Cyberlobbying Ou Les Nouvelles Logiques d Influence Sur Internet

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Base de Connaissance AEGE : http://www.bdc.aege.fr LE CYBERLOBBYING Ou les nouvelles logiques d'influence sur Internet L’industrie des biotechnologies a parfaitement compris le message et a modifié en conséquence sa stratégie de communication sur les OGM. Le site Internet « 217 » répond aux interrogations de l’opinion publique. Mots clés Influence, Lobbying, Cyberlobbying, Internet, OGM 03/2003 Auteurs : C4iFR, Antoine Violet-Surcouf Le(s) auteur(s) de ce document d’analyse, d’opinion, d'étude et/ou de recherche a autorisé l'AEGE à enregistrer l'article dan s la base de données, dénommée : bdc.aege.fr. La diffusion, publication subséquente est aussi autorisée par l'(es) auteur(s) sur toutes formes de support écrit, électronique à l’ensemble des utilisateurs de cette base de données. Aucune autre forme de diffusion n'est autorisée. L'analyse, l'opinion et/ou la recherche reposent sur l'utilisation de sources éthiquement fiables mais l'exhaustivité et l'exactitude ne peuvent être garantie. Sauf mention contraire, les projections ou autres informations ne sont valables qu'à la date de la publication du document, et sont dès lors sujettes à évolution ou amendement dans le temps. Le contenu de ces documents et/ou études n'a, en aucune manière, vocation à indiquer ou garantir des évolutions futures. Le contenu de cet article n’engage la responsabilité que de ses auteurs, il ne reflète pas nécessairement les opinions du(des) employeur(s), la politique ou l’opinion d’un organisme quelconque, y compris celui de gouvernements, d’administrations ou de ministères pouvant êtres concernés pas ces informations. Et, les erreurs éventuelles relèvent de l’entière responsabilité des seuls auteurs. Les droits patrimoniaux de ce document et/ou étude appartiennent à l'Association AEGE, voire un organisme auquel les sources auraient pu être empruntées. Le(s) auteurs ont expressément cédés les droits patrimoniaux subséquents à l'insertion de ce(s) document(s) dans la base de données bdc.aege.fr. Toute utilisation, diffusion, citation ou reproduction, en totalité ou en partie, de ce document et/ou étude ne peut se faire sans la permission expresse du(es) rédacteur(s) et du propriétaire des droits patrimoniaux.

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Base de Connaissance AEGE : http://www.bdc.aege.fr

LE CYBERLOBBYING

Ou les nouvelles logiques d'influence sur Internet

L’industrie des biotechnologies a parfaitement compris le message et a modifié en conséquence sa stratégie de

communication sur les OGM. Le site Internet « 217 » répond aux interrogations de l’opinion publique.

Mots clés

Influence, Lobbying, Cyberlobbying, Internet, OGM

03/2003

Auteurs :

C4iFR, Antoine Violet-Surcouf

Le(s) auteur(s) de ce document d’analyse, d’opinion, d'étude et/ou de recherche a autorisé l'AEGE à enregistrer l'article dans la base de

données, dénommée : bdc.aege.fr. La diffusion, publication subséquente est aussi autorisée par l'(es) auteur(s) sur toutes formes de support

écrit, électronique à l’ensemble des utilisateurs de cette base de données. Aucune autre forme de diffusion n'est autorisée. L'analyse, l'opinion

et/ou la recherche reposent sur l'utilisation de sources éthiquement fiables mais l'exhaustivité et l'exactitude ne peuvent être garantie. Sauf

mention contraire, les projections ou autres informations ne sont valables qu'à la date de la publication du document, et sont dès lors sujettes

à évolution ou amendement dans le temps.

Le contenu de ces documents et/ou études n'a, en aucune manière, vocation à indiquer ou garantir des évolutions futures. Le contenu de cet

article n’engage la responsabilité que de ses auteurs, il ne reflète pas nécessairement les opinions du(des) employeur(s), la politique ou

l’opinion d’un organisme quelconque, y compris celui de gouvernements, d’administrations ou de ministères pouvant êtres concernés pas ces

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Les droits patrimoniaux de ce document et/ou étude appartiennent à l'Association AEGE, voire un organisme auquel les sources auraient pu

être empruntées. Le(s) auteurs ont expressément cédés les droits patrimoniaux subséquents à l'insertion de ce(s) document(s) dans la base de

données bdc.aege.fr. Toute utilisation, diffusion, citation ou reproduction, en totalité ou en partie, de ce document et/ou étude ne peut se faire

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DA 201

LES DOSSIERS D’ ANALYSE

Le cyberlobbying ou

Les nouvelles logiques d’influence sur Internet

Etude de cas : le débat sur les OGM

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« Aujourd’hui, la clé du pouvoir des dirigeants réside dans l’influence et non plus dans l’autorité. »

Kenneth Blanchard1

« Les influences qu’on n’arrive pas à discerner sont les plus puissantes. »

Gustav Meyrink2

Mars 2003

1 Chef d’entreprise américain. 2 Philosophe et romancier allemand.

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- SOMMAIRE - INTRODUCTION PARTIE 1- LA PRESENTATION DES FAITS PAR LE SITE 9 1. Comment mettre en confiance les internautes ? 11 1.1 L’attractivité 11

A/ L’architecture du site 11 B/ Les couleurs, la police et les

illustrations 14 1.2 Crédibilité et neutralité 18 A/ La crédibilité du site 18

B/ La neutralité du site 21 2. Comment désamorcer les critiques des internautes ? 24 2.1 Devancer les critiques 24

A/ Protéger les liens invisibles et la

démarche adoptée 24 B/ Annoncer les failles de son

discours 26 2.2 Occuper le terrain de la connaissance 28

A/ Délimiter et contrôler les points

de polémique 28 B/ Simplifier le débat et inverser les

causalités 33 PARTIE 2 - LA STRUCTURATION DU DEBAT PAR LE SITE 40 1. Comment influencer les internautes ? 40 1.1 Les processus d’acceptation des OGM par les internautes 40

A/ L’évolution temporelle

naturelle 40 B/ L’amoindrissement des

risques 42 C/ Les perspectives et encerclements

des OGM 43

1.2 Discréditer et diaboliser pour diviser 47

A/ Le discrédit et les

incohérences 47 B/ Le fractionnement en

camps opposés 49 C/ L’isolement de l’adversaire

principal 52 2. Comment influencer selon les audiences privilégiées ? 54 2.1 Le choix des audiences privilégiées 55 A/ Le monde éducatif 55

B/ Le monde médical 57 2.2 L’emploi de supports spécifiques 59

A/ Le Journal des instituteurs 59

B/ Le test pour les élèves 62 PARTIE 3 - LA RESONANCE DU DEBAT HORS DU SITE 70 1. Comment s’appuyer sur un réseau ? 70 1.1 Comment cartographier un réseau ? 70

A/ Etape 1 : identifier les acteurs 70 B/ Etape 2 : rechercher les

connivences 71

C/ Etape 3 : créer du sens 71 1.2 Comment identifier les acteurs derrière les sites Internet ? 71

A/ Etape 1 : interroger les

bases de données d’enregistrement 71 B/ Etape 2 : rechercher des

compléments d’information 74 C/ Etape 3 : rechercher les liens

éventuels entre ces structures 75 CONCLUSION ANNEXES

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- Avant-propos -

Depuis l’arrivée en 1996 du maïs transgénique de la société Novartis en Europe, l’opinion publique française entretient une grande méfiance à l’encontre des plantes génétiquement modifiées (OGM) utilisées dans l’alimentation animale et humaine du fait principalement d’un manque d’information concernant l’identification et la nature des risques potentiels. En effet, toutes les questions qui touchent à l’alimentation humaine inquiètent surtout depuis l’affaire des farines animales et des cas avérés d’ESB. Cette obsession collective est entretenue par un manque de clarté des discours politiques et scientifiques qui ne trouvent pas le vocabulaire approprié pour rassurer les consommateurs. En outre, les OGM représentent de formidables enjeux

OGM : L'ÉVOLUTION DU DÉBAT PUBLIC Le débat public sur les OGM a commencé dans la polémique. L'échange d'invectives et d'affirmations péremptoires ne créait pas les conditions propices à répondre au besoin essentiel d'une opinion qui demandait avant tout à savoir, donc à recevoir de l'information. Les industriels, assurés de leurs connaissances scientifiques, comme les opposants, fidèles à leur vocation militante, affirmaient des convictions que l'opinion publique, prise à témoin pour obtenir des autorités publiques autorisations ou interdictions, était appelée à endosser sans les comprendre. Un nouveau contexte Aujourd'hui, chacun a compris que la priorité est à l'information sur les faits, sans laquelle aucun débat n'est possible. On retrouve ainsi la possibilité d'examiner la question des OGM en donnant la parole à chacun. Et en laissant ensuite l'opinion se déterminer librement, et en connaissance de cause. Si l'on veut continuer à nourrir ce débat, il convient de se garder de trois comportements qui constituent des régressions. Le premier consiste à tenter systématiquement de disqualifier celui que l'on considère comme " l'adversaire " en lui déniant, par principe, toute sincérité. Le deuxième est de dénoncer comme partiale toute recherche scientifique qui vise à améliorer la connaissance des faits. Le troisième est de qualifier de " manipulations occultes " toute initiative de diffusion de l'information dans le public. L'intention de ces types de comportements est toujours de réveiller la polémique, autant sur la forme que sur le fond du sujet. Et ainsi d'empêcher ou de retarder la clarification du débat. Les leçons de l'expérience Devant toute option concernant un choix pour l'avenir, l'opinion demande aujourd'hui à savoir et à pouvoir choisir. Elle refuse que des positions soient prises " à sa place " par qui que ce soit. La demande de comprendre s'impose à tout citoyen qu'il soit industriel, militant ou autorité publique. Le débat sur les OGM a été souhaité par les autorités publiques, au-delà des expertises exigées par la réglementation. Les organisations militantes l'appelaient de leurs vœux. Les industriels se sont mis en mesure d'y répondre en dehors de toute considération de concurrence entre eux, dans une démarche qui relève de leur responsabilité devant la société. C'est pourquoi l'association DEBA a été créée. Objectif : apporter des informations sur les biotechnologies végétales en s'appuyant sur les compétences des entreprises qui l'animent, en toute transparence sur la vocation de DEBA. DEBA, avec les industriels qui l'ont chargée de cette mission, souhaite poursuivre en toute clarté le travail exigeant de réponse aux questions du public en diffusant des informations vérifiées, dans le respect des thèses face auxquelles il appartient à chacun de se déterminer. Librement, et en connaissance de cause.

POPUP DE PRESENTATION PRESENT SUR LE SITE WWW.OGM-DEBATS.COM

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économiques qui, soutenus par la mondialisation libérale, imposent aux plus déshérités de la planète le renoncement à une agriculture ancestrale. Cette controverse forte et durable a néanmoins fait l’objet d’une étude qui a abouti à un rapport officiel3 qui conclut ainsi : « la plupart des acteurs ont mal compris les réactions du public et ceci représente une des causes fondamentales de l’impasse actuelle de ce débat ; presque toutes les opinions courantes de l’homme de la rue s’avèrent être de simples mythes. » D’une manière générale, « l’interprétation erronée des perceptions du public ont eu une influence déterminante sur les stratégies de communication et les décisions des organismes publics et privés ainsi que des associations de protection des consommateurs ou de l’environnement. Ainsi ces acteurs ne réussissent pas à répondre de façon adéquate aux attentes du public et donc ne contribuent pas à faire avancer le débat4. » L’industrie des biotechnologies a parfaitement compris le message et a modifié en conséquence sa stratégie de communication sur les OGM. Le site Internet « 217 » répond aux interrogations de l’opinion publique en proposant des informations précises et rassurantes sur les techniques actuelles de modification génétique ainsi que sur leurs différentes applications en insistant sur le droit à l’information, en recherchant et en associant les internautes à un débat contradictoire.

3 Perceptions publiques des biotechnologies agricoles en Europe ; rapport du projet de recherche PABE financé par la commission des Communautés Européennes - Mai 2002. 4 Cf note 6.

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- Introduction - Les Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC) permettent aujourd’hui d’entretenir au moyen d’un grand nombre d’informations de toutes natures, un contact direct et permanent avec la société et plus précisément avec ceux qui la composent : les individus. Ces informations, principalement véhiculées par le réseau Internet, font parfois l’objet de critiques, mais personne ne se risque à penser qu’elles peuvent être manipulées dans un but précis. Le doute existe bel et bien et ne peut être levé ou du moins supposé, qu’à l’issue d’une analyse prudente et objective permettant d’aboutir à une information élaborée. Si cette démarche est actuellement effectuée par des spécialistes, elle devrait bientôt ne plus être ignorée du commun des mortels pour que ce dernier puisse à son tour acquérir une information plausible sous peine d’être « mal-informé » ou « dés-informé ». Cependant ce souhait résiste difficilement à la réalité des faits à supposer que l’on puisse effectivement établir cette réalité car nous entrons ici dans le domaine des sciences de la cognition qui couvrent aujourd’hui un vaste domaine de recherche interdisciplinaire. L’étude des représentations et des stratégies mentales des individus (consommateurs, décideurs, acteurs…) comme la perception, la mémoire, la résolution des problèmes, le langage et l’apprentissage font l’objet d’actives recherches dont certaines applications apparaissent déjà dans les domaines civils et militaires : les doctrines de conflits cognitifs5 et du Perception Management6 (ou PM pour la suite de l’étude). Cette dernière doctrine définie par le Département de la Défense américain (DoD) a été adaptée aux nouveaux champs conflictuelles de la géoéconomie. Elle met en œuvre des stratégies d’influence modifiant considérablement la perception que l’on pourrait avoir des enjeux économiques. Cette stratégie qui repose essentiellement sur la maîtrise des mécanismes psychologiques adaptés aux exigences de la société de l’information, s’attache à modifier les principes de représentation mentale des individus ; la perception du monde et de leur environnement s’en trouvent alors transformé. L’objectif réside dans l’acceptation non pas de plusieurs variables cohérentes, mais de quelques unes étrangères entre elles qui constituent néanmoins un ensemble représentatif dans des domaines importants comme les Organismes Génétiquement Modifiés (OGM). Ces stratégies d’influence se doublent d’une manipulation de la connaissance parfois très difficile à démontrer.7

5« Toute forme d’affrontement de perception entre agents économiques, civils et/ou étatiques » cours de Philippe Baumard à l’Ecole de Guerre Economique dans Suprématies cognitives et opérations informationnelles. 6 « Perception Management » - Actions consistant à fournir et/ou à camoufler une information sélectionnée et des indices à des audiences étrangère de façon à influencer leurs émotions, leurs motivations et leurs raisonnements objectifs – Pour les organismes de renseignement et les décideurs de tous niveaux, ces actions consistent à influencer les évaluations officielles, pour parvenir en finale à rendre les comportements et les agissements officiels étrangers favorables aux objectifs de l’émetteur. 7 Guerre économique et information, les stratégies de subversion, Didier Lucas, Alain Tiffreau Ellipses, Paris 2001.

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Le cyberlobbying est « la mise en œuvre d’une dynamique d’influence au moyen du Réseau, par des acteurs d’influence (institutionnels, culturels, économiques, sociaux, médiatiques), en utilisant des relais d’influence (journalistes, scientifiques…), dans le but de placer en position de dépendance les destinataires d’influence c’est à dire les internautes. » Jusqu’à présent cette pratique était le fait principalement d’acteurs issus de la société civile, se réclamant d’une ingérence citoyenne. Pourvus de faibles moyens, ces groupes contestataires exerçaient de fortes pressions sur leurs objectifs afin d’essayer d’imposer leurs revendications ; il convient bien entendu de différencier les réelles associations de consommateurs des groupes d’activistes chevronnés qui, au moyen d’une agit-prop8 efficace, entretiennent un climat de subversion. Ce vocable cyberlobbying agrège la notion de lobbying qui au sens large est une démarche effectuée par un groupe d’intérêts dénommé lobby dont la mission est de convaincre de la justesse de leur projet, les personnes ayant un pouvoir de décision. Cette action délibérée destinée à emporter la conviction doit le plus souvent s’accompagner d’une démarche d’influence indirecte faisant intervenir des organisations ou des individus ; l’analyse des comportements humains prend ici une grande importance et nous rejoignons le domaine de la psychologie cognitive et plus particulièrement son application dans les sciences sociales. Notre propos en l’espèce, n’est pas de nous substituer aux scientifiques mais d’essayer de montrer par un exemple concret qu’il existe une prise en compte réelle des recherches effectuées en sciences humaines, particulièrement au plan des dynamiques d’influence dans le but d’exercer une influence sur l’opinion publique. Le réseau Internet est aujourd’hui l’un des moyens les plus appropriés. L’analyse que nous vous présentons porte sur un site Internet mis en ligne le lundi 7 octobre 2002 : http://www.ogm-debats.com ou IP : 217.174.194.186. Ce site a été créé par l’association DEBA (Débats et Echanges sur les Biotechnologies en Agriculture) à l’initiative de cinq majors de l’agroalimentaire BASF Agricultural Products, Bayer CropScience, Dow AgroSciences, DuPont-Pioneer Semences, Monsanto et Syngenta et se propose d’être un lieu d’échanges de qualité permettant de faire avancer le débat sur les OGM. C’est un site d’information et d’échanges afin de donner accès à des données actualisées, de répondre à des questions légitimes et de susciter un dialogue constructif sur les plantes transgéniques9. Afin de faciliter la lecture nous dénommerons ce site « site 217 ». Une opération de Perception Management sur un site Internet suit ce que l’on peut appeler un déroulement cognitif. Ce déroulement commence par présenter les faits à l’état brut, puis modifie la perception de la population cible pour enfin la rendre elle-même émettrice du message. Schématiquement, ce déroulement cognitif prendrait la forme suivante :

8 Agitation - propagande. 9 Le texte en italique est extrait du site.

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Présentation des faits Structuration de la polémique

Résonance de la polémique

Le site 217 suit le même déroulement. A la présentation des faits suit la structuration du débat par le site pour obtenir une résonance du débat par les internautes du site. Présentation des faits Structuration du débat Résonance du débat

Chacune des phases du déroulement cognitif doit permettre de répondre aux questions nécessaires à cette opération d’influence. La présentation des faits étant la première phase, elle répond à ces deux questions préalables :

• Comment mettre l’internaute en confiance ? • Comment désamorcer les critiques des internautes ?

La phase de structuration du débat répond ensuite à deux autres questions :

• Comment influencer les internautes ? • Comment influencer selon les audiences privilégiées ?

L’ensemble des réponses à ces questions distillées dans le site conduit l’internaute à devenir lui-même à son tour une source d’influence en se faisant l’écho du débat.

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La présentation des faits par le site Les opérations psychologiques regroupent de nombreux procédés comme la désinformation, l’intoxication ou encore la déception. Ces derniers diffèrent des opérations de PM car ils n’agissent pas sur les mêmes composants des faits. En effet, ils sont constitués de deux aspects : l’information en elle-même et la vision de cette information. La désinformation, l’intoxication et la déception agissent sur l’information en elle-même pour la corrompre soit partiellement, soit totalement. Faits manipulés

Vision intacte

Prise de décision

de la cible

Faits réels

Ces techniques sont particulièrement efficaces sur les populations qui n’ont pas les moyens ou la volonté de vérifier les informations. Elles ont également l’avantage d’influencer plus rapidement les décisions des populations cibles. Cependant, ces techniques restent plus délicates à utiliser auprès des populations qui ont accès aux informations ou qui ont les capacités intellectuelles pour les contester. Ainsi, ces techniques restent spécialement valables dans des pays dirigés par des pouvoirs forts ou dans lesquelles les populations sont faiblement éduquées. La gestion des perceptions utilise quant à elle des faits véridiques et vérifiables dont elle modifie le sens et la vision.

Faits intacts

Vision manipulée

Prise de décision

de la cible

Faits réels

Cette technique agit sur les prises de décision des populations sur le long terme, et nécessite donc une mise en oeuvre plus longue dans le temps. Ainsi, l’efficacité de ces opérations ne peut être mesurée que dans le temps puisque cette technique modifie le cœur du processus de raisonnement de la cible.

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Les doses « homéopathiques » d’influence du PM sont distillées dans une masse d’informations réelles, ce qui rend ces opérations d’influence difficilement identifiables comme telles. C’est pourquoi cette technique d’influence reste l’une des plus pertinentes dans les sociétés développées dans lesquelles les populations ont accès à l’information et au savoir. Le tableau ci-dessous reprend les différences fondamentales entre les techniques de type désinformation et le Perception Management.

DESINFORMATION PERCEPTION MANAGEMENT

Information Vision

Action directe Action indirecte

Action sur le court terme Action sur le long terme

Pays en voie de développement Pays développés

Effets facilement mesurables Effets difficilement mesurables

Action sur un événement isolé Action sur le mode de pensée

Opération facilement détectable Opération difficilement détectable

Action sur la surface du système Action au cœur du système

« Antibiotiques » « Homéopathies »

La présentation des faits remplit deux objectifs prioritaires à ce stade du déroulement cognitif :

1. Le premier objectif est d’attirer la population cible à écouter son message grâce à un discours attractif, crédible et neutre ;

2. Puis une fois la population attirée, le second objectif est de désamorcer les éventuelles critiques en les anticipant, en occupant le terrain de la connaissance et en éliminant les points sensibles du débat.

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1. Comment mettre en confiance les internautes ? Pour mettre en confiance les internautes, les sites Internet qui mènent une campagne de PM utilisent trois techniques étroitement liées qui sont l’attractivité, la crédibilité et la neutralité.

1.1 L’attractivité Le premier objectif d’une opération de PM est de réunir une audience aussi large que possible. Pour attirer cette audience, les sites Internet utilisent des techniques faisant appel au visuel. Quand un internaute parcourt un site, son attention est d’abord attirée par la disposition des informations (l’architecture du site), et par les couleurs, polices et illustrations utilisées.

A/ L’architecture du site A l’heure actuelle, la plupart des sites Internet sont structurés sous les formes suivantes :

1

2 3

Type A

1

2 3 2

Type B >> La familiarité du site L’internaute a l’habitude de retrouver le titre et le logo du site dans une bande horizontale en haut de son écran (1), les différentes rubriques (comme les liens, dossiers…) dans une ou deux bandes verticales (2), et enfin les données en tant que telles dans le corps central de la page (3). Grâce à ces types d’architectures, l’internaute n’est pas confronté à un système nouveau ; il a l’impression d’être maître de sa navigation, et même de connaître les enjeux du site10. C’est ce sentiment de familiarité que les sites de PM cherchent à obtenir pour mettre l’internaute en confiance pour qu’il baisse la garde de son esprit critique. Le site 217 ne déroge pas à la règle et propose aux internautes une lecture familière des données présentées, en se présentant sous une architecture de type B.

10 Alors que le plus souvent, les enjeux présentés par des sites de PM dépassent complètement l’internaute qui s’est laissé piéger.

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>> La familiarité de l’information Pour renforcer la confiance de l’internaute, les sites de PM utilisent cette technique de la « familiarité » dans le corps du texte. Les auteurs du site identifient les éléments de la polémique dont ils sont certains qu’un très grand nombre d’individus, donc d’internautes potentiels, connaît la teneur surtout s’ils sont présentés de manière simplifiée, caricaturale ou parcellaire. A la lecture de ces faits connus, et qui semblent donc maîtrisés, l’internaute se sent renforcé dans ses capacités à comprendre la suite de la polémique. Flatté dans son ego, il baisse sa garde et accepte beaucoup plus facilement les éléments nouveaux qui lui sont présentés. En effet, puisque ceux qu’il connaît sont vrais, pourquoi les autres qu’il ne connaît pas ne le seraient-ils pas également ? Les auteurs les glissent ensuite dans leur site de manière récurrente dans différentes pages du site pour entretenir la confiance de l’internaute.

Les points du débat sur les OGM

Des exemples de témoignage Des rubriques diverses

Le propriétaire du site

Les partenaires

Le titre du site Un court descriptif des objectifs du site

Les différentes rubriques

Un bandeau défilant

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Le site 217 utilise tout au long de ses pages ce procédé, en voici deux exemples : Exemple 1 : Dès la page d’accueil11, l’internaute peut lire deux témoignages qui s’opposent sur les OGM. Le premier témoin est pharmacien et met en avant le principe de précaution face au danger potentiel que représentent les OGM. Le second témoin est étudiant en commerce et affirme que les biotechnologies représentent l’avenir et qu’il consomme lui-même des aliments contenant des OGM sans pour autant être malade. Ces témoignages sont censés représenter le débat qui a lieu sur ce site. L’internaute peut ainsi constater dès la première page que le site lui propose bien un débat dans lequel chaque camp a la parole. L’internaute est mis en confiance et peut poursuivre plus en avant dans la lecture d’autres pages. Ces deux témoignages sont donc vitaux puisqu’ils évitent les blocages psychologiques des défenseurs d’un camp ou de l’autre. Exemple 2 : Une des contributions provient d’un professeur de l’Université de Strasbourg datée du 23 juillet 2002, Jacques-Henry Weil. Ce dernier répond à une question postée en ligne par une étudiante en médecine :

« Dans des populations normalement alimentées, peut-on imaginer une nourriture composée d’aliments plus diététiques, mieux « contrôlés », enrichis en telle ou telle substance ? Je me pose alors la question de savoir si un

intérêt pour le consommateur serait de manger plus sain ?12… » Le professeur tient un discours scientifique tout en prenant garde à rester compréhensible par l’internaute. Il rappelle ce que le grand public sait déjà, à savoir que les « maladies cardiovasculaires […] sont la première cause de mortalité dans le monde occidental. » Il mentionne ensuite les acides gras « saturés » et « désaturés » dont la population a pris connaissance lors des nombreuses campagnes de sensibilisation menées dans les années 1990 en France.

« Or le risque d’artériosclérose -dû au dépôt de cholestérol et d’autres lipides dans les vaisseaux sanguins- augmente avec

la proportion d’acides gras saturés… » Même si l’internaute n’a que de vagues et lointaines notions de ces thèmes, il a pourtant le sentiment de les connaître et de pouvoir valider ces affirmations. En confirmant ce que les internautes croient savoir, le professeur obtient leur confiance et devient ainsi une source valide d’information pour la suite de l’opération. Au final, ce sont les auteurs du site qui en bénéficient puisque le professeur se présente favorable aux OGM. Pour résumer, cette technique redoutable ambitionne un double objectif : le premier, élémentaire, mais indispensable pour la suite de l’opération de PM, consiste à attirer l’internaute dans le site pour qu’il le parcourt et pour qu’il prenne connaissance des éléments favorables aux auteurs du site. Le second objectif va bien au-delà de cette simple prise d’information, l’internaute doit faire siens ces éléments comme s’il les avait lui-même élaborés et devenir ainsi un fervent défenseur et promoteur de la cause des concepteurs du site, en demeurant sourd à tout élément contradictoire.

11 Cf « Page d’accueil » présente à la fin octobre 2002. 12 A noter que la question contient déjà la réponse. Qui peut affirmer que le consommateur n’a pas intérêt à manger plus sainement ?

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B/ Les couleurs, les polices et les illustrations >> La perception des couleurs et des polices Les couleurs agissent directement sur la perception que se fait l’internaute sur les sites. En général, les sites institutionnels (ou qui se veulent institutionnels) ont un fond blanc et utilisent une police de type Arial.

www.defense.gouv.fr

Les sites contestataires utilisent quant à eux des couleurs plus symboliques et agressives (noir, rouge…) avec des polices diverses.

www.popaganda.com

www.michaelmoore.com

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Les sites « écologiques » utilisent le plus souvent des couleurs pastel symbolique de la nature (vert, jaune..) et des polices classiques (Arial, Times…).

www.foei.org

www.greenpeace.fr

Le site 217 reprend en grande partie cette codification.

On y retrouve plusieurs variations de vert (couleur de la nature), du jaune (symbole du soleil et du maïs) et des nuances d’orange. La police utilisée est l’Arial.

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L’utilisation de ces couleurs et de la police Arial est révélatrice de la volonté des concepteurs du site 217 de rapprocher ce dernier des autres sites écologiques et environnementaux. >> Le renfort visuel des animations et des illustrations Cette symbolique est renforcée par l’animation de la partie supérieure de la page. L’internaute y retrouve un soleil, symbole de vie, dont s’échappent des rayons.

Le soleil se transforme en œil « de la connaissance » dont s’échappent les rayons « de la clairvoyance ». Le soleil laisse la place à un ciel bleu et à des plants de maïs qui semblent naître de la terre (mouvement vertical de bas en haut).

En transition, l’animation revient au soleil rayonnant.

Le soleil se transforme à nouveau en œil, et le ciel bleu cède la place à un épis de maïs et à un individu qui se pose des questions.

L’illustration de cet individu se retrouve sur la page d’accueil à côté d’un texte récapitulatif des objectifs et des enjeux de ce site.

« Vous vous sentez concerné13 par les implications des OGM en terme d'alimentation et de santé...

Vous ne trouvez pas de réponses à vos questions ? Vous avez une opinion sur le sujet ?

Quelque soit votre position, exprimez-vous, réagissez sur ce forum... »

Les concepteurs du site ont nommé cette image : « penseur ». Cet individu qui prend une pose dubitative représente l’internaute qui se pose des questions et qui va chercher ses réponses dans le site.

13 sic.

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A chaque catégorie d’audience visée correspond une illustration. Si celle du « penseur » correspond au grand public, on retrouve également celles-ci :

Cette petite fille qui mâche un épis de blé correspond au dossier pour les « médecins ». Cette illustration pourrait évoquer la jeunesse, la bonne santé et la nature.

Cette image est censée représenter les « enseignants ».

Enfin, cette dernière représente un « jeune » qui semble vouloir poser une question. Comme pour l’homme dubitatif, ce jeune curieux doit trouver les réponses à ses questions sur ce site.

Les illustrations sont utilisées ici comme des renforts visuels pour conforter le message véhiculé. De plus, la phrase « Participez au débat » qui se déplace au centre de la page d’accueil est une invitation (voire un ordre) à l’action, c’est à dire poursuivre plus en avant dans le site. >> Réussir à attirer l’internaute à lire le débat du site dépend également de la crédibilité que l’internaute accorde au site.

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1.2 Crédibilité et neutralité De nos jours, chaque internaute peut devenir éditeur de sa propre information sur Internet ; les apprentis journalistes qui ne recoupent pas l’information y côtoient les désinformateurs professionnels. L’insécurité face à l’information rend les internautes de plus en plus méfiants vis à vis des données présentes sur Internet. Pour que les internautes aillent plus en avant dans les sites, les concepteurs de sites de PM doivent les rendre crédibles. Qu’est-ce qu’un site crédible ? Il doit contenir des informations pertinentes, vérifiées et vérifiables, émanant de sources reconnues. De plus, à aucun moment l’internaute ne doit sentir une prise de position de la part des concepteurs du site ; le site doit paraître neutre. Si le site donne des signes de parti pris, les internautes assimileront immédiatement ce dernier à la catégorie des sites militants pour leur camp. Pour mener à terme l’opération de PM, le site dédié ne doit absolument pas être identifié comme militant. C’est pourquoi, la neutralité apparente revêt une importance capitale.

A/ La crédibilité du site Pour crédibiliser leur site, les concepteurs d’opération de PM font souvent appel à des sources externes déjà crédibles. >> Le réseau de sites Internet La première étape consiste à ancrer le site dans un réseau, c’est à dire dans un maillage de site. Le nouveau site de PM devient ainsi le « partenaire » d’autres sites aux notoriétés plus importantes. Le site de PM doit néanmoins réussir à convaincre les sites du réseau à créer des liens pointant vers lui. Soit ces derniers y trouvent naturellement leur intérêt (renforcement du réseau, gain en notoriété, augmentation de la publicité…), soit des ententes spéciales sont passées de site à site… Ceci n’est valable que si le site est indépendant et bien distinct des autres sites du réseau. Nous aborderons plus loin dans l’étude la possibilité qu’il fasse partie d’un plan pré-établi, technique pour occuper le terrain de la connaissance. Le site 217 a bien pris soin de s’inscrire dans un réseau de sites traitant des biotechnologies :

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www.bio-scope.org

www.abeurope.info

www.ogm.org

Le site 217 les présente comme des partenaires, terme fort qui renforce l’image d’une communauté où le nombre constitue une force. Le message est clair : le site 217 n’est pas seul dans sa démarche d’information auprès du public sur les OGM. Pourtant, seul le site OGM.org pointe un lien vers le site 217, et aucun des trois sites ne le considère comme un « partenaire ».

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>> Le réseau de compétences Au-delà du réseau de sites, une opération de PM s’appuie sur un réseau de compétences reconnus. Ces compétences vont de l’expert aux scientifiques en passant par les universitaires et les institutions. Le site de PM cherche à s’assurer des cautions morales qui le placent dans une position de simple relais, et non d’émetteur premier de l’information. Cette position lui permet d’éviter les attaques directes en se retranchant derrière un tiers. Plus le site de PM multiplie les tiers, plus ses adversaires doivent faire face à un large front. Pour assurer sa crédibilité, le site 217 fait également appel à cette technique de « réseau de compétences ». Le débat portant sur un secteur lié à la recherche, le premier réseau sollicité est celui des universités. Les concepteurs du site 217 citent The Pew Initiative on Food and Biotechnology de l’Université de Richmond aux Etats-Unis pour promouvoir la modification de la composition en acides gras du soja et du colza pour protéger les consommateurs contre les infarctus. Pour couper court aux éventuelles critiques sur le choix d’une source américaine, le site prend soin d’évoquer des sources européennes. A plusieurs reprises, Jacques-Henry Weil, professeur à l’Université de Strasbourg, prend la parole pour défendre les perspectives de bienfait des OGM. De même, le site mentionne un extrait d’une intervention de Denise-Anne Moneret-Vautrin, allergologue à l’Université Poincaré Nancy I. Les institutions internationales constituent un autre réseau de compétences que le grand public critique difficilement. Le site 217 mentionne Albert Sasson qui a été un conseiller spécial auprès du directeur général de l’UNESCO. Une telle carte de visite est difficilement critiquable au premier abord et force à l’écoute. Pour renforcer l’idée de sécurité des OGM, le site 217 n’hésite pas à préciser que « c’est la Commission européenne qui autorise (ou refuse…- NDLR) la culture, l’importation et la mise sur le marché des plantes et aliments transgéniques… »14 et liste ensuite un certain nombre de commissions et d’agences compétentes sur les OGM. Cette liste de commissions aux noms scientifiques (Commission de Génie Génétique (CGG) ; Commission de Génie Biomoléculaire (CGB) ; Comité Technique Permanent de la Sélection des Plantes Cultivées (CTPS)…) renforcent indéniablement le caractère institutionnel et sérieux donné à la question des OGM. L’internaute grand public n’a aucun moyen de contrôler le travail et le rôle réel de ces commissions. Naturellement il pense que la question des OGM est traitée en plus haut lieu par une multitude d’acteurs institutionnels. Enfin, les résultats d’enquêtes ou d’expériences réalisées par des tiers crédibilisent fortement les sites de PM puisque ces derniers sont perçus comme de simples relais d’informations validées. Le site 217 relate les résultats de 7 expériences réalisées par l’INRA15 et destinées à « tester la valeur alimentaire et la toxicité éventuelle de 41 plantes transgéniques… ». Pour jouer complètement ce rôle de

14 Cf « Comment l’innocuité des plantes et aliments transgéniques est-elle évaluée ? ». 15 INRA : Institut National de Recherche Agronomique.

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simple relais, le site signale le lien vers le détail des expériences sur le site de la source première, à savoir l’AFSSA16. Dans le même esprit, le site 217 utilise un sondage IPSOS17 qui démontre que les consommateurs sont prêts à consommer des produits transgéniques si ces derniers protègent l’environnement en réduisant les quantités de pesticide utilisées. >> La crédibilité d’un site qui se veut polémique et sans parti pris dépend aussi énormément de sa neutralité apparente…

B/ La neutralité du site Un site de PM doit être perçu comme présentant une opinion neutre. Dans le cas contraire, il perdrait l’audience opposée à l’opinion exprimée. >> La neutralité dans sa présentation Pour prétendre être neutre, le site doit apparaître comme un lieu de rencontre des positions diverses. Il peut ainsi prendre la forme d’un site forum, d’un site présentant toute l’information sur un sujet… Dans tous les cas, le site doit apparaître comme un simple support qui ne fait que relayer de l’information brute. Le site 217 est un cas typique en la matière, en commençant par le nom du site : ogm-debats.com Il se positionne clairement dans la catégorie du forum en tant que lieu de débat sur les OGM. Pour renforcer cette prise de position, les concepteurs du site mentionnent autant qu’ils le peuvent le terme « débat » qui est censé représenter un gage de neutralité. Rien que sur la page d’accueil, l’internaute retrouve 8 fois le mot « débat ».

16 AFSSA : Agence française de sécurité sanitaire des aliments. 17 Cf « Comment le consommateur est-il informé de la présence d’OGM dans un aliment ? ».

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Même l’association DEBA (« Débats et Echanges sur les Biotechnologies en Agriculture ») qui a mis en ligne ce site joue sur l’ambiguïté de son appellation. Tous les efforts sont focalisés pour véhiculer l’idée de la neutralité. Il est toujours difficile pour un site de justifier son indépendance vis à vis d’intérêts extérieurs. C’est justement le cas ici pour le site 217 qui affiche clairement que les membres fondateurs de l’association DEBA sont de grands industriels agroalimentaires comme Bayer CropScience, DuPont ou Monsanto. Ces dernières sont évidemment pour la culture et la commercialisation des OGM. Alors que ses fondateurs sont d’un parti pris, le site tente néanmoins de convaincre l’internaute de la neutralité de son contenu. Le site se devait d’afficher ses fondateurs pour éviter que d’éventuelles révélations de connivence avec de grands groupes industriels du secteur ne ruinent la confiance des internautes. Il adopte ainsi une stratégie de diffusion d’information non-récupérable par le camp adverse ; ce que nous développerons au chapitre suivant. Il amoindrit cependant la partialité de ces groupes en les définissant comme des « sociétés actives dans le domaine des biotechnologies végétales »18. L’utilisation du terme « sociétés actives » permet de rester dans le vrai tout en étant vague. Ce flou est nécessaire pour préserver une neutralité d’apparence. >> La présence des arguments des différents camps Au-delà des concepteurs et des gérants du site, le contenu doit également apparaître neutre. Si le site de PM devient une plate-forme d’échange sur un sujet donné, il est indispensable de retrouver les arguments des deux camps. L’art des concepteurs de l’opération de PM sera de sembler présenter aux internautes une tribune équilibrée présentant l’ensemble des arguments, alors qu’il ne sera présenté qu’une information partiale et partielle. Toute la difficulté à ce niveau de l’opération est de distiller de manière dosée des arguments défavorables aux concepteurs du site, mais qui restent facilement démontables. L’internaute a l’impression que les deux camps sont présents, alors qu’en réalité les arguments adverses au site de PM sont souvent de faible importance. Certains témoignages du site 217, qui paraissent trop partisans d’une opinion, contre-balancent aussitôt leurs arguments en nuançant leurs propos. Exemple 1 : Le témoin qui intervient le 19 juin 2002 fait un bilan de la société française en assimilant le refus des OGM à une volonté de retour à l’agriculture du début du siècle19. Ce témoin apparaît clairement pro-OGM dans son témoignage. Néanmoins, il nuance ses propos en affirmant « Par contre je trouve bien de faire une pause dans le progrès en se posant des questions ». Même si, elle préconise une pause dans le « progrès » et non pas dans le développement des OGM, l’internaute y voit un individu lucide et rationnel qui expose ses idées, sans pour autant être autiste aux arguments adverses. Ce témoin gagne en crédibilité aux yeux de l’internaute, et surtout, son discours pro-OGM passe beaucoup mieux.

18 Cf « Qui sommes-nous ? ». 19 Cf Maryse Salinieri, contrôleur de gestion.

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Exemple 2 : Les deux témoignages de la page d’accueil du site 217 sont très révélateurs de cette volonté de paraître présenter les arguments des uns et des autres. Le premier témoin qui est pharmacien est crédité d’une compétence puisqu’il représente un professionnel de la santé. Sans être contre les organismes transgéniques, il défend le principe de précaution.

« En tant que pharmacien, je ne peux m’empêcher de faire le parallèle entre OGM et médicaments. Le corps humain est extrêmement

complexe et les effets secondaires… » Après lecture, l’internaute retient beaucoup de paroles, mais peu de solutions apportées. Son style fourni, mais plat, est presque moralisateur. Le second témoin en école de commerce rompt totalement avec le discours précédent et concourt à faire ressortir le ton moralisateur du précédent. Bien qu’il soit moins crédible puisque jeune étudiant, son ton nettement plus agressif à l’encontre des anti-OGM rend son discours plus vivant ; l’internaute est plus réceptif à ses arguments. L’internaute termine la lecture de la page d’accueil par ce témoignage et en retient naturellement plus d’éléments. La soi-disant présence des deux camps concourt au sentiment de neutralité que le site cherche à dégager, alors qu’une analyse plus approfondie permet de mettre en lumière la réalité des perceptions des internautes. Comme l’attractivité qui remplissait une double fonction (mettre en confiance l’internaute dans un premier temps, puis le transformer en diffuseur d’information), la crédibilité et la neutralité remplissent également un double objectif. Le premier objectif de la crédibilité et de la neutralité d’un site est de mettre en confiance l’internaute pour qu’il prenne connaissance des informations présentées. Ceci doit conduire au second objectif qui est de fidéliser l’internaute en quête de réponses sur cette question. La crédibilité et la neutralité sont indispensables pour qu’un site devienne un site de référence. >> Devenir un site de référence pour attirer les internautes est une des tactiques des sites de PM pour occuper le terrain de la connaissance.

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2. Comment désamorcer les critiques des internautes ?

Après avoir acquis la confiance de l’internaute, les concepteurs de site doivent à présent verrouiller l’information présentée. Cela consiste à désamorcer les offensives adverses visant les failles de leur propre discours. Pour y parvenir, les concepteurs d’opérations de PM sont amenés à neutraliser les critiques en les anticipant, puis à contrôler le terrain de la connaissance en le délimitant à leur avantage, tout en en simplifiant les problématiques.

2.1 Devancer les critiques

Deux types d’attaque menacent les opérations de PM. Pour simplifier, les unes portent sur la « forme » et les autres sur le « fond ».

A/ Protéger les liens invisibles et la démarche adoptée La « forme » d’une opération de PM correspond au système mis en place pour véhiculer le message destiné à contrôler les perceptions de l’audience cible. Dans le cadre de notre étude, il s’agit des sites Internet. >> Les acteurs derrière l’opération Les sites de PM tentent d’apparaître dans un rôle qui est différent de celui qu’ils jouent réellement. Pour cela, ils cherchent bien évidemment à camoufler leurs objectifs réels. Si cependant ces derniers venaient à être dénoncés auprès des populations cibles, ils perdraient considérablement de leur influence. C’est pourquoi, les concepteurs doivent protéger les liens qui unissent le site Internet aux commanditaires réels. Pour éviter que ces liens ne soient visibles et deviennent une faille, il existe deux approches. La première consiste à dissimuler les initiateurs du site, ce qui permet de cacher les objectifs recherchés. Pour y parvenir, les sites ont le plus souvent recours à des intermédiaires qui cloisonnent l’émission des ordres. Cependant, il y a toujours un risque que ces liens soient découverts, ce qui décrédibilise complètement la démarche et peut la réduire à néant. La deuxième démarche prend le contre-pied total par rapport à la précédente. Alors que la première attitude consistait à dissimuler les liens entre le site et les donneurs d’ordre, celle-ci les affiche clairement. Longtemps perçue comme suicidaire, elle ne l’est pourtant pas puisqu’une fois ces liens établis, l’information est irrécupérable par les adversaires. Cette approche marque une évolution importante par rapport à la politique du secret qui dominait les actions d’influence, et révèle combien ces opérations de PM sont difficiles à dénoncer comme telles.

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Le site 217 a adopté la deuxième démarche en affichant très explicitement ses liens avec « des sociétés actives dans le domaine des biotechnologies végétales »20. L’association DEBA va même jusqu’à indiquer ses membres fondateurs qui sont « Bayer CropScience, Dow AgroSciences, DuPont-Pioneer Semences, Monsanto et Syngenta. » En révélant ces liens, le site fournit une information non récupérable et anticipe les attaques de ses adversaires qui auraient cherché à révéler ces connivences contre nature pour une plate-forme de débat qui se veut neutre. En adoptant cette démarche, le site 217 gagne en crédibilité en semblant jouer la carte de l’honnêteté et de la transparence. >> Protéger la démarche adoptée Au-delà des liens entre les différents acteurs, un risque pèse sur la démarche en elle-même. Le simple fait d’initier une telle action peut être perçu comme une volonté d’influence de la part du site. Les concepteurs de site de PM limitent déjà considérablement ce risque potentiel en insistant sur la neutralité du site. Pour verrouiller cette faille, le site recourt à l’anticipation en annonçant les critiques des adversaires concernant la démarche. Le site 217 fait de même et anticipe dans un « avant-propos ». Quand l’internaute arrive sur la page d’accueil du site 217, une fenêtre indépendante apparaît. Cette dernière remplit différentes fonctions, elle récapitule l’enjeu du site, et surtout indique à l’internaute quelle attitude adopter à l’égard de ce site. « Si l'on veut continuer à nourrir ce débat, il convient de se garder de trois comportements qui constituent des régressions.

• Le premier consiste à tenter systématiquement de disqualifier celui que l'on considère comme « l'adversaire » en lui déniant, par principe, toute sincérité.

• Le deuxième est de dénoncer comme partiale toute recherche scientifique qui vise à améliorer la connaissance des faits.

• Le troisième est de qualifier de « manipulations occultes » toute initiative de diffusion de l'information dans le public. L'intention de ces types de comportements est toujours de réveiller la polémique, autant sur la forme que sur le fond du sujet. Et ainsi d'empêcher ou de retarder la clarification du débat. »

Le troisième comportement cité ci-dessus nous intéresse particulièrement ici. Ce que le site appelle « manipulations occultes » peut précisément correspondre à une opération de PM. Le site accuse explicitement ceux qui oseraient induire une quelconque opération d’influence sous-jacente comme les ennemis du libre débat. Le site dicte très clairement la « bonne » conduite que les internautes sont tenus de respecter. Ces derniers sont immédiatement diabolisés s’ils ne respectent pas les directives données (nous aborderons la diabolisation plus loin dans l’étude). Ainsi en anticipant les accusations d’opération d’influence, le site 217 se protège des éventuelles attaques sous cet angle.

20 Cf « Qui sommes-nous ? ».

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B/ Annoncer les failles de son discours

Les autres risques qui pèsent sur les sites de PM reposent sur le « fond », à savoir les arguments en présence. >> Annoncer ses propres failles… Dans les opérations de propagande classique, on retrouve deux camps qui s’opposent. La propagande dénonce violemment les failles adverses tout en rejetant les attaques de ces derniers visant leurs propres failles. La diabolisation et le refus d’écoute de l’autre dans cette propagande classique dégage un sentiment de « bon » et de « mauvais » camp. Au final, cette « guerre » devient stérile et aucun camp ne l’emporte réellement sur l’autre. Les opérations de PM dépassent ce clivage de « bon » et de « mauvais » camp. Toute la difficulté de ces opérations consiste à donner l’impression d’une écoute des arguments adverses, voire même d’une certaine valorisation. Le système laisse expressément ouvertes certaines failles pour contribuer à ce semblant d’équilibre qui valorise sa neutralité et sa crédibilité. Le site 217 laisse volontairement des failles dans son argumentaire. En se présentant comme un site de débat, il semble simplement présenter les arguments de ceux qui doutent des OGM. Dès la page d’accueil, le site donne le ton avec le témoignage du pharmacien, le premier témoin. « En tant que pharmacien, je ne peux m’empêcher de faire le parallèle entre OGM et médicament. Le corps

humain est extrêmement complexe et les effets secondaires d’un médicament ne sont révélés qu’après la mise sur le marché (AMM), quand des milliers de personnes ont testé la molécule. Heureusement, si l’on peut dire, seul un humain qui a employé le médicament peut être victime des effets secondaires. Dans le cas des OGM, les possibilités d’exposition sont tellement ouvertes que les effets négatifs seront plus difficilement maîtrisables. Même avec la

meilleure volonté nous n’en connaîtrons jamais tous les paramètres ni leurs régulations. Il va donc falloir arbitrer entre les intérêts et les risques. »21

Dans ce témoignage, le site 217 anticipe plusieurs failles : la nocivité potentielle des OGM et le principe de précaution ; les liens entre la culture des OGM et les intérêts financiers. Ces deux failles, sanitaire et économique, sont celles qui reviennent le plus souvent et qui sont les plus virulentes. En annonçant ses propres failles, le site de PM anticipe sur ses adversaires en les empêchant de prendre l’initiative grâce à des arguments pertinents. Ces derniers sont condamnés à répéter sans cesse ces arguments, sans contribuer de manière constructive à l’évolution du débat. Cette anticipation emprisonne les adversaires dans une position ou un discours les condamnant à terme. >> …tout en les minimisant Cependant, annoncer ses propres failles est un exercice périlleux. Il est indispensable de prendre grand soin des failles qui sont mis en lumière et à la manière dont elles le sont. Il serait contre-productif de donner des armes trop puissantes à ses adversaires.

21 Cf « Accueil ».

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Les sites de PM prennent d’importantes précautions sur le contexte qui entoure l’annonce des failles, que ce soit sur le ton ou le style employé. Exemple 1 : Prenons l’exemple du pharmacien du site 217 qui apparaît après une lecture rapide comme un anti-OGM. Une lecture plus poussée permet de nuancer ce sentiment. Tout d’abord, ce témoin n’apparaît pas comme un farouche opposant aux OGM. Il met simplement en avant le principe de précaution qui veut que l’on attende les résultats d’études scientifiques et les effets secondaires sur la santé avant de commercialiser de nouveaux produits. Il minimise même dans son discours les risques en expliquant qu’ « heureusement, si l’on peut dire, seul un humain (sur des milliers ? NDLR) qui a employé le médicament peut être victime des effets secondaires. » Il va même plus loin en diluant complètement les risques qu’il avance quand il affirme que « les possibilités d’exposition sont tellement ouvertes […] Même avec la meilleure volonté nous n’en connaîtrons jamais tous les paramètres… » Au final, l’internaute retiendra de ce témoignage un sentiment négatif, car son auteur avec un ton général défaitiste emploie des termes négatifs, voire moralisateurs qui n’ouvrent guère de perspectives aux problèmes qu’il évoque. Exemple 2 : Abordons à présent un autre exemple d’anticipation par le site : la dissémination des plantes transgéniques22. Dans cette page, les concepteurs du site commencent par expliquer le processus de dissémination des gènes des espèces végétales. Pour éviter que les adversaires ne puissent opérer un amalgame entre les plantes transgéniques et les autres végétaux, le site s’empresse d’affirmer que « chaque espèce végétale doit être étudiée au cas par cas… » Le site poursuit en tentant de rassurer les internautes inquiets sur les risques liés aux OGM.

« La dispersion du pollen a été étudiée pour un grand nombre d’espèces cultivées, ce qui a permis aux commissions d’évaluation de définir des distances

d’isolement pour les essais OGM… » Pour ce faire, les concepteurs du site font pourtant une généralité, en parfaite contradiction avec la phrase précédente. Pour compléter le dispositif d’anticipation, le site admet qu’il existe des risques de dissémination, mais s’empresse aussitôt d’ajouter que « la probabilité […] est très faible. » En admettant ce risque, le site canalise les critiques en se réservant le droit de conclure sur le niveau réel de danger. >> Ainsi les sites de PM, à l’image du site 217, structurent les processus d’anticipation en trois phases successives. Contrer dans un premier temps les arguments adverses en anticipant les critiques, affirmer ensuite que ces critiques n’ont aucun fondement, et conclure enfin en précisant que si la critique a une raison d’être, son impact serait très limité ou sans conséquence.

22 Cf « La dissémination des gènes de plantes transgéniques présente-t-elle un risque pour l’environnement ? ».

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2.2 Occuper le terrain de la connaissance En avançant ses propres critiques et failles, le site de PM se protège des offensives adverses. La deuxième étape du processus de désamorçage total des critiques est l’orchestration de l’occupation du terrain de la connaissance.

A/ Délimiter et contrôler les points de polémique Pour remporter la victoire, le général cherche à connaître les armes de ses adversaires et à combattre sur un terrain qu’il maîtrise. Si ce dernier réussit à définir des règles de combat qui lui sont favorables et à les faire accepter par la majorité, il obtient un avantage certain sur ses ennemis. Par exemple, de nos jours, cette pratique peut prendre la forme de conventions sur l’emploi de certaines armes (mines anti-personnelles, armes chimiques, bactériologiques…), ce qui revient finalement à définir des systèmes de normes internationales. >> La définition des termes Dans le milieu économico-financier, la démarche reste la même. Celui qui parvient à définir les règles du « jeu » en devient quelque part un des arbitres clés. Cette définition des règles commence avec le sens même des mots employés. Chaque individu comprend les idées, les concepts et les mots différemment selon sa culture et son passé personnel. En dictant sa propre définition des idées et des termes employés dans une polémique, le site de PM permet de rallier ces individus à sa vision de la problématique énoncée puisque tous parlent et comprennent à présent le même langage. Cela peut revêtir différentes formes. L’association d’un terme neutre à un autre positif ou négatif peut par exemple servir un objectif sémantique23. Le site 217 fournit un glossaire afin de donner sa propre définition des termes qu’il emploie. Bien que la définition de ces termes parait neutre, on peut cependant s’attarder sur celle de « mutation ».

« Modification soudaine de la séquence ADN, transmissible à la descendance. De telles modifications, très fréquentes dans la nature,

peuvent aussi être provoquées en laboratoire » Le terme « mutation » fait généralement peur, et est souvent assimilé aux OGM. C’est pourquoi, le site veut le dédramatiser. Il l’associe donc avec un terme connoté positivement : la nature. Cette volonté est d’autant plus marquée qu’une autre page dédiée aux définitions reprend la même idée.

« Tous les végétaux cultivés sont issus de mutants naturels qui apparaissent de manière spontanée et que l’homme a su retenir

en raison de leurs propriétés. »24 L’internaute en lisant à plusieurs reprises cette association « positive » dédramatise, au moins inconsciemment, le terme « mutation » qui lui apparaît désormais inscrit dans l’évolution naturelle de l’humanité. Cette appréciation orientée des définitions contribue à désamorcer les offensives

23 Nous aborderons plus loin les aspects sémantiques dans la gestion des perceptions. 24 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisement », « biotechnologies », « OGM » ? ».

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futures fondées sur ces termes. La perception de l’internaute sur la mutation peut ainsi changer pour qu’il devienne lui-même hostile à tout discours axé sur les risques de mutation. >> L’emploi de l’amalgame Bien que l’association de termes concoure à juguler les critiques, la technique de l’amalgame va bien plus loin. Alors qu’associer signifie « mettre ensemble », amalgamer veut dire « mélanger des choses très différentes »25. Fréquemment utilisé en politique, l’amalgame est également largement employé dans les opérations de PM. L’utilisation de l’amalgame par des sites de PM leur permet de progressivement et insensiblement sortir du cadre strict du débat pour mener la polémique sur d’autres fronts qui leur sont plus favorables. Ces sites fixent les limites et les points de la polémique, et créent ces nouveaux fronts tout en prétendant toujours traiter des fronts classiques. Le site 217 mène une telle stratégie avec l’utilisation de l’amalgame. Il cherche à assimiler les techniques transgéniques aux techniques traditionnelles d’agriculture, comme la sélection naturelle, les croisements… principalement dans la page « Qu’entend-on par « sélection », « croisements », « biotechnologies », « OGM » ? ». Pour éviter que l’amalgame ne soit trop flagrant, le site présente les cultures transgéniques comme l’évolution normale des techniques agricoles traditionnelles. Il ne prend pas le risque de justifier cette appartenance, il la sous-entend et laisse le soin à l’internaute d’établir lui-même la relation. Toutefois, les concepteurs facilitent la tâche de l’internaute en glissant quelques indices :

« Aujourd’hui, en plus des croisements « classiques », le sélectionneur dispose en effet de toute une palette d’outils permettant d’améliorer considérablement les productions végétales. »

« La méthode de croisement « classique » se limite aux plantes interfécondes et vise à cumuler dans la

plante les variables les plus performantes de gènes d’intérêt agronomique. »26 Dans ces deux extraits, les auteurs du site utilisent le terme « classique ». L’internaute doit comprendre que bien que les techniques transgéniques ne soient pas « classiques », elles sont de la même famille. Cette « famille » qui souffre moins de la polémique devient un ancrage fort pour les OGM. Elle comprend la sélection, les croisements, la culture in vitro, la localisation de gènes… Chacun des membres de cette famille a une crédibilité positive grâce aux résultats passés (sélection, croisements) ou actuels (culture in vitro, localisation de gènes). Il existe pourtant de grandes différences entre les membres de cette famille et les techniques transgéniques. Par exemple, les croisements créent des espèces nouvelles (c’est le cas du « chou-fleur, du brocoli ou du chou de Bruxelles »27) sans qu’il n’y ait une intervention sur les gènes (figure 1). La seconde quant à elle crée des espèces transgéniques en apportant un gène externe à l’alimentation de l’homme (par exemple, introduction d’un gène préalablement modifié issu de la bactérie E. coli dans une variété de riz basmati pour obtenir un riz transgénique résistant au froid et à la sécheresse28) (figure 2).

25 Le Petit Larousse. 26 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisement », « biotechnologies », « OGM » ? » 27 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisements », « biotechnologies », « OGM » ? » 28 PNAS, comptes-rendus de l’Académie américaine des sciences du 25 novembre 2002.

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A B

C

Aliments comestibles sans risque par l’homme

Aliment comestible sans risque par l’homme

figure 1

A D

E

Aliment comestible sans risque par l’homme

Risques pour l’homme ?

Elément non présent dans l’alimentation de l’homme

figure 2

A terme, les concepteurs du site souhaitent brouiller les frontières entre les systèmes pour que l’internaute ne distingue plus les techniques transgéniques des techniques traditionnelles. >> Le transfert de la polémique Ce flou entre les systèmes, et donc des limites de la polémique, contribue au transfert de cette même polémique vers un système moins sensible aux critiques des adversaires. Les polémiques naissent vis à vis de grands systèmes comme la société, la sécurité, la culture, l’économie… Ceux qui mènent des opérations de PM cherchent à transférer la polémique du système actuel vers un autre qui leur est plus favorable. Une fois la polémique menée dans ce nouveau système, ils obtiennent une plus grande marge de manœuvre et de l’importance pour ensuite constamment minimiser l’ancien système dans lequel sont enfermés leurs adversaires. Il est admis que le transfert est un succès quand la cible ne réalise pas que la polémique ne tourne plus autour du système initial. L’internaute ne doit donc par réagir à ce détournement. Pour ce faire, les concepteurs du site utilisent les émotions des internautes. Les techniques pour susciter les émotions chez l’internaute seront abordées plus loin dans l’étude.

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Pour interpeller une audience aussi vaste et diverse que possible, le site présente très clairement les différents systèmes liés aux OGM vers lesquels les auteurs du site cherchent à détourner les internautes29 :

« La transgénèse trouve des terrains d’application dans des domaines aussi vastes que la médecine, l’environnement ou l’industrie. »

Le site présente ainsi les thèmes de la « médecine/santé/humanitaire », de l’ « industrie/économie » et de l’ « environnement/écologie », sans oublier celui de l’évolution de la « société » face aux OGM.

>> Le témoin Marie Debord, cadre dans la chimie, détourne le débat sur le terrain de l’humanitaire. Elle fait part de son expérience lors d’un voyage au Mali et de la famine qu’elle a pu y constater.

« Lors d’un voyage, j’ai constaté qu’au Mali l’alimentation était peu variée […] car peu de choses poussent en raison du climat […] et les denrées importées sont rares et trop chères pour la plupart des habitants. Une alimentation aussi déséquilibrée favorise forcément les maladies. Ce que j’aimerais savoir, c’est si les OGM permettront de développer de nouvelles variétés de cultures résistantes aux conditions difficiles comme le manque d’eau, les attaques d’insectes, la pauvreté des terres, pour introduire d’autres céréales ou des fruits et légumes

nouveaux dans l’alimentation, et pour développer l’élevage. » La famine et les inégalités dans le monde sont des thèmes fortement mobilisateurs, notamment en France. En abordant ce thème, elle est quasiment sûre de rallier un grand nombre d’internautes à ses idées. Elle établit une causalité entre l’alimentation et les maladies, ce qui inscrit à première vue sa question dans l’axe du débat. Pourtant, elle évince totalement la question des liens entre les OGM dans l’alimentation et la santé. Sa question liste tout ce que les OGM ouvrent comme perspectives de développement dans l’agriculture. Elle fait indirectement l’apologie des OGM avec une question qui en réalité n’en est pas une.

« Les OGM permettront de développer de nouvelles variétés de cultures résistantes aux conditions difficiles comme le manque d’eau, les attaques d’insectes, la pauvreté des terres… »

De plus, cette liste de conditions difficiles de ce pays concourt à renforcer les émotions de l’internaute qui se projette pour un instant dans ces pays.

>> Les difficultés économiques, humanitaires, sanitaires… des pays du Tiers-monde sont des viviers de systèmes exploitables par les concepteurs de site de PM. Le site évoque l’extrait d’un article d’Albert Sasson, ancien conseiller spécial auprès du directeur général de l’UNESCO30.

« Personne ne prétend que les plantes transgéniques vont résoudre tous les problèmes, mais elles sont une solution intéressante parmi d’autres. Plus de 5 millions d’agriculteurs cultivent des OGM

et les trois quarts vivent dans les pays du Sud… » Cet extrait met en opposition les pays du Sud et l’Europe dont le titre « Les pays du Sud en avance sur l’Europe ? » est volontairement provocateur. L’axe économique est très important dans la problématique des OGM.

29 Cf « Quelle est l’utilité des plantes transgéniques pour ceux qui ne sont pas agriculteurs ? » 30 Cf « Les pays du Sud en avance sur l’Europe ? »

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D’un côté, les OGM doivent permettre aux pays du Sud de nourrir leurs populations, de se développer et d’atteindre une meilleure qualité de vie. De l’autre, si les OGM deviennent une norme, les enjeux économiques sous-jacents seront immenses. A cet égard, il est intéressant de noter qu’en changeant de système les auteurs du site se focalisent sur certains points et en atténuent d’autres. Par exemple, ils insistent sur les pays du Sud en tant que concurrents sérieux dans cette course agricole (« Plus de 5 millions d’agriculteurs cultivent des OGM et les trois quarts vivent dans les pays du Sud… »), mais ne mentionnent que très rarement les Etats-Unis, l’Argentine et le Canada qui représentent ensemble 96 % des superficies de cultures transgéniques31. Dans cette même page, les auteurs du site appuient le développement des cultures transgéniques dans le monde avec de nombreux chiffres.

« Le nombre d’agriculteurs cultivant des plantes transgéniques est passé de 3,5 millions en 2000 à 5,5 millions en 2001. Plus des trois-quarts de ces agriculteurs sont des fermiers qui cultivent

du coton génétiquement modifié résistant aux insectes… » Ces chiffres impressionnants renforcent un des axes majeurs du site, la présence massive et internationale des OGM dans les cultures32. Pourtant, ces chiffres font surtout références aux cultures non alimentaires comme le coton, et ne rentrent plus dans le débat des OGM et de l’alimentation/santé.

>> L’environnement est un thème qui fédère, au moins dans le principe, le plus grand nombre. Le site utilise ici ce thème à plusieurs reprises, ce qui constitue à nouveau un transfert dans un système favorable. Pour donner l’impression d’un large soutien de la population française, le site présente l’information sous la forme suivante33 :

« Aujourd’hui, un français sur deux est ouvert à la consommation d’aliments contenant des OGM autorisés en France. Parmi les personnes réticentes, près d’une personne sur deux accepte d’acheter ces aliments si on lui garantit que les plantes OGM en question permettent de mieux préserver les sols, l’air et l’eau en réduisant la quantité de pesticides utilisée. »

Selon ces calculs, les trois quarts des Français seraient « ouverts » à la consommation d’aliments transgéniques. Ce sondage, très favorable aux OGM et cautionné par l’institut IPSOS, comporte pourtant de nombreux points d’ombre. Ce résultat ne concerne que la population qui a été sondée, et la généralisation à l’ensemble de la population française sans aucune précision sur la population test est contestable. De plus, le terme « ouvert » reste très ambigu. Signifie-t-il « favorable » aux OGM (comme le laisse sous-entendre le site) ou « être au courant » de l’existence de produits transgéniques dans l’alimentation ?

>> L’exemple précédent rejoint le thème de la société. Celui-ci est présent dès la page d’accueil avec le témoignage de l’étudiant34.

« Quand on voit que les militants anti sont souvent des citadins qui fument clope sur clope, qui ne supportent pas de pucerons dans leur salade (en sachet d’ailleurs) et qui respire de la pollution à longueur de journée… Ils feraient mieux [[de - NDLR] réfléchir à leur hygiène de vie

plutôt que d’empêcher les chercheurs de faire leur travail. »

31 Cf « Quel est le développement des cultures transgéniques dans le monde ? » 32 Nous aborderons ce point plus loin avec la technique de l’encerclement. 33 Cf « Comment le consommateur est-il informé de la présence d’OGM dans un aliment ? » 34 Cf la page d’accueil.

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En transférant le débat sur le système sociétal, les auteurs du site évincent une fois de plus les enjeux sanitaires des OGM dans l’alimentation. L’opposition aux plantes transgéniques ne viendrait donc pas des dangers sanitaires, mais de son ancrage dans la société. Le site induit que les remises en question des OGM viennent des positions de repli d’une certaine partie de la population française. D’autres témoignages appuient cette idée35 :

« Cela fait des années que les français (sic) ne savent plus ce qu’ils mangent. […] Depuis l’exode rural et le travail des femmes,

se nourrir c’est devenu quelque chose dont ils s’occupent à la va-vite. […] Par contre je m’effraie de voir des jeunes vouloir revenir à l’agriculture de l’avant guerre. C’est impossible et en plus j’ai

l’impression qu’ils se font une idée fausse de la qualité d’autrefois. » Par ces témoignages, le site distille un message clair : c’est en réalité une partie de la société française qui est réfractaire aux biotechnologies, ce qui empêche le débat d’évoluer. Par conséquent, c’est la société même qui est à l’origine des réactions, et non plus les questions d’ordre sanitaire.

B/ Simplifier les faits, raccourcir la logique des enchaînements, renverser les causes et les conséquences

Après avoir délimité et contrôlé les points de polémique, le site de PM doit continuer à occuper le terrain de la connaissance. Il dispose pour ce faire d’autres techniques, autant d’atouts pour persuader l’internaute et le convaincre du bien-fondé de ses arguments. >> La simplification du débat La première de ces techniques est la simplification des débats. Les polémiques prennent naissance dans la complexité des causes, des enjeux et des scénarii possibles. Les partisans d’une thèse le sont généralement parce que certains points ont plus d’importance que d’autres à leurs yeux. Les leaders d’opinion jouent de ces points particuliers en les mettant en valeur pour soutenir leur camp. Pour parfaire leur stratégie, ils font de ces points des éléments incontournables, évidemment beaucoup plus importants que ceux du camp adverse. En majorant certains éléments par rapport à d’autres, ils simplifient indéniablement l’ensemble de la polémique. Le site 217 utilise bien entendu cette technique à plusieurs reprises. Dès la page d’accueil, chaque camp explique via des témoins ses arguments pour ou contre les OGM. Si un adversaire des OGM avance les raisons de sa méfiance envers les cultures transgéniques, il délimite de lui-même le débat aux quelques points qu’il a énoncés. En mettant en avant un témoin (ou en en créant un…) qui n’aborde qu’un nombre restreint d’axes de polémique, les auteurs du site parviennent à canaliser le débat en le simplifiant aux seuls points avancés. Dans l’exemple du pharmacien, ce dernier justifie sa prise de position36 :

35 Cf « Les contributions internautes : Maryse Salinieri ». 36 Cf la page d’accueil.

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« En tant que pharmacien, je ne peux m’empêcher de faire le parallèle entre OGM et médicament. Le corps humain est extrêmement complexe et les effets secondaires d’un médicament ne sont souvent révélés qu’après la mise sur le marché […] Dans le cas des OGM, les possibilités d’exposition sont tellement ouvertes que les effets négatifs seront plus difficilement maîtrisables. Même avec la meilleure volonté nous n’en connaîtrons jamais tous les paramètres ni leurs régulations. Il va donc falloir arbitrer entre les intérêts et les risques. » Selon cet adversaire des OGM qui met en avant le principe de précaution, la menace principale des organismes transgéniques vient du manque de certitude vis à vis des effets secondaires. Ce manque de certitude devient ainsi l’argument principal des adversaires des OGM qui craignent des effets indésirables dans le futur. En enfermant leurs adversaires dans cet axe, les auteurs du site construisent leur argumentaire dans les autres pages web en préservant cette vision simplifiée de la polémique. On retrouve également les arguments vus précédemment qui assimilent les adversaires des OGM à des individus méfiants de l’avenir qui cherchent à retrouver un pseudo-passé sécurisé37. Ce n’est donc pas un hasard si les concepteurs d’opérations de PM sur Internet cherchent à contenir la polémique dans les limites qu’ils désirent dès la première page du site. >> L’inversion des causes et des effets Une autre technique pour occuper le terrain de la connaissance et de promouvoir des arguments consiste à inverser les causes et les conséquences. Un fait quel qu’il soit peut être la cause ou la conséquence d’un autre événement. Ainsi le processus normal voudrait qu’une cause entraîne une réaction qui déboucherait sur une conséquence.

Cause

Réaction

Conséquence

Or les opérations d’influence sur les perceptions modifient ce processus en persuadant leur audience que les causes sont en fait des conséquences. Voyons des exemples concrets pour mieux comprendre cette technique difficilement détectable. Exemple 1 :

« Confiants ou méfiants, les consommateurs demandent à être informés au moment de choisir… et les législateurs l’ont bien compris ! Depuis 1998, la Commission européenne exige en effet de mentionner

la présence d’OGM sur les étiquettes pour les produits alimentaires dont les ingrédients contiennent plus de 1 % d’OGM. »38

37 « Par contre je m’effraie de voir des jeunes vouloir revenir à l’agriculture de l’avant guerre. C’est impossible et en plus j’ai l’impression qu’ils se font une idée fausse de la qualité d’autrefois. ». 38 Cf « Comment le consommateur est-il informé de la présence d’OGM dans un aliment ? »

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Selon les auteurs du site, la demande en informations de la part des consommateurs a conduit à l’étiquetage des produits contenant des organismes transgéniques. Ils posent le processus de réflexion de la manière suivante :

Recherches

d’information

Etiquetage

Ils évincent ainsi une autre cause qui pourtant paraît légitime, à savoir les risques potentiels que représentent les cultures transgéniques.

Risques

potentiels

Etiquetage

Dans la version du site, la cause de ce processus est la « recherche d’information », tandis que dans l’autre version, les « risques potentiels » en sont la cause. En inversant les causalités, le site de PM parvient à éliminer la question, pourtant centrale, des risques sanitaires de l’alimentation transgénique du débat. En posant le raisonnement en ces termes, le site qui apporte de l’information aux consommateurs, se place dans une démarche citoyenne « positive ». Exemple 2 :

« Cependant, dans le cadre de la législation européenne, l’utilisation des gènes de résistance aux antibiotiques dans la production d’OGM sera, bientôt, définitivement abandonnée : la

directive 2001/18 préconise d’éliminer progressivement les marqueurs de résistance aux antibiotiques qui sont susceptibles d’avoir des effets préjudiciables sur la santé humaine et l’environnement. »39

Dans cette page, les auteurs du site affirment que la loi va conduire à la suppression des gènes responsables de la résistance aux antibiotiques. Ainsi cette loi va conduire au risque nul des OGM. Cet aveu de risques d’allergies à cause des OGM (qui va à l’encontre de tous les témoignages précédents démontrant qu’ils existent bel et bien, mais comme dans tous les produits) pourrait être perçu comme une faille. Pourtant avec cette inversion de causalité, les concepteurs du site font de cette faiblesse une force, et concluent sur la suppression des risques des OGM.

39 Cf « Les aliments transgéniques vont-ils favoriser la résistance aux antibiotiques ? »

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Loi

Suppression

Aucun risque

En établissant ce raisonnement, le site écarte une fois de plus une autre chaîne de causalité possible, dont les risques liés aux OGM sont une fois de plus à l’origine :

Risques

Loi

Suppression

Cette technique d’inversion des causes et des conséquences est difficile à dénoncer car les raisonnements restent logiques. Cette technique est d’autant plus insidieuse qu’elle inscrit dans le raisonnement du lecteur une certaine manière de penser, celle voulue par les concepteurs du site. Cette méthode est un exemple flagrant de l’action directe des opérations de gestion des perceptions sur les individus, leurs manières de réfléchir, de poser les problèmes et d’appréhender les concepts.

>> La promotion de LA vérité La dernière technique consiste à véhiculer l’idée que LA vérité existe malgré la polémique en cours. Le site se positionne ensuite en affirmant qu’il est en mesure de la fournir. Un des témoins, Damien Vidal, étudiant en médecine, aborde le problème des allergies et des OGM.

« Les OGM entraînent-ils de nouveaux risques d’allergies ? Certains prétendent qu’ils les augmentent, d’autres qu’ils peuvent les diminuer !

Qu’en est-il vraiment ? »40 40 Cf « Les contributions des internautes ».

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L’allergie est un des axes principaux d’attaque des anti-OGM. Pourtant l’étudiant présente les deux versions comme si ce point n’était qu’un de plus dans la polémique. En ajoutant un « vraiment » à sa question : « Qu’en est-il vraiment ? », il attend une réponse qui soit dans le « vrai », c’est à dire LA vérité sur ce sujet. Si le site de PM parvient à répondre en premier à ce genre de question, sa version sera retenue comme LA vérité. Ceci est d’autant plus vrai si la réponse est formulée par un expert, ce qui est le cas dans le site 217 en la personne d’un professeur de biochimie de l’Université de Strasbourg. A cet égard, il est intéressant de noter que le témoignage de Marie-Laurence Autard renforce l’ensemble du dispositif. Cette dernière soulève également la question des allergies et du transgénique, et en appelle directement à ce qui est pour elle l’autorité en la matière : les scientifiques.

« J’aimerais aussi avoir des réponses claires de scientifiques sur nos connaissances actuelles sur les risques des plantes transgéniques sur notre santé… »41

Cette désignation des détenteurs ou non de l’autorité renforce indéniablement le professeur d’Université qui est intervenu juste avant elle pour atténuer considérablement les liens entre OGM et allergies. De plus, la précision « réponses claires » réclame également une réponse de type vérité unique et infaillible.

« Dans la mesure où les OGM seront une part nécessaire de l’alimentation du futur proche, il est légitime d’examiner les précautions nécessaires pour réduire le risque allergénique, avant de s’intéresser aux

bénéfices attendus d’OGM dans la prévention ou le traitement d’affections allergiques. » Cette phrase est l’une des plus marquantes du site car elle affirme explicitement que les OGM font de toute façon partie de l’avenir. La question n’est plus de savoir s’il faut ou non autoriser les cultures transgéniques, mais plutôt comment les améliorer pour préparer l’avenir. Cette affirmation est d’autant plus forte qu’elle émane d’un témoin qui dénonce les allergies des OGM et qui se positionne plutôt comme leur adversaire. >> L’ensemble de ces techniques concourt à occuper le terrain de la connaissance dans le but d’éliminer les points de polémique ou de les attirer dans une enceinte qu’elle peut maîtriser et canaliser. Elle dilue ensuite la résonance des adversaires en diminuant leur place pour enfin prendre une place incontournable dans le débat. En devenant un site de référence, les adversaires n’ont pas réellement de droit de réponse. C’est ainsi que le site 217 accuse directement la France d’être responsable du rejet des OGM contre l’avis de la Commission européenne, sans que la France ne puisse répondre à ces affirmations :

« Enfin, deux dossiers relatifs au colza […], tolérants à un herbicide et permettant de créer des colzas hybrides, bénéficient d’une décision positive de la Commission européenne. Cependant, cette décision

n’a jamais fait l’objet d’un consentement écrit de la part de l’Etat membre rapporteur, en l’occurrence la France. »42

Les schémas suivants résument les différentes phases d’une opération d’occupation du terrain de la connaissance. La figure 1 présente l’émetteur (en rouge), par exemple les partisans des cultures

41 Idem. 42 Cf « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? ».

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transgéniques, encerclé par des adversaires (en gris foncé) qui diffusent de la connaissance aux différentes audiences (en gris clair).

figure 1

La figure 2 schématise la phase actuelle du site de PM. L’émetteur crée un relais sans en apparaître comme l’initiateur (en gris foncé avec pointe rouge). Ce relais prend l’apparence d’un adversaire ou d’un neutre, et diffuse de la connaissance (flèches rouges) pour rompre indirectement l’encerclement. Cette diffusion massive en fait un émetteur de référence.

figure 2

La figure 3 conceptualise les objectifs recherchés par cette démarche. Une fois que l’émetteur est devenu une référence, les adversaires sont contraints de communiquer par elle pour toucher les audiences. De plus, certaines audiences sont acquises à la cause de l’émetteur grâce à cette logique d’influence et deviennent à leur tour des relais de connaissance (flèches rouges). Cette tactique rompt l’encerclement pour encercler à son tour.

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figure 3

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La structuration du débat par le site Comme nous l’avions abordé au début de cette étude, l’analyse des opérations d’influence sur les perceptions via les sites Internet se décompose en trois phases :

1. La présentation des faits par le site ; 2. La structuration du débat par le site ; 3. La résonance du débat hors du site.

Nous venons d’achever l’analyse de la première phase, abordons à présent la suivante : la structuration du débat par le site. Si la présentation des faits obéit à des techniques générales quelque soit le thème abordé, l’étude de la structuration du débat, thème central de ce dossier, montre comment se développe une stratégie d’influence qui se veut à la fois offensive et défensive.

1. Comment influencer les internautes ? Pour convaincre les internautes, les sites de cyberlobbying pratiquent une double stratégie : offensive et défensive. Tout en soutenant leurs thèses par une stratégie défensive, ces sites appliquent envers leurs contradicteurs et leurs commentaires une stratégie offensive..

1.1 Les processus d’acceptation des OGM par les internautes La stratégie défensive recherche l’adhésion des internautes en présentant un ensemble de techniques destinées à défendre et à promouvoir les OGM.

A/ L’évolution temporelle naturelle La sécurité liée aux OGM est un des points les plus nuisibles aux cultures transgéniques. La crainte du « nouveau » et des manipulations des gènes freine de nombreux consommateurs. Un des témoins l’annonçait même clairement en :

2

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« La nouveauté fait peur, et cette appréhension est grandie

lorsqu’il s’agit de notre santé… »43 >> L’héritage du passé Pour pallier ces peurs du « nouveau », le site insinue tout simplement que les OGM et les cultures transgéniques existent depuis les débuts de l’agriculture.

« Depuis les origines de l’agriculture, il y a près de 12 000 ans, l’homme cherche à sécuriser ses récoltes et à améliorer son alimentation. Parmi les techniques qu’il a développées à cet effet, la sélection

et les biotechnologies n’ont cessé de se perfectionner à travers les âges pour finalement se rejoindre grâce au génie génétique. »44

L’idée que les OGM sont le résultat d’une évolution temporelle naturelle de l’agriculture se retrouve à de nombreuses pages du site :

« Depuis toujours, les agriculteurs cherchent à obtenir les variétés les plus performantes possibles. Les moyens techniques utilisés à cet effet par les semenciers, dont la transgénèse, s’inscrivent donc dans la lignée

d’une évolution millénaire des modes de sélection et d’amélioration. »45 Les OGM font ainsi partie de l’Histoire de l’Homme et de son agriculture. Ces affirmations ont l’avantage d’humaniser les manipulations de gènes et de rassurer face aux craintes de certains. Une fois rattachés au passé, les OGM puisent une nouvelle légitimité positive. >> La solution d’avenir L’ancrage des OGM dans le passé et dans l’évolution naturelle des techniques agricoles permet également d’ouvrir les portes de l’avenir. Alors que les OGM sont contestés, les auteurs du site n’hésitent pas à affirmer, via des témoignages, que les OGM sont l’avenir de l’agriculture.

« Dans la mesure où les OGM seront une part nécessaire de l’alimentation du futur proche… »46

La transgénèse n’est plus une technique isolée. Elle est devenue l’aboutissement de siècles d’évolution agricole, et représente une technique comme les autres et parmi d’autres.

« Personne ne prétend que les plantes transgéniques vont résoudre tous les problèmes, mais elles sont une solution intéressante parmi d’autres. »47

« Noyer » la transgénèse avec d’autres techniques reconnues du grand public permet aux auteurs du site de réduire aux yeux des internautes les risques que constituent les OGM.

43 Cf « Les contributions internautes » Anne Tiercelin, 14/06/2002. 44 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisement », « biotechnologies », « OGM » ? » 45 Cf « Pourquoi un agriculteur choisit-il des plantes transgéniques ? » 46 Cf « Limiter les risques d’allergie » 47 Cf « Les contributions internautes » Anne Tiercelin, 14/06/2002.

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B/ L’amoindrissement des risques

Pour amoindrir les risques que peuvent soulever les OGM, les concepteurs du site continuent à fondre les OGM dans une masse plus large. Ils ne cherchent pas à nier les risques des OGM car cela entraînerait une polémique et la révélation de leur parti pris. Leur approche sur la question sécuritaire revient à consentir qu’il existe des risques potentiels, mais comme ailleurs.

« Oui le risque d’allergie existe avec les OGM, comme d’ailleurs avec tout produit non issu d’OGM. »48

>> La généralisation des risques Les auteurs du site cherchent à généraliser les risques afin de diminuer la portée émotionnelle négative de ces derniers. Les auteurs utilisent également les mentalités et les connaissances des internautes pour remplir leurs objectifs. Comme pour mettre en confiance les internautes, il s’agit de s’appuyer sur des faits qui ont déjà une connotation. Plus concrètement, analysons l’exemple suivant :

« Le risque de favoriser la résistance aux antibiotiques par l’intermédiaire des OGM n’a jamais été prouvé scientifiquement. […]

L’utilisation d’antibiotiques comme facteurs de croissance en nutrition animale, et plus globalement, leur emploi en médecine humaine et vétérinaire sont reconnus comme la source majeure

du développement des résistances aux antibiotiques. »49 Contrairement aux risques allergiques, le site affirme clairement que la résistance aux antibiotiques via des OGM n’a jamais été prouvée. Bien que l’inverse (l’absence de résistance aux antibiotiques via les OGM) n’ait pas été prouvé non plus, cette affirmation en début de phrase marque les esprits. Le site cherche ensuite à détourner l’attention sur une autre cause responsable. Les auteurs prennent l’exemple (bien connu du grand public) de l’utilisation massive d’antibiotiques qui favorisent des résistances. Les internautes sont pour la plupart sensibilisés à la question des antibiotiques et ne contestent pas le bien fondé de l’affirmation. Là où il pourrait avoir deux causes de résistance aux antibiotiques, l’internaute n’en retient qu’une, celle dont il est déjà sûr. >> Le mépris du débat Pour diminuer l’impact d’une critique d’un adversaire, une technique consiste à mépriser ses affirmations. Sans aller directement jusqu’au mépris, d’autres attitudes remplissent un rôle similaire.

« Ils [les pays du Sud - NDLR] pourraient bien négocier ce tournant tandis que nous en serons encore à épiloguer sur d’hypothétiques risques. »50

48 Cf « Les contributions internautes » Jacques-Henry Weil, 26/06/2002. 49 Cf « Les aliments transgéniques vont-ils favoriser la résistance aux antibiotiques ? ». 50 Cf « Les pays du Sud en avance sur l’Europe ? ».

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Dans cette phrase, le verbe « épiloguer » à une connotation négative . « Epiloguer » signifie « trouver à redire sur toutes choses ». Cela revient à dire que ce débat est avant tout mené par des contestataires et qu’il est inutile. « Epiloguer » est la marque d’un certain dédain affiché envers des risques définis comme « hypothétiques ». De telles affirmations se retrouvent sous diverses formes tout au long des pages du site et cherchent à rabaisser l’importance du débat ainsi qu’à diminuer son impact.

C/ Les perspectives et encerclements des OGM Une autre attitude qui va de pair avec celle de l’évolution temporelle naturelle consiste à mettre en valeur les perspectives liées au développement des biotechnologies. >> Des perspectives positives Le thème des bénéfices retirés par les cultures transgéniques est omniprésent sur le site. Des phrases du type « la transgénèse constitue un outil complémentaire qui ouvre de nouvelles perspectives… »51 se retrouvent sur la quasi-totalité des pages. Pour justifier les perspectives annoncées, les auteurs promeuvent un ensemble d’émotions. Différents témoignages s’accordent pour dénoncer tel ou tel problème, qu’il soit environnemental, humanitaire, économique ou social. Une fois l’internaute sensibilisé sur ces points, les OGM sont présentés comme la solution pour les résoudre. Exemple 1 : La mauvaise alimentation des sociétés occidentales est souvent mise à mal dans plusieurs témoignages.

« Dans des populations normalement alimentées, peut-on imaginer une nourriture composée d’aliments plus diététiques, mieux « contrôlés », enrichis en telle ou telle substance ? » 52

Les maladies cardio-vasculaires sont mises en avant comme axe émotionnel dans cet exemple car elles sont l’une des premières causes de mortalité (si ce n’est la première) des pays occidentaux. Face à ce fléau des sociétés modernes, les OGM semblent être la solution pour diminuer la mortalité.

« Il s’agit là de travaux en cours de réalisation, et qui ont bien pour objectif de proposer une alimentation plus saine, mieux équilibrée, et pourquoi pas moins calorique. »53

Exemple 2 : Toujours dans le registre de l’alimentation, la dialectique du site fait souvent référence aux perspectives qu’ouvrent les OGM pour résoudre les famines dans le monde.

« Lors d’un voyage, j’ai constaté qu’au Mali l’alimentation était peu variée […] car peu de choses

51 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisements », « biotechnologies », « OGM » ? » 52 Cf « Les contributions internautes », Caroline Dusseauge, 27/06/2002. 53 Cf « Les contributions internautes », Jacques-Henry Weil, 23/07/2002.

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poussent en raison du climat (sécheresse dans une grande partie du pays, situé en Afrique subsaharienne) et les denrées importées sont rares et trop chères pour la plupart des habitants. »54

Le témoin pose une question par la suite: « Ce que j’aimerais savoir, c’est si les OGM permettront de développer de nouvelles variétés de cultures résistantes

aux conditions difficiles comme le manque d’eau, les attaques des insectes, la pauvreté des terres, pour introduire d’autres céréales ou des fruits et légumes nouveaux

dans l’alimentation, et pour développer l’élevage. » En réalité cette question contient déjà la réponse car d’autres témoins et documents démontrent que tout cela est ou sera bientôt possible grâce aux cultures transgéniques. Exemple 3 : Dans les pays du Tiers monde, les maladies découlent très souvent d’une mauvaise ou insuffisante alimentation. D’autres maladies proviennent du manque d’hygiène ou de la transmission de virus. C’est le cas du paludisme qui se transmet à l’homme par les moustiques. Le paludisme est l’un des principaux facteurs de mortalité parmi les populations de ces pays qui n’ont pas accès aux médicaments. Les médicaments restent encore très limités ; ils sont pour la plupart préventifs ou ne soignent que les crises, mais n’éliminent jamais le microbe. Dans le site, la transgénèse est présentée comme une solution prometteuse pour soigner le paludisme.

« Il y a actuellement beaucoup d’engouement pour les vaccins oraux pouvant être fabriqués par des végétaux transgéniques, tels la tomate, la banane, la carotte ou encore la pomme de terre. Des recherches

sont en cours pour des applications à l’hépatite et au paludisme, pour lequel on est très démuni. »55

La précision dans cet extrait de « pour lequel on est très démuni » renforce l’idée que la transgénèse est la meilleure solution à ce jour pour lutter contre le virus. Exemple 4 : Les maladies sexuellement transmissibles (MST) sont une autre catégorie de maladies qui fait des ravages aussi bien parmi les populations du Nord que dans celles du Sud. Le potentiel de projection émotionnel des MST sur les populations est très important compte tenu des nombreuses campagnes médiatiques de prévention et d’information. Le site 217 évoque ces MST, en particulier l’herpès génital.

« Lorsque nous avons décidé de nous concentrer sur la production d’anticorps contre les maladies sexuellement transmissibles, nous avons opté pour une production dans les plantes. »56

Quasiment tous les internautes associent immédiatement les MST au Sida. L’association positive des biotechnologies à la guérison de MST gratifie les OGM d’une légitimité et d’une crédibilité très importante aux yeux des internautes.

54 Cf « Les contributions internautes », Marie Debord, 14/06/2002. 55 Cf « Quelles perspectives pour les aliments-vaccins ? » 56 Cf « Une façon peu onéreuse de produire des médicaments »

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>> Pour conclure, le site résume de lui-même les perspectives qu’offrent les cultures transgéniques57. Elles peuvent se présenter sous la forme du tableau suivant :

Ce qui est dit Ce qui en est induit, puis affirmé

Sécurisation des récoltes Réduction des famines dans le monde

PROGRES ALIMENTAIRE

Moins de pesticides Amélioration de l’alimentation ; diminution de la pollution et des insectes résistants

PROGRES SANITAIRE ET

ECOLOGIQUE

Moins de temps consacré à l’agriculture

Amélioration de la vie agricole

PROGRES SOCIAL

Moins de carburant Réalisation d’économies, moins de pollution

PROGRES ECONOMIQUE ET ECOLOGIQUE

>> Un encerclement global Il existe encore une autre technique pour influencer les internautes et leur faire accepter les cultures transgéniques. Elle consiste à démontrer que les OGM sont présents à tous les niveaux. La technique de l’évolution naturelle en fait partie puisque les OGM apparaissent présents depuis les débuts de l’agriculture ; c’est un encerclement temporel. L’autre encerclement mis en avant par le site est de nature géographique. Tout au long des pages du site, ses auteurs ont distillé le sentiment que les OGM sont cultivés sur tous les points du globe, par des millions d’agriculteurs…sauf en France.

« Des plantes transgéniques sont cultivés dans de nombreux pays, où elle sont utilisées, souvent après transformation, dans l’alimentation humaine ou animale. »58

« La culture des OGM, notamment le soja et maïs, est largement répandue dans le monde »59

« Si 4 pays […] cultivent 99 % de la surface totale des plantes transgéniques, d’autres pays comme le Mexique et l’Afrique

du Sud montrent des progressions notables. L’Indonésie a commercialisé du coton transgénique pour la première fois en 2001. »60

« En Europe, l’Espagne fait figure d’exception avec presque 30 000 hectares de maïs transgéniques […]

Néanmoins, l’Allemagne autorise depuis 5 ans la mise en culture de quelque centaines d’hectares

57 Cf « Pourquoi un agriculteur choisit-il des plantes transgéniques ? » 58 Cf « Les plantes transgéniques sont-elles utilisées dans l’alimentation humaine ? » 59 Cf « Consomme-t-on des OGM lorsqu’on mange des produits issus d’animaux ayant consommé des plantes génétiquement modifiées ? » 60 Cf « Quel est le développement des cultures transgéniques dans le monde ? »

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de maïs transgéniques […], et au Royaume-Uni ce sont les pouvoirs publics qui encadrent l’implantation de plusieurs milliers d’hectares de cultures génétiquement modifiées […] La Bulgarie et la Roumanie cultivent 40 000 hectares de soja et de maïs tolérant à un herbicide, à des fins commerciales. »61

Les auteurs citent fréquemment de nombreux pays cultivant des plantes transgéniques. Bien que le site affirme lui-même que seulement quatre pays représentent 99% de la surface totale (les Etats-Unis représentant à eux seuls 68 % des cultures transgéniques mondiales), cette énumération associée à de nombreux chiffres volontairement impressionnants marquent tout de même les esprits des internautes.

« Plus de 5 millions d’agriculteurs cultivent des OGM et les trois quarts vivent dans les pays du Sud. »62

« En 2001, la surface mondiale totale de cultures transgéniques dépasse les 50 millions d’hectares, plus du double de la surface agricole française… »63

« Selon le rapport annuel de l’ISAAA sur les cultures transgéniques dans le monde, la surface totale de ces

dernières a atteint 52,6 millions d’hectares en 2001, soit l’équivalent de la surface de la France. »64 Ces deux derniers extraits poursuivent un même objectif : marquer l’imaginaire des internautes par les chiffres. Bien que dans les deux cas les comparaisons ne soient techniquement pas valables (Que représentent deux fois la surface agricole française ou même de la France face à une surface agricole mondiale ?), elles le sont néanmoins d’un point de vue émotionnel car elles renforcent le sentiment d’implantation massive des OGM dans le monde. Les cultures transgéniques apparaissent ainsi comme le nouveau modèle agricole repris quasiment mondialement. A cette présence géographique prétendue globale s’ajoute l’encerclement par les produits transgéniques déjà commercialisés. Les auteurs citent les plantes transgéniques déjà autorisées en Europe et en France, ce qui renforce l’incompréhension de nombreux internautes qui pensaient que tous les OGM étaient bannis de France. Dans une page intitulée « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? », les auteurs du site énumèrent les plantes transgéniques dont la culture a reçu une autorisation avant le moratoire. Le titre de la page induit que les OGM sont déjà commercialisés, la liste appuie ensuite ce sentiment. Une autre page65 vient compléter ce dispositif avec des liens vers deux sites institutionnels qui dressent des listes complètes de plantes transgéniques autorisées en France et en Europe. >> Ces éléments coordonnés cherchent à persuader l’internaute que les OGM sont cultivés dans de nombreux pays du monde, même en Europe et en France. Cette approche est déstabilisante pour l’internaute qui ne comprend plus pourquoi de nombreux pays, y compris des voisins de la France (Espagne, Allemagne, Royaume-Uni), cultivent des plantes transgéniques et que ce ne soit toujours pas le cas en France, exceptées pour certaines. Ces incohérences apparentes marquent le passage de la stratégie défensive à la stratégie

offensive.

61 Cf « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? » 62 Cf « Les pays du Sud en avance sur l’Europe ? » 63 Cf « Quel est l’impact économique des OGM ? » 64 Cf « Quel est le développement des cultures transgéniques dans le monde ? » 65 Cf « Les plantes transgéniques sont-elles utilisées dans l’alimentation humaine ? »

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1.2 Discréditer et diaboliser pour diviser Pour compléter le dispositif défensif que nous venons d’étudier dans la partie précédente, les sites de PM lancent parallèlement des actions offensives.

Une fois que les sites ont défendu leurs arguments et leur camp, ils cherchent ensuite à saper les thèses adverses. Pour ce faire, ils s’attaquent à l’identité même de l’adversaire.

A/ Le discrédit et les incohérences Il existe différents niveaux d’attaque « identitaire ». Au premier niveau, on retrouve le doute et le discrédit. Le PM évite la désinformation et la diffamation, les attaques doivent porter sur des faits vérifiés et vérifiables pour prendre toute leur portée. Une technique utilisée pour surmonter des

arguments ou des obstacles ne présentant aucune faille consiste à semer le doute dans les

esprits et à jeter le discrédit sur les partis adverses. Dans le cas du dossier des OGM, le moratoire de 1999 empêchait l’autorisation de mise sur le marché de nouvelles plantes génétiquement modifiées tant que l’Union européenne ne se munirait pas d’une législation complète sur l’étiquetage et la traçabilité des OGM. Ce moratoire constitue un des obstacles majeurs en Europe. Au lieu de l’attaquer frontalement, les concepteurs du site 217 agissent sur l’image et la crédibilité du moratoire. Plusieurs techniques ont été mises en œuvre pour le décrédibiliser tout au long des pages du site. >> Une « guerre sémantique » Les concepteurs du site glissent des termes négatifs qui accolés au moratoire lui nuisent, sans que cela constitue pour autant des attaques qualifiées.

« Depuis 1999, du fait du moratoire imposé par 6 pays européens dont la France, le processus d’autorisation de mise en marché de nouveaux OGM est gelé en Europe. »66

Le moratoire est ici qualifié d’ « imposé », terme à forte connotation négative. On l’associe généralement à la force qui « impose » aux plus faibles. En quelques sortes, les défenseurs des OGM deviennent des victimes qui « subissent » sans avoir leur mot à dire. Revenons un instant sur cette « guerre sémantique ». L’usage des mots revêt une importance capitale dans les opérations de PM. La finesse dans le choix des mots fait la richesse de la gestion des perceptions. Chaque mot est plus ou moins connoté dans l’esprit des internautes. La « guerre sémantique » touche directement cet imaginaire sollicité le plus souvent de manière inconsciente par les internautes. Les internautes retrouvent cette manipulation sémantique à de très nombreuses reprises dans le site 217. Il s’agit d’associer des émotions qui sont soit positives, soit négatives à des phrases ou arguments.

66 Cf « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? »

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Par exemple, pour les biotechnologies et les OGM, la sémantique positive ne manque pas.

« La transgénèse constitue un outil complémentaire qui ouvre de nouvelles perspectives… »67

« Dans ce contexte, les OGM contribuent à la fois : à mieux comprendre la biologie végétale, à concevoir des aliments répondant aux aspirations des consommateurs, à développer des procédés particulièrement

économiques ou écologiques. »68 « Nouvelles perspectives », « contribuent », « mieux comprendre », « répondant aux aspirations des consommateurs »… tous ces termes connotés positivement entourent les OGM d’un environnement perceptif favorable. Parfois, la démarche va même plus loin en adoptant une position clairement partisane.

« Mais elles offrent plus encore… »69 Dans cet exemple, le terme « offrir » projette les plantes transgéniques dans le domaine de la générosité. L’opposition sémantique prend encore plus d’importance si l’internaute peut comparer les éléments entre eux. C’est le cas ci-dessous, quand les auteurs du site démontrent que la transgénèse dépasse les techniques agricoles traditionnelles de sélection et de croisements.

« La méthode de croisement « classique » se limite aux plantes interfécondes […] Les améliorations obtenues sont le fruit d’un long processus d’observation […] parfois aussi celui du hasard… »70

« Beaucoup plus rapide, la transgénèse permet d’améliorer les plantes… »71 Dans le premier extrait, les méthodes classiques sont affublées de termes plutôt négatifs (« se limite », « fruit d’un long processus », « celui du hasard ») qui laisse un sentiment d’isolement et d’incertitude. Dans le second extrait, la lenteur des méthodes classiques est dépassée par la vitesse d’exécution de la transgénèse (« beaucoup plus rapide ») qui « améliore les plantes » de manière plus certaine et constante que le hasard. Cet exemple reflète bien l’opposition sémantique qu’il est possible d’appliquer à des concepts ou à des faits pour renforcer ou diminuer la perception que l’internaute s’en fait. >> Les incohérences Pour continuer à décrédibiliser leurs adversaires, les concepteurs d’opérations de PM examinent les incohérences et orchestrent leur divulgation. Pour donner l’illusion d’incohérences, les concepteurs de sites de PM simplifient souvent la situation en présentant les faits à leur avantage. « Avant le moratoire de fait que nous connaissons aujourd’hui, certains OGM ont reçu l’agrément de l’Union Européenne, au

terme de procédures extrêmement rigoureuses. […] En France, les plantes transgéniques dont la culture a reçu une autorisation avant le moratoire sont les suivantes… »72

67 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisement », « biotechnologies », « OGM » ? 68 Cf « Quelle est l’utilité des plantes transgéniques pour ceux qui ne son pas agriculteurs ? » 69 Cf « Pourquoi un agriculteur choisit-il des plantes transgéniques ? » 70 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisement », « biotechnologies », « OGM » ? 71 Cf « Qu’entend-on par « sélection », « croisement », « biotechnologies », « OGM » ? 72 Cf « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? »

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L’idée véhiculée est la suivante : le moratoire n’a aucune raison d’être puisque des cultures transgéniques ont été autorisées en France et en Europe avant son application. Il est incohérent d’interdire « maintenant » ce qui était autorisé « avant ». Pourquoi est-ce que les OGM étaient autorisés et ne le sont plus ? Représentaient-ils un risque pour la santé et l’Etat n’a pas pris les mesures nécessaires pour protéger les consommateurs, ou bien est-ce qu’ils n’étaient pas dangereux et ne le sont toujours pas ? C’est bien évidemment cette seconde idée que le site tente de transmettre aux internautes. Pour compléter le dispositif, le site répète fréquemment ses arguments. Rédigés sous des formes légèrement différentes, la répétition des idées permet de les ancrer dans l’esprit des internautes. La phrase suivante reprend sous des termes à peine différents la même idée que l’extrait précédent.

« En Europe, un moratoire de fait gèle depuis 1999 le développement de nouvelles plantes transgéniques. Cependant, des autorisations ont été délivrées avant cette date… »73

Ces répétitions renforcent le sentiment d’incohérence de la politique européenne en matière d’OGM. Les cultures et les échanges de plantes transgéniques paraissent déjà, même partiellement, en place. Cela donne l’impression que le moratoire n’a pas lieu d’être puisque tout le système est déjà en place et fonctionnait bien par le passé. Cette idée est reprise par l’extrait suivant qui tente de démontrer que les animaux se nourrissent déjà de plantes transgéniques.

« Les tourteaux de soja, l’ensilage de maïs entrent pour une large part dans l’alimentation animale, et comme notre pays fait commerce avec de gros producteurs d’OGM (USA, Argentine, Brésil…),

les rations des animaux d’élevage sont loin d’en être exemptes, même si un moratoire en interdit la culture. »74

Une fois de plus, le moratoire paraît ne servir à rien puisque les consommateurs mangent des aliments issus des OGM depuis longtemps via les animaux, et que nuls ne semblent en être affectés. Cela rejoint la technique de l’encerclement. Les OGM sont partout, dans l’histoire agricole de la France, dans l’alimentation animale, et même dans les autres pays européens.

« En Europe, l’Espagne fait figure d’exception avec presque 30 000 hectares de maïs transgénique […] L’Allemagne autorise depuis 5 ans la mise en culture de quelques centaines d’hectares de maïs transgéniques […] au Royaume-Uni ce sont les pouvoirs publics qui encadrent l’implantation de plusieurs milliers d’hectares de

cultures génétiquement modifiées… »75 La France semble ainsi mener une politique agricole et sanitaire incohérente face aux autres pays de l’Europe qui pour certains ont adopté les OGM dans leur agriculture.

B/ Le fractionnement en camps opposés Semer le doute et le discrédit sur l’adversaire préparent le terrain pour pousser plus loin l’offensive. Cela a permis d’affaiblir les forces adverses et a servi d’introduction à la division en

73 Cf « Les plantes transgéniques sont-elles utilisées dans l’alimentation humaine ? » 74 Cf « Consomme-t-on des OGM lorsqu’on mange des produits issus d’animaux ayant consommé des plantes génétiquement modifiées ? » 75 Cf « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? »

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camps. Cette matérialisation peut devenir un théâtre d’action pour modifier la perception que l’internaute se fait des camps. Le premier qui délimite dans l’esprit des internautes les contours des camps à son avantage gagne un avantage considérable. Pour y parvenir, les concepteurs de site de PM peuvent recourir à la diabolisation de l’adversaire et/ou à l’imposition d’une vision dualiste de la situation. >> La diabolisation de l’adversaire La diabolisation de l’adversaire est l’étape qui suit le discrédit. Plus radicale et moins nuancée, cette technique s’applique moins facilement aux opérations de PM qui se jouent des nuances et de la modération, du moins en façade. La diabolisation est donc plus rare pour les opérations de PM que pour celles de désinformation. Cette technique est facilement détectable et révélatrice de sa position sur un sujet, alors que les opérations de PM cherchent à paraître le plus possible neutres aux yeux de leur audience cible. Dans le site 217, nous pouvons relever une tentative principale de diabolisation que les concepteurs du site ont entouré de précautions. Elle se trouve sur la page d’accueil dans le témoignage de l’étudiant en école de commerce.

« S’ils [les anti-OGM - NDLR] ne savent pas que les biotechnologies vont permettre de synthétiser les médicaments et les plastiques de l’avenir, il serait temps de leur dire avant qu’ils rasent tous les champs d’essais. »76

Cette diabolisation se ressent avec l’emploi de « raser tous les champs d’essais » qui évoque fortement un intégrisme primaire. Les concepteurs du site confinent les anti-OGM dans cette image souvent répandue dans l’opinion publique, celle de militants agressifs qui ne s’expriment que par des actions médiatiques d’arrachage de cultures. Ils se permettent une telle allusion car elle émane d’un jeune qui a volontairement un langage libéré. Cela permet également d’éviter de mentionner tous les « rationnels » qui sont contre les OGM, comme les scientifiques par exemple. Le discrédit et la diabolisation sont des moyens qui concourent ensemble à atteindre l’objectif recherché : la division en camps pour isoler la France. >> Une représentation dualiste Les sites de PM recherchent la conceptualisation de camps ayant de fortes connotations émotionnelles. L’exemple précédent tendait à présenter les anti-OGM comme des militants qui agissent violemment au-lieu de réfléchir. Cette représentation dualiste de scientifiques contre des militants se retrouve très clairement dans la page qui apparaît en même temps que la page d’accueil.

« Les industriels, assurés de leurs connaissances scientifiques, comme les opposants, fidèles à leur vocation militante, affirmaient des convictions que l'opinion publique, prise à témoin pour obtenir des autorités publiques autorisations ou interdictions, était appelée à endosser

sans les comprendre. »77

76 Cf la page d’accueil, François Le Gall.

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Cette page est comme un avant-propos au site en présentant les forces en présence et les règles du débat. Les industriels qui sont derrière le site s’associent aux scientifiques, détenteurs dans l’imaginaire des réponses, tandis que les anti-OGM sont uniquement considérés comme des militants qui s’opposent par « vocation ». Cette affirmation est très forte puisqu’elle insinue que les opposants aux cultures transgéniques sont les mêmes qui s’opposent à tout. S’ils ont la « vocation militante », cela signifie bien qu’ils se sont opposés à d’autres projets dans le passé. La « vocation » des militants s’oppose ici à la « raison » des scientifiques, l’action à la réflexion… Cette vision dualiste se retrouve aussi dans le témoignage de l’étudiant de la page d’accueil. « Quand on voit que les militants anti sont souvent des citadins qui fument clope sur clope, qui ne supportent pas de pucerons dans leur salade (en sachet d’ailleurs) et qui respire de la pollution à longueur de journée… »78

Les anti-OGM sont présentés sous un autre angle toujours aussi peu avantageux. Ils sont désignés par le terme « anti » qui reprend l’idée précédente qu’ils sont opposés à tout. L’internaute découvre également que les opposants aux OGM sont « souvent des citadins qui fument clope sur clope ». Malgré le caractère excessif de cette affirmation, cette dernière permet de couper les anti-OGM de toute légitimité rurale. Les ruraux sont perçus proches de la terre, de l’agriculture et des produits de la terre, et donc plus légitimes pour juger les cultures transgéniques. Même s’il est facile de contester un tel argument (beaucoup d’internautes ont dans leur esprit l’image d’un José Bové rural, anti-OGM, arrêté pour ses arrachages de cultures transgéniques), de nombreux internautes peuvent acquiescer qu’il y a un certain snobisme intellectuel à se déclarer anti-OGM. « Par contre, je m’effraie de voir des jeunes vouloir revenir à l’agriculture de l’avant-guerre. C’est impossible… »79

Pour compléter le tableau noir des anti-OGM, leur action n’est pas présentée comme une volonté de se protéger d’éventuels risques sanitaires, mais comme un refus de se tourner vers le futur et d’accepter le changement. Ils sont ainsi perçus comme des anti-modernistes. La dualité des camps peut ainsi se représenter sous la forme du tableau suivant :

ANTI-OGM PRO-OGM

Militants Scientifiques

Vocation Raison

Action Réflexion

Citadins Ruraux

Mauvaise hygiène de vie Bonne hygiène de vie

Repli sur le passé Ouverture sur l’avenir

Mal Bien

77 Cf « OGM : L’évolution du débat ». 78 Cf la page d’accueil, François Le Gall. 79 Cf « Les contributions internautes », Maryse Salinieri, 19/06/2002.

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C/ L’isolement de l’adversaire principal

Les camps matérialisés et définis servent de cadre de confinement pour les adversaires. Une fois leurs adversaires classés dans cet « axe du mal », les concepteurs d’opérations de PM peuvent cibler un adversaire en particulier pour l’isoler du reste du groupe et l’affaiblir. C’est le cas ici de la France qui est progressivement pointée du doigt comme principale responsable de la situation actuelle. Farouchement opposée aux OGM, la France mène une coalition de sept pays80 qui soutiennent le moratoire de 1999. Frapper la France devrait permettre d’ébranler la coalition anti-OGM, et explique peut-être l’apparition de ce site exclusivement en français. Le processus d’isolement de la France se visualise très clairement dans une des pages du site81, et explique bien le passage progressif d’un groupe d’adversaires à un adversaire : la France. Ce processus se déroule en trois phases : Phase 1 : L’Europe et la France

« Depuis 1999, du fait du moratoire imposé par 6 pays européens dont la France, le processus d’autorisation de mise en marché de nouveaux OGM est gelé en Europe. »

La France et d’autres pays européens réussissent à imposer leurs vues au reste de l’Europe en matière de réglementation des cultures transgéniques. La France fait partie d’un groupe assez puissant pour instaurer un moratoire à l’ensemble de l’Union européenne. Dans ce groupe, la France paraît protégée et jouit même d’une certaine légitimité. Les auteurs du site mentionnent d’abord « 6 pays européens », puis y inscrit ensuite la France. Ils ne précisent pas les noms des autres pays appartenant à cet ensemble anti-OGM, seule la France est mentionnée. Prémices d’une focalisation spécifique sur la France. Phase 2 : L’Europe et la France contre l’Espagne, l’Allemagne et le Royaume-Uni.

« En Europe, l’Espagne fait figure d’exception avec presque 30 000 hectares de maïs transgénique […] L’Allemagne autorise depuis 5 ans la mise en culture de quelques centaines d’hectares de maïs

transgéniques […] au Royaume-Uni ce sont les pouvoirs publics qui encadrent l’implantation de plusieurs milliers d’hectares de

cultures génétiquement modifiées… » Plus loin dans le texte, les auteurs du site fissurent le camp européen en précisant (cette fois) quels sont les pays qui ont adopté les cultures transgéniques. Ils citent trois pays de l’Union européenne qui curieusement encerclent la France. Le Royaume-Uni au Nord, l’Espagne au Sud et l’Allemagne à l’Est. Tous les trois représentent un certain poids que ce soit au niveau de l’économie, de la superficie ou de la population. A ces pays, les auteurs ajoutent la Roumanie et la Bulgarie qui ont demandé leur adhésion à l’Union européenne.

80 France, Autriche, Italie, Danemark, Grèce, Belgique et Luxembourg. 81 Cf « Quelles sont les plantes transgéniques autorisées à la culture en France ? »

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L’image d’une France physiquement encerclée par les OGM renforce la perception d’isolement du pays. Les auteurs du site donnent les noms des pays « pro-OGM », ce qui leur confère un poids plus important que les pays « anti-OGM », pourtant plus nombreux, qui ne sont pas nommés. Phase 3 : La France contre le reste de l’Europe

« Enfin, deux dossiers relatifs au colza […], tolérants à un herbicide et permettant de créer des colzas hybrides, bénéficient d’une décision positive de la Commission européenne. Cependant, cette décision

n’a jamais fait l’objet d’un consentement écrit de la part de l’Etat membre rapporteur, en l’occurrence la France. Tant que ce consentement n’a pas été donné, ces colzas ne peuvent pas être commercialisés. »

Cet extrait se trouve dans le dernier paragraphe de la page. La Commission européenne qui représente l’ensemble des pays européens apparaît ici favorable à des cultures transgéniques. Cette affirmation marque un retournement de la situation, puisque les pro-OGM semblent désormais être majoritaires. Pourtant malgré cette majorité, les cultures transgéniques ne sont pas autorisées en Europe à cause de l’Etat membre rapporteur. Or cet Etat rapporteur n’est autre que la France. Le rapport de force s’est totalement inversé au cours de la page Internet puisque maintenant la France paraît seule à s’opposer aux OGM. La dernière phrase « tant que le consentement n’a pas été donné » insiste bien sur le rôle de la France qui est désignée comme la seule responsable de la situation actuelle. Ce sentiment est le dernier que l’internaute retiendra s’il lit l’intégralité de la page. >> Toute la stratégie offensive élaborée par les concepteurs du site atteint son paroxysme avec l’isolement de la France de cette dernière phrase. Les techniques décrites précédemment sont destinées à tous les internautes qui parcourent les sites de PM. Or il est fréquent, comme pour le site 217, que les concepteurs d’opérations de PM réservent des messages, des arguments et des techniques spécifiques pour certaines audiences particulières.

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2. Comment influencer selon les audiences

privilégiées ? Les sites Internet rencontrent plusieurs contraintes techniques dont deux particulièrement intéressantes dans l’étude d’opérations de PM. Il s’agit de la capacité à réagir en temps réel par la réactualisation des données, et de la capacité à rendre compréhensible le contenu du site à des audiences internationales. >> Rendre le site réactif En ce qui concerne la réactivité du site, il existe deux types principaux de langage informatique pour la construction de sites Internet. Le langage HTML est actuellement celui qui est encore le plus utilisé. Les concepteurs doivent créer chaque page et les modifier eux-mêmes. L’avantage de ce langage réside dans sa facilité d’accès et d’utilisation par le plus grand nombre si le site ne change pas souvent d’aspect. Le langage PHP est l’autre type possible. Son utilisation connaît une importante croissance, notamment pour les sites nécessitant des réactualisations fréquentes. C’est le cas des sites d’information qui utilisent quasiment tous ce langage. Il nécessite un minimum de prise en main pour en comprendre le fonctionnement. Cependant, une fois la structure du site élaborée, les auteurs n’ont plus qu’à remplir des fiches questionnaires82 qui se chargent de l’édition, de la mise en page et de l’actualisation des liens des documents. Le site 217 fonctionne sous le langage PHP, ce qui implique une forte réactivité potentielle. Ce langage permet en effet de mettre facilement et rapidement en ligne des témoignages d’internautes, des articles ou de répondre très rapidement à toute attaque adverse. >> Rendre le site compréhensible Quand le réseau Internet s’est développé, un des objectifs premiers était de diffuser le maximum de données à un maximum d’individus dans le monde. C’est pourquoi, la plupart des sites qui remplissent une vocation de large diffusion ont leur site traduit en plusieurs langues. L’étude des langues présentes sur un site est révélatrice des publics que ce dernier cherche à toucher en priorité, tout en considérant que la traduction en anglais biaise cette analyse. Les sites de PM peuvent être traduits en plusieurs langues si l’objectif de leurs concepteurs est de toucher des audiences de pays différents. Toutefois, le site 217 est uniquement écrit en français. Cette information revêt une importance toute particulière puisqu’elle limite les audiences cibles aux seules populations francophones. Le site 217 a été conçu de telle manière que certaines rubriques sont accessibles à tout moment. Ces rubriques sont destinées à des catégories précises de la population francophone. Il s’agit des médecins, des enseignants et des étudiants que l’on peut grouper en deux classes : le monde médical et le monde éducatif.

82 Titre du document, auteur, chapeau, texte, rubrique affiliée, mots-clés qui définissent l’article…

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2.1 Le choix des audiences privilégiées Ces rubriques sont toujours accessibles aux internautes car elles se trouvent dans le bandeau en haut de la page.

Elles correspondent à des « espaces » qui sont spécialement prévus pour des audiences visées. L’internaute retrouve :

• « L’espace médecins » ; • « L’espace enseignants » ; • « L’espace jeunes ».

Ces deux mondes (médical et éducatif) correspondent à des catégories clés de la société française en matière de diffusion d’information, notamment en terme d’informations médicales. Ces catégories fonctionnent selon le principe « diffuseurs-récepteurs ».

Monde éducatif Monde médical

Diffuseur Enseignants Médecins

Récepteur Etudiants Patients

Les concepteurs du site 217 ont effectué un travail précis d’identification des « caisses de résonance »83 les plus sensibles sur le sujet des cultures transgéniques. Ces espaces « dédiés » correspondent à réelle stratégie de pénétration des couches sociales représentatives pour mener à bien une réelle politique de communication/éducation sur les OGM. On peut considérer cette démarche comme une dynamique d’infiltration perceptive de la société.

A/ Le monde éducatif >> Les enseignants Ce sont les enseignants des écoles, collèges et lycées qui sont visés dans le site, et pas les professeurs d’université. Ces derniers étant le plus souvent en même temps chercheurs, ils seraient beaucoup moins réceptifs aux arguments présentés par le site. Les universités sont déjà des lieux de polémique dans lesquels la parole du professeur est plus facilement remise en question, contrairement aux classes de collège/lycée.

83 On appelle « caisses de résonance » les individus ou groupes d’individus qui ont la volonté et les capacités de donner de la résonance à un débat ou à un fait auprès de l’opinion publique.

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Les concepteurs du site 217 ont du répondre à cette première question : Quels sont les professeurs qui sont amenés à parler des OGM dans leurs cours ? Evidemment il y a les professeurs de Biologie, mais aussi ceux d’Economie et Géographie. Ces derniers, par exemple, enseignent un chapitre intitulé « Nourrir les Hommes » en Seconde qui aborde la question des cultures transgéniques. Les enseignants des collèges/lycées, notamment les professeurs chargés de l’Histoire, de la Géographie et de l’Education civique, manquent souvent de temps pour préparer leurs cours et leurs exercices. Le site utilise une de leurs faiblesses qui est cette recherche de gain de temps pour véhiculer leurs messages perceptifs. Le site 217 propose d’aider les enseignants à préparer leurs cours en leur fournissant des documents et des exercices déjà rédigés. Il s’agit du « Journal des instituteurs et des professeurs des écoles » déjà en ligne et de cinq fiches pédagogiques bientôt disponibles en ligne84. Ces documents que l’on étudiera par la suite permettent d’occuper le terrain de la connaissance et de disposer de fortes caisses de résonance. Les professeurs enseignent à une centaine d’élèves par an, et forment des générations entières. En devenant un outil pédagogique, les documents du site influencent directement la perception des générations futures sur les OGM. >> Les étudiants/élèves Les étudiants sont les générations futures, mais surtout les consommateurs de demain. En influant directement sur ces derniers, le site cherche à modifier à son avantage la perception de cette population sur les OGM.

84 Toujours pas en ligne en mars 2003.

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Pour toucher cette population, le site joue la carte de l’attractivité et du ludique. C’est pourquoi la page qui leur est réservée est volontairement plus interactive que le reste du site. Le jeu et les connaissances sont associés aux OGM pour rendre ces derniers attractifs et positifs. Comme pour les enseignants, les auteurs du site communiquent avec les étudiants à l’aide de documents. Une visite virtuelle d’un laboratoire de recherche génétique85 leur est proposé, illustrée par des photos commentées86. Le but étant de susciter la curiosité des plus jeunes. Un test de connaissance disponible en ligne leur est également présenté, agrémenté de dessins. Cette démarche vers le monde éducatif est voulue. Généralement plus sensibles aux progrès et aux démonstrations concrètes, les jeunes représentent pour les concepteurs du site l’audience la plus importante à traiter car les jeunes sont les consommateurs de demain.

B/ Le monde médical

Le corps médical jouent un rôle d’information important auprès de l’opinion publique. En effet, les relations qu’ils entretiennent avec leurs patients (médecins) ou leurs clients (pharmaciens) en font souvent des interlocuteurs privilégiés et fiables car ce sont des professionnels de la santé. Les informations qu’ils apportent alors ont un impact positif. Les médecins sont donc contraints d’effectuer des recherches en permanence pour compléter leurs connaissances et rester au courant de l’actualité. Bien qu’à l’heure actuelle, on puisse encore douter que les médecins utilisent fréquemment Internet comme source d’information, cette éventualité à terme n’est pas à exclure. Le site 217 semble avoir mis en place cet espace pour les médecins de la nouvelle génération plus à l’aise avec l’outil Internet.

85 Toujours pas en ligne en mars 2003. 86 Idem.

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Comme pour les espaces étudiants et enseignants, l’espace « médecins » propose de télécharger des documents « OGM et santé…parlons-en », l’un à destination des médecins, l’autre pour les patients. Ces documents présentent un faible intérêt en soi puisqu’ils reprennent les arguments principaux présentés dans le site, en utilisant les différentes techniques de PM analysées précédemment. >> Les mondes éducatif et médical représentent des milieux d’importants échanges d’informations. En pénétrant ces espaces de flux d’informations, les opérations de PM pénètrent le système de prise de décision de l’opinion publique. Le schéma suivant présente les canaux utilisés par le site 217 pour persuader l’opinion publique. Les patients diffusent à leur entourage les informations que les médecins leur ont communiquées. Les élèves reçoivent un enseignement de leurs enseignants qu’ils communiquent à leur tour à leur famille et entourage. Progressivement, les familles reçoivent des informations identiques de sources différentes, et modifient leur perception des OGM.

PERCEPTION MANAGEMENT

Médecins

Etudiants

Professeurs

Opinion publique

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2.2 L’emploi de supports spécifiques Les concepteurs d’opérations de PM adaptent les supports de leurs discours selon les audiences auxquelles ils s’adressent. Les documents du site 217 contiennent également d’autres techniques de gestion des perceptions pour approcher le débat sur les OGM sous de nouveaux angles.

A/ Le Journal des instituteurs Ce document de huit pages se compose d’une première partie qui fait un point rapide sur les OGM, et d’une seconde partie qui sont des fiches « connaissances/test » pour les élèves. Son objectif officiel est d’apporter des éléments de réponse les plus objectifs possibles pour que les jeunes puissent se forger leur propre opinion et comprendre les enjeux du débat. >> Un résumé de la situation Ces deux pages d’information sur les OGM sont un condensé des arguments que l’on retrouve à travers le site. C’est également un condensé des techniques de gestion des perceptions étudiées précédemment. Comme pour les autres pages du site, les titres des paragraphes sont des questions : il s’agit bien de donner des réponses et d’apporter la vérité sur ce sujet. Il ne s’agit pas ici de revenir en profondeur sur les techniques déjà étudiées dans les autres pages du site, mais simplement de donner quelques éléments d’analyse. La première page donne les définitions de base sur les cultures transgéniques, et fixe ainsi les limites du débat et les « règles du jeu ». Le document continue à insinuer que les OGM sont déjà cultivés sur l’ensemble de la planète comme pour sous-entendre le retard pris par l’Europe et la France.

« Des plantes transgéniques sont ainsi cultivées sur une cinquantaine de millions d’hectares dans le monde, surtout aux Etats-Unis, en Argentine,

au Canada, en Chine, en Afrique du Sud ou en Australie. » Le thème des perspectives ouvertes par la transgénèse87 est largement repris dans ce journal. Dès la première phrase du paragraphe, les auteurs rappellent que « les possibilités offertes par la transgénèse sont nombreuses », puis ils énumèrent longuement ces perspectives (une meilleure agriculture et qualité des produits, une augmentation de la valeur nutritive, l’augmentation de la durée de conservation, de nouveaux produits médicaux, des carburants plus économiques…). Cette liste qui ne dresse qu’un bilan positif des OGM est importante pour pouvoir répondre aux questions à la fin du document. On peut imaginer que les enseignants des petites classes vont résumer ces deux pages pour l’enseigner à leurs élèves qui ensuite pourront répondre aux fiches questionnaires. Dans le dernier paragraphe intitulé « Pourquoi la polémique autour des OGM ? », le site limite volontairement le débat aux « conséquences et risques de ces nouvelles techniques, en terme environnemental et en terme de santé publique ». L’environnement et la santé ont déjà été traités de manière « très positive »

87 Technique particulière du génie génétique permettant d’intégrer un ou plusieurs gènes nouveaux dans un organismes. Référence glossaire du site.

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précédemment. Ce journal est l’émanation de l’association DEBA qui prétend présenter les deux visions opposées au sein d’un débat. Or le lecteur est ici confronté à des questions soulevées par des opposants aux OGM (Y a-t-il risque de dissémination de gènes par croisements inopinés entre espèces proches ?…), mais contrairement aux précédentes questions, les auteurs n’y consacrent pas de paragraphes pour y répondre. Enfin, un point technique reste non résolu. Ce journal est daté de décembre 2001 et mentionne l’adresse du site 217. Or ce site n’a été activé qu’en octobre 2002… >> Les fiches élèves Les fiches destinées aux élèves se présentent toujours (sauf pour la dernière) de la même manière. Un court texte introduit des connaissances, puis des exercices ludiques (mots-croisés, vrai-faux, dessins à entourer…) permettent de contrôler les connaissances acquises.. Prenons par exemple la fiche 2. Celle-ci explique comment fabriquer les OGM. Pour y répondre, la fiche a recours à un syllogisme :

L’insecte est nuisible au maïs

Le gène est résistant à l’insecte

Le gène est introduit dans le maïs contre l’insecte

Le gène (sous-entendu les OGM) est devenu l’allié du « gentil » maïs contre le « méchant » insecte. Les questions de la fiche reprennent les mêmes idées (« On peut rendre une plante plus résistante aux attaques des insectes grâce au génie génétique »). L’élève peut même inconsciemment constater que le maïs transgénique (à droite) est plus performant que le maïs classique (à gauche) car il est plus grand et produit plus d’épis de maïs.

Enfin la dernière fiche, la fiche 5, mérite une attention particulière car elle illustre bien l’utilisation des questions dans les opérations de PM. Dès l’introduction, la fiche explique les « règles du jeu » : les anti-OGM sont les « opposants » (terme négatif), tandis que les pro-OGM en sont les « défenseurs » (terme positif). Les élèves de ces classes

+

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sont plus habitués à répondre à des exercices de type VRAI/FAUX. Les auteurs jouent dessus pour favoriser l’amalgame dans l’esprit des élèves de type : Pro-OGM = vrai ; Anti-OGM = faux. Si on liste les arguments des pro-OGM, on peut en induire un certains nombre de points.

Questions Induction

1 Protection de l’environnement

3 Augmentation des rendements

5 Amélioration de la qualité des produits

8 Perspectives nouvelles en médecine

10 Diminution des famines dans le monde

13 Protection de l’environnement

15 Carburant plus économique

Ces questions résument l’ensemble du document ; elles n’induisent que des arguments positifs. Les élèves réalisent bien que les arguments des anti-OGM sont contraires à ce qu’ils ont pu lire et apprendre dans les fiches précédentes. Ils en déduisent donc simplement que les arguments des anti-OGM sont faux.

Questions Induction

6 Propagation des OGM à l’Homme = FAUX

7 Mélange de gènes d’animaux et de végétaux = FAUX

9 Cette question est en totale contradiction avec les questions pro-OGM 1 et 13 qui affirment que les OGM protègent l’environnement = FAUX

12 « Les consommateurs sont mal informés » = FAUX car les élèves sont informés par cette revue

En fait, dès que les élèves lisent des phrases négatives, ils savent qu’il s’agit des arguments des anti-OGM. Pour conclure, ces fiches portent systématiquement la mention « Photocopie autorisée… », ce qui facilite leur diffusion alors que la plupart des livres et des manuels luttent contre le photocopillage.

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B/ Le test pour les élèves

Un autre document destiné aux élèves est disponible sur le site. Il s’agit d’un test de douze questions auxquels les internautes doivent répondre en ligne question par question. Les jeunes sont moins enclins à lire les pages du site, c’est pourquoi ce test leur est destiné du fait de sa démarche ludique. Ce test est un condensé des axes prioritaires déclinés dans le reste du site. Sur les douze questions, on peut considérer qu’il y en a sept d’« orientées »88. Ces dernières reprennent les principaux arguments (environnement, allergies…) ou emploient des techniques de modification des perceptions (encerclement, inscription temporelle…).

N° de la question

Question Type de question

1 Pourquoi l’homme ne peut-il pas vivre sans

les plantes ? Question classique

2 Quelle est l’unité responsable du codage et de

la transmission d’un caractère héréditaire ? Question classique

3 A quoi servent les gènes ? Question classique

4 Comment le génie génétique peut-il améliorer

l’environnement ? Question orientée

5 Quel est le produit qui n’est pas issu des

biotechnologies ? Question orientée

6 Comment peut-on, par génie génétique,

diminuer les allergies de l’homme dues aux plantes ?

Question orientée

7 Dès le début de l’agriculture, l’Homme a

commencé à choisir les plus belles plantes, pourquoi ?

Question orientée

8 Quelle est la structure de l’ADN ? Question classique

9 Comment peut-on identifier la fonction d’un

gène ? Question classique

10 Pourra-t-on à l’avenir réduire l’utilisation des

engrais par génétique ? Question orientée

11 Comment assurer l’alimentation, sachant que

la population mondiale augmente de 80 millions de personnes par an ?

Question orientée

12 Comment produit-on de l’insuline pour les

diabétiques ? Question orientée

88 On appelle questions « orientées », les questions qui induisent des messages sous-jacents qui servent les intérêts des concepteurs du site.

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Analysons à présent plus précisément en quoi chacune de ces questions est « orientée ». La question 4 : Comment le génie génétique peut-il améliorer l’environnement ?

Cette question positionne les OGM sur le thème de l’environnement, thème que l’on retrouve tout au long du site. Il est connoté très positivement auprès des jeunes qui l’appréhendent de manière très duale : l’environnement c’est « Bien », tout ce qui va contre est « Mal ». Cette question joue sur les émotions des jeunes internautes qui placent les OGM aux côtés de l’environnement, donc du Bien. L’axe écologique est considéré si pertinent par les concepteurs du site qu’il est réutilisé à la question 10. Les dessins sont un support visuel aux questions et remplissent un rôle important. Les jeunes sont très accessibles aux dessins, c’est pourquoi ils sont volontairement humoristiques afin de rendre sympathiques et attractifs les OGM. Sur le dessin ci-dessous, les personnages-gènes nettoient les sols pollués, et donc concrétisent dans l’esprit des jeunes la dépollution annoncée par la question. Cependant, cette question n’aborde absolument pas les OGM sous l’angle de la sécurité sanitaire dans l’alimentation. Une fois de plus, le débat est orienté sur les terrains (ce que nous avions appelés « Systèmes ») favorables aux OGM.

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La question 5 : Quel est le produit qui n’est pas issu des biotechnologies ?

Cette question reprend la technique de l’encerclement. Tous les produits présentés dans la liste sont des aliments courants. Cette question frappe l’esprit du jeune qui doit faire un choix parmi des aliments qu’il consomme tous les jours et dont il ignorait leur nature « biotechnologique ». C’est justement sur une autre technique, l’amalgame, que cette question puise sa force. Les OGM sont implicitement identifiées aux biotechnologies. Ainsi, sans que le site ne désinforme, les jeunes pensent que ces produits courants de consommation sont composés d’OGM. Les auteurs du site profitent clairement du flou sémantique entre les OGM, le génie génétique, les biotechnologies…

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La question 6 : Comment peut-on, par génie génétique, diminuer les allergies de l’homme dues aux plantes ?

Il est souvent reproché aux OGM de favoriser les allergies. Les concepteurs du site utilisent cette faiblesse pour contre-attaquer et modifier cette idée dès le plus jeune âge. Il est en effet plus difficile de remettre en question les idées que l’on connaît depuis son enfance et avec lesquelles l’on s’est construit. Ils inversent totalement cette idée en affirmant qu’au contraire les OGM peuvent justement préserver des allergies. Les dessins jouent encore pour cette question un rôle important. Les personnages représentés sont des Asiatiques. L’un d’entre eux mange du riz transgénique tandis que l’autre éternue en mangeant du riz classique. Cette situation comique reste dans les cadres des clichés français qui assimilent immédiatement le riz aux populations asiatiques. Cependant, cela renforce, même imperceptiblement, l’image de la présence internationale des cultures transgéniques. Enfin, les auteurs du dessin ont glissé, dans un jeu de mot pour enfants, un trait contre le riz non transgénique en l’appelant « riz toubêt ».

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La question 7 : Dès le début de l’agriculture, l’Homme a commencé à choisir les plus belles plantes, pourquoi ?

Cette question reprend la technique de l’inscription temporelle des OGM dans l’évolution de l’agriculture. Une fois de plus, les OGM sont assimilés aux techniques agricoles classiques que peuvent être la sélection naturelle ou les croisements. Bien sûr, aucune explication explicite n’est donnée entre « les plus belles plantes » et les OGM, mais étant donné le contexte et les allusions des questions précédentes les jeunes sont incités à établir les liens d’eux-mêmes.

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La question 10 : Pourra-t-on à l’avenir réduire l’utilisation des engrais par génie génétique ?

Cette question se fait l’écho de la question 4 en abordant à nouveau la question des OGM et de l’environnement. Les jeunes peuvent facilement répondre à cette question puisqu’ils l’ont déjà vue précédemment. Question 4 : « Par la création de plantes utilisant moins d’intrants (engrais ou pesticides) ». Ils sont ainsi confortés dans leurs connaissances tandis que la répétition de ces idées finit par ancrer dans leurs esprits l’idée que les OGM seront un outil futur de l’écologie. Un type de réponse par « oui » ou « non » ne laisse pas de place à la polémique ou au doute. Une telle affirmation concourt à l’effort général de persuasion. Pourtant, l’utilisation du terme « envisage » dans la réponse nuance cette stricte réponse.

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La question 11 : Comment assurer l’alimentation, sachant que la population mondiale augmente de 80 millions de personnes par an ?

Cette question est très clairement construite pour marquer/choquer l’imaginaire du jeune. Le chiffre annoncé de « 80 millions de personnes par an » sert à créer des émotions, quitte à effrayer. La question propose de répondre à un problème délicat, celui de l’alimentation dans le monde. Cette question qui est un débat à elle seule, occulte tous les facteurs économiques ou sociaux pour expliquer les famines. Ainsi, s’il existe un problème d’alimentation, il vient uniquement du manque de ressources alimentaires89, et donc il faut réussir à produire plus. Avec ce postulat de départ, si nous trouvons la solution pour produire plus, nous pourrons alimenter la population mondiale et éliminer les famines. Dès lors, les OGM sont la solution puisqu’ils « limitent les pertes des cultures dues à des parasites » et « améliorent la conservation des récoltes ». Les auteurs jouent sur les perspectives offertes par les OGM et notamment en terme d’humanitaire : les OGM peuvent épargner des vies et assurant l’alimentation mondiale !

89 Les auteurs de la question n’abordent pas dans cette question les destructions des surplus en stock des paysans européens, ou la famine en Inde, pays dans lequel les greniers de l’Etat sont pourtant pleins.

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Les nombreux chiffres reproduits dans la réponse servent également à marquer les esprits des jeunes, et à les révolter face à tant de gâchis. Cette révolte est un premier stade pour les rendre actifs, voire militants en faveur des cultures transgéniques.

>> Les concepteurs du site 217 ont repris des illustrations provenant du GNIS (Groupement national interprofessionnel des semences et plants). Ce détail est intéressant à noter, car le GNIS milite activement en faveur de la culture des OGM en France. Nota : Ces références à d’autres acteurs ainsi que quelques recherches Internet permettent de reconstituer la cartographie des connexions entre groupes, individus, associations ou entreprises, et ainsi remonter le système des flux d’information.

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La résonance du débat hors du site

1. Comment s’appuyer sur un réseau ? Les zones et les techniques d’influence sont souvent perçues sous l’angle du « choc des civilisations »90. Nous pourrions nuancer en parlant plutôt de « choc des réseaux », car ces derniers sont évidemment indispensables pour mener à bien de telles opérations. La réussite de ces dernières tiendra surtout aux capacités d’activation des individus clés, de coordination des différents réseaux et de paralysie des éventuels réseaux adverses. Dans le cas des opérations de gestion des perceptions, ces réseaux remplissent différentes fonctions. Un de leur principal objectif est d’assurer la diffusion de l’information désirée par différents relais. Ces relais coordonnés concourent à encercler la population cible avec l’information choisie. Dans des opérations de PM, il est plus ou moins facile de cartographier le réseau de soutien. Cette cartographie une fois réalisée présente l’avantage de mieux appréhender le rôle et le fonctionnement des différents acteurs impliqués dans ces opérations d’influence. Prenons pour exemple le site 217.

1.1 Comment cartographier un réseau ? Ce site ne cherche pas à dissimuler son réseau de soutien. Même s’il présente l’association DEBA comme son initiatrice, le site affiche très clairement les membres fondateurs de cette dite association. Cette transparence présente un double avantage. L’information dévoilée est non récupérable par les adversaires (un des principes du Perception Management), mais selon les cas, elle permet aussi de les leurrer en ne révélant que les connivences apparentes pour mieux dissimuler un réseau beaucoup plus profond.

A/ Etape 1 : identifier les acteurs La première étape consiste à relever toutes les références à d’autres acteurs, puis à identifier ces derniers.

90 Samuel Huntington.

3

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Dans le site 217, les membres fondateurs de DEBA (donc les instigateurs réels du site) sont cités et sont très importants. L’internaute y retrouve Bayer CropScience, Dow AgroSciences, DuPont-Pioneer Semences, Monsanto et Syngenta. Toutes ces entreprises sont actives dans le secteur des biotechnologies, donc favorables aux cultures transgéniques. Dans la rubrique réservée aux jeunes, le test des douze questions est directement extrait de documents du GNIS (Groupement national interprofessionnel des semences et plants). Cet acteur français milite également en faveur de la mise en culture des OGM, comme nous le vérifierons par la suite. Les autres acteurs que l’on retrouve sont les trois « partenaires » cités dans les liens : ABEurope, BioScope et OGM.org. C’est dans l’étude approfondie de l’ensemble de ces acteurs que les connivences du réseau vont pouvoir apparaître.

B/ Etape 2 : rechercher les connivences La deuxième étape consiste à rechercher les connivences et les liens entre les différents acteurs identifiés lors de l’étape 1. A cette fin, un processus d’identification est mis en œuvre afin de connaître les organisations ou les personnes qui contrôlent directement ou indirectement ce type de site ; rapide, cette méthode91 permet de dresser une cartographie des acteurs en présence..

C/ Etape 3 : créer du sens La troisième étape consiste à extraire du sens de ces liens. Une fois les connivences établies, il est indispensable d’en connaître la nature, les limites, les incidences sous-jacentes… Pour cela, il est nécessaire d’effectuer un travail d’investigation plus poussé, ce qui implique de disposer de suffisamment de temps ainsi que d’importantes capacités de recoupement d’informations.

1.2/ Comment identifier les acteurs derrière les sites Internet ? La méthodologie d’identification des acteurs qui suit n’est que la première phase de l’investigation, elle n’est en aucun cas suffisante en elle-même pour prétendre réaliser une cartographie exhaustive d’un réseau dans son ensemble. Cette méthodologie se déroule en trois étapes.

A/ Etape 1 : interroger les bases de données d’enregistrement A partir des adresses de sites relevés, la première étape consiste à interroger les bases de données d’enregistrement des adresses Internet. Il existe plusieurs sites qui proposent ces services, et il est

91 Cf « comment identifier les acteurs derrières les sites Internet » ?

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utile d’en interroger plusieurs pour recouper les informations et obtenir des détails supplémentaires. Nous pouvons ainsi utiliser All Who Is (www.allwhois.com) ou encore le site de l’ICANN92 (www.icann.org). Site Ogm-debats.com En utilisant cette méthode, nous obtenons les informations suivantes sur le site 217 : Registrant : AEB Multimedia - 86, rue Président Wilson à Levallois-Perret France Contact administratif : AEB Multimédia

[email protected] - Tél : +33 1 49 68 64 07 Contact technique : Amen.Fr - Agence des Médias Numériques

[email protected] - Tél : +33 1 46 51 95 60 Créé le : 7 octobre 2002 - Expiration le : 1er octobre 2003 Site Bio-scope.org

Site Bio-Scope.ORG

Registrant : BioLinX GmbH - Steinlestr. 6 Frankfurt am Main, D-60596 Allemagne Contact administratif : Gabriele Sachse

[email protected] - Tél : +49 69 63 14 640 Contact technique : Samuelis, Dominik - EDV-Consulting Dominik

[email protected] - Tél : +49 61 51 15 38 13 Créé le : 25 août 1999 - Expiration le : 25 août 2003

92 L’ICANN est le régulateur international de l’Internet.

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Site Abeurope.info

Site ABEurope.info

Registrant : Jan Andersen - Vanl se 2720 Danemark Contact administratif : Jan Andersen - Tél : +45 70 26 38 38 - email : [email protected] Contact technique : Jan Andersen - Tél :+45 70 26 38 38 - email : [email protected] Créé le : 6 janvier 2002 Site Ogm.org

Site OGM.org

Registrant : GNIS - 44, rue du Louvre 75004 Paris France Contact administratif et technique : Jacques Thomas, Azur Multimédia

[email protected] - Tél : +33 4 92 79 50 05 Créé le : 8 avril 1998 - Expiration le : 8 avril 2003 Le « registrant » correspond généralement au propriétaire du site, le « contact administratif » et le « contact technique » fournissent des précisions sur les individus ou les sociétés à contacter pour obtenir de plus amples informations.

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Cependant, il est important de noter que les informations présentes dans ces bases de données ne sont pas contraignantes, c’est à dire qu’aucun contrôle n’est effectué par ces registres pour en vérifier la véracité. Le recoupement des informations par d’autres biais est donc indispensable.

B/ Etape 2 : rechercher des compléments d’information Une fois que l’ensemble des noms a été relevé, il s’agit d’obtenir de plus amples informations les concernant. Quelles est la raison sociale des sociétés citées ? Dans quels pays sont-elles localisées ? Cette localisation a-t-elle une incidence sur l’opération ?… Toutes ces informations doivent permettre de mieux appréhender le rôle de chaque acteur ainsi que leurs relations et leurs interactions afin de démonter la stratégie employée. Dans le cas du site 217 et de ses partenaires, des sociétés de communication ont systématiquement été utilisées comme intermédiaires. AEB Multimédia est une émanation de Concept Consulting Multimédia qui est basée dans la proche banlieue de Paris. Quant à l’agence conseil en communication Azur Multimédia qui a réalisé le site OGM.org, elle est dirigée par Jacques Thomas et se trouve dans le sud de la France.

Le site d’Azur Multimédia permet de recouper ces informations recueillies et confirmer qu’il a réalisé le site OGM.org pour le GNIS.

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Ce sont des sociétés allemandes qui ont conçu le site Bio-Scope. Biolinx, une entreprise chargée de la communication sur les biotechnologies, apparaît à l’origine du site, et a chargé le cabinet allemand EDV Consulting de la réalisation technique. Biolinx pourrait n’être qu’un intermédiaire et n’avoir pas initié d’elle-même cette démarche.

Enfin pour le site ABEurope, une simple recherche par des moteurs de recherche sur [email protected] permet d’identifier une agence de communication danoise : GCI Mannov Public Relations.

C/ Etape 3 : rechercher les liens éventuels entre ces structures Cette étape est l’aboutissement de la phase de collecte d’informations. Il s’agit de donner du sens à ces données en les recoupant afin de découvrir les liens de ce réseau. Chaque site partenaire a un lien avec le site 217. Le plus évident est celui du site OGM.org qui mentionne le site 217 dans ses liens.

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Le site ABEurope a un curieux lien avec le site 217. Sa page d’accueil présente de très forte similitude avec la présentation de l’association DEBA. Voici le texte de ABEurope : « The companies involved with the development of agricultural biotechnology believe strongly that biotechnology has the potential to be of great value to the agricultural and food industries. We recognise that the introduction of crops produced with biotechnology and the use of these crops in foods have raised concerns in Europe, and that future introductions can be made successfully only once consumers feel they have sufficient information to make an informed choice. […] The following companies are members of ABE: BASF, Bayer CropScience, Dow AgroSciences, DuPont, Monsanto and Syngenta. » Voici à présent le texte du site 217 : « Ces entreprises sont convaincues que les biotechnologies peuvent être des sources de progrès pour demain. La mise sur le marché de cultures transgéniques et leur utilisation à des fins alimentaires suscitent des inquiétudes en France. De futures innovations ne pourront être développées avec succès que si le consommateur estime qu’il a suffisamment d’informations pour faire un choix éclairé. […] DEBA compte cinq membres fondateurs : Bayer CropScience, Dow Agrosciences, DuPont-Pioneer Semences, Monsanto et Syngenta. » Les auteurs du site ont même poussé la similitude jusqu’à citer les membres fondateurs des associations dans le même ordre. Quant au site Bio-Scope, la connexion est à trouver sur le site de Biolinx. Dans la page des clients, l’internaute retrouve Monsanto Agrar Deutschland GmbH, filiale allemande de Monsanto qui est l’un des cinq membres fondateurs du site 217.

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Au terme de ces recherches initiales, il est possible de réaliser une première cartographie du réseau qui soutient le site 217 :

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- Conclusion - >> Les modifications du site Cette étude a été réalisée lors du dernier trimestre 2002 en s’appuyant sur le site en ligne à ce moment. Il est évident que le site 217 connaîtra de nouvelles modifications au cours des mois à venir, comme ce fut déjà le cas en décembre 2002. Sur la page d’accueil de décembre 2002, certaines rubriques ont été déplacées et certains ajouts ont été réalisés, notamment un historique qui remplace les partenaires sur la colonne de gauche.

Page d’accueil du site en décembre 2002

Cependant cette page d’accueil réactualisée reprend les grands points de notre analyse. Prenons l’analyse des deux nouveaux témoignages : 1er témoin : Des organismes incontrôlables ? par Claire Lécluse - professeur de biologie

« C’est quand même curieux de voir à quel point on assimile les OGM à une maladie : ils « contaminent » les champs voisins, « affectent » les cultures classiques (quand on ne les appelle pas « saines »…) et j’en passe. En tout cas, ce n’est pas une raison pour empêcher l’expérimentation, si elle est sécurisée : tant qu’on n’en saura pas plus, on ne trouvera aucune solution. Car le problème, c’est ce côté incontrôlable des OGM. Est-ce qu’on ne va pas mettre en danger la diversité des espèces végétales ? D’autant que les croisements, la nature sait les faire toute seule, pas besoin de lui donner un coup de pouce… En plus, en rendant les plantes résistantes

aux insectes parasites, on menace aussi de bouleverser le monde animal, sans aucune garantie de rétablir la situation de départ. »

Comme sur la page d’accueil d’octobre, le premier témoin est professeur, soit un spécialiste. Comme son prédécesseur, il met en avant le principe de précaution vis à vis des OGM, mais ne les condamne pas totalement en laissant une voie de sortie via l’expérimentation. La première partie de son témoignage semble défendre les cultures transgénèses en pointant du doigt l’emploi d’une sémantique négative de la part des anti-OGM. La suite est nettement plus perplexe vis à vis

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de la sécurité qui entoure ces cultures. Comme pour le premier témoignage d’octobre, l’internaute garde l’impression que ce témoin ne défend pas les OGM et se rangerait plutôt dans la catégorie des neutres sceptiques. Toutefois, l’internaute est dorénavant beaucoup plus alerte à l’emploi d’une sémantique négative de la part des anti-OGM. Si son avis n’est pas encore tout à fait tranché sur la question, il ne manquera pas de réagir s’il remarque une digression de ce type. Ainsi progressivement, il prendra des positions contre les adversaires des OGM, plus par réaction que par conviction. 2ème témoin : Une agriculture plus propre avec les OGM ? par Nathalie Durasse - contrôleur qualité dans l'industrie

« Je profite de votre site pour pousser un coup de gueule. Les plantes transgéniques permettent de diminuer les traitements pesticides et je ne comprends pas pourquoi, malgré les preuves, il y a des gens qui affirment encore le

contraire. En Chine, grâce au coton OGM, les cultivateurs ne pulvérisent presque plus d’insecticides alors qu’avant ils traitaient au moins 10 fois. Si ça n’est pas une preuve !!

Vu l’état des connaissances, je ne suis pas encore sûre de vouloir manger des OGM à tous les repas. Par contre, même si je ne suis pas adepte du bio, je suis sûre de ne pas vouloir boire de l’eau ou manger des légumes pollués par des pesticides en excès. Mon souhait est que chacun fasse un effort, les agriculteurs en réfléchissant plus avant de traiter, les chercheurs en prenant le temps nécessaire pour étudier des traitements « propres » (de la lutte biologique, des pesticides plus pointus ou des OGM, pourquoi pas) et la société en

acceptant des pommes avec un ver de temps en temps. » Ce second témoin adopte un ton similaire au jeune qui témoignait en octobre 2002 : En décembre : « Je profite de votre site pour pousser un coup de gueule. » En octobre : « La prise de tête sur les OGM moi ça me fait un peu rigoler. » Tous les deux axent leur témoignage sur la responsabilité de la société et les perspectives prometteuses des cultures transgéniques. Ce témoin réduit le débat à une simple alternative : d’un côté, une agriculture utilisant massivement des pesticides nuisibles pour l’environnement et la santé, ou de l’autre, l’emploi des biotechnologies et des OGM préservant de ces pesticides. Ces deux nouveaux témoignages remplissent exactement les mêmes fonctions que ceux d’octobre. Les nuances et les différents points de vue présentés rendent le site attractif aux internautes qui cherchent des réponses et un lieu de débat. Ainsi les modifications apportées sur le site donnent raison à la première analyse qui avait été faite sur les techniques employées pour conduire cette opération d’influence sur les perceptions. >> Le site Internet n’est qu’un des relais dans une opération de PM Les sites Internet touchent une certaine catégorie de la population cible. Pour être efficace, l’opération doit toucher l’ensemble de la population visée. Pour cela, il est indispensable d’identifier les autres relais susceptibles de la toucher et d’y conduire d’autres opérations de gestion des perceptions. Une fois que les concepteurs des opérations sont assurés que l’ensemble de la population cible est atteinte par l’information désirée, il est indispensable de multiplier les messages offensifs, en les coordonnant ensemble afin d’encercler l’audience cible.

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- Sites Internet

- Forums, listes de diffusion,

Newsgroups, Chat…

- Marketing viral

- Télévision

- Radio

- Presse

- Presse spécialisée

- Colloques, conférences…

- Rumeurs

- Tracts, affiches…

- Productions artistiques (films,

dessins animés, bandes

dessinées…)

Populations

cibles

Espace virtuel

Médias

traditionnels

Vecteurs

indirects

La coordination des relais dans une opération de PM

Cette coordination des relais d’information permet d’occuper le terrain de la connaissance et de parler à la place de l’adversaire. Face à ce dispositif, la population cible ne reçoit que les informations issues des opérations de PM, et ses perceptions sont ainsi influencées. Dans cette optique, les sites Internet doivent être perçus comme un relais parmi d’autres, sans en surestimer le rôle, ni la portée. Cependant, les opérations via ce nouveau vecteur semblent plus efficaces du fait de sa nouveauté et du manque de référence pour l’internaute, ce dernier étant moins ou pas du tout habitué aux pièges tendus par l’espace virtuel en général.

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- Annexes -

Présentation des entreprises qui ont créé l'association DEBA

Nom de l’entreprise Monsanto

Localisation 800 N. Lindbergh Blvd. St. Louis, MO 63167 - Etats-Unis

Site Internet http://www.monsanto.com

Activités Monsanto est une entreprise mondiale présente dans 90 pays répartis sur plusieurs continents. Deuxième acteur de l’agrofourniture dans le monde en 1999, elle représente 8 % du marché mondial des semences et 10 % du marché des produits phytosanitaires. Elle se positionne comme le leader mondial de la recherche et des applications en matière de biotechnologies végétales.

Chiffre d’affaire 5,5 milliards de dollars (2000)

Nombre d’employés 14 700

Concurrents BASF AG Bayer CropScience Syngenta

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Nom de l’entreprise

Bayer

Localisation Werk Leverkusen 51368 Leverkusen - Allemagne

Site Internet http://www.bayer-ag.de

Activités Bayer, qui créa l’aspirine dans les années 1890, fait partie des plus importants fabricants chimiques au monde. Cette entreprise fabrique des produits de santé (pharmacie, équipements de diagnostique…), des produits agricoles (protection des semences et des animaux), des produits chimiques et polymère (plastiques, caoutchouc synthétique).

Chiffre d’affaire 25,8 milliards de dollars (2001)

Nombre d’employés 116 900

Concurrents ATOFINA BASF AG Novartis

Nom de l’entreprise Syngenta

Localisation Schwarzwaldalle 215 4058 Basel - Suisse

Site Internet http://www.syngenta.com

Activités Syngenta est la plus grosse entreprise mondiale d’agrochimie. Elle fabrique des produits de protection des semences (insecticides, herbicides, fungicides), des semences de légumes (maïs, tomates…) et des fleurs. Syngenta et Myriad Genetics a décodé le gène du riz, ce qui permet à créer un riz plus résistant aux maladies.

Chiffre d’affaire 6,3 milliards de dollars (2001)

Nombre d’employés 22 791

Concurrents BASF AG Bayer CropScience Monsanto

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Nom de l’entreprise Dow Chemical

Localisation 2030 Dow Center Midland, MI 48674 - Etats-Unis

Site Internet http://www.dow.com

Activités Dow Chemical est un des leaders mondiaux dans la production de plastiques, de produits chimiques, d’hydrocarbones, des herbicides et des pesticides. Elle est la plus grande compagnie aux Etats-Unis.

Chiffre d’affaire 27,8 milliards de dollars (2001)

Nombre d’employés 52 689

Concurrents BASF AG Bayer AG DuPont

Nom de l’entreprise Pioneer Semences

Localisation Chemin de l'Enseigure

31 840 Aussonne - France Filiale de Pioneer Hi-Bred International Inc. (Etats-Unis)

Site Internet http://www.pioneer.com/france/default.htm

Activités Filiale de Pioneer Hi-Bred International (Etats-Unis), Pioneer Semences est présente en France depuis 1962. Au 1er rang mondial en matière de recherche, de production et de commercialisation de semences pour l'agriculture, Pioneer fait partie du groupe DuPont de Nemours. En France, Pioneer sélectionne, produit et commercialise des semences de maïs, de tournesol et de Colza. Pioneer met aussi en marché des conservateurs d'ensilage de maïs plante entière, de maïs grain humide et d'herbe.

Chiffre d’affaire Non renseigné Nombre d’employés 220