De Falla / Turina - opera-orchestre-montpellier.fr · De Falla / Turina Lawrence Foster direction...

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De Falla / Turina Lawrence Foster Lawrence Foster Lawrence Foster Lawrence Foster direction Lucia Duchonova Lucia Duchonova Lucia Duchonova Lucia Duchonova mezzo-soprano Emmanuel Christien Emmanuel Christien Emmanuel Christien Emmanuel Christien piano Jardin del Pirata (Mallorca) - Santiago Rusiñol Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique Vendredi 20 janvier 2 Vendredi 20 janvier 2 Vendredi 20 janvier 2 Vendredi 20 janvier 20h30 0h30 0h30 0h30 Opéra Berlioz / Le Corum Opéra Berlioz / Le Corum Opéra Berlioz / Le Corum Opéra Berlioz / Le Corum Cahier pédagogique Cahier pédagogique Cahier pédagogique Cahier pédagogique Saison 2011-2012 Réalisé par Liane Limon, stagiaire. Avec l’aimable participation de Monique Morestin et Yvan Nommick. Service Jeune Public et Actions Culturelles - 04 67 600 281 - www.opera-orchestre-montpellier.fr

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De Falla / Turina Lawrence FosterLawrence FosterLawrence FosterLawrence Foster direction

Lucia Duchonova Lucia Duchonova Lucia Duchonova Lucia Duchonova mezzo-soprano Emmanuel ChristienEmmanuel ChristienEmmanuel ChristienEmmanuel Christien piano

Jardin del Pirata (Mallorca) - Santiago Rusiñol Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

Vendredi 20 janvier 2Vendredi 20 janvier 2Vendredi 20 janvier 2Vendredi 20 janvier 20h300h300h300h30 Opéra Berlioz / Le CorumOpéra Berlioz / Le CorumOpéra Berlioz / Le CorumOpéra Berlioz / Le Corum

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ProgrammeProgrammeProgrammeProgramme

De Falla / TurinaDe Falla / TurinaDe Falla / TurinaDe Falla / Turina

Manuel de FallaManuel de FallaManuel de FallaManuel de Falla Nuits dans les jardins d’Espagne Joaquín TurinaJoaquín TurinaJoaquín TurinaJoaquín Turina Poema en forma de canciones opus 19 Triptico opus 45 : Farruca Saeta en forma de Salve a la Virgen de la Esperanza opus 60

Manuel de FallaManuel de FallaManuel de FallaManuel de Falla Le Tricorne

Lawrence FosterLawrence FosterLawrence FosterLawrence Foster direction Lucia Duchonova Lucia Duchonova Lucia Duchonova Lucia Duchonova mezzo-soprano Emmanuel ChristienEmmanuel ChristienEmmanuel ChristienEmmanuel Christien piano Orchestre national Montpellier Languedoc-Roussillon

Nuits dans les jarNuits dans les jarNuits dans les jarNuits dans les jardins d’dins d’dins d’dins d’EspagneEspagneEspagneEspagne

« Le but des Nuits dans les jardins d’Espagne est d’évoquer des lieux, des sensations et des sentiments. Les thèmes employés sont basés sur la musique populaire d’Andalousie. La musique ne prétend pas être descriptive – elle est simplement expressive. Mais quelque chose de plus que les sonorités des danses et des festivals ont inspiré ces “évocations en sons” car la mélancolie et le mystère y jouent réellement un rôle ». Manuel de Falla

« Impressions symphoniques », tel est le nom que l’on donne à ces pièces pour piano et orchestre. Il s’agissait à l’origine de trois nocturnes pour piano composés en 1909, mais sur l’insistance du pianiste Ricardo Viñes, elles devinrent une œuvre pour piano et orchestre. Ecrites entre 1911 et 1915, elles furent créées à Madrid au Teatro Real, le 9 avril 1916 sous la direction d'Enrique Fernandez Arbos (son commanditeur).

La partition est empreinte de l’influence française, s’inscrit dans la postérité immédiate de pièces françaises telles qu’Iberia de Debussy ou le « Nocturne » de la Rhapsodie Espagnole de Ravel. Les Nuits ne sont pas un concerto pour piano. Il s’agit plutôt d’une succession de tableaux dont l’unité est assurée par l’usage constant de la rythmique des danses andalouses et par les dessins mélodiques développés à travers des variations.1 La partie soliste, l’écriture pianistique s’inspire largement de celle de la guitare, elle est élaborée, brillante et éloquente, mais rarement dominante. À la manière d’un promeneur plongé dans ses rêves, le soliste accompagne un orchestre qui plante un décor luxuriant, nocturne et poétique, diffusant des parfums enivrants. La partition d’orchestre est exubérante et crée un halo sonore autour du soliste. En revanche, ces pièces ne sont pas un concerto traditionnel en trois mouvements, mais plutôt un poème symphonique en trois moments, décrivant trois jardins :

1. En el Generalife Le titre de cette première pièce fait référence au nom de la résidence d’été des rois maures à Grenade, pourvue d’un superbe jardin en terrasses. Le climat nocturne est instauré par le premier thème à l’orchestre et ensuite au piano, puis opposé à un second thème qui s’impose. La pièce se conclut dans la nuance pianissimo.

2. Danza lejana Celle-ci est dans la même atmosphère d’enchantement nocturne avec, par bouffées soudaines, des envolées rythmiques et un jeu remarquable des vents en écho sur les cordes.

3. En los jardines de la sierra de Córdoba Ce mouvement s’enchaîne au précédent. Il est en forme de rondo2 à refrain. Inspiré directement des « zambras »3 gitanes, l’orchestre rayonne dans les feux d’une fête de nuit. Les percussions opposent des sonorités éclatantes (triangle, cymbales) aux sonorités sourdes des deux précédents mouvements.

C’est ici un exemple très représentatif de l’influence andalouse sur la musique de Falla. On ressent une touche ravélienne et une grande affinité avec la musique pouvant inscrire l’œuvre dans la mouvance impressionniste française, mais on voit aussi une originalité en ce qui concerne la technique pianistique. Celle-ci coule naturellement sans effort ni effet dans le déroulement orchestral mouvant, ce qui donne une impression d’improvisation constante.

La mélancolique beauté, la lumière crépusculaire et le mystère qui émanent de quelques-unes de ces peintures de jardins durent impressionner fortement Falla et exciter son imagination. On peut situer en 1909 le début de la gestation des Nuits dans les jardins d’Espagne ou du moins le projet de les composer.4

1 Yvan NommickYvan NommickYvan NommickYvan Nommick extrait de livret du disque Manuel de Falla dir. Josep Pons, piano Hosep Colom – Harmonia mundi France 901606 2 Le Rondo est une forme musicale basée sur l’alternance de couplets (B, C…) et d'un refrain (A) sous forme A/B/A/C/A/D/A/coda 3 Le zambra est un chant espagnol accompagné à la guitare sur un rythme à 2 ou 4 temps, qui est exécuté lors des fêtes zambra célébrées dans le sud

du pays.

Le TricorneLe TricorneLe TricorneLe Tricorne

Le Tricorne ou El sombrero de tres picos (titre original) est un ballet en un acte composé par Manuel de Falla, sur le livret de Gregorio Martinez, chorégraphié par Léonide Massine, et scénographié Pablo Picasso (décors, costumes et rideau). Créé par les Ballets Russes de Serge de Diaghilev le 22 juin 1919 à l'Alhambra de Londres, il a pour interprètes principaux Léonide Massine, Tamara Karsavina et Léon Wojcikowski. La direction d'orchestre était confiée à Ernest Ansermet. Inspiré de la nouvelle homonyme de Pedro Antonio de Alarcon (1874), le ballet est une commande de Diaghilev à de Falla, qui avait déjà composé une pantomime sur le sujet, Le Corrégidor et la meunière (1917). Il acheva la composition du Corrégidor mais mit deux ans de plus à retravailler la partition pour en faire le ballet Le Tricorne. Les modifications se portent principalement sur l’orchestration et la structure de la pièce. L’effectif du Tricorne est beaucoup plus grand et exige une formation symphonique, de plus, Falla y a ajouté une fanfare en guise d’introduction pour permettre aux spectateurs d’apprécier le splendide rideau de Picasso.

L'œuvre allie classicisme, modernisme et caractère espagnol, tant dans la musique, les décors que la chorégraphie. De nombreux passages sont considérés comme des morceaux d'anthologie, dont la jota5 finale, qui est encore un morceau de bravoure dans les concours chorégraphiques actuels. Tout au long du

ballet Falla utilise la musique folklorique andalouse. Les personnages sont caractérisés par des thèmes et des timbres spécifiques. Pour le Meunier, le cor anglais joue un thème tiré de la première des Sept chansons, Le Drap Mauresque, d’origine muricienne ; la Meunière quant à elle, est identifiée par un thème de jota ; le Corrégidor, lui, est annoncé par le basson qui met en relief son caractère grotesque. Falla fait une citation caricaturale du motif initial (« motif du destin ») de la Cinquième Symphonie de Beethoven jouée par les cors avec la sourdine représente les coups frappés à la porte par les Alguazils venus arrêter le Meunier.6

Livret

Suite n°1 : Après une courte fanfare, le rideau se lève révélant un moulin en Andalousie. Le meunier essaie d’apprendre à un merle comment dire l'heure. Il demande à l’oiseau de chanter deux fois mais il chante trois fois. Agacé, le meunier gronde l'oiseau et lui dit d'essayer à nouveau. L'oiseau gazouille maintenant quatre fois. Le meunier se met une fois encore en colère contre l'oiseau et sa femme lui offre une grappe de raisin. L'oiseau prend la grappe et gazouille à deux reprises. Le meunier et sa femme se mettent à rire avant de continuer leur travail. Bientôt, le magistrat, sa femme et leur garde du corps passent, lors de leur promenade quotidienne. La procession passe et le couple retourne à son travail. On entend revenir le coquet, mais lubrique, magistrat. Le meunier propose à sa femme de se cacher pour jouer un tour au magistrat. Le meunier se cache et le magistrat voit sa femme danser. Après sa danse, elle lui offre une grappe de raisin. Lorsque le magistrat prend les raisins, la femme du meunier s'enfuit et le magistrat lui court après. Finalement, il l'attrape et le meunier saute d'un buisson avec un bâton. Le meunier chasse le magistrat puis lui et sa femme poursuivent leur labeur.

Suite n°2 : Cette nuit-là, des invités sont chez le meunier. Celui-ci danse pour les divertir. Mais il est interrompu par le garde du corps du magistrat qui est venu pour l'arrêter sur de fausses accusations. Le meunier ayant été enlevé, les invités partent un par un. La femme du meunier va dormir alors que le magistrat est en route vers le moulin. En allant vers la porte, le magistrat trébuche et tombe dans la rivière ce qui réveille la femme du meunier qui décide de s'enfuir. Le magistrat se déshabille, étend ses vêtements sur un arbre et s'endort dans le lit du meunier. Le meunier s’échappe de prison et une fois rentré chez lui, il voit le magistrat dans son lit. Le meunier pense que le magistrat veut être avec sa femme et, pour se venger, décide de lui voler ses vêtements afin de se faire passer pour lui et séduire la femme de celui ci. Le meunier part, habillé comme le magistrat. Le magistrat se réveille, sort et voit que ses vêtements ont été volés, il s'habille donc avec les vêtements du meunier. Le garde du corps vient et voit le magistrat habillé comme le meunier et va l'arrêter. La femme du meunier voit le garde du corps combattre avec ce qui ressemble à son mari et se joint à la lutte. Le meunier revient et voit sa femme dans la lutte et s’y mêle pour la protéger. Le magistrat explique toute l'histoire et le ballet se clos avec les invités du meunier jetant le magistrat en l’air dans une couverture.

4 Yvan NommickYvan NommickYvan NommickYvan Nommick extrait de livret du disque Manuel de Falla dir. Josep Pons, piano Hosep Colom – Harmonia mundi France 901606 5 La jota est une danse traditionnelle espagnole répandue à peu près partout dans ce pays. 6 YYYYvvvvaaaannnn NNNNoooommmmmmmmiiiicccckkkk idem note 4

Manuel de FallaManuel de FallaManuel de FallaManuel de Falla

Manuel de Falla est né à Cadix en 1876. Andalou par son père et catalan par sa mère, il est le digne représentant de la musique espagnole de son époque. Dans sa jeunesse, Manuel de Falla apprend le piano et la composition. Par la suite, il étudie au conservatoire de Madrid et compose quelques « zarzuelas » (petites saynètes musicales). C’est à Madrid qu’il découvre le fameux musicien Felipe Pedrell et en devient l'un des plus fervents disciples. Après trois années d'études chez Pedrell, il s'installe à Barcelone, où divers concours retiennent son attention. En 1905, il remporte un premier prix de piano et le Prix de la Real Academia de Bellas Artes de Madrid avec son opéra La Vie brève.

Cela lui permet de monter à Paris, où il vit de 1907 à 1914 une existence difficile mais passionnante, fréquentant Debussy, Ravel, Dukas et Albéniz. Ce furent des années décisives pour le mûrissement de son art mais dont la véritable moisson créatrice ne fut récoltée qu'au lendemain de son retour en Espagne. Falla subit leurs influences sans toutefois abandonner son empreinte espagnole.

Il revient en Espagne et écrit la première version de l'Amour sorcier en 1915 et termine ses Nuits dans les

jardins d'Espagne (1916). Puis en 1917, il crée le Tricorne qui eut beaucoup de succès à Londres deux ans plus tard par les Ballets russes de Serge Diaghilev. Il vit à Madrid jusqu'en 1920, puis se retire à Grenade, où il mène une vie de plus en plus érémitique, assombrie par une santé précaire. Le rythme de sa création se ralentit encore : sa dernière œuvre achevée importante, le bref Concerto pour clavecin de 1923-1926, exigea trois années de labeur acharné. Il entreprit ensuite son œuvre la plus vaste et la plus ambitieuse, l'oratorio l’Atlantide, demeuré inachevé au terme de vingt ans d'efforts et complété d'après ses nombreuses esquisses par Ernesto Halffter Escriche. Suite à l'arrivée de Franco au pouvoir en 1939, le compositeur quitte l'Espagne pour l'Argentine où il vivra en solitaire jusqu'à sa mort dans la petite localité d'Alta Gracia.

Falla est un représentant éminent de la « seconde vague nationaliste » des compositeurs européens, celle qui trouva en l'exemple de Debussy la clef de la libération de l'hégémonie germanique.7

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7 YYYYvvvvaaaannnn NNNNoooommmmmmmmiiiicccckkkk

Jardins d’Espagne, entre musique et peintureJardins d’Espagne, entre musique et peintureJardins d’Espagne, entre musique et peintureJardins d’Espagne, entre musique et peinture Comme l’affirme le chercheur Yvan Nommick « Les Jardins d’Espanya de Rusiñol nous semblent être le point

de départ le plus probable du projet d’écrire les Noches en los Jardines de España. »8. La relation spirituelle entre ces deux artistes est prouvée par la lettre de Falla à sa famille du 13 Janvier 1909 dans laquelle le compositeur demande qu’on lui envoie à Paris, des reproductions des Jardins de Espanya. Falla admirait donc la peinture du peintre catalan, en particulier ses tableaux représentant les jardins de l’Alhambra et du Généralife.

Pour ce qui est de Rusiñol, c’est en 1892 que le thème des jardins s’impose dans ses peintures. Inspiré par un voyage à Grenade et la découverte des jardins de Majorque et de Castille, la ville d’Aranjuez devient son lieu de prédilection. Il peint aussi des jardins abandonnés qui dévoilent un caractère hors du temps et à la recherche du repos absolu. C’est d’ailleurs avec ce thème des jardins que Rusiñol lança la grande mode des tableaux de paysages verdoyants de l’Alhambra. Le style des Jardins d'Espanya est caractéristique de l’évolution de Rusiñol qui a été influencé dans un premier temps par les impressionnistes puis ensuite par les symbolistes et les allégories. Il fut ensuite le chef de file des « modernistes » espagnols qui considéraient l’art comme une religion permettant d’échapper au matérialisme de la société bourgeoise. A la même époque, Rusiñol et les peintres luministes de Sitges ont organisé dans les locaux de l’hôtel « Subur » de Sitges une exposition de peinture de paysages destinée à montrer le choc émotionnel que ressent un artiste lorsqu'il contemple tel ou tel paysage. Rusiñol va transporter une partie de son style impressionniste acquis après ses voyages à Paris dans ses toiles, comme par exemple certains tons gris ou mats qui se retrouvent dans les paysages de Catalogne et de Majorque, montrant une réalité observée depuis un côté sombre. Plus tard il découvrira le Greco, Madrid, l’Andalousie, le jardin de l’Alhambra et du Généralife de Grenade. Puis il redécouvrira les jardins abandonnés qui vont représenter à la fois l’espace intime de l’artiste et un reflet de la société de l’époque arriérée et décadente, qui néglige son patrimoine culturel. Le point culminant de sa carrière est sans doute l'exposition de 1900 où il présente la collection Jardins d'Espanya.

Jardin d’Aranjuez – Santiago Rusiñol Jardin d’Aranjuez – Santiago Rusiñol

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8 Extrait de Manuel de Falla, Presses de l’Université de la Sorbonne (Série d’études p151)

Falla quand à lui de part ses séjours en France, s’est beaucoup inspiré de la musique française. En étroite relation avec Ravel, Debussy ou encore Dukas, il s’intégra d’une certaine manière dans le style impressionniste.

Un mot sur l’impressionisme :

On considère que l’impressionnisme musical apparut avec le Prélude à l’après-midi d’un faune de Debussy, même si Fauré en fut le précurseur de par ses sonorités et ses harmonies nouvelles. Les impressionnistes tentent de traduire le monde des sons, la sensation de l’instantané et du changement à travers la volonté de créer une musique pouvant perdurer éternellement. Ils suggèrent l’inexprimable, l’immatériel et renoncent aux thèmes héroïques, dramatiques, métaphysiques ou mythologiques au profit de l’observation des transformations constantes de la nature et des jeux de lumière. Ils tentent de capter dans un paysage la part d’éphémère, l’instant et le changement, en nous faisant entrer dans le monde symboliste où communiquent le visible et l’invisible.9

El Generalife- Santiago Rusiñol Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

L’atmosphère des Jardins de Espanya et des Noches en los Jardines de España fait ressortir une affinité évidente et une association visuelle suave entre ces peintures et la musique de Falla. On remarque beaucoup de similitudes dans les parcours européens de Santiago Rusiñol et Manuel de Falla. Ils ont tous deux effectué des voyages en France et plus particulièrement à Paris où ils ont baigné dans un entourage impressionniste au caractère nationaliste. Les caractéristiques stylistiques de l’impressionnisme et du symbolisme se retrouvent autant dans la peinture de Rusiñol que dans la musique de Falla. On remarque tout de même la part symboliste de ces deux artistes dans la volonté de représenter à la fois leurs sentiments ou leurs impressions face aux paysages naturels et artificiels. Les procédés d’écriture de Falla évoquent des images claires par de nombreux effets symbolisant l’eau ou les fontaines des jardins ou encore les nappes sonores de l’orchestre pouvant s’assimiler à la brume ou au rêve d’un lieu baignant dans le repos. Il s’agit donc d’une véritable affinité spirituelle entre le peintre et le musicien sur ce thème des jardins. Après avoir effectué le même circuit européen, Santiago Rusiñol et Manuel de Falla, chacun à leur tour, vont retrouver un intérêt et un amour fort pour leur pays et ses paysages. Tous deux ont utilisé des éléments qui leur ont permis d’évoquer une Espagne éternelle et sublime.

El Generalife – Santiago Rusiñol Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

9Yvan Nommick Del impresionisme al neoclasicismo : el influjo de la musica francesa en los compositores espagñoles - ORCAM

Danse et peintureDanse et peintureDanse et peintureDanse et peinture : : : : le Tricornele Tricornele Tricornele Tricorne Par Monique Morestin

Picasso - Le Tricorne, Rideau de scène conçu par Picasso Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

En 1907 Serge de Diaghilev fonde les Ballets russes, compagnie de danse appelée à un grand succès. Dès 1911, celle-ci s’installe en Europe occidentale : elle rayonne à partir de Monte-Carlo, Paris et Londres. Son génial créateur sollicite tous les arts, musique, peinture, arts plastiques pour sa troupe. Toute l’avant-garde de l’art est convoquée. Ainsi, malgré la parenthèse de la première guerre mondiale, des spectacles inoubliables sont créés jusqu’à la mort de Diaghilev en 1929. Le premier spectacle, éblouissant, est le Sacre du printemps sur une musique d’Igor Stravinsky. Durant cette période, plusieurs musiciens français participent à cette aventure : Eric Satie avec Parade, Francis Poulenc (Les Biches), Darius Milhaud (Le Train bleu).

Pour les décors et les costumes, Diaghilev s’adresse à de grands talents. C’est ainsi que Picasso est appelé à montrer une autre facette de son talent en travaillant pour la scène. A partir de 1916, celui-ci exécute à de multiples reprises des peintures pour des spectacles de danse ou du théâtre. Sa première expérience dans ce domaine est le ballet Parade. Il conçoit les décors, parfois aussi les costumes. Il ne faut pas oublier qu’il s’intéresse déjà depuis une dizaine d’années aux saltimbanques et artistes de cirque (périodes bleue et rose). Picasso a souvent, au cours de sa vie, puisé également ses sources d’inspiration dans les spectacles de cabaret, le théâtre, et bien entendu, la corrida. Ce monde d’illusion, mais aussi de joie et d’émerveillement est pour lui le reflet de la vie. En cela, nous pouvons le rapprocher de Toulouse-Lautrec, avide, lui aussi, de plonger ses spectateurs dans le monde du music-hall et ainsi, de leur rendre plus familier ses artistes. Lorsque Diaghilev demande à Picasso de participer à la création du ballet Le Tricorne, celui-ci n’hésite pas. L’argument s’inspire d’un roman espagnol de Pedro de Alarcon, « Sombrero de tres picos », publié en 1874. Le fondateur des Ballets russes a pressenti Manuel de Falla pour en faire la musique.

Depuis mai 1916, la compagnie de Diaghilev séjourne en Espagne, où elle est très bien accueillie par le roi Alphonse XIII (grand-père de l’actuel souverain). En cette époque de guerre européenne, l’Espagne est à l’écart du conflit et offre un havre appréciable pour la troupe. En reconnaissance, et par fascination pour les danses traditionnelles du pays, Diaghilev veut créer un spectacle entièrement espagnol. Non seulement, l’histoire et la musique ont été écrites par des espagnols mais la chorégraphie s’inspire du flamenco, grâce

au danseur de flamenco Felix Fernandez découvert par Diaghilev. Les circonstances retarderont la création de l’œuvre, qui, paradoxalement, sera créée à Londres en 1919. L’imaginaire de Picasso peut s’épanouir dans cette histoire qui se déroule au XVIIIe siècle, en Andalousie, à l’époque du grand peintre espagnol Goya, dans une Espagne de fantaisie. C’est la deuxième fois que Picasso doit illustrer un ballet (après Parade). Il a certes été séduit à l’idée de représenter son Andalousie natale mais a beaucoup hésité sur la façon de le faire. Nous possédons de très nombreux croquis qui témoignent de ses recherches pour le rideau, les décors et les costumes. Un des problèmes à résoudre étant que l’histoire se déroule au XVIIIe siècle mais que Picasso est un artiste du XXe siècle. Finalement, après avoir envisagé diverses hypothèses, le peintre adopte une solution beaucoup plus épurée.

Pour le rideau de scène (nous avons connaissance de quatre essais différents), il choisit un fond gris, illustré par plusieurs personnages, vêtus à la mode andalouse : quatre femmes, un homme, un enfant situés dans une galerie donnant sur les arènes où une corrida vient d’avoir lieu (un attelage est en train de sortir le taureau mort). Quand la musique d’ouverture commençait, le rideau du théâtre se levait, dévoilant cette œuvre. Puis à son tour l’œuvre de Picasso laissait apparaître le ballet.

Picasso a également hésité entre plusieurs projets de décor. Tous représentent un village andalou, mais, il en dispose les éléments (maison du meunier, pont avec arche…) de façon différente. Finalement, il choisit un décor très simple avec la maison du meunier à droite, peinte en ocre clair, reliée à d’autres bâtiments par une grande arche. Au fond, un pont à plusieurs arches et la silhouette d’un village se devine sous un ciel étoilé. Avec une économie de moyens, le peintre met en scène un village andalou. Picasso séjourne à Londres pour peindre lui-même le rideau de scène ; il dessine également les éléments du décor et de la mise en scène (chaise à porteur du Gouverneur, ferronnerie du puits…)

Quelques croquis préparatoires du décor – 1919 Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

Picasso crée également les costumes. Il s’inspire largement des premiers tableaux de Goya qui représentaient la haute société du XVIIIe siècle.

Goya, L'ombrelle (1776-1778) Tous droits réservés, diffusion gratuite à l’usage pédagogique

Mais il y ajoute un choix éclatant de couleurs pour les faire ressortir sur scène. Chaque ton, très vif, s’oppose au noir : vert, bleu et noir ; rouge, jaune et noir etc. Les choix de couleurs et de formes permettent de différencier les groupes sociaux et de mettre en valeur le caractère de chaque personnage : vanité du Gouverneur, coquetterie de la femme du meunier, par exemple. Cette histoire met en scène cinq rôles principaux et une multitude de personnages secondaires, ce qui explique le nombre de costumes à inventer.

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Dans son souci de perfection, Picasso s’occupe d’adapter les costumes à chaque danseur, ainsi que le raconte Karsavina, la créatrice du rôle de la femme du meunier. « A l’époque des répétitions, écrit Karsavina, Picasso avait terminé tous les costumes sauf le mien qu’il souhaitait créer sur moi et il venait tout le temps me regarder danser. Le costume qu’il élabora finalement était un chef-d’œuvre suprême de soie rose et de dentelle noire de la forme la plus simple ; le symbole, plus que la reproduction ethnographique, d’un costume national. » Le peintre a aussi imaginé les maquillages des danseurs, comme le rapporte un témoin : « Pendant que j’assistais à l’installation de la scène pour la première représentation du nouveau ballet (Le Tricorne) j’aperçus Picasso accompagné d’un machiniste portant un plateau de fards… L’un des danseurs, habillé en alguazil vint sur la scène, marcha vers Picasso, salua et attendit. Picasso sélectionna quelques fards et décora le menton du danseur avec une multitude de points bleus, verts et jaunes qui lui donnaient assurément une apparence sinistre qui convenait à son rôle. » Le Tricorne n’avait pas le parfum de scandale du ballet Parade mais Picasso semble avoir apprécié de coopérer avec ce spectacle totalement espagnol. Serge de Diaghilev se souviendra de cette expérience et fera, pour plusieurs autres ballets, appel à cet artiste de génie. Le roman de Pedro de Alarcon, inspirera d’autres artistes, comme Salvador Dali quelques années plus tard.

Salvador Dali - Le Tricorne, 1949, dessins de costumes – aquarelles

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Ce couvre-chef (illustré ci-dessus par des peintres anglais et vénitien) apparaît à la fin du XVIIe siècle, en Angleterre. Des militaires, gênés par leur chapeau à larges bords, décident d’en replier trois côtés sur la calotte, ce qui donne cette forme avec trois cornes. La mode se répand au XVIIIe siècle dans tous les pays d’Europe, de porter cet accessoire aussi bien dans l’armée que dans le civil, qu’on soit homme ou femme.

Poema en forma de canciones opus 19Poema en forma de canciones opus 19Poema en forma de canciones opus 19Poema en forma de canciones opus 19

Cette pièce est inspirée du poème de Ramón de Campoamor Ya que este mundo. Elle fut créée au Teatro Real de Madrid le 6 avril 1919 par l’orchestre symphonique de Madrid avec à la direction Enrique Fernandez Arbos et au chant la mezzo Aga Lahowka.

Elle est composée de cinq parties :

I. Dedicatoria, II. Nunca olvida, III. Cantares, IV. Los dos miedos, V. Las locas por amor

Turina nous raconte une histoire non dénuée de poésie et d’humour. Il nous entraîne dans une succession de tableaux tour à tour romantiques, légèrement impressionnistes et tragiques, empreints d’une expression lyrique et colorée. L’immense sensualité dégagée par sa musique nous est transmise puissamment, avec une grande force évocatrice. L’aspect émotionnel contenu dans cette œuvre submerge parfois l’auditeur, réceptacle de tensions.

Triptico Triptico Triptico Triptico opopopopusususus 45:45:45:45: FarrucaFarrucaFarrucaFarruca

La Farruca est la première partie du triptyque qui fut initialement composée pour voix et piano sur les poèmes de Ramón de Campoamor. Cette pièce fut créée en 1927 par la mezzo Conchita Supervía, elle fut ensuite remaniée pour orchestre et créée aux alentours de 1928.

Saeta en forma de Salve a la Virgen de la Esperanza op60Saeta en forma de Salve a la Virgen de la Esperanza op60Saeta en forma de Salve a la Virgen de la Esperanza op60Saeta en forma de Salve a la Virgen de la Esperanza op60

Cette pièce fut elle aussi composée initialement pour voix et piano, sur des poèmes de Joaquín et Serafín Alvarez Quieto. Elle a été créée en 1930 par Conchita Supervía dans sa forme originelle puis en 1931 pour orchestre.

JoaquíJoaquíJoaquíJoaquín Turinan Turinan Turinan Turina

Joaquín Turina naît le 9 décembre 1882 à Séville. En 1894 il commence ses études formelles de la théorie de l'harmonie et le contrepoint. Presque aussitôt, il se met à composer de petites pièces. Il étudie dans sa ville natale, auprès de García Torres et Enríquez Rodríguez, puis à Madrid avec José Tragó. En 1905, il réside à Paris, où il suit des cours de composition auprès de Vincent d'Indy, à la Schola Cantorum. Comme son compatriote et ami Manuel de Falla, il fait également la connaissance des compositeurs « impressionnistes », Claude Debussy, Paul Dukas et Maurice Ravel.

En 1914, il retourne à Madrid et se consacre alors à une triple activité de compositeur, professeur de musique et critique musical. Il compose des opéras, des pièces orchestrales, de la musique de chambre, des pièces pour piano, pour guitare ainsi que de nombreuses mélodies. Il est également chef d'orchestre et accompagne notamment les Ballets russes de Diaghilev.

À partir de 1931, il est professeur de composition au Conservatoire royal de Madrid. En 1935, il est élu à l'Académie royale des Beaux-Arts de San Fernando. Joaquín Turina meurt le 14 janvier 1949 à Madrid. Le conservatoire madrilène est rebaptisé en son honneur (Conservatorio Profesional de Música Joaquín Turina). Parmi ses œuvres, on peut citer les opéras Margot (1914) et Jardín de Oriente (1923), diverses œuvres pour orchestre, dont La Procesión del Rocío (1913), Sinfonía sevillana (1920), Ritmos (1928), les Danzas fantásticas (1920, versions pour piano et orchestre), La Oración del Torero (initialement écrite pour un quatuor de luth, et ensuite remaniée pour un quatuor à cordes puis pour un orchestre de cordes), diverses pièces de musique de chambre, compositions pour piano, pour guitare ainsi que des chansons. La plus grande partie de son œuvre dénote d'indiscutables influences de la musique andalouse traditionnelle. Il est également l'auteur d'un Traité de composition et d'une Encyclopédie abrégée de la musique (1917, Enciclopedia abreviada de música).

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Musique Espagnole et Française au XXèmeMusique Espagnole et Française au XXèmeMusique Espagnole et Française au XXèmeMusique Espagnole et Française au XXème

Beaucoup de stéréotypes sont ancrés lorsqu’il s’agit d’évoquer la musique espagnole et son caractère. Le cante Flamenco10 avec ses falsetas11, la farruca12, et tant d’images « folkloriques » sont le reflet parfois trop réduit de la culture espagnole. Beaucoup de citations ou d’emprunts à cette musique se retrouvent à travers le monde, comme en Amérique latine (transmission par les colonies), ou en France avec les espagnolades du XXème.

L’intérêt pour cette musique est dû en partie au caractère et au métissage qu’elle a subit à travers l’histoire. Avec la conquête musulmane du VIème siècle, l’influence de la communauté gitane et les fortes identités régionales (Andalousie, Castille, Galice…), l’évolution musicale de l’Espagne a su faire fusionner ces cultures pour créer sa singularité musicale. A partir du XIXème siècle, la musique savante veut s’affranchir de quelques traits musicaux « arabisants » un peu trop présents en les contrôlant. Tout en gardant une part de leur folklore, les compositeurs classiques espagnols ont souhaité créer des sortes « d’écoles musicales » qui, au cours du siècle suivant, ont suivi l’ascension de l'évolution de la musique française. Ils ont notamment trouvé de nouveaux moyens d’enrichir leur musique à travers celle de Debussy ou encore de Ravel.

De manière réciproque, en France, on remarque un syndrome « d’alhambrisme » à la suite de cet intérêt pour l’Espagne. Le charme envoûtant de l’Andalousie fascine les compositeurs avec ses hauts lieux comme Séville ou Grenade, villes magiques du flamenco.

Plusieurs compositeurs européens, tels que Chabrier, Dukas, Ravel ou Debussy, fantasment sur les nuits andalouses, parfois sans même être allés dans le sud. Ils les traduisent par une expression musicale singulière, remplie d’hispanismes, de rythmes caractéristiques, de mélanges d’échelles sonores, de couleurs instrumentales et de subtilités harmoniques. Ils suggèrent à l’auditeur ce qu’ils ont rêvé en reconstituant une atmosphère ibérique idéale à travers des « espagnolades ». Soucieux de dépaysement et de renouveau sonore, grâce à ce mélange, ils trouvent une concordance entre coloration musicale et harmonie. De plus, ils sont admiratifs de l’utilisation de la musique folklorique par les compositeurs espagnols. Debussy écrit à propos d’Albéniz: « Sans réutiliser exactement les thèmes populaires, il est évident qu’il les a entendus, assimilés

et incorporés dans sa musique, sans que l’on puisse percevoir le point de départ. ».13 Par cet élan d’invention créatrice, ils ont apporté un sang neuf à l’imaginaire européen. Si l’on prend l’exemple de Falla, on remarque son large cercle de relations au sein des compositeurs français du début XXème. Il a beaucoup été conseillé par Debussy et durant cette période, il entama des œuvres fondamentales de son répertoire : les Noches en los jardines de España. Le sous-titre de cette pièce, « impressions symphoniques », indique clairement une ascendance debussyste. Dans le premier tableau « El Généralife », Falla fait une allusion claire à un extrait du « dialogue du vent et de la mer » (troisième partie de La mer de Debussy). Dans cette pièce il n’y a pas d’opposition dramatique entre le piano et l’orchestre, le soliste ne domine pas, il évoque le murmure des fontaines des jardins de l’Alhambra, le trémolo des guitares et l’intense vie rythmée des danses andalouses.14

10 Le cante flamenco (chant flamenco) est l'une des trois principales composantes du flamenco, avec toque (à la guitare) et baile (danse). 11 Courtes mélodies jouées à la guitare entre les couplets chantés, ou pour accompagner les danseurs. 12 Danse andalouse faisant partie du répertoire flamenco. 13 Yvan NommickYvan NommickYvan NommickYvan Nommick Del impresionisme al neoclasicismo : el influjo de la musica francesa en los compositores espagñoles - ORCAM 14 Idem note 11

Un autre exemple de ces relations franco-espagnoles, Manuel de Falla était aussi proche de Maurice Ravel. Ils possèdent beaucoup de points communs mais se sont en plus grandement inspirés de leurs travaux respectifs. Falla raconte que le jour où il connut Ravel, celui-ci jouait sa Rapsodie espagnole à quatre mains avec Ricardo Viñes et écrit « La Rapsodie me surprit par son caractère espagnol. En parfait accord avec mes

propres intentions … ». 15 C’est donc à travers le pianiste Ricardo Viñes, créateur de la majeure partie de leur pièce pour piano, que ces deux compositeurs firent connaissance. Mais leur amitié n’est pas le seul lien qu’ils aient. Ils partagent le même souci de perfection musicale, de clarté et de concision de l’expression, de pudeur dans le sentiment. Parlant de son travail, Falla affirme « c’est une substance à extraire, quelquefois avec un travail énorme de la souffrance… Ensuite cacher l’effort comme si c’était une improvisation très équilibrée, avec les moyens les plus simples, les plus sûrs ». Et Ravel adopte un point de vue semblable : « Je ne suis pas de ceux qui composent vite. Je me méfie de la facilité. Je mets une obstination un peu scientifique à construire avec solidité, à chercher le matériau le plus pur, à bien cimenter ». Le traitement de la musique folklorique, surtout espagnole, présente également des similitudes entre les deux compositeurs. Tous les deux tentent de revitaliser des modèles historiques en utilisant un langage moderne et insèrent librement le passé dans des œuvres qui transcendent les différences stylistiques.16

Gloriette en fin d'après-midi (Aranjuez, 1913, collection privée) – Santiago Rusiñol

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15 Yvan Nommick Yvan Nommick Yvan Nommick Yvan Nommick Le matériau et la forme chez Manuel de Falla et Maurice Ravel : éléments d’analyse comparative ; extrait de la série d’études La musique entre France et Espagne-Interactions stylistiques 1870-1939. 16 Idem note 13

Biographies des artistesBiographies des artistesBiographies des artistesBiographies des artistes Laurence FosterLaurence FosterLaurence FosterLaurence Foster Direction musicale Avec la saison 2011-2012, Lawrence Foster assume sa dixième saison en tant que Directeur artistique et Chef principal de l’Orchestre de la Fondation Gulbenkian de Lisbonne. Auparavant, Lawrence Foster a été Directeur musical des Orchestres Symphoniques de Barcelone, Jérusalem et Houston, de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo et de l’Orchestre de Chambre de Lausanne. Il a dirigé la saison dernière : des concerts avec l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig (Lisa Batiashvili, soliste), les Orchestres Philharmoniques de Helsinki de des Pays-Bas et un concert au Festival de Grafenegg (Autriche) en juillet 2010. Avec le pianiste Daniel Barenboim, il donne les deux concertos pour piano de Chopin à la tête de l’Orchestre Gulbenkian et l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo. En 2010-2011, il dirige le NDR Sinfonieorchester de Hambourg, l’Orchestre Philharmonique de Radio France, le Residentie Orkest de la Haye (avec Aldo Ciccolini), l’Orchestre Symphonique de Tivoli (avec Evgueni Kissin) et les concerts de la saison du MDR Sinfonieorchester Leipzig. Après le récent succès de son intégrale des symphonies de Schumann avec l’Orchestre Philharmonique Tchèque (enregistré pour Pentatone), il retourne diriger l’orchestre au printemps 2011. Lawrence Foster travaille avec bon nombre de jeunes orchestres les plus importants. L’été 2004, il amène l’Australian Youth Orchestra aux Proms de la BBC, ainsi qu’au Concertgebouw d’Amsterdam, avant de repartir en tournée avec l’ensemble en juillet 2007. Il effectue également une tournée avec la Junge Deutsche Philharmonie à Pâques 2009 et dirige l’Orchestre de l’Académie au Festival de Schleswig-Holstein en août 2009. Auparavant il est Directeur musical des Festival et Ecole de Musique d’Aspen (Colorado), y retournant l’été 2009 pour fêter le 60e anniversaire du festival. En tant que chef lyrique, Lawrence Foster est engagé par les opéras les plus prestigieux à travers le monde. Invité régulier du Hamburgische Staatsoper, il y dirige une reprise de Pelléas et Mélisande en 2008-2009, Der Freischütz et une reprise de Carmen en 2010-2011. Au printemps 2011, il retourne à l’Opéra de Marseille pour Wozzeck et dirige la création mondiale d’un nouvel opéra de René Koering pour l’Opéra de Monte-Carlo, La Marquise d’O. L’enregistrement de son interprétation de l’Esmeralda de Louise Bertin, capté live au Festival Radio France – Montpellier en 2008 est sorti en CD (Accord). Avec l’Orchestre Gulbenkian, Lawrence Foster donne au moins un opéra en version concert à Lisbonne par saison ; en 2010, il y dirige Ariane à Naxos de Strauss. 2011-2012 marque la dernière saison de Lawrence Foster en tant que Directeur musical de l’Orchestre et Opéra national de Montpellier, où il a dirigé de nombreuses productions, notamment La Flûte enchantée à l’automne 2009, Otello au printemps 2010, Die Fledermaus et Samson et Dalila, en janvier 2011. Né en 1941 à Los Angeles, de parents roumains, Lawrence Foster est devenu un champion important de la musique de Georges Enesco et a servi comme Directeur artistique du Festival Georg Enescu de 1998 à 2001. Son dernier enregistrement au compositeur roumain – sa propre orchestration de l’Octuor pour cordes, avec l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo (EMI) – a paru au printemps 2009. En janvier 2003, il se voit décoré par le Président de la Roumanie pour services rendus à la musique roumaine. Parmi ses projets : cette saison, il retournera à l’Opéra de Marseille pour Wozzeck et à l’Opéra de Monte Carlo pour La Marquise d’O. Pour le Staatsoper d’Hambourg, il dirigera les productions de La Dame de

Pique (2011-12) et The Cunning Little Vixen (2013-14). Il sera à l’Opéra de Francfort pour une nouvelle production de La Khovanschina en 2012-13.

LuciaLuciaLuciaLucia DuchoňováDuchoňováDuchoňováDuchoňová Mezzo-soprano

La mezzo-soprano Lucia Duchoňová est originaire de Trnava dans l'ouest de la Slovaquie. Son éducation musicale a commencé très tôt grâce à l'influence de ses parents. Après des études au Conservatoire d’Etat de Bratislava et à l'Académie Janáček de Brno, sa première expérience scénique se fait au Brno Opera Studio. Pendant ce temps, elle assiste aux masters classes dirigées par Irwin Gage, Grace Bumbry, Marjana Lipovsek et Christoph Prégardien. Et depuis 2007, elle travaille avec Margreet Honig. Aujourd'hui, Lucia Duchoňová est une interprète de concert et d’oratorio, très demandée en dehors de son pays. En 2002, elle a chanté non seulement dans la Messe de Leonard Bernstein au jubilé d'or des Semaines Européennes à Passau, mais aussi, en tant que soliste, dans un concert en hommage à sa célèbre compatriote Lucia Popp à Bratislava. Elle a ensuite interprété la cantate Davidde penitente de Mozart au Herrenchiemsee Festival. On l’a vu au Festival du Schleswig-Holstein, au Festival Haendel de Göttingen, au Festival de musique du Rheingau, pendant les Nuits Blanches de Saint-Pétersbourg, au Printemps de Prague et à La Folle Journée à Tokyo. Les Kunstlied jouent également un rôle important dans la vie de Lucia Duchoňová. Avec des programmes inhabituels et attractifs, elle poursuit son parcours musical de la découverte, accompagnée, par exemple, du Benewitz Quartet. Pour les récitals, Lucia Duchoňová a collaboré avec l'Orchestre symphonique de Bamberg, l'Orchestre Gulbenkian, l'Orchestre Philharmonique de Radio NDR, le Collegium 1704, l’Orchestre de Chambre tchèque, l'Ensemble Kanazawa et l'Orchestre baroque Elbipolis. Alors que, initialement, son répertoire était porté sur des œuvres majeures de Bach, Haendel et Mozart, Lucia Duchoňová s’est tournée de plus en plus vers des pièces des 19ème et 20ème siècles. Sur scène, elle a interprété les rôles de Lisetta dans Il Mondo della Luna de Haydn et de la Troisième Dame dans La Flûte enchantée de Mozart. Malgré ses nombreuses occupations, Lucia Duchoňová organise ZOOM +, un festival international de chant a cappella, dans sa ville natale Trnava, étendant la programmation au swing, au jazz et à la musique sacrée avec Kruhy, l'ensemble vocal qu’elle a fondé. La discographie de Lucia Duchoňová comprend Judas Maccabäus de Haendel (DHM) et Alexander's Feast (Hänssler Classic), ainsi que son premier enregistrement solo avec des compositions de Joaquin Turina, disque qui a été nominé en 2011 pour un Grammy.

Emmanuel ChristienEmmanuel ChristienEmmanuel ChristienEmmanuel Christien Piano Né en 1982, Emmanuel Christien intègre la classe de Jacques Rouvier au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris en 1999 et y obtient brillamment ses prix de piano, de musique de chambre et d’accompagnement vocal. Il entre en cycle de perfectionnement en 2005. Il est alors lauréat de la Fondation Alfred Rheinold qui lui offre un piano « Blüthner ». Emmanuel a travaillé avec des personnalités telles que Jean-Claude Pennetier, Aldo Ciccolini, Paul Badura-Skoda ou Anne Queffélec. Il a été primé dans plusieurs concours internationaux (prix de la meilleure interprétation des œuvres de Brahms au concours Casagrande à Terni (Italie), concours européen Vlado Perlemuter). Il poursuit parallèlement un cursus de musique de chambre, avec la violoncelliste Aurélienne Brauner. Il se forme au répertoire du Lied et de la mélodie avec la mezzo-soprano Clémentine Margaine et la soprano Marie-Bénédicte Souquet, dans la classe d’Anne Grappotte, ainsi qu’avec Ruben Lifschitz à la fondation Royaumont. Emmanuel s’est produit en soliste, et en musique de chambre, dans de nombreux festivals en France et à l’étranger : Festival de Saint-Denis, Folle journée de Nantes, La Roque d’Anthéron, Radio-France Montpellier, Cordes sur Ciel, Chopin à Bagatelle ainsi qu’à Tokyo, Milan, Aberdeen, Bombay (Arties Festival). Il a joué en concerto avec l’Orchestre des Lauréats du Conservatoire, l’Orchestre de Caen, l’Orchestre de chambre de Moldavie. Musicien de chambre passionné, il s’est produit avec des artistes tels que David Fray, Bruno Monsaingeon, le quatuor Ardeo, ou Jean-Claude Pennetier qui l’invite en 2011 au festival Piano Passion de l’Opéra de Saint-Etienne. Il a également collaboré avec le metteur en scène Jean-Paul Scarpitta et participe régulièrement à des projets associant théâtre, littérature et musique. On a pu l’entendre à la radio dans les émissions Génération jeunes interprètes, Dans la cour des grands, L’Atelier du chanteur. On l’entendra prochainement dans les Concertos de Bach pour deux, trois et quatre claviers avec David Fray, Jacques Rouvier, Audrey Vigoureux et l’Orchestre national Montpellier. En 2012 sortiront deux CD, l’un consacré aux Pièces pour alto, clarinette et piano de Max Bruch avec l’altiste Nicolas Bône et le clarinettiste Olivier Patey (Arties Records), l’autre au répertoire français pour violon et piano avec Samika Honda (Polymnie).