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Je prépare un projet que tu ne pourras pas refuser. La semaine dernière, Richard Dowling a eu le culot de me demander si je pouvais trouver un petit boulot à son fils. Ce dernier est un poussin charmant – si le genre éphèbe à peine pubescent et encore vierge te plaît. Viens ici ravager son petit cul, lui empaler les fesses si fort qu’il en redemande. Entre-temps, je vais convaincre les annonceurs de Dowling de retirer quelques pubs du New York Information en laissant entendre que le PDG a essayé de refiler son fils à un vieux pervers en échange d’encarts publicitaires Quand tu auras vu Jamie Dowling, tu te rendras compte que ta mission n’est pas une tâche si ingrate. Et si ce n’est pas assez, tu peux toujours compter sur une nuit sensuelle en ma compagnie, tu l’auras à la conclusion de ta petite mission de relations publiques.

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Don Bapst

Roman

Traduit de l’anglais-américainpar Denis-Martin Chabot

Éditions Textes Gais31 rue Bayen75017 Paris

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Il existe de ce titre trois versions numériques :• une en français,• une en anglais, version originale de cet ouvrage,• une 3e regroupant ces deux versions.Chacune de ces versions comporte à la suitel’intégralité de Les liaisons dangereusesde Choderlos de Laclos en langue française.

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Les principaux protagonistes de ce roman

Terry Simms, responsable éditorial du magazine Liaisons, véritable Bible de la mode. Homme séduisant, quelque peu efféminé, la jeune quarantaine.

Victor Stephens, rédacteur en chef de Liaisons, vaniteux, superbement viril et musclé, la trentaine avancée.

Richard Dowling, éditeur du New York Information, publication financière influente. Il possède Liaisons. Homme rigide, mais diplomate, la cinquantaine avancée.

Jamie Dowling, jeune fils de Richard. Aussi mignon que naïf. En formation chez Liaisons, il y rencontre et tombe amoureux de Peter Marquez.

Peter Marquez, stagiaire chez Liaisons. Beau Latino, la vingtaine. Amoureux de Jamie Dowling.

Christophe Tourvel, designer français et fondateur de Habiller, chaîne de prêt-à-porter en vogue en Californie. Homme d’une beauté saisissante, modeste et confiant, la jeune quarantaine.

Douglas Scott, coordonnateur de soirées de bienfaisance dédiées à la lutte contre le sida. Professeur d’un âge avancé.

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Avertissement de l’éditeur

Le responsable éditorial originel de ce livre assure que son contenu est tout à fait authentique. Quant à moi, bien que je considère ce texte divertissant et pertinent, je n’ai jamais douté un seul instant qu’il soit une œuvre de pure fiction. Le comportement de ces personnages ne me semble pas crédible.

Dans le monde palpitant de la Presse, qu’elle soit imprimée ou en ligne, les rédacteurs et les éditeurs, toujours sur la brèche, n’ont pas de temps à consacrer à l’élaboration de vastes complots visant à se nuire les uns les autres.

De nos jours, se trouve-t-il encore quelqu’un – du moins un individu haut placé dans les médias comme les personnages de ce drame – qui envoie des mails diffamatoires à partir de son adresse mail professionnelle ?

De plus, la probabilité que des gens s’adonnent à des pratiques sexuelles aussi dangereuses et risquées à une époque de prise de conscience aussi importante des risques concernant le VIH et les autres IST me semble faible.

Je laisse le soin au lecteur de tirer ses propres conclusions.Ce dernier peut apprécier ce récit, d’autant plus s’il est disposé

à mettre de côté son incrédulité et à considérer [email protected] comme le témoignage d’une époque où Internet reste un phénomène

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nouveau dont on ne peut encore maîtriser les conséquences, même chez les riches et les puissants.

Ce récit, bien qu’il se déroule au tournant du vingt et unième siècle, se fixe dans une époque d’innocence en matière de technolo-gie bien révolue de nos jours. Imaginez seulement qu’aujourd’hui, le directeur d’une grande publication soit forcé de démissionner non à cause d’une décision éditoriale désastreuse, mais en raison de mails scandaleux retrouvés sur le serveur ! Cela nous ramène-rait directement aux années 1990.

Larry ChoderlosÉditeurNew York, mars 2000

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Préface du rédacteur

La série de mails que vous vous apprêtez à lire ne représentent qu’une fraction du grand nombre que j’ai pu récupérer jusqu’au tout début de l’année 2000 du serveur informatique de la société où je travaille.

En révisant le manuscrit qui en résulte, des éditeurs, rédacteurs et agents m’ont accusé de tous les maux, notamment d’avoir épié la vie intime de mes collègues et même de verser dans le sensationnalisme en traitant d’un thème surutilisé ou, au contraire, d’avoir contrefait le texte. Bien qu’il puisse y avoir une malheureuse et inévitable vérité dans ces accusations, je peux assurer les lecteurs que la dernière allégation n’est pas fondée. Ces mails sont reproduits tels que je les ai trouvés.

Certains m’accuseront de rechercher la notoriété en profitant de l’infamie des autres, mais je n’ai aucune intention de causer du tort aux gens impliqués dans ce récit.

D’autres m’accuseront de marginaliser davantage l’homo-sexualité à une époque où les gais et les lesbiennes subissent encore de la discrimination dans une société homophobe et ce, malgré les petites victoires récentes dans la lutte pour leurs droits.

J’ai beaucoup réfléchi à cette dernière préoccupation avant de publier cet ouvrage. Devrais-je taire ce récit véridique qui

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pourrait servir d’avertissement aussi bien aux homos qu’aux hétéros, uniquement parce que plusieurs protagonistes de ce drame appartiennent à une minorité opprimée ? J’en ai conclu que ce serait de la censure.

J’ai publié les mails dans leur intégralité, confiant que les lecteurs auront la maturité nécessaire pour forger leur propre interprétation.

J’espère qu’ils comprendront que les messages reproduits dans ce livre constituent plus qu’un document mettant en cause quelques individus. Ils ressemblent – dans leur format et peut-être même dans leur contenu – à ceux écrits par quiconque éprouvant une folle passion.

L’insouciance des rédacteurs de ces mails montre la gravité de leurs actions et de leurs conséquences.

Dans ce monde effréné, malgré les fruits de la recherche et des progrès technologiques, les virus, qu’ils soient organiques ou virtuels, représentent une réalité tangible.

Don BapstLos Angeles, mars 2000

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Date : Mardi 3 août 1999, 12 h 22 HAEDe : Jamie Dowling <[email protected]>Objet : La vie dans la Grosse PommeÀ : Sue Wilson <[email protected]>

Salut, Sue, Ma vie est excitante depuis mon arrivée à New York. La ville est

géniale. Mon travail chez Liaisons est intense. J’écris « travail », parce que, la plupart du temps, je me démène au bureau sans vraiment savoir ce que je suis censé faire. J’espère bientôt me dénicher un vrai job de graphiste dans une autre publication. Ce serait sympa de me trouver un boulot sans l’aide de mon père.

Pour le moment, en tant qu’assistant, j’apprends beaucoup à observer ce qui se passe. C’est tellement différent de ce que nous avons appris à l’école durant tous ces cours de mise en pages et de maquette. Les éditeurs ne passent pas leur temps à discuter du travail des graphistes. On dirait qu’ils se foutent de quoi l’image a l’air pourvu qu’elle soit prête à temps pour l’imprimeur – je devrais être renvoyé pour ce commentaire.

C’est super agréable de voir passer ici les célébrités du monde de la mode et leurs mannequins. Certains sont absolument splendides ! OK, je ne m’intéresse qu’aux hommes. Oui, je suis certain maintenant d’être gai – à 99 % –, même si je n’ai encore aucune expérience. Mon père me dit qu’il faut que je me donne du temps, que je n’ai que 18 ans et tout ça. Il ne veut pas que je souffre comme lui. Il me dit d’attendre et me donner du temps pour savoir ce que je ressens.

Les choses ont bien changé depuis le temps où mon père avait mon âge. Il a dû épouser ma mère par obligation pour sauver les apparences. Je suis convaincu que la vie est plus facile maintenant

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que dans son temps. Je n’ai qu’à écouter parler les mannequins et les dessinateurs de mode de leur petit ami pour le constater.

Mon père croit dur comme fer que pour chaque individu qui réussit à percer dans le domaine de la mode et de l’édition, il y en a des dizaines qui sont rejetés uniquement parce qu’ils sont gais. Mais, même si cela est vrai, est-ce vraiment une bonne raison pour nier ce que je suis ?

Je remercie le ciel de pouvoir t’écrire, Sue. Tu es la seule en qui j’ai assez confiance pour te raconter tout cela.

Viens à New York dès que tu le pourras, on visitera la « Grosse Pomme » ensemble.

Bisous.Jamie

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Date : Mercredi 4 août 1999, 10 h 12 HAEDe : Terry Simms <[email protected]>Objet : PropositionÀ : Victor Stephens <[email protected]>

Mon cher Victor,J’ai bossé comme un malade pour finir à temps le dernier

numéro. Une annonce a été retirée à la dernière minute et… Bref, je ne veux pas commencer ce message en parlant du boulot !

Entre les cocktails au bord de la piscine et les dîners sans fin sur les terrasses de West Hollywood, tu ne dois pas avoir beaucoup de boulot dans cette ville parodique dans laquelle tu te trouves.

Avec qui t’envoies-tu en l’air ?J’aurais mieux fait de ne pas t’envoyer en mission auprès des

célébrités. :-)De mon côté, je me tape un petit Hispanique, Peter Marquez,

un stagiaire âgé de vingt ans qui sort tout juste d’une école de journalisme à Chicago. Je m’efforce de parfaire son éducation, ce qui nous mène très tard le soir… souvent jusqu’au petit matin. On aurait du mal à assister aux réunions commerciales de 8h30 si on ne prenait pas nos vitamines habituelles : C, E, K, G… Quand je te parle de faire son éducation, je dois tout lui apprendre : « Oui, mon garçon : C comme Crystal, E comme Ecstasy... »

Je prépare un projet que tu ne pourras pas refuser. La semaine dernière, Richard Dowling a eu le culot de me demander si je pouvais trouver un petit boulot pour son fils pendant quelques mois. Victor, imagine-toi les différentes teintes de bleu qui ont coloré mon visage avant que je puisse me ressaisir et répondre en souriant : « Mais, bien sûr ! »

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Il est le patron après tout. Si seulement il coupait le cordon qui lie Liaisons au New York Information une fois pour toutes ! Imagine ce que je pourrais accomplir en tant que responsable éditorial sans ce vieux con qui renâcle à tout propos.

Depuis son arrivée à notre bureau, tout le monde a remarqué que Jamie, le petit assistant, est comme son papa une véritable petite pédale. On pourrait croire qu’à 18 ans, il aurait déjà baisé un millier de fois, mais il semble que son papa l’ait tenu à l’écart au fin fond de la campagne.

Il l’a envoyé dans un internat durant ses études secondaires, puis l’a inscrit à un programme intensif de deux ans en design dans une école de la côte.

En passant, tu ne devineras sûrement pas où Dowling veut lui trouver un job permanent : à la nouvelle firme de courtage de Jonathan Banks ! Eh oui ! Le même Banks qui s’est retiré d’un partenariat avec moi à la dernière minute. Ce n’est qu’un vieux trognon, tu le sais, alors que Dowling fils est un poussin charmant – si le genre éphèbe à peine pubescent et encore vierge te plaît. Évidemment, Banks s’est offert de prendre le petit sous son aile. Dowling se dit que ce dernier lui servira d’exemple, étant donné qu’il est trop vieux pour essayer de niquer son garçon et trop constipé pour laisser ce dernier s’épanouir dans son homosexualité.

Tu vois, Dowling vit encore à l’âge des pierres. Pour lui, le coming-out de son fils ferait la une : « Le magnat de la Presse financière abandonne son fils à une vie de débauche homosexuelle. » En fait, on se contrefiche pas qu’un peu de savoir qui ramone le petit cul ! Une bonne part de la paranoïa de Dowling provient de ses actionnaires, les banques et les entreprises de tabac prorépublicaines qui financent sa publication et son site Internet.

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Avec Banks comme patron de Jamie, le papa s’imagine que les chances sont bonnes que le fiston se la ferme et reste dans son placard.

C’est d’un ennui ! Alors, j’ai besoin de toi. Viens ici ravager son petit cul, lui empaler les fesses si fort qu’il en redemande, puis assure-toi qu’il refuse le poste au site merdique de Banks. Entre-temps, je vais convaincre les annonceurs de Dowling de retirer quelques pubs du New York Information en laissant entendre que le PDG a essayé de refiler son fils à un vieux pervers en échange d’encarts publicitaires. Imagine le spectacle que nous donnerait le supplice de ces deux vieilles tantes. Nous finirions peut-être par donner un infarctus à Dowling.

Quand tu auras vu Jamie Dowling, tu te rendras compte que ta mission n’est pas une tâche si ingrate. Et si ce n’est pas assez, tu peux toujours compter sur une nuit sensuelle en ma compagnie, tu l’auras à la conclusion de ta petite mission de relations publiques.

xoxo Terry

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