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Fedor Dostoievsky

Crime et châtiment

Tout ce qu’il faut savoir sur Crime et châtiment de Dostoïevsky ! Retrouvez l’essentiel de l’œuvre dans une fiche de lecture complète et détaillée, avec un résumé, une étude des personnages, des clés de lecture et des pistes de réflexion.

Rédigée de manière claire et accessible, la fiche de lecture propose d’abord un résumé chapitre par chapitre du roman, puis s’intéresse tout particulièrement à Raskolnikov, un anti-conformiste qui voit sa vie et ses idéaux bouleversés suite à un meurtre, sans oublier les autres personnages : Sonia, Petrovitch, Razoumikhine, etc. On étudie ensuite la signification du titre, Crime et châtiment, puis la société russe du XIXe siècle, avant de commenter la thématique du salut par la foi. Enfin, les pistes de réflexion, sous forme de questions, vous permettront d’aller plus loin dans votre étude.

Une analyse littéraire de référence pour mieux lire et comprendre le livre !

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ISBN 978-2-8062-1267-2

SOMMAIRE

1. RÉSUMÉ 4

2. ÉTUDE DES PERSONNAGES 6RaskolnikovSoniaPorphyre PetrovitchRazoumikhineDounia

3. CLÉS DE LECTURE 8Crime et châtiment, un titre expliciteUn tableau de la société russe du XIXe siècleLa thématique du salut par la foi

4. PISTES DE RÉFLEXION 10

5. INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES 11

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CRIME ET CHÂTIMENTFÉDOR DOSTOÏEVSKI

Rédigée par Catherine Nelissen, maitre en langues et littératures françaises et romanes (Université libre de Bruxelles)

Fédor Dostoïevski est né à Moscou en 1821. Considéré comme l’un des plus grands romanciers russes, il a marqué les esprits par ses réflexions métaphysiques et son engagement patriotique.

Ses œuvres les plus connues ont été publiées en Europe durant une période d’exil due à sa fréquentation des cercles progressistes russes. Crime et châtiment (1866) et L’Idiot (1868) ont ainsi ouvert la phase de maturité de l’auteur. Dostoïevski a été célébré à son retour en Russie en 1871. Son dernier roman, Les Frères Karamazov (1880), est paru quelques mois avant son décès à Saint-Pétersbourg en 1881.

UNE TORTURE PSYCHOLOGIQUE COMME CHÂTIMENT DU CRIMEPublié en 1866, Crime et châtiment est un des romans les plus connus de Dostoïevski. Il raconte l’histoire de Raskolnikov, jeune étudiant fauché qui assassine une vieille prêteuse sur gages et sa sœur pour sauver sa famille de la misère. La souffrance psychologique qui assaille alors le jeune homme est une thématique chère à l’auteur. Elle trouve dans ce long roman l’une de ses plus belles expressions.

Dans Crime et châtiment, Dostoïevski développe ses vues religieuses et existentialistes en insistant sur le thème du salut par la foi. Le style complexe et novateur du roman sert à l’analyse profonde de la psychologie humaine.

• Né à Moscou en 1821, décédé en 1881 à Saint-Pétersbourg• Écrivain russe• Quelques-unes de ses œuvres :Crime et châtiment (1866), romanL’Idiot (1868), romanLes Frères Karamazov (1880), roman

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1. RÉSUMÉ

Première partie

Dans la seconde moitié du XIXe siècle, Rodion Raskolnikov, jeune étudiant russe qui, par manque d’argent, a dû abandonner ses études, erre sans but dans les rues de Saint Pétersbourg. Il envisage de tuer une vieille usurière dans le but de la voler et d’utiliser l’argent dérobé à de meilleures fins. Convaincu d’être un surhomme isolé du commun des mortels grâce à ses qualités extraordinaires, Raskolnikov est persuadé d’avoir le droit d’enfreindre les lois pour servir des idéaux qu’il juge nobles. Pourtant, il ne cesse de s’interroger : ce crime qu’il tend à commettre sera-t-il vraiment l’œuvre du bien ou sera-t-il perçu comme mal ? Le jeune homme se décide néanmoins à aller jusqu’au bout. Une lettre envoyée par sa mère l’y pousse : elle lui apprend que sa sœur Dounia a décidé de se marier avec Loujine, homme riche mais odieux, afin de lui venir en aide. Raskolnikov, bouleversé par cette nouvelle, se rend un soir chez la vieille prêteuse sur gages. Celle-ci, qui connait le jeune homme pour lui avoir déjà prêté de l’argent, ne se méfie pas et le laisse entrer. Raskolnikov sort alors une hache et frappe sans hésiter. Mais un fait imprévu se produit : la demi-sœur de la vieille dame arrive inopinément. L’étudiant paniqué se jette sur cette dernière et la tue à son tour. Complètement affolé, il se lance à la recherche de son butin. Toute raison l’abandonne : il œuvre sans méthode et bourre ses poches de tout ce qu’il trouve jusqu’à ce qu’il entende frapper à la porte. Deux hommes attendent sur le palier. Il décide alors de pousser le verrou. Les inconnus s’interrogent et, quand ils descendent demander de l’aide, Raskolnikov en profite pour s’échapper.

Deuxième partie

De retour chez lui, Raskolnikov, épuisé nerveusement, s’endort immédiatement. Lorsqu’il se réveille, il pense d’abord devenir fou. Tout a été trop loin : sa deuxième victime n’aurait jamais dû mourir. Son obsession est alors de faire disparaitre toutes les preuves de son crime : sans savoir comment s’y prendre et sans parvenir à réfléchir, il tente de dissimuler ses vêtements tachés de sang et les objets dérobés.

Nastassia, la servante de la maison où il loge, lui apprend qu’il est convoqué au commissariat de police. Effrayé, il se rend à ce qu’il pense être son jugement. Son soulagement est immense quand il apprend qu’il n’est question que de ses dettes envers sa logeuse. Pourtant, sa conscience le ronge : ne devrait-il pas tout avouer ? Lorsque les policiers se mettent à parler du double meurtre, il s’évanouit. Revenu à lui, il se rend chez son ami Razoumikhine, puis rentre chez lui où il tombe dans une sorte de comma fiévreux. Nastassia et Razoumikhine le veillent jusqu’à son rétablissement. Ayant repris ses esprits, il apprend qu’un peintre qui travaillait dans l’immeuble de la vieille le soir du meurtre a été arrêté. Un peu plus tard, Razoumikhine lui révèle que le juge d’instruction Porphyre Petrovitch souhaite le voir.

Troisième partie

Toujours en convalescence, Raskolnikov reçoit la visite de sa mère et de sa sœur. Il se montre froid à leur égard et souligne qu’il ne veut pas du mariage de Dounia avec Loujine. Razoumikhine, quant à lui, tombe sous le charme de Dounia. Alors que tous sont réunis chez Raskolnikov, Sonia, la fille prostituée de Marméladov, un homme dont le jeune étudiant s’était rapproché peu auparavant, fait son entrée. Elle vient suite à la mort de son père pour convier Raskolnikov à l’enterrement. Celui-ci fait preuve d’une prévenance à l’égard de Sonia qui intrigue sa mère et sa sœur. Toutes prennent ensuite congé. Raskolnikov parle alors à Razoumikhine de l’entretien qu’il doit avoir avec Petrovitch : ils décident de se rendre sans tarder chez celui-ci. Le juge d’instruction mène alors un interrogatoire déguisé, poussant Raskolnikov à la faute. Mais celui-ci ne se laisse pas prendre.

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Quatrième partie

Le lendemain, Svidrigaïlov, ancien maitre de Dounia qui avait fait des propositions malhonnêtes à la jeune femme, débarque dans la chambre de Raskolnikov. Il demande à ce dernier de dire à sa sœur qu’il désire lui donner une importante somme d’argent pour se faire pardonner ses erreurs passées. Il se retire alors et cède la place à Loujine, Dounia et sa mère. Loujine, qui a appris l’arrivée à Saint Pétersbourg de Svidrigaïlov, met Dounia en garde. Raskolnikov leur confie alors la visite de Svidrigaïlov et le souhait qu’il a formulé. Loujine se met en colère et il est prié de quitter les lieux. Dounia accepte le don de son ancien patron et pense retourner avec sa mère à la campagne. Mais Razoumikhine lui demande de rester pour monter avec lui et Raskolnikov une affaire consistant à traduire et éditer des livres. L’idée est approuvée par tous et Raskolnikov confie sa mère et sa sœur à son ami. Il se rend ensuite chez Sonia pour la questionner sur sa foi en Dieu. Elle lui répond avec une piété qui le touche. Il décide alors de lui avouer son crime quand il sera prêt. Il va ensuite chez Petrovitch pour un nouvel interrogatoire. Le juge d’instruction est sûr de la culpabilité de Raskolnikov : un témoin l’a vu entrer chez la vieille. Mais un coup de théâtre se produit : Nicolas, un des deux peintres qui travaillaient ce soir-là dans l’immeuble de la vieille, annonce être l’assassin dans le but de sauver son ami inculpé.

Cinquième partie

Un jour plus tard, a lieu l’enterrement de Marmeladov. Loujine, furieux d’avoir été éconduit par Dounia, décide de s’en prendre à Sonia, connaissant le lien qui l’unit à Raskolnikov. Il se rend chez elle pour soi-disant lui offrir de l’argent. Mais, lors de sa visite, il dissimule habilement un billet de cent roubles dans la robe de la jeune femme. Lors du repas en l’honneur du défunt, il réapparait pour traiter Sonia de voleuse devant tous les invités. Raskolnikov se rend alors chez sa jeune amie humiliée. Il lui avoue son crime et la supplie de ne jamais le quitter. Bien qu’effrayée par l’acte commis par l’homme qu’elle aime, Sonia lui promet de l’accompagner dans sa souffrance. Ils sont alors interrompus par un homme leur annonçant que la belle-mère de Sonia est devenue folle et est sur le point de mourir. Ils se rendent à son chevet et assistent à son décès. Svidrigaïlov arrive pour proposer une aide financière à Sonia. Il apprend ensuite à Raskolnikov qu’il est le voisin de cette dernière et qu’il a entendu toute leur conversation : il sait qu’il est coupable de meurtre.

Sixième partie

Raskolnikov a l’esprit torturé. Il redoute la condamnation autant qu’il y aspire. Petrovitch annonce franchement à Raskolnikov qu’il le sait coupable. Il lui demande de se dénoncer afin que celui-ci trouve le repos. Le jeune homme se rend alors chez Svidrigaïlov pour savoir s’il compte révéler à Petrovitch ce qu’il a entendu la veille. Mais ce n’est pas là son intention. Il a en effet gardé l’espoir d’un rapprochement avec Dounia et, lorsqu’il la rencontre un peu plus tard, c’est à elle qu’il apprend que Raskolnikov est un assassin. Désespérée, elle sort une arme et menace Svidrigaïlov avant de s’enfuir. Celui-ci comprend qu’il n’obtiendra jamais l’affection de la jeune femme et se suicide. Dounia, quant à elle, se rend chez son frère qui lui fait ses adieux. Il va ensuite voir Sonia avant d’aller se dénoncer au commissariat.

Épilogue

Après neuf mois de détention en Sibérie, Raskolnikov se trouve grandement affaibli. La cour, ayant tenu compte de son état et de ses aveux, l’a condamné à huit ans de travaux forcés. Sonia l’a suivi en Sibérie et lui rend régulièrement visite en prison. Raskolnikov lui déclare son amour et retrouve la foi. À partir de cet instant, commence sa régénération.

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2. ÉTUDE DES PERSONNAGES

Raskolnikov

Le personnage principal du roman est un jeune homme de vingt-quatre ans qui, faute d’argent, a dû abandonner ses études. Issu de la campagne, il vit seul à Saint-Pétersbourg où il entretient une réputation de sombre fierté et d’insensibilité. Son ami Razoumikhine le décrit ainsi :

Il a toujours été sombre, morose, fier et hautain (…). Il n’aime pas révéler ses sentiments et préfère blesser les gens que se montrer expansif. Parfois, il est tout simplement froid et insensible au point d’en sembler inhumain (…). On le croirait toujours pressé et tout le monde le dérange et cependant il reste couché à ne rien faire (…). Il a une très haute opinion de lui-même et non sans raison, je crois. (III, 2)

Raskolnikov est un anti-conformiste : il se considère comme un surhomme ayant le droit de transgresser les lois. Pour un idéal de justice, il n’hésite pas à tuer une vieille usurière et la sœur de celle-ci, croyant ainsi aider les pauvres gens forcés de remettre à la vieille dame leurs objets précieux en échange de quelques pièces. Mais, une fois l’acte commis, Raskolnikov croit devenir fou tant il se sent coupable. Il se remet alors en question et fait preuve d’humilité en avouant sa faute. Exilé en Sibérie, il devient le contraire de ce qu’il pensait être : de sa prétention d’être un surhomme, il passe à la conviction de n’être qu’un homme ordinaire soumis aux lois communes. Rabaissé par tous, il se tourne vers Dieu. Sa foi envers Lui et son amour pour Sonia, jeune prostituée, entrainent sa renaissance et sa rédemption.

Sonia

C’est une jeune fille de dix-huit ans qui se prostitue pour subvenir aux besoins de sa famille. Malgré son déshonneur, son âme demeure pure. C’est elle qui pousse Raskolnikov à se dénoncer au juge d’instruction. Tombée amoureuse du jeune homme, elle n’hésite pas à accompagner ce dernier en Sibérie, convaincue que le salut de leur âme ne pourra se réaliser que dans la souffrance. Profondément pieuse, Sonia est aimée de tous au camp sibérien où on la considère comme une sorte de sainte :

Lorsqu’elle venait voir Raskolnikov en train de travailler parmi ses compagnons ou qu’elle rencontrait un groupe de prisonniers se rendant à l’ouvrage, tous ôtaient leurs bonnets et la saluaient. « Chère Sofia Sémionovna, tu es notre mère douce et secourable », disaient ces galériens, ces êtres grossiers et endurcis à la frêle petite créature. (Épilogue, 2)

Porphyre Petrovitch

Petrovitch est le juge d’instruction chargé du meurtre de l’usurière et de sa sœur. Rapidement convaincu de la culpabilité de Raskolnikov, il essaye en vain de faire avouer ce-dernier. Il multiplie ainsi les allusions au crime durant ses discussions avec le jeune homme, tentant de le pousser à bout. Raskolnikov craint ainsi Petrovitch autant qu’il le hait (« Le plus terrible pour lui était de se retrouver de nouveau en présence de cet homme : il le haïssait au-delà de toute mesure, et il craignait même de se trahir par sa haine », IV, 5).

Le juge d’instruction s’arme de patience et préfère jouer au chat et à la souris, et provoquer Raskolnikov plutôt que de le faire arrêter et de l’attaquer directement. Sa connaissance de la psychologie humaine est son meilleur atout. D’ailleurs, il pousse l’audace jusqu’à exprimer sa tactique à Raskolnikov même :

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Et si je laisse mon présumé coupable tranquille, si je ne le fais pas arrêter, si je ne l’inquiète pas, il sait néanmoins à toute heure, à toute minute, ou il soupçonne, que je suis au courant de tout, que je le surveille nuit et jour, que je ne le perds pas de vue ; il a conscience d’être suspect, et infailliblement il sera pris de vertige, et ma parole, il viendra lui-même chez moi (…). (VI, 5)

Razoumikhine

Seul ami de Raskolnikov, Razoumikhine est sans doute le personnage le plus positif du roman. Dostoïevski le décrit en ces termes :

C’était un garçon d’une gaieté débordante et extrêmement sociable, bon jusqu’à la simplicité. Du reste, cette simplicité dissimulait de la profondeur et de la dignité. Les plus intelligents de ses camarades le comprenaient, tous l’aimaient. (…) Ce qu’il y avait encore de remarquable chez Razoumikhine, c’était que le découragement n’avait pas prise sur lui, et que jamais il ne se laissait abattre par aucun revers. (I, 4)

Serviable, le jeune homme vient en aide non seulement à Raskolnikov, mais aussi à sa mère et à sa sœur. Il gagne pauvrement sa vie en tant que traducteur et finit par épouser Dounia, la sœur de son ami, dont il tombe amoureux dès leur première rencontre.

Dounia

Elle est la sœur de Raskolnikov. Entièrement dévouée à ce dernier, elle n’hésite pas à accepter, au début du roman, la demande en mariage de Loujine, un homme riche qu’elle n’aime absolument pas, afin d’aider financièrement son frère.

Dounia vend ainsi son corps pour secourir sa famille. Femme forte et extraordinairement belle, elle travaillait auparavant comme gouvernante afin de payer les dettes de sa mère et de Raskolnikov. Elle endurait alors les avances grossières de son maitre. Un grand courage et un immense dévouement la caractérisent tout au long du récit. Elle épouse finalement Razoumikhine.

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3. CLÉS DE LECTURE

Crime et châtiment, un titre explicite

En intitulant son roman Crime et châtiment, Dostoïevski donne au lecteur la clé de son œuvre. Le sujet du roman peut en effet être résumé par ces mots dramatiques : la première partie du livre raconte la préparation et l’exécution du crime par Raskolnikov, et les cinq parties suivantes font état de la torture psychologique que subit le jeune homme suite au meurtre.

Il faut savoir que la thématique de la punition morale est devenue une obsession pour Dostoïevski suite au meurtre de son père par ses serviteurs. Durant ses quatre années passées au bagne, l’auteur a pu s’intéresser de près à la psychologie des criminels. Dans Crime et châtiment, il livre ses observations sur l’état d’esprit complexe des malfrats. La brièveté et la facilité du crime se trouve ainsi suivie d’une longue période de souffrance morale sur laquelle l’écrivain s’attarde :

• L’accent est clairement mis par l’auteur sur le châtiment dans le but de souligner la portée morale de l’œuvre : alors que le crime est exécuté par Raskolnikov avec rapidité et détachement (Première partie du roman), le châtiment constitue un poids très lourd à porter (Parties 2 à 6).

• Dostoïevski insiste sur les différences qui existent entre « l’avant meurtre » et « l’après meurtre ». À l’esprit méthodique et rationnel du début, fait place un sentiment de culpabilité qui ne connait pas de limites et qui porte Raskolnikov vers la folie. Aux raisonnements brefs et pointilleux (« Les préparatifs étaient simples d’ailleurs ; ils ne demandaient pas beaucoup de temps. Il s’efforçait de penser à tout, de ne rien oublier. Il fallait avant tout préparer un nœud coulant, le coudre au pardessus, affaire d’une minute », I, 6), succède un labyrinthe de questions nerveuses et d’actes insensés rapportés par l’auteur sur des pages entières :

« Comment ai-je pu me rendormir alors que rien n’est fait ? Bien sûr le nœud coulant y est toujours ! Avoir oublié cela ! Une telle pièce à conviction ! ». Il arracha la chevillière et la réduisit en petits morceaux qu’il fourra sous l’oreiller avec son linge. « Des chiffons de toile ne peuvent en aucun cas éveiller des soupçons ; à ce qu’il me semble, du moins à ce qu’il me semble ! » répétait-il (…). (II, 1)

Le lien entre le crime et la punition est clairement établi par l’écrivain : le meurtre est omniprésent dans la tête du personnage et c’est en cela que consiste le châtiment principal.

• Le méfait engendre inévitablement la condamnation. La soudaineté avec laquelle le châtiment se révèle à la suite du meurtre est ainsi mise en évidence par Raskolnikov même : « La conviction que tout, même la mémoire, même la plus élémentaire faculté de raisonnement l’abandonnait, le tourmentait cruellement. «Quoi ! Est-ce déjà le châtiment qui commence ? Oui, oui, c’est bien ça !» » (II, 1).

• Le châtiment est total, à la fois physique, psychologique et légal : fièvre, folie, paranoïa et bagne s’additionnent dans ce roman pour punir Raskolnikov.

• Les personnages secondaires coupables de méfaits sont également châtiés : par exemple, Svidrigaïlov, ancien maitre de Dounia qui avait tenté de mettre la jeune fille dans son lit et qui a empoisonné sa propre femme, connait le délire avant de se suicider.

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Un tableau de la société russe du XIXe siècle

Dostoïevski s’est beaucoup intéressé à la vie politique et sociale de la Russie. Son engagement socialiste, sa condamnation au bagne et à l’exil, son poste de rédacteur au sein de revues politiques en sont les preuves les plus flagrantes. Dans Crime et châtiment, l’auteur illustre de nombreuses réalités de son époque :

• La misère qui touchait le peuple russe du XIXe siècle est ainsi rendue au travers de nombreuses images. Elle se fait sentir dès les premières lignes du récit. Raskolnikov est présenté comme un jeune homme aux allures de clochard sous-louant une « petite chambre située sous les combles d’un immeuble (…), qui ressemblait plus à un placard qu’à une habitation » (I, 1), dans les bas-quartiers de Saint-Pétersbourg ainsi décrits :

Dans la rue, la chaleur était étouffante. La cohue, partout de la chaux, des échafaudages, de la brique, de la poussière, et ces puanteurs particulières à l’été que connaît bien tout Pétersbourgeois n’ayant pas les moyens de louer une campagne. (I, 1)

• L’alcoolisme, phénomène social important dans la Russie miséreuse de cette époque, trouve de nombreuses illustrations dans le roman. Le problème est introduit par l’auteur au deuxième chapitre du récit par l’intermédiaire de Marmeladov, un père de famille incapable de nourrir les siens qui se réfugie dans la boisson : « Monsieur, commença-t-il, presque solennel, la pauvreté n’est pas un vice, cela est vrai. Je sais que l’ivrognerie n’est pas davantage une vertu, et c’est tant pis. Dans la pauvreté, vous conservez encore la noblesse innée de vos sentiments ; jamais dans la misère. » (I, 2)

• La prostitution touche un grand nombre de femmes de l’époque. Dostoïevski fait ainsi de son personnage féminin principal une prostituée : Sonia n’a d’autres moyens pour faire vivre sa famille que de vendre son corps.

La thématique du salut par la foi

Tout au long du récit, Dostoïevski montre qu’il désire avant tout ramener Raskolnikov sur le droit chemin. Celui-ci, dans l’esprit de l’auteur, n’est autre que celui de la foi dans laquelle chacun peut trouver le pardon et la rédemption. L’écrivain utilise alors Sonia comme guide et lumière pour le jeune criminel. La jeune femme, très pieuse, intrigue Raskolnikov par son rapport à la religion. Le jeune homme trouve en elle une pureté qu’il envie plus que tout. Un lien très fort se révèle alors entre le meurtrier et la douce prostituée. L’évolution de Raskolnikov vers la foi se réalise aux côtés de Sonia :

• Sonia lit à Raskolnikov le récit de la Résurrection de Lazare dans la Bible d’une de ses victimes. Il s’agit d’une révélation pour l’ex-étudiant : « Je suis la Résurrection et la vie. Celui qui croit en moi, fut-il mort, vivra. » (IV, 4)

• Raskolnikov se remet alors en question. Lorsqu’il revient chez Sonia après une longue réflexion, elle lui offre une croix de cyprès. Il s’exclame alors : « C’est donc le symbole de ce que j’accepte de porter la croix, hé hé ! Comme si d’aujourd’hui seulement je commençais à souffrir ! La croix de cyprès, c’est celle des petites gens (…). » (VI, 7) Lui qui se prenait pour un surhomme retombe dans la masse populaire. La prise de conscience est énorme.

• Sonia recommande à Raskolnikov d’avouer son crime au peuple et de lui demander pardon : « Va au carrefour, salue le peuple, baise la terre que tu as souillée par ton péché, et dis tout haut, à la face du monde : Je suis un assassin ! » (VI, 7) Raskolnikov s’exécute avant d’aller avouer sa faute au juge d’instruction.

• La délivrance a lieu en Sibérie. L’amour qui unit les deux jeunes gens sauve Raskolnikov : « C’était l’amour qui les ressuscitait. Le cœur de l’un enfermait une source de vie inépuisable pour l’autre. (…) Ils avaient sept ans de Sibérie à faire (…) Mais Raskolnikov était régénéré, il le savait ; il le sentait de tout son être. » (Épilogue, 2)

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4. PISTES DE RÉFLEXION

Quelques questions pour approfondir sa réflexion…

• Plusieurs sortes de châtiments entrent en jeu dans le récit : classez-les suivant leur degré d’intensité et leurs rapports de dépendance (tel type de châtiment entraine tel autre), et justifiez votre classement.

• Citez trois éléments qui poussent Raskolnikov à commettre son crime.

• Dans la première partie du roman, Raskolnikov fait un rêve symbolique : il revoit une jument qu’un ivrogne avait battue à mort lorsqu’il était jeune. Quelles réalités sociales ce rêve reflète-t-il ?

• Expliquez la théorie sur laquelle se fonde Raskolnikov pour exécuter son crime. De quel philosophe Dostoïevski la tient-il ?

• Citez deux genres littéraires auxquels Crime et châtiment se rattache et expliquez.

• À quel personnage historique le jeune meurtrier se compare-t-il ? Quel est le but de cette comparaison ?

• En quoi Raskolnikov constitue-t-il un « antihéros » ?

• Commentez cette déclaration faite par Raskolnikov :

Je n’ai pas tué un être humain, mais un principe ; oui, le principe, je l’ai bien tué, mais je n’ai pas su accomplir le saut. Je suis resté en deçà… Je n’ai su que tuer. (III, 6)

• Raskolnikov est un être empli de contradictions : développez cette affirmation en vous appuyant sur des exemples.

• À quel autre roman de Dostoïevski Crime et châtiment fait-il penser (concentrez-vous sur le comportement et les idéaux du personnage principal) ?

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5. INFORMATIONS COMPLÉMENTAIRES

Édition de référence

• Dostoïevski Fedor, Crime et châtiment, éd. André Markowicz, Paris, Actes Sud, « Thesaurus » 1996.

Études de référence

• Jean Perrot, « Crime et châtiment », Dostoïevski, Paris , Hatier, « Profil d’une œuvre », 1970.

• Jean-Louis Backès, « Crime et châtiment » de Fedor Dostoïevski, Paris, Gallimard, « Foliothèque », 1995.

Adaptations

• Crime et châtiment, pièce mise en scène par Robert Hossein, avec Francis Huster et Mélanie Thierry, octobre 2001, Théâtre Marigny, Paris.

• Crime et châtiment (1956), film réalisé par Georges Lampin, avec Jean Gabin et Robert Hossein.

• Crime et châtiment (1971), téléfilm de Stellio Lorenzi.

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