Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines: Poupées d'enfants et jeux de poupées
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2
Aux enfants sahariens et nord-africains
à mes enfants Tania, Ben, Ruben et Pia
à mes petits-enfants Linde, Camille, Ilona, Thilda, Oona et Alvin
Photo couverture :
Jeu de poupée des filles ghrib,
Sahara tunisien, 1975, photo de l'auteur.
Couverture : Johnny Friberg
Avec 163 photos et autres illustrations
ISBN 91-974811-9-X
Publié sur le CD inclus dans Rossie, J-P. (2005). Toys, play, culture and
society. An anthropological approach with reference to North Africa and
the Sahara.
© 2005 Jean-Pierre Rossie
Toute reproduction, intégrale ou partielle, par quelque procédé que ce
soit faite sans le consentement écrit de l'auteur ou de l'éditeur est illicite
sauf pour l'usage strictement privé du copiste ou les analyses et les
courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration
SITREC
KTH
SE–10044 Stockholm
Téléphone : +46 (0)8 790 64 98
Internet : http://www.sitrec.kth.se
E-mail : [email protected]
3
Contenu du CD
Les 144 photos couleurs et autres illustrations originales du livre Toys,
play, culture and society. An anthropological approach with reference
to North Africa and the Sahara
Les volumes de la collection :
Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines
Poupées d‟enfants et jeux de poupées, 2005, 344 p., 163 ill.
L‟animal dans les jeux et jouets, 2005, 229 p., 107 ill.
Bibliographie commentée des jeux et jouets, 2005, 61 p.
Les volumes de la collection :
Saharan and North African Toy and Play Cultures
Children‟s dolls and doll play, 2005, 328 p., 163 ill.
The animal world in play, games and toys, 2005, 219 p., 107 ill.
Commented bibliography on play, games and toys, 2005, 61 p.
4
Jean-Pierre Rossie est né en 1940 à Gent (Gand), Belgique. Après des
études d'assistant social, puis d'africaniste à l'Université d'Etat de Gand,
il obtint en 1973 le diplôme de docteur en histoire et philologie africaine
à la même université. Sa thèse en néerlandais portait sur le thème
“Enfance et Société. Le processus de socialisation en Afrique centrale
patrilinéaire”.
Suite à un séjour de recherches auprès des semi-nomades Ghrib du
Sahara tunisien, il se consacra, depuis 1975, aux recherches sur les jeux
et jouets sahariens et nord-africains.
En 1967, il fut proclamé lauréat de la Belgische Stichting Roeping -
Fondation Belge de la Vocation. Entre 1968 et 1978 il travailla auprès du
Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek - Fonds National
pour la Recherche Scientifique, Bruxelles, qui a subventionné ses
recherches et publications jusqu'en 1992.
Entre 1980 et 1990, il était attaché comme assistant social et
anthropologue socioculturel aux services sociaux pour les immigrés,
spécialement les immigrés turcs et nord-africains, de la ville de Gand.
Un premier séjour de recherche dans le sud du Maroc en février 1992,
depuis lors suivi de séjours annuels dans ce pays, ont permis à l'auteur de
compléter, de vérifier et d'actualiser les données sur les jeux et jouets
marocains.
En 1993 il fut un des membres fondateurs de l'International Toy
Research Association (ITRA), de 1997 à 2001 il fut un membre du
Nordic Center for Research on Toys and Educational Media (NCFL), et
depuis sa création en mars 2002 il fait partie du Stockholm International
Toy Research Centre (SITREC).
Le 29 octobre 2004 la Lennart Ivarsson Scholarship Foundation lui a
attribué le BRIO Prize 2004.
5
Sommaire
Résumé 9
La collection : Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines 13
Préface de Dominique Champault 15
Introduction 17
Description des populations 23
Les Touaregs 23
Les Ghrib 24
Les Maures 25
Les Sahraouis 26
Les Regeybat 27
Les Chaamba 28
Les Teda 29
Les Belbala 30
Les Habitants de la Vallée de la Saoura 30
Les Mozabites 31
Les Kabyles 32
Les Chaouia 33
Les Populations des campagnes marocaines 34
Les Citadins de l'Algérie, du Maroc et de la Tunisie 36
Remerciements 41
Carte de l'Afrique du Nord et du Sahara 45
Carte du Maroc 47
6
Poupées d‟enfants et jeux de poupées sahariens et nord-africains 49
1 Les poupées-hommes 51
1.1 Résumé 51
1.2 Les poupées-méharistes 53
1.3 Les poupées-cavaliers 60
1.4 Les poupées-bergers 63
1.5 Les poupées-muletier 64
1.6 Les poupées-guerriers et poupées-notables 66
1.7 Les poupées-jeunes mariés 72
2 Les poupées femmes 79
2.1 Résumé 79
2.2 Les poupées-femmes touarègues 82
2.3 Les poupées-femmes ghrib 92
2.4 Les poupées-femmes maures 96
2.5 Les poupées-femmes sahraouies 102
2.6 Les poupées-femmes regeybat 102
2.7 Les poupées-femmes teda 103
2.8 Les poupées-femmes belbala 107
2.9 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura 109
2.10 Les poupées-femmes mozabites 110
2.11 Les poupées-femmes kabyles 112
2.12 Les poupées femmes chaouia 112
2.13 Les poupées-femmes du Nord-ouest algérien 116
2.14 Les poupées femmes marocaines 117
2.15 Les poupées-femmes tunisiennes 205
3 Les poupées-enfants 209
3.1 Résumé 209
3.2 Les poupées-enfants touarègues 209
3.3 Les poupées-enfants maures 211
3.4 Les poupées-enfants kabyles 211
3.5 Les poupées-enfants chaouia 211
3.6 Les poupées-enfants marocaines 212
7
Conclusions 215
1 Synthèse 217
2 Aspects environnementaux et économiques 223
3 Aspects socioculturels 225
Utiliser la culture ludique nord-africaine et saharienne 233
1 Actions pédagogiques et culturelles
dans les pays en voie de développement 237
2 Éducation interculturelle et mondiale
dans un contexte occidental 255
Catalogue des poupées sahariennes et
nord-africaines du Musée de l‟Homme 261
1 Introduction 263
2 Les poupées-hommes 264
2.1 Les poupées-méharistes 264
2.2 Les poupées-cavaliers 267
2.3 Les poupées-guerriers et poupées-notables 269
2.4 Les poupées jeunes-mariés 274
3 Les poupées-femmes 275
3.1 Les poupées-femmes touarègues 275
3.2 Les poupées-femmes maures 278
3.3 Les poupées-femmes regeybat 280
3.4 Les poupées-femmes teda 280
3.5 Les poupées-femmes belbala 282
3.6 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura 283
3.7 Les poupées-femmes mozabites 284
3.8 Les poupées-femmes chaouia 284
3.9 Les poupées-femmes marocaines 286
3.10 Les poupées-femmes tunisiennes 287
8
4 Les poupées-enfants 288
4.1 Les poupées-enfants touarègues 288
4.2 Les poupées-enfants maures 289
4.3 Les poupées-enfants chaouia 290
Table des transcriptions 291
Table des illustrations 293
Bibliographie 303
Vidéos : poupées et jeux de poupées marocains 321
Annexe 1 : modèle de description des jeux et jouets 327
Annexe 2 : données autobiographiques 331
Index auteurs 337
Index géographique et ethnique 341
9
Résumé
Dans ce livre je propose au lecteur une analyse des poupées et jeux de
poupées des enfants sahariens et nord-africains. En premier lieu sont
traitées les poupées-hommes, puis les poupées-femmes et les poupées-
enfants. Chacune de ces trois parties commence par un résumé mettant
en lumière les caractéristiques du groupe de poupées. Dans les
Conclusions on trouve une synthèse et une discussion de certains aspects
environnementaux, économiques, sociaux et culturels en relation avec
les poupées et jeux de poupées. La section suivante propose des idées et
des actions pratiques pour rendre utile cette culture ludique enfantine. Le
catalogue offre une description systématique des poupées de la collection
du Musée de l'Homme est donnée. Une première annexe offre un
modèle de description des jeux et jouets. Dans une deuxième annexe le
lecteur intéressé trouvera des données autobiographiques.
En Afrique du Nord et au Sahara l‟on trouve aussi bien des poupées-
hommes que des poupées-femmes et des poupées-enfants. Cependant les
poupées-femmes sont de loin les plus nombreuses. Exception faite pour
le Maroc, je n‟ai noté l‟existence de poupées-hommes que chez les
enfants de populations vivant au Sahara. Ces poupées-hommes et ces
poupées-femmes sont d‟âge adulte, souvent l‟âge d‟un jeune marié ou
d‟une jeune mariée. Les poupées-enfants représentent des filles et des
garçons d‟un certain âge déjà. Les poupées-enfants et les poupées-bébés
restent rares.
Le plus souvent les enfants sahariens et nord-africains confectionnent
eux-mêmes leurs poupées, mais parfois ce sont des femmes adultes de la
famille ou des artisanes et artisans qui les fabriquent. Sauf quelques
exceptions les poupées sont de fabrication locale.
Comme un peu partout dans le monde, ce sont avant tout les filles qui
jouent avec des poupées, beaucoup plus rarement les garçons et dans ce
cas il s‟agit presque toujours de poupées-hommes.
Bien que trop rarement révélé dans les informations bibliographiques,
les poupées décrites ici n‟ont de sens que dans le contexte des jeux
d‟enfants. Le plus souvent il s‟agit de jeux collectifs rassemblant des
enfants, la plupart du temps des filles, de la même famille et/ou du
voisinage. Pour ces jeux de poupées collectifs les enfants utilisent bon
10
nombre d‟autres jouets ou instruments de jeu. En plus, ils accompagnent
leur jeu de chansons, danses, comptines, contes et autres jeux de langage.
Selon toutes les données à ma disposition, les poupées sont utilisées
dans des jeux où les enfants s‟adonnent à interpréter la vie des adultes.
Dans le domaine du monde masculin, les enfants font de leur poupée un
méhariste, cavalier, muletier, berger, guerrier ou notable. Dans le
domaine du monde féminin il s‟agit le plus souvent de jouer au ménage,
de représenter des réunions importantes et des fêtes, surtout des
mariages, de figurer une grossesse, un accouchement et même un
enterrement. Sauf dans la représentation des fêtes de noces où le monde
féminin et masculin se trouvent mêlés, la distinction entre les activités
féminines et masculines reste très ferme dans les jeux de poupées.
Pour la fabrication des poupées une grande variété de matériaux
d‟origine naturelle ou de récupération est utilisée. Dans la très grande
majorité des cas, ces matériaux sont d‟origine locale ou domestique : du
matériel d'origine minérale, animale et végétale, du textile, du plastique
et du métal. L‟apport de matériaux étrangers au milieu naturel ou
domestique est négligeable.
En ce qui concerne la forme et l‟élaboration des poupées, les enfants
de chaque population mentionnée semblent s‟être tenus à un ou parfois
quelques modèles clairement définis.
Comme les enfants jouent avec le même type de poupées, leur
similitude facilite l‟élaboration et la communication de significations
communes, ce qui est encore renforcé quand les enfants fabriquent leurs
poupées. Les poupées et jeux de poupées peuvent donc être vus comme
un moyen effectif de communication aidant au maintien du système
socioculturel.
Si cependant l‟on prend en vue toute l‟aire géographique en question
une intéressante variété se laisse entrevoir, aussi bien sur le plan des
matériaux utilisés, que de la forme, de la grandeur, du visage, de la
coiffure et de l‟élaboration vestimentaire. Sauf exception assez rare, les
poupées restent des représentations figuratives et réalistes du moins au
niveau de l‟aperçu global et de l‟aspect vestimentaire. Abstraction faite
de la classe aisée, le modèle de la femme idéale est une femme bien
nourrie, même corpulente, décemment vêtue comme le démontrent les
poupées-femmes de ces régions.
11
Chez beaucoup de populations nord-africaines et sahariennes, les traits
de visage ne sont pas indiqués sur les poupées locales ou bien ils le sont
de manière fantaisiste. Je n‟ai trouvé des poupées à visage que parmi les
poupées-femmes belbala, mozabites, marocaines et tunisiennes, ainsi
qu‟auprès des filles ghrib où il est question d‟une évolution récente
influencée par l‟école, une évolution qui se confirme aussi pour certaines
communautés marocaines.
Les informations que j‟ai pu obtenir depuis la première édition de ce
livre en 1993, confirment l‟utilisation de la poupée locale ou
traditionnelle, faite par les filles et très rarement des garçons, pour les
jeux de poupées dans les villages du centre et du sud du Maroc. En
même temps se trouve confirmés leur disparition et leur remplacement
par la poupée en plastique importée de Chine ou ailleurs, dans les villes
et les petits centres urbanisés, de temps en temps même dans un village.
Plusieurs informations démontrent que la poupée en plastique s‟est
infiltrée lentement et que pendant tout un temps les deux types de
poupées ont coexisté ou coexistent encore. Dans ce contexte l‟influence
des milieux aisés sur les citadins et ruraux des classes moyennes et
populaires peut être soulignée.
13
La collection :
Cultures Ludiques
Sahariennes et Nord-Africaines
Engagé depuis 1975 d'abord dans la recherche sur les jeux et jouets, puis
dans des essais de pédagogie interculturelle basée sur le ludique et dans
des organisations internationales s'intéressant au développement de
l'enfant, j'ai eu l'idée de créer une collection que je voudrais dénommer
Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines. Des cultures ludiques
qui devraient, à juste titre, faire partie intégrante du patrimoine culturel
de l'humanité, tout comme les chefs d'œuvres de l'art et de l'architecture.
Une première tentative pour créer une collection pareille pour
l'International Council for Children‟s Play fut soutenue par André
Michelet, à ce moment directeur du Centre d'Etudes Roland Houdon à
Saran, France, et résulta dans la publication par ce Centre de mon livre
Jeux et jouets sahariens et nord-africains : poupées - jeux de poupées en
1993. Comme le Centre d'Etudes Roland Houdon a arrêté ses activités de
publications peu de temps après, cette tentative s'est terminée
prématurément.
En 1999 le Nordic Center for Research on Toys and Educational
Media a publié sur son site web la première version HTML en français
et en anglais de Poupées d'enfants et jeux de poupées, et de la
Bibliographie commentée des jeux et jouets. Une version HTML
remaniée de ces livres ainsi que la première version HTML en français
et en anglais de L'animal dans les jeux et jouets furent publiées par le
Stockholm International Toy Research Centre sur son site web en 2003.
La rédaction du quatrième volume La vie domestique dans les jeux et
jouets est bien avancée. Deux autres volumes analysant les Jeux
d'adresse et Les techniques traditionnelles et modernes dans les jeux et
jouets sont prévus.
Une périodicité fixe n'est pas planifiée pour cette collection, mais afin
de rendre disponible l'information sur les jeux et jouets sahariens et
nord-africains aussi bien à ceux lisant le français qu'à ceux lisant
l'anglais, ainsi que pour stimuler l'échange d'informations et la
14
fécondation réciproque des idées et des actions entre le monde
anglophone et francophone, trop souvent séparés par des clivages
linguistiques, les ouvrages sont publiés en français et en anglais.
Pour des raisons financières les livres disponibles de la collection :
Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines et de la collection :
Saharan and North African Toy and Play Cultures sont publiés sur le
CD inclus dans Rossie, J-P. (2005). Toys, play, culture and society. An
anthropological approach with reference to North Africa and the
Sahara.
Les volumes de la collection :
Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines
Poupées d‟enfants et jeux de poupées, 2005, 344 p., 163 ill.
L‟animal dans les jeux et jouets, 2005, 229 p., 107 ill.
Bibliographie commentée des jeux et jouets, 2005, 61 p.
Les volumes de la collection :
Saharan and North African Toy and Play Cultures
Children‟s dolls and doll play, 2005, 328 p., 163 ill.
The animal world in play, games and toys, 2005, 219 p., 107 ill.
Commented bibliography on play, games and toys, 2005, 61 p.
15
Préface de Dominique Champault
Les jeux des enfants du Nord de l'Afrique n'ont jusqu'ici jamais fait
l'objet d'une étude globale. Il faut donc d'emblée remercier Jean-Pierre
Rossie de s'être attelé à une tâche minutieuse : retrouver les données
éparses dans des monographies plus ou moins anciennes, les confronter
d'une part à ses enquêtes personnelles puis à une importante série
muséographique pour nous livrer enfin un travail exhaustif qui vient
combler un vide.
En s'adonnant à l'étude des poupées, il ne craint pas de s'attaquer à un
jeu des plus éphémères dans ce secteur géographique. Les fillettes du
monde arabo-berbère jouent peu à la poupée, sans doute parce que le
loisir leur en est, plus qu'à d'autres, mesuré : dès l'âge le plus tendre, elles
doivent relayer leur mère dans les tâches domestiques et la charge de
leurs cadets est bien souvent écrasante. Néanmoins, en gardant les
troupeaux, surveillant la cuisine ou les bébés, elles ont toujours façonné
des poupées avec lesquelles elles se comportent comme toutes les petites
filles du monde ; pour cela elles utilisent les matériaux qui leur tombent
sous la main : bâtonnets, os, chiffons, poils de chèvre. L'os de mouton
transformé de manière comparable à l'époque romaine par une enfant
syrienne, aujourd'hui par une fillette vivant dans un oasis, témoigne du
même génie inventif, palliant la pauvreté des moyens. Une mère
attentive, une servante disponible dans les milieux les moins défavorisés,
peuvent confectionner les mêmes poupées, avec les mêmes éléments :
l'assemblage en est seulement mieux agencé et plus solide.
Un point commun : toutes les poupées-femmes sont désignées comme
'nouvelles mariées' par des vocables affectés selon les régions à la mariée
pendant une séquence du premier au septième jour de mariage. On ne
représente jamais un poupon au sexe plus ou moins défini, mais toujours
une femme au moment où, investie par la force sacrée de la baraka, au
plus fort de sa féminité, elle est potentiellement la plus féconde. Mais il
n'est pas anodin de créer une image à la ressemblance, même lointaine,
de l'humain. Sans reprendre les exégèses vouées aux interdictions plus
ou moins formelles édictées par le judaïsme puis l'islam, il faut bien
noter que les adultes et particulièrement les hommes, observent une
16
méfiance ambiguë envers les images. Une force opératoire est toujours
reconnue aux poupées ; l'une des plus évidente est celle d'amorcer la
pluie (sans doute par analogie avec d'anciennes poupées de rogations).
C'est pourquoi, dans certaines régions, les parents interdisent à leurs
enfants de manipuler des poupées aux moments où l'eau nuirait aux
cultures : récolte des grains, maturité des dattes, etc.
Il semble fondé de considérer qu'à l'origine, au Proche Orient comme
en Afrique du Nord, les premières figurines à ressemblance humaine ont
été liées aux rites agraires, comme si la femme féconde pouvait
communiquer sa vertu à la nature entière. En Egypte ancienne les
fillettes attendaient de leur poupée une promesse de fécondité alors que
les adultes jetaient au Nil des poupées pour amorcer sa crue, rite auquel
on sacrifiait encore il y a quelques lustres avec des poupées en sucrerie.
Récemment encore, dans certaines zones rurales du Maghreb, la dernière
gerbe moissonnée, désignée comme 'l'épouse du champ', pouvait être
affublée d'oripeaux féminins avant d'être dépiquée à part. Ses grains,
mêlés aux semences préservées, leur communiquaient un exceptionnel
pouvoir de germination.
Les rites s'estompent avec les techniques nouvelles. Ne reste dans
l'esprit populaire qu'une vague suspicion à l'égard des poupées 'fétiches'
dont certaines ont pu être utilisées pour l'envoûtement, l'identification du
mal ou du sortilège. Les poupées à l'occidentale, trop naturalistes, jugées,
il y a quelques décennies encore, comme innovation blâmable sont
aujourd'hui partout répandues.
Enfin, il convient ici de souligner combien l'étude de Jean-Pierre
Rossie illustre la complémentarité qui peut et doit s'instaurer entre les
chercheurs et les musées : les collections ne dorment pas à tout jamais
dans leurs réserves ; bien documentées, elles sont prêtes à s'animer sous
un regard attentif, à témoigner de temps plus ou moins lointain, de
cultures originales qui ne sombrent pas dans la monotonie de l'Occident :
“... il dépend de celui qui passe, que je sois tombe ou trésor...”.
Dominique Champault,
Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient,
Musée de l'Homme, Paris.
19
Le livre que le lecteur a sous ses mains est le deuxième volume d'une
série de publications sur les cultures ludiques des enfants sahariens et
nord-africains. Des cultures ludiques qui, contrairement à ce qui a été fait
par Charles Béart (1955) pour l'Afrique occidentale, Fritz Klepzig (1972)
pour les populations bantoues de l'Afrique subsaharienne et Eliseo
Andreu Cabrera (2004) pour la région méditerranéenne, n'ont pas été
répertoriées et analysées systématiquement jusqu'à présent. L'unique
tentative dans l'aire géographique en question est à ma connaissance
celle de Paul Bellin dans “L'enfant saharien à travers ses jeux” (1963).
Je suis cependant convaincu que cette tâche est des plus urgentes vu
les transformations spectaculaires dans lesquelles les sociétés de cette
région se sont engagées. Suite à des changements politiques,
économiques, sociaux et culturels, cet héritage, qui a participé à part
entière au façonnage de l'identité des individus et des groupes humains
en question, risque fortement de se perdre. Ceci pourrait se révéler
vraiment néfaste parce que, d'une part, la population saharienne et nord-
africaine est dans sa majorité constituée d'enfants et de jeunes et que,
d'autre part, le domaine des jeux et jouets représente une réelle mine d'or
pour le développement et la socialisation de cette jeunesse ainsi que pour
une pédagogie et une didactique scolaire adaptées, particulièrement
propagées par des instances internationales comme l'Unesco (voir
bibliographie : Groupe Consultatif...) ou la International Federation for
Parent Education (voir bibliographie), et parfois aussi par les autorités
nationales.
A travers l'aperçu des poupées et des jeux de poupées sahariens et
nord-africains il sera, je l'espère, possible de relever aussi bien la
diversité des cultures, basée sur les spécificités géographiques,
historiques et sociologiques, que l'universalité de la culture humaine
suite à une réponse fondamentale à des problèmes de vie semblables.
Dans ce livre il n'est question que des poupées utilisées dans les jeux
d'enfants. Les poupées rituelles d'ordre curatif ou prophylactique, de
menace ou d'envoûtement, pour obtenir de la pluie ou promouvoir la
fertilité et la fécondité n'ont pas été mentionnées. Pour une première
approche de ces thèmes je renvoie le lecteur intéressé à une première
analyse publiée par J. Herber en 1918 dans “Poupées marocaines”, à
l'article de Dominique Champault “Du rituel agraire au jeu” dans le
catalogue de l'exposition sur les poupées, tenue en 1983 au Musée de
20
l'Homme, “Poupée-Jouet. Poupée-Reflet”, au livre de Jean Servier “Les
portes de l'année” édité en 1962 ainsi qu'au livre plus ancien de Edwarsd
Westermarck plublié en 1926 (volume 1 : 79, 330-335, 340-343, 596).
De même, ni les poupées-souvenirs ni les poupées en costume national
ou folklorique, ne sont retenues.
Exception faite pour les Ghrib et pour le Maroc, la période sur
laquelle s'étend l'analyse s'étale du début de ce siècle jusqu'à la fin des
années 1960. Plus précisément et dans le contexte de cette étude, la
référence bibliographique la plus ancienne remonte à 1905 et la poupée
la plus ancienne de la collection du Département d'Afrique Blanche et du
Proche Orient du Musée de l'Homme fut collectionnée en 1934. Les
données les plus récentes proviennent, d'une part, de mes recherches en
1975 et 1977 chez les Ghrib du Sahara tunisien, qui vivaient à ce
moment leurs dernières années de semi-nomadisme, complétées, jusqu'à
ce jour, par des informations sur l'évolution de la culture ludique de cette
population qui me sont transmises par mon ami et collègue Gilbert J.M.
Claus, et d'autre part de mes recherches au Maroc, en cours depuis 1992,
qui apportent de nouvelles données sur la seconde moitié du XXe siècle
et le tout début du XXIe siècle. Il existe aussi un livre sur les jeux et
jouets chez les Sahraouis publié en 1999. Le présent utilisé à travers le
texte se réfère donc toujours à l'époque d'où proviennent les données et
non pas nécessairement à celle d'aujourd'hui.
D'une manière générale on peut dire que les jeux et les jouets décrits
appartiennent ou appartenaient à des enfants vivant dans des
communautés qui, bien qu'influencés par la vie moderne et
occidentalisée, se référaient encore à la tradition ancestrale surtout dans
le domaine enfantin et féminin, ainsi que dans la sphère de la
socialisation et de la transmission intergénérationnelle des normes et
valeurs. Cela veut donc dire, si l'on fait abstraction des données
recueillies dans des grandes villes marocaines, qu'il ne sera pas question
des enfants vivant dans des centres urbanisés, industrialisés et/ou
occidentalisés. Si on prend l'Algérie comme exemple, les données se
réfèrent aux enfants peu ou pas scolarisés des communautés nomades,
semi-nomades ou agricoles mais on cherchera en vain, sauf exception
rarissime, des renseignements sur les enfants scolarisés d'Alger ou des
autres grandes villes algériennes. Exception faite des villes marocaines,
ce volume décrit donc les poupées et jeux de poupées des enfants et des
21
communautés faisant parties de sociétés plus ou moins traditionnelles
mais en voie de modernisation.
De plus, les informations rassemblées se réfèrent à des enfants entre
trois et treize ans, pour les garçons peut-être jusqu'à un âge un peu plus
avancé. Donc on cherchera en vain des données sur les tout petits. Les
raisons en sont multiples : il est difficile pour un chercheur masculin
d'entrer dans le monde intérieur et domestique des femmes dans lequel le
petit enfant grandit, jouer à l'extérieur est une activité des enfants déjà
plus grands, les petits qui ont besoin d'un jouet transforment souvent un
objet dans un jouet représentatif là où fabriquer soi-même un jouet ne se
fait qu'à un âge plus avancé. Dans le cas du jeu de poupée le
développement propre à l'enfant joue aussi un rôle. Comme le dit Gilles
Brougère (1993: 181) :
Il ne peut y avoir de réel jeu à la poupée avant la troisième année et
celui-ci reste encore très limité. En conséquence les premiers jeux
sont des jeux moteurs (manipulations, promenades) ou des 'jeux' de
relation affective, du type de l'objet transitionnel.
Quatre sources de données sont à la base de ce livre :
La collection de jouets sahariens et nord-africains conservée dans le
Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient du Musée de
l'Homme à Paris, complétée par les renseignements contenus dans les
fiches signalétiques et par une analyse personnelle des jouets. Comme
cette collection est en voie d'être transférée à un musée qui ouvrira en
2006 il faut contacter le nouveau Musée du Quai Branly à Paris
(http://www.quaibranly.fr).
La bibliographie ethnographique, linguistique et autre traitant de l'aire
géographique donnée, que j'ai analysée dans une bibliographie
commentée.
Mes recherches de 1975 à 1977 sur les jeux et jouets des enfants
ghrib, complétées depuis lors par quelques renseignements fournis par
Gilbert J.M. Claus.
Mes recherches en cours depuis février 1992 sur les jeux et jouets au
Maroc, plus spécifiquement dans les zones rurales et les quartiers
populaires des villes.
22
Bien que les données bibliographiques ne proviennent pas toujours
d'investigations détaillées ou scientifiques et qu'elles sont parfois
accompagnées de commentaires ethnocentriques, je crois pouvoir dire
que le soin qui a été mis à l'analyse et à la confrontation critique des
sources est garant d'un degré élevé d'authenticité des informations.
Toutes les populations sur lesquelles j'ai pu trouver des
renseignements ont été incorporées dans l'étude. Il s'agit de différents
groupes Touaregs, des Ghrib, des Chaamba, des Maures, des Sahraouis,
des Regeybat, des Teda, des Belbala et des Chaouia, des habitants de la
Vallée de la Saoura et de ceux du Mzab, des Kabyles ainsi que de
certaines communautés algériennes, marocaines et tunisiennes.
Jusqu'à présent j'ai utilisé le vocable Berbère pour désigner la culture
et la langue des populations nord-africaines et sahariennes qui vivaient
dans ces régions avant la venue des Arabes, y vivent encore et continuent
à parler leurs propres langues. Suite à la signification péjorative de ce
vocable, lié au mot barbare, les associations culturelles concernées
mettent en avant le vocable local Amazigh, un terme que j'utiliserai
dorénavant dans mes publications scientifiques. Néanmoins, je continue
à utiliser le vocable Arabo-Berbère pour les descendants de ces
populations ayant perdus leur langue d'origine et parlant arabe.
Dans le texte l'ordre de ces populations suit la séquence suivante :
d'abord sont présentées les données sur les populations nomades ou
semi-nomades du Sahara, suivies par les populations sédentaires du
Sahara et finalement les populations sédentaires de l'Afrique du Nord.
Les termes géographiques et ethniques mentionnés dans le texte
peuvent être localisés sur deux cartes, une carte de l'Afrique du Nord et
du Sahara et une carte du Maroc.
Afin de situer les cultures ludiques dans leur contexte géographique,
économique, social et culturel il m'a semblé nécessaire d'essayer de
donner une description, bien sur très limitée, des populations en
question. Cette description se réfère à la même période que celle d'où
proviennent les informations sur les jeux et jouets.
23
Description des populations
Les Touaregs
Si numériquement les Touaregs ne constituent nullement la population la
plus importante de la région en question, ils sont au moins la population
la mieux documentée et représentée dans la collection analysée.
Les Touaregs vivent sur un immense territoire saharien et sahélien
entre, au nord, Ghadames en Libye, au sud-est, Agadez au Niger, et au
sud-ouest, Mopti au Mali. Leur habitat présente un relief montagneux
variant entre 500 mètres et plus de 2000 mètres.
Les estimations, toujours approximatives, du nombre de Touaregs
varient de 250.000 à 300.000 (Camps, 1984: 8), environ 350.000 (La Vie
du Sahara, 1960), et environ 700.000 (Komorowski, 1975: 101), jusqu'à
moins d'un million (Bernus, 1983: 7). Dans l'exposition de 1994 sur les
Touaregs au Musée de l'Afrique Centrale à Tervuren en Belgique le
chiffre de 1.300.000 Touaregs est avancé, dont 750.000 au Niger,
400.000 au Mali et 60.000 en Algérie, en Libye et en Burkina Fasso. Les
Touaregs Kel Ahaggar ne seraient que 20.000, vivant sur un territoire
algérien presque aussi vaste que la France (Bernus, 1983: 7). En juillet
1999 la population du Mali a été estimée à 10.429.124 habitants, dont 47
% d'enfants de moins de quinze ans et 10 % de Touaregs (E-Conflict™
World Encyclopedia).
Toutes ces sources s'accordent pour dire que jusque pendant le
premier tiers du vingtième siècle les Touaregs menaient une vie nomade
ou semi-nomade, dans ce dernier cas se transformant momentanément en
sédentaires dans les oasis.
Les Touaregs furent avant tout des éleveurs de dromadaires mais qui,
vers 1960, “vivent essentiellement de l'élevage des moutons, des chèvres
et des bœufs au Sud” (La Vie du Sahara, 1960: 7). Depuis les années
1950, la vie traditionnelle des Touaregs se perd de plus en plus. Ceci
d'abord à cause de l'influence de la colonisation française, puis de
l'intégration dans cinq états indépendants différents et finalement suite à
l'extrême sécheresse au Sahel durant les années 1970 qui a eu des
conséquences dramatiques pour les Touaregs sahéliens (Leupen, 1978:
24
58. Claudot-Hawad, 1992: 222). Actuellement beaucoup de familles
vivent dans des maisons avec télévision et parabole.
Du point de vue ethnique et linguistique les Touaregs sont des
Amazighs amazighophones, bien qu'ils “ne constituent ni une 'race' ni
une 'nation'. Leur dénominateur commun se situe dans une culture, un
langage, des comportements semblables... ” (Bernus, 1983: 6).
Dans le cadre de l'analyse des jeux et jouets, il faut distinguer cinq
groupements de Touaregs :
Touaregs Kel Ahaggar : Massif de l'Ahaggar (Algérie);
Touaregs Kel Ajjer : Tassili N'Ajjer (Algérie), région de Ghât Libye);
Touaregs Kel Aïr : Massif de l'Aïr;
Touaregs Kel Iforas : Adrar des Iforas (Mali, Algérie);
Touaregs Ioullemeden : plaines sahéliennes de la Boucle du Niger
(Mali).
Les Ghrib
L'habitat des Ghrib s'étend de la limite méridionale du Chott l-Djerid, le
lac de sel du sud-tunisien, jusqu'à la frontière algérienne. Il s'agit d'un
territoire d'environ 6000 km² dans la frange septentrionale du Grand Erg
Oriental, un immense désert de sable. Le relief est assez plat, entrecoupé
ici et là de dunes de sable.
Les Ghrib sont évalués à environ 4400 en 1975. Entre-temps, cette
population s'est accrue et comporte actuellement environ 7000
personnes. Ces données sur les Ghrib et celles qui suivent proviennent
des publications de Gilbert Claus ou d'informations qu'il m'a transmises.
Bien qu'il y ait parmi ces Ghrib arabophones des fractions qui
prétendent avoir comme ancêtres des Amazighs du Sud du Maroc, il y en
a d'autres qui se disent originaires du sud de l'Arabie ou du nord du
Yémen.
L'économie était depuis l'entre guerre et jusqu'à récemment, basée sur
le semi-nomadisme avec d'un côté l'élevage de dromadaires, pour lequel
ils étaient réellement renommés, de chèvres, de moutons et d'ânes, et
d'autre côté l'agriculture d'oasis.
25
Depuis les années 1970, la sédentarisation dans les oasis en bordure
du Chott l-Djerid a pris de plus en plus d'ampleur. De nos jours, les
Ghrib se sont pour ainsi dire complètement sédentarisés dans les oasis de
Ghidma, Hezwa, Redjem Matoug et surtout dans l'oasis d'El Faouar qui
est devenue un centre urbain important, chef-lieu d'une délégation. De
cette manière ils ont perdu tout de leur ancienne renommée d'éleveur de
dromadaires, bien que l'intérêt pour cet élevage reprenne quelque peu,
suite à la promotion du tourisme saharien à El Faour où un hôtel de
transit fonctionne maintenant.
Les Maures
Dans le Sahara occidental vivent les Maures sur un territoire limité par
l'Atlantique à l'Ouest, l'actuelle frontière avec le Maroc au nord et une
frontière imaginaire allant du fleuve Sénégal par Néma à la boucle du
fleuve Niger au sud.
A partir de la côte le relief s'élève lentement pour atteindre les 350 m
au Plateau du Dhar où se situe Oualata. Une grande partie de la
Mauritanie est occupée par d'énormes dunes, depuis l'Atlantique en
direction du nord-est en passant juste au nord de Tidjikdja.
En 1960, les Maures étaient estimés à 600.000 dont 77 % de nomades
(La Vie du Sahara, p. XXIV; Belgisch Comité voor UNICEF, 1996: 57).
Il s'agit d'une population qui, contrairement au Touaregs fortement
éparpillés sur plusieurs états, a réussi à s'organiser en état : la République
Islamique de Mauritanie. En 1996 il y a 2.400.000 habitants en
Mauritanie dont 52 % vit dans les villes et seulement 12 % sont encore
des nomades ; un tiers de la population vit dans la capitale Nouakchott et
les bidonvilles avoisinants (informations de l'UNICEF). Avec 30 % les
Maures ne constituent qu'une partie de la population totale. 40 % sont
formés par des groupes mixtes d'origine maure ou provenant d'Afrique
Noire et les autres 30 % sont des descendants d'Africains noirs. De la
population mauritanienne estimée à 2.581.738 en juillet 1999, 47 % ont
moins de quinze ans (E-Conflict™ World Encyclopedia).
Du point de vue ethnique, “on appelle Maures les Arabes mêlés aux
Berbères, ainsi que les Berbères fortement arabisés du Sahara du Sud-
Ouest et du Sahara ex-espagnol” (Komorowski, 1975: 103). Mais eux-
26
mêmes se désignent comme les 'Beïdane', les 'Blancs'. Du point de vue
linguistique les Maures parlent un arabe maghrébin.
Ces Maures sont, certainement pendant la période à laquelle réfèrent
les jeux et jouets des enfants de ce peuple, des pasteurs chameliers, des
caravaniers, des commerçants et, dans la zone sahélienne, des éleveurs
de bœufs. Certains d'entre eux sont plutôt sédentarisés dans des petites
villes. Un de ces centres urbains est Oualata, dans les années 1970 une
agglomération de 800 à 1000 habitants. C'était “un centre spirituel et une
ville de commerce au carrefour du Maroc, du Mali et du Sénégal... (Son)
isolement lui a valu aussi le maintien de ses traditions de spiritualité,
d'enseignement traditionnel qui remontent au VIIIème siècle” (Gabus,
1976: 7), ainsi que de son organisation sociale et domestique.
Comme chez les Touaregs et les Ghrib, le mode de vie des Maures est
depuis une quarantaine d'années soumis à une pression croissante
d'adaptation à un état et une économie qui s'inscrivent dans le contexte
mondial. Actuellement, environ 60 % de la population vit de l'agriculture
et de l'élevage, et environ 40 % a trouvé une subsistance en ville dans le
secteur moderne ou informelle de l'économie (Belgisch Comité voor
UNICEF, 1996: 33).
Les Sahraouis
Les Sahraouis nomadisaient dans l'immense espace saharien qu'ils
appellent 'Trab el Bidan', la 'Terre des Blancs'. Cet espace s'étend du
fleuve Sénégal jusqu'au Oued Drâa qui longe les versants sud du Jbel
Bani et de l'Anti Atlas en passant près de la ville d'Assa dans le sud du
Maroc. Cette vaste région comprend la Mauritanie, le Sahara Occidental,
une partie du Nord-Ouest du Mali et du Sud-Ouest de l'Algérie. La
langue des Sahraouis est une forme locale d'arabe appelée 'hassaniya'
(Pinto Cebrián, 1999: 9).
Tout comme chez les Touaregs, les Ghrib et les Maures, un processus
de sédentarisation s'est développé chez les Sahraouis, dont l'ampleur
s'accentua à partir des années 1970.
Une partie du Trab el Bidan dénommée le Sahara Occidental fut une
colonie espagnole de 1904 à 1975. Actuellement et suivant la
terminologie employée par le Conseil de Sécurité des Nations Unies, le
27
gouvernement marocain est la “puissance administrante du Sahara
occidental” (Rapport du Secrétaire Général sur la situation concernant le
Sahara occidental, 25 octobre 2000, S/2000/ 1029, 6 pages, p. 6, § 30,
http://www.un.org/french/docs/sc/reports/2000/1029f.pdf, consulté le
11.01.2001). L'agence de presse Europe Medea mentionne comme
l'unique source valable sur la population du Sahara Occidental le dernier
recensement espagnol de 1974. Selon celui-ci, qui n'a pas pu prendre en
compte l'ensemble des populations nomades, il y avait à ce moment
73.497 Sahraouis dans le territoire et 21.522 Européens et ressortissants
d'autres pays. La population actuelle est sans doute de l'ordre de 200.000
à 300.000 personnes (http://www.medea.be/fr/index250.htm, consulté le
11.01.2001). Sous le contrôle du Polisario, le Frente Popular para la
Liberación de la Seguia el Hamra y el Rio de Oro, quelques 200.000
Sahraouis habiteraient les camps de réfugiés de la région de Tindouf
dans le sud-ouest de l'Algérie (http://www.sahara.net/people.html,
consulté le 12.01.2001).
L'ancien système économique entièrement basé sur le nomadisme et le
commerce caravanier a été remplacé en grande partie par une économie
basée sur l'industrie de la pêche et l'exploitation de gisements de
phosphates et de fer (http://www.medea.be/fr/index250.htm, consulté le
11.01.2001).
Les Regeybat
Les Regeybat, ou Regueibat, se déplacent sur un vaste territoire, dans le
Sahara Nord-occidental de l'Atlantique à l'Erg Iguidi et d'Assa à la
région de Tiris, niant les frontières entre l'Algérie, le Maroc, la
Mauritanie, et le Sahara ex-espagnol.
Il s'agit d'une région peu élevée et peu accidentée, et très faiblement
peuplée. Ainsi le Sahara Occidental, que les Regeybat dominaient
jusqu'au début du vingtième siècle, ne comptait que 60.000 habitants
vers 1970 (Grand Atlas du Continent Africain, 1973: 105). En juillet
1999 la population du Sahara Occidental était estimée à 239.333
habitants (E-Conflict™ World Encyclopedia).
28
Les Regeybat sont des Arabo-Berbères qui “sont les plus proches,
linguistiquement et culturellement, des tribus arabes bédouines” (Camps,
1984: 9), parlant l'arabe tout comme les Maures.
Ces nomades sont des éleveurs de dromadaires, de chèvres et, où cela
est possible, de moutons. En plus, et jusqu'à une époque assez récente, ils
s'occupaient du commerce transsaharien, qui a depuis lors perdu presque
toute signification économique.
La décolonisation au début des 1970 du Sahara Espagnol et les
revendications des pays limitrophes ont créé un mouvement
indépendantiste, le Front Polisario. Il a été dit que les Regeybat jouent un
rôle de fer de lance dans les activités militaire. Cependant, peu semble
être connu sur la situation actuelle des Regeybat.
Les Chaamba
Les Chaamba, eux aussi nomades dans leur majeure partie, transhument
sur tout le Sahara algérien septentrional depuis El Oued, Ouargla et le
Grand Erg Oriental, en passant par El Golea et le Grand Erg Occidental
jusqu'à l'Erg er Raoui et même au-delà. Cette immense région désertique,
aux puissants massifs de dunes, est entrecoupée de plaines arides peu
accidentées.
Tout comme les Regeybat, les Chaamba arabophones sont des Arabo-
berbères dont l'origine démontre l'interpénétration des populations
amazighs autochtones avec des tribus arabes venues de la Péninsule
Arabe.
Au début des années 1950, la population totale approchait les 20.000
(Cabot Briggs, 1958: 111).
Les Chaamba trouvaient leurs moyens de subsistance, et les trouvent
parfois encore, dans l'élevage de dromadaires et de moutons. Ils étaient
des méharistes renommés, qui se sont en partie intégrés dans l'armée
coloniale et celle de l'Algérie indépendante. Dans les oasis, ils s'occupent
aussi de jardinage et des palmeraies.
Aujourd'hui, ils descendent de leurs chameaux et montent dans les
poids-lourds qui circulent sur les pistes sahariennes (Komorowski, 1975:
107).
29
Les Teda
Les Teda, appelés Toubou par les Arabes et les Européens, vivent dans
un endroit aussi spécifique qu'isolé. Il s'agit du massif volcanique du
Tibesti au Nord-ouest du Tchad. Ce massif du Tibesti, qui a son point
culminant à 3350 mètres et une altitude moyenne entre 1000 et 1800
mètres, “s'élève tel un bastion au milieu d'une mer de sable”
(Lopatinsky, Les Teda du Tibesti: 9).
Contrairement aux autres populations qui sont des Amazighs ou
Arabo-berbères, les Teda forment ethniquement et linguistiquement un
groupe distinct qui s'apparente aux populations noires du Soudan.
Dans le massif du Tibesti les Teda étaient en 1960 estimés à 20.000
personnes (La Vie du Sahara, p. XXIV), et probablement moins encore
car cette source incorpore des groupes de cultivateurs apparentés au
Teda du Tibesti. De la population totale du Tchad estimé à 7.557.436
d'habitants en juillet 1999, 44 % ont moins de quinze ans (E-Conflict™
World Encyclopedia). Le recensement de la population du Chad de 1993
donne 28.501 Teda (Ethnologue: Languages of the World).
Ces Teda sont restés très longtemps attachés à leur mode de vie et
avaient encore en 1980 “conservés des particularismes culturels qui sont
en accord avec les impératifs de leurs conditions de vie” (Bradily, 1980:
141). D'ailleurs l'influence maghrébine d'abord et française ensuite, avec
une occupation effective à partir de 1930 seulement, est restée faible
jusqu'en 1940.
Le semi-nomadisme fut le système socio-économique rendant possible
la survie des Teda. Une partie du groupe familial reste dans l'oasis, par
exemple à Bardaï, et s'occupe des jardins - vu comme un travail de
serviteurs - et des palmeraies, tandis que l'autre partie s'en va à la
recherche des prairies pour les chèvres, moutons, ânes et dromadaires et
fait en même temps le petit commerce caravanier (Lopatinsky, Les Teda
du Tibesti: 10, 15, 285, 288; Le Cœur, 1950: 198; Kronenberg, 1958: 3-
5).
“Traditionnellement la base de la nourriture est constituée par les
dattes et quelques céréales, dont les unes sont cultivées, et les autres
sauvages” (Bradily, 1980: 141). L'importance des dattes pour les Teda se
révèle jusque dans la confection des poupées par les filles.
30
Les Belbala
Jusqu'à présent les populations décrites sont, ou du moins étaient, des
nomades ou semi-nomades. Par contre, les Belbala sont bien que vivant
dans le Sahara Nord-occidental, la première communauté sédentarisée à
l'oasis de Tabelbala, mais vivant en contact direct avec les Chaamba.
Tabelbala, située à une hauteur de 500 mètres, est une petite palmeraie
très isolée qui se trouve au pied de l'Erg er Raoui, entre cette zone de
dunes, et une petite chaîne montagneuse d'environ 700 mètres de
hauteur.
Les Belbala forment une population sédentaire d'environ 1600
personnes vers 1960, parlant une langue tout à fait particulière,
incomprise des autres sahariens sédentaires ou nomades. Une langue
d'origine négro-africaine avec des apports amazighs et arabes.
Dominique Champault, dont l'ouvrage Une oasis du Sahara nord-
occidental : Tabelbala est la source d'information primordiale en ce qui
concerne les Belbala, écrit que les habitants de Tabelbala ont survécu
grâce à une économie d'oasis avec palmeraies, jardinage et élevage de
chèvres, ânes, quelques moutons et quelques dromadaires
qu'entretiennent des Chaamba. De plus, et jusqu'au début du vingtième
siècle, Tabelbala était un lieu de séjour et d'approvisionnement du trafic
caravanier venant du Maroc.
Mais l'avenir de ce trafic caravanier et celui de l'oasis de Tabelbala
furent en 1969 décrits comme suit par cet auteur : “Que Tabelbala soit
peut-être né du transport chamelier, qu'il en ait vécu pendant de
nombreux siècles, c'est en même temps apercevoir qu'il ne peut
longuement lui survivre” (p. 447).
Les habitants de la Vallée de la Saoura
D'autres sédentaires sahariens sont les habitants des oasis de la Vallée de
la Saoura, une population sur laquelle je n'ai trouvé que très peu de
données.
La Saoura délimite le désert pierreux qui s'étend vers l'ouest, des
dunes de sables de l'Erg qui s'étendent à l'est et au sud. Cette rivière qui
prend source dans l'Atlas saharien, coule en direction nord-sud et s'enlise
31
après quelques centaines de kilomètres dans le désert. Elle transporte
parfois en hiver une quantité considérable d'eau.
La Vallée de la Saoura a toujours été une très importante route de
communication et de commerce trans-saharien. Dans le lit de l'Oued
Saoura se trouvent des jardins et des palmeraies, avec environ 8000
palmiers à Beni Abbes en 1944. A ce moment là, environ 5000
personnes vivaient dans cette agglomération (Naval Intelligence
Division, 1943: I 66-67, II 61).
Selon Dominique Champault la situation alimentaire était plus
tragique dans les petites oasis de la Vallée de la Saoura qu'à Tabelbala,
bien que, jusque dans les années 1950, il y ait eu des petites caravanes
assez régulières dans la Vallée de la Saoura (1969: 176, 269).
Les Mozabites
Les Mozabites, des musulmans appartenant à une secte puritaine non
orthodoxe, se sont réfugiés au cours du XIe siècle dans la région
saharienne de l'Oued Mzab. Là ils fondèrent cinq villes fortes, Ghardaïa
étant la plus importante, et au XVIIe siècle encore deux autres villes. Le
relief est celui d‟un haut plateau, situé à une altitude moyenne de 700
mètres, avec des vallées souvent larges et profondes (Naval Intelligence,
1943-1944: 69).
Le nombre de ces citadins d‟oasis fut évalué vers 1950 à environ
50.000 personnes. Actuellement il y en aurait environ 200.000 (Camps,
1984: 8). Leur langue appartient à la grande famille des parlers berbères.
Zygmunt Komorowski décrit ainsi l‟économie mozabite : “Depuis des
siècles ils s‟enrichissaient sur le commerce transsaharien. Aujourd‟hui,
ils tiennent une grande partie du petit commerce en Algérie et leur
diaspora atteint même l‟Amérique” (1975: 107).
Bien que la population mozabite s‟est, suite à son particularisme
religieux, volontairement isolée, elle a su tirer profit de l‟insertion dans
un état moderne et dans une économie coloniale et post-coloniale.
32
Les Kabyles
Les Kabyles vivent dans une région montagneuse au Nord-Est de
l‟Algérie et qui s‟étend d‟Alger à Annaba. Cet espace se divise en trois
régions. La Grande Kabylie ou la Kabylie de Djurdjura culmine à une
hauteur de 2.308 mètres. A l‟est de la Grande Kabylie se trouve la Petite
Kabylie avec une hauteur maximale de 1008 mètres à l‟ouest de l‟oued
Kebir. La troisième région est celle de Collo située à l'Est. La capitale de
la Kabylie est Tizi-Ouzou dans la Grande Kabylie. C‟est dans ces
régions montagneuses que les Kabyles se sont depuis toujours retirées
suite aux invasions successives.
La Kabylie est une région de peuplement de grande densité où
vivaient en 1987 2.537.000 personnes. En 1984, plus de 530.000
Kabyles vivaient en France (Ethnologue: Languages of the World).
Selon une autre source publiée en 1998 les Kabyles sont estimés à quatre
millions de personnes et l‟émigration vers la France et d‟autres pays
européens date déjà de la Première Guerre mondiale (Tamisier, p. 143).
La langue kabyle appartient à la grande famille des langues amazighs.
Le Larousse du 20e siècle décrit en 1931 certains aspects de
l‟économie de ces régions de la manière suivante :
On cultive les céréales sur les terres basses, et sur les pentes les
vergers et les vignes. La région, parfaitement arrosée, a de
magnifiques forêts de chênes-lièges, de chênes zéens, et plus haut de
cèdres. La Petite Kabylie et celle de Collo renferment des mines de
plomb, de cuivre et surtout de fer (volume I-M, p. 222).
Sur la côte abrupte se trouvent quand-même quelques ports comme
Djidjelli. En 2001 on peut lire dans Ethnologue: Languages of the World
que les Kabyles sont largement des agriculteurs cultivant olives, figues,
grenades, pèches, abricots, poires, prunes et légumes.
La structure socio-politique est marquée par une forte organisation
villageoise. L‟évolution depuis la seconde moitié du siècle dernier nous
montre l‟importance des “institutions politiques traditionnelles et (de) la
culture moderne acquise par les Kabyles au sein des mouvements
syndicaux et politiques auxquels ils ont tant donné, aussi bien dans
l‟immigration en France qu‟en Algérie (Mahe, compte rendu du livre).
33
Les Chaouia
L'Aurès, le territoire des Chaouia, est un massif montagneux
impressionnant d'environ 11.000 km2 situé entre les Hauts-plateaux du
nord-est algérien et le Sahara. Les Chaouia, 'bergers' en arabe, sont des
Amazighs parlant une langue amazighe. Ethnologue: Languages of the
World mentionne 1.400.000 Chaouia pour 1993.
Vers les années 1940, ils vivaient encore largement selon les modes de
vie ancestraux et restaient “des montagnards peu influencés par ce qu'ils
ont vu en ville. Ils gardent une ancienne organisation tribale” (Catalogue
des Collections de l'Aurès, 1943: 4).
En 1938 et selon Thérèse Rivière, les Chaouia du Nord de l'Aurès sont
sédentarisés dans des vallées fertiles où la culture intensive dans des
jardins et palmeraies est possible. Les Chaouia du Sud, au contraire, sont
“des semi-nomades pasteurs de chèvres et de moutons, cultivateurs de
blé et d'orge qui vivent à peu près en économie fermée”. Ces semi-
nomades hivernent au Sahara et estivent dans l'Aurès (p. 294, voir aussi
Ballais, 1989).
A ce moment, la densité de la population atteignit dans le nord de
l'Aurès 5 à 25 habitants par km², cinq fois plus que dans le sud de
l'Aurès, et la population Chaouia tout entière devait se chiffrer dans les
quelques dizaines de milliers.
La situation actuelle en Aurès est décrite par Danielle Jemma-Gouzon
(1989: 7-8) :
Puis vient le temps de rompre l'isolement et, avec lui, celui de la
tentation de l'ailleurs. Les temps présents. Au fond des vallées, les
terres se vident. Les hommes partent. Dans les villages, seuls
demeurent les vieillards, les femmes et les enfants. Les gestes
s'érodent, comme les maisons de terre, en perte de sens et de
symboles. Le Temps a pénétré les montagnes de l'Aurès et, avec lui,
l'Histoire. La famille s'ouvre aussi mais se fragmente, satisfaite d'une
économie moins précaire mais moins communautaire. Aspirations
nouvelles. Modèles nouveaux.
34
Les populations des campagnes marocaines
Mes recherches au Maroc en cours depuis février 1992 m'ont permis
d'obtenir de nouvelles données sur les poupées et les jeux de poupées de
certaines communautés arabo-berbères ou amazighs vivant dans des
villages ou petites villes des régions rurales du Maroc.
Il s'agit en ce qui concerne les information recueillies en 1992, d'une
part, de familles de la région de Hmar et de ceux du groupement Oulad
Yahya, dans la région de Taroudannt, parlant l'arabe maghrébin, et
d'autre part, de familles berbérophones du village Tizal dans la région
d'El Khemis, ainsi que du centre urbain rural d'Imi-n-Tanoute.
La petite ville de Taroudannt est située dans la vallée entre le Haut
Atlas et l'Anti-Atlas, à une altitude peu élevée d'environ 250 mètres, le
long de l'Oued Sous qui se jette dans l'Atlantique à Agadir. L'autre petite
ville, Imi-n-Tanoute, se trouve au pied du versant ouest du Haut Atlas, à
une altitude d'environ 900 mètres, sur la route reliant Marrakech à
Agadir. Ces deux centres urbains ont une population de 25 à 40.000
habitants. Là se mêlent berbérophones et arabophones et il arrive que
dans une même famille les deux langues soient utilisées selon les
besoins.
Depuis septembre 1992, j'ai recueilli des informations sur les régions
rurales suivantes :
Le village Ignern situé à 1600 m d'altitude sur la route de Taroudannt
à Tazenakht près de Taliouine et le village Aït Ighemour situé à 2600
m d'altitude près de la route de Tazenakht à Amerzgane, deux petits
villages amazighs au pied de la montagne Jbel Siroua.
La petite ville de Goulmima sur la route de Ouarzazate à Errachidia et
deux petits villages limitrophes, Magaman et Ighrem-n-Cherif, tous
amazighophones et situés près de l'Oued Gheris sur le versant est du
Haut Atlas.
Le village amazigh Ksar Hasni Biad près de Merzouga et au pied des
dunes de sables de l'Erg Chebbi.
35
La petite ville de Midelt située à 1500 m d'altitudes au pied de la
montagne Jbel Ayachi sur la route d'Errachidia à Meknès ainsi que
cinq petits villages limitrophes : Ksar Assaka, Tabenatout, Tataouine
et Aït Sidi Amar avec une population amazighophone ainsi que
She°ba avec une population arabophone.
Le village amazigh Zaïda à 40 km avant Midelt en venant du Moyen
Atlas.
Deux populations amazighes du Moyen Atlas : les habitants du
village d'Arhbalou-n-Serdane près de Boumia et les Aït Ouirra de la
région d'El Ksiba située à environ 1100 m d'altitude près de la ville de
Kasba Tadla.
Les trois villages amazighes Aït Hmed ou Yacoub près de Khemisset,
Tiddas et Oulmès sur la route de Khemisset à Khenifra.
La petite ville côtière de Sidi Ifni et les villages amazighs Ergoub,
Imou Ergen, Lahfart et Tafraoute dans l'Anti-Atlas.
Le village arabophone Aïn Toujdate sur la route d'El Hajeb à Fès.
Le village arabophone Oulad ben Sbaa près de Sidi Mokhtar sur la
route d'Essaouira à Marrakech.
Comme mentionné pour Taroudannt et Imi-n-Tanoute, des
amazighophones et arabophones se trouvent aussi mêlés à Khemisset,
Midelt, Goulmima et Sidi Ifni. Dans les villages la population est plus
homogène. On y vit de l'agriculture, souvent encore suivant les méthodes
séculaires, de la production des oliviers, arganiers, pommiers et autres
arbres fruitiers, de l'élevage du grand ou petit bétail, bétail d'ailleurs
souvent gardé par les filles ou les garçons. Dans les petites villes
l'artisanat, le commerce, le transport, le fonctionnariat créent des
ressources supplémentaires provoquant ainsi une plus ou moins forte
désertion des campagnes.
Il arrive que j'aie mentionné le groupe ethnique auquel appartiennent
les enfants, cependant l'importance du groupe ethnique est devenue
beaucoup moins évidente qu'avant.
36
Les citadins de l'Algérie, du Maroc et de la Tunisie
Des communautés non-ethniques ou multiethniques vivent dans les
grandes, petites et parfois très petites villes côtières ou non loin de la
côte du Maroc et de l'Algérie. Dans le cadre de l'analyse présentée dans
ce livre, se trouvent aussi mentionnées quelques agglomérations urbaines
à l'intérieur de ces pays et qui représentent une situation démographique
analogue. Ces agglomérations sont, sauf exceptions rarissimes, situées
dans les plaines côtières ou peu élevées de l'intérieur.
En juillet 1999, la population de l'Algérie fut estimée à 31.133.486
d'habitants dont 37 % d'enfants de moins de quinze ans, celle du Maroc à
29.661.636 d'habitants dont 36 % d'enfants de moins de quinze ans et
celle de la Tunisie à 9.513.603 d'habitants dont 31 % d'enfants de moins
de quinze ans (E-Conflict™ World Encyclopedia).
La population citadine vit, dans sa grande majorité et en ce qui
concerne la période couverte par ce livre, de l'artisanat, du commerce, du
fonctionnariat et de l'exécution d'autres services.
Fès, Marrakech et Rabat sont aujourd'hui des villes de plus de 500.000
habitants. Kénitra, à 40 km au nord de Rabat, est un centre régional avec
plus de 200.000 habitants et une ville satellite de la capitale. Ce sont des
villes aux visages multiples où l'on remarque aussi bien un
comportement très européen, un comportement vraiment traditionnel et
un comportement strictement islamique. Cela se voit plus
particulièrement au niveau de la population féminine : comme dans les
rues, le port du voile côtoie celui de la minijupe.
Les renseignements sur les poupées et le jeu de poupée obtenus dans
ces villes proviennent de couches sociales moyennes, populaires et
réellement pauvres comme dans le quartier de Douar Akioud où toute
infrastructure, sauf l'eau courante, manque en 1992 mais où on regarde
pourtant la télévision alimentée par des batteries.
La langue utilisée dans tous ces centres est une forme locale de l'arabe
maghrébin. Du point de vue ethnique, ces populations sont constituées
en majeure partie d'Amazighs arabisés de longue date ou depuis peu.
Gabriel Camps (1984: 9) écrit à ce sujet :
37
En fait, dans la société musulmane nord-africaine et saharienne, il
existe des maghrébins arabophones ou arabo-berbères et des
maghrébins berbérophones qui conservent le nom de Berbères que les
Arabes leur donnèrent. Parmi les Arabo-berbères, qui ne constituent
pas plus une entité sociologique que les Berbères, on distingue un
groupe ancien, citadin, aux origines souvent très mêlées, car il faut
tenir compte dans les villes des apports antérieurs à l'Islam, des
réfugiés musulmans d'Espagne (Andalous) et des nouveaux venus
généralement confondus sous le nom de Turcs, bien qu'ils fussent,
pour la plupart, des Balkaniques et des Grecs de l'Archipel.
Avant de clore cet aperçu des différentes populations dont les poupées et
jeux de poupées figurent plus loin, reprenons encore cette distinction
entre maghrébins amazighophones et maghrébins arabophones et
examinons ce qu'en dit Nefissa Zerdoumi dans son livre remarquable
Enfants d'hier. L'éducation de l'enfant en milieu traditionnel algérien
(1970, 2e édition 1982: 35-36)
Pendant des siècles, la famille algérienne musulmane, malgré une
histoire mouvementée, est demeurée immuable, non pas qu'elle ait
bénéficié d'une protection religieuse ou législative particulière, mais
parce que, ayant adopté une structure défensive, elle se trouvait à
l'écart des causes susceptibles de provoquer son évolution. Elle
portait en elle des éléments statiques, absorbant ou neutralisant les
influences successives et contradictoires du cadre politico-social. Ces
influences ont tracé des zones culturelles relativement dissemblables.
Dans les massifs montagneux (Kabylie, Aurès), les parlers et les traits
coutumiers berbères se sont maintenus dans leur originalité. On y
observe une certaine indépendance à l'égard de l'Islam, notamment
dans le système juridique, un amour jaloux de la terre et de ses fruits,
un goût prononcé pour le travail lucratif individuel, une structure
sociale à tendance démocratique. En face, le pays arabe, celui des
steppes aux larges dimensions ou des plaines allongées, a conservé,
dans ses campagnes comme dans ses centres urbains, les caractères
liés à la civilisation pastorale, plus ouverte, plus classiquement
islamique mais moins attachée à la parcelle de terre qu'à la solidarité
tribale ou familiale. Entre ces deux systèmes, qui hors des villes
38
apparaissent distincts, il y a des interpénétrations nombreuses qui en
font une société aux aspects variés mais au fond commun tissé du fil
semblable des cellules familiales.
Dans ce livre je propose au lecteur une analyse globale des poupées et
jeux de poupées des enfants sahariens et nord-africains. En premier lieu
sont traitées les poupées-hommes, puis les poupées-femmes et les
poupées-enfants. Ces deux dernières catégories se trouvent groupées
suivant la population dont elles proviennent. Par contre, j'ai groupé les
poupées-hommes selon ce qu'elles représentent, ceci pour rendre
l'analyse plus intelligible. Une description selon la provenance aurait
causé un éparpillement des données. Chacune de ces trois parties est
devancée par un résumé mettant en lumière les caractéristiques de ce
groupe de poupées.
Dans la section Conclusions une synthèse est proposée ainsi qu'une
discussion de certains aspects environnementaux, économiques, sociaux
et culturels. La section suivante propose des idées et des actions
pratiques pour rendre utile cette culture ludique enfantine.
Le Catalogue des Poupées Sahariennes et Nord-Africaines du Musée
de l'Homme donne une description détaillée et systématisée des poupées
provenant de la collection du Musée de l'Homme et utilisée pour
l'analyse. Ce catalogue est suivi d'une description des cinq vidéos sur les
poupées et jeux de poupées marocains réalisés en rapport avec mes
recherches. Une première annexe offre un modèle de description des
jeux et jouets.
Dans ce livre se trouve aussi le résumé des cinq vidéos sur les poupées et
le jeu de poupées d'enfants marocains réalisés dans le cadre de mes
recherches. Le premier annexe propose un modèle de description des
jeux et jouets.
La transcription des mots vernaculaires et des références
géographiques et ethniques est basée sur les sources que je crois être les
plus sûres ou les plus largement acceptées et qui se trouvaient à ma
disposition. La diversité des langages et des sources bibliographiques
rend à peu près impossible une uniformisation complète. Pour la
transcription de certaines lettres arabes des signes conventionnels sont
utilisés. La liste de ces signes conventionnels se trouve à la table des
transcriptions. Les mots arabes écrits en italique ont été transcrits de
39
cette manière. Les mots amazighs que j'ai notés au Maroc ont souvent
été transcrit en premier lieu en caractères arabes car les amazighophones
utilisent souvent des caractères arabes pour transcrire leur langue. Ces
mots amazighs sont aussi écrits en italique.
Les mesures sont mentionnées en centimètres : B = base, H = hauteur,
LO = longueur, LA = largeur, E = épaisseur, D = diamètre, + =
maximum, - = minimum.
Ce livre démontre clairement l'importance des poupées et jeux de
poupées des enfants sahariens et nord-africains réfutant ainsi le point de
vue négatif d'un ancien administrateur d'un commune mixte écrivant en
1921 dans un article sur les jeux et jouets des enfants algériens que “les
poupées de nos fillettes et les jouets ordinaires de nos petits garçons sont
très rares et n'existent pour ainsi dire pas, en pays arabe…” (Robert, p.
155). En tout cas, Paul Bellin a déjà prouvé le contraire dans sa
remarquable étude sur l'enfant saharien vu à travers ses jeux. En 1963 il
écrivit (p. 48) :
Eu égard à l'indigence que nous venons de rappeler, on pourrait donc
s'attendre à trouver une jeunesse désœuvrée et languissante. Or, il
n'en est rien : la jeunesse saharienne joue. Elle joue autant, et peut-
être plus, qu'aucune autre, avec spontanéité, avec entrain, avec ce
sérieux qui est le propre des activités puériles. Il faut donc admettre
qu'en dépit des conditions de vie précaires l'enfance saharienne est
une enfance saine.
Avant de décrire les poupées et jeux de poupées des enfants sahariens et
nord-africains il faut quand même attirer l'attention sur quelques limites
ou problèmes auxquels l'analyse des données s'est heurtée. Il y a d'abord
le problème des sources bibliographiques et muséographiques. Les
auteurs et les collectionneurs n'ont pas toujours procédé avec le même
esprit scientifique. Parfois il y a manque de précision sur le plan ethnique
ou géographique lorsque les informations sont attribuées à telle
population ou à telle région. Une autre restriction fort regrettable est que
trop souvent les jouets sont décrits comme des objets et non pas comme
des instruments de jeu. Ainsi l'activité ludique n'est pas analysée avec le
même soin que l'est le jouet lui-même. Enfin il y a ici et là imprécision
40
terminologique quant aux termes et expressions utilisés pour les jouets et
les jeux dans lesquels ils sont employés.
En tenant compte de ces limites, ce que j'ai voulu faire en assemblant
de manière systématique et critique toutes les données à ma disposition,
c'est d'élaborer une analyse de base qui pourra stimuler et servir de
fondement, d'une part, à des recherches sur le terrain afin de relever la
spécificité d'un jeu ou jouet local et, d'autre part, à mettre cette culture
ludique saharienne et nord-africaine en relation avec les jeux et jouets
d'autres aires socioculturelles ainsi que dans une perspective mondiale.
Car si certains aspects des jouets et certains comportements dans les jeux
sont certainement particuliers à une aire socioculturelle, voire à une
communauté, une famille ou même un enfant, d'autres rôles et
comportements semblent bel et bien universels.
Dans “Three myths about children‟s folklore” June Factor lie à juste titre
ses recherches à son expérience personnelle (2001: 24-26). June Factor
commence sa description autobiographique en évoquant en anglais des
paroles de Paul Valéry que j‟ai traduit en français.
Paul Valérie écrivit dans un de ses essais : je m‟excuse de me révéler
ainsi à vous, mais à mon avis il est plus utile de parler de sa propre
expérience que de prétendre à une connaissance tout à fait
impersonnelle, une observation sans observateur ; en réalité il
n‟existe pas de théorie qui ne soit un fragment, soigneusement
préparé, d‟une autobiographie.
Etant convaincu que mes travaux sur les jeux et jouets des enfants
sahariens et nord-africains sont influencés par ma vie personnelle, je
pense qu‟il peut être utile à celui qui s‟y intéresse de disposer de
certaines informations lui permettant d‟établir des liens. J'ai donc mis
des données autobiographiques dans un second annexe.
Concernant mes contacts avec les enfants, les règles de l‟éthique de la
recherche scientifique proposée par le Conseil Européen de la Recherche
Scientifique ont été suivies. Ainsi l‟autorisation paternelle ou maternelle
a été demandée lors de la collecte de données ou des prises de photos
avec des enfants. Il aurait d‟ailleurs été difficile de faire autrement car le
41
travail de terrain se faisait dans les familles ou dans l‟espace public. Une
exception à cette règle existe néanmoins. Il s‟agit des observations et des
photos d‟enfants faites occasionnellement d‟une certaine distance dans
des rues ou autres espaces publics des centres urbains marocains mais
dans ce cas des adultes se trouvaient non loin et je n'ai pas rencontré de
réactions négatives en photographiant ces enfants.
Remerciements
Avant de proposer au lecteur ce trésor que sont les poupées et jeux de
poupées sahariens et nord-africains, il me reste à remercier tous ceux qui
d'une manière ou d'une autre m'ont permis de mener ce livre à son terme
et plus spécialement :
Les familles ghrib, particulièrement les enfants des années soixante-
dix, ainsi que Gilbert J.M. Claus du Département de Langues et
Cultures Africaines de l'Université d'Etat de Gand, pour l'accueil et le
soutient qu'ils m'ont offerts dans le cadre de mes recherches sur les
jeux et jouets ghrib.
Roquia El Mouloua et sa mère Fatima Bent Abdeslem, d'origine de
Marrakech mais vivant à Gand, pour leur amitié et leur aide dans ma
mise en rapport avec leur famille de Marrakech.
La famille Skouri de Kbour Chou, Eloula de Daoudiyât et Kader de
Douar Akioud à Marrakech ; le professeur Boughali, doyen, Youssef
Ait Ammou, maître-assistant, et Fatima Outizal, étudiante, de la
Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l'Université Cadi
Ayyad de Marrakech ; la famille Bamoussa, Khettou et Jalil d'Imi-n-
Tanoute ; la famille Ait Heda de Taroudannt et la fille Latifa de
Hmar, ainsi que nombre d'autres informatrices et informateurs sud-
marocains, qui tous ont rendu en février 1992 mon premier séjour
dans leur région d'une utilité réelle.
Souad Ouazzani d'Aïn Toujdate.
Mohamed Boutouil et sa famille de Khemisset, Malika et Thuriya
Bannour de Tiddas, Hesna Ourèra de Aït Hmed ou Yacoub.
42
Ali Hacherras, président, et d'autres membres de l'Association Tilelli
de Goulmima, les familles Hacherras, Lihi et Taous de Goulmima,
Omar Taous et ses élèves de Magaman, Hesna Midouan de Ighrem-n-
Cherif.
Aïcha Aït Mamou, Souad, Latifa, Najat, Sabah et Kamel Laabib et
quelques autres de Ksar Assaka, Mohamed Hammioui et ses élèves de
Tataouine, des enfants de Tabenatout, Taäkit et Midelt, Bouchra et
ses compagnons de jeu de She°ba, ainsi que Sfia Gharîb de Midelt.
L'instituteur Ali Boukrit, sa femme, leur fille Amal et sa copine Leila
de Zeïda.
Les filles de Ksar Hasni Biad.
Nour-Eddine Ikhbous d'Essaouira et ses élèves d'Aït Ighemour.
Ennèya, sa mère et les enfants d'Ignern.
Bari Saïd et ses élèves d'Imou Ergen et de Lahfart, Boubaker
Daoumani et ses élèves de Lahfart, des enfants de Lagzira et de Sidi
Ifni qui, avec d'autres encore, ont contribué à l'étude des poupées et
jeux de poupées marocains depuis octobre 1992.
Souad Laabib de Ksar Assaka pour son aide comme intermédiaire et
interprète pour le tamazight et l'arabe de 1995 à 2000.
Boubaker Daoumani de Sidi Ifni pour son aide comme intermédiaire,
interprète pour le tashelhit et l'arabe ainsi que pour sa collaboration à
la réalisation de vidéos sur les jeux et jouets des enfants, à partir de
2002.
Les enfants et leurs parents de Sidi Ifni et Lagzira qui ont accepté que
leur jeu de poupée soit filmé.
Le Nationaal Fonds voor Wetenschappelijk Onderzoek (Fonds
National Belge pour la Recherche Scientifique), Bruxelles, qui a
soutenu mes recherches et mes publications de 1970 à 1992.
Dominique Champault, ancienne responsable, et Jean Lambert,
responsable du Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient
du Musée de l'Homme à Paris, et leurs collaborateurs, pour leur
bienveillance et leur aide.
Les photographes du Laboratoire de Photographie du même musée
qui ont réalisé toutes les photos des poupées de la collection de ce
musée, de même que les responsables du Service de la Photothèque.
Marie-Antoinette Fropo pour la correction du texte de 1993.
43
André Michelet, ancien président du Conseil International pour le Jeu
de l'Enfant et de l'Association Française pour l'Education par le Jeu,
pour avoir rendu possible une première édition de ce livre en 1993.
Ruben Rossie pour ses conseils et son aide dans l'utilisation de
l'ordinateur.
Krister Svensson, Eva Petersson, Anders Nelson et Mattias Nilsson
de l‟ancien Nordic Center for Research on Toys and Educational
Media (NCFL), et Krister Svensson, Anders Nelson, Mattias Nilsson
et Johnny Friberg du Stockholm International Toy Research Centre
(SITREC) pour leur amitié et leur aide.
51
1 Les poupées-hommes
1.1 Résumé
La collection de poupées sahariennes et nord-africaines du Musée de
l'Homme ne comporte que des poupées-hommes de populations
sahariennes. Cette situation n'est pas due aux collectionneurs, car les
différents auteurs consultés ne mentionnent pas de poupées-hommes en
dehors du Sahara. Toutefois une exception doit être faite pour le Maroc.
Ainsi un article paru en 1917 dans la revue France-Maroc parle d'une
poupée-homme marocaine représentant le marié. Laoust certifie en 1921
l'existence de cette poupée-jeune marié auprès des Amazighs du Haut et
de l'Anti-Atlas au Maroc, et la met en relation avec des rituels pour la
fête de l'°ashûra au début de l'année musulmane. Il s'agit donc plutôt
d'une poupée rituelle que d'une poupée pour jeu d'enfant. Un auteur
marocain Mohammad Ibn Azzuz Hakim, mentionne lui aussi, en 1959,
que les filles de Ghomara (Gumara el Haila), dans le nord du Maroc,
confectionnent à côté de leurs poupées-femmes des poupées qui sont
habillées en homme. Il en sera question lors de la description des
poupées-femmes marocaines. Néanmoins la rareté, ou selon Jeanne
Jouin l'inexistence, de la poupée-homme chez les filles marocaines fut
soulignée par cette dame qui, sur base de ses observations au Maroc
entre 1930 et 1940, m'a certifié lors d'un entretien au Musée de l'Homme
le 30 juillet 1980 qu'elle n'avait jamais vu de poupées-hommes au Maroc
et spécialement à Rabat et ses environs. En plus elle m'expliquait qu'elle
pensait que cela était du au fait que la femme était trop séparée de
l'homme et du monde masculin. Les informations obtenues lors de mes
recherches au Maroc, démontrent cependant que cette assertion doit être
relativisée car dans certaines régions une poupée-jeune marié est assez
fréquemment utilisée par les filles pour leur jeu de poupée représentant
le mariage. Mais il reste vrai que la poupée-jeune marié est beaucoup
moins élaborée que la poupée-jeune mariée. En plus on trouve bien que
rarement des garçons marocains jouant avec une poupée-homme qu'ils
ont confectionnée eux-mêmes.
52
Les poupées-hommes de la collection étudiée proviennent surtout
d'enfants touaregs, aussi bien des garçons que des filles. Les autres
furent faites par des enfants ou servantes maures, un enfant de la Vallée
de la Saoura, et des fillettes chaamba. Dans la bibliographie mention est
faite de poupées-hommes chez les garçons et filles touaregs, les enfants
regeybat, les garçons teda, les enfants de la ville de Mopti, les fillettes
belbala, les filles amazighes du Haut et de l'Anti-Atlas et les filles de la
région de Ghomara. Auprès des garçons et filles ghrib ainsi que dans
certaines communautés marocaines on trouve aussi des poupées-
hommes.
La poupée-homme la plus ancienne de la collection date de 1934 et fut
achetée à un jeune garçon touareg Kel Djanet (Touaregs Kel Ajjer), mais
dans la collection du Département d'Afrique Noire du Musée de
l'Homme, se trouvent deux poupées-cavaliers (ou poupées-méharistes)
récoltés en 1904 près de Rhergo sur le fleuve Niger. Dans la
bibliographie mention est faite en 1907 de poupées-hommes auprès des
enfants touaregs Kel Iforas.
Selon toutes les informations que j'ai pu trouver, ce ne sont que les
garçons touaregs, ghrib et teda, ainsi que ceux du village amazigh Aït
Ighemour, qui confectionnent et jouent avec les poupées-hommes. Des
poupées-hommes sont confectionnées par les filles chez les Touaregs, les
Ghrib, les Maures, les Regeybat, les Chaamba, les Teda, les Belbala et
dans certaines communautés marocaines. A l'exception des poupées-
hommes faites par les servantes noires des Maures de Oualata, les
poupées-hommes sont fabriquées par les enfants eux-mêmes.
Toutes ces poupées-hommes se rangent dans différentes catégories :
méharistes, cavaliers, muletiers, bergers, guerriers, notables et jeunes
mariés. Les poupées-hommes sont utilisées pour des jeux figurant des
scènes de la vie adulte. Des poupées-jeunes mariés existent chez les
Touaregs, les Ghrib, les Chaamba et probablement les Belbala, ainsi que
dans des communautés marocaines.
L'armature des poupées-hommes des enfants touaregs, ghrib, maures,
chaamba, belbala et d'Aït Ighemour est souvent en matière végétale et en
forme de croix, couverte d'étoffes. Les enfants touaregs jouent aussi avec
des méharistes et des cavaliers en argile, tout comme les enfants maures,
les enfants teda et les enfants noirs de Mopti. Les garçons d'Aït
53
Ighemour modèlent en argile un muletier et sa mule mais ils utilisent
aussi des courgettes et des morceaux de pomme de terre non pelée.
Bien que les poupées-hommes soient le plus souvent en matière
végétale et étoffes ou en terre crue ou cuite, il y a aussi des poupées-
hommes en pierre plate (Touaregs, Regeybat) ou en pierre cylindrique
(Ghrib), faites d'une touffe de cheveux de chèvre (Ghrib) ou de fils
électriques plastifiés (Vallée de la Saoura).
La forme des poupées-hommes varie de très schématique, comme
pour ceux taillés dans la pierre ou celles en touffe de poils de chèvre, à
une représentation détaillée des attributs typiques des hommes sahariens,
comme c'est le cas pour les méharistes, guerriers ou notables touaregs en
matière végétale et étoffes.
La poupée-homme la plus petite mesure 5 cm. C'est un cheval avec
son cavalier, modelée d'une pièce. La poupée-homme la plus grande est
une poupée-homme d'environ 100 cm faite par un garçon du village Aït
Ighemour au Maroc.
Du point de vue des vêtements et parures les poupées-hommes sont ou
bien peu colorées sinon monochromes ou bien très colorées comme dans
le cas de certaines poupées-hommes touarègues et des méharistes et
cavaliers miniaturisés en terre cuite des enfants maures de Oualata.
Si on laisse de coté les trois poupées-hommes faites par des garçons
d'Aït Ighemour, aucune de ces poupées-hommes n'a de visage et si elles
sont habillées, elles portent des vêtements d'hommes adultes.
1.2 Les poupées-méharistes
Les poupées-méharistes étaient sans aucun doute un des jouets préférés
des garçons sahariens. Il se peut néanmoins que les changements
économiques et sociaux survenus dans les dix ou vingt dernières années,
et spécialement la sédentarisation des nomades et semi-nomades
sahariens, portent les enfants de ces régions à délaisser les dromadaires
jouets et leurs poupées-méharistes en faveur des jouets imitant les
moyens de transport modernes, comme les voitures et les camions. Cette
évolution fut déjà discernable au moment de mes recherches chez les
enfants ghrib entre 1975 et 1977.
54
Des poupées-méharistes ont été révélées
chez différents groupes touaregs, chez les
Ghrib, les Maures, les Regeybat, les Teda et
les habitants de la Vallée de la Saoura.
J'ai vu en 1975 auprès d'un jeune garçon
ghrib du Sahara tunisien un méhariste réduit
à sa forme la plus simple. Ce méhariste,
assis sur une selle en brindilles portée par
un dromadaire jouet en mandibule de
chèvre, n'est qu'une touffe de poils de
chèvre (fig. 2).
Selon Charles de Foucauld il existe d'autres méharistes de forme
rudimentaire taillés dans la pierre par des enfants touaregs Kel Ahaggar
du Sahara algérien.
Bien que le capitaine Archier (1953: 39) déclare que chez les
Touaregs Kel Ahaggar le mot 'tifersîtîn (sing. téfersitt)' est le nom, donné
uniquement aux dromadaires en pierre taillée, Charles de Foucauld écrit
dans son Dictionnaire Touareg-Français (1951-1952: 358) que ce mot
désigne un animal ou un personnage en pierre taillée servant de jouet.
Charles de Foucauld est, à ma connaissance, le seul auteur qui ait déclaré
que “les enfants du Ahaggar taillent grossièrement des pierres plates en
forme de chameau, de cheval, d'homme, de femme etc.” Ce sont surtout
les jeunes garçons, spécialement les bergers qui taillent ces méharistes et
leurs dromadaires dans la pierre.
En ce qui concerne les Regeybat du Sahara algérien Denis note que les
enfants jouent avec des poupées-méharistes en pierre (1952: 32-33). En
plus, un informateur de la Vallée de la Saoura, aussi dans le Sahara
algérien, interprétait deux pièces de la collection, rassemblée par Denis,
comme représentant des méharistes et mettait l'un d'eux sur un
dromadaire de pierre.
Dans le livre Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines.
L'Animal dans les Jeux et Jouets le lecteur intéressé trouvera de plus
amples informations sur les jouets en pierre taillée (p. 54-59, 108, 179).
Chez les Touaregs Kel Ahaggar du Sahara algérien et les Touaregs
Kel Ajjer du Sahara algérien et libyen, les garçons et les filles font des
dromadaires, souvent sellés et montés d'un méhariste, avec une
2
55
mandibule de chèvre ou de mouton. La figure 3 nous montre un
magnifique exemplaire de 27 cm de haut avec un méhariste de 16 cm de
haut (catalogue 2.1, 41.19.113, p. 264). Un autre exemplaire est à voir à
la planche 28 de “La Vie du Sahara”.
3
56
Selon une information dans le fichier de la collection, on trouve les
mêmes dromadaires de mandibule sellés et montés à El Oued dans le
Sahara algérien près de la frontière tunisienne, et comme déjà mentionné
plus haut, les garçons ghrib jouent eux aussi avec des dromadaires de
mandibule sellés et montés.
L'armature de ces méharistes touaregs sur dromadaire de mandibule
est faite en bois de tamarix, en tiges de mrokba ou en roseau. Les
vêtements de dessus des poupées-méharistes touarègues à armature
végétale sont en étoffe de couleur uniforme, avec une préférence pour le
blanc et le bleu indigo. Le baudrier et la ceinture sont faits de fils de
coton mercerisés multicolores. Certains méharistes portent une culotte
longue blanche. Le cou et la tête sont parfois enveloppés de fils de laine
multicolores.
Avec ces dromadaires de mandibule et leurs méharistes, les enfants
touaregs s'amusent à figurer des carrousels de dromadaires ou d'autres
scènes de la vie nomade.
Les enfants touaregs Kel Aïr
(Sahara du Niger) font des
méharistes avec un corps en fibres
ou feuilles de palmier torsadées.
Les dromadaires portant ces
méharistes ont comme tronc un
coussin de chiffons dans lequel se
trouvent fixées quatre brindilles de
bois pour les pattes. Le cou et la
tête sont en fibres ou feuilles de
palmier torsadées.
Le méhariste de ce genre de 15,5
cm de haut, montrée à la figure 4,
porte une coiffure noire avec des
floches de laine rouge et verte
maintenues par une épingle double
(H totale = 48 cm; dromadaire : H =
35 cm, LO = 20 cm; catalogue 2.1,
74.107.6, p. 264).
4
57
Dans le document “Vie des Touaregs. Enfance et Jeux”, rédigé par un
auteur anonyme probablement dans les années cinquante, une excellente
description est donnée des dromadaires jouets en armature végétale ainsi
que du jeu dans lequel ils sont utilisés. Pour la confection de ces jouets
aussi bien que dans le jeu lui-même, garçons et filles collaborent. Vu
l'importance de ce témoignage je le copie en entier.
Le personnage principal, autour duquel tous les autres gravitent, est
le chameau, objet de convoitise de tous les jeunes nomades,
l'équivalent de l'automobile pour nos petits enfants de France. Son
armature en bois souple, de l'acacia ou 'mœrua crassifolia' de
préférence, est montée par les garçons, puis habillée de vieux chiffons
par les petites filles qui recouvrent ensuite le tout d'un beau morceau
de tissu blanc pour en faire une monture de chef. Parfois, lorsque la
couture de ce petit chef-d'œuvre s'avère trop délicate pour ces jeunes
doigts inexpérimentés, on va demander l'aide d'une femme de la
famille qui ne dédaigne pas d'aider à la confection du jouet. Tous les
détails de l'animal sont scrupuleusement respectés : la tête est bien
dessinée à l'aide de petits morceaux de bois minuscules, taillés et
retaillés par l'artiste de la bande : yeux, oreilles, bouche, rien n'y
manque, et la forme de la bosse est souvent très réussie ; par contre,
le chameau, vu de profil, n'a que deux pattes que l'on pique dans le
sable pour le faire tenir debout. C'est encore un garçon qui, dans un
morceau de bois tendre, tamaris de préférence, sculpte la selle, exacte
réplique de la 'rahla tamzak', décorée au feu à l'aide de pointes
d'aiguilles, puis fixée sur l'animal par une petite sangle, dont le
travail, pompom compris, est semblable à celui du harnachement
normal. Puis toute la petite troupe s'affaire à tailler dans des débris
de peau : la bride, les dabias, l'areg et jusqu'à la cravache et au tapis
de selle qui complètent l'équipement. La monture terminée, il faut
faire le méhariste : un squelette de bois, les filles posent les
gandouras de luxe tandis que les garçons montent les deux 'chechs' et
les cordons de noblesse et que l'artiste de la bande découpe dans une
boîte de conserve la 'takouba' de fer blanc sans laquelle un homme
appartenant à la noblesse ne saurait se déplacer. Puis, petit à petit,
autour de cette figure principale, se monte le reste de la famille : la
mère, enveloppée dans ses larges vêtements et dont les pieds de bois
58
sont curieusement piqués dans une grosse boule d'argile qui, posée
sur le sol permet de lui imprimer un curieux balancement censé
représenter la marche ; les enfants, de toutes tailles, puis les
serviteurs noirs. Aux personnages viennent s'ajouter animaux et objets
familiers du campement : chameaux de bât, chèvres, chiens, ânes,
tapis, marmites, outres et jusqu'à la tente taillée dans un morceau de
peau. Les santons terminés, tous les enfants jouent 'à la tribu'.
Pendant que les garçons, avec le chef de famille monté sur son méhari
blanc, les chameaux de bât chargés de sacs de sable, s'en vont au long
des pistes tracées sur le sol, tournent autour des montagnes de
cailloux et abreuvent leur convoi à des points d'eau imaginaires,
parcourant ainsi des milliers de kilomètres sur une curieuse carte en
relief où les proportions sont loin d'être respectées, les petites filles,
restées au campement, montent la tente, envoient les nègres d'étoffe
garder les chèvres d'argile, simulent une cuisine longue et savoureuse
et finissent par faire un repas succulent avec trois dattes. Lorsque les
garçons, après un long périple de cent mètres, reviennent au camp,
tout ce petit monde simule les fêtes joyeuses qui accueillent les
caravanes de retour du Soudan.
Les enfants sahariens des
Touaregs, Maures et Teda
modèlent des dromadaires
en terre crue ou cuite qui
sont montés par un
méhariste fait de la même
façon. Un des dromadaires
en argile séchée au soleil,
collectionnés auprès des
enfants touaregs Kel Ajjer
du Sahara algérien, est
monté par un méhariste lui
aussi modelé en argiIe et
séché au soleil (fig. 5, H
totale = 14,5 cm;
dromadaire : H = 9 cm, LO
= 9,5 cm; catalogue 2.1,
37.21.104.1/2, p. 264). Les bras de ce méhariste de 7,2 cm de haut
5
59
forment une croix avec le tronc et la tête qui n'est qu'une pointe. Deux
jambes courtes permettent de tenir le méhariste en selle.
Deux autres Touaregs en terre crue du même genre et d'environ 10 cm
de haut étaient destinés à être posés sur un dromadaire ou un cheval (voir
1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60). Ils furent eux aussi modelés en argile,
puis séchés au soleil, par un garçon hartani de onze ans, vivant auprès
des Touaregs Kel Ahaggar à Tamanrasset (Sahara algérien).
Les enfants des Touaregs Ioullemeden de la région sahélienne de
Tahoua au Niger, font eux aussi des méharistes en argiles qu'ils mettent
en selle sur des dromadaires en argile “souvent agrémentés de morceaux
de chiffons de couleur et de brins d'herbes représentant les impédimenta
(les bagages encombrants) ou le harnachement” (Nicolas, 1950: 186).
Les enfants maures du Sahara Nord-occidental (frontière algéro-
marocaine) jouent avec des dromadaires à quatre pattes sellés et montés
d'un méhariste. Le tout est fabriqué en terre cuite rougeâtre. Ce
méhariste est du même type que la poupée-cavalier des enfants maures
décrite plus loin et montrée à la figure 8 (p. 62).
Les enfants teda du Tibesti au Sahara tchadien, modèlent eux-mêmes
des dromadaires dans l'argile. Peter Fuchs (1961: 47) déclare que ces
figurines sont les jouets favoris des garçons teda, qu'ils mettent en selle
des méharistes en argile et s'engagent avec ces jouets dans des razzias
réciproques.
Dominique Champault a recueilli en 1956 auprès des enfants de la
Vallée de la Saoura dans le Sahara Nord-occidental en Algérie, un
dromadaire monté d'un méhariste de 6,5 cm de haut et avec une
envergure des bras de 11 cm, tous les deux en fils électriques plastifiés,
jaunes pour le dromadaire et rouge pour le méhariste (fig. 6, p. 60, H
totale = 15,5 cm; dromadaire : H = 11 cm; LO = 6,5 cm; catalogue 2.2,
62.60.29/30, p. 267). Le méhariste est tenu en selle par une lisière en fil
électrique plastifié rouge qui le relie à la tête du dromadaire.
Cet exemple démontre que si les matériaux s'adaptent aux temps
modernes, la représentation du dromadaire et du méhariste subsiste dans
les jeux des enfants sahariens, ce qui est confirmé par les dromadaires
jouets et les poupées-méharistes que j'ai trouvés auprès des enfants ghrib
en 1975 et 1977.
60
6
1.3 Les poupées-cavaliers
Chez les Touaregs et les Maures du Sahara Nord-occidental les chevaux
jouets portent une selle souvent montée d'un cavalier. Le cheval, la selle
et le cavalier ont été modelés dans l'argile et forment trois pièces
séparées contrairement aux chevaux sellés et montés des enfants maures
de Oualata qui sont modelés d'une pièce.
Trois chevaux sellés et montés d'un cavalier touareg ont été modélés
en argile, puis séchés au soleil. Deux de ces chevaux ont pu aussi bien
représenter des dromadaires (catalogue 2.2, 41.19.152-154, p. 267). Ces
jouets qui s'appellent 'aknar' furent faits par trois garçons hartani, les
serviteurs noirs des Touaregs Kel Ahaggar, entre huit et douze ans.
Malheureusement ces objets manquent au Musée de l'Homme. La
hauteur d'un des chevaux était 8 cm comme l'indique la fiche
signalétique de cet objet.
61
Un des cavaliers représente, selon son créateur, le fils de l'amenokal
ou 'roi' de l'Ahaggar.
Il s'agit de jouets de garçons. Monter à cheval était uniquement
réservé aux hommes et bien que certaines femmes de l'Ahaggar montent
à méhari, aucune ne montait à cheval (de Foucauld, 1951-1952: 1034).
En 1904 Desplagnes
a récolté des figurines
en terre cuite trouvée
en surface près de
Rhergo sur la boucle
du Niger au Mali, dans
une plaine sahélienne
où nomadisaient les
Touaregs Ioullemeden
(fig. 7). Selon Lebeuf et Pâques (1970: 53) il s'agit de :
Deux représentations de cavaliers, en position assise ; les jambes sont
allongées, le tronc, légèrement rejeté en arrière, est muni de deux
tenons latéraux constituant les bras, la tête est modelée à partir d'un
appendice vertical, aplati, portant sur un des deux spécimens un
cimier descendant sur la nuque ; deux points latéraux figurent les
yeux ; des traces de peintures brune et blanche sont encore visibles ;
la plus petite des deux figurines porte autour du cou un collier, simple
fil de coton vert ; hauteur : 57 mm et 86 mm.
Comme on trouve dans la collection Desplagnes un dromadaire et des
selles de dromadaires en terre cuite, ces poupées-hommes pourraient
aussi bien servir comme poupées-méharistes.
Les enfants maures du Sahara Nord-occidental jouent eux aussi avec
des chevaux sellés et montés, faites en terre cuite. Le jouet qu'on voit à la
figure 8 (p. 62) consiste en quatre pièces, le cheval (H = 16 cm, LO =
17,5 cm), la selle (LO = 6 cm), le cavalier (H = 12 cm) et son chapeau
(H = 3,5 cm), en terre cuite rougeâtre (H totale = 26 cm). Le tout à été
passé à l'ocre rouge à l'exception cependant du cheval (catalogue 2.2,
38.141.83, p. 267).
7
62
Le cou de ce cheval à quatre
pattes est incurvé en avant et
les oreilles sont modelées sur
une petite tête. La queue est
bien mise en relief. La selle
est du type à pommeau en
latte arrondie.
Le cavalier se tient en selle
par les deux jambes écartées.
Il a les bras étendus et porte
un chapeau. Comme chez
toutes les autres poupées-
hommes, sauf ceux du
village marocain Aït
Ighemour, il n'y a pas
d'indication de visage.
Les enfants noirs de Mopti, sur le Niger au Mali, modèlent en argile des
cavaliers et des chevaux qui ne ressemblent point aux cavaliers trouvés
près de Rhergo, mais au contraire très bien à ceux des enfants maures du
Sahara Nord-occidental. Ces figurines peuvent être en terre crue, séchée
au soleil, ou en terre cuite. J.J. Mandel et A. Brenier-Estrine nous
montrent dans leur article “Clay Toys of Mopti” deux chevaux sellés et
montés (1977: 11-12).
Des petits chevaux en terre crue, servant de jouets aux enfants maures
de Oualata (Sahara mauritanien), sont faits par les servantes noires
(catalogue 2.2, 38.48.81-83, p. 267). Le cheval, la selle et
éventuellement le cavalier ont été modélés d'une pièce. Ces jouets déjà
remarquables par leur coloration ont en plus les deux pattes antérieures
réunies en un seul tronc. Une de ces poupées-cavaliers de la collection
porte le casque colonial.
Le cavalier indigène maure de Oualata de la figure 9 (p. 62) monte sur
un cheval sellé. Le cou du cheval est incurvé en avant et la tête forme un
très faible relief. Les deux pattes antérieures sont réunies en un seul
tronc. La queue est faite d'un brin de coton. Le jouet fut recouvert d'un
enduit blanc. Les sabots et la selle sont peints en ocre.
8
63
La sangle est en
ocre ornée de dessins
jaunes et noirs. Le
cavalier est peint en
jaune. Des lignes ocres
et bleues dessinent le
harnachement. En
avant du poitrail une
protubérance semi-
cylindrique est ornée
d'une croix composée,
ocre et noire (H = 7
cm, LO = 6,7 cm, LA
3,3 cm; catalogue 2.2,
38.48.82, p. 267).
Le jouet le plus petit de cette série de cavaliers mesure 5 cm de haut
sur 4 cm de longueur, le plus grand mesure 8,3 cm sur 9,5 cm.
La manière dont les enfants utilisent tous ces chevaux jouets et
poupées-cavaliers dans leurs jeux n'a pas été révélée, mais il est clair
qu'ils les utilisent surtout pour interpréter la vie des adultes ou les
comportements des animaux eux-mêmes, tous comme ils le font avec
leurs dromadaires jouets et poupées-méharistes.
1.4 Les poupées-bergers
Contrairement à ce qu'on pourrait penser, vu qu'il s'agit de populations
vivant dans une situation économique et sociale où le petit et/ou le gros
bétail jouent un rôle important, très peu de données existent sur
d'éventuelles poupées-bergers en Afrique du Nord et au Sahara.
Denis écrit que les enfants regeybat (Sahara algérien) figurent “le
berger noir en fichant en terre des pierres en forme d'Y que l'on
trouverait beaucoup en Mauritanie, et dont la fourche formerait les bras
de l'homme” (1952: 32-33).
Personnellement j'ai constaté que les garçons ghrib du Sahara tunisien
jouent pour leur jeu de troupeau avec une pierre cylindrique d'environ 10
cm de haut qui devient le berger, une pierre cylindrique plus petite
9
64
comme chien de berger et des crottes de chèvres pour les animaux (voir
Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines. L'Animal dans les
Jeux et Jouets, fig. 16, p. 62).
1.5 Les poupées-muletiers
Même si le mulet joue un rôle important dans toute la région et que des
jeunes s'occupent du mulet je n'ai jamais trouvé référence à une poupée-
muletier jusqu'au jour où deux garçons me l'ont montré au petit village
amazigh Aït Ighemour (province de Ouarzazate, sud-marocain) en
octobre 1992.
A Aït Ighemour dans le Haut Atlas les garçons entre six et environ dix
ans vont chercher de l'argile à flanc de montagne (fig. 10).
Avec cet argile ils modèlent bon nombre de jouets, entre autre un
muletier à casquette qui serre entre ses grosses jambes un mulet non
sellé (fig. 11, H = 11 cm). Dans la tête allongée du mulet, avec ses deux
oreilles bien prononcées, le garçon a mis des yeux. Si nécessaire on
mouille un peu l'argile avec de la salive pour que la tête, les oreilles, les
bras, les jambes ou les pattes s'adhèrent bien au corps du muletier ou du
mulet. Ces muletiers et mulets sont séchés au soleil. Avec ces jouets
assez frustes, les garçons miment des scènes de l'élevage ou du
transport.
10 11
65
Un autre type de muletier avec son mulet fut fait en octobre 1992 par
un garçon du même village et cela avec des branchettes et des courgettes
(fig. 12, muletier : H = 32 cm, mulet : H = 21 cm, LO = 20 cm). Pour le
muletier le garçon a mis aux deux extrémités d'une branchette une petite
courgette, l'une figurant la tête et l'autre le bassin. Les deux branchettes
qui ont été introduites dans le bassin et représentent les jambes, se
terminent par deux morceaux de pomme de terre servants de pieds. Dans
la courgette servant de tête des petits morceaux de pomme de terre, avec
la pelure tournée vers l'extérieur, font office de bouche et des yeux. Pour
le mulet une grosse courgette sert de tronc dans lequel cinq branchettes
sont enfoncées, quatre pour les pattes et une pour le cou. Une courgette
plus petite forme la tête et est enfoncée sur la branchette servant de cou.
12
66
1.6 Les poupées-guerriers et poupées-notables
Dans la collection du Musée de l'Homme l'on trouve des poupées
symbolisant des guerriers touaregs ou des Touaregs en grande tenue qui
proviennent des Touaregs Kel Ahaggar et Kel Ajjer (Sahara algérien),
des Touaregs Kel Aïr (Sahara du Niger) et des Touaregs Kel Iforas
(Sahara malien) (catalogue 2.3, p. 269).
L'exemple le plus ancien date d'avant 1935 mais Maurice Cortier
constate déjà leur existence auprès des Touaregs Kel Iforas en 1907
(1908: 310).
Selon cet auteur les poupées-hommes sont un des principaux jouets
des garçons Kel Iforas. Néanmoins les deux exemplaires de la collection,
qui représentent des Touaregs Kel Iforas en grande tenue, ont été faits
par une fille.
Aussi bien les filles que les garçons touaregs Kel Ahaggar
confectionnent et jouent avec des poupées-hommes avec lesquelles ils
figurent des scènes de vie, des 'ahâl' ou réunions galantes, des carrousels
de dromadaires etc. Bellin (1963: 100) affirme en ce qui concerne les
jeunes nobles Kel Ahaggar :
Dans le cas des jeunes garçons touaregs, ce qui les intéresse, c'est
moins de jouer avec les poupées que de les confectionner. Nous avons
affaire à une création, et - nous n'hésiterons pas à le dire - à une
création artistique... Le jeune Targui se fabrique des spectacles avec
une meule tournante ou avec une brindille incandescente ; il taille,
modèle des statuettes, hommes et chameaux. Dans le goût du
spectacle, dans la création artistique, le rêve a une bonne place.
Foley (1930: 47), pour les Touaregs Kel Ahaggar, et Cortier (1908: 310),
pour les Touaregs Kel Iforas, notent que les poupées-hommes construites
par les garçons sont mariées selon le cérémonial d'usage aux poupées-
femmes construites par les filles.
Une intéressante photo d'Henri Lhote (fig. 13, p. 67) nous montre une
jeune fille touarègue Kel Ahaggar jouant dans le sable avec des poupées-
hommes habillées en guerriers. Sur cette photo on voit aussi un
dromadaire sellé portant des sacs de selle (1944: 113, planche VIII).
68
Les figures 14 et 15 (p. 67) laissent voir une poupée de 20 cm et de 33
cm de hauteur qui représente un Touareg Kel Ahaggar (catalogue 2.3,
41.19.104-105, p. 270). Ces poupées-guerriers ou poupées-notables sont
à rapprocher de la poupée-méhariste assise sur un dromadaire fait d'une
mandibule de chèvre ou de mouton (fig. 3, p.55).
L'armature en forme de croix de la grande majorité des poupées-
hommes de la collection est en matière végétale : tiges de graminées,
morceaux de bois, roseaux, fibres de palmier torsadées ou feuilles de
palmier tressées. Deux poupées-hommes ont une armature faite d'un os.
Comme on peut le constater à la figure 16, différentes formes
d'armatures ont été utilisées pour la construction de ces guerriers ou
notables en miniature. Le premier type d'armature est fait d'un morceau
de bois ou d'os auquel est ligaturé en croix un petit morceau de bois pour
figurer les bras. Le second type d'armature est un roseau dont les deux
tiers ont été découpés pour représenter les jambes. Un bâtonnet est
introduit horizontalement dans le roseau pour figurer les bras. Le
troisième type d'armature se compose verticalement de deux, trois ou
cinq tiges de graminées. Deux ou trois tiges y sont ligaturées en croix
pour former les bras. La tige verticale du milieu ne va qu'à la hauteur de
la taille, les deux ou quatre tiges extérieures se prolongent pour former
les jambes. Les tiges sont reliées avec des fils de coton. Le quatrième
type d'armature est fait de trois ou quatre tiges de graminées, dont
celle(s) du milieu ne va (vont) qu'à la taille, sur lesquelles une tige à été
ligaturée en croix pour figurer les bras. La tige servant de bras est fendue
au milieu et glissée au-dessus des tiges verticales. Les tiges sont reliées
avec des fils de coton. Le dernier type d'armature est en feuilles de
palmier tressées ou en fibres de palmier torsadées, éventuellement
raffermi par un fil de fer.
La hauteur minimale des poupées-guerriers et poupées-notables
touarègues est 7,5 cm, la hauteur maximale 40 cm.
16
69
A côté des poupées-guerriers à armature d'origine végétale, les textes
font référence à des figurines de sexe masculin en terre cuite, habillées et
armées, chez les garçons touaregs Kel Iforas du Sahara malien (Cortier,
1908: 310) .
Les vêtements et les ornements des poupées-hommes imitent, parfois
très modestement mais le plus souvent très complètement, le costume et
les ornements des guerriers touaregs ou des Touaregs en grande tenue.
Ce costume se compose d'un pantalon blanc ou bleu indigo, serré à la
ceinture et rétréci à la cheville, et d'une ou de deux longues blouses,
même trois pour les gens riches. Au milieu de la couture de la blouse un
trou laisse le passage à la tête. Selon les coutumes touarègues la longue
blouse inférieure est blanche et celle du dessus bleue. Une description
détaillée des vêtements d'homme touareg est à lire dans Cortier, 1908:
317; Foley, 1930: 23-26; de Foucauld, 1951-1952: 73-74, 98, 439, 995;
Gabus, 1958: 282-289. Pour des photos et croquis d'homme touareg voir
Foley, 1930: pl. XVI-XVIII et Gabus, 1958: 282.
Dans la collection du Musée de l'Homme, les poupées touarègues de
sexe masculin portent assez souvent une culotte blanche (fig. 17, H= 17
cm), une fois une culotte beige, bleue indigo ou multicolore.
17 18
70
Leur costume se compose d'un, de deux ou de trois longues blouses,
parfois il y en a quatre ou même cinq. Normalement la blouse inférieure
est blanche et celle du dessus bleu indigo comme on peut le voir sur la
figure 18 (p. 69), l'armature de la figure 17 (p. 69) mais habillée
(catalogue 2.3, X.66.1.42, p. 269). Mais il arrive que les tissus aient une
autre couleur. Une poupée-homme porte un manteau beige avec
capuchon. Les enfants ont utilisé, comme tissu, des cotonnades, de la
soie mercerisée et de la gaze blanche.
A la manière des Touaregs nobles qui portent des cordons de noblesse,
la plupart des poupées-hommes sont ornée de fils de laine ou de coton se
croisant sur la poitrine en guise de baudrier. Ces fils de laine ou de coton
sont de couleur blanche, rouge, bleue, verte, jaune. Lorsque les poupées
portent une ceinture, elle se constitue des mêmes fils de laine ou de
coton (fig. 3, p. 55). Le baudrier et la ceinture sont rarement en gaze (fig.
19, H = 23 cm; catalogue 2.3, 34.52.43, p. 269).
Une poupée-homme, d'un enfant touareg Kel Iforas, porte une culotte
en tissu multicolore, une blouse bleu indigo, un baudrier et une ceinture
de fils de laine verte, rouge et blanche fig. 20).
19 20
71
Le cou est brodé de coton blanc, indigo, rouge, jaune et vert. Un petit
écheveau de coton indigo imite la chevelure (fig. 20, p. 70, H = 17 cm;
catalogue 2.3, 38.16.43, p. 269).
Cette manière de broder le cou de fils multicolores se retrouve chez
plusieurs poupées-hommes. D'autres poupées ont le cou et la tête
enveloppés de tissu monochrome. Certains Touaregs en miniature
portent un turban, d'autres ont la tête entourée de fils de coton ou de
laine de couleur variée comme le montrent les figures 3 (p. 55), 14 et 15
(p. 67). Par la manière typique dont les enfants entourent de fils la tête
des poupées-hommes, ils imitent la coiffure typique des hommes
touaregs avec les cheveux tressés et ramenés en arrière. Pour cette
coiffure voir Lhote, 1944: 289, pl. XIV.
Deux poupées-hommes touarègues Kel Ahaggar ont la tête entourée
de papier d'argent avec l'imitation de la coiffure au-dessus (catalogue
2.3, 41.19.106/107, p. 269)
Il est à remarquer qu'aucune de ces poupées-hommes porte des traits
de visage, ce qui s'accorde avec la règle générale pour les poupées-
hommes sahariennes et nord-africaines.
Quelques Touaregs d'imitation portent l'épée. L'importance de la
takouba - cette épée touarègue - dans l'esprit du garçon, qui a fabriqué la
poupée de la figure 14 (p. 67), se manifeste par sa taille. Pour une
description de la takouba voir Champault, 1980.
Il existe aussi des poupées-hommes qui figurent les guerriers maures.
Dans le catalogue “Poupées-jouets. Poupées-reflets” (1983: 74) sont
mentionnées deux poupées-hommes, de 7 cm de hauteur, offertes par G.
Duchemin à la collection de poupées du Musée de l'Homme. Il s'agit de
tiges de graminées revêtues par les enfants maures de Oualata, dans le
Sahara mauritanien, de la tunique et du turban des guerriers maures.
Jean Gabus parle lui aussi d'une poupée-homme lorsqu'il mentionne la
maison jouet de Oualata. Cet homme est fait d'un bâtonnet enveloppé
d'étoffe et “selon la taille du bâtonnet, l'homme est de plus ou moins
grande importance sociale” (1958: 163).
72
Vu que les deux poupées-hommes de Oualata offerte par G.
Duchemin au Musée de l'Homme n'ont pas été retrouvées, un dessin sur
échelle réduite des deux croquis figurant dans le livre de Gabus est
reproduit à la figure 21 (1958: 163, croquis: 134).
1.7 Les poupées-jeunes mariés
En parlant des poupées-guerriers, j'ai noté que selon certains auteurs, les
enfants des Touaregs Kel Ahaggar et Kel Iforas marient, suivant le
cérémonial d'usage, les poupées-hommes faites par les garçons avec les
poupées-femmes construites par les filles.
En plus Francis Nicolas (1950: 186) parle de poupées-hommes en
argile qui représentent et se nomment “ashlu, le marié”, ceci chez les
enfants des Touaregs Ioullemeden (Touaregs Kel Dinnik, Sahara/Sahel
du Niger).
Parfois, bien que cela soit assez exceptionnel dans la seconde moitié
des années soixante-dix, les filles Ghrib du Sahara tunisien
confectionnent à partir de l'âge d'environ sept ans, un jeune marié d'une
hauteur d'à peu près 15 centimètres avec une armature de deux bâtonnets
reliés en forme de croix (fig. 22, p. 73).
21
73
Cette poupée-jeune marié sans traits de visage est habillée par les filles
de chiffons blancs et coloriés servant de sous-vêtements et de vêtements
d'homme. Sur la tête elles lui mettent un petit bonnet fait d'étoffe rouge,
faisant figure de kabbûs, et éventuellement un morceau d'étoffe blanche
ou kaki comme turban. A la ceinture elles attachent souvent un bâtonnet
pointu représentant l'épée, cet objet distinctif que porte le nouveau marié
ghrib pendant les noces.
Les fillettes des nomades chaamba (Sahara Nord-occidental)
confectionnent, elles aussi, une poupée-homme figurant le jeune marié
(fig. 23, p. 74) et tout comme le jeune marié lui-même, cette poupée
s'appelle asri (catalogue, 2.4, p. 274). Sur une 'âme' d'os un bâtonnet est
ligaturé en croix pour figurer les bras. Comme vêtements, faits de
chiffons blancs, le jeune marié porte une longue blouse, un turban et un
manteau d'homme. La ceinture et le baudrier sont en fils de laine rouges
et verts. Le visage n'est pas indiqué.
Dominique Champault mentionne concernant les poupées des fillettes
belbala (Sahara algérien) que de “très rares poupées sont masculines et
portent burnous (manteau d'homme), turban et, au côté, un petit sabre de
bois” (1969: 345). Selon une communication personnelle que m'a
22
74
transmise Dominique Champault en novembre 1991, ces poupées-
hommes belbala sont faites d'un os simple et non en forme de croix.
Il n'est probablement pas trop hasardeux de mettre ces poupées-
hommes belbala en rapport avec les poupées-jeunes mariés des filles
ghrib et chaamba.
En ce qui concerne la période de l'année pendant laquelle les filles
belbala jouent avec leurs poupées, Dominique Champault écrit que
comme dans la croyance populaire belbala la manipulation des poupées
appelle la pluie, on ne joue en principe à la poupée qu'en automne au
moment où la pluie est désirée (1969: 140).
Au Maroc, où les filles arabophones et amazighophones jouent
volontiers au mariage, certaines filles et femmes disent qu'une poupée-
jeune marié est confectionnée, mais il est aussi bien souligné par d'autres
qu'une pareille poupée-homme n'est pas utilisée.
23
75
Dans les années soixante-dix et selon la famille Skouri, une famille
d'enseignantes, les filles du milieu populaire du quartier Kbour Chou à
Marrakech utilisaient une poupée homme, le °arîs ou fiancé,
confectionnée avec deux morceaux de roseau assemblés en forme de
croix et vêtus à la manière des hommes. La confection de cette poupée-
jeune marié se trouve confirmée par une femme née à Marrakech il y a
environ soixante ans. Cette femme affirme qu'elle-même et les filles de
sa génération, c'est-à-dire dans les années quarante, faisaient un fiancé en
roseau pour qu'il se marie avec leur poupée-jeune mariée. Ce jeune marié
était vêtu du erza, le turban, du jellaba et du selhâm, le manteau.
En contraste avec ces données, des jeunes femmes de Douar Akioud,
un quartier périphérique très pauvre de Marrakech, m'ont dit avec
insistance qu'elles-mêmes et leurs amies n'utilisaient pas de poupée-
homme pour le jeu du mariage. Le mari de leur poupée-jeune mariée
n'existait que dans leur imagination. Vers la même période, le début des
années quatre-vingt, et dans le milieu amazigh de la petite ville d'Imi-n-
Tanoute c'est la même situation qui se présente. Le jeu du mariage de la
poupée-jeune mariée, se joue sans poupée-homme servant de fiancé.
Mais dans la campagne aux alentours de Taroudannt, une autre petite
ville du sud du Maroc, les filles arabo-berbères semblent bel et bien
jouer au mariage de leur poupée-jeune mariée avec son fiancé, le °arîs,
figuré par une poupée habillée en homme. Cette affirmation se réfère aux
filles des Oulad Yahya dans les années 1940 et aux filles d'aujourd'hui de
la région rurale Hmar à environ dix kilomètres de Taroudannt. La
poupée-jeune marié est dans cette région rurale vêtue d'un pantalon long
et d'un jellaba blanc à capuchon cintré avec une ceinture. Les filles
arabophones de Aïn Toujdate entre Fès et Meknès se créaient aussi une
poupée-jeune marié vers 1987.
Une fille amazighe d'environ huit ans, habitant le petit village Aït
Hmed ou Yacoub à 4 km de Khemisset près de la route vers Sidi
Slimane, fait elle aussi en octobre 1996 une poupée-jeune marié ou isli
pour jouer au mariage avec une ou plusieurs de ses copines. Entre 1975
et 1985 des filles amazighes du village Ksar Assaka près de Midelt
utilisaient une poupée-jeune marié ou isli pour leur jeu de poupée
représentant les cérémonies de mariage tout comme les filles amazighes
du village Magaman près de Goulmima le font en 1996. Une des
poupées faites par les filles de ce village représente le jeune marié. Ce
76
n'est qu'une poupée vite faite avec une petite armature en forme de croix
de deux bâtonnets vêtue d'un chiffon transparent (fig. 101 en bas côté
droit, p. 153).
Une description détaillée de ces jeux de mariage de la poupée-jeune
marié avec la poupée-jeune mariée au Maroc se trouve dans les pages sur
les poupées-femmes marocaines.
Une dernière poupée-homme (fig. 24), qui me semble tout à fait
particulière, m'a été présentée en octobre 1992 par un garçon scolarisé de
dix ans du petit village amazigh Aït Ighemour situé à 8 km de la
montagne Jbel Siroua dans le Haut Atlas. Ce village se trouve à 2600 m
d'altitude et à la fin d'une piste de 36 km partant du village Anezal sur la
route d'Amerzgane à Tazenakht dans la province de Ouarzazate.
Les données sur cette poupée-homme, ainsi que toutes les autres
informations sur les enfants de ce village furent recueillies avec l'aide
d'un instituteur amazigh d'Essaouira, Ihbous Nour-Eddine né en 1967,
qui à ce moment là enseignait depuis deux ans dans l'école du village.
24
77
La poupée-homme en question n'est pas seulement remarquable pour
sa hauteur d'environ un mètre et sa tête en courgette mais aussi pour les
activités ludiques dans laquelle elle est utilisée. Selon le garçon qui a
confectionné cette poupée-homme, elle est utilisée par les garçons pour
représenter les jeunes hommes qui la nuit assistent avec les jeunes
femmes à la danse ahwash, la danse traditionnelle de la région de
Ouarzazate. Ils célébreraient aussi le mariage de cette poupée-homme,
qui d'ailleurs s'appelle isli ou jeune marié, avec une grande poupée-
femme qui porte le nom de tislit ou jeune mariée. Je mentionne ces
informations avec une certaine réserve car il faudrait encore les
confirmer et les compléter auprès d'autres garçons et filles de ce village.
L'armature de cette poupée-homme consiste en une branche d'environ
un mètre de long auquel est ligaturé en forme de croix un roseau
d'environ 40 cm de long. Une grande courgette takhsaït est enfoncée en
haut de la branche verticale. Dans cette courgette le garçon a fait des
incisions pour les sourcils, et des creux pour les yeux, le nez et la
bouche. Les incisions pour les sourcils et le creux pour la bouche sont
noircis avec le khol, un produit de beauté. Dans le creux des yeux se
trouve un morceau de pomme de terre avec la pelure rouge tournée vers
l'extérieur et dans celui du nez un morceau du fruit de l'arbre iqurran de
couleur jaune. Une rondelle de plastique rouge, utilisée à l'école pour
apprendre à compter, poussée dans la bouche sert de langue. Cette
poupée est vêtue d'un sous-vêtement rouge et un survêtement blanc à
capuchon qui normalement est porté par un garçon. Sur la tête et autour
du cou un foulard a été mis. Ainsi vêtue cette poupée-homme met en
scène un jeune marié ou un jeune homme qui va à la danse 'ahwash'.
Cette poupée est fabriquée pendant la période de la récolte des courgettes
et des pommes de terre, c'est-à-dire en automne.
L'existence à Guelmim de pareilles poupées-hommes à tête en
courgette faites par des garçons a été confirmée par un informateur
originaire de cette ville pour le début des années 1970. A Guelmim, qui
alors n'était qu'un village, cette poupée-homme servait cependant
d'épouvantail dans les champs.
79
2 Les poupées-femmes
2.1 Résumé
Les poupées-femmes sont beaucoup plus répandues en Afrique du Nord
et au Sahara que les poupées-hommes. Elles sont très importantes dans la
vie des enfants, surtout des filles, aussi bien chez les populations
nomades que sédentaires.
En provenance de populations nomades, la collection du Musée de
l'Homme possède des poupées-femmes recueillies auprès des Touaregs,
des Maures et des Regeybat, et moi-même j'en ai trouvé chez les Ghrib.
En ce qui concerne les populations sédentaires vivant au Sahara ou en
Afrique du Nord, la collection du Musée de l'Homme montre des
poupées-femmes provenant des Belbala, de la Vallée de la Saoura, des
Teda, des Chaouia, du Mzab, du Maroc et de la Tunisie.
La bibliographie confirme l'existence de poupées-femmes chez toutes
ces populations mais n'en mentionne pas chez d'autres populations
exception faite pour les Sahraouis, les Amazighs Beni Snous de la région
de Tlemcen et des habitants de cette ville algérienne (voir 2.13 Les
poupées-femmes du nord-ouest algérien, p. 116).
Mes recherches dans le centre et le sud du Maroc, de 1992 à
aujourd'hui, ont apporté des informations sur les poupées-femmes faites
par des filles arabophones et amazighophones et exceptionnellement
aussi par quelques garçons amazighophones.
La poupée-femme la plus ancienne de la collection est de 1934 et
appartenait à une fille touarègue Kel Ajjer. Les mentions les plus
anciennes dans la bibliographie consultée datent de 1905 pour les
Amazighs marocains, de 1906 pour les Amazighs chaouia et de 1908
pour les Touaregs.
Les poupées-femmes sont le plus souvent confectionnées par les filles
elles-mêmes, parfois par une mère, une sœur aînée, une servante ou une
cordonnière. Les garçons ne jouent avec ou ne confectionnent des
poupées-femmes que chez les Touaregs et chez les Chaouia, deux
populations amazighes. Des informations que j'ai obtenues en 1993 au
Maroc démontrent cependant que là aussi il peut y avoir des endroits où
des garçons font une poupée-femme.
80
La plupart de ces poupées représentent des jeunes mariées. Parfois il
s'agit de femmes mariées, de mères, de jeunes filles et
exceptionnellement d'une vieille femme ou d'une divorcée. Ces poupées-
femmes servent à des jeux qui représentent la vie des adultes. Il est
question de jouer au ménage, de représenter des fêtes et autres réunions
importantes, de figurer une grossesse, un accouchement, un enterrement
ou des noces, où parfois un jeune garçon sert de marié à la place d'une
poupée-jeune marié.
Dans la confection des poupées-femmes bon nombre de matériaux
sont utilisé. Pour l'armature il s'agit de pierres plates, d'os, d'argile crue
ou cuite, de sable, de matières végétales comme les bâtons, le roseau, les
fibres ou feuilles, la paille, la pâte de gomme et les dattes, l'épi de maïs,
les chiffons, le cuir et même les crottes de chèvre, de mouton, d'âne ou
de dromadaire. Pour les autres attributs l'on utilise les mêmes matières
végétales, des étoffes, des fils de laine ou de coton, du cuir, des cheveux
naturels, des poils de chèvre ou de mouton, des perles, des cauris, des
coquillages, du métal blanc, du cuivre, du papier argent, des pièces de
monnaies, de la peinture, du khol, de l'encre et du stylo. Il reste encore à
mentionner dans la collection du Musée de l'Homme des petites poupées
en vannerie servant de jouets aux enfants de la Vallée de la Saoura et de
la région de Ouargla mais dont nulle trace n'a été retrouvée, bien qu'elles
soient mentionnées dans le catalogue de l'exposition “La Vie du Sahara”
(1960: 74).
La forme de base des poupées-femmes sahariennes et nord-africaines
se limite à trois types comme on peut le voir à la figure 25. D'abord il y a
la poupée en position debout avec une armature verticale faite d'un os ou
d'un ou plusieurs bâtonnets, avec ou sans bâtonnet horizontal pour
figurer les bras et parfois avec deux jambes séparées.
25
81
Ce type de poupée se retrouve aussi bien chez les populations
nomades que sédentaires. Du même type est la poupée-cuillère qui bien
qu'elle soit d'ordre rituel sert aussi comme poupée d'enfants (voir 2.15
Les poupées-femmes tunisiennes (p. 205) ainsi que Rossie and
Daoumani, 2003, Video 1).
Ensuite il existe la poupée assise, trouvée uniquement chez les
populations nomades, qui est faite de la même manière mais l'armature
verticale est fixée dans un support représentant les fesses. L'on trouve
aussi des poupées montrant la même forme mais modelée en argile.
Finalement il y a un autre type de poupée en position debout, faite
d'étoffe bourrée de paille ou de chiffons, et qui n'est signalé qu'auprès de
populations sédentaires, le plus souvent citadines. Dans ce cas, la tête, le
corps, les bras et/ou les jambes sont des pièces séparées. La poupée en
plastique, parfois utilisée comme armature au Maroc, reproduit la même
forme. Chez les Mozabites la tête de poupée, importée, est en papier
cartonné.
Toutefois, Sigrid Paul (1970: 118, 208: fig. 96) nous montre une
poupée algérienne d'un tout autre type que ceux décrits plus haut. Cette
poupée très stylisée est découpée dans un morceau de bois, sauf les deux
jambes en forme de bâton qui y sont ajoutées. Malheureusement l'auteur
ne donne aucune précision ethnique ou géographique, mais il apparente
cette poupée aux poupées-femmes de l'Afrique du Nord-Est.
La poupée-femme la plus petite, dont j'ai trouvé trace, mesure 2 cm
(Maures de Oualata), la plus grande 58,5 cm (Mozabites).
Les vêtements et parures des poupées-femmes sahariennes et nord-
africaines imitent ceux des femmes adultes. Les cheveux revêtent
souvent une grande importance et parfois des cheveux naturels ont été
utilisés.
Bien que la forme des poupées-femmes reste assez simple, certains
détails peuvent être mis en relief, comme par exemple pour les seins, les
fesses et la tête. Le plus souvent il s'agit d'une représentation réaliste
d'une femme, mais ici et là une approche fantaisiste se remarque.
Contrairement à presque toutes les poupées-hommes, certaines
poupées-femmes ont des traits de visage et des tatouages faciaux. Les
poupées-femmes des enfants touaregs, ghrib, maures, regeybat, teda,
chaouia et de la Vallée de la Saoura n'ont pas de traits de visage. Chez
les Maures, les Regeybat et surtout les Teda de petites perles sont posées
82
de manière géométrique ou fantaisiste sur le visage. Chez les poupées-
femmes belbala et Mozabites et chez certaines poupées marocaines et
tunisiennes, les yeux, les sourcils, le nez, la bouche et/ou le tatouage
facial sont indiqués. Chez les Ghrib, où normalement les traits de visage
n'étaient pas indiqués, des frères dessinaient en 1975-1977 un visage sur
la poupée-mariée de leurs sœurs. Je me demande si cette rupture avec la
tradition, sous l'influence de l'école, est aussi l'explication pour
l'existence de poupées-femmes à visage dessiné signalées par Jean
Gabus en 1958 auprès des Maures de Boutilimit dans le sud-ouest de la
Mauritanie.
Les poupées-femmes sont certainement plus colorées que les poupées-
hommes. Les poupées-femmes monochromes sont rares. La plupart de
ces poupées-femmes sont assez colorées et certaines sont très colorées à
cause de leurs vêtements et parures multicolores.
2.2 Les poupées-femmes touarègues
Des poupées-femmes d'enfants touaregs Kel Ahaggar (Sahara algérien),
Kel Ajjer (Sahara libyen), Kel Aïr (Sahara du Niger) et Kel Iforas
(Sahara malien) figurent dans la collection du Musée de l'Homme. Selon
Nicolas (1950: 186) des poupées en argile qui représentent la fiancée ou
la jeune mariée se retrouvent aussi chez les Touaregs Ioullemeden
(Sahara du Niger).
La poupée-femme touarègue la plus ancienne de la collection date de
1934. Cependant Cortier mentionne déjà en 1908 que les petites filles
touarègues Kel Iforas confectionnent des figurines qu'elles habillent en
femme ou en enfant (p. 310).
Non seulement les filles touarègues mais aussi les garçons font des
poupées-femmes. Ceci n'est pas révélé uniquement dans le fichier de la
collection et dans la bibliographie mais prouvé par le fait qu'Henri Lhote
a collectionné une poupée-femme fabriquée par un garçon Kel Ahaggar
et que cet auteur décrit une pierre plate peinte vers 1960, suivant
l'exemple des peintres européens relevant des peintures rupestres au
Tassili n'Ajjer, par un garçon touareg de manière à représenter une
femme assise et en tenue de cérémonie.
83
Balout écrit qu'à côté des enfants, les femmes et les servantes
confectionnent-elles aussi des poupées (1959: pl. LXVI1).
Toutes ces poupées-femmes des enfants touaregs sont caractérisées
par une position assise. Dès lors elles sont dénuées de jambes comme le
note déjà Cortier en 1908 (p. 310). “La femme étant de tradition toujours
sous la tente, la poupée est toujours assise ; elle n'est jamais représentée
debout, alors que l'homme est toujours représenté debout et près de son
chameau” (Balout, 1959: pl. LXVII).
Les fesses des poupées sont très développées car ceci est une marque
de beauté et d'aisance (fig. 26, catalogue 3.1, 36.44.73, p. 275). Ainsi la
poupée est un moyen d'inculquer dans l'esprit de l'enfant touareg, l'idéal
de la beauté féminine. Un idéal qui était provoqué chez les filles Kel
Iforas riches en les faisant suivre vers l'âge de 12 ou 15 ans un régime
basé sur une nourriture et un repos abondants (Cortier, 1908: 310).
A part la mention de Charles de Foucauld que les enfants touaregs Kel
Ahaggar taillent grossièrement des pierres plates en forme de femme
pour leur servir de jouet (1951-1952: 350) et exception faite des
poupées-femmes en argile des enfants touaregs Kel Ajjer et Ioullemeden,
l'armature des poupées féminines se fait suivant un modèle assez
uniforme chez les différents groupes touaregs (fig. 27).
26 27
84
Selon les données bibliographiques et celles tirées de l'étude des
poupées, le corps est formé d'une base proéminente dans laquelle se
trouve fixée une épine, une tige sèche, un morceau de bois, un os de
mouton, de chèvre ou de gazelle. La base massive se constitue d'un petit
sac de sable ou d'un chiffon bourré de paille, de chiffons, de crottes de
dromadaire ou d'âne. Cette base peut aussi être faite d'une à cinq boules
d'argile entourée de tissu ou de gaze. La base la plus élaborée est
fabriquée de cinq boules d'argile, deux pour les fesses, deux pour les
seins et une pour la taille. Une ou deux branchettes forment les bras mais
parfois les bras manquent (fig. 28).
La hauteur minimale de ces poupées-femmes touarègues est 6,5 cm, la
hauteur maximale 16,5 cm.
Les vêtements des poupées imitent ceux des femmes touarègues
comme décrits par Henri Lhote (1944: 268-269).
Les femmes touarègues ne portent pas de pantalons, mais elles ont un
jupon de toile blanche enroulé autour des reins. Celles de l'Ahaggar
portent dessus une grande blouse en toile blanche, semblable, pour la
forme, à celle des hommes, mais fermée sur les côtés. Les femmes
aisées en portent une deuxième par-dessus, en toile indigotée... Elles
ne se voilent pas la figure comme les hommes et portent une petite
mantille faite d'un ou deux toukourdi avec lesquelles elles s'entourent
la tête et la figure dont elles dissimulent les traits devant l'étranger.
Pour une description détaillée des vêtements et des bijoux touaregs voir
Foley (1930: 23-29) et de Foucauld (1951-1952: 867 et 995). Cet auteur
28
85
décrit aussi la coiffure féminine (p. 1241-1242). Une belle photo d'une
femme touarègue est à voir dans La Vie du Sahara (1960: pl. 5).
Une ou plusieurs pièces de
tissu, de préférence de couleur
blanche ou bleue indigo
enveloppent l'armature des
poupées. Ainsi une poupée porte
quatre blouses longues en tissu
blanc, indigo, blanc, indigo
(catalogue 3.1, 41.19.128, p.
275). Quelques poupées portent
une mantille (fig. 29, H = 13,7
cm; catalogue 3.1, 41.19.123, p.
275) mais la tête des autres est
découverte (fig. 30, H = 15 cm;
catalogue 3.1, 41.19.122, p. 275).
Les cheveux de la poupée de la figure 30 sont en fils bleus tressés. Les
cheveux des autres poupées sont faits de fils de coton ou de laine ou avec
des rubans. Il arrive que
la fillette ait utilisé un
peu de ses cheveux.
Certaines poupées ont le
cou entouré de fils verts,
bleus, rouges, blancs ou
jaunes, comme pour la
poupée de la figure 30.
Comme dans le cas des
poupées-hommes des
enfants touaregs, leurs
poupées-femmes n'ont
jamais de traits de
visage.
Quelques poupées portent comme bijoux un collier de perles et une
chaînette. D'ailleurs Charles de Foucauld y fait mention dans son
Dictionnaire Touareg-Français au mot “loullou ... petit bijou, mot
enfantin, les très petits enfants qui commencent à parler appellent loullou
29
30
86
toutes les petites choses précieuses à leurs yeux, les petits colliers qu'on
leur met ou qu'ils mettent à leurs poupées” (1951-1952: 1067).
Une poupée touarègue Kel Ajjer, datant de 1934 et provenant de Ghât
en Libye, porte comme boucles d'oreilles deux médailles avec sur une
face le Sacré-
cœur et sur la
face opposée la
Sainte Vierge
(fig. 31, H = 10
cm; catalogue
3.1, 37.21.29, p.
277). Concernant
l'utilisation de ces
médailles il est à
remarquer qu'il
n'y avait pas de
Pères Blancs dans
cette région.
La description de Maurice Cortier des poupées-femmes des filles
touarègues Kel Iforas ressemble tout à fait à celle des poupées décrites
ci-dessus. Cet auteur écrit en 1908 (p. 310) :
On prend un os, propre et blanc, gros comme un crayon et long d'une
dizaine de centimètres. Un morceau de bois croisé à mi-longueur
représente les bras. Une sorte de sac bourré de chiffons figure le
corps dénué de jambes. La partie de l'os servant de tête est entourée
d'anneaux de fils de diverses couleurs entre lesquels apparaît la
surface blanche. Les vêtements consistent généralement en un ikerchei
ou un tameng'out (voile) placé sur la tête et une gandourah (blouse
longue) couvrant le corps.
Dans Au cœur du Hoggar mystérieux. Les Touaregs tels que je les ai vus,
E. Steinilber-Oberlin décrit en 1934 quelques jeux des enfants touaregs
entre autres le jeu de poupée. Cet auteur écrit à ce sujet (p. 83-84) :
Ils excellent à confectionner avec des bouts de bois, des os de chèvres
et des chiffons, des petits pantins qu'on appelle isounar. Les filles
31
87
fabriquent des isounar-femmes et les garçons des isounar-hommes.
Des lambeaux de cotonnade ont vite fait de simuler la takemmist
masculin ou l'ekerhei féminin. La figure de la poupée est toujours fort
négligée et ne se compose guère que d'un tampon d'étoffe. Comment
s'en étonner? Les hommes étant toujours voilés, leur représentation
s'en trouve simplifié, et un morceau d'étoffe fixé sur la tête du pantin
et tombant jusqu'à son extrémité suffira à caractériser le sexe féminin.
Réduits à ses lignes essentielles, le jouet n'en est que plus curieux… Il
est courant qu'un gamin et une fillette s'amusent à faire convoler en
justes noces leurs isounar respectifs. Désormais, légitimement unis, le
pantin-homme et le pantin-femme ne se quittent plus, dorment
ensemble sous des abris minuscules symbolisant la tente et se
querellent continuellement, ce qui prouve bien qu'ils sont mariés.
Une poupée collectionnée en 1938 auprès d'une fille touarègue Kel
Iforas mais dont ne subsiste qu'un croquis dans le fichier, est faite d'un
petit morceau de tissu bleu enroulé autour d'une crotte de dromadaire,
figurant le corps et surtout les seins d'une femme. Une épine de talha
piquée dans la crotte supporte deux mèches de coton bleu qui imitent les
cheveux (fig. 32).
Ekhya Ag-Sidiyene, un
chercheur touareg Kel Iforas né
en 1952 dans un campement à
environ 100 km du centre
urbain de Kidal au Sahara
malien et correspondant du
Muséum d'Histoire Naturelle de
Paris pour cette région, que j'ai
rencontré au Département
d'Afrique Blanche du Musée de
l'Homme le 7 juillet 1981, m'a
donné des renseignements
supplémentaires sur cette forme typique de poupées-femmes. Les
poupées 'tanet n-meshlân', c'est-à-dire femme-jouet, ont un corps de
crotte d'âne enveloppé d'une pièce de tissu. Cette crotte représente les
fesses obèses de la femme aisée. Deux épines, entourées de fils de coton
mercerisé multicolore, sont fixées dans la crotte. Cette poupée porte des
32
88
vêtements d'étoffe indigo, le voile ne couvrant pas le visage.
Anciennement on utilisait aussi des peaux et des feuilles larges comme
vêtements pour cette poupée. Les cheveux sont des mèches de coton
fixées comme ont le voit sur le croquis de la figure 32 (p. 87). Parfois
une ou plusieurs perles ornent le dessus de la tête. Les poupées bien
élaborées ont des dessins stylisés qui représentent la poitrine. Ces dessins
sont faits avec des fils de coton multicolores qui contournent des épines
fixées dans la crotte. Ekhya Ag-Sidiyene dessinait l'exemple montré à la
figure 33. Selon lui, les traits géométriques sur le croquis de la poupée de
la figure 32 (p. 87) auraient eux-aussi été faits pour représenter les seins.
Le modèle simple, avec une épine plantée dans une crotte mais sans
vêtements ni dessin géométrique pour représenter les seins, est une
fillette.
Sur la photo d'une poupée-femme touarègue de la collection montrée à
la figure 34, et qui fut faite par une fillette Kel Iforas, l'on voit aussi un
dessin géométrique marquant la poitrine (H = 13,5 cm).
Des poupées-femmes en argile se retrouvent auprès des enfants touaregs
Kel Ajjer et Kel Ioullemeden. Chez les Touaregs Kel Dinnik des
Touaregs Kel Ioullemeden (région sahélienne de Tahoua, Niger) les
enfants font aussi des poupées-femmes en argile appelée “tashlut, la
fiancée, mariée” (Nicolas, 1950: 186) .
33 34
89
René Pottier a recueilli, lors de sa
mission chez les Touaregs Kel Ajjer
en 1934, une poupée-mère de couleur
grisâtre (fig. 35, H = 13 cm, D base =
6,5 cm) et son enfant de couleur
brunâtre (H = 7 cm, D base = 3,5 cm)
en terre cuite (catalogue 3.1,
37.21.102.1/2, , p. 277).
La forme typique de ces poupées
est basée sur un corps massif sans
jambes et deux protubérances
coniques figurant les bras,
correspondent ainsi à la forme des
autres poupées-femmes touarègues.
Le cou et la tête s'allongent à partir du
corps sur environ un tiers de la
hauteur de la poupée. Sur la tête des
poupées, surtout la poupée-mère, il
me semble que ce sont des tresses de
cheveux qui sont modelées, bien que
la surélévation allongée au milieu de la face fasse penser à un nez.
Ces poupées-femmes touarègues, pour lesquelles ont été avancées les
noms de 'aknar' chez les Touaregs Kel Ahaggar, 'taknart' chez les
Touaregs Kel Ajjer et Kel Aïr ou 'tamet n-meshlân' chez les Touaregs
Kel Iforas, sont mariées aux poupées-hommes (Cortier, 1908: 310;
Foley, 1930: 47). Mais il se peut que, comme dans la région de
Tombouctou où nomadisent les Touaregs Ioullemeden Kel Tademekkat,
les poupées-femmes “font l'objet d'une cérémonie de mariage de la
poupée à un jeune garçon” (Gabus, 1967: 112).
Les poupées-femmes forment avec les poupées-hommes et les
animaux-jouets des enfants touaregs, tous plantés dans le sable, les
personnages d'un petit théâtre où les enfants s'initient à la vie des adultes.
Une poupée-femme peut aussi être mise sur un dromadaire-jouet
(Balout, 1959: pl. LXXI; Paul, 1970: 110, 207 - fig. 95).
35
90
Ces poupées-femmes représentent éventuellement des femmes assises
à l'ahâl auquel les garçons et les filles peuvent participer à partir de l'âge
de seize ans environ. Henri Lhote (1944: 238) décrit l'ahâl de la manière
suivante (voir aussi Claudot-Hawad, 1986) :
Le mot ahal signifie réunion, conversation, entretien... Ces réunions
musicales et littéraires ont un caractère plus ou moins particulier,
suivant qu'elles sont mêlées d'asri ou non. L'asri, littéralement courir
à bride relâchée, signifie la pratique de certaines mœurs très libres, et
vivre en état d'asri, c'est être dans des conditions permettant de
pratiquer la liberté de mœurs. Peuvent être en état d'asri, les jeunes
gens et jeunes filles pubères, les veufs et les divorcés des deux sexes
Comme déjà mentionné, Henri Lhote nous décrit une poupée-femme
peinte vers 1960 par un garçon touareg sur une pierre (fig. 36). Ce
garçon, comme d'autres, s'inspirait des techniques des peintres européens
qu'il voyait relever des peintures rupestres ornant les parois des abris
sous roche du Tassili N'Ajjer.
L'exemple de cette poupée, dont la description donnée par cet auteur
(Lhote, 1975: 407-408) se trouve ci-dessous in extenso, démontre
parfaitement la continuité et la transmission intergénérationnelle des
formes et des valeurs à travers les jeux et les jouets.
36
91
Un jour, notre guide Djébrine m'apporta trois pierres peintes et me
les offrit en m'expliquant que cela avait été fait par des enfants de son
campement, sans pouvoir, toutefois, me préciser lesquels, car ces
objets avaient été abandonnés dans un abri, comme la plupart des
jouets. L'une de ces pierres était un galet en grès, de forme
approximativement triangulaire, de 4,5 cm de haut, 4,3 cm. à la base
et d'une épaisseur de 8 à 10 mm environ. Les surfaces étaient bien
planes, les côtés avaient été régularisés et polis, sauf celui formant la
base, dont les angles avaient été arrondis. Avec un peu d'imagination,
le profil suggérait une femme assise, les jambes repliées sous elle, à la
manière des femmes touarègues installées sous leur tente ou lors des
fameuses réunions musicales et poétiques, connues sous le nom
d'ahal. C'est dans cette même position que sont fabriquées les poupées
figurant des femmes, l'assise réalisée à l'aide de deux crottes de
chameau, recouvertes d'un petit morceau de chiffon, évoquant ainsi
les rondeurs glutérales de la Targuia. Et, en effet, le jeune artiste,
brimé par la modestie de la surface à sa disposition, avait situé la tête
au sommet du triangle, qu'il avait matérialisée par deux points
représentant les yeux, surmontés de deux traits obliques, figurant les
sourcils, un troisième point pour le nez, un ovale pour la bouche, le
tout tracé avec de la gouache noire récupérée d'un de nos tubes
pratiquement vide. La tranche du triangle partant du sommet du crâne
avait également été peinte en noir pour simuler les cheveux. La
coiffure des femmes touarègues du Hoggar et du Tassili comportant
deux nattes latérales, une de chaque côté, celles-ci avaient été
figurées par deux larges traits noirs, marqués de points à l'ocre rouge
dans l'évidement interne, afin d'indiquer les chaînettes d'argent à
l'extrémité desquelles sont suspendus de petits pendentifs de
chevelure, ordinairement triangulaires, mais qui sont aussi semi-
ovalaires dans le modèle porté par les femmes de Rhat, assez souvent
adopté par celles du Tassili. Ici, ils sont grossièrement arrondis et
peints à l'ocre rouge. L'enfant-artiste a voulu représenter une femme
en tenue de fête, et c'est pourquoi il l'a pourvue de lourds anneaux
d'oreille en argent, qui ne passent pas dans le lobe, mais sont
maintenus en place par une lanière de peau placée sur le sommet de
la tête, qui les maintient à bonne hauteur : ils ont été tracés par un arc
de cercle noir, doublé d'un point au centre à l'ocre rouge et d'une
92
série de petits points noirs. Sur la poitrine, enfin, un pendentif
triangulaire, comme en portent toutes les femmes touarègues du
Hoggar et du Tassili, est peint en noir, avec doublure du trait à l'ocre
rouge et d'une série de points noirs, comme pour les anneaux
d'oreille. Un petit trait noir, en zigzag, encadré par trois points placés
en triangle, à l'ocre rouge, représente, sans doute, une amulette ou
une pendeloque de peau. Sur l'autre face du galet, pour que l'image
soit complète, un gros trait en noir figure la grosse natte qui tombe
dans le dos, à l'extrémité de laquelle est peint, à l'ocre rouge, un
pendentif de chevelure. L'ensemble s'il ne reflète pas un grand art,
n'en est pas moins très suggestif : cette figuration de femme, en tenue
de cérémonie, accroupie comme pour recevoir l'hommage des jeunes
gens, témoigne de la préoccupation des garçons, dont certains - et
nous en avons connu - sont déjà capables de faire des vers, soit pour
vanter certaines femmes, soit pour se moquer de celles qui ne leur
accordent pas encore assez de considération et les traitent en gamins.
2.3 Les poupées-femmes ghrib
Les filles ghrib du Sahara tunisien jouent à partir de l'âge d'environ trois
ans avec une poupée-femme faite par leur mère, une sœur aînée ou une
tante. Cette poupée s'appelle et représente el °arûs ou la jeune mariée.
Cependant, une fille de huit ans m'a montré une petite poupée qui, selon
elle, figure une vieille femme.
A partir de l'âge de six ans les filles commencent à confectionner
elles-mêmes leurs poupées, ce qui demeure une activité individuelle,
mais pour jouer aux poupées plusieurs filles se rassemblent
normalement.
Elles jouent avec ces poupées aussi bien dehors qu'à l'intérieur et les
utilisent le plus souvent dans le cadre des jeux de ménage. Pour ces jeux
les filles emploient, en plus des poupées, encore d'autres jouets de leur
fabrication propre comme une tente en miniature (fig. 1, photo
couverture), un métier à tisser miniaturisé, des modèles réduits
d'ustensiles de cuisine, du moulin à bras, des nattes, etc. (voir Cultures
Ludiques Sahariennes et Nord-Africains. La Vie Domestique dans les
93
Jeux et Jouets). Quand les filles ont une poupée-jeune mariée et une
poupée-jeune marié, elles peuvent fêter leur mariage.
Pour construire une poupée les fillettes utilisent un morceau de bâton
d'un diamètre d'à peu près deux centimètres et un bâtonnet, des chiffons
et des fils de couleurs variés, du poil de chèvre, des fils de fer, des
épingles, des morceaux de fer-blanc et d'aluminium...
Pour faire l'armature de la poupée, la partie supérieure du bâton est
fendue et une moitié en est découpée à la hauteur d'environ deux doigts.
Ainsi le haut du bâton obtient une face aplatie et une fois entourée
d'étoffe blanche, il servira de tête de poupée. En dessous de cette tête,
mais avant qu'elle ne soit enveloppée d'étoffe blanche, la fille fixe en
croix le bâtonnet au bâton avec un petit ruban, cela pour donner des
'épaules' à sa poupée.
Les épaules et le corps de la poupée sont entourés de morceaux
d'étoffes de couleurs différentes représentant les sous-vêtements et les
vêtements d'une femme mariée. Sur les figures 37 et 38 on voit une belle
poupée et la fille qui l'a confectionnée.
37 38
94
Les cheveux de la poupée-jeune mariée sont faits de poils de chèvre et
sont tressés comme le font les femmes mariées, c'est-à-dire avec deux
longues tresses devant les oreilles. Un ou plusieurs chiffons en guise de
fichu coiffent la poupée. Enfin elle est ornée de bijoux en imitation des
bijoux qu'une femme reçoit de son futur époux. Ces bijoux d'imitation
sont confectionnés par la fille avec des fils de fer, des morceaux de fer-
blanc ou d'aluminium, des boutons et autres objets de ce genre (fig. 39).
Comme beaucoup de poupées-femmes touarègues, la poupée-femme
ghrib a souvent le cou entouré de fils multicolores (fig. 40 p. 94, 42 p.
95). La hauteur de ces poupées varie entre 15 cm et 25 cm, la poupée-
homme étant normalement plus petite que la poupée-femme.
Traditionnellement les poupées n'avaient pas de visage dessiné (fig. 37 p.
93, 39, 40 côté droit). Mais dans la seconde moitié des années 1960 il
arrivait parfois que l'un ou l'autre frère en âge d'école primaire employât
un crayon ou un stylo pour donner des yeux, des sourcils, un nez et/ou
une bouche à la poupée de sa sœur (fig. 41-42, p. 95).
39 40
95
Sur une poupée de la figure 40 (p. 94) se voit comment une fille a
essayé maladroitement à donner
un visage à sa poupée comme ont
fait les garçons (fig. 41, 42).
Vers 1990 une innovation dans
la confection des poupées s'est
présentée. Pour cela les filles se
sont appropriées un des rebuts de
la société de consommation, une
société de consommation qui a
réussi à s'approprier la
communauté Ghrib. Il s'agit de
l'utilisation d'un flacon de produit
de lessive ou autre liquide
comme tête de poupée en
introduisant le bâton vertical de
l'armature de la poupée dans le
col du flacon. La fille a dessiné
un visage élaboré sur le flacon (fig. 43).
41
41
42 43
96
Gilbert J.M. Claus, qui a pris cette photo en août 1991, m'a fait savoir
que les filles Ghrib font actuellement aussi une tête de poupée découpée
dans un morceau de carton, ou une poupée d'étoffe bourrée.
Les filles ghrib peuvent fabriquer leurs poupées en tout temps
contrairement aux filles des sédentaires de Tabelbala au Sahara algérien,
qui ne peuvent faire des poupées que durant le printemps et l'automne,
parce que cela provoquerait de la pluie pendant les autres saisons
(Champault, 1969: 345). Chez les Ghrib le rapport entre la confection
des poupées et la tombée de la pluie n'est pas fait.
Bellin (1963: 99, jeu n° 70) a observé chez les Kel Rela ou nobles des
Touaregs Kel Ahaggar (Sahara algérien) que non seulement les filles
mais aussi les garçons confectionnent des poupées-femmes. Bien que les
Ghrib furent en contact régulier avec les Touaregs, mes informatrices et
informateurs m'ont affirmé que les garçons ghrib ne confectionnent pas
de poupées-femmes ni ne jouent avec elles.
2.4 Les poupées-femmes maures
Chez les Maures de
Tidjikdja au Sahara
mauritanien les filles et les
femmes font deux sortes de
poupées féminines. Un
premier modèle rappelle les
poupées-femmes touarègues
avec le corps fait d'un os de
pattes de mouton ou d'un
bâtonnet fixé dans un
coussin de chiffons.
Une poupée de la
collection du Musée de
l'Homme (fig. 44, H = 15
cm; catalogue 3.2, 69.70.7.5,
p. 278) dont la chevelure
abondante en fils de coton
noir coiffe l'os qui est 44
97
entouré de fils de coton disposé en bande rouge, jaune, rouge, jaune,
rouge, contraste avec les quatre autres poupées de la même série dont
deux ont une tête (fig. 45, H = 14,5 cm; catalogue 3.2, 69.70.7.1, p. 278)
et les deux autres une coiffure (fig. 46, H = 16 cm; catalogue 3.2,
69.70.7.4, p. 278) modelée en pâte de gomme et de charbon pulvérisé.
Si une tête de poupée est modelée, elle a une forme particulière. Dans
ce cas le visage est indiqué de manière fantaisiste avec des petites perles.
Les autres poupées n'ont pas de visage.
Ces poupées, excepté celle de la figure 44 (p. 96), ont de longues tresses
de coton ou de laine auxquelles des perles de couleurs variées se
trouvent enfilées. Elles portent normalement un survêtement indigo,
mais chez la poupée de la figure 44 il est en gaze blanche. La poupée de
la figure 45 porte en plus un voile blanc.
La belle poupée de la figure 46 concrétise parfaitement la description
de la coiffure et de la parure des femmes maures. Dans La Vie du Sahara
(1960: 38) il est du que le vêtement féminin :
45 46
98
Est un voile de cotonnade indigo, habilement enroulé et drapé autour
du corps et sur la tête mais laissant habituellement le visage
découvert... Le voile couvre une coiffure de nattes et de torsades
savantes, ornée de perles, de coquillages, de menus bijoux et de
talismans enfermés dans de petits sachets de cuir.
De ces cinq poupées trois représentent des femmes et deux des fillettes,
probablement les numéros 69.70.7.1 (fig. 45, p. 97) et 69.70.7.2, vu que
la coiffure et les bijoux des femmes (fig. 46, p. 97) leurs manquent.
On peut s'imaginer comment les filles maures jouent avec ces poupées
assises en regardant la figure 47 qui montre deux de ces poupées assises
sur une selle à baldaquin pour dromadaire. Ces poupées s'appellent
'amtsal' (La Vie du Sahara, 1960: 72).
47
99
Fernando Pinto Cebrián écrit en 1999 que les filles créent aussi bien
des poupées-femmes que des poupées-hommes appelées respectivement
'mint owzar' ou 'ould owzar'. Ils ont une forme schématique car, comme
le dit cet auteur, il est inacceptable pour l'Islam de représenter la figure
humaine. Cette forme schématique est alors rendue plus ou moins
réaliste en y joignant quelques objets. La poupée montrée sur la photo
couleur reproduite dans le livre a une structure faite d'un axe vertical qui
représente le torse de la poupée toujours figurée en position assise. Cet
axe consiste en un os de chèvre vêtue de chiffons noirs et blancs
représentant les vêtements de femme. La tête de la poupée est embellie
avec des bijoux comme cela se fait pour une jeune mariée ou 'aaris' (p.
113, photo n° 25).
Le second modèle montré à la figure 48 (H = 3,5/4 cm; catalogue 3.2,
38.48.50/51, p. 279) et 49 (H = 4/4 cm; catalogue 3.2, 983.52.1/2, p.
279) et que l'on trouve chez les enfants maures de Tidjikdja et chez ceux
de Oualata, représente une femme ou une jeune fille assise très
miniaturisée. Ces poupées, éventuellement habillées, sont en argile crue
peinte.
48 50
49
100
Selon Jean Gabus celle peinte en jaune est une femme noble ou une
femme maraboutique et celle peinte en rouge est la servante (1958: 163).
Charles Béart y ajoute qu'auprès des poupées-femmes de ce type se
trouvent “des enfants blancs (les Beïdanes) et ocrés (les Serviteurs)”. En
plus, il remarque que ces poupées “qui ressemblent si peu à des femmes
sont sexuées nettement” (1955: 96). Le dessin de la figure 50, qui
reproduit celui figurant dans l'étude de Charles Béart, nous montre la
base de ce type de poupées. La vérification des bases de ce genre de
poupées, conservées au Musée de l'Homme, démontre que cette pratique
d'indiquer les parties génitales n'est pas générale car ces poupées ne sont
pas sexuées.
A Oualata les filles jouent avec ces poupées miniaturisées dans la
maison de poupée, faite par des potières de cette ville, dont on voit un
magnifique exemple à la figure 51 (H = 9,5 cm, LO = 26 cm, LA = 22
cm). Jean Gabus propose plusieurs autres exemples (1958: 163-167)
ainsi que la description des maisons réelles de Oualata et l'explication
des motifs décoratifs qui les ornent (1958: 118-133; voir aussi Centre de
Recherches et d'Etudes sur les Sociétés Méditerranéennes, 1979: 143,
fig. 12).
51
101
En dehors de la région de Oualata, par exemple à Kaédi et
Nouakchott, une tente de
poupée avec tous les détails est
utilisée (Béart, 1955: 97)
comme c'est le cas chez les filles
ghrib.
Un troisième modèle de
poupée maure, appelée 'atme' et
confectionnée à Boutilimit dans
le sud-ouest de la Mauritanie,
est mentionné par Jean Gabus
(1958: 136, dessin n° 103a) .
Cette poupée se différencie
des poupées décrites ci-dessus
par sa tête en étoffe bourrée et
son visage dessiné avec bouche
triangulaire, nez, yeux et
sourcils. Ses cheveux sont de
longues mèches tressées avec ici
et là des perles enfilées. Comme
je n'ai pas retrouvé une pareille
poupée, le dessin dans le livre
de Jean Gabus est reproduit à la
figure 52.
Comme la poupée-femme touarègue, la poupée-femme maure est
représentée comme une femme noble engraissée. Jean Gabus écrit à ce
sujet “La fillette engraissée, prenant de l'ampleur, et devenant matrone
au type stéatopyge, est un symbole courant dans le Sahara, d'inspiration
amazighe sans doute, autant que d'inspiration nègre (captifs, éléments
résiduels de l'ancienne population noire)” (1958: 119).
Enfin il faut mentionner que Charles Béart parle de poupées de cuir
maures. Ces poupées sont confectionnées par les enfants eux-mêmes ou
par leurs mères mais le plus souvent par les cordonnières (1955: 95). En
Mauritanie l'on trouve, selon cet auteur, aussi “la poupée d'étoffe montée
sur boîte à conserves recouverte d'étoffe, commune au Sénégal, et des
poupées de cire” (1955: 97, 836). Je n'ai cependant pas trouvé trace de
pareilles poupées qui seraient utilisées par les enfants maures.
52
102
Avec leurs poupées, maisons ou tentes de poupées et des ustensiles de
ménage miniaturisés, dont une description détaillée sera donnée dans
Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africains. La Vie Domestique
dans les Jeux et Jouets, les filles jouent à la vie des femmes adultes.
2.5 Les poupées-femmes sahraouies
Fernando Pinto Cebrián montre dans son livre les poupées en position
assise que les filles sahraouies utilisent pour leurs jeux de poupées et
leurs jeux de ménage (1999: 103, 113). Ces poupées portent le nom
'owzar'. Pour ces jeux les filles utilisent aussi des tentes, des lits, des
nattes et des ustensiles en miniature (voir Cultures Ludiques Sahariennes
et Nord-Africaines. La Vie Domestique dans les Jeux et Jouets).
Cet auteur écrit que les filles dès qu'elles en sont capables jouent
durant toute l'année à imiter leur mère dans sa fonction d'épouse et de
maîtresse de la tente familiale. Les adultes trouvent ces jeux nécessaires
pour que les filles apprennent tout ce qui est en rapport avec la famille
traditionnelle vivant dans le désert. Les filles organisent aussi des fêtes et
des réunions comme elles les observent dans la réalité. A côté des
poupées traditionnelles qui ressemblent à celles des filles maures, on
trouve aussi des poupées en plastique importées comme les Indiens et les
Cow-boys qui sont donnés aux petits garçons (1999: 105, 109).
2.6 Les poupées-femmes regeybat
Chez les Regeybat qui nomadisent dans le Sahara Nord-occidental
(Algérie), existent des poupées, portant le nom de 'rendja', qui imitent la
femme. La poupée de la collection, une poupée en position assise, fut
construite par une fillette (H = 16 cm).
Il s'agit d'une âme d'os posée d'équerre sur un coussinet de chiffons
bleus, créant ainsi une poupée assise. Une cotonnade blanche représente
le voile et une cotonnade bleue représente la robe. Un ornement de
coquillages et de perles se trouve à la place de la tête. Cette poupée n'a
pas été retrouvée dans la collection, mais elle ressemble aux autres
poupées sahariennes en position assise.
103
2.7 Les poupées-femmes teda
Oleg Lopatinsky a recueilli en 1963 et a analysé une merveilleuse
collection d'une quarantaine de poupées provenant des Teda du Tibesti
au Sahara tchadien. Que cette forme de poupée-femme ne soit pas de
date récente est attestée par la poupée à tête surmodelée en gomme
recueillie par G. Moberg avant 1935 et celle à tête en datte recueillie par
la mission Le Cœur en 1934.
Ces poupées à deux jambes, dont la hauteur varie entre 17 et 38 cm, sont
construites par des filles de dix à seize ans et, selon Fuchs (1961: 46),
parfois aussi par une mère ou une sœur plus âgée. Quelques poupées de
la collection représentent des femmes de brousse en costume quotidien
ou parées pour la danse. Il y a aussi une femme de brousse aisée, avec
cheveux tressés, cauris et croix d'Agadez (fig. 53, H = 27 cm; cataloge
3.4, 65.3.14, p. 281) et une vieille femme de brousse (fig. 54, H = 26 cm;
53 54
104
catalogue 3.4, 65.3.15, p. 281). Les autres poupées sont des citadines
pauvres, sans cauris ni croix d'Agadez (fig. 55, H = 22,5 cm; catalogue
3.4, 65.3.46, p. 281), ou riches en costume de fête (fig. 56, H = 26 cm;
catalogue 3.4, 65.3.29, p. 281). Parfois elles représentent des citadines en
costume quotidien (fig. 57, p. 105, H = 33 cm; catalogue 3.4, 65.3.31, p.
281) et en costume d'intérieur. La poupée de la figure 58 (p. 105) est une
citadine parée pour la fête (H = 24 cm; catalogue 3.4, 65.3.32, p. 281).
Dans cette diversité de types de poupées-femmes, l'imagination
inventive des filles teda est à signaler. Ces poupées sont (en 1963) assez
rares en brousse, ainsi que dans les centres comme Aozou, Bardaï, Wour,
Zouar et Yebbi Bou. Elles sont devenues plus communes surtout à
Bardaï où les Européens en achètent beaucoup.
55 56
105
Le corps et les membres sont faits en branchettes d'acacia, deux pour le
corps et une posée en croix pour les bras, attachées entre elles avec un fil
végétal obtenu à partir de feuilles de palmier. Une fois les membres liés
les uns aux autres on passe par-dessus la sève d'acacia, appelée
'gourmay'. Les fesses sont modelées en gourmay recouverte de chiffons.
Les seins sont formés de dattes coupées en deux, dénoyautées, chauffées
puis modelées sur la branche faisant office de poitrine, fixées parfois
avec du fil ou de la ficelle. Pour la tête on utilise une datte, évidée au
préalable, mise sur la branche faisant corps et cou. La base de la date est
ensuite enduite de gourmay pour mieux la faire adhérer au cou.
57 58
106
Les dattes utilisées à cet effet sont toujours
fraîches. Le dessin de la figure 59 présente cette
armature de poupée.
Les traits du visage sont faits avec des petites
perles multicolores incrustées à chaud,
représentants yeux, bouche, nez, le tout disposé
d'une façon très fantaisiste. Parfois la face à un
aspect vernissé dû à une application de graisse
avant et après le modelage à chaud.
Les cheveux sont en poils de chèvre ou laine de mouton ou en charpie
de tissu noir, tressés au préalable en forme de petites nattes, caractérisant
la coiffure teda, puis introduits dans des petits trous faits avec une épine
ou pointe de couteau, fixés ensuite avec du gourmay. Plusieurs poupées
ont des cauris dans les cheveux.
Les bijoux sont représentés par des petites perles ou des minuscules
morceaux de métal. Assez souvent l'anneau nasal est représenté (fig. 57,
p. 105). Parfois les poupées portent des colliers de perles (fig. 53, p.
103). Les bracelets, les chevilliers et les croix d'Agadez sont fidèlement
reproduits et fixés sur ces poupées, éventuellement à l'aide d'épines.
Les vêtements sont variés suivant les tissus que les fillettes ont pu se
procurer. La mode et le drapé teda sont fidèlement respectés. Toutes les
poupées ont la culotte par pudeur. Aucune fillette n'a accepté de mettre
une culotte sur la poupée lors d'une présence masculine.
Une description détaillée des vêtements et de la parure des femmes
teda se trouve dans le mémoire de Oleg Lopatinsky Vêtements, parure,
parfums et coiffure chez les Teda. Des photos de femmes teda sont à voir
dans Kronenberg Die Teda von Tibesti (photos 15 et 19) et dans les
Carnets de Route de Charles Le Cœur (1969, pl. VII-2, XV et XVI ).
Dans La Vie du Sahara (1960: 72) le nom de 'davi-jidi' est donné à ces
poupées et, en ce qui concerne le jeu de poupée des filles teda, Peter
Fuchs note que les filles font des selles de femme en miniature pour leurs
poupées (1961: 47).
59
107
2.8 Les poupées-femmes belbala
Des poupées-femmes qui portent le nom de 'tamames', un mot qui
désigne la jeune mariée avant la consommation du mariage, sont
fabriquées par les fillettes belbala vivant à l'oasis de Tabelbala au Sahara
Nord-occidental en Algérie (fig. 60, 61 p. 108, H = 23 cm; catalogue 3.5,
54.74.7, p. 282).
Sur une âme d'os de mouton ou de chèvre, éventuellement un morceau
de roseau, un bâtonnet est ligaturé en croix au tiers de la hauteur pour
figurer les bras. Une des cinq poupées de la collection du Musée de
l'Homme a cependant des bras et des jambes d'argile. Des chiffons
enveloppent ces armatures pour donner du corps à la poupée.
60
108
Ces poupées se tiennent debout,
comme celle des filles ghrib et teda,
mais contrairement aux poupées-
femmes touarègues, maures et
regeybat qui sont en position assise.
Le visage et le tatouage facial de
trois poupées de la collection sont
peints sur l'os. Les poupées portent
un 'izar', une longue bande
rectangulaire de cotonnade drapée
de couleur bleue. Ces poupées sont
coiffées par un voile ou un 'mendil'.
Les cheveux des poupées sont en
poils de chèvre tressés en deux
longues nattes (fig. 61). Les poupées
ne portent pas toujours des bijoux
aussi élaborés que ceux que l'on voit
sur la poupée de la figure 60 (p. 107).
Parfois ce ne sont que des colliers d'herbes (Champault, 1969: 345;
pour une description des vêtements, bijoux, peintures faciales et
tatouages voir p. 178-181, 189-192 et 195-202).
Une cinquième poupée fut modelée par une fillette en kaolin cru.
Cette poupée, avec des bras et des jambes légèrement atrophiés, a le
visage orné de quelques points bruns et elle est enveloppée de chiffons
(H = 28,5 cm, catalogue 3.5, 54.74.51, p. 282). Mais cette poupée en
argile ne représente pas le modèle courant car il est spécifié sur sa fiche
signalétique que “ce type de poupée, aberrant, est jugé par les parents et
amis, ridicule et inconvenant”.
Selon Dominique Champault, qui a collectionné les cinq poupées, “on
ne joue pas à la poupée à n'importe quel moment de l'année : seulement
en automne et au printemps, du moins dans les familles traditionalistes”.
Et cet auteur déclare à ce sujet “j'ai vu des pères entrer en colère parce
que les filles confectionnaient ou embellissaient une poupée, en plein
été. Les poupées font pleuvoir, disent-ils, et la pluie d'été nuit à la
conservation des dattes plus encore qu'à leur maturation” (1969: 345).
Chez les Belbala ce ne sont que les filles qui jouent à la poupée et
jusqu'à l'âge de six ou sept ans environ. A partir de cet âge elles auront
61
109
plutôt à s'occuper d'un petit frère ou d'une petite sœur et le jeu de poupée
les y aura préparées car bien que “chaque fillette joue à la poupée selon
son tempérament propre, il s'agit toujours d'être la mère, de promener
son enfant dans le dos, de l'allaiter, de le faire danser sur ses genoux”
(Champault, 1969: 345).
Bien que le jeu de poupée représentant les cérémonies de mariage ne
soit pas explicitement mentionné par Dominique Champault, le nom de
'tamames' ou jeune mariée que portent ces poupées les mettent en rapport
avec beaucoup de poupées sahariennes et nord-africaines nommées-elles
aussi jeunes-mariées et avec lesquelles les filles jouent au mariage.
2.9 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura
Une poupée-femme a été collectionnée chez les sédentaires d'El Ouata
dans la vallée de la Saoura au Sahara Nord-occidental en Algérie (fig.
62, B = 32,5 cm; catalogue 3.6, 62.51.1, p. 283).
Cette poupée a une
armature composée d'un
roseau vertical et d'un
roseau horizontal figurant
les bras. La partie
inférieure du roseau
vertical est enrobée de
tissu pour donner de
l'ampleur à la poupée.
Comme vêtements cette
poupée-femme porte une
robe rouge à dessins et au-
dessus une robe rouge
cintrée par une ceinture
verte. Les cheveux sont
deux longues tresses de
cheveux noirs naturel.
Comme souvent les traits
de visage ne sont pas
indiqués. 62
110
La description de cette poupée sur la fiche signalétique mentionne que
la tête était enveloppée de papier d'argent, d'un turban noir et d'un voile
multicolore. Cependant ces attributs n'ont pas été retrouvés et manquent
donc sur la photo.
2.10 Les poupées-femmes mozabites
Chez les filles mozabites du Sahara algérien se retrouvent trois genres de
poupées-femmes, celles à tête en papier cartonné, d'autres construites de
chiffons sur armature de bâtonnets ligaturés en forme de croix et celles
faites d'un os.
Une poupée à tête en
papier cartonné, tête
importée du Nord de
l'Algérie par un père
mozabite, mais habillée
à Ghardaïa au Mzab est
à voir à la figure 63 (H
= 58,5 cm; catalogue
3.7, 34.49.37, p. 284).
Depuis longtemps les
pères, presque tous des
commerçants dans le
Nord de l'Algérie,
apportent ce type de
têtes de poupées pour
leurs filles. D'ailleurs,
A.M. Goichon note déjà
en 1927 qu'au Mzab
“les poupées sont quel-
quefois européennes”
(p. 59).
63
111
La poupée de la collection, achetée en 1934 pour l'Exposition du Sahara
à Paris, porte le costume et les bijoux des femmes de Ghardaïa.
C'est une mère qui l'a habillée ainsi pour l'offrir à sa fille. Selon la fiche
signalétique les filles mozabites adorent les poupées. Elles portent le
nom de 'teslet' ou jeune mariée en langue mozabite.
Sur le visage de cette poupée sont peints le maquillage et les tatouages
des femmes mozabites. Les pièces de monnaie qui forment le collier
portent la date de 1870 écrite en caractères arabes. Sur le front, pend une
petite main de Fatima en métal. Cette main de Fatima, la fille du
prophète Mahomet, retourne le mauvais sort vers la personne qui le jette.
Sur la poupée on remarque des boucles d'oreilles et une longue chaîne
avec des fibules. Elle porte aussi des anneaux de chevilles et des souliers
de cuir.
Les filles qui sont moins favorisées se font faire par leurs mères ou
font elles-mêmes des poupées de chiffons avec les cheveux en poils de
chèvre. A.M. Goichon donne dans son livre de 1927 La vie féminine au
Mzab quelques informations sur les poupées (p. 58-59). Les petites filles
du Mzab jouent à la noce avec des poupées qu'elles fabriquent avec une
armature de deux baguettes en croix et qu'elles vêtent d'un chiffon, le
plus souvent en mariée. “La tête est un petit chiffon blanc, choisi très
propre, sur lequel l'enfant dessine un visage au charbon et fixe des
cheveux en poil de chèvre”.
Selon cet auteur, un autre type de poupée était fait quand les chiffons
manquaient. “Les chiffons sont rares et enviés ; quand on n'en a pas, on
se dédommage en faisant une poupée incassable : les yeux, le nez, la
bouche, sont dessinés sur un bel os raclé et lavé”.
Pour le jeu de poupée de leurs sœurs, il arrive que des frères fassent
une maisonnette mozabite.
Contrairement à ce qui se passait chez des populations amazighes, les
poupées ne jouaient “jamais de rôle religieux au Mzab, elles sont du
domaine exclusivement privé, sans être jamais employées dans les fêtes
populaires” (Goichon, 1927: 58-59).
63
112
2.11 Les poupées-femmes kabyles
Jusqu'à présent je n'ai trouvé qu'une seule information sur les poupées
chez les Kabyles, celle fournie par Germaine Laoust-Chantréaux qui en
parle par rapport à ses recherches dans la région de Aït Hichem entre
1937 et 1939. Elle mentionne la poupée représentant la jeune mariée et
une autre poupée représentant un bébé. Cette poupée-bébé est décrite
dans la section sur les poupées-enfants.
La poupée-femme est décrite de la manière suivante (1990: 167) :
La représentation anthropomorphique de la tislit gagne encore en
précision. Cette poupée est formée de deux bâtons disposés en croix et
recouverts d'étoffe : c'est la “mariée” avec laquelle les enfants jouent
de longues heures puis qu'ils perdent ou brisent sans regrets.
2.12 Les poupées-femmes chaouia
Dans la région montagneuse de l'Aurès en Algérie les enfants amazighs
chaouia possèdent des poupées-femmes. Non seulement les filles mais
aussi les garçons confectionnent ces poupées.
Les poupées de la collection du Musée de l'Homme datent toutes de
1936 et 1937 mais Huughe les mentionne sous le nom 'taslit' en 1906 (p.
519). Selon Tillion (1938: 54) les poupées-femmes chaouia s'appellent
'haslit' ce qui signifie fiancée, mariée. Le même mot désigne en plus “la
petite héroïne de la fête des labours et la cuiller à pot qu'on habille en
femme et qu'on promène solennellement pour faire pleuvoir”.
L'armature des poupées, d'une hauteur de 7 à 28 cm, est faite d'un
bâtonnet ou d'un os unique, ou bien de deux bâtonnets ou d'un os et d'un
bâtonnet ligaturés en croix (fig. 64).
Les bras de certaines poupées sont faits
d'un bâtonnet brisé au milieu (fig. 64-
65, H = 18 cm; catalogue 3.8,
36.2.279, p. 285).
64
113
Les vêtements sont ceux des femmes locales. Les poupées portent
souvent une ou plusieurs robes rougeâtres mais parfois la robe est
blanche, noire, verte ou orange. Beaucoup de poupées ont une cordelière
et une ceinture en fils de coton
ou de laine pour cintrer les
robes. Au-dessus elles portent
souvent une mante blanche ou
noire. La robe rouge est, selon
Mathéa Gaudry, typique pour
le sud des vallées ceci suite à
l'influence saharienne. Cet
auteur ajoute que la mante
blanche est principalement un
manteau d'hiver et la mante
noire un manteau d'été (1929:
34-35). Certaines poupées
portent un turban et/ou un
foulard et leurs cheveux sont
parfois naturels. Quelques
poupées sont ornées d'un
collier ou d'une chaînette (fig.
66, p. 114, H = 17,5 cm;
catalogue 3.8, 36.2.314, p.
285).
Une photo de femmes en tout apparat d'un village chaouia se trouve dans
le Catalogue des Collections de l'Aurès (1943: 1). Les vêtements de la
poupée peuvent indiquer la situation particulière dans laquelle le
personnage se trouve. Ainsi une poupée fut désignée comme une
divorcée.
Il est à remarquer que les poupées-femmes chaouia portent
parfois un bébé ou un petit enfant dans le dos (fig. 67, p. 115,
H = 21 cm; catalogue 3.8, 37.9.33, p. 285). Selon toutes les
informations à ma disposition, il est clair que ceci est une
vraie exception chez les poupées sahariennes et nord-
africaines. L'armature de la poupée-bébé est faite d'un
morceau de roseau (fig. 68, H = 6 cm).
65
68
114
Pour les filles comme pour les garçons ces poupées représentent des
personnages féminins auxquels ils donnent des noms propres : “chaque
poupée a un nom, parfois un nom arbitraire, qui a plu à l'enfant, mais,
plus souvent, le nom d'une fille qu'il connaît et admire”. Lorsqu'il est
question d'un nom réel, les enfants tiennent compte de la filiation. Ainsi
un garçon de six ans était furieux parce qu'un garçon de quatre ans
appartenant à une autre fraction avait donné à sa poupée le nom d'une
fille de la fraction du premier garçon : “Il peut bien prendre des noms de
sa fraction, disait-il, il a bien assez de filles chez lui” (Tillion, 1938: 54).
66
116
2.13 Les poupées-femmes du Nord-ouest algérien
Auprès d'un groupe amazigh, les Beni Snous de la région du village du
Kef en Algérie près de la frontière algéro-marocaine et pas loin de
Tlemcen, Edmond Destaign (p. 64) a noté en 1905 une autre manière de
faire une poupée-femme lors de la fête de l'ennayer, la fête du nouvel an
amazigh. Parfois les filles vont :
Quand le soleil est chaud, jusqu'à la grotte des Ath Moumen (grotte
creusée dans les dolomies près du village du Kef). Au moyen d'une
tige de férule, les petites filles font une poupée qu'elles revêtent
comme une mariée et jouent, en chantant, jusqu'au coucher du soleil.
Nefissa Zerdoumi (1982: 228) nous parle, sur la base de ses recherches
au début des années 1960, des poupées des filles de Tlemcen au Nord-
ouest de l'Algérie, sa ville natale :
Dans les campagnes comme dans les faubourgs, les seules poupées
que l'on voit occasionnellement sont bien modestes et de surcroît on
les appelle blisa (féminin de blis qui veut dire Satan). Elles sont
fabriquées tant bien que mal, en cachette, par leurs mères d'adoption;
deux roseaux assemblés en croix et recouverts de chiffons forment le
corps et les membres ; sur la tête, façonnée approximativement, sont
dessinés, à l'encre généralement, les yeux, le nez et la bouche ; de
vrais cheveux sont parfois ajoutés sous un morceau d'étoffe ajusté en
forme de foulard. Dans la fiction qui s'instaure, la poupée est, comme
pour la fillette européenne, le poupon que l'on dorlote, mais c'est
aussi parfois l'objet de jeux plus osés : on marie la poupée, on la
délivre d'un enfant en imitant les gestes de la qâbla (sage-femme). A
l'âge où l'on emmaillote les poupées, succède rapidement l'âge où l'on
emmaillote de vrais bébés et cette transition mérite d'être soulignée
car elle est sans doute la charnière de la condition sociale féminine.
117
2.14 Les poupées-femmes marocaines
Les renseignements recueillis sur les poupées-femmes marocaines se
réfèrent à des poupées des filles des villes de Fès, Moulay Idriss, Rabat,
Settat, Khouribga, Marrakech et Imi-n-Tanoute, à celles des région de
Ghomara, du Zerhoun, de Khemisset, de Midelt, de Goulmima, de
Merzouga, de Ouarzazate, de Taroudannt et de Sidi Ifni, de certains
villages du Moyen Atlas, du Haut Atlas et de l'Anti-Atlas, et des fillettes
juives des anciens mellahs sud-marocains.
La poupée la plus ancienne dans la collection du Musée de l'Homme
fut faite par une fillette de Fès et provient d'un don de 1931 (fig. 69). Ce
musée possède trois autres poupées-femmes marocaines ayant la même
armature avec un os vertical. La hauteur de ces poupées varie entre 21 et
28 cm. En 1915 la Mission scientifique du Maroc mentionne déjà une
poupée-femme de Settat faite d'un os entouré de chiffons.
Trois types d'armatures peuvent se distinguer en ce qui concerne les
poupées marocaines. Le type d'armature le plus commun est fait d'un os,
d'un roseau, d'une branchette, d'un morceau de bois ou même d'une
69 70
118
plante fibreuse auquel, le plus souvent, a été ligaturé, en forme de croix,
un morceau de roseau ou de bois afin de figurer les épaules et les bras,
comme c'est le cas pour la poupée de la figure 69 (p. 117, H = 28 cm,
catalogue 3.9, 31.45.59, p. 286). Le second type d'armature, jusqu'à
présent seulement trouvé dans la collection du Musée de l'Homme, a
comme tronc un carré de tissu bourré de chiffons auquel sont cousus une
tête et quatre membres eux aussi en tissu bourré de chiffons (fig. 70, p.
117, H = 29 cm, catalogue 3.9, 34.123.1, p. 287). Les yeux, le nez, la
bouche et les tatouages sont cousus. Le troisième type d'armature est
modelé en argile (fig. 149, p. 189).
Les poupées-femmes marocaines décrites dans la bibliographie, celles
de la collection du Musée de l'Homme et quelques-unes des poupées sur
lesquelles j'ai pu me renseigner sur place ont des traits de visage
élaborés. Ces traits sont dessinés au noir de fumée, avec du goudron, de
l'encre, un stylo, un crayon couleur, un fer rouge ou un couteau. Les
poupées marocaines du Musée de l'Homme ont les traits de visage
cousus. Moi-même j'ai trouvé une poupée-femme avec des yeux cousus.
Il s'agit de la poupée-femme refaite par une fille de seize ans du village
Aïn Toujdate en 1993 (fig. 72, p. 124).
Une manière particulière de donner une armature et un visage à une
poupée est mentionnée par J. Herber en 1918 (p. 66).
Une poupée de Sidi Kacem avait les traits représentés au moyen
d'entailles faite dans le roseau ; un ovale limitait le menton ; des
petits traits, un peu de couleur, du noir, du rouge achevaient le visage.
La croisée inférieure, qui est exceptionnelle, maintenait des chiffons et
formait l'évasement des hanches.
Je n'ai jusqu'à présent pas encore revu cette manière de créer le visage et
l'évasement des hanches. Vu la particularité de cette armature de poupée,
j'ai repris en dessin à la figure 71 la photo qui figure dans l'article de J.
Herber (p. 67).
119
Dans la région du Zerhoun près de Moulay Idriss (Herber, 1918: 66) et à
Fès (Soulé, 1933: 355) il arrivait qu'un grain d'orge soit glissé sous le
chiffon pour donner du relief au nez.
Les cheveux des poupées sont en soie effilée, en fils de coton ou de
laine, en chanvre, en feuilles de roseau, en barbe de maïs, en morceau de
datte entouré d'un chiffon, mais les filles utilisent aussi leurs propres
cheveux.
Les poupées portent le costume des citadines ou paysannes adultes
mais il est plus ou moins luxueux selon les moyens à la disposition des
filles. Une mantille et des bijoux complètent éventuellement ce costume
de poupée. Voici comment J. Herber (1918: 66-68) décrit la parure des
poupées marocaines :
La poupée a généralement des cheveux naturels qui sont maintenus
par le foulard de tête, ou le bandeau. Elle est vêtue d'une série de
chiffons de toutes couleurs qui représentent sans doute la
superposition des caftans polychromes que porte la femme arabe ; ils
sont percés d'un trou à leur centre, destiné au passage de la tête et
retombent, en avant, en arrière, à la manière d'une chasuble très
large, dont les bords sont ensuite repliés vers le dos, à l'alignement
des épaules. Une ceinture, des fichus, terminent cet habillement - ou
cet accoutrement - que parent quelquefois des sequins et des perles.
71
120
Différents noms ont été avancés pour désigner la poupée marocaine.
Doutté (1905: 328) a mentionné pour la langue amazighe 'tislit' et
Westermarck (1926: 269) 'taslit'. Selon Doutté (1905: 328), Herber
(1918: 68) et Soulé (1933: 355) le mot arabe 'arousa' est aussi utilisé.
Destaign (1920: LVI) mentionne dans son livre sur les Amazighs du
Moyen Atlas ces trois noms pour les poupées. Tous ces mots désignent
la fiancée ou jeune mariée. Madame Soulé note en plus le nom 'çouira' et
un article de la revue France-Maroc (1917: 39) s'intitule “la poupée
iblisa”. Destaign (1905: 64) et Zerdoumi (1982: 228) parlent des poupées
'blisa' des filles de Tlemcen près de la frontière marocaine en Algérie.
Un nom, plus récent est donné par Flamand qui a poursuivi ses
recherches au Maroc de 1948 à 1958. Il parle de “mounica, terme issu de
l'espagnol muñeca et désignant la poupée dans tous les milieux
marocains” (p. 182). Ce nom semble cependant être moins récent car J.
Herber le note déjà en 1918 pour Tanger, Larache et le mellah de Rabat
et ajoute qu'il s'agit d'une influence des commerçants espagnols (p. 81).
Mes informations, recueillies depuis 1992, mettent en avant le mot arabe
°arûsa et les mots amazighs taslit, tèslit ou tislit tous signifiant la jeune
mariée, pour désigner la poupée-femme traditionnelle. Le terme
'mounica' fait plutôt référence à la poupée en plastique, habillée par la
fille elle-même, ou encore à la poupée importée d'Europe. Comme dans
certains milieux, par exemple à Marrakech, la poupée en armature de
roseau est tombée dans l'oubli, le terme de mounica s'utilise pour toute
sorte de poupée. Actuellement on entend aussi les mots 'poupiya' et
'poupouya' dérivés de poupée. Là aussi il n'y a rien de neuf car comme le
dit J. Herber en 1918 “le nom de poupéia pénètre le Maroc avec les
poupées françaises” (p. 81).
Les jeux de poupées se cristallisent autour de différents thèmes : le
mariage, la grossesse et l'accouchement, la relation mère-enfant, la vie
de ménage et l'enterrement. Les deux premiers thèmes, le mariage et
l'accouchement, sont déjà mentionnés en 1918 par J. Herber (p. 68). Les
jeux de ménages pour lesquels des poupées sont utilisées seront décrits
dans Cultures Ludiques Sahariennes et Nord-Africaines. La Vie
Domestique dans les Jeux et Jouets.
Parmi les publications de la bibliographie, la description la plus
détaillée des cérémonies de mariage que les filles offrent à leurs poupées
est due à madame Soulé, date de 1933 et parle de la ville de Fès (p. 355-
121
357 et 360-361). Si possible, plusieurs filles apportent leur poupée et la
plus belle sera la mariée. En même temps les filles ont pris avec eux le
petit ménage de leur poupée :
Petit kanoun (fourneau en terre), plateau, verres, théière, boîtes à thé
et à sucre, etc., et même des provisions de fête : thé, sucre, menthe,
semoule". Une fois qu'une cuisine et une chambre de poupées sont
préparées la mariée est assise sur des coussins avec autour d'elle les
autres poupées qui lui servent de garde d'honneur. Deux grandes
filles dirigent le jeu comme des maîtresses des cérémonies. Une
troisième fille s'occupe de la toilette de la mariée et une jeune
négresse est la servante et s'occupe des menus ustensiles de ménage.
Les autres filles se mettent autour des poupées et représentent les
parentes et les amies de la mariée. Pendant que la toilette de la
mariée est faite derrière un rideau tendu sur une corde, les maîtresses
des cérémonies chantent :
“Ohé ! Madame la fiancée ! Sors pour qu'on te voie!
Si tu es vraiment belle ou seulement soupçonnée de l'étre ! Ô Roses
qui êtes dans le panier, appelez votre frère ! ”
Une partie des parentes et amies reprend la phrase chantée pendant
que les autres filles poussent des you-you d'impatience. Une fois la
toilette terminée on expose la mariée sur les coussins. Alors les
maîtresses des cérémonies entonnent en battant des mains le chant en
l'honneur de la mariée et les fillettes répètent ce chant phrase par
phrase :
“Que le salut soit sur l'Envoyé de Dieu!
Il n'y a point de gloire autre que celle de notre Seigneur Mohammed!
Dieu est avec la très grande intercession!
Il n'y a point de gloire autre que celle de notre Seigneur Mohammed!
Voici la beauté pure! (sans fards).
Voici la beauté de Fès! (Moulay Idriss).
La voici! Puisse Dieu te bénir, ô Madame!
Fasse que Sa protection soit sur toi, ô Madame!
Que la bénédiction divine soit sur toi, ô Madame!
Voici du miel sur la pointe de l'aiguille, le voici!
Que la bénédiction de Dieu soi sur toi, ô Madame!
Que sa sauvegarde soit sur toi, ô bannière des fiancés!
122
La voici! La fiancée qui tourne pareille à un bol de soupe (bis).
C'est, par Dieu! avec les réals (pièce d'argent) qu'on l'a emportée
(allusion au douaire nuptial).
Qu'elle soit la bienvenue, la belle fiancée, de même celles qui
l'accompagnent!
Il l'a emportée, il l'a enlevée, le seigneur des hommes!
Fasse Dieu que sa fortune lui soit durable!
Il l'a emportée! Il l'a emportée! Il l'a emportée!
Grâce à sa fortune! ”
Après l'exposition de la mariée vient le moment de la dînette pour
laquelle la petite négresse a préparé le thé, les gâteaux et le couscous
que maintenant les filles partagent avec leurs poupées.
A la fin de la fête la mariée est replacée dans sa chambre derrière le
rideau où le marié peut venir auprès d'elle. A ce moment les fillettes
chantent :
“Qu'elle soit bienheureuse, Madame, bienheureuse chez elle!
Nous louons Dieu pour ce moment, ô Madame!
C'est notre Seigneur seul qui dispense toute chose!
Nous adressons nos louanges à Dieu en ce moment!
Ohé Madame! Emmène-moi avec toi, emmène-moi, ne me laisse point
(car) les propos de femmes m'ont fatiguée.
Ohé Madame! Il est blessé par la pomme!
Ohé Madame! Soigne-le avec une catin!
Ohé Madame! El Glaoui ! El Glaoui!
Ohé Madame! Soigne-le avec les allusions!
Ohé Madame! Il est blessé et le sang coule!
Ohé Madame! Soigne-le, ô commissaire!
Ohé Madame! Il est blessé à la porte de la maison!
Ohé Madame! Soigne-le, ô commandant!
Ohé Madame! Il est blessé par l'orange!
Ohé Madame! Soigne-le, ô Bitina (vedette de cinéma)!
Ohé Madame! Il est blessé par le citron!
Ohé Madame! Soigne-le, ô Mimouna!
Ohé Madame! Il est blessé par le poignard!
Ohé Madame! Soigne-le, ô jeune fille!
Ohé Madame! Seigneur Abdelqader Jilali tu nous assisteras! ”
123
L'article “La poupée Iblisa” dans la revue France-Maroc de 1917 (p. 39)
parle aussi du jeu marocain dans lequel les filles représentent les
cérémonies de mariage. La chambre de la poupée est ici un trou dans le
mur tapissé de morceaux d'étoffe et fermé par une portière.
On prépare à la poupée un petit siège où on l'installe. Puis on amène
une seconde poupée. C'est le mari de la première. Les fillettes lui
crient : "sois le bienvenu, nous t'avons trouvé une épouse qui te plaira
et te donnera satisfaction". On assoit le mari à côté de l'épouse, au
milieu d'un joli tapage de youyous et d'applaudissements.
L'apparition d'une poupée-homme auprès des filles marocaines est aussi
attestée par l'auteur marocain Mohammad Ibn Azzuz Hakim et ceci chez
les filles de la région de Ghomara, plus précisément Gumara el Haila
selon le livre de cet auteur (1959: 32). Selon l'Encyclopédie Berbère le
pays ghomâra actuel correspond à la région occidentale du Rif central. Il
fut habité par un ensemble de neuf tribus (1998: 3110-3111).
Mohammad Ibn Azzuz Hakim mentionne que la poupée-homme est
souvent remplacée par un petit garçon. Il donne encore quelques
informations non rencontrées chez d'autres auteurs. Selon lui, la poupée
est parfois remplacée par un chaton nouveau-né, qu'on enveloppe d'une
loque, et pour leur jeu de poupée les filles se rendent visite l'une l'autre
avec leur poupée et tiennent des conversations comme si c'était les
poupées elles-mêmes qui parlent, ou bien, elles chantent pour leurs
poupées pour qu'elles ne pleurent pas. Cet auteur parle de l'imitation de
la fête de mariage mais en plus de celle de la circoncision et même du
baptême, bien que ce dernier terme, donnée sans aucune explication,
reste trop vague pour expliciter une réalité musulmane. Peut-être est-il
question de la cérémonie de l'imposition du nom le quarantième jour
après la naissance, comme me l'ont suggéré des gens de Marrakech. Un
autre jeu de poupée représentant la circoncision est mentionné à la fin du
chapitre sur les poupées-enfants marocaines (p. 213).
Excepté quelques informations sur les poupées et jeux de poupées des
filles Aït Ouirra, de Marrakech, de quelques autres villes et des anciens
mellahs juifs du sud-marocain provenant de la bibliographie, les données
sur les poupées et jeux de poupées marocains proviennent de mes
recherches au Maroc depuis 1992. Ces informations ont été présentés
124
suivant un ordre géographique en commençant par les données sur les
enfants des régions d'El Hajeb et de Khemisset dans le Nord du Maroc.
Puis viennent les données concernant les enfants du Moyen Atlas, des
régions de Midelt, Goulmima et Merzouga, ainsi que celles provenant
des enfants de la région du Jbel Siroua dans le Haut Atlas, des régions de
Marrakech, d'Imi-n-Tanoute et de Taroudannt, de la région de Sidi Ifni
dans l'Anti-Atlas et de la ville de Sidi Ifni. Finalement, les données en
rapport avec les anciens mellahs juifs du sud-marocain sont
mentionnées.
Souad Ouazzani, une fille de seize ans vivant à Aïn Toujdate un
village entre El Hajeb et Fès, a reproduit en août 1993 la poupée-jeune
mariée ou °arûsa comme
elle le faisait à l'âge
d'environ dix ans, c'est-à-
dire vers 1983. Elle et les
autres filles jouaient avec
cette °arûsa à la fête de
mariage, éventuellement
avec une poupée-jeune
marié ou °arîs. La poupée-
jeune mariée de la figure
72 (H = 23 cm, L = 12,5
cm) fut faite par Souad de la
manière suivante. A un
morceau d'une planche une
branchette est attachée en
forme de croix avec un
ruban. Cette structure est
enveloppée de trois couches
d'étoffes différentes. En
serrant ces étoffes par un
ruban qui passe derrière le
cou et par-devant en dessous
des bras, les seins de la poupée sont mis en relief. Un caftan rouge à
dessins noirs couvre le tout. Un foulard coiffe la tête et un izâr, grand
foulard ou drap, brun est drapé de la tête aux pieds et retenu à la taille
par un large ruban multicolore. La tête de la poupée est confectionnée
72
125
avec une étoffe blanchâtre, ressemblant à de la gaze, bourrée de petits
chiffons, le tout étant fermé par derrière en le cousant avec du fil de
coton. Sur cette tête figure un visage aux grands yeux, cousus avec du fil
de coton noir, des sourcils, un nez et une bouche ovale dessinés au stylo.
Un jour, lors de l'°Ashûra, Souad et sa sœur ont pu acheter de leur
grand frère un petit cadeau. Souad à choisi une poupée-femme et sa sœur
une poupée-homme, toutes les deux en plastique. Ensemble elles ont
joué au mariage de leur couple de poupées en couvrant leurs poupées
couchées avec un morceau d'étoffe et en dansant et chantant autour
d'elles.
Pour son jeu de poupée, une fille des Amazighs Khabliîn d'environ
huit ans, Hesna Ourèra, utilise des poupées-femmes et des poupées-
hommes rudimentaires. Avec une ou quelques copines, elle joue toujours
à la fête de mariage. Hesna habite le petit village Aït Hmed ou Yacoub
situé à 4 km de Khemisset près de la route vers Sidi Slimane. Quand j'ai
rencontré Hesna la première fois en octobre 1996, elle se trouvait près de
sa maison de poupée. Dans cette maison de poupée, plus ou moins
elliptique de 70 cm sur 50 cm et faite de deux rangées de pierres
superposées, trois poupées sont couchées par terre (fig. 73).
Cette maison de poupées se trouve adossée au mur de la maison
paternelle. Comme cela se voit sur la photo, une photo sur laquelle
Hesna ne voulait pas figurer, il y a au milieu de la maison de poupée un
morceau d'étoffe comme tapis, des morceaux de verre comme verres de
73
126
thé et une boîte de sardines comme plateau. Une touffe d'herbes est
devenue un bouquet de fleurs.
Les poupées elles-mêmes représentent, selon Hesna, deux tislit ou
jeunes mariées, et un isli ou jeune marié (fig. 74, voir aussi Rossie e.a,
1998, vidéo, p. 321). Les poupées de cette fille sont faites d'un morceau
de roseau coupé en deux qu'elle
entoure complètement d'une
cotonnade. Ce vêtement est fixé en
mettant l'extrémité de l'étoffe dans
le tour d'étoffe précédent ou bien
avec une petite ceinture faite de la
même étoffe. Ces poupées n'ont ni
bras, ni visage, ni cheveux, ni
bijoux. La distinction que Hesna
fait entre la poupée-femme et la
poupée-homme est surtout basée
sur la pose d'un petit caillou en haut
du roseau de la poupée-homme,
caillou qui est presque invisible car
entouré par l'étoffe. Des trois
poupées que Hesna m'a données, la
plus grande de 17 cm et la plus
petite de 13 cm sont des poupées-
femmes. La poupée-homme avec
caillou mesure 16 cm.
Ces poupées de Hesna démontrent que même si à la ville moyenne de
Khemisset, chef-lieu de la province de Khemisset, et selon toutes les
informations recueillies sur place les filles ne jouent aujourd'hui qu'avec
des poupées en plastique, la poupée locale fabriquée par les filles elles-
mêmes peut encore survivre dans des villages en bordure de la ville. La
même situation se présente à Midelt, une petite ville au pied du Jbel
Ayachi, à Taroudannt, une petite ville dans la vallée entre le Haut Atlas
et l'Anti-Atlas, et à Sidi Ifni, une autre petite ville à la côte atlantique au
sud d'Agadir.
A Tiddas, un village amazigh à 45 km de Khemisset sur la route
reliant cette ville à Khenifra, deux sœurs Malika et Thuriya Bannour,
respectivement dix-sept et vingt-deux ans en octobre 1996, m'ont raconté
74
127
qu'elles confectionnaient des poupées-jeunes mariées et des poupées-
jeunes mariés quand elles étaient des petites filles. Ces poupées 'tislit' et
'isli' avaient une armature de roseau en forme de croix, le morceau de
roseau servant de bras étant fixé avec une bandelette d'étoffe. L'armature
était vêtue de chiffons à la manière des femmes ou celle des hommes. Un
visage, avec bouche, nez, yeux et sourcils, était dessiné au stylo. Elles
jouaient avec d'autres filles à la fête de mariage en chantant les chansons
de circonstance. Malika et Thuriya attestent cependant que ces poupées
locales encore fabriquées par les filles elles-mêmes vers 1990 n'existent
plus dans leur village situé en bord de route. Elle y est remplacée par une
poupée en plastique, avec cheveux et vêtements, achetée dans les petits
magasins ou lors du marché.
Au pied du Moyen Atlas, sur la route de Khenifra à Khemisset, se
trouve Oulmès, bien connue pour sa source dont l'eau est commercialisée
sous ce nom. En 1996, des informations concordantes de Fatima
Boutouil de cinquante-sept ans, de deux
femmes de sa famille d'environ soixante-dix ans
et de deux garçons d'environ dix ans rencontrés
lors d'une visite à cette source, tous nés dans la
région, attestent l'utilisation d'une plante
fibreuse à longues feuilles minces appelée
bèrwèl comme armature de poupée. Cette
plante, qui pousse en période de pluie, était
aussi utilisée pour se faire un bracelet ou un
collier et même pour y verser, après l'avoir
gonflée, du lait de chèvre qui mis dans la
chaleur donne du beurre.
Pour faire une poupée une plante est coupée
à ras du sol et retournée pour que les feuilles
pendent en bas. En haut se montre alors une
tige blanchâtre dans laquelle une branchette est
introduite horizontalement pour donner des bras
à la poupée-femme (fig. 75). Selon les deux
garçons, les filles pendent des chiffons par-
dessus les bras de la poupée pour la vêtir.
Dans les années 1940 et selon Sfia Gharîb, une femme née en 1938
dans le village amazigh Arhbalou-n-Serdane sur la route de Khénifra à
75
128
Boumia mais vivant à Midelt, elle-même et les filles entre quatre et onze
ans se fabriquaient une poupée-jeune mariée ou tislit, pour jouer
ensemble avec un groupe d'environ quatre filles, des cousines ou
voisines, ou parfois même seule à la cérémonie de mariage, presque
toujours la cérémonie de mariage. Pour cela elles utilisaient une petite
maison de poupée bordée de pierres. Dans le cadre de la cérémonie de
mariage elles jouaient aussi à la dînette pour la préparation de laquelle
un petit moulin à bras ou takkerût est utilisé. Ce jeu de poupée pouvait se
pratiquer durant toute l'année et rien n'empêchait les filles de jouer avec
leurs poupées à la maison.
Sfia Gharîb a refait en janvier 1997 deux poupées presque identiques
et dont on voit une à la figure 76. Toujours sur un os de patte de mouton,
la moitié d'un morceau de roseau est ligaturé en forme de croix avec une
bandelette. Quatre ou cinq rectangles de tissu, au milieu desquelles une
fissure est faite pour
pouvoir le passer par-
dessus la tête, servent de
sous-vêtements et sur-
vêtements. La couleur
des étoffes est blanche
ou rose, une fois elle est
noire. Le survêtement ou
tfina est dans les deux
cas une cotonnade
blanche transparente tout
comme la large cape ou
ternest que portent ces
poupées. Une ceinture
de tissu rose tient les
vêtements en place. La
tête porte ou bien un
foulard noir ou bien un
foulard rose, tenu en
place par une bandelette
blanche. Des traits de
visage n'étaient pas
dessinés sur le haut de 76
129
l'os qui reste visible. Ces deux poupées mesurent 29 cm de hauteur et
l'envergure des bras est 9 cm.
Un professeur d'éducation physique marocain, Lahcen Oubahammou,
a obtenu en juin 1987 le grade de maître ès-sciences en sciences de
l'activité physique à l'Université Laval au Canada avec sa thèse
L'ethnographie des jeux traditionnels chez les Aït Ouirra du Maroc :
description et classification. Dans cette thèse, peut-être unique dans son
genre en ce qui concerne le Maroc, l'auteur décrit cinquante-trois jeux
avec plusieurs variantes. Ces jeux sont le plus souvent des jeux d'adresse
et des jeux sportifs. Cependant, il donne aussi quelques informations sur
le jeu de poupée des filles Aït Ouirra. Les Aït Ouirra sont une population
amazighe de 14.019 personnes selon le recensement de 1971, vivant au
Moyen Atlas dans la région montagneuse et boisée d'El-Ksiba à environ
1100 m d'altitude et à 27 km de la ville de Kasba-Tadla.
Le jeu de la jeune mariée, 'ilihane n'tislit', est décrit par Lahcen
Oubahammou de la manière suivante :
Les fillettes Aït Ouirra... prennent un morceau de roseau (aghanim)
sur lequel elles fixent un autre morceau en forme de croix pour
représenter les bras. 'Tislit' peut être aussi le tibia de mouton appelé
'taâjijt'. Le visage est dessiné avec le noir de fumée (ayffouss) et la
poupée est habillée de vieux linge. Les fillettes la promènent en
répétant le chant dit à l'occasion d'un mariage. Un groupe de fillettes
accompagne 'la fiancée' vers la demeure de son fiancé et, chemin
faisant, elles répètent le refrain suivant : “Doumt a thi hak zourkh a
rabbi” qui veut dire “allez-y que Dieu soit votre guide”. Un autre
groupe de fillettes accueille la fiancée. Lorsque le cortège s'approche
du groupe qui accueille, il répète le refrain suivant :
“Yim takhen a brid
A ikhamen makkourrine
A youchen ghedd tamlatt
A yifigher noubrid
A lamoun mech immouth”.
“Ouvrez-nous le chemin
Ô grandes familles
Ô chacal ou gazelle
130
Ô serpent du chemin
Surtout s'il est mort”.
Le groupe qui accueille répond :
“Nssayakhount ahrir
A ikhamen mekkourrine”.
“Nous vous présentons ahrir
Ô grandes familles”.
Traversant le Moyen Atlas et en se dirigeant vers Errachidia on arrive à
la petite ville de Midelt située à une altitude de 1500 m au pied du Jbel
Ayachi. Comme dans d'autres villes la poupée traditionnelle faite par les
filles elles-mêmes semble y avoir disparue mais à 3 km avant Midelt en
venant de Meknès des filles la font encore. Ce sont des filles Oulad
Khawa, Ikhawîn en amazigh, du village She°ba, un îlot arabophone en
milieu amazigh.
Bouchra, une fille d'environ huit
ans et allant à l'école, a montré en
novembre 1996 comment elle
procède pour faire une poupée-
jeune mariée ou °arûsa (fig. 77, H =
15 cm, envergure des bras = 6,5
cm). Pour cela elle relie en forme de
croix deux morceaux de bois avec
un lacet. Puis elle met un morceau
rectangulaire d'une vieille nappe en
plastique sur cette armature. Au-
dessus de cette longue robe un
survêtement ou 'caftan' d'étoffe
transparente à motifs brillants est
mis, une ceinture de la même étoffe
serrant la taille. Afin de pouvoir
passer la tête de la poupée à travers
les vêtements une fissure est faite en
leur centre avec les dents ou si
nécessaire en frappant avec une
pierre l'endroit voulu. Comme
foulard une bandelette de tissu noir
77
131
enveloppe la tête en ne laissant rien apparaître du visage où il n'y a
d'ailleurs pas de traits de visage. Ce foulard a été ajouté par une autre
fille à qui Bouchra a demandé de le faire. Comme d'autres filles
expliquent, ce foulard manque parfois surtout lorsque la fille en question
n'arrive pas à le faire elle-même.
Avec une poupée-jeune mariée plusieurs filles jouent ensemble aux
cérémonies de mariage après quoi la poupée est jetée pour en faire une
nouvelle le moment voulu. Il n'y a pas de période particulière de l'année
pour jouer à la poupée. Les filles disent qu'une fois elles jouent à la
poupée, une autre fois à la marelle, au jeu de ménage et ainsi de suite
selon leur bon plaisir.
Dans ce village il y a parfois des filles qui ont reçue une poupée en
plastique achetée dans un petit magasin ou au marché. Pareille poupée se
casse assez vite mais elle continue néanmoins à servir même sans bras ni
jambes. Le vêtement d'origine peut être remplacé par un vêtement de
poupée locale comme cela se voit à la figure 78.
78
132
A Ksar Assaka, un petit village à 4 km de Midelt en direction du Jbel
Ayachi, j'ai pu obtenir fin 1996 et début 1997 des informations précises
sur le jeu de poupée des filles. Ces informations proviennent de trois
sœurs - Souad, Najat et Sabah Laabib - qui jouaient à la poupée entre
1975 et 1985 ainsi que de leur mère Aïcha Aït Mamou qui en faisait
autant environ vingt-cinq années plus tôt. Cette famille appartient au
groupement amazigh des Aït Merghad. Actuellement cette poupée serait
devenue très rare dans ce village si elle n'y est pas tout à fait disparue, la
poupée locale étant remplacée par la poupée en plastique importée.
Souad Laabib, née à Ksar Assaka en 1968, m'a décrit en détail le jeu
de poupée de son enfance. Elle s'y adonnait entre ses six et douze ans
dans un groupe de jeu très stable composé d'elle-même, de deux cousines
et de deux copines du voisinage. L'endroit lui aussi était fixe, situé sur le
côté ensoleillé de la maison paternelle de Souad et où il n'y avait pas de
maison ni de champs. Le jeu de poupée se pratiquait à n'importe quel
moment de l'année, les filles alternant le jeu de la poupée avec la
marelle, les osselets, le cache-cache et même le football avec les
garçons. Le jeu de poupée, dans lequel à chaque fois il est question de la
tamgra, c'est-à-dire la fête de mariage, se jouait plus ou moins une fois
par semaine. Le moment propice de la journée est l'après-midi pendant la
sieste des parents.
Le groupe de jeu se divise en deux. Souad et deux filles seront les
parentes de la poupée-jeune mariée et Zhor, une copine du voisinage et
une autre fille seront les parentes de la poupée-jeune marié. Chaque fille
se choisit un vieux prénom comme Beha, Etto, Yemna, etc.
79
133
La première chose à faire est de contrôler l'état de la maison de
poupée de la jeune mariée et celle du jeune marié, de les réparer si
nécessaire et de les nettoyer avec un peu d'eau et une brosse. Les deux
maisons de poupées sont rectangulaires et d'environ la même grandeur,
les murs étant délimités par des pierres (fig. 79, p. 132). La maisonnette
à gauche du dessin s'appelle taddert n tislit, la maison de la jeune mariée.
Ce qui distingue la maison de poupée de la tislit est l'escalier à trois
marches, trois rectangles de pierres faits devant la porte de la maison, et
le heurtoir, une petite pierre sur une grande pierre placée devant
l'escalier. Dans chaque maison de poupée six morceaux de carton
remplacent les tapis, des morceaux de verre deviennent des verres à thé
et des herbes ou s'il y en a des fleurs de champs créent un bouquet de
fleurs. Pendant que les autres filles nettoient les maisons de poupées,
Souad fabrique une tislit et Zhor un isli, cette poupée-jeune marié étant
du même genre que celle de la figure 83 côté gauche (p. 137).
Une fois que tout cela est bien en ordre, Zhor, la mère du jeune marié,
et sa compagne s'amènent devant la maison de la tislit, elles frappent à la
porte et sont invitées d'entrer avec toutes les formules de politesse
nécessaires. Le thé est servi et après l'échange de quelques nouvelles, le
vrai but de la visite se révèle. Les femmes en visite proposent le mariage
de leur fils avec la fille de la maison, tout en louant les vertus de l'une et
de l'autre. Une discussion suivant les règles s'engage, l'accord de
principe est conclu et une nouvelle rencontre est fixée. Les femmes en
visite s'en vont mais reviennent bien vite. Pendant leur absence le
montant de la dot pour la fiancée et sa famille est fixé. Quand les
femmes reviennent une nouvelle discussion s'engage et une fois que les
deux familles tombent d'accord la date du mariage est choisie. A ce
moment, le jeu qui a déjà duré environ deux heures est interrompu pour
le continuer l'après-midi suivant ou même plus tard.
La deuxième partie du jeu de poupée commence avec l'inspection des
lieux et des poupées qui sont restées sur place parce que Souad et ces
compagnes de jeu n'amenaient pas ces poupées à la maison. Souad dit
dans ce contexte qu'elle n'a jamais pris une poupée à la maison mais elle
ne peut pas en donner la raison, seulement cela ne se faisait pas. Une fois
les réparations exécutées, la mère du jeune marié revient avec sa
compagne chez la jeune mariée avec les cadeaux de circonstance, des
vêtements, des souliers, de la farine, du sucre qui ne sont autres que des
134
chiffons, des vieux souliers, une grande pierre, un bidon vide. Alors tout
le monde chante et danse comme pour un vrai mariage en rythmant cela
avec un vrai petit bendir ou tambour à main. Quand les chants et la danse
s'arrêtent, les filles vont chercher le jeune marié et là les chants et la
danse reprennent. Alors la mère de l'isli prend sa poupée dans ses bras et
en cortège on regagne la maison où la tislit attend.
La poupée-jeune marié est placée à côté de la poupée-jeune mariée et
chaque fille se met autour de ce couple. A ce moment est mimée la
cérémonie de la pose du henné, remplacé par du sable mouillé, sur les
mains et les pieds du couple en chantant les chansons de circonstance.
Un vrai dîner composé de pain et de tomates est alors dégusté. Après le
dîner le couple est amené à la maison paternelle de l'isli. Quand la tislit
quitte sa maison, les filles chantent une chanson d'adieu triste mais
quand on arrive à la maison de l'isli la chanson est joyeuse. Dans cette
maison la mariée et le mari sont couchés l'un à côté de l'autre sur un lit
de carton. La nuit de noces bien courte se termine par le retour des
parentes qui viennent vérifier la
preuve de la virginité de la tislit, une
serviette blanche sur laquelle un peu
de safran rouge a fait des taches de
sang. Le jeu de poupée arrive à son
terme avec le chant qui honore la
virginité de la poupée-jeune mariée.
Le jeune couple est laissé dans la
maison de poupée et tout est
abandonné jusqu'au prochain jeu de
poupée.
Souad a refait cette poupée-jeune
mariée qui était confectionnée selon
un modèle immuable (fig. 80).
L'armature est faite d'un roseau à
l'arrière duquel un morceau de la
moitié d'un roseau est ligaturé en
forme de croix avec une bandelette.
Au-dessus des bras pendent en
avant et en arrière deux vêtements
faits de longs rectangles de tissu 80
135
avec au centre une petite fissure pour faire passer la tête de la poupée.
Cette fissure est faite en frappant l'étoffe placée sur une pierre plate avec
une autre pierre ou parfois avec un couteau. Le premier vêtement, qui
représente le tshamir est un morceau de tissu multicolore aux motifs
floraux. Pour le survêtement, le tfina, une étoffe à motifs brillant est
obligatoirement utilisée. Ces chiffons précieux étaient apportés de chez
un tailleur par la mère de Souad lorsqu'elle allait au marché du dimanche
à Midelt. La poupée montrée à la figure 80 (p. 134) porte comme
survêtement un morceau de tissu à fond noir transparent sur lequel sont
appliquées des feuilles et des fleurs rouges bordés d'un contour doré.
Une ceinture du même tissu sert la taille. Le morceau de roseau au-
dessus des bras est entièrement enveloppé avec un foulard ou tèh'nebusht
bleu avec au-dessus un autre foulard fait du tissu brillant utilisé pour le
survêtement. Ainsi rien n'apparaît de la tête de la poupée. Cette poupée
mesure 29 cm de haut avec une envergure des bras de 14 cm.
La sœur de Souad, Najat Laabib, née en 1971 à Midelt, vivait aussi à
Ksar Assaka où elle a joué à la poupée jusqu'à l'âge de douze ou treize
ans. Le groupe de jeu comportait en plus de Najat, une sœur cadette,
Sabah, et deux cousines habitant une maison voisine. Comme dans le cas
de Souad, c'est toujours et uniquement la fête de mariage, la tamgra, qui
était mise en scène. Selon Najat, elles aimaient beaucoup ce jeu de
poupée, c'était à chaque fois quelque chose de spécial. Elles le jouaient
souvent au début des années 1980 sauf s'il faisait trop froid.
Le jeu commence en construisant ou en réparant la maison de poupée
dans le jardin de la maison paternelle de Najat, toujours au même
endroit. C'est une maison de poupée rectangulaire assez grande,
d'environ 1 m sur 2 m, avec une chambre dans chaque coin où les quatre
filles peuvent s'asseoir à l'aise. La maison et les chambres sont délimitées
par une rangée de pierres bien propres et un peu brillantes de la grandeur
d'un poignet et complétées à certains endroits avec des morceaux de
verre blanc et vert provenant de bouteilles cassées. A la chambre du coin
supérieur droit un petit escalier, fait de deux roseaux auxquels des
morceaux d'une planche sont attachés par des rubans, mène à la terrasse
virtuelle. Une fois que la maison de poupée est en ordre elle est nettoyée
avec un peu d'eau et avec quelques herbes ou fleurs de champs un jardin
de fleurs est créé.
136
Maintenant chaque fille commence à confectionner sa tislit ou jeune
mariée. Elles rivalisent pour faire une belle tislit et si une poupée est
jugée ne pas assez belle elle est aussitôt refaite. Un isli ou jeune marié
est aussi fabriqué par chaque fille. Ainsi ce sont quatre couples pour qui
la fête de mariage est faite en dansant et en chantant comme s'il s'agissait
d'un vrai mariage. Deux filles s'accompagnent avec le tellunt, un
tambour à main ou bendir, les deux autres avec le tèbja, une flûte à corne
de mouton. Deux scènes sont mimées durant cette fête de mariage. La
première scène est celle de faire monter la poupée tislit sur une poupée-
mouton et dans la deuxième scène l'isli, portant un bâton tenu par la fille
qui manipule la poupée et signe distinctif de l'autorité du mari, accueille
sa tislit chez lui. Il y a aussi un dîner avec des tomates et du pain.
La poupée-mouton représente le mouton que la famille du jeune marié
apporte chez la jeune mariée et que cette dernière monte pour qu'elle ait
une bonne vie. Pour figurer cela, la poupée-tislit est couchée sur le dos
de la poupée-mouton et ainsi elles font une petite promenade (fig. 81).
Cette poupée-mouton est faite avec un vieux bidon d'huile autour duquel
un morceau de peau de mouton usé est cousu. Les pattes sont quatre
pilles usées et deux cornes de mouton sont fixées au bon endroit.
Ce jeu de poupée qui dure plusieurs heures peut être interrompu pour se
continuer plus tard. Dans ce cas Najat apportait ses poupées à la maison
sans que sa mère ne s'y soit opposée. Une fois la fête de mariage de leurs
81
137
poupées terminée, les filles s'amusent à tout casser, même les poupées,
en jetant des pierres et cela avec beaucoup d'hilarité.
Quand j'ai demandé à Najat en septembre 1996 si elle voulait recréer
le plus fidèlement possible la poupée-jeune mariée de son enfance elle
m'a offert lors d'une nouvelle visite trois poupées-jeunes mariées.
La première tislit (fig. 82) a une armature de deux roseaux ligaturés en
forme de croix avec un ruban d'étoffe. Au centre d'un morceau de tissu
bleu une ouverture est faite pour pouvoir draper le survêtement ou tfina
sur les bras et le corps de la poupée. Ce vêtement unique est cintré par un
ruban jaune. La jeune mariée a des cheveux, avec deux longues tresses
devant les bras, faits de fils de laine brune tirés d'un vieux tapis. Le
foulard est un chiffon rouge tenu en place par un ruban blanc. Deux
grandes boucles d'oreilles avec chacune trois perles passent à travers le
foulard. Cette poupée-jeune mariée sans traits de visage a 28 cm de
hauteur et une envergure de bras de 21 cm.
La deuxième tislit (fig. 83 côté droit) a la même armature que la
précédente, mais les bras sont faits avec un morceau de la moitié d'un
82 83
138
roseau. Cette poupée est vêtue d'un vêtement unique, un long morceau
de tissu rose à motifs brillants rectangulaire, serré à la taille par un ruban
du même tissu. Autour de la tête est noué un foulard lui aussi du même
tissu. Sous ce foulard sont fixés les cheveux qui pendent en deux tresses
devant les bras. Comme pour la poupée précédente les cheveux sont faits
avec des fils de laine brune tirés d'un vieux tapis. Cette poupée mesure
27 de haut et 13,5 cm pour l'envergure des bras. Elle non plus n'a pas de
traits de visage.
Pour la troisième tislit (fig. 84) le même type d'armature est utilisé
sauf que cette fois le morceau de la moitié d'un roseau traverse le roseau
vertical et est fixé par une bandelette.
Le survêtement unique est un
morceau rectangulaire de coton qui a
en son centre une fissure pour laisser
passer la tête de la poupée. Ce
vêtement blanc à motifs bleu est
serré à la taille par une ceinture de
fils de laine noire et rouge. Un
morceau de tissu blanc est utilisé
pour couvrir la tête. Contrairement à
toutes les autres poupées faites par
Najat et ses sœurs, cette poupée a un
visage dessiné au stylo noir pour les
yeux et sourcils et au stylo rouge
pour la bouche et le maquillage sur
les joues. Les cheveux qui pendent
sur le dos en une longue et large
tresse sont faits avec des fils de laine
beige tirés d'un vieux tapis. Un
foulard enveloppe la tête et est fixé à
la hauteur du cou par un ruban, tous
deux du même tissu que la robe.
Cette poupée mesure 22,5 cm de haut et l'envergure des bras 10 cm.
L'isli, la poupée-jeune marié que Najat a refait à ma demande un peu
plus tard, est bien plus simple (fig. 83 côté gauche, p. 137). L'armature
en forme de croix, avec un morceau de la moitié d'un roseau introduit
dans la fissure faite en haut du roseau vertical et fixé par un ruban pour
84
139
former les bras, n'est vêtue que d'un jellaba et d'un turban faits avec un
tissu mauve. Cette poupée mesure 19,5 cm de haut et 8,5 cm pour
l'envergure des bras.
La plus jeune des sœurs Laabib, Sabah, est née à Midelt en 1973. A
Ksar Assaka, elle jouait ensemble avec sa sœur Najat au mariage des
poupées. Sabah à refait fin 1996 des poupées de son enfance lorsqu'elle
avait environ dix ans, c'est-à-dire vers 1983. Elle a créé trois modèles
différents dont deux en armature de roseau et un autre à épis de maïs.
La poupée à épis de maïs, de 19 cm de haut avec une envergure des
bras de 11,5 cm, est confectionnée de la manière suivante (fig. 85). A
cinq centimètres du haut de
l'épis de maïs est introduit
la moitié d'un morceau de
roseau servant de bras. Les
cheveux longs roux-brun
noués avec un fil rouge-noir
ne sont autres que la barbe
de l'épi. Le vêtement unique
consiste en un morceau de
tissu molletonné provenant
d'un vêtement de bébé usé
de couleur verte à
l'extérieur et blanche à
l'intérieur. Une petite
fissure faite dans le tissu
permet de faire passer les
cheveux et la tête de la
poupée. Une partie blanche
du tissu enveloppe les bras.
Un petit ruban d'étoffe
bleue sert la taille. Le haut
de l'épi de maïs qui forme la
tête ne porte pas de traits de
visage. A l'arrière la robe est tenue en place avec la tige qui transperce le
tissu. L'utilisation d'un épi de maïs pour confectionner une poupée est
aussi attestée pour le village de Tizal près d'El Khemis.
85
140
Pour sa seconde poupée Sabah a utilisé deux moitiés d'un morceau de
roseau qu'elle a ligaturés en forme de croix avec un ruban (fig. 86, côté
gauche). Les cheveux blonds abondants de cette poupée de 23 cm de
haut avec une envergure des bras de 18,5 cm sont faits avec du chanvre.
Ces cheveux longs entourent complètement le haut du roseau vertical ne
laissant rien apparaître du visage de la poupée. Les cheveux qui pendent
par-devant les bras sont tressés vers le bas. Comme tout vêtement elle
porte un morceau d'étoffe rouge à points noirs découpé dans une vieille
jellaba. Au milieu de ce morceau de tissu rectangulaire un petit trou
permet de le draper au-dessus des bras et du corps, la taille étant
accentuée par une large ceinture mauve et noire. Le bas de la robe est
par-devant retenu en place par l'extrémité du roseau.
86
141
La plus grande des trois poupées utilise comme armature un roseau en
entier dans lequel Sabah a introduit à 6 cm du haut un demi-roseau (fig.
86 côté droit, p. 140). Elle mesure 35 cm de haut et l'envergure des bras
18 cm. Cette poupée porte drapée au-dessus des bras un joli vêtement
transparent blanchâtre à motifs carrés de fils dorés. Un ruban du même
tissu sert la taille. Un coquillage attaché avec une épingle de sécurité est
l'unique bijou de cette tislit. Le plus remarquable à cette poupée sont ses
cheveux verts tressés faits avec des feuilles de roseaux. Sur les côtés de
la tête ces tresses forment deux grandes boucles qui sont tenues en place
en haut du roseau par un grand foulard multicolore qui enveloppe toute
la tête ne laissant pas apparaître le visage. Cette coiffure imite l'ancienne
coiffure typique de la région, appelée ikherbèn, que portait encore la
grandmère de Sabah mais que sa mère ne portait déjà plus.
Aussi bien Souad que Najat et Sabah Laabib affirment qu'un prénom
n'est pas donné à la tislit ni à l'isli. Ce fait de ne pas donner de prénom à
la poupée fut confirmé en septembre 1999 par deux filles de huit et neuf
ans vivant dans le
village Zaïda sur la route
de Meknès à Midelt et à
30 km avant cette
dernière ville (voir le
chapitre "Toys, Play,
Signs, Meanings and
Communication" (p. 79)
dans Rossie, Toys, Play,
Culture and Society).
Aïcha Aït Mamou,
née à Ksar Assaka en
1941 où elle a passé sa
jeunesse et la mère des
trois sœurs sus-
mentionnées, jouait avec
pareilles poupées de
roseau vers 1950. Elle a
spontanément refait la
tislit de son enfance en
octobre 1998 (fig. 87).
87
142
L'armature de cette poupée consiste d'un roseau entier auquel la moitié
d'un roseau est ligaturé en forme de croix (H = 29 cm, envergure des
bras = 11 cm). Comme sous-vêtements elle porte trois chiffons et comme
survêtement un morceau d'étoffe multicolore à motif végétal et avec des
lignes dorées verticales parallèles. Au centre de ces pièces d'étoffe un
trou fut fait pour pouvoir les passer au-dessus de la tête. Le foulard est
un large chiffon dont les deux bouts sont fixés au survêtement avec une
épingle. Un chiffon noir représentant les cheveux entoure le haut du
roseau vertical où il est tenu en place par un ruban. Ce ruban et le foulard
sont de la même étoffe que le survêtement. Des yeux et des sourcils
noirs, un nez et une bouche rouge et des joues rouges forment les traits
de visage. Un miroir caché dans une boîte de fer blanc singularise la
poupée. Jusqu'au début des années 1990 un pareil miroir attaché à un
foulard rouge cachait le visage de la fiancée pendant la fête de mariage.
Bien que ces miroirs se trouvent encore au marché local en octobre 1998
on m'a certifié que cette partie du vêtement nuptial ne se voyait plus.
Aïcha Aït Mamou a expliqué qu'une croyance spécifique faisant
référence à la grossesse était liée à ce miroir. Cette croyance stipule que
la jeune mariée ne deviendrait pas enceinte si longtemps que la boîte
n'est pas ouverte mais qu'elle n'a qu'à se regarder dans le miroir si elle
voulait avoir un bébé.
Aïcha Merghad, une femme d'environ soixante ans en 1998 né dans le
village Aït Sidi Amar de la région El Ayachi productrice de pommes
située à environ 20 km avant Midelt en venant du Moyen Atlas, a elle
aussi refait sa poupée d'enfance. L'armature de la tislit ou jeune mariée
qu'elle a faite en octobre 1998 consiste d'un morceau de roseau et un
bâtonnet liés en forme de croix. Les traits de visage ressemblent celle de
la poupée précédente. Les seins de cette poupée sont obtenus en mettant
deux petites pierres sous les vêtements qui consistent d'un sous-
vêtement, un survêtement, une ceinture et un foulard provenant du même
tissu blanc à points multicolores (fig. 88, p. 143, H = 25 cm, envergure
des bras = 14 cm).
Déjà en novembre 1997 Aïcha Merghad avait refait deux exemples
des poupées avec lesquelles elle jouait vers la fin des années 1940 mais
cette fois-ci l'armature verticale est un os.
143
L'armature de la première poupée est un os de 11 cm de long auquel est
attaché avec un ruban un demi roseau en forme de croix (fig. 89 côté
droit, p. 144, H = 33 cm, envergure des bras = 12 cm). Le visage étant
caché par un voile l'os n'est pas visible. Cette armature est vêtue d'un
sous-vêtement vert à points blancs, un tshamir ou longue blouse bleue à
lignes blanches et d'un tfina ou survêtement blanc à points bleus, rouges
et bruns. Trois pièces du même tissu créent la ceinture, le grand foulard
et le ruban tenant le foulard en place sur la tête de la poupée. Comme j'ai
pu le constater en novembre 1997, la jeune mariée porte un grand foulard
de ce genre quand elle est conduite à la maison de son mari. La
deuxième poupée, qui ressemble de près la première, a le haut de l'os
88
144
entouré d'un foulard rouge qui tient en place de long cheveux. Elle porte
aussi un petit collier à perles blanches et un grand foulard jaune avec des
dessins géométriques gris et bruns couvrant totalement la poupée (fig. 89
côté gauche, H = 23 cm, envergure des bras = 8,5 cm).
Kemal Laabib, né à Ksar Assaka en 1971 et le dernier-né de Aïcha Aït
Mamou, m'a dit qu'il jouait avec des filles au mariage, mais avec une
petite fille comme jeune mariée et un petit garçon comme jeune marié.
Cela se passait entre ses quatre à six ans. Une fois l'âge de six ans passé
jouer ensemble avec les filles ne se faisait plus. Il se rappelle aussi
d'avoir fabriqué la poupée de roseau, mais cela restait certainement une
exception.
Mhamed Bellamine, un homme né à Ksar Assaka en 1968 m'a raconté
en mai 2000 que lorsqu'il était enfant les filles et les garçons entre six et
dix ans jouaient ensemble au mariage à Ksar Assaka. Une belle fille était
89
145
choisie comme jeune mariée et son maquillage se faisait avec du khol et
du rouge à lèvre. Un garçon était choisi à tour de rôle pour jouer le jeune
marié. Avec des pierres le plan d'une maisonnette était réalisé et du
matériel de récupération comme des boîtes de sardines ou de vieilles
batteries de radio représentaient les ustensiles de ménage. Alors les filles
font des youyous pendant que la jeune mariée et le jeune marié sont
amenés à la maison ou la cérémonie du henné est exécutée en utilisant de
la boue. Puis les enfants leur donnent la bise d'adieu et leur souhaitent
bonne chance. Ce jeu de mariage comporte aussi une dînette pour
laquelle les enfants recevaient parfois un peu d'huile et des légumes de
l'un ou l'autre adulte. Mhamed soulignait que ces légumes étaient
préparés mais pas mangés. La même chose se passait lorsque du thé était
préparé.
A Tataouine, situé sur la piste en direction du Jbel Ayachi à 11 km de
Midelt, et avec l'aide de Mohamed Hammioui, un instituteur local, j'ai
reçu en septembre 1999 huit poupées, quatre faites par des filles (fig. 90)
et quatre faites par une mère (fig. 91, p. 146). Avec pareille tislit ou
poupée-jeune mariée et parfois aussi avec un isli ou poupée-jeune marié
les filles jouent normalement au mariage dans des maisonnettes
délimitées par des pierres.
90
146
Avec pareille tislit ou poupée-jeune mariée et parfois aussi avec un isli
ou poupée-jeune marié les filles jouent normalement au mariage dans
des maisonnettes délimitées par des pierres. L'armature de ces poupées
se fait avec un roseau ou un os auquel un bâtonnet est attaché en forme
de croix. Certaines poupées ont des traits de visage éventuellement
incrusté dans le roseau au fer rouge. Les cheveux d'une de ces poupées
n'est autre que la barbe de l'épis de mais pour les autres un peu de
cheveux de fille furent utilisé. Une petite poupée est la copie de la
poupée telghenja utilisée pour implorer la pluie.
Dans le village Tabenatout à 4 km de Midelt sur la route vers
Tataouine j'ai vu comment les filles donnaient de très long cheveux à
leur tislit ou poupée-jeune mariée en novembre 1997. Afin de créer ces
cheveux très estimés et quatre fois la longueur de la poupée elle-même
les filles cherchent la partie supérieure d'un jeune roseau avec des
longues feuilles vertes. Avec ses ongles Imane Bâalil, la fille de treize
ans que l'on voit sur la photo, divise deux ou trois feuilles en fines
bandelettes (fig. 92, H = 16 cm, longueur des cheveux = 49 cm). Ces
bandelettes de feuille de roseau sont attachées en haut du roseau vertical
de l'armature de la poupée avec une autre bandelette de feuille ou avec
du fil. A environ 5 cm du haut de ce roseau une branchette et percée
horizontalement pour former les bras. Puis un ou plusieurs chiffons sont
91 92
147
mis au-dessus des bras et cintré au niveau de la taille par un ruban
servant de ceinture. Les traits de visage sont parfois dessinés sur le
roseau avec un feutre et les cheveux peuvent être tressés.
Une fille de huit ans vivant dans le village Zaïda situé le long de la
route de Meknès à Midelt et à 40 km de cette dernière ville, utilise en
septembre 1999 comme maison de poupée une maisonnette que je n‟ai
pas encore vue ailleurs au Maroc ou trouvée dans la bibliographie
concernée et qui me semble être une vraie nouveauté dans les campagnes
marocaines. Probablement à cause de l‟interdit de jouer dehors dans la
'saleté', cette fille a inventé une maison de poupée qui contourne les
objections de sa mère dont le mari est un instituteur. Il s'agit d'une
maison de poupées faite dans une boîte de carton. Cette fille a découpé
dans les quatre côtés de la boîte des fenêtres et une porte de telle manière
qu'elles peuvent s'ouvrir et se fermer (fig. 93). Les faces intérieures des
fenêtres et des portes sont garnies de rideaux et il y a aussi quelques
coussins cousus par la fille et des grands ou petits chiffons servant de
tapis et de couvertures.
93
148
Cette fille et une autre fille, qui est sa voisine et possède la même maison
de poupée, jouent souvent à la fête de mariage avec pareille maison de
poupée et un poupée-jeune mariée (fig. 94, H = 21 cm). La poupée-
jeune mariée est aussi particulière que la maison de poupée. C'est une
poupée importée en plastique du genre Barbie vendue dans les magasins
locaux mais ne servant normalement que comme objet de décoration
après que les grandes filles ou les femmes lui ont crocheté une robe
andalouse (fig. 95). Avec quelques chiffons ces filles confectionnent les
vêtements de leur poupée en plastique. Au centre d'un chiffon un trou est
fait pour pouvoir le mettre sur les épaules de la poupée après que sa tête
a été enlevée. Les côtés du vêtement sont alors cousus. Selon ces deux
filles un prénom n'est pas donnée à la poupée-jeune mariée. Il peut aussi
y avoir un jeune-marié représenté par une poupée Papa Noël comme
celle tenue en main par une fille de deux ans du village Ignern et que sa
mère a achetée au marché de Taliouine pour 5 dirham (0,5 Euro).
94 95
149
Quand j'ai photographié
cette fillette en novembre
1998 on m'a raconté que
le nom local de cette
poupée en plastique est
afkir ou vieil homme (fig.
96). Les cérémonies de
mariage le plus souvent
représentées sont le jour
de l'arrivée des vêtements
et des autres cadeaux à la
maison de la jeune
mariée et le jour où la
jeune mariée quitte sa
maison pour être
conduite à la maison de
son époux. Pendant leur
jeu de poupée ces filles
chantent et dansent
comme lors d'un vrai
mariage et un dîner
virtuel est dégusté bien
qu'il arrive que des noix
soient mangées. En jouant avec des poupées en plastique importées les
techniques traditionnelles de fabrication d'une poupée peuvent rester
utile. Regardant de près la poupée de la figure 94 (p. 148) j'ai remarqué
la manière originelle utilisée par la fille qui a remplacé les bras
manquant de sa poupée en plastique par un morceau de roseau selon la
manière utilisé pour faire les bras des poupées traditionnelles.
A Aït Slimane, un petit village près d'Amellago dans le Haut Atlas et à
environ 50 km au nord de Goulmima, j'ai trouvé en septembre 1999 un
groupe de cinq enfants de six ou sept ans en train de jouer dans leur
maison de poupée (fig. 97, p. 150). Deux filles ont accepté de se laisser
photographier avec leur tislit ou poupée-jeune mariée (fig. 98, p. 150).
Les enfants disaient qu'ils jouent toujours à la tamgra ou fête de mariage
pour laquelle un isli, la poupée-jeune marié, est aussi utillisé.
96
150
Là où à Goulmima, une petite ville amazighe des Aït Merghad sur la
route de Ouarzazate à Errachidia et à 58 km de cette dernière ville, la
poupée en plastique, la 'poupiya', semble avoir remplacée la poupée
locale à armature de roseau, la tislit, cela n'était pas le cas en 1980 ou
même en 1985. L'évolution fut graduelle comme dans la famille Lihi où
Aïcha jouait avec une tislit et Rachida, sa sœur cadette, avec une tislit
fabriquée par elle-même et avec une 'poupiya' que sa mère lui ait
donnée.
97
98
151
A Magaman, un village tout proche de Goulmima sur la route vers
Tadirhoust, des fillettes amazighes de la deuxième année de l'école
primaire confectionnent encore des poupées. Sur la figure 99 on voit ces
filles de sept ans avec leur poupée à la main. J'ai obtenu ces poupées et
les informations ci-dessous grâce à l'aide de l'instituteur de cette classe,
mon ami le poète Omar Taous de Goulmima, en novembre 1996.
Des huit poupées sept représentent une tislit ou jeune mariée et une
représente un isli ou jeune marié (fig. 100-101, p. 152-153, voir aussi
Rossie e.a., 1998, vidéo, p. 321). L'armature en forme de croix est
pareille pour toutes les poupées. Quatre poupées ont une armature en
roseau, deux en branchettes, une en morceaux de bois, les bras étant
attachés aux corps par une bandelette de coton ou de plastique. Pour la
huitième poupée un morceau de tuyau en plastique rouge à été utilisé qui
est traversé par une branchette pour faire les bras. Aucune de ces
poupées ne porte de traits de visage. Elles sont assez rudimentairement
vêtues avec un ou maximum deux vêtements, des chiffons rectangulaires
au centre duquel un petit trou fut fait pour pouvoir passer la tête. Le
survêtement est blanc, blanc à motifs géométriques verts, rouge à lignes
noires, transparent noir, et multicolore.
99
152
La poupée avec corps en tuyau en plastique porte un survêtement
transparent avec motif floral doré et vert cintré à la taille avec une
ceinture de la même étoffe. Cette poupée porte un collier de perles vertes
en plastique. Les autres poupées ne portent aucun bijoux et ont, sauf une,
les vêtements cintrés à la taille par une bandelette de tissu. La poupée qui
fait exception quant au survêtement porte une longue bande d'étoffe
blanchâtre à motifs verts, plusieurs fois enroulée autour du corps en
dessous des bras. Bien qu'aucune poupée ne porte un foulard, les filles
disent que parfois elles en mettent un sur leur poupée. La poupée-jeune
marié ou isli est très sommairement habillée avec un chiffon transparent
mais normalement il devrait encore porter un survêtement. La hauteur
maximale des poupées est 18 cm et la hauteur minimale 13 cm.
100
153
Bien que ces poupées aient été apportées à la demande de leur
instituteur, les filles déclarent unanimement qu'elles jouent avec ces
poupées locales à la maison. Suite à ma question si elles ont aussi des
poupées en plastique, la réponse des filles est qu'elles préféreraient des
poupées en plastique si elles pouvaient en avoir. Mais quand un garçon
101
154
réagit en disant que la poupée locale est préférable parce qu'elle ne coûte
rien plusieurs filles changent d'avis. Ce revirement d'avis reflète
probablement la différence entre la réalité et les rêves de ces filles
villageoises.
Avec leurs poupées les filles jouent aux cérémonies de mariage. Pour
jouer à cela une fille déclare qu'elle fait la tislit et sa sœur l'isli. Une fois
que la poupée-jeune mariée et la poupée-jeune marié sont couchées sur
deux pierres plates les chants de circonstance commencent. Parfois les
filles jouent avec leurs poupées à la danse ahîdûs, la danse amazighe
typique, en utilisant un petit seau pour rythmer leurs chants et leur danse.
Toute la classe s'accorde pour dire que les garçons ne font pas de
poupées et les filles ajoutent que parfois une fille fait une poupée pour sa
petite sœur pour jouer ensemble en chantant.
Dans le petit village Ighrem-n-
Cherif, à proximité de Goulmima et
de l'autre côté de l'Oued Gheris, des
filles confectionnent aussi une
poupée-jeune mariée du même
genre. Hesna Midouan, une fille
amazighe non-scolarisée de six ans, à
fait en novembre 1994 la poupée
'tislit' de la figure 102. Cette poupée
de 21,5 cm de hauteur avec une
envergure des bras de 6,5 cm porte
sur une armature de roseau en forme
de croix un unique vêtement long de
cotonnade à fleurs multicolores
cintré par une bandelette du même
tissu. En haut du roseau un foulard
de la même étoffe coiffe la tête sans
traits de visage.
Bien au sud de Midelt, près de
Merzouga en bordure des dunes de
sable de l'Erg Chebbi, les filles
amazighes du petit village de Ksar
Hasni Biad offrent aux touristes des
poupées-femmes traditionnelles. 102
155
Ainsi une dizaine de filles m'ont proposé début février 1997 leurs
poupées. J'en ai acheté trois qui représentaient une certaine diversité à
dix dirhams (1 Euro) par poupée.
Les trois poupées ont une armature d'un roseau vertical assez gros
auquel a été ligaturé par-devant la moitié d'un roseau pour former les
bras. La première poupée faite par une fille d'environ cinq ans n'a que
des traits de visage très effacés avec yeux, sourcils, nez, bouche et
tatouages (fig. 103). La bouche est un trait droit. Les bras et le corps sont
enveloppés de trois morceaux d'étoffes donnant de l'ampleur à la poupée.
Au-dessus elle porte deux pièces de tissu rectangulaires, une de couleur
rose et l'autre bleue. Une bandelette jaune croisée devant les bras ainsi
qu'une ceinture de fils de laine orange serrent les vêtements. Un grand
foulard rouge tenu en place par un ruban rouge enveloppe le haut de la
tête. Un petit collier de perles plastiques blanches décore la poupée. Aux
deux extrémités de ce collier un ruban est noué et permet de porter la
poupée. Cette poupée mesure 23 cm de hauteur avec une envergure des
bras de 9,5 cm.
104 103
156
La deuxième poupée, achetée à une fille de sept ans, a des traits de
visage plus clairs mais en même temps sur un côté des traits effacés
comme si le roseau avait reçu un nouveau visage (fig. 104, p. 155). Au-
dessus des yeux et sourcils se trouve un tatouage en V retourné et les
joues portent deux points. La bouche en croissant est prolongée par une
ligne médiane avec trois points de chaque côté. Sur la tête se trouve un
large foulard rouge fixé par un ruban vert-gris. En dessous des bras un
morceau du même tissu que le ruban entoure plusieurs fois le roseau
pour donner du ventre à la poupée. Comme survêtement une cotonnade
blanche rectangulaire a été passée, par un trou au centre de l'étoffe, par-
dessus la tête. Un ruban vert-gris croisé sur la poitrine et deux fils verts
aux poignets tiennent les vêtements en place. Juste en dessous des bras
des paillettes sont cousues en forme d'ovale sur le vêtement blanc. Ce
vêtement blanc à l'intérieur mais déjà assez sale à l'extérieur ainsi que les
deux visages soutiennent l'information, donnée par un marchand de tapis
du même village, que les filles jouent avec leurs poupées avant de les
vendre à des touristes lorsque l'occasion se présente. La hauteur de cette
poupée est 22 cm et 9 cm pour l'envergure des bras.
La dernière poupée d'un aspect plus neuf est en même temps la plus
typique des trois poupées (fig. 105, p. 157). Elle appartenait à une fille
d'environ sept ans. Le visage se compose des yeux avec sourcils et deux
points pour le nez en noir, d'un trait droit pour la bouche et deux rondes
sur les joues en rouge. Sur le front se trouve un tatouage de quatre points
noirs en forme de losange. Tous ces traits sont faits avec une sorte de
goudron noir ou du vernis à ongles rouge. La coiffure, appelée ikherbèn,
consiste en deux grandes nattes faites d'un morceau de datte enveloppé
d'étoffe noire, le tout collé sur le côté du roseau. Un fil de laine rouge et
verte tient en place un grand foulard vert foncé. Un morceau de tissu
contourne plusieurs fois le roseau en dessous des bras de telle manière
qu'un ventre bien grand se profile (fig. 106, p. 157). Au-dessus, d'abord
un grand carré de tissu jaune plié en deux et puis un autre morceau
d'étoffe orange rectangulaire. Afin de pouvoir passer ces vêtements par-
dessus la tête de la poupée, une fissure est faite à l'endroit voulu. Deux
petites boules de tissus ont été glissées sous les vêtements pour figurer
les seins. Le tout est alors profilé par un ruban vert passé en croix par-
devant et en dessous des bras. C'est aussi la plus grande des trois
poupées avec ses 25 cm de hauteur, l'envergure des bras étant 11 cm.
157
En 2001 Luc Lauras a acheté une
quarantaine de poupées de jeunes
femmes nomades vivant dans
leurs tentes récemment plantées
près de la piste à Merzouga (fig.
107). L‟achat de ces poupées
faites pour les touristes mais
ressemblant les poupées faites par
les filles de Ksar Hasni Biad
cadrait dans l‟exposition du
Musée International des Arts
Modestes à Sète sur la côte
méditerranéenne (novembre 2001
– février 2002). Lorsque Luc
Lauras m‟a invité à participer à
l'exposition Modesties Exotiques,
j‟y ai exposé ma collection de 107
105 106
158
poupées des enfants amazighs de l‟Atlas et du Pré-Sahara marocains
(Rossie et Lauras, 2002, Vidéo). Comme le catalogue de cette exposition
ne fut pas imprimé j‟ai utilisé l‟article en question pour le numéro sur les
peuples amazighs de la revue interculturelle Passerelles (Rossie, 2002).
Dans le petit village amazigh d'Aït Ighemour, situé à 8 km du Jbel
Siroua à 2600 m d'altitude et à la fin d'une piste de 36 km partant du
village d'Anezal sur la route d'Amerzgane à Tazenakht dans la province
de Ouarzazate, j'ai pu obtenir en octobre 1992 une série de dix poupées
faites par des filles entre six et douze ans, ceci grâce à l'aide de Nour-
Eddine Ihbous un instituteur amazigh d'Essaouira qui y enseignait depuis
deux ans (fig. 108, 109 p. 159).
Pareilles poupées, qui sont déjà confectionnées par des filles de trois ans,
servent à jouer aux cérémonies de mariage, surtout celles qui devancent
l'entrée de la jeune mariée dans la maison de son époux. Pour cela les
filles sont assises derrière la tislit et chantent la chanson appropriée en
battant les mains.
L'armature de toutes ces poupées consiste en un roseau vertical auquel
on a fixé horizontalement une branchette avec une bandelette de tissu.
108
159
Cette armature porte trois à quatre vêtements que les filles mettent par-
dessus la tête de la poupée à travers une petite fissure au centre de
l'étoffe. Ces vêtements sont tenus en place par une ceinture d'étoffe. Le
tshamir ou survêtement est le plus
souvent un morceau de tissu à
dessins brillants. Une poupée porte
au-dessus du vêtement brillant
encore un autre de couleur blanche
mais par contre elle n'a pas de
foulard noir, signe distinctif des
femmes mariées et que portent les
autres poupées. Cette poupée
représente une jeune fille. La plupart
des poupées porte aussi le khèrraif,
un baudrier que la femme met sur
ses vêtements pour pouvoir attacher
les manches retroussées quand elle
travaille mais qui est aussi porté en
d'autres circonstances. Les baudriers des poupées sont faits avec des fils
de coton mais une poupée porte un baudrier en fil doré brillant ce qui
démontre qu'il s'agit d'un khèrraif de jour de fête lorsque les femmes
portent un baudrier brillant.
De sept des dix poupées l'on voit le roseau au niveau du visage mais
les traits de visage ne sont jamais dessinés. Un turban rouge, bleu ou
blanc coiffe la tête sans cheveux. Les poupées ne portent pas de bijoux et
selon les filles en question cela est toujours ainsi. La hauteur des poupées
varie entre 9,5 cm et 16 cm et l'envergure des bras entre 5,5 cm et 7 cm.
Dans ce même village où j'ai trouvé la poupée-homme à tête en
courgette faite par un garçon de dix ans (fig. 24, p. 76), un autre garçon
d'environ le même âge a fabriqué une poupée-femme d'environ 50 cm de
haut avec une grande pomme de terre comme tête et dont je n'ai
malheureusement pas pu faire une photo. Dans cette tête les yeux, le nez
et la bouche ont été incisés. Pour l'armature le garçon a introduit une
barre de fer, représentant les bras, dans le bâton vertical. Sur la tête se
trouve un mouchoir retenu en place par une bandelette ainsi qu'un
foulard rouge. Le survêtement rouge est cintré par une ceinture de la
même couleur et le khèrraif est fait avec des fils verts.
109
160
Ignern est un village amazigh d'environ soixante maisons situé à une
altitude de 1600 m et à 15 km du centre rural de Taliouine en venant de
Tazenakht. Une piste de 4 km partant de la route de Tazenakht à
Taroudannt y donne accès. Les filles de ce village confectionnent encore
en novembre 1996 des poupées tèslit ou jeune mariée. Pareille poupée-
jeune mariée faite par une jeune fille d'environ dix ans a une armature
composée d'un roseau vertical traversé horizontalement par une
branchette (fig. 110, voir aussi Rossie e.a., 1998, vidéo, p. 321). A
travers une fissure trois vêtements ont été drapés sur cette armature : un
morceau de tricot à rayures variant du brun au beige, puis une pièce de
coton à rayures bleues et blanches et au-dessus un morceau de tricot
rouge qui ne vient qu'à la taille. Enfin un morceau de tissu blanc
transparent est replié sur la ceinture faite d'un fil de plastique rouge.
Cette poupée porte de jolis cheveux roux, faits avec la barbe d'un épis de
maïs, et tenus en place par un ruban de la même étoffe que le vêtement
de coton. Le morceau de roseau qui apparaît sous le ruban ne porte pas
de traits de visage. Cette poupée mesure 20 cm de haut avec une
envergure des bras de 12 cm.
110 111
161
Ennèya, une mère de trente-cinq ans, m'a fait cette poupée qui consiste
en un roseau dans lequel une branchette est introduite pour former les
bras (fig. 111, p. 160, voir aussi Rossie e.a., 1998, vidéo, p. 321). Le
visage de la poupée - avec yeux, nez et bouche - est dessiné avec une
extraction d'herbes nommée èktran, une sorte de goudron utilisée pour la
préparation des peaux de moutons. Trois couches de vêtements, dont
deux de couleur blanchâtre et la troisième à fond rouge, sont mises au-
dessus de la tête à travers une fissure faite au centre de l'étoffe. Une
bandelette bleue à motifs blancs sert la taille. Le zîf, un grand foulard, est
tenu en place par un amelul, une bandelette d'étoffe rouge, et une
couverture blanchâtre enveloppe la poupée. Cette poupée mesure 16 cm
de haut et l'envergure des bras est 9,5 cm.
Selon Ennèya les garçons ne
font pas de poupée-jeune mariée
et ne participent pas directement
dans le jeu de poupée des filles.
Ce qui arrive c'est que les filles
vont acheter dans les petits
magasins que les garçons se
construisent avec des pierres tout
se dont elles ont besoin pour leur
jeu de poupée en payant avec des
cailloux.
A Ignern des poupées en
plastique côtoient maintenant les
poupées traditionnelles. Selon
une fille de huit ans, quelques
filles viennent avec leur poupée
de plastique à la maison d'une
d'elles pour coudre à la main un
pantalon et une longue blouse
pour cette poupée. La poupée de
ce genre, montrée à la figure 112,
mesure 43 cm de haut et
appartient à une fille de neuf ans.
112
162
Dans une autre région amazighe, au village de Tizal près d'El Khemis
situé à 60 km de Marrakech sur la route reliant cette ville à Ouarzazate,
les filles jouaient encore au début des années 1980 avec des poupées à
armature de roseau qu'elles habillaient en jeune mariée avec des
vêtements de dessus brillants. Il arrivait que la taslit soit faite avec un épi
de maïs à travers duquel la fille piquait un bâtonnet pour former les bras.
La barbe de maïs, oui ou non tressée, était utilisée comme cheveux pour
la poupée. Comme bijou la poupée portait un collier de perles. Un trou
dans le mur de la cour intérieure de la maison faisait office de maison de
poupée. Selon des informations, provenant d'une femme amazighe de
Tizal d'environ 50 ans, la poupée de roseau de sa jeunesse mesurait entre
10 et 15 cm et l'armature était faite en forme de croix. Vers 1950, son jeu
de poupée imitait la cérémonie du henné, en préparation du mariage,
ainsi que le mariage lui-même. Au moment de jouer à la cérémonie du
henné, les filles se réunissent autour de la poupée. Une des filles joue le
rôle de la mère de la fiancée et une autre prête sa voix à la poupée.
Quand la mère applique le henné sur les mains de sa fille, toutes les deux
'pleurent' pendant que les autres filles chantent en amazigh :
Au nom d'Allah, le Miséricordieux, le Compatissant,
Dieu nous nous soumettons à Vous, Soyez avec nous,
Dieu sera avec toi ma fille, et avec nous.
Plus tard on fête le mariage de la taslit et les filles chantent alors :
La taslit est comme la fleur d'amande de la région d'Ihîhî, quand la
fleur s'ouvre, elle attire les abeilles.
Le dr. Guichard parlant en 1921 des jouets de Marrakech dans la revue
France-Maroc (p. 162-163), décrit et montre une 'chapelle' et un 'trône'
en miniature servant pour le jeu de poupée. Assise dans une petite
chapelle ou 'ammaria' en bois découpés, la mariée reçoit le soir de ses
noces l'hommage des invités et de son fiancé. Celui-là a sa propre chaise
'chilia' où il s'assied “pour y être en butte aux plaisanteries et aux niches
des invités qui lui plaquent à tour de rôle avec un peu de salive des
pièces de monnaie sur la figure”.
163
Les deux dessins des figures 113 et 114 copient la chapelle jouet et la
chaise jouet comme ils figurent sur la photo publiée par Guichard. La
petite chapelle, aussi bien que le siège, sont peints de couleurs vives et
ornés d'arabesques multicolores. Ce sont les ouvriers en bois qui
fabriquent ces deux jouets. Les parents les achètent pour leurs petites
filles surtout lors des fêtes de l'°ashûra, le dixième jour de l'année
musulmane, et de l'aïd es-seghrir, la fête qui termine le jeun du mois de
ramadan. Aujourd'hui pareils attributs sont encore utilisés pour un vrai
mariage, mais toutes mes informatrices m'ont dit ne jamais avoir joué
avec cette chapelle et ce trône en miniature, et, selon elles, ceux-là ont
du être des jouets d'enfants de familles riches.
Au début des années 1940, les jeunes filles de cette ville se fabriquaient
des poupées avec une armature de deux roseaux assemblés en forme de
croix. Pour modeler une tête et un visage, elles utilisaient parfois le
levain. Les traits de visage y étaient appliqués avec des produits de
maquillage locaux. Cette °arûsa se mariait avec son °arîs, la poupée-
jeune marié, selon le cérémonial de l'époque.
Madame Skouri, directrice de l'école Kbour Chou Filles (Essmara) à
Marrakech, m'a offert l'°arûsa de la figure 115 (p. 164). Cette poupée-
jeune mariée fut faite en 1961 ou 1962 par une fille de cette école, née en
1954. Il s'agit d'une poupée de 24 cm de hauteur avec une armature faite
d'un roseau vertical entier, auquel a été fixé, en forme de croix, la moitié
113 114
164
d'un morceau de roseau de 10 cm environ. Pour donner du corps à la
poupée, le croisement des roseaux et une partie en dessous de ce
croisement ont été
enveloppés avec des
chiffons. Un morceau de
tissu rectangulaire de
couleur verte, qui pend à
l'arrière de l'armature et
se montre un petit peu au
col, est caché par un
caftan blanc, au-dessus
duquel une tunique a été
mise, une tunique ouverte
des deux côtés et faite
d'un chiffon de tissu très
brillant de couleur
argenté. Tous ces tissus
sont tenus en place par
une ceinture faite avec
une petite bande de tissu.
Une large mantille
transparente, à grands
motifs floraux jaunes et
fixée à l'aide d'une épingle, sert de vêtement de dessus. Cette poupée n'a
pas de visage, mais madame Skouri certifie que d'autres poupées en
avaient un.
Bien que des jeunes femmes du quartier de Daoudiyât et de Douar
Akioud croient que la poupée traditionnelle ne se fait plus, Youssef Aït
Ammou de l'Université de Marrakech, affirme que l'on peut encore, ici et
là, voir dans certains quartiers populaires de Marrakech des jeunes filles
qui jouent en 1992 avec une poupée-femme en roseau.
Néanmoins, l'évolution de la poupée traditionnelle, en armature de
roseau faite par la fille elle-même, vers la poupée importée, le plus
souvent en plastique (fig. 117, p. 166) qu'on pouvait début 1992 acheter
au souk pour environ trois dirhams (0,3 Euro), semble avoir commencée
il y a plusieurs dizaines d'années, probablement après la deuxième guerre
mondiale, tout au moins dans les grandes villes. Cette évolution pourrait
115
165
même déjà être commencée vers 1900 car j'ai trouvé dans l'article de F.
Castells “Note sur la fête de Achoura à Rabat”, publié en 1915 (p. 342)
le témoignage suivant :
Quelques boutiques assiégées par les enfants vendent des jouets
d'importation européenne : fusils, pelotes, poupées, tambours,
clairons, etc. Les objets les plus brillants sont ceux qui ont le plus de
succès. A côté de ces boutiques se tient, accroupi devant sa
marchandise, un vieux représentant de la tradition qui offre, sans
beaucoup de succès, d'humbles petits jouets de fabrication indigène.
En milieu plus ou moins aisé de Marrakech, par exemple dans la famille
de madame Skouri, la poupée traditionnelle n'était plus utilisée vers 1950
ni par elle-même ni par ses nièces ou copines. En plus, ses propres filles
jouaient, au début des années 1970, avec des grandes poupées-enfants
importées, auxquelles elles mettaient des vêtements de bambins ou bien
des vêtements qu'elles, ou leur mère, confectionnaient (fig. 116). Les
bijoux que portait la poupée étaient ceux que possédait la fille. Selon les
besoins du jeu, cette poupée, portant le nom de Sofia ou Yasmina, était
vêtue en bébé, en petite fille ou en jeune femme.
116
166
Dans les milieux populaires de Marrakech la poupée en armature de
roseau a du survivre plus longtemps, et n'aurait pas encore totalement
disparue. Dans le quartier pauvre de Douar Akioud la plupart des filles
jouaient encore avec cette poupée traditionnelle vers 1980. Pourtant,
Fatima Kader, une jeune femme de vingt et un ans du même quartier,
jouait alors déjà avec une poupée en plastique, qu'elle habillait et
maquillait de tout cœur. Fatima à bien voulu refaire une copie, aussi
exacte que possible, de cette poupée avec laquelle elle jouait quand elle
avait environ neuf ans. Avant de décrire cette poupée, il faut tirer
l'attention sur le fait qu'il s'agit d'une jeune femme qui avait dès son
jeune âge une disposition et une habilité marquées pour la décoration et
le maquillage. Cela est d'ailleurs prouvé par le fait qu'elle s'est
développée d'une petite fille créant des poupées remarquables à une
jeune femme excellent dans l'art d'appliquer des figures complexes avec
le henné sur les mains et les pieds.
La poupée en plastique produite en masse
à Hong Kong ou ailleurs (fig. 117) s'est
transformée sous mes yeux en une véritable
jeune mariée de Marrakech (fig. 118, p. 167).
Pour arriver à ce résultat, Fatima a d'abord
donné à cette poupée en plastique des seins
en introduisant deux petites boules d'étoffe
sous le vêtement qu'elle porte déjà. Puis du
même morceau de vieille robe, dont seront
faits la robe et le long voile, un slip est
cousu. Dans un morceau rectangulaire de
cette étoffe blanche plus ou moins
transparente, un trou est fait pour la tête et
deux autres petits trous pour les bras. Une
fois la robe mise en place, les côtés sont
cousus. Vient alors le moment de la pose de
la chevelure à base de laine de couleur naturelle foncée. Ces longs
cheveux sont fixés sur la tête avec de la colle, d'un tube de colle acheté
au magasin du coin, puis tressés en deux nattes au bout desquelles
Fatima a mis un élastique avec ornement en plastique, un élastique très
utilisé pour les cheveux des petites filles. Avec la même laine et la même
colle la poupée reçoit des sourcils et des mèches de cheveux sur le front.
117
167
Pour accentuer la bouche et les joues de la poupée une laque rouge est
utilisée, tout comme de l'eye-liner noir est utilisé pour marquer le
contour des yeux, les sourcils et les mèches sur le front. Cet eye-liner est
aussi employé pour appliquer les figures géométriques sur le menton et
au-dessus du nez et la tache de beauté sur la joue gauche. Les ongles des
mains et des pieds ont
été laqués en rouge.
Juste au-dessus des
mèches de cheveux se
trouve le kherîr, une
décoration en fils de
coton mercerisé rouge.
Cette décoration, qui
est aussi portée par les
jeunes mariées, se
caractérise par un
losange avec au milieu
du losange une tige
verticale en fils de
couleur dorée. Des
deux côtés de ce
losange pend un long
bout de fils tressés, fait
des mêmes fils de coton
mercerisé formant le
losange, et avec lequel
le losange est noué
autour de la tête. La
coiffe-voile, du même morceau de tissu que la robe, est tenue en place
avec un autre kherîr de couleur mauve. Deux ceintures de fils de coton
mercerisé tressés, une de couleur rouge et une de couleur verte et
blanche, contournent la taille. Le collier et les deux bracelets de la
poupée ont été faits à partir d'un collier d'enfant aux grosses perles vertes
et petites perles jaunes à traits verts. Comme dernier bijou Fatima a
introduit dans la tête de la poupée deux boucles d'oreilles, boucles
d'oreilles pour petite fille faites d'une pièce de métal jaune à laquelle sont
attachés trois petits pendentifs à perles vertes et oranges.
118
168
Les deux kherîr, les boucles d'oreilles, le collier d'enfant, les deux
élastiques à ornements, la laque et l'eye-liner utilisés pour embellir la
poupée, ont été achetés à la médina de Marrakech par Fatima et une amie
en vue de la confection de la poupée. Mais quand Fatima était petite, elle
utilisait pour cela ces propres bijoux ou ceux qu'elle arrivait à emprunter
à sa grand-mère, mère ou autre parente, ainsi que leurs produits de
maquillage.
Pour jouer au mariage de la poupée-jeune mariée - mais sans qu'il y ait
une poupée-jeune marié ou un petit garçon qui la remplace - les filles de
Douar Akioud, de la génération
de Fatima, se rassemblent en
petits groupes de quatre à six
filles, entre cinq et dix ans, et
s'en vont aux jardins potagers à
quelque distance des maisons.
Là une maison de poupée est
construite avec des petits murs
de cailloux couverts de sable
humide et la poupée est mise
dans un des coins de cette
maison (fig.119, copie du
dessin fait par Fatima).
Actuellement ce genre de maison de poupée se bâtit encore. Une fois que
tout est mis en place, les filles chantent et dansent comme il se fait pour
un mariage. Quand le mariage de l'°arûsa est terminé, les filles se
donnent la bise et retournent chez elles.
Une photo d'une maisonnette plus ou moins carrée, délimitée par des
pierres de différentes dimensions avec deux petites ouvertures pour une
porte d'entrée et une porte à l'arrière et dans l'espace ainsi marqué un
assortiment de boîtes vides et deux morceaux de tissus rectangulaires
représentant l'ameublement et les ustensiles, se trouve dans le livre
Enfants du Maghreb entre hier et aujourd'hui de Mohamed Sijelmassi
(1984: 94).
Dans le quartier Daoudiyât de Marrakech et selon les informations
limitées recueillies sur place, les filles, qui avaient entre 6 et 12 ans dans
les années 1970, jouaient-elles aussi au mariage. Cependant c'était des
enfants qui jouaient le rôle de la fiancée et du fiancé, non pas des
poupée
119
169
poupées. Le même genre de poupées en plastique que celui de Douar
Akioud, vêtues et maquillées par les filles, servait de bébé ou de petit
enfant que l'on porte dans le dos, qu'on nourrit ou qu'on dorlote. Pour
cette poupée une maison de poupée d'un autre type était construite. Trois
rangées de boîtes de sardines assez grandes, sont placées en trois étages
contre un mur formant ainsi les pièces d'une maison citadine. Une autre
boîte posée au sol sert de lit de poupée. Une petite boîte de conserve
ronde représente le plat de nourriture ou la cuve de lessive.
Une étudiante du Département de Français de l'Université Cadi Ayyad
de Marrakech déclare en novembre 1993 qu'elle jouait au mariage à
Ouarzazate ville vers 1980 et cela aussi bien avec des poupées de roseau
confectionnées par elle-même, comme le faisaient les filles plus âgées,
qu'avec des poupées d'origine européenne tout habillée. Cependant, la
poupée de roseau ne se trouve plus en début 1990 dans la ville mais
seulement encore dans les villages. Ces poupées servent aussi au jeu de
maman et bébé, la fille étant la maman.
Dans la petite ville d'Imi-n-Tanoute sur la route reliant Marrakech à
Agadir, les filles amazighes habillaient, vers 1992 encore, l'armature de
roseau pour leur servir de taslit. Là-bas, l'armature d'une poupée-jeune
mariée était faite de la manière suivante : un morceau de roseau
d'environ 15 cm est coupé en deux dans le sens de la longueur et sur une
des deux moitiés on ligature l'autre moitié, réduite à environ 8 cm, en
prenant soin que la partie concave du roseau vertical se présente de face.
En entourant le croisement et une partie en dessous avec des chiffons, de
l'ampleur est donnée à son corps. Des crottes de lapin sont souvent
introduites sous le tissu pour former les seins. Les cheveux, de la laine de
mouton, éventuellement teinte au henné, se fixent avec du chewing-gum
ou un petit ruban. Plusieurs morceaux rectangulaires de tissu, au milieu
duquel un trou est fait pour faire passer la tête de la poupée et non
cousue sur les côtés, se superposent sur son corps. Ils représentent deux
sous-vêtements ainsi que la traditionnelle longue et large jupe amazighe.
Les vêtements de dessous sont de couleur uniforme et elles sont tenues
en place avec une cordelière d'élastique se croisant sur la poitrine, tout
comme le font encore les femmes amazighes d'un certain âge déjà. Les
vêtements de dessus doivent se faire avec des chiffons brillants à motifs
surimprimés de couleur dorée ou argentée. Une bande de tissu imite la
grande cape de laine que les femmes se mettent par-dessus les épaules.
170
Finalement, une ceinture de tissu sert la taille et un foulard est noué
autour de la tête. Un petit collier de perles et éventuellement une broche
sont mis à la poupée en guise de bijoux.
En ce qui concerne le visage de la poupée, les informations recueillies
sur place sont plus ou moins ambiguës. En fin de compte, il semble que
chaque fille décide elle-même si elle fait un visage à sa poupée ou non.
Quand un visage, avec sourcils, yeux, nez et bouche, est indiqué cela se
fait, dans la seconde moitié des années 1970, avec un stylo. Une mère de
famille d'Imi-n-Tanoute, qui jouait à la poupée vers 1950, affirme que
dans son temps le visage fut dessiné avec du charbon de bois.
Mélika Bamoussa de Imi-n-Tanoute, une jeune mère de 21 ans en
1992, épouse de Smaïl Khettou et parlant l'amazigh avec son mari, à bien
voulu refaire la taslit de son enfance (fig. 120).
120 121
171
Cette poupée-jeune mariée se conforme de tout point de vue à la
description ci-dessus, sauf qu'elle mesure 25 cm de haut avec une
envergure des bras de 12,5 cm. Les cheveux sont en laine blanche tressée
en une très longe natte, tenus en place avec du chewing-gum (fig. 121, p.
170). Les robes de dessous sont de couleur kaki et blanche, celles du
dessus en tissu transparent avec surimpression de motifs floraux et
géométriques ou le blanc, le noir, le mauve et le vert s'alternent mais où
les contours sont marqués de lignes de couleur dorée. Comme cape de
laine figure un chiffon rouge transparent drapé sur les épaules et fixé à
l'avant par une épingle de sécurité à laquelle pend une grande perle
blanche. La taille est cintrée par une bande de tissu blanche avec au-
dessus une ceinture en torsade, faite de trois fils de fer plastifiés autour
desquels des ficelles dorées, utilisées pour faire des emballages cadeaux,
sont enveloppés. Une broche, une grande fleur à pétales dorées, est fixée
sur la poitrine et un mouchoir de tête rouge/mauve achève la parure de
cette taslit au visage dessiné au stylo.
En rapport avec les chiffons utilisés pour faire les vêtements de la
poupée, il est à remarquer qu'on les récupérait dans les poubelles des
tailleurs, ce qui est devenu impossible maintenant car ces chiffons sont
utilisés pour faire des tapis. Dans cette recherche de chiffons chez les
tailleurs, chiffons brillants surtout, les petits frères étaient parfois mis à
contribution, comme se rappelle très bien Smaïl Khettou.
Les filles ne donnent pas de prénom à leur taslit car cela la rabaisserait
au rang des jeunes filles, elle qui représente la jeune mariée.
Mélika, et les filles de sa génération, jouaient entre autres au mariage
de leur poupée-jeune mariée, mais sans qu'une poupée-jeune marié soit
faite. Ce jeu de poupée était
surtout populaire en été, la
période des mariages après
les récoltes. Avec des pierres
les murs d'une maison de
poupée sont construits sur un
schéma assez uniforme mais
à l'intérieur duquel la
grandeur et l'alignement des
pièces varient (fig. 122,
copie du dessin de Zohra
122 122
172
Bamoussa, 19 ans en 1992). Cette maison de poupée comporte la cour
intérieure, la chambre des invités, dans laquelle des chiffons et une petite
boîte remplacent les coussins et la table, la chambre à coucher de la
taslit, avec son lit de grande boîte à sardines et de chiffons, et la cuisine,
avec ustensiles de cuisine d'imitation.
Le jeu de poupée se pratiquait parfois dans la cour de la maison ou
mieux encore sur la terrasse aménagée sur le toit de la maison.
Cependant la maison n'était pas le meilleur lieu pour ce genre de jeux car
les parents n'y étaient pas toujours favorables en argumentant qu'une
petite fille ne doit pas tellement s'occuper des choses en rapport avec la
sexualité et les relations hommes-femmes. Pour contrecarrer ces
objections, Mélika et ses cousines allaient jouer à la poupée chez leur
grand-mère lorsque leurs mères se retrouvaient dans la maison d'une
d'elles. Avant de retourner à la maison, ces filles cachaient tout leur
matériel pour jouer à la poupée.
En 1992 et dans ce même milieu d'Imi-n-Tanoute, où les petites filles
confectionnaient encore la taslit traditionnelle il y a dix ans, et où leurs
frères ou maris sont entre-temps devenus professeur de lycée ou
travaillent à un niveau semblable, Mélika et Smaïl me montraient avec
une certaine fierté les nounours et les poupées à la Française de leur
toute petite fille, reçus en cadeau de l'un ou l'autre membre de la famille
vivant en France.
En milieu arabo-berbère et vers 1945, des fillettes Oulad Yahya des
environs de Taroudannt avaient l'habitude de se fabriquer une °arûsa,
ainsi qu'un °arîs habillé en homme, avec deux morceaux de roseaux
entiers assemblés en forme de croix. L'os de mouton n'aurait pas été
utilisé. La hauteur de ces poupées fut de 50 cm environ et l'envergure des
bras d'à peu près 40 cm. De la laine s'utilisait pour les cheveux de la
poupée-jeune mariée, mais la barbe de maïs pouvait aussi bien faire
l'affaire. Son visage, avec sourcils, yeux, nez et bouche, se dessinait sur
le roseau avec du charbon de bois. Au moins un collier embellissait cette
poupée. Ainsi elle ressemblait avec perfection à une vraie fiancée le jour
de son mariage. Le jeu de poupée préféré fut celui du mariage de la
°arûsa avec son °arîs, et pour ce jeune ménage une maison de poupée,
aux murs en cailloux couverts de sable humide, était érigée.
173
Si certains parents Oulad Yahya acceptaient que leurs petites filles
rentraient à la maison avec leur poupée, d'autres le refusaient, parce que
selon eux les filles doivent s'occuper de choses plus sérieuses.
Vers 1992, les filles Oulad
Yahya de Taroudannt ne
jouent (presque) plus avec la
poupée en roseau. Elles
reçoivent une poupée en
plastique, du genre Barbie,
pour laquelle la fille elle-
même, ou sa mère,
confectionne des vêtements.
Ou bien, comme c'est le cas
fin 1996, on achète une petite
poupée made in China tout
habillée pour dix dirhams (1
Euro) (fig. 123). Selon le
propriétaire du petit magasin
de jouet dans la médina de
Taroudannt, les filles aiment
aussi beaucoup la petite
poupée-bébé avec son
biberon.
Contrairement à ce remplacement de la poupée en roseau par une
poupée en plastique, les filles arabophones d'aujourd'hui du centre rural
de Hmar, à environ 15 km de Taroudannt, jouent toujours avec la poupée
traditionnelle. Selon Latifa, la fille d'environ onze ans qui m'a transmis
ces informations dans la maison d'Abdellatif Aït Hedda en février 1992,
on utilise pour la partie verticale de l'armature de cette
poupée une tige creuse robuste de la plante bûsûsû que
l'on laisse d'abord sécher. La fille choisit une tige avec
une bifurcation, bifurcation qui servira de jambes. Pour
les bras un morceau de roseau, coupé en deux, est
ligaturé en forme de croix sur la tige (fig. 124). Ensuite
on enveloppe l'armature de chiffons pour donner de l'ampleur au corps
de la poupée. Les cheveux sont faits ou bien avec ceux de la fille elle-
même ou bien avec de la laine et on les fixe dans le creux de la tige à
123
124
174
l'aide d'une épine. Ces cheveux doivent être très bien peignés et, selon sa
propre volonté, la fille les tresses ou les laisse pendre. Avec un objet
pointu on fait deux petits trous dans la tige sèche pour marquer les yeux,
et une autre ouverture pour le nez et la bouche. Les yeux, le nez et la
bouche sont par après marqués avec du charbon de bois. La fille fait en
plus des vêtements de femme, pour sa poupée-jeune mariée, ou
d'homme, pour sa poupée-jeune marié, ceci avec des chiffons de
vêtements usés. Comme bijou la °arûsa reçoit un collier de coquillages
d'escargots de grandeur et de couleur variées.
Les filles jouent surtout pour fêter le mariage de leurs poupées. Pour
cela elles bâtissent, elles aussi, une maison de poupée délimitée par des
pierres. Dans un coin de cette maisonnette on place, sur le sol légèrement
relevé, la poupée-jeune mariée. Les filles de Hmar jouent à la poupée
lorsqu'elles ont l'âge de garder les moutons, c'est-à-dire à partir de cinq
ans jusqu'à dix ou douze ans, et ceci à n'importe quel moment de l'année.
Le soir, les bergères rentrent à la maison avec leur poupée dans le dos.
Cependant elles n'amènent pas la poupée dans le foyer. Elle est cachée
dans les environs et ressortit quand les bergères retournent avec les
moutons aux pâturages. Les jeux de poupées se terminent en tout cas
lorsque la fille doit aider dans le ménage. A ce moment elle donne sa
°arûsa unique, qu'elle a entourée de beaucoup de sollicitude et de
tendresse, à une sœur ou une cousine plus jeune. Latifa affirme que les
poupées en plastique, du genre Barbie et vêtue en Andalouse ou
autrement par les femmes, ne servent dans son village que comme
poupée de décoration (fig. 95, p. 148).
Lors d‟une troisième visite chez Abdellatif Aït Hedda en novembre
1998 il m‟a donné deux poupées créées par des filles et apportées par la
mère de Latifa du village Hmar. La première poupée est faite avec un
morceau de la plante bûsûsû. Une enflure de la tige sert de tête, une tête
sans cheveux, ni traits de visage ou foulard (fig. 125, p. 175, H = 17 cm,
envergure des bras = 11 cm). Cette poupée est habillée de quatre chiffons
entourés autour de la tige en dessous des bras et servant de sous-
vêtements. Le sous-vêtement supérieur est un morceau de gaze blanche.
Le survêtement est un morceau de tissu avec des motifs de couleur
rouge, verte et argentée serré autour de la taille par une ceinture du
même tissu.
175
La deuxième poupée est remarquable car elle propose une des très rares
poupées figurant une mère portant un bébé dans le dos. L‟armature est
faite d‟un morceau de roseau auquel un bâtonnet est ligaturé en forme de
croix (fig. 126, p. 176, H = 21 cm, envergure des bras = 8 cm). La
poupée-mère est vêtue d‟un sous-vêtement et d‟un survêtement en gaze
mauve décorée de fleurs dorées. La poupée-bébé est tenue en place par
un chiffon. Du cheveu de cheval a été utilisé pour les cheveux de la mère
et du bébé. Ces cheveux sont fixés en poussant une extrémité de la
chevelure, enroulée d‟un chiffon, dans le creux du roseau. Un chiffon
noir à motifs géométriques blancs sert de foulard. La fille a donné des
seins à la mère en poussant deux petites boules de tissu sous les
vêtements. Cette poupée-mère a comme traits de visage un petite trou
colorié en rouge pour la bouche et des yeux indiqués par deux petits
trous coloriés en noir. Les sourcils sont indiqués par deux lignes obliques
noires mais le nez manque.
125
176
L‟armature, les cheveux et les yeux de la poupée-bébé sont identique à
ceux de la poupée-mère mais le nez et la bouche ne sont pas indiqués
(fig. 126, H = 9,5 cm, envergure des bras = 5,5 cm). Des chiffons blancs
ont été utilisés pour le sous-vêtement et le survêtement du bébé. Cette
poupée-mère à bébé est complétée par un petit sac fait d‟un morceau de
tissu et contenant quelques chiffons figurant les vêtements et les produits
de soin du bébé.
126
177
Les exemples suivants de poupées et jeux de poupées liés à la mise en
scène des cérémonies de mariage viennent de quelques villages de
l‟Anti-Atlas dans la région de Sidi Ifni et de cette ville côtière du sud-
marocain elle-même.
Avec l‟aide de Said Bari, un instituteur de l‟école primaire d‟Imou
Ergen située à environ 10 km de Sidi Ifni, j‟ai reçu en novembre 1998
une série de onze poupées, neuf poupées créées par des filles de dix à
quatorze ans et deux poupées créées par un garçon de douze ans et un
garçon de treize ans (fig. 127). De ces onze poupées dix représentent la
tislit ou la jeune mariée et une l‟isli ou le jeune marié. Les garçons aussi
bien que les filles jouent avec ces poupées à mettre en scène la tamgra
ou la fête de mariage dans des maisonnettes délimitées par des pierres.
Les enfants ont spécifié que les garçons jouent aux poupées quand ils
gardent les animaux dans la montagne et séparément des filles.
127
178
La poupée la plus petite représentant le jeune marié est moins élaborée
que les poupées-jeunes mariées car elle n‟a
ni cheveux ni traits de visage (fig. 128, H =
6,5 cm, envergure des bras = 2,5 cm). Elle
ne porte qu‟un seul sous-vêtement découpé
dans une feuille de cahier d‟exercice et un
survêtement pour lequel l‟emballage orange
transparent d‟un bonbon a été utilisé. Ce
survêtement est cintré par une bandelette
d‟un sac de plastique noir. L‟armature se
compose de la moitié d‟un roseau auquel un
bâtonnet est attaché en forme de croix, le
côté bombé du roseau servant pour le
devant de la poupée.
Un morceau de roseau sert comme armature verticale des dix poupées-
jeunes mariées (fig. 129-138, p. 178-180). Dans neuf cas un bâtonnet a
été poussé à travers le roseau pour former les bras. Sauf une poupée,
elles ont des traits de visage avec yeux, sourcils, bouche et
éventuellement un nez dessinés sur le roseau avec un stylo noir, bleu ou
rouge. Deux poupées présentent une bouche souriante, les sept autres
ayant une ligne droite comme bouche.
128
129 130 131
179
Les traits de visage de trois poupées sont peu visibles. Les cheveux de
huit poupées-jeunes mariées sont des cheveux de chèvre. Les cheveux
d‟une fille servent pour la chevelure d‟une poupée mais des fils de coton
ou de laine peuvent aussi s‟utiliser. Une extrémité des cheveux est
poussée dans le creux du roseau et la chevelure est tenue en place par un
ruban. Les sous-vêtements consistent le plus souvent de deux chiffons.
Une poupée porte trois sous-vêtements, une autre un sous-vêtement et
une troisième n‟a pas de sous-
vêtement. Au centre des chiffons
une déchirure est faite pour passer la
tête. Le survêtement de huit poupées
est un morceau de tissu à motifs. Ils
sont cintrés à la taille avec une
bandelette de tissu mais une fois il
s‟agit de fils de coton. Une fille a
choisit comme survêtement de sa
poupée un morceau de plastique
rouge transparent découpé d‟un sac
de plastique (fig. 135). Cela est
aussi la poupée pour laquelle la fille
a utilisé comme chevelure un peu de
ses propres cheveux.
135
132 133 134
180
Les vêtements des poupées sont complétés par un grand foulard, une
fois même deux foulards, mais il arrive aussi qu‟une partie du
survêtement soit utilisée comme foulard. La hauteur de ces poupées varie
entre 7,5 cm et 20 cm et l‟envergure des bras entre 2,3 cm et 5 cm.
La poupée la plus grande n‟a pas de traits de visage ni de cheveux
mais une bandelette de tissu sert de foulard, un foulard qui entoure le
haut du roseau où il est tenu en place par un morceau de ruban adhésif
(fig. 136, H = 20 cm, envergure des bras = 4,5 cm). Un grand chiffon
contournant plusieurs fois le roseau forme le sous-vêtement tandis que le
survêtement est drapé sur les bras et le corps de la poupée et est cintré
par une bandelette de tissu. Le morceau de roseau servant de bras ne
traverse pas le roseau mais une fente fut faite dans le haut du roseau
vertical pour pouvoir mettre les bras à leur place.
Une des deux poupées les plus petites se singularise par les deux sous-
vêtements pour lesquels la fille a utilisé des emballages de bonbon (fig.
137, H = 7,5 cm, envergure des bras = 2,3 cm). Son survêtement est un
morceau de gaze verte cintré par un petit ruban, le même genre de gaze
étant utilisé pour le foulard. La deuxième poupée la plus petite n‟a qu‟un
vêtement, un morceau de tissu à fond blanc qui est cintré à la taille par
une bandelette rouge (fig. 129, p. 178, H = 7,5 cm, envergure des bras =
3 cm). Les cheveux noirs de ces deux poupées proviennent de cheveux
de chèvre et elles ont des traits de visage sans indication du nez.
136 137 138
181
A Ergoub, situé à 9 km de Sidi Ifni à la fin du goudron et avant Imou
Ergen, la jeune mariée Aïcha qui venait d‟épouser Mohamed ou
Hamouche expliquait en novembre 1998 que là les filles ne font plus de
poupées traditionnelles depuis environ dix ans mais utilisent des poupées
en plastique. Elle ajoutait qu‟aujourd‟hui les filles d‟Ergoub voient la
poupée faite par une fille elle-même comme de la „saleté‟.
Il arrive qu‟une poupée soit si représentative du milieu d‟où elle
provient qu‟il est possible de définir ce lieu à première vue. Cela est le
cas d‟une poupée créée par une fille de l‟école primaire de Imou Ergen
en novembre 1998, une fille venant de la région de Tafraoute dans
l‟Anti-Atlas. L‟armature de cette poupée se limite à un roseau vertical
(fig. 139). Le haut de ce roseau est entouré d‟un chiffon blanc fixé avec
un fil de coton. Sur ce support blanc des yeux ronds, des sourcils et un
nez sont dessinés en noir tandis que la bouche est rouge. Une pièce de
tissu bleu foncé est drapée sur la tête et le corps de la poupée. Au niveau
du menton les deux côtés de ce vêtement sont cousus ensemble avec du
fil blanc. Un deuxième morceau du même tissu enveloppe la partie
inférieure de la poupée. Il est cintré par un fil au-dessus duquel la partie
supérieure de ce tissu est repliée vers l‟avant.
139 140
182
Comme j‟ai pu le constater en visitant la petite ville de Tafraoute à la
fin de la même année, les vêtements de cette poupée ressemblent à ceux
portés par les femmes de cet endroit.
En février 2002 une des filles du village Lahfart qui ont créé la série
suivante de poupées a aussi fait une poupée qui ressemble aux femmes
de Tafraoute (fig. 140, p. 181, H = 18 cm). L‟armature de cette poupée
est un cône utilisé pour y enrouler du fil de coton mercerisé et elle n‟a
pas de bras. Les traits de visages ressemblent ceux de la poupée
précédente mais le nez est un V rouge. Elle est habillée d‟un morceau de
tissu noir drapé autour du cône et cachant la bouche. Un très grand
foulard noir du même tissu couvre la tête et tout le corps. A l‟avant de la
poupée ce foulard est cousu ensemble en un point.
Lorsque je me suis installé dans la petite ville côtière Sidi Ifni au Sud
du Maroc début 2002, l‟instituteur et co-fondateur de l‟Association Isni
pour la Culture et l‟Art, Boubaker Daoumani, m‟a contacté après avoir
vu mon livre sur les
poupées et jeux de poupées
des enfants sahariens et
nord-africains de 1993 que
je venais d‟offrir à son
collègue Said Bari.
Boubaker Daoumani
enseigne dans la première
et la deuxième classe de
l‟école primaire de Lahfart,
un petit village caché dans
les pentes côtières de
l‟Anti-Atlas. Pour arriver à
ce village on doit monter
une piste pendant une
vingtaine de minutes, une
piste qui débute de la route
de Tiznit à Sidi Ifni et à
environ 9 km avant cette
dernière ville. En février
2002 et avec l‟aide de ses
collègues cet instituteur a 141
183
collectionné plusieurs poupées et quelques animaux-jouets créés par les
élèves.
Plusieurs filles d‟environ dix ans ont créé douze tislit ou jeunes
mariées. Une de ces filles a fait trois poupées qui se ressemblent (fig.
141, p. 182, H = ± 25 cm, envergure des bras = ± 8 cm). L‟armature est
un morceau de roseau transpercé par un bâtonnet de roseau. La fille a
légèrement incrusté les trait de visage puis les a dessinés au stylo noir.
Les longs cheveux sont de la laine tressée et ils pendent le long du dos
où ils se fixent dans la ceinture. Pour fixer la chevelure en haut du roseau
la fille a poussé une extrémité dans une petite fissure. Le sous-vêtement
est un chiffon dont les côtés restent ouverts. La fille a donné à ses trois
poupées un survêtement et un foulard provenant du même tissu jaune
avec des motifs floraux brillants en vert, rose et blanc. A l‟arrière de la
poupée les bords du survêtement son cousus ensemble. Le grand foulard
couvre la tête et les épaules, il se croise par-devant et se fixe dans la
ceinture pour laquelle un élastique est utilisé.
Une petite poupée avec le même type d‟armature montre sur le roseau
des traits de visage effacé (fig. 142 côté droit, H = 12 cm, envergure des
bras = 5,5 cm). Elle porte deux vêtements multicolores mis au-dessus de
la tête par une déchirure et drapés au-dessus des bras. Sous les bras un fil
blanc cintre ces vêtements. Un morceau de gaze blanche sert de grand
foulard qui couvre la tête et tout le corps. Il est cintré par un fil mauve.
142
184
Sous les bras un fil blanc cintre ces vêtements. Un morceau de gaze
blanche sert de grand foulard qui couvre la tête et tout le corps. Il est
cintré par un fil mauve. Pour les sous-vêtements de cette poupée et la
poupée suivante les filles ont utilisé du tissu à motifs brillants, un genre
de tissu normalement utilisé pour les survêtements. Les cheveux de la
fille ont servi pour donner une chevelure à la poupée. Une extrémité des
cheveux est entourée d‟un chiffon puis poussée dans le creux en haut du
roseau où elle est tenue en place en y enfonçant un caillou de mesure
adéquate. Sauf les trois poupées faites par la même fille, les poupées-
jeunes mariées des filles de Lahfart portent un survêtement sans motifs
brillants.
L‟autre petite poupée à sous-vêtement brillant est particulière pour
deux raisons encore (fig. 142 côté gauche, p. 183, H = 10,5 cm,
envergure des bras = 4 cm). La partie verticale de l‟armature n‟est pas un
roseau mais un tube en carton autour duquel des fils de coton mercerisés
étaient enroulés. Pour donner des bras à la poupée un bâtonnet de roseau
fut percé à travers le tube. En haut du tube la fille a enlevé la couche
supérieure du carton, puis elle a blanchit cet endroit avec du vernis à
ongles et dessiné avec un stylo bleu des yeux ovales à pupille, des
sourcils, un nez et une bouche souriante. Une extrémité des cheveux est
enfoncée dans le creux du roseau et la chevelure est tenue en place avec
un ruban rougeâtre. Deux robes multicolores enveloppent le tube en
carton et elles sont fixées en dessous des bras par un ruban. La robe
supérieure a des motifs brillants. Un grand foulard rose couvre la tête et
les bras de cette poupée, un foulard tenue en place par le survêtement
vert à motifs floraux noirs. Ce survêtement est mis au-dessus de la tête
par une déchirure et les bords du tissu ont été cousus ensemble sous les
bras.
De six poupées-jeunes mariées les filles ont découpé la partie
inférieure du roseau vertical de telle manière à donner des jambes à leur
poupée, une manière de donner des jambes à une poupée que je n‟ai que
très rarement vue jusqu‟à présent.
185
Chez cinq poupées les jambes se
cachent sous leurs vêtements mais
elles restent visible chez une
poupée (fig. 143, H = 20 cm,
envergure des bras = 5 cm).
Les yeux et les sourcils sont des
traits droits dessinés avec un stylo
bleu. Une ligne rouge droite figure
la bouche.
Un chiffon multicolore sert de
sous-vêtement. Le survêtement,
avec une déchirure centrale pour
passer la tête, se drape au-dessus
des bras et les bords sont cousus
ensemble comme cela a été fait
pour quelques autres poupées.
Un foulard du même tissu que
celui du survêtement couvre les
cheveux qui sont des bandelettes
de plastique noir. Cette chevelure
est fixée dans le creux du roseau
avec une petite pierre. Un grand
foulard en gaze blanche couvre la
tête et tout le corps et il est cousu
en un point par-devant de la
poupée.
Pour les cheveux de deux poupées la fille a utilisé un peu de ses
propres cheveux, une chevelure fixée dans le creux du roseau avec une
petite pierre (fig. 144, p. 187, H = 16/19 cm, envergure des bras = 5/6
cm). Leurs traits de visage sont les mêmes mais une poupée a aussi un
nez rouge. Deux chiffons multicolores entourent ces poupées et
représentent les sous-vêtements. La poupée au nez rouge porte encore un
sous-vêtement découpé dans un sac de plastique transparent vert. Une
grande robe en gaze blanche tenue en place par un élastique sur lequel
elle est repliée par-devant figure le survêtement.
143
186
Les deux poupées portent un petit foulard qui tient la chevelure en
place ainsi qu‟un large foulard qui entoure la poupée totalement. La
poupée la plus petite porte aussi une ceinture de fils de coton blanc.
Deux autres poupées de la série de poupées aux jambes découpées
montrent les mêmes traits de visage dessinés avec un stylo bleu et rouge.
Ces deux poupées n‟ont pas de long cheveux mais des lignes courtes
dessiné sur le front avec un stylo bleu indiquent la chevelure (fig. 145, p.
187, H = 12 cm, envergure des bras = 6 cm). Comme d‟habitude deux
sous-vêtements, un survêtement et
un large foulard cintré par un ruban
forment les habits.
La dernière poupée de cette série
manque aussi la chevelure mais les
traits de visage sont différents avec
des yeux ronds à pupille, des
sourcils, un nez rond et une grande
bouche souriante tous dessinés au
stylo bleu (fig. 146, H = 12 cm,
envergure des bras = 7,5 cm). Cette
poupée porte trois sous-vêtements
multicolores, un survêtement à
motifs végétaux ainsi qu‟un grand
foulard à étoiles et points qui couvre
la tête, les bras et tout le corps.
La plus petite des douze poupées-jeunes
mariées de Lahfart présente une création
assez particulière (fig. 147, H = 10,5 cm,
envergure des bras = 4 cm). Son armature est
faite d‟un court morceau de roseau
transpercé par un bâtonnet pour former les
bras. Les traits de visage sont peu visibles,
deux lignes droites faites avec un stylo bleu
pour les yeux et une ligne droite rouge pour
la bouche. Dans un morceau d‟emballage
aluminium d‟un biscuit un trou est fait pour
passer la tête de la poupée et ce survêtement
pend au-dessus des bras. Une extrémité de la
146
147
187
chevelure est poussée dans le creux du roseau et un ruban noir tient cette
chevelure en place sur le front. Un élastique décoré de petites perles
bleues et blanches, comme l‟élastique que l‟on met dans les cheveux des
fillettes, orne le front. Trois tresses de cheveux pendent le long du corps,
deux à l‟avant et une à l‟arrière de la poupée. Un autre élastique à perles
forme la ceinture qui cintre à la taille le survêtement et les tresses.
144
145
188
Une poupée créée par Mina, une élève de treize ans de la classe de
Said Bari qui enseignait dans l‟école primaire de Lahfart en février 2002,
a une armature que je n‟avais pas encore vue. Cette armature a été
découpée dans un morceau d‟Isomo protégeant un appareil électronique
ou ménager (fig. 148, H = 17 cm, envergure des bras 10,5 cm). Le corps,
avec la tête, les bras et
les jambes, de cette tislit
ou jeune mariée est
découpé dans une pièce
d‟Isomo. Les yeux, les
sourcils, le nez et les
cheveux sont dessinés
avec un stylo bleu mais
la bouche avec un stylo
rouge. Avec le stylo bleu
la fille a encore dessiné
des orteils ainsi que trois
points sur le front et les
joues pour représenter
les taches coloriées
traditionnelles. A travers
une déchirure centrale le
vêtement est passé par-
dessus de la tête. D‟un
côté les bords du vêtement sont cousus ensemble tandis qu‟un ruban bleu
le cintre sous les bras. Un ruban d‟environ 3 cm de largeur provenant du
même tissu bleu contourne la poupée en dessous de la ceinture, le bord
supérieur de ce ruban étant cousu au vêtement. Un grand foulard en gaze
blanche couvre la tête et les bras de la poupée.
Une des deux poupées-mères portant un bébé dans le dos que j‟ai
trouvées jusqu‟à présent fut modelée en argile par une fille de quatorze
ans. Boubaker Daoumani a collectionné cette poupée-mère et la poupée-
bébé dans le village Lahfart en janvier 2002 (fig. 149, p. 189, H = 12,5
cm, envergure des bras = 10 cm; le bébé H = 6 cm, envergure des bras =
3 cm). A travers le corps massif en argile, avec une grande tête sans cou,
des jambes courtes et des petits pieds, la fille a percé un bâtonnet pour
créer des épaules et des bras.
148
189
Les traits de visage légèrement incrustés dans l‟argile montrent deux
lignes droites pour les sourcils et une ligne droite pour la bouche ainsi
que des petits trous
pour les yeux et le nez.
Des lignes fines
suggèrent les cheveux
et la chevelure se
termine dans un
chignon. Le bébé porté
dans le dos est une
copie miniaturisée de la
poupée-mère la seule
différence étant qu‟il
n‟y a pas de lignes pour
indiquer les cheveux.
La poupée-mère est
vêtue d‟un vêtement
multicolore dont les
bords sont cousus
ensemble d‟un côté. Ce
vêtement pend sur les
bras et descend
jusqu‟au chevilles. Un
large foulard provenant
du même tissu tient en
place la poupée-bébé et
est noué à l‟avant de la poupée-mère.
Dès élèves de Said Bari ont fait les deux poupées suivantes qui
doivent cependant être vues non pas comme des poupées à jouer mais
comme des poupées de décor. Néanmoins je tiens à les décrire car une
d‟elles offre un exemple vraiment rare de poupées-femmes créées par un
garçon et qu‟elles témoignent de la créativité enfantine.
149
190
La poupée-jeune mariée faite par Lahoucein Idouhna, un garçon de
douze ans, a comme armature un roseau vertical percé par un long
morceau de fil de fer formant les épaules et les bras courbés vers le bas
(fig. 150, H = 24 cm). La partie supérieure du roseau est enveloppée de
coton blanc sur lequel de grands yeux à pupille sont dessinés avec un
stylo noir ainsi qu‟un nez, une bouche et des joues dessinés avec un stylo
rouge. La tête sans cheveux et les épaules sont couvertes d‟un large voile
transparent comme pour une mariée européenne. La poupée porte une
robe blanche inspirée par les robes des jeunes-mariées européennes, une
robe qui fait éventuellement partie des robes portées par une jeune-
mariée marocaine lors des cérémonies de mariage. Le garçon qui a créé
cette poupée disait que sa mère l‟a aidé à mettre le voile.
L‟autre poupée, réalisée par un garçon de dix-sept ans qui a commencé
l‟école primaire tardivement, représente un homme (fig. 151, H = 22
cm). La tête et le cou furent découpés dans un morceau d‟Isomo. Le cou
s‟incruste dans le creux d‟un roseau de 3,5 cm de diamètre.
150 151
191
En bas du roseau deux morceaux de roseau d‟un centimètre de
diamètre sont enfoncés dans le creux pour former les jambes. Les pieds
sont deux morceaux d‟un demi-roseau collés aux jambes. Pour faire les
bras le garçon a percé un fil de fer à travers le roseau vertical puis les
deux extrémités ont été pliées vers le bas. Le cou, les bras et le corps
sont enveloppés de rubans et une large cape pend sur les épaules, une
cape cousue en un point à la hauteur de la gorge. Les cheveux sont faits
avec un morceau de peau de mouton collé sur la tête. Les traits de visage
avec yeux ronds à pupille, sourcils, nez triangulaire, oreilles et bouche
souriante sont dessinés au stylo bleu.
Peu après avoir reçu les deux poupées avec une armature complète ou
partielle en Isomo, l‟utilisation de morceaux d‟Isomo fut confirmée
lorsque j‟ai vu un jeune garçon assis devant la porte de sa maison dans
un quartier populaire de Sidi Ifni. Il était en train de gratter avec un
morceau de fer aplati, une pièce d‟Isomo pour lui donner la forme
voulue.
La vidéo filmée dans la région de Sidi Ifni le 4 mars 2002, montre le
jeu de construction de maisonnette et le jeu de poupée de Halima, une
fille de six ans, et de Fadil, son frère de neuf ans (fig. 152).
152
192
Ces enfants vivent dans une maison isolée construite de manière
traditionnelle dans la région de Lagzira près de la route goudronnée à 10
km avant Sidi Ifni en venant de Tiznit. Le genre de poupées utilisé par
ces enfants parlant amazigh est unique pour autant que j‟aie pu le vérifier
au Maroc bien que les sources bibliographiques y fassent référence une
ou deux fois. La jeune-mariée aussi bien que le jeune-marié, les
membres de la famille et les visiteurs sont représentés par des
coquillages d‟escargot. Quand il s‟agit de la jeune mariée ou du jeune
marié le coquillage
est enveloppé dans
un morceau de gaze
blanche. Le jeu de
mariage commence
par promener en
voiture la mariée, le
marié et quelques
membres de la
famille en utilisant
une boîte de
sardines (fig. 153).
Après une bien longue promenade à travers le terrain de jeu en face de la
maison, la procession arrive au village avec ses maisonnettes. Dès que
Halima arrive avec sa voiture de mariage près d‟une des maisonnettes
elle commence a mettre les poupées dans la position correcte avec
l‟ouverture du coquillage représentant la tête en haut (fig. 154, p. 193)).
Quand Fadil termine la promenade en voiture, les deux joueurs
commencent à construire chacun une nouvelle maisonnette avec de la
boue et des pierres.
Un détail montre comment Halima et Fadil, qui vivent dans une
famille pauvre plutôt traditionnelle, intègrent dans leur jeu le dernier
produit de la haute technologie seulement disponible à Sidi Ifni depuis
environ l‟an 2000, c‟est-à-dire le téléphone portable figuré par un
morceau d‟une vieille télécommande. Le protocole avec la description
détaillée de cette vidéo est disponible sur le site Internet de SITREC
(Rossie and Daoumani, 2003, Video 4).
153
193
Lors de ma première visite à Sidi Ifni, une ville d‟environ 25.000
habitants sur la côte atlantique au sud d‟Agadir, en novembre 1998
Malika, une femme de vingt-trois ans et membre de la famille qui dirige
l‟hôtel restaurant Suerte Loca, m‟a raconté qu‟on pouvait trouver à Sidi
Ifni la poupée faite par la fille elle-même jusqu‟au début des années
1980 mais que de nos jours les filles jouent avec des poupées en
plastique importées. Cette utilisation de poupées en plastique importées
se confirmait alors par l‟observation d‟une fille de six ans qui jouait avec
une poupée en plastique bon marché devant sa maison. Bien que la
poupée en plastique avait remplacé la poupée traditionnelle les autres
objets utilisés par la fille pour son jeu se trouvaient localement. Ainsi la
fille avait mis sa poupée dans une maison de poupée, les carreaux en
haut du petit escalier menant à la porte d‟entrée, et comme ustensiles elle
154
194
employait une petite table en bois et quelques bouchons de bidons à
huile remplis d‟eau servant de verres de thé.
Comme d‟autres informations recueillies à Sidi Ifni confirmaient que
la poupée faite par les filles avait disparu de cette ville, j‟étais vraiment
surpris en filmant la première vidéo réalisée en collaboration avec
Boubaker Daoumani le 31 janvier 2002, de voir qu‟on pouvait encore y
trouver la poupée traditionnelle. Je suis entré en contact avec une famille
arabophone de classe populaire par le biais d'adolescentes se trouvant
devant la porte de leur maison située en face de la barandilla, l'escalier
en bordure de la plage. Puis après avoir obtenu l‟accord des parents il a
été possible de filmer Fatiha et Yasin, une fille de six ans et son cousin
de quatre ans qui jouent souvent ensemble. L‟unique indication donnée à
Fatiha le jour avant le tournage est qu‟on aimerait filmer son jeu de
poupée. Lors de la prise de vue la première chose que Fatiha a fait est de
créer une poupée avec une louche en bois comme armature verticale, une
louche reliant d‟une certaine manière cette poupée à la poupée faite pour
implorer la pluie. A cette louche la fille a attaché en forme de croix un
bâtonnet pour faire les épaules et les bras. Après avoir dessiné les traits
de visage sur le côté creux de la louche, Fatiha a mis un vêtement à sa
poupée en le serrant à la taille avec une ceinture. Plus tard elle a encore
fabriqué plusieurs autres poupées du même genre mais avec un bâtonnet
comme armature verticale. Parfois Yasin commençait à faire une poupée
mais cela plutôt sous la pression de sa nièce. En tout cas, il ne semblait
pas avoir envie de faire des poupées car il ne finissait jamais l‟armature
en forme de croix. Pendant tout le jeu le comportement de ce garçon d‟à
peine quatre ans exprimait son refus de faire du travail de femme et cela
non seulement quand il s‟agissait de créer une poupée mais aussi
lorsqu‟il était question de préparer un repas. Yasin a clairement exprimé
son refus en criant à Fatiha qui l‟ordonnait de préparer à manger : “Vas-y
toi-même, je suis un homme et pas une femme! Moi, je suis un homme
non pas une femme! ”. Exaspéré par ce refus Fatiha a décidé à préparer
le repas elle-même.
Après environ huit minutes de fabrication de poupées le jeu
commence vraiment avec la préparation du petit déjeuner des enfants,
enfants représentés aussi bien par les poupées faites par Fatiha que par
deux poupées du genre Barbie que la fille a placées contre le mur de la
maison et restant disponible tout le temps. La mise en scène de cette
195
préparation du petit déjeuner est suivie par le réveil des enfants, le petit
déjeuner et la conduite des enfants à l‟école. Bien que référence est faite
pendant le jeu à l‟école et la classe, la mise en scène d‟une situation liée
à cet environnement n‟est pas réalisée. Yasin collabore à cette séquence
du jeu de poupée en délimitant un espace rectangulaire représentant
l‟école avec quatre bâtonnets, bâtonnets qu‟il aurait du utiliser pour faire
des poupées. A la fin du jeu de poupée les enfants doivent être ramenés
de l‟école mais Fatiha change d‟idée et propose d‟apporter le repas à
l‟école. Une description détaillée de cette vidéo se trouve dans le
protocole disponible sur le site Internet de SITREC (Rossie and
Daoumani, 2003, Video 1).
Un autre exemple de jeu de poupée, filmé sur le toit plat servant de
terrasse du Suerte Loca à Sidi Ifni le 10 février 2002, montre deux filles
d‟une famille de classe moyenne dont les grands-parents maternels sont
les propriétaires de cet hôtel restaurant. Le troisième joueur est Malika,
une fille de neuf ans d‟une famille de classe populaire vivant tout près.
Une année auparavant Malika avait demandé aux deux sœurs si elle
pouvait jouer avec elles et de cette manière elle était devenue leur amie.
Malika parle l‟arabe marocain lorsqu‟elle joue avec Jalila âgée de neuf
ans et sa sœur Awatif âgée de sept ans mais à la maison elle parle la
langue amazighe locale. Ces filles jouent avec de véritables poupées
Barbie dont une porte une petite robe hawaïenne et danse sur de la
musique algérienne raï ou de la musique arabe moderne. Elles utilisent
aussi une poupée-bébé et plusieurs peluches anthropomorphes et
zoomorphes ainsi que des figurines miniaturisées, tous des jouets
appartenant aux deux sœurs. Le jeu de poupée qui dure trente-neuf
minutes met en scène plusieurs thèmes le plus souvent liés à la relation
mère-enfants, un rôle maternel joué par Malika. Jalila et Awatif jouent à
aider la mère ou s‟engagent dans des rôles complémentaires comme
téléphoner avec des portables-jouets, faire des courses ou conduire les
enfants à l‟école, des rôles que Malika joue aussi. Un moment donné les
deux sœurs prétendent faire un voyage au Maroc et à l‟étranger mais il
arrive aussi qu‟elles jouent seul un instant. En plus des poupées les
joueurs disposent encore de téléphones-jouets, de produits de beauté-
jouets, de boucles d‟oreilles pour enfants, d‟une boîte à musique, de faux
billets Euro, de différents types de sacs, d‟une valise et de matériel de
l‟hôtel comme des tabourets et des bancs, des sièges et des tables en
196
plastique. Tous ces objets démontrent clairement le niveau de vie et la
situation multiculturelle dans lesquels Awatif et Jalila grandissent, une
situation à laquelle Malika, jouant le rôle plus traditionnel de la mère,
s‟adapte facilement. Le protocole détaillé de la vidéo sera disponible sur
le site Internet de SITREC (Rossie and Daoumani, à paraître, Video 3).
Un exemple de jeu avec la poupée Little Miss fabriquée en Chine (fig.
123, p. 173) m‟a été raconté en septembre 2003. Une jeune mère
amazighe, Fatima Moutawakil vivant à Tiznit dans la province d‟Agadir
depuis ses trois ans, jouait à la poupée de ses sept à ses douze ans. Elle
faisait partie d‟un groupe de jeu comportant encore deux voisines un peu
plus âgées et son frère cadet. Au début des années 1980, Fatima
confectionnait des vêtements pour sa poupée, l‟unique de ce genre dans
le groupe de jeu. Cette poupée était vêtue comme une femme adulte et
un des jeux favoris consistait à mettre du maquillage à la poupée avec du
safran artificiel et un chewing-gum rouge qui après être mouillé avec de
la salive servait comme du rouge à lèvres.
Les mêmes filles et trois garçons dont deux cousins aimaient à jouer
au mariage, au ménage ou à papa et maman. Dans ces cas ils jouaient
sans utiliser des poupées. Les différents personnages comme la tislit ou
jeune mariée, l‟isli ou le jeune marié, la mère et le père des deux familles
et parfois une servante ou un domestique étaient joués par les joueurs.
Des petits coussins figuraient des enfants. Ce jeu se passait dans la
maison d‟un des joueurs mais seulement en l‟absence des parents. Des
ustensiles et d‟autres objets trouvés dans la maison servent comme
matériel de jeu et les chambres comme terrain de jeu. Quand ils jouaient
au ménage un d‟entre eux devait aller faire les courses. En parlant des
gens comme le font les adultes dans pareilles circonstances les joueurs
parlaient toujours de personnes imaginaires. Les autres thèmes ludiques
sont la visite au docteur ou au marché. Parfois le jeu était plus
fantastique comme jouer à tarzent, les monstres des contes locaux.
Eventuellement une plage était créée en laissant couler de l‟eau sur les
carreaux pour que les joueurs puissent glisser. Selon Fatima la richesse
des thèmes de jeux était souvent due aux garçons un peu plus âgés qui
inventaient quelque chose de nouveau. Naturellement il fallait remettre
tout en ordre avant que la mère revienne sinon les joueurs seraient battus,
ce qui est arrivé.
197
Dans le jeu de poupée des filles juives du sud-marocain, la poupée
représentant le marié est remplacée par un jeune garçon qui s'assoit
auprès de la poupée figurant la mariée. Flamand (recherches de 1948 à
1958, p. 183) décrit ce jeu de la mariée de la manière suivante :
Ce jeu consiste à revêtir la poupée des accessoires traditionnels et à
lui faire prendre les attitudes de la mariée juive. Les enfants cherchent
à reproduire l'apparat et les gestes rituels des fêtes nuptiales : elles
invitent leurs compagnes en grand nombre ; la poupée revêtue d'une
robe blanche, un voile en tulle encadrant son visage, se place au
milieu de la salle à manger, dans un fauteuil entouré de fleurs
blanches ; le marié - quelque garçonnet amené par une sœur ou une
amie - s'assoit auprès d'elle ; chaque invité, à son arrivée, embrasse
les mariés et félicite leurs parents supposés ; ceux-ci font passer du
vin, des liqueurs et des plats de friandises aussi réels que le
permettent les ressources familiales et les apports des invités. Ces
festivités ont lieu généralement les samedis après-midi.
Un second thème pour le jeu de poupée est la grossesse et
l'accouchement dont deux auteurs nous parlent et que des données
récentes confirment. L'article “la poupée Iblisa” de 1917 (p. 39),
mentionné plus haut, décrit ce simulacre de l'accouchement.
Mais bientôt on annonce que la maman va accoucher. En un tour de
main une fillette confectionne une poupée semblable à la première,
mais plus petite. La sage-femme (une autre fillette) arrive bientôt et
vient s'accroupir devant la poupée-maman pendant que tout le chœur
des petites filles dit : “O Sidi Bou Serrhine (marabout enterré aux
environs de Sefrou), ô l'oiseau aux pattes teintes de henné, délivre vite
cette femme du mal d'enfant. Ne la laisse pas dans les douleurs”. A ce
moment l'apprenti sage-femme passe la main sous les vêtements et en
tire la petite poupée en annonçant : “Elle a enfanté”. Danses,
youyous, battements de mains reprennent de plus belle. Tout ce petit
monde crie : “Louange à Dieu et au grand dispensateur qui est notre
maître”.
198
Maurice Cortier décrit déjà en 1908 ce jeu marocain de l'accouchement
(p. 310). Une fois de plus, une fillette joue le rôle de sage-femme
pendant que ses compagnes chantent en chœur : “Ô père des petits,
oiseau aux pattes de henné, fais que l'enfant naisse de suite ; épargne les
douleurs à la mère, etc.”
Des renseignements que j'ai obtenus au Maroc réfèrent eux aussi au
simulacre de l'enfantement par la poupée-femme, mais premièrement je
décris la représentation de la grossesse.
Latifa, une jeune fille d'environ 11 ans en 1992 du centre rural de
Hmar près de Taroudannt, a le mieux explicité la relation entre les
différents jeux de poupées qui, au début des années 1990, existe chez les
filles de sa région. Après le jeu de mariage de la °arûsa et du °arîs,
décrit plus haut, et une fois que le jeune couple vit ensemble un certain
temps déjà, la °arûsa voit se modeler un gros ventre. Elle est enceinte!
Avec tout que cela comporte de coutumes et de gestes protecteurs. Plus
tard la poupée-femme accouchera d'une fille ou d'un garçon, une copie
de taille réduite de la poupée-femme ou de la poupée-homme. Le
moment venu du jeu de la naissance, on invite toutes les poupées pour
fêter cet heureux événement, en chantant et en se réjouissant autour
d'une dînette.
Dans les années 1940, la même série de jeux de poupées se jouait par
les filles des Oulad Yahya des régions rurales aux environs de
Taroudannt. Ce triple jeu de poupée se retrouve aussi dans le milieu
amazigh d'Imi-n-Tanoute, du moins vers 1980. Le gros ventre de la taslit
enceinte s'obtenait en mettant un petit coussin de chiffons sous ses
vêtements. La poupée-bébé est une fois de plus construite suivant le
modèle de la poupée adulte, seulement sa taille est plus réduite et ses
vêtements sont plus simples. Suivant la volonté des filles, la poupée-
mère donnera la vie à une poupée-garçon, iwis, ou une poupée-fille, illis.
Selon Sfia Ghârib, une femme amazighe née en 1938 à Arhbalou-n-
Serdane au Moyen Atlas, la poupée-jeune mariée décrite plus haut (fig.
76, p. 128) pouvait aussi jouer son rôle dans l'enfantement d'un bébé
figuré par une toute petite poupée du même genre.
199
La collection du Musée de l'Homme possède un berceau-jouet de Sfax
collectionné vers 1933 (33.70.10), un berceau-jouet déjà mentionné par
Castells en 1915.
Jusqu'à ce que j'aie filmé en collaboration avec Boubaker Daoumani les
vidéos sur le jeu de poupée dans la région de Sidi Ifni début 2002, je
n'avais reçu que trois informations sur des jeux de poupée dans lesquels
les filles utilisent des poupées représentant des petits ou des jeunes
enfants. Ces informations se réfèrent aux filles de Ouarzazate, les filles
des Oulad ben Sbaa ainsi que les filles juives des anciens mellahs du
sud-marocain.
Comme mentionné à la fin des données sur les poupées-femmes de
Marrakech la relation entra la fille ayant le rôle de mère et son bébé,
représenté par une petite poupée, fut jouée à Ouarzazate vers 1980.
Au village Ouled ben Sbaa, près de Sidi Mokhtar sur la route
d'Essaouira à Marrakech, les filles arabophones de six à douze ans
utilisent leurs poupées surtout comme des bébés. Ce jeu se pratique seule
ou avec une ou plusieurs filles de la famille ou du voisinage dans la cour
de la maison. Selon Abdelhalek Naseh, dont proviennent ces
informations, c'est un jeu très courant qui se pratique toute l'année. Cette
poupée qui s'appelle néanmoins °arûsa ou jeune mariée, a une armature
de roseau ou de bâtonnets en forme de croix vêtue avec des chiffons.
“Bien que la forme de base reste assez simple, certains détails sont mis
en relief comme les seins, les fesses, la tête” (1993: 30-31).
Flamand (recherches de 1948 à 1958, p. 183) parlant des fillettes
juives du sud-marocain écrit :
Deux enfants placent une poupée entre eux ou bien dans un véhicule à
sa taille : landau, poussette ou simple boîte de carton tirée par une
ficelle. Dans cet équipage, ils simulent diverses occupations de
parents : préparer le repas de leur "enfant", s'entretenir de son
avenir, emmener l'enfant à l'école, faire des visites ou bien recevoir en
sa compagnie... etc.
200
Dès lors je pensais qu‟utiliser des poupées pour jouer des rôles de mère
ou d‟enfant était exceptionnel au Maroc. J‟étais donc étonné de voir que
les deux premiers groupes de jeu jouant à la poupée et filmés à Sidi Ifni
ont librement choisit de s‟engager partiellement ou complètement dans
un jeu figurant des relations entre mère et enfants et entre enfants et
l‟école. Dans le premier cas les poupées représentant des enfants sont
des poupées faites par une fille de six ans d‟une famille populaire ou
bien des poupées en plastique du genre Barbie qui lui appartiennent.
Dans le deuxième cas il s‟agit de vraies poupées Barbie et de peluches
appartenant à deux sœurs d‟une famille de classe moyenne (Rossie and
Daoumani, 2003, Video 1, Video 3). La description de ces poupées se
trouve p. 194-196.
L'enterrement de la poupée est un quatrième thème des jeux de poupées
des filles marocaines. La première mention de ce jeu dans la
bibliographie consultée date de 1915. Le dixième jour de l'année
musulmane, c'est-à-dire lors de la fête de l'°ashûra, les enfants de Settat
et d'ailleurs “font des simulacres d'enterrement en creusant une fosse
pour enterrer avec le cérémonial habituel une poupée faite d'un os
entouré de chiffons” (Mission Scientifique du Maroc, p. 302).
Une jeune femme, Naïma Tadili, de la ville de Khouribga, que j'ai
rencontrée au Centre d'Etudes des Problèmes du Monde Musulman
Contemporain à Bruxelles en 1981, m'a parlé spontanément de ces
enterrements de poupées. Ses souvenirs, et ceux de sa belle-mère en
visite en Belgique, ont donné les renseignements ci-dessous.
Un os de patte de mouton égorgé à l'aïd el-kebir, c'est à dire le
dixième jour du mois dhu el-hijjah (le dernier mois du calendrier
musulman et le mois du pèlerinage), est utilisé par des filles de la région
de Khouribga, près de Settat et non loin de Casablanca, pour
confectionner une poupée qui s'appelle °ashûra. Un bâtonnet est ligaturé
en croix à cet os pour figurer les bras et l'armature est alors habillée en
femme. Sur la tête de la poupée les filles mettent du henné. Le visage
n'est pas indiqué. Pendant tout un mois lunaire ces poupées sont au
centre des activités ludiques des fillettes. Avec leur poupée elles se
promènent dans le voisinage et font la quête de dons chez la famille et
les voisins. Ceux-ci leur donnent un peu d'argent ou des denrées. Vient
alors le jour de l'°ashûra, le dixième jour du premier mois de l'année
201
musulmane. En Afrique du Nord en général et dans la région en question
en particulier, la fête de l'°ashûra donne lieu à des rites et usages qui sont
en rapport avec la naissance de la nouvelle année et la mort de l'année
passée. Une description récente de la fête de l'°ashûra dans la ville de
Marrakech a été publiée en 1976 par Jemma-Gouzon. Lors de l'°ashûra
on commémore aussi les morts. En plus cette fête est une journée où l'on
gâte les enfants qui reçoivent des bonbons et des jouets. Dans ce
contexte les filles vivent la mort et l'enterrement de leur poupée. Comme
il est dit dans la citation ci-dessus datant de 1915 et comme il était
encore d'usage dans plusieurs familles de Khouribga pendant la seconde
moitié des années 1960, la poupée meurt à l'°ashûra et est enterrée par la
fille elle-même. Les filles de la même famille et leurs amies enterrent
ensemble leurs poupées et font les rites d'enterrement pour la poupée qui
à été pour eux durant tout un mois un être bien-aimé qu'elles perdent en
ce jour de l'°ashûra. Le septième jour après l'enterrement les filles
reviennent au cimetière de leurs poupées pour y accomplir les devoirs
envers les morts comme on le fait pour les humains. Selon mon
informatrice, Naïma Tadili, ce jeu traditionnel n'était pas toléré par tous
les parents. Ainsi elle n'a pas participé personnellement à ce jeu mais elle
l'a vu faire par ses amies et voisines. Dans certaines familles ce jeu serait
encore pratiqué début 1980, surtout à la campagne mais de moins en
moins en ville. Une autre femme marocaine Rhimo Bijat Laraïchi, née en
1942 à Larache mais vivant à Gand en Belgique, m'a affirmé en juillet
1982 qu'elle a vu ce jeu d'enterrement de la poupée à Settat, sur la route
de Casablanca à Marrakech, mais que cette coutume n'existe pas à
Tanger, Tetouan ou Larache.
Dans son “Noms et cérémonies des feux de joie chez les Berbères du
Haut et de l'Anti-Atlas”, Laoust parle lui aussi et en 1921 de
l'enterrement par des fillettes de la poupée nommée 'ashur' ou 'isli n-
ashur', c'est-à-dire le fiancé de l'ashur, encore appelé “mon Frère
Achour” ou “mon Oncle Achour” (p. 31), ce qui ne laisse aucun doute au
sujet du sexe de cette poupée. Il est donc question ici d'une poupée-
homme provenant d'une région non-saharienne. D'autres exemples de
poupée-hommes marocaines que j'ai pu trouver depuis 1992 sont décrits
chez les poupées-hommes. Selon cet auteur cette poupée masculine est à
Tanannt, près des Cascades d'Ouzoud dans la région de Marrakech, un
roseau recouvert de blouses et d'un burnous, mais un os peut aussi bien
202
être utilisé. Laoust (1921: 30-31) nous raconte ce jeu rituel de la manière
suivante :
Quelques jours avant l'apparition de la lune de l'Achoura, les fillettes
la promènent sur le sentier qui mène au marché des Aït Majjen et au
mausolée de Sidi Sâïd. Elles la posent debout au pied du gros
térébinthe dont l'ombre protège le tombeau de l'agourram, et arrêtent
au passage tous ceux que le hasard du chemin mène dans ces parages.
en disant : “donnez-nous l'obole d'Achour, aqarid n-'asur !” Quand
naît la lune de moharrem, elles recueillent des dattes, des noix, des
raisins secs dont toutes les familles font grande provision à l'Achoura.
Puis, le soir de la fête, elles vont avec leur poupée de maison en
maison, demander les menus cadeaux : œufs et morceaux de viande
qu'il est d'usage de leur remettre. Après le souper, elles se réunissent
sous un figuier et groupées autour de la poupée étendue à terre, elles
simulent une grande douleur : elles dénouent leurs tresses,
s'égratignent le visage, pleurent bruyamment et chantent de ces
lamentations funèbres qu'on entend dans les familles qu'un deuil vient
de frapper. Cette nuit-là, en effet, est celle de la mort d'Achour, du
personnage énigmatique que personnifie la poupée. Ce rite accompli,
les fillettes se séparent pour se retrouver au même lieu aux premières
lueurs de l'aurore : c'est à cette heure précise que meurt Achour et
que l'on procède à ses funérailles. Dans la petite tombe où on le
dépose, on jette des dattes et des œufs. Puis les petites filles s'étant
retirées, les garçons arrivent à leur tour ; ils se précipitent sur la
tombe, s'emparent des dattes et des œufs, déterrent la poupée, la
dépouillent de ses vêtements et la jettent nue sur le sol pour qu'elle
appelle la pluie ... Peut-être croient-ils que la pluie vivifiante et
fécondante préside à la résurrection de l'esprit affaibli ou mourant de
la végétation que personnifie sans doute ce mannequin.
En février 1992, ces données, datant de 1921, ont été confirmées, pour la
seconde moitié des années 1970, par une jeune femme amazighe de 24
ans qui a vécu toute sa jeunesse dans la région de Beni Mellal dans le
Moyen Atlas. Elle y a ajouté que les jeunes filles considèrent que la fête
de °ashûra est leur propre fête et quand elles font le tour des maisons
elles chantent à chaque fois :
203
Maintenant c'est °ashûr, nous sommes libres!
C'est à l'aïd el-mouloud (la fête de la naissance du Prophète) que les
hommes gouvernent!
J'ai trouvé confirmation de l'enterrement au cimetière d'une petite
poupée, la 'fiancée d'°ashûr', par les fillettes amazighes des Aït Ouirra de
la région d'El Ksiba, près de Kasba-Tadla au Moyen Atlas. Ce jeu rituel
marque la fin de la fête de l'°ashûra (Oubahammou, 1987: 88). Dans
Enfances Maghrébines M. Dernouny parle aussi de l'enterrement d'une
poupée, une poupée-homme nommée 'Sidi Achour'. Cette poupée est
faite avec soin à partir d'un os par des jeunes filles un mois à l'avance
pour être prêtes le jour de l'°ashûra'(1987: 26-27). Dans un article publié
en 1971 il est dit que le soir avant l'°ashûra des filles villageoises font
des poupées qu'elles appellent 'Achour' et qu'elles les enterrent dans de
vieilles tombes, poupées que les garçons recherchent le lendemain pour
les détruires (Belghiti, p. 102).
Il est clair que ce jeu de poupée simulant l'enterrement est lié aux
rituels en relation avec l'agriculture tout comme le jeu de poupée pour
demander la pluie. Bien que les poupées rituelles aient été éliminées de
l'analyse, il faut néanmoins souligner que la distinction entre poupée
rituelle et poupée pour jeu d'enfant s'estompe parfois comme c'est le cas
pour le jeu de poupée simulant l'enterrement ou pour la poupée en cuiller
de bois utilisée pour faire tomber la pluie dont ont trouve un exemple
marocain ci-dessous et un exemple tunisien chez les poupées-femmes
tunisiennes.
Souad Laabib du village amazigh de Ksar Assaka près de Midelt se
rappelle que jusqu'à l'âge de quatorze ans, c'est-à-dire vers 1982, elles et
les autres filles du village ont fait en période de sécheresse la poupée à
cuiller de bois, appelée telghenja, habillée comme une femme plus ou
moins âgée et nullement comme une jeune mariée. Pour cela un bâtonnet
est ligaturé en croix au cuiller de bois d'environ 50 cm de haut pour
donner des bras à la poupée. Des chiffons sont mis sur cette armature en
guise de vêtements après qu'une ouverture a été faite dans leur centre
pour pouvoir passer la tête. Cette tête est alors entourée de morceaux de
tissu, servant de foulards, de telle manière que le bois n'apparaît pas. Une
ceinture sert la taille de la telghenja qui ainsi a toujours la forme d'une
204
femme maigre au point que quand on veut dire d'une femme qu'elle est
vraiment maigre on dit qu'elle est comme une telghenja.
Une fois que telghenja est prête et dans l'après-midi, un groupe
d'environ dix filles de plus ou moins le même âge va avec elle en
procession, en chantant et en s'accompagnant sur un bendir ou tambour à
main, au 'er-rûd' ou tombeau couvert de Sidi Bounouar au cimetière du
village. Arrivé au tombeau les filles chantent :
Sîdî Bûnwâr jînâ, er-Rabbî t°afû °alînâ.
Sidi Bounouar on vient, que Dieu nous guérit.
Alors les filles enlèvent les souliers et entrent l'une après l'autre en
emportant telghenja dans le tombeau couvert. Elles donnent une bise sur
le cadre de la porte et contournent trois fois le tombeau sur lequel des
bises sont aussi données. Tout le groupe reste autour du tombeau
pendant qu'une tah'rért ou soupe est préparée avec de l'eau froide et de la
farine. Les filles sortent du tombeau, une d'elles monte sur le toit et verse
cette soupe dans l'écoulement pour qu'elle coule le long du mur. Pendant
la procession et durant tous ces rituels des filles tiennent, à tour de rôle,
telghenja droit au-dessus de leur tête mais une fois que la dînette
commence, elle est couchée par terre. Pour cette dînette à côté du
tombeau couvert, les filles ont apporté du pain, des tomates, des
morceaux de sucre et du thé préparé à la maison. Après la dînette les
filles chantent à nouveau. Cependant, les chants sont maintenant des
chants chantés pendant des sessions de possession par les esprits et la
danse des cheveux qui y est liée est exécutée. Après cela la procession se
remet en marche en chantant et avec telghenja bien en vue pour faire un
tour entre les maisons du village, mais sans que l'on fasse la quête ou que
l'on entre dans les maisons. Pendant que telghenja est promenée dans le
village, les filles chantent :
A telghenja asî ûrâwûnnem sîginnâ, gher er-Rabbi enzâr atkertûga.
Oh telghenja lève tes mains vers le ciel, pris Dieu pour que la pluie
fasse pousser l'herbe.
205
Ou bien elles chantent :
A telghenja marja wunna wurdifighen, isi°mâ ghed isîmût.
Oh telghenja marja ceux qui ne sont pas sortie de la maison pour te
voir, ils sont aveugles ou morts.
Quand les filles sont fatiguées de se promener avec telghenja elles vont
s'asseoir, se parlent de la pluie qui doit venir ainsi que d'autres choses et
rigolent entre eux. Après quelque temps telghenja est déshabillée, ces
vêtements sont jetés et le cuiller à bois est repris à la maison par la fille
qui l'a empruntée à sa mère. Une fois c'est la mère de Souad, ayant
trouvé un grand vieux cuiller à bois dans la maison, qui a fait la telghenja
que Souad et ses copines ont utilisée pour ce jeu rituel.
2.15 Les poupées-femmes tunisiennes
La collection du Musée de l'Homme possède deux poupées-femmes
tunisiennes provenant de deux villes et fabriquées avant 1931.
155
206
Ces poupées d'une hauteur d'environ 30 cm ont le corps, la tête et les
membres faits de pièces de tissu bourrées de paille et de chiffons. Leur
visage, à bouche, nez, sourcils et yeux, est dessiné et brodé. Afin de
donner un peu de relief au nez un grain est à cet endroit glissé sous
l'étoffe, comme cela est fait pour certaines poupées marocaines. Une
poupée est en costume de femme arabe (fig. 155, p. 205, H = 36 cm;
catalogue 3.10, 30.54.891, p. 287) et l'autre en costume de juive (fig.
156, H = 33 cm; catalogue 3.10, 30.54.888, p. 287). Elles portent
plusieurs robes. La poupée en costume arabe porte de nombreux bijoux.
Sigrid Paul décrit et montre dans son livre Afrikanische Puppen une
poupée tunisienne de 28 cm de hauteur, collectionnée par Moberg en
1950 (1970: 118, 208 - Abb. 97). Contrairement aux poupées-femmes
tunisiennes du Musée de l'Homme, cette poupée a une tête rectangulaire
en bois revêtue de tissu blanc. Néanmoins, les traits de visage de cette
156
207
poupée - avec sa bouche brodée avec du fil rouge et ses sourcils, ses
yeux et son nez dessinés - se rapprochent des traits de visage des deux
poupées tunisiennes du Musée de l'Homme.
Aimé Dupuy nous parle en 1933 (p. 309) des poupées tunisiennes :
Bien entendu, la poupée figure au nombre des jouets féminins ;
toutefois, remarque un élève mouderrès d'Agareb (caïdat de Sfax), "la
femme arabe, dans les villages, se tient encore à l'écart du luxe. Elle
n'achète pas la poupée de sa fille chez un marchand de jouets, elle la
fabrique elle-même ... Elle (la fille) continue ce jeu qui montre son
attachement à la vie intérieure, jusqu'à l'âge de huit ou dix ans.
Aimé Dupuy (1933: 309) décrit aussi le jeu de poupée et bien en ces
termes :
La fille considère sa poupée comme une compagne vivante. Elle l'aime
passionnément, lui prépare des mets qui ne sont qu'un peu de terre et
d'herbe hachée, la prend en promenade, la fait souvent coucher avec
elle et fait tout son possible pour qu'elle soit mieux parée et plus jolie
que celle de ses voisines.
En Tunisie la poupée en cuiller de bois, mais habillée en mariée, utilisée
pour des rites de pluie au début de l'année est mentionnée par Jean
Servier (1962 294). D'ailleurs cette poupée-cuiller, dont une photo figure
dans le livre de Servier (photo 12), ressemble, dans sa forme générale
mais plus spécialement encore dans ses traits de visage, aux deux
poupées tunisiennes montrées à la figure 155 et 156 (p. 205-206).
Dans son Mots et choses berbères, E. Laoust présente en 1920 (p.
225-226) la poupée-cuiller des enfants tunisiens de la manière suivante :
Umm Tangi ou Tango, la “mère Tangui” est, à Tunis, la petite poupée
que les enfants promènent, en temps de sécheresse, en l'accompagnant
de leurs chants :
“Votre mère Tango ô femmes,
Demande à Dieu, la Pluie!
Votre mère Tango, avec son collier,
Implore Dieu, qu'il ne la repousse pas!... ”
208
Dans l'île de Djerba, on donne le nom de Tongo à la petite cuiller que
l'on distribue aux enfants en guise de jouet à l'occasion des grandes
fêtes religieuses et plus particulièrement à l'approche du Ramadan.
Cette cuiller a reçu des marchands une décoration vraiment curieuse.
La partie bombée de l'instrument figure, en effet, la tête d'une jeune
fille dont les traits : yeux, nez et bouche ont été tracés à la peinture
noire ; des cheveux à la “chien”, également peints, ornent le front à la
manière des fiancées. A Tunis, où s'observe une coutume identique,
l'ornementation de la cuiller se fait dans chaque famille ; elle n'est
plus, comme à Djerba, l'œuvre du revendeur. Les enfants mangent en
se servant de cette cuiller pendant toute la durée du Carême, puis les
petites filles s'en amusent comme d'une poupée. L'usage s'observe
dans les familles d'un certain rang et non, comme on le supposerait,
dans les classes populaires. Ce qui est tout à fait curieux, c'est que
cette cuiller spéciale ne porte point le nom habituel de mgerfa, qui est
arabe, mais celui de gonjaia qui est berbère.
Ainsi donc, dans des régions les plus anciennement islamisées du
Maghreb, le nom à peine modifié de la grande divinité africaine
Tlghenja, est resté appliqué à son image symbolique : la cuiller
devenue petite poupée d'enfant, poupée néanmoins différentes des
autres par son caractère rituel puisqu'on ne s'en amuse qu'à
l'occasion des grandes solennités musulmanes.
Dans la région de Sousse, une poupée était aussi portée de porte en porte
par les enfants pour appeler la pluie. Cette poupée n'était pas faite d'un
cuiller mais de deux planches clouées en forme de croix, recouvertes
d'étoffes coloriées. A chaque maison on versait de l'eau sur la poupée
(Dupuy, 1933: 316).
Pour un aperçu des données sur la personnalisation de la pluie au
Maghreb voir le commentaire de Gabriel Camps dans l'Encyclopédie
Berbère au mot “anzar” (1989: 795-797).
209
3 Les poupées-enfants
3.1 Résumé
Les poupées-enfants semblent être bien rares au Sahara et en l'Afrique
du Nord et elles ne diffèrent que peu des poupées-adultes. Dans la
collection du Musée de l'Homme j'ai trouvé trace de poupées-enfants
chez les Touaregs Kel Ahaggar et Kel Ajjer. Une référence
bibliographique et une information personnelle attestent l'existence de
poupées-enfants chez les Touaregs Kel Iforas. Auprès des Maures de
Tidjikdja, ont été recueillies deux poupées-fillettes.
A l'exception d'une poupée habillée en costume d'enfant nègre,
recueillie quelque part en Algérie et offerte au Musée de l'Homme par le
Gouvernement Général de l'Algérie en 1889 mais qui a
malheureusement disparu (fichier signalétique: 89.79.127), la collection
ne comporte - provenant en dehors du Sahara - que des poupées-enfants
que portent, dans le dos, certaines poupées-femmes chaouia.
Cependant la revue France-Maroc de 1917 mentionne l'existence
d'une poupée-bébé marocaine lors de la description du jeu de
l'accouchement de la poupée-maman. La pratique de ce jeu a déjà été
confirmée pour le sud du Maroc lors de ma première mission de
recherche dans cette région en février 1992. Depuis lors, l'utilisation de
poupées-bébés dans les jeux des filles marocaines du village Arhbalou-n-
Serdane au Moyen Atlas m'a été signalée. A Taroudannt, et
probablement ailleurs, une poupée-bébé avec son biberon, fabriquée en
Chine, est devenue vraiment populaire parmi les filles.
3.2 Les poupées-enfants touarègues
Trois poupées recueillies chez les Touaregs Kel Ahaggar (Sahara
algérien) représentent des enfants. Deux figurent des garçons (catalogue
4.1, 41.19.133/157, p. 289) et une est une fillette assise de 5,5 cm de
hauteur (catalogue 4.1, 41.19.129, p. 289). Cette poupée-fille est du
même genre que la poupée-femme touarègue Kel Ahaggar décrite au
chapitre 2.2 (p. 85). Elle fut construite par un garçon.
210
Un jeune garçon touareg Kel Ahaggar en tenue de cérémonie est figuré
par une poupée qui ne diffère
des poupées-guerriers et
poupées-notables touaregs
que par une taille plus petite
de 11 cm (fig. 157, voir
catalogue 4.1, 41.19.157, p.
289). L'armature est en tiges
de graminées et formée de
deux bâtonnets verticaux
auxquels sont ligaturés en
croix deux autres bâtonnets.
Cette poupée est vêtue d'un
sous-vêtement kaki et d'un
survêtement noir. Elle porte
le baudrier et la ceinture faits
de fils de coton jaune, rouge
et vert. La tête est entourée
de tissu noir avec, au-dessus,
des fils de coton de la même
couleur jaune, rouge et verte
ainsi que de couleur blanche.
Maurice Cortier parle en 1908 (p. 310) de figurines représentant des
petits enfants et confectionnées par les fillettes touarègues Kel Iforas
(Sahara malien). Selon Ekhya Ag-Sidiyene qui m'a renseigné sur les
poupées-femmes touarègues Kel Iforas, il existe des poupées-fillettes
faites d'une crotte d'âne dans laquelle une épine est fixée. Cette poupée-
fillette ne porte ni habits ni dessins géométriques représentant les seins
comme cela se voit sur les poupées-femmes (fig. 32 p. 87, 34 p. 88).
Auprès des Touaregs Kel Ajjer (Sahara libyen) furent recueillis en
1934 une poupée-mère et son enfant en terre cuite. On peut voir la
poupée-mère à la figure 35 (p. 89). La poupée-enfant à corps massif sans
jambes ressemble tout à fait à la poupée-mère. Elle mesure 7 cm de
hauteur et le diamètre de la base est 3,5 cm.
157
211
3.3 Les poupées-enfants maures
Deux poupées provenant des Maures de Tidjikdja au Sahara mauritanien
représentent des fillettes (catalogue 4.2, 9.70.7.1/2, p. 289). Elles furent
confectionnées par des filles selon le modèle des poupées-femmes de
cette région. Charles Béart mentionne lui aussi des poupées-enfants peint
en ocre comme les poupées-servantes (voir 2.4 Les poupées-femmes
maures, p. 96).
3.4 Les poupées-enfants kabyles
Un des deux types de poupées mentionnés par Germaine Laoust-
Chantréaux représente le bébé. Cet auteur écrit :
Il est facile aux fillettes de reconstituer, à leur mesure, l'univers où
elles vivent ; ainsi à l'aide de quelques menues brindilles elles font de
petits berceaux, recouverts de quelques morceaux d'étoffe. Là, à l'abri
du voile, dort la tigsett, la poupée des petites filles d'Aït Hichem : ce
n'est rien moins, ainsi que son nom l'indique (petit os) qu'un os de
gigot, soigneusement revêtu de chiffons ; la partie renflée forme la
tête où des traits de suie dessinent la figure que l'on farde tandis qu'un
minuscule foulard masque la nudité du crâne. Ainsi enveloppée, la
tigsett satisfait les plus difficiles.
3.5 Les poupées-enfants chaouia
Comme on peut le voir à la figure 67 (p. 115) certaines poupées-femmes
chaouia portent un petit enfant dans le dos (voir 2.12 Les poupées-
femmes chaouia, p. 112).
212
3.6 Les poupées-enfants marocaines
Comme déjà mentionné dans la synthèse, une information
bibliographique de 1917 décrit l'accouchement de la poupée-femme et
bien en ces termes : “en un tour de main une fillette confectionne une
poupée semblable à la première (la poupée-femme) mais plus petite”
(“La poupée Iblisa”, p. 39). C'est l'unique référence à des poupées-
enfants marocaines que j'ai trouvée dans la bibliographie. Mais les
informations que j'ai pu recueillir au Maroc confirment la pratique de ce
jeu aussi bien chez des filles amazighophones qu'arabophones.
Dans la campagne de Taroudannt, des filles Oulad Yahya dans les
années 1940, et celles d'aujourd'hui du centre rural de Hmar jouent à la
grossesse de leur °arûsa et à la naissance de son bébé, une poupée-
femme ou une poupée-homme en miniature selon la volonté des filles.
Chez les filles amazighes d'Imi-n-Tanoute on jouait, dans les années
1970, également à la taslit enceinte et à la naissance de la poupée-bébé,
une copie en miniature de la poupée-mère, tout comme cela se faisait
chez les filles amazighes d'Arhbalou-n-Serdane vers 1950.
Jusqu'à présent j'ai obtenu deux poupées-mères portant un bébé dans
le dos, une faite avec une armature de bâtonnets en forme de croix par
une fille du village Hmar près de Taroudannt en 1997 (fig. 126, p. 176)
et une autre modelée en argile par une fille du village Lahfart près de
Sidi Ifni en 2002 (fig. 149, p. 189). Ces poupées-bébés à traits de visage
ont été décrites ensemble avec leur poupée-mère (voir 2.14 Les poupées-
femmes marocaines, p. 117).
En milieu populaire arabophone de Marrakech, dans le quartier de
Daoudiyât, une petite poupée en plastique servait, vers 1975, de petit
enfant ou de bébé que les filles portaient dans le dos, qu'elles
nourrissaient ou dorlotaient. Pareille poupée-bébé avec biberon, en
plastique, est vers 1996 un des jouets favoris des filles de Taroudannt.
Il faut aussi mentionner qu'une des poupées qui me furent données par
les filles amazighes du village Aït Ighemour est à interpréter comme une
fillette.
Pour une analyse du jeu de la poupée enceinte et de celle qui enfante,
ainsi que du jeu avec la poupée-petit enfant, je renvoie le lecteur au
chapitre 2.14 sur les poupées-femmes marocaines (p. 197-199).
213
A la fin de cette analyse des poupées sahariennes et nord-africaines et
bien que basée sur une source unique, il faut que je mentionne le jeu de
poupée dans lequel des filles amazighes du village de Tizal, près d'El
Khemis, jouent à la circoncision. Cette information me fut transmise par
Fatima Outizal, née à Tizal, qui la tient d'une femme de cinquante-cinq
ans et qui a vécu toute sa jeunesse à Tizal. Cette femme raconte que dans
les années 1950 un des jeux de poupées était celui de la cérémonie de
circoncision. Une petite poupée d'environ 7 cm de hauteur, faite de deux
roseaux assemblés en forme de croix, est fabriquée par les filles. Ce sera
le garçon à circoncire. Au moment de la circoncision une fille, jouant le
rôle de la mère du garçon, se tient debout un bâton à la main. Elle se
regarde dans un miroir pendant que les filles chantent en amazigh :
Où est-ce que le garçon pleure ?
C'est à la circoncision qu'il pleure !
L'on peut trouver confirmation de l'existence au Maroc de ce jeu de
poupée représentant la circoncision en se référant à la très brève mention
de ce jeu dans le livre de Mohammad Ibn Azzuz Hakim (1959: 32, voir
2.14 Les poupées-femmes marocaines, p. 123).
217
Dans cette section je présente d'abord une synthèse de l'analyse des
poupées et jeux de poupées sahariens et nord-africains, suivie par des
conclusions basées sur cette analyse et se rapportant à des aspects
environnementaux, spatio-temporels, économiques, sociaux et culturels,
ainsi qu'à l'évolution des sociétés.
1 Synthèse
En Afrique du Nord et au Sahara, on trouve aussi bien des poupées-
hommes que des poupées-femmes et des poupées-enfants. Cependant les
poupées-femmes sont de loin les plus nombreuses. Exception faite pour
le Maroc, je n'ai noté l'existence de poupées-hommes que chez les
enfants de populations vivant au Sahara. Ces poupées-hommes et ces
poupées-femmes sont d'âge adulte, souvent l'âge d'un jeune-marié ou
d'une jeune-mariée. Les poupées-enfants représentent des filles et des
garçons d'un certain âge déjà. Les poupées-enfants et les poupées-bébés
semblent être rares, ceci contrairement à la situation en Europe
occidentale et méditerranéenne où, jusqu'à une époque récente et depuis
le début du vingtième siècle, les enfants jouaient surtout avec des
poupées-enfants et des poupées-bébés.
Le plus souvent les enfants sahariens et nord-africains confectionnent
eux-mêmes leurs poupées, mais parfois ce sont des femmes adultes de la
famille ou des artisanes et artisans qui les fabriquent. Ainsi, toutes les
poupées sont de fabrication locale, bien que la tête d'un type de poupée
mozabite soit d'origine européenne, qu'au Maroc une poupée importée en
plastique peut servir d'armature de poupée et que selon F. Castells (1915:
342) et Sigrid Paul (1970: 113) des poupées européennes furent déjà
acceptées dans la culture nord-africaine vers 1914.
Comme un peu partout dans le monde, ce sont avant tout les filles qui
jouent avec des poupées, beaucoup plus rarement les garçons et dans ce
cas il s'agit presque toujours de poupées-hommes.
Bien que trop rarement révélé dans les informations bibliographiques,
les poupées décrites ici n'ont de sens que dans le contexte des jeux
d'enfants. Le plus souvent il s'agit de jeux collectifs rassemblant des
enfants, la plupart du temps des filles, de la même famille et/ou du
218
voisinage. Pour ces jeux de poupées collectifs les enfants utilisent bon
nombre d'autres jouets ou instruments de jeu. En plus, ils accompagnent
leur jeu de chansons, danses, comptines, contes et autres jeux de langage.
Selon toutes les données à ma disposition, les poupées sont utilisées
dans des jeux où les enfants s'adonnent à l'interprétation de la vie des
adultes. Dans le domaine du monde masculin, les enfants font de leur
poupée un méhariste, cavalier, muletier, berger, guerrier ou notable.
Dans le domaine du monde féminin il s'agit le plus souvent de jouer au
ménage, de représenter des fêtes - surtout des mariages - et autres
réunions importantes, de figurer une grossesse, un accouchement et
même un enterrement. Sauf dans la représentation des fêtes de noces où
le monde féminin et masculin se trouvent mêlés, la distinction entre les
activités féminines et masculines reste très ferme dans les jeux de
poupées.
Pour la fabrication des poupées une grande variété de matériaux
d'origine naturelle ou de récupération est utilisée. Dans la très grande
majorité des cas, ces matériaux sont d'origine locale ou domestique : du
matériel minéral comme des pierres ou de l'argile ; du matériel animal
comme de la bouse sèche, des os, des cheveux, du cuir et de la laine ; du
matériel végétal comme des feuilles, du roseau, des branchettes, des
dattes, des épis de maïs ; du matériel textile comme des chiffons et des
fils ; du matériel métallique comme des fils de fer et de la tôle ; du
matériel plastique comme des flacons, des fils et des bijoux. L'apport de
matériaux étrangers au milieu naturel ou domestique est négligeable, les
seuls cas remarquables étant la tête en papier cartonné des poupées
mozabites, l'utilisation de fils électriques plastifiés par les enfants de la
vallée de la Saoura, la tête en flacon des récentes poupées des filles ghrib
et la poupée en plastique importée au Maroc et certainement aussi dans
les autres pays de la région.
En ce qui concerne la forme et l'élaboration des poupées des enfants
sahariens et nord-africains, les enfants de chaque population mentionnée
semblent s'être tenus à un ou parfois quelques modèles clairement
définis.
Comme dans chaque communauté les enfants jouent avec le même
type de poupées, leur similitude facilite l'élaboration et la
communication de significations communes. Ceci se trouve renforcé par
le fait que les enfants fabriquent eux-mêmes leurs poupées. Dès lors, les
219
poupées et jeux de poupées peuvent être vus comme un moyen effectif
de communication aidant au maintien du système socioculturel. Mais
cela ne signifie nullement que la créativité individuelle est absente.
Si cependant l'on prend en vue toute l'aire géographique en question
une intéressante variété se laisse entrevoir, aussi bien sur le plan des
matériaux utilisés, que de la forme, de la grandeur, du visage, de la
coiffure et de l'élaboration vestimentaire. Sauf exception assez rare, les
poupées restent des représentations figuratives et réalistes du moins au
niveau de l'aperçu global et de l'aspect vestimentaire. Abstraction faite
de la classe aisée, le modèle de la femme idéale est une femme bien
nourrie, même corpulente, décemment vêtue comme le démontrent les
poupées-femmes de ces régions.
Chez beaucoup de populations nord-africaines et sahariennes, les traits
de visage ne sont pas indiqués sur les poupées locales ou bien ils le sont
de manière fantaisiste. Je n'ai trouvé des poupées à visage que parmi les
poupées-femmes belbala, mozabites, marocaines et tunisiennes, ainsi
qu'auprès des filles ghrib où il est question d'une évolution récente
influencée par l'école, une évolution qui se confirme aussi pour certaines
communautés marocaines. Cependant plusieurs poupées que j'ai vues
chez des enfants marocains depuis 1998 ont des traits de visage et il
arrive qu'une poupée refaite par une mère a des traits de visage et que
celle faite par sa fille n'en a pas. L'idée que des poupées sans traits de
visage sont plus anciennes, originelles ou authentiques que celles avec
des traits de visage semble fausse pour le moment.
Les informations que j'ai pu obtenir depuis la première édition de ce
livre en 1993, confirment l'utilisation de la poupée locale ou
traditionnelle, faite par les filles et très rarement des garçons, pour les
jeux de poupées dans les villages du centre et du sud du Maroc. En
même temps se trouve confirmés leur disparition et leur remplacement
par la poupée en plastique importée de Chine ou ailleurs, dans les villes
et les petits centres urbanisés, de temps en temps même dans un village.
Plusieurs informations démontrent que la poupée en plastique s'est
infiltrée lentement et que pendant tout un temps les deux types de
poupées ont coexisté ou coexistent encore. Dans ce contexte l'influence
des milieux aisés sur les citadins et ruraux des classes moyennes et
populaires peut être soulignée. Que dans ces milieux aisés, suite à la
stimulation par les médias audio-visuels, l'on est branché sur ce qui est à
220
la mode en Europe est souligné dans un numéro spécial, “le Marché du
Jouet”, de la revue marocaine Enjeux (1993: 35-36) :
Une contagion qui s'apparente à un véritable 'transfert culturel' dont
le meilleur exemple est sans doute la célèbre poupée Barbie. De nos
jours une 'petite marocaine de bonne famille' se doit d'avoir la
panoplie complète : la maison Barbie avec son mobilier, la garde
robe Barbie, la Ferrari de Barbie, son fiancé... De quoi bâtir un
univers conforme aux stéréotypes culturels occidentaux. Même
phénomène chez les garçons, mais les modes sont différents. En ce
moment les robots genre Terminator ont une côte d'enfer!
Le premier “salon de l'enfant” qui s'est tenu du 16 au 26 décembre 1993
s'adressait aussi aux parents et enfants des milieux favorisés citadins.
L'intrusion de la poupée Barbie dans les activités ludiques des filles de
la classe aisée indique un changement fondamental dans les attitudes
traditionnelles envers le modèle de femme idéale en Afrique du Nord, un
modèle idéal décrit plus haut comme une jeune femme corpulente
décemment vêtue. Une femme du type Barbie est dans la réalité décrite
au Maroc comme un 'squelette vivant'. Une femme dont l'aspect
physique est attribué à l'une des conditions misérables suivantes : la
pauvreté, la maladie ou les problèmes, sinon à une interaction entre ces
facteurs. Dès lors, il n'est pas surprenant que certaines femmes
marocaines prennent des pilules pour grossir tout comme d'autres
femmes en Occident le font pour maigrir.
Pourtant, une poupée svelte avec une robe andalouse flamenco,
localement crochetée, s'infiltre dans les maisons marocaines (fig. 95, p.
148). Mais suivant plusieurs informatrices ces poupées ne servent
nullement comme jouets d'enfants. Elles sont des objets de décoration
que l'on retrouve surtout sur les postes de télévision. Néanmoins, il est
possible que dans un avenir plus ou moins proche le modèle Barbie
dépasse le modèle traditionnel de poupée comme cela se fait dans la
classe aisée. Un exemple de la progression de poupées en plastique du
genre Barbie au Maroc durant ces dernières années se remarque dans le
jeu de poupée de deux filles du village Zaïda au Maroc Central (fig. 94,
p. 148) et d'une fille de Sidi Ifni dans le sud-marocain (Rossie and
Daoumani, 2003, Video 1). Des informations obtenues lors de la foire du
221
moussem annuel de Sidi Ifni en juillet 2003 démontrent que ce genre de
poupées en plastique se vend bien même si les vendeurs de jouets disent
que la poupée Little Miss, importée de Chine et avec des formes plus
arrondies, est la plus populaire parmi les filles de cette ville (fig. 123, p.
173).
Il faut, avant de conclure cette synthèse générale, tout de même attirer
l'attention sur le fait que la portée de cette analyse des poupées et jeux de
poupées sahariens et nord-africains se trouve limitée par les sources
d'informations qui ont été utilisées. Ainsi les poupées et jeux de poupées
mentionnés n'excluent nullement l'existence d'autres types de poupées et
d'autres jeux de poupées au Sahara et en Afrique du Nord. Je ne peux
donc qu'espérer que d'autres compléteront, et si nécessaire corrigeront,
les données rassemblées dans ce livre. Ce complément ou cette
correction est d'autant plus nécessaire que les données bibliographiques
ne soient pas toujours basées sur des analyses approfondies et que mes
recherches sur le terrain se limitent quand même à un nombre restreint
d'enfants.
223
2 Aspects environnementaux et économiques
Au Sahara et en Afrique du Nord et dans les limites de cette analyse, la
poupée est un objet confectionné auquel chacun - enfant, adulte et
société - donne le statut de jouet. Il ne s'agit nullement d'un quelconque
objet pris dans l'environnement qui, par hasard et par l'imagination et la
volonté de l'enfant, serait devenu une poupée.
Dans l'aire géographique en question, il existe une relation très étroite
entre l'environnement physique et les poupées. Ceci est du en premier
lieu à l'utilisation de matériaux locaux d'origine minérale et végétale,
ainsi que de matériaux utilisés dans les ménages. Je n'ai trouvé que deux
exceptions, l'emploi d'une tête de poupée de fabrication européenne pour
un type de poupée-femme mozabite et celle de la poupée en plastique
servant d'armature à habiller ou à utiliser comme poupée finie dans
certaines communautés marocaines.
Les poupées et les objets comme la tente, la maison et les ustensiles
qui entrent dans les jeux de poupées, reflètent directement la réalité. Ils
sont “une simulation des objets du monde réel” comme le dit Brian
Sutton-Smith des objets-jeu du 19e siècle en Europe (1987: 20).
En ce qui concerne l'aspect spatial des jeux de poupées, il est évident
que, dans la plupart des cas, ces jeux de poupées se déroulent à
l'extérieur et non pas dans une chambre d'enfant qui d'ailleurs n'existait
pas dans les habitations des communautés dont parle ce livre.
Sur l'aspect temporel peu d'informations ont été révélées. La seule
mention faite à ce sujet se réfère à la société belbala où le jeu de poupée
n'était autorisé ou du moins n'était stimulé que pendant l'automne et le
printemps au moment où la pluie est désirée. Jean Servier, qui a bien
étudié la relation entre les jeux d'enfants et le symbolisme de l'année
agraire en Algérie, parle du jeu de la toupie, de la balançoire, du saut-de-
mouton et du combat de pierres, mais ne mentionne pas le jeu de poupée
(1962: 277-280). En ce qui concerne les Ghrib, on m'a certifié qu'il
n'existait pas un temps de l'année où le jeu de la poupée était déconseillé
ou au contraire stimulé. La même réponse me fut donnée chaque fois que
j'ai reçu une réaction à ce sujet d'un marocain ou d'une marocaine.
224
Pour ce qu'il en est de l'aspect économique l'on peut affirmer que la
poupée n'est jamais un objet du circuit commercial. Bien au contraire,
c'est une poupée faite par les enfants eux-mêmes, éventuellement par
quelqu'un de sa famille et plus rare encore par l'artisane ou l'artisan
locaux. Cependant, des filles du village marocain Ksar Hasni Biad près
des dunes de sable de Merzouga vendent pour quelques dirhams les
poupées qu'elles ont faites aux touristes de passage. Mais cela est bien le
seul exemple d'une commercialisation débutante que je connais. Dans ce
contexte je peux mentionner des sites Internet qui vendent des poupées
africaines probablement faites par des adultes (sites consultés le 7
septembre 2004: http://www.over2u.com/shop/african_dolls.html ou
http://www.africaguide.com/shop/dolls.htm).
Les vêtements et les parures des poupées sont faits de matériaux de
récupération, vieux chiffons, vieilles perles, fils de fer, morceaux
d'aluminium... Comme l'armature des poupées reste simple, la
technologie utilisée demeure rudimentaire. En plus, le modèle de la
poupée reste stable dans chaque population, même s'il y a parfois plus
d'un genre de poupée.
La poupée en plastique, au contraire, fait partie du marché du jouet.
Cette poupée est, pour autant que je sois bien informée, toujours
importée, pour la poupée moins chère de Chine ou d'un pays du sud-est
de l'Asie et pour la poupée de luxe d'Europe. Il y a pourtant une petite
production de jouets en plastique bon marché au Maroc mais “les jouets
fabriqués au Maroc ne marchent pas. Trop bas de gamme pour une
clientèle d'employés et de fonctionnaires” (“le Marché du Jouet”, 1993:
34, 38).
225
3 Aspects socioculturels
Dans les milieux plus ou moins traditionnels dont il est question dans ce
livre, les poupées et jeux de poupées reflètent la réalité sociale et
culturelle de la communauté dans laquelle grandit l'enfant. Laissant de
côté de rares exceptions et pour autant que j'aie pu le vérifier, les
poupées et les jeux de poupées se réfèrent uniquement à la vie adulte.
Les poupées des filles comme celles des garçons ne sont pas des objets
isolés mais servent le plus souvent pour des jeux d'interprétation de la
vie féminine et masculine. La poupée-femme est une jeune mariée, une
épouse, une mère, même une fois une divorcée ou une femme âgée. La
poupée-homme est un jeune marié, un berger, un muletier, un cavalier,
un dromedariste, un guerrier, un notable. Dans la collection du Musée de
l'Homme ne se trouve qu'une poupée touarègue représentant un garçon.
Dans son jeu de poupée l'enfant anticipe très souvent la vie qu'il
mènera comme adulte, du moins dans la communauté traditionnelle où le
mode de vie ne changeait que peu d'une génération à l'autre ; une
stabilité qui n'existe d'ailleurs plus nulle part en Afrique du Nord et au
Sahara depuis deux ou trois décennies. Cependant, on peut se demander
si aujourd'hui les jeux de poupées proposent encore une figuration de la
réalité familiale selon les valeurs et les rôles dictés par la collectivité et si
elles ne deviennent pas un moyen de se libérer des contraintes sociales
comme en Occident où le jeu de “poupée n'est pas l'imitation du
comportement des adultes mais un moyen d'échapper à leur emprise”,
comme le dit Michel Manson (1984: 54).
Néanmoins, l'on peut aisément affirmer que dans les régions et pour la
période couverte par ce livre, la poupée et le jeu de poupée sont un
miroir du monde adulte, plus spécifiquement d'une vie d'adulte idéalisée.
Sauf très rares exceptions, les poupées et les jeux de poupées
représentent des personnages et des activités qui socialement sont
valorisés. Quand on analyse ces poupées et jeux de poupées, il devient
clair qu'aussi bien les poupées-hommes que les poupées-femmes
symbolisent presque exclusivement des statuts idéalisés d'hommes et de
femmes, un homme ou une femme dans une situation localement
enviable. Référence est constamment faite à un modèle positif et valorisé
auquel l'enfant peut s'identifier.
226
Cela contraste avec la poupée occidentale à partir du début du
vingtième siècle, une poupée que Gilles Brougère (1985: 134-135) décrit
de la manière suivante :
Le païdomorphisme strict ne peut rendre compte de tout ce qui se fait,
se vend sous l'appellation poupée aujourd'hui. Au-delà des formes
purement enfantines, il s'agit d'un monde pour et par l'enfant, qui
n'existe qu'en fonction des représentations et désirs prêtés à l'enfant.
C'est la trace de l'interprétation que font les adultes de l'imaginaire et
des aspirations des enfants... La poupée est alors le miroir d'une
enfance idéale, idéalisée, mais destiné à l'enfant, et cela selon
plusieurs voies possibles qu'il s'agisse de la figuration directe de
l'enfant, de celle des aspirations qu'on lui prête, du repli dans un
monde imaginaire sécurisant parce que purement enfantin ou
considéré tel (Kiki, les personnages de Walt Disney).
Une autre distinction importante est celle entre une approche collective
et plus ou moins uniformisée du jeu de poupée et une approche
individuelle et singulière. En général on a tendance à souligner l'aspect
collectif et uniforme des jeux de poupées dans les communautés
enfantines sahariennes et nord-africaines, un point de vue que je
partageais volontiers. Mais le plus que j'arrive à observer et à m'informer
sur les jeux de poupées au Maroc, le plus que je me rends compte qu'il
est bien possible que sous l'uniformité apparente des modèles de poupées
et des thèmes des jeux de poupées propre à chaque communauté, région,
sous-ethnie ou ethnie se cachent des variantes individuelles propres à
chaque enfant ou petit groupe de jeu. Un exemple frappant est présenté
par l'analyse des poupées et jeux de poupées des trois sœurs Laabib de
Ksar Assaka qui ont joué avec leur propre petit groupe de jeu et avec
quelques années de différence entre 1975 et 1985 autour de la même
maison paternelle. Je parle de cet aspect singulier et individuel dans les
jeux et jouets d'enfants marocains dans le chapitre "Toys, Play and
Creativity" (p. 93) de mon livre Toys, Play, Culture and Society.
En ce qui concerne la relation adulte-enfant à travers le don d'une
poupée, si général dans d'autres sociétés plus tournées vers les biens de
consommation, ce don semblait être très rare dans les sociétés dont j'ai
parlé, les enfants faisant eux-mêmes leur poupée dans bon nombre de
227
cas. Si ce n'est pas l'enfant lui-même qui la fait, c'est une sœur ou un
frère, une cousine ou un cousin qui la fait. Et même si la poupée est faite
par une mère, une tante, une servante ou toute autre personne, cette
poupée ne semble pas s'insérer, sauf très rares exceptions, dans un
système de récompenses ou de gages d'affection. Ce n'est
qu'exceptionnellement que la poupée sert d'objet cadeau. Cette situation
contraste clairement avec celle des sociétés occidentales décrites par
Brian Sutton-Smith (1992: 7) :
Les jouets sont donnés comme un gage des relations familiales. Le
parent dit 'je te donne ce cadeau pour te lier à moi, maintenant vas
jouer seul'. Afin de remplir cette impression de solitude, certains
jouets sont de jouets doux, animaux et poupées que l'enfant traitera
comme des compagnons imaginaires.
J'ai pu démontrer dans un article “Children's play, generations and
gender with special reference to the Ghrib” (1993) que les relations
ludiques entre générations d'adultes et d'enfants ne sont pas
exceptionnelles chez les Ghrib du Sahara tunisien et il en est
probablement de même dans d'autres régions sahariennes et nord-
africaines (voir le chapitre "Toys, Play and Generations" dans mon livre
Toys, Play, Culture and Society, p. 117). Cependant dans les jeux de
poupées cette relation ludique entre adulte et enfant semble être bien rare
mais elle est certainement plus courante entre enfants de générations
successives.
Dès lors, les jeux de poupées jouent un rôle important dans les
relations enfants-enfants. Il s'agit pour ainsi dire toujours de jeux
collectifs où des petites et des jeunes filles jouent ensemble. Ces enfants
appartiennent à la même famille étendue ou sont des voisins. A l'écart du
contrôle direct des adultes, ils se livrent à leur interprétation de la vie de
ménage, des occupations féminines ou masculines, des festivités. Gilles
Brougère (1996: 7) souligne pour la France l'importance majeure du
groupe de jeu pour le déroulement du jeu dans une analyse des jeux avec
les Power Rangers issus d'une série de télévision :
228
C'est bien dans une relation complexe avec les autres que le jeu se
construit dans le cadre d'une référence qui fonctionne comme une
règle, ce qui s'impose pour que le jeu existe et soit partagé. Mais pour
cela il faut organiser le fonctionnement collectif ce qui suppose
encore résoudre des problèmes pour adapter la situation matérielle et
sociale à l'objectif ludique.
Ce constat me semble s'appliquer tout à fait aux groupes de jeu jouant à
la poupée dans des communautés où l'individualisme est moins
développé. Dans cet ordre d'idées on pourrait avancer que la créativité se
manifeste non seulement dans le contenu du jeu mais aussi dans
l'organisation du jeu.
Les poupées sahariennes et nord-africaines ne sont pas destinées à des
tout petits. Ce ne sont point des poupées qui puissent servir de support
affectif pour un bébé ou un bambin. D'ailleurs, ils n'en avaient pas
tellement besoin puisqu'ils vivaient en symbiose avec leur mère, et si elle
ne pouvait pas s'en occuper momentanément il y avait toujours une sœur
ou cousine aînée, une grand-mère ou une tante pour le faire.
Je viens d'écrire qu'il s'agit de l'interprétation du monde adulte par les
enfants à travers leurs jeux de poupées et non pas une imitation pure et
simple. A ce sujet Jürgen Jensen souligne dans son article sur les jeux et
jouets d'imitation dans l'île Buvuma en Ouganda que les jeux d'imitation
ne servent pas en premier lieu à l'apprentissage d'habilités, de techniques,
de comportements et de rôles car les enfants ont dans ces milieux la
possibilité et même le devoir de les pratiquer dans la vie de tous les jours
en s'intégrant progressivement aux tâches de leur mère, de leur père et
des autres membres de leur famille (1971: 208-209).
Il n'y a aucun doute que les jeux de poupées dont il a été question dans
l'analyse, jouent un rôle important dans le développement de la
personnalité de la fille, et parfois du garçon, ainsi que dans
l'apprentissage du milieu naturel, social et culturel. Ceci est d'autant plus
vrai que dans le milieu rural, d'où proviennent la majorité des poupées
décrites, l'éducation scolaire de type moderne n'était pas une réalité
journalière surtout pour les filles.
A travers les jeux de poupées, dans lesquels se trouvent parfois
mélangés des petits enfants et des enfants plus âgés, bons nombres
d'informations sur l'environnement physique et social, de
229
comportements, de savoir-faire, de connaissances, de symboles, de
significations, d'idées, de valeurs et de normes esthétiques, sociaux et
moraux sont transmis de génération en génération et intériorisés de
manière ludique par les enfants. Ceci nous amène à considérer certains
aspects culturels en relation avec les jeux. “Culture comme matière de
jeu et culture comme élément qui conditionne les choix ludiques et la
direction du développement de l'expérience” (Ferrarotti, 1987: 31).
Les poupées mettent l'enfant en rapport avec un fonds culturel, avec
des significations plastiques, propres à la communauté dans laquelle il
grandit. Comme les poupées sont intimement liées aux réalités
socioculturelles dans lesquelles elles fonctionnent, elles participent
directement au système de communication visuelle de chaque
communauté et par lequel, à travers des signes conventionnels, un
échange s'élabore entre l'enfant et son environnement. Cependant, il ne
s'agit pas d'un rapport passif avec cette culture, mais d'une appropriation
active. “La valeur ludique renforce l'efficacité symbolique du jouet. C'est
ce qui fait la spécificité du jouet par rapport à d'autres supports culturels:
la relation active qu'y greffe l'enfant” (Brougère, 1987: 56). Dans le cas
des jeux de poupées sahariens et nord-africains l'imprégnation culturelle
doit être d'autant plus forte que les enfants confectionnent normalement
eux-mêmes leurs poupées.
Le jeu de poupée n'est pas limité à la communication visuelle à travers
les poupées car d'autres formes de communication non-verbales, par les
gestes et la danse, y trouvent leur place. La communication verbale à
travers les dialogues et les chansons ne manquent nullement puisque les
jeux de poupées comportent un support linguistique comme le
démontrent clairement les jeux de poupées décrits dans le chapitre sur les
poupées-femmes marocaines (p. 117), un support linguistique d'une très
grande importance dans des cultures orales.
Bien que les jeux de poupées offrent bon nombre d'aspects positifs
pour une socialisation efficace des enfants, l'attitude envers les poupées
n'est pas toujours bienveillante dans les régions en question. Plus d'une
fois il existe une attitude ambivalente envers les poupées auprès des
adultes, du moins autrefois. Cette attitude ambivalente semble basée sur
la relation qui est faite entre la poupée d'enfant, d'une part, et la poupée
rituelle ou magique, d'autre part.
230
Comme l'on peut s'en rendre compte dans la description du jeu de
poupée marocain où un enterrement est imité par les filles ou du jeu
rituel pour provoquer la pluie, la distinction entre jeu d'enfant et jeu
rituel est très floue. Dans le catalogue de la mémorable exposition sur les
poupées, tenue au Musée de l'Homme en 1983-1984, Dominique
Champault a consacré un article à ce thème avec le titre révélateur “du
rituel agraire au jeu” (1983: 79-81). Le lecteur intéressé trouvera un
aperçu des données sur les poupées rituelles nord-africaines dans Sigrid
Paul, Afrikanische Puppen (1970: 110-118), ou bien il peut se référer
directement aux sources elles-mêmes dont les plus importantes sont :
Doutté (1905: 328-329), Herber (1918: 70-72), Hardy et Brunot (1925:
48) et Flamand (p. 182-183). Voir aussi le chapitre "Toys, Play, Rituals
and Festivities" dans mon livre Toys, Play, Culture and Society (p. 139).
Que cette méfiance envers les poupées n'ait pas totalement disparu à la
fin des années soixante nous explique Nefissa Zerdoumi (1982: 225) en
parlant de la région de Tlemcen en Algérie :
L'Islam, en prohibant formellement les représentations portant ombre,
c'est-à-dire les statues, a créé une méfiance dans l'esprit de certaines
familles à l'égard de la présence de poupées au foyer. Lorsqu'elles
sont tolérées, celles-ci sont souvent suspectes car les djnoun (c'est-à-
dire les esprits) viennent volontiers les habiter ; il est alors imprudent
de les laisser près d'un bébé pendant son sommeil, la nuit surtout.
Cette méfiance existait aussi dans le sud du Maroc et pour les mêmes
raisons. Selon Fatima Outizal, on disait encore dans son enfance que si la
taslit ou la °arûsa reste la nuit avec l'enfant ses cheveux ne poussent pas.
Et elle précise que si cette croyance s'affaiblit à chaque nouvelle
génération, elle était encore toute vivante dans la génération de ses
grands-mères.
Selon Juliette Grange, tout jeu et toute coutume enfantine obéissent “à
une loi de rétention..., possédant une inertie face au changement et
conservant des coutumes séculaires” (1979: 234). Cela semble vrai pour
les poupées et jeux de poupées sahariens et nord-africains, du moins
jusqu'à un certain point, car il n'en reste pas moins vrai que l'évolution
technologique, économique et socioculturelle de ces sociétés ont
231
influencé ce patrimoine ludique. Un bel exemple nous donne Jean Gabus
qui écrit, déjà en 1967 (p. 118) :
Les bouleversements que subit la société mauritanienne, pourtant
atténués (mais jusqu'à quand ?) à Oualata, s'inscrivent dans ces
objets destinés aux jeux d'enfants. Dans un avenir plus proche qu'on
l'imagine, les maisons de poupées de Oualata deviendront 'souvenirs
destinés aux touristes'. Il y a deux ans, elles étaient déjà l'un des
fleurons de l'artisanat national faisant l'objet d'une exposition à
Nouakchott. Il ne s'agissait déjà plus des petites maisons
traditionnelles comportant deux ou trois pièces. Les dimensions
avaient été doublées. Par ailleurs, on constate à Oualata qu'elles sont
peut-être plus 'clinquantes' que par le passé, mais souvent plus
fragiles. Aussi, dans la perspective d'un transport (si l'on veut
proposer aux touristes un objet, encore faut-il qu'ils puissent
l'emporter) sont apparues des maisons de poupées en métal... Elles
sont laides, les enfants ne les utilisent pas, leur destination et leur
fonction ont radicalement changé.
Cette influence de la modernité dans le domaine du ludique n'est pas
d'aujourd'hui en Afrique du Nord et au Sahara. Mention est déjà faite de
poupées européennes dans les villes marocaines par Herber en 1918 (p.
80) et Dupuy écrit en 1933 qu'en Tunisie des jouets allemands sont
vendus pour la fête de l'°ashûra.
Beaucoup plus récemment, c'est-à-dire en 1975, l'influence de l'école
sur les garçons ghrib leur faisait dessiner des visages sur les poupées de
leurs sœurs qui par tradition n'en mettaient pas. Et que dire de
l'innovation toute récente de la tête de poupée faite d'un flacon, produit
de la société de consommation, innovation utilisée en juillet 1991 par
une jeune fille ghrib pour confectionner sa poupée, par ailleurs du genre
traditionnel (fig. 43, p. 95).
Dans ce contexte, il est à remarquer que l'univers ludique des filles
reste bien plus longtemps dans la sphère de la tradition que celui des
garçons qui s'inspire volontiers des innovations technologiques et des
changements socioculturels. Un exemple en est donné par mes propres
observations au Maroc et ceux de mon ami et collègue Gilbert J.M.
Claus chez les Ghrib du Sahara tunisien. Dans ces deux cas on peut
232
affirmer que le football règne en maître auprès des garçons là où les
filles restent attachées à leurs jeux de poupées. Mais on peut se
demander quelle sera l'influence à court et à moyen terme sur les filles
de la télévision qui a conquis les communautés les plus isolées, comme
c'est le cas chez les Ghrib et dans presque tous les villages marocains, et
pénètre directement dans l'intimité familiale, le domaine féminin par
excellence dans ces régions. Comme j'ai pu le remarquer à Imi-n-
Tanoute et d'autres endroits du Maroc, une autre influence, aussi directe
et pénétrante, s'exerce à travers les poupées, nounours et autres jouets
sophistiqués qu'offrent aux enfants les membres émigrés de la famille de
retour au pays ou qui sont ramenés par ceux restés au pays suite à une
visite auprès de leur famille immigrée en Europe.
Pour une analyse du thème signes, significations et communication
ainsi que de l'influence de l'évolution des communautés nord-africaines
et sahariennes en ce qui concerne les poupées d'enfants et les jeux de
poupées voir les chapitres en question dans mon livre Toys, Play,
Culture and Society (p. 43, 149).
235
Il ne faut pas, et j‟en suis tout à fait convaincu, que cette recherche sur le
patrimoine ludique enfantin du passé et du présent ne reste qu‟une œuvre
académique ou folklorique, si méritoire qu'elle soit. Bien au contraire,
cette recherche devrait aboutir à des résultats tout à fait concrets. Je
pense ici au domaine du bien-être de l'enfant et de l‟éducation formelle
et informelle, de l‟adaptation de l‟école aux conditions locales, des
relations parents-enfants et parents-enseignants, au développement
communautaire et à la promotion de l‟entente interculturelle. Dans mon
livre Games and Toys: Anthropological Research on their Practical
Contribution to Child Development. Aids to Programming Unicef
Assistance to Education, publié en 1984 par le „Unit for Co-opération
with Unicef and the World Food Programme‟ de l‟UNESCO, j‟ai eu
l‟occasion de parler de l‟utilisation du patrimoine ludique local pour une
meilleure connaissance de l‟enfant et de sa société (p. 19-24), pour lier
l‟éducation scolaire avec la vie réelle et l‟environnement des enfants,
pour stimuler l‟intérêt et la participation des parents, pour l‟élaboration
de matériaux pédagogiques ancrés dans la culture locale, pour la
formation du personnel para-professionnel et professionnel des crèches,
jardins d‟enfants et écoles primaires ainsi que pour les activités des
mouvements de jeunesse (p. 24-32).
Mes idées sur l‟utilisation éventuelle de la culture ludique des enfants
sahariens et nord-africaines pour des actions pédagogiques et culturelles
se limitent au niveau théorique et des souhaits car l‟élaboration de
pareilles actions appartient aux professionnels et autres acteurs culturels
de ces régions. Dans ce contexte on peut mentionner la création
d‟associations culturelles amazighes dans les villes marocaines avec une
importante population amazighophone. Ainsi, lorsque j‟étais invité par
l‟Association de l‟Université d‟Eté Agadir à faire une communication
lors de la septième session annuelle du 25 qu 27 juillet 2003 consacrée à
“la culture amazighe et les problèmes de développement” une attitude
nouvelle concernant la culture ludique des enfants pouvait se remarquer.
Comme thème de mon intervention j‟ai choisit “la culture ludique des
enfants amazighs marocains et les questions de développement” pour
mettre en avant les possibilités d‟utiliser les activités de jeux et de
création de jouets des enfants amazighs eux-mêmes dans le préscolaire et
l‟école primaire, dans la formation des professionnels pour ces écoles et
des volontaires pour les maisons de jeunes et les colonies de vacances,
236
pour des actions socioculturelles, pour des programmes concernant la
langue amazighe, pour le développement d‟une littérature enfantine
basée sur les réalités locales, etc. Comme je fus contacté après cette
communication par plusieurs personnes voulant en savoir plus ou même
tester certaines possibilités dans la pratique, j‟ai l‟impression qu‟un
intérêt grandissant se manifeste pour la culture ludique locale et son
utilisation pédagogique et culturelle. Les années à venir démontreront si
cela fut plus qu‟un enthousiasme passager.
La proposition pour utiliser mes données dans le cadre de l‟éducation
interculturelle ou l‟éducation pour la paix dans un contexte occidental au
contraire est basée sur des expériences personnelles. Ici les paroles de
Claude Lévi-Strauss sont plus que pertinentes : la découverte des autres
est la découverte d‟une relation, nullement la découverte d‟une barrière
(citation non-littéraire).
237
1 Actions pédagogiques et culturelles
dans les pays en voie de développement
Comme il est prouvé qu‟il existe “un lien étroit entre la qualité de la
stimulation au foyer au cours des premières années et les résultats
scolaires en primaire” (Groupe Consultatif, 1991: 10-11), il y a tout
intérêt à porter une attention particulière aux jeux et jouets dans ces
foyers et à l‟attitude des adultes envers eux. Dans cette même
publication Préparer les enfants à l‟école et adapter l‟école aux enfants
on peut lire encore : “il convient d‟endosser la responsabilité que les
écoles s‟adaptent aux besoins des enfants et non plus demander aux
enfants de s‟adapter au système”. Halpern et Meyers (Groupe
Consultatif, 1991: 22) concluent ainsi :
Un programme intégré jeune enfant-enseignement primaire
permettrait d‟établir un lien entre les intérêts de la famille et ceux de
la communauté et de renforcer le système scolaire formel ; il serait
possible, par exemple, d‟intégrer les valeurs et les contenus de la
culture locale au programma d‟enseignement, en premier lieu au
niveau pré-primaire puis au niveau primaire.
Un des contenus de la culture locale qui se prête à merveille pour
s‟intégrer au programma de l‟enseignement formel est celui des jeux et
jouets. De ce point de vue, il serait donc tout à fait dommage que les
responsables de la formation et de l‟éducation en Afrique du Nord et au
Sahara négligent l‟héritage ludique de leurs sociétés pour se laisser
immerger par la culture ludique de la société de consommation et des
médias occidentaux, les jeux standardisés des écoles européennes ou
américaines, ou encore les jouets en plastique fabriqués massivement
assez souvent de mauvais goût et parfois même dangereux. Dans son
livre sur l'enfance Kpelle au Liberia David F. Lancy discute le problème
d'utiliser dans l'éducation la culture locale et les jeux (1996: 197-198).
Quand on repasse en vue toutes ces poupées pour lesquelles les
enfants ont utilisé des matériaux naturels et de récupération on ne peut
que s‟étonner de l'utilisation créative de ces matériaux, une utilisation
qui renferme un vrai apprentissage. Dans une notice Bernadette Luwaile
238
Mwamba, du Salvation Army Pre-school à Lusaka en Zambie, souligne
aussi cet aspect. Elle écrit que pendant des générations les enfants ont
joué avec le sable, l‟eau, la boue, l‟argile, les pierres, les bâtons, les
tiges, les balles de blé, les noix, les fruits, les feuilles et les fleurs. Mais
aujourd‟hui, les jouets achetés dans les magasins prédominent.
Cependant, il est plus important que jamais que nos enfants valorisent les
ressources de la terre. Si nous pouvons promouvoir leur sensibilité dès le
plus jeune âge, leur avenir deviendra plus sûre. Pour occuper, amuser et
éduquer de jeunes enfants il n‟est pas nécessaire d‟acheter des jouets
coûteux, une considération importante en ces temps difficiles. Des
grandes quantités de matériaux pour jouer sont facilement disponibles si
l‟on a un peu d'imagination, beaucoup de patience et l‟empressement à
laisser les enfants jouer de manière salissante (Bernard van Leer
Foundation, 1996: 21).
On pourrait aussi penser à promouvoir une interaction fertile entre les
jeux traditionnels et les jeux pédagogiques modernes d'origine
occidentale pour développer une pédagogie ludique adaptée. Un exemple
de cette interaction se trouve dans l'étude de Chantal Lombard, Les
jouets des enfants baoulé. Essais sur la créativité enfantine dans une
société rurale africaine. Cette recherche s'inscrivait dans un programme
de développement de l‟éducation mis sur pied par le gouvernement de la
Côte d'Ivoire et fut basée sur une redéfinition des valeurs éducatives. A
ce sujet, Chantal Lombard (1978: 209) écrit :
Nos réflexions, sans pouvoir prétendre suffire à proposer une
pédagogie adaptée à la Côte d'Ivoire, insisteront sur deux points : 1.
Pour que la créativité traditionnelle puisse être intégrée à l‟école,
comme un ferment du développement des enfants, il s‟agit d‟ouvrir
l‟école afin que celle-ci soit le lieu de rencontre entre la culture
traditionnelle et le savoir scientifique moderne, et non le lieu de la
rupture, comme elle l‟est encore actuellement. 2. Pour que la
créativité traditionnelle acquière une dimension nouvelle et féconde la
pensée moderne, il s‟agit que l‟école fasse accéder les enfants à un
autre niveau de maîtrise de l‟environnement matériel, qu‟elle
réconcilie la technologie et l‟imagination créatrice.
239
Pour autant que je sache, c‟est en Algérie et au Maroc que semble se
dessiner une tentative d‟intégration de la culture ludique locale dans
l‟enseignement, bien qu‟à un niveau et dans un réseau d‟enseignement
différents.
En Algérie il s‟agit de l‟intégration de certains jeux traditionnels dans
le domaine de l‟éducation physique. Youssef Fates (1987:18), qui a
préparé une thèse de doctorat d‟état à l‟Université Paris 1 sur le thème du
sport en Algérie, décrit ainsi cette tentative :
La Direction des Etudes, de la Recherche et de la Coordination du
Ministère de la Jeunesse et des Sports d'Algérie, a organisé une
enquête nationale par questionnaire, dans les quarante-huit
„wilayates‟ (départements) du pays afin de recueillir des informations
sur les caractéristiques historiques des jeux (les moments, les
occasions de leur pratique, les infrastructures nécessaires, le
matériel, les règles) et sur leurs pratiquants (l'âge, le sexe, le
nombre). Outre le fait que l'enquête visait “la production d‟un
document fiable et en rapport avec la réalité concrète du secteur
géographique”, l'enquête du Ministère de la Jeunesse et des Sports
recherchait la mise en place d'un projet d'animation de quartiers,
basée sur l'utilisation des jeux et des sports traditionnels. “En outre,
placés entre la modernité et la tradition, les jeux traditionnels,
organisés sur des bases pédagogiques et éducatives enrichissantes,
devront constituer un moyen de mobilisation des masses populaires en
général, et des jeunes, en particulier”. Malheureusement, jusqu'à ce
jour les résultats de cette enquête n'ont pas encore été dépouillés.
On peut donc supposer que cette tentative d‟intégration des jeux dans
l‟éducation physique et dans l‟animation des quartiers en Algérie n‟a pas
dépassé le stade des bonnes intentions.
Au Maroc, une autre tentative structurée de valorisation du patrimoine
ludique pourrait se réaliser à travers la collaboration de deux projets
soutenus financièrement et professionnellement par la Bernard van Leer
Foundation, une fondation internationale qui concentre ses efforts sur le
développement d'initiatives non-onéreuses et basées sur la participation
des communautés locales, dirigées vers le bien-être de la petite enfance
et vers l'éducation des enfants socialement et culturellement
240
désavantagés de 0 à 8 ans. Il s'agit, d'un côté, de l'organisation Alliance
de Travail dans la Formation et de l'Action pour l'Enfance, ATFALE ou
'enfant' en arabe, basée à l'Université Mohammed V à Rabat. L'autre
projet, du Ministère de l'Education, concerne les 36.117 kouttab ou
institutions coraniques préscolaires avec environ 800.000 enfants de
deux à six ans en 1994-95 (Bouzoubaâ, 1998: 5).
Ces deux projets collaborent pour former les instituteurs des kouttab,
non formés pour s'occuper de cette classe d'âge et pour qui n'existait
aucune formation au travail. Dans cette formation l‟attention est portée
sur bon nombre de thèmes comme celui du langage, de la santé, de
l'arithmétique, des méthodes et de l'organisation scolaire, mais aussi sur
le thème ludique. Pour cela Brigitte El Andaloussi a rédigé une brochure
a été rédigée sur le jeu dans le préscolaire, une première version fut
publiée par ATFALE en 1990 et réédité en 1992 (ATFALE, 1992) ainsi
qu'une version remaniée publiée par Gaëtan Morin éditeur – Maghreb en
1997 (El Andaloussi, 1997). Dans la première version de cette brochure
se trouvait une référence directe aux jeux traditionnels marocains. Sous
la rubrique Les jeux traditionnels il était dit (ATFALE, 1992: 10) :
Il est important que l'éducatrice connaisse les jeux traditionnels de la
région dans laquelle elle travaille, et qu'elle en favorise l'expression
dans son institution car ils présentent un intérêt réel à différents
niveaux. Plus les enfants seront scolarisés et moins les jeux
traditionnellement appris dans la famille, dans la rue ou dans les
champs par les enfants, auront tendance a être retransmis malgré leur
richesse indéniable pour le développement du jeune enfant. En effet,
ils véhiculent la mémoire de son pays, ils favorisent sa créativité et
son initiative et ils permettent d'entretenir des liens entre les enfants
de classes d'âge différentes.
Bien que je regrette que ce paragraphe important et l'unique référence
aux jeux traditionnels ne se trouve plus dans la version de 1997 – même
si les autres conseils donnés dans le petit chapitre "Jeux traditionnels" de
la version 1992 se retrouvent dans le nouveau chapitre "Quelques
conseils pratiques" (El Andaloussi, 1997: 10) – je dois mentionner que
l'intérêt de l'éducatrice au préscolaire pour la culture ludique enfantine
locale est maintenant stimulé en relation avec les comptines (El
241
Andaloussi, 1997: 9). Parlant de ce que l'éducatrice peut faire pour
développer la pratique des comptines et des chansons Brigitte El
Andaloussi écrit qu'elle doit chercher ce qu'il existe dans l'héritage
culturel. Dans ce contexte l'éducatrice doit créer une collection, l'enrichir
par l'échange avec des collègues et en demandant aux mères les petites
chansons qu'elles chantent à leurs enfants (1997: 9).
Un entretien, en février 1992 au Centre de Rééducation du Save the
Children Fund à Marrakech, avec Amina Drissi, qui a participé à un
séminaire d'information de ce projet préscolaire, semble indiquer que
l'héritage ludique marocain s'y trouve intégré. Une indication plus
précise m'est apparue lors de ma visite au Centre de Ressources pour le
Préscolaire à Kénitra. Ce centre, qui en novembre 1993 se trouvait à
l'école primaire Shuhada de cette ville, présentait dans un local comment
une classe du préscolaire pouvait être organisée afin de mieux s'adapter à
la pédagogie moderne. Dans le coin des poupées ne se trouvaient pas
seulement des poupées en plastique importées mais aussi des poupées en
armature de roseau habillées à la manière locale et confectionnées par
des participantes à la formation du groupe ATFALE (fig. 158).
158
242
Dans le cadre des innovations pédagogiques l'élaboration de coins
d'activités dans les kouttab, pour lesquels les enfants, les enseignants et
les parents apportent du matériel recyclable, est d‟une grande
importance. Le coin du „magasin de nourriture‟, de la „santé‟ et des
„poupées‟ sont les coins d‟activités les plus populaires et les plus
trouvés. Ainsi, un but majeur des rencontres au Centre de Ressources est
de stimuler la création par les enseignants et enseignantes de jeux et
jouets bon marché (Bouzoubaâ, 1998: 10, 12). Bien que la référence
directe à l'utilisation de la culture ludique des enfants marocains ne se
trouve plus dans la brochure de 1997 sur le jeu au préscolaire il est à
espérer que l'utilisation de ce patrimoine ludique local est toujours
stimulée lors des formations.
Il ne fait donc aucun doute que la culture ludique locale des enfants
devrait jouer un rôle important dans le préscolaire. Un rôle d‟autant plus
important que la participation des parents à la vie de l'école fait partie
intégrante des projets. Ces parents qui sont les dépositaires des traditions
ludiques locales peuvent entre autre être intéressés à cette participation
par le biais de la confection et l‟entretien des jouets, comme cela s‟est
réalisé dans d'autres pays en voie de développement (Bernard van Leer
Foundation, 1991: 14). Le guide d'activité pour le préscolaire de 1997,
mentionné ci-dessus, répond à cette préoccupation. Parlant de
promouvoir la fabrication de jouets traditionnels il est proposé de mettre
à profit la coopération des parents pour qu'ils transmettent ces jouets à
leurs enfants car l'industrie du jouet a détrôné toutes les techniques
traditionnelles de productions de jouets. Dès lors le préscolaire doit
utiliser le savoir-faire des mères pour créer des poupées et celui des
pères pour créer des véhicules avec du matériel naturel et de
récupération. Référence est aussi faite au coût minimal des jouets créés
sur place. Etant parfaitement d‟accord avec ce point de vue je voudrais
quand même souligner que cette domination des jouets fabriqués par
l'industrie doit être plus ou moins relativisée et cela non seulement dans
les villages et les centres ruraux mais aussi dans les quartiers populaires
des grandes villes marocaines. Premièrement, beaucoup d'enfants
marocains vivent encore dans des régions rurales où la création de jouets
par des enfants même d‟age préscolaire reste une activité courante et où
faire des poupées et des animaux-jouets traditionnels se fait parfois
encore dans le premier village à côté des centres ruraux. Deuxièmement,
243
mes recherches dans des petites villes comme Goulmima, Khemisset,
Midelt et Sidi Ifni montrent que même si certains modèles de jouets
fabriqués sur place et surtout les poupées traditionnelles semblent avoir
disparues, d'autres jouets et surtout des véhicules sont encore fabriqués
par les enfants. Concernant la poupée créée par les filles j'ai constaté un
jour qu'une fille de six ans vivant dans la ville rurale Sidi Ifni utilisait
spontanément l'armature traditionnelle faite d'un morceau de roseau et
d'un bâtonnet liés en forme de croix, une armature qu'elle habillait de
chiffons (Rossie and Daoumani, 2003, Video 1). Néanmoins, une
procédure courante est de remplacer l'armature traditionnelle par une
poupée en plastique peu chère que les filles habillent de morceaux
d‟étoffe. Troisièmement, même dans les quartiers populaires des
grandes villes comme Agadir, Kénitra et Marrakech j‟ai trouvé des
enfants, plus souvent des garçons que des filles, qui fabriquaient certains
jouets personnellement.
Ayant constaté l'adresse des enfants qui créent leurs propres jouets il
serait très utile que l'éducatrice au préscolaire cherche à savoir ce que les
enfants savent et peuvent faire. Ainsi une règle pédagogique importante
pourrait s'appliquer, c'est-à-dire de démarrer l'enseignement par
l'expérience personnelle de l'enfant dans son propre milieu. A côté des
parents on peut aussi utiliser l'expérience et l'intérêt pour la fabrication
de jouets des enfants plus âgés. Une éducatrice du préscolaire pourrait
éventuellement trouver de l'aide pour créer des jouets en joignant à ces
efforts des enfants plus âgés, eux qui sont les vrais experts.
En lisant quelques observations sur les kouttab faites par les membres
du groupe ATFALE on peut se rendre compte du chemin qui reste à
parcourir pour que ces institutions préscolaires puissent prendre profit de
la créativité que les enfants marocains déploient dans leurs activités
ludiques. En ce qui concerne le jeu et les jouets dans les kouttab, il est dit
qu'à l'étroit sur des bancs derrière des pupitres les enfants ne peuvent
bouger ni satisfaire leur besoin de jouer. En plus, il n'y a pas de terrain
de jeu (Bouzoubaâ, 1998: 6). L'introduction d'une pédagogie qui tient
compte de l'enfant lui-même et de sa créativité ludique est rendue plus
difficile encore par l'attitude des parents qui n'aiment pas payer pour voir
jouer leurs enfants dans un kouttab (Bouzoubaâ, 1998: 12).
244
Regardant à nouveau le guide d'activité sur le jeu au préscolaire et en
particulier les exemples des jeux joués à l'intérieur ou à l'extérieur, les
jeux de langage et les jeux d'équipe décrits dans les fiches techniques (El
Andaloussi, 1997: 53-78) il me semble que ces exemples peuvent bien
servir à trouver parmi les jeux des enfants amazighophones et
arabophones d'aujourd'hui des jeux qui s'accordent avec les objectifs
pédagogiques mentionnés pour les jeux proposés dans ce guide. Les jeux
qui y figurent ne semblent pas se référer aux expériences ludiques de la
plupart des enfants marocains et croire que beaucoup de ceux qui
travaillent au préscolaire pourront d'eux-mêmes utiliser les jeux locaux
des enfants de leurs classes est plutôt illusoire. Dès lors, faire un guide
supplémentaire offrant des exemples pris dans le patrimoine ludique
marocain serait d'une réelle utilité pour les éducatrices et éducateurs du
préscolaire et des premières années du primaire, ainsi que pour les
volontaires des colonies de vacances et des maisons de jeunes. Bien que
plus difficile à faire, on pourrait aussi essayer de trouver parmi les jeux
du patrimoine ludique marocain ou inspirés par ceux-ci des activités et
des thèmes pour développer des jeux pédagogiques comme ceux
présentés par Brigitte Elle Andaloussi (1997: 13-51). La même remarque
peut se faire en rapport à un autre guide d'activité pour le préscolaire,
celui sur l'activité ludique du jeune enfant. Alain Léonetti qui a écrit ce
guide intéressant souligne dans le contexte d'une éducation physique
centrée sur les besoins de l'enfant que pour être capable de réaliser cela il
est nécessaire de favoriser l'activité ludique spontanée de l'enfant (1997:
3). Cependant les exemples proposés reflètent plutôt des expériences
d'enfants européens. Ces exemples ont certainement leur utilité mais en y
ajoutant des exemples provenant du patrimoine ludique marocain
l'intégration du jeu spontané de l'enfant au préscolaire marocain serait
favorisée, une intégration vue par Alain Léonetti comme indispensable.
Selon Harinder Kohli, directeur de la Banque Mondiale pour le
Maghreb, les besoins les plus pressants dans le domaine social se
“trouvent chez les populations rurales et tout particulièrement les enfants
et les femmes”. (l‟Economiste, 1993: 30). Je crois que toute politique
sociale envers les enfants et leurs mères ne peut aboutir que si l'on tient
compte de la réalité socioculturelle dans laquelle ils vivent. Tenir compte
des expériences ludiques des enfants ruraux et leur utilisation sociale et
pédagogique peut y contribuer modestement mais efficacement. Au
245
niveau scolaire cela pourrait aider l'école à la campagne d'être moins un
lieu de déracinement, comme des auteurs marocains, dont El Mostafa
Haddiya (1988), l'ont décrite, pour devenir un lien entre la communauté
rurale et son développement.
Dans l'étude Child Survival and Development in Africa, Ibinabo
Agiobu-Kemmer se demande s'il n‟est pas possible d'incorporer des
traditions et des expériences culturellement valables dans le curriculum à
côté des sujets conventionnels et ceci à tous les niveaux de l'école. Cet
auteur écrit que les mères du projet Ntataise en Afrique du Sud ont peut-
être trouvé le préscolaire moins difficile à comprendre parce qu'elles ont
vu des collaborateurs ou collaboratrices du projet aider leurs enfants à
construire des petites maisons, des voitures et des animaux familiers, ou
même à faire des poteries d'argile. Beaucoup de compétences pratiques
peuvent être apprises aux enfants dans le contexte du jeu. Des objets et
matériaux naturels comme le sable, l'argile, l'eau, les branches, la paille,
les grains, les bouchons, les boîtes vides sont facilement à trouver dans
la plupart des communautés. Les enfants ont besoin de jouer avec des
jouets et des objets qu'ils peuvent facilement détruire et refaire pendant
leur jeu. Quand nous donnons des jouets onéreux à des centres
préscolaires communautaires pour encourager la stimulation cognitive
des enfants, les mères et ceux travaillant pour le projet ont peur de laisser
les enfants jouer avec ces jouets parce qu'elles ne les veulent pas voir se
détériorer. Les enfants profitent beaucoup de fabriquer eux-mêmes leurs
jouets en utilisant des cartons, des boîtes, pneus et autres matériaux.
Nombreux sont ceux qui ont été impressionnés par les camions, voitures
et avions que font des enfants africains, spécialement dans les zones
rurales, sans conseil ou presque d'un adulte (1992: 7-8). Dans un autre
continent et pays, en Inde par exemple, un projet subventionné par la
Fondation Aga Khan enseigne à des monitrices comment utiliser des
matériaux peu cher mais aux possibilités créatives pour stimuler le
besoin naturel de découverte chez l'enfant (Bernard van Leer
Foundation, 1993: 3).
Le travail d'analyse des jouets traditionnels de l'Inde et les efforts
d'adaptation de ces jouets dans le cadre thérapeutique pour des enfants
handicapés livrés par Sudarshan Khanna du National Institute of Design
à Paldi Ahmedabad ont suscité mon admiration et montrent clairement
une voie de plus pour l'utilisation des jouets et des jeux locaux. Dans
246
deux livres, Dynamic Folk Toys (1983) and Joy of Making Indian Toys
(1993), Sudarshan Khanna présente beaucoup de jouets faits par des
enfants ou d'autres confectionneurs de jouets. Comme dans le cas des
jouets sahariens et nord-africains, certains jouets de l'Inde sont
particuliers à leur région d'origine et d'autres sont des variantes de types
de jouets universels. Etant professeur à la Faculty of Industrial Design,
ce chercheur souligne l'importance des aspects technologiques et des
principes scientifiques qui sont à l'œuvre dans l'élaboration de ces jouets.
Un autre chercheur de l'Inde, Arvind Gupta, a écrit plusieurs brochures
remarquables sur l'utilisation de jouets locaux décrivant la manière de les
fabriquer et comment ils peuvent promouvoir des expériences novatrices
pour enseigner les sciences et les mathématiques.
Sur la situation actuelle et future de ces jouets traditionnels de l'Inde,
Sudarshan Khanna écrit : les revenus de la plupart des fabricants de
jouets locaux sont très bas. Leurs clients viennent de communautés
pauvres pour lesquels ils doivent maintenir un prix minimal. Le
rendement économique faible est une des raisons pour l'abandon massif
dans la profession. L'autre raison est l'intrusion des jouets en plastique
produit en masse. Malgré le faible rendement et l'absence de n'importe
quel support institutionnel, la fabrication locale de jouets populaires est
toujours vivante mais vacillante. Actuellement, il n'y a pour ainsi dire
plus de développement de „design‟ mais beaucoup de créateurs de jouets
sont conscients de l'importance de la créativité et de l'innovation dans
leur métier. Les jouets populaires dynamiques sont d'une telle
importance qu'il est attristant de constater que la société les a négligés.
Mais récemment, une certaine prise de conscience s'est manifestée chez
des pédagogues et des experts en développement de l'enfant lorsqu'ils
soulignent le fait que les jouets produits dans les usines ne puissent
remplacer les jouets faits par les artisans et qui expriment nos racines
culturelles. Notre société devra accepter que les créateurs de jouets aient
un rôle beaucoup plus large que celui de fabricants d'objets pour jouer.
Maintenant il est plus que temps que l'artisan soit reconnu comme un
professionnel. Beaucoup doit être fait pour réparer le dommage qui a été
causé aux jouets fabriqués par des artisans locaux. Il y a quelques an-
nées, le Commissaire pour le Développement de l'Artisanat, en
collaboration avec l'Institut National du Design, a formulé des
propositions pour revitaliser le secteur. Il est nécessaire de construire des
247
musées de jouets, des centres de formation et des liens de
commercialisation aussi bien au niveau des états que de la nation. Il est
essentiel de créer des voies et des moyens par lesquels des créateurs de
jouets talentueux, des pédagogues innovateurs et des designers dévoués
travaillent en équipe pour sauver cet héritage (1987: 13-14). Depuis lors
Sudarshan Khanna a créé dans le cadre du National Institute of Design
un centre de recherche sur les jouets et pour le développement de
l'artisanat local dans ce domaine.
Sudarshan Khanna a participé dans les UNESCO-Workshops
organisés par l'association sans but lucratif Fördern durch Spielmittel -
Spielzeug für behinderte Kinder, en traduction 'Stimulation par les jouets
- Jouets pour des enfants handicapés' (website consulté le 13.10.2004:
http://www.spielmittel.de). Le but de ce projet est de développer des
jouets pour la rééducation des enfants. De la lettre d'invitation pour le
quatrième Unesco Symposium, Workshop and Exhibition en automne
1996, je traduis ce qui suit concernant l'origine et le but de ce projet : il y
a tellement d'enfants handicapés sur la planète que nous avons le
sentiment qu'il est nécessaire de créer une structure par lesquelles les
conditions de vie de ces enfants peuvent être améliorées continuellement
et plus efficacement. Il est particulièrement important que les handicaps
soient détectés très tôt et pris en considération. De cette manière, le
développement mental et physique des enfants peuvent être encouragés
dès le début et leur intégration peut être soutenue. Les jouets et outils
pédagogiques jouent un rôle important dans la petite enfance. Il n'est
besoin que de jouets bons et adéquats, qui stimulent le jeu et en même
temps satisfont aux plus hautes exigences fonctionnelles et structurelles
liées à cette tâche. En prenant ces idées comme point de départ, le projet
'Toys for Children's Rehabilitation' fut proposé en 1989 comme
contribution à la Décennie Mondiale du Développement Culturel et
reconnu comme une 'Activité de la Décennie Mondiale' par l'UNESCO
(numéro de registration 079). Dans le cadre de ce projet, trois ateliers ont
déjà eu lieu. Les participants à ces ateliers ont développé plusieurs
designs de jouets et créé des prototypes. Ces dessins et modèles furent
exposés à plusieurs occasions en Allemagne et à l'étranger. Les résultats
de ces ateliers ont été publiés en 1992 et 1995 dans un manuel à deux
volumes, Toy Workshop - Toys you can make yourself for handicapped
and non-handicapped children. Le quatrième atelier continuera cette
248
expérience interdisciplinaire. De nouvelles idées et des prototypes
nouveaux de jouets et d‟outils pédagogiques seront développés. Cet
atelier mettra aussi ses résultats à la disposition des parents d'enfants
handicapés et des enseignants et membres du staff des institutions où
travaillent des handicapés. Après qu'ils sont soigneusement testés, ces
designs de jouets seront publiés dans un ou plusieurs manuels avec les
instructions pour leur construction. Aussi, il sera fait très attention à ce
que les designs peuvent se transformer en jouets sans que cela nécessite
l'utilisation d'un nombre excessif de matériaux ou de techniques
compliquées. Nous voudrions que cet atelier offre une aide pratique et
théorique, mais aussi une aide morale pour soutenir les spécialistes des
pays qui n'ont que peu de ressources disponibles pour le développement
de jouets.
Ce projet démontre la possibilité de développer des manières
nouvelles et intéressantes pour mettre à profit certains jouets
traditionnels et faits par les enfants ou les adultes eux-mêmes. J'espère
qu'un jour quelques jouets sahariens et nord-africains pourraient servir à
créer des jouets, culturellement et socialement adaptés, pouvant être
utilisés pour la rééducation d'enfants handicapés mais aussi pour le
développement des autres enfants.
Finalement, je ne puis omettre de mentionner une initiative du monde
scientifique tunisien. Lors d'une visite en Tunisie en mai 1987, j'ai eu des
entretiens avec des responsables du Musée des Arts et Traditions
Populaires à Tunis et du Musée du Bardo à Carthage, ceci après avoir
constaté que dans ces musées et celui de Sousse on ne voyait pour ainsi
dire rien qui référait à l'enfance tunisienne et au patrimoine ludique du
pays. A cette occasion un intérêt grandissant pour ces thèmes s'est révélé
résultant dans la création d'un 'Groupe de Recherches Approfondies sur
les Jeux et Jouets Tunisiens des Origines à nos Jours'. Bien que je n'aie
plus eu de nouvelles de ce groupe de recherches depuis l'organisation
d'un congrès à Carthage en 1989 et la publication des résultats de ce
congrès (Jeu et Sports en Méditerranée, 1991), il est à espérer qu'il
pourra réaliser ses ambitions.
Dans un document nommé “La Révolution de l'Education” publié par
l'UNICEF en 1999, il est dit qu'une approche globale de l'apprentissage
pour la vie “doit permettre aux élèves d'exprimer leurs idées, leurs
pensées et leurs opinions, favoriser les moments joyeux et les occasions
249
de jeu, mettre les enfants à l'aise avec eux-mêmes et avec les autres.
Enfin, il doit les traiter avec respect” (p. 22). Cet apprentissage pour la
vie est décrit comme suite (p. 19) :
Toute une série d'approches novatrices de l'enseignement et de
l'apprentissage visent à faire de la vie en classe une expérience plus
enrichissante et utile... Il faudra reformuler les politiques et les
processus éducatifs si l'on veut insuffler un amour de l'apprentissage
qui dure toute la vie et permettre à l'individu de compléter, voire de
remplacer, les compétences acquises dans l'enfance au fur et à mesure
que surgissent des besoins nouveaux.
Comment pourrait-on formuler un meilleur plaidoyer pour la mise à
profit de la créativité des enfants qui s'exprime si bien en créant des
jouets et en jouant ou même en inventant des jeux. Bien de compétences
essentielles acquises pendant l'enfance sont apprises et exercées dans des
activités ludiques qui impliquent les pairs, des enfants plus âgés et
parfois même des adultes. Si les adultes veulent rendre l'expérience de la
vie en classe plus enrichissante et utile, la prise en considération des
expériences de jeu et de création de jouets n'est-elle pas une des
meilleures possibilités d'y parvenir? Du moins si ces adultes ne
contrôlent pas trop les activités ludiques spontanées des enfants ou ne les
transforment pas dans des vrais exercices didactiques.
Dans le site de l'UNICEF Teachers Talking about Learning
(www.unicef.org/teachers, consulté en décembre 2004) on lit dans la
section 'Learning games from around the world' basée sur le Vietnamese
Multigrade Teacher's Handbook, que les enfants adorent jouer. S'ils en
ont l'occasion ils créent des règles pour de nouveaux jeux, utilisant des
ballons, des bouchons et tout ce qu'ils trouvent comme matières
premières. Des jeux impliquant le jeu de rôle, la résolution de problèmes
simulés ou l'utilisation de compétences et connaissances spécifiques. Les
jeux peuvent être structurés pour qu'ils mènent à un apprentissage actif.
Un apprentissage qui développera la communication, l'analyse, la prise
de décision et autres aptitudes cognitives (www.unicef.org/teachers, voir
la section 'Explore Ideas', puis la section 'Games from around the
World'). Dans une section suivante 'Journal activity: Games for learning'
250
les enseignants sont stimulés à créer des situations pédagogiques basées
sur les jeux des enfants.
Trois exemples provenant de l'Afrique subsaharienne démontrent qu'il
est possible d'utiliser les jeux et jouets pour un développement mieux
adapté aux besoins des enfants et aux contextes dans lesquels ils
grandissent. Le premier exemple concerne un programme utilisant les
jeux et la création de jouets afin de sensibiliser les enfants pour leurs
droits et leurs devoirs au Zimbabwe (“We are also human beings…”,
2001). Elisa K. Lwakatare du Tanzanian Ministry of Education and
Culture a présenté le deuxième exemple lors du Second International
Toy Research Conference organisé par le Nordic Center for Research on
Toys and Educational Media en juin 1999. Ce coordinateur de
l'éducation préscolaire parlait entre autre de la nécessité de fabriquer sur
place des jouets pédagogiques. Cette nécessité fut aussi soulignée par
Arvind Kumar Gupta en ce qui concerne l'Inde. Dans son texte de
conférence Elisa K. Lwakatare écrit : les jouets jouent un rôle important
dans le processus de socialisation. Dès lors, l'utilisation de jouets
importés encourage le développement de normes culturelles et de valeurs
étrangères à la Tanzanie. Bien que certains jouets soient appropriés et
peuvent être adoptés par la culture tanzanienne, ils restent peu
accessibles à cause du pouvoir d'achat limité de beaucoup de familles
tanzaniennes. La politique d'éducation et de formation en Tanzanie
comme définit par la réforme pédagogique actuelle stipule l'accès
équitable à une éducation et formation de qualité. Cela signifie un accès
équitable aux jouets comme matériel pédagogique. En d'autres mots, il
faut faire que l'utilisation de jouets devient un aspect intégré du
processus communicatif en éducation. Cela ne peut se produire qu'en
stimulant le design et la fabrication sur place de jouets, de préférence
réalisée avec du matériel local. Le besoin en matériel pédagogique pour
l'éducation est énorme à cause de la promotion de l'éducation préscolaire
dans cette réforme. Le nombre d'écoles préscolaires dans le pays croit
rapidement. En 1993 il n'y avait que 247 établissements préscolaires
mais en 1999 il y en avait déjà 3667. L'augmentation de la demande
exige une augmentation semblable des approvisionnements en matériel
de jeu du moins si ce niveau d'éducation doit être adéquatement soutenu.
Cette fourniture de matériel pédagogique (jouets) doit se baser sur une
251
recherche approfondie afin de trouver les designs les plus adéquats et
une utilisation économique des matériaux (1999: 7-8).
Même si cette politique tanzanienne pour créer sur place des jouets
pédagogiques adaptés aux conditions socioculturelles et matérielles
locales n'est qu'à ces débuts, cela s'avère être déjà d'une grande
importance car le problème est ainsi posé et des moyens pour le résoudre
sont développés.
Le troisième et jusqu'à présent le meilleur exemple que je connais de
l'utilisation de la culture ludique locale se trouve dans Early Childhood
Matters (Bouma, 2000). Ce programme d'éducation de la petite enfance
est initié, contrôlé et dirigé par les parents Samburu du Samburu District
au Nord du Kenya suite à des changements sociaux liés à leur mode de
vie semi-pastoral. Traditionnellement les enfants étaient gardés par les
grands-mères quand les parents étaient absents. Ces grands-mères
s'occupaient des enfants mais en même temps elles jouaient avec eux et
les enseignaient des poèmes, des contes et des chansons. Ce système
s'appelle lmwate, lmwate signifiant la clôture. Bien que ce système a
bien fonctionné pour des générations innombrables il était tombé en
désuétude jusqu‟au moment où les parents se sont rendus compte qu'il
fallait faire quelque chose pour leurs petits enfants qui restaient
seulement sous la garde d'une sœur ou d'un frère un peu plus âgés ou
étaient laissés tout seul. Après discussion dans la communauté et avec
les grands-mères qui se rappelaient bien le lmwate, il fut décidé de créer
un lmwate moderne. Les parents construisirent une clôture avec une
grande maison pour les petits pouvant servir de lieu de repos et de
refuge. Se basant sur les conseils des personnes âgés des jouets furent
fabriqués, des chansons, des contes, des proverbes et des poèmes
collectionnés et des appareils de jeu construits. Les jouets comprennent
des poupées et des ballons en bois et en cuir, des animaux en argile ou en
rotin, des lances-pierres, des hochets, des catapultes. Les appareils de jeu
sont des structures à grimper, des plate-formes surélevés, des
maisonnettes, des balançoires, des bascules, des cerceaux, des tunnels à
ramper, etc. Cette facilité est ouverte chaque matin et ne peut fonctionner
sans la participation des parents. Toutes les mères y travaillent à tour de
rôle (p. 32-34). Bien vite ce lmwate moderne fut soutenu par le Samburu
Early Childhood Development Project, un projet commun du Kenya
Institute of Education et le Christian Children's Fund. A côté de la
252
formation concernant les activités de développement pour la petite
enfance, ce projet a donné aussi une formation concernant la santé, la
nutrition et l'hygiène. Il a en plus aidé le lmwate comité à obtenir des
médicaments de base et de la bouillie de flocons d'avoine pour le
déjeuner des enfants, de la bouillie de flocons d‟avoine enrichie pour
ceux souffrant de malnutrition. Une fois que tout cela fonctionnait, le
projet s'est retiré. Son action se limite maintenant à être disponible quand
le lmwate comité le demande bien que ce comité tient le projet au
courant de tout ce qui se passe dans le lmwate (p. 34).
Il n'y a aucun doute que des jouets pédagogiques sont nécessaires en
Afrique du Nord et au Sahara et quand je vois la multitude de jouets
créés par les enfants marocains encore aujourd'hui il ne devrait pas être
tellement difficile de trouver des modèles pour des jouets pédagogiques
adaptés qui sont bon marché à fabriquer et utile pour le préscolaire et
l'école primaire. Le développement remarquable de classes préscolaires
par exemple au Maroc rendra cela inévitable dès que la pratique scolaire
prendra en compte la valeur des jeux et jouets et cela simplement parce
que l'achat de jouets pédagogiques occidentaux est au-dessus des
moyens de la plupart des écoles des régions en question.
N'importe quel programme qui tient à promouvoir le bien être, le
développement ou l'éducation des enfants pourrait améliorer son
efficacité en utilisant des stratégies qui mettent les adultes à l'écoute des
enfants visés et stimulent la participation de ces enfants à l'élaboration
du programme. Dans un numéro de Early Childhood Matters, publié en
février 1999 par la Bernard van Leer Foundation, cette fondation
souligne que suivant leur âge, leur milieu culturel et leurs opportunités
de développement, les enfants ont prouvé être des partenaires valables et
plein de ressources (n° 91, p. 4). Dans un article publié dans le même
numéro, David Tolfree et Martin Woodhead plaident avec conviction
pour que les praticiens, les chercheurs et les décideurs dans le domaine
du développement de la petite enfance se mettent à l'écoute des enfants
(n° 91, p. 19). La prise en compte des jeux des enfants et de leur création
de jouets me semble offrir une excellente manière pour se mettre à
l'écoute des enfants.
253
L'importance de la recherche sur les jeux et jouets des enfants est
clairement mis en avant dans le document Child Culture - Play Culture
de Flemming Mouritsen du Danish Odense University. Cet auteur
souligne la nécessité de remplacer la perspective adulte par la
perspective enfantine lorsqu'il écrit que la pédagogie, aussi bien au
niveau théorique que pratique, s'est basée sur ce que les enfants doivent
devenir avant que l'on s'intéresse à connaître les enfants et leur vécu. Je
suis convaincu que pareille perspective enfantine peut être facilitée par
l'observation et l'analyse des jeux et jouets des enfants avec le moins de
présuppositions adultes possible.
Finalement et en ce qui concerne les chercheurs et les instituts de
recherche s'intéressant au Tiers-Monde, je voudrais attirer leur attention
sur l'enfant et sa culture dans le monde rural et les quartiers populaires
des grandes villes car j'ai l'impression que peu de moyens sont investis
dans ce domaine. Pourtant si la situation des enfants doit s'améliorer en
ces lieux et si la désertion des campagnes doit être réduite, une meilleure
connaissance de l'enfant, de son milieu de vie et de sa culture ainsi que
des changements qui les affectent sera indispensable.
255
2 Éducation interculturelle et mondiale
dans un contexte occidental
L'utilité de la culture ludique saharienne et nord-africaine ne se limite
pas à l'Afrique du Nord et au Sahara ni au Tiers Monde car il est bien
possible de l'intégrer dans ce qu‟on appelle l'éducation interculturelle ou
l'éducation pour la paix afin de l'utiliser dans les pays d'Europe
occidentale où des immigrés provenant de ces régions se sont installés en
grand nombre depuis des décennies.
Comme volontaire du Comité de Gand pour l'UNICEF en Belgique,
j'ai élaboré un petit projet que j'aimerais appeler „monde-enjeu :
l'éducation interculturelle par le jeu‟. Dans le cadre de ce projet j'ai
d'abord travaillé en 1989 avec des enfants d'environ cinq ans allant au
jardin d'enfants. Je leur ai montré une courte série de diapositives basée
sur les jeux d'imitation des filles et garçons ghrib du Sahara tunisien.
Dans cette série de diapositives les petits voient et la réalité et
l'interprétation de cette réalité dans l'activité ludique. Les thèmes sont la
vie dans le désert, l‟oasis, les animaux, le ménage, le filage, le tissage et
la modernisation de la vie nomade.
Après que les enfants ont vu et commenté les diapositives, je leur ai
demandé de chercher des avantages de la vie dans le désert et des
désavantages de la vie chez eux ainsi que des inconvénients de la vie
159
256
dans le désert et des plaisirs de la vie chez eux. Par exemple, il a été
question du beau temps, de l'espace libre, de la disponibilité des frères et
sœurs, cousins et cousines comme camarades de jeu dans le désert versus
le temps pluvieux, le danger de jouer dehors, la solitude de plusieurs
enfants en Belgique ou encore de la rareté de l'eau, de la nourriture, des
jouets ou produits de luxe dans le désert versus l'abondance de ces
choses en Belgique.
Après la récréation les filles et garçons se sont divisés en plusieurs
petits groupes. Chaque groupe doit fabriquer quelque chose pour
construire un village d'oasis, comme on peut le voir à la figure 159 (p.
255). Quelques-uns uns des enfants ont fait des maisons comme ils en
ont vu, d'autres fabriquent des palmiers, un puits d'eau, un dromadaire,
etc. Les matériaux à leur disposition sont du matériel de récupération,
des cures pipes vertes, des tubes en carton de rouleaux de papier essuie-
tout, de la plasticine et des
éléments de boîtes de
construction. Comme j'ai
introduit au début la relation
entre la transhumance des
nomades du Sahara et celle
des nomades modernes des
cirques et des foires, des
enfants ont construit une
roulotte en pièces lego (fig. 160). Une autre tâche était de rechercher
d'entre des animaux en plastique ceux qui peuvent vivre dans le désert et
les oasis. Enfin, les enfants ont appris à chanter une petite chanson sur
une mélodie simple et répétitive assez connue mais avec des paroles
adaptées. Puis, ils ont contourné leur village d'oasis en imitant la marche
des dromadaires (fig. 161, p. 257).
Depuis cette expérience, j'ai utilisé la même approche ludique de
l'interculturel de la première à la sixième classe de l'école primaire,
chaque fois pendant une heure. Dans ces classes j'ai utilisé une vidéo de
vingt minutes sur la manière dont vivent et jouent les enfants du Kenya
en Afrique de l'Est, une vidéo réalisé pour le Comité Néerlandais pour
l'UNICEF. Ainsi les enfants gantois sont confrontés avec une situation
matérielle et familiale bien différente mais ils voient aussi que les
enfants du Kenya sont très créatifs dans la construction de leurs jouets.
160
257
Ceci a amené des écoliers gantois à exprimer très spontanément leur
admiration pour cette créativité et ce savoir-faire des enfants africains.
Après la vidéo, je reprends le même genre de comparaison entre ce que
les enfants trouvent agréables ou désagréables dans leur propre vie et
dans celle des enfants africains. Comme je donne ce programme inter-
culturel dans le cours de religion ou de morale laïque, l'instituteur ou
l'institutrice continue souvent ce travail de réflexion dans une leçon
ultérieure et/ou offre aux enfants la possibilité de fabriquer des jouets
avec du matériel de récupération qu‟ils amènent de la maison. Ainsi un
mini-projet pédagogique est élaboré ce qui par la suite peut donner lieu à
une exposition des jouets, dessins et textes faits par les enfants. Il arrivait
aussi qu'on me demande de participer à un projet pédagogique en rapport
avec des thèmes spécifiques comme l'eau, les déchets et le recyclage, la
protection de l‟environnement ou la créativité enfantine. Dans ces cas je
sélectionnais une série de diapositives sur les jeux et jouets des enfants
marocains et du Sahara tunisien pour illustrer certains aspects liés à ces
thèmes.
Une autre expérience, que j'ai vécue au mois d'avril 1992, m'a mis en
contact avec deux groupes d'enfants complètement ou partiellement
sourds. L'activité durait une demi-journée. Comme les possibilités
d'expression verbale sont assez limitées, j'ai mis l'accent sur le visuel
161
258
avec d'abord la vidéo en question et puis une série de cinquante
diapositives sur les jeux et la vie des enfants ghrib. Puis les élèves de
l'école primaire spécialisée ont construit des jouets, des instruments de
musique etc. tout comme ils l'ont vu sur la vidéo et les diapositives. Ce
premier essai a clairement démontré l'utilité d'une pareille approche.
Mais pour être plus efficace il me semble tout à fait nécessaire
d'introduire dans le processus pédagogique au moins une heure
d'introduction pour pouvoir transmettre à ces enfants sourds les
informations verbales qui rendent plus compréhensible l'apport visuel.
Lors d'une journée UNICEF organisée par le Comité de Gand pour
l'UNICEF le 10 mai 1998, il s'est démontré que les enfants se laissent
volontiers stimuler par des exemples de jouets fabriqués par des enfants
marocains pour créer eux-mêmes des jouets avec du matériel de
récupération (fig. 162, 163 p. 259).
Ce qui me semble très utile et stimulant dans ces approches ludiques
d'une pédagogie interculturelle, c‟est, à côte de la stimulation de la
créativité et de l'effort personnel des enfants gantois, l'apport d'une
image plus positive des enfants africains, une image qui jusque là était
unilatéralement négative et basée sur des images d'enfants malades,
162
259
mourant de faim, misérables, images qu'on voit régulièrement à la
télévision comme si cela était l'unique vécu des enfants africains.
Les résultats de ces actions m'ont convaincu qu'une possibilité, certes
limitée mais créative parce que ludique, peut être trouvée dans
l'utilisation des jeux et jouets à des fins interculturelles. Ainsi on pourra
préparer des jeunes enfants à devenir des adolescents et des adultes avec
moins de préjudices envers les minorités ou majorités sociales,
culturelles et ethniques vivant chez eux d'une part, et envers les gens et
les sociétés des pays étrangers d'autre part.
Ce sentiment se trouve partagé par Lazarine Bergeret de la Fédération
Internationale pour l'Education des Parents. Dans son article “Des
poupées à la ludothèque?” (1985: 164, 166) elle écrit :
La curiosité des ludothécaires, part des jeux et s'étend à toutes les
cultures, à toutes les latitudes, à toutes les périodes, à toutes les
civilisations mais l'enrichissement de leur information les conduit peu
à peu à rechercher quelque message commun de l'humanité dont le
jeu pourrait bien être une langue véhiculaire... Peut-être alors des
poupées pourraient-elles être sinon prêtées du moins exposées à la
ludothèque, comme à l'école d'ailleurs, afin qu'elles participent à cette
163
260
recherche possible d'un message commun à l'humanité? Souvent ces
jours derniers, les enseignants que j'avais pu informer ou décider à
venir profiter des ateliers organisés ici-même (en 1983 au Musée de
l'Homme dans le cadre de l'exposition „Poupée-jouet. Poupée-reflet‟),
me téléphonaient leur constatation non seulement d'un enrichissement
des improvisations enfantines mais d'une meilleure entente entre
enfants d'ethnies différentes. Ce n'était pas les choix anticipatifs des
parents qui déterminaient le style des poupées mais un premier pas
vers l'empathie possible par la seule connaissance des poupées des
autres... Je ne saurais affirmer ou nier qu'il faille des poupées en
ludothèque. A chaque équipe de ludothécaires de réfléchir ses choix
mais je sais que l'enfant écrit sa propre histoire par la succession
changeante de ses choix. Peut-être cette histoire serait-elle moins
violente si, dès l'enfance étaient connues et reconnues les poupées
d'autrui.
Lazarine Bergeret et moi-même nous nous trouvons en bonne
compagnie dans ce domaine, puisque le Groupe de travail pour la
rencontre des cultures de la Division de l'Enseignement Scolaire du
Conseil de la Coopération Culturelle, un organe du Conseil de l'Europe,
inclut dans son étude Pistes pour activités pédagogiques interculturelles
les jeux dans les thèmes à traiter (1989: 9-10).
Il faudrait donc lier une approche interculturelle du ludique, dans
laquelle s'inscrit ce livre, à une approche ludique de l'interculturel. Ceci
est tout à fait indispensable car l'individu d'aujourd'hui, et certainement
celui de demain, ne pourra que difficilement survivre dans un
environnement local et mondial de plus en plus multiculturel et
interdépendant, s'il n'a pu développer une personnalité qui puisse
comprendre et l'universalité et la spécificité des conditions de vie de son
propre groupe et des autres sociétés partout dans le monde. De cette
manière, les jeunes et les adultes pourront, je l'espère, fonctionner d'une
manière plus adéquate dans les sociétés multiculturelles qui se sont
créées récemment dans les grandes villes d‟aujourd‟hui.
263
1 Introduction
Sans l'existence du fichier signalétique de la collection des poupées
sahariennes et nord-africaines du Département d'Afrique Blanche et du
Proche Orient du Musée de l'Homme, l'étude de cette collection aurait
été impossible.
La grande majorité des renseignements mentionnés dans ce catalogue
a dès lors été puisée dans ce fichier.
Les jouets dont la provenance est mentionnée dans la liste des objets
déposés au Département d'Afrique Blanche et du Proche Orient mais
pour lesquels une fiche signalétique n'a pas été rédigée sont décrits par
l'auteur de ce livre, qui a aussi complété les renseignements du fichier si
nécessaire.
Les jouets décrits dans ce catalogue sont, à l'intérieur de chaque
section, classés suivant la population dont ils proviennent.
En ce qui concerne la poupée elle-même, d'abord son origine est
indiquée - provenance géographique, provenance ethnique plus
spécifique, collectionneur et/ou donateur - suivie par la description et si
possible le constructeur du jouet.
Après ces données ont été mentionnés des renseignements sur les
joueurs et sur d'éventuels dessins ou photos retrouvés dans la
bibliographie. S'il existe dans le Service de la Photothèque du Musée de
l'Homme des photos de poupées, non reproduites dans ce livre, cela est
indiqué.
Les mesures sont mentionnées en centimètres : B = base, H = hauteur,
LO = longueur, LA = largeur, E = épaisseur, D = diamètre, + =
maximum, - = minimum.
Les deux premiers chiffres du numéro d'objet indiquent l'année de
l'entrée de ce jouet dans la collection du Département d'Afrique Blanche
et du Proche Orient du Musée de l'Homme.
264
2 Les poupées-hommes
2.1 Les poupées-méharistes
Touareg Kel Ahaggar :
41.19.110/112/113/115/137 (fig. 3 - 41.19.113, p. 55)
Origine : Idèles, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Rela (110-115),
nomades. Mission Henri Lhote, 28 septembre 1938 et les jours suivants.
Description :
41.19.110 : dromadaire de mandibule de chèvre, méhariste en armature
de roseau, tissu bleu indigo comme vêtement, baudrier en fils de coton
blancs ; la selle est figurée par des tiges de mrokba entourées de coton
mercerisé, et une étoffe bariolée, ficelée, représente la couverture que les
Touaregs accrochent généralement sur la croupe du dromadaire. H = 27.
41.19.112 et 113 : dromadaire de mandibule de chèvre, selle en tiges de
mrokba couvertes de coton mercerisé ; des morceaux de peau brodée
figurent les sacs de selle. Méhariste en armature de tiges de mrokba,
tissu blanc et bleu indigo comme vêtements, baudrier et ceinture en fils
de coton mercerisé multicolores ; ces fils entourent aussi le cou et la tête.
H = 28 et 29.
41.19.115 : dromadaire de mandibule de chèvre, selle en tiges entourées
de fils rouges, bleus et blancs. Méhariste en armature de bois de tamarix,
tissu bleu indigo comme vêtement, baudrier en fils de coton blancs, verts
et rouges ; la tête est enveloppée des mêmes fils figurant la coiffure des
hommes. Le cou est entouré de fils blancs, verts et jaunes. H = 27.
41.19.137 : dromadaire de mandibule de mouton, la selle - entourée
d'étoffe bleue indigo et le méhariste ont une armature en tiges. Le
méhariste, aux jambes entourées d'étoffe bleue indigo, porte comme
vêtements cinq gandouras de couleur kaki, multicolore, blanche, indigo
et rouge. La tête est entourée de fils de laine bleus et jaunes et fils de
coton blancs et rouges. H = 28.
265
Constructeurs : garçons et filles, ces jouets ont été faits par un garçon de
12 ans (112-113), un autre garçon (137) et une fille de 12 ans (110/115).
Touareg Kel Ajjer : 37.21.28
Origine : Ghât, Sahara, Libye. Touareg Kel Djanet, nomades.
Acheté par René Pottier le 14 décembre 1934 à un jeune garçon
d'environ dix ans.
Description : le dromadaire est une mandibule de mouton ; pour le
méhariste ont été utilisées quatre brindilles, deux pour le corps et deux,
ligaturées en forme de croix, pour les bras. Ces brindilles sont
enveloppées de chiffons faisant figure de vêtements. H = 27,5. Ce jouet
n'a pas été retrouvé dans la collection du Musée de l'Homme, mais une
photo figure dans le fichier signalétique, ainsi que dans La Vie du
Sahara.
Figures dans la bibliographie :
la planche 28 du catalogue "La vie du Sahara" montre ce méhariste-jouet
touareg et sa monture faite d'une mandibule de chèvre. La planche 4 de
ce livre présente une belle photo d'un dromadaire sellé des Touaregs,
dont ces jouets donnent une représentation fidèle.
Touareg Kel Air : 69.108.1, 74.107.6/7 (fig. 4 - 74.107.6, p. 56)
69.108.1
Origine : Alarsès, région d'Agadez, Sahara, Niger. Touareg Kel Air,
nomades. Reçu par M. J. Decellas du constructeur du jouet en 1960.
Description : l'armature du dromadaire et du méhariste est en feuilles de
latanier torsadées, enroulées autour d'un fil de fer. Cette structure est
enveloppée de tissu. La selle à pommeau en forme de croix est du type
dit d'Agadez. Le tapis de selle a été découpé dans un galon. Les sacs de
selle en cotonnade à rayures jaunes et blanches sont ornés de floches en
266
tissu et de lanières de cuir auxquelles sont attachées des perles jaunes.
Des fils de laine rouges ornent le cou du dromadaire et sa queue est en
lanières de cotonnade. Le méhariste est vêtu du costume habituel,
vêtements de dessous blancs et vêtements de dessus en couleur bleue
indigo, la taille serrée par une courroie fermée par une boucle de fer. Le
voile de tête est fixé à l'aide d'une épine. Les vêtements du méhariste ont
été réalisés avec les tissus utilisés pour les vêtements d'hommes. H totale
= 46, LO = 34. Méhariste : H = 24.
74.107.6/7
Origine : Talat, Air, Sahara, Niger. Touareg Kel Owey et Touareg Kel
Timili, nomades.
Recueilli par A. Bourgeot en mars 1974.
Description :
74.107.6 (fig. 4, p. 56) : le dromadaire est fait de quatre brindilles de bois
pour les pattes, fixées dans un coussin de chiffons servant de tronc. Le
cou et la tête sont en fibres de palmier torsadées. La selle en bois
pyrogravé fut ornée de floches en cuir et en laine rouge. Le méhariste a
un corps en fibres de palmier torsadées recouvert d'un vêtement en étoffe
blanche. Il a une coiffure noire avec floches de laine rouge et verte
maintenues par une épingle double. Dromadaire : H = 35 ; LO = 20.
Méhariste : H = 15,5. H totale = 48.
74.107.7 : le dromadaire a le tronc en chiffons, les pattes en brindilles de
bois, la tête et le cou en fibres de palmier torsadées. Sauf les pattes, le
dromadaire est enveloppé d'un tissu noir. On a découpé la selle dans un
morceau de fer blanc et des deux côtés pendent un sac de selle en cuir et
de longues floches de laine rouge. Le méhariste en corps de fibres de
palmier torsadées porte un vêtement de dessus noir. H totale = 32, LO =
17.
Touareg Kel Ajjer : 37.21.104.1/2 (fig. 5, p. 58)
Origine : Djanet, Tassili n'Ajjer, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ajjer,
nomades. Mission René Pottier, 1934-1935.
267
Description : voir 1.2 Les poupées-méharistes, p. 53.
Maures : 38.141.82
Origine : Sahara nord-occidental, frontière algéro-marocaine. Maures,
nomades.
Recueilli par le commandement militaire des confins algéro-marocains,
1936.
Description : le dromadaire à quatre pattes, la selle et le méhariste sont
en terre cuite rougeâtre. La selle est ornée d'un décor incisé en lignes et
pointes. Dromadaire : H = 13 ; LO = 16,2. Méhariste : H = 11,5. Selle :
H = 5,2 ; LO = 7 ; LA = 4,7. H totale = 23.
Vallée de la Saoura : 62.60.29/30 (fig. 6, p. 60)
Origine : Vallée de la Saoura, Sahara nord-occidental, Algérie. Nomades
et sédentaires.
Recueilli par Dominique Champault, 1955.
Description : voir 1.2 Les poupées-méharistes, p. 53.
2.2 Les poupées-cavaliers
Touareg Kel Ahaggar : 41.19.152-154
Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,
nomades.
Mission Henri Lhote, 10.10.1938.
Description et constructeur : voir 1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60.
268
Maures : 38.141.83/84, 38.48.81-83 (fig. 8 - 38.141.83, fig. 9 - 38.48.82)
Origine :
38.141.83/84 : Sahara nord-occidental, frontière algéro-marocaine.
Maures, nomades.
Recueilli par le commandement militaire des confins algéro-marocains
en 1938.
38.48.81-83 : Oualata, Hodh oriental, Sahara, Mauritanie. Maures,
sédentaires. Recueilli par la Mission Puigaudeau-Sénones.
Description :
38.141.83 (fig. 8, p. 62) : voir 1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60.
38.141.84 : même genre de cheval sellé et monté que le numéro
précédant mais avec un cavalier sans chapeau. Cheval : H = 12,4.
Cavalier : H = 16,5. Selle : H = 5. H totale = 20.
38.48.81 : figurine en terre crue représentant grossièrement un cheval
harnaché et son cavalier indigène. Le cou est incurvé en avant et la tête
forme un relief à peine sensible. Les pattes antérieures sont réunies en un
seul tronc. La queue est en ficelles. L'avant-train était peint en blanc.
L'arrière-train est peint en ocre rouge, ainsi que la selle et le sabot
antérieur. Le poitrail porte une protubérance demi-cylindrique décorée
d'un ornement cruciforme ocre. La sangle est ornée de lignes noires,
jaunes et ocres. Sur le côté droit du cou, des lignes noires dessinent la
crinière. Les brides sont marquées par des lignes ocres. Le cavalier est
peint en jaune. H = 6,5. LO = 7. LA = 3,6.
38.48.82 (fig. 9, p. 63) : voir 1.3 Les poupées-cavaliers, p. 60.
36.48.83 : figurine en terre crue représentant grossièrement un cheval et
un cavalier portant la casque colonial (le cavalier manque). Les deux
pattes antérieures sont réunies en un seul tronc. Une plume représente la
queue du cheval. L'objet est recouvert d'un enduit blanc orné de lignes et
de points bleus, ocres et jaunes. Le sabot antérieur est de couleur ocre,
l'un des postérieurs de couleur jaune et l'autre de couleur bleue. Sur le
poitrail une protubérance est ornée de lignes coloriées. Une petite gourde
peinte en bleu indigo complète ce jouet. Un fil de coton bleu de 4 cm
permet de le pendre à l'épaule du cavalier. H = 5. LO = 4. LA = 2. La
gourde : H = 1,8 ; LO = 1,5.
269
Constructeurs des nos. 38.48.81-83 : les servantes noires des Maures de
Oualata.
2.3 Les poupées-guerriers et poupées-notables
Touareg : X.66.1.42 et 44-55 (fig. 17 et 18 - X.66.1.42, p. 69)
Origine : Touareg sans spécification plus précise, nomades.
Description :
X.66.1.47/48 et 54 : ces Touaregs ont une armature en roseau dont les
deux tiers ont été découpés pour représenter les jambes. Un bâtonnet est
introduit horizontalement dans le roseau pour figurer les bras. Le
Touareg n°. 47 est vêtu d'une longue blouse bleue, une blouse blanche
bariolée et une blouse indigo au-dessus. Le baudrier et la ceinture sont en
fils jaunes, verts et rouges. La tête et le cou sont ornés de fils verts et
blancs. H = 15. Le Touareg n°. 48 est habillé de trois blouses, indigo-
kaki-indigo. Son baudrier et sa ceinture sont en fils de coton vert et
blanc. Le cou est entouré de fils blancs et verts et la tête est entourée des
mêmes fils ainsi que de fils jaunes. H = 14.
Le Touareg n°. 54 porte deux blouses bleues et un turban en gaze
blanche. Ces trois poupées-hommes ne portent pas de culotte.
X.65.1.44/46/49/53/55 : l'armature consiste en un morceau de bois
(44/46/53) ou d'os (49/55) auquel est ligaturé en croix un petit morceau
de bois pour figurer les bras. Le dessous de l'armature des nos. 46, 53 et
55 est entouré de tissu ou de gaze, mais aucune de ces cinq poupées
porte une culotte.
Les blouses que portent ces Touaregs sont une blouse blanche et indigo
(44), une blouse blanche, rouge bariolée et indigo (45), une blouse en
gaze blanche et en indigo (49/55), une blouse en gaze blanche (53).
Deux poupées portent leurs blouses non cintrées (53/55), les trois autres
sont ornées du baudrier et de la ceinture en fils de coton vert (44/49) ou
jaune, vert, rouge et blanc (46).
Parfois le cou est entouré de fils rouges (46) ou verts et bleus (53).
La tête du n°. 46 est coiffée de fils blancs, jaunes et rouges. Un turban
blanc coiffe les n°. 44 et 49.
270
La hauteur de ces poupées est successivement 16, 13, 9, 14,5 et 7,5 cm.
X.66.1.52 : avec quatre branchettes, reliées deux par deux, une croix est
confectionnée, servant d'armature pour un Touareg vêtu d'une blouse
indigo. Il ne porte ni ceinture, ni baudrier, ni culotte. Le cou et la tête
sont entourés de tissu blanc et indigo. H = 15.
X.66.1.42/51 : l'armature se compose verticalement de cinq tiges de
graminées dont la tige du milieu ne va qua la taille. Ces tiges sont reliées
entre elles, deux par deux, avec du fil de coton. Deux tiges de graminées
y ont été ligaturées en croix.
Ces Touaregs portent une culotte longue en tissu blanc et deux blouses,
une blanche et une indigo. Le n°. 42 porte ses blouses non cintrées, mais
le n°. 51 a une ceinture en fils de laine vert et rouge. Le cou de ces
poupées-hommes est entouré de fils de blanc, rouge et vert (42) ou blanc
(51). H = 17 et 15,5.
X.66.1.50 : le type d'armature est le même que pour les Touaregs
précédents, sauf que les bras sont formés par trois tiges. Les vêtements
se composent d'une culotte blanche et de deux blouses non cintrées, une
blanche et une indigo. H = 18,5.
X.66.1.45 : ce Touareg a une armature en feuilles de palmier tressées, les
bras et les jambes sont représentés. Les vêtements se composent d'une
culotte longue, en tissu indigo, et de deux blouses, une en kaki et une en
indigo. Le baudrier et le turban sont en tissu indigo. H = 16.
Constructeurs et joueurs : les enfants touaregs.
Touareg Kel Ahaggar : 41.19.103-106/125/125 ; 41.19.130/132/133 (fig.
14 - 41.19.104, fig. 15 - 41.19.105, p. 67)
41.19.103-108/125/126
Origine : In Amedgel, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Rela,
Touareg Kel Ahaggar, nomades.
Mission Henri Lhote, 28.9.1938 (103-108) et 3.10.1938 (125/126).
Description : l'armature des n°. 105, 107 et 108 consiste en deux tiges
verticales auxquelles ont été ligaturées en croix deux autres tiges
271
figurants les bras. L'armature des n°. 103, 104, 106, 125 et 126 comporte
verticalement trois tiges dont celle du milieu ne va qu'à la hauteur de la
taille, les deux tiges extérieures se prolongeant pour former les jambes.
Deux tiges y sont ligaturées en croix.
Les vêtements du n°. 104 sont formés de deux blouses longues, une
blanche et une violacée à bandes blanches et noires. La ceinture et le
baudrier sont en fils blancs et violets. Le cou est enveloppé de tissu noir.
La tête est enveloppée de tissu vert entouré de fils blancs et rougeâtres.
Ce Touareg porte une épée en forme de croix, faite de deux bouts de
roseau et entourée d'étoffe rougeâtre.
Les jambes du n°. 105 sont entourées de tissu indigo. Ce Touareg porte
deux gandoura ou blouses longues, une verte et une rouge à rayures au-
dessus. La tête et le cou sont entourés de fils blancs, jaunes, verts, bleus
et rouges. La ceinture et le baudrier sont faits de fils aux mêmes
couleurs. Une tige verticale entourée de fils jaunes et rouges, à laquelle
se trouve ligaturée une petite tige entourée de fils verts, est l'épée.
Le n°. 106 porte trois gandoura, en tissu multicolore, blanc et indigo. La
ceinture et le baudrier sont en fils blancs, rouges et violets. La tête est
enveloppée de papier d'argent et de fils bleus, jaunes et rouges.
Les jambes du n°. 107 sont entourées de tissu. Le baudrier et la ceinture
sont en fils blancs, verts et rouges. La tête est, comme chez la poupée
précédente, enveloppée de papier d'argent. La tête et le cou sont entourés
de fils blancs et rouges.
Le n°. 108 porte une culotte blanche et cinq gandouras, en tissu rouge,
blanc, indigo, blanc, indigo. La ceinture et le baudrier sont en fils jaunes,
verts, oranges, rouges et bleus. Le cou et la tête sont enveloppés de tissu
indigo et de fils jaunes pour le cou, fils jaunes et blancs pour la tête.
Les jambes du n°. 125 sont enveloppées de tissu kaki. Il porte une
gandoura blanche et une indigo au-dessus. Le baudrier et la ceinture sont
en fils blancs et rouges. Le cou et la tête sont enveloppés de tissu indigo
et la tête est, en plus, entourée de fils blancs et rouges.
Les jambes du n°. 126 sont aussi entourées de tissu kaki. Ce Touareg
porte quatre gandoura, en tissu indigo, blanc, blanc et indigo. La ceinture
et le baudrier sont en fils blancs et rouges. La tête et le cou sont
enveloppés de tissu indigo et entourés de fils blancs et rouges.
H- = 18,5 (126). H+ = 40 (125).
272
Constructeurs et joueurs : les n°. 103-106 et 125/126 furent
confectionnés par un garçon, un jeune akli du campement de Bilbil ag
Aganguéroubou des Kel Rela, le n°. 106 fut fait par une fille Kel Rela
d'environ treize ans. Avec ces poupées-hommes jouent aussi bien les
filles que les garçons Kel Rela.
Figures dans la bibliographie : dans l'Album du Musée du Bardo sur les
Touaregs Kel Ahaggar l'on peut voir une très belle photo d'une poupée-
homme, du même genre que ceux décrits ci-dessus (Balout, Bovis et
Gast, 1959: planche LXVI). Lhote nous montre une jeune fille Kel
Ahaggar jouant dans le sable avec des poupées-hommes (1944: 113,
planche VIII) (fig. 13, p. 67).
Photothèque du Musée de l'Homme : photo du n°. 41.19.107.
41.19.130/132/133
Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,
nomades.
Mission Henri Lhote, 5.10.1938.
Description : l'armature des n°. 132 et 133 est faite d'un morceau de
roseau dont la partie inférieure a été découpée afin de représenter deux
jambes. Une tige traversant le roseau figure les bras. L'armature du n°.
130 comporte verticalement trois tiges dont celle du milieu ne va qu'à la
hauteur de la taille. Deux tiges y sont ligaturées en croix.
Ces poupées-hommes sont vêtues comme des guerriers touaregs en
grande tenue, avec deux longues blouses, une blanche ou jaunâtre et une
indigo au-dessus. Le n°. 130 porte en plus une culotte longue.
Le n°. 133 n'a qu'une ceinture en fils bleus, mais les deux autres portent
un baudrier et une ceinture, en fils de laine bleue, verte, rouge et jaune
(130) ou en fils blancs (132). La tête et le cou sont enveloppés de tissu
indigo. En plus la tête du n°. 130 est entourée de fils blancs.
H- = 10,3 (133). H+ = 20 (130).
Constructeur et joueurs : ces trois poupées-hommes ont été faites par un
garçon touareg de Tamanrasset. Tous les enfants de Tamanrasset jouent
avec ce genre de poupées.
273
Touareg Kel Ajjer : 34.52.43 (fig. 19, p. 70)
Origine : Djanet, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ajjer, nomades.
Recueilli par le capitaine Duprez avant 1935.
Description : ce Touareg, en tenue de guerrier, a une armature en fibres
de palmier torsadées entourée d'étoffe bleue. Il porte quatre gandouras
ou blouses longues, une blanche, bleue, noire et bleue ; une ceinture et
un baudrier en gaze. H = 23.
Constructeur et joueurs : le fils du cheikh de Djanet a réalisé cette
poupée mais les enfants touaregs Kel Ajjer jouent tous avec des poupées-
hommes du même genre.
Touareg Kel Air : 36.44.82/83
Origine : Agadez, Aïr, Sahara, Niger. Touareg Kel Aïr, nomades.
Recueilli par Henri Lhote, don de 1936.
Description : l'armature est en feuilles ou fibres torsadées, avec bras et
jambes. Le n°. 82 n'est qu'une armature (H = 12,5) mais la poupée n°. 83
(H = 22) porte des vêtements d'homme touareg avec une longue culotte
beige, deux blouses longues, beige et indigo, une ceinture en fils de
coton bleu et un manteau beige avec capuchon.
Constructeur et joueurs : avec pareille poupée-homme, fabriquée par un
enfant d'Agadez, jouent tous les enfants touaregs Kel Aïr.
Touareg Kel Iforas : 38.16.43/44 (fig. 20 - 38.16.43, p. 70)
Origine : Kidal, Adrar des Iforas, Sahara, Mali. Touareg Kel Iforas,
nomades. Recueilli par O. Schultz, juillet 1938.
Description : la description du n°. 38.16.43 se trouve au chapitre 1.6 Les
poupées-guerriers et les poupées-notables (p. 71). L'armature du n°.
274
38.16.44 est faite de trois tiges de graminées, dont celle du milieu ne va
qu'à la taille, sur lesquelles une tige de graminée a été ligaturée en croix
pour figurer les bras. La tige servant de bras est fendue au milieu et
glissée au-dessus des tiges verticales.
Le cou et la tête sont brodés de coton blanc, vert, rouge et indigo. Un
petit écheveau de coton indigo imite la chevelure.
Ce Touareg en miniature porte une longue blouse blanche et un baudrier
d'écheveaux de coton blanc, rouge et indigo. H = 15.
Constructeur : une fille des Touaregs Kel Iforas de Kidal.
2.4 Les poupées-jeunes mariés
54.74.10 (fig. 23, p. 74)
Origine : les Chaamba nomadisant à l'Ouest de l'Erg er-Raoui, Sahara
nord-occidental, Algérie. Nomades.
Mission Dominique Champault, 1954.
Description : voir 1.7 Les poupées-jeunes mariés, p. 72.
Constructeur : une fillette chaamba.
275
3 Les poupées-femmes
3.1 Les poupées-femmes touarègues
Touareg Kel Ahaggar :
41.19.122/123/129/1964/1965/1967, 41.19.128/164-166 (fig. 29 -
41.19.123, fig. 30 - 41.19.122, p. 85)
41.19.122/123/129/1964/1965/1967
Origine : In Amedgel, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Rela,
Touareg Kel Ahaggar, nomades.
Mission Henri Lhote, 3.10.1938.
Description : dans un chiffon bourré de paille (122/123/1967) au d'une
(129) ou de deux (1964/1965) crottes de dromadaire ou boules de terre,
un morceau d'os de mouton (122/123/129/1965/1967) ou de bois (1964)
est fixé pour servir d'âme à la poupée. Une tige (122/129/1965) ou deux
tiges (123/1964) ou bien un morceau d'os (1967) y sont ligaturés en croix
afin de figurer les bras. Les jambes ne sont pas indiquées comme il s'agit
de femmes assises. La partie supérieure du morceau de bois ou d'os de
mouton est enroulée de fils de coton mercerisé mais le visage n'est pas
indiqué.
41.19.122 : cou entouré de fils jaunes, verts et rouges ; cheveux tressés
en fils bleus ; vêtement indigo. H = 15.
41.19.123 : cou et tête entourés de fils verts et rouges ; cheveux en
bandelettes d'étoffe indigo ; grandes blouses kaki-blanche-multicolore. H
= 13,7.
41.19.129/1964 : cou entouré de fils verts, jaunes et rouges ; cheveux en
fils indigo ; vêtement indigo. H = 6,5 et 10,7.
41.19.1965 : cou entouré de fils rouges et bleus ; cheveux en fils bleus ;
un vêtement beige et un vêtement rouge au-dessus. H = 12,2.
41.19.1967 : cou enroulé de fils rouges, jaunes, verts et blancs ; tête
entourée de tissu indigo ; cheveux en fils bleus tressés avec un morceau
de tissu rouge fixé à l'extrémité ; pas de vêtements. H = 11,2.
276
Ces poupées portent souvent une mantille mais parfois la tête est
découverte comme chez les n°. 122 et 1967.
Constructeurs et joueurs : ces poupées ont été faites par les filles Kel
Rela d'In Amedgel, les n°. 122 et 123 par une fille de douze ans. Les
filles et les garçons Kel Rela jouent avec ces poupées-femmes.
41.19.128/164-166
Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,
nomades.
Mission Henri Lhote, 5.10.1938 (128) et 11.10.1938 (164-166)
Description : dans une boule d'argile recouverte d'étoffe ou dans une
pelote de chiffons, un os est fixé auquel sont ligaturées en croix deux
branchettes servant de bras.
41.19.128 : cette poupée porte quatre blouses longues en tissu blanc,
indigo, blanc, indigo et des fils de laine imitent les cheveux. H = 11,5.
41.19.164 : ce jouet représente une femme dans le costume d'In Salah.
Elle porte un collier en perles et chaînette. H = 15,3.
41.19.165 : cette poupée porte le costume des femmes d'In Salah, ainsi
que leurs bijoux figurés par une chaînette et des perles. Des mèches de
laine figurent les cheveux.
41.19.166 : ce jouet représente une femme en costume arabe. Elle a des
cheveux véritables appartenant à la fillette qui a confectionné la poupée.
H = 10.
Les poupées 41.19.164-166 n'ont pas été retrouvées.
Constructeurs et joueurs : le n° 128 fut fabriqué par un garçon, le n°. 165
par une fille hartania de dix ans, les n°. 164 et 166 par deux autres filles.
Garçons et filles jouent avec ces poupées.
Figures dans la bibliographie : Foley montre deux poupées-femmes
touarègues Kel Ahaggar (1930: 46, fig. 44) et Gabus en montre une autre
(1958: 135). Une photo de cinq poupées-femmes du méme genre est
reproduite dans l'Album du Musée du Bardo concernant les Kel Ahaggar
(Balout, 1959: planche LXVII). Le même type de poupée est à voir dans
277
"Afrikanische Puppen" de Sigrid Paul (1970: Abb. 94).
Touareg Kel Ajjer : 37.21.29 (fig. 31, p. 86), 37.21.102.1/2
(fig. 35, p. 89)
Origine : Ghât, Sahara, Libye (37.21.29) ; Djanet, Sahara, Algérie
(37.21.102.1/2). Touareg Kel Djanet, Touareg Kel Ajjer, nomades.
Mission René Pottier, 16.12.1934 (37.21.29).
Description :
37.21.29 : l'armature de la poupée est constituée par une baguette de bois
enfoncée dans une crotte d'âne enveloppée d'un morceau de tissu. Le
vêtement de dessus enveloppant la poupée est de couleur blanche. Les
cheveux sont des écheveaux de coton mercerisé rouge et brun. Les
boucles d'oreilles sont des médailles avec d'une face le Sacré-Cœur et à
la face opposée la Vierge. H = 10.
37.21.102.1/2 : voir 2.2 Les poupées-femmes touarègues, p. 89.
Touareg Kel Aïr : 36.44.72-77 (fig. 26 - 36.44.73, p. 83)
Origine : Agadez, Aïr, Sahara, Niger. Touareg Kel Aïr, nomades.
Recueilli par Henri Lhote, avant 1937.
Description : dans le corps de la poupée un morceau d'os (77) ou un
bâtonnet (72-75) est enfoncé pour servir de cou et de tête.
Eventuellement un (75) ou deux (72) bâtonnets sont ligaturés en croix
pour figurer les bras.
36.44.72 : corps fait de deux boules de terre pour les fesses, une boule de
terre pour la taille et deux boules d'étoffe pour les seins ; cheveux en
bandelettes de tissu indigo tressées ; vêtement indigo. H = 12,5.
36.44.73 : corps fait de cinq boules de terre, deux pour les fesses, une
pour la taille et deux pour les seins ; cheveux en ruban indigo noués par
une lanière de cuir ; vêtement indigo. H = 16,5.
36.44.74 : corps fait de quatre crottes et de chiffons ; cheveux en
écheveaux de fils de coton indigo ; vêtement indigo. On a utilisé des
278
épines pour fixer le vêtement. H = 8,3.
36.44.75 : corps fait de quatre boules de terre et de chiffons ; cheveux en
écheveaux de fils de coton indigo ; vêtement indigo. H = 12.
36.44.76 : corps fait de quatre boules de terre pour les fesses et de deux
crottes pour les seins ; cheveux en écheveaux de fils de coton indigo ;
vêtement indigo. H = 11.
36.44.77 : corps fait de deux boules de terre pour les fesses ; vêtement
indigo. H = 11,6.
Touareg Kel Iforas : 38.16.45 (fig. 32, p. 87)
Origine : Kidal, Adrar des Iforas, Sahara, Mali. Touareg Kel Iforas,
nomades.
Recueilli par 0. Schultz, juillet 1938.
Description : 2.2 Les poupées-femmes touarègues, p. 89.
Constructeur : une fille Kel Iforas de Kidal, probablement la fille qui a
confectionné les poupées-guerriers ou poupées-notables n°. 38.16.43/44.
3.2 Les poupées-femmes maures
38.180.77 (fig. 47, p. 98)
Deux poupées-femmes maures en armature d'os se trouvent sous le
baldaquin de la selle portant le même numéro (voir 2.4 Les poupées-
femmes maures, p. 98).
69.70.7.1-5 (fig. 44 - 69.70.7.5, fig. 45 - 69.70.7.1, fig. 46 - 69.70.7.4,
p. 96-97).
Origine : Tidjikdja, Tagant, Sahara, Mauritanie. Maures, nomades et
sédentaires.
Mission Prohusa, 0. du Puigaudeau, janvier-mars 1960.
279
Description : voir 2.4 Les poupées-femmes maures, p. 96-97, H = 14,5
(1), 19,5 (2), 22 (3), 16 (4), 15 (5).
Constructeurs : pareilles poupées-femmes sont faites par les filles et les
femmes de Tidjikdja.
Figure dans la bibliographie : une photo de la poupée 69.70.7.4 se trouve
dans "Poupée-jouet. Poupée-reflet", 1983: 96.
38.48.50/51 (fig. 48, p. 99)
Origine : Tidjikdja, Tagant, Sahara, Mauritanie. Maures, nomades et
sédentaires. Mission Puigaudeau-Sénones, 1936-1938.
Description : ces petites poupées en terre crue reproduisent une jeune
fille (50) ou une femme (51) bien grosse en position assise. Des petites
perles ornent le dessus de la tête du n°. 51. La chevelure des poupées est
en nattes noires. Le corps de la poupée n°. 50 est peinte en ocre et celui
du n°. 51 en couleur bleuâtre. Des dessins géométriques ornent les
poupées. 50 : H = 3,5 ; B = 2. 51 : H = 4 ; B = 2,3.
Figure dans la bibliographie : un croquis de pareille poupée nous montre
Gabus, 1956: 134.
983.52.1-3 (fig. 49 - 983.52.1/2, p. 99)
Origine : Oualata, Sahara, Mauritanie. Maures, nomades et sédentaires.
Don de G. Duchemin.
Constructeurs : les servantes.
Description : ces trois poupées en argile représentent des femmes maures
assises.
983.52.1 : corps de couleur grise, sans marques ni traits, enrobé de gaze
blanche. Dans la coiffure à multiples nattes noires en cire sont incrustées
trois petites perles jaunes et une rouge. La poupée porte un collier en
280
petites perles jaunes, rouges et noires. H = 4. B = 2,4.
983.52.2 : corps de couleur brune avec au milieu du devant trois rayures
horizontales parallèles et un petit trou (le nombril ?). Coiffure à nattes
noires dans laquelle furent incrustées à quelques endroits des petites
perles bleues, jaunes, rouges et noires. La poupée est vêtue de gaze
noire. H = 4. B = 2,5.
983.52.3 : corps blanc avec au milieu du devant deux rayures
horizontales parallèles et un petit trou (le nombril ?) et trois rayures
obliques parallèles se dirigeants des côtés vers le milieu de la base. H =
2. B = 1,4.
3.3 Les poupées-femmes regeybat
54.74.9
Origine : Regeybat nomadisant à l'ouest de Tabelbala, Sahara nord-
occidental, Algérie. Nomades.
Dominique Champault, 1954.
Description : voir 2.6 Les poupées-femmes regeybat, p. 102.
3.4 Les poupées-femmes teda
54.51.75
Origine : Tibesti, Sahara, Tchad. Teda, nomades et sédentaires.
Recueilli par G. Moberg, avant 1935.
Description : à une branchette fourchue, dont les deux éléments figurent
les jambes, un bâtonnet est ligaturé en croix pour former les bras. La tête
est surmodelée en gomme avec, comme visage, des petites perles rouges
incrustées. La coiffure est faite de deux enfilades de petites perles
281
rouges. Comme vêtements la poupée porte des chiffons de cotonnade
bleue, usagés et souillés, ceinturés d'une ficelle. H = 25.
35.50.174/175
Origine : Tibesti, Sahara, Tchad. Teda, nomades et sédentaires.
Mission Le Cœur, 1934.
La fiche signalétique du Musée de l'Homme indique que la poupée n°.
175 fut recueillie chez les Touaregs. Probablement s'agit-il d'une erreur
car pareilles poupées ne nous sont connues que chez les Teda et parce
que la Mission Le Cœur avait pour but des recherches chez les Teda. En
plus la poupée n°. 174, recueillie en même temps que le n°. 175, est
attribuée au Teda dans le catalogue "Poupée-jouet. Poupée-reflet" (1983:
92). Finalement je n'ai retrouvé trace de poupées à tête en datte dans la
bibliographie concernant les Touaregs.
Description :
35.50.175 : l'âme de la poupée est un bâton fourchu auquel est ligaturé
en croix un bâtonnet. Des tresses ornent la tête en datte. H = 22.5.
35.50.174 : armature comme la poupée précédente mais sans tête en
datte. Cette poupée porte deux cauris autour du cou. H = 27.
65.3.9-49 (fig. 53 - 65.3.14, fig. 54 - 65.3.15, fig. 55 - 65.3.46, fig. 56 -
65.3.29, fig. 57 - 65.3.31, fig. 58 - 65.3.32, p. 103-105)
Origine : Bardaï, Tibesti, Sahara, Tchad. Teda, nomades et sédentaires.
Recueilli par Oleg Lopatinsky, 1963.
Description : voir 2.7 Les poupées-femmes teda, p. 103-106.
Ces poupées représentent : des femmes de brousse en costume quotidien
(10/27/28/40/47), une femme de brousse aisée (14), des femmes de
brousse parées pour la danse (9/11/25/34/44), une vieille femme de
brousse (15), des citadines pauvres (12/45), des citadines en costume
quotidien (23/26/31/33/35), des citadines en costume de citadine (17-
19/21/22/24/30/36), des citadines en costume d'intérieur (43/48), des
citadines riches (20/37/41/45), des citadines parées pour la fête (42/49),
282
des riches citadines en costume de fête (16/29/32/38) et une femme parée
pour la fête (39).
Constructeurs et joueurs : les filles teda de dix à seize ans.
Photothèque du Musée de l'Homme : photo des poupées
65.3.21/22/24/43.
3.5 Les poupées-femmes belbala
54.74.7/8/11 (fig. 60 et 61 - 54.74.7, p. 107-108)
Origine : Tabelbala, Sahara nord-occidental, Algérie. Belbala,
sédentaires.
Recueilli par Dominique Champault en 1954.
Données spatio-temporelles : voir 2.8 Les poupées-femmes belbala, p.
107.
Description : voir 2.8 Les poupées-femmes belbala, p. 107.
La face de la poupée n°. 7 est peinte en kohl délayé à l'huile. Avec cette
peinture la fillette a indiqué les yeux, les sourcils, la bouche et le
tatouage de danse dit 'sérafin'. La face de la poupée n°. 8 est aussi peinte
en khol délayé à l'huile mais le tatouage est fait au safran. Les traits du
visage de la poupée n°. 11 sont esquissés à l'encre.
Un voile rouge, maintenu par un bandeau de fils de laine, et un grand
voile blanc coiffent la poupée n°. 8. Les poupées n°. 7 et 11 portent un
mendil de tête rouge.
Comme bijoux elles portent un collier de perles de Briare (8) ou une
chaînette terminée par un penditif et deux penditifs dans les cheveux (7).
La poupée n°. 11 ne porte pas de bijoux. H = 23 (7), 22 (8), 21 (11).
Constructeurs et joueurs : les fillettes belbala.
283
52.27.35
Origine : Tabelbala, Sahara nord-occidental, Algérie. Belbala,
sédentaires.
Collectionné par Dominique Champault en mars 1951.
Données spatio-temporelles : poupées faites au printemps et en automne.
Description : cette poupée, représentant la jeune mariée et appelée
'tamames' est construite à partir d'un tibia de chèvre emmailloté de
chiffons rouges figurant l'izar. La tête, qui est figurée par la partie distale
de l'os, fut recouverte de cheveux de femme disposés en deux tresses
latérales et une tresse arrière, tout comme une coiffure simplifiée de
femmes mariées. Les bras sont faits de chiffons mais la poupée n'a ni
mains ni pieds. H = 18.
Constructeurs et joueurs : les fillettes belbala.
54.74.51
Origine : Tabelbala, Sahara nord-occidental, Algérie. Belbala,
sédentaires.
Mission Dominique Champault, 1954.
Description : voir 2.8 Les poupées-femmes belbala, p. 107.
3.6 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura
62.51.1 (fig. 62, p. 109)
Origine : El Ouata, Vallée de la Saoura, Sahara nord-occidental, Algérie.
Sédentaires.
Don de Corneille Jest, avant 1963.
Description : voir 2.9 Les poupées-femmes de la Vallée de la Saoura, p.
109.
284
3.7 Les poupées-femmes mozabites
34.49.37 (fig. 63, p. 110)
Origine : Ghardaïa, Mzab, Algérie. Mozabites, sédentaires.
Achat du lt. d'Armagnac pour l'exposition du Sahara, 1934.
Description : le corps est en chiffons bourrés de son et la tête est en
papier cartonné. Les cheveux naturels sont faits en tresses et en chignon.
Sur le visage on a peint les tatouages typiques.
Les vêtements se composent d'un sous-vêtement jaune et d'un
survêtement rougeâtre cintré par une ceinture rouge. La poupée ne porte
pas le voile en laine que les femmes mozabites utilisent pour se voiler
dans la rue. Aux pieds elle porte deux petits souliers de cuir bordés d'un
gallon vert et embellis d'un pompon.
Beaucoup de bijoux ornent la poupée. A ses pieds elle a un chevillier en
métal et à ses bras un bracelet avec fermeture de bâtonnet. Deux fibules
de type traditionnel ferment la robe de dessus. Celles-ci sont reliées par
une chaînette. La poupée porte aussi des boucles d'oreilles à croissant de
lune et une broche à perle rouge dans les cheveux. Sur le front pend une
petite main de Fatima en métal. Enfin, elle est ornée d'un collier en
pièces de monnaie portant la date de 1870 en caractères arabes. H = 58,5.
Constructeur et joueurs : voir 2.10 Les poupées-femmes mozabites, p.
110.
3.8 Les poupées-femmes chaouia
36.2.182-184/189/274-321/322bis-329 (fig. 65 - 36.2.279, p. 113,
fig. 66 - 36.2.314, p. 114)
Origine : Djebel Tadjmout, Aurès, Algérie. Ouled Abderrahman,
Chaouia, sédentaires.
Mission Thérèse Rivière, 1936.
285
Description : voir 2.12 Les poupées-femmes chaouia, p. 112-114.
36.2.183 : le corps est un bâtonnet unique entouré de tissu. Les
vêtements comportent une robe rouge maintenue par une cordelière
croisée, une mante blanche attachée avec une épine et une mante noire
par-dessus, un turban rose et un foulard rouge. H = 19.
36.2.184 : un bâtonnet unique représente le corps. La poupée porte deux
robes rouges, deux mantes superposées, une blanche et une noire,
attachées avec une épine, un turban noir et un foulard orange. H = 17.
36.2.279 : l'âme de la poupée est un morceau de roseau fendu, auquel est
ligaturé un bâtonnet brisé en son milieu. Les vêtements sont une robe
verte, une mante blanche et un turban vert. Cette poupée porte une
poupée-enfant dans le dos. Cet enfant est fait d'un morceau de roseau
fendu, avec le haut et le bas découpés en pointe, entouré de tissu noir et
avec une ceinture rouge. H = 17,5. H de l'enfant = 6. La poupée n°. 277
porte aussi un petit dans le dos.
36.2.283 : corps fait d'un os. Des mèches de cheveux encadrent la figure.
Cette poupée porte deux robes en cotonnade, une mante blanche, un
turban blanc bien fait et un foulard orange. H = 21.
36.2.314 : sur une âme d'os un bâtonnet est ligaturé en croix. La poupée
porte une robe de cotonnade grenat imprimée et une mante blanche au-
dessus, ainsi qu'un foulard jaune et un turban noir. Elle est ornée d'un
collier de perles rouges et de piécettes dorées. H = 18. La poupée n° 318
porte une chaînette terminée par un bouton rouge.
Constructeurs et joueurs : les filles et garçons chaouia.
37.9.8bis/17-52 (fig. 67 - 37.9.33, p. 115, fig. 68 - armature bébé, p. 113)
Origine : Aurès, Algérie. Chaouia, sédentaires.
Mission Germaine Tillion, 1935-1937.
Description : voir 2.12 Les poupées-femmes chaouia, p. 114-115.
L'armature des poupées consiste en un bâtonnet ou un os unique
(8bis/18-51) ou en un os auquel est ligaturé en croix un bâtonnet (17/52).
Certaines poupées portent un petit dans le dos (23/30/32/33/37). La
poupée n°. 35 avec son manteau noir est une divorcée. H- = 7 (45). H+ =
28 (17).
286
Constructeurs et joueurs : les fillettes chaouia.
Figure dans la bibliographie : Gaudry (1961: pl. XXXIX) nous montre
une petite fille chaouia du Djebel Amour en Algérie qui tient tendrement
une poupée de chiffons dans ses bras.
3.9 Les poupées-femmes marocaines
31.45.59 (fig. 69, p. 117)
Origine : Fès, Maroc. Sédentaires.
Don de Jeanne Jouin, avant 1932.
Description : sur un morceau de roseau entier, servant d'âme, est ligaturé
un morceau de roseau fendu pour servir de bras. A la hauteur de la tête,
un morceau de tissu blanc entoure le roseau. Sur ce fond blanc a été
dessiné un visage sans nez mais avec une bouche et des yeux noirs et
avec le tatouage typique en noir sur le front et le menton. Les cheveux
sont en soie noire effilée. Le vêtement figure celui de la citadine
marocaine. La poupée porte une chemise blanche, un caftan orange et un
caftan jaune à manches, une tunique transparente blanche, une ceinture
blanche à rayures bleues et jaunes, une cordelière, pour retrousser les
manches, en fils de coton bleus et noirs et un foulard blanc à dessins
roses. Elle porte un collier de perles jaunes et grises et avec une grosse
perle blanche au milieu. La plaque frontale est représentée par un bouton
avec une étoile et un croissant de lune. H = 28.
Constructeur et joueurs : cette poupée fut faite par une fillette de Fès.
Toutes les fillettes de Fès jouaient avec ces poupées.
42.28.1
Origine : Moulay Idris, Zerhoun, Maroc. Uled Nceir (Ouled Nacer),
sédentaires. Recueilli par J. Herber, avant 1943.
287
Description : le corps de la poupée est constitué par deux bâtonnets de
roseau disposés en croix ; un morceau de tissu blanc, enveloppant le
sommet de la croix, forme le visage. Les yeux et la bouche sont dessinés
à l'encre rouge, le tatouage est en encre noire.
La poupée est vêtue d'une chemise blanche, d'un caftan rougeâtre, d'un
autre caftan bleu à rayures blanches et d'un survêtement transparant serré
à la taille par une ceinture verte. Sur la tête un chiffon blanc représente le
mouchoir de soie porté par les femmes. Cette mariée porte un collier et
des pendeloques en verroterie. H = 21.
34.123.1/2 (fig. 70 - 34.123.1, p. 117)
Origine : Rabat, Maroc. Sédentaires.
Don de J. Herber, avant 1935.
Description : les corps, têtes et membres de ces poupées sont faits de
chiffons bourrés.
34.123.1 : les yeux carrés, le nez, la bouche et les tatouages ont été
cousus en fil noir. Sur les côtés de la tête chauve pendent quelques fils
noirs en guise de cheveux. Comme vêtements la poupée porte une
culotte en écru, un sous-vêtement violet et un survêtement blanc
transparent avec broderie. H = 29.
34.123.2 : les yeux, le nez et la bouche sont noirs, les tatouages rouges.
Les cheveux sont des écheveaux de coton noir. H = 18,5.
3.10 Les poupées-femmes tunisiennes
30.54.888/891 (fig. 155 - 30.54.891, p. 205, fig. 156 - 30.54.888, p. 206)
Origine : une ville tunisienne (888) et la ville de Hammamet (891),
Tunisie. Sédentaires.
Collection Delaporte, dépôt du Musée de St. Germain et du Musée de la
Marine, avant 1931.
Description : le corps, la tête et les membres furent confectionnés de
pièces de tissu bourrées de paille et de chiffons.
288
30.54.888 : les pupilles des yeux, les sourcils et la bouche sont indiqués.
Le nez est mis un peu en relief en posant une graine au bon endroit
comme cela pouvait être le cas pour une poupée marocaine de Fès. Cette
poupée est en costume juive. Elle porte une robe longue bicolore, verte
et rouge, avec au-dessus une robe rouge brodée à manches en dentelle.
Un grand voile rouge coiffe la tête et des souliers en tissu bleu ornent les
pieds. H = 36.
30.54.891 : le nez, lui aussi en relief, et la bouche de cette poupée sont
brodés mais les yeux et les sourcils ont été dessinés. Les cheveux, en
tissu noir tressé, sont cousus sur la tête. La poupée porte une robe
blanche avec, à l'ouverture. six galons de couleur rouge-ocre-rouge-
rouge-ocre-rouge. Les manches de cette robe sont multicolores. Au-
dessus de cette robe, elle en porte une autre, sans manches, de couleur
bleue et avec un galon rose des deux côtés de l'ouverture. Les bijoux
comportent deux boucles d'oreilles à perles, un collier de perles et un
autre de perles et de piécettes de cuivre jaune, deux fibules liées par une
chaînette à perles et un anneau en métal jaune au bras droit. H = 33.
289
4 Les poupées-enfants
4.1 Les poupées-enfants touarègues
Touareg Kel Ahaggar : 41.19.129/133/157 (fig. 157 - 41.19.157, p. 210)
41.19.129
Voir catalogue 3.1 Les poupées-femmes touarègues, p. 275.
41.19.133
Voir catalogue 2.3 Les poupées-guerriers et les poupées-notables, p. 272.
41.19.157
Origine : Tamanrasset, Ahaggar, Sahara, Algérie. Touareg Kel Ahaggar,
nomades.
Mission Henri Lhote, 5.10.1938.
Description : voir 3.2 Les poupées-enfants touarègues, p. 209.
Touareg Kel Ajjer : 37.21.102.2
Voir 2.2 Les poupées-femmes touarègues, p. 89 et catalogue 3.1 Les
poupées-femmes touarègues, p. 277.
4.2 Les poupées-enfants maures
69.70.7.1/2 (fig. 45 - 69.70.7.1, p. 97)
Voir 2.4 Les poupées-femmes maures, p. 96 et catalogue 3.2 Les
poupées-femmes maures, p. 278.
290
4.3 Les poupées-enfants chaouia
37.9.23/30/32/33/37 (fig. 67- 37.9.33, p. 115, fig. 68 - armature du bébé,
p. 113)
Voir 2.12 Les poupées-enfants chaouia, p. 115 et catalogue 3.8 Les
poupées-femmes chaouia, p. 284.
291
Table des transcriptions
Certaines lettres arabes sont indiquées par des signes conventionnels :
th =
j =
h' =
kh =
dh =
sh =
ç =
d' =
t' =
z' =
º =
gh =
q =
^ = indique une voyelle longue
293
Table des illustrations
Tous les clichés des poupées de la collection du Département d‟Afrique
Blanche et du Proche Orient du Musée de l‟Homme ont été réalisés par
M. Delaplanche, D. Destable, Ch. Lemzaouda ou D. Ponsard du
Laboratoire de Photographie du Musée de l‟Homme.
1. Jeu de poupée, 1975, photo couverture, Ghrib, photo de l'auteur.
2. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, 1975, p. 54, Ghrib, photo de
l'auteur.
3. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 55, Touaregs, Collection du
Musée de l'Homme n° 41.19.113, cliché D. Ponsard.
4. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 56, Touaregs, Collection du
Musée de l'Homme n° 74.107.6, cliché M. Delapanche.
5. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 58, Touaregs, Collection du
Musée de l'Homme n° 37.21.104.1/2, cliché M. Delaplanche.
6. Dromadaire-jouet et poupée-méhariste, p. 60, Vallée de la Saoura,
Collection du Musée de l'Homme n° 62.60.29/30, cliché M.
Delaplanche.
7. Poupée-cavalier, p. 61, Touaregs, reproduction du dessin dans le livre
de Lebeuf et Pâques, 1970: 53.
8. Cheval-jouet et poupée-cavalier, p. 62, Maures, Collection du Musée
de l'Homme n° 38.141.83, cliché M. Delaplanche.
9. Cheval-jouet et poupée-cavalier, p. 63, Maures, Collection du Musée
de l'Homme n° 38.48.82, cliché M. Delaplanche.
10. Garçons cherchant de l'argile à flanc de montagne, 1992, p. 64, Aït
Ighemour photo de l'auteur.
11. Poupée-muletier et son mulet, 1992, p. 64, Aït Ighemour, photo de
l'auteur.
12. Poupée-muletier et son mulet, 1992, p. 65, Aït Ighemour, photo de
l'auteur.
13. Fille touarègue jouant avec des poupées-hommes, p. 67, photo Henri
Lhote, 1944: 113, planche VIII.
14. Poupée-homme à épée, p. 67, Touaregs, Collection du Musée de
l'Homme n° 41.19.104, cliché M. Delaplanche.
294
15. Poupée-homme, p. 67, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 41.19.105, cliché D. Destable.
16. Les différents types d'armatures des poupées-guerriers et poupées-
notables touaregs, p. 68, dessin de l'auteur.
17. Armature de poupée-homme, p. 69, Touaregs, Collection du Musée
de l'Homme n° X.66.1.42, cliché M. Delaplanche.
18. La même poupée-homme que la précédente mais habillée, p. 69,
cliché M. Delaplanche.
19. Poupée-homme, p. 70, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 34.52.43, cliché D. Destable.
20. Poupée-homme, p. 70, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 38.16.43, cliché D. Destable.
21. Poupées-hommes, p. 72, Maures, dessin sur échelle réduite de deux
croquis figurant dans le livre de Jean Gabus, 1958: 134.
22. Poupées-hommes, 1977, p. 73, Ghrib, photo de l'auteur.
23. Poupée-homme, p. 74, Chaamba, Collection du Musée de l'Homme
n° 54.74.10, cliché D. Destable.
24. Poupée-homme, 1992, p. 76, Aït Ighemour, photo de l'auteur.
25. Types de base des armatures des poupées-femmes, p. 80, dessin de
l'auteur.
26. Poupée-femme, p. 83, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 36.44.73, cliché D. Destable.
27. Armature de poupée-femme, p. 83, Touaregs, Collection du Musée
de l'Homme n° X.73.90.14, cliché D. Destable.
28. Les différents types d'armatures des poupées-femmes touarègues, p.
84, dessin de l'auteur.
29. Poupée-femme, p. 85, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 49.19.123, cliché D. Destable.
30. Poupée-femme, p. 85, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 49.19.122, cliché D. Destable.
31. Poupée-femme, p. 86, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 37.21.29, cliché M. Delaplanche.
32. Poupée-femme, p. 87, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme,
dessin de l'auteur.
33. Figuration géométrique de la poitrine d'une poupée-femme
touarègue, p. 88, dessin de l'auteur.
295
34. Poupée-femme, p. 88, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme
n° 38.16.45, cliché photo M. Delaplanche.
35. Poupée-mère, p. 89, Touaregs, Collection du Musée de l'Homme n°
37.21.102.1, cliché D. Destable.
36. Poupée-femme, p. 90, Touaregs, reproduction du dessin dans Henri
Lhote, 1975: 408, fig. 1.
37-38. Fille Ghrib avec sa poupée-femme et la poupée elle-même, 1975,
p. 93, photos de l'auteur.
39. Détail des bijoux d'une poupée-femme, 1975, p. 93, Ghrib, photo de
l'auteur.
40. Deux filles ghrib tenant leurs poupées, 1975, p. 94, photo de l'auteur.
41-42. Deux poupées-femmes avec traits de visage faits par des garçons,
1975, p. 95, Ghrib, photos de l'auteur.
43. Poupée-femme à tête de flacon, 1991, p. 95, Ghrib, photo de Gilbert
J.M. Claus.
44. Poupée-femme, p. 96, Maures, Collection du Musée de l'Homme n°
69.70.7.5, cliché D. Destable.
45. Poupée-femme, p. 97, Maures, Collection du Musée de l'Homme n°
69.70.7.1, cliché D. Destable.
46. Poupée-femme, p. 97, Maures, Collection du Musée de l'Homme n°
69.70.7.4, cliché M. Lemzaouda.
47. Poupées-femmes sur selle à baldaquin, p. 98, Maures, Collection du
Musée de l'Homme n° 38.180.77, cliché M. Delaplanche.
48. Poupées-femmes, p. 99, Maures, Collection du Musée de l'Homme
n° 38.48.50/51, cliché M. Delaplanche.
49. Poupées-femmes, p. 99, Maures, Collection du Musée de l'Homme
n° 983.52.1/2, cliché M. Delaplanche.
50. Base de poupée-femme, p. 99, Maures, dessin de l'auteur basé sur
celui de Béart, 1955: 96.
51. Maison de poupée, p. 100, Maures, Collection du Musée de
l'Homme n° 38.48.98, cliché M. Delaplanche.
52. Poupée-femme, p. 101, Maures, reproduction du dessin dans le livre
de Jean Gabus, 1958: 119.
53. Poupée-femme, p. 103, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°
65.3.14, cliché M. Delaplanche.
54. Poupée-femme, p. 103, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°
65.3.15, cliché D. Destable.
296
55. Poupée-femme, p. 104 Teda, Collection du Musée de l'Homme n°
65.3.46, cliché, D. Destable.
56. Poupée-femme, p. 104, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°
65.3.29, cliché M. Delaplanche.
57. Poupée-femme, p. 105, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°
65.3.31, cliché M. Delaplanche.
58. Poupée-femme, p. 105, Teda, Collection du Musée de l'Homme n°
65.3.32, cliché M. Delaplanche.
59. Armature de poupée-femme teda, p. 106, dessin de l'auteur.
60. Poupée-femme, p. 107, Belbala, Collection du Musée de l'Homme n°
54.74.7, cliché Ch. Lemzaouda.
61. Vue de dos de la poupée-femme précédente, p. 108, cliché D.
Destable.
62. Poupée-femme, p. 109, Vallée de la Saoura, Collection du Musée de
l'Homme n° 62.51.1, cliché M. Delaplanche.
63. Poupée-femme, p. 110, Mozabites, Collection du Musée de l'Homme
n° 34.49.37, cliché M. Delaplanche.
64. Types d'armatures des poupées-femmes chaouia, p. 112, dessin de
l'auteur.
65. Poupée-femme, p. 113, Chaouia, Collection du Musée de l'Homme
n° 36.2.279, cliché D. Destable.
66. Poupée-femme, p. 114, Chaouia, Collection du Musée de l'Homme
n° 36.2.314, cliché D. Destable.
67. Poupée-femme portant un bébé ou un petit enfant dans le dos, p.
115, Chaouia, Collection du Musée de l'Homme n° 37.9.33, cliché
D. Destable.
68. Armature de la poupée-bébé ou petit enfant chaouia précédente, p.
113, dessin de l'auteur.
69. Poupée-femme, p. 117, Maroc, Collection du Musée de l'Homme n°
31.45.59, cliché D. Ponsard.
70. Poupée-femme, p. 117, Maroc, Collection du Musée de l'Homme n°
34.123.1, cliché M. Delaplanche.
71. Armature de poupée-femme, p. 119, Maroc, dessin de l'auteur basé
sur J. Herber, 1918: 67.
72. Poupée-femme, 1993, p. 124, Aïn Toujdate, Maroc, photo de
l'auteur.
297
73. Maison de poupée avec deux poupées-femmes et une poupée-
homme, 1996, p. 125, Aït Hmed ou Yacoub, Maroc, photo de
l'auteur.
74. Poupée-femme et poupée-homme, 1996, p. 126, Aït Hmed ou
Yacoub, Maroc, photo de l'auteur.
75. Armature de poupée-femme, 1997, p. 127, Oulmès, Maroc, photo de
l'auteur.
76. Poupée-femme, 1997, p. 128, Arhbalou-n-Serdane, Maroc, photo de
l'auteur.
77. Poupée-femme, 1996, p. 130, She°ba, Maroc, photo de l'auteur.
78. Poupée-femme en plastique, 1996, p. 131, She°ba, Maroc, photo de
l'auteur.
79. Maisons de poupées, p. 132, Ksar Assaka, Maroc, dessin de l'auteur.
80. Poupée-femme, 1997, p. 134, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.
81. Poupée-femme couchée sur une poupée-mouton, 1997, p. 136, Ksar
Assaka, Maroc, photo de l'auteur.
82. Poupée-femme, 1997, p. 137, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.
83. Poupée-femme et poupée-homme, 1997, p. 137, Ksar Assaka,
Maroc, photo de l'auteur.
84. Poupée-femme, 1997, p. 138, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.
85. Poupée-femme, 1997, p. 139, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur.
86. Poupées-femmes, 1997, p. 140, Ksar Assaka, Maroc, photo de
l'auteur.
87. Poupée-femme, 1998, p. 141, Ksar Assaka, Maroc, photo de l'auteur
88. Poupée-femme à armature de roseau, 1998, p. 143, Aït Sidi Amar,
Maroc, photo Johan De Gussem.
89. Poupées-femmes à armature d'os, 1999, p. 144, Aït Sidi Amar,
Maroc, photo Johan De Gussem.
90. Filles avec leurs poupées-femmes, 1999, p. 145, Tataouine, Maroc,
photo de l'auteur.
91. Fille avec deux poupées-femmes, 1999, p. 146, Tataouine, Maroc,
photo de l'auteur.
92. Poupée-femme avec cheveux faits de feuilles de roseau, 1997, p.
146, Tabenatout, Maroc, photo de l'auteur.
93. Fille avec sa maisonnette de boîte de carton et sa poupée, 1999, p.
147, Zaïda, Maroc, photo de l'auteur.
298
94. Poupée en plastique genre Barbie avec un morceau de roseau servant
de bras, 1999, p. 148, Zaïda, Maroc, photo de l'auteur.
95. Poupée avec une robe andalouse flamenco localement crochetée,
1992, p. 148, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.
96. Une fille de deux ans avec le Vieil Homme, 1998, p. 149, Ignern,
Maroc, photo de l'auteur.
97. Des enfants dans leur maison de poupée, 1999, p. 150, Aït Slimane,
Maroc, photo de l'auteur.
98. Filles tenant leur poupée-femme, 1999, p. 150, Aït Slimane, Maroc,
photo de l'auteur.
99. Filles tenant leur poupée, 1996, p. 151, Magaman, Maroc, photo de
l'auteur.
100. Poupées-femmes, 1996, p. 152, Magaman, Maroc, photo de
l'auteur.
101. Trois poupées-femmes et une poupée-homme, 1996, p. 153,
Magaman, Maroc, photo de l'auteur.
102. Poupée-femme, 1994, p. 154, Ighrem-n-Cherif, Maroc, photo de
l'auteur.
103. Poupée-femme, 1997, p. 155, Ksar Hasni Biad, Maroc, photo de
l'auteur.
104. Poupée-femme, 1997, p. 155, Ksar Hasni Biad, Maroc, photo de
l'auteur.
105-106. Poupée-femme, 1997, p. 157, Ksar Hasni Biad, Maroc, photo
de l'auteur.
107. Poupée-femme, 1999, p. 157, Merzouga, Maroc, photo de Luc
Lauras.
108. Poupées-femmes, 1992, p. 158, Aït Ighemour, Maroc, photo de
l'auteur.
109. Poupées-femmes, 1992, p. 159, Aït Ighemour, Maroc, photo de
l'auteur.
110. Poupée-femme, 1996, p. 160, Ignern, Maroc, photo de l'auteur.
111. Poupée-femme, 1996, p. 160, Ignern, Maroc, photo de l'auteur.
112. Poupée-femme en plastique avec robe faite par la fille, 1996, p.
161, Ignern, Maroc, photo de l'auteur.
113. Chapelle-jouet, p. 163, Maroc, dessin de l'auteur basé sur une photo
de Guichard, 1921: 163.
299
114. Chaise-jouet, p. 163, Maroc, dessin de l'auteur basé sur une photo
de Guichard, 1921: 163.
115. Poupée-femme, 1961, p. 164, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.
116. Poupée importée utilisée à Marrakech dans les années 1970, 1992,
p. 165, photo de l'auteur.
117. Poupée en plastique, utilisée comme armature pour une poupée-
jeune mariée, 1992, p. 166, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.
118. Poupée en plastique transformée en poupée-jeune mariée, 1992, p.
167, Marrakech, Maroc, photo de l'auteur.
119. Maison de poupée, p. 168, Marrakech, Maroc, dessin de l'auteur
basé sur le croquis de Fatima Kader.
120-121. Poupée-femme, vue de devant et de dos, 1992, p. 170, Imi-n-
Tanoute, Maroc, photo de l'auteur.
122. Maison de poupée, p. 171, Imi-n-Tanoute, Maroc, dessin de
l'auteur.
123. Poupée en plastique 'Little Miss', 1996, p. 173, Taroudannt, Maroc,
photo de l'auteur.
124. Armature de poupée-femme, p. 173, Hmar, Maroc, dessin de
l'auteur.
125. Poupée-femme avec la partie plus épaisse de la plante bûsûsû
utilisée comme tête, 1998, p. 175, Hmar, Maroc, photo de l'auteur.
126. Poupée-mère portant un bébé dans le dos, 1998, p. 176, Hmar,
Maroc, photo de l'auteur.
127. Dix poupées-femmes et une poupée-homme, 1998, p. 177, Imou
Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
128. Poupée-homme avec un emballage de bonbon comme vêtement,
1998, p. 178, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
129. Poupée-femme à visage souriant, 1998, p. 178, Imou Ergen, Maroc,
photo de l'auteur.
130. Poupée-femme avec vêtement bleu à motif floral, 1998, p. 178,
Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
131. Poupée-femme avec vêtement blanc à motif floral vert, 1998, p.
178, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
132. Poupée-femme avec vêtement rouge et ceinture de fils blanc, 1998,
p. 179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
133. Poupée-femme avec vêtement, foulard et ceinture rouge, 1998, p.
179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
300
134. Poupée-femme avec vêtement rouge et blouse blanche, 1998, p.
179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
135. Poupée-femme avec vêtement de plastique rouge transparent, 1998,
p. 179, Imou Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
136. Poupée-femme avec vêtement à motif floral et foulard de la même
étoffe tenu en place par un morceau de scotch, 1998, p. 180, Imou
Ergen, Maroc, photo de l'auteur.
137. Poupée-femme avec un emballage de bonbon comme vêtement et
un grand foulard de gaze, 1998, p. 180, Imou Ergen, Maroc, photo
de l'auteur.
138. Poupée-femme avec vêtement rouge cintré par une ceinture de fils
blanc et foulard de la même étoffe, 1998, p. 180, Imou Ergen,
Maroc, photo de l'auteur.
139. Poupée-femme, région de Tafraoute, 1998, p. 181, Imou Ergen,
Maroc, photo de l'auteur.
140. Poupée-femme, 2002, p. 181, région de Tafraoute, Lahfart, Maroc,
photo de l'auteur.
141. Poupée-femme, 2002, p. 182, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
142. Poupées-femmes, 2002, p. 183, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
143. Poupée-femme montrant des jambes découpées, 2002, p. 185,
Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
144. Poupées-femmes, 2002, p. 187, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
145. Poupées-femmes, 2002, p. 187, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
146. Poupée-femme, 2002, p. 186, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
147. Poupée-femme vêtue d'une robe faite avec l'emballage aluminium
d'un petit gâteau, 2002, p. 186, Lahfart, Maroc, photo de l'auteur.
148. Poupée-femme avec armature en Isomo, 2002, p. 188, Lahfart,
Maroc, photo de l'auteur.
149. Poupée-mère portant un bébé dans le dos, 2002, p. 189, Lahfart,
Maroc, photo de l'auteur.
150. Poupée-femme en robe de mariage blanche, 2002, p. 190, Lahfart,
Maroc, photo de l'auteur.
151. Poupée-homme avec tête en Isomo, 2002, p. 190, Lahfart, Maroc,
photo de l'auteur.
301
152. Coquillages d'escargots représentant la jeune mariée, le jeune
marié, leur famille et les visiteurs dans une maisonnette avec
voiture de mariage dans le garage, 2002, p. 191, Lagzira, Maroc,
photo de l'auteur.
153. Les coquillages d'escargots menés en voiture faite d'une boîte de
sardines, 2002, p. 192, Lagzira, Maroc, photo de l'auteur.
154. Fille avec sa maison de poupée, 2002, p. 193, Lagzira, Maroc,
photo de l'auteur.
155. Poupée-femme, p. 205, Tunisie, Collection du Musée de l'Homme
n° 30.54.891, cliché D. Destable.
156. Poupée-femme, p. 206, Tunisie, Collection du Musée de l'Homme
n° 30.54.888, cliché M. Delaplanche.
157. Poupée-enfant, p. 210, Touaregs, Collection du Musée de
l'Homme n° 41.19.157, cliché D. Destable.
158. Coin de poupée dans un Centre de Ressources pour le Préscolaire,
1993, p. 241, Kénitra, Maroc, photo de l'auteur.
159. Village d'oasis fait par des enfants d'une classe préscolaire, 1989, p.
255, Gand, Belgique, photo de l'auteur.
160. Caravane de nomade fait par un enfant d'une classe préscolaire,
1989, p. 256, Gand, Belgique, photo de l'auteur.
161. Les enfants d'une classe préscolaire marchent autour de leur village
d'oasis, 1989, p. 257, Gand, Belgique, photo de l'auteur.
162-163. Exemple de jouets fabriqués par des enfants marocains
stimulant des enfants flamands à créer eux-mêmes des jouets,
1998, p. 258-259, Journée UNICEF organisée par le Comité de
Gand pour l'UNICEF, Eeklo, Belgique, photo de l'auteur.
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traditionnel algérien. Paris: Editions François Maspero, 302 (première
édition, 1970).
321
Vidéos :
Poupées et jeux de poupées marocaines
Video: homemade dolls from Morocco
Rossie, Jean-Pierre, Laabib, Souad & Sterner, Björn (1998). Video:
Homemade Dolls from Morocco. Filmé par Björn Sterner, Halmstad:
Nordic Center for Research on Toys and Educational Media, University
of Halmstad, 18 minutes. - Vidéo disponible dans la vidéothèque de
SITREC.
Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14
Poupées-femmes marocaines (p. 117).
Dans la première partie de la vidéo, Souad Laabib montre comment
différentes poupées ont été faites avec des matériaux naturels et de
récupération. Ces poupées sont :
1. Poupée-jeune mariée (1'-5'30"), confection en janvier 1997 de la
poupée faite dans les années 1940 par Sfia Gharîb, née dans le village
d'Arhbalou-n-Serdane sur la route de Khenifra à Boumia, Moyen
Atlas (fig. 76, p. 128).
2. Poupée-jeune mariée (5'30"-7'30"), confection en 1996 de la poupée
faite au début des années 1980 par Sabah Laabib, née à Midelt en
1973 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka
Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 85, p. 139).
3. Poupée-jeune marié (7'30"-10'), confection en 1996 de la poupée très
simple faite au début des années 1980 par Najat Laabib, née à Midelt
en 1971 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar
Assaka, Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 83 à gauche, p. 137).
4. Poupée-jeune mariée (11'30"-12'), confection en 1996 de la poupée
faite au début des années 1980 par Sabah Laabib, née à Midelt en
1973 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka,
Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 86 à droite, p. 140).
322
Dans la deuxième partie de cette vidéo Jean-Pierre Rossie montre
quelques poupées et donne des informations supplémentaires :
5. Poupée-jeune mariée (12'-12'15"), confection en 1996 de la poupée
faite au début des années 1980 par Sabah Laabib, née à Midelt en
1973 mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka,
Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 86 à gauche, p. 140).
6. Poupée-jeune mariée (12'15"-12'55"), confection en 1996 de la poupée
faite vers la fin des années 1970 par Souad Laabib, née à Ksar Assaka
en 1968 et ayant vécu la plupart du temps de son enfance dans ce
village, Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig.80, p. 134).
7. Poupée-jeune mariée (12'55"-13'25"), confection en 1996 de la poupée
faite au début des années 1980 par Najat Laabib, née à Midelt en 1971
mais vivant la plupart du temps de son enfance à Ksar Assaka, Jbel
Ayachi, Haut Atlas (fig. 84, p. 138).
8. Poupée-jeune mariée (13'28"-13'50"), confection en 1996 de la poupée
faite dans les années 1970 par Ennèya, une mère de trente-cinq ans
vivant dans le petit village de Ignern près du centre rural de Taliouine,
Jbel Siroua, Haut Atlas (fig. 111, p. 160).
9. Poupée-jeune mariée (13'50"-14'40"), faite en novembre 1996 par une
fille d'environ dix ans vivant à Ignern près de Taliouine, Jbel Siroua,
Haut Atlas (fig. 110, p. 160).
10. Sept poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié (14'40"-
16'40") faites en novembre 1996 par des filles de la deuxième année
de l'école primaire du village Magaman près de Goulmima (fig. 101-
102, p. 153-154).
11. Poupée-jeune mariée et poupée-jeune marié (16'40"-18') faites en
octobre 1996 par Hesna Ourèra, une fille d'environ huit ans du petit
village Aït Hmed ou Yacoub près de Khemisset (fig. 73-74, p. 125-
126).
323
Vidéo :
Poupées de l'Atlas et du Pré-Sahara marocains
Rossie, Jean-Pierre & Lauras, Luc (2001). Vidéo : Poupées de l'Atlas et
du Pré-Sahara Marocains. Filmé par Luc Lauras, 19.10.2001, Musée
International des Arts Modestes, Sète, 60 minutes, version décrite ci-
après. Il existe aussi une version de 30 minutes utilisée pendant
l'exposition dans ce musée (novembre 2001 - février 2002) - Vidéos
disponibles dans la vidéothèque de SITREC.
Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14
Poupées-femmes marocaines (p. 117).
La vidéo avec commentaire de Jean-Pierre Rossie débute par un aperçu
de toutes les poupées, suivi par :
1. Les armatures des poupées (1'30''-3'40).
2. Sept poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié (3'40''-6') :
poupées créées par des filles d'environ sept ans du village Magaman
(Goulmima), Pré-Sahara, en 1996 (fig. 99-101, p. 151-153), et le
modèle d'une maison de poupée.
3. Une poupée-jeune mariée (6'-7') : faite en 1994 par une fillette six ans
du village Ighrem-n-Cherif (Goulmima), Pré-Sahara (fig. 102, p.
154).
4. Dix poupées-jeunes mariées (7'-11') : confectionnées par des filles de
six à douze ans du village Aît Ighemour, Jbel Siroua, Haut Atlas, et
des ustensiles-jouets fabriqués par des garçons de ce village, 1992
(fig. 108-109, p. 158-159).
5. Quatre poupées-jeunes mariées (11'-14'50'') : trois poupées-jeunes
mariées faites par des jeunes filles et un faite par une mère d'environ
quarante ans du village Ignern, Jbel Siroua, Haut Atlas, ainsi qu'une
série d'ustensiles-jouets faite par les mêmes filles, 1996 (fig. 110-111,
p. 160).
6. Sept poupées-jeunes mariées, une poupée-jeune marié et une poupée-
mouton (14'50''-24'30'') : refaite en 1997 par trois sœurs entre vingt et
vingt-six ans ainsi que par leur mère de cinquante-cinq ans du village
324
Ksar Assaka (Midelt), Jbel Ayachi, Haut Atlas (fig. 80-86, p. 134-
140), et le modèle d'une maison de poupée (fig. 79, p. 132).
7. Poupée-jeune mariée (24'30''-26') : refaite par une jeune mère
d'environ vingt ans, Imi-n-Tanoute, Haut Atlas, en 1992 (fig. 122, p.
171).
8. Poupée-jeune mariée (26'-27'50'') : poupée créée par une fille
d'environ neuf ans de la région de Tafraoute, Anti-Atlas, en 1998 (fig.
131, p. 178).
9. Dix poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié (27'50''-31') :
huit poupées-jeunes mariées et une poupée-jeune marié faites en 1998
par des filles de dix à quatorze ans ainsi qu'une poupée-jeune mariée
faite par un garçon de douze ans, tous des élèves de l'école d'Imou
Ergen près d'Ergoub (Sidi Ifni), Anti-Atlas (fig. 127-138, p. 177-180).
10. Trois poupées-jeunes mariées (31'-37'40'') :faites par des filles du
village Ksar Hasni Biad (Merzouga), Pré-Sahara, en 1997 (fig. 103-
106, p. 155-157).
11. Trois poupées-jeunes mariées et une poupée mère portant un bébé
dans son dos (37'40''-42'40'') : créées par des filles du village Hmar
(Taroudannt), Anti Atlas, en 1998 (fig. 124-126, p. 173-176).
12. Osselets d'os (42'40''-43'35'') : utilisés pour des jeux d'adresse mais
souvent remplacés par des pierres.
13. Deux poupées-jeunes mariées (43'35''-47'30'') : une poupée
traditionnelle confectionnée en 1961 par une élève et une poupée en
plastique importée utilisée comme armature pour une poupée-jeune
mariée refaite par une jeune femme en 1992, Marrakech (fig. 115-
117, p. 164-166), et un modèle de maisonnette (fig. 119, p. 168).
14. Planchette à laver servant de jouet, Rabat, 1993 (47'30-48'10'').
15. Deux poupées importées (48'10''-52') : une avec un survêtement
cousu par une fille du village Ignern, Jbel Siroua, Haut Atlas, en
1996 (fig.112, p. 161) et la poupée Little Miss achetée dans un petit
magasin de Taroudannt en 1996 (fig. 123, p. 173).
16. Maison de poupée d'une boîte de carton et poupée jeune mariée en
plastique avec les bras réparés de manière traditionnelle (52'-55') :
créées par une fille de neuf ans du village Zaïda (Midelt) en 1999
(fig. 93-94, p. 147-148).
325
Video: doll and construction play in Sidi Ifni
Rossie, Jean-Pierre & Daoumani, Boubaker (2002). Video 1: Doll Play
and Construction Play in Sidi Ifni, Morocco, 31.1.2002. Filmé par Jean-
Pierre Rossie, Stockholm International Toy Research Centre, Stockholm:
Royal Institute of Technology - Vidéo disponible dans la vidéothèque de
SITREC.
Description détaillée des 19 minutes de jeu de poupée d'une fille de sept
ans et d'un garçon de quatre ans avec des poupées faites par la fille ou
achetées, ainsi que des 26 minutes d'interview par Boubaker Daoumani
avec les joueurs et la mère du garçon. Les poupées représentent des
enfants. Autorisation paternelle donnée sur la vidéo.
Le protocole détaillé de cette vidéo est disponible sur l'Internet :
http://www.sitrec.kth.se
Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14
Poupées-femmes marocaines (p. 194-195).
Video: doll play in Sidi Ifni
Rossie, Jean-Pierre & Daoumani, Boubaker (2002). Video 3: Doll Play
in Sidi Ifni, Morocco, 10.2.2002. Filmé par Jean-Pierre Rossie,
Stockholm International Toy Research Centre, Stockholm: Royal
Institute of Technology. Vidéo, audiocassette et autorisation paternelle
écrite déposées à la vidéothèque de SITREC.
Description détaillée des 39 minutes de jeu de poupée de deux filles de
neuf ans et une fille de six ans avec des poupées Barbie, d'autres poupées
et des objets de jeu. Les poupées représentent des enfants. L'interview de
Boubaker Daoumani avec les joueurs est enregistrée sur audiocassette.
Vidéo et audiocassette déposées à la vidéothèque de SITREC.
326
Le protocole détaillé de cette vidéo deviendra disponible sur l'Internet :
http://www.sitrec.kth.se
Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14
Poupées-femmes marocaines (p. 195-196).
Video: doll and construction play in Lagzira
Rossie, Jean-Pierre & Daoumani, Boubaker (2002). Video 4: Doll Play
and Construction Play in Lagzira (Sidi Ifni), Morocco, 4.3.2002. Filmé
par Jean-Pierre Rossie, Stockholm International Toy Research Centre,
Stockholm: Royal Institute of Technology. Vidéo et audiocassette
disponibles dans la vidéothèque de SITREC.
Description détaillée des 43 minutes de jeu de poupée et de construction
de maison de poupées d'une fille de six ans et de son frère de neuf ans
avec des poupées représentées par des coquillages. Les poupées
représentent une jeune-mariée ou un jeune marié quand ils sont entourés
d'un chiffon de gaze blanc, sinon elles représentent la famille et les
invités. L'interview de Boubaker Daoumani avec les joueurs et le père,
comprenant l'autorisation paternelle, est enregistré sur audiocassette.
Le protocole détaillé de cette vidéo est disponible sur l'Internet :
http://www.sitrec.kth.se
Pour une description des poupées et jeux de poupées voir le chapitre 2.14
Poupées-femmes marocaines (p. 191-193).
327
Annexe 1 :
Schéma de description des jeux et jouets
Ce schéma pour une description détaillée des jeux et jouets a été élaboré
pour faciliter la recherche, non pas comme une analyse exhaustive de
tous leurs aspects. Des remarques et suggestions éventuelles sont les
bienvenues.
1 Nom du jeu (1)
1.1 Nom en langue locale dans l'écriture originale
1.2 Transcription
1.3 Traduction
2 Origine du jeu (2)
2.1 Local, étranger
2.2 Ancien, récent
2.3 Forme récente d'un jeu ancien
3 Joueur(s)
3.1 Nombre de joueurs
3.2 Sexe (3)
3.3 Age (4)
3.4 Education formelle reçue
3.5 Facteur(s) de cooptation (5)
3.6 Structure du groupe de jeu (5)
4 Données spatio-temporelles
4.1 Lieu(x) (à l'intérieur, à l'extérieur; à la campagne, en ville; le relief;
en forêt, en bordure d'une rivière, dans la rue, au terrain de jeu)
4.2 Moments de la journée et/ou de l'année
4.3 Durée de l'activité (6)
4.4 Fréquence (jeu exceptionnel, rare, courant, très populaire)
328
5 Idiomes (7)
5.1 Jeux sans contexte narratif
5.2 Jeux avec contexte narratif (expression corporelle, musicale,
verbale; e.a. gestes spécifiques, terminologie, littérature orale,
chansons)
6 Matériel et jouet(s) utilisés (8)
6.1 Nom des objets (matériel, outil, jouet) (1)
6.2 Origine (9)
6.3 Description du matériel et des outils employés (10)
6.4 Description et fabrication éventuelle du/des jouet/s (10)
6.5 Constructeur(s) (11)
6.6 Utilisateur(s) du/des jouet/s (11)
7 Description de l'activité ludique (12)
7.1 Début de l'activité ludique
7.2 Règles
7.3 Enjeu
7.4 Cours du jeu
7.5 Récompense(s) et/ou pénalité(s)
7.6 Réaction du/des joueur/s et/ou spectateur/s
8 Remarques (13)
9 Données audio-visuelles
Dessin, photo, dia, film, vidéo, son
Remarques
1 Comme la transcription en caractères latins n'est qu'approximative de
la prononciation locale, il est recommandable d'enregistrer les noms
et autres données linguistiques liés à l'activité ludique. A côté d'une
traduction littérale une traduction libre peut être donnée. Cette
traduction libre est basée sur le jeu lui-même ou sur sa ressemblance à
un jeu (européen).
329
2 Il ne s'agit pas de trouver l'origine de l'activité ludique (et du jouet) en
question, une origine qui souvent se perd dans des temps très
lointains mais de savoir si oui on non il s'agit d'une pratique ancienne
(grands-parents ou antérieur) ou récente, locale ou importée.
3 Jeu (jouet) de filles ou de garçons veut seulement dire que le jeu
(jouet) est considéré par la plupart des enfants ou adultes comme
spécifique à l'un ou l'autre sexe mais cela n'exclut pas qu'un enfant de
l'autre sexe se l'approprie occasionnellement. D'autres jeux (jouets)
appartiennent aux deux sexes.
4 Les indications concernant l'âge des joueurs ne sont
qu'approximatives.
5 Les facteurs déterminant la cooptation de joueurs et la structure du
groupe de jeu sont en Afrique du Nord et le Sahara basés sur la
structure résidentielle et familiale. Dès lors, se sont souvent les
enfants de la même famille paternelle ou des voisins qui jouent
ensemble, surtout en milieu rural. Dans les villages urbanisés, les
petites et grandes villes l'importance du lien familial diminue et
l'importance du voisinage, des amitiés et des relations créées à l'école
augmente. L'âge et le sexe comme facteurs de cooptation et de
structure du groupe de jeu devient plus important vers six ans. Pour
analyser la structure du groupe on peut tenir compte de certains
aspects comme un groupe de jeu avec ou sans leader(s) et suiveur(s),
la manière de prendre les décisions (concertation entre les membres,
imposition par un meneur de jeu), comment un joueur est inclus ou
exclus.
6 La durée d'un jeu est difficile à établir car il y a parfois des versions
simplifiées et plus élaborées du même jeu. Cette information ne
donne qu'une idée relative de la durée moyenne d'un jeu car la durée
du même jeu joué à des moments différents ou par des enfants
différents est assez variable.
7 Terminologie, expressions, devinette, proverbes, contes, chansons
utilisés dans le jeu. Si possible les enregistrer car ces données peuvent
aussi être utiles à d'autres chercheurs.
8 Les objets et les jouets font partie de l'activité ludique dans laquelle
ils sont utilisés et ce ne sont donc pas des objets distincts. Même si la
recherche se concentre sur les jouets et le processus de fabrication de
330
jouets une (brève) description du jeu en question ne devrait pas
manquer.
9 En ce qui concerne l'origine d'un jouet une différence peut être faite
entre l'origine du jouet lui-même (créé sur place, fabriqué par une
industrie nationale, importé) et l'origine locale ou étrangère du
modèle qui a inspiré la fabrication du jouet.
10 La description, l'utilisation et le rôle des objets et des jouets utilisés
dans un jeu sont normalement mentionnés dans la description de
l'activité ludique.
11 Quand un enfant ou un adulte (hors du circuit commercial) fabrique
un jouet on mentionnera le sexe, l'âge et la situation sociale du
constructeur, et éventuellement la relation qui existe entre le
constructeur et l'utilisateur.
12 Signaler si la version complète d'un jeu est décrite ou une version
simple. Par exemple il arrive que le même jeu soit joué par des
enfants plus jeunes et des enfants plus âgés mais suivant des versions
différentes.
13 Ici on peut mentionner le rapport éventuel entre le jeu/jouet et
l'environnement physique, économique, social, culturel dans lequel
vivent les joueurs (e.a. le lien avec le lieu de résidence, le mode de
subsistance, les activités économiques, l'organisation familiale, les
coutumes, les rites, les fêtes).
Jean-Pierre Rossie
331
Annexe 2 :
Données autobiographiques
Né le 16 août 1940 dans la ville historique de Gand en Flandre,
Belgique, j‟ai été élevé avec quatre frères plus âgés dans une famille de
classe moyenne. Il est possible que mon intérêt pour les enfants et les
jeunes, déjà présent pendant mes études d‟assistant social, soit en rapport
avec le mouvement scout auquel j‟ai participé d‟abord comme enfant et
adolescent et puis comme chef scout. Un autre centre d‟intérêt déjà
décelable vers mes quinze ans fut l‟Afrique, plus précisément l‟Afrique
Noire. Ainsi je voyais ces études commencées en 1958 comme une
préparation à un engagement dans les services sociaux de ce que l‟on
appelait à ce moment le Congo Belge. L‟indépendance de la République
Démocratique du Congo en 1961, l‟année où j‟ai obtenu mon diplôme, à
mis tout de suite fin à ce projet. Comme je voulais de toute manière
partir en Afrique, j‟écrivis à l‟ambassade de plusieurs pays africains et à
quelques instances internationales. Une des rares réponses fut celle de
l‟UNESCO stipulant cependant qu‟un diplôme universitaire était
indispensable. C‟est cette lettre qui m‟a poussée à commencer des études
à la section d‟ethnologie du département d‟études africaines de
l‟Université d‟Etat de Gand en 1963, l‟année même où le premier de mes
quatre enfants est né. Bien que le professeur supervisant ma dissertation
de fin d‟études m‟a averti d‟un manque d‟informations ethnographiques
sur l‟enfance, j‟étais convaincu du contraire et j‟écrivis en 1986 un
mémoire sur l‟enfance traditionnelle en République Démocratique du
Congo. Néanmoins, ces études culturelles n‟offraient-elles aussi que peu
de possibilités d‟aller en Afrique et ainsi je me suis décidé à essayer
d‟entrer dans la recherche scientifique. J‟ai eu la chance d‟être accepté
par le Fonds National Belge pour la Recherche Scientifique sur base
d‟un projet de recherche sur l‟Islamisation des Royaumes Wolof au
Sénégal. Cependant des problèmes financiers ont mis prématurément fin
en 1969 à mon séjour dans ce pays.
De retour à Gand, j‟ai travaillé comme éducateur de jeunes en
situation problématique pendant deux ans. Pendant cette période j‟ai
commencé à penser continuer mes recherches précédentes sur l‟enfance
332
africaine. Accepté de nouveau comme chercheur par le Fonds National
Belge pour la Recherche Scientifique j‟ai terminé en 1973 la rédaction
de ma thèse de doctorat en néerlandais sur "L‟enfant et la Société. Le
processus de socialisation en Afrique Centrale patrilinéaire". Comme
cette thèse fut basée sur une utilisation extensive de documents, je
ressentais fortement le besoin de faire des recherches sur le terrain. Pour
des raisons d‟ordre familial, financier et politique des recherches en
Afrique Centrale ne me semblaient pas réalisables, dès lors j‟ai demandé
à mon ami et collègue Gilbert JM Claus qui préparait sa thèse de
doctorat sur les semi-nomades Ghrib du Sahara tunisien si je pouvais le
rejoindre. Ayant obtenu son consentement j‟ai proposé à la même
fondation une recherche sur la socialisation de l‟enfant ghrib. Ma
première période de recherche sur le terrain de trois mois a débuté en
mars 1975 et fut suivie par deux autres périodes de trois mois en
automne de la même année et au printemps 1977. C‟est lors de mon
premier séjour chez les Ghrib que j‟ai pris conscience de l‟importance du
jeu d‟enfant et du groupe de jeu non seulement pour obtenir des
informations mais aussi pour faciliter d‟être accepté par les enfants et
leurs familles. Dès cet instant je me suis concentré sur cet aspect de la
culture des enfants ghrib en élaborant une description détaillée de leurs
activités ludiques et de leurs jouets en les illustrant par beaucoup de
diapositives et un peu de tournage de film.
Après ces huit années comme chercheur (1970-1978) il me fallait
orienter ma vie professionnelle. En 1980 j‟ai eu la chance de trouver un
nouveau terrain d‟activités qui me convenait en créant en collaboration
avec un collègue turque le premier service municipal de la Ville de Gand
pour les immigrés turcs et nord-africains. En réponse à ce changement
professionnel le corpus de jeux et jouets des enfants ghrib risquait de
rester inutilisé. C‟est alors que j‟ai commencé à rechercher des données
sur les jeux et jouets d‟enfants dans la bibliographie sur l‟Afrique du
Nord et le Sahara. Cette analyse bibliographique m‟a permis de rédiger
une bibliographie commentée. Visitant le Musée de l‟Homme à Paris en
1982 mon attention fut attirée par quelques jouets d‟enfants touaregs et
nord-africains exposés dans les vitrines. Sachant que dans des musées
anciens les réserves renferment beaucoup plus d‟objets que ce qui est
exposé, j‟ai contacté le département concerné et trouvé dans les réserves
une importante collection de jouets d‟Afrique du Nord et du Sahara
333
s‟étendant sur une période débutant à la fin du dix-neuvième siècle et
allant jusqu‟environ 1960. Avec la permission de Dominique Champault,
responsable du Département d‟Afrique Blanche et du Proche Orient, j‟ai
analyse en détail cette collection pendant mes périodes de vacances.
Au milieu des années 1970 un changement important dans mes
attaches scientifiques s‟est progressivement mis en place. Au début de
mes recherches sur l‟enfance africaine j‟étais lié au domaine des études
africaines et orientales parlant en quelques rares occasions de l‟enfance
en Afrique centrale puis des activités ludiques des enfants ghrib. Me
sentant isolé en raison de mon sujet d‟étude je recherchais d‟autres
contacts. Mon premier essai à surmonter cette isolation était ma
participation au congrès mondial de l‟0MEP, l‟Organisation Mondiale de
l‟Education Préscolaire, à Copenhague en 1975 où j‟ai présenté un
exposé sur "Children in Exceptional Situation in Africa" (Rossie, 1982).
Dans la même année j‟ai donné deux conférences à la Faculté de
Psychologie et des Sciences de l‟Education de l‟Université de Genève,
une sur le même sujet et l‟autre sur la socialisation de l‟enfant en Afrique
centrale. Puis, je suis allé chez Irenäus Eibl-Eibesfeldt de l‟Arbeitsstelle
fur Humanethologie du Max Planck Institut fur Verhaltenswissenschaft à
Percha bei Starnberg près de Munich. Ce professeur m‟a initié à filmer
selon la méthode d‟éthologie humaine ce qui a produit en 1977 un film
inédit d‟environ une heure sur les relations entre enfants et entre enfants
et adultes chez les Ghrib du Sahara tunisien (film déposé à la
vidéothèque de SITREC).
La rencontre avec André Michelet en 1987, à ce moment président de
l‟International Council for Children‟s Play (ICCP), m‟a introduit dans le
monde des jeux et jouets. C‟est au sein de cette association que j‟ai
réellement commencé à discuter de mes résultats de recherches et qu‟il
m‟a été possible de publier en français mon premier livre sur les poupées
et jeux de poupées des enfants sahariens et nord-africains. C‟est aussi
dans le cadre de cette association que j‟ai rencontré Brian Sutton-Smith
qui en 1993 m‟a proposé de devenir un membre fondateur de
l‟International Toy Research Association (ITRA). Lorsque j‟ai rencontré
Krister Svensson en 1996 à l‟occasion du premier International Toy
Research Conference à Halmstad en Suède, j‟ai trouvé enfin un havre
scientifique d‟abord dans le Nordic Center for Research on Toys and
Educational Media (NCFL) de l‟Université de Halmstad et depuis 2002
334
dans le Stockholm International Toy Research Centre (SITREC) du
Royal Institute of Technology à Stockholm. Ce n‟est qu‟avec le soutien
de ces deux centres que j‟ai pu rendre disponible mes données sur
l‟héritage ludique des enfants sahariens et nord-africains. Il n‟y a aucun
doute que ce changement de références scientifiques et de contacts avec
des associations et des chercheurs du domaine des études africaines et de
l‟ethnologie au domaine des études sur l‟enfant et le jeu se reflète
clairement dans mes travaux. Cela a en plus stimulé mes tentatives à lies
héritages ludiques des enfants sahariens et nord-africains aux approches
théoriques et pragmatiques de chercheurs occidentaux et non-
occidentaux s‟intéressant aux jeux et jouets. Par exemple j‟ai prêté
attention à plus d‟un aspect que j‟ai éventuellement développé par après
dans mes publications suite à ma participation à des congrès
thématiques.
En 1990 j‟ai quitté le service social pour les immigrés avec l‟intention
de consacrer mon temps plus directement à la rédaction d‟une série de
livres sur les héritages ludiques des enfants sahariens et nord-africains et
de recommencer des recherches sur le terrain. Cherchant un nouveau
terrain de recherches je choisis le Maroc entre autres parce que je
pouvais à travers mes relations amicales avec une famille marocaine
vivant à Gand entrer en contact avec une parente de cette famille qui
était directrice d‟école primaire à Marrakech. Utilisant l‟argent restant
d‟une deuxième bourse de recherches du Fond National Belge pour la
Recherche Scientifique je fis un séjour de recherches de trois semaines à
Marrakech en février 1992. Les informations obtenues et les contacts
créés aussi bien avec des familles de Marrakech et d‟Imi-n-Tanoute
qu‟avec la Faculté de Lettres et Sciences Humaines de l‟Université Cadi
Ayyad de Marrakech semblaient prometteurs. Dès lors j‟ai décidé de
faire des recherches au Maroc pendant des périodes de plus ou moins
deux mois deux ou trois fois par ans. Sauf pendant l‟année 2001 c‟est ce
qui fut fait. A mon retour à Marrakech en octobre 1992 on m‟a proposé
un rôle de figurant dans un film qui allait se tourner dans les hautes
dunes près de Kénitra. Saisissant cette occasion pour me rapprocher de
Rabat, je me suis installé après cette expérience dans la Medina de
Kénitra pour environ trois ans. Puis, je suis allé à Khemisset et par après
à Midelt. Retournant après une année d‟absence au Maroc en début
2002, je suis allé pour trois mois à Sidi Ifni, une petite ville côtière au
335
sud d‟Agadir, où j‟avais noué quelques contacts superficiels avec des
instituteurs. Visitant un de ces instituteurs dans son école de montagne,
je fus contacté par un instituteur du premier degré, Boubaker Daoumani,
qui m‟exprimait son intérêt pour mes recherches et proposait d‟y
collaborer. De retour à Sidi Ifni pour une nouvelle période de trois mois
à partir d‟octobre de la même année, je me suis installé dans un quartier
populaire situé en flanc de la colline faisant face à l‟Océan Atlantique.
Avançant en âge à toute allure je vois approcher trop vite la fin de mes
activités de recherches et de publication des résultats, une fin que
j‟espère néanmoins encore assez lointaine. Poussé par ce sentiment et en
commentant le livre de Shlomo Ariel (2003) ou en étudiant le livre de
Julie Delalande (2001) et les articles dans le volume édité par Julia
Bishop et Mavis Curtis (2001), tous analysants différents aspects
linguistiques, culturels et sociaux des activités ludiques enfantines, je
regrette parfois devoir constater le peu qu‟offrent mes travaux en
comparaison à tout ce qu‟il est à faire. Néanmoins, je me sens conforté
par l‟idée que tout vient en son temps et qu‟un jour l‟héritage ludique
passé et contemporain des enfants sahariens et nord-africains sera
reconnu d‟importance majeure par les instances scientifiques, culturelles
et éducatives de leurs pays. Si j‟aurais pu y contribuer d‟une manière ou
d‟une autre je me sentirais comblé. Entre-temps je me sens soutenu par
l‟intérêt dont témoignent certains collègues. Pourtant j‟espère qu‟en plus
des savants du domaine des jeux et jouets intègreront dans leurs analyses
et leurs élaborations théoriques l‟information disponible sur les jeux et
jouets des enfants sahariens et nord-africains.
Comme je suis quand même resté un peu assistant social et étant
depuis longtemps un volontaire du Comité de Gand pour l‟UNICEF, j‟ai
voulu trouver des moyens pour rendre mes données, mes photos et ma
collection de jouets provenant de mes recherches sur les enfants
sahariens et nord-africains utile au niveau de l‟action sociale et
pédagogique. Cela m‟a conduit à essayer d‟élaborer ce que j‟aime
appeler une approche ludique de l‟interculturel. Cette préoccupation m‟a
aussi stimulée à monter deux expositions temporaires, une dans le cadre
des écoles communales de Gand (décembre 1982) et une autre dans le
Musée International des Arts Modestes à Sète (novembre 2001 – janvier
2002), ainsi qu‟une exposition permanente de ma collection de jouets des
enfants ghrib au Musée du Jouet à Mechelen en Belgique (1983- ).
336
Pendant la session 2003 de l'Université d'Eté Agadir sur le thème de
l'amazighité et les questions de développement on m'a invité à donner
une conférence sur la culture ludique de l'enfant amazigh marocain et
les questions de développement. Les quelques contactes établies lors de
cette session semblent créer des nouvelles occasions pour une recherche
action au Maroc mais il est certainement beaucoup trop tôt pour savoir si
quelque chose se concrétisera.
337
Index Auteurs
Agiobu-Kemmer, I. S., 245
Archier, L., 54
Ariel, S., 335
ATFALE, 240-243
Ballais, J. L., 33
Balout, L., 83, 89, 272, 276
Béart, Ch., 19, 100-101, 211,
295
Belghiti, M., 203
Belgisch Comité voor Unicef,
25-26
Bellin, P., 19, 39, 66, 96
Bergeret, L., 259-260
Bernard van Leer Foundation,
238-239, 242, 245, 252
Bishop, J. C., 335
Bouma, J., 251
Bouzoubaâ, K., 240, 242-243
Brenier-Estrine, A., 62
Brougère, G., 21, 226-227, 229
Brunot, L., 230
Cabot Briggs, L., 28
Cabrera E. A., 19
Camps, G., 23, 28, 31, 36, 208
Castells, F., 165, 199, 217
Catalogue des collections de
l'Aurès, 33, 113
Centre de Recherches et
d'Etudes sur les Sociétés
Méditerranéennes, 100
Champault, F. D., 15, 19, 30-31,
42, 59, 71, 73-74, 96, 108-
109, 230, 267, 274, 280,
282-283, 333
Claudot-Hawad, H., 24, 90
Claus, G. J. M., 20-21, 24, 41, 96,
231, 295, 332
Cortier, M., 66, 69, 82-83, 86,
89, 198, 210
Curtis, M., 335
Daoumani, B., 42, 81, 182, 188,
192, 194-196, 199-200, 220,
243, 325-326, 335
de Foucauld, Ch., 54, 61, 69,
83-85
Delalande, J., 335
Denis, 54, 63
Dernouny, A., 203
Destaign, E., 116, 120
Doutté, E., 120, 230
Dupuy, A., 207-208, 231
Early Childhood Matters, 251-
252
E-Conflict™ World
Encyclopedia, 25, 27, 29, 36
Eibl-Eibesfeldt, I., 333
El Andaloussi, B., 240-241, 243
El Mostafa, H., 244
Ethnologue: Languages of the
World, 29, 32-33
338
Encyclopédie Berbère, 123, 208
Factor, J., 40
Fates, Y., 239
Ferrarotti, W., 229
Flamand, P., 120, 197, 199, 230
Foley, H., 66, 69, 84, 89, 276
Fuchs, P., 59, 103, 106
Gabus, J., 26, 69, 71-72, 82, 89,
100-101, 231, 276, 279, 294-
295
Gaudry, M., 113, 286
Goichon, A. M., 110-111
Grand Atlas du Continent
Africain, 27
Grange, J., 230
Guichard, 162-163, 298-299
Gupta, A., 246, 250
Hardy, G., 230
Herber, J., 19, 118-120, 230-
231, 286-287, 296
Huughe, G., 112
Ibn Azzuz Hakim, M., 51, 123,
213
International Federation for
Parent Education, 19
Jemma-Gouzon, D., 33, 201
Jensen, J., 228
Jeu et Sports en Méditerranée,
248
Khanna, S., 245-247
Klepzig, F., 19
Komorowski, Z., 23, 25, 28, 31
Kronenberg, A., 29, 106
Laabib, S., 42, 132, 135, 141,
203, 226, 321-322
Lancy, D. F., 237
Laoust, E., 51, 201, 307,
Laoust-Chantréaux, G., 112,
211
Lauras, L., 107, 158, 298
Lebeuf, A. M. D., 61, 293
Le Cœur, Ch., 29, 103, 106, 281
Léonetti, A., 244
Leupen, A., 23
Lhote, H., 66, 71, 82, 84, 90,
264, 270, 272-273, 275-277,
289, 293, 295
Lombard, Ch., 238
Lopatinsky, O., 29, 103, 106,
181
Luwaile Mwamba, B., 238
Lwakatare, E. K., 250
Mahe, A., 32
Mandel, J-J., 62
Manson, M., 225
Mission Scientifique du Maroc,
117, 200
Mouritsen, F., 253
Naseh, A., 199
Nicolas, F., 59, 72, 82, 88
339
Oubahammou, L., 129, 203
Paul, S., 81, 206, 217, 277
Pâques, V., 61, 293
Pinto Cebrián, F., 26, 99, 102
Poupée-Jouet. Poupée-Reflet,
20, 260, 281
Robert, A., 39
Servier, J., 20, 207, 223
Sijelmassi, M., 168
Soulé, 119-120
Steinilber-Oberlin, E., 86
Sterner, B., 321
Sutton-Smith, B., 223, 227, 333
Tillion, G., 112, 114, 285
Tolfree, D., 252
UNICEF, 25-26, 235, 248-249,
255-256, 258, 301, 335
La Vie du Sahara, 23, 25, 29,
55, 80, 85, 97-98, 106, 265
Westermarck, E., 20, 120
Woodhead, M., 252
Zerdoumi, N., 37, 116, 120, 230
341
Index Géographique et Ethnique
Adrar des Iforas, 24, 273, 278
Agadez, 23, 103-104, 106, 265,
273, 277
Agadir, 34, 126, 169, 193, 196,
235, 243, 335-336
Ahaggar, 23-24, 54, 59, 61, 66-
68, 71, 72, 82-84, 89, 96,
209-210, 264, 267, 270-272,
275-276, 289
Aïn Toujdate, 35, 75, 118, 124,
296
Aïr, 24, 56, 66, 82, 89, 273, 277
Aït Hmed ou Yacoub, 35, 41,
75,125, 297, 322
Aït Ighemour, 34, 41, 52-53, 62,
64, 76, 158, 212, 293-294,
298
Aït Merghad, 132, 150
Aït Ouirra, 35, 123, 129, 203
Aït Slimane, 149, 298
Alarsès, 265
Algérie, 20, 22-24, 26-28, 31-33,
36-38, 54, 56, 58-59, 63, 69,
73, 79, 81-82, 96, 102, 109-
112, 116, 120, 195, 209, 223,
230, 239, 264, 266-267, 270,
272-277, 280, 282-286, 289
Amazigh, 15, 22, 24-25, 28-38,
42, 51, 64, 74-76, 79, 101,
111-112, 116, 120, 125-127,
129-130, 132, 150-151, 154,
158, 160, 162, 169-170, 192,
195-196, 198, 202-203, 212-
213, 235-236, 244, 336
Anti-Atlas, 34-34, 51-52, 117,
124, 126, 177, 181-189, 201,
324
Arabe, 15, 22, 24-26, 28-30, 33-
38, 42, 111, 119-120, 163,
195, 206-208, 240, 276, 284,
291
Arabo-Berbère, 22, 28-29, 34,
36, 75, 132
Assa, 26-27
Aurès, 33, 37, 112-113, 284-285
Bardaï, 29, 104, 281
Belbala, 10, 22, 30-31, 52, 73-
74, 79, 82, 96, 107, 219, 223,
280, 282-283, 296
Beni Snous, 79, 116
Berbère, voir Amazigh
Boutilimit, 82, 101
Casablanca, 200-201
Chaamba, 22, 28, 30, 52, 73-74,
274, 294
Chaouia, 22, 33, 79, 81, 112-
113, 209, 211, 284-286, 290,
296
Chott l-Djerid, 24-25
Djanet, 52, 265-266, 273, 277
Djerba, 208
El Faouar, 25
El Khemis, 34, 139, 162, 213
El Ksiba, 35, 203
El Ouata, 109, 283
Erg er Raoui, 28, 30
Erg Iguidi, 27
Ergoub, 35, 181, 324
Errachidia, 34-35, 130, 150
Essaouira, 41, 76, 158, 199
342
Fès, 35-36, 117, 119-121, 124,
286, 288
Gand, 41, 201, 255, 258, 301,
331-332, 334-335
Ghadames, 23
Ghardaïa, 31, 110-111, 284
Ghât, 24, 86, 265, 277
Ghomara, 51-52, 117, 123
Ghrib, 4, 10, 20-22, 24-26, 41,
52-54, 56, 59, 63, 72-74, 79,
81-82, 92, 94-96, 101, 108,
218-219, 223, 227, 231-232,
255, 258, 293-295, 316, 332-
333, 335
Guelmim, 77
Goulmima, 34-35, 41, 75, 117,
124, 149-151, 154, 243, 322-
323
Haut Atlas, 34, 64, 76, 117, 124,
126, 149, 321-324
Hmar, 34, 41, 75, 173-174, 198,
212, 299, 324
Ighrem-n-Cherif, 34, 42, 154,
298, 323
Ignern, 34, 42, 148, 160-161,
298, 322-324
Imi-n-Tanoute, 34-35, 41, 75,
117, 124, 169-170, 198, 212,
232, 299, 324, 334
Imou Ergen, 35, 42, 177, 181,
299-300, 324
In Amedgel, 270, 275-276
Jbel Ayachi, 35, 126, 130, 132,
145, 321-322, 324
Jbel Siroua, 34, 76, 124, 158,
322-324
Juifs du Sud du Maroc, 117, 123-
124, 197, 199
Kénitra, 241, 243, 301, 334
Khemisset, 35, 41, 75, 111, 124-
127, 2243, 322, 334
Khouribga, 36, 117, 200
Kidal, 87, 273-274, 278
Ksar Assaka, 35, 42, 75, 132,
135, 139, 141, 144, 203, 226,
297, 321-322, 324
Ksar Hasni Biad, 34, 42, 154,
224, 298, 324
Lagzira, 42, 192, 301, 317, 326
Lahfart, 35, 42, 182-184, 186-
188, 212, 300
Libye, 23-24, 54, 82, 86, 210,
265, 277
Magaman, 34, 42, 75, 151, 289,
322
Mali, 23-24, 61-62, 66, 69, 82,
87, 210, 273, 278
Maroc, 4, 9, 11, 20-27, 30, 34,
36, 38, 41-42, 51-53, 59, 74-
76, 79, 81-82, 116-206, 209,
212-213, 217-220, 223, 226,
229-232, 235, 239-245, 252,
257-258, 267-268, 286-288,
296-301, 321-336, 334, 336
Marrakech, 34-36, 41, 75, 117,
120, 123-124, 162-166, 168-
169, 199, 201, 212, 241, 243,
298-299, 334
Maures, 22, 25-26, 52-54, 58-62,
71, 79, 81-82, , 96-100, 101-
102, 108, 209, 211, 267-269,
278-279, 289, 293-295
343
Mauritanie, 25-27, 62-63, 71, 82,
96, 101, 211, 231, 268, 278
Merzouga, 34, 117, 124, 154,
157, 224, 298,
Midelt, 35, 41, 75, 117, 124,
126, 128, 130, 132-147, 154,
203, 243, 321-322, 324, 334
Mopti, 23, 52, 62
Moulay Idriss, 117, 119, 121
Moyen Atlas, 35, 117, 120, 124,
127, 129-130, 142, 198, 202-
203, 209, 321
Mozabites, Mzab, 11, 22, 31, 79,
81-82, 110-111, 217-219,
223, 284, 296
Niger, 23-25, 52, 56, 56, 59, 61-
62, 66, 72, 82, 88, 265-266,
273, 277
Nouakchott, 25, 101, 231
Oualata, 25-26, 52-53, , 60, 62,
71-72, 81, 99-101, 231, 268-
269, 279
Ouargla, 28, 80
Ouarzazate, 34, 64, 76-77, 117,
150, 158, 162, 169, 199
Oulad ben Sbaa, 35, 199
Oulad Yahya, 34, 75, 172-173,
198, 212
Oulmès, 35, 127, 297
Pré-Sahara marocain, 158, 323
Rabat, 36, 51, 117, 120, 165,
240, 287, 324, 334
Regeybat, 22, 27-28, 52-54, 63,
79, 81, 102, 108, 280
Rhergo, 52, 61-62
Sahara Nord-occidental, 27, 30,
59-62, 73, 102, 107, 109, 267-
268, 274, 280, 282-283
Sahara Occidental, 25-27
Sahraoui, 20, 22, 26-27, 79, 102
Saoura (Vallée de la), 22, 30-31,
52-54, 59, 79-81, 109, 218,
267, 283, 293, 296
Sénégal, 25-26, 101, 331
Settat, 117, 200-201
She°ba, 35, 42, 130, 297
Sidi Ifni, 35, 42, 117, 124-126,
177, 181-182, 191-195, 199-
200, 212, 220-221, 243, 325-
326, 334-335
Tabenatout, 35, 42, 146, 297
Tafraoute, 35, 181-182, 200, 324
Tagant, 278-279
Tahoua, 59, 88
Taliouine, 34, 148, 160, 322
Talat (Aïr), 266
Tamanrasset, 56, 287, 292, 296,
309
Tanger, 120, 201
Taroudannt, 34-35, 41, 75, 117,
124, 126, 160, 172-173, 198,
209, 212, 299, 324
Tassili n'Ajjer, 24, 82, 90, 266
Tataouine, 35, 42, 145-146, 297
Tazenakht, 34, 76, 158-160
Tchad, 29, 59, 103, 280
Teda, 22, 29, 52-54, 58-59, 79,
81, 103-106, 108, 280-282,
295-296
Tibesti, 29, 59, 103, 106, 280-
281
Tidjikdja, 25, 96, 99, 209-211,
278-279
Tombouctou, 89
344
Tiris (région de), 27
Tizal, 34, 139, 162, 213
Tlemcen, 79, 116, 120, 2
Touareg, 22-26, 52-56, 61, 66-
68, 72, 79, 81-90, 96, 209-
210, 264-267, 269-278, 281,
289, 293-295, 301, 332
Tunisie, 4, 10, 20, 22, 24-25, 36,
54, 56, 63, 72-79, 81-82, 92,
203, 205-207, 219, 227, 231,
248, 255, 257, 287, 301, 332-
333
Zaïda, 35, 141, 147, 220, 297-
298, 324