DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

download DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

of 10

Transcript of DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    1/10

    BIBLIO THEQ_UE B rZAN TINEPUBLIEE sous LA DIRECTION DE PAUL LEMERLE

    ETUDES - 7

    NAISSANCED'UNE CAPITALE

    Con st an ti nop le e t s es in s ti tu ti on sd e 330 a 451

    PAR

    GILBERT DAGRONProfeueur au College de France

    PREFACE PAR PAUL LEMERLEMembre de ]'Institut

    PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    2/10

    LES FACTIONS DANS LA VILLE 349

    CHAPITRE XII

    meme soit reduite a la derniere extremite, peu leur importe du moment que leurfaction y gagne - ainsi appellent-ils Ie parti qu'ils constituent ( o i h c o ~ yap " t " o u ~O 1 J c r " t" c x c r L ~ "t " C X ~ X C X A o u c r W ) . Meme des femmes participent avec eux a cette rivalite,non seulement en suivant les hommes, mais au besoin en s'opposant a eux ( O C V " t " L c r " t " C X -" t " o u c r C X L ) , bien qu'elles n'aillent en aucun cas au spectacle et ne soient pousseespar aucune autre raison. Si bien que je ne sais quel nom donner a ce phenomene,sinon celui de maladie de l'ame, Voila ce qui sepasse dans la population de chaqueville ( "t "c x~ ~ " t" e 1 t6 A ec rL x cx t ~ ~ fJ .< P ~ x& .c r" t"

    : De longue date, Ie peuple etait divise dans les villes en Bleus et Verts, maisil n'y a pas longtemps que, pour ces denominations et pour les gradins corres-pondants qu'ils occupent pendant Ie spectacle, les gens dilapident leur argent,s'exposent aux pires violences physiques et n'hesitent pas a affronter la mort laplus honteuse s. lIs luttent contre ceux qui sont assis du cote oppose sans savoirpourquoi ils s'exposent au danger, mais parfaitement assures que, meme s'ilssurpassent leurs adversaires dans l 'affrontement, ils seront aussitot amenes enprison et subiront les pires tortures avant de mourir. Est done nee entre eux unehaine qui n'a pas de sens, mais qui reste pour toujours inexpiable, car elle ne cedeni devant Ie mariage, ni devant la parente, ni devant I'amitie, meme si ce sontpar exemple deux freres, ou I'equivalent, qu'opposent ces couleurs. lIs ne sesoucientni de Dieu, ni des hommes, pourvu qu'ils gagnent dans cette lutte, rneme auprix d'un sacrilege contre Dieu, meme si les lois de l 'Etat subissent une atteintede leur fait au-dedans ou au-dehors. Que leur patrie manque du necessaire ou

    I. Historic arcana, I, I.2. Bell. pers., I , 24; themes repris par Historia arcana, 7, I.3. C'est-a-dire une condamnation a mort prononcee par Ie prefet de la ville.

    I.Citons la phrase bien connue de THl~OPHYLACTE SIMOKATTES, V I II, 7, II (ed. de BOOR,p. 2 9 7) : e :! < ; / l Uo X P W f L & :T W \ I < jl ~c re :l ~ l < r e :t cr 1 ]P P lJ c re :v . X I X T Q : fL I X P O V y Q :p T 'i j< ; A u c r c rw 3 lJ C ; T I X U T lJ C ; lX u ~ I X \l O fL ~ C ; f L lX v l lX < ;T t l; ' P W f L l X l w \I3 I W A U I /T O ' lt p & :Y f L IX T O C .

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    3/10

    350 LE PEUPLE DE LA CAPITALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 351S'il n'est pas douteux que les couleurs de I'Hippodrome apparaissent avec

    l'Hippodrome lui-meme et le debut des courses, il faut attendre pres d'un siecleavant de trouver dans les sources dignes de foi la mention d'une activite ou d'unrole politique des demes ou factions a Constantinople.. Que Constantin ait ete acclame par les Bleus a son entree a Byzance, et qu'il

    y art .ecras.ele~Vert~, fa~orables a Licinius et paiens, est une fable des patriographes 1;une imagmation historique dont nous avons cherche plus haut a elucider Ie sens.Ces episodes ?e la ~on?~tion cons~antinienne travestie en victoire hippique nesont pas plus a retemr ICI que celui du consul Kallistratos acclame par les Vertset se refugiant dans une eglise malgre le pardon de I'empereur=. Tout trahitl 'invention tardive; Constantin ne s'est pas appuye sur les Bleus".

    La division en couleurs est attestee, pour la premiere fois sans doute aC,o~stantin?ple, d~ns une homelie prononcee par Gregoire de Nazianze en 380,ou II est dit que SI les fideles de la capitale s'appellent chretiens de la mememaniere que Verts et Bleus , ce nom est peu de chose'. Allusion discretepresque reticente, qui permet seulement de conclure que la division de I'Hippodrom;en Verts et ~leus est bien connue de l'ensemble des fideles et qu'elle partage endeux Ie public au sens large, non pas seulement les membres officiels des demes,Mais en ce debut du regne de Theodose I, nous avons encore affaire a une parti-cularite de I'Hippodrome plutot qu'a un phenomene social et politique. Inversementdans la deuxieme moitie du regne de Theodose II, plusieurs sources nous assurentque l'agitation des factions prend un tour politique et parfois sanglant. Nestoriussignale qu'en 430 les factions du peuple qui combattaient (entre elles?) au sujet(du nom a donner a Marie) vinrent ensemble au palais episcopal 6. On souhaiteraitque Ie texte soit plus clair, mais tel quel il suggere une intervention du peuplegroupe en factions dans la politique religieuse. A la date de 445, Marcellinus Comesdonne la premiere mention de troubles sanglants, nes a l'Hippodrome, mais ayantsans doute degenere en affrontement dans les rues de la capitale : Apud Byzantiumpop~lari orta in circo seditione multi invicem occiderunt, multaque intrinsecushominum pecudumque morbo corpora perierunt 8. Texte precis, cette fois, quiparle des luttes factionnelles, mises sur Ie merne plan qu'une epidemic, comme d'une

    maladie sociale; premier texte aussi qui nous montre une emeute a Constantinopleprendre une forme factionnelle.

    Ainsi, avant d'etudier les renseignements foumis par Malalas, nous pouvonsdeja .dater approximativement la recente perversion denoncee par Procope,et constater qu'elle est contemporaine des grandes crises religieuses qui n'ont paspeu contribue a mobiliser la population de Constantinople, mais aussi de gravesmenaces exterieures et surtout d'un mouvement demographique d'une exception-nelle ampleur.

    Cette premiere conclusion est confirmee par Malalas; car, bien que son ceuvredeploie de Romulus a Justinien une sorte de theorie de I'Hippodrome et des factionsou se confondent histoire et legende, ce n'est qu'a partir de Theodose II que ladivision du peuple de Constantinople en Verts et Bleus est presentee comme unprincipe de la vie politique byzantine.

    Theodose II est caracterise d'emblee comme un empereur favorisant lesVerts 1 , ce que beaucoup d'historiens modemes ont interprete comme une alliancepolitique avec une partie de la population de la capitale et de l'Empire, sur laquellel'empereur aurait fonde son autorite 2; il aurait, au demeurant, change d'orientationa la fin de son regne et abandonne les Verts, devenus monophysites, pour setoumervers les Bleus, que favorisait sa sceur Pulcherie ". Cette reconstitution n'a d'autrefondement que la disgrace de Chrysaphios (dont on sait en effet qu'il etait Vert )et I 'idee qu' a p ri or i tout acte politique est a cette epoque traduisible en langagefactionnel. Or Malalas lui-meme ne va pas aussi loin. Apres avoir signale quel'empereur favorisait les Verts, il ne fait nullement de cette preference une expli-cation politique du regne : ce sont les Byzantins , et non des factions, qui poussenta l 'Hippodrome des cris juges seditieux en faveur de Kyros', et Malalas insisteailleurs sur le fait que Theodose II etait aime du peuple entier et du senat 6,ce qui conviendrait mal a un empereur partisan.

    En fait, Ie seul passage de Malalas qui pretende montrer Theodose II dansl'exercice de sa politique par tisane est le recit du partage des gradins de l'Hippodromeentre Verts et Bleus, avec les protestations et les explications qui en resultent+.Or cet episode, dont nous avons vu qu'il ne peut etre isole d'un contexte Iegendaire,ne prend un sens satisfaisant et une certaine vraisemblance historique que si l'on

    I.Patria, ed. PREGER,I, pp. 41-42,48, 54 (Parastaseis, 38,41 , 52); II, pp. 172-173 (pseudo-KODINOS).Voir plus haut, p. 308.2. Patria, ed. PREGER, I, p. 59; II, p. 173. Voir plus haut, p. 315.3 Les conclus ions de J. JARRY a ce s ujet ne sont pas acceptables (Heresies et factions,pp. 144-148 , 227)4 GREGOIREDE NAZIANZE,Or., 37 (in Matth., XIX, 1-12), 18, P.G., 36, co! . 301-304.Cf. A. MARICQ,Factions du cirque et partis populaires, p. 416.5 . Le li vre d 'Her acli de de Damas, t rad . NAU, p . 91 .6. MARCELLINUSCOMES,anno 445, 2, M.G.H.a.a., XI, p. 81.

    I.MALALAS,Bonn, p. 351.2 . Depuis G. MANO]LOVICLe peuple de Constantinople, P- 640) jusqu 'a J. JARRY (loc. cit.},3. Voir par exemple F. DvORNIK,The Circus Parties in Byzantium, Byzantina Metabyzantina,

    I, 1946, p. 126.4. MALALAS,Bonn, pp. 361-362. II est vra i que Chron.Pasch., Bonn, p. 588, parle a cette occasionde ' t " a (.LtPll.

    5. Ibid., p. 358, I. 5-6.6. Voir plus haut, p. 345.

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    4/10

    352 LE PEUPLE DE LA CAPITALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 353

    suppose l'empereur reglant de facon indifferente un probleme de simple protocole,surpris ensuite de l'ampleur du mecontentement et des risques d'emeute, et inventantapres coup une preference secrete pour apaiser la rancceur du parti defavorise.Ceparti est du reste leparti Vert qui, passant de la droite de l'empereur a sagauche,se sent brime par la nouvelle repartition des places; et les paroles consolantes del'empereur ressemblent bien a une fausse excuse, premiere version historique de laduplicite que Romulus, selon notre auteur, avait erigee en principe de gouvernementet que Justinien, selon Procope, utilisa lui aussi pour soumettre les seditieux a I'autorite imperiale, en feignant une divergence d'opinions entre Theodora etlui-meme : Theodora faisait semblant d'etre entierement devouee awe Bleus...Justinien faisait comme s'il s'en indignait et s'en fachait secretement, sans etrecapable de donner des ordres contraires ala volonte de sa femme 1.Ainsi comprisle recit devient non seulement plus coherent, mais plus interessant historiquementpuisque, au lieu d'un souverain arbitraire dans ses choix, il nous montre unepopulation urbaine dont les structures sociales eclatent, un debordement del'Hippodrome sur la Ville qui est pour la premiere fois de nature a compro-mettre I'autorite de l'empereur. Celui-ci se soumet a un jeu politique plus qu'ilne le choisit.

    Qu'en est-il sous Marcien? Cet empereur, nous disent Malalas et le ChronikonPaschale , favorisait le parti des Bleus , non seulement a Constantinople, mais engeneral dans lesvilles de l'Empire (X!XT!X 1t6ALV). La preuve: A la suite des troublesprovoques par le parti des Verts (Ie texte n'en precise pas Ia cause et ne laisse passupposer qu'il s'agisse de la succession de Theodose II), il alla jusqu'a promulguerune sainte ordonnance (6e:t!X aL

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    5/10

    354 LE PEUPLE DE LA CAPITALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 355

    Institution politique ? L'expression risque d'abuser et elle est equivoque.On a en effet cherche a expliquer Ie phenomene demotique a Constantinoplecomme une resurgence du sentiment democratique et de la politeia helleniques+;

    simple jeu de mots. On a ~urtout, plus o~moins clairement, r~ttache l'~pparit~ondes demes dans la vie pubhque de la capitale au mouvement d autonomie urbau~equi pousse les villes d'un Empire desempare a ~~rganiser elles-mem,~set ~ reagirpar leurs propres institutions et leur propre milice aux me~aces d mvas~on. Onaurait arme les demes del'Hippodrome pour la garde des murailles 1. Or, de 1examendes sources il ressort au contraire une evidente repugnance de l'empereur a armerles demes de Constantinople, au moment meme O U cet armement devient ~abitueldans les autres cites, grandes ou petites; et cette repugnance s'explique precisementpar le caractere politique qu'a pris dans la capitale l'institution demotique. Voyonsles textes.Lorsqu'en mai 378 l'empereur Va~ens passa par C?nstantin~ple pour gagnerla Thrace et faire la guerre aux Goths, 11trouva, nous dit Socrate , le peuple de laville decourage par les incursions barbares jusque sous les murailles, murmurantcontre les lenteurs de l'empereur et demandant des armes pour combattre. Cettedemande fut jugee insultante pour l'armee, et elle mit Valens dans une telle colerequ'il menaca de raser la ville a son retour. Constantinople, tenue pour suspectedepuis l'usurpation de Procope, est done desarmee; l'empereur veut qu'elle le reste;c'est d'ailleurs par defi que la capitale demandait des armes, et Valens comprenden effet cette demande comme une atteinte a sa legitimite.

    Lors de la seconde crise barbare, au debut du ve siecle, la situation ne s'estguere modifiee malgre l 'ampleur du peril. Ce n'est pas une milice urbaine quichasse les Goths de Gainas hors de Constantinople en 400, mais une emeute popu-laire : Synesios interprete l'evenement comme une victoire des institutions ~ivilessur la tyrannie militaire ". Et, dans la suite, le programme d'armee natlOnal.eqU'elaborent Aurelien et Anthemius ne prevoi~ pas d'armer .le peuple, marsde recruter I'armee parmi les nationaux (essentIellement parmI les pay~ans ?esprovinces), plutot que parmi les barba~es4. Rien :r:'incite a, pens~r qu'il existedesormais a Constantinople des formations populaires armees, bien que nousapprenions l'existence pour la meme epoque (apres la mort ? : Theod~se I) ~~milices rurales qui s'organisent spontanement, et surtout de milices urbaines deja

    ville est devenue, avec Ie senat, les ' t 'c l y ( J.cx : t'1X ~~(J . (Uv et les fonctionnaires imperiaux,une nouvelle Rome 1. La formule etablit une equivalence entre les formationspopulaires de Constantinople, autrement dit les demes issus des divisions del'Hippodrome, et le p op u lu s r om a nu s de Rome; elle reconnait done au peuple de lacapitale orientale un role tout particulier, nous y reviendrons, et Iehausse au niveaud'une institution d'Empire, comparable a l'institution senatoriale elle-meme. Detoute evidence, un document du temps de Theodose I seserait exprime differemment :ce qui permet de promouvoir Constantinople, c'est qu'y resident l 'empereur et lesenat "; mais Sozomene ecrit a Constantinople sous Theodose II, et il use d'unvocabulaire institutionnel dont la nouveaute montre une evolution : nous sommesarrives au moment precis O U Ie peuple de Constantin, au-dela des regles d'un rituel,s'identifie politiquement avec Ie peuple romain.

    Sur l'organisation des demes, a cette epoque et a Constantinople, nous nesavons a peu pres rien. Les textes, du moins ceux qui ne sont pas tardifs et suspectsd'anticipation, ne parlent guere de demotes et de demarques, bien qu'evidemmentils existent. Les ' t 'cly(J.IX't'1X de Sozomene, qui ne sont militaires que par metaphore(comme on parle alors du ' t 'cly(J.1X monastique) 3, representent en tout cas un grou-pement reconnu et une force organisee. Et lorsque Marcien interdit aux Vertsde 0''t'plX't'us:0'6IXL, et de 1tOAL't'S:Us:0'6IXL, nous comprenons que Ie premier verbe designel'acces individuel d'un quelconque membre du deme a un poste de l'administrationou a une dignite du Palais (la mesure accompagne la condamnation de Chrysaphios),tandis que Ie deuxieme est deja, et restera, le terme technique pour designer lafonction de representation officielle du deme Iui-meme s, L'institution est suspendue.

    I. SOZOMENE,VII, g, 3.2. C'es t laformule quijustifie le28e canon du concile de Chalcedoine (voir plus bas); Ie 3e canon

    du concile de Constantinople secontentait d'appeler Constantinople nouvelle Rome. Ainsi, l'allusionaux formations populai res de la capi tale, qu' il n'y a aucune rai son de considerer comme uneinterpolation, n'est qu'une interpretation; mais assurement c'est celIe de la capitale.

    3. Par exemple, MANSI, 8 , col. 1050.4. MALALAS,Bonn, p. 368. Cf. H.-G. BECK Konstantinopel, B.Z., 58, Ig65, p. 41, n. 80. Le

    verbe designe tres couramment au rve siecle I 'activite curiale, et ce glissement de sensest revelateurde I'evolution sociale.5. Jeu de mots, si I' on rapproche les demes byzantins des demes atheniens; mirage, si l' oncherche dans les demes et la democrati c de Constantinople un reste de I' ideal poli tique deI 'hel lenisme, une tradition dernocratique opposee au systeme aristocratique et centra lisateur desRomains (P. JOUGUET,La vie municipalsdans l'Egypte romaine, Paris, IgII, p. 348; G. MILLET, Lesnoms des auriges, Recueil Kondakov,p. 283; G. MANOJLOVIC,Le peuple de Constantinople,pp. 668-66g).I I n 'y a rien de commun entre les dernes, institution romaine, et la division de certa ines grandes

    villes de l'Orient hellenise en quartiers (cpu),a.(,&!Lcp08a.),qui permet un controle de la populationet une repartition de certaines corvees (references papyrologiques et litteraires pour Ie n~ et lerve siecle dans A. H. M. JONES, Later Roman Empire, p. 274) . ... . ..I. G. MANOJLOVIC,op. cit., pp. 622-633; suivi notamment par DJAKONov, Vizantijskie dimi 1fakcii, op.cit., pp. 162 sq. Doutes de H.-G. BECKKonstantinopel, BZ, 58, Ig65, p. 37 et n. 75

    2. SOCRATE,IV, 38; KEDRENOS,Bonn, p. 54g3. Dans la nuit du I~au 12juillet 400. SYNEsIOS,De p r o o . , I, 18; II, 1-3; EUNAPE,frag. 79,F.H.G.,IV, p. 49; ZOSIME,V, 18, 10- Ig, 5; PHILOSTORGE,XI, 8; SOCRATE,VI, 6. La revolte est sporitanee,n'a pas de chefs, ne mobilise pas une force organisee- . "4. SYNESIOS(De regno,25, P.G., 66, col. 1100) affirme que l'empereur, dans une socl(:~e ou Iondistingue deux categories sociales, les militaires et les civils.)~,devra ~econsacrer alternatlvementa l 'armee et aux cites. L'arrnee nationale n'est plus une milice urbame.

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    6/10

    356 LE PEUPLE DE LA CAP/TALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 357aguerries, qui defendent les cites fortifiees de Thrace contre Gainas '. Ce mouvementne cessera ~e serenfo~cer, de s'institutionnaliser hors de la capitale, comme Iemontrepou.r la region dan~blenne Ieprivilege demilice invoque par la bourgade d'Asemos s.Mais qua~d les. cites s~nt abandonnees a elles-memes, Constantinople reste Ie~entr~ de I Empire. Sa defense n~repos~ sur aucune autre institution militaire queI armee de campagne, dont certames unites sont detachees a la garde des murailles.Nous avons vu que ni Ie O " ' t " p o c ' t " O C ; ; T i j c ; ; r c 6 A W C ; ; du L iv re d es d re m on i es3 ni la pUatourade l'empereur Maurice 4 ou de Malalas 6 n'etaient un contingent des couleurs .

    Res~e Ie passage du pseudo-Kodinos qui assure que, sur ordre de l'empereur,la muraIlI~ terrestre fut restauree en soixante jours par huit mille membres des deux fact~~nsde~demes , ayant a leur tete Magdalas demarque des Bleus, et sonfrere. Charisios demarque des Verts, aide par son parent Eulampios. Les Bleusauraient reconstruit la moitie Nord de la muraille, a partir des Blachernes lesVerts la moitie Sud, depuis la Porte Doree, lIs se seraient rejoints a la Porte Myrian-dron ou Polyandron, ainsi nommee a cause de l'abondance de la main-d'ceuvrea l'end~oit de I: jonction des deux. equipes, nom deforme par le langage populaireen Koh~ndron . Ce texte ne constitue pas, comme on l'a dit, la premiere mentionsure de.l armement du peuplede Constantinople t ; d'abord parce qu'il n'est pas sfir,e~ensuI.teparce que Iepeuple qui repare en hate les murailles ecroulees, par crainted un raid des Huns, forme une main-d'oeuvre mobiljsee, non une troupe armee.

    Les circonstances et I'evenement lui-meme sont connus par des documents epi-graphiques irrecusables; mais toutes sortes de confusions, de contaminations ont tresvite altere la tradition, et Ie recit du pseudo-Kodinos les reproduit et les amplifie '.Nous avons vu que la mention des demarques freres est probablement Iegendaire.L'etymologie Polyandros-Koliandros est evidemment fantaisiste". Quant a lamention de 8000 ouvriers appartenant aux deux factions des demes , aucuntexte serieux, aucune inscription ne la confirme. Nous croyons pouvoir l'expliquerainsi : une partie de la tradition attribue par erreur la reconstruction des muraillesa Kyros (au lieu du prefer du pretoire Constantin), influence par sa reputationde constructeur et de renovateur de la ville"; or Kyros, a cause de sa mesaventurea I'Hippodrome+, est volontiers associe a I'evocation d'une activite factionnelledans la capitale. II n'en faut pas plus, sans doute, pour transformer en demotesBleus et Verts les ouvriers du chantier d'urgence de 447-448.

    Ainsi, non seulement Constantinople ne donne pas l'exemple de l'armementde ses demes en milice urbaine, mais il n'existe d'abord aucun lien apparent entrele regime des factions et les diverses formes de mobilisation urbaine que lecirconstances peuvent imposer dans la capitale. Et cette conclusion reste valablebien au-dela du regne de Theodose II:es 200 ou 250Verts equipes militairementqui soutiennent l'usurpateur Hypatios en 532, lors de la sedition Nika, ne son

    I. Z~>SIME,v, 19,6 : ces milices de Thrace sont doric constituees des la fin du IVe siecle : mais< :ons ta?tmople n 'e st pas a i ncl ure pa rm i ce. s c it es de Thrace , Les tex te s l es p lu s net s pou r I'epoqued Andnn ople s ont ceux de THlhl ISTIOS, DISC . XIV et XV, et cel ui d'AMMIEN MARCELLIN, XXXI6, 2; c~. V' ,VELKOV, Bemerkungen i iber d ie wir ts chaf tl iche Rol le der stadtischen P lebs in der DiozeseThrakien irn 4 Jahrhundert, in D ie R ol le d er P le bs i m s pi it ro m is ch en R ei ch , Berlin, Giirl itzer Eirene-Tagu~g, 1967, pp. 55-56. Voir aussi E. DEMOUGEOT, De l'uniu a l a d i vi s io n , p. 168; L. ROBERT,Hellenu:_a ,IV, p. 61, n. 2 e t 3; l es i nscr ipt ions de Tegee , At hene s et Megar e qui i ndi quent une res is tanc ea Alaric, I.G., V, 2, 153; III, 636; VI I, 93; PREMERSTEIN , Ze i tsch r if t fu r deu t sche sA l t e r tum 60 1923pp. 71-.80, et O. FIEBI.NGER,Inschrif tensammlung zur Geschichteder Ostgermanen, neue Folge, De~ks~hrifte~der Wlener Akaderrue, 70, 3 a-b.

    2. THEO~HYLACTE SIMOKATTES,VII, 3, ed. de BOOR, pp. 249 -251.3 De c e ru n ., I, pp. 449-450 (voir plus haut, pp. 112-113, 345).4 L~ p eda tu r a mu ro~ . Sous Maurice, Ie peuple la renforce, il ne la constitue pas: e :t 3e 3'ijfL6c;;

    e cr 'n ~ TlJ 7t"6Ae:~,3~ov xcxxdvouc;; crufLfL(~cx~v TCXrC;;OUTe:XOUC;;t"e:3IXTOUpCX~C;;;tra tegikon , XI, 3.~ p ed at ou ra apparart encore dans Ie L i vr e d e s c e rem o ni es comme une garde de soldats; les factionscrient : Vous, ceux de la pldatoura , levez-vous, adressons nos vceux aux souverains! (D e c e rim .,I, 69, Bonn, p. 318, ed. VOGT, II, p. 124).

    5 MALALAS,Bonn, p . 351 :T

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    7/10

    358 LE PEUPLE DE LA CAPITALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 359

    peut-etre que des recrues de l'armee dont la sympathie va aux Verts"; on ne doitpas donner le sens d'une institution militaire a cette escorte qui accompagne ledeme des Verts ( [ L e' t" o c 7 t O C p O C ~ \ )A O C X ' Y j ~ ) a l'issue d'un hippikon au temps deJustinien 2;pendant I'annee terrible 540, il n'y a aucune milice populaire a Constantinople;et en 559, quand les Huns sont a proximite de la capitale et que Belisaire n'a presqueaucune troupe a sa disposition, Agathias ne nous dit pas qu'i l uti lise les dernes,mais qu'il precede a un recrutement dans la population urbaine, dont Ie caractereexceptionnel et la valeur derisoire sont soulignes", II faut attendre 583-584, quandMaurice va avec I 'armee jusqu'aux Longs Murs pour une campagne contre lesAvars en laissant aux demes la garde de la capitale ' , et 602, quand il confie (sansillusion) sa defense contre l'usurpateur Phocas a 1500 Verts et 900 Bleus", pouravoir des faits assures et des chiffres serieux, A cette date, I'autodefense est deja deregle partout ailleurs, en Mesopotamie et en Syrie contre les Perses, en Thraceet en Macedoine avant meme les premieres attaques avaro-sklavenes", Ce quenous voyons a Antioche et a Thessalonique, nous ne le trouvons pas a Constantinople.Et a Rome? Pour la premiere fois,la population est armee en440 contre lesVandales,mais il ne semble pas qu'on lui laisse ses armes 7. Ce qui parait bien signifier que,dans les deux capitales de l'Empire, la transformation du p o pu l us r om an u s en soldatsest une mesure provisoire de salut public, dont on craint qu'elle n'ait des consequencespolitiques et n'introduise la subversion.

    ne veut sans doute pas dire autre chose lorsqu'il considere les ' t" o c Y [ L oc ' t" o c 3 ~ [ L (U v dela nouvelle Rome comme un privilege qui la met au-dessus des grandes cites del'Orient.

    Reprenons le cas d'Antioche. Nous avons vu qu'au IVe siecle, dans I'epoqueencore indecise de l'Empire des cites, l'hippodrome y est transforme parfois enarene polit ique par la presence imperiale. Ce n'est plus guere le cas a partir duregne de Theodose I; et si les courses connaissent un succes persistant ', ellesrestenttoujours assez proches de la tradition agonistique des jeux Olympiques, et leurcaractere de liturgie se perpetue ", tandis qu'il est tout de suite estompe a Constan-tinople par le ceremonial imperial. L'ceuvre si dense, et maintenant si bien connue,de Libanios ne contient aucune allusion a une opposition factionnelle qui puisseconfirmer les surprenantes affirmations de Malalas sur une querelle entre Vertset Bleus sous Caligula et sur Ie mauvais accueil reserve a Julien par les demotesde la ville", Sans aller jusqu'a nier l'existence de couleurs ,disons avec P. Petitqu'aucun document ne montre leur intervention dans les multiples conflits quiagitent alors la societe d'Antioche non plus que dans Ia vie politique de la cite ' .Dans un passage de l 'Antiochikos, Libanios se felicite meme que les competitionshippiques d'Antioche ne soient pas troublees par les factions ( O C O ' 't " O C O " L O C O '' t" O V ) :or ce discours cherche pour l'essentiel a montrer la superiorite de la grande citesyrienne sur Constantinople+ ... L'allusion signifie done que les courses d'Antioche

    Comme institution politique, les demes seraient done d'une certaine facon lamarque de Ia capitale. Disons plus precisement, puisque hippodromes et demesexistent depuis longtemps hors de Constantinople", qu'ils y ont pris un sens et undegre d'organisation nouveaux au contact de l'institution imperiale. Sozomene

    I. Chron. Pasch., Bonn, p. 625; TH1~OPHANE,ed, de BOOR,p. 185.2. MALALAS, Bonn, p. 490.3. AGATHIAS,V, 15-16.4. THEOPHANE, ed. de BOOR, p. 279; THEOPHYLACTE SIMOKATTES,VII, IS, 7, ed. de BOOR,

    P2725. THEOPHYLACTESIMOKATTES,VIII, 7, 10-11, ed. de BOOR, p. 297. De meme, Phocas confie

    la garde de la vi lle aux demes contre Heracl ius (JEAN D'ANrIOCHE, F.H.G., V, p. 38); cette mesuremili ta ire a evidemment des impl icat ions poli tiques : ils'agit d'I nteresser I e peuple de la capitale ala sauvegarde de l 'empereur.

    6. Ant ioche contre les Perses : PROCOPE,Bell. pers., II, 8, II; 17; 28 , cf. B. RUBIN, Justinian,pp. 329 sq. Jerusalem en 614 : SEBEOS,Histoire d'Htraclius, t rad. F. MACLER,p . 68. L'Egypte :JEANDENIKIOU, trad. CHARLEs,passim (Iors des crises interieures on recrute des Verts). Thessalonique lorsdes attaques avaro-sklavenes : Miracula Demetrii, I , 97, P.G., 116, col . 1276 et passim.

    7. VAI.ENTINlEN, novelles 5, 3, de mars 440; 8, I, du 9 juin aao ; 8, 2, du 27 janvier 441.Cf. CONDURACHI,Factions et jeux du cirque a Rome au debut du Vie siecle, Revue historique du Sud-Esteuropeen, J8, 1941, pp. 95-102, et A. CHASTAGNOL,Prefecture urbaine, p. 83.

    8 . La seule Expositio totius mundi, au milieu du IV. siecle, signale des cirques a Antioche, Laodicee,Tyr , Beyrouth, Cesaree, Nicornedie (ed. ROUGE,pp. 164-166 et 184) .

    I . LmANIos se plaint que ses compatriotes preferent les courses aux livres et font plus de casd' un cocher que d'un sophiste (Or., XXXV, 13; XXXVI , 15); Julien reduit le nombre des coursesde 16 a 6 d ans une seule journee (LmANIos, Or., XVI, 41). Voir aussi H. SEYRIG,Amulettes et sortilegesd'Antioche, Berytus, II, 1935, pp. 48-50.

    2. Les courses hippiques sont une des l iturgies les plus lourdes; l 'empereur subvient rarementala depense a Antioche (LIBANIOS,ep. 381), et les notables qui s'en chargent font figure de bienfaiteurs(JEAN CHRYSOSTOME,Homelie sur la vaine gloire, 5, ed, A-M. MALINGREY pp. 78-80) . Cf . P. PETIT,Libanius et la vie municipale a Antioche, pp. 136-139.

    3. MALALAS,Bonn, pp. 244 et 327.4. P. PETIT, op. cit., p. 141. L'hippodrome d'Antioche est evidemment le lieu d'un rassemblement

    populaire qui peut se transformer facilement, nous I 'avons dit, en manifestation ou emeute. Maisdans les emeutes dont nous connaissons en detai l Ie deroulement a la fin du IVsiecle, aucun caracterefactionnel n 'apparai t, contrai rement a ce que suggere GREGOrRE(Le peuple de Constant inople oules Bleus et les Ver ts , op. cit., p. 573); recti fiant l 'Interpretat ion des defixionum tabellae, nOS 15 et 16de A. Audol lent , Louis ROBERTvoi t dans ces inscr ipt ions une r ivali te entre deux mimes d'Antioche,I 'un Vert, l'autre Bleu : nous restons dans le monde du cirque, ou en tout cas du spectacle (Etudesepigraphiques et philologiques, pp. 99-102) . Dans son etude, Les Perses a Ant ioche, Bulletin de la Faculudes Lettres de S t ra sbourg ; 31, 1935, J . GAGE se fonde trop exclusivement sur Ie temoignage de Malalaspour prouver l 'existence de f.tctions a Antioche avant le v siecle et d 'une vie poli tique fondee sur ladivision factionnelle.

    5. Or., XI (Antiochikos); 268 : 0 ,) )( t ru tW II c Xy c7 w

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    8/10

    36 0 LE PEUPLE DE LA CAP/TALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 36 1restent fideles a la tradition purement agonistique de l'Orient hellenique, par oppo-sition a Constantinople OU lesjeux degenerent en O''t'IXO'Lt; politique. C'est reconnaitre,bien avant Sozomene et dans un esprit tout contraire, Ie role particulier des' t' IX Y [ La : t' o c 8~ [ Lwv de la capitale.

    Libanios ecrit au IVe siecle, et il schematise. La O'TIXO'Lt; politique ne reste pasen realite Ie privilege de Constantinople; mais Ie probleme est de savoir, dans lariche documentation qui a ete rassemblee pour une etude de l'activite factionnellehors de Constantinople 1, OU s'arrete l'organisation liturgique et OU commencel'organisation politique. Or le seul document retenu qui soit anterieur a la deuxiememoitie du ve siecle, done anterieur a l'essor des demes a Constantinople, un papyrusdes archives d'Aurelius Isidorus du 16septembre 315, fait mention d'un ,?ocxTLovapLOt ;Bleu d'Alexandrie, Hephaistion, dans lequel on ne sait trop s'il faut reconnaitreun cocher ou le chef d'une faction 2. Ce qui merite le nom d'activite factionnellen'apparait que plus tard. Malalas en parle pour Antioche, avec des details quipour la premiere fois donnent l 'impression d'authenticite, sous Zenon et sousAnastase+; le meme auteur signale un affrontement a Cyzique sous Justinien 4;les papyrus nous montrent qu'au Vie siecle la division entre Bleus et Verts rythmeen Egypte, peut-etre plus qu'ailleurs, la vie publique ",Pour la fin du Vie et Ie debutdu Vile siecle, des temoignages epigraphiques montrent l'existence de factions enAsie Mineure (Stratonicea, Priene, Didyme, Ephese), en Syrie-Palestine et enEgypte", et des sources litteraires, comme les Mir acu l a Deme tr ii ou la Chronique deJean de Nikiou, evoquent leur participation aux troubles de la meme epoque ouleur attitude lors des invasions, comme si elles etaient desormais une institutionpopulaire 7.

    On peut done supposer que cette tonalite politique nouvelle vient de Constan-tinople, et que les demes de la capitale ont ete, un peu comme Iesenat, l'instrumentd'une restructuration de l'Empire. II y a assurement communication, et bientotsolidarite entre les couleurs d'une ville de l'Empire a l 'autre : sous Zenon, lemagis ter praesenta l i s Longinos, frere de l'empereur, remplace les chefs des demes deConstantinople en faisant appel a des personnalites nouvelles d'Alexandrie, d'Emese,de Cyzique+; sous Anastase, on transfere a Antioche un ,?OCXTLOVIXPLOt ; Vert deConstantinople=; sous Justin, un mouvement d'emeute parti de Byzance gagnetout l'Empire, et la democratie des Bleus (entendons leurs violences) provoquel'exil des responsables de la faction dans toutes les villes sauf .Alexandrie>; sousJustinien, les Bleus de Tarse, qui ont a se plaindre du comesMalthanes, sont venges.par les Bleus de Constantinople qui assaillent Ie fonctionnaire pendant son sejourdans la capitale+, Tout est evidemment orchestre de Constantinople, OU la 7tPO't'WI)O'Lt;imperiale s'exerce d'abord et directement; et, comme le suggere l'expression stereo-typee de Malalas, lejeu politique passe ensuite de la capitale dans toutes les villesde l'Empire, x oc 't 'o c 7 t 6ALV6 Ces exces se commettaient a Byzance, mais aussi danschaque vil le, ecrit Procope. Car il en fut de cette maladie comme de n'importequelle autre: apres avoir pris naissance ici (a Constantinople), le mal gagnait toutl'empire des Romains '.

    Antioche paienne et chrltienne, pp. 60-61. L'Expositio totius mundi, dans sa tres breve not ice sur Constan-tinople, note l'importance particuliere de ses jeux : Nec non vero e tiam circensium spectaculumsaevissime spectatur (on s'y passionne furieusement pour les spectacles du cirque), renseignement dela merne date que l'allusion de LIBANIOSt qui en confirme I'jnterpretation (50, ed, ROUGE,p. 186).

    I.Ai. CHRISTOPHILOPOULOU, Ol tX't"6C;T I j c ; KWVO"'t"OtVTIVOU7t6AeWC;U~Ot\l't "IVO('ij(LOLXOtPLO"'t"1]PLoVtc ; A. K. "OpAOtv8ov,II, pp. 328-360.

    2. AI. E. R . BOAK H. CHAYYruYOUTIE, Th e archives of Aurelius Isidorus in the Egyptian Museum,Le Caire - Universite du Michigan, Ann Arbor, 1960, 58, pp. 13-14; commentaire de Ai. CHRISTO-PHILOPOULOU,p. cit., pp. 329-332, qui insiste particulierement sur Ie role du

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    9/10

    362 LE PEUPLE DE LA CAPITALE LES FACTIONS DANS LA VILLE 363

    primitive. Aussi faut-il nuancer lesinterpretations, qui different sensiblement entre elles, de G. MANOJ-LOVIC,op. cit., pp. 644-655, etJ. JARRY,Heresies etfactions, pp. 124-125 et 157-172.I. Depuis Manojlovie, on considere generalement que les Bleus constituent une classe socialementsuperieure, comptent des partisans dans les quartiers distingues de Constantinople, dans les fau-bou rgs des Blache rne s, ho rs de l a v il le dans l es m il ie ux ruraux ; au cont ra ir e, l es Ver ts forment l amasse urbaine des ouvriers, des marins e t des commercants, surtout implantes dans les quart ie rsmaritimes.J.JARRY (op. cit., pp. 157-172) aboutit a desconclusions differences : lesquartiers portuairese t le grand commerce marit ime seraient Bleus, a insi que les fonct ionnaires du Palais; au contrai re ,les grands proprietaires fonciers, les petits marchands et les ouvriers seraient Verts. Nous n'entamonspas i ci une d iscu ss ion qui por ter ai t sur d es t ext es du VIe s i ecl e et qu i me ttr ai t e n evidenc e un seu lpoint: le caractere plus populaire des Verts, que nous expliquons differemment,

    2 . G. MANOJLOVI6(op. cit., pp. 656-657) e tabl issa it une l ia ison Vert-monophysisme, Bleu-orthodoxie au temps du concile de Chalcedoine sur la simple remarque que Chrysaphios est le patrondes Verts (d'apres Malalas), e t qu' il favorise I 'heresie monophysi te (THl~.OPHANE,d, de BOOR,pp. 100-101). Plus systematiquement, J. JARRYs'efforce, dans son livre Heresies et factions, de fairecoincider phenomene factionnel et phenornene heretique,3 . Ala dua li te des demes correspond en tout cas une denonciat ion unique de la democra tie e t dela demagogie (cf . PALLADIOS,Dial. 5, ed. COLEMAN-NoRTON,. 29, contre les intrigants deConstantinople, 't'ou

  • 8/3/2019 DAGRON, Gilbert, Naissance d'Une Capitale. Les Factions...

    10/10

    36 4 LE PEUPLE DE LA CAPITALE

    Ce peuple de notre histoire, en sedition alternee (O " 't "O tO "LW' t " IXL , a . ' I I' t "LO " ' t "O tO "LW' t"O tL ),ne represente ni classes sociales, ni partis; il prefigurerait plutot les fityan-ayyarunde Bagdad, une jeunesse sportive et militante , et a double sens politique :tantot gendarme, tantot voleur ' . Un phenomene urbain de l'Orient medieval .

    I. La question des rapports entre les demes byzantins et les associations urbaines de l 'I slammedieval sort evidemment du cadre de cette etude. Nous renvoyons, pour ces dernieres, aux travauxde C. CAHEN, Zur Geschichte der stadtischen Gesellschaft im islamischen Orient des Mitte1alters,Saeculum,9, 1958, pp. 59-76; Mouvements populaires etautonomismes urbains, Arabica, V, 3, 1958 ,pp. 225-250, e t V, I , 1959, pp. 25-26; No u ve ll e E n cy c lo p e di c d e l 'I sl am , s , v . Ahdat; E. AsHTON-STRAUSS,L'administration urbaine en Syrie medievale, R i oi st a d e gl i S tu d i o r ie n ta li, pp. 73-128. Les ahdat de Syrie-Palestine (anciens territoires byzantine) et les ayyarun-fityan (termes et notions distinctes, mais quirecouvrent sans doute une meme realite sociale) dans les villes d'Iran sont des associations de jeunesgens, tantot pourchasses comme emeutiers, tantot charges du maintien de l 'ordre; e lles n'ont pasde caractere corporatif ni professionne1, et ne correspondent pas a une structure de c1asse. EI1essont done apparemment un phenomene purement urbain. Propre a l 'I slam ? S'il n'est pas questiond 'y voir le simple prolongement des demes byzantins, on peut noter que les differences sont moinsmarquees qu'on nel 'a cru, e t que les phenomenes sont socialement comparables . Deja Sp. VRYONISa montre que les demotes byzantins sont caracterises dans les textes comme des jeunes (v&O(v((X~= fityan) :Byzantine Circus Factions and Islamic Futuwwa Organisations, B.Z., 58, 1965, notammentpp. 52-56. Nous pouvons ajouter que ce caractere de jeunesse est en rapport avec les ritue ls derenouvellement du Cirque-Hippodrome. De plus, I 'argument qui oppose I'unite des associations isla-miques a la dualite des demes n'a pas, nous croyons I'avoir montre, une valeur determinante.

    L'EGLISE DE CONSTANTINOPLE ...