’exploitation à des peuples habitués d’abord aux plaines 14. D’autre part, en se limitant à l’observation des faits dans notre secteur, le territoire était précédemment et largement occupé par des populations d’éleveurs-cultivateurs qui n’avaient pas forcément envie d’ac-cueillir ces nouveaux arrivants bien que l’on puisse conjecturer que les nombreuses voies de com-

!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!10 — L’arrivée des Gaulois en Syrie n’est pas volontaire : en 278, le roi Nicomède fait appel aux troupes

gauloises qui se trouvaient alors stationnées en Grèce. Mais, deux ans plus tard, l’armée syrienne défait au moyen de ses éléphants la cavalerie gauloise qui reste cependant puissante ; elle s’établit alors sur place. La culture guerrière de ces groupes les fait apprécier dans tous les conflits. On trouvera donc des mercenaires gaulois auprès des égyptiens, des perses, et bien entendu dans les armées romaines. Ce sont eux qui les premiers participeront à la destruction de Carthage aux côtés des redoutables Garamentes. Cette présence méditerranéenne explique que par le biais des armées se soient introduits dans les différentes langues des termes celtiques. Le bas latin en transmettra dans les langues romanes d’ailleurs beaucoup plus de cette façon que par l’influence supposée uniforme d’un fort substrat celtique.

11 — Les anachorètes d’Égypte, interdits du fait de leur trop grand nombre et de la menace qu’ils étaient en fait arrivés à faire peser sur l’économie voire sur la démographie, s’étaient réfugiés pour quelques uns d’entre eux, en Irlande. Ils seront suivis sur cette terre protégée par la mer, des moines fuyant les invasions « barbares ». Les uns comme les autres amenèrent des éléments culturels variés qui s’ introduiront dans la formation de la culture romane ; on explique ainsi cette impression d’unité qu’offre, par exemple, l’art roman à partir duquel se reconstitue sous un autre angle la culture latine.

12 — Ce n’est pas tout à fait nouveau. Dès le XVIe siècle, comme le souligne Pierre PINON dans La Gaule retrouvée (ouvrage qui en fait décrit essentiellement la civilisation galloromaine sur laquelle nous sommes mieux renseignés) [Découvertes/ Archéologie. Gallimard, n° 103] : « …les érudits se penchent sur les origines des pouvoirs : celui du roi d’abord, si discuté jusqu’à la Fronde, celui des « bonnes villes », si rassurant en ces périodes de troubles religieux. C’est dans cette quête des origines qu’ils rencontrent sans les chercher, les Gaulois.» […] Dans le dessein de magnifier la France, ils cherchent à travers les Gaulois la naissance de leur nation. […] Se réclamer des Gaulois, c’est pour les Français remonter au-delà des Francs et des Romains, plonger dans un passé mythique dont ils ne peuvent ressortir que grands. »

13 — Rappel ; Tène : -500, -250, Tène I ; -250, -100, Tène II ; -100, conquête romaine, Tène III ;14 — Il est intéressant de noter — sans vouloir faire dire plus que nécessaire à l’étymologie — que le latin

CAMPUS, signifiait initialement « terrain plat, plaine » ; ce terme a pris le sens plus général de « champ »parce que, rappelle A. MEILLET (DELL), la culture se faisait le plus souvent dans la plaine.

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munications existantes (héritières des drailles) ont tout de même favorisé l’établissement de certains d’entre eux, particulièrement aux points de rencontres et d’échanges déjà établis.

Ce phénomène, assez évident, s’est surtout cristallisé un peu avant la Guerre des Gaules. À ce sujet, Pierre Bec s’exprime ainsi :

« La vague celtique, d’une manière générale et contrairement à ce qui s’est produit dans le Nord [de la France] ne semble pas avoir été profonde en pays d’oc, surtout dans le sud, les Gaulois n’y ayant exercé qu’une influence surtout politique.»

C’est cette influence qui organise les civitas dont parle César.

La civitas présidera par la suite au fondement des évêchés, première réelle reconstruction admi-nistrative après les bouleversements apportés à l’empire romain par les invasions de l’est. La civitass’est en quelque sorte maintenue au cours de l’histoire sans trop de modifications jusqu’à nos jours, à travers les structures administratives épiscopales.

L’archéologie en Velay ne révèle pas grand chose de la présence des Gaulois, présence courte compara-tivement, plus tard, à celle des Wisigoths par exemple dans des situations comparables, même si, de fait, la recherche est pauvre en ce sens dans notre département.

Notons également que les oppida gaulois, si nom-breux dans la moitié nord de la France, évitent le Massif central.

La carte ci-contre en apporte une confirmation au moment de la guerre des Gaules. La toponymie auto-rise néanmoins quelques hypothèses de fixation.

Les Oppida mentionnées par César (< Stephen Ficht)> L’Archéologue n°53 fév. 2002

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En résumé, s’il est certain que le XIXe siècle laissait une place trop grande à la civilisation latine pour expliquer la nôtre, il est tout aussi certain qu’à la fin de ce siècle jusqu’au XXe siècle, particulièrement après la guerre de 1870 contre les Prussiens, on a voulu voir partout des gaulois et une influence très difficile à démontrer dans la prétendue importance des Celtes dans la moitié sud de notre pays. On oublie qu’avant les Celtes d’autres peuples occupaient la Gaule, particulièrement en zone de montagne. On oublie que les Celtes occupaient aussi une grande partie de l’Europe de l’est ; on oublie aussi que la Bretagne reçoit l’essentiel de sa « celtitude » actuelle après l’émigration des gallois vers le VIIe

siècle. Et il y a encore des publications qui attribuent aux Gaulois les mégalithes dont l’usage est abandonné environ mille ans avant l’arrivée des premiers Celtes.

Il faut donc être méfiant dès que quelqu’un brandit son bouclier gaulois et son druide : il y a au mieux ignorance, au pire manipulation, oh pardon, imbécilité.

Ce qui est permanent dans l’histoire, ce sont les grandes directions des voies de communication.

Nous y reviendrons, car c’est là que se situe notre propre avenir en Velay. H. Quesnel

Dolmen de Rougeac

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Cet apologue est ainsi raconté par Guillaume Tardif (1436 / 40 - 1492), qui traduisit librement Laurent Valla (1407 – 1457) qui lui, rapportait Ésope. Je fais de même en passant à l’occitan. Je ne suis pas le premier d’ailleurs : Jean de Lafontaine le fit aussi en français ; on peut donc pour la traduction se reporter au livre II , fable 18.

« Un jòine jovencèl, bien crane, aviát en son ostal, entre d’autras chausas, una bien genta e plasenta chata.

Aquelh jovencèl, en eisaminar la belèsa d’aquela chata, se disiát : « M’agradariá ben d’aveir una tan genta femna com aquela genta chata ». Comas èra end aqueste pensament e que la druja lo menava, faguèt una prièira a la divessa Vènus, maire de Cupido, aquelh dieu daus Amors, per que li plagie de mudar sa chatona end una agradabla pucèla per qu’agie solaç embés èla e que, per la fin, pogie assapar son arguèlh.

La divessa aguèt piatat de z-èlh e chamgèt aquela chata end una pucèla ben ananta e ben formada.

Sobre aquò lo jovencèl, plen delh fuòc de son vanç e de con-cupiscéncia a causa de l’agreança de la jòina pucèla novelament transformada, prenguèt la dita pucèla, e la menèt en sa chambra per son plaser.

Vènus que voliá saupre se la dita chata aviá chamjat sos biais de viure e s’aviá gardat sas condicions d’endavants, faguèt s’eschapar una rata elh mèi de la chambra d-ont lo jovencèl e pucèla s’èran coijats.

Tot ’m un còp, la pucèla, que se soventava pus de sa mudacion pas mais que de son amic, se levèt delh leit e se prenguèt de chaçar la rata, en esperar de se la manjar, se per fortuna l'aviá poduda prene.

Aquí dessobre, la dita divessa Vènus s’avisèt de çò que la dita pu

cèla aviá pas gis chamjat nemais perdut sa natura felina, bestiala e raubarèla. Adóncas, tota inquiatada, la tornèt botar en sa promèira forma de chata, puèissa qu’aviá pas sauput arrapar las proprietats de la natura daus òmes amais d’aquelas d'una femna rasonabla ».

Guilhaume Tardiu (1492)

Laurent Valla seguèt lo promièr, elh « Rinascimento », que parlèt de filològia. Mès, pas qu’aquò. Seguèt sabent en grec, latin, filosòfia e sabe pas encara quant de veaas.

Guilhaume Tardiu, naissiguèt vas lo Puèi-de-Velay alentorn 1436 ~ 1440 ; moriguèt gaire après 1492. Es coneissut coma i-un daus promièrs umanistas francés.

Dans la dispute entre ceux qui se réclament du « patois » de leurs parents et ceux qui se réclament de l’occitan, j’ai enfin percé une différence de taille. Se référer à ses parents est bien insuffisant pour connaître véritablement une langue. Refuser de reconnaître la richesse de la langue dans les parlers voisins du sien, se limiter à la référence familiale ou d’un seul hameau, au mieux d’un canton, est bien stupide : il faut aller au-delà de ses parents, se souvenir des grands parents qui eux aussi se référaient à leurs anciens et ayeux à une époque où le français ne polluait pas ou peu la langue. Travailler à la connaissance véritable de la langue d’oc en écoutant les plus anciens quand c’est possible, en recherchant la richesse des mots et des formes grammaticales chez ces personnes-là et chez ceux qui ont pu écrire — peu importe l’orthographie —, est un acte de noble conservation et de sauvetage de la langue. Respecter ceux qui nous ont précédés dans la langue, travailler, voire trimer à retrouver les bonnes formes, écouter ceux qui ont accompli un vrai travail de recherche, d’écoute, de restitution, avoir la volonté de diffuser les résultats obtenus, accepter les critiques constructives, faire l’effort d’écrire correctement selon des règles qu’il faut évidemment apprendre, voilà ce qu’est l’action en faveur de l’occitan tel qu’il a été parlé véritablement en Velay, pour ne parler que de ce petit pays. En résumé, agir pour l’occitan est le contraire de la médiocrité. J’ai cette orgueilleuse prétention de ne pas choisir la facilité et de vouloir partager dans mes traductions le résultat de mon travail. À prendre ou à délaisser. Je suis bien sûr disponible.

Mots anciens ou oubliés jovencèl (jouvenceau) ; belèsa, beutat, agreança (beauté) ; druja (vigueur, y compris la v. ; sexuelle) ; arguèlh (orgueuil, mais aussi comme druja) ; mudar, mudacion (changer, changement) ; ananta (qui a belle allure) ; inquiatat /intyatat/ (en colère).| per que li plagie de mudar (pour qu’il lui plaise de changer).�

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