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SommaireRevue de presse 4

30 jours 5

Courriers/témoignages 6

Actualités 8• Lycées/collèges en grève mardi 7 décembre• Loi d’orientation : deux cents collègues en forum

à Marseille• Où en est l’unité syndicale ?• Remplacement : réquisitionner les profs ?• Suppression des heures de TPE en Terminale• Salaires : refus gouvernemental de négocier• Hors-classe : des reculs qui ne font pas le compte

Débat/opinion 14• Autorité contre autoritarisme :– François de Singly– Miguel Benasayag

Eco/social 16• Que sont devenus les emplois-jeunes ?• Les nouveaux travaux du

Conseil d’Orientation des Retraites• Europe : libéralisme à tout va

Dossier 19• Soutien scolaire : réduction

ou accroissement des inégalités?

Métier 28• Septième Rendez-vous de l’Histoire de Blois• Mathématique en L

19

L’Université Syndicaliste, hebdomadaire du Syndicat national des enseignements de second degré (SNES, 1, rue de Courty,75341 Paris Cedex 07. Tél standard : 01 40 63 29 00). Directeur de la publication : Gérard Anthéaume, tél. 01 42 80 91 04. Rédacteurs en chef : Serge Chatelain et Alexis Chabot. Secrétaire de direction : Thérèse Bara. Collaborateurs permanents : NicolasBeniès, Fabrice Giovanazzi, Claudie Martens. Responsable publicité : Clotilde Poitevin, tél. : 05 65 11 00 79. Photocompositionet photogravure : C.A.G. Imprimerie : RPN, Livry-Gargan (93). C. P. N° 0108 S 06386. I.S.S.N. N° 0751-5839. Dépôt légal àparution. Conception : Voltaire & Associés, 15, rue de la Banque, 75002 Paris. Prix du numéro : 1,30 €. Abonnement : 1) Personnelsde l’Éducation nationale : France 26 € ; étranger et DOM-TOM : 40 €. 2) Autres, France : 37 € ; étranger : 51 €.

Publicité : MGEN (2), MAIF (18), GMF (31), UNCME (47), ZIG-ZAG (47), Microsoft (48), unencart volant les restos du cœur france métropolitaine. Photo de Une : Daniel Maunoury.Pour s’ informer et donner son avis : Mél : [email protected], Internet :http://www.snes.edu

DIFFUSIONCONTROLEDIFFUSIONCONTROLE

2 0 0 2

Fenêtre sur L’IRHSES : entretien avec

son président Alain Dalançon

10 Actualité :Lycées/collègesen grève mardi 7 décembreDossier

Soutien scolaireRéduction ou accroissementdes inégalités ?

• Sciences au collège : les thèmes deconvergence?

• STG : la rénovation entre dans sa dernière phase

Catégo 30• Évaluation et notation des fonctionnaires• Régime de « retraite additionnelle

de la fonction publique »

Fenêtre sur 32• L’IRHSES : entretien avec

son président Alain Dalançon

International 34• 51e session de la Conférence des ministres

de l’Éducation des pays ayant le françaisen partage

• Allemagne : réforme(s) après l’électrochocde l’enquête PISA

Culture 36• Livres-revues• Cinéma/Théâtre/Spectacles/Expositions• Multimédia

Débat 42• La FSU doit-elle accepter la demande d’adhésion

de syndicats de l’enseignement privé?

Entretien 44• Le « socle commun» :– Pierre-André Périssol :Une idée porteuse

de progrès– Jean-Yves Rochex : Une logique de renoncement

32

ÉditoEn grèvePas à pas le ministère rogne ce qu’il peutpartout où il le peut : il tente de remettre en cause l’accès à la hors-classe, de modifierle système de mutations, de grignoter les options, là où elles existent encore, et les dédoublements, notamment en languesvivantes. Il supprime brutalement les TPEen Terminale, sans évaluation du dispositif, des acquis des élèves, au mépris de l’engagement important des collègues et des établissements.Dans notre secteur comme dans les autres,ce gouvernement s’applique avec méthode àrevenir sur les acquis concernant les carrières,refuse de négocier sur les salaires, réduitle nombre de fonctionnaires d’État, développela précarité, s’attaque aux services publicsde proximité, privatise les dernières grandesentreprises publiques.Si les considérations budgétaires sontune des explications données, elles ne sontqu’un élément des choix gouvernementaux.Ce gouvernement sert les intérêts des plusnantis au détriment des plus démunis, choisit de réduire la fiscalité des grosses fortunes et d’abandonner les services publics.Ce n’est pas le plan Borloo qui permettra de reconstruire du lien social là où lesinégalités économiques, sociales,territoriales se creusent.C’est dans ce contexte, qu’à peu de frais, le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, lancesa nouvelle réforme de l’école et s’exprimeavec son ministre de l’Éducation pourdévelopper l’idéologie du don et des talentspour construire l’école de demain. Un socle des indispensables réduit pour ceux qui ont des « talents » manuels, cela s’appelleune école ségrégative ! Nous avions cruenterrer ces vieilles idées réactionnaires quiconduisent à enfermer les jeunes des milieuxpopulaires et à les priver de tout espoir depromotion sociale. Il en va de même lorsque parcirculaire le ministre Fillon restaure lespunitions collectives confondant autorité etautoritarisme. Toutes les occasions sont bonnespourvu qu’elles ne coûtent rien, voireéconomisent, pour rassurer ceux qui, faceà la dégradation réelle des conditions de vie,de travail, face à la peur de l’avenir, souhaitentle retour « aux bonnes vieilles méthodes ».Or, en matière de progrès social, d’autorité,de pédagogie, c’est en faisant confiance auxpersonnels, en stabilisant les statuts, les équipes,en affirmant des objectifs ambitieux pour laNation, en permettant la construction de valeurspartagées, que l’on transformera l’école pourl’avenir de la société et non en la tournantvers un passé à jamais révolu.

C’est pour unenouvelle politiqued’éducation que nousferons grève, dansun premier temps,le 7 décembre.

Gisèle Jeancosecrétairegénérale

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4 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

REVUE DE PRESSESOCIÉTÉ

L’inégalité se porte bien

La réforme des retraites de 2003 commence à faire sentir ses effets.Et le réveil s’annonce douloureux pour un certain nombre de

femmes. Le constat est unanime. Pour la plupart des observa-teurs, loin de réduire les inégalités qui existent dans ce domaine –la retraite des femmes est en moyenne inférieure de moitié à celledes hommes –, la réforme Fillon contribue pour certaines d’entreelles à les accentuer. Après la polémique sur la réforme des pen-sions de réversion dont le décret a été provisoirement suspendu parle gouvernement, ce sont les femmes fonctionnaires qui se mobi-lisent contre la suppression de la bonification d’un an par enfant,entérinée par la loi. [...] Alors les femmes seraient-elle les premièresvictimes de la dernière réforme des retraites ? Tout le laisse àpenser, même si les conséquences sont encore difficiles à évaluerprécisément. Une étude inédite de l’INSEE fondée sur des simu-lations. [...] apporte un début de réponse. Selon leurs auteurs, si laréforme de 1993 (qui a porté de 37,5 ans à 40 ans la durée de coti-sation et calculé le montant des retraites sur les vingt-cinq meilleuresannées au lieu de dix) a nettement désavantagé les femmes, entraî-nant pour certaines générations une baisse de 13 % de leurs pen-sions, les effets de la réforme de 2003 sont moins nets. Globale-ment faible, son impact cacherait cependant d’énormes disparités.[...] « La réforme de 2003 va surtout accroître les disparités au seindes femmes entre celles qui ont des carrières complètes avec desniveaux de pensions élevés et celles qui ont travaillé à temps par-tiel ou ont connu des périodes d’interruption », commente undes auteurs de l’étude. Ce que dénoncent à l’unisson les unionsconfédérales de retraités. [...]

27 octobre 2004

Les femmes, grandes perdantesde la réforme des retraites

1er octobre 2004

CHÔMAGE ET RMIEN PLEINE CROISSANCELa croissance est là. Pourtantle chômage augmente toujours :+ 0,5 % en août. Cela représente2 453 100 demandeurs d’emploi,22 % de plus qu’il y a un an.On objectera qu’il avait baisséde 0,5 % en juillet et que lesstatistiques d’un mois d’été sontpeu significatives [...] Mais les faitssont là : le chômage ne baisse pas.Plus grave : le nombre de chômeursde longue durée, ceux qui sontinscrits depuis plus d’un an àl’ANPE, a augmenté plus viteencore : + 0,2 % en un mois,+ 2,5 % en un an. Et une étudepubliée mercredi par la DREES(Service statistique du ministère dela Santé et de la Protection sociale)montre qu’entre le 1er juillet 2003et le 30 juin 2004, le nombred’allocataires du RMI a explosé :+ 10,5 %. Au début de l’été, ilsétaient 1 039 300 (en données CVS)à vivre avec moins de 418 eurospar mois. Un record absolu depuisla création de cette allocationpar Michel Rocard en 1989 [...]

14 octobre 2004

LE PREMIER MINISTREFAIT DE LA RÉFORMEDE L’ÉCOLE L’UNE DESTROIS PRIORITÉS DE 2005« La réforme de l’école », avec « labaisse du chômage » et « la luttecontre la vie chère », est une des« trois priorités du contrat France2005 » qui sera présenté d’ici à lafin de l’année, a annoncé le Premierministre, mardi 12 octobre, àl’occasion de la remise du rapportde la commission du débat nationalsur l’avenir de l’école, présidée parClaude Thélot. [...] La nouvelle loine sera pas seulement une loid’orientation mais aussi « une loide programmation », a-t-il précisé,c’est-à-dire avec un engagementfinancier correspondant auxobjectifs définis. Toutefois lesdifficultés de l’école, dont lesrésultats stagnent, ne viennent pas du manque de moyens, selonM. Raffarin. Le budget de l’éducationnationale, premier budget del’État, a augmenté de 23 % en dixans alors que le nombre d’élèvesa baissé de 500 000. [...]

16 octobre 2004

VIOLENCES SCOLAIRES :LES CHIFFRESQUI DÉRANGENTAu cours de la période scolaire2003-2004, quelque 81 366 actesde violence ont été signalés dansle second degré, ce qui représenteune augmentation de 12 % parrapport à l’année précédente,mais une stagnation par rapport àl’année 2001. Une hausse qui a étéplus sensible lors de périodes biendéterminées, comme en janvier-février et en mai-juin. Toutefois,mesurée sur l’année scolaire strictosensu – en écartant donc la périoepeu significative des vacances dejuillet et août –, l’augmentationest de 10 %. Parmi les actes ayantconnu les plus fortes hausses,trois retiennent particulièrementl’attention : les violences physiquesà caractères sexuel (+ 26 %), lestentatives de suicide (+ 27 %), lesinfractions liées aux stupéfiants(consommation + 25 %, et trafic+ 19 %). Cela étant, ces actesne représentent que 6 % du totaldes signalements. [...]

25 octobre 2004

L’ENSEIGNEMENT PUBLICÀ PARIS, MACHINE À EXCLUREParis, capitale des inégalitésscolaires. Ce que chacunpressentait est confirmé par unrapport confidentiel de l’Inspectiongénérale de l’Éducation nationale.[...] En 120 pages, ce rapportdésosse méthodiquement unevéritable machine à exclure les plusfaibles. Paris ne se contente pasd’être incapable de résorber lesinégalités sociales de départ : illes creuse. Si « 40 % des effectifssont issus des classes sociales lesplus défavorisées », Paris n’estpas épargné par les défis : le tauxde chômage ou de bénéficiaires duRMI y est supérieur à la moyennenationale ; l’académie accueilleautant d’élèves non francophonesprimo-arrivants que celle de Créteil.Par ailleurs, aux inégalités quirègnent entre les arrondissementsdu centre et de l’ouest (Ve, VIe, VIIe,VIIIe, XVIe et XVIIe) et ceux du nord-est (Xe, XIe, XVIIIe, XIXe et XXe)s’ajoutent les inégalités internes àquasiment tous les arrondissements.

Le dessin du mois

Le Canard enchaîné du 17 novembre 2004

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 5

Mémoire. Cinquante ans après, l’Algérie commémore le débutde sa guerre d’indépendance.

1ER

nov.

Déconstruction. Décès du philosophe françaisJacques Derrida.

10oct.

Droits de l’homme. Jacques Chirac achèveson périple économique en Chine.

12oct.

Deuxième chance. Ouverture du procès en appeld’Alain Juppé, devant la cour d’appel de Versailles.

13oct.

Démocratie. La Polynésie française connaît le plus grandrassemblement de son histoire, pour la dissolution de l’Assembléelocale et la convocation de nouvelles élections.

16oct.

Bourbier. Neuf soldats français sont tuéspar l’aviation ivoirienne.

6nov.

Paix. L’armée américaine lance une offensive massivesur la cité sunnite de Fallouja.

7nov.

Distribution des prix. Le prix Medicis revient à MarieNimier pour La Reine du silence, le Renaudot à Irène Némirovski,morte en déportation à Auschwitz, pour son roman Suite française.

8nov.

L’Europe, l’Europe, l’Europe ! Le Parti socialistedébat en librairie sur le sort de la Constitution européenne.

9nov.

Yasser Arafat est mort.11nov.

Dur, dur... Condoleezza Rice est nommée secrétaire d’Étataprès la démission de Colin Powell.

16nov.

Bush repetita.2

nov.

30 JOURS

L’autre voix de l’Autriche. Elfriede Jelinek,prix Nobel de littérature.

7oct.

Bible. Le rapport de Michel Camdessus, ancien présidentdu FMI, dénonce le « déficit de travail » en France et proposed’« assouplir les règles sociales »...

19oct.

Irak. Deux mois de détention pour les otages français,Christian Chesnot et Georges Malbrunot, et leur chauffeur syrien.

20oct.

Social. Le gouvernement réforme l’impôt sur la fortune (ISF)à la baisse.

23oct.

Iconoclaste. Nicolas Sarkozy prône l’intégration de l’islamdans la République et souhaite une réforme de la loi de 1905.

27oct.

Alarme. À la SNCF, un protocole d’accord signé par la CGTmet en place un système d’«alarme sociale» visant à déclencherdes négociations sans dépôt d’un préavis de grève.

28oct.

PALESTINE

Un peuple en deuilDepuis le 11 novembre 2004, le peuple palestinien

est en deuil. Yasser Arafat, le président de l’Autoritépalestinienne, le signataire, avec Yitzhak Rabin,des accords d’Oslo, est décédé. En mai dernier,une délégation de la FSU avait pu le rencontrer ets’entretenir avec lui à la Mouqataa.Pendant plusieurs dizaines d’années, il a porté l’espoirde la création d’un État palestinien viable et souverain,conformément aux résolutions internationales, aux côtésde l’État d’Israël.La fin des violences dans cette région du monde,la construction de la paix restent plus que jamais liéesau respect de ces résolutions. Françoise Dumont De la sardine aux TPE

Quand on est Marseillais d’ori-gine et élevé dans le culte dela sardine qui aurait bouché le

Vieux-Port, on croit s’y connaîtreen exagération. La réalité tendantrégulièrement au dépassement de cegenre de fiction, on reste pourtantbouche bée devant la façon dont leministère justifie la suppression desTPE en Terminale : ainsi « 95 % »des heures seraient consacrées au« bachotage » !Alors quoi ? Quelle hallucinationcollective a donc poussé des milliersde lycéens à présenter au bac uneépreuve à laquelle ils n’auraient pasété préparés ? Serait-ce pour mas-quer leur turpitude que les profsont si bien noté ces mêmes candi-dats ? Et quel aveuglement saisit lavénérable inspection générale quicroit pouvoir écrire que les TPEfonctionnent ?Après avoir finement examiné cha-cune de ces hypothèses, on estcontraint, comme spécialiste de laquestion, d’affirmer que l’exagéra-

tion ministérielle susmentionnée nedoit rien au genre épique mais toutau souci d’habiller la suppressionde 72 heures de cours pour cha-que Terminale de série générale.Réponse à ceux qui doutaient encorede ce qu’un budget misérable nepouvait passer que par une réductionde l’offre de formation.J’ai connu (au moins) un ministrequi utilisait systématiquement lechiffre bidonné, le mépris et la miseen accusation des enseignants. Lemoins qu’on puisse dire est quecela ne lui a valu l’estime de per-sonne. Écrivant ce billet à la veillede l’intervention télévisée duministre, j’espère que FrançoisFillon, qui dispose de 100 minutespour nous convaincre, saura en uti-liser 5 pour nous dire que ce chiffrea été lancé à l’insu de son pleingré. Il lui en restera toujours 95pour nous proposer une bonne loid’orientation… (Mais ceci est uneautre histoire.)

Fabrice Giovanazzi

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6 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

DEBATCourriers

ÉCLATEMENT DES TERRITOIRESCet Atlas des nouvelles fracturessociales deviendra vite un outil indispensable.La décentralisation aveugle est indirecte-ment mise en cause. Elle provoque une miseen concurrence des territoires et un éclate-ment social. Un processus de ghettoïsation està l’œuvre. On peut dire que la question des ter-ritoires dissimule une profonde crise socialeque le sous-titre synthétise et que les carteset graphiques illustrent, « Les classesmoyennes oubliées et précarisées ».

• Christophe Guilluy et Christophe Noyé, Éditions Autrement.

« Ma mère est morte »L. Lauvernay, 42110 Jas

En ce jour des vingt ans de la disparition de FrançoisTruffaut, je me souviens de cette réplique d’Antoinedans Les quatre cents coups, fournie en guise

d’excuse à son professeur pour justifier de son absence :« Ma mère est morte ».

Antonia est morte le dimanche 3 octobre 2004, en find’après-midi, à l’âge de 90 ans. Le lendemain, sa petite-fillene s’est pas rendue à son lycée, pour exercer sa missionde professeur ; elle a choisi de consacrer sa journée à soutenirsa propre mère, à réaliser les premières formalités et à veillersur la dépouille.Sa chef d’établissement a accordé à cette professeur, jamaisabsente (il est des approximations qui suffisent à exprimerla vérité), une autorisation d’absence.Sous condition de récupérer les heures perdues.

Au terme de l’instruction n° 7 du 23 mars 1950, le décèsd’un proche n’offre pour le fonctionnaire que la possibilitéde bénéficier d’autorisation facultative d’absence, « simplemesure de bienveillance » prise par le chef de service,« seul juge quant à l’opportunité ».Ainsi, le fonctionnaire doit notamment demander la permissionde s’absenter pour le décès de :• ses parents ;• son conjoint ;• ou de ses enfants.Pour un fonctionnaire, « ma grand-mère est morte » n’est pasune excuse entièrement suffisante pour autoriser son absence.« Ma mère est morte » (ou mon « épouse », ou mon « fils »)peut, éventuellement, permettre une telle autorisation (quin’est pas un droit, tel qu’il l’est pour les salariés selon l’articleL.226-1 du Code du travail).

Ainsi, apaisé en mon moral (au masculin) par les textes,j’ai donc prévenu ma mère que je ne pouvais lui promettred’être présent à son propre enterrement.En effet, en tant que fonctionnaire consciencieux, je ne puisêtre du parti d’Antigone.Je garde les poings serrés, emplis de toute la terre que jene jetterai pas.

Fonction publique

Ne tirez plus sur le pianiste !M. D.

Il y a environ quinze jours, au cours du battage médiatique qui aentouré le rapport Thélot, j’ai eu le plaisir d’apprendre que les pro-fesseurs de ma classe d’âge, c’est-à-dire les vieux, étaient trop idéa-

listes (lisez de gauche) et ne se mettaient pas suffisamment au niveaudes élèves (lisez pas assez démagogues). Les jeunes, les nouveaux,allaient transformer l’école sur de saines bases, car ils sont plus prag-matiques (lisez sans doute plus libéraux) et prennent les élèves à leurniveau (mutation génétique exceptionnelle dans l’histoire de l’ensei-gnement). Ainsi, on essaie de diviser la profession entre jeunes etvieux, suivant le procédé bien connu de diviser pour mieux régner, alorsque dans un cas comme dans l’autre, jeunes, pardon, juniors et vieux,pardon, seniors, sont dans l’affaire l’objet de jugements insultants.J’avais digéré la bonne nouvelle, j’étais bonne à jeter, lorsqu’un vilaindémon me poussa à lire Le Monde du 22/10/2004: « Faut-il rendre l’an-glais obligatoire à l’école? ». Comme d’habitude, la page comprenaitdeux articles, un grand aux allures objectives et un plus petit où l’onmaniait les citations à grand renfort de guillemets. On s’interrogeait surla baisse du niveau des élèves français en anglais par rapport à d’autrespays européens. Pourquoi le niveau des élèves avait-il baissé? Leministère de s’interroger, l’inspection générale d’anglais d’être perplexe,les groupes d’évaluation d’évaluer. Mais, ma brave dame, ce sont les pro-fesseurs! Ils enseignent la grammaire en français et les élèves sontinhibés! Les bras me tombent. Avec l’encadrement rigide, tant au

Médias

« Corsisation des emplois »dans le secondaireY. B., Champigny-sur-Marne

Néo-recrutés

Je suis Corse (je n’y suis pourrien) et enseignante (je l’aichoisi).

Au mois d’août, en vacances dansma famille, en Corse, j’ai pu suivre,abondamment relayé par les mé-dias locaux, le feuilleton quasi-quotidien des néo-recrutés issusde l’IUFM de Corse. Consternant !Consternant de la part d’ensei-gnants et, n’en déplaise au S3d’Ajaccio, refuser de quitter la Cor-se, refuser de rejoindre son pre-mier poste sur le continent, n’estpas une banale affaire syndicale.

Aux côtés du recteur, le préfet,par lettre ouverte, leur a rappeléleurs obligations, du concours na-tional à l’affectation nationale.La « corsisation des emplois »portée par le STC (Syndicat destravailleurs corses) est une déri-ve dangereuse, pour la Corse elle-même ne serait-ce que par le fortrepli communautaire qu’elle vainduire, à l’encontre du brassagequi reste source de diversité et derichesse. En tout état de cause,cela mérite clarification de la partde mon syndicat.

LES NOURRITURES TERRESTRESOn lit dans la dernière livraison de la revue Enseignement catho-lique-actualités (n° 287, octobre 2004) que la direction de l’en-seignement catholique organisera en décembre 2004 des assisessur le thème : « Faire grandir la personne dans le monde d’au-jourd’hui ». Un projet dont nul ne peut douter du caractère spiri-tuel.Mais « faire grandir » l’élève, c’est aussi assurer sa croissance, etdonc le nourrir. Est-ce pour cela que cette revue contient unepleine page de publicité intitulée «Lettre ouverte de Sodexho Éta-blissements d’Enseignement, Grand Partenaire des Assises 2004de l’Enseignement Catholique » ? Le trust de la restaurationrapide, qui y vante ses mérites et propose ses services, apparaîtcomme un pieux donateur pour permettre le financement desditesassises.Au-delà de l’abus des majuscules (est-ce pour Lui?), voyons là unetriste évolution pour une institution vénérable qui, à d’autresépoques, n’avait pas besoin de s’associer aux marchands dutemple pour multiplier les pains. Francis Berguin

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 7

niveau des programmes que la manière d’enseigner, on se demande com-ment certains professeurs ont réussi à faire de la grammaire en classe.Mais trêve de plaisanteries! Les années 1996-2002 correspondent audébut du lycée « light » dont nous n’avons pas encore mesuré leseffets. Des heures d’enseignement supprimées, en particulier en langues,et les épreuves orales de langue au bac supprimées dans la quasi-tota-lité des sections. Voilà la cause. Il aurait suffi que Le Monde pose la ques-tion à des enseignants du second cycle et cela aurait peut-être évité qu’en-core une fois on tire sur le pianiste.

Ben Laden président?A. C., Paris

États-Unis

Secrètement, politiques et journalistes rêvaient tant de la victoirede John Kerry qu’ils finirent par la juger possible, et puis bientôtla plus probable des issues. Dépassée la déception des résultats,

on peut légitimement se demander : qui a été élu? Est-ce le réducteurd’impôts pour gens aisés? Est-ce le pourfendeur de l’avortement, lechantre de la peine de mort? Le contempteur du protocole de Kyoto?Ce serait le même alors que le petit garçon à George Bush (le vrai, le Père)qui avait pourtant, il y a quatre ans, récolté des millions de voix de moinsque ce 2 novembre, et même quelques milliers de suffrages de moins queson rival démocrate... Ce n’est donc pas ce Bush-là, toujours aussi inféodéau lobby industriel et pétrolier, qui a « mérité » tant de voix le 2 novembre.Les impôts, le système de santé, l’environnement n’y ont rien fait : lesAméricains ont voté, bien malgré eux, selon les vœux d’Ousama BenLaden – et peut-être même pour lui. De même, d’ailleurs, que celui-ciavait implicitement appelé à voter pour G. W. Bush par le seul effet desa réapparition caverneuse quatre jours avant le scrutin. Bush ne serait rien sans Ben Laden. Et si la réciproque n’est pas toutà fait vraie (la politique extérieure des États-Unis encourage depuis long-temps les plus détestables de ses ennemis), Bush a été d’une grande aidepour le terrorisme international, ne serait-ce que par l’invasion del’Irak et le soutien inconditionnel à la politique de Sharon.Et puis, surtout, Bush a besoin de cet ennemi rêvé, et de même BenLaden ne peut espérer meilleur porte-voix à sa rhétorique fanatique quecette administration américaine. Toute posture guerrière, toute prétentionà incarner « le Bien », tout appel aux plus basses des passions humaines– et avant tout à la peur, dimension essentielle et méconnue de lapolitique – exigent un diable. Chacun a trouvé le sien et le besoin infan-tile de protection des uns, de détestation des autres, s’est si bienexprimé que le spectre de la peur est finalement le seul vainqueur: BenLaden préside, lui aussi, à la destinée des États-Unis.

L’AVEYRON À TRAVERS SES PEINTRESExposition de tableaux de Marie-Claude Cavagnac, Michel Cure,Henri Duffourg, Pierre Fournel, Gérard Fournier, François Galibert,René Loviat et Michel Valentin.Du 10 au 15 décembre 2004, mairie du 7e arrondissement, 116, ruede Grenelle, Paris, de 8 h 30 à 17 heures en semaine, de 9 heuresà 12 heures le samedi (fermé le dimanche).

DE BOUCHE À OREILLESUn DVD autour de rencontres avec des musiciensqui savent rendre accessibles à tout public lesœuvres qu’ils interprètent ou qu’ils ont composées.Des séquences très variées sont proposées autourde trois thématiques : « les matériaux de la mu-sique », « la musique se construit » et « la musiquese donne ». Des mondes sonores très divers sontexplorés: de Marc Perrone, à Ravel en passant par

Aperghis, Boulez ou Arthur H.Le livret d’accompagnement propose une documentation sur les ex-traits musicaux, les compositeurs et les interprètes. Des pistes d’uti-lisation pédagogique sont suggérées. Édité par le SCEREN-CNDP.

« Psychologues : les risques du métierdans une société libérale ?

Quels repères et quels contre-feux ? »25 et 26 novembre 2004

COLLOQUE SNES

Eurosites - 144/146, avenue du Président-Wilson, 93210 La Plaine-Saint-Denis (métro : Porte de la Chapelle ou RER B : Grand Stade)

Au Théâtre de Nesle

LES ANNÉESSAINT-GERMAIN

Avec la complicité de Roland Romanellià l’accordéon et de Raoul Duflot aupiano, Corinne Cousin revient à sespremières amours : la chanson. Se pro-

menant deVian à Préverten passant parLes FrèresJ a c q u e s ,Q u e n e a u ,Ferré, Gains-

bourg, Mouloudji, Trenet... elle nousoffre un voyage en musique à travers leSaint-Germain des Prés de l’après-guerre et nous entraîne avec générositéet pétulance dans un univers de bonne humeur communicative. C’estdrôle, plein de poésie, tendrement nostalgique. On en sort le cœur léger.• Tous les lundis à 21 heures, 8, rue de Nesle, 75006 Paris. M° Odéonet Pont-Neuf.

Renseignements : 01 46 34 61 04Une place achetée (15€) =

1 place offerte sur présentation de L’US

élèves. Malgré tout, je pense que le solde est positif mais qu’il pourrait l’êtrebien davantage avec des évolutions significatives dans les domaines quej’ai indiqués. Cela supposerait que le ministère mette tout le mondeautour d’une table, que quelques moyens soient débloqués ou... que nouspuissions être suffisamment forts pour le contraindre à le faire !

Un solde positifG. O., Fontenay-sous-Bois

Pratiquant les TPE depuis qu’ils existent et même avant puisque j’aifait partie de ceux qui les ont « expérimentés », je suis bien obligé deconstater que les élèves réclament, à juste titre, un encadrement (car

dans TPE, il y a «E») que je suis incapable de leur donner. En effet, cetteannée, par exemple, avec 31 élèves de Terminale et 9 groupes de TPE,nous ne pouvons, ma collègue d’histoire-géo et moi, que leur consacrerenviron 10 minutes (par groupe) chaque semaine. Quand il faut discuterd’un plan, par exemple, ou du résultat d’une recherche, cela devientmission « bâclée ». Certes, on finit par s’en tirer, en consacrant parfoisquelques heures de cours aux TPE (après on a quelques difficultés à ter-miner les programmes), ou en faisant gratuitement quelques HS (mais ilne faut pas le dire)... Il y aurait également beaucoup de choses à dire surl’évaluation ainsi que sur le choix des thèmes qui sont souvent d’une pré-tention inversement proportionnelle à ce que peuvent réellement faire les

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ACTUALITES

8 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

LES RAISONS DE LA GRÈVE

FORUM DE MARSEILLEUN CONGRÈS EXTRAORDINAIRE DE MOBILISATION

Le 12 novembre, le SNES Aix-Marseille a organisé le pre-mier des cinq forums de la

campagne nationale sur la loid’orientation. La forme retenuea été celle d’un congrès extraor-dinaire de débat et de mobilisa-tion. Pari réussi : près de 200 col-lègues présents, qui ont expriméun accord général sur l’analysede la situation, mais aussi sur lanécessité de l’action.Le second degré est particulière-ment dans la ligne de mire desattaques : il est trop démocratique,trop cher. Le projet gouvernemen-tal est de l’adapter à une société deplus en plus inégalitaire.Le SNES se positionne pour uneécole démocratique, qui bousculeles inégalités sociales et qui inter-pelle le monde du travail. Le rap-port Thélot et ses zélateurs vou-draient qu’elle se calque sur desemplois non-qualifiés, etd’ailleurs sous-payés, qui reste-raient l’horizon indépassable.Développer l’apprentissage et l’al-ternance, détricoter le canevas desformations technologiques et pro-fessionnelles, restreindre les pour-suites d’études, cela permettraittout à la fois de renforcer le rôle

en cours au niveau de la fonctionpublique.La loi d’orientation va donner uncadre institutionnel à des régres-sions déjà à l’œuvre. Nous ne pou-vons plus différer le recours à l’ac-tion, sous peine de voir se dégradermaintenant ce qui fait notre quoti-

dien et le cœur de notre métier.Le Congrès académique s’estdonc prononcé pour le recours àla grève nationale dans l’Éduca-tion dès le mois de décembre, etpour la participation à une mani-festation interprofessionnellerégionale le 18 novembre. Lasituation nécessite un plan d’ac-tion continu jusqu’au vote de laloi, mais aussi des élargissementsrapides de l’action au niveau de lafonction publique. Et pourquoipas au niveau interprofessionnel :il est grand temps que les salariésmettent un coup d’arrêt auxattaques incessantes de ce gou-vernement réactionnaire.

S3 Aix Marseille (17/11/04)

LYCÉES ET COLLÈGES : LE SNES APPELL

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FORUM DE ROUENdu mercredi 15 décembre 2004

Il se tiendra de 14 h 30 à 18 h 30 à la Maison de l’Université, sur le cam-pus universitaire de Mont-Saint-Aignan.Thème : Besoins en qualifications et formation initiale.• Première table ronde : Quels besoins en qualifications ?Participants : un sociologue, un chercheur du CEREQ, un industriel, ledirecteur de l’OREF.• Deuxième table ronde: Quelles demandes pour la formation initiale?Participants : syndicalistes, universitaires, parents d’élèves.• Conclusion : par Gisèle Jean, cosecrétaire générale du SNES.

du patronat dans la formation desjeunes, de réduire les coûts dusystème éducatif, mais aussi defaire taire pour longtemps toutevelléité d’émancipation.Le recentrage de la scolarité obli-gatoire sur un socle limité au pluspetit dénominateur communcache mal le retour d’un Collègedu tri social.Pour arriver à ses fins, le gouver-nement doit au préalable atomiseret soumettre le corps enseignant.L’individualisation des carrières,l’accroissement des pouvoirs deshiérarchies locales sur nos muta-tions, sur nos promotions, mon-trent que cette politique est déjà àl’œuvre. L’absence de reconnais-sance salariale du travail accom-pli en est un signe supplémen-taire, tout comme les évolutions

Dès la mi-octobre le bureaunational du SNES avait indi-qué que le recours à la grève

lui semblait indispensable d’icidécembre.Dans sa politique de remise encause des services publics et deréduction du nombre des fonction-naires, l’Éducation nationale estune cible privilégiée. Sur 1,2 millionde fonctionnaires, 800000 sont eneffet enseignants. Le gouvernementa sauté sur le prétexte de la baissedes effectifs en lycées et collègespour s’acharner, depuis deux ans,contre les enseignants de seconddegré et leurs personnels, et prendredes mesures qui vont bien au-delàde la prise en compte de la baissedémographique.

• 20 000 postes d’enseignants sontou vont être supprimés en quatreans. Ce qui signifie: classes char-gées, suppressions d’options,notamment en LV, suppressionsd’enseignements technologiqueset professionnels, d’enseigne-ments de soutien. Le ministèreentend maintenant supprimer les2 heures de TPE en Terminale. • Suppression de 30 000 postesd’encadrement éducatif (sur-veillants, aides-éducateurs, assis-tants d’éducation).• Déficit de 5 à 10000 recrute-ments pour assurer le maintiende l’encadrement pédagogiqueaux rentrées 2005 et 2006.• Chômage de 5 à 10 000 non-titulaires alors que le ministère

incite les recteurs à recourir mas-sivement au système des vaca-tions.• Modifications de fond des pro-cédures concernant le mouvementdes personnels et les promotionshors classe qui, en accentuant lerôle des hiérarchies locales,remettent en cause l’équité pourles personnels et les principes quiassurent l’égale qualité du ser-vice public sur tout le territoire.Contrairement aux engagementspris depuis 89, ce ne serait plus lagrande majorité qui pourrait accé-der à l’échelon terminal de lahors-classe.• À quelques jours des premièresannonces sur la loi d’orientation,le Premier Ministre donne sa lec-

ture du rapport Thélot et du soclecommun : l’objectif de qualifica-tion pour tous est ramené au «cer-tificat des savoirs fondamentaux»;la volonté de construire des par-cours personnalisés pour, d’unepart, « les gens qui ont des facili-tés » et, d’autre part, « les gensqui ont des difficultés», conduit àla reconstitution de filières ségré-gatives dès la 5e. Quant à F. Fillonil envisage de « réquisitionner»

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 9

LE SNES ET LA DÉMARCHE UNITAIRE

L E À LA GRÈVE LE MARDI 7 DÉCEMBRE

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7décembre: l’UNATOS (agents),le SNUEP (lycées profession-nels), le SNETAP (enseignementagricole), le SNICS (infir-mières). Le SNASUB et leSNEP doivent se prononcer dansles jours qui viennent, commedevrait aussi le faire l’UNSEN-CGT et sa fédération.Il reste peu de temps d’ici le 7décembre, raison de plus pourredoubler d’efforts pour réussirnotre grève qui pour être indis-pensable, n’est pas gagnéed’avance. Gageons cependant quesa réussite aura des effets d’en-traînements sur les forces syndi-cales qui hésitent encore. C’estvrai qu’après 2003, la remobili-sation n’est pas facile. Se conten-ter d’attendre n’est pourtant pasune solution. Il faut bien que cer-tains se lancent en premier. LeSNES sera de ceux-là. �

Bernard Boisseau

Le SNES fait le choix del’unité. Au plan général,comme au plan de l’Éduca-

tion, c’est un atout essentiel,comme l’a bien montré le mou-vement du printemps 2003, mêmesi au bout du compte «l’essai n’apas été transformé » sur lesretraites.Mais cette recherche de l’uniténe peut pas aller jusqu’au prix del’inaction, surtout quand on est,comme l’est le SNES, le syndicatmajoritaire dans un secteur quiconcentre des attaques gouverne-mentales sans précédents. Dès ledébut septembre, puis plus préci-sément le 12 octobre, le SNES afait savoir publiquement qu’il esti-mait indispensable, dans le cadred’un processus continu d’actionqu’il souhaitait le plus unitairepossible, d’aller à la grève d’icidécembre.L’accord s’est fait sans difficulténotamment entre la FSU, leSGEN-CFDT, la FERC-CGT,l’UNSA Éducation et la FCPE,sur le principe d’une action cen-trée sur le budget. Mais l’argu-ment des difficultés de mobilisa-tion, effectivement réelles, a étéinvoqué pour en limiter la por-tée : 200 000 « cartons rouges »ont quand même été remis au Pre-mier Ministre le 5 novembre. LaFSU a souhaité donner des pro-longements à cette action. Unenouvelle remise de « cartonsrouges» aura lieu auprès des pré-fectures le 24 novembre. LeSNES et la FSU s’investirontpleinement dans cette nouvelleinitiative à laquelle ils souhaitent

que soient données des suites uni-taires, notamment au moment oùs’élabore la carte scolaire audeuxième trimestre.Mais le SE et le SGEN, tout enaffichant leur volonté de main-tenir l’unité, s’en sont tenus obs-tinément à la seule question dubudget, ce qui signifie en clairqu’ils ne voulaient pas que soitévoquée la question de la loid’orientation pas plus que le rap-port Thélot qu’ils ont d’ailleurspleinement approuvé. Pour leSNES, il ne peut être question defaire l’impasse sur des sujets quimobilisent la profession et quiengagent l’avenir du systèmeéducatif. Il lui a paru indispen-sable de faire s’exprimer la pro-fession et de peser sur les déci-sions gouvernementales par unrecours à la grève, et cela, avantque ne se tienne le Conseil desministres qui arrêtera le projet deloi, c’est-à-dire en décembre. Le bureau fédéral, saisi le 8 novembre, s’est réuni le

15 novembre pour faire le point.Le SNUIPP s’est prononcé pourla grève mais en janvier, périodede la carte scolaire du 1er degré.Les avis étaient plus diversparmi les autres syndicats. LeSNES a donc rendu public sonappel le 16 novembre. D’autressyndicats seront présents le

LA GRÈVE, TEMPS FORTD’UN PLAN D’ACTION À PLUSIEURS VOLETS

• Campagne d’opinion (réunions dans les établissements et réunionspubliques) sur la critique du SNES du rapport Thélot et ses proposi-tions pour la loi d’orientation. 250 000 brochures diffusées. Forumsà Marseille, Rouen, Orléans et Paris.

• Mercredi 24 novembre : deuxième étape des « cartons rouges » àRaffarin. Ils sont remis au préfet de chaque département. Des suitessont préparées pour le deuxième trimestre.

• Lundi 29 novembre et jours suivants : réunion dans tous les établis-sements : appréciation des annonces Fillon et préparation de lagrève.

• Mercredi 1er décembre : opération «classe dans la rue» contre la pré-carité et les vacations.

• Mardi 7 décembre : grève dans les lycées et collèges.

les enseignants dans les établis-sements pour assurer les rem-placements, alors même que l’oncasse le dispositif des titulairesremplaçants dont le SNESdemandait qu’il soit amélioré.• Comme tous les fonctionnaires,les personnels du second degréont vu leur pouvoir d’achat dimi-nué de 5 % depuis 2000. Leministre de la Fonction publiquequi se répand en propos provoca-teurs contre les fonctionnaires et

contre l’Éducation nationale, ne leurlaisse aucun espoir d’une annoncede rattrapage pour la séance denégociations salariales qu’il arepoussée jusqu’au 8 décembre.C’est pour ces raisons que leSNES a décidé d’appeler lespersonnels des lycées et col-lèges à la grève le mardi 7décembre pour signifier expli-citement au gouvernementqu’il doit revoir sa politique. Ilappelle en outre les personnels

à se réunir dans tous les éta-blissements lundi 29novembre(ou l’un des jours suivants)pour discuter des orientations

proposées par le ministre etpour préparer la réussite dela grève. �

Bernard Boisseau

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10 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

ACTUALITES

MAUVAISE FOI ET MÉPRISSUPPRESSION DES HEURES DE TPEEN TERMINALE

REMPLACEMENT”RÉQUISITIONNER ” LES PROFS ?

Le ministère a annoncé sonintention de supprimer lesTPE en Terminale et, en

conséquence, l’épreuve faculta-tive au baccalauréat à la rentrée2005. Rappelons que les modali-tés d’évaluation dans le cadre dubaccalauréat étaient transitoireset que le ministère devait statuer(suppression, maintien avec ousans modification) de façon défi-nitive avant la rentrée 2005.La raison annoncée ne manque pas

Comme la politique budgé-taire menée par le gouver-nement fait durement sentir

ses effets sur le terrain, notam-ment en matière d’encadrementdes élèves, F. Fillon se défausse deses responsabilités en jetant lesenseignants en pâture à l’opinionpublique. Marchant sur ce terraindans les traces de Ferry, il dénonceles 4 000 professeurs, principale-ment d’allemand et de philoso-phie… «payés à ne rien faire»,du fait des suppressions d’optionset de sections. Amplifiant son pro-pos, il vise ensuite toute la pro-fession en rejetant sur le corpsenseignant les problèmes de rem-placement.Sûr de son effet vis-à-vis deparents d’élèves, demandeurs àjuste titre que leurs enfants nesoient pas pénalisés par desabsences d’enseignants, il envi-sagerait de donner les pouvoirsaux chefs d’établissementd’étendre les remplacementsinternes. Ainsi, un professeurpourrait être contraint de rempla-cer au pied levé un collègueabsent, contre une rémunérationen HS. On voit tout de suite legain que représenteraient de tellesmesures par rapport au recrute-ment de personnels titulaires pourassurer les remplacements ; com-plétées par le recours aux vaca-taires dans certains cas, elles per-mettent des économies d’emplois.

La baisse du nombre de postes misaux concours et les suppressionsd’emplois d’enseignants (2 500 aubudget 2004, 5 500 prévues aubudget 2005) vont évidemment àrebours et ont eu comme consé-quence, parmi d’autres, desmesures de carte scolaire pour lesTZR alors que les besoins n’étaientdéjà pas couverts.Si l’on s’attache maintenant auproblème des absences de trèscourte durée, il s’agit de savoir ceque recouvre le mot «remplace-ment » ; assurer une efficacitéréelle de l’acte pédagogique ouaccueillir et encadrer les élèves?L’ignorance, feinte ou réelle, del’acte d’enseignement, de sa com-plexité interne conduit à direqu’un professeur pourrait cumulerdes heures, comme si les élèvesétaient interchangeables, commesi le travail se réduisait à la pres-tation en classe sans rien en amontni en aval. Les enseignants savent,

eux, que le travail avec les élèvesse construit, que la lourdeur deleurs charges actuelles est peucompatible avec de nouvellestâches.Encore une fois, au lieu de pres-crire, le ministère de l’EN seraitbien inspiré de mettre à platsérieusement les conditions d’ac-cueil des élèves, de réfléchir auxmoyens de développer leur auto-nomie de façon diversifiée selonles cycles, d’améliorer en consé-quence les équipements, lenombre de personnels (docu-mentalistes, MI-SE, ces derniersayant de par leur qualité d’étu-diants la possibilité d’un rôled’accompagnement éducatif).

Frédérique Rolet

QUELQUES DONNÉES :Taux d’absence des professeurs(enquête Insee sur la période 1991-1998 : 1,6 % (3 % pour l’ensembledes salariés).

Moyens de remplacementSecond degré : 3 % d’emplois/nombre de titulaires (besoins estiméspar le Ministère : 6 %).1er degré : 8 %Passer à 5 % des emplois nécessi-terait 8 000 créations d’emplois.

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On voit aussi tout de suite que ceshypothèses méconnaissent le fonc-tionnement des établissements(locaux, emplois du temps, etc.)comme la réalité de l’activitéenseignante. Si l’on sort du dis-cours démagogique, et qu’onexamine la réalité du problèmedu remplacement, il convientd’abord de distinguer entre rem-placement de courte, moyenne,longue durée et absences de trèscourte durée.Dans le premier cas, pour assurer lacontinuité du service public d’édu-cation et garantir aux élèves lacontinuité pédagogique dans la dis-cipline, il faut des personnels titu-laires qualifiés dans toutes les dis-ciplines et spécialités. Le décret de1999 définissant de façon unique lamission de remplacement allaitdans ce sens ; sa mise en œuvresupposait qu’on prévoie dans lesrecrutements et créations de postesd’intégrer cette dimension.

de saveur : «La mesure proposée setraduira pour les élèves de Termi-nale et leurs professeurs par unallègement de leur charge globalede travail au profit de la prépara-tion de l’examen, répondant ainsià l’une des principales critiquesformulées à l’encontre des TPE.En effet, malgré l’intérêt pédago-gique croissant qu’ils suscitent,tant auprès des élèves que des pro-fesseurs, les TPE sont ressentis enTerminale comme une surcharge

de travail l’année de l’examen.»L’opposition entre l’intérêt péda-gogique croissant et les nécessitésde l’examen mériterait au moinsune explicitation, quand on saitque depuis trois ans le ministère estresté sourd à toutes nos demandesd’évaluation sérieuse des différentstypes d’apports des TPE en Ter-minale, discipline par discipline,série par série ! Par ailleurs quelallègement cela représente-t-il pourles enseignants qui devront assurer

de toute façon leurs 15 ou 18heuresde cours ? Avec une classe de pluset une heure de première chaire enmoins ?Ne nous y trompons pas, la véri-table raison n’est pas celle-ci !Supprimer purement et simple-ment 2 heures par division dansles quelques 8 000 divisions deTerminales générales dans le sec-teur public (soit environ 100postes), sans compter le nombreimportant d’heures de première

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 11

TRAVAIL INFORMEL ? TABLES RONDES MINISTÉRIELLES

chaire qui ne seront plus attri-buées, est d’abord une réponseaux ordres de Bercy !Le SNES s’opposera à cette mani-pulation, surtout quand officieuse-ment, le ministère laisse croire à lapresse que 95% des heures de TPEétaient utilisées à autre chose, cequi est évidemment faux ! (80%des élèves de Terminales généralesse sont présentés à l’épreuve l’andernier). Ce mauvais procès faitaux enseignants est indigne et laisseplaner un doute sur la crédibilité duministère. De nombreuses équipespédagogiques ressentent cette déci-sion et ces justifications commeun mépris pour leur travail et leur

savoirs et un meilleur rapport desélèves aux enseignements.Aucune étude sérieuse ne peutinfirmer ou confirmer cette hypo-thèse, mais il est sûr que la simplesuppression des 2 heures de TPEn’apportera aucune améliorationau travail en classe.Le SNES a toujours été favorableau travail interdisciplinaire et àla recherche documentaire large-ment intégrés dans les pratiquesquotidiennes et pas seulementcantonnés à un dispositif péri-phérique.Ses interrogations sur les TPE deTerminale proviennent depuis ledébut de la difficulté à mesurer

l’apport de ces derniers et desmodalités d’évaluation auxquellesnous avons toujours clairementexprimé notre opposition. Il n’ena jamais, pour autant, demandéla suppression !Le SNES demande la publicationde l’évaluation du dispositif, sielle existe, sur laquelle le minis-tère s’appuie pour proposer cettesuppression. En tout état de cause,aucune décision ne doit être prisesans que les équipes pédago-giques et l’ensemble de la pro-fession aient eu l’occasion des’exprimer. �

Roland [email protected]

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engagement auprès des élèves. Leministère ne peut, d’un simplerevers de main, balayer le bilanqu’elles en tirent : obligation pourles élèves de construire des pro-blématiques personnelles avectoutes les difficultés que cela repré-sente pour eux et leurs enseignants,développement de la recherchedocumentaire et de l’usage desCDI par exemple...Cette opération purement comp-table ne bénéficiera sûrement pasaux élèves : les TPE ont été ins-tallés sur la suppression d’heuresde cours au nom du principequ’ils permettraient, par nature,une meilleure appropriation des

Reproduisant le scénario destrois groupes de travail pré-cédents, les collaborateurs du

ministre sont restés d’un mutismeimperturbable, laissant s’exprimerles organisations syndicales, sanspoint d’étape ni éléments de syn-thèse, renvoyant aux rencontresultérieures de F. Fillon avec lesfédérations de l’Éducation.Pendant ce temps, la presse a faitétat d’arbitrages en cours et Raf-farin a donné publiquement de pre-mières indications. Dès la pre-mière table ronde nous avonsdénoncé la méthode imposée par leministère de l’Éducation nationale,présentée comme travail informel.La 1re table ronde sur les finalitésdes missions a porté sur la questioncentrale pour le ministère : la façond’atteindre le socle commun ?Nous sommes intervenus sur lesfinalités de l’école en montrant qu’ilfallait atteindre à la fois la réussitede tous les élèves, c’est à direréduire les sorties sans qualifica-tion, tout en élevant le niveau dequalification. Nous avons égale-ment développé notre conception dela culture commune large, ouverteà l’opposé d’un socle minimum, etcontre la filiarisation précoce.La 2e table ronde «École ouvertesur l’extérieur » a porté sur leslangues vivantes. Nous avonsdéfendu le maintien de la diversitédes langues enseignées et réfutél’idée qu’il fallait que l’anglais

soit appris dès le primaire pourtous. Nous avons critiqué la fai-blesse du cadre européen de réfé-rence en langue, au niveau culturel,et demandons son évolution.Nous concevons l’orientation dansle cadre d’une démarche éduca-tive dans laquelle les CO-Psy ontun rôle central, en donnant dutemps aux professionnels, auxéquipes pour aider l’élève àconstruire son projet, et noncomme une adéquation entreorientation et affectation.La formation continue pour adultesdoit s’effectuer dans le cadre duservice public, notamment enredonnant des moyens aux Greta.Lors de la 3e table ronde sur leslycées, nous avons rappelé notresouhait d’élever le nombre debacheliers et de développer les par-cours de réussite en repensant lesfilières technologiques et la sérieL, en développant des passerelles etdes possibilités de choix à toutmoment après la Troisième, afinque les élèves ne puissent être défi-

nitivement bloqués. Nous avonsobtenu l’ouverture du dossier surl’évaluation au baccalauréat afinqu’il reste un repère national. LaSeconde ne doit pas être déjà déter-minée.Nous avons insisté sur la réductiondes inégalités entre établissementset la conjugaison de règles natio-nales fortes et d’initiatives péda-gogiques locales, le refus du ren-forcement de la hiérarchie. Acontrario nous demandons de ren-forcer le pouvoir de propositions etde décisions des instances de l’éta-blissement, et souhaitons une ges-tion plus collective en facilitantl’implication des parents et desélèves.La discussion sur le contenu etl’exercice du métier enseignant futlongue, mettant en lumière lesdivergences entre les organisationsde réussite scolaire, divergencesrecouvrant aussi la Nation.Le SNES a réaffirmé sa conceptiond’un métier enseignant qui ne dis-socie pas enseignement/éducation,un métier centré sur les appren-tissages scolaires. Si l’on veut sedonner comme objectif la réussitede tous les élèves, le leurre seraitjustement d’esquiver la question del’acquisition des connaissances ;trop souvent les réformes ontocculté la question des enjeux dis-ciplinaires pour privilégier des dis-positifs périphériques. Des tâchesont alors été ajoutées les unes aux

autres, prenant beaucoup de tempset décentrant progressivement l’ac-tivité enseignante.Toute démarche guidant unerecomposition du métier devraitpartir de la réflexion sur le rôle duprofesseur dans la communautéscolaire, d’une clarification desmissions des différents profes-sionnels.Quant à certaines tâches comme lesoutien, l’aide au travail person-nel… en fait des moyens diversi-fiés d’acquisition des connais-sances disciplinaires, elles doiventêtre intégrées dans le servicecomme acte pédagogique à partentière ; certaines situations doi-vent faire l’objet d’un travail encomplémentarité (suivi des élèves,absentéisme, apprentissage à l’au-tonomie…), ce qui suppose untemps de concertation laissé à lamaîtrise des équipes.La demande majeure des person-nels de l’éducation est de retrou-ver de la souplesse et du temps,d’avoir la possibilité de mettre enœuvre le travail en équipe, nonune codification des tâches.Dans la même logique, la forma-tion initiale et continue ne doit pasbrader la qualification mais mieuxla reconnaître, permettre une irri-gation par la recherche, s’appuyersur une préprofessionnalisation etse poursuivre par une entrée pro-gressive dans le métier. �

Gisèle Jean, Frédérique Rolet

ULTIME TABLE RONDE DANS LE CALENDRIER SERRÉ QUE S’EST DONNÉ LE MINISTÈRE DE L’ÉDUCATION NATIONALE, LA RÉUNIONDU 16 SUR LES MÉTIERS DE L’ÉDUCATION DEVAIT TRAITER EN QUELQUES HEURES DE TOUS LES PERSONNELS DE L’ÉQUIPEÉDUCATIVE, DE L’ÉVOLUTION DU MÉTIER ENSEIGNANT ET DES DISPOSITIFS DE FORMATION INITIALE ET CONTINUE…

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12 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

ACTUALITES SALAIRESREFUS GOUVERNEMENTAL

Le 8 novembre, date du pre-mier rendez vous salarial, leministre n’avait à soumettre

aux organisations syndicales quedes éléments statistiques, déjàconnus pour la plupart, cherchantà contester la perte du pouvoird’achat subi par les fonction-naires. Il proposait comme seuleperspective d’en discuter... quinzejours plus tard.Unanimement, les sept fédérationsont contesté cette méthode, dénoncél’utilisation fallacieuse des donnéesstatistiques. Elles ont rappelé leursrevendications et exigé l’ouverturede réelles négociations. Comme seule réponse, le 15novembre, le ministre confirmaitsa proposition initiale en l’assor-tissant d’un deuxième rendez vousle 8 décembre. Il annonce qu’alors,il présentera une « esquisse demesures salariales concrètes, à par-tir desquelles pourront se nouerdes négociations ». Manifestement,le gouvernement joue la montreet cherche à discréditer nos reven-dications. Il y oppose descontraintes qu’il a lui-même choi-sies. Il oppose salaires et emplois

alors que pour jouer tout leur rôle,les services publics ont besoin desdeux. Et la croissance a besoin dela consommation, pour être créa-trice d’emplois.Il est légitime de revendiquer lemaintien de son pouvoir d’achat etsa progression. Osons le faire dansla grève le mardi 7décembre. �

Anne Fé[email protected]

UNE MESURE MALHONNÊTEFace aux organisations syndicalesqui placent au cœur des sujetsde la négociation salariale qu’ellesdemandent la valeur du point d’in-dice, le ministre objecte qu’enmoyenne le pouvoir d’achat desfonctionnaires augmente de 2,6%par an depuis dix ans. En inté-grant dans cette évaluation les effets des avance-ments et de l’évolution des emplois, le ministre nie ledroit à la carrière et prétend faire payer aux agentsl’évolution des qualifications. De cela, on avait mal-heureusement l’habitude. Les précédents ministresavaient eux aussi pointé le « salaire moyen » pour l’op-

poser aux revendications. Là oùDutreil fait plus fort, c’est qu’ilchoisit la population statistique.La moyenne ne porte que sur lespersonnels en place deux annéesconsécutives. On efface ainsi lesgains apportés à l’employeur parle remplacement des personnels

partis en retraite par des plus jeunes moins rému-nérés. Pour comparer de manière juste l’évolution des trai-tements à celles des prix, il faut comparer des situa-tions identiques. La seule mesure objective est biencelle du point d’indice. A. F.

27 octobre 2004

RÉFORME DE L’ÉTATRenaud Dutreil se lâche : « Le problèmeque nous avons, c’est que les gens sontcontents des services publics ».Devant les ultra-libéraux de la FondationConcorde, le ministre de la Réforme del’État s’est lâché et a dit tout le bien qu’ilpense des fonctionnaires.Le restaurant Pépita, situé à proximité desChamps-Élysées, était rempli, mercredi 20octobre, d’une soixantaine de costumes-cravates à la mine cireuse, venus assister àun petit déjeuner-débat avec Renaud Dutreil,ministre de la Fonction publique et de laRéforme de l’État. Cette conférence étaitorganisée par la Fondation Concorde, thinktank ultra-libéral proche de Jacques Chirac.Florilège des déclarations du ministre, surle thème de prédilection de la droite: «Com-ment insuffler le changement».« Les retraités de la fonction publique nerendent plus de services à la Nation. Cesgens-là sont inutiles, mais continuent depeser très lourdement. La pension d’unretraité, c’est presque 75 % du coût d’unfonctionnaire présent. Il faudra résoudrece problème. »« À l’heure actuelle, nous sommes un peuméchants avec les fonctionnaires. Leur pou-voir d’achat a perdu 4,5 % depuis 2000. »« Comme tous les hommes politiques dedroite, j’étais impressionné par l’adversaire.Mais je pense que nous surestimions consi-dérablement cette force de résistance. Ce quicompte en France, c’est la psychologie, déblo-quer tous ces verrous psychologiques. »« Le grand problème de l’État, c’est la rigi-dité de sa main-d’œuvre. Pour faire passerun fonctionnaire du premier au deuxièmeétage de la place Beauvau, il faut un an.Non pas à cause de l’escalier [rires dans lasalle], mais des corps. Il y a 1 400 corps.900 corps vivants, 500 corps morts [rires],comme par exemple l’administration destélécoms. Je vais les remplacer par cinqfilières professionnelles, qui permettrontla mobilité des ressources humaines : édu-cation, administration générale, écono-mie et finances, sécurité sanitaire etsociale. Si on ne fait pas ça, la réforme del’État est impossible. Parce que les corpsabritent les emplois inutiles. »« C’est sur l’Éducation nationale que doitpeser l’effort principal de réduction deseffectifs de la fonction publique. Sur le1,2 million de fonctionnaires de l’Éduca-tion nationale, 800 000 sont des ensei-gnants. Licencier dans les back office del’Éducation nationale, c’est facile, on saitcomment faire, avec Éric Woerth [secré-taire d’État à la Réforme de l’État] onprend un cabinet de conseil et on changeles process de travail, on supprimequelques missions. Mais pour les ensei-gnants, c’est plus délicat. Il faudra faire ungrand audit. »« Le problème que nous avons en France,c’est que les gens sont contents des ser-vices publics. L’hôpital fonctionne bien,l’école fonctionne bien, la police fonc-tionne bien. Alors il faut tenir un discours,expliquer que nous sommes à deux doigtsd’une crise majeure – c’est ce que fait trèsbien Michel Camdessus –, mais sans pani-quer les gens, car à ce moment-là ils serecroquevillent comme des tortues. »

Emmanuelle Veil

Le 8 décembre prochain, la FSU organise à Paris une jour-née de mobilisation sur les retraites des femmes dansla fonction publique : une matinée de réflexion et débaten présence d’Anne-Marie Brocas, secrétaire généraledu COR, suivie d’audiences auprès des groupes parle-mentaires et des ministères de la Fonction publique, duDroit des femmes et de la Famille.La loi Fillon représente une régression pour tous, et nouscontinuons à la combattre sur tous ses aspects. Mais ellepénalise particulièrement les femmes. La FSU est inter-venue sans relâche tout au long de l’année 2003/2004 pourfaire connaître cette conséquence de la loi, et pour faire

prendre en compte des situations de femmes qui se voientécartées de l’attribution des bonifications pour enfants.Cette journée doit permettre aux femmes de témoigner desinjustices générées par la loi, et attirer plus fortement l’at-tention sur ce dossier.Une conférence de presse se tiendra en fin de matinée enprésence de Gérard Aschieri.S’inscrire auprès du secteur formation syndicale de laFSU [email protected]

MERCREDI 8 DECEMBREÀ partir de 9 h 30, au SNUIPP, rue Cabanis, Paris 14e

L’ENSEMBLE DES FÉDÉRATIONSDE FONCTIONNAIRESREVENDIQUE DES MESURES☛ Prenant effet dès 2004.☛ Conduisant à des mesures derevalorisation du point d’indice.☛ Remettant à niveau le pou-voir d’achat de cette valeur dupoint au regard du 1er janvier2000 soit une augmentation de5 % à ce titre.☛ Assurant un fort relèvementdu minimum de rémunération.☛ Anticipant sur l’inflation pourla période à venir par un calen-drier de revalorisation du pointd’indice.☛ Engageant une réforme de lagrille et des carrières sur la basedes principes qui les fondent.☛ Assurant rattrapage, main-tien et progression du pouvoird’achat des pensions de retraites.

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 13

HORS-CLASSES 2005DES RECULS QUI NE FONT PASLE COMPTE

Parce que la politique gouvernementale pour le service publicd’éducation et ses personnels est inacceptable, le SNES appelleà la grève le 7 décembre, pour signifier explicitement que cettepolitique doit être revue. Préparons ensemble cette journéed’action, construisons-en les suites.Dans ce cadre, individuellement ou collectivement, signez,faites signer, diffusez massivement la lettre ouverte ci-contre.Téléchargement et signatures en ligne sur notre site :www.snes.eduRetour des signatures « papier » :SNES, secteur Emploi, 1, rue de Courty, 75 341 Paris cedex 07.télécopie : 01 40 63 29 78.

Avec les notes de service2005 sur les hors-classes,les perspectives d’accéder

à l’échelon terminal de la horsclasse s’assombrissent pour noscatégories et l’horizon se brouille.Au lieu d’être un droit pour tousles collègues et d’être amélioréeset élargies, les promotions de finde carrière que nous avionsconquises deviennent aléatoires.Inacceptable et grave de dangers !D’abord, parce qu’il y a ruptureavec les engagements de l’Étatsur l’amélioration, en terme derémunération, de la carrière despersonnels enseignants et d’édu-cation et par lesquels une trèsgrande majorité de collègues avaitl’assurance d’y accéder. Ensuite,parce qu’il s’agit d’engager une« nouvelle gestion des promo-tions » qui les feraient dépendreprincipalement des avis hiérar-chiques. Plus de critères objec-tifs et transparents permettant àchacun(e) de se situer et d’avoirune lisibilité de carrière, mais lasoumission au pouvoir discré-tionnaire du recteur, donc del’inspection et (ou) des chefsd’établissement : offensive degrande ampleur comme le mon-trait sans détour le projet de notede service pour les certifiés, CPE,PEPS et PLP communiqué finseptembre. Avec ces textes, leministère ouvre le chantier de latransformation en profondeur dela gestion de nos carrières. Rien

d’étonnant qu’ils aient donc faitl’unanimité syndicale contre eux.Les interventions de l’intersyn-dicale, réunie à l’initiative duSNES, contraignent le ministère àrevoir sa copie. Il l’a revue unepremière fois, après une audiencele 21 octobre au cabinet duministre (référence à l’anciennetéet abandon du rôle-clé conféréaux chefs d’établissement cf. L’USn° 608) puis, à nouveau à l’issued’un groupe de travail le 10 no-vembre. Désormais, l’exigencede continuité avec les principes envigueur jusque-là est mieux affir-mée ; le refus d’un barème natio-nal commun à tous demeure,même si les recteurs sont invitésà construire un barème acadé-mique dans le respect des orien-tations nationales. Enfin l’énoncédes critères qui doivent aider auclassement des promouvableslaisse encore la porte ouverte àdes marges considérables d’arbi-traire. Le SNES considère que cetexte ne donne pas les garantiesattendues pour préserver l’accèsde la grande majorité à la hors-classe et la démarche unitaireauprès du cabinet du ministre sepoursuit. Le texte définitif n’estdonc pas encore arrêté.De façon précipitée, l’arbitrageministériel a été rendu pour lanote de service agrégés qui vientde paraître au BO du 18 novem-bre. Le barème national de clas-sement des promouvables

demeure, la prise en compte duconcours est réintroduite mais lenouveau dispositif est de nature àaccroître l’arbitraire au-delà del’actuel hors-barème. (Se reporterau supplément Carrières quiparaîtra la semaine prochaine.)Le dossier est donc loin d’êtreclos.Si par la vigilance collective qu’ilnous faut continuer à déployer àtoutes les étapes, nous pouvonssans doute parvenir à limiter pourla campagne de promotions 2005les effets immédiats de l’offen-sive, nous ne pouvons penserl’enrayer sans une mobilisationde grande ampleur dont l’une desétapes est la grève du 7 décem-bre. Nous avons des propositionspour des carrières moins uni-formes et plus attractives pourtous dans le cadre de garantiescollectives nationales. C’est unebataille de conviction pour fairepartager l’idée qu’un servicepublic d’égale qualité sur tout leterritoire se construit sur les qua-lifications des personnels et leurreconnaissance. �

Nicole [email protected]

MUTATIONS / PROMOTIONS 2005DEFENDRE NOS GARANTIES COLLECTIVES

CPA :

Maintien en activitéL’article 73 de la loi Fillon portantréforme des retraites, prévoit lapossibilité pour les collègues entrésen CPA au plus tard à la rentrée 2003,de demander leur maintien en activitéau-delà de leur 60e anniversaire.Jusqu’à leur 61e anniversaire(1) pourles collègues nés en 1944 ou 1945,jusqu’à leur 62e anniversaire(1)

pour les collègues nés en 1946 ou1947, jusqu’à leur 63e anniversaire (1)

pour les collègues nés en 1948. Lademande doit être formulée au plustard le 31 décembre 2004, auprès desservices rectoraux.

[email protected]

1. Ou jusqu’à la fin de l’année scolairecorrespondante.

Précarité :

Classes de rueDans le cadre des mercredis de laprécarité et du plan d’action nationaldu SNES, nouvelle action nationalele 1er décembre contre la précarité :classes de rue, invitation de députés,conférence de presse.Plusieurs académies ont d’ores etdéjà décidé de reconduire des actionsdès le 24. À Nice : campement aurectorat ; à Clermont : roue de lafortune.Renseignez-vous auprès de vossections académiques et sur le sited’action et d’échanges du SNES.Par ailleurs, le SNES appelle àparticiper à la manifestation le4 décembre place de Clichy à Paris,contre le chômage et la précarité,le plan Borloo, le contrôle socialdes chômeurs, pour uneindemnisation de toutes les formesde précarité,à l’appel de AC !, APEIS, MNCP, CGTchômeurs.http://www.ac.eu.org

Florence Dursapt,Secteur non-titulaires

Pentecôte :

Le lundi sera travailléAlors que Raffarin a d’ores et déjàannoncé que le « jour férié travaillé »serait le lundi de Pentecôte (saufexception départementale motivée),le ministère organise une mascaradede concertation en convoquant sur cesujet un CTPM le 22 novembre. Pour leSNES, la question n’était pas dechoisir entre la Pentecôte ou laTrinité, mais bien l’iniquité de cettemesure.

Elizabeth Labaye

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14 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

DEBATopinion

stabilité face aux dangers de l’affectif et des relations amoureuses.Avec la seconde modernité, qui remonte à quelques décennies, onest entré à nouveau dans l’incertitude, les modèles traditionnelssont en crise, remplacés par la volonté de chacun ou de chaquegroupe de faire sa propre histoire, individuelle ou collective.Chaque jour, des savoirs qui semblaient avérés sont remis en cause,la logique de la transmission perd de son évidence. Une sorte de«réflexivité » générale (une façon d’agir en se regardant faire, en secherchant) se met en place, touchant tous les secteurs de la vie.Le savoir, en conséquence, devient, lui aussi, incertain, est remisen question. L’institution chargée de sa transmission est donc logi-quement en crise. Au fond, la crise de l’autorité me paraît n’êtrequ’une conséquence de cette crise de la transmission.

J.-M. Z. : Quelle place accordez-vous à l’esprit critique curieu-sement prôné par les tenants d’une école traditionnelle, àcondition de le réserver, semble-t-il, à ceux qui auront com-mencé par appliquer les règles et obéir?F. de Singly: Cette expression nous piège. Elle est utilisée par cer-tains pour nous enfermer dans un schéma chronologique, d’abord latransmission (voire «l’admiration » sur commande), et plus tard l’es-prit critique. Ce dernier ne devrait apparaître qu’une fois qu’on auraitsuffisamment bénéficié de la «transmission ». Là encore, je préfèreparler de réflexivité, le mot « critique » étant trop connoté. Parexemple, chacun de nous a besoin du passé, pour pouvoir d’abordraconter son histoire. L’école et les enseignants doivent mettre à dis-position de chacun les matériaux nécessaires à la construction de sonhistoire et à sa projection dans l’avenir. La «réflexivité » n’est pasalors un nouveau nom pour la raison, mais la possibilité que va avoirchaque individu de faire des bilans sur le passé, de se bricoler sonidentité. En aucun cas il ne s’agit de brûler le passé !

J.-M. Z. : On pourrait objecter que vous décrivez des phéno-mènes typiques des classes moyennes. L’individualisme, avecles aspects positifs que vous lui attribuez, concerne-t-il autantles classes populaires?F. de Singly: On dit beaucoup de choses fausses à ce sujet. Dans nossociétés, ce processus touche toutes les couches sociales, même si lesconditions de vie (le logement notamment pour avoir une vie privée«personnelle ») rendent plus difficile pour certains leur constructionidentitaire. Ce qui est plus compliqué c’est la spécificité des évolu-tions historiques affectant notamment les individus issus de culturestrès traditionnelles. Ces groupes sociaux changent très rapidement,cependant ils ne peuvent pas se socialiser aux valeurs de la moder-nité en quelques années alors que nous avons mis au moins deux

UNE FOIS DE PLUS MINISTRES, certains médias et quelques intellectuels nous reparlent d’une « crise del’autorité ». Certains allant jusqu’à proposer la « restauration » de l’autorité dans les classes par le biaisde circulaires prônant le retour aux punitions collectives, aux « bonnes vieilles méthodes qui ont fait leurspreuves ». Pourquoi pas le retour aux châtiments corporels ?L’autorité est souvent confondue avec l’autoritarisme. La négation des évolutions de notre société depuisplus de 40 ans et notamment des relations parents/enfants, hommes/femmes, maître/élève ne permetpas de construire de nouveaux repères, de nouveaux liens entre les personnes.L’autorité est nécessaire notamment dans la relation pédagogique mais elle doit s’inscrire dans le cadrede valeurs partagées et non se traduire par l’autoritarisme qui mène plus à la déresponsabilisation qu’à laformation du citoyen. Gisèle Jean

François DE SINGLYDirecteur du centre de recherches sur les liens sociaux (CNRS-université Paris V)

Jean-Michel Zakhartchouk: Partons d’idées qui circulent surl’autorité, notamment chez les enseignants : «on a le plus grandmal à faire respecter par les élèves l’autorité des adultes », « lesavoir lui-même ne fait plus autorité ». Dans ces conditions,peut-on encore transmettre?François de Singly : La force de ce discours traduit quelque chosede vrai : il y a bien une crise de l’autorité. Dans la famille, on estpassé d’une logique de transmission à celle de la constructionidentitaire, ce qui a profondément changé les relations. Maisl’école, elle, est restée dans la logique de la transmission et lesrelations enseignants-élèves ont du mal à évoluer. Faisons undétour par l’histoire : nous sommes entrés dans ce que j’appelle la« seconde modernité ». La première a été inaugurée par la Révolu-tion française, qui a mis fin aux certitudes, à un monde où tout estdéjà écrit (remarquons que dans bien des endroits du monde, onest encore dans cet état antérieur à la modernité où on pense qu’ilsuffirait de reproduire, de recopier). À partir du XIXe siècle nossociétés sont entrées dans l’ère du changement permanent : paressence, une société moderne déstabilise l’autorité existante.On peut voir alors dans l’école républicaine une tentative pour réintro-duire de la stabilité avec la culture de la Raison (majuscule), les grandsrécits, l’idéologie du Progrès qui remplaçait la Religion. Par là, on avoulu restabiliser le monde, comme le mariage devait introduire de la

Au fond, la crise de l’autorité me paraît

n’être qu’une conséquence de cette crise

de la transmission (du savoir).

La crise de l’autorité n’est qu’une conséquenceSelon François de Singly(1), directeur du centrede recherches sur les liens sociaux (CNRS-universitéParis V), la tentation, dans un monde dont les modèlessont en crise, serait de réaffirmer les référencesau passé. François de Singly s’y refuse, préférant faireappel à la réflexion critique que de s’en remettreaux vertus de la transmission.

Autorité contre autoritarisme

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 15

siècles pour « digérer » les valeurs de la Révolution française.Je crois pourtant que la grande différence est moins entre lesgroupes sociaux qu’entre les genres. Les garçons vivent davantagel’affirmation de soi sur le mode de la compétition et du culte de laperformance, les filles sont sur un mode à la fois plus personnel etplus coopératif.

J.-M. Z. : Il s’agit donc de trouver la «bonne autorité», ce quin’est pas simple pour les enseignants.F. de Singly : Les réponses que l’on cherche dans la volonté deretour au passé ne sont pas adéquates. Je pense qu’il faut cesser deraisonner en termes de modèles préexistants et passés. Ce quicompte, c’est bien ce qui répond à des besoins. Dans les entretiensque nous menons, nous voyons des individus tiraillés entre cequ’ils font et qui leur semble pertinent, adéquat, et les normes

qu’ils ont dans la tête (ce qu’est un «bon père » par exemple), parlesquelles ils sont culpabilisés ou inhibés.Et puis il y a des moments différents dans l’enseignement. À cer-tains moments, je livre à mes étudiants des méthodes, je fais desapports dans la magistralité. Mais à d’autres, dans des travaux diri-gés, on cherche ensemble ; je les guide, mais ils me voient aussipatauger, ne pas avoir de certitudes. Il y a alors du savoir partagé,construit ensemble, dans la réflexivité. On est amené à utiliser lesgrands anciens (que ce soit Durkheim ou Bourdieu) et en mêmetemps à en faire un usage critique, parfois très critique. On est làdans un savoir vivant. �

Propos recueillis en décembre 2003 par J.-M. Zakhartchouk

(1) Auteur de Les uns avec les autres, quand l’individualisme crée du lien,Armand Collin, 2003.

INTERVENTION DE FRANÇOIS DE SINGLY AUX JOURNÉES DU CRAP SUR L’AUTORITÉ, 25 OCTOBRE 2004 À PARIS

Le problème de l’autorité est central, mais actuellement il n’y a pas de réponse, si ce n’est la certitude qu’il faille dire non à la «restauration » ! Toutes les tentatives dans ce sens ont d’ailleurs régulièrement échoué.Historiquement, dans les sociétés démocratiques modernes, il y a un déclin de l’autorité.Par exemple, le XIXe siècle a tenté un retour en arrière. Mais dès le début du XXe on assiste à une nouvelle limitation de l’autorité paternelle (en terme de châti-ments corporels par exemple) qui trouve sa conclusion en 1970 et 2000 avec la mise en place «des droits des enfants » et du «défenseur des enfants ».Cette évolution touche évidemment l’école qui est beaucoup plus en crise que ne l’est la famille qui a su inventer des modes de fonctionnement nouveaux.Cette crise trouve aussi son origine dans le fait que la logique des transmissions des savoirs (des connaissances ou des héritages) ne va plus de soi. La seulecertitude qui semble émerger est que demain ne sera pas comme aujourd’hui ou comme hier. De cette évidence naît la difficulté de faire admettre la néces-sité de lire «les grands aînés», qui allait de soi il y a un siècle.La grande question reste celle du «comment se construire en tant qu’individu » ? Apparaît alors une contradiction forte entre l’individualisation de l’ensei-gnement et la restauration de l’autorité. L’individualisation, par nature, tend à rendre l’élève maître de son orientation, de son parcours et conçoit le jeunedans d’autres dimensions que celle d’élève. En revanche, la restauration de l’autorité se base sur la seule dimension d’élève. Les autres restent à la porte del’école, et les débats autour de la laïcité, en France, sont imprégnés de cette conception.

Miguel BENASAYAGPhilosophe et psychanalyste. Auteur de L’abécédaire de l’engagement

aux éditions Bayard

L’autorité n’est pas quelque chose

que quelqu’un exerce sur quelqu’un d’autre

en face à face mais c’est un lien.

Aujourd’hui dans de nombreux discours d’hommes politiques,d’intellectuels, est présente la question de l’autorité et surtoutdu retour à l’autorité.

Il y a plusieurs versions, dans le domaine médiatique il existe tousces jeux à forte audience fondés sur l’autoritarisme comme le« maillon faible », mais également d’autres jeux mettant en scène unproviseur, un surveillant général autoritaires. Ce que je constate dansle travail que j’accomplis depuis trois ans en ZEP c’est que la ques-tion de l’autorité est un vrai problème et qu’il y a parfois un appel dela part de collègues à un retour de l’autorité.Ce retour souhaité à l’autorité est le propre de toute société en crise.Le futur est incertain, le monde a peur de l’avenir. Il se développe undiscours sur l’autoritarisme dans l’école, la famille, la ville avec unevision sécuritaire. C’est dangereux. Les sociétés ont peur et vont ten-ter de réduire les droits individuels et civiques. La liberté devient unluxe. Dans nos sociétés, l’autoritarisme, le sécuritaire va se durcir ous’articuler avec des tendances fascisantes.L’autoritarisme c’est le bras de fer gagné par la barbarie.Il y a une réalité actuelle, la dissolution du liant, la société ressentiecomme menaçante, le manque de cadre.Que pouvons-nous faire car il n’y a jamais de retour en arrière à unpassé ? Il faut réfléchir à la question de l’autorité, voir comment ellese pose.Les années rebelles, les années 70 ont développé une critique anti-autoritariste qui au final s’est mariée avec le libéralisme, avec cettenouvelle idéologie qui veut faire croire que tout est possible … avecde l’argent. C’est un paradoxe. Mais il est important de bien analyserles deux faces : anti-autoritarisme et idéologie libérale.

La génération des adultes est un échec. Il y a une perte de repèresréels entre adultes et enfants.Ce qu’il faut c’est recréer un lien social qui résiste à la barbarie. Oron essaie de suppléer un lien par l’autoritarisme. L’autorité n’est pasla coercition, elle suppose une structure commune partagée.L’autorité n’est pas quelque chose que quelqu’un exerce sur quel-qu’un d’autre en face à face mais c’est un lien. Il faut créer desgroupes d’enseignants, de parents capables de réfléchir à la com-plexité du savoir, accepter l’idée que l’enseignant ne sait pas toutmais qu’il a l’autorité.Il faut pour rétablir le lien social, inventer, créer des groupes deréflexion. Qu’est-ce qui est en train de se passer que nous ne maîtri-sons pas ?Il n’y a pas de recette ni de réponse universelle, il faut rechercherensemble dans l’école et ailleurs pour créer des lignes de résistance àl’autoritarisme.

Propos recueillis par Gisèle Jean

Recréer un lien social qui résiste à la barbarie

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16 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

ECO/SOCIALANALYSE. Le CEREQ (Centre d’Études et de Recherches sur les Qualifications) vientde publier une enquête intéressante* montrant que les aides-éducateurs les plus diplô-més ont pu mieux gérer l’après emploi-jeunes que les autres.

Quel devenir pour lesex-emplois-jeunes ?

Sécurité socialeI

Ils veulent la tuer !Le patron de Buffalo Grill, marchant surles traces de Claude Reichmann, prési-dent du Mouvement pour la liberté de laprotection sociale, n’a pas hésité à pro-poser récemment à ses salariés desouscrire des assurances individuellesde santé, remettant en cause le mono-pole de la Sécurité sociale. « Je veuxêtre le premier chef d’entreprise àaffranchir mes salariés qui le souhai-tent de l’obligation de consacrer 45 %de leurs revenus au financement de leurprotection sociale », a-t-il déclaré auParisien. Il a poursuivi en indiquant qu’ils’engageait à reverser à chacun dansson salaire l’équivalent des chargespatronales, s’il s’assurait ailleurs qu’à laSécurité sociale. Le ministère de la Santéa réagi en affirmant que l’entrepriserisquait de « mettre ses salariés dansl’illégalité ». Mais le commissaire euro-péen en charge du marché intérieur,M. Bolkenstein indique que « lorsqu’unétat membre décide d’ouvrir la couver-ture d’un risque relevant du régime légalde Sécurité sociale aux assureurs privés,il doit accepter que toute entreprised’assurance autorisée dans son propreétat puisse couvrir ce risque sur la basede la liberté d’établissement et de laliberté des prestations de services ».On sait que certaines assurances pro-posant déjà des remboursements decertaines dépenses au premier euro,les logiques individuelles se multiplientau détriment des solidarités collectives.

Loi de financementLe PFLSS (Projet de Loi de Financementde la Sécurité sociale) vient d’êtreadopté par l’Assemblée (seuls les dépu-tés UMP l’ont voté). L’ objectif desdépenses de l’assurance-maladie enhausse de 3,2 % seulement apparaîttotalement irréaliste, alors que desengagements ont déjà été pris enverscertains professionnels de santé, etqu’on peut douter de la réalité desmesures d’économies espérées parDouste-Blazy dans un délai aussi court(mise en place du parcours de soins etdu médecin traitant au 1er janvier, ins-tauration d’un euro par acte...) ; le DMP(Dossier Médical Personnalisé), quant àlui, ne sera pas opérationnel avant plu-sieurs années (et coûtera cher).On peut craindre alors qu’au vu desdépassements de l’ONDAM (ObjectifNational de Dépenses de l’AssuranceMaladie), le mécanisme de contrôle desdépenses (comité d’alerte) se mette enmarche contraignant les caisses à orga-niser elles-mêmes les dérembourse-ments et le rationnement des soins.À signaler dans les autres titres duPFLSS, la création d’une contributionà la charge des entreprises dont lessalariés ont été exposés à l’amiante,au profit du fonds de cessation d’acti-

Alors que le gouvernement adécidé d’accélérer la fin dudispositif (une disposition du

plan Borloo prévoit l’extinctionde l’aide de l’État (donc le non-remplacement d’un emploi-jeune)lorsque le bénéficiaire quitte ledispositif, tout en organisant lamontée en charge de nouveauxemplois « aidés », CIE (contratinitiative emploi) ou CAE (contratd’accompagnement dans l’emploi)et contrats dits « d’avenir » (maislequel ?), il était intéressant d’ana-lyser la sortie du dispositif et l’in-sertion dans l’emploi des anciensaides-éducateurs, emplois jeunes de l’Éducation nationale. LeCEREQ s’y est employé et publieune intéressante enquête sur lesujet.*S’il reste encore environ 22 000aides-éducateurs à la rentrée2004, il y en avait environ 65 000au plus fort de la vague de recru-tement. Comme le ministèrel’avait annoncé dès le début, ilsn’ont pas été maintenus dans desfonctions « pérennisables ». Leurpassage dans l’EN, vu commeun « sas » ou un tremplin pourl’emploi, devait donc leur per-mettre une certaine profession-nalisation. Mais en même temps,la volonté de ne pas les voir« s’incruster » dans le dispositifa poussé également le ministère àproposer des conventions avecdiverses entreprises ou des for-

Le Conseil d’orientation desretraites (COR) a repris sestravaux avec un objectif :

rendre un avis préparatoire auxdécisions qui devront être prisesen 2008 (bilan de la premièreétape de la réforme Fillon). Il tra-vaille aussi à un rapport théma-tique sur les avantages familiaux,preuve que la question des boni-fications pour enfants, dans un

contexte où la dégradation desdroits à la retraite pèse davantagesur les femmes, reste ouverte, Parailleurs, le COR continue à tra-vailler sur une question clé (âge ettravail), alors que les négocia-tions promises sur la pénibilitédu travail pour les seniors n’ont eulieu ni dans le privé, ni dans lepublic.Mais c’est évidemment l’élabo-

ration des projections écono-miques et financières à l’horizon2050 qui retient l’attention. Lecoût du financement des retraitesvarie considérablement selon leshypothèses économiques et démo-graphiques qui seront retenues.Les travaux de l’OFCE (OfficeFrançais de la Conjoncture Éco-nomique) ont clairement montréque le taux de chômage est la

mations susceptibles de débou-cher sur un emploi stable. Il ad’ailleurs fallu plusieurs années,et une pression syndicale forte,pour que cela se mette en placeavec des crédits suffisants, encorequ’inégaux selon les académies.Cela impliquait de la part desaides-éducateurs un double inves-tissement, dans l’emploi et dansla formation. Il est clair que dansces conditions, ce sont les plusdiplômés, mieux armés pour anti-ciper leur parcours dès l’entréedans l’emploi-jeune, qui ont étéles principaux bénéficiaires dudispositif. Ils ont été égalementles premiers à obtenir des for-mations souvent diplômantes oude préparation à des concours, etdonc moins coûteuses que lesformations professionnelles.C’est notamment le cas de ceuxqui ont quitté leur emploi avant lafin du contrat : 85 % d’entre euxont trouvé immédiatement unemploi alors que ce n’est le casque de 48 % de ceux qui ont étéjusqu’au bout.Les aides-éducateurs, titulairesdu seul baccalauréat, peu assurésdans leur parcours scolaire et sansprojet professionnel avéré, et dontcertains s’étaient fortement inves-tis dans leur activité (c’est notam-ment le cas d’aides-éducatricesdans le 1er degré), ont eu plus dedifficulté à prévoir l’après emploi-jeune. Certains se sont vus refuser

par les rectorats les formationsqu’ils espéraient et proposerd’autres considérées commemieux adaptées à leur cas. De fait,ceux-là ont souvent quitté le dis-positif sans avoir acquis une qua-lification ou un diplôme.Quant aux conventions signées àgrand bruit par Claude Allègre avecles entreprises, elles se sont avéréesun leurre (peu d’emplois propo-sés) et inadéquates avec les pro-jets et espoirs professionnels desjeunes, dont la majorité souhaitaittravailler dans le social et se voyaitproposer la restauration rapide !Ainsi, 76 % se sont retrouvés auchômage à la fin de leur contrat(le taux s’est ensuite abaissé heu-reusement, mais reste supérieur à50 %) et un nombre non négli-geable a postulé pour un emploid’assistant d’éducation. Enfin,on peut regretter que l’EN n’aitpas réellement mis en place unevalidation des acquis dans lecadre de la VAE (Validation desAcquis de l’Expérience) quiaurait été particulièrement impor-tante pour les aides-éducateurspeu diplômés. �

Elizabeth [email protected]

* Bref, n° 211, septembre 2004

RETRAITES

De nouvelles mesures en 2008

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 17

vité de ces salariés, ainsi que l’aug-mentation de la contribution de labranche ATMP au financement de cefonds. Celle-ci versera par ailleurs200 millions d’euros au fonds d’indem-nisation des victimes de l’amiante.

Autoroutesi

Ça roule pourles privatisationsAprès avoir vendu 49 % des autoroutesdu sud de la France, l’État s’apprête àréduire sa participation dans les auto-routes Paris-Rhin-Rhône et du nord-est,se promettant de garder néanmoins70 % du capital.D’un point de vue économique, fairepayer les autoroutes est stupide.Puisque ce sont les routes les plus sûreset les plus rapides, il faudrait aucontraire inciter par la gratuité les auto-mobilistes et les camionneurs à lesemprunter plutôt que les routes natio-nales ou locales. Le coût du passaged’une automobile est d’ailleurs quasi-nul(seuls les camions dégradent le revê-tement et le coût pour l’environnementest le même sur toutes les routes). Laseule justification du péage était d’enfaire une sorte de taxe finançant laconstruction des routes. On pouvaitdonc espérer, une fois les dettes rem-boursées, que les autoroutes devien-draient gratuites ou presque. Aucontraire, les sociétés d’autoroutesauront désormais pour mission de rap-porter les profits les plus élevés pos-sibles à leurs actionnaires, ce qui nedevrait pas être bien difficile, puis-qu’elles sont en situation de monopole !En fait, cette vente des infrastructurespubliques est une forme d’endettementcaché de l’État ; sauf que ce ne sont pasles contribuables mais les automobi-listes qui rembourseront le capitalobtenu par l’État.

MGENi

Enquête en coursLa mutuelle a lancé depuis plusieurssemaines une vaste enquête destinéeaux personnels enseignants des pre-mier et second degrés. Intitulée « climatscolaire et organisation/conditions detravail », elle a pour objectif de chercherles corrélations entre ces deux champs,afin de construire de nouveaux outilsfondés « d’une part, sur la perceptionpar les personnels du climat émotion-nel et relationnel des établissementsscolaires et, d’autre part, sur les carac-téristiques objectives et quantitativesde ces établissements ». Il s’agit notam-ment de rechercher les indices de qua-lité de vie au travail, le lien entre vio-lence/climat/engagement... et stress/souffrance au travail. Une publicationsuivra cette recherche, dont nous sou-tenons la démarche.Vous pouvez y répondre en quelquesminutes sur le site www.mgen.fr, et cejusqu’à la fin du trimestre.

variable-clé : alors que le coûtsupplémentaire des retraites en2050 est évalué à entre 5 et 10points de PIB, l’impact d’un tauxde chômage à 8 % représenterait20 à 30 points de PIB en moins(par rapport à la projection dePIB fondée sur un taux de chô-mage à 4,5 %) en 2050 !Le COR a maintenu l’hypothèsed’un chômage à 4,5 % dans sonscénario central, mais pour 2015,et non plus 2010 comme dans sonprécédent rapport.Il est une fois de plus démontréque le financement de la protec-tion sociale suppose des choixvolontaristes de politiquemacroéconomique en faveur dela croissance et de l’emploi.

Un accord s’est fait pour retenirune variante avec un solde migra-toire supérieur (+ 100 000/an soitle double du solde actuel).Autre aspect intéressant : l’idée detester une variante avec uneindexation des pensions sur lessalaires nets. Il est vrai qu’avecl’indexation sur les prix retenuepar la loi Fillon, les retraités serontappauvris en fin de vie et ce quiaura été gagné sur les pensionsse traduira en hausse du coût de ladépendance !L’impact de la loi Fillon fait éga-lement débat : la cessation d’acti-vité serait retardée d’une demi-année dans le privé et de deux ansdans la fonction publique. Devantl’incertitude des comportements,

le COR a retenu une variante oùl’effet serait double et une varianteoù l’impact de la loi serait nul.De son côté, la Commission euro-péenne prépare ses propres pro-jections (avec un taux de chô-mage à 7 %) qui seront publiéesau printemps 2005.D’autre part, la Commission euro-péenne impulse dans chaque paysdes « ateliers nationaux sur lacontribution de la protection socialeau prolongement de la vie active ».Les retraites restent dans le champde la compétence des états, maison voit bien qu’elles sont de plusen plus inscrites dans une pers-pective européenne. �

Daniel [email protected]

EUROPE SOCIALE, EUROPE LIBÉRALE

Le combat est commencéD

’importantes évolutions agi-tent actuellement l’Unioneuropéenne

La Commission européenne, etles gouvernements qui la dési-gnent, ont fait une interprétationunilatérale des résultats desrécentes élections européennes,y voyant un virage à droite del’opinion. Dès lors, les choix poli-tiques des autorités européennessont devenus transparents.D’abord avec l’orientation trèslibérale des nominations à laCommission (personnages fortdouteux, comme l’a montré l’épi-sode Buttiglione, maintien de lanéerlandaise Nelly Kroes alorsqu’elle siégeait dans une tren-taine de conseils d’administra-tions de grandes firmes). Ensuite, avec la publication d’unedirective sur le temps de travailqui assouplit le plafond de ladurée hebdomadaire maximum(48 heures) si le salarié est « d’ac-cord » pour aller au-delà de cethoraire. Heureusement, il serainterdit de dépasser les65 heures ! (Il y a des momentsoù on a envie de relire Marx.)Le « must » de la commission,c’est le projet de directive « Bol-kestein » (du nom de l’anciencommissaire au marché intérieur)visant à libéraliser le marché desservices à l’intérieur de l’UE. Cettedirective introduit un nouveau prin-cipe juridique dont l’adoptionaurait pour conséquence de faire

exploser le droit du travail, decontraindre les états à supprimerles réglementations d’accès à cer-taines professions et de réduire laprotection des consommateurs. Eneffet, selon le « principe du paysd’origine », une entreprise parexemple polonaise pourrait pro-poser ses services en France avecdes travailleurs polonais détachés,rémunérés et travaillant selon lalégislation polonaise, et qui nepourront être contrôlés que par desinspecteurs du travail polonais.

Mais le sujet principal pour lanouvelle commission, c’est lapanne de la « stratégie de Lis-bonne », qui avait l’ambition defaire de l’UE la région la pluscompétitive du monde d’ici à2010. Le rapport que vient deremettre l’ancien premierministre néerlandais, Wim Kok,dresse un constat d’échec : crois-sance plus faible en Europe,emploi à la traîne, capacité derecherche et d’innovation insuf-fisante...L’offensive libérale s’accentue,comme le montrent les conclu-

sions du rapport Kok (accélérer lalibéralisation du marché inté-rieur). Bolkenstein a d’ailleursbien résumé les choses en décla-rant à la mi-octobre : « le pro-blème est que la locomotive deLisbonne doit tirer trop dewagons. On l’a surchargée avecdes objectifs supplémentairescomme la cohésion sociale et ledéveloppement durable ».Parallèlement, on assiste à unepoussée des mouvements sociauxen Europe, en particulier en Alle-

magne. Cela bouge même auRoyaume-Uni (grève le 5novembre dans la fonctionpublique contre un projet de sup-pression de 100 000 emplois sur550 000 !), et aux Pays-Bas :après des semaines de grèves etde manifestations, le gouverne-ment vient de reculer sur son pro-jet de réforme de la protectionsociale.Reste la question essentielle : àquand des mobilisations socialeseuropéennes ? Le mouvementsyndical européen est interpellé. �

Daniel Rallet

Selon le « principe du pays d’origine »,

une entreprise polonaise pourrait proposer

ses services en France avec des travailleurs

polonais détachés, rémunérés et travaillant

selon la législation polonaise.

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 19

DOSSIERAide, soutien, accompagnement

Dossier coordonné par Gisèle Jean, Roland Hubert, Daniel Rallet. Avec la participation de : Mireille Breton, Yves Cauet, Jean-François Clair, Julien Cueille, Kathy Mérand, Sylvie Nony, Georges Ortusi, José Pozuelo, Catherine Remermier, Valérie Sultan.

Avec la massification du collège, puis du lycée, la croissance del’hétérogénéité des élèves dans les classes, et entre les établis-sements, une multitude de dispositifs d’aide, de soutien, d’ac-compagnement ont été mis en place. En retraçant l’histoire de cesdispositifs, souvent empilés les uns sur les autres, rarement éva-

lués et mis en cohérence avec ce qui se passe au cœur de la classe, nous avonsinterrogé la façon dont notre système scolaire traite la difficulté scolairemais également comment il tente ou non de la prévenir.Quelle est la nature des difficultés, comment les appréhender, sur quels leviersest-il possible d’agir assez tôt, comment évaluer l’impact des actions menées?L’idée même de soutien scolaire désigne souvent l’élève comme la sourced’une « faiblesse » : or la nature des savoirs scolaires enseignés, leur hiérar-chisation forte peuvent parfois conduire à mettre en difficulté des élèves.Travailler à construire une culture commune qui ne rejette pas celle dumilieu familial mais s’appuie sur elle pour construire, dans le cadre des dis-ciplines ou de projets pédagogiques, de nouveaux savoirs nous semble unepiste féconde.L’aide et le soutien sont pour partie inhérents à la vie de la classe ; ceci sup-pose une véritable recherche en éducation qui irrigue la formation des ensei-gnants et s’appuie sur la recherche de terrain. Mais aide et soutien se dérou-

lent aussi hors de la classe dans le cadre d’équipes pluriprofessionnellesdont il faut montrer les réussites, et d’associations, de mouvements pédago-giques qui tentent d’apporter des réponses précises à des difficultés scolairesque vivent les élèves.Au-delà de ce maillage fort dans et hors l’école, du service public non mar-chand, se développe un service marchand qui fait ses choux gras de l’angoissedes parents.Des cahiers de vacances, recommandés parfois par les enseignants, auxcours particuliers à échelle industrielle en passant par la multiplication de logi-ciels d’aide, le marché du soutien se porte très bien. Mais il a souvent une autrefonction que d’aider les élèves présentant quelques difficultés passagères, ilvise à faire réussir ceux qui déjà réussissent et touchent les catégories les plusfavorisées qui peuvent payer.La deuxième école vient renforcer les acquis de la première, mais aussi sesinégalités.Au moment où le débat sur la loi d’orientation s’engage autour d’un rapportintitulé « la réussite de tous les élèves» en proposant un certain nombre demesures dont «une personnalisation du suivi et des apprentissages pour desélèves en difficulté», il nous semble indispensable de montrer toute la com-plexité de ce que l’on appelle aide ou soutien.

Soutien scolaireRéduction ou accroissement

des inégalités ?

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20 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

Questions à Élisabeth Bautier, membre du groupe ESCOL, Université de Paris VIII

C’est la conception des difficultés des élèveset leur évaluation

qui apparaissent fondamentalesQuelles sont les données dontnous disposons actuellementsur la question du soutien scolaire ?La présence des dispositifs d’aide dans les col-lèges, en particulier les collèges situés enZEP, est sans doute générale. Cependant, leuranalyse met en évidence plus ou moins decohérence et de pertinence dans leur mise enœuvre ; quant à l’évaluation de leur efficacité,il s’agit là d’une question beaucoup plus dif-ficile à traiter tant sur le plan du recueil dedonnées que sur celui, plus théorique, desmodes et critères d’analyse de cette efficacité.La disjonction possible de ces différentesapproches ne peut qu’interroger sur les objec-tifs réels ou les enjeux des dispositifs, d’unepart, d’autre part sur ce que seraient les condi-tions d’une aide effective aux élèves.Seul un travail dans les collèges impliquantdes entretiens avec les personnels (ensei-gnants, vie scolaire, chefs d’établissement),une analyse des documents de travail desélèves, de l’organisation des emplois du

temps, une comparaison de la compositiondes classes et de l’affectation des ensei-gnants... permet cette mise au jour. Ce travailpasse aussi par l’identification de points devue qui ne convergent pas toujours : le pointde vue institutionnel, le point de vue de l’éta-blissement, le point de vue des enseignantsdans la quotidienneté de la classe, le point devue des élèves.

Quelles sont les manières de conduirecette aide dans les établissements ?En d’autres termes,qui fait quoi et pour qui ? Au total, si on tente de distinguer les différentsdispositifs, on trouve selon les établissements,de façon cumulée ou non: une aide apportéesous forme de révisions, des groupes de travail,des formes de soutien, des groupes de remé-diation, de l’aide au travail personnalisé, desétudes dirigées (rares), du tutorat, des heuresde vie de classe dans certains établissements.Certains contenus d’intervention apparais-

sent liés à des stages effectués par des ensei-gnants qui tentent alors de les appliquer dansle collège. Tout se passe comme si les ensei-gnants étaient suffisamment démunis devantla difficulté d’apprentissage des élèves pourqu’ils aient envie que « tout» soit tenté.

Quels sont les effetsde ces dispositifs sur les élèves ? Globalement, les effets de ces différents dis-positifs ne sont pas évalués, les enseignantsdes différents établissements s’accordentpour dire que les effets positifs sont d’abordcomportementaux. Les effets sur le niveauscolaire sont en revanche très rarement men-tionnés, ils existent pourtant pour certainsélèves, mais il s’agit davantage des consé-quences d’une « mise au travail » ainsidéclenchée, plus que d’une compréhensionrestaurée.La description ci-dessus fait apparaître unetrès grande hétérogénéité des actions mises enplace sans que la pertinence de l’une par rap-port à l’autre soit évoquée et même pensée.

Il n’y a pas que les enfants qui sont inégaux devant l’école : leurs parents aussiDans une récente étude, le CERC(1) décortique lesformes principales que prend cette inégalité.Le constat est bien connu mais son rappel toujoursaussi violent : environ 55 % des enfants dont lepère n’a pas de diplôme sont en retard à l’entréeen Troisième alors qu’ils ne sont que 10 % parmiceux dont le père a un diplôme du supérieur long.

La relation des parents à l’écoleLa corrélation avec le niveau de revenu des parentssemble moins forte, d’après cette étude, que celleavec leur niveau de formation et leur catégoriesocioprofessionnelle. L’aide au travail scolairepar exemple semble fortement liée au sentimentqu’ont les parents (surtout les mères) d’être« dépassé(e)s » pour pouvoir aider leurs enfants.De 30 à 40 % des enfants issus de catégoriesouvriers ou employés ont des parents quiéprouvent des difficultés à les aider dans leurtravail scolaire dès l’école élémentaire.Ce qui corrobore une analyse que nous faisonssouvent au SNES : les élèves les plus en difficultésont aussi ceux qui bénéficient le moins d’uneaide parentale au travail scolaire.

L’aide scolaireCette inégalité dans l’aide au travail n’est pascompensée mais au contraire aggravée, parl’inégalité dans le recours à des aides extérieures.L’enquête chiffre à 11 euros par an en moyenne, ladépense des ménages en petits cours. Mais le

montant de cette aide diminue avec l’augmentationdes difficultés scolaires : elle est quasi-nulle pourles ménages les plus pauvres.

L’aspiration des famillesEnfin un dernier coin enfoncé dans l’égalité desjeunes réside dans les aspirations des familles etdans la façon dont, sans doute, elles sont portéesjusqu’aux lieux de décision (conseils de classe) : à15 ans, à niveau de compétence égale en lecturepar exemple (niveau moyen), un enfant d’ouvriera presque deux fois plus de chances d’être en

retard qu’un enfant de cadres. Il est manifeste quele retard scolaire est loin de fournir donc uneimage complète de l’ensemble des inégalitéssociales qui traverse notre école.Aide au travail scolaire, soutien scolaire, aspira-tion des familles, ce sont toutes ces questionsconcrètes qu’il faut prendre à bras le corps pour re-construire la démocratie sur le terrain de l’école.

1. CERC : Conseil de l’emploi, des revenus et de la cohésionsociale ; www.cerc.gouv.fr

Élementaire Collège Lycée

en %

Note : le résultat est analogue pour les mères. Source : Hèran. 1994.0 20 40 60 80 100

Cadres fonction publique

Professions libérales

Professeurs

Cadres entreprises

Ouvriers qualifiés

Employés fonction publique

Autres employés

Ouvriers non qualifiés

Aide, soutien, accompagnementDO

SSIE

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Ce sont plutôt les contraintes de situation, lesinjonctions institutionnelles et les orienta-tions locales qui « installent» tel ou tel mo-de d’intervention, plutôt que son adéquationà des difficultés identifiées chez les élèves.Au-delà des descriptions des dispositifs, cesont donc les logiques d’action des établis-sements qu’il est important d’étudier pourconstruire des critères d’efficacité pertinents.Ces logiques font apparaître les principes dela réflexion (ou non réflexion) qui sous-ten-dent le traitement de la difficulté des élèves(réflexion et travail n’étant malheureusementpas synonymes d’efficacité concernant lesapprentissages des élèves).Deux grands types d’établissements peuventêtre identifiés sur la base de ces logiques,nous les constituons en pôles qui s’opposent:•Un premier type est celui des établisse-ments qui sont dans une logique d’applicationdes textes institutionnels, mais sans impli-cation particulière au regard des élèves en dif-ficulté. Dès lors, on peut trouver une multi-plicité de structures dont la mise en œuvre necorrespond à aucune compétence particu-lière de la part des enseignants. Il n’y a en cecas pas de suivi des élèves, ni d’évaluationdes effets des dispositifs. On rencontre cette situation dans des éta-blissements où les enseignants semblentdésespérés, découragés, et qui sont le lieud’une forte rotation de l’équipe éducative. • Un second type d’établissements estconstitué par ceux qui ont une histoire (uneculture ?) de l’aide aux élèves, ou au moinsune mobilisation forte sur le problème. Dansces cas, on peut trouver des dispositifs di-versifiés dans leurs objectifs et les popula-tions d’élèves ; les groupes d’élèves ne sontpas stables tout au long de l’année, maisvarient en fonction de leurs « progrès ».Mais on peut également ne pas trouver lesdispositifs institutionnels au profit d’une or-ganisation pédagogique et d’équipe. L’ab-sence de dispositif ne signifie d’ailleurs pasabsence d’aménagement des emplois dutemps ou des services, elle correspond alorsà une volonté du chef d’établissement detraiter de la difficulté en Sixième, tout aumoins de placer cette question dans la poli-tique effective de l’établissement et non de selimiter à un affichage dans le projet d’éta-blissement correspondant à une mise enconformité avec les injonctions ministériellesou académiques. Sans doute aussi, faut-ilconsidérer que dans le second type d’éta-blissement, c’est tout un ensemble d’atti-tudes et d’activités cohérentes qui contribueà l’aide des élèves : concertation, avis posi-tif sur les possibilités d’apprendre des élèves,cohérence et adaptations des interventions,travail d’équipe... L’évaluation des disposi-tifs et de leurs effets existe et des ajuste-ments sont effectués au cours de l’année.

Comment remédier efficacementaux difficultés des élèves ? Sans une rémunération minimale des ensei-gnants impliqués dans l’action, ceux-ci peu-vent se lasser. Cependant, au-delà de ces

questions matérielles, c’est bien la conceptiondes difficultés des élèves et leur évaluationqui apparaissent fondamentales dans la miseen œuvre d’une aide quelque peu efficace. Àcôté des dispositifs d’aide eux-mêmes, l’ana-lyse de ce qui fait difficulté pour les élèves etnon de ce qui fait manque ou lacunes est cequi fait différenciation des établissements...et des élèves.La première perspective, à la différence de laseconde, permet d’installer l’élève dans lacompréhension des exigences du collège quise situent simultanément sur le plan, certes,des connaissances disciplinaires, mais aussisur celui des modes de raisonnement, sur unrapport au langage et aux tâches scolairessitués dans une logique de travail de «secon-

darisation», travail qui est acculturation lan-gagière, culturelle et cognitive et pas « seu-lement» (mais aussi) acquisition de savoirs.Selon les enseignants engagés depuis plu-sieurs années dans de telles analyses, celles-ci sont d’autant plus nécessaires que les pra-tiques dominantes ne mettent pas toujoursl’accent sur les difficultés les plus profondes,celles qui mettent les élèves en grande diffi-culté par retards cumulés dans les apprentis-sages fins et ne hiérarchisent pas les apportsde la remédiation. En particulier, les choix quisont souvent faits, y compris dans l’ensei-gnement «ordinaire» sont-ils ceux qui per-mettent aux élèves de comprendre les en-jeux cognitifs et langagiers liés à la scolaritélongue ? �

À lire également :• Bautier E., 2004. Formes et activités sco-laires, secondarisation, reconfiguration, dif-férenciation sociale in Hommage à V.Isambert-Jamati, Presses universitaires de Provence.• Bautier E., Rochex J.-Y. 2004 « Activitéconjointe ne signifie pas significations par-tagées». Raisons éducatives n°8, Les formesde la signification en éducation.• Bautier E., in Colloque maîtrise de la langueSNES, supplément au n° 591 de L’US du13/09/2003.

Enseignants – CO-Psy

Un double regardsur les difficultés des élèves

La question de l’identification des diffi-cultés des élèves est un problème cen-tral. Comment dépasser les constats qui

portent sur les performances pour comprendrece qui se passe dans la tête des élèves lors-qu’ils sont confrontés à une tâche ?Grâce à leur formation, les CO-Psy s’efforcentavec leurs démarches et leurs méthodologiespropres d’appréhender les sources d’incom-préhension, de malentendus, de blocage. Lesquestionnaires utilisés en début de Sixième etde Seconde permettent ainsi d’approcher lamanière dont les élèves vivent ces change-ments de cycle, les nouvelles disciplines, lesnouvelles exigences du collège ou du lycée,les changements dans leur vie scolaire.Ce recueil est l’occasion à la fois, de retra-vailler certains éléments en groupe, de sus-citer des échanges et de déboucher sur despistes de solution, mais également de re-prendre ces problèmes au niveau individuel :Dévalorisation de soi et sentiment d’échec oud’injustice, attentes parentales et autonomie,troubles spécifiques de la lecture et de l’or-ganisation temporo-spatiale, rapport aux sa-voirs... Bien entendu les entretiens dont on

nous dit aujourd’hui qu’ils sont bien tropcoûteux sont des moments privilégiés pouraborder ces difficultés.Dans certains collèges existent des expé-riences de travail en binôme entre enseignantde mathématiques ou de français et CO-Psy,en direction de petits groupes d’élèves iden-tifiés en fonction de leurs résultats à l’éva-luation Sixième. Ce double regard permetd’être attentif à ce qui se passe dans la tête desélèves quand ils sont aux prises avec un exer-cice à partir de grilles de lecture différentes.Le décalage inévitable de ces approches et deces positionnements permet de faire échan-ger les élèves entre eux et de les interroger au-trement sur leurs représentations de la tâche,la manière dont ils s’y prennent, les connais-sances qu’ils mobilisent...En participant à ces actions malgré les ef-fectifs insuffisants, le CO-Psy ne « sort » pasde son rôle, d’une part parce que dans ses mis-sions figure la contribution à la réussite sco-laire, ce que l’administration oublie trop sou-vent, mais également parce que la préventiondes décrochages est un investissement rentablepour l’orientation. �

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22 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

Depuis les années 1990, les dispositifs d’ai-de et de soutien, tant au collège qu’au ly-cée, se sont multipliés, se succédant, s’em-

pilant ou se chevauchant.Répondant à des objectifs pédagogiques pastoujours réellement explicités, ils ont souvent étéinstallés pour des raisons plus générales quel’aide ou le soutien direct à des élèves : pourimpulser des changements dans les pratiques desenseignants dans la classe, pour susciter le tra-vail en équipe, donner des moyens pour mieuxgérer une hétérogénéité grandissante dans lesclasses, améliorer le rapport des élèves auxapprentissages et développer leur autonomie,ou tout simplement répondre à une fortedemande sociale « d’efficacité scolaire ».

Aide, accompagnement, soutien?Pour les enseignants, il n’a pas toujours étéfacile de faire la distinction entre les troisdomaines dans lesquels peut s’appliquer l’aide:celui qui relève de l’aide individualisée à unélève en difficulté ponctuelle, celui qui relève del’accompagnement, du soutien dans unedémarche pédagogique conduisant entre autresà l’autonomie, et enfin celui qui relève d’unevéritable remédiation pour un élève en grandedifficulté ou en rupture scolaire. C’est ainsiqu’ont cohabité des dispositifs pour un travailindividualisé ou une «aide aux devoirs» avecdes dispositifs collectifs allant de temps spéci-fiques clairement identifiés pour un petit groupeà ceux concernant l’ensemble d’une classe inté-grant aménagement des horaires, des approches,voire des programmes. Leur mise en place parréduction des horaires disciplinaires et de cours,à partir du principe qu’ils permettraient unemeilleure relation des élèves aux apprentissagesou seraient de nature à créer une nouvelle moti-vation, a parfois brouillé la perception desobjectifs réels.À côté des classes spécifiques dont nous netraiterons pas ici, on peut distinguer deux grandstypes de dispositifs.

L’aide individualisée dansun cadre disciplinaireet la remise à niveauMise en place en Seconde en 1999, parce que« l’école doit être à elle-même son proprerecours » selon le ministre de l’époque, maisaussi pour répondre à la demande des lycéensd’un accompagnement personnalisé, expriméedans la consultation nationale sur les lycées de1998: elle est intégrée en fait dans un ensembleplus vaste destiné à mieux gérer l’hétérogénéitédes classes (circulaire du 29/12/98 « La qualité

des apprentissages des élèves exige, comptetenu de l’hétérogénéité des publics, la mise enplace de dispositifs d’aide individualisée : aideméthodologique, études encadrées ou sur-veillées, permanences, aide aux devoirs etleçons, etc.»). Elle est articulée à l’évaluationnationale diagnostique, supprimée depuis, etaux modules dont l’objectif pédagogique estautre, puisque, espaces pour la mise en placed’approches pédagogiques différentes dans lecadre ou en prolongement des programmes, ilss’adressent à tous les élèves. Les enseignants sesont vite retrouvés devant une difficulté de miseen œuvre née en partie de celle de distinguer aideet soutien (difficulté entretenue par les pres-criptions ministérielles qui, dans la circulaire derentrée 2003, encourageaient la globalisationdes heures d’AI et de modules) : à qui fallait-ils’adresser, aux élèves en grande difficulté etqui auraient besoin d’une véritable remise àniveau ou aux élèves en difficulté passagère, àdes élèves désignés ou à des élèves volontaires?Les pratiques sont en conséquence très diversi-fiées suivant les établissements et les disci-plines. Les quelques évaluations de ce disposi-tif convergent pour conclure qu’il bénéficiesurtout aux élèves en difficulté ponctuelle etpeu aux élèves en grande difficulté dès l’entréeen Seconde, sauf sur le plan relationnel.En classe de Cinquième, initialement appelée,comme en Sixième, «heures de mise à niveau»,une aide individualisée « réservée aux établis-sements où des besoins d’aide aux élèves en très

grande difficulté » sont identifiés, est instauréeen 1999, «dans le cadre de petits groupes nedépassant pas 8 élèves afin d’assurer une véri-table prise en charge personnalisée » (circu-laire du 12/07/99). En fait elle ne prendra jamaisla place institutionnelle que peut occuper l’AI enSeconde qui a été, dès le début, accrochée expli-citement à deux disciplines et intégrée dans lesservices des enseignants.

L’aide au travail personnelCes dispositifs, essentiellement au collège, ontpris des formes variées : ATP, études dirigées,études encadrées, tutorat... Leur définition estfluctuante, le même dispositif changeant parfoisde dénomination, les mêmes heures pouvantêtre attribuées à des dispositifs différents d’uneannée sur l’autre. Il s’agit, ici, d’apporter uneaide méthodologique ou pédagogique au tra-vail personnel de l’élève. On ne touche pasdirectement à ce qui se passe en classe, mais àla phase d’appropriation individuelle et per-sonnelle des savoirs par les élèves. Peu de bilansglobaux ont été tirés de ces dispositifs, et leursmoyens ont été globalisés : à la rentrée 2004,sont à la disposition des équipes «une heurenon affectée » en Cinquième et Quatrième etdeuxheures d’ATP en Sixième. Il est intéressantde noter que ce type de dispositifs n’a pas étéinstallé de façon institutionnelle au lycée géné-ral et technologique. Cette absence mériteraitsûrement d’être intégrée dans la réflexion plusglobale sur l’accès d’un élève à toutes les formesde l’autonomie !

Donner des repères et des outilsFaute de pouvoir codifier nationalement l’aide etle soutien, et dans la logique d’une plus grandeautonomie des établissements, la stratégie minis-térielle est de globaliser un contingent d’heuresà disposition des équipes pédagogiques pourmettre en place les dispositifs les mieux adaptésaux réalités locales. Pour que cet espace d’au-tonomie soit efficace, au-delà de conditionsd’enseignement permettant le temps des appren-tissages et de la différenciation dans le cadre dela classe, il faudrait donner aux personnels beau-coup plus de repères didactiques sur l’aide et lesoutien, des outils pour mieux appréhender lesinteractions entre l’aide et les différents typesd’évaluation (formative, diagnostique, certifi-cative) qui mesurent ou révèlent l’échec et lesprogrès, mieux utiliser les études qui interro-gent ou explicitent les interactions entre le travailen classe et celui en dehors de la classe, et enfindégager le temps de concertation indispensableau fonctionnement des équipes. �

Témoignage

En collège ZEP« Notre priorité est le maintien d’horaires de courssuffisants, base de tout, et la meilleure articulationpossible entre pédagogie et organisation tech-nique afin de faciliter les apprentissages et decréer un climat propice. Le soutien va de pair avecdes classes complètement hétérogènes (refus detout type de ”classe-ghetto”), l’entraide, l’expli-citation des démarches et une bonne liaison entreles divers intervenants. Nous avons étendu auxTroisièmes le type de soutien en français et mathsutilisé en Sixième, en petits groupes mêlant élèvestrès faibles et élèves volontaires, avec les pro-fesseurs de la classe. »

Il faudrait donner auxpersonnels beaucoup plus

de repères didactiquessur l’aide et le soutien

Aide, soutien, accompagnementDO

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Aide et soutien

Un empilement de dispositifs pour répondreaux difficultés scolaires des élèves

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 23

De l’aide au travail mutuel

Un projet innovant avec le GFEN

La Ligue de l’enseignement répond à nos questions

Pour l’appétit d’apprendre

L’accompagnement à leur scolarité, lesjeunes s’en occupent eux-mêmes pourpeu qu’on leur donne les moyens de tra-

vailler ensemble ! C’est pour se préparer au Bre-vet des collèges que, durant deux semaines devacances, les élèves faibles et moyens du col-lège Montaigne de Lormont (ZEP dans la ban-lieue bordelaise) ont bénéficié d’un travail com-mun avec des élèves volontaires de deux lycéesvoisins (le Lycée des Iris et le Lycée Profes-

sionnel Jacques Prévert). Aux vacances dePâques, dans le collège, les Troisièmes ont ré-visé avec les Secondes, Premières ou Termi-nales chaque matin, par petits groupes, aprèsavoir fait un stage commun avec le GFEN (enfévrier) sur les façons d’apprendre. À la fin dechaque matinée, une assemblée générale desjeunes leur permettait de modifier le dispositifet de régler les petits problèmes. Le Centre So-cial de Lormont Génicart, concepteur engagé du

Aujourd’hui le soutien scolaire devientun marché rentable. Quelle analysefaites-vous des évolutions ?Personne ne peut reprocher aux parents d’avoirle souci de la réussite de leurs enfants.L’École doit être le premier lieu où s’effectuele soutien à l’élève. Or, parce que, notamment,les conditions, mais aussi la volonté, n’existentpas toujours, se développe un marché rentable,celui de l’angoisse scolaire. À cet égard, onpeut dire que la progression rapide du chiffred’affaires des entreprises sur ce secteur est unbon indicateur de l’investissement ou du non-investissement des acteurs de l’école.

Quels rôles des associations commela vôtre peuvent jouer dansl’aide aux élèves en difficulté ?La visée de l’accompagnement à la scolarité, quin’est pas une école après l’école, c’est susciter,entretenir, redonner l’appétit d’apprendre. C’estdans ce sens que les apports culturels et lespratiques de socialisation en font partie. Notre rôle : • Réaliser une intervention éducative etsociale plus large, prenant en compte l’élève

dans sa globalité et son environnement.• Favoriser une démarche en réseau associantécoles, établissements du second degré,familles, institutions culturelles, acteurs locaux,élus, associations, travailleurs sociaux et, évi-demment, jeunes eux-mêmes, la pertinence duprojet étant fondée sur le volontariat des enfantset adolescents.

• Donner une priorité aux élèves exposés auxdifficultés scolaires et sociales.• Chercher à renforcer les parents dans leurrôle d’éducateurs, en faisant émerger leurssavoir-faire.

Quelle articulation entre votre travailet celui que les équipes éducativespeuvent réaliser dans lesétablissements ?Nous travaillons à tous les niveaux d’ensei-gnement avec les personnels des établissementsscolaires. Nous mettons en place les actionsen coopération avec l’équipe enseignante etéducative. Nous ne venons pas concurrencerleurs missions mais, bien au contraire, consti-tuer un moyen efficace pour favoriser l’inté-gration scolaire qui est nécessaire à la réussitedes enfants. Notre travail doit être en liaison avec lescompétences à acquérir à l’école, articulantprojet d’établissement et projet éducatif ter-ritorial. �

Damien RaymondChargé de mission Éducation

Ligue de l’enseignement

projet, a délégué une animatrice pour garantirle travail commun. En trois ans, ce sont chaqueannée de 45 à 75 jeunes qui ont ainsi travailléensemble, améliorant très sensiblement leurs ré-sultats. Les lycéens ont évalué que ce travailleur a permis d’assurer leurs fondamentaux etl’un des aspects non attendu de l’opération a étéle changement rapide de comportement descollégiens vers plus de maturité. Un « effetd’initiation » des adolescents au contact desjeunes adultes des lycées. La question de laliaison Troisième-Seconde s’est ainsi poséeautrement. Les enseignants et l’administrationdes lycées, les ATOS qui servaient un petit-dé-jeuner le matin, le centre social, le GFEN, tousfortement impliqués, évaluent très positive-ment cette action qui montre que les élèvespeuvent prendre sereinement et efficacementleurs affaires en main lorsqu’un dispositif les as-socie à son fonctionnement.L’idée d’aide a laissé peu à peu la place à cellesde travail mutuel, de solidarité active. Dès la finde la première expérience, les lycéens l’ontvalidé en se portant volontaires en si grandnombre qu’il a fallu établir des critères de par-ticipation, démentant ainsi ceux qui doutent dela générosité et de l’engagement des jeunes. �

Témoignage

Soutien en Terminale : un coup de pouceAvoir l’élève seul devant soi, dansune relation de face à face, quipermet de faire le point avec luisur ses difficultés, au-delà ducontrôle des connaissances qui,à mon avis, n’est pas la dimen-sion la plus importante de l’exer-cice, c’est faire preuve d’une ef-ficacité réelle, même si cela a uncoût qui pourrait être élevé, dansle cas d’une généralisation de cet-te expérience. Cela s’appelle des

heures de colle (ou d’interrogationorale) que j’ai eu l’occasion d’ef-fectuer en Sciences Économiqueset Sociales, à titre expérimental(et parce qu’il restait quelquesHSE), dans mon établissement, enclasse de Terminale ES.Ce genre de « luxe » est généra-lement réservé aux élèves desclasses préparatoires aux grandesécoles. Appliquées aux élèves deTerminale et repensées un peu

différemment, ces heures per-mettent de pointer ce qui ne vapas, tant dans le domaine des sa-voirs que des savoir-faire et deconseiller les élèves avec une di-mension « personnalisée ». Inté-gré dans le service des ensei-gnants, le jeu en vaudrait vraimentla chandelle...

Georges Ortusi,Lycée Pablo-Picasso,

Fontenay-sous-Bois (académie de Créteil)

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DOSS

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Les jolis cahiers de vacances

Merci papa, merci maman...D

es enfants en maillots de bain, souriantset studieux, un ciel d’azur, une merd’émeraude... Les couvertures de

« Nathan vacances » et du « Passeport »Hachette (Français, de la Sixième à laCinquième) expriment déjà l’ambiguïté d’unpari difficile : faire travailler un jeune ado-lescent pendant ses vacances d’été.L’intérieur des cahiers se veut égalementludique et attrayant : dessins, photographies,abondance de couleurs, textes aérés et facilesà déchiffrer.Dans son « mode d’emploi » introductif,Hachette s’adresse directement à l’élève :usant d’un tutoiement décontracté, l’éditeursuppose à l’enfant la capacité de comprendrel’organisation du travail, d’en tirer le meilleurprofit, – voire de mettre en œuvre par lui-même sa propre remédiation («... repérer tespoints faibles et savoir quelles séquences tra-vailler en priorité »).Chez Nathan, la présentation est au contraireuniquement destinée aux parents... et pourcause : il faut impérativement relier le cahierde vacances aux juteux stages « Acadomia ».L’un ne va pas sans les autres, ainsi que l’ex-plique dès la première page une aguichantepublicité, dont la formule lapidaire :« Acadomia... et les résultats sont là!» évoquela présence paradisiaque d’un « enseignantpédagogue » (sic) se rendant sur le lieu mêmedes vacances. À quel prix? Question à doublesens, qui n’est sans doute pas pertinente pourl’éditeur : la réussite scolaire via l’école à laplage n’exige-t-elle pas quelques sacrifices ?Les cahiers proposent des exercices simpleset cloisonnés. Les parents pourront y trouverdes repères rassurants de leur propre scolarité,et endosser plus facilement leur rôle tempo-raire d’évaluateurs, – aidés en cela par lesfeuillets de corrigés.C’est peut-être la raison pour laquelle lagrande absente de ces cahiers est l’expressionécrite, – production scolaire dont l’évalua-tion exige l’expertise pointue d’un profes-sionnel de l’enseignement.Ainsi, au regard de ce qu’il est légitime d’at-tendre d’un élève qui va entrer en Cinquième«produire un texte complet cohérent, maîtri-ser la narration et s’initier à la description...»,les exigences sont inexistantes chez Nathan,indigentes chez Hachette, qui propose aumieux, sous la rubrique «expression écrite»,l’écriture d’une ou deux phrases, avec uneconsigne de transformation. Or, on ne peut dis-socier les exercices proposés d’une certaineconception de l’efficacité des savoirs. Unedes incitations importantes de l’accompagne-ment des programmes de Sixième, qui invitel’enseignant de français à s’appuyer sur lesproductions écrites de ses élèves pour les

mettre en activité réflexive sur la langue, nepeut évidemment pas être prise en comptedans le cadre de ce travail estival. Absencecompréhensible, mais regrettable : on saitcombien la maîtrise de l’écrit va peser de plusen plus lourd dans la suite de la scolarité.Alors, quelle efficacité pour ces cahiers devacances ? Entretiennent-ils la bonne scolaritéde l’élève... ou la bonne conscience de sesparents ?Une recherche réalisée dans l’Académie deBourgogne au cours de l’année 2000, et por-tant sur un échantillon de près de 2 500 élèvesde CM1(1), montre que près de 82% de cesenfants ont des activités scolaires pendantles congés. Ils ont travaillé prioritairementles maths (89 %) et le français (92%), le plussouvent (55%) sur des cahiers de vacances.90 % des parents d’enfants ayant utilisé uncahier de vacances participent directement àcette activité; on ne s’étonnera pas d’apprendreque ce sont ces mêmes parents qui aident leplus leurs enfants pendant l’année scolaire.

Toutefois, il semble que l’efficacité de cescahiers dépende largement de l’usage qui ena été fait : seuls les enfants ayant achevé leurcahier (soit seulement 23,4 %) amélioreronten moyenne leurs connaissances dans toutesles disciplines.Or, aller au bout de son cahier de vacancesn’est pas du seul ressort de la motivationindividuelle, mais dépend aussi des caracté-ristiques scolaires et sociales de l’élève. Cesont majoritairement les « bons » élèves etles enfants de cadres qui achèvent totalementle travail proposé...Les cahiers de vacances ne servent-ils doncqu’à élargir les écarts sociaux de réussite ?...La question ne doit sans doute pas être tran-chée aussi brutalement.Les auteurs de l’enquête eux-mêmes recon-naissent que ce travail estival maintient l’en-fant en contact avec l’activité intellectuelleque réclame l’école. Les élèves restent dansune sorte de « veille scolaire » propice, dumoins, à la mémorisation de certaines connais-sances acquises.Au-delà de ces considérations, l’importantse situe peut-être ailleurs, au sein des rap-ports plus étroits que la période des «grandesvacances» implique souvent entre enfants etparents.Si cette intimité permet de privilégier et dedonner plus de temps aux échanges, en par-ticulier à la « conversation sur l’école », – l’undes éléments attestés de la réussite scolaireselon la sociologue Anne Barrère – alors...longue vie aux cahiers de vacances, qui don-nent un support et un contenu à ce dialogueessentiel au-delà de l’année scolaire !... �

1. Source : notes de l’Iredu «Trêve estivale et com-pétition scolaire » Jean-Pierre Jarousse et ChristineLeroy-Audouin. Mars 2001.

Les cahiersde vacances

entretiennent-ilsla bonne scolarité

de l’élève... ou la bonneconscience

de ses parents ?

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Aide, soutien, accompagnement

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«Je me suis dit qu’il y avait forcémentun marché du soutien scolaire. C’estainsi que le projet est né en 1989 ».

Maxime Aiach, fondateur d’Acadomia, a lemérite de la franchise. Dès 1991, l’entreprisebénéficie d’un coup de pouce inespéré : legouvernement met en place la déduction fis-cale de 50 % pour l’emploi de personnel àdomicile. Combien cela coûte ? Environ 30euros de l’heure dont la moitié prise en chargepar l’État (pour ceux qui paient l’impôt).Grâce à cette carotte fiscale, le marché dusoutien scolaire à domicile va progressivementsortir de l’ombre et mener Acadomia à laplace de numéro 1. En quinze ans, la sociétéa bâti un réseau de 65 agences locales quirecrutent directement. Les professeurs, étu-diants, enseignants en activité ou retraités,doivent avoir en principe le niveau bac + 3. Ilssont répertoriés selon la matière enseignée,leurs disponibilités et leur adresse, afin que lasociété puisse répondre rapidement à lademande. Chaque année 25 000 personnesdispensent 2 millions d’heures de cours à80000 élèves, du primaire au supérieur. Leprof qui ne convient pas peut être changéd’une heure à l’autre.Le PDG d’Acadomia estime que ce n’estqu’un début : « 90 % des cours particulierssont encore donnés au noir, mais notre mar-ché croît de 5 à 6 % par an. Pour l’instant,nous détenons 2 % de parts de marché, maisje vise les 10 % ».

En somme, le projet est d’introduire unelogique capitaliste dans un marché encoredominé par l’artisanat. Acadomia a été intro-duit en Bourse en 2000, sur le marché libred’Euronext à Paris, à 9,70 euros. Le titre vautaujourd’hui 50 euros, et il a gagné 70 % depuisjuin 2003. L’objectif avoué est de coter le titresur le second marché et d’ouvrir le capital à

hauteur de 45% au lieu de 30% actuellement.Pour séduire les parents, l’entretien préalableavec eux constitue la première phase incon-tournable de tout appel à Acadomia. C’estla phase de charme pour enrôler le payeur.«Évaluation Acadomia », examens blancs,conférences-ateliers pour apprendre à mieuxtravailler, et même SOS parents (une assis-tance téléphonique en ligne) : aucun des res-sorts du marché de l’angoisse scolaire n’estoublié.Et pour huiler le tout, de la communication àtour de bras. 4 à 5 millions d’euros sontdépensés en spots publicitaires et en affiches,y compris sur les bus scolaires (comme enVendée où le conseil général est un témoinpassif de cette pratique), ou sur les bus detransport vers les discothèques! La cible seracette fois les adolescents. Bien sûr, disposer d’une caution est incon-tournable : les Éditions Nathan fournissent unepseudo-légitimité.Acadomia se vante d’obtenir des résultatsmiraculeux : « C’est en appliquant la méthodeAcadomia de façon rigoureuse que nos élèvesarrivent à gagner progressivement unemoyenne de 5 points supplémentaires dans lamatière suivie ».Pourtant rien de bien nouveau au planpédagogique. Mais les parents payent et exer-cent une pression sur leurs rejetons en exi-geant un retour sur investissement. Commeles actionnaires. �

Acadomia

La modernité capitalistesur un marché porteur

Une expérience : enseigner chez AcadomiaComme pas mal d’étudiants, j’aieu l’occasion de donner descours particuliers pour arrondirles fins de mois. Plutôt que decourir boulangeries et petitesannonces, j’ai préféré la formule« clef en main » de boîtes pri-vées spécialisées, qui avait deuxavantages : celui de fournir lelien indispensable que d’autresplus chanceux obtiennent par lebouche à oreille, et celui d’êtredéclaré, afin d’éviter les mau-vaises surprises.Journée d’embauche Acadomia :une dizaine de candidats de toushorizons, distribution de bro-chures racontant l’histoire etl’organisation de l’entreprise,petit laïus de présentation, puisentretien d’embauche en solo.

Deux, trois questions très for-melles sur la discipline à ensei-gner et hop, on signe le contrat.À préciser que mes fonctions deMI-SE ont particulièrement inté-ressé les recruteurs. Travaillerpour l’Éducation nationale estune preuve de sérieux, très at-tractive auprès des parentsd’élèves (les clients), pourtantessentiellement orientés versl’enseignement privé (sur six en-fants, cinq étaient scolarisésdans l’enseignement catholique).Après on attend le coup de fil, onnégocie le niveau (car on n’estpas payé pareil si on enseigne àun élève de Sixième ou de Ter-minale), et on se pointe chezdes parents, souvent obnubiléspar les notes, qui payent en

« tickets ». Alors commence l’ex-ploitation : sur l’heure quepayent les clients, moins de 50%sont reversés à l’enseignant qui,de plus, peut recevoir une heureavant son rendez-vous l’appeld’Acadomia l’informant que pourune raison ou une autre les pa-rents n’ont plus besoin de sesservices, les déplacements nesont pas remboursés, ni les coursannulés par le client.Très vite l’expérience devientcontraignante, et on négocieavec les parents la possibilitéd’être payé de la main à la main.Au final, on retourne dans l’illé-galité et Acadomia n’aura étéqu’un marchand de « listes » quise paie rondement au passage.

Didier Dhuique

Témoignage

Les parentspayent

et exercentune pression

sur leurs rejetonsen exigeant

un retour surinvestissement.

Comme lesactionnaires.

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Soutien scolaire et TICE

Entre fantasmes et réalitéD

epuis l’apparition de l’informatique, degrands espoirs (ou fantasmes) ont étéportés sur cette technologie. De la «ma-

chine à apprendre» expérimentale (MITSI) auCD-Rom, de nombreuses expérimentations ontété menées, parfois suivies d’une diffusioncommerciale comme les CD-Rom éducatifs oules sites Web de soutien ou d’aide aux devoirs.Cependant, aucune étude n’a jamais montréque l’utilisation des TICE était plus efficacequ’un travail « classique » en présentiel.Les éditeurs privés l’ont bien compris puisquela plupart des CD-Rom éducatifs «grand pu-blic » ont une fonction de connexion en lignepermettant de poser des questions d’ordre pé-dagogique. Les sites Web, quant à eux, ont tousune fonction du type «contacter un enseignant».Qu’appelle-t-on « soutien scolaire » ? Quel estle profil des élèves ayant besoin d’un soutien ?Que peuvent apporter les TICE ?Dans le cadre de l’expérimentation des Landes,«un collégien, un portable», une enquête d’opi-nion a été réalisée : 11 % des élèves ayantrépondu indiquent qu’ils «n’aiment pas le col-lège et considèrent que le numérique n’y chan-gera rien ». Or, ce sont souvent des élèves

ayant ce profil qui ont besoin d’un soutienscolaire. Les TICE sont donc loin d’être lapanacée...Il faut donc déjà que l’élève ait la volonté« d’apprendre». Nous avons tous pu constaterque certains élèves trouvent un intérêt à noscours lorsqu’on utilise l’ordinateur, la vidéo...Toutefois cet intérêt se limite la plupart dutemps à certaines activités. Il provient parfoisde l’ergonomie attractive du logiciel ou de ladémarche pédagogique originale. Il provientaussi de la possibilité de «s’exprimer» avec unemachine qui ne « juge » pas comme les cama-rades ou le professeur.Comme pour tout outil, on ne peut pas toutfaire avec les TICE. Ainsi, elles ne pourrontpas être utilisées en autonomie par l’élève àn’importe quelle fin, ni pour toutes les disci-plines. Les procédures, parfois extrêmementsophistiquées et réfléchies, de correction d’er-reur ne remplaceront jamais le dialogue avecun enseignant.Cependant, pour des tâches répétitives, lesTICE permettent de faire travailler des élèvessur une banque d’exercices corrigés pouracquérir des réflexes de résolution, tout en

avançant à leur rythme. On trouve de nom-breux logiciels de ce type, gratuits ou payants,mais il est intéressant de constater que trèspeu de ces logiciels sont qualifiés « logicielde soutien», même parmi ceux présentés sur lessites institutionnels. En ce qui concerne lessites Web, les critères « soutien » ou « aide »sont mis en avant. Mais ils répondent souventà une logique commerciale. Et on retrouvealors en ligne ce qu’on peut acheter avec unCD-Rom, sauf que l’espace de travail ne setrouve plus sur le disque dur de l’ordinateurpersonnel, mais sur un serveur distant.La politique de développement des TICE vou-lue par le ministère, en particulier avec lesEspaces Numériques de Travail, vise à déve-lopper leurs usages dans le système éducatif.Elle permettra aux enseignants de disposer denouveaux outils pour l’exercice de leur métier,et ce, on peut l’espérer, dans l’intérêt desélèves. Toutefois, on peut se demander com-ment nous pourrons nous approprier ces outils.Les problèmes de maintenance et de formation(technique et pédagogique) que nous rencon-trons depuis des années peuvent nous laissersceptiques... �

L’aide à l’élève dans l’établissement

Qui? Avec quelle formation?F

aire réussir les élèves est l’objectif desmembres de la communauté éducative.Ni retour aux précepteurs, ni simple «sou-

tien» ou approfondissement disciplinaire, l’ai-de « individuelle» interroge nos pratiques et exi-ge des compétences spécifiques pour lesquellesla profession est en droit de demander à l’ins-titution du temps pour la réflexion, la formationet les conditions de réalisation. Loin de dé-tourner chacun des missions qui sont lessiennes, il s’agit de permettre à tous de les me-ner à bien aujourd’hui.

L’aide « individuelle » :une aventure collectiveQuels sont les besoins des élèves ? Que doit-onconnaître d’un élève pour pouvoir l’aider et à quirevient-il de l’« aider »? Lacunes disciplinaires,blocages psychologiques, situation sociale per-turbante... l’élève est une personne, une entité, sesactivités cognitives ne sont pas indépendantes deson affectivité, de son milieu social et culturel.Dans les équipes de suivi chacun a son rôle (ensei-gnants, CPE, CO-Psy, assistante sociale...). Entrel’aide à l’apprentissage et l’aide psychologique, oùest la frontière ? Le SNES, dans un stage en mai

2004(1), a tenté d’avancer quelques pistes pouréviter au mieux « la confusion des rôles et leconflit des territoires ». La « polyactivité » deman-dée aux aides-éducateurs, repérée dans une étudedu CEREQ, a permis de mesurer ce que la com-munauté éducative a à repenser pour couvrir l’en-semble des besoins des élèves. Une meilleureconnaissance des champs d’intervention de cha-cun, de leur spécificité, exige du temps, deséchanges et une grande professionnalité.

Travailler sur nos pratiquesUne aide efficace aux élèves ne va donc pasdans le sens d’une dilution mais bien aucontraire d’une plus grande professionnalisationde nos métiers, permettant un regard croiséprenant en compte l’élève dans sa globalité.Une étude du CNAM, pour le SNES, apporteégalement un éclairage innovant(2).• Repérer et identifier les difficultés pour lesréduire. Évaluer le chemin parcouru. Avecquels « outils » ?Bien peu a été fait pour mettre à jour leslogiques à l’œuvre dans les démarches d’aide etévaluer leur degré de pertinence, pour donnerdes moyens conceptuels et théoriques fiables

permettant d’analyser les difficultés rencon-trées par les élèves. Pour ce qui est des ensei-gnants, on peut souhaiter une meilleure for-mation dans le domaine de la psychologie del’adolescent, de la psychosociologie mais aussides connaissances réflexives en matière d’épis-témologie de la discipline, de didactique.

Travailler ensemble pour aller plus loinAbsences, travail (ou non) à la maison, projetou absence de projet d’avenir par exemple,exigent une réflexion d’équipe pour aider unélève que l’on souhaite volontaire.L’allègement des effectifs des classes et debonnes conditions de travail en équipe autori-seraient une plus grande prise de risque de cha-cun (savoir se taire et écouter, voire se mettreen danger quand les élèves posent toutes lesquestions) et une plus grande efficacité. �

(1) Stage « Quelles missions éducatives pour lesecond degré ? » organisé par le groupe métier ;compte-rendu disponible au SNES sur demande.(2) CNAM « Le développement du pouvoir d’agir desprofesseurs du secondaire » (disponible au SNESsur demande).

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TechnologieI

Programme de collègeLe programme de Sixième mis en consulta-tion et amendé à la suite de la consultationsera présenté au Conseil Supérieur de l’Édu-cation du 1er décembre. Le SNES avait pro-posé une réécriture du préambule et fait denombreuses propositions. Nous venons de recevoir le nouveau texte et rencon-trons le groupe d’expert, piloté par DanielSecrétan, vendredi 19 novembre.Il semble que certaines de nos critiques aientété prises en compte et que le programme deTroisième ne soit plus à l’ordre du jour.Cependant, nous continuerons de demanderau ministère que l’enseignement de la tech-nologie se fasse en groupes réduits tout aulong du collège sans réduction horaire desélèves.Le texte de l’intervention du SNES et le voteau CSE seront sur le site après le 1er décembre.

Langues vivantesI

Échanges de postesLes formulaires de candidature aux échangesposte pour poste devront être téléchargés,avant le 17décembre 2004, à l’adresse :http://www.ciep.fr/echposte. Les chefsd’établissement les transmettront pour le 14janvier 2005 au rectorat de leur académie,à l’attention du délégué académique auxrelations internationales et à la coopéra-tion (DARIC).La DARIC transmettra l’ensemble des dos-siers au Centre international d’études péda-gogiques pour le 31 janvier 2005, selon lesmodalités définies et consultables en ligneà l’adresse du CIEP (déjà mentionnée ci-dessus) dans lesquelles sont précisées lesconditions de participation à ce programme.

LivreI

Quelle histoireenseigne-t-onen Europe ?Quelle est la place de l’histoire socialedans l’enseignement de l’histoire enFrance et en Europe ?La revue Histoire et Sociétés et AdaptÉditions ont publié les principalesinterventions du Colloque de Blois (dansle cadre des Rendez-vous de l’Histoire de2003), s’interrogeant sur les enjeux dela recherche en histoire sociale et saminoration dans les programmes enFrance, en Espagne, en Ita l ie , enAllemagne et en Suisse. (Présentationet sommaire sur le s ite d’Adapt :www.adapt.snes.edu). De la recherche à l’enseignement :penser le social, 10 €À commander à Adapt Éditions, 237, bd.St-Germain, 75007 Paris avec chèquecorrespondant libellé à l’ordre d’Adapt(port gratuit) ou commande en ligne avecpaiement par carte www.adapt.snes.edu,accessible aussi par le site du SNES.

METIER

Voilà plusieurs années que desrapports ministériels ouautres (mars 1997, rapport

au Premier ministre), des confé-rences et débats (récemment auSénat) pointent du doigt l’ab-sence de référence féminine dansles manuels et ses conséquencessur la construction identitaired’un-e élève. Pourtant, il estencore trop courant de rencon-trer dans des manuels des illus-trations présentant garçons etfilles dans des situations sexuéesou des énoncés véhiculant des

poncifs sur le rôle « inné » dessexes. Ainsi, malgré les constats– de l’Éducation nationale elle-même (note de service du10/11/1983...) –, rien ne changeet les enseignants sont finalementpeu sensibilisés au problème. Les conférences-débats organi-sées par le Groupe d’HistoireSociale et le SNES lors des sep-tièmes Rendez-vous de l’Histoireont permis d’en discuter concrè-tement à partir des nouveauxmanuels d’histoire de lycée.Constat éclairant : dans le meilleurdes cas, 2 % de la pagination sontconsacrés aux femmes. Mais la nécessaire prise encompte de la place de la femmene peut se réduire à une simpleprésence en termes de groupesocial (les ouvrières du XIXe siècle)ou de personnage historique. Lesinterventions ont montré larichesse d’une entrée par le«genre » conduisant nos élèves àconstater comment une culture,un travail sexués... ont des consé-quences sur l’histoire d’une nationtout en les aidant à construire leurpropre identité. S. Chaperon a rappelé que leterme «genre» importé des États-Unis crée des polémiques (pour-quoi ne pas y préférer l’adjectif« sexué »... ?). La notion de«genre» se veut plus large et plussociétale que celle de «sexe» : lesexe est donné à la naissance, le

genre est le résultat d’une édu-cation et d’une vie sociale large-ment sexuées. Les chercheur-se-seuropéen-ne-s invité-e-s ont mon-tré que ces débats partout pré-sents cachent souvent la diffi-culté d’une société à admettrequ’elle-même produit du«genre». En Espagne, la récenteloi sur les violences conjugales,en intégrant la notion de «genre»,a créé une vive polémique. Lecas de la Russie est éclairant :recherche et enseignementn’abordent pas cette probléma-

tique dans une société devenue« classiquement » patriarcale etoù les femmes elles-mêmes refu-sent la double activité prônée parle régime soviétique (travaildomestique, activité profession-nelle), reprenant à leur comptele modèle de la femme au foyer.Les intervenants étrangers onttous mis en avant les enjeuxsociétaux et scientifiques autourdes femmes et de leur histoire,certains proposant des « pistes »didactiques. Ainsi, A.-M. Sohn aplaidé pour une « histoirebisexuée » du travail (l’apportd’une main-d’œuvre masculine

ou féminine – au XIXe siècle parexemple – a eu des conséquencessur l’organisation des tâches, lessalaires... des deux sexes),V.Opériol et CH.Heimberg ontprésenté des séquences croisantanalyse historique et réflexionsur les inégalités hommes/femmes.Entre place dans les programmeset nouvelle entrée sociale, Bloisa été aussi l’occasion de revenirsur l’histoire du féminisme. Rienn’est moins simple. En partantd’un constat, la ringardise del’adjectif « féministe », un groupede chercheur-se-s a publié LeSiècle des féminismes. Passageen revue des combats, des vic-toires, des avancées... et constatd’un déclin. Pourquoi ? Le fémi-nisme paierait au prix fort la non-mixité de ses origines et sesvictoires sans précédent qui don-nent l’illusion que plus rien n’està gagner aujourd’hui. Cetteapproche n’a pas convaincu toutle monde, en particulier nombrede professeurs pensant à leursélèves conscientes de subir auquotidien des inégalités fla-grantes : mariage forcé, tâcheménagère, travail scolaire déva-lorisé...Les revendications féministesexistent bel et bien et font encoresens pour beaucoup d’hommeset de femmes. L’organisation desluttes est par contre, là commeailleurs, à construire. Pour uneapproche globale, l’historien asous doute besoin du sociologueet certainement du syndicaliste... Le SNES a pris toute sa place àBlois: son entrée mêlant pratiquepédagogique, contenus d’ensei-gnement et approche sociale, sesinvités, universitaires de qualité,ont permis de tenir tous les boutsd’une problématique où his-toire/enseignement/volonté poli-tique d’aller vers une société éga-litaire par l’éducation secombinaient dans toute leur com-plexité. �

Maryvonne Guigonnet,responsable du

« groupe femmes» du SNESHélène Latger

chargée de la réflexion surl’histoire-géographie au SNES

SEPTIÈME RENDEZ-VOUS DE L’HISTOIRE DE BLOIS

Histoire des femmes,du genre, du féminisme...

Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 27

Dans le meilleur des cas, 2 % de la pagination

des nouveaux manuels d’histoire

de lycée sont consacrés aux femmes.

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BTSI

Programme etépreuve de françaisUn projet de programme de françaispour les BTS accompagné d’unrenouvellement de l’épreuve a étésoumis au Conseil supérieur de l’éducation du 14/10/2004.Sans concertation préalable. Lespersonnels n’ont évidemment rienà dire sur les programmes qu’ilssont censés mettre en œuvre.Quelles sont les caractéristiquesde ce texte ?Le fait de publier deux thèmesd’étude pour les étudiants deseconde année est plutôt positifet peut permettre à tous de mieuxpréparer l’épreuve. Mais les autresaspects du texte posent bien desproblèmes. Ainsi, la même épreuveavec le même corpus est prévuepour tous les BTS. Est-ce uneréponse pertinente à la diversitédes spécialités ? Il y a de notablesdifférences entre BTS artistiques,tertiaires, techniques, scientifiques.Et on peut maintenir la mêmeexigence à partir de textesdifférents. D’ailleurs, le texteofficiel lui-même recommandede proposer en cours d’année « destextes et documents de qualitéen accord avec les compétencesde lecture du public concerné »...Le texte met en place un contrôleen cours de formation en troissituations, tout en maintenant,il est vrai, une épreuve terminale.Le SNES a rappelé son oppositionau CCF qui pose en outre desproblèmes de faisabilité. Comptetenu du faible horaire de françaisdans ces sections, de l’annéeécourtée par le stage – fondamentalpour ces formations – commentinstaller trois situationsd’évaluation de deux heureschacune sans mettre les étudiantssous pression ? Comment assurerun enseignement qui permetted’ouvrir sur le monde, d’enrichirsa culture et d’améliorer la maîtrisede la langue ? D’ailleurs, le texteprésente en annexe un répertoiredes capacités et techniques à faireacquérir aux étudiants, avecproposition de situations deformation (huit pages !). Outre soncaractère très morcelé(et celaaurait aussi mérité d’être discutéen concertation), ce répertoire poseaussi la question de la faisabilité :comment mettre en œuvre leprogramme dans l’horaire imparti ?Le SNES a demandé un report ets’est adressé au Cabinet pourobtenir audience et concertationpour révision de la copie.

Le programme de l’option obli-gatoire au choix de mathé-matiques de la classe de Pre-

mière a été voté au CSE en juin2004. Publié au BO n°5 du 9 sep-tembre 2004, il sera appliqué à larentrée 2005. Le projet de pro-gramme de Terminale reprend les4 domaines amorcés en Première:arithmétique (congruences), ana-lyse (introduction intéressante del’exponentielle à partir des suitesgéométriques), stat-proba (condi-tionnement, indépendance, loibinomiale, adéquation à une loiéquirépartie), géométrie (pers-pective centrale) auxquels s’ajouteun paragraphe dénombrement(combinaisons).Comme en Première, le raison-nement et l’algorithmique serontillustrés sur des contenus du pro-gramme. L’inquiétude est celled’un programme trop lourd ; leschoix sont difficiles car les pour-suites d’études (professoratd’école, sciences humaines, arts,philosophie...) des bacheliers Lsont extrêmement diverses et defait les besoins le sont aussi. Nousavons insisté sur la nécessité de

Pour Jean-François Bach, pré-sident du groupe de relec-ture des programmes du pôle

sciences au collège, les thèmesde convergence permettront de« donner un coup de projecteursur certains points » et de favori-ser le travail entre disciplines.Conscient de la nécessité de déga-ger du temps pour la concerta-tion, il essaie de « trouver unesolution pour que les gens se ren-contrent », mais à moyensconstants. Nous avons rappelé lespropositions du SNES concernantla construction des programmes etles objectifs de culture au col-lège. A l’idée de laisser les élèvesen activité sans le professeur pourdégager du temps (avec un assis-tant d’éducation ou un interve-nant extérieur ?!), nous avons

marquer les limites du pro-gramme, en particulier en arith-métique et proposé quelquesallègements : supprimer les com-binaisons et limiter l’étude descomportements de exp, ln, qn enl’infini à des observations numé-riques, réduire la partie stat-probaà celle de ES. Par contre faut-ilrenoncer à toute approche de lanotion d’intégrale comme le faitle projet ? On peut concevoir uneapproche de l’intégrale qui pri-

vilégie la valeur culturelle de lanotion, favorise le lien somme decontributions élémentaires et airesous la courbe et évite toute tech-nicité (par exemple à partir de lanotion de valeur moyenne). Onne peut compter sur l’enseigne-ment supérieur pour cela. Ne pasle traiter en Terminale peut péna-liser ceux qui entreprendraientcertaines études, par exemple éco-nomiques.Nous avons demandé que le docu-ment d’accompagnement soit plusfourni que l’actuel (références his-toriques, connaissances sur laperspective...). Le projet de pro-gramme devrait être soumis àconsultation au premier semestre2005 par le biais de la liste dediscussion sur le site ministériel :www.eduscol.education.fr (s’ins-crire sur la liste).Enfin nous avons dénoncé l’ab-sence de moyens spécifiques pourimplanter cette option (elle neconcerne qu’environ 7 % desélèves de L). �Pour nous écrire :[email protected]

José Pozuelo, Brigitte Sotura

MATHÉMATIQUE EN L

Rencontre avec le groupe d’experts

SCIENCES AU COLLÈGE Compte rendu de l’audience SNES /Jean-François Bach le 20 octobre 2004

Quels objectifs pour les thèmesde convergence ?

opposé la nécessité d’encadre-ment par des enseignants, sansrogner les horaires disciplinairesni le travail en groupe : desmoyens professeurs sont incon-tournables pour un enseignementde qualité et du temps réel deconcertation dans les emplois dutemps. Si nous souhaitons pou-voir mener un véritable travailinterdisciplinaire sur quelquespoints bien identifiés dans les pro-

grammes, afin de donner du sens,de la cohérence, aux contenusenseignés par différentes disci-plines, nous réfutons l’approchede J.-F. Bach qui a une vision uti-litariste de ces thèmes, moyenpour lui de charger les comporte-ments (dans le domaine de lasanté, la sécurité...) avant mêmede permettre l’acquisition d’uneculture scientifique ambitieuse.

Liliane Cotton, Joël Besnard

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 29

Ce travail collectif repose sur l’obser-vation et l’analyse de ce qui se passe

dans des collèges populaires, de ZEP.Sous différents angles les auteurs tententde mettre en évidence les différents dis-positifs pédagogiques mis en place pourrépondre à l’hétérogénéité croissante desélèves.Chacun de ces dispositifs est repris, tra-duit, retravaillé par les équipes dans cha-cun des collèges observés.C’est la grande diversité du collègeunique qui nous est donnée à voir, avecdes analyses de ces dispositifs qui,

comme le rappellent les auteurs, restent à la périphérie de l’en-seignement. Le «centre» semble figé dans la forme scolairetraditionnelle.Mais l’ouvrage montre que les choses bougent dans le collège.Intéressante réflexion sur les liens entre culture scolaire et cul-ture familiale pour la construction de la culture commune.Cet ouvrage fera l’objet d’une présentation et d’un débatavec les auteurs dans le cadre de l’Observatoire national despratiques et des programmes.

Le collège en chantierSous la direction de Yves Dutercq et Jean-Louis Derouet. INRP. Édition 2004

Younes Amrani, jeune homme travaillant commeemploi-jeune dans la région de Lyon, lit 80 % au

bac... et après de S. Beaud ; il écrit à l’auteur pour le« remercier » de ce livre, qui décrit des histoires prochesde la sienne. S’ensuit une conversation par e-mail d’où vaémerger une «autre vision » des « jeunes de banlieue »,bien plus complexe que celle véhiculée dans les médias.Ce livre est un formidable document pour comprendrece que sont les conditions de vie de ces « jeunes des ban-lieues ». On y découvre, par la voix de Y. Amrani, un monde et des individuspris dans des contradictions douloureuses, hésitant entre révolte et « abandonde la partie », en rage contre une France qui « a fait ses plans sans » ces « jeunesde banlieues », mais rêvant de pouvoir vivre comme tout le monde, sans com-prendre pourquoi ce pays leur inflige ces conditions de vie après avoir broyéleurs parents.La pauvreté qui entraîne la « haine » et la honte de soi ; la difficulté des rela-tions garçons-filles dans les cités ; le tiraillement entre individualisme et res-pect des traditions ; la révolte face aux appareils politiques sourds aux souf-frances de ces jeunes ; les difficultés à l’école, les espoirs et les terriblesdésillusions du retour à l’usine...Tous ces thèmes et bien d’autres font de ce document bouleversant un livreà lire de toute urgence, pour lutter contre le regard méprisant ou condescen-dant que l’on porte trop souvent sur cette frange de la jeunesse populaire.

Pays de malheur !Younes Amrani, Stéphane Beaud.Éditions La découverte, 2004.

STG (SCIENCES ET TECHNIQUES DE GESTION).

La rénovation entre dans sa dernière phase

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La Première STG entreen applicationà la rentrée 2005L’horaire global professeuraffecté aux disciplines relevantdu bloc technologique étantinchangé, la rénovation ne devraitpas avoir d’impact sur les postesd’économie-gestion.Toutefois la vigilance s’impose : ila été demandé aux chefs d’éta-blissement de déclarer la fermeturede leurs Premières STT au recto-rat pour réouvertures de PremièresSTG qui ne seraient pas nécessai-rement égales aux fermetures. Larénovation est ainsi le prétexte àune réduction des formations ter-tiaires alors même que son objec-tif affiché est leur valorisation.Des prévisions de regroupementdes spécialités par pôles pourraientégalement être à l’origine de sup-pressions de divisions de Premièredans certains établissements.Dès maintenant, dans chaque éta-blissement et dans le cadre de lapréparation de la rentrée, deman-dons les prévisions de structure enPremière STG par spécialité, etvérifions la légitimité des prévi-sions d’effectifs.Dans le cas d’incohérences, envi-sageons dès maintenant l’actioncollective (enseignants du général

et du technique) dans le cadre duCA et en direction du rectoratpour le maintien voire le déve-loppement des enseignementstechnologiques tertiaires.La nouvelle discipline « Mana-gement des organisations» (1+1)consomme 3 heures professeurs« redistribuées» entre les diffé-rentes disciplines. C’est un ensei-gnement du tronc commun pou-vant par conséquent êtrethéoriquement enseigné par unprofesseur d’économie-gestionquel que soit son étiquetage. Laquestion des postes dépendradonc aussi de la répartition desservices entre les collègues.

La Terminale STG entrera enapplication à la rentrée 2006Les interventions du SNES surles programmes de Première etles amendements proposés ont eudes répercussions positives sur laconception de ceux de Terminale.Nous notons :• Une évolution positive de l’en-seignement de mercatique rédigéde façon moins abstraite de façonà permettre un lien plus évidentavec une démarche active.• Un enseignement de « Mana-gement des organisations » (3 h)qui intègre en partie les demandes

du SNES d’un renforcementd’une étude plus identifiée desorganisations et des associationspubliques. Il n’en reste pas moinsque nous continuons à demanderun dédoublement de l’horaire(2heures + 1).•L’économie reste dans la logiqueque nous avions contestée d’éco-nomie de marché avec toutefoisdes améliorations par rapport àl’enseignement de Première puis-qu’en Terminale des pointsmacroéconomiques essentielssont abordés.• Le référentiel de droit n’a quantà lui pratiquement pas évolué surle fond et reste abordé à partir del’entreprise.• Le projet de «Comptabilité etfinance d’entreprise » semblaitrecueillir des avis assez favorables.• Le projet de «Gestion des sys-tèmes d’information» fait l’ob-jet des plus vives contestations.Le SNES a demandé la réécri-ture de ce programme «illisible»et « infaisable » pour beaucoupde collègues. Le projet amendémarque une évolution importantedans le sens d’une meilleure lisi-bilté. Mais la demande de forma-tion des collègues est forte y com-pris dans les pratiquespédagogiques à mettre en œuvre.

• « Communication et gestion desressources humaines » rompt avecla logique d’apprentissage detechniques au profit d’uneapproche plus généraliste de lacommunication avec une nou-velle dimension intégrant leconcept de ressources humaines.Le SNES a toujours accueillifavorablement le principe d’unerénovation de la série. L’ensembledes collègues partage l’idée desa valorisation nécessaire. Enmême temps, les collègues fontpart de leurs difficultés grandis-santes à enseigner dans les classesde STT et de leurs inquiétudesface aux nouvelles exigences descontenus rénovés. Ce n’est qu’enprenant en compte cette réalitéque la rénovation de la série ter-tiaire sera un succès et pourracontinuer à contribuer à une dyna-mique de démocratisation denotre système éducatif.Mais les disciplines générales nedevraient pas être les oubliés dece chantier : améliorer les condi-tions d’enseignement des mathé-matiques, avoir une réflexionambitieuse sur l’histoire géogra-phie, les langues vivantes, laphilo... sont aussi les clefs de laréussite de cette rénovation. �

Sylvie Obrero

Livres

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30 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

CATÉGORIESAVANT MÊME LA LOI DE MODERNISATION annoncée pour l’année 2005, la fonction publique vit de profonds changements.À la gestion des personnels, politiques et hauts-fonctionnaires veulent substituer une « gestion des ressources humainesindividualisée ». Au nom de l’efficacité, celle-ci devrait reposer essentiellement sur l’avis du chef de service. La réformede l’évaluation des fonctionnaires, organisée par le décret du 29 avril 2002, est une pièce maîtresse de cette évolution.

Réforme de l’évaluation et dela notation des fonctionnairesL

’évaluation donne lieu à unentretien conduit par lesupérieur hiérarchique direct

du fonctionnaire. L’entretienporte sur « les résultats profes-sionnels obtenus par le fonction-naire au regard des objectifs quilui ont été assignés, (...) sur sesbesoins de formation continue,(...) sur ses perspectives d’évolu-tion professionnelle ». Il peutaussi porter sur la notation.Des arrêtés ministériels précisentla périodicité de la notation, éta-blissent la liste des chefs de ser-vice ayant pouvoir de notation,les critères d’appréciation, lesniveaux de notes, leurs margesd’évolution ainsi que les modali-tés d’harmonisation préalable desnotations. Les projets d’arrêtéspour les personnels IATOSdevraient être prochainementpubliés ; l’évaluation sera effec-tuée tous les deux ans (annéesimpaires), l’échelle de notationest déplafonnée.

La différenciation des rythmesd’avancement d’échelon estaccentuée. L’avancement estmodulé à partir d’une durée« moyenne » ; chaque année,20 % des agents peuvent ainsibénéficier de trois mois de réduc-tion de la durée de séjour dansl’échelon; 30 % d’une réductiond’un mois par an. Les agentsconcernés sont ceux qui ont béné-ficié des plus fortes augmenta-tions de note. Une majoration dela durée de séjour dans l’échelon(de 1 à 3 mois par an) peut êtreappliquée au fonctionnaire dontla « valeur professionnelle estinsuffisante ». Dans ce cas, lesmois récupérés par l’administra-tion sont redistribués aux autresagents du service! La répartitiondes augmentations de notes doitrespecter le partage des agentsentre les 20 %, 30 % et les autres.Les notes sont donc attribuées, àpartir du bilan de l’entretien, parune commission qui en assure

une répartition conforme. Le rôlede la CAP, saisie pour examinerles demandes de révision setrouve ainsi fortement réduit.L’avancement de grade doit tenircompte des notations attribuées àl’intéressé, des propositionsmotivées formulées par les chefsde service, et de l’évaluation del’agent retracée par les comptesrendus d’évaluation. La FSU s’est prononcée contrece texte; pour l’efficacité du ser-vice public, il est nécessaire dedonner aux agents les moyens deremplir leurs missions. Il estnéfaste de les diviser quand le tra-vail en équipe devient essentiel.Elle a rappelé sa revendicationque les changements de gradebénéficient au plus grand nombre.Formellement ce décret nes’applique pas aux enseignants,CPE et CO-Psy, dont l’évalua-tion relève de dispositions statu-taires particulières. Pourtant, lesorientations qui ont prévalu ne

sont pas complètement étran-gères à celles que nous connais-sons. Au moment où l’évaluationdes enseignants, insatisfaisantedans son organisation et sondéroulement, fait l’objet deréflexions diverses, de proposi-tions dans le rapport Thélot, iln’est pas inutile de savoir ce quise passe autour de nous. Lescohérences avec les logiques quenous contestons dans les projetsdes notes de service sur l’accès àla hors-classe ne relèvent pas quedu hasard. � Anne Féray

LA RETRAITE ADDITIONNELLE EN PRATIQUECe régime obligatoire est alimenté par les cotisations sur les éléments derémunération non soumis à retenue pour pension. Le taux de cotisationest de 5 % salarié, 5 % employeur. L’assiette est constituée des élémentsde rémunération soumis à CSG, hors du traitement indiciaire, de la NBI etdes indemnités de sujétion. Elle comprend notamment l’ISOE, les heuressupplémentaires. Elle est limitée à 20 % du traitement indiciaire.Le montant des droits est évalué en points. Aucun point ne peut êtreaccordé à titre gratuit. Le versement de la pension s’effectuera en rente,sauf si les droits sont inférieurs à 205 euros par an. Ce sera vraisembla-blement le cas pour ceux qui cesseront leur activité avant 2010. La valeur du point augmente avec l’âge auquel le versement estdemandé. Cet âge ne peut en aucun cas être inférieur à 60 ans.Les droits à réversion sont calqués sur ceux du Code des Pensions.Loi du 21 août 2003 (article 76) ; décret 2004-569; arrêté en cours.

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nationale. Le régime de retraiteadditionnelle n’apporte pas cesgaranties. Il s’agit d’un régime à« cotisations définies » : si chaqueagent sait ce qu’il cotise, il ignorece que seront les prestations ser-vies au cours de sa retraite. Lesseules ressources du régime sontles cotisations et les revenusfinanciers des placements. Àchaque instant, les avoirs durégime doivent couvrir les« engagements » : il s’agit doncbien d’un régime de retraite parcapitalisation. Seul élément desolidarité, les risques sont mutua-lisés. Si ce régime est une nou-veauté, c’est bien au sens où,régime public de retraite, il s’ins-pire des modalités de l’assurance.La FSU n’a donc pas souscrit à

LE RÉGIME DE « RETRAITE ADDITIONNELLE DE LA FONCTION PUBLIQUE » (RAFP) a été créé par la loi de réformedes retraites. Les premières cotisations seront prélevées en janvier 2005.

RAFP : une capitalisation mal déguiséeL

’objectif de rendement durégime est d’augmenter àterme le taux de remplace-

ment de la pension des fonction-naires d’au plus 4 points. Laréforme des retraites dégrade cetaux d’environ 25 points pourceux qui, au terme d’une carrièred’une durée moyenne, voudraientliquider leur pension à l’âge de 60ans. La « contrepartie » n’estmanifestement pas à la hauteur. La FSU revendique l’intégrationdes «primes» et indemnités dansle traitement. Comme aujour-d’hui la NBI, elles feraient alorsl’objet de retenues pour pensionet d’une contribution de l’em-ployeur plus élevées. Elles ouvri-raient ainsi des droits plus impor-tants, garantis par la solidarité

sa création. Représentée auconseil d’administration, elle ysiège pour assurer la transpa-

rence sur la gestion des biens desfonctionnaires, y défendre leursintérêts. � A. F

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32 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

FENÊTRE SUR/L’IRHSES

L’US : Pourquoi ce livre? N’existait-ildonc rien sur le sujet ?Alain Dalançon : Les raisons de cetteentreprise ont été résumées dansl’avant-propos de ce 1er tome quej’ai signé avec le concours d’AndréDrubay, ancien secrétaire généraldu SNES de 1967 à 1971, et dePierre Pétremann, secrétaire géné-ral de l’IRHSES et professeuragrégé d’histoire. Il fallait com-bler un vide. Paradoxalementaucun livre n’était consacré auSNES, le plus important et le plusancien syndicat du second degré –si l’on tient compte des organisa-tions qui furent à ses origines –alors que le SGEN, le SNI et laFEN disposaient chacun d’une his-toire écrite par des historiens mili-tants. Or il existait une fortedemande des jeunes et mêmemoins jeunes. Il nous a semblé quele temps était venu de prendre encharge l’écriture de cette histoire.

L’US : Mais avec quelle objectivité ?Tu as été un responsable du SNES, nepeut-on pas te suspecter d’avoir écritune histoire partisane ? A. D. : On ne peut évidemmentesquiver la question de la distan-ciation nécessaire au travail del’historien. La dérive vers le «partipris » nous interpellait. Cette qua-lité de syndicaliste me permet seu-lement de me prévaloir d’unebonne connaissance du milieuenseignant et syndical du SNESet de la FEN. Mais je suis aussi his-torien. En tant que tel, je sais qu’iln’existe pas d’histoire objective,je veux dire, au-dessus de la mêlée desaffaires de ce monde, incontestable et doncdéfinitive. Nous nous sommes seulementefforcés d’être intellectuellement honnêteset d’utiliser les méthodes éprouvées du métierd’historien. Nous avons souligné que ce livren’était pas une histoire officielle du SNES,qu’elle ne prétendait pas trancher ni conclure,qu’elle restait objet de débat.

Notre seul espoir, c’est que ce livre donneun ensemble de repères. À la fois, à ceuxqui ont été des acteurs – responsables ouanonymes – et aux plus jeunes, afin qu’ilscomprennent dans quelles continuités etquelles évolutions se situent les problèmesauxquels ils sont confrontés et pour mieuxles persuader de la nécessité du syndica-lisme.

L’US : L’histoire est donc utile pour lesyndicalisme aujourd’hui ?A. D. : Bien sûr. Mais il n’est pasquestion pour moi de prêter le flancà une quelconque instrumentalisa-tion de l’Histoire. Elle ne permetpas de décider pour l’éternité qui aeu tort ou raison. Et ne me deman-dez pas si la scission de 1992 n’ainauguré qu’une parenthèse, si l’au-tonomie de la FSU (ou de l’UNSA)a un avenir, ce qu’il faudrait fairepour apporter des solutions à lacrise du syndicalisme... L’Histoirepermet seulement de nous situer, dereconnaître notre passé et de mieuxnous préparer à agir dans le présentet nous projeter dans l’avenir.

L’US : De quelles sources disposiez-vous ?A. D. : Nous avions accumulé depuis15 ans des matériaux divers et desétudes. Il nous a donc semblé pos-sible d’en faire la synthèse. L’ori-ginalité de cette histoire provient ducroisement de l’utilisation tradi-tionnelle des archives (écrits, impri-més, photos...) avec celle des expo-sés et débats des séminaires(CRHSS-FEN puis CHS-UNSA etceux de la FSU), et avec la prise encompte des analyses et du vécudes acteurs de cette histoire, quenous avons interviewés quand nousl’avons pu. Il est en effet impen-sable de nous priver de l’apportdes témoignages des militants. Neserait-ce que parce que cette his-toire, comme toute histoire, estcelle d’hommes et de femmes, dontil faut rendre sensible le vécu, les

représentations, les craintes comme lesespoirs et les utopies.

L’US : Mais n’avez-vous pas été l’objet de pres-sions de la part de ces militants ?A. D. : Jusqu’à présent non. J’espère que celacontinuera pour l’élaboration du 2e tome.Mais il est clair qu’il n’a jamais été questionpour nous d’écrire cette histoire comme une

L’INSTITUT DE RECHERCHES HISTORIQUES SUR LES ENSEIGNEMENTS DU SECOND DEGRÉ (L’IRHSES) créé à l’initiative duSNES conserve les archives et effectue tout un travail de publication. Nous avons questionné Alain Dalaçon, sonprésident, sur l’histoire du SNES dont le premier tome a été publié.

Histoire du SNESDes origines à 1966 (tome 1)

Questions à son auteur, Alain Dalançon, président de l’IRHSES(1)

Disponible actuellement à l’IRHSES 5, square Villaret-de-Joyeuse, 75017 Paris.

Tél. : 01 40 68 74 74Courriel : [email protected]

Internet : www.irhses.snes.edu

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 33

d’enseignants qualifiés, dont la conditiondoit être revalorisée, parce qu’il en va del’avenir de la Nation, pour la réalisation despromesses de l’idéal républicain d’une sociétéplus juste avec des citoyens responsables,libres et égaux en droits et devoirs.Du coup, corporatisme – si décrié aujour-d’hui, parce qu’on l’associe dans le discoursdominant à conservatisme, refus de laréforme – ne signifie pas obligatoirement

repliement conservateur. Les revendicationss’adossèrent de plus en plus précisément àdes projets d’amélioration et de réforme dusystème éducatif (son unification, sa démo-cratisation) voire à la préparation de la révo-lution sociale, pour les légitimer sur le fond.On ne peut réduire cela à un habillage ver-tueux d’intérêts égoïstes. « Ce monde nou-veau que le XXe siècle est en train d’enfantersera celui de la justice sociale, de la libertéhumaine et de la paix entre les peuples »,lisait-on sur les murs lors du congrès de laFEN-CGT de 1949, phrase que la FEN auto-nome n’aurait pas désavouée à l’époque.Foutaise que tout cela, pourront dire lessceptiques aujourd’hui! Mais c’est bien pourqu’une telle utopie généreuse devienne uneréalité que le combat syndical fut aussi mené,et que j’espère – je sors là de ma fonctionstricte d’historien –, il continuera d’êtremené.

L’US : Sur quelles pistes partez-vous pour lesecond tome et quand prévoyez-vous sa sortie ?A. D. : Ce qu’il nous faudra essayer de com-prendre dans le second tome (prévu pourembrasser la période 1967-1992), ce seranotamment pourquoi l’autonomie structu-relle de la FEN, qui permettait de rassembler

motion de congrès. Pas de faux compromispour donner satisfaction à tout le monde ouà certains ; pas de sujets tabous ! J’ai voulupréserver mon indépendance dans la réflexionet dans l’écriture. Mais je n’ai pas voulu tra-vailler dans le secret, puisque notre texte a étésoumis aux avis et remarques de notre conseild’administration. Nous comptons bien pour-suivre dans cette voie.

L’US : Quelles ont été vos problématiques ?A. D. : Pour reprendre l’image et l’approche deJacques Girault, le syndicalisme peut servirde «prisme pour observer et analyser les rap-ports entre le monde enseignant et la sociétéglobale», dans un pays où l’École est deve-nue très tôt un enjeu d’État, et le lieu et lemoyen privilégié de mutation de la société. On ne peut évidemment tout dire. J’ai voulufaire d’abord un récit en contextualisant aumieux les faits et en essayant de ne pas igno-rer tout ce qui se pense, se dit et s’écrit pourles analyser (problématiques d’historiens,sociologues, spécialistes des sciences del’éducation et des sciences politiques, et syn-dicalistes eux-mêmes...). J’ai également tenté de ne pas verser dans uneapproche par trop téléologique de l’histoire :c’était fatal, cela devait arriver. Cependant, lesévénements décisifs méritent une analyse de

leurs causes, dont certaines sont lointaines etprofondes. J’ai souhaité également prendre mes dis-tances par rapport à des clés explicatives,qui sous prétexte de prendre de la hauteur,aboutissent parfois à des simplifications abu-sives. C’est le cas des explications qui privi-légient les rapports syndicalisme-politique.Nous montrons qu’il existait une relative«autonomie » du fait syndical. C’est aussi lecas des interprétations qui privilégient la« professionnalisation » et l’opposition descultures instituteurs/profs ou enseignants/non-enseignants. La dimension diversité et oppo-sition des orientations syndicales a tendancealors à disparaître.

L’US : Un mot de vos conclusions ?A. D. : Ce qui est incontestable, ce sont lesmarques durables que ce syndicalisme aimprimées depuis un siècle dans le fonc-tionnement du service public d’éducation etdans l’identité des fonctionnaires qui tra-vaillent à son service. Les syndicalistes ensei-gnants ont ainsi bâti progressivement unargumentaire, déjà très au point dès 1919, quisous-tend toujours l’intervention syndicaleaujourd’hui : il faut recruter par concoursdans l’université républicaine laïque plus

très largement l’ensemble des professionsde l’Éducation nationale n’a pas résisté, cequi a conduit à l’exclusion du SNES et duSNEP de la fédération, son éclatement et larecomposition que nous connaissons actuel-lement. Même si je partage des conclusions exposéesdans l’introduction du récent ouvrage de GuyBrucy sur l’histoire de la FEN, je ne pensepas que la question soit épuisée. En tout casson livre ne rend pas superflu une autreapproche, vue à partir de l’histoire du syn-dicat, dont certains pensent que c’est « par luique le malheur arriva ». Rendez-vous dansun peu plus d’un an. �

(1) Président de l’IRHSES depuis la fondation en1985, il fut secrétaire du S3 de Poitiers de 1976 à1992 et directeur de L’US de 1985 à 1989.Professeur de chaire supérieure d’histoire, aujour-d’hui retraité, il enseigna durant 25 ans dans lakhâgne de Poitiers.

Les revendications s’adossèrent de plus en plus précisément

à des projets d’amélioration et de réforme du système éducatif

voire à la préparation de la révolution sociale. On ne peut réduire

cela à un habillage vertueux d’intérêts égoïstes.

L’IRHSES L’Institut de recherches historiques sur les enseignements de second degré est une associationloi de 1901, créée en 1985 à l’initiative du SNES avec un double objectif : permettre le dévelop-pement de la recherche historique en conservant les archives et en les étudiant, faciliter la for-mation syndicale. Aujourd’hui, l’IRHSES est reconnu comme centre de formation syndicale et tousles stages que le SNES organise le sont avec son label.Depuis plus de 15 ans, l’IRHSES a accumulé des matériaux divers, produit des études dans sonbulletin Points de repères. (Numéros sur enseignement et démocratisation du second degré, surla guerre d’Algérie, sur la scission de 1948…). L’Institut conserve les archives du SNES (entotalité depuis 1966, partiellement depuis 1944), de la FIPESO (Fédération internationale des pro-fesseurs de l’enseignement secondaire officiel), une partie des archives photographiques de l’Uni-versité syndicaliste, des fonds privés de militants... Cela représente 3 500 cartons d’archives,300 cassettes audio/vidéo, 20 000 photos et diapos qui sont consultables par les chercheurs,conformément aux règles du CODHOS qui regroupe tous les instituts conservateurs des archivesdu mouvement social. L’IRHSES participe aussi à l’élaboration des notices biographiques du Maitron(dictionnaire biographique du mouvement ouvrier).

5, square Villaret-de-Joyeuse, 75017 Paris(métro Argentine), tél. : 01 40 68 74 74.

Courriel : [email protected] Internet : http://www.irhses.snes.edu

Attention : l’IRHSES va déménager dès la finde l’année 2004 et rejoindra le nouveau siègedu SNES, 46, avenue d’Ivry, Paris 13e.Si vous voulez aider l’IRHSES, adhérez à l’as-sociation. La cotisation donne droit à la récep-tion de Points de repères (le n° 27 vient deparaître : étude cartographiée des scrutinsde 1967 et 1969 dans le SNES et la FEN parPierre Pétremann).Avis de recherche : il nous manque unedizaine de numéros de l’US, entre 1936 et 1939(qui ne se trouvent ni à la BN ni aux archivesnationales, cette revue avait été créée en1928 par la section des professeurs du 2e et 3e

degré de la Fédération unitaire, sous la direc-tion de Georges Cogniot).

IRHSES PRATIQUE

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34 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

INTERNATIONALMARCHÉ DE DUPES. La réunion de la 51e session de la Conférence des ministres de l’Éducation des pays ayantle français en partage (CONFEMEN), s’est tenue fin octobre 2004 à l’Ile Maurice. Les partisans de la rechercheà tout prix du coût minimal pour les systèmes éducatifs africains y ont rencontré une forte opposition.

Échange statut des enseignantscontre Éducation Pour TousL

e début de la réunion de la CONFEMENsur le thème de l’évaluation a montréque la menace devait être prise très au

sérieux. Pour lancer les discussions avaientété invités la Banque Mondiale, une cher-cheuse de Hambourg, pour présenter le pro-gramme PISA, et de nombreuses institutionsintervenant en éducation y compris finan-cièrement.Le ton est tout de suite donné par le repré-sentant de la Banque Mondiale pour quil’évaluation doit déboucher sur le choix ducoût minimal pour « scolariser » le plus grandnombre possible d’enfants. L’obsession de laBanque Mondiale c’est le coût du système, del’élève, de l’enseignant... présenté par desdiagrammes sur l’« espérance de vie sco-laire », « niveau moyen d’acquis des élèves »,« score standardisé ajusté en cinquième classeprimaire », « taux de réussite à l’examen defin de primaire »... Le tout est asséné avecl’assurance scientifique, mais sans les don-nées qui ont été utilisées et que tout scienti-fique souhaitera connaître pour pouvoir tirerdes conclusions politiques.Comme si cela ne suffisait pas, le Programmed’Analyse des systèmes éducatifs (PASEC)est venu en renfort avec des études réaliséesau Mali, au Niger et au Togo.La présentation est tout aussi schématiquemais les conclusions ciblées sont encore plusbrutales :• la taille des classes limitées à 60/65 élèvesne conduirait pas à une baisse sensible dequalité par rapport à des classes à effectifsréduits ;• le niveau académique du BEPC est sou-haitable pour le recrutement des enseignantsdu primaire au Togo, plutôt que celui dubaccalauréat exigé depuis 1983 dans ce pays ;• les différences de résultat entre enseignantscontractuels et fonctionnaires sont restreintes,voire inexistantes.Au-delà de considérations statistiques quiont leur importance, c’est l’objectif qu’ilimporte de démasquer : il faut casser le sta-tut des enseignants en Afrique sub-saha-rienne francophone car c’est un obstacle à laréduction du coût de l’éducation.Pourtant, toute cette belle mécanique s’estenrayée. La plupart des ministres rappellentque l’éducation ne peut être considérée seu-lement en terme de coût financier. Le ministredu Congo refuse de se voir imposer un recru-tement des enseignants au niveau BEPC,alors que son pays recrute à un niveau supé-

rieur. Le ministre du Mali s’insurge contre lechantage de la Banque Mondiale qui lui pro-pose d’ouvrir le recrutement d’enseignants enéchange de la privatisation du secteur ducoton. Il dénonce le rôle de la Banque Mon-diale à travers les PAS, qui a mené son paysà cette situation de pénurie d’enseignants.Roger Dehaybe, administrateur de l’AgenceIntergouvernementale de la Francophonie,dénonce l’hypocrisie des bailleurs de fondsqui donnent plus par tête de bétail que ce

qu’ils donneraient par enfant pour l’éducationen Afrique. Le CSFEF* invité à prendre laparole en fin de conférence, revient sur lesattaques dont sont victimes les enseignants endénonçant l’orientation politique desméthodes utilisées et en mettant en gardesur les conséquences explosives de mise enœuvre de telles politiques.Ce qui est en jeu actuellement en Afriquesub-saharienne francophone, ce n’est ni plusou moins que le droit à l’éducation. Pourcasser le service public, quoi de mieux que des’attaquer au statut des personnels et reléguerainsi l’éducation au rang d’un service mar-chand dont les salariés ne seraient plus étroi-tement liés aux missions essentielles de l’État.Condamner le statut, c’est décrocher les qua-lifications des personnels de leurs systèmesde rémunérations, ouvrant ainsi la porte àune école sans qualité, alors que les évolu-tions de toutes les sociétés nécessitent plus decapacités humaines, scientifiques et sociales.Il faut à la fois défendre le statut de fonc-tionnaire des enseignants pour nos pays et ilfaut imposer l’octroi de moyens financiers

nécessaires à l’éducation pour tous. L’esti-mation la plus haute – 15 milliards de dollarsUS – représente moins de 0,30 % du PNBtotal des pays en développement, 0,06 % duPNB total des pays développés et 0,05 % duPNB mondial.Sans compter que les moyens que ces paysconsacrent à l’éducation peuvent être large-ment augmentés par la mise en place de poli-tiques fiscales appropriées et par la luttecontre la corruption.

À tous les amateurs de graphiques, il faut enplus proposer ceux qui indiqueront combiend’élèves supplémentaires et combien d’en-seignants fonctionnaires qualifiés l’annulationde la dette permettra de réaliser. C’est uneréponse à une interrogation du PrésidentDiouf, Secrétaire général de l’OrganisationInternationale de la Francophonie, qui dansune interview récente posait la question duréaménagement de la dette en faveur del’éducation et de la santé dans l’optique duprochain sommet de la Francophonie. �

Roger Ferrari,* Président du Comité Syndical Francophone

de l’Éducation et la Formation (CSFEF)

AbréviationsBAD : Banque Africaine de DéveloppementBID : Banque Islamique de DéveloppementADEA : Association pour le Développementde l’Éducation en AfriqueAIF : Agence Intergouvernementale de laFrancophoniePAS : Plan d’ajustement structurel

ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR EUROPÉENLe SNES a participé à la réunion du comité enseignements supérieurs del’Internationale de l’Éducation Europe, qui s’est tenue à Gdansk les 21-22octobre dernier. La majorité des pays européens adaptent leur systèmeau processus de Bologne sans grande contestation des étudiants ou despersonnels, mais sans concertation non plus avec les organisations syn-dicales. L’IE demande que soient prises en compte ses propres revendi-cations, face aux menaces de privatisation de l’enseignement supérieuret de dégradation des conditions de travail des personnels.Ainsi, l’IE organisera un séminaire à Bruxelles en février prochain afin depeser sur la prochaine conférence ministérielle de Bergen (suivi du pro-cessus de Bologne). Jean-Hervé Cohen

Monument aux trois ancres, place Soli-darnos, en mémoire aux dockers dispa-rus pendant la guerre, aux ouvriers tuéspendant la grève des chantiers navals de1970, aux grandes grèves de 1980.

Ce qui est en jeu actuellement en Afrique sub-saharienne

francophone, ce n’est ni plus ni moins que le droit à l’éducation.

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RussieI

SolidaritéLa situation de nos collègues en Russie estinacceptable. En effet, selon l’IE, le salairemoyen des enseignants est d’environ100 dollars (moins de 100 euros) par mois.Les conditions de vie des employés du publicse dégradent de jour en jour, ce qui a amenéle syndicat ESEUR à appeler les personnelsde l’éducation à une journée de grève le20 octobre, pour réclamer une augmentationdes salaires de 30 %.Des centaines de milliers d’enseignants,scientifiques, médecins et employés de laculture ont participé à cette journée à traverstoute la Russie.Nous exprimons ici notre solidarité et notresoutien aux collègues russes ainsi qu’auxcollègues de la république d’Ossétie du Nord.

ItalieI

Grève généraledans l’ÉducationLundi 15 novembre, l’ensemble des syndicatsitaliens ont organisé une grève générale et unemanifestation nationale à Rome. Ils demandentun relèvement de 8 % des traitements pour2004 et 2005, l’engagement d’un planpluriannuel d’investissement pour l’écolepublique. Ils expriment « leur refus le plusferme de la régionalisation du systèmed’instruction » et demandent la garantiedu caractère national du second degré« contre toute dérive régionaliste ».Ils s’opposent à un projet gouvernementalqui aurait pour conséquence de réduire lesdroits des personnels et de leurs représentants,et défendent la responsabilité collégialedes enseignants dans la définition de l’offre deformation. Ils déclarent solennellement le droità l’instruction pour tous les élèves, droit remisen cause par la réforme Moratti. Celle-cipréconise une sélection plus précoce enproposant aux élèves de 13 ans un choix entrepoursuivre en série générale ou aller enformation professionnelle. Elle prévoitl’abandon des projets d’intégration des jeunesimmigrés et des handicapés. Fondée surles trois « I » (informatica, inglese, impresa –informatique, anglais, entreprise), elle suggèreune gestion managériale des établissements.Toute ressemblance avec une situation connueailleurs est purement fortuite.

IslandeI

Mobilisation d’envergureLes enseignants Islandais, qui depuis 1996 sontemployés par les municipalités et non plus parl’État, sont en grève depuis plusieurs semaines.Ils revendiquent une amélioration de leur statut,de meilleures conditions de travail et desaugmentations de salaires. Ils subissentde plein fouet les effets de la décentralisation.Nous y reviendrons prochainement.

Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 35

L’US Mag : Quelles sont les principalesraisons de la réforme ? Quelles en sontles problématiques ?Christoph Heise : A tous les niveaux del’éducation, le financement, la gestion etl’adaptation à la concurrence internationalesont à l’ordre du jour. Le point le plusimportant, c’est la qualité de l’école pourtous. L’étude internationale comparative del’enquête PISA a montré que les compé-tences en lecture et en compréhension, aussibien qu’en mathématiques, des jeunes de15 ans en Allemagne étaient bien au-dessousde tous les autres pays. Ce fut pour l’Allemagne, longtemps sereineet fière de son système de formation, unchoc terrible qui engendra un long débat etune grande effervescence des 16 gouver-nements des länder et de leurs 16 ministresde l’Éducation. Même le gouvernementfédéral, peu concerné par la politique sco-laire, à la suite du « choc PISA », a pris dif-férentes initiatives.

L’US Mag : Quels sont les points essentielsde la discussion PISA ?C. H. : L’école pré-élémentaire (les « kin-dergarten ») doit être développée, car ellel’est peu et n’est pas scolairement forma-trice ; c’est le principe de la garderie qui pré-domine. Son existence dépend uniquementdes communes et du ministère des Affairessociales et non du ministre de l’Éducation.Les personnels ne sont pas des enseignants.Aujourd’hui, la règle en Allemagne c’estque les cours commencent à 8 heures et seterminent à 13 heures. L’après-midi on propose des activités nonobligatoires. Ce système ne permet pas lacontinuité du travail et son approfondisse-ment dans les disciplines scolaires contrai-rement à la journée complète de cours. Maiscela coûterait cher pour un encadrementqualifié des jeunes.Au plan politique, une question centrale :comment se fait-il qu’en Allemagne l’aidesociale et l’égalité des chances soient auplus bas par rapport aux autres pays ? Lapensée conservatrice selon laquelle uneorientation précoce dès l’âge de 10 ans pré-domine. PISA a montré que ce système est contre-productif pour la masse comme pour lesmeilleurs élèves. Les pays obtenant lesmeilleurs résultats ont un système uniqueintégré. Les conclusions à tirer pour la

réforme : les élèves doivent rester dans desfilières non différenciées, la sélection doits’opérer plus tard. Il faut changer de men-talité : ne pas se fonder sur un système cloi-sonné mais créer un système intégré quipermet à chacun de développer ses talents.

L’US Mag : Et comment réagissent les16 gouvernements des länder ?C. H. : Avec une stratégie molle et masquéedans la plupart des cas, quelles que soientleurs orientations politiques, ils maintiennentle « vieux » système. Quelques-uns font despas timides vers l’ouverture des mécanismesde sélection, notamment pour l’accès àl’Université et aux formations supérieures.

L’US Mag : Est-ce que cela signifie que lepaysage scolaire allemand évolue en ordredispersé ?C. H. : Oui, on établit une régionalisation etune diversification plus profondes avec unenouvelle discussion sur le fédéralisme et lerenforcement des instances régionales, cequi conduit à une plus grande autonomiedans l’organisation financière et pédago-gique. Mais, naturellement, les 16 ministres del’Éducation mettent l’accent sur les« matières fondamentales » et des « cri-tères » de formation standardisés, ce qui esttout nouveau pour un pays où il n’y avaitaucun programme national. Mais il n’y a pasde miracle, les professeurs et leurs syndicatsne sont pas consultés.

L’US Mag : Et comment votre syndicatvoit-il les choses ?C. H. : La GEW met en pratique lesconcepts de l’orientation tardive et de lastructure unique de l’école pour tous. Nousnous fondons sur l’enquête PISA et menonsdes actions qui reçoivent un bon accueildans la profession, pas seulement chez nosadhérents, mais aussi dans la société civile,chez les parents, les églises, aussi bien quechez les entrepreneurs et les travailleurs. Ilest clair pour nous qu’au centre de laréforme se trouve l’idée de changement dementalité : une école pour tous, sans orien-tation précoce. Cela nécessite une réformedes structures, un nombre plus importantde professeurs avec une formation initiale etcontinue améliorée.

Propos recueillis par Odile Cordelieret traduits par Roger Charles Le Breton

ALLEMAGNE : APRÈS L’ÉLECTROCHOC DES RÉSULTATS DE L’ENQUÊTEPISA, les seize gouvernements des länder et même le gouvernementfédéral ont entrepris de réfléchir à une (des) réforme(s) de l’éducation.Christoph Heise, secrétaire international du syndicat des enseignantsGEW, chargé des questions internationales, répond à nos questions.

Fin de l’ultra-sélection ?

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Sécession américaine– sont aussi traitéescomme des prolégo-mènes à la Premièreguerre mondiale etaux guerres civiles actuelles. Elles représentent enmême temps des formes d’entrée dans la modernitéliées à une barbarie de plus en plus technologique.Des catégories sont aussi interrogées, comme cellesdu génocide, de la déportation de populationsentières, de pouvoir, du totalitarisme... Au total,c’est l’analyse de toutes nos sociétés qui apparaît, etde la place et de la nature de l’État. Autant direqu’elle est concomitante, éclairante de l’ensembledes rapports sociaux qui se sont constitués notam-ment au moment de la libération. Une somme d’in-terrogations !Peut-on concevoir une «culture de paix » résultantde l’ensemble de ces guerres ? C’est la thèse de laquatrième partie présentée par Robert Frank. Ellelaisse sceptique en fonction des guerres qui sontcelles du XXIe siècle. � Nicolas Bénies

• Le XXe siècle des guerres, sous la direction de P. Causa-rano, V. Galimi, F. Guedj, R. Huret, I. Lespinet-Moret,J. Martin, M. Pinault, X. Vigna, M.Yusta. 606 p., Les Édi-tions de l’Atelier.

Les auteurs renouent avec les réflexions amorcéespar Pierre Naville dans son article Travail etguerre dans le traité de sociologie du travail de

1964 pour traiter des rapports entre la guerre et lechangement social. Se trouvent mis en perspectivela place du travail des femmes, la naissance desrelations sociales, la démographie et, last but notleast, la formation des classes laborieuses liée àl’interrogation sur la notion de progrès social. Lesguerres marquent tout le siècle. Faut-il parler d’uneguerre de 30 ans réunissant ainsi la Première et laSeconde guerre mondiale? Les auteurs divergent,osent la confrontation. Le concept de guerre civiletotale – thèse défendue par Enzo Traverso – est-ilefficace pour rendre compte des dimensions de bar-barie de ces deux guerres et, peut-être, des guerresactuelles ? Là encore, les problématiques sont dif-férentes. Elles permettent aussi au lecteur de sefaire sa propre opinion tout en poursuivant les ana-lyses proposées. L’histoire culturelle n’est pasoubliée – il faut lire aussi Les enjeux de l’histoireculturelle de Philippe Poirrier (Points/Seuil) – per-mettant de construire des types d’individus notam-ment à travers les romans. Il aurait fallu tenir compteplus encore des romans policiers.Les guerres antérieures – notamment la guerre de

CULTURELivres/Revues

Notre sélection� SPÉCIAL ÉTATS-UNIS

La campagne électoraleaméricaine a suscitéénormément d’ouvragessur l’empire et sa politique detoute-puissance comme sur lesconseillers néoconservateurs deW. Bush. Le tournant du 11/9/2001

provoque un tel traumatisme que lesÉtatsuniens semblent dans l’incapacitéde raisonner. En creux, c’est le point devue que nous propose Rashid Khalididans l’Empire aveuglé mettant en causel’absence d’analyse de l’administrationaméricaine. Curieuse démonstrations’adressant plus au président américainqu’aux lecteurs pour souligner lesinconséquences de cette politiqueimpériale. Pour ce faire, il tire un bilanrapide des conséquences ducolonialisme. Même si démonstrationn’est pas raison, il jette une lumièrecrue sur des prises de décision fondéessur des seuls présupposésidéologiques. Le lecteur françaisn’apprendra pas grand-chose maispourra se rendre compte de l’inanitédu débat intérieur américain.Sébastien Fath, chercheurau CNRS, insiste, quant à lui,sur la place de la religion etde ses dogmes. Il essaie dedifférencier lescomportements en faisant de Bushune sorte de prototype. Il est « bornagain », nouveau chrétien, et lit laBible tous les matins. Une sorte deposition politique qui fait de la religionun nouveau ciment. Mais un cimentdiviseur. Les communautarismess’opposent sur leur idée de Dieu.

Alain Frachon et Daniel Vernetcentrent leurs propos sur lesréférences idéologiques desnéoconservateurs en dressantleur portrait. Ils restent trop« journalistiques » ratantl’explication de leur placedans la construction de lapolitique impériale américaine.Saul Bellow cerne au plus près

ces nouveaux gourous dans son romanRavelstein où on reconnaît la plupartde ces intellectuels.Deux derniers ouvrages abordent, demanière un peu caricaturale, les liensde la famille Bush avec les princessaoudiens (pour Robert Baer, un ex-espion) et avec les milieux industrielset financiers pour Christophe Grauwin.Des éléments factuels qu’il fautprendre en compte, liés à l’idéologielibérale, pour les intégrer dansune analyse internationaleglobale permettant d’appréhender àla fois la superpuissance des États-Uniset leurs contradictions internes quipourraient faire penser à un géant auxpieds d’argile. N.B.• L’Empire aveuglé, R. Khalidi, Actes Sud ;Dieu bénisse l’Amérique, S. Fath,Seuil ; L’Amérique messianique,A. Frachon, D. Vernet, Seuil ;Ravelstein, S. Bellow, Folio ;Or noir et Maison Blanche,R. Baer, Folio ; La Croisade descamelots, C. Grauwin, Fayard.

Religion, dogmes et cultureU

n dictionnaire étrange. Une manière d’aborder l’histoire des religions en com-mençant par... l’athéisme. Une sorte d’ironie mordante en ces temps d’obscu-rantisme et de dogmatisme. Saviez-vous que plus d’Étatsuniens croient dans le

« créationnisme » – le monde que Dieu a fait en 7 jours – que dans la théorie de l’évo-lution de Darwin? Rien que pour cette raison il faudrait créer ce dictionnaire qui nousoffre avec ces entrées de quoi lire ou relire une grande partie des philosophes, socio-logues qui ont fait notre histoire. Daniel Dubuisson décline sa thèse centrale : la reli-gion fait partie intégrante de l’histoire des civilisations, elle est culture, références etnon pas dogmes à suivre en toute circonstance. Elle est « inventée » par le XIXe sièclequi la transforme en un monde à part du monde. Elle est, l’aurait-on oublié? « opiumdu peuple », surtout lorsqu’elle se transforme en construction d’identité – des « micro-

identités fantasmées » disent les sociologues – contre le reste du monde, contre les autres et qu’elle rem-place la politique. Ce livre est une démonstration de l’évolution des formes des religions suivant lecontexte indiquant l’inanité des dogmes, impliquant plusieurs lectures possibles. Le savait-on, Dieu estmultiple et peut servir de paravent à bien des aventures où le Bien et le Mal n’ont que peu à voir. Une sortede plaidoyer pour la tolérance et l’interculturalité comme nécessité pour se construire soi-même. Un plai-sir de (re)découvrir des textes en un contexte particulier, celui de l’ordre alphabétique. � N. B.• Dictionnaire des grands thèmes de l’Histoire des religions. De Pythagore à Lévi-Strauss. Textes réunis par DanielDubuisson, 831 pages, Complexe.

HISTOIRES DU XXe SIÈCLE

Guerres et paix

36 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

� FOUCAULT, LE RETOURMichel Foucault fait partie de notreactualité culturelle. Il fallait bien uneanthologie de ses textes. Frédéric Groset Arnold I.Davidson s’en sont chargé.Ils essaient de donner une cohérenceaux trois périodes de cette œuvre.Ce n’est pas vraiment convaincant.Il apparaît, au contraire, une absencede système d’explication du monde.La seule porte de sortiequ’il propose et le couragedes individus refusant touteforme de pouvoir.Lire Foucault c’est lire

l’éclatement des cohérences quimarque notre époque ditepostmoderne. Ne serait-ce que pour cette raison, il faut le lire.• Philosophie, Folio/Essais.

� TÉMOIGNAGELucienne Foucras raconte le calvairede son mari subissant les conséquencesde la vaccination contre l’hépatite B. Lamort est inéluctable. Elle questionne.Personne ne lui répondde manière convaincante.• Le dossier noir du vaccincontre l’hépatite B, Éditionsdu Rocher.

� DIALOGUEStéphane Beaud avait publié 80 %au bac. Et après ? (La Découverte),thèse qui a suscité la réaction d’unemploi-jeune, Younes Amrani. Il a écritses commentaires suscitant undialogue avec le sociologue. Éclairantsur les éclatements territoriaux et«communautaristes» de notre pays.Un dialogue qu’on voudrait voir segénéraliser pour éviter lesenfermements sur une cité,sur un quartier. En sortir,c’est rencontrer le monde.• Pays de malheur, La Découverte.

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NOS COLLÈGUESPUBLIENT

� UNE SOMMEConnaissez-vous le programmede philo de Terminale ? Ilcouvre tous les thèmes qu’un« honnête homme » du XXIe

siècle se doit de connaître.L’auteur les fait lire en présentant lesgrands auteurs et en voulant faciliterle mouvement de la pensée. Pas tou-jours convaincant – sur Marx en par-ticulier – mais toujours intéressant.• Cours de philosophie, Marie-Line Bretin,832 p., Vuibert.

� DES MATHS POUR TOUSConçu pour que les élèves tra-vaillent de manière autonome,il ne se limite pas au pro-gramme de Troisième maiscouvre l’ensemble des connais-sances qu’il faut acquérir aucollège. Le cours est rappelédans le détail et illustré d’exemples etd’exercices corrigés. À la fin de chaquechapitre un problème de synthèse,dont la solution est rédigée en totalité.• Mathématiques, Révision et approfondis-sement, programme de 3e, Thierry Lambert,611 p., Economica.

� HISTOIRE ROMANCÉEPrintemps 1788 l’abbé deRoyaumont fait construire unpalais abbatial digne de la couralors que Dom Cannone, undes dix moines restants, essaiede garder l’éthique cister-cienne. Le marquis de Travenet, noblelibéral, attend son heure. Nous sui-vons l’histoire de ces trois person-nages ainsi que celle de Marie la pay-sanne dans ces années de tourmentejusqu’à Thermidor. Un roman et uneleçon d’histoire. •Tempête sur Royaumont, éditions duValhermeil.

Notre sélection� UN SUÉDOIS UNIVERSEL

Les œuvres complètes deTomas Tranströmer viennentde paraître en français. C’estun magicien de la métaphore.Son influence est immense.

Beaucoup ont puisé dans ce vivierrappelle son traducteur JacquesOutin. Il se permet toutes lesaudaces pour dévoiler un mondede plus en plus envahi par lamarchandise. Citons ce poème datéde 2004 : « Des hommes-oiseaux/Des pommiers enfleurs/La grande énigme. » Un poèteessentiel. Pour rebaptiser la réalitéde tous les jours, pour la voir d’unautre œil. Grâce à lui, à sesmétaphores, notre environnementse transforme en une « inquiétantefamiliarité », pour citer Freud.Les poètes donnent à voir ! N. B.• Baltiques, Tomas Tranströmer,Poésies/Gallimard.

� LITTÉRATURE ET MODERNITÉKipling, écrivain anglais parexcellence. Telle pourrait êtreson épitaphe. Tout pourraitêtre dit. Que nenni ! AlbertoManguel, grand lecteur devantl’éternel a voulu comprendre

les relations de sa vie avec sesromans et poèmes. Le choc. Soninconscient – son « daîmon » dit-il –lui souffle des vérités que l’homme,le Britannique convaincu de lasupériorité de son pays ne dirajamais. Mais il ne les refuse paslorsque sa plume court sur le papier.Ses poèmes font partie dupatrimoine national et ilsn’expriment en rien le sentimentcolonial provenant de sa naissanceen Inde. En 120 pages, Manguelouvre des horizons pour démontrerque l’œuvre est plus grande que soncréateur. L’homme est empêtré dansses préjugés, le créateur non. Unpeu étrange tout de même. La folien’est pas loin. Comment faire ladifférence ?

Manguel publie en mêmetemps Journal d’un lecteur,relecture des classiques dela littérature à la lumièredes événements récentsnotamment ceux qui ont

frappé l’Argentine, son pays. Chaquerelecture permet d’ouvrir d’autressens à l’œuvre qui se trouve grossiepar le nouveau contexte. La guerreen Irak occupe une grande partiede ses réflexions. Lire alimentel’analyse des événements.Rapprochements osés et étranges,une sorte de redécouverte. N. B.• Kipling, une brève biographie, Journald’un lecteur, Alberto Manguel, Actes Sud.

Polar� CLINS D’ŒILBoris Akounine connaît sur le bout desdoigts la littérature et Moscou. Celle dela fin du XIXe siècle est une ville étrangemarquée par toutes les contradictionsde l’empire. Les deux nouvelles réuniesici sont deux hommages. À MauriceLeblanc – décidément redevenu très àla mode, Omnibus réédite Lesaventures extraordinaires d’ArsèneLupin en trois volumes – mettant enscène un Arsène Lupin russe – ledécalage est important parce qu’ilrecèle une ironie subtile, bien française,– l’autre à Jack l’éventreur – plusexactement aux interprétationsdiverses et variées qu’il a suscitées –devenu par sa grâce, russe. Il montre lavie dans les prisons, lieu de formationde criminels endurcis, ayant perdutoute notion de l’humaine condition. Unvrai pamphlet dirigé pas seulementcontre la Russie de ce temps. Il se lit àplusieurs niveaux.

• Missions spéciales, BorisAkounine, Grandsdétectives/10/18.

� BD ET POLARSPouvait-on mettredes images sur despolars devenus desclassiques? Laréponse positivedes Éditions EPdemandait une

démonstration. Avec Là où dansentles morts, c’est une réussite. Dessinset textes s’entremêlent pourredonner vie aux personnageset paysagesNavajo de TonyHillerman. PourTorch Song, ledessin n’arrive pasà suivre l’universtourmenté, fou,de James Ellroy.Entre les deux se trouve Mongo lemagnifique dont le livre II est attendupour pouvoir juger de cette tentative.

Nicolas Bénies•Là où dansent les morts, scénario etdessin de Katou; Torch Song, de Ptoma;Mongo le magnifique, de L. F. Bollée,d’après Chesbro, dessin Roger Mason.Noir quadri/Emmanuel Proust Éditions.

Paradoxe américain : tandis que leconservateur et religieux GeorgeW. Bush est réélu Président des

États-Unis, le dernier roman de PhilipRoth, pourfendeur de toutes les hypo-crisies de l’Amérique puritaine, figuredepuis plusieurs semaines sur les listes de best-sellers. Dans Le Com-plot contre l’Amérique, Roth imagine que Charles Lindbergh, l’avia-teur admirateur d’Hitler, est élu Président des États-Unis...En attendant la traduction de ce roman de « politique-fiction », un genrenouveau pour lui, il marque également de sa présence la rentrée litté-raire en France, avec la parution de trois œuvres : son roman précédent,La bête qui meurt, où Roth retrouve vingt ans plus tard l’un de sesdoubles, Nathan Zuckerman, l’écrivain mis en scène dans la tétralogieZuckerman enchaîné ; une nouvelle traduction de l’une de ses œuvresmajeures, La contrevie, interrogation vertigineuse sur l’identité, lacréation et la judéité; et enfin un recueil d’essais sur la littérature, Par-lons travail, sous forme de rencontres ou de dialogues avec des écri-vains tels que Primo Lévi, Milan Kundera ou Saul Bellow.Face aux années Bush et leur mélange d’ordre moral, d’arrogance etd’exploitation des passions les plus primaires, la voix iconoclaste deRoth est aussi scandaleuse et revigorante qu’au temps de Portnoy etson complexe (1969). Il poursuit dans ses œuvres actuelles cetteinvestigation du désir, de la sexualité, de l’identité et de l’appartenance,qui font, sur le mode ironique, le prix d’une œuvre majeure de notretemps. Il traque toujours sans relâche les mythes et les non-dits del’Amérique bien-pensante, idéaliste et violente, qu’il s’agisse d’in-terroger la guerre du Vietnam, le maccarthysme ou la vogue conser-vatrice née de la fin du second mandat de Bill Clinton et de l’affaireLewinsky : il faut lire ou relire la trilogie américaine constituée par Pas-torale américaine, J’ai épousé un communiste et La tache pour mieuxcomprendre où en est l’Amérique d’aujourd’hui. � Alexis Chabot• Éditions Gallimard. La revue de littérature étrangère, Transfuge, lui consacre un excellent dossier.

L’ANTI-BUSH

Philip Roth, l’autre Amérique

ClassiquePAPA HAYDN

Haydn (1732-1809), leur Père à tous? AvantMozart, avant Beethoven, le maître vien-nois, souvent oublié, trop vite rangé aurayon poussiéreux des vieux classiquesemperruqués. Il est une pièce charnièredans l’histoire de la musique et son génieéclate dans une œuvre d’une ampleur etd’une inventivité surprenantes : plus de centsymphonies, des messes, des oratorios, unemusique de chambre inépuisable, dessonates pour piano… Les grands interprètesne s’y sont d’ailleurs pas trompés. C’est le casde Sviatoslav Richter (Decca) ou de GlennGould (Sony) pour les sonates pour piano, ouencore de Leonard Bernstein, dont la sen-sibilité et le tempérament conviennent par-faitement aux Symphonies parisiennes et auxSymphonies londoniennes (Sony). C’est aussicelui d’Herbert von Karajan, interprète desdeux grands oratorios, Les Saisons et LaCréation : de ce dernier, on connaissait déjàun enregistrement de studio de légende(DG) ; voici que paraît un magnifique live duFestival de Salzbourg, de quelques annéesantérieur, où Karajan révèle la même affinitéavec la musique de « papa Haydn » (DG).Mais les chefs contemporains ne sont pas enreste : Nikolaus Harnoncourt, dans plusieursversions de La Création notamment, ou bienencore René Jacobs dans l’enregistrementdes Saisons que vient de publier HarmoniaMundi : sans doute l’une des meilleuresvoies pour pénétrer dans l’univers de l’un desplus grands de la musique classique. A.C.

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Le succès récent des Choristes n’a pas empê-ché les effondrements de l’été 2004; lespoids lourds de San Antonio n’ont pas

trouvé leur public, pas plus que le délirant Ato-mik Circus et la cocasse aliénisation de BenoîtPoelvoorde. La grosse artillerie américaine arepris ses droits: entre Jugnot et Spiderman,point de salut. Pourtant le cinéma français existe,ne serait-ce que par sa résistance têtue au rou-leau compresseur américain, mais ce rôle mêmele déconsidère, tout comme parfois le systèmede soutien, conquête de l’après-guerre, qui,selon certaines Cassandre, permettrait aujour-d’hui à trop de mauvais films de voir le jour.Certes le cinéma n’a pas de frontières; l’artn’est pas mondialisé, il est universel, comme lemontre Assayas promenant Maggie Cheungpar le monde (Clean). Fuir non pas tant laFrance elle-même que la définition hexagonaledu cinéma, pour certains artistes, semble urgent.De quoi se méfie-t-on? Du piège des films« trop » français, même dotés des meilleuresintentions? Des icônes de rechange fabriquées

L’art a besoin d’essais, d’esquisses, de biffures;cette liberté-là, le cinéma français l’a encore;deux cents films produits chaque année, c’estl’assurance d’un cinéma où tout film, et c’est unluxe, n’est pas obligé de chercher à plaire.Pourvu que ça dure. �

Jacqueline Nacache

à la hâte (doublé de Marilou Berry, coincéeentre Bacri-Jaoui dans Comme une image, etdans la France rétro de La première fois que j’aieu vingt ans) ? Des joujoux narratifs fatigués del’ex-enfant terrible François Ozon (Cinq foisdeux)? Pourtant ce flot ne noie pas les poètessolitaires: Danièle Dubroux ou Eugène Green,chez lesquels l’écart devient la norme (ErosThérapie, Le pont des arts); ils n’empêchent pasles heureuses surprises de celles et ceux quifont assez confiance au cinéma pour ne pasavoir à laver les films de toute couleur sociale,au contraire : Brodeuses, qui conjugue le gestepatient et feutré de la broderie avec la violencedes sentiments; Les Revenants de R. Campillo,drôle de fable sur la réinsertion sociale du zom-bie ordinaire. Heureusement le cinéma fran-çais est plus compliqué qu’un champ de batailleoù s’opposeraient pied à pied le conteur géné-reux et l’auteur narcissique, le spectacle et l’in-timisme, Jeunet l’euphorique et des Pallières àla triste figure; ses chemins sont multiples, par-fois des impasses, parfois des voies royales.

Le génie helvétique au SénatSuivre l’exemple suisse, c’est ce que dit souhaiterPierre Hérisson, sénateur UMP de Haute-Savoie.Le 19 octobre, pour ses collègues de la vénérableassemblée, il a organisé au Palais du Luxem-bourg, la projection du Génie helvétique de JeanStéphane Bron. Le film infiltre le système. Mieuxque les mécanismes parlementaires, il montrel’exercice même de la politique entre rectitudemorale et soupçon de vénalité, jeu des alliances,des compromis et du lobbying. C’est si excitantque l’ordonnateur de la séance a «appelé de sesvœux» une réalisation comparable dans les cou-lisses du Sénat français. On croit rêver. Chef-d’œuvre de pédagogie rayonnante, pionnierde l’action civique en milieu législatif, Le géniehelvétique (comprenez «génétique» : depuisjanvier 2004 des OGM ont droit de cité enSuisse) pourrait donc passer sur la chaîne des éluset sur TV5. Que des sénateurs français se disentprêts à communiquer comme leurs homologueshelvètes, voilà qui nuance la tonalité conserva-trice de leur image. L’enjeu est plus vaste. Il està Bruxelles. Percutant, le film prouve la possi-bilité de savoir qui nous accommode et comment.On peut réagir, agir. D’ailleurs, en Suisse, l’his-toire ne s’arrête pas là où finit le film, une «vota-tion» est en l’air. L’affaire est bien à suivre...

F. J.-A.• En salle dès le 3 novembre.

POÉSIE ET MUSIQUEMichel Leiris est « au programme »de l’Agrégation. Sans doute s’enserait-il offusqué; pas nous, puisquel’occasion nous vaut de mieuxconnaître cet homme du « siècle àl’envers ». Le colloque dont ce livrefixe et prolonge la parole avait,paraît-il, l’air d’une fête; les actes engardent la trace, dès la swinguante

introduction de Francis Marmande. Commel’œuvre de Leiris, ils vibrent de poésie, demusique, d’engagement, et du cliquetis facé-tieux et grave des jeux de mots. Pages capti-vantes où l’écrivain se dessine tout vif, ethno-logue de près et de loin, consterné par l’état desbibliothèques antillaises, méditant sur un versde Love For Sale ou les grains de son d’Ada« Bricktop » Smith. Autour d’une image miroi-tante les textes dressent un monument éruditmais discret, tout sauf un tombeau, et tissent leface-à-face de Leiris avec son temps commeavec lui-même : surréalisme, peinture, jazz,corps à corps avec l’autobiographie, refus de lanaissance et dépassement de la mort. J. N.• Michel Leiris, Le siècle à l’envers, textes rassembléspar Francis Marmande, Farrago-Léo Scheer.

Tout sur Sinatra, même l’inutileAppelons-le un livre-catalogue. À la gloire deFrankie. C’était aussi son nom au Sinatra né àHoboken, dans le New Jersey. Il a fallu qu’il tra-vaille avant d’arriver à se faire surnommer« The Voice ». Il était resté un peu italien,moins que son camarade de jeu « Dino » de cesdames, Dean Martin (il avait un peu francisé sonpatronyme). Charles Pignone, archiviste, a réunilà tout ce qu’il a trouvé, même les programmes.La sensation est un peu curieuse. Comme si le

chanteur allait revenir sur scène,une fois encore. Est-il jamais parti?Comme la plupart de ces saltim-banques, il ne vivait que « onstage ». Le reste s’épuisait dans lanuit alcoolisée. Bizarre existence.Rien ne transparaît ici. Le style esthagiographique, point final. C’estpourtant un grand plaisir de leretrouver... à cause de sa voix.• Sinatra, Charles Pignone, 204 photo-graphies, 1 CD de 60 min, Seuil.

CULTURECinéma/Théâtre/Spectacles/Expositions

Natacha Régnier, figure emblématique du cinéma français, dans le film de Eugène Green Le pont des arts.

CINÉMARecherche d’identitéPlus casse-gueule, on n’imagine pas. Pourtant, lefilm de Ismaël Ferroukhi tient en un équilibreadmirable sur une montagne d’écueils. Son sujet– la transmission, la filiation à l’épreuve desvaleurs humaines et rituelles de l’Islam – relèvede la prise de risques téméraire. Cinq semaines avant le bac, le père de Rédal’oblige à remplacer son frère aîné privé de per-mis de conduire pour conduite en état d’ivresse.Le père va à La Mecque, il fait perdre au lycéenun an d’études et sa petite amie. D’Aix-en-Pro-vence à la Ville sainte, à travers l’Italie, les Bal-kans, l’Anatolie jusqu’aux sables d’Arabie, levoyage de ce père et son fils en état d’hostilitépermanente devient une aventure initiatique. Onaurait tort de se méfier d’un tel énoncé. Plu-sieurs fois le film laisse ébahi par son aisance àfranchir les obstacles. L’idée métaphorique d’unefemme en noir et muette qui s’impose aux voya-geurs transforme la traversée de la Croatie enmoment de deuil. Des péripéties variées, clima-tiques en Bulgarie, de fausse arnaque en Turquie,transposent à l’échelle individuelle la réalité deces zones géopolitiques brûlantes. Nicolas Cazale(Réda), Mohamed Majd (le père) sont excel-lents, une affaire d’hommes en somme. Tournéau Maroc, Le grand voyage est haletant et abso-lument laïque. Les séquences spectaculaires del’arrivée à La Mecque où, dans la concentrationdes pèlerins, les femmes ne sont pas absentes, ontquelque chose d’inédit dans leur gigantisme et parleur puissance documentaire. Avant l’envol dufils rebelle, toujours non-pratiquant mais assu-mant la culture paternelle, elle apporte l’ultimedonnée : pour Réda, rentrer en France c’est déci-der de son identité.

Françoise Jeancolas-Audé• Le grand voyage, d’Ismaël Ferroukhi.

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Où en est le cinéma français?

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THÉÂTRE GÉRARD-PHILIPE DE SAINT-DENIS

Un lieu mythiqueDe bouche à oreilleUn DVD autour de rencontres avec des musi-ciens qui savent rendre accessibles à tout publicles œuvres qu’ils interprètent ou qu’ils ont com-posées. Des séquences très variées sont propo-sées autour de trois thématiques : « les matériauxde la musique », « la musique se construit » et« la musique se donne ». Des mondes sonores trèsdivers sont explorés : de Marc Perrone, à Ravelen passant par Aperghis, Boulez ou Arthur H. Lelivret d’accompagnement propose une docu-mentation sur les extraits musicaux, les com-positeurs et les interprètes. Des pistes d’utili-sation pédagogique sont suggérées.• Édité par le SCEREN-CNDP.

Dix ans déjàLa femelle du requin, revue litté-raire, fêtera ses dix ans en 2005.Ce numéro permet de découvrir unnouvel auteur, Thomas B. Reverdy, etde prendre conscience de l’impor-tance de l’œuvre de Antonio Tabuc-chi. Un dossier de 30 pages lui est consacré. • http://lafemelledurequin.free.fr

Deux clubs de jazzLe Triton se trouve de l’autre côté du périphé-rique. On sait que c’est une frontière difficile àfranchir. Pourtant la programmation mérite qu’ons’y arrête. Les 26 et 27/11, Vicente Pradal proposede découvrir les « canciones » des XVII et XIXe

siècles. Un grand moment en perspective. Le 30,deux saxophones s’affronteront : Sylvain Cathalaau ténor et Stéphane Payen à l’alto.Le New Morning, de son côté, invite Archie Shepp,saxophoniste mythique, et ses amis qui se pro-duiront le 25/11. Le 26, ce sera le tour de DavidMurray, autre saxophoniste ténor, désormaisinstallé en France. Le 1/12, ce sera un hommageà Janis Joplin et le 2, le pianiste cubain – dont ledernier disque, Mulatos, Ota Records/Night &Day – Omar Sosa, qu’il ne faut pas rater.• Le Triton, BP 13, 11 bis, rue du Coq-Français, 93260 Les Lilas,http://www.letriton.com• New Morning, 7-9, rue des Petites-Écuries, 75010 Paris,http://www.newmorning.com

Début 1950, l’aventure du Théâtrenational populaire conduit JeanVilar et ses comédiens dans l’his-torique salle des fêtes de la ville deSaint-Denis qui deviendra en 1960le théâtre Gérard-Philipe. Ils yjouent L’Avare et La Mort deDanton devant un public trèslimité. En 1963, Jacques Rous-sillon crée Printemps 71 d’Ada-mov. C’est le premier événementde l’histoire du théâtre Gérard-Philipe. De José Valverde (1966-1976) à Stanislas Nordey (1997-2001), le théâtre connaît le succèset devient le lieu mythique quel’on sait. Le 1er janvier 2002, AlainOllivier est nommé directeur.

L’US: Comment s’établit uneprogrammation?Alain Ollivier : La vie d’unthéâtre c’est à la fois le désir dedécouvrir des œuvres nouvelles etcelui de renouveler la vie scé-nique des œuvres de notre héri-tage culturel. Dans un centredramatique national, une pro-grammation est toujours le faitde ces lectures et de ces relec-tures. Je n’interviens jamais dansles choix de Daniel Jeanneteauet Jean Boillot, les deux metteursen scène associés. Ce qui peut

provoquer une pro-g r a m m a t i o ncontrastée... C’estainsi que Shakespeare (Coriolan),Maeterlinck (Pelléas et Méli-sande), Brecht (L’importantd’être d’accord), Sarah Kane,Pierre Charras et Olivia Rosenthalcroiseront les représentations deleur œuvre à Saint-Denis.

L’US : Vous accueillez le festi-val Africolor et vous organisezun festival jeune public. Est-cedans le but de diversifier votrepublic?A. O. : Nous travaillons chaquejour à l’élargissement et à ladiversification du public. À Saint-Denis, nous vivons dans une géo-graphie humaine très diversifiée,de cultures et de sensibilités mul-tiples. Chaque fois que nousavons l’occasion de pouvoir pro-grammer une œuvre qui trouveraauprès de ces communautés unécho immédiat, nous le faisons.Le public répond.Outre le festival jeune public « Etmoi alors? », le théâtre Gérard-Philipe présente en juin les tra-vaux des différents ateliers misen place dans les établissementsscolaires du 93.

L’US : Pour vous, l’éducationartistique en général et l’initia-tion au théâtre en particuliersont une priorité dans les éta-blissements scolaires.A. O. : Une éducation artistiqueet culturelle pour tous avait étémise en place fin 2002 par Cathe-rine Tasca et Jack Lang. Aujour-d’hui, après les réductions de cré-dits qui mettent en difficulté ledéveloppement des ateliers artis-tiques et les stages de formationpour enseignants, rien ne nousassure de la continuité d’une poli-tique aujourd’hui de premièrenécessité.Quand cessera-t-on de considé-rer comme futile l’éducation artis-tique au collège et au lycée?Au théâtre Gérard-Philipe, nousconsidérons de notre responsa-bilité l’initiation à l’art drama-tique dans les collèges et leslycées, et les ateliers qui s’y fontpermettent de travailler à l’éveildes sensibilités et des imagina-tions, un stimulant pour l’exer-cice des autres disciplines ensei-gnées. �Propos recueillis par Francis Dubois

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Réduc’SNESNouveaux ou fidèles partenaires :•Théâtre de l’Olivier à Istres (04 42 55 24 77), Igishangaconçu et joué par Isabelle Lafon à partir des témoignages surle génocide de 1994 au Rwanda (27/11, spectacle en tournée)• Théâtre du Rond-Point : simultanément à Musée haut, Muséebas, parcours humoristique imaginé et mis en scène par Jean-Michel Ribes, brocardant certaines formes de côtoiement desarts plastiques, du snobisme à l’industrialisation/marchandi-sation de visites de musées (jusqu’au 26/11) ; festival Le fou rireest immortel jusqu’au 31/12 (01 44 95 98 21) •Théâtre Écarlate(75019) : duel musical et verbal autour des contes de Grimm(15-31/12, 01 42 41 28 22) •Théâtre Jean-Vilar (Vitry 94, 01 5553 10 60) avec expo-concert Chants et récits de l’esclavage (12-17/12) participant aussi aux Théâtrales Charles Dullin, festivalde jeune création en Val-de-Marne impliquant plusieurs autrespartenaires dont le Théâtre Romain-Rolland (Villejuif, 01 49 5817 00) • Théâtre international de langue française : Gabriel Gar-ran crée L’homme-poubelle puzzle insolite de Matei Visniec surles aléas de la société contemporaine (jusqu’au 19/12, 01 40 0393 90) • Théâtre Paris-Villette avec Premières et deuxièmespauses approche de grands auteurs par de jeunes compagnies(01 42 02 02 68) • Théâtre 71 (Malakoff, 01 55 48 91 00), fes-tival MAR.T.O, marionnettes et théâtres d’objets, jusqu’au5/12, associant d’autres partenaires du 92 (Théâtre des Sourcesde Fontenay-aux-Roses 01 41 13 40 80, théâtre Firmin-Gémierd’Antony 01 46 66 02 74)… et des réveillons-spectacles en pers-pective au Théâtre du Chêne-Noir (Avignon 04 90 82 40 57) avecAriane et Ferdinand de et par Philippe Caubère (du 27 au31/12), et à l’Espace Aleph (Ivry 94, 01 46 70 56 85) : nouvellecréation d’Oscar Castro Neruda, ainsi la poésie ne chante pasen vain du 2 au 18/12 et la reprise des créations précédentes(Le Che..., Allende...). Détails et autres composantes de l’actualité culturelle sur le sitedu SNES www.snes.edu/snesactu/ rubrique culture… et l’accèspermanent – réservé aux syndiqués – à la base «Réduc’SNES»répertoriant la centaine de lieux accessibles à tarif réduitpour les syndiqués… [email protected]

yeux, un tambour-sablier japonais,suivi de Kakophonie et de Kaladki,chants traditionnels de Noël enBiélorussie. Les pays défilent, lesinstruments aussi, des tradition-nels jusqu’à l’électronique, tousles sons du monde viennent s’ydonner rendez-vous. Jusqu’àl’étourdissement, jusqu’à croulersous les noms de toutes lesmusiques, jusqu’à s’enfoncer dansle vocabulaire pour remonter versla musique. C’est un travail detitan, une folie douce qui fait plai-sir à lire. Une sorte de poésie insen-sée et pleine de sève se met enplace, à votre insu. Les mots chan-tent et s’organisent en une mélopéefaite de passé, de présent et un peud’avenir. Un dictionnaire de mys-tères qui donnent l’impression deles dévoiler tout en leur conser-vant leurs secrets. N.B.• Dictionnaire des Mots de la Musique,Outre Mesure.

EXPOS

FéminismeAlors que l’actualité résonne d’ini-tiatives pour les droits des femmeset contre les violences qu’ellessubissent encore trop souvent(manifestations du 27/11, projetde loi novateur en Espagne d’oùnous arrive aussi le remarquablefilm Ne dis rien), un ensemble dedocuments, d’images et de publi-cations sont rassemblés par la BPI(Bibliothèque publique d’infor-mation, centre Pompidou, 01 4478 12 75, accès libre et consul-tables sur www.bpi.fr) pour accom-

pagner plusieurs rencontres-débatsjusqu’en 2005, dans le cadre d’uncycle Les apports du féminisme,ses enjeux d’aujourd’hui et Lesévolutions récentes des relationsfemmes/hommes.

TravailUne exposition C’est quoi ton tra-vail ? et de nombreux débats inter-rogeant l’évolution de 15 métiers,l’ergonomie, les conditions de tra-vail.. avec des images, des vidéos,des textes, des parcours spécifiquespour les classes... à l’Ecomuséede Fresnes (94) (01 49 84 57 37).

DICTIONNAIRELes mots des sonsJacques Siron nous convie à uncurieux voyage. Dans les mots,dans la musique. Ces mots de touteorigine expriment la musique despeuples, diverse, variée tout enparlant à tout un chacun. Ouvrons-le à la lettre «k». Kakko saute aux

Ont participé à la conception de ces pages : Nicolas Béniès, Francis Dubois, Françoise Jeancolas, Philippe Laville, Jacqueline Nacache.

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CULTUREMultimédia

Faire cours avec un ordinateur ! Utile ? Facile ?DE NOMBREUX ÉTABLISSEMENTS sont dotés par leur conseil régional ou général de vidéo-projecteurs.Parfois ils sont très utilisés, ailleurs ils ne sortent guère de leur emballage ! Dans le même temps les collèguesutilisent l’ordinateur pour produire des documents, captent sur le réseau images, animations et logiciels,sont gênés par l’étroitesse de leur contingent de photocopies ou l’utilisation de l’informatique en situationde cours. Faire un cours, ou des travaux dirigés, illustré (richement au besoin, avec une grande variétéde documents, de schémas, animés ou non...), c’est très facile dès lors qu’on a le moyen de le montrersur un écran assez grand, ou de visualiser une unique copie à chaque poste.

PowerPoint, logiciel de Micro-soft, est devenu un grand clas-sique des amphis. La logique debase est le diaporama : on réa-lise des « diapositives » qui vonts’afficher dans un ordre préétabliavec changement d’image auto-matique ou manuel.

Qu’est-ce qu’une diapositive ?On peut simplifier en disant quec’est un écran. Donc une photo,un graphique, un plan de cours,un texte... Mais on peut en faitassocier du son, appeler unevidéo (numérisée, prise sur unCD ou sur le web, ou faite avecla webcam du lycée), un logi-ciel. On peut dessiner ou écriresur une photo... bref tout est pos-sible.Noter qu’on peut imprimer : c’estun outil classique pour préparerdes transparents, si on n’utilisepas de vidéoprojecteur.

Comment s’y prendre ?Le menu est assez intuitif, le logi-ciel offre une aide. Bien des uti-lisateurs réticents aux TICE seprennent au jeu en quelquesdizaines de minutes, tellement lelogiciel vous guide. Les versionsles plus récentes permettent plusd’effets attrayants ou utilescomme faire apparaître progres-

sivement les mots d’une phrase,diverses transitions entre diapo-sitives.

L’outil pour fairePowerPoint, n’est pas gratuitmais, comme bien des produitsMicrosoft, il est souvent sur votre

ordinateur habituel (avec la« suite » installée à l’origine parexemple). Le fichier produit portel’extension ppt.

L’outil pour lireLes ordinateurs du lycée ne sontpas nécessairement équipés dePowerPoint. Pensez à installer lelogiciel nommé visionneuse, gra-tuit, léger, automatique, proposépar PowerPoint au moment oùvous enregistrez votre travail. Onpeut aussi le télécharger sur lesite de Microsoft. On peut enprincipe lire les fichiers ppt avec

un navigateur (il y en a sûrementun sur chaque appareil de l’éta-blissement) mais il est prudentde vérifier, les surprises ne sontpas rares.

Des animations en prêt-à-porterOn trouve de nombreuses petitesanimations sur les sites pédago-giques, on peut souvent les télé-charger librement pour l’usagescolaire, souvent aussi on peutles modifier.

Richesse et limitePowerPoint est un très bon outilpour un exposé très structuré.La présentation peut-être trèssoignée à peu de frais, retenantbien le regard (ça « en jette »).En revanche les diaporamas sontmoins commodes pour uneexploration en interaction avecla classe (ne caricaturons pas,on peut afficher toutes les dia-pos, prévoir un menu pour l’in-teractivité, mais cela demandeun peu plus de temps et demaîtrise). �

Encore plus simple, pas moinsefficace !

Pas besoin de logiciel spéci-fique. Vous pouvez partir dedocuments déjà préparés

sous Word, si cet outil vous estfamilier, ou, mieux, faire unmenu et quelques pages sousFrontPage Express, parce quec’est gratuit et qu’il est déjà survotre ordinateur (installé avecInternet Explorer). Deux étapes :

1. Préparez répertoire(s) et fichiers à appelerPour débuter, faites très (trop)simple. Créez un répertoirecours_machin et collez-y tous

vos documents, textes, images,vidéos, etc. (vous renoncerez àcette hérésie dès que vous saurezpourquoi faire autrement peutservir). Ne créez des sous-réper-toires que pour les « paquets »de fichiers autonomes qui ne sontpas de vous. Par exemple logi-ciel_chose pour cette petite appli-cation qui calcule des âges àpartir des rapports 14C/12C ousite_paul pour une copie de siteWeb.Adaptez vos documents à l’usageprévu. Quel type de document ?Tout texte mis en page, au besoinillustré (fichier du polycopié del’an dernier, enregistré souspolynn.rtf), photo en plein écran,graphique, animation copiée sur

Ma conférence sous PowerPoint ?

NOS SITES DU MOIS• Dans Économie et Statistique

n° 361, 2003, deux articles inté-ressants : « L’origine socialedes élèves des grandes écoles »et « La taille des hommes, sonincidence sur la vie de coupleet la vie professionnelle », à liresur http://www.insee.fr/fr/ppp/publications/ficsom_frame.asp?som_id=42&com=/fr/p.

• Sélection de sites Internet concer-nant la construction européenne :http://www.ac-versailles.fr/p e d a g o g i / s e s / t h e m e s /mondialisation/menu1.htm.

Inutile de recopier votre dossierpartout dans une salle en réseau.Si vous n’appelez pas un logiciel« non-réseau », vos élèves y accé-deront avec [ouvrir], [parcourir],[voisinage réseau]... Dans ce cason ouvre avec le navigateur et lesdocuments doc, rtf, etc. sont malvenus.

TRAVAUX DIRIGÉS

DES SITES POUR EN SAVOIR PLUSPour faire un site Web comme pour réaliser des animations sous Power-Point, il y a une multitude d’aides en ligne. Pour le premier point, revoirnotre précédent article (mars 2002), en ligne sur http://www.adapt.snes.edu.Vous y trouverez aussi un article sur l’utilisation d’images (mars 2003)mais rien sur vidéo ou son (c’est en projet). Pour PowerPoint, le plussimple est encore d’utiliser une recherche avancée (par Google...) avecdes expressions aussi contraignantes que « réaliser un diaporama avecPowerpoint ». Deux adresses :• http://www2.ac-rennes.fr/crdp/29/ie/aides/multimedia.htm conduit

notamment à de petits dossiers sur la réalisation de diaporamas avecPowerPoint mais aussi avec OpenOffice.org, sur les fichiers sons, etc.

• http://www.mylinea.com/agil/informatique/powerpoint/ sur l’annuaireAgil de ressources pédagogiques tertiaires, donne des liens suffi-sants (guides d’utilisation, fiches pour élèves, etc.).

MICROSOFT N’ESTPAS INCONTOURNABLE !

Certes non. Il m’a semblé que lecollègue qui n’utilise pas un vidéo-projecteur quand il existe est rare-ment équipé de logiciels libres etqu’il préférera partir de ce qu’il vatrouver « à la maison ». Mais unesuite bureautique libre sait fairedes liens donc des diaporamas ettout logiciel éditeur de html fait aumoins aussi bien que FrontPageExpress. Ainsi si vous avez Mozilla,vous avez navigateur + éditeur etil n’y a pas une virgule à changer àl’article ci-dessus.

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 41

le Web (vérifiez qu’elle ne faitpas appel à un logiciel qui vousmanquera, téléchargez-le dans cecas), vidéo, document sonore,feuilles de tableur... voire uneapplication (= logiciel). Donnezdes noms de fichiers simples,clairs, faciles à mémoriser :minuscules seules, ni espace, niponctuation, ni tiret. Cela vousfacilitera notamment la saisie desliens surtout si vous ne savez pasbien les copier avec la souris.

Préparer une imageOuvrez-la (avec Gimp ou MSPhoto Editor...). Redimension-nez en pixels à 1024 de large ou768 de haut (800 et 600 pourlire sur un vieil équipement).Enregistrez sous maphoto.jpg(photo, cas général) ou gif (sché-mas). Elle s’ouvrira ainsi pleinécran.Collez votre photo dans un logi-ciel vous permettant de dessiner,superposez vos commentaires etdessins. Enregistrez votre originalau format par défaut de votrelogiciel (vous pourrez modifier cefichier au besoin). Enregistrezaussi sous maphoto2.jpg pour

l’exploitation en cours.Pour implanter une image dansun document (page de texte)n’utilisez pas copier puis coller :votre logiciel d’édition de la pagerisque de la modifier à votre insuet de créer un sous-répertoireavec une copie de plus et un nou-veau nom : on s’y perd vite...Préférez : [insertion] [image] [àpartir du fichier]. Dans ce cas,c’est bien l’image préparée quevous affichez et non une adapta-tion de celle-ci.

2. Préparez le menuVotre plan sera un menu. Il vaafficher votre plan de cours et,par exemple, chaque sous-titre

renverra d’un clic vers l’exercicecorrespondant. On peut évidem-ment avoir un menu désignantdes sous-menus et imaginer toutce qu’on veut, à condition quedes liens permettent le retourspontané, sans « réfléchir ».Préférez un fichier menu.htm réa-lisé avec l’éditeur de pages html(ici FrontPage Express). Voussaisissez le plan... puis vous faitesdes liens. Word (etc.) n’est pas interdit sivous avez déjà des documentsque vous ne voulez pas tropmodifier. On peut en effet « navi-guer » avec ce type de logiciel depage en page. C’est paresseuxmais efficace, parfois cause dedésagréments, mieux vaut vérifierque ça passe bien sur lesmachines de lecture...

Pour faire un lienSélectionnez le texte qui y ren-voie, passez par [insertion] [lienhypertexte], saisissez le lien en

adresse relative : nomfichier.jpgpour une image dans le mêmerépertoire que le menu. Ou nom-répertoire\nomfichier.jpg si elleest dans un sous-répertoire. Atten-tion aux liens assistés automa-tiques (en cliquant sur une liste defichiers ouverts) : si votre logicielenregistre C:/mesdocuments/mesimages/nomfichier.jpg vousne lirez votre travail que sur cetunique ordinateur !

Les tableaux Ce sont souvent de bons outilsde présentation. Pour un affi-chage adapté à l’écran de lecturefixez la largeur à 100 %.

EnregistrementEnregistrez menus et textes auformat htm me paraît le mieuxmais certains préfèrent, pour laqualité de présentation, enregis-trer sous rtf (format d’échange,plutôt pratique) ou rester sousdoc (attention à la mise à jour

des antivirus), les deux gérantles liens.

3. Le résultatPour lire, on clique sur le fichierdu menu et... plus besoin de réflé-chir aux TICE ! Vous n’aurezprobablement rien à installer surl’ordinateur d’exposition. Pourmenu et textes avec l’extensionhtm vous lirez avec tout naviga-teur. Mais si vous avez choisimenu.rtf ou .doc, vous l’ouvri-rez avec le traitement de textemais il est alors prudent de véri-fier la compatibilité avant l’arri-vée de vos 30 chérubins ! Pour un débutant, le résultat seramoins esthétique qu’avecPowerPoint. Mais un travail éla-boré et efficace se prépare vite,

c’est souple, c’est la logique dusite Internet, ce qui vous servirapar ailleurs. Vous ne faites pasappel sur l’ordinateur de lectureà des installations spécifiques,sauf éventuellement pour cer-tains des « documents » dési-gnés, ce qui est inévitable (ani-mations Flash, certains logiciels,etc.). Autre intérêt : vous pou-vez appeler tel ou tel « exercice »en fonction de la réaction de laclasse, donc sortir sans tâtonnerd’une progression linéaire pré-établie. �

Les captures d’écranPour créer une documentation, on est parfois amené à faire une captured’écran. Divers procédés existent sous Linux ou Windows. Sous Windows, on peut appuyer sur la touche [Impr écran] puis [Coller]dans un programme acceptant des images (OpenOffice.org ou Paint parexemple). Sous Linux, on obtient le même résultat, plus rapidement, avec lesprogrammes Xbindkeys et Import (configurables en mode texte). Il existe d’autres utilitaires libres fonctionnant entièrement via uneinterface graphique et offrant d’autres possibilités :• Sous Linux, Ksnapshot permet de réaliser très facilement des captures

avec ou sans temporisation, soit de l’écran entier, soit d’une fenêtre(avec ou sans son cadre), soit enfin d’une zone sélectionnée à l’aide dela souris.

• Sous Windows, Smartision ScreenCopy fait le même travail et disposed’une fonction d’auto-capture très pratique pour prendre automati-quement une série de photos d’écran, d’un navigateur de captures pourles visualiser très facilement et d’un générateur de galeries au formathtml. Bien entendu, vous pouvez choisir de capturer l’écran entier ouseulement une fenêtre (sans pouvoir exclure le cadre cependant).Seul regret, le format de fichier des images est limité à jpg (non libre).Logiciel et documentation française sont téléchargeables surhttp://smartision-sc.sourceforge.net/downloads.php.

• Enfin, sous Linux, Mac ou Windows, on peut faire facilement unecapture d’écran avec le manipulateur d’image Gimp.

Rubrique suivie par Claude Micouin ([email protected])

Pages réalisées par Alain Prévot pour Adapt-SNES

237, boulevard Saint-Germain, 75007 Paris, tél. : 01 40 63 27 70

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Ces articles sont soumis à la licencelibre GPL, c’est-à-dire que la repro-duction exacte et la distribution inté-grale sont permises sur n’importequel support, à autant d’exemplairesque vous le désirez, pourvu que cettenotice et les mentions de copyrightsoient préservées.

Tous les articles multimédias parusdans L’US Magazine, des centaines detests de cédéroms, de nombreux liens,le catalogue des publications d’Adapt(commande en ligne possible) surhttp://www.adapt.snes.edu

DES NOUVELLESDU MONDE

DES CÉDÉROMS

Les synthèses de 400 tests decédéroms éducatifs sont surhttp://www.adapt.snes.edu. Nousavons toujours besoin de testeursbénévoles. Si vous êtes intéressés,contactez Sabiha au 01 40 63 27 70ou par mél : [email protected].

DES NOUVELLES DES LOGICIELS « ALTERNATIFS »

TRANSPORTER SON TRAVAILLa disquette risque de vous limiter beaucoup. Graver et lire un CD est tou-jours simple (essayez les RW, il y a des incompatibilités à la lecture). Les clés USB (de la taille d’un briquet) sont à privilégier sauf très vieil équi-pement. N’achetez pas une trop petite capacité (500 Mo est souvent unbon compromis capacité/coût). Bien sûr, vous pouvez (surtout en haut débit) vous envoyer un messagepar courrier électronique, enregistrer le fichier joint sur un répertoire par-tagé et le récupérer où vous voulez par le réseau.

• [Alt] [Tab = les 2 flèches] pourpasser vite du logiciel au travailau dernier ayant travaillé.

• Les trois icônes en haut àdroite pour réduire sans fermer(barre basse), afficher plusieursfenêtres ajustables (2 rectangles),fermer durablement (x).

• Les flèches vers page précé-dente ou vers page suivante dunavigateur.

DES COMMANDESÀ NE PAS OUBLIER

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42 - US MAGAZINE - N° 506 - OCTOBRE 1999

Le 3 avril 1987, le congrès national du SNES, réuni à Versailles,refusa de syndiquer les personnels de l’enseignement privé souscontrat, auparavant adhérents du SNUDEP-FEN. Le Monde titrason article de compte-rendu : « Pas de main tendue aux laïques duprivé ». Comment en était-on arrivé là ?Le SNES avait pourtant largement contribué à favoriser la naissanceen avril 1983, dans la FEN, du « Syndicat National pour l’Unifica-tion du service public d’éducation et de la Défense des personnels del’Enseignement Privé ». C’était à l’époque où la construction d’ungrand service public unifié laïque de l’Éducation nationale(SPULEN) était d’actualité, conformément à l’engagement ducandidat Mitterrand à la présidence de la République. On sait que ceprojet avorta complètement en 1984 et que lui succédèrent les« mesures simples et pratiques » de Chevènement. Cet échec étaitaussi celui du camp laïque, notamment du CNAL et de la FEN ; ilallait être lourd de conséquences pour l’avenir de la fédération toutentière. Au printemps 1986, on eut vent de projets de recompositioninterne et externe de la part des majoritaires UID de la FEN.

Dans ce contexte, ces derniers décidèrent de dissoudre leSNUDEP et de renvoyer les adhérents de ce syndicat – qui n’avaitété qu’une structure d’accueil en attendant la naissance duSPULEN –, vers les syndicats nationaux pour qu’ils lesaccueillent. Le Conseil national du SNES de juin 1986 estima quela question était mal posée : il refusait la « solution d’une simplestructure d’accueil pour les militants du SNUDEP » tout commecelle de « leur syndicalisation directe sans que la question de laplate-forme commune aux personnels du public et du privé soitrésolue ». La réunion de concertation au niveau fédéral demandéepar le SNES eut finalement lieu. Le SNETAA décida de syndiquercarrément les personnels du privé, le SNI-PEGC de ne syndiquerque les ex-adhérents du SNUDEP, et pour ses adhérents relevantdu secteur de syndicalisation du SNES, l’adhésion directe à laFEN fut exceptionnellement décidée pour 1986-1987.Le SNES mit à profit la préparation du congrès national deVersailles pour organiser le débat dans les académies et dansL’US : une partie du rapport du thème V (présenté par J.-L. Auduc

UN BREF RAPPEL HISTORIQUE : FALLAIT-IL SYND I

Le congrès de Perpignan a validé le pro-cessus d’élargissement de notre fédéra-

tion, celle-ci s’est ouverte aux trois fonc-tions publiques. Un syndicat de chefsd’établissement, le SNUPDEN, a été inté-gré. Logiquement, des organisations syndi-cales de l’enseignement privé (le SNUDECet le SUNDEP) ont demandé à pouvoiradhérer à la FSU.L’US-Mag, supplément au n°606, présenteles termes du débat et les deux syndicatscandidats.Si l’entrée d’organisations de l’enseigne-ment privé est soumise à débat, c’est que lanature de cette adhésion est particulière.Les arguments en faveur de ces adhésionssont les suivants : l’élargissement de laFSU doit la conduire naturellement à inté-grer ces organisations ; on ne peut pas nepas répondre à une demande d’organisa-tions avec lesquelles nous avons déjà menédes luttes communes, qui ont des revendi-cations proches des nôtres, et qui ont dansle passé, pour le SNUDEC, été membre dela FEN comme le SNES. Enfin, il ne s’agi-rait pas d’intégrer l’enseignement privémais d’en syndiquer les personnels qui ontdes problèmes comparables aux nôtres.Pourtant l’adhésion de ces organisationspose au moins deux problèmes :•Le syndicalisme pratiqué par la FSU nerisque-t-il pas d’être remis en cause?

•L’adhésion syndicale est-elle une démarchepurement rationnelle ou la fibre militante a-t-elle aussi un enracinement affectif?

La FSU a fait le choix d’être une fédérationde syndicats nationaux qui se définissent par

une communauté de métiers. Contrairementau SGEN, puis à la FEN, qui ont fait le choixde rassembler dans un seul syndicat l’en-semble des personnels enseignants, et qui ontdisserté sur l’unicité professionnelle entre lepremier et le second degré, la FSU a choisi degarder une organisation où, pour l’essentiel,les personnels se retrouvent, avec des syndi-cats différents suivant le niveau d’enseigne-ment et le type d’enseignement; les résultatsdes élections professionnelles depuis 1993 ontmontré que ce choix faisait l’adhésion, nonseulement des syndiqués mais aussi plus lar-gement des personnels. Les deux organisa-tions qui demandent à adhérer à la FSU vien-nent de la CFDT et en ont la culture. Ellessyndiquent les personnels des différentsniveaux de la maternelle à la terminale.Si le refus du syndicat des enseignants, pro-posé par la FEN et qui a amené notre exclu-sion et la création de la FSU, devait se termi-ner, douze ans plus tard, par la remise encause de notre identité syndicale à l’occasionde l’entrée de syndicats de l’enseignementprivé, voilà qui ne manquerait pas de sel.Des questions ne manqueraient pas de seposer, de la pire des façons, sur d’autresrecompositions, pensons par exemple à lasituation de l’enseignement professionnel,devenu un désert syndical. Faudrait-il pourrésoudre le problème, élargir le champ desyndicalisation du SNES ?Comment notre fédération pourra-t-elledéfendre deux logiques : un syndicalismed’enseignants avec une FSU très minoritairedans l’enseignement privé et un syndica-lisme d’enseignement ?

Le SNES, syndicat national de l’enseigne-ment du second degré, loin d’être le syndicatcorporatiste trop souvent présenté, est d’abordun syndicat qui porte un projet pour l’école, etles personnels contribuent, par le mode derecrutement, leurs qualifications, leurs statuts,à promouvoir ce système. Le problème ne serésume pas à syndiquer des enseignants duprivé mais à savoir si la FSU intègre dans saconception scolaire, son projet d’école et sesrevendications, l’enseignement privé. Si leSNUDEC a adhéré à la FEN en 1981, c’estbien parce que l’unification scolaire était àl’ordre du jour et s’il l’a quitté en 1984, c’estbien à cause de l’échec de l’unification sco-laire marqué par la démission de Savary. Quipeut croire, aujourd’hui, que cette questionsoit d’actualité ? Bien au contraire, aumoment où l’Union européenne redéfinit lesservices publics en services d’intérêt général,quelle serait l’interprétation donnée à l’inté-gration par la FSU de l’enseignement privé,sinon qu’une adaptation à ces nouveaux ser-vices «publics» à défendre et à représenter àtout prix.C’est là que l’on touche au deuxième aspectdu problème soulevé par l’adhésion de syn-dicats de l’enseignement privé. Même si lesproblèmes d’ordre syndical n’existaient pas,ce qui n’est pas le cas comme nous venonsde le montrer, cette adhésion ne pourraitabsolument pas se traiter seulement à partirde considérations rationnelles ou de la listedes avantages et des inconvénients procuréspar cette démarche. L’adhésion à une organi-sation syndicale, en particulier en France oùil n’y a aucun avantage spécifique, ni sala-

ENSEIGNANTS DU PRIVÉ À LA FSU ?EN DÉBAT

Nous publions ci-dessous la dernière série de contributions au débat sur ce sujet.Le SNES, lors de sa CA nationale des 23 et 24 novembre, doit se positionner et mandater sa délégation pour le conseil national de la FSU. Celle-ci doit répondre définitivementdébut décembre aux deux syndicats de l’enseignement privé qui frappent à sa porte.

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OCTOBRE 1999 - n° 506 - US MAGAZINE - 43

et F. Berguin) précisait que « le maintien d’un syndicat propre àces catégories de personnels aurait dû rester le meilleur outil »mais que « pour ne pas laisser les adhérents du SNUDEP relevantde son champ de syndicalisation sans protection, nous proposonsque le SNES prenne la décision de principe d’accueillir ces mili-tants ». A la suite d’une « discussion très ouverte », les rapporteursfirent voter sur une motion qui comportait à la fin deux éventua-lités : acceptation de la syndicalisation de la quarantaine d’adhé-rents de l’ex-SNUDEP ou impossibilité en l’état actuel. Ce fut la2e solution qui l’emporta(1). Les opposants à la syndicalisation esti-maient que le SNES n’aurait pas de possibilité effective dedéfendre ces personnels et craignaient surtout que l’adhésion desmembres de l’ex-SNUDEP au SNES prépare celle du privé, quideviendrait alors un pion important dans la recomposition syndi-cale visant à créer un grand syndicat de la maternelle à l’Univer-sité au sein de la FEN. Notons que l’EE (N. Bénies) avait proposéde son côté une motion en trois points : refus de la syndicalisationdes personnels du privé, critique renvoyant dos à dos UID et UA,

accueil des membres du SNUDEP. A l’issue du vote, JacquesEstienne (leader UIDR) demanda un vote par mandats quiconfirma le premier vote et fit apparaître les avis opposés des S3(2).Le dernier carré des ex-membres du SNUDEP finit par fonder leSNUDEC. Cette affaire fut donc une des péripéties du drame quise termina par l’exclusion du SNES et du SNEP de la FEN, etl’implosion de la fédération.

A. Dalançon, président de l’IRHSES

(1) 226 voix contre 117 à la 1re, 27 abstentions et 5 refus de vote.(2) Pour cette syndicalisation : 25 867 mandats, contre : 35 033, 3 925abstentions et 602 refus de vote. Les S3 d’Aix, Rennes, Poitiers, Paris,Toulouse, Nice, Dijon reportèrent la totalité ou presque de leurs mandatspour l’adhésion, ceux de Lille (qui avait déposé une motion optant pourl’opposition), Grenoble, Versailles, Créteil, Reims, Rouen, Besançon,Nantes firent l’inverse, les autres partageant leurs mandats dans desproportions variables.

ND IQUER LES ANCIENS ADHÉRENTS DU SNUDEP ?

faut aussi se placer dans une perspectivede développement du service public etd’assimilation/nationalisation du secteurprivé qui les embauche.La FSU, depuis sa fondation, se bat pourl’unification du syndicalisme. Elle lutteaussi pour le développement des servicespublics, notamment d’Éducation nationale.Si la recherche de l’unification syndicaleva dans le sens d’une intégration des syn-dicats de l’enseignement privé SUNDEPet SNUDEC, la défense du service publiclui impose de redonner un élan fort aucombat contre le dualisme scolaire, pour lanationalisation de l’enseignement privéconfessionnel ou patronal. Les mandats et les pratiques déclarées deces syndicats vont clairement dans lemême sens. Mais il est nécessaire que leurentrée dans la FSU s’accompagne d’unengagement sans ambiguïté : celui de necontribuer en rien au développement dusecteur privé d’éducation.L’histoire du service public d’éducation,les combats qu’il a dû mener – et mèneencore dans certaines régions comme laBretagne ou l’Alsace-Moselle – pour s’im-poser, les dangers d’éclatement et de mar-chandisation qui le menacent, rendent cetteperspective particulièrement délicate.Il n’est pas nécessaire de précipiter la déci-sion : nous proposons que la FSU nereferme pas la porte ouverte à Perpignan etengage avec le SNUDEC et le SUNDEPun contrat d’association d’un an. Il serapossible, dans ce délai, de redonner touteson énergie au combat laïque de notrefédération, tout en œuvrant sur le terrainpour que les interventions des postulantsaillent dans le même sens.Et pour qu’un sujet aussi sensible nesemble pas tranché par une « décision desommet », une consultation de tous lesadhérents de la FSU – par exemple pour leprochain congrès – permettra d’adopter ladécision définitive. �

Les élu/es École Emancipéeà la CA Nationale du SNES

Je suis totalement d’accord avec lescamarades du secrétariat académique du

S3 d’Aix-Marseille. Il faut que la FSUs’ouvre à ces camarades, sur les bases queprécise le S3 d’Aix et qui semblent accep-tées par les demandeurs. Ne nous compor-tons pas en « culs-pincés » (pour les rejeterailleurs, dans le réformisme UNSA dedroite, ou pire). Évitons de nous comportercomme dans l’après mai-juin 68, où sinous avions été plus « ouverts » nousaurions perdu moins de temps et d’énergie(à utiliser contre le pouvoir) dans« certains » affrontements sectaires de« terroir ».

Avant d’être responsable au SNES, j’ai étéresponsable CGT à la Régie Renault de1962 à 1965 (de 22 à 25 ans). Je n’aijamais été sectaire vis-à-vis d’un ouvriercatholique, enterré à l’église ; j’entrais àl’église et respectais les convictions reli-gieuses de l’homme – car je luttais contrele patronat et non contre mon camaradeouvrier catholique – alors que d’autrescamarades restaient dehors. Cela m’a valule respect d’ouvriers catholiques, syndi-qués à la CGT et non à la CFDT.

Quand j’étais secrétaire du comité d’entre-prise, secrétaire de la CGT de l’entreprise,délégué syndical CGT(1), j’avais 340 syndi-qués à la CGT ; il y en avait 70 à la CFDTet 3 à FO, sur 750 ouvriers et cadres(2).Vieux débat syndical sur l’unité, récurrentface à une droite dominatrice(3) et toujoursd’actualité. Recrutez sur des bases d’unitéacceptées. Ne vous laissez pas piéger(4). Ànous d’y faire face au mieux, dans l’intérêtde nos mandants, et de l’unité syndicale,pour laquelle nous combattons. Difficilecombat, celui de l’unité. �

R. D., retraité, Ingré

1. Et connu comme membre responsable du particommuniste au niveau départemental du Loiret.2. Voyez le pourcentage de syndicalisation !!! à laCGT !!!3. Et multiforme (à droite, mais aussi à « gôche »).4. Par une « fausse laïcité sectaire » qui ne profitequ’aux conservateurs de tout poil.

rial, ni de gestion sociale, ni de carrière, àêtre syndiqué, l’adhésion, donc, repose enpartie sur l’image d’un idéal et d’une com-munauté de pensée. Le combat pour la laï-cité, le refus de l’enseignement privé ou ladénonciation des accords successifs faisantla part belle à cet enseignement sont des élé-ments constitutifs de l’adhésion de nom-breux syndiqués et une motivation impor-tante de nombreux militants.Il ne s’agit donc pas de jeter l’anathème surnos collègues du privé, ce sont des salariésqui portent leurs revendications et avec quinous avons mené régulièrement des luttes etcela, bien qu’ils ne fassent pas partie de laFSU. Nos combats nous amèneront à l’ave-nir à nous retrouver dans les actions.Le S3 de Lille, à travers ses instances, s’estprononcé contre l’adhésion des organisationssyndicales de l’enseignement privé et il luiparait indispensable, pour préserver l’unitédu syndicat et de notre fédération autour deses valeurs fondatrices, que l’ensemble dessyndiqués soit consulté directement par unvote organisé par les sections d’établisse-ment avant toute décision. �

Le secrétariat du S3 de Lille

Si la FSU élargissait son champ de syn-dicalisation aux personnels de la Santé,

refuserait-elle les salarié/es du privé, aumotif bien réel que le secteur privéconcurrence la Santé publique ? Ni lafédération CGT-Santé, ni Sud-Santé nefont ce choix.Le dualisme privé/public, arme de guerreredoutable contre les services publics, n’estpas de la responsabilité des salariés du privé,qu’il s’agisse de santé, d’éducation, de trans-ports ou d’énergie. S’ils sont dans le privé,c’est bien souvent du fait de politiques déve-loppant la précarité et attaquant les servicespublics. Il leur est donc légitime de se syndi-quer pour se défendre contre leurs patrons,de rechercher un cadre plus unitaire pours’unir aux autres salariés.Mais, pour que leurs revendications nes’opposent pas à l’intérêt public, il leur

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44 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

ENTRETIEN AVEC PIERRE-ANDRÉ PÉRISSOL ET JEAN-YVES

un socle commun de fondamentaux tout aulong de leur scolarité obligatoire. Pourquoi 100 % des élèves ? Parce que, d’unepart, personne ne peut se résigner à ce quenotre école laisse un pourcentage significatif denos enfants sans aucun bagage à la fin de leurscolarité, qu’elle soit impuissante à assurerl’égalité des chances. Parce qu’ensuite il estimpossible d’espérer qu’un jour 80 % d’uneclasse d’âge atteignent le bac si on renonce à ceque 100 % aient effectivement acquis aupara-vant des bases solides.Ces bases sont celles dont chaque élève a besoinpour aller plus loin dans ses études, que ce soitdans un lycée d’enseignement général, un lycéetechnique, un lycée d’enseignement profes-sionnel, ou vers l’apprentissage. Aussi leuracquisition devrait-t-elle être évaluée avant la finde la scolarité obligatoire. L’élévation du niveau général de qualificationconstitue un enjeu économique et social majeur.La France devra former dans les prochainesannées plus de bacheliers et plus de diplômés del’enseignement supérieur. Mais cet objectif trèslégitime ne pourra être atteint si préalablementon n’acquiert pas des bases solides.

L’US Mag : Quelle est la conception du collège qui estainsi mise en avant ?P.-A. P. : La priorité est de réussir le collègepour tous.Il n’est pas de réussite sans bases : aussi lecollège doit-il être unique en ce sens qu’il doittransmettre à tous un tronc commun de fonda-mentaux. Il n’est pas de réussite sans prise en compte durythme, des capacités propres des élèves : aussile collège doit-il être personnalisé dans lerythme et les modalités d’acquisition de cesocle commun.Il n’est pas de réussite sans respect du talent desélèves : aussi le collège doit-il être diversifiédans les options proposées à tous les élèvesau-delà du socle commun. Chacun pourra alorsdécouvrir sa voie de réussite et aller aussi loinqu’il le pourra. �

Propos recueillis par Alexis Chabot

L’US Mag : Quels sont, selon vous, les principauxobjectifs du rapport de la Commission Thélot ?Pierre-André Périssol : Le noyau des propo-sitions de la Commission Thélot repose sur letriptyque socle commun – personnalisation –enseignements choisis. L’idée d’identifier un socle commun indispen-sable est fondatrice. Il s’agit du cœur de ce quiest fondamental à acquérir à chaque niveau dela scolarité obligatoire, en termes de connais-sances, de compétences et de règles de com-portements, sans lesquelles il n’est pas pos-sible de réussir sa scolarité, plus tard sa vieprofessionnelle et sa vie de citoyen. Tant que100 % des élèves n’auront pas acquis ce soclede fondamentaux, l’objectif de conduire tous lesjeunes à une formation réussie demeurera unleurre.Cette ambition ne pourra être atteinte que parune personnalisation et une diversification desenseignements. Pour arriver à transmettre effec-tivement ce socle commun à 100 % des élèves,il est indispensable de permettre aux ensei-gnants d’en faire réellement une priorité. Ce quisignifie que ceux-ci doivent pouvoir person-naliser au maximum leur enseignement, lesrythmes et les modalités d’apprentissage, etconsacrer à un élève tous les efforts dont il abesoin pour acquérir une bonne maîtrise de cesocle commun de fondamentaux.Mais l’école se doit aussi de tenir compte de ladiversité des aspirations des élèves et de leurtalent : c’est la raison d’être de la troisièmeproposition essentielle. En permettant à chaqueélève, une fois le socle commun de fondamen-taux solidement maîtrisé, d’aborder et d’ap-profondir des enseignements complémentaireschoisis en fonction de ses intérêts et de sesaptitudes, l’école aidera chacun à découvrirson terrain de réussite, celui où il démontre untalent particulier et qui l’amène au meilleur delui-même. L’école pourra ainsi mieux valoriserla variété des parcours et la diversité des qua-lifications.

L’US Mag : Que faut-il entendre par « culture com-mune » ?P.-A. P. : Il convient d’abord de faire remarquerque la Commission Thélot n’avait ni le mandatni les moyens d’élaborer une programmationdes enseignements. Son rapport propose mêmeque la définition de la culture commune soitdéfinie en deux temps : un cahier des chargesvalidé par la représentation nationale et unetraduction en termes de programmes par uneautorité indépendante. Par conséquent, les exemples cités dans le rap-port ne constituent pas des propositions mais

une simple illustration faite pour démontrerque l’exercice d’élaboration d’un socle communest bien réalisable.La culture commune recouvre ce qui est fon-damental et devrait être prioritairement maî-trisé à chaque niveau de la scolarité obligatoirepar l’ensemble des élèves. À titre d’exemple, desfondamentaux en termes de connaissances –lire, écrire, compter, maîtriser la langue et les dis-cours, connaître les principales opérationsmathématiques et le raisonnement logique, maisaussi de compétences – s’exprimer, raisonner, serepérer dans le temps historique et dans l’espacegéographique, etc. – et de règles de comporte-ments civiques et sociaux – s’entendre avec lesautres, respecter les différences, etc.

L’US Mag : Pourquoi parler d’un « socle commun »?À quel niveau d’exigences correspond-il ? N’est-ilpas porteur de dangers pour l’égalité de forma-tion pour tous les élèves ?P.-A. P. : L’école a accompli en deux ou troisgénérations seulement des progrès remar-quables, avec une véritable élévation des qua-

lifications et une démocratisation à son actif.Mais, en même temps, elle se heurte à diverseslimites qui sont vécues comme autant d’échecs.L’égalité des chances est battue en brèche.L’échec scolaire dans l’acquisition des fonda-mentaux ne régresse pas. 60 000 jeunes quittentchaque année le système éducatif sans aucunequalification.En affirmant très clairement quel patrimoineculturel chaque enfant doit obligatoirementmaîtriser, quel que soit son niveau de find’études, nous pourrons atteindre deux objec-tifs essentiels : permettre aux 15 à 20% d’élèvesenviron qui, aujourd’hui, ne maîtrisent pas lesfondamentaux de le faire en y consacrant lesefforts nécessaires ; encourager ceux qui lesdominent plus vite à se cultiver encore plus, àapprofondir, grâce aux enseignements com-plémentaires choisis.C’est pourquoi l’idée d’identifier un socle com-mun indispensable est porteuse de progrès etnon d’une baisse de niveau et des exigences.Si l’on veut réellement, au-delà des incantations,que l’école conduise 100 % de nos jeunes àune formation réussie, il est indispensablequ’elle transmette d’abord à 100 % d’entre eux

Après le rapport Thélot: le

Il s’agit du cœur de ce qui est fondamental à acquérir à chaque

niveau de la scolarité obligatoire, en termes de connaissances,

de compétences et de règles de comportements.

UNE IDÉE PORTEUSE DE PROGRÈS

Pierre-André Périssol est député UMP, membre dela commission Thélot.

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Supplément au no 608 du 10 novembre 2004 - US MAGAZINE - 45

S ROCHEX

gramme, du contenu de ce socle commun (« lire,écrire, maîtriser la langue et les discours, compter,connaître les principales opérations mathématiques,s’exprimer – y compris en anglais de communica-tion internationale –, se servir de l’ordinateur, vivreensemble dans notre République ») ne peut qu’ou-vrir la porte à la détermination a minima de ce quiserait ainsi garanti à tous. Le rapport va d’ailleurslui-même dans ce sens, dans les rares – et affligeants– passages où il apporte quelques précisions sur lamanière dont il conçoit les deux « piliers » dusocle commun. Ainsi les précisions concernant lesmathématiques limitent les exigences de leur ensei-gnement aux seuls termes compter, calcul et opé-rations mathématiques. [...] De même, la maîtrisede la langue française est présentée comme devantêtre la première tâche de l’École, parce que « c’estla langue qui rend possible la vie commune », en

une formulation qui témoigne d’une conceptionétroitement utilitaire et « communicationnelle »[...]De plus, si ce socle commun « ne constitue pas latotalité de ce qui est enseigné à l’école et au col-lège », son articulation avec les « autres enseigne-ments fondamentaux communs » et avec les « ensei-gnements complémentaires choisis » est pour lemoins problématique. Les auteurs du rapport insis-tent sur la nécessité d’une différenciation crois-sante des parcours et contenus de formation au furet à mesure de la scolarité obligatoire, les appro-fondissements permis par les enseignements com-plémentaires n’étant accessibles qu’aux élèves maî-trisant les éléments du socle. Mais contrairement à ce que les appellations pro-posées pourraient laisser entendre, cette différen-ciation (baptisée de manière euphémistique «per-sonnalisation») ne concerne pas le seul cycle dit dedifférenciation, mais pourra s’opérer dès le cycle ditd’approfondissement, c’est-à-dire dès le CE 2 !Autrement dit, la scolarité obligatoire serait demoins en moins commune. Dès l’école, et encoreplus au collège, serait entériné officiellement leprincipe d’une école à plusieurs vitesses et à dif-férents niveaux d’exigence, préparant très tôt à desorientations différenciées. La façade préservée del’école et du collège uniques dissimulerait (fortmal) la coexistence de boutiques de riches et d’of-ficines de pauvres dans les mêmes enceintes etsous les mêmes appellations. Aux uns les cursuscomplets, aux autres le seul minimum préparant auxemplois « peu qualifiés » ou ne requérant qu’unequalification « fondée sur le savoir-être et la rela-tion à autrui ». Le tout au nom de la diversité desélèves et de la pluralité des voies de réussite et desexcellences !

L’US Mag : Quel regard portez-voussur les conclu-sions de la commission Thélot ?Jean-Yves Rochex: Les zélateurs et les auteursdu « rapport Thélot » le présentent volontierscomme le seul moyen, la dernière chance d’affirmerune ambition pour l’École, de sauver le collègeunique et d’aller vers « la réussite de tous les élèves» face aux assauts conjugués de tous ceux, conser-vateurs ou « républicains », défenseurs proclamésde l’élitisme, pour lesquels notre système éducatifserait victime, non d’une insuffisance, mais d’unexcès de démocratisation. La lecture attentive du rapport conduit à de toutautres conclusions, tant celui-ci est soutenu tout àla fois par un aveuglement sociologique, pour lemoins surprenant et inquiétant, et par une logiquede renoncement que ne suffisent pas à dissimuler lespropositions et les effets d’annonce sur la réussitede tous et sur l’engagement de la Nation à garan-tir à chacun la maîtrise d’un socle commun deconnaissances, de compétences et de comporte-ments. Entrons dans le détail des propositions etargumentations du rapport pour nous en convaincre.Tout d’abord, si l’objectif de définir des contenus deculture commune dont la maîtrise serait garantie àtous paraît tout à fait louable, on ne voit pas enquoi il serait contradictoire avec une ambition réaf-firmée de promotion des nouvelles générations entermes de diplômes et de niveaux d’études. Certesles formulations de la commission ont évolué, dupré-rapport au rapport définitif : si ce dernier affirmeque « le défi que l’École devra relever (...) ne peutexclusivement se traduire en termes de niveaud’études, ou même de diplôme, atteint par telle outelle proportion d’une classe d’âge », on pouvait liredans le pré-rapport que ce défi « peut difficilementse traduire » en termes de niveau d’études ou dediplômes, et qu’il vaudrait mieux s’assurer quel’ensemble d’une classe d’âge maîtrise, à l’issuede la scolarité obligatoire « le socle commun » pro-posé par la Commission. À l’évidence, c’est cettelogique qui permet à Jean-Pierre Raffarin de direqu’il s’inscrit dans les orientations du rapport quevient de lui remettre Claude Thélot lorsqu’il affirmequ’il faudra remplacer notre objectif de 80 % d’uneclasse d’âge au baccalauréat «par celui de la réus-site », et d’« un diplôme pour tous » (lequel diplômepourra n’être que le seul Brevet des collèges, voireque la seule sanction du socle commun).

L’US Mag : Que faut-il entendre par «socle commun»?J.-Y. R. : Quant à la définition du socle commun età ses rapports (pour le moins obscurs dans le rap-port) avec les autres enseignements, communs oucomplémentaires, le moins que l’on puisse direest qu’ils ne servent pas les ambitions proclamées.La définition très générale, fort peu opératoire, etsans rapport explicite avec aucun contenu de pro-

L’US Mag : Quelle est, selon vous, la logique qui sous-tend ce rapport ?J.-Y. R. : La logique maîtresse qui sous-tendl’ensemble du rapport est celle de l’adaptation del’école, de ses parcours et exigences, à la diversitédes élèves. Ceux-ci, nous répète-t-on à de trèsnombreuses reprises, sont différents par leurs talents,leurs aptitudes, leurs besoins, leurs intérêts, leursrythmes d’apprentissage, leur mérite, etc. [...]Apparent bon sens derrière lequel se profile uneincroyable et inquiétante cécité sociologique quis’aveugle sur le fait que ces différences sont aussi,très souvent, des inégalités, qu’elles ne sont passeulement des caractéristiques individuelles desélèves, mais des constructions sociales, scolaires etnon scolaires. La logique d’adaptation étroite quinous est proposée, parce qu’elle ne se donne jamaisla peine d’analyser ce qui, dans les différentsmilieux sociaux et les différentes configurationsfamiliales, donne forme et contenu aux différences

ainsi mises en avant, non seulement tend àconsidérer celles-ci comme naturelles, mais nepeut que conduire l’École à entériner et à accroîtreles inégalités qui lui pré-existent, en ignorant ou enminorant le rôle qu’elle devrait jouer, non dans« l’expression» des talents et des mérites, et dans« l’éclosion » des excellences, selon les termesrévélateurs utilisés par les auteurs du rapport, maisdans leur formation et leur développement. [...]Mais cette perspective ne fait pas partie de celles quisont proposées par la commission, dont le rapportne s’intéresse pratiquement jamais à la façon donton pourrait rendre notre système éducatif plus effi-cace, plus juste et moins inégalitaire dans l’exercicede sa mission essentielle de transmission des savoirs.Particulièrement révélateur à cet égard est le fait quele chapitre 5, consacré au « renforcement de lacapacité d’action des établissements scolaires », netraite en aucune manière de cette question de latransmission des savoirs et ne pense le dit renfor-cement que sous l’angle du renforcement de la« fonction éducative » des établissements.Cécité sociologique, naturalisation des différences,logique d’adaptation étroite, minoration etméconnaissance des enjeux d’apprentissage et del’importance du travail d’étude et d’enseignementdans la production ou la réduction des inégalitéssocioscolaires font que les propositions du rapportThélot et les conceptions qui les sous-tendent nepeuvent que nourrir le renoncement à toute ambitionde démocratisation de notre École. �

e «socle commun» en débat

La logique maîtresse qui sous-tend l’ensemble du rapport

est celle de l’adaptation de l’école à la diversité des élèves.

UNE LOGIQUE DE RENONCEMENT

Jean-Yves Rochex est professeur en Sciences del’Éducation à l’Université Paris VIII Saint-Denis.

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46 - US MAGAZINE - Supplément au no 608 du 10 novembre 2004

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