COURS SUR LA « DISSERTATION SUR LES PASSIONS...

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COURS SUR LA « DISSERTATION SUR LES PASSIONS » DE HUME *Biographie de l'auteur : DAVID HUME 1711/1776 Philosophe écossais, après des études à Edimbourg, il préfère les lettres et la philosophie à la carrière d'avocat ; séjourne en France entre 1934 et 1737. Son TNH publié en en 1739-40 a peu de succès ; ce sont les Essais philosophiques sur l'entd humain qui le rendent célèbre. Il surmonte l'hostilité du clergé pour devenir conservateur d'une bibliothèque universitaire, puis exerce des fonctions diplomatiques en France où il est accueilli par les philosophes et les salons « couverte de fleurs ». Il installera Rousseau à Londres puis se brouille avec lui. De retour en 1768 il travaille à l'édition de ses œuvres. Cf fiche GF. I) L'empirisme de HUME ou la passion de l'expérience Def de l'empirisme : (empeiria = expérience gr ) théorie philosophique née au XVIIIème selon laquelle l'expérience seule est à la fois l'origine et le fondement de toute connaissance, contre le rationalisme cartésien qui fondait toute connaissance sur le travail exclusif de la raison. Def de l'expérience : c’est l’ensemble des données et des impressions sensibles que nous éprouvons (experire= éprouver en latin). La question est alors de savoir quel est le rôle de l’expérience dans la construction de nos connaissances: en quoi est-ce un élément indispensable? En réaction au rationalisme cartésien, les empiristes (empeiria= expérience en grec) ont, à partir du 18ème siècle, systématisé le recours à l’expérience. Ces philosophes, représentés par les encyclopédistes Diderot, Dalembert ou Condillac en France, mais aussi Locke et Hume en Angleterre, faisaient reposer l’empirisme sur 4 principes : A) L'expérience comme origine et fondement de la connaissance : Il part d'un fait, le plus fondamental de l'épistémologie humaine (puisqu'il prend pour acquise la réfutation lockéenne des idées innées) : celui de la perception . Nous percevons, nos sens nous font ressentir des perceptions. Nous pouvons dire que nous ignorons ce que nous percevons, mais nous ne pouvons pas prétendre ne pas percevoir - la perception est un fait. Et puisque nous n'avons pas d'idées innées, c'est-à-dire d'idées précédant l'arrivée de toute perception ou impression, « toute idée dérive d'une impression » Il n’y a pas d’idées innées : toutes nos idées sont le résultat d’une construction plus ou moins tardive à partir des données de l’expérience, alors que pour Descartes Dieu a placé a priori dans notre esprit des idées claires et distinctes que la lumière naturelle de la raison permet d‘entrevoir (innéisme). Ici au contraire l’âme est une « tabula rasa » (table rase), comme une page blanche qui reçoit toutes ses informations a posteriori, grâce aux matériaux de l’expérience (à cet égard il faut distinguer les empiristes des matérialistes qui considèrent que tout ou presque est matériellement, génétiquement inné); qu’il s’agisse des sensations externes ou internes, elles laissent leur empreinte sur notre esprit; savoir c’est donc d’abord percevoir des impressions sensibles (ex de l‘enfant qui s‘éveille au contact d‘expériences diverses et variées; ou se placer au niveau d‘Adam et imaginer ce que percevrait un pur esprit sans corps!). La perception est donc à la fois première d’un point de vue logique et chronologique : “il nous est impossible de penser à quelque chose que nous n'ayons auparavant senti” (EEH SVII p. 129). Pour les empiristes, nos idées ne sont donc que les pâles copies des impressions premières que nous avons pu ressentir: il y a une différence de degré et non de nature entre les sensations du corps et les idées de l’esprit, même si l’impression la plus faible restera toujours plus intense que l’idée la plus forte. Se priver de l’expérience sensible reviendrait donc à se priver de la source de toute connaissance. Cf LOCKE Essai sur 1

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COURS SUR LA « DISSERTATION SUR LES PASSIONS » DE HUME

*Biographie de l'auteur : DAVID HUME 1711/1776Philosophe écossais, après des études à Edimbourg, il préfère les lettres et la philosophie à lacarrière d'avocat ; séjourne en France entre 1934 et 1737. Son TNH publié en en 1739-40 a peu desuccès ; ce sont les Essais philosophiques sur l'entd humain qui le rendent célèbre. Il surmontel'hostilité du clergé pour devenir conservateur d'une bibliothèque universitaire, puis exerce desfonctions diplomatiques en France où il est accueilli par les philosophes et les salons « couverte defleurs ». Il installera Rousseau à Londres puis se brouille avec lui. De retour en 1768 il travaille àl'édition de ses œuvres. Cf fiche GF.

I) L'empirisme de HUME ou la passion de l'expérience

Def de l'empirisme : (empeiria = expérience gr) théorie philosophique née au XVIIIème selonlaquelle l'expérience seule est à la fois l'origine et le fondement de toute connaissance, contrele rationalisme cartésien qui fondait toute connaissance sur le travail exclusif de la raison.

Def de l'expérience : c’est l’ensemble des données et des impressions sensibles que nouséprouvons (experire= éprouver en latin). La question est alors de savoir quel est le rôle del’expérience dans la construction de nos connaissances: en quoi est-ce un élément indispensable?En réaction au rationalisme cartésien, les empiristes (empeiria= expérience en grec) ont, à partir du18ème siècle, systématisé le recours à l’expérience. Ces philosophes, représentés par lesencyclopédistes Diderot, Dalembert ou Condillac en France, mais aussi Locke et Hume enAngleterre, faisaient reposer l’empirisme sur 4 principes :

A) L'expérience comme origine et fondement de la connaissance :

• Il part d'un fait, le plus fondamental de l'épistémologie humaine (puisqu'il prend pour acquise laréfutation lockéenne des idées innées) : celui de la perception. Nous percevons, nos sens nousfont ressentir des perceptions. Nous pouvons dire que nous ignorons ce que nous percevons,mais nous ne pouvons pas prétendre ne pas percevoir - la perception est un fait. Et puisquenous n'avons pas d'idées innées, c'est-à-dire d'idées précédant l'arrivée de toute perception ouimpression, « toute idée dérive d'une impression » Il n’y a pas d’idées innées : toutes nos idéessont le résultat d’une construction plus ou moins tardive à partir des données de l’expérience,alors que pour Descartes Dieu a placé a priori dans notre esprit des idées claires et distinctes quela lumière naturelle de la raison permet d‘entrevoir (innéisme). Ici au contraire l’âme est une« tabula rasa » (table rase), comme une page blanche qui reçoit toutes ses informations aposteriori, grâce aux matériaux de l’expérience (à cet égard il faut distinguer les empiristes desmatérialistes qui considèrent que tout ou presque est matériellement, génétiquement inné); qu’ils’agisse des sensations externes ou internes, elles laissent leur empreinte sur notre esprit; savoirc’est donc d’abord percevoir des impressions sensibles (ex de l‘enfant qui s‘éveille au contactd‘expériences diverses et variées; ou se placer au niveau d‘Adam et imaginer ce que percevraitun pur esprit sans corps!). La perception est donc à la fois première d’un point de vuelogique et chronologique : “il nous est impossible de penser à quelque chose que nousn'ayons auparavant senti” (EEH SVII p. 129). Pour les empiristes, nos idées ne sont donc queles pâles copies des impressions premières que nous avons pu ressentir: il y a une différence dedegré et non de nature entre les sensations du corps et les idées de l’esprit, même si l’impressionla plus faible restera toujours plus intense que l’idée la plus forte. Se priver de l’expériencesensible reviendrait donc à se priver de la source de toute connaissance. Cf LOCKE Essai sur

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l'entendement humain (1689) : l'esprt est une table rase, une page blanche que l'expérience vientremplir “Supposons donc qu'au commencement l'âme est ce qu'on appelle une “table rase”,vide de tout caractère, sans aucune idée quelle qu'elle soit (…) D'où puise-t-elle tous cesmatériaux qui sont comme le fond de tpis ses raisonnements et de toutes ses connaissance ? (..)de l'epérience : c'est là le fondement de de toutes nos connaissance et c'est de là qu'elles tirentleur première origine”.

• Principe empiriste de retour à l'expérience originaire (antériorité de l'impression,correspondance de l'idée et de l'impression) ; recourir à l'expérience comme point de départet point de vérification ultime : on en part et on y revient, ou bien on compare les expériencesentre elle (TNH p. 129) d'où l'idée de faire appel à des exemples et à des cas particuliers (forinstance) plus souvent dans le TNH, plus éclairant à cet égard que la Dissertation. Il fauttoujours “consulter l'expérience” pour résoudre les difficulté que l'en rencontre, mais aussi pourapporter un certain nombre de limitations et de réserves (les exceptions qui confirment la règleet qui occupent parfois des sections entières “limitations de ce système, ou au système général”ce qui montre que l'expérience prouve tout autant le faux que le vrai p.116). Hume utilise mêmele raisonnement par l'absurde :il suppose son raisonnement faux pour mieux ensuite montrer lesconséquences absurdes et conforter sa thèse “pour donner plus d'autorité à son raisonnement” p.127. De même que la physique newtonienne décrit les propriétés des corps et étudie leurmouvement en fonction de leurs principes (ex loi de l'attraction universelle) (for) INSTANCE = (cas) récits particuliers animés d'une fonction généralisante, séquence decomportement déjà organisée selon un rythme propre. les corps peuvent être décrits en eux-mêmes, selon leur vitesse et leur trajectoire, selon leurs causes efficientes (tel mouvementrésulte de tel choc). Hume part de situations pasionnelles précises, érigées en archtypes pourarriver à des concepts abstraits puis des principes fondamentaux ; subsumer ces expériencesconcrètes sous des lois générles car ne peut pas toutes les décrire.

PBL 1 = peut-on donner des lois aux passions, parler d'une nature humaine passionnelle, malgréleur caractère particulier et subjectif ? Aporie = Ou faire une philosophie de l'affectivité purequi ne permet pas de schématisme et de lois générales (singularité sans abstraction) / ou bien ilfaut s'intéresser aux situations par système de classement et conceptualisation, au risque deperdre la spécificité de chaque affect ressenti (abstraction sans singularité). Hume est toujours enéquilibre entre ces deux exigences : rendre compte de l'impact singulier de l'affect mais aussil'élever vers des lois permettant une lecture de la nature humaine.

B) Le raisonnement par induction comme source de la croyance et le scepticisme modéré :

• Tout effet a une cause et même si tout ce qui se suit selon une succession chronologique nerelève pas de la causalité, tout ce qui relève de la causalité implique une successionchronologique puisque la cause précède son effet (A précède B) ; mais nous ne nous contentonspas de relier un effet à une cause selon le principe de causalité logique (pas de fumée sans feu,A est la cause de B), nous instaurons un rapport de nécessité causale entre les 2 (déterminismepermettant d'affirmer que si A alors nécessairement B), et ce grâce à la force de l'habitude quinon seulement ajoute une nécessité a priori au sein du rapport de causalité. mais du coup sepermet de prévoir que Si A se produit alors il ne peut pas s'en suivre autre chose que B.

• Même les raisonnements les plus complexes et les plus abstraits ne sont liés qu’à la répétition del’expérience sur elle-même, à l’habitude: on établit une connexion nécessaire, un lien decausalité entre une cause et sa conséquence à force de les voir se répéter sous nos yeux; leraisonnement pas induction plutôt que par déduction càd faire découler des cas

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particuleirs à partir d'idées claires et distinctes ou de principes (Popper l'appelle “leproblème de Hume” car il est le 1er à le clarifier) consiste à tirer une conclusion générale àpartie de cas particuliers (# déduction qui va du général au particulier): « J’ai trouvé que telobjet a toujours été accompagné de tel effet et je prévois que d’autres objets qui en apparencesont semblables s’accompagneront d’effets semblables » (Hume). Ex: le soleil se lèvera demain,puisque jusqu’ici il s’est levé tous les matins. Je constate plusieurs fois que A est suivi de B,donc j’induis de là que A implique B. C’est à force d’observer des conjonctures constantesentre les phénomènes que nous prenons l’habitude de les anticiper. D’où un scepticismemodéré de la part de Hume: la plupart de notre savoir ne se fonde que sur des croyances induitesde l’expérience. Sans ces raisonnements simples et immédiats, nous ne pourrions pas nousfamiliariser avec le réel: l’induction est la pensée la plus commune et la plus spontanée: déjàl’enfant répète certains gestes comme pour vérifier que « ça marche »; et plus tard l’adulte seratoujours tenté de tirer des lois générales à partir de cas particuliers. C’est pourquoi Husserl au2Oème siècle parlera d’ « Ur -doxa » cette croyance naturelle et originelle qui nous donne desrepères et des certitudes dans le monde qui nous entoure.

• Tirer des principes et des lois générales ; faire une enquête chercher à “réduire ces principes àun plus petit nombre et pour découvrir entre les causes un dénominateur commun” (TNH II, 1, SIV p. 108) donc s'élever du particuler au général. Le problème sera de savoir comment unsceptique modéré qui fait reposer tout son système sur des exemples particuliers peut en tirerdes lois générales. Appliquer à l'étude de la nature et de l'entendement humains le procédé qui aréussi à Newton pour la mécanique céleste : passer de nos jugements particuliers sur les chosesà leurs principes les plus généraux, « principes qui pour chaque science doivent marquer leslimites de toute curiosité humaine ». Mais ne pas chercher à évaluer à son tour le principe parlequel on évalue tout le reste, comme le newtonien n'explique pas la gravitation par laquelle ilexplique tout le reste. On ne peut établir que des règles générales, vraies jusqu'à preuve ducontraire = tendance à faire valoir des opinions formées dans certaines circonstances à toutesles circonstances semblables = avec risque de généralisation abusives, règles excessives pardéfinition, source du préjugé. Conséquence de l'action conjointe de la ressemblance et de lacausalité. Mais peuvent être compensées par des règles correctives ou critiques pour redresserles probabilités philosophiques en probabilités causales ou en système de preuves. Cherche deslois, des règles pour régler les « circonstances » passionnelles. But = établir une casuistiquepassionnelle (phoronomie = loi porteuse / science de l'équilibre, étude du mvt des corps), nonune définition générique + conditions de régulation de la mouvance concrète de nos passionscomme combinatoire de relations.

• CSQCE = LE SCEPTICISME HUMIEN : la spécificité de l'empirisme humien est sonassociation avec un scepticisme modéré : on doit douter de nos connaissances qui ne sont laplupart du temps que des croyances (doute sceptique) ainsi que des données de l'expérience carnous n'avons pas accès aux choses mêmes mais seulement à nos perception des choses ; refusde la définition scolastique de la vérité comme adéquation de notre jugement à l'être des chosesqu'il considère comme dogmatique, on ne peut pas passer de nos perceptions aux chosesperçues. et inventaire des opérations de l'esprit tire son origine de la seule considération del'expérience, qu'il impose comme seul guide. Au-delà d'elle l'esprit divague, alors que pris dansses limites il doute. L'expérience n'est jamais décevante, toujours instructive. Pour autant on nese résigne pas à constater l'impuissance de l'esprit (comme dans le pyrrhonisme) ; au contraire,on constate l'immense pouvoir de l'imagination et de notre capacité à croire.

• Mais pout autant on ne doit renonçer ni à connaître le vrai (#doute pyrrhonien) ni à s'appuyersur les faits sensibles (# doute cartésien). Semble reprendre la Ière MM de Descartes et Hume lamène au bout et s'y tient ; il repère le pyrrhonisme comme une attitude monstrueuse car radicale

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et porte sur les facultés même et non slt sur leur usage ; or Hume ne veut pas examiner leur bienfondé, mais slt leur bon ou mauvais emploi des facultés, pas la dénonciation de ces « facultés »= l'hyper rationalisme conduit au scepticisme qui est certes le comble de la philo, le plus raffinémais peut aboutir à une apathie et une apraxie or la nature est tjrs plus forte, ce n'est qu'un jeu del'esprit et la force de la nature emporte tout (on retourne à la vie). Cf conclusion du livre Idépressive, au bout du rouleau du scepticisme, il suffira que je joue au tric trac avec des amispour me rasséréner donc il y a bien une démarche rationnelle mais elle s'inscrit dans la natureelle-même qui finit toujours par vaincre. On n'a pas d'autre moyen de connaître que cescroyances et elles sont révélatrices du fonctionnement de l'entendement humain (acceptation etdescription de ces croyances). L'homme n'est pas sûr de ce qu'il sait mais cette certitudereposant en réalité sur des incertitudes est la seule qui lui permette de penser le monde ; donc cescepticisme n'interdit pas la connaissnce même scientifique, il est même plutôt le fondement detoute science. De la réalisation de son projet empiriste résulte une philosophie sceptique.Hume est sceptique car empiriste : c'est le recours à l'expérience qui ne permet pas d'ériger devérités absolues d'où une grande humilité philosophique. Le scepticisme oppose “les choses quiapparaissent” et “les choses qui sont pensées” ce qui aboutit à la suspension du jugement doncinterroge ce qui justifie les certitudes de la raison et les croyances de l'expérience ; mais enmême temps il retourne le scepticisme contre lui-même, contre ses excès, que ce soit celui quiprécède toute recherche (doute hyperbolique cartésien qui ne peut être dépassé qu'en utilsant desfacultés mises en doute dc pétition de principe) ou celui qui est postérieur à toute recherche(pyrrhonisme qui ne reconnaît même pas les faits de l'usage et de la croyance). D'où unscepticisme modéré = l'impuissance de la raison nous oblige à constater certaines croyancesspontanées sans pour autant les tenir pour légitimes. Liée au modèle newtonien qui avoue sonignorance face à ce qui dépasse les capacités humaines et ne se fie qu'à des preuvesexpérimentales. Pour Russell cette philosophie a pu apparaître comme “la banqueroute du raisonnable auXVIIIème siècle”.

PBL 2 = peut-on fonder une connaissance des passions sur des habitudes et des croyances quisont propres à un individu, une culture, une époque ?

C) La méthode des sciences expérimentales : Conséquence épistémologique sur l'histoire dessciences, qui fonde en partie la science moderne : Toute science (connaissance rationnelle quicherche à expliquer les phénomènes naturl en établissant des constantes et des lois générales)doit reposer sur l’observation de la nature et des faits (un fait étant une donnée objectiveobservable dans l‘expérience):

• CF influence de BACON (fin XVIème) : premier empiriste, un des premiers philosophe dessciences qui veut tester les données de l'expérience, qui ne disent rien par elle-même, par desexpérimentations adéquates qu'il nomme « expérience cruciale » ou « exemples décisifs », en sebasant sur la notion de causalité efficiente càd connaître le mécanisme qui produit les choses (ptcommun avec le rationalisme et non plus de causalité finale comme chez Aristote : les corpstombent pour rejoindre leur lieu naturel, la chenille est faite pour devenir papillon ; c'est ladifférence cause/fin qui marque toute la différence entre Anciens et Modernes). La méthodescientifique qu'il préconise repose sur 3 étapes : 1) rassembler tous les phénomènes d'un certaingenre (énumérer tous les phénomènes correspondant à une élévation de la chaleur) ; 2) certainsphénomènes apparemment similaires ne le sont pas (la lumière n'implique pas toujours uneaugmentation de la chaleur) ; 3) montrer les degrés de variation que peut connaître lephénomène initial (faire varier la chaleur selon l'échauffement du feu ou la lumière du soleil). Faire varier les conditions de l'expérience et déplacer le curseur de manière à observer desmodifications des phénomènes (fréquent ds les exemples et les expérimentations du TNH

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notamment p. ). CF influence épistémologique de BACON = agir sur les relations pour voircomment les phénomènes varient. Il suffit de supprimer un élément pour constater que tout lephénomène disparaît avec lui et cela fait la preuve que cet élément est une condition nécessaireà la réalisation du phénomène (TNH p 129 “si nous interrompons cette relation, la passion etaussitôt détruite” don cette relation est indispensable à la constitution d'une passion). Humepropose des expérimentations de sa théorie, en élaborant des expériences de pensées danslesquelles différentes circonstances liées aux passions sont soumises à des variations. Cesexpérimentations permettent autant de confirmer la validité de la théorie, que de montrer qu'elleest capable de rendre compte de cas en apparence contraires. Ainsi, non seulement la théorie est-elle élaborée par induction, mais sa fonctionnalité (rendre compte du mécanisme de toutepassion, même dans les cas qui posent problème) est démontrée. Il faut prendre en compte leseffets perturbateurs de certains principes sur certains autres (la révolution de chaqueplanète autour du soleil modifiée par l'attraction des planètes entre elles) ; de même les passionspeuvent être amplifiées / modifiées par des principes secondaires comme la sympathie. Or, nonseulement Hume renvoie toujours à l'expérience singulière, mais il met en place desexpérimentations méthodiques : l'ordre d'exposition de la DI suit ouvertement les 3 étapesde BACON : section II consacrée à l'orgueil et l'humilité évoque d'abord les différentes formesque prennent ces passions (II, 1-2), puis il expose des hypothèses susceptibles de les expliquer(II, 3-5) c’est-à-dire l'association d'idées et d'impressions, en les mettant à l'épreuve del'expérience (II, 6-9) ; puis il souligne les variations d'intensité qui peuvent toucher toutes lespassions (I, 4 et tout VI).

• La construction de théories scientifiques ne peut pas se faire sans le concours del’expérience : elle en est à la fois la cause, l’inspiration (c’est l’observation des phénomènes quiva provoquer des interrogations, des hypothèses) et la conséquence (le scientifique provoqueraune expérience pour valider ses hypothèses, car ce n‘est pas la première observation qui estforcément la bonne). Ainsi, l’observation scientifique est toujours polémique puisqu’elle vientconfirmer ou infirmer une croyance antérieure; elle nous oblige à reconstruire le réel autrementque ce que nous croyions savoir sur lui. Mais il faut passer de l’expérience àl’expérimentation: une expérience isolée n’est pas fiable car ce sont les choses qui agissent surnous de façon incontrôlée et elle ne se produit jamais deux fois dans les mêmes conditions; lacontingence et la multiplicité des expériences pose pbl ici: par ex la chute d’une feuille morte oud‘une pomme, dont la trajectoire est aléatoire, soumise à des conditions extérieures variables,m’indique que les corps chutent toujours vers le bas, mais ne me disent rien sur la loi de la chutedes corps, d‘où l‘expérimentation du tube de Newton. Il est impossible de répéter un fait naturelsur lui-même donc pour passer du constat de fait à l’explication du phénomène, il faut refairel’expérience dans des conditions maîtrisées et répétables à l’infini: c’est le rôle del’expérimentation. Dans ce cas c’est nous qui agissons sur les choses en provoquant uneexpérience selon un protocole précis. Terme employé par Hume dans le TNH.

• Il faut donc distinguer la démarche empirique du sens commun de la démarchescientifique : dans le 1er cas, un phénomène particulier reçoit une info précise, et il produit uneconséquence précise. Mais entre le reçu et le produit, on ne sait pas ce qu’il y a : le phénomèneest une boîte noire (le sel fait monter les blancs ou fait partir les taches de vin mais on neconnaît pas les causes chimiques de cela, il s'agit d'un savoir-faire aveugle, automatique sanssavoir véritableà). On sait qu’une causalité existe (ou plutôt, on le croit naturellement) et relieles deux, mais on ignore comment elle fonctionne. C’est ainsi que raisonne, par exemple, lamédecine traditionnelle et ses « recettes de grand-mère » (on constate tel symptôme et on donnetel remède, lequel conduit le plus souvent à l’arrêt du symptôme, mais on ne sait pas pourquoiou comment). La démarche de la science de l’homme, c’est-à-dire du projet de Hume, est touteautre. La science d’un domaine donné tente d’expliquer la manière dont fonctionne ce domaineou dont fonctionnent les phénomènes qui appartiennent à ce domaine. Ainsi, la météorologie

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tente d’expliquer les principes généraux selon lesquels fonctionnent les phénomènes météo(nuages, pluie, etc.). La science de l’homme, elle, prend l’individu ou l’humain pour objet. Telle sera la philosophie expérimentale prônée par les encyclopédistes; on collectionne desfaits sans a priori (on « botanise» ), puis on imagine des lois reliant ces faits; on les vérifie dansl’expérience; enfin on peut faire des prévisions. Toute science doit montrer par l’expérienceavant de démontrer par la raison : il suffit d’observer les phénomènes pour en trouver les causes.Ex: la décomposition de la lumière: « La philosophie rationnelle pèse les possibilités, prononceet s’arrête tout court. Elle dit hardiment: on ne peut pas décomposer la lumière. La philosophieexpérimentale l’écoute et se tait pendant des siècles; puis tout à coup elle montre le prisme etdit : la lumière se décompose » constate Dalembert.

• LE PARADIGME NEWTONIEN Sous titre du TNH = “Essai pour introduire la méthode expérimentale dans les sujets moraux”.Non pas seulement se conformer au modèle newtonien mais atteindre la même exactitude pourla nature humaine : son pbl =comment l'esprit devient -il une nature ? (Deleuze) . Explicationde l'ordre de l'univers à partir de principes simples (loi de la gravitation universelle, principed'inertie), sans se préoccuper de prétentions métaphysiques, de Dieu ou de causes finales : “laphilosophie naturelle consiste dans la découverte de la structure et des opérations de la nature,dans leur réduction, autant qu'il se peut, à des règles générales ou à des lois, dansl'établissement de ces rgles par des observations et des expérimentations, et de là dans ladéduction des causes et des effets des choses” (Principes maths de la philo naturelle 1689).Appliquer la méthode expérimentale ; une complète soumission à l'expérience pour aboutir àune science humaine. Notons qu'à l'époque la physique s'appelle “philosophie naturelle ouphilosophie expérimentale apppliquée aux sujet naturels” : il est donc logique, si la physique estune forme de philosophie, que la philosophie devienne une forme de physique. Pour Hume,comme pour Newton, la science expérimentale est principalement inductive et doit se limiter àla découverte de lois, de relations constantes. Notre raison ne peut pénétrer la nature ultimeou l'essence de celle-ci càd qu'on ne peut pas remonter dans les causes jusqu'à la natureprofonde des choses telles qu'elles sont en elles-mêmes. En revanche, elle peut tenter de lesdégager des faits, par l'examen de ceux-ci. Revendiquer aussi le choix des phénomènes contreles hypothèses (“hypotheses non fingo”) dans le domaine moral et non pas seulement physique.Newton est l'un des principaux découvreurs de la méthode scientifique, ou expérimentale, quivise à confirmer des hypothèses (ou, mieux, à en établir) par l'expérience et l'expérimentation.Ainsi, loin de prétendre connaître l'univers par de pures spéculations philosophiques, lescientifique newtonien expérimente, calcule, échafaude des hypothèses et des théorèmes qu'ils'efforce de vérifier autant que possible, en n'hésitant pas à les remettre en question si les faitssemblent les contredire. Ses notions forment un système, terme qui ne renvoie pas à unethéorisation purement intellectuelle des passions, mais à la démarche empirique de Newton.Hume espère ainsi établir un système sur la base d'un petit nombre de principes capables derendre compte des phénomènes étudiés, de la même manière que les scientifiques s'efforcent derendre compte des mécanismes de la nature en ne multipliant pas les principes explicatifs : ils'agit d'être économe en hypothèses et de confronter les principes à des expérimentations afin deconfirmer la justesse du système (principe de parcimonie ou rasoir d'Ockham).

• 3 niveaux d'analyse des passions en découlent chez Hume = définition des objets, principesde leur apparition, circonstances de leur modification.

• Donc tout au long de la DI Hume procède par des raisonnements a priori qui seront sans cessetestés et affinés par l'observation. Newton procède d'abord de façon hypothétique indépendantede l'expérience en tirant des conséquences logiques de principes défendus mais l'expérience sertde preuve pour attester de leur validité. Ex : Si la loi de la gravitation universelle est vraie, alorson doit pouvoir prévoir la vitesse de la chute des corps ou l'importance de la marée r/ à la

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proximité de la lune. Hume utilisera le même type de méthode notamment sur l'amour et lahaine (TNH II, 2, II ) où il alterne principes et “expérimentations pour confirmer le système”.C'est un expérimentateur soucieux de tester ses principes en sélectionnant des exemples dans ceseul but : à ce titre Hume est le premier, non pas à réfléchir sur les passions, mais à élever la viepassionnelle au rang de monde càd de totalité ordonnée comme un cosmos, un systèmeorganisant une multiplicité en trouvant une constance et une régulatité dans cesphénomènes. Conception de la passion comme un système reliant toujours : sujet/objet/cause(qualités, éléments déclencheurs) / finalité (fin pratique, visée du bonheur). Identitéreproductible dans les mêmes circonstances mais relations d'indépendances entre les élémentsqui la composent afin de les faire varier.

• Il compare explicitement sa démarche à celle des physiciens : “n'atteignons nous pas la mêmeévidence qu'en optique ?”(sur la crainte et l'espoir I, 4, p. 60). Transformer la science descouleurs en une réflexion mathématique et faire varier les éléments composant le prisme pourconstater les effets. Cf traité d'optique de Newton, branche de la physique.

• La conclusion de le DIP va jusqu'à faire le rapprochement entre sciences de l'homme et sciencesde la nature qu'il présente comme objectif principal du texte (VI, 9, p. 93) : “ dans leurproduction comme dans leur transmission les passions suivent une sorte de mécanisme réguliersusceptible d'une investigation aussi précise que celles des lois du mouvement, de l'optique, del'hydrostatique ou de toute autre division de la philosophie naturelle”

• Plus tard au XIXème = Appliquer une méthode hypothético déductive : Telle sera ladémarche expérimentale décrite par Claude Bernard (fondateur de la physiologie) dans son« Introduction à la médecine expérimentale ». Elle procède par 3 étapes: 1) il faut tout d’abordobserver et établir des faits positifs (calcul, mesure, témoignages): en général le point de départde la recherche est un fait qui pose problème , il y a contradiction entre le fait observé et lesavoir antérieur (fait polémique) ; 2) puis vient l’explication rationnelle de ces faits en instaurantdes liaisons logiques ou causales entre eux : de là on pourra formuler déjà une hypothèse (si palors q) càd une explication qui rend le phénomène intelligible même si elle relève del’imagination et est contre-intuitive ; enfin 3) on applique et vérifie cette hypothèse en laconfrontant à la réalité de l’expérience, pour la confirmer ou l’infirmer, par la mise en place d'unprotocole expériemntal : « on introduit cette idée anticipée dans un raisonnement en vertu dequoi on fait des expériences pour la contrôler ».

• EN RESUME « Afin d'éliminer les hypothèses, qui accompagnent l'absence d'une étudeexacte de la nature humaine, on s'astreindra à l'examen des phénomènes, on s'efforcera dedégager les circonstances, puis on induira par analyse les principes qui leur sont communs ;ces principes seront à leur tour soumis à des principes plus généraux, et l'on poursuivra laprogression dans la généralité, aussi longtemps qu'elle sera supportée par une méthodeexpérimentale strictement appliquée, tout en s'efforçant de produire un ordre systématique.Cette méthode, Hume l'applique parfois avec ostentation, presque comme un cérémonial, visantà manifester à tous les lecteurs l'importance et le sérieux de son entreprise. “ Michel Malherbe

• PBL 2 = Il s'agit donc d'établir une science des passions c’est-à-dire une science subjective quipèse certaines raisons, certains motifs. Si on tire du côté scientifique on soulignera l'aspectrigoureux, méthodique, généralisateur de la réflexion humienne sur les passions. Si on tire ducôté perceptif, on soulignera l'aspect subjectif, relatif, pragmatique, arbitraire des passions. Danstous les cas la question qui se pose est : peut-on établir une sciences de passions, reposant surune méthode expérimentale rigoureuse et permettant d'établir des lois universelles etnécessaires ?

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D) Conséquence psychologique qui fonde la définition contemporaine et phénoménologiquede la conscience = Une critique de l’identité personnelle: il est difficile d’isoler un moisubstantiel qui serait toujours identique à lui-même, puisque nous traversons des expériencestoujours changeantes; le cogito cartésien serait donc une illusion substantialiste, comme si tous nosétats mentaux prenaient racine dans un seul et unique moi. Or, je ne suis jamais le même, je deviensun autre à chaque instant qui passe; nous forgeons cette fiction du moi, ce lien invisible entrel’enfant en photo et l’adulte que nous sommes devenu, quitte à inventer des chaînons manquants,pour que notre esprit ait l’impression de ne faire qu’un. « L’esprit est un sorte de théâtre oùdiverses perceptions font successivement leur apparition ».(Hume) Ainsi, « avoir de l’expérience »ne serait que le résultat d’une accumulation d’expériences concrètes différentes de soi-même, cettesuccession de « moi(s) » que l’usage de la vie a concrétisée: il conviendrait donc plutôt de dire« avoir eu des expériences ». Dès le début, Hume rompt avec l’humanisme et le cartésianisme.En effet, l’humanisme fait de l’homme le centre de l’univers et la mesure de toute chose, tandis quele cartésianisme prétend connaître une âme immatérielle qui serait ontologiquement distincte dumonde des phénomènes. L’orientation humienne ne peut aller qu’à l’encontre de ces deuxperspectives : d’abord, Hume accepte un certain perspectivisme logique, il comprend que l’hommedoit d’abord se connaître lui-même pour pouvoir ensuite connaître les autres phénomènes (il ne luiadjoint aucune valeur métaphysique en tant qu’homme) ; ensuite, il refuse d’aborder la questiond’une âme immatérielle, dans la mesure où nous n’avons aucun moyen d’y répondre car aucuneexpérience de celle-ci. En fait l'esprit n'est pas et n'a pas de nature ; il est donné plutôt comme unecollection d'idées, non pas une faculté mais l'ensemble des choses qui sont ce qu'elles apparaissent,comme une pièce sans théâtre. Atomisme psychologique (l'esprit par lui-même n'est qu'unecollection d'atomes, ce qui rend une vraie psychologie impossible).CF TEXTE SUR LA FICTION DU MOI : IDENTITE = l'identité est une relation philosophique que l'imagination établit entre des existencesdifférentes, des impressions ou des idées qui sont ressemblantes et qui sont donc réunies,synthétisées, en l'idée d'un même objet. L'identité attribuée est toujours fictive et l'idée que nousavons de notre moi ou d'autrui aussi. Il y a une irréductible singularité des perceptions donc on nepeut jamais constater la moindre identité réelle ; plusieurs objets ne peuvent être identiques, du faitmême de leur pluralité, et comme l'identité est une relation il est inutile de dire qu'un objet estidentique à lui-même. Cette proportion à synthétiser la diversité dans la mêmeté est donc unecroyance, c'est un sentiment et non une perception. ESPRIT = « lieu » inqualifiable des perceptions qui le constituent comme mémoire, imagination ouentendement. Ce n'est pas une faculté et il n' a pas d'essence (annonce la phéno), ni simplicité niidentité. C'est un amas ou une collections de perceptions de toutes sortes, impressions ou idées.« Rien n'est jamais réellement à l'esprit que ses perceptions ».

PBL 3 = Hume veut remonter aux lois qui régissent le psychisme humain, le fonctionnementnaturel de l'imagination, de l'entendement et de la sensation MAIS sans pour autant trouver l'originedu comportement dans un Je ou un Cogito isolés, existant a priori, sans non plus chercher la clé del'entendement (mind) qui n'est qu'un faisceau de perceptions différentes. Si l'esprit humain secaractérise par l'instabilité, le chaos des perceptions ou des affects, comment devient il une nature etpeut-il se constituer en système ? Comment ordonner le chaos des affects en un monde depassions ? Dans ce cas, qui est le sujet des passions ? Qui est responsable de l'état passionneldans lequel je me trouve si je je n'existe pas ?

En résumé : on ne peut pas connaître sans l'expérience et on ne peut pas faire de science sansse référer à la science de la nature humaine ; mais quel type de connaissance nous apportel'expérience en matière de passions, dans la mesure où il s'agit d'affects complexes qui nous

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embarquent malgré nous mais qui relèvent déjà d'une intellectualisation du réel ?

II) Analyse et commentaire de la DISSERTATION SUR LES PASSIONS de HUME

A) Présentation générale

*Histoire du texte :

*Le TNH 1739 (Une tentative pour introduire la méthode de raisonnement expérimental dans lessciences morales) = son livre phare, rédigé lors d'un séjour en France à La Fleche (“à l'ombre deDescartes” Malherbe) ; devenir le Newton de la métaphysique en appliquant la méthodeexpérimentale à la nature humaine ; fonder une science nouvelle de la nature humaine qui servede capitale à toutes les autres sciences : « Il est évident que toutes les sciences, d'une façon plusou moins importante, ont une relation à la nature humaine, et que, si loin que l'une d'entre ellespeut sembler s'en écarter, elle y revient toujours d'une façon ou d'une autre. Même lesmathématiques, même la philosophie naturelle et la religion naturelle dépendent dans une certainemesure de la science de l'HOMME, car elles tombent sous la connaissance des hommes et sontjugées par leurs pouvoirs et leurs facultés. Il est impossible de dire quels changements et quellesaméliorations nous pourrions faire dans ces sciences si nous connaissions entièrement l'étendue etla force de l'entendement humain “ (Intro TNH). Chez Hume, l’homme est un phénomène et c’estainsi qu’il faut le connaître. Une fois le phénomène homme connu, les autres phénomènes serontd’autant plus faciles à comprendre et à expliquer. Jusqu'ici la nature humaine n'était qu'un objet parmi d'autres, ou la conséquence d'une sciencegénérale qui lui préexistait : pour Hume la science de la nature humaine est posée pour la premièrefois comme unique fondement (on a besoin de la connaître pour faire de la science, meme les mathsdependent de la structure de l'esprit humain) et visée de la science (comme on en a besoin il fautcommençer par explorer cet objet là avant tous les autres).

Nature et nature humaine = inconnaissables hors inférences ou observations particulières qui ens'appuyant sur des expériences passées projette un expérience possible permettant de croire encertaines circonstances (particularité des situations ou des objets, ce peut être un point de vuesubjectif ou un élémént variable x, un cas exemplaire) ou principes au-delà desqules on ne trouvepas de fondement. Nature : “un mot vague et indéterminé”, une équivocité à assumer de manière àdégager une règle tout en sa basant sur des cas limites. On parle de « naturalisme » chez Hume carnos comportements sociaux sont fondés sur la nature humaine dont on peut établir des lois (on a dumal à imaginer et trouver un pays où le parricide serait une vertu ou le suicide la fin la plus nobledonc il y a une relative constance de la nature humaine au-delà de la diversité des moeurs) même sion ne peut que les constater sans les expliquer : on décrit les passions “par une constitution denature dont nous ne saurions pousser plus avant l'explication” (DIP p. 80). L'histoire ne fait quevarier le circonstances ce qui donne une illusion d'irrégularité ou de chaos. Mais c'est uneconception trop rigide qui ne rend pas compte de la contingence des rapports humains. Est« naturel » ici non ce qui est contraire de « culturel » donc biologique ou animal, car toutes lespassions sont culturelles au sens anthropologique (propres à l'homme) et ethnologique (influencéespar le déterminisme socio-culturel ou l'éducation) ; non pas ce qui est fixé archaïquement,primitivement ; mais ce qui est régulier, habituel, comme une seconde nature, obéissant à deslois pouvant évoluer. Donc : Il n'y a pas d'affectivité immuable même s'il y a des cycles.

Mais “jamais entreprise littéraire fut plus infortunée que mon TNH. Il tomba mort-né des presses

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sans même avoir l'honneur de susciter un murmure chez les fanatiques”.(“Ma vie”)

*DI publiée en 1757 après le TN de 1739-40 et reprend les mêmes thèmes et thèses du livre II caréchec de celui-ci donc le réécrit sous forme plus brève et incisive (1/6ème) : dire autrement pourmieux être entendu, pour accorder la philosophie au sens commun : « les réflexionsphilosophiques ne sont que des réflexions de la vie courante rendues méthodiques et corrigées »(EEH). Comprendre/ apprendre l'homme mais aussi être compris de lui : « soyez philosophe, maisau milieu de votre philosophie, soyez toujours un homme » (EEH). Déjà le livre I est devenu l'Enquête sur l'entendement humain en 1748, le livre III est devenul'Enquête sur les principes de la Morale. Def Essai = exercice de réflexion associé à un effort d'écriture littéraire depuis la Renaissance(Montaigne en 1580) ; liberté formelle dans les arguments et le style ; c'est une tentative, uneexpérimentation ; d'où une certaine modestie, qui convient bien aux sceptiques et prisée par leshonnêtes hommes à partir du XVIIème qui s'intéressent à tout et refusent de se spécialiser. Commec'est une manière brève et plaisante d'argumenter, ils traitent non de problèmes métaphysiquestraditionnels (Dieu, liberté, lois de la nature) mais les manières des hommes, leurs mœurs, leursconduites. A cheval entre deux mondes, celui de l'érudition (savants, philosophes) et celui de laconversation (clubs, salons) comme l'explique Hume lui-même dans un essai sur l'essai en 1742. Ilveut réconcilier les deux mondes ; se soucier de la réception de nos recherche auprès de l'opiniontout en élevant le débat : il se veut « ambassadeur des provinces du savoir auprès de celles de laconversation ». Le genre de l'essai convient mieux aux passions dlmo il n'a pas l'ambition de savoirabsolu et d'exhaustivité d'un traité car les passions « ne fonctionnent pas toujours avec unerégularité parfaite » (II, 11 p. 78) et varient selon les circonstances. Il mêle le sérieux de l'analyse etle ton plus léger de l'étude de mœurs, il divertit le lecteur par de nombreux exemples, surtout dansla section II sur l'orgueil, dès qu'il affirme, il évoque des exemples vivants. Il y a aussi denombreuses allusions à des théories ou des auteurs visant les gens cultivés : Addison, Horace,Virgile, les maximes de La Rochefoucauld etc. Mais Hume cite plus des essayistes ou des poètesque des philosophes car il est sensible à la singularité de chaque passion (aller du particulier augénéral / induction). EX : la tragédie est plus intéressante car le style théâtral ne donne pas au jeudes passions un cadre étroit.

DIP reprenant le livre II, publié avec 3 autres dissertations, avant dernière œuvre ; aux côtés de laDIP, on trouve 3 autres essais (Four Dissertations) qui sont en lien avec elle car le monde humain etun monde au sein duquel les passions sont omniprésentes donc les autres essais permettent derepérer les conséquences des passions dans les sphères de la religion (Histoire naturelle de lareligion s'oppose aux tentatives d'argumentations rationnelles des théologiens et souligne le rôle despassions dans la croyance religieuse : ce n'est pas par curiosité ou amour de la vérité qu'on croit enDieu mais à cause du « souci anxieux du bonheur, la crainte des maux futurs la peur de la mort » ;Hume prend une position sceptique qui n'est ni la révélation irrationnelle des anciens, ni la religionnaturelle qui tente de raisonner ; 3 positions que Hume fait dialoguer ; il considère qu'aucuneconnaissance ni rationnelle ni révélée n'est possible en matière de religion ; seul le sceptique peutobserver une foi véritable car il sait qu'il ne fait que croire et n'érige pas sa croyance en savoir, cequi permet la tolérance religieuse), de l'art (De la tragédie : on peut jouir de la représentation de lajalousie ou de la haine car une émotion calme comme « l'énergie de l'expression, le pouvoir desrythmes, les charmes de l'imitation » peut adoucir la violence de la passion et apaiser l'âme duspectateur cf catharsis d'Aristote Poétique). Avantages : suppression des redondances et des lourdeurs mais : glissements dans sa philosophie etchangement de valeurs de certains points décisifs. Change de manière plus que de matière. EX :

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tableau de correspondance possible : Section III = IIde partie du livre sur les passions / Section V =IIIème partie du TNH etcInconvénients = pas de titres pour se repérer dans la progressions ; moins d'exemples éclairants quedans le TNH d'où la nécessité d'utiliser le tableau de correspondance p. 390s pour consulter lasource du TNH sur des points obscurs ou des présupposés non justifiés. Si quelque chose apparaîtobscure, ce peut être un effet de la contraction, et non de l'absence d'argumentation de Hume.Malgré la réduction de taille, elle conserve les mêmes exemples et les mêmes citations que leTN, mais en nombre plus réduits. Cad que tout ce qui est dans la Dissertation est dans le TNHmais tout ce qui est dans le TNH n'est pas dans la Dissertation.Points communs : volonté de schématisation et d'aboutir à des lois/ un système pour rendre comptede la complexité des passions. Confirme le raisonnement par induction : on part d'exemplesparticuliers pour en tirer des lois générales.Différences = La dissertation a ses exigences propres liées à la brièveté du propos : avoir des points de départsstables pour une argumentation rapide et convaincante. Ex : les hypothèses du TN deviennent desthèses ds la DI (ex le rôle de l'espoir et de la crainte, lié à l'incertitude du réel, dans la constructiondes passions). Pas le temps pour une longue exploration d'où cette différence de tonalité rhétorique.Le TNH situait la théorie des passions à mi chemin entre celle de l'entendement et celle de la moralepour montrer le lien entre les mécanismes intellectuels, cognitifs, les mouvements affectif et lesjugements moraux. Changement d'angle d'attaque aussi : on commence par la fin du Livre II(espérance et crainte) car il a un souci différent : il ne s'agit plus de critiquer le moi substantiel enpartant de l'orgueil (ce n'est pas l'orgueil qui est le produit du moi mais le moi qui est le produit del'orgueil) ; de même que la honte cristallise toutes les caractéristiques de l'être pour autrui chezSartre : ce n'est pas parce que j'ai honte que j'ai conscience d'autrui, c'est parce que j'ai consciencedu regard d'autrui sur moi que j'ai honte. Il y a donc une conception encore plus probabiliste dumoi, qui se définit relativement à ce qui n'est pas lui : les calculs sous-tendent le mélange de nospassions. De plus, il fait le choix de séparer la réflexion sur la volonté (SV) et celle sur les passionsdirectes (SI), qui étaient réunies dans la 3ème partie du Livre II (« De la volonté et des passionsdirectes ») : la volonté perd son rôle modérateur ou médiateur. Enfin, il y a dans le livre II unelongue discussion sur le libre arbitre au début de la 3ème partie ce qui est abandonné dans la DIP encentrant la réflexion sur le rapport entre raison et passions dans la détermination du vouloir.

* Originalités du texte :

Après l'entendement, ce sont les passions qui sont au cœur de l’enquête philosophique (cf Livre IIdu TNH). Ainsi l'ordre chronologique du TNH ne doit pas nous tromper : il remonte des effetsaux causes ; ce sont les passions qui fondent l'entendement et non l'inverse ; il suit un ordre decomposition (du plus simple au plus complexe) et non d'analyse (du complexe au simple,recherche des principes premiers à partir des notions complexes). La 2èmeplace ne doit pas êtreinterprétée comme une secondarisation des passions r/ au travail de l'entendement mais comme uneplace centrale ; il faudrait plutôt relire tout le TNH à partir du Livre II car la nature humaine estpassionnelle dans toutes ses dimensions et les passions sont les déterminants fondamentaux detout la vie intellectuelle, y compris de l'entendement. Donc la Dissertation va permettre derétablir la priorité des passions et l'ordre causal des phénomènes en remettant les passions au centre.Hume veut substituer à une psychologie de l'esprit une psychologie des affections de l'esprit :l'esprit est lui-même une manière d'être affecté, « l'esprit n'a pas les caractères d'un sujetpréalable », DELEUZE , il trouve sa positivité dans ce qui lui vient du dehors et l'affect ; l'espritest une affection de l'esprit : « la raison n'est rien qu'une détermination générale et calme despassions fondée sur une une vue distante ou sur la réflexion » (TNH).

2 notions sont en déclin r/ TN :

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* la sympathie : allusion et non analyse à part ; elle est remplacée par l'intérêt (rôle grandissant del'utilitarisme). Ex : il place les passions directes avant les passions indirectes comme si les passionsétaient avant tout des déterminations immédiates du plaisir et de la douleur. Donc relativise lamédiation d'autrui.* les esprits animaux : les passions ou les croyances ne sont plus des forces mais des sentiments ;il a des exigences plus rigoureuse en biologie à ce moment là et ce vague discours physiologiquesur les esprits animaux n'explique rien (esprits vitaux ténus, subtils, qui reçoivent des impressionsdu dehors et impriment le mouvement aux muscles donc ils semblent résoudre le pbl del'articulation âme/corps car leur rôle est d'établir le mouvement dans la machine du corps mais nefont que le déplacer). Cf TNH p. 116 II, 1, S5 = « sans l'impression présente, l'attention ne se fixepas, et les esprits animaux ne se mettent pas en branle » / seulement quelques allusions en VI, 8 :« Les esprits animaux changent difficilement de direction, cette difficulté agite les esprits animaux,la surprise ... met les esprits en effervescence, … les passions déclinent ; il n'y a plus de presse desesprits animaux » p. 92. Les Modernes ont révolutionné la philosophie des passions en révélantl'importance concrète du corps et des détails de la physiologie humaine dans le développement desaffects ; toute la 1ère partie du Traité des passions de Descartes est consacrée, comme un traitéd'anatomie, à expliquer les sensations de chaleur, les mouvements des membres, les sensations duventre, du coeur, de la respiration etc. qui accompagnent les passions. C'est surtout le rôle du sang etdes nerfs qui est souligné, « semblables à des petits tuyaux qui viennent tous du cerveau etcontiennent, ainsi que lui, un certain air ou vent très subtil, qu'on nomme les esprits animaux » (PA,art 7, p. 104). Physiologie des passions à laquelle Hume rend un hommage discret : il ouvre sonessai en mentionnant le rôle de « la structure originale de nos organes » (I, 1, p. 58) de même quele livre II s'ouvrait sur l'idée que les impressions « naissent de la constitution du corps, des espritsanimaux, ou de l'application des objets aux organes extérieurs » (p. 99) . Mais il n'entend pasapprofondir le sujet ; même si les impressions relèvent de « causes naturelles et physiques », leurexamen relève des « sciences de l'anatomie et de la philosophie naturelle » et cela entraînerait leTNH « trop loin de son sujet » (II, I, 1 p. 99).CF Influence de DESCARTES/ Passions de l'âme car :1. Etude indépendante des passions pour elles-mêmes.2. Références aux esprits animaux.3. Mise en disposition de l'esprit par nos passions.4. Analyser les phénomènes passionnels en éléments simples pour ensuite recomposer le complexemême si système inachevé (CF 4 règles de la méthode).

Différences avec Descartes : Il ne s'agit pas de dénombrer ou classer les passions mais d'étudier ladynamique et le passage incessant d'une affection à une autre # contre tout substantialisme etdualisme de l'âme # contre toute prétention à définir les passions comme Locke.

cf Les « têtes d'expression des passions de l'âme» de Charles Le Brun (peintre de la galerie desglaces à Versailles) s'inspirent de la théorie cartésienne des passions, mais aussi de la théoriearistotélicienne de l'art comme imitation (mimesis), pour montrer que les passions restent toujoursle signe d'une interaction entre l'âme et le corps ; le visage traduit mais aussi, de ce fait, trahit lesaffects. Cf également le masques (persona en latin) utilisés dans le théâtre grec pour traduire desémotions ou des passions d'une personne et faire paraître vrai ce qui est seulement feint.[VII. Le désir. Cette Passion rend les sourcils pressez & avancez sur les yeux, qui sont plus ouvertsqu’à l’ordinaire ; la prunelle enflammée se place au milieu de l’œil ; les narines s’élèvent & seferment du côté des yeux ; la bouche s’entre-ouvre, & les esprits qui sont en mouvement donnentune couleur vivre & ardente. XII. Tristesse. L’abattement que la tristesse produit fait s’élever les sourcils vers le milieu du frontplus que du côté des joues ; les yeux presque fermez, mouillés & abaisses du côté des joues ; la

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prunelle est trouble ; le blanc de l’œil jaune ; les paupières abattuës & un peu enflées ; le tour desyeux livides ; les narines tirant en bas ; la bouche entre-ouverte & les coins abaissez ; la têtenonchalamment penchée sur une des épaules ; la couleur du visage plombée ; les lèvres pâles &sans couleur.XVI. L’horreur. L’objet méprisé cause quelquefois de l’horreur & pour lors le sourcil se fronce &s’abaisse beaucoup plus. La prunelle située au bas de l’œil est à moitié couverte par la paupièreinférieure ; la bouche entre-ouverte, mais plus serrée par le milieu que par les extrémités, qui étantretirées en arrière, forment des plis aux joues ; le visage pâlit & les yeux deviennent livides ; lesmuscles & les veines sont marqués.XVII. L’effroi. La violence de cette Passion altère toutes les parties du visage, le sourcil s’élève parle milieu ; les muscles sont marquez, enflez, pressez contre l’autre, & baissez sur le nez, qui seretire en haut aussi-bien que les narines ; les yeux forts ouverts ; la paupière de dessus cachée sousle sourcil ; le blanc de l’œil environnée de rouge ; la prunelle égarée se place vers la partieinférieure de l’œil ; le dessous de la paupière s’enfle & devient livide ; les muscles du nez et deshoues s’enflent, & ceux-ci se terminent en pointe du côté des narines ; la bouche fort ouverte, & lescoins fort apparents ; les muscles et les veines du col tendus ; les cheveux hérissés, la couleur duvisage comme du bout du nez, des lèvres, des oreilles, & le tour des yeux pâle & livide ; enfin toutdoit être fort marqué.XVIII. La colère aiguë. Les effets de la colère en font connaître la nature. Les yeux deviennentrouges & enflammés ; la prunelle égarée et étincelante ; les sourcils tantôt abattus, tantôt élevéségalement ; le front très ridé ; des plis entre les yeux ; les narines ouvertes & élargies ; les lèvres sepressant l’une contre l’autre, l’inférieure surmontant la supérieure, baisse les coins de la bouche unpeu ouverts, formant un ris cruel & dédaigneux.XIX Haine ou Jalousie. Cette Passion rend le front ridé ; les sourcils abattus & froncés ; l’œilétincelant, la prunelle à demi cachée sous les sourcils tournés du coté de l’objet : elle doit paraîtrepleine de feu aussi-bien que le blanc de l’œil & les paupières ; les narines pâles, ouvertes, plusmarquées qu’à l’ordinaire retirés en arrière, ce qui fait paraître des plis aux joues ; la bouche ferméeen sorte que l’on voit que les dents sont serrées ; les coins de la bouche retirez & fort abaissez ; lesmuscles des mâchoires paraîtront enfoncés ; la couleur du visage partie enflammée, partie jaunâtre ;les lèvres pâles ou livides. XX. Le désespoir. Comme cette Passion est extrême, ses mouvements le sont aussi ; le front se ridede haut en bas ; les sourcils s’abaissent sur les yeux, & se pressent du côté du nez, l’œil en feu &plein de sang ; la prunelle égarée, cachée sous le sourcil, étincelant & sans arrêt, les paupièresenflées & livides ; les narines grosses, ouvertes, & élevées ; le bout du nez abaissé ; le muscles,tendons, veines enflés & tendus ; le haut des joues gros, marqué & serré à l’endroit de la mâchoire ;la bouche retirée en arrière est plus ouverte par les côtés que par le milieu. La lèvre inférieuregrosse et renversée ; l’on grince des dents ; l’on écume ; l’on se mord les lèvres, qui sont lividescomme tout le reste du visage ; les cheveux sont droits & hérissées.]

2 notions sont retirées r/ TN :* La notion de Force, de dynamique = elle permettait par exemple de rapprocher l'orgueil del'amour ou l'humilité de la haine d'autre part car elles ont une même dynamique et provoquent unesensation de plaisir ou de déplaisir, alors qu'on a plutôt tendance à les opposer étant donné quel'amour et la haine concernent autrui alors que l'orgueil et l'humilité concernent le moi. CF SHEMA5* La Volonté = elle perd son rôle (le contrôle du principe de réalité revient au jeu complexe despassions faibles ou fortes avec un possible ressenti illusoire) ; elle est tour à tour distinguée despassions puis traitée comme l'une d'entre elles. La raison n’a aucune force par elle-même. Elle est« l’esclave des passions », c’est-à-dire un outil à leur disposition même si pas de remarques sur laraison comme esclave des passions ds la Dissert. (cf schéma 8)

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BUT du texte : = ni faire l'éloge ni critiquer ni conseiller un bon usage des passions mais expliquer et décrire lesopérations de l'esprit humain sur un mode constatatif ; pas de jugement éthique. 3 niveaux = définirl'objet des passions / les principes de leur apparition / les circonstances de leur modification . Ilne s'agit pas non plus de seulement décrire leur apparence, mais de dévoiler les mécanismesinvisibles. Hume adopte un point de vue dynamique sur les passions, les espèces d'un même genrede passions ayant tendance à s'engendrer l'une l'autre # tradition antique des taxinomies jusqu'àDescartes proposait des classifications figées par genres et espèces ; il leur emprunte néanmoins ensoulignant que les espèces du même genre peuvent s'engendrer. Ex : jalousie ou angoisse présentéescomme des espèces de douleur, comme des états isolés les uns des autres. Double tension paradoxale = à la fois critiquer l'adage scolastique selon lequel l'homme est unanimal raisonnable pour démontrer le fond passionnel de la nature humaine / mais en même tempsadopter une méthode scientifique pour rendre compte de cette nature à travers un système de règles,une modélisation des passions qui n'a rien de subjectif ou arbitraire. Montrer que c'est, non pas laraison, mais la part d'irrationnel qui constitue l'homme, tout en l'expliquant de la manière laplus rationnelle qui soit, à la façon des scientifiques.Difficulté = en science les objets étudiés sont extérieurs à l'observateur et ne sont donc pas altéréspar l'observation ; on doit pouvoir décrire avec neutralité objective (or l'homme est un être depassions donc il est ici à la fois le sujet et l'objet, juge et parti, on prend toujours une perspective surun système passionnel d'où le risque de partialité) et reproduire l'expérience en faisant varier lesparamètres (or reconnaissance d'une relative instabilité des passions dont l'identité n'est qu'une étapetransitoire entre 2 passions ; la passion est une altération ; de plus il y a une infinité d'étatspassionnels individuels et Hume refuse de les faire tous découler d'une seule comme LaRochefoucault avec l'amour de soi ; et on ne peut pas provoquer des passions comme desphénomènes physiques). CF l'introduction du TNH soulignait les difficultés épistémologiques“quand on recueille ses expériences, elle ne peut les produire à dessein, avec préméditation”.Mais comme ds toute science humaine, on peut prendre des précautions scientifiques ; on peutériger des lois ; on peut considérer la passion comme un phénomène de manière neutre sans lepersonnaliser (neutralité affective de la personne sur laquelle on expérimente. Ex : orgueil =sentiment de soi que ce soit Crevel ou Rastignac ; il y a donc une objectivation nécessaire de lapassion pour l'étudier et la repérer : de même que le psy ne doit pas transférer ses sentiments sur sonpatient, il ne faut pas que le philosophe vive « la haine en première personne ») ; la sympathie avecles autres (qui est l'âme de touts les passions) permet l'identification par le passionné lui-même deses propres passions chez autrui (effet de miroir voire mise en abyme qui peut confirmer notrepropre point de vue et mettre en évidence ce qui se produit le plus souvent). Et puis même enscience le fait de l'observation empêche l'observation du fait en soi, toute observation passe par lamédiation d'un oeil ou d'intruments humains !Il faut séparer les principes (objectifs) de la sensation vécue (confuse) car l'étude des passionsprésente des difficultés.

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B) EXPLICATION LINEAIRE

PLAN GENERAL

SECTION I / LES PASSIONS DIRECTES = joie, tristesse, crainte, espoir = ont pour objet lesbiens et les maux considérés du point de vue du plaisir et de la souffrance. TNH livre II, partieIII, sections 9 et 4.

SECTION II A IV / LES PASSIONS INDIRECTES = amour, haine, orgueil, humilité =cherchent aussi des biens ou refusent des maux mais dlm où nous les percevons en nous-mêmes ou chez autrui. TNH Livre II, partie I, sections 5,6,7,8,9,10,11 puis partie II, sections1,2,3,6,8,9,10,11.

SECTION V A VI / RAISON , VOLONTE ET PASSION = TNH livre II, partie III, sections 3,4,5,6,7,8Conclusion de la Dissertation sans correspondance au TNH

SECTION I / LES PASSIONS DIRECTES = joie, tristesse, crainte, espoir = ont pour objet lesbiens et les maux considérés du point de vue du plaisir et de la souffrance.

CF TABLEAU HUMIEN

LES PASSIONS COMME IMPRESSIONS DE REFLEXION

Impressions = « toutes nos sensations, passions et émotions, telles qu’elles font leur premièreapparition dans l’âme ».

* LES IMPRESSIONS CF SCHEMA 1= « Les perceptions qui entrent avec le plus de force et deviolence, nous pouvons les nommer impressions ; et sous ce terme, je comprends toutes nossensations, passions et émotions, telles qu’elles font leur première apparition dans l’âme. » =originaux ou modèles dont les idées sont les copies ; elles sont fortes et vives. Elles sont l'absolu duproblème, le principe qu'on ne questionne pas et dont on ne cherche pas plus loin les conditions,bref la structure atomique de l'esprit (relève de l'anatomie ou de la physiologie), c'est ce dont on nepeut connaître la cause, au-delà de quoi l'analyse ne peut remonter (cf intuition sensible). D'où leprincipe de vérification suivant : toujours, quand on a un doute, « rechercher de quelle impressiondérive cette idée supposée ». L'empirisme frôle ici le matérialisme , réduisant l'homme à un êtrevivant et matériel essentillement déterminé par ses affects. Il ,n'est pas “un empire dans un empire”masi une chose parmi les choses, un corps parmi les corps : le rapport externe et sensible sera donctoujours privilégié.

* TOUT EST PERCEPTION : Ontologie de la perception où tout ce qui se présente à l'esprit estperception : c'est à cela seulement qu'on peut attribuer une existence : antériorité de l'impression surl'idée d'où la nécessité de décomposer les idées complexes en idées simples puis rechercher desimpressions correpondantes ; immédiateté de la perception, pas de représentation d'autre chose situéen face de soi ; nature atomistiques des perceptions qui remet en cause l'idée de continuité ou

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d'identité du sujet. Qu'est-ce que penser ? C'est copier en composant. Les impressions et lesidées sont les atomes ultimes dont la combinaison ou la fusion (qui s'opère selon une ouplusieurs des relations) constitue l'intégralité du monde empirique, moral et intellectuel.

Les objets de référence ne sont pas les mêmes (“certains objets, d'autres objets ...”) donc il nefaut pas confondre les impressions de sensation avec les impressions de réflexion qui vont endépendre mais sans s'y réduire.

IMPRESSION DE SENSATION = ce qui frappe nos sens et nous fait percevoir quelque chose, cesont l'origine de l'esprit. Cf nos sensations premières, nos perceptions immédiates, nos impressionspremières et originales qui naissent sans perception qui les précède puisque c'est ce dont laperception sera faite. La dimension corporelle est indépassable puisque c'est grâce à nos sens quenous ressentons quelques chose des objets extérieurs sur nos organes, même si Hume renvoie auxesprits animaux cartésiens qui opèrent la jonction entre l'âme et le corps.VIVACITE = une vue de l'esprit ; évidence immédiate qui accompagne et caractérise lesimpressions, force de conviction de nature affective et incomparable ; impressions et idées sontéprouvées différemment en intensité ; il y a cependant la vivacité des idées auxquelles on croit carelles ont acquis, par un phénomène de transfert, une force sensible qui les distingue des autres(notamment des fictions). Il y a une ambivalence et une difficulté à décrire cette force car c'estl'atome du scepticisme au-delà duquel on ne peut aller. L'impression a pour essence cette réalitéaffective qu'on juge très évidente surtout quand on la compare à l'idée. Cette vivacité donne descontenus pour existants sans jamais qu'on puisse savoir s'ils ont ou non une réalité extérieure.Celui qui voit la couleur rouge ou qui ressent la colère est voué à sa perception. Mais les passions sont plus et autre chose que des sensations.# CF Hutcheson : théorie des sens externes : les émotions sont des sensations spécifiques liées aux 5sens.

IMPRESSION DE REFLEXION = PASSIONS = un affect qui naît soit d'une impression desensation soit d'une idée ; toute passion naît d'un rapport réglé entre sentiment et idée ; cesont des entités psychologiques, mentales, secondes, qui ne se réduisent pas à des sensationsimmédiates, car elle dérivent d'idées mais comme les idées dérivent elles-mêmes des sensations, laboucle est bouclée (cercle vertueux) : elles sont à la fois sensibles et réflexives, une certainemanière de sentir les idées-images. La vue comme le simple souvenir d'une chose peut faire naîtrela peur ; comme les précédents elles ne sont pas appréhendées par le biais d'une idée maisconcrètement et directement vécues, senties : c'est pourquoi elles sont décrites comme des« modifications originelles de l'existence », une modification de notre être par des objets ou dessituations qui se distinguent des sensations immédiates ; elles sont de réflexion non au sens ducogito réflexif (ou produit d'un acte intellectuel) mais au sens de réactions subjectives immédiatesà ce qui est donné. Le retour de l'idée provoque de nouvelles impressions qui en dérivent, copiéespar la mémoire et l'imagination, engendrant d'autres impressions ou idées. C'est la qualification del'esprit, l'effet des principes dans l'esprit. Cf affects, émotions, sentiments, désir, passions quiressemblent aux sensations primitives de plaisir et de douleur. Les passions ne sont pas unnouvel objet discernable de l'entendement ; toue passion est une réaction au plaisir et à ladouleur, elle résulte de ce qui dans l'impression est agréable ou douloureux, lorsque dansl'impression domine la sensation de plaisir ou de douleur. Donc toute impression est dotée d'unecharge affective. Une passions est elle-même une impression pure que l'on envisage à partir dusentiment agréable ou pénible qu'elle suscite. L'affect en constitue l'essence, c'est pourquoi on nepeut la définir, seulement la décrire. La logique des passions est d'intériorisation : les objetstrouvent une résonnance intérieure et au-delà d'un certain seuil de vivacité l'idée devient elle-mêmeune impression. Les passions ne sont donc pas des choses que les hommes porteraient

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accidentellement en eux et qu'on pourrait enlever comme une protubérance : ce sont des processusqui constituent le fonds de notre être. Une passion est un processus de redoublement du sensible :d'ailleurs toute passion est passion de qqchose, des réactions de l'esprit à ce qui l'affecte.DEF TNH “une passion est une émotion violente et sensible de l'esprit qui se déclenche quand seprésente un bien ou un mal” II, 3, 8. p. 288

PBL 1 : On ne remonte pas jusqu'au bout dans la série des causes : De même pour les principesde fonctionnement de l’esprit humain, puisque nous percevons les effets de ces principes, mais nepercevons pas directement les principes eux-mêmes. C’est pour pallier, dans la mesure dupossible, à cette non-perception directe que Hume recourt à la modélisation (conception d'unmodèle, représentation d'un système par un autre, plus facile à appréhender).

Pas de définition possible de certains affects : « […] Les passions de l’ORGUEIL et del’HUMILITÉ étant des impressions simples et uniformes, il est impossible de jamais en donner unejuste définition par une multitude de mots, et c’est aussi le cas pour les autres passions. Tout auplus pouvons-nous prétendre les décrire en énumérant les circonstances qui les accompagnent[…]. »

car :

1) ATOMISME ce qui constitue l'atome de la vie affective est insécable, indécomposable : l'amouret la haine impossibles à définir TNH p. 163 car « elles ne font que procurer une impression simplesans aucun mélange ni composition ». principe critique de la réduction analytique de toute idéecomplexe en éléments simples (la philo est une critique de l'entdt, de la morale etc., au sens de tri etde discernement : partant des opinions et des croyances des hommes pour en chercher par analyse etinduction, le principe = proposition première qui sert de support à d’autres, permettant de tirer desconséquences (postulat, axiome) ou de commander une action) ; genèse des principes de nosjugements. Pas de véritable atomisme psychologique isolant les passions les unes des autres pardécoupage artificiel : souligne plutôt son associationisme : à ne pas confondre avecatomisme (l'esprit par lui-même n'est qu'une collection d'atomes, ce qui rend une vraie psychologieimpossible). Les passions sont les éléments fondamentaux qui expliquent tout le reste et nonl'inverse ; ne se contentent pas d'articuler ensemble connaissance et morale mais permettent de lesexpliquer.2) INTUITIONISME = ce qui fait impression et auto-suffisant et n'a pas besoin de preuve externe« ces passions sont d'elles-mêmes suffisamment connues par le sentiment et l'expérience ordinaireque nous en avons » TNH p. 164. cf intuition sensible3) PHENOMENISME Au commencement était l'impression, perception originelle et vive, quinous fait entendre, voir, aimer, haïr, désirer ou vouloir. Hume prend pour point de départ de sonenquête ce qu'il appelle les perceptions de l'esprit. Toute idée, toute connaissance, provient d’uneperception. Toute idée gagne en force dans l’esprit lorsqu’une perception apparentée y survient.(Exemple : si nous voyons des voitures toute la journée, l’idée de voiture aura plus de vivacité et deprégnance dans notre esprit que si nous n’en voyons que très rarement.) Ces perceptions sont dedeux sortes : les impressions et les idées. Cette division correspond à la différence entre sentir et penser : « Chacun, de lui-même, percevrafacilement la différence entre sentir et penser. ». Penser vient après cette expérience quand l'espritse remémore les impressions, les mélange pour en faire des idées. Impressions et idées sont les deuxnoms de l'expérience. Les idées viennent chronologiquement après les impressions, elles sontqualitativement moins vives et moins fortes que les premières. On ne peut être sûr de bien penserque si l'on chercher toujours l'impression qui est derrière et dont dérive l'idée (ex on a vu de l'or etgravi une montagne, on sait donc pourquoi on rêve d'une montagne d'or).

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PBL 2 = Les impressions ne sont pas représentatives de quelque chose ; elles sont une réalitéautosuffisante. Pour dire que l'impression est « représentative » il faudrait admettre une doubleexistence, celle des objets et celle des impressions ; or ce n'est pas ici l'empreinte que des corpsextérieurs laissent sur l'esprit par le biais des sens mais une expérience primitive sans lien avecune extériorité : l'impression est l'être même ; elle est présentative et dotée d'une évidenceabsolue ; d'ailleurs le mot “impression” ne convenait pas à Hume, mais l'quivalent de ce qu'il veutdécrire ne se trouve dans aucune langue. Nous y adhérons spontanément et c'est en elle que nousvivons, comme perceptions primitives caractérisées par un sentiment spécifique.

PBL = opposition entre leur caractère réflexif ou secondaire en tant qu'impression de réflexioncàd impressions produites par les idées correspondant aux impressions de sensation, dérivées desimpressions de sensations car saisies affectives de ces données qui les précèdent (réflexion au sensde réaction sentimentale, une manière de ressentir la sensation et son idée, auxquelles elle donne unretentissement spécifique d'où l'idée qu'il y a des passions directes, qui orientent primitivement versla jouissance ou le déplaisir, selon que les sensations sont possibles, certaines ou incertaines (cftableau humien flèche de droite)mais aussi un caractère primaire, impulsif : une fois qu'elles le présentent à l'esprit elle sedonnent comme “vivre immédiat” (Malherbe), non représentatives, dotées d'une certaineprimitivité, impulsions primitives à partir de quoi sont formés nos jugements et actes (cf tableauhumien flèche de gauche). A la fois toutes les passions et par voie de conséquence les jugementsmoraux dérivent des sensations agréables ou désagréables ; mais aussi les passions possèdent enelles-mêmes un qualité affective originale, propre càd sont elles-mêmes considérées comme desplaisirs ou des peines ; càd que plaisir et souffrance ne sont pas seulement la cause mais l'êtremême des affects (même plus tard avec les passions indirectes, l'orgueil sera considéré comme“une certaine satisfaction que nous ressentons en nous-mêmes” (II, 1), la compassion décritecomme un “malaise” (III, 4), la passion amoureuse comme composée de plaisir (III, 7)). Plaisir etsouffrance sont l'alpha et l'omega de la condition humaine.

Pbl 3 de la distinction ave les affects des animaux : sujet disparu entre TNH (II, S12, P1) et DIP :“tout ce que nous découvrons être vrai d'une espèce peut être conclu sans hésitation comme certainde l'autre” p. 156 car anatomiquement constitués de manière semblables ; il y a une correspondanceentre passions chez les animaux et chez les hommes. Mais le désir et les passions n'ont-ils pas unepart essentiellement culturelle et anthropologique. Ce dont ne rend pas compte sa théorie, si ce n'estlorsque les passions se complexifient et font intervenir des relations entre idées dont ne sont pascapables animaux. La différence homme/animal se situerait au niveau des idées complexes sur letableau.

NATTENTION : impression de “réflexion” ne signifie ni représentation intellectuelle, ni prise deconscience de soi, ni détachement du sensible ; même les passions les plus directes (émotions)seront déjà des impressions de réflexion au sens où elles sont enregistrées dans la mémoire etréutilisées par l'imagination pour former d'autres idées-images et ainsi la dynamique passionnelle sedéploie dans toutes les directions. Ce sont des processus moteurs sans pour autant être innés, et ilsdéfinissent notre nature tout en étant d'une grande plasticité et variété. Comment est-ce possible ?Les passions sont des résultats, les produits d'une triple interaction, idées-affects, homme-monde, hommes entre eux. Il y a une interaction permanente entre le monde des affects et lemondes des idées-images : donc si l'on veut comprendre le fonctionnement des passions, il fautdéborder le cadre passionnel dlm où les passions elles-mêmes débordent le monde des affects pour

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envahir le monde de l'esprit. Les passions, mêmes directes, impliquent l'intervention du mondedes idées et réciproquement, les idées impliquent toujours déjà l'intervention des affects. Etc'est d'ailleurs parce que le monde des idées est un monde lui-même “affecté” que le monde est despassions est un monde complexe faisant intervenir l'imagination et l'entendement.

LE MONDE DES IDEES COMME MONDE AFFECTE

IDEES = 2ème genre de perceptions, toujours dérivée d'une impression ; comme idée simple elleen constitue la copie ; comme idée complexe, elle est un agencement d'idées simples. Lepremier principe de la nature humaine est que « toutes nos idées simples doivent dériverd'impressions simples qui leur correspondent et qu'elles représentent exactement ». L'idée est uneimage mentale de cette impression (théorie des idées-images inverse de Platon : c'est l'impressionqui est modèle) donc : la question de l'origine de nos connaissances ne se pose plus au sein dudualisme cartésien entre l'âme et le corps, le réel c'est l'impression, il appartient à la vie mentale(Hume prépare le terrain à la phéno et fait la moitié du chemin en considérant qu'il n'y a plus unsujet isolé en face d'un monde d'objets mais un sujet imprégné et défini par le monde des objets, lemonde est dans l'esprit, non au dehors ; la phéno terminera ce mouvement d'extériorisation de laconscience en disant que la conscience est dans le monde) ; la relation idée / impression est celle decopie, reproduction affaiblie, par rapport à un modèle, donc pas de différence de contenu mais dedegré de vivacité et du sentiment qu'il procure, pas de différences de nature comme le veut leprincipe empiriste, mais une différence de force : « la pensée la plus vive est encore inférieure à lasensation la plus terne ». IDEE simple = idée que je me fais d'un objet particulier (cette pomme), son image mentalecorrespondante, par association de plusieurs impressions contigües (sa couleur, sa forme, son odeuretc.). Toute idée simple, comme toute impression, est singulière.

IDEE complexe = plusieurs idées associées par ressemblance forment des idées générales etabstraites, des concepts (ce qu'il y a de commun entre toutes les pommes possibles). Les idéescomplexes sont formées par association fantaisiste ou régulière (ressemblance, contiguité, causalité)et constituent la totalité du concevable, la limite du possible.

CF IDEISME = hérité de Locke, doctrine réduisant tous les objets de notre entendement à desidées simples ou complexes ; sauf qu'il précise la relation que cette idée entretient avec le réel : est-ce seulement une représentation ou un véritable intermédiaire ? Comment une idée peut-elleressembler à une chose ? La philosophie de Hume est une critique de la représentation justementparce que les idées ne peuvent pas “représenter” des relations abstraites : Hume donne à l'esprit uneorigine simple et évite ainsi aux idées d'avoir à représenter des choses, on voit mal comment lesidées pourraient leur ressembler. Il n'y a qu'un copyright des IDEES CF SCHEMA 2= copiede cette impression qui survit à sa disparition, faible copie d'une impression première ; si toutidée est représentative de qqchose, elle l'est d'une impression qui est de même nature qu'elleet supérieure seulement en intensité. Aucune idée n'est valable ni n'a d'existence si on ne saitassigner la ou les impressions dont elle est la copie (au moins pr les idées simples). Esprit n'estautre chose qu'une mosaïque d'impressions : ce qui est intéressant à étudier ce ne sont pas lesimpressions en elles-mêmes mais les relations entre elles et les idées qui forment le tissu de l'esprit.

Hume propose une modélisation du fonctionnement de l'entendement humain pour en tirerdes principes.

D’abord, il tente de comprendre les principes de fonctionnement de l’entendement (livre I duTNH). L’entendement est le cadre logique de l’esprit, il est l’ensemble de principes logiques selon

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lesquels nous raisonnons et développons des croyances. Ce ne sont pas des principesnécessairement explicites : en général, ils sont même plutôt implicites, car ils sont tellement« naturels » à nos yeux que nous ne les remarquons pas. La tâche de Hume dans cette premièreétape (qui est aussi le premier livre du Traité) est de comprendre en quoi consistent ces principes.

Et il y a deux genres d'affections : le dépassement du donné qui sera source de connaissance etl'affection passionnelle et morale.

Les connexions imaginaires : l'associationisme atténue l'atomisme de Hume.

CF SCHEMA 3 : Les RELATIONS entre idées : les pensées sont méthodiques, on ne pense pasn'importe comment, même le rêve ou la conversation la plus décousue ne s'organise pas n'importecomment, il y a une connexion entre nos idées ou images “elles ne sont pas entièrement dépourvuesde règles et de méthode dans leur changement” DIP p. 64. Il y a des lois qui maintiennent l'ordredans l'esprit comme les lois de l'attraction newtonienne maintiennent l'ordre ds l'univers. Commentles idées simples deviennent-elles des idées complexes ? (lacune du système de Locke). On établitdes connexions en respectant 3 règles : Il s’agit en quelque sorte de la « mécanique » de l’esprit.On parlera de SCHEMATISME = passage par généralisation des exemples particuliers du fluxaffectif à une loi universelle (induction) ou de la loi à l'expérience vécue (déduction) d'où uneliaison de la conception à la sensation par le biais de l'imagination car celle-ci est hybride. Des idéesvives de la mémoire on peut passer ensuite à la compréhension de toutes les autres idées vives paropération de transfert. Certaines idées sont éprouvées d'une autre manière que les autres.

LES PRINCIPES D'ASSOCIATION = ce sont les règles selon lesquelles les idées s'appellent lesunes les autres et se lient pour former des ensembles distincts déterminants le cours de la pensée.L'esprit est libre d'associer les idées selon sa fantaisie mais a tendance à établir des liaisonsrégulières (ressemblance, contiguité, causalité) : Hume les constate comme “une sorte d'attractionqui possède des effets aussi extraordinaire dans le monde de l'esprit que que dans le monde actuel”et agit à la manière d'une “force douce”. Ce sont des tendances ou des plis dans l'imagination quipasse facilement d'une idée à une autre selon ce rapport et cela détermine des attentes. Lesprincipales opérations de l'entendement n'en sont que les effets et cela permet d'expliquer lesconditions de formation de nos attentes mentales. Alors que les impressions ne s'unissent que parresemblance, les idées de la mémoire sont généralement associées d'après les 3 règles, même si ellespeuvent se lier sans princips. Hume considère ces 3 principes comme “le ciment de l'univers” eton tient le concept d'association comme le vrai pivot de son système sceptique.RELATIONS = liaisons des idées dans l'esprit, naturelles si déterminées par des conditions ( 3 =ressemblance, contiguité, causalité à cause de l'attraction entre perceptions singulières ou commeune “force douce” qui incline la liberté de la fantaisie à avoir certaines attentes exsingulier contigu ressemblant causal ) ; philosophiques si c'est l'esprit qui prend l'initiativeet juge bon de comparer deux idées (assemblages d'idées par un acte de l'entendement qui lescompare sous un point de vue arbitraire, 7 = ressemblance, contrariété, degrés d'une qualité,rapports de quantité = pures comparaisons d'idées indépendantes de l'expérience, structuresformelles de la connaissance ; identité, contiguité, causalité = connues par expérience, probables).Les « relations philosophiques » sont ce que l’esprit identifie en fait de relations entre les objets.

Deux idées entrent en connexion :* soit à cause de leur ressemblance = un tableau nous fait penser à son original, au modèle.RESSEMBLANCE = relation naturelle ou philosophique la plus libre qui soit, lie des idéesparticulières entre elles pour les comparer. C'est la “source la plus fertile d'erreur” participant auphénomène de la croyance mais peut aussi comparer des idées entre elles indépendamment del'expérience pour constituer une connaissance démonstrative. Dans son ontologie de la perception le

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rapport de ressemblance est désormais des idées aux impressions, plutôt que des impressions auxobjets.

* soit parce que les impressions qu'elles copient sont contiguës, voisines = penser à unappartement fait penser à l'immeuble ou la rue dans lequel il se trouve.CONTIGUITE = association reliant des idées d'après la proximité temporelle ou spatiale desimpressions correspondantes ; il y a chez Hume une pensée du contigu et du distant. La contiguitérépétée contribue à la constitution de la croyance surtout causale (par association d'idées).

* soit parce que l'une représente une cause et l'autre l'effet, la relation de cause à effet (si onpense à une blessure on pense automatiquement à ce qui l'a causé et à la douleur qu'elle engendre).CONNEXION = Hume nie l'existence de liens de causes à effets réels entre les choses, ce qui a tiréKant de « son sommeil dogmatique ». On admet une connexion nécessaire slt entre des faits voisinset successifs, observés plusieurs fois, ce qui n'affecte pas le le couple de faits mais engendre dansnotre esprit une habitude. Ex quand 2 boules de billards se heurtent, on pense que le mouvement dela 1ère est la cause du mouvement de la scde, et qu'il y a une connexion nécessaire entre les 2 (cftexte). Une boule de billard va heurter une autre boule de billard, on croit que la première vacommuniquer son mouvement à la seconde, ce qui est très probable, sauf si le joueur a provoqué uneffet de retour de la boule sur elle-même ; si je crois A, alors je crois par habitude, car j'imagine quece qui s'est produit la plupart du temps va se reproduire ; si je crois B, je ne fais qu'un pari, avecmoins d'intensité, et n'y croirait vraiment qu'a posteriori. Or l'expérience nous indique seulementune conjonction et une succession de faits, on a l'habitude de les voir se produire à la suite l'un del'autre mais nous n'en sommes pas sûrs logiquement. Et nous imaginons un lien entre les 2 :l'imagination sert de catalyseur de l'association des idées. Lorsqu’une boule de billard (imagedes boules de billard vient de Malebranche) heurte une autre boule de billard et lui transmet sonimpulsion, nous voyons deux phénomènes survenir l’un après l’autre. Nous croyons alors voir unecause et un effet. Pourtant, nous ne percevons pas directement la causalité. Si elle existe (ce quenous ne pouvons pas prouver par des arguments démonstratifs, mais nous sommes forcés dereconnaître l’existence de la causalité dans la pratique, car nous ne pourrions pas raisonner sanselle), nous ne la percevons que d’une manière indirecte.DONC : L'idée de relation de cause à effet provient de notre habitude et n'est pas réellementds les choses. Trois présupposés non vérifiables: constance de la nature / le futur doit ressembler aupassé / fiabilité des inductions passées (pétition de principe car présuppose que ce qui a tjrsfonctionné fonctionnera toujours donc présuppose l'induction). L'association est donc une qualitéqui unit les idées et non une qualité des choses elles-mêmes. Le privilège de la causalité parrapport à la contiguité et la ressemblance, c'est qu'elle nous fait affirmer l'existence deqqchose, car elle confère à l'idée de l'objet une solidité et une objectivité, mais les deux autrespréparent déjà cela en naturalisant l'esprit et en préparant la croyance. L'association est une loi de lanature et comme toute loi elle se définit par ses effets, non par une cause. Donc on doit se contenterde scruter les effets, pas besoin de remonter aux causes des principes. L'essentiel est leur effet surl'imagination. Seule l'expérience nous autorise à inférer un effet d'une cause. Ex : le soir on secouche en se disant que le soleil se lèvera demain : même si le contraire est toujours possible, noncontradictoire, même si je ne peux pas le prouver par la seule expérience, car elle ne me permet pasde prouver la ressemblance du futur avec le passé, ma raison étant incapable de démontrer que lesoleil se lèvera demain, pourtant je persiste dans ma croyance, mon action combat monignorance, avec pour grand guide de toute la nature humaine le principe de l'accoutumancequi, de la répétition dans le passé, permet d'anticiper le futur. La relation de nécessité causaleest seulement une relation constante ds les choses et elle n'est que dans le sujet qui la contemple.C'est paradoxalement une subjectivité qui se dépasse vers ce qu'elle ne connaît pas sencore, qui

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affirme au-delà de ce qu'elle sait, mais qui en meme temps est passive. Le fait de la connaissance estque mon jugement dépasse l'expérience et l'idée. NECESSITE = détermination d'un effet par une cause : la nécessité est inférée par l'esprit sur labase de conjonctions constantes de deux phénomènes ; idée fragile car arbitraire (elle n'est que dansl'esprit de celui qui la pense) mais utile pour se répérer et distinguer les conjonctions les plusprobables. COUTUME = tendance de l'esprit qui le conduit à associer deux idées par une relation de nécessitésous l'influence de la conjonction constante des impressions correspondantes = habitude qui a pourcondition la répétition d'événements impressionnels contigus, pour effet la liaison de leurs idées etle « transfert de vivacité » qui provoque la croyance. La capacité à prendre des habitudes est unprincipe de la nature humaine. Il est naturel à l'esprit de dépasser le donné, passivement. Toutes lesassociation d'idées sont possibles et comme ces relations sont extérieures à leurs termes, laconnaissance n'a pas de fondement objectif = Habitude = affection de l'esprit qui le porte à étendreaux cas semblables ce qu'il a remarqué ds ses expériences passées et le pousse à inférer uneexistence future. Opération dont la coutume est le résultat. L'expérience m'instruit deconjonctions d'objets ds le passé, tandis que la coutume me pousse à attendre la même chose àl'avenir. L'expérience rend possible la comparaison mais ne détermine pas l'inférence. « La coutumefait toute la causalité ». CAUSALITE = relation liant deux idées par une connexion considéréecomme nécessaire, l'une des 2 idées représente la cause de ce que l'autre représente comme effet.Cette relation fait l'objet de doutes sceptiques pour en critiquer la nécessité prétendue tout en faisantl'objet d'une explication empiriste qui la reconnaît comme effet de la coutume. Relation naturelleentre les idées, elle n'est pas interrogeable comme telle bien qu'elle soit la seule qui dépasse ledonné intellectuel ou empirique pour aller plus loin. En tant que relation philosophique elle nedépend pas uniquement des idées même si elle fait l'objet d'un démonstration. Donc elle ne peutêtre prouvée a priori (une idée ne contenant pas de qualité déterminant son objet comme cause oueffet) ni a posteriori (cela supposerait que le passé soit la règle de l'avenir). Ce n'est qu'une attentenaturelle. La répétition produit un effet de coutume sur l'esprit qui considère ces conjonctionscomme des connexions nécessaires. La causalité n'est pas dans les choses mais trouve sonorigine dans l'esprit qui est déterminé à l'association par cette conséquence psychologique dupassé qu'est la coutume. La causalité devient alors un cas de croyance. Conjonction constante =contiguité de deux impressions, répétée dans la mémoire ; l'esprit passe de ce lien contingent à unlien nécessaire entre deux impressions, l'une cause, l'autre effet. La constance de nos impressions seramène au fait que les objets nous “ sont toujours apparus ds le meme ordre” et nous “reviennentsans le moindre changement”. Il y a donc un écart entre le fait mnésique de la conjonction etl'idée vive de la connexion qui est une croyance. C'est la coutume qui vient combler cet écart.

DONC = C'est la connexion imaginative qui fait l'intermédiaire entre l'idée simple et l'idéecomplexe (ex : comparaison entre portrait et son modèle, idée simple, entraîne idée complexe derelation de causalité entre les 2, l'un ayant inspiré l'autre). « Par idées, j’entends les imagesaffaiblies des impressions dans la pensée et le raisonnement. Telles sont, par exemple, toutes lesperceptions excitées par le présent discours, à l’exception seulement de celles qui proviennent de lavue et du toucher, et à l’exception du plaisir immédiat ou du désagrément qu’il peut occasionner. ».En résumé : la ressemblance mène du portrait peint au modèle ; la contiguïté dans l'espace ou letemps du salon où je discute à la maison qui l'abrite, de l'ami que je rencontre à cet autre amirencontré hier ; la relation de causalité conduit la pensée à comprendre le contenu de la dissertationcomme une conséquence de l'échec du TNH. La ressemblance, la proximité, les rapports de taille etde nombre… font partie des relations à partir desquelles l’imagination développe des objetscomplexes. Hume tentera de montrer en quoi telle ou telle situation particulière (par exemple, lafierté que nous ressentons lorsque nous regardons des objets coûteux qui nous appartiennent)s’explique par des principes de fonctionnement de l’esprit. D'où une emprise de l'imagination sur

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l'esprit. Ce n'est pas pour autant une critique moralisatrice qui dénoncerait les approximations del'esprit humain : c'est un constat de fait, la raison n'est pas le guide l'action. Croire, c'est sentird'une manière particulière, avoir une idée dont la vivacité est proche de celle de l'impressionet qui nous pousse à adhérer à ce qui n'est pas encore comme si c'était déjà.

Dans tous les cas, je crois parce que j'imagine. L'imagination se sert de l'évidence de l'expérience(ce qui saute aux yeux) pour la plier à ses règles d'association. L'homme est irrationnel mais (car)imaginatif dlm où cette confusion se fait dans un certain ordre. L'imagination invente la nécessité làoù il n'y a que constance, car l'expérience nous apprend seulement la conjonction des événementsdans le passé et l'imagination en tire par habitude une règle de connexion. C'est l'oeuvre del'imagination de nous faire sentir la nécessité, alors que l'expérience ne livre rien au-delà d'elle-même. “ La croyance c'est qqchose de senti par l'esprit qui distingue les idées du jugement d'une fiction del'imagination.Cela leur donne plus de poids et d'influence ; les fait paraître de plus grandeimportance ; les renforce dans l'esprit et en fait le principe directeur de nos actions”

* DEF de la CROYANCE qui en découle = Il y a un rôle déterminant de l'affectivité dans lathéorie de la croyance fondée par Hume : le réel est de l'ordre de l'exigence plus que de la chose.De l'insuffisance des choses sensibles à s'expliquer elles-mêmes Hume ne déduit pas la supérioritéet le rôle indispensable de l'entendement humain mais le rôle de la croyance humaine, dont il fautchercher les motifs. D'où un scepticisme modéré (« sceptique mitigé ») : on doute des jugementsportés sur le réel mais on ne peut faire autrement que de croire en ce qui nous apparaît. Ce n'est nil'idée de la chose, ni la chose elle-même qui produit efficacement la relation de cause à effet :c'est notre croyance. « L'idée d'un objet est une partie essentielle de la croyance qu'on y accorde,mais non le tout ». La croyance n'est que l'idée avec un degré de vivacité très élevé et c'estseulement lorsque la croyance s'ajoute à l'idée que l'idée devient la connaissance de qqchosede réel et non une fiction. Croire à une idée n'ajoute rien au contenu de l'idée mais ses idées ontalors plus de force et de stabilité (prendre pour une histoire vraie ce que l'autre tient pour un conte).“L'essence de la relation est la relation facile. L'esprit, devenu nature, a tendance” DELEUZE. Lacroyance est un je ne sais quoi que chacun sent suffisamment. Bien que nous percevions les objetsqui nous entourent – et bien que nous croyions naturellement en la réalité de nos perceptions, c’est-à-dire en l’existence effective des objets hors de nous -, nous ne percevons pas les liens de causalité.

CROYANCE = « idée vive reliée ou associée à une impression présente », vivacité de l'idée àlaquelle on croit ; opinion accompagnée par une certitude subjective donc pas connaissance au sensstrict. La 1ère de nos croyances est que les objets sensibles existent, et le souvenir qu'on en garde.

* DEF de la CONNAISSANCE qui en découle = « assurance que fait naître une comparaisond'idées » = 3 sortes = 1) connaissance démonstrative ou certaine, raisonnements démonstratifs apriori (relations d'idées qui sont certaines ssi non contradictoires) et qu'on peut regrouper ensemble :2) causale et assurée par des preuves 3) incertaine ou probable, raisonnements probables, inférencesa posteriori, relations entre les faits qui n'atteignent qu'une certitude morale car le contraire esttoujours possible, la chance n'étant qu'une forme d'ignorance, comme un déni de la causalité.Hume distingue donc entre deux modes du connaître : la connaissance en tant que telle(perception d'une relation entre idées) et la probabilité (= possibilité mesurable, évidenceaccompagnée d'incertitude, dont le contraire est toujours possible) cf section I, &3. La sciencecausale de la nature humaine est une science sceptique inspirée de la science des probabilités. Cfautre inspiration épistémologique / BERNOULLI = utiliser la logique des probabilités pourattribuer une valeur à une action. Il y a deux sortes de raison puisqu'il y a deux sortes de relations, les relations d'idées qui

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dépendent seulement d'idées comparées entre elles, et les relations d'objets. La premièreconcerne strictement les relations entre idées, alors que la seconde traite les choses de fait.Elles produisent tantôt des certitudes (par intuition ou démonstration), tantôt des probabilités,croyances (raison expérimentale, entendement) mais dans tous les cas elles ont comme racinecommune la comparaison donc leur convictions respectives ne sont pas sans rapport. Cetteopposition est centrale pour toute la philosophie humienne car elle exprime l'idée que laconnaissance empirique, issue de notre rencontre avec le monde, ne peut être rationnellementjustifiée jusqu'à ses fondements. La probabilité recoupe en ce sens le fameux problème de lacausalité, car, une fois que la critique sceptique a montré comment notre habitude d'associercausalement les évènements ne repose pas sur un fondement rationnel, la solution est de faireconfiance à nos sens. En effet, dans la majeure partie des cas, c'est-à-dire avec une plus grandeprobabilité, ils ne nous trompent pas. Hume insiste sur l'inférence en matière de faits : tous lesraisonnements probables qui nous permettent d'affirmer l'existence de faits en dehors de notreexpérience actuelle, ce qui n'est ni slt expérience actuelle ni slt relation d'idées. Ex : ds letémoignage on conclue des effets actuels à leurs causes passées, ds la prévision on conclue de lacause dont nous avons l'expérience actuelle à l'effet qu'elle produira (Ex : le soleil se lèverademain, certitude différente de celle des maths). Cette inférence repose sur la connexion de lacause et de l'effet. La connaissance est donc bien possible et elle nous vient de l'expérience maisl'expérience nous donne moins d'infos que ce qu'on croit et les connexions sont des projections denotre esprit sur les choses, qui lui-même n'est qu'une suite de perceptions : Hume questionne ainsile rapport entre le réel et notre représentation du réel.

AU FINAL = Ce primat de la dimension affective peut s'observer de deux façons : soit l'idéeest tellement avivée qu'elle se transforme en impression (ce qui sera le cas avec les passionsindirectes section II), soit c'est l'impression originelle de plaisir ou de douleur qui donne sonstatut de bien ou de mal à l'objet, ce qui est le cas avec les passions directes.

& 1 La DIP commence par ce que le TNH II avait relégué en partie III, ce qui donne à la théoriehumienne une certaine dimension hédoniste (hédonisme = théorie selon laquelle le plaisir est le seulmoyen d'être heureux) qu'elle n'avait pas dans le TNH qui commençait par l'exposition des passionsindirectes les plus complexes et les plus élaborées. Cela semble indiquer que le plaisir et lasouffrance sont les seuls critères du bien et du mal. Plaisir (placeo = plaire, être agréable= = étataffectif agréable +/- durable que procure la satisfaction d'une tendance physique ou psychique.

* Les passions directes sont des passions simples et indivisibles. Elles ne sont constituéesd’aucun mélange. On ne peut pas les définir. On ne peut que ressentir ces passions pour savoir àquoi les idées qui les désignent correspondent. Désigner de telles passions par des mots pour qui neles ressentirait pas reviendrait à tenter de décrire la couleur à un aveugle. Def = “passions quiproviennent d'une poursuite directe du bien ou d'une aversion pour le mal” (II, 1). Lasensation de plasisit produit immédiatement le désir et ensuite la volonté d'agir. Ellesconcernent notre rapport immédiat aux circonstances et sont onstitutives de notre moi affectifIl existe deux genres de passions directes : à côté de celles qui naissent dun plaisir et de ladouleur, il y a celles celles qui relèvent d'un instinct naturel (besoin biologique comme la faim ou lasoif ou l'appétit sexuel ou le désir de voir nos ennemis punis ou nos amis récompensés , cf pulsionsde vie et de mort chez Freud). L'homme est déterminé à fuir la douleur et à rechercher le plaisir,c'est ce qui oriente ses activités. “L'esprit par un instinct originel tend à s'unir au bien et à éviter lemal” TNH p.289.

&1 Le Bien et le Mal doivent être définis en référence aux sensations de plaisir et de douleur.

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Plaisir et douleur = ce sont des impressions de sensation d'un genre particulier qui suscitentdirectement les passions et sont donc les « ressorts principaux de l'esprit humain ». Ilsaccompagnent toute perception sans être traversé par une idée : ce sont des faits primitifs auxquelss'ordonnent toutes les passions comme quêtes du plaisir et fuite de la douleur (ici « biens et maux,agrément ou malaise »). Les passions directes comme désir ou aversion, joie et tristesse (si biens etmaux certains) ou espoir et crainte (si biens et maux incertains) les suivent directement. Tout icis'inscrit dans une économie du plaisir. Il y a connexion par ressemblance entre les impressions deplaisir / douleur et les passions qui sont elles-mêmes plaisantes ou douloureuses. Ce sont donc cesexpériences qui introduisent d'elles-mêmes toute la vie passionnelle, qui va être dominée par unetendance à l'équilibre, à une vie « modérée », combinant des plaisirs moins grands mais plus sûrs. Le bien et le mal ne sont que le nom que l'esprit donne aux objets plaisant ou pénibles : miseen place d'une morale qui est régie par le principe de plaisir comme tendance à se procurer lesobjets bons et à éviter les objets qui causent des souffrances.

# Traditionnellement on considère que nos sensations ont une dimension double càd qu'elles ont unedimension affective puisqu'elles nous permettent d'éprouver directement le réel qui nous entouresous forme de plaisir ou de déplaisir ; mais aussi elles ont une dimension représentative càd qu'ellesprésentent le réel sous un certain angle, comme si elles étaient déjà une interprétation du sens duréel (pour Descartes par ex la joie ou la tristesse peut être purement intellectuelle et se situe bien audelà du plaisir ou de la souffrance, dans un jugement, et même si elle provient de sensationsagréables ou désagréables, elle en provient donc ne s'y réduit pas) ; or Hume rabat la dimensionreprésentative sur la dimension affective, gommant la 1ère au profit de la seconde : lessensations de plaisir et de souffrance sont purement perceptives donc physiques (soit on éléve lasensation vers une dimension plus intellectuelle, soit on fait descendre le sens dans la sensation, cequi est le cas ici) ; il y a prédominance de la dimension affective sur la dimensionreprésentative des sensations. Il suffit qu'une chose nous afsse du mal ou du bien pour qu'elle soitjugée comme un bien ou un mal : il y a ici assimilation entre le plaisir et le bien, entre lasouffrance et le mal (cf Epicure si l'on considère qu'il suffit de ressentir du plaisir pour êtreheureux donc vertueux mais au prix d'une hiérarchisation de ces plaisirs ; voire Calliclès si l'on nefait plus le tri entre les plaisirs qui sont bons à prendre).Ce rabattement conceptuel en produit un autre (2ème alinéa), qui confirme l'”amoralisme” deHume : de ce fait, le jugement moral du bien et du mal ne doit pas lui non plus être séparé duplaisir et de la souffrance. Ils ne sont pas conçus mais perçus ou même ressentis. Ils ne sont pasdes objets de connaissance mais des continuations de nos sentiments par d'autres moyens. Il n'y adonc pas de conscience ou de réflexion morale dont le rôle serait de délibérer avec soi-même pourchoisir le bien et le mal selon des définitions abstraits. Si nos affects sont des ressentis, et si nosjugement moraux dépendent de nos affects, alors nos jugement moraux eux-même sont (influencéspar) des ressentis. Et de ce fait, les passions ne portent pas sur des objets qui sont bons ou mauvaisen soi et qui préexisteraient à notre jugement, mais c'est parce que nous sommes affectés etpassionnés que nous attribuons telle valeur morale à un objet ou à une situation. Ce n'est pas parceque certains objets sont bons ou mauvaix en soi qu'ils produisent des passions, c'est parce que nousressentons des passions que nous attribuons une couloration axiologique aux choses ; rabattementsémantique du moral sur le psychologique. Cf Spinoza : “nous ne désirons aucune chose parce quenous la jugeons bonne, mais au contraire nous appelons bonne la chose que nous désirons” : ce quiest bon pour soi est considérér comme bon en soi ; Le bien dans ce cas n’est pas une valeurtranscendante (placée au dessus de nous) qui préexisterait au désir : le bien n’est pasindépendant du sujet qui désire, nous jugeons la valeur morale d’une chose à l’aulne de notre désirpour elle. C’est donc le désir qui précède et qui détermine la valeur morale d’un acte: le désir estcondition du bien. Chacun est ainsi tenu de rechercher ce qui lui est utile et agréable, il est naturelet raisonnable pour Spinoza de désirer ce qui nous permet de continuer d’exister. Nos jugements

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moraux sont donc presque toujours l’expression d’un état affectif. Si une chose nous procure de lajoie et du plaisir, elle sera bonne ; si elle nous procure de la peine et de la souffrance, elle seramauvaise. Le seul critère moral est alors l’augmentation ou la baisse, les fluctuations de la joie et dela tristesse. Car la raison du caractère désirable d’une chose réside en nous, dans le sujet désirant , etnon dans l’objet désiré. L’objet est presque un prétexte au désir et seul le “désir de persévérer dansson être” (“conatus”) compte. Les passions sont l'origine de tous nos jugements de valeur et non leus effets : il y a inversiondu rapport de cause à effet càd que ce n'est pas la morale qui cause les affects mais les affects quicausent la morale. Ex : il suffit que le chatiment d'un adversaire nous fasse plaisir pour qu'il soitmoralement bon en soi, ou que la maladie d'un ami nous fasse du mal pour qu'elle soit moralementmauvaise en soi. Donc : pas de passion ni de morale sans expérience affective ; la sensation est la conditionnécessaire de la passion, de même que la passion à son tour est la condition nécessaire de toutjugement moral. Mais est-ce une condition suffisante ? Tous les plaisirs ou peines corporels nedonnent pas naissance à des passions (ex : la chaleur, une démangeaison, la faim ne deviennent pasnécessairemet des passions) même si certaines peuvent être cause de passions (épilepsie ou galecause de honte ou humilité II, 11 / plaisie visuel produit orgueil). Plaisir et douleur ne sont paseux-mêmes des passions mais toute passion leut est liée. Les sensations corporelles peuventdéclencher des passions et ainsi déborder le domaine physiologique ou organique mais certaines nesont pas ou n'enclenchent pas de passions. Il faut donc d'autres éléments pour définir l'étatpassionnel malgré la prédominance affective. Hume ne réduit pas les passions à une action ducorps sur l'âme comme dans le dualisme cartésien : les passions résultent d'associationsd'impressions et de idées dans un réseau affectif complexe, un flux perpétuel d'affects qui n'est pasisolable de la complexité des circonstances (éléments qui font la singularité des situations).

CF SCHEMA 4 BIS PASSIONS DIRECTES ET INDIRECTESSCHEMA 5 / CRAINTE

&2 Les passions directes suivent les perceptions de biens et de maux présents (joie/chagrin) ou lareprésentation de biens et de maux possibles (espoir/crainte, désir/aversion). On remarque que Hume prend le parti d'explications multiples voire contradictoires pourrendre compte d'une réalité affective complexe. Certaines passions mêlent le bien et le mal, leplaisir et la souffrance, ce sont des passions directes mais mixtesIl existe 3 catégories de passions directes : celles qui proviennent d'une présence ou quasi-présence, imminence / celles qui proviennent de l'attente d'un bien ou d'un mal non encore présent /celles qui proviennent de la poursuite des biens futurs ou de la fuite des maux, qu'ils soient présentsou distants. Hume ne cherche pas à donner une définition des propriétés internes des plaisir et despeines mais une réflexion sur la distance variable qui nous en sépare ou nous en rapproche.Joie et tristesse sont les plus directes car double immédiat du plaisir et de la souffrance ; désir etaversion déclenchés par toute situation où l'on se représente un bien ou un mal. Pas d'examendétaillé mais originalité : pas besoin de sentiment de manque pour que le désir apparaisse ; le bienest considéré simplement, il suffit de reconnaître un objet comme un bien pour qu'il soit désiré.

Insiste plus sur l'espoir et la crainte qui reposent sur la théorie des jugements de probabilité :espoir et crainte sont l'envers et l'endroit d'une même incertitude : on espère que cela se produise(pas) ou on craint que cela ne se produise (pas), sans en être sûr. Traité x fois au livre I du TNH, ilsouligne ici les conséquence affectives des jugement de probabilité plutot que sur leursfondements épistémiques : “la probabilité résulte d'une opposition de chances ou de causescontraires qui ne permet pas à l'esprit de se fixer, mais qui, le ballotant sans cesse, d'un côté àl'autre, le détermine à considérer un objet tantôt comme existant tantôt comme inexistant” (I, 3) . Ils

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naissent quand la réalisation d'un bien ou d'un mal est seulement possible ou probable mais pascertaine. Ces passions sont un mélange de joie et de tristesse qui les crée directement : l'incertitudedu bien fait fluctuer l'imagination qui passe dela joie que produit l'idée de sa possession à la tristesseque produit l'idée de sa perte, sans pouvoir se fixer : “le pour et le contre prévalent alternativement”ce qui laisse l'esprit dans l'incertitude la plus totale. Dans cette fluctuation hésitante l'esprit sentalternativement les impressions momentanées de joie et de tristesse. C'est le passage rapide del'une à l'autre qui produit une tierce passion, qui est plus et autre chose qu'un simple composéde deux car les émotions (d'où l'image de l'huile et du vinaigre plus loin), plus lentes, vibrent etdurent plus longtemps que les idées donc l'une peut commencer quand l'autre se prolonge. Auxidées contigües de joie et de tristesse s'ajoute la continuité des impressions entre elles. CF EEH (version courte du livre I du TNH) Section VI / De la probabilité : l'ignorance de lacause réelle des événements a la même influence sur l'entendement que le hasard et engendre lesmêmes sortes de croyances ou d'opinion : psychologiser l'entendement ne l'empêche pas deraisonner et intellectualiser les affects ne les empêchent pas de vefrser dans la doxa. Prendl'exemple du dé marqué d'un même signe sur 4 faces : il est plus probable qu'il tombe sur l'uned'entre elles quand on le jette donc notre attente de cet événement serait plus grande, ce qui nousfait croire plus à la réalisation de cet événement qu'à un autre : “la croyance n'est qu'une conceptiond'un objet plus ferme et plus puissante que celles qui accompagne les fictions de l'imagination”. Lecalcul de probabilité est la conséquence directe du scepticisme humien car c'est parce que nousdoutons des causes, quand elles sont irrégulières ou méconnues, que nous devons nous réfugier dansle probable. C'est le revers de l'habitude : ce que nous ne pouvons pas déterminer avec certitude parhabitude, nous devons intégrer la marge de possibilité inverse, celle que l'événement ne se produisepas, pour affirmer quelque chose. C'est l'exception à la règle habituelle, liée à la contingenceimprévisible des événements, qui crée du probable. En l'absence de croyance et de transfert dupassé vers le futur, il n'y a que du probable ; ce qui jusqu'ici avait pour conséquence un scepticismephilosophique puisque toutes nos théories peuvent être jugées incertaines, va produire des effetspsychologiques donc pratiques avec les passions.

CF Influence de PASCAL (invente/formalise le calcul de probabilité pour réduire la part dehasard ) : Logique différentielle : tout plaisir réel est relié à une peine possible ; on ne ressentjamais autant un plaisir que si l'on vient/ craint d'en être privé. Mise en œuvre d'une balance entrecrainte et espérance. Sans crainte et sans espoir, l'intérêt s'évanouit : dans la dramaturgie par ex. “lesscènes contentes sans crainte ne valent rien, ni les extrêmes misères sans espérances”, riend'étonnant pour un moraliste qui conçoit la condition humaine comme une tragédie.

&3-9 Les formes variées de l'espoir et de la crainte sont fonction de la probabilité des biens et desmaux. On remarquera que Hume veut repérer les conduites les plus fréquentes et opte lui-mêmepour un calcul de probabilité sur les éléments récurrents pour analyser le calcul de probabilitéqui est à l'origine des passions de crainte et d'espoir, ce qui montre que le calcul de probabilité estutilisé par l'entendement dans d'autres circonstances que les passions, mais aussi qu'il y a une miseen abyme : Hume est lui-même un exemple de ce qu'il démontre.

& 3 Selon que la situation a plus ou moins de chances de se produire, cela entrâine destransformations affectives. Ces passions simples se compliquent assez vite : elles font intervenir lecalcul de probabilité qui est plutôt une prérogative de l'entendement et elles naissent de lareprésentation imaginaire de biens et de maux futurs. Equivalence entre entendement et imaginationsoulignée au & 3 car ils se comportent identiquement dans des situations d'incertitude, d'expectative(sous la forme d'une contrariété affective résultant des idées ou des images), mais aussi de manièregénérale parce que l'entendement n'est qu'une partie réglée de l'imagination par des lois logiques(l'imagination constitue tout le fonde l'esprit humain et se décline en mémoire comme imagination

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reproductrice, en fantaisie comme imagination créatrice et en entendement comme imaginationréglée).DEF de l'IMAGINATION qui en découle : « une sensation en voie de dégradation » (phantasme= apparition, tout ce qui apparaît à l'esprit comme collection d'idées) ; rien ne se fait parl'imagination, tout se fait dans l'imagination ; l'idée est dans l'imagination non pas au sens oùl'imagination serait une faculté de produire des idées mais la production de l'idée parl'imagination n'est qu'une reproduction de l'impression dans l'imagination. C'est lemouvement des idées, l'ensemble de leurs actions et réactions à la fois lieu et lien des idées (qui sefait souvent au hasard). La constance et l'uniformité viennent seulement de la manière dont les idéessont associées dans l'imagination selon différents principes d'association. L'idée générale ne peutêtre représentée que dans l'imagination sous la forme d'une idée particulière. L'imagination n'est pas une faculté mais un lieu, celui des idées, le fond de l'esprit :l'imagination est la collection des images des impressions càd l'esprit ; identification entre leconcevable et l'imaginable nous n'avons “d'autre choix qu'entre une raison fausse et pas de raisondu tout” ; l'ensemble des idées simples constitue la mémoire, un espace progressivement engendrépar les expériences et notre histoire ; leur libre mouvement constitue la fantaisie ; leur associationselon des règles, des régularités : l'entendement. Théorie de l'imagination qui substitue “à unepsychologie de l'esprit une psychologie des affections de l'esprit” DELEUZE.La passion s'étend parce qu'elle se réfléchit ; la passion se réfléchit dans l'imagination. Elle setrouve devant une reproduction d'elle-même élargie et s'ouvre sur un monde artificiel où elle peut sedéployer sans limites. L'imagination acquiert, en se peuplant de passions et de leurs objets, « toutun jeu de passions qui lui appartiennent ». Dans la réflexion (à prendre au sens de miroirréfléchissant et non d'intuition intellectuelle du moi par lui-même), la passion s'imagine etl'imagination se passionne. C'est donc l'imagination qui rend possible une réflexion de laraison. Elle réfléchit l'affection qui retentit ensuite dans l'esprit. La passion ne se réfléchit pasdans l'imagination sans que l'imagination n'étende la passion en retour. « Le pouvoir de l'imagination, c'est d'imaginer le pouvoir » DELEUZE. La passion trace des figures constantes et déterminées dans l'imagination grâce à des règles.Ainsi la passion ne fixe pas l'imagination de la même façon que les modes d'association : ceux cidonnaient aux idées des relations réciproques possibles, alors que les passions donnent un sens, unedirection, une réalité à ces relations (en les faisant correspondre à un cas ou une image particulière).L'imagination suit le penchant que la passion lui donne, le possible devient réel grâce à elle. Mais iln'y a pas que cette effet simple de la passion sur l'imagination : elle est ce par quoi la passion seréfléchit, se regarde, se contemple à travers des images et des principes d'associations qui vont lafaire grandir, aller au-delà du réel, se refléter indéfiniment.

D'où l'image de l'instrument à cordes p. 58-59 pour l'esprit humain par opposition à uninstrument à vent : image qui confirme la conjonction esprit/corps mais aussi le fait que le corpsn'est pas une machine corrélat du fait que l'esprit n'est pas un pur esprit immatériel (on sort dudualisme cartésien) ; les impressions de réflexion sont autant de vibrations entraînant la propagationd'une onde au-delà du choc initial alors que le son s'évanouit dès qu'on cesse de souffler dans l'autrecas. Les passions peuvent subir un emballement du fait d'une simple pensée car l'entendement oul'imagination est plus “leste”, fonctionne sur un temps court (les idées-images naissent etdisparaissent instantanément) alors que les passions ont une temporalité lente et diffuse, selon unmouvement perpétuel qui rend parfois difficile de les distinguer entre elles ; elles s'inscrivent dansune histoire et un devenir ; tout comme la durée bergsonienne, elles s'imbriquent même les unesdans les autres, une nouvelle pouvant commençer tandis qu'une autre continue de se prolonger. Cequi intéresse Hume, c'est la dynamique passionnelle càd leur influence réciproque et leursrelations, les modalités de ce mélange et les lignes de passages.

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& 4 = Si les chances sont également probables, alors la passion est d'autant plus forte.Expérimentations de système de variations comme sur un curseur ou un bouton pourdistinguer l'essentiel du contingent (cf traité d'optique de Newton) ; en augmentant le chagrin, onpenche vers la la crainte ; en diminuant le chagrin on augmente l'espoir. Conflit entre 2 passionscontraires qui se synthétisent en une troisième car “l'existence et l'inexistence sont des objetsincompatibles entre eux” TNH p. 293.

& 5 = Deux sortes de probabilités : si le probable est la part d'imprévisibilité, il peut être dû soit àun hasard absolu (ignorance totale des causes qui déterminent un événement dûe à la complexité etl'infinité des causes) soit à un hasard relatif (dû à notre ignorance ou au manque de moyenstechniques donc réductible au fur et à mesure que la science progresse). Il distingue ainsi uneprobabilité objective, liée à la nature de l'objet en lui-même (même si “la chance n'est rien de réelen soi” cad que la probabilité n'existe pas en soi, c'est toujours le résultat d'un rapport de l'hommeau monde) / d'une probabilité subjective, liée à notre jugement ou notre ignorance.

& 6 = Mais l'espoir et la crainte peuvent apparaître dans des cas où il n'y a pas seulement probabilité(ce qui a plus de chance d'arriver que de ne pas arriver) mais da,s le cas où le mal ou le bien estseulement possible càd qui peut aussi se produire que ne pas se produire càd que rien ne faitpencher vers le réel ou l'impssible ; surtout si le mal est grand : même si le risque est faible, ledanger couru (torture future) compense la faiblesse dela probabilité. Ainsi le bonheur et le malheurne sont pas seulement liées à des situations réelles mais virtuelles donc cela accroit la dimensionpsychologique et imaginaire (illusoire ?) du sentiment de bonheur ; possibilité d'inversionaffective ( ex :la joie d'un autre provoque ma tristesse) donc relativité du bonheur ou du malheurselon le point de vue d'où l'on se place. On peut avoir l'impression de la possibilité du bonheur ou du malheur et cela constitue déjà unbonheur ou un malheur que de croire pouvoir l'être. Même si il est impossible que le malheur arrive,l'imagination invente une réalité où il pourrait arriver. Ex = peur du précipice p. 60-61CF Pascal / Montaigne : le philosophe face au précipice. Cf phobies comme peur irrationnelleprovoquant un état de panique alors que ce n'est dû qu'à un effet de résonnance subjective“Le plus grand philosophe du monde, sur une planche plus large qu'il ne faut, s'il y a au-dessous unprécipice, quoique sa raison le convainque de sa sûreté, son imagination prévaudra” Pensées « Qu'on loge un philosophe dans une cage de menus filets de fer clairsemés, qui soit suspendue auhaut des tours de Notre-Dame de Paris, il verra par raison évidente qu'il est impossible qu'il entombe, et si (1), ne se saurait garder (s'il n'ai accoutumé le métier des recouvreurs (2)) que la vuede cette hauteur extrême ne l'épouvante et ne le transisse. Car nous avons assez à faire de nousassurer aux galeries (3) qui sont en nos clochers, si elles sont façonnées à jour (4) encore qu'ellessoient de pierre. Il y en a qui n'en peuvent pas seulement porter la pensée. Qu'on jette une poutreentre ces deux tours, d'une grosseur telle qu'il nous la faut à nous promener (5) dessus: il n'y asagesse philosophique de si grande fermeté qui puisse nous donner courage d'y marcher commenous ferions, si elle était à terre. J'ai souvent essayé cela en nos montagne de deçà (6) (et si suis deceux qui ne s'effrayent que médiocrement de telles choses) que je ne pouvais souffrir la vue de cetteprofondeur infinie sans horreur et tremblements de jarrets et de cuisses, encore qu'il s'en fallût bienma longueur que ne fusse du tout au bord, et n'eusse sur choir(7) si je ne me fusse porté à escientau danger “ Essais

DONC = La puissance de l'imagination se manifeste dans la naissance et le développement detoutes les passions provoquant une “espèce de croyance” qui peut s'exercer dans un sens (peurpanique) ou l'autre (calme retrouvé). C'est en cela que le désir ou l'aversion se distinguent de lavolonté : ils naissent de la simple considération d'un bien ou d'un mal alors que la volonté est liée àune action.

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Ce qui vaut pour des maux incertains vaut a fortiori pour de maux certains (prisonnier enfermé sansjamais pouvoir sortir) : l'homme subit la torture de la claustration et est hanté par l'image de sapropre situation comme pour se protéger par cette image interposée de la situation réelle qui est lasienne alors que cette extériorisation produit l'effet contraire. p. 61

Cf schema 7 exemple de passion DIRECTE, la crainte. Puisque nos connaissances ont lieu grâceà l’uniformité (relative) des phénomènes et des règles générales à l’œuvre derrière eux, nous nepouvons qu’être surpris lorsque survient un phénomène inhabituel. Cette surprise, en proportion dela différence qu’elle présente avec ce à quoi nous sommes habitués, suscite en nous de la curiosité.Or, toujours en proportion, cette curiosité est une passion violente et soudaine. Laquelle violencenous effraie et, par la transmission des forces qui s’effectue d’une passion à une autre, se transformeen crainte. A partir de ce moment-là, nous pouvons remarquer deux choses : d’abord, que la craintedoit avoir un objet, qu’elle ne peut pas être crainte d’on ne sait quoi (sinon, ce n’est plus de lacrainte, mais de l’angoisse), ensuite que l’imagination tend à associer ces deux phénomènesconcomitants (la surprise et la crainte) et à identifier l’un comme cause de l’autre. Nous identifionsalors la passion à la perception, identifions la crainte à l’objet surprenant, et c’est pourquoi nousavons peur des surprises. C'est le contraire de l'habitude et cela provoque comme une “commotiondans l'esprit” TNH p. 297 car on n'y est jamais vraiment préparés (comme bruit d'une explosion).

& 7 = la crainte ou l'espoir ne dépendent pas seulement de l'existence probable ou possible d'unechose mais du genre de chose qui peut se produire. L'incertitude sur la personne décédée ne devientchagrin qu'une fois la certitude apparue : “c'est un mal certain dont l'espèce est incertaine” (TNH p.297); Dans ce cas le “mouvement vibratoire qui ressemble à un mélange conflictuel” hésite entre lesdeux personnes jusqu'à se fixer sur l'une d'entre elles et c'est alors que la crainte se meut en chagrin.

&8 = si toute passion d'espoir et de crainte relève de l'incertitude, toute incertitude ne produit pas detelle passion de même que toute sensation ne produisait pas de passion. Condition nécessaire maispas suffisante. De même une incertitude peut provoquer de la crainte même si il n'y a pasbalancement avec l'espoir ni contradiction des passions entre elles ; je peux n'éprouver que de lacrainte face à la maladie certaine d'un ami si je le quitte un soir et craint de ne pas le revoir lelendemain. L'incertitude sur son état se suffit à elle-même pour provoquer la crainte. Au final“n'importe quel doute produit cette passion” TNH p. 299. Il existe d'autres passions directes quisont des variations sur le thème de l'espoir et de la crainte : étonnement, consternation, anxiété etc.

&9 Si le passions naissent d'objets différents sans liens les uns avec les autres, les passions sesuccèdent sans influer les unes sur les autres : elles peuvent se substituer les unes aux autres si ellessont contraires et ont des objets différents. Ex : perte d'un procès et naissance d'un fils n'ont aucunrapport donc l'une ne peut compenser ou tempérer l'autre. cf divertissement pascalien : “D’où vientque cet homme qui a perdu son fils unique depuis peu de mois et qui est accablé de procès, dequerelles et de tant d’affaires importantes qui le rendaient tantôt si chagrin n’y pense plus àprésent ?” Dans ce cas sont comme deux liqueurs différentes dans deux bouteilles différentes.

Les passions peuvent aussi se neutraliser jusqu'à un calme état d'indifférence à propos d'unévénement mixte. L'esprit atteint plus facilement le calme et la tempérance si il s'agit du mêmeévénement qui possède une ambivalence car alors les deux passions se détruisent. Elles peuvent secontredire entre elles comme se renforcer les unes les autres. Propriété de neutralisation des acideset des bases. Avantage et inconvénient d'une même situation par ex.cf la métaphore de l’alcali et de l’acide (apres l'optique, la chimie): image de fluides et demélanges propices à symboliser les processus dynamiques passionnels, d'autant que le moi lui-

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même est un flux : « Si les objets des passions contraires sont totalement différents, les passionssont comme deux liqueurs opposées dans des bouteilles différentes qui n’ont aucune influence l’unesur l’autre. Si les objets sont en connexion intime, les passions sont comme un alcali et un acidequi, mélangés, se détruisent. Si la relation est plus imparfaite et consiste en des vuescontradictoires du même objet, les passions sont comme de l’huile et du vinaigre qui, mêmemélangés, ne s’unissent et ne s’incorporent jamais parfaitement. » p. 62.

En résumé = se suivent si objets différents (2 liqueurs différentes) ; se détruisent si partiesdifférentes d'un même objet (alcali et acide) ; se mêlent si dérivent de chances contraires etincompatibles (espoir et crainte comme huile et vinaigre). Soit se suivent, soit se détruisent l'unl'autre, soit se mélangent sans jamais s'unifier.

TR / Première loi de la nature humaine apparait déjà : les passions se définissent par l'influencequ'elles subissent à la fois des sensations éprouvées mais aussi de la diversité des images ou idéesproduites par l'imagination et des relations d'idées. Les passions directes ne mettent pas en jeu unemécanique sociale même si elles sont prises dans un tissu social : “nous ne pouvons former aucunsouhait qui ne fasse référence à la société (…) tout plaisir devient languissant quand on en jouit horsde toute compagnie” (TNH II, II, 5, p. 201). Avec les passion directes, c'était la dimension pratiquedes passions qui était approchée : elles n'avaient pas pour objet les autres hommes, mais des objetsplaisants ou pénibles. Avec les passions indirectes apparaît la dimension sociale des passions.

SECTION II A IV / LES PASSIONS INDIRECTES = amour, haine, orgueil, humilité =

CF SCHEMA 6 ET 7

SECTION II &1 à 3 = les passions indirectes et les principes de leur analyse ou la fabrique despassions =cherchent aussi des biens ou refusent des maux mais dlm où nous les percevons ennous-mêmes ou chez autrui.

&1De même que les passions directes n'étaient pas décrites par les propriétés internes des plaisirs ousouffrances qui les occasionnent mais par le rapport de l'esprit à ces plaisirs selon qu'ils sontvécus comme présents ou probables, de même les passions indirectes ne donnent pas lieu à unedescription des sensations engendrées mais sont éclairées par une réflexion sur les objets quiprocurent ces sensations. Elles se développent sur la base des (dé)plaisirs que notre propre moi oula personne d'autrui nous font éprouver mais leur complexité est liée à la diversité des pesrpectiveset des circonstances qui les produisent. Le pbl de la double dimension à la fois primitive et réflexiveest passions se pose à nouveau avec plus d'acuité : comment soutenir le caractère primitif despassions alors qu'elles sont définies comme impressions réfléchies ?Indirect ne signifie pas qui passe par la médiation de jugements ou d'un mécanisme mental ou àcause d'un objet absent car c'était déjà le cas des passions directes ; cela veut dire = les sensationsqui les causent nous affectent en tant qu'elles proviennent de moi ou d'un autre : c'est la médiationdu rapport à soi ou aux autres. Les principales passions indirectes sont l'orgueil (satisfaction ou complaisance de soi) et l'humilité(mécontentement de soi) : elles concernent l'image de soi, l'amour et la haine (idem pour autrui).L'avantage est qu'elles dévoilent la structure passionnelle : elles sont paradigmatiques de tous lesétats passionnels. Elles requièrent une cause extérieure. Même si l'orgueil a pour objet le moi, ilne peut s'éveiller que indirectement par le détour d'objets qui sont liés au moi mais qui ne sont pas

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le moi ; la considération nue du moi ne suffit pas pour le déclencher. La différence essentielle avecles passions directes est donc qu'elles sont directement et fondamentalement sociales. Elles sont lerésultats du concours pluriel de plusieurs facteurs et causes qui leurs sont extérieurs. Onconsidère un objet intermédiaire dont l'idée se convertir en impression : le moi (pour orgueil ethumilité) ou autrui (amour et haine). Les passions indirectes sont des passions dérivées despassions directes. Elles proviennent d’un mélange de ces passions simples et de diversescirconstances extérieures. Par exemple, la joie peut provenir à la fois de l’orgueil, de l’amour etd’un sentiment de force, tandis que le sentiment de sécurité peut comporter aussi bien de l’orgueilque de l’humilité (deux passions qui s’opposent).

ORGUEIL (pride = fierté plus neutre en fr, superbia en lat, orgueil + péjoratif en fr) = « unecertaine satisfaction que nous ressentons en nous-même pour quelque perfection ou possessiondont nous jouissons » = # choix tactique car critiqué comme péché capital par l'Eglise càd péché entraînant tous les autres(depuis la somme théorlogique de Thomas d'aquin au XIIIème or Hume veut sortir du cadrereligieux et théologique) ou comme vice. Mais évolue au XVIIème car considéré commerevendication d'honneur, recherche de gloire (symbolisé par Titus chez Racine qui préfère la gloirede l'empereur à l'amour de Bérénice, préfet cruel et libertin qui se change en empereur vertueux à lamort de son père Vespasien, comme métamorphosé par sa fonction ; diem perdidi = j'ai perdu majournée si je n'ai pas accompli un bien ; il meurt de la peste en disant « je n'ai commis qu'une seuleerreur » sans qu'on sache laquelle …) cf Molière Les Précieuses ridicules tournent en dérisionl'orgueil de ceux qui veulent briller dans les salons par le beau langage et les belles manières.Chez Pascal l'orgueil est toujours une fierté mal placée ne découlant pas d'une juste appréciation desa valeur propre. L'orgueil n'est que vanité, souci de l'apparence et non de la réalité. Mauvaisepassion qui détourne les hommes de la vérité et du Bien, donc de Dieu. Cf Pensées 139, 148, 150,152, 153. Vanité = au sens latin du terme (vanitas), désigne le vide d’un être dont les prétentionsdépassent les capacités effectives tellement qu’il en devient digne de risée. Le terme vanitéreprésente ainsi l’expression comique, voire burlesque, de la notion, plus dramatique, de néant. Cen’est pas seulement parce qu’une chose ou une conduite manque de fondement qu’elle est vaine,c’est aussi parce que cette absence de raison fait qu’elle n’est littéralement rien. Le thème de lavanité de l’homme annonce et prépare ainsi celui du néant de l’homme, qui réapparaît dans lesPensées à un stade postérieur de l’argumentation. Cette vanité, conçue comme absence de raison, dejustification et plus généralement de fondement, permet de susciter le rire, parce qu’elle révèle dansles conduites humaines des disproportions entre ce que l’on a coutume de penser et ce que la réalitérévèle. Est vain ce qui manque de fondement ou de cause solide, par exemple le respect que l’onaccorde aux grands de naissance, alors que leur valeur humaine ne mérite pas toujours un excèsd’honneur. Ridicules aussi les raisons qui nous font estimer les Grands : « La coutume de voir lesrois accompagnés de gardes, de tambours, d’officiers et de toutes les choses qui ploient la machinevers le respect et la terreur font que leur visage, quand il est quelquefois seul et sans sesaccompagnements, imprime dans leurs sujets le respect et la terreur parce qu’on ne sépare pointdans la pensée leur personne d’avec leur suite qu’on y voit d’ordinaire. Et le monde qui ne sait pasque cet effet vient de cette coutume croit qu’il vient d’une force naturelle ». + autre texteCritique se poursuit avec Rousseau qui définit l'orgueil comme amour-propre, né de la vie ensociété, à ne pas confondre avec l'amour de soi (instinct de survie, de conservation, “sentimentnaturel qui porte tout animal à veiller à sa propre conservation”) propre à l'homme naturel. Sepréférer soi-même aux autres ou vouloir être préféré par eux constitue la racine de tous les mauxhumains : “sentiment relatif, factice et né dans la société qui porte chaque individu à faire plus decas de soi que de tout autre, qui inspire aux hommes tous les maux qu'ils se font mutuellement”.

# Le fait de s'apprécier soi-même est pour Hume moralement neutre et un moteur capital des

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actions humaines car peut être utile pour reconnaître nos propres qualités et devenir vertueux ennous rendant conscient de nos mérites et en provoquant l'approbation d'autrui : “il n y' pas dequalité de l'esprit plus indispensablement requise pour procurer l'estime et l'approbation deshommes” (TNH III). Comme pour Aristote : on ne peut définir les vices par leur objet, être contentde soi n'est ni bon ni mauvais, c'est l'être trop ou pas assez qui est mauvais, EN IV, 6, 1125a : « lemagnanime s'estime à son juste mérite alors que les autres pèchent par excès ou défaut » ; seulessont mauvaises la vanité, placer son mérite trop haut et la pusillanimité, avoir une opinion troppetite de soi-même ; savoir de quoi on est digne ou non est une juste mesure, un juste milieunommée magnanimité et cela seul est vertueux. Contre la morale chrétienne, à choisir entre les 2,Hume choisit l'orgueil car il ne peut y avoir de vertu pour celui qui se méprise lui-même : “l'orgueilet la haine fortifient l'âme tandis que l'amour et l'humilité l'affaiblissent” TNH p. 233. L'orgueilleuxest plus utile à lui-même et aux autres car il procure l'estime des autres “il serait plus avantageux desurestimer notre mérite que de nous en fair une idée inférieure à notre juste valeur”. TNH III p.723. “Quoi de plus utile que toutes les passions de l'esprit, l'ambition, la vanité, l'alour, la colère ?Mais que de fois elles rompent leurs digues et causent les plus grandes convulsions dans lasociété !” (Dialogues sur la religion naturelle)Mais on préfère l'humilité à l'orgueil chez les autres car cela permet de conserver une meilleurestime de soi (note ironique du livre III du TNH). D'ailleurs on ne peut pas s'enorgueillir de l'élogede qqun qu'on méprise car on ne peut pas entrer en sympathie avec son esprit et revenir de lui à soipour causer l'orgueil.# choix non anodin car en rapport avec la critique du moi fictif, sa fausse conception substantialistechez Descartes. Les causes multiples d'orgueil souligneront la subjectivité du moi. # ne revient pas pour autant à une morale de l'intérêt ou de l'amour-propre comme celles de deHobbes (“désir d'acquérir pouvoir sur pouvoir” comme moteur du genre humain) ou LaRochefoucault car sera tempérée par la sympathie naturelle entre les hommes. Hume veut montrerque l'orgueil lui-même n'est intelligible que sur fond d'une sympathie première, dont il se détache.Hume détruit la doctrine de l'égoïsme en montrant qu'on ne peut ressentir le plaisir de la renomméeque si l'on participe de l'esprit des autres . De plus, la docrine de l'égoïsme est incohérente car sil'orgueil provenait du seul fait d'avoir un moi, alors tout le monde serait orgueilleux, on seraittoujours satisfait de soi “l'orgueil serait perpétuel s'il provenait immédiatement de la nature” TNHp. 114 ; il faut donc autre chose. Donc chercher les autres causes de l'orgueil implique de ne leenvisager que comme des manières d'être de la nature humaine et non comme des vices.Chez LRF (moraliste du XVIIème) il y a un pessimisme moral qui considère que l'orgueil est lapassion dont dérivent tous les sentiments moraux, ce qui nous incite toujours à privilégier notreintérêt à celui des autres : “Nos vertus ne sont, le plus souvent, que des vices déguisés » ; d'où lacondamnation des passions, présente également chez ceux qui les condamnent, nul n'y échappe : “Sinous n'avions point d'orgueil, nous ne nous plaindrions pas de celui des autres”.alors que pour Hume le plaisir qu'on ressent face à une conduite noble est indépendant du plaisirqui renforce l'orgueil. Il liquide toutes ces thèses, toutes les philosophies morales précédentes d'unseul geste car cela dépend “plus de l'invention que de l'expérience”. (Abrégé 6, 37)# “amour de soi” expression inadéquate pour Hume ; on ne peut pas s'aimer soi-même “au senspropre”donc la complaisance à soi n'est pas de l'amour, dédié à autrui, ce n'est pas la mêmesensation que “cette émotion tendre qu'éveillent un ami ou une femme aimée” (TNH II).DONC = il n'y a pas de passion du pouvoir chez Hume, car le pouvoir n'est qu'une des causes del'orgueil, comme occasion de se distinguer ; c'est par orgueil que les hommes aiment le pouvoir, ladomination, qui n'est que le moyen d'une autre passion et non une fin en soi. # Hobbes

&2 Distinction objet /causeL'objet des passions indirectes (“ce vers quoi l'esprit dirige sa vue”, objet simple et unique) ne doitpas être confondu avec la cause de ces passions (ce qui chez moi ou l'autre cause la passion, “ce qui

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suscite l'émotion”, la qualité agréable ou déplaisante possédée par le moi ou l'autre par ex le mériteou le démérite, la laideur ou la beauté, causes tres nombreuse et variables d'où la nécessité dedécrire le circonstances). Par qualité, Hume entend certaines propriétés, telle que la beauté,susceptibles de produire en nous des impressions26. Par sujet, Hume entend l'objet (chose, êtrevivant) porteur de ces qualités26. Par objet de la passion, Hume entend l'objet auquel la passion estrapportée26. Par exemple, analysant la passion de l'orgueil, Hume discerne les conditionssuivantes : un certain sujet doit produire en nous un sentiment agréable par quelqu'une de sespropriétés ; ce sujet doit nous être relié de quelque manière, en sorte qu'il se produit une transitionentre le sentiment de la qualité et notre moi. Ce moi, en tant qu'il est ainsi relié à une qualité, estalors l'objet propre de la passion de l'orgueil. Ainsi, la propriété d'un bien digne d'éloge est pour sonpropriétaire un sujet d'orgueil.OBJET / CAUSE : identification des passions indirectes par leurs objets / explication par leurscauses.OBJET = variable selon les passions (celle du jeu, du pouvoir ou celle de l'amour) mais il fautdiscerner le dénominateur commun à toutes malgré leur diversité. Quel que soit l'affect, on cherchetoujours à travers les passions l'objet qui nous fait du bien. L'objet des passions indirectes est« ce vers quoi l'esprit dirige sa vue » (objet passionnel et subjectif, créé par le sujet lui-même, c'estla passion elle-même qui le vise et le constitue). CAUSE = qualités ou défauts qui produisent nos émotions ; elles sont reliées à l'objet de la passion(c'est le mérite de cet ami ou la beauté de cette femme), c'estla « cause efficiente » qui explique sonapparition et sa persistance. Passions indirectes si plus complexes, ayant une cause qui les suscite à cause de telle qualitérésidant en elle, et un objet visé et constitué par la passion elle-même : “voici donc une passionsituée entre 2 idées : l'une qui la produit, l'autre qu'elle produit. La 1ère représente la cause, laseconde, l'objet de la passion”, la passion indirecte se caractérisant par l'association des idées de lacause déclencheuse et de l'objet passionnel, doublée d'une association des impressions de la cause etde la passion comme le plaisir de la beauté et le plaisir de l'orgueil. Il y a alors une « double impulsion » imprimée à l'esprit : deux formes d'association donnentnaissance aux passions indirectes : celle des idées et celle des affections : ma belle maison produitde l'orgueil car l'habitude a produit une association entre les 2 idées que je me fais de ma maison etde mon propre moi ; de plus, le spectacle de cette maison provoque du plaisir, que j'associe auplaisir provoqué par l'orgueil lui-même. Toutes associations sont indissociables les unes des autreset il y a interaction entre elles. Le carré des passions indirectes (TNH p. 167) : Cf Schema 5. Du côté gauche du carré, nousavons le couple orgueil/humilité. Du côté droit, le couple amour/haine. Le premier couples’intéresse au moi, le second à autrui. Ces couples sont en réalité deux extrêmes sur une mêmeéchelle : un orgueil faible est plus proche de l’humilité qu’un orgueil fort, et il peut éventuellementbasculer (si la passion change en degré) dans l’humilité.Si les deux couples de passions sont parallèles et ne se recoupent pas, ce qui unit les deux couplesest que l’orgueil et l’amour sont des passions agréables, tandis que l’humilité et la haine sont despassions désagréables.

PBL = si les passions indirectes sont déclenchées par des qualités physique et morales qu'on trouveen soi ou chez autrui (il se concentrera sur ces sources aux &6-7), comment expliquer qu'on puisses'enorgueillir d'objets extérieurs (son pays, qui n'est pas beau en soi) ou aimer qqun pour sesrichesses, qui ne sont pas des qualités intrinsèques ? “Notre vanité se fonde tout autant sur desmaisons, des jardins etc” TNH II, I , 9. Les passions indirectes peuvent être déclenchées par d'autresobjets que l'objet primitif (le moi ou autrui) : la théorie des lois des passions a pour but de résoudrecette difficulté. Hume met en évidence les “causes efficientes” càd les circonstances dans lesquellesémergent ces passions (vocabulaire emprunté à théorie des 4 causes d'Aristote = mouvementnécessaire pour que l'objet soit ce qu'il est). L'orgueil ne se fixe pas que sur des objets dans

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lesquels le moi se réfléchit : il est produit par des qualités déterminées d'objets déterminés.

&3Le principe (négligé par les philosophes) des passions indirectes est la conjonction de deuxformes d'associations : l'association des idées “principe par lequel nous passions par unetransition facile d'une idée à une autre” p.64 et l'association des affections “l'une n'a pasplutôt surgi que les autres suivent naturellement” p. 65.3 propriétés remarquables = 1) comme notre esprit ne peut se fixer sur une idée bien longtemps, les idées se relient entre ellesdonc les idées se succèdent entre elles autant que les passions cf rappel des 3 types d'association parressemblance, contiguité, causalité p. 64 : “elles passent ordinairement avec régularité d'un objet àce qui lui ressemble, à ce qui lui est contigu ou à ce qu'il produit”. Contrairement aux affirmationshabituelles, il n'y a rien d'arbitraire dans les associations produites par l'imagination. Versantcognitif des passions indirectes.2) contrairement aux idées, les passions, en tant qu'impressions de réflexion, ne se suivent que parressemblance : “toute les impressions qui se ressemblent sont reliées entre elles” p. 65 ; d'où descycles passionnels où une émotion en entraîne une autre, liant le chagrin (échec au concours) et lacolère (contre les corrrecteurs), la colère à l'envie (jalousie du voisin qui a réussi), l'envie à lamalveillance (envie de saboter sa voiture), laquelle provoquera à nouveau du chagrin (l'amende àpayer) etc. La proximité qualitative des émotions leur permet de se produire entre elles. Versantaffectif des passions indirectes.3) Quand il s'agit du même objet, dans certaines passions, l'association des idées “corrobore”l'association des passions entre elles, les idées vont alimenter les impressions (idée ou plaisir decrever ses pneus ou trafiquer ses freins, passions inquiètes liées à la peur d'être surpris, arrêté etc ) :“en unissant leur action, ils confèrent à l'esprit une double impulsion” p. 65. Utilise alors la règle dedouble association : loi fondamentale de transformation des passions de leur naissance à leur mort ;elles ne sont pas innées mais acquises par association d'idées et d'impressions (inspirée de la loid'attraction newtonienne car selon H les matériaux psychologiques et physiques relèvent desmêmes lois, ce qui présuppose un principe d'inertie des idées et des impressions).Règle de la double association = les passions indirectes associent les idées de leur cause et de leurobjet avec les impressions agréables ou désagréables de la cause et de la passion elle-même. Un mécanisme de connexion s'établit entre une qualité/ un défaut/ une circonstance et le moi,donc entre cause et objet.Surcroît de plaisir ou de souffrance, “prime de beauté” apportée par les idées ou les images que jeconvoque en pensée ou par les sensations ressenties ; idées et impressions, plus que jamais encontinuité les unes avec les autres, s'apportent “une assistance mutuelle” p. 66. Ex = beauté d'unpaysage associant les 5 sens / “tout comme les différentes couleurs d'une peinture, quand elles sontbien diposées, servent de faire valoir les unes aux autres” : les mélanges diversifient les possibilitésde plaisirs.DONC = Cela produit une potentialisation réciproque au sens où les produits de l'imagination-entendement suscitent des émotions qui à leur tour provoquent l'activité de l'imagination.“Corroborer” signifie à la fois cet effet de confirmation et de renforcement. On pourrait s'étonner que Hume expose d'abord ses principes et ensuite les cas auxquel on peut lesappliquer mais il ne faut pas oublier les éxigences d'une dissertation brève et efficace et le fait qu'ilssont aussitôt suivis d'exemples. Il s'agit désormais de vérifier le principe de double relation.cf théorie des 4 causes d'Aristote = l'orgueil a une matière dont il est constitué (son objet le moi etles impressions agréables provoquées par mes qualités), une forme (impression simple, originale etindécomposable qui le distingue des autres passions), une finalité (utilité à soi et aux autres pourl'estime) et des causes efficientes, causes productrices des mouvements affectifs (loi d'associationdes idées + des émotions) .

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SECTION II & 4 à 9 = l'orgueil et l'humilité peuvent être expliqués par le principe de doubleassociation ou double relation

&4L'association des idées et ses effets théoriques sur l'orgueil et l'humilité : on n'est jamais fiertout court, mais toujours fier de qqchose : comment et pourquoi va-t-on relier à soi-même ou àautrui certains attributs ? Toutes les causes qui produisent l'orgueil sont reliées à moi par contiguïté ou causalité(ressemblance inutile pour faire ressortir ma supériorité). Je ne suis fier de mon pays que parceque je me le représente comme indissociable de moi, lié à ce que je sui, je m'identifie à lui. L'orgueilest causé par une connexion entre le moi-objet et la cause, ce qui lui appartient et qui nourrit cettepassion (l'idée-image que je me fais de moi et celle de mes qualités) : “tout ce qui nous enorgueillitdoit, d'une façon ou d'une autre, nous appartenir” p. 66. D'où le fait que les qualités personelles ouexternes provoquent directement du plaisir ; la vanité si elles sont connectés avec l'idée plaisantequ'on se fait de soi et les objets qui sont reliés au moi.

&5 L'association des affections et ses effets théoriques sur l'orgueil et l'humilité....mais aussi par les impressions agréables, le plaisir procurés par l'objet du moi ou les qualités qu'ilpossède. La relation nécessaire entre les idées de la cause et le moi ne suffisent pas : il faut qu'ellepossède une qualité ou un défaut, qualités qu'ils possèdent intrinsèquement de donner du plaisir pareux-mêmes. Le sentiment d'orgueil est agréable en soi : l'orgueil est un sentiment dont toutel'essence réside dans le plaisir éprouvé. cf plaisir narcissique (vive le selfie). L'impression de l'objetqui cause l'orgueil est agréable, tout comme l'impression de l'orgueil lui-même : les impressionssont semblables ; de même lo'bjet de la passion est relié au moi et l'objet de la passion est le moidonc ces deux objets se ressemblent aussi. Il y a donc deux relations de ressemblance entre lescauses de l'orgueil et l'orgueil : une relation d'impressions et une relation d'idées. Résumé : “tout cequi procure une sensation plaisante et se trouve relié au moi suscite la passion de l'orgueil, qui estagréable elle aussi et a le moi pour objet” TNH II, 1, 5 p. 114

Cf schema 6 La double relation est une interaction entre des idées (déjà présentes dans l’esprit) etdes impressions nouvelles, qui causent des passions : exemple de passion directe avec l'orgueil.Imaginons que je regarde une Ferrari dans la rue. Cette Ferrari me paraît belle par elle-même : en laregardant, j’éprouve une impression de plaisir liée au fait que je la trouve belle. Il n’y a aucunerelation entre la voiture et moi, donc aucune relation d’orgueil ou d’humilité qui y est liée. Iln’empêche que sa beauté existe dans mon esprit et suscite chez moi du plaisir.A présent, imaginons que cette Ferrari ne soit pas une voiture vue par hasard dans la rue, mais mavoiture. Elle m’est liée par une relation de propriété (qui ne change rien à l’objet lui-même, maisexiste dans l’esprit). Cette relation me relie à la voiture. Le sentiment de beau s’associe à l’idée del’objet, elle-même associée à l’idée du moi. La beauté de l’objet, la valeur que lui attribuent lesautres, tout cela flatte mon orgueil par une double relation entre l’idée du beau et l’idée de l’objet.

Dans le schéma, la double relation vaut pour l’orgueil, mais elle vaut aussi pour toutes les autrespassions.Si la Ferrari n’est pas à moi et que je vois quelqu’un s’installer au volant (quelqu’un dontje suppose qu’il en est le propriétaire), il y a deux possibilités : soit le plaisir esthétique se

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communique à l’idée que je me fais du propriétaire de la Ferrari, et j’éprouve à son égard unesympathie proportionnelle à ce plaisir ; soit je ressens plutôt de la jalousie à son égard, auquel cas jeraisonne par comparaison, et le plaisir s’inverse pour se transformer en déplaisir. D’après Hume,c’est l’estime ou la sympathie qui sont les plus courantes dans ce genre de cas (Traité, II, II, V).

La double relation s’exerce de manière intrapersonnelle (c’est-à-dire au sein de l’esprit d’unindividu) et interpersonnelle (c’est-à-dire entre deux ou plusieurs individus).

DONC = Cette analyse de l'orgueil, et de son contraire, l'humilité, permet à Hume de montrer lemécanisme de transition qui se produit au sein d'une double relation : une première relation,d'impression, originellement indépendante de la passion ; une seconde relation, d'idée, par laquellela sensation est reliée à celui qui éprouve la passion. La sensation originelle est donc "transfusée"du sujet au moi. L'absence de l'une ou l'autre de ces relations empêche ou détruit la passion. Afin deconfirmer cette théorie de la double relation, Hume multiplie les expérimentations, c'est-à-dire qu'ilinvente des situations en faisant varier les éléments qui entrent en jeu. Ces expérimentations sontainsi des expériences de pensées qui doivent montrer la pertinence du système pour décrire lesmécanismes qui produisent ou empêchent la production d'une passion. La passion donne à l'imagination un penchant, alors que l'idée retient l'esprit. Donc la passiona besoin de l'association des idées mais inversement l'association suppose la passion (les idées'associent en fonction d'un but que seule la passion peut conférer à l'activité humaine, c'est parceque l'homme a des passions qu'il associe les idées de telle ou telle manière, selon tel intérêt, ex :gentillesse associée à bêtise dans le cas de la haine). Il y a donc une double implication / doublerelation de la passion et de l'association d'idées. Ce qui constitue le moi c'est la synthèse del'affection et de la réflexion « la synthèse d'une affection qui fixe l'imagination (la passion dicte àl'imagination ce qu'elle doit imaginer) et d'une imagination qui réfléchit l'affection (l'imaginationdécuple le pouvoir de la passion en lui ouvrant un monde artificiel, virtuel où tout est possible).L'imagination chez Hume selon Deleuze est à la fois « réfléchissante (elle calme les passions enles réfléchissant), essentiellement débordante (elle ouvre un monde possibles) et apparemmentconstituante (elle permet à la passion de se fixer sur des images) ».

& 6-9Confirmation des hypothèses précédentes par l'expérience&6 les qualités morales : peines et plaisir sont “la source primitive du blâme et de la louange” p. 67.On remarque que le plaisir et la douleur sont encore ici indissociables des distinctions morales(mérite et démerite) qui les causent : mérite et démérite causent directement plaisir ou souffrancedans cette morale du sentiment ; la vertu nous cause directement du plaisir et le vice du déplaisir.Tout du moins, s'il n'en sont pas la cause ils l'accompagnent cd que la vertu est en soi uneimpression de plaisir (ex de la fable). A partir du moment où on identifie le plaisir au bien, il ne peutpas être jugé comme mauvais, et si on identifie la souffrance au mal, elle ne peut pas être considéréecomme bonne : pas de distance critique ou morale face à eux. Constat de fait et non examen de cequi justifierait en droit d'opposer vice et vertu. Hume revendique le droit de philosopher surles passions indépendamment de toute considération morale. Cf TNH II, 1, sVII p. 122s.L'intérêt prend une place grandissante dans la DIP pour fonder la vertu.

Ex de l'esprit = l'humour indéfinissable (anglicisme sans traduction française), le trait d'esprit estune forme de plaisir du moi en société pluisqu'il est censé démontrer la finesse, la subtilité d'un êtreintelligent face aux autres: “il est moins sot qu'il en a l'air / c'est toute la différence entre nous !”répond le personnage principal de “Ridicule”. La vanité produit des débordements considérables en société (cf Crevel) mais aussi et surtout unmensonge aux autres / à soi-même puisqu'elle veut donner l'illusion d'être un autre, jusqu'à

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s'inventer des aventure ou une vie qu'on n'a pas eue, quitte à s'approprier celles des autres. p. 69.« nous mettrons toujours sous les yeux des autres les traits dont nous sommes les plus satisfaits »TNH p166.Le moi étend sa capture bien au-delà des biens qu'il possède et constitue son empire par le simplejeu des associations dont il est le centre organisateur. CF Pascal : « le moi est haïssable … il estinjuste … il se fait centre de tout ». Cf reprise au & 9 p. 73 : Hume ne cesse d'emboîter les sectionsles unes dans les autres, citant ici un aspect qu'il traitera plus tard. CF Vanités en peinture : La Vanité est un type particulier de nature morte, à implicationphilosophique, qui évoque à la fois la vie humaine et son caractère éphèmère. Si le thème est trèsancien, on le trouve déjà chez les antiques, il se constitue comme genre autonome vers 1620 àLeyde en Hollande, pour se répandre ensuite tout au long du XVIIe siècle en Europe,particulièrement en Flandes et en France. Prisées à l'époque baroque les vanités vont quasimentdisparaître au XVIIIe siècle, mais renaissent avec Cézanne, puis plusieurs peintres du XXe siècle.Les objets représentés symbolisent les activités humaines, étude, argent, plaisir, richesse, puissance, mises en regard d'éléments évoquant le temps qui passe trop vite, la fragilité, la destruction, et le triomphe de la Mort (avec souvent un crâne humain).

CF MONTAIGNE Les ambitions, les richesses, les affaires, les divertissements, les croyancespassagères, les présomptions de grandeur et de savoir, l’attachement aux biens du monde dontl’homme fait preuve chaque jour ne sont que vanité. Montaigne dans ses Essais « dénonce lesmultiples manifestations de l’orgueil humain » en offrant au lecteur une interprétation personnelledu thème de la vanité du monde, thème qui alimente son expression et sa pensée. Montaigne utilise« l’écriture comme voyage sans but et sans fin » pour décliner tous les sens possibles de la vanité àtravers les diverses activités humaines décrites. Mais la vanité dans les Essais, c’est aussi et surtoutle rapport à l' »excrément » c’est-à-dire, tout ce que produit le corps et est évacué par lui. Ainsi,« l’écriture est le produit de l’esprit comme l’excrément est le produit du corps ». De cette façon,l’auteur prend conscience de sa condition de vivant destiné à la mort comme le sont les prod uits deses réflexions qui suscite en lui tant d’orgueil et de suffisance. Ainsi, l’on remarque un jeu del’auteur avec le mot « bulle », « emblème du vide et de la fragilité humaine » dans les tableaux devanité.

&7 les qualités physiques = la beauté est définie dans le TNH comme “un ordre ou uneconstruction de parties ajustées pour procurer du plaisir ou une satisfaction de l'âme” (ex du palais)p. 126 ; beauté tout aussi indéfinissable que l'esprit. “une forme qui produit du plaisir” p. 127. Labeauté peut être associée à de nombreuses passions (amour, orgueil pour la beauté de notre visageou silhouette) mais elle n'est pas une propriété objective des choses qui déclencherait despassions chez les hommes de manière systématique ; la beauté n'est pas une qualité originelle ; elleest seulement le corrélat de certaine sensations agréables que l'on peut ressentir (ou pas), ellen'est qu'affaire de sentiment. Contre la théorie classique du beau comme perfection ou harmonieinterne aux choses, on ne peut pas en former de concept général et abstrait ; il y a autant de beautésque de ressentis. Relativisme esthétique. Délogée du monde objectif, la beauté gagne le mondeintérieur et subjectif des passions. Problème du goût = Règle du goût : tous les hommes n'ont pas les mêmes dispositions pouréprouver le charme de l'art ou l'éventail des passions. Analyse à la limite entre esthétique etphilosophie morale : la délicatesse du goût peut être éduquée par la fréquentation des oeuvres etpermet d'appaiser les passions violentes donc engendre des passions calmes comme la raison. Cf Essais esthétiques : “Rien n'améliore autant le caractère que l'étude des beautés”.Ex : la tragédie : met en scène des passions humaines nourrit l'imagination des spectateurs et leurfournit des passions qui vont en retour changer les passions de celui-ci ; la passion réfléchie parl'imagination va changer de qualité, ainsi la tristesse d'une passion représentée se noie dans le plaisir

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du jeu de l'imagination. Cf Shaftesbury sur l'esthétique et l'enthousiasme (s'échapper de soi même pour s'élever versdieu).Idéaliste qui croit en l'existence d'un sens moral inné et d'une beauté de l'âme humaine (contreHobbes, chaque humain étant naturellement instruit du Bien et du Mal. Cf Kant qui fonde le jugement de goût sur le plaisir singulier sauf que pour Kant le jugementesthétique est désintéressé et on fait comme si tout le monde avait le même.

&8-9 les biens extérieurs et les possessions = la notion de propriété est déterminante pour grossirles passions égoïstes. Elle confirme que nous habitons un monde et nous le faisons notre par nosinvestissements affectifs ; on ne se contente pas de le regarder du dehors comme un tableau. On passe aisément des biens matériels que l'on possède et qui constituent des signes extérieurs derichesse (maison , jardin, équipage= voiture) qui donnent de l'éclat à notre moi en le prolongeant àl'extérieur, en le faisant exister sous les yeux des autres, à tout ce qui peut y être associé de près oude loin. Ex : un transfert de propriété s'effectue de la propriété naturelle de mon corps à la natureque j'ai travaillée (Locke).Ex de l'esclavage = on tire moins de jouissance de posséder des machines ou des marionnettes quedes hommes dont le regard servira de témoin de notre puissance ; le maître entre dans l'esprit desesclaves et s'y regarde comme le maître TNH p. 145, ce qui exalte sa personne en le distinguant. Unhomme ne jouit de l'orgueil que parce qu'il participe au plaisir que les autres ont de contempler sasupériorité. Portrait ironique du vaniteux p. 73 : “l'air qu'il respire est plus sain”. Ton plus moralisateur : il y ades remarques axiologiques sous-jacentes, implicites : (II, 8 p.71) ; la passion de l'orgueil parled'elle-même avec son étalage de biens. Un puissant mécanisme d'appropriation imaginaire se met en place grâce à l'usage grammatical desadjectifs possessifs (mon pays, ma paroisse). Le moi s'empare de qqchose qui provoque du plaisirpar sa beauté et l'associe par contiguité au moi (oui c'est bien moi là qui pose à côté d'une ferrari) cequi renforce la passion d'orgueil possédant son plaisir propre. Le TNH souligne le fait que, grâce àl'argent, le plaisir est aussi d'anticiper des possessions possibles et apporte la même joie que par despossessions réelles : “l'avare jouit de son argent càd du pouvoir de se procurer tous les plaisirs” p.143 / “l'anticipation du plaisir est par elle-même un plaisir très considérable” puisqu'on se trouvepresque au même niveau d'intensité que l'impression. p. 144Cela peut aussi se manifester par l'intérêt pour un pays étranger si on déprécie son pays en lecomparant aux autres. p. 70-71 Ainsi, une éthique de la sympathie doit empêcher une doubledérive : l'égoïsme pur et le repli sur soi ; la bienveillance excessive qui s'inquiète plus de l'étrangerque de ses propres concitoyens.# Cf Freud “narcissisme de la petite différence” (Malaise ds la Civ) : Un groupe ne s’identifiecomme groupe que par l'exclusion d'individus désignés par une petite différence qui fait sens pourla communauté qui les exclut. Le rejet de l'autre devient un ciment communautaire. Par l’exclusion,la communauté peut satisfaire sur des étrangers des pulsions agressives refoulées par le devoir debienveillance envers les semblables. Cf antisémitisme et racisme des personnages de la CousineBette à propos du Brésilien, surtout lors du dîner.

TR : Les lois fondamentales des passions indirectes s'appliquent-elles toujours ? Ne sont-elles pasatténuées ou renforcées dans leurs effets selon les circonstances (principes secondaires) ?

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SECTION II & 10 à 11 = circonstances modifiant les effets de la double association dansl'orgueil et l'humilitéCertaines circonstances favorisent, augmentent ou diminuent l'effet de la double association.La sympathie a un effet si puissant qu'elle peut presque à elle seule faire apparaître ou disparaîtreune passion. Elle atténue aussi à sa manière l'atomisme individuel selon lequel les hommes seraientrepliés sur leur intérêt individuel (Hobbes, Mandeville). Cf Théorie de l'attraction répulsion deNewton : on a besoin ds autres même si on ne peut les supporter cf insociable sociabilité de Kant.Communication des passions qui peut être positive ou négative.

&10 La sympathie (pas au sens commun d'affection pour un proche) et l'approbation d'autrui oucomment les passions circulent par effet de contagion = “notre propension à recevoir parcommunication les inclinations et les sentiments des autres” (TNH p. 146) ; l'approbation des autreshommes est déterminante car ces témoins privilégiés nous octroient une bonne ou mauvaiseréputation. Les jugements extérieurs confirment ou contredisent la passion pour soi-même. Lebonheur de l'orgueillleux dépend de l'assentiment des autres hommes (du nombre de “like” surfacebook). Cela contredit les partisans d'une morale égoïste ou egotiste, solitaire. Il y a uneorigine « sympathique » des passions c’est-à-dire une identification à ce que nous imaginonsqu'autrui éprouve, grâce à la communication entre les hommes. Les sentiments des hommes secommuniquent aisément. D'où une intersubjectivité des passions (les hommes sont des sujetspensants capables de prendre en considération la pensée d'autrui dans leur jugement propre, encoreune fois propre à l'homme). Mécanisme de transmission des passions d'une personne à une autredonc principe secondaire et non passion originale. Ici Hume souligne plus ses effets que sesfondements psychologiques. Elle donne l'amour de la renommée mais empêche aussi d'être troppartial avec soi-même en se confrontant au regard d'autrui. L’estime qu’autrui éprouve pour moi donne lieu à de l’orgueil. Lorsqu’autrui montre qu’ilm’estime, il ne flatte pas seulement mon orgueil : il éprouve du plaisir à m’estimer (impression deplaisir), et cette expression se transmet à moi par sympathie. Je ressens donc la même impressionde plaisir que l’autre. Seulement, puisque cette impression est dirigée vers moi plutôt que versautrui, elle n’est plus de l’estime (l’estime étant une passion indirecte dérivée de l’amour, qui estpassion tournée vers autrui) mais de l’orgueil. L'orgueil est l'organe d'une substantification dumoi sous le regard d'autrui, même ci cet autre c'est moi. “les hommes tiennent toujours comptedes sentiments d'autrui pour se juger soi-même”.

SYMPATHIE = (souffrir avec) “principe d'identification affective”, il y a qqchose en commun,toujours déterminé par fuite de la douleur et recherche du plaisir (pas au sens unique de Rousseausource de neutralité bienveillante, ici elle peut aussi bien provoquer la tendesse que le mépris) =principe de communication des sentiments / passions d'une personne à une autre , ouverture àautrui, elle varie selon le degré de proximité (ex souci de l'opinion de l'autre). Certes il y a peut-êtreune influence des esprits animaux (Descartes) qui communiquent les infos du dehors, et aussi laressemblance avec les autres hommes aide à reporter sur soi ce qui vaut pour autrui, il est commemoi (Spinoza), mais c'est surtout un effet indirect des associations d'idées (j'associe sa colèreextérieure et ses gesticulations expressive à un sentiment intérieur et cela nous fait tenir unraisonnement par analogie ; quand je verrai les mêmes manifestations, je les associerai à la colère,au point de la ressentir moi-même “nous sommes suffisamment guidés à la fois par l'expériencecommune et par une espèce de présentation qui nous dit ce qui agira sur les autres au moyen de ceque nous ressentons immédiatement en nous-mêmes” TNH p. 166. de la manifestation des affectsde l'autre j'infère qu'il souffre ou se réjouit et j'en déduis l'idée de souffrance ou de plaisir mais cetteidée de l'affect se convertit en l'affect lui-même (j'imagine ce que je ressentirais à sa place), du faitde l'identité de nature des impressions et des idées.

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Mécanisme = l'impression qu'on a de soi est très vive et la sympathie transfère une partie de cettevivacité aux objets auxquels nous sommes reliés ; or nous le sommes à autrui par contiguité (onpartage le même espace-temps) et par ressemblance (l'alter ego, un autre moi qui n'est pas moi “ lanature a conservé une grande ressemblance entre tous les hommes” TNH II, 1, 11).Réciproquement, la passion d'autrui va prendre à nos yeux une certaine valeur, celle de cause de sesactions, selon le sens qu'on donne aux signes. Pas de perception de soi sans celle d'un autre etréciproquement. “la comparaison est une méthode sûre pour augmenter notre estime d'une chose”TNH p. 145 Cf triangulation du désir GIRARD. Cf impératif catégorique kantien / “penser en se mettant à la place de tout autre” ne se réduit pas àla sympathie car trop sensible et particulier ; exigence plus universelle.

DONC = Les passions ne sont pas des vécus solitaires et tirent partie de leur élan decomparaison entre nous et les autres. Elles ne germent pas d'une intériorité close sur elle-même.Autrui en est la médiation indispensable. La seule consistance du moi (mosaïque de perceptions) luivient de ses affects et de la confirmation de son existence par autrui. CF Sartre : “autrui est lemédiateur indispensable entre moi et moi-même”.CF Rousseau “Et l'estime publique eut un prix”. Chacun s'expose sur une scène où il attend desautres qu'ils lui confirment l'image ou la valeur qu'il se donne. Désir de reconnaissance illimité. Exdes maladies qui font honte &11 p. 77.EN RESUME = Il y a chez Hume aussi cette ambivalence de la sympathie = ce sont les mêmesprocessus passionnels qui socialisent et qui individualisent l'homme : l'individu ne se sent existerque dans la distinction, qui exige une comparaison constante< ; la sympathie est la propriété del'imagination qui fait que j'éprouve les mêmes sentiments que les autres : je souffre à la vue de leursouffrance et me réjouis de leur joie ; mais je peux aussi, par le même mécanisme projectif,m'affliger de son bonheur ou me réjouir de son malheur en retour de ce premier mouvementd'identification. Ex : foule de supporters : sympathie n'est pas empathie ni communion car peutavoir un aspect négatif (foule lors d'un meeting nazi). Chacun fait qqchose qu'il ne décide pas, lafoule ne pense pas. Faire foule et s'y dissoudre est un moyen de se retrouver dans le monde. Lespassions impliquent la société comme moyen oblique de les satisfaire. Cette abolition desfrontières intersubjectives produit tout autant la construction d'un moi qui se contemple dans lemiroir du regard d'autrui (moins flatteur donc plus instructif) mais aussi l'esprit de comparaison, lajalousie existentielle qui est source de conflits. Ainsi, la sympathie explique le poids qu'on accorde aux opinions des autres ; d'ailleurs je resteindifférent aux jugements des gesn que je méprise (preuve a contrario). Nous tirons notre plaisir dessentiments d'autrui et cela participe à la formation ou au soutien de bcp de passions ; la sympathieest aussi le principe même du sens moral, dont le raffinement dépend d'une extension de lasympathie par les règles générales. Peu d'hommes sont ainsi capables d'aller à l'encontre del'opinion des autres d'où “la grande uniformité observable dans les façons de penser d'une mêmenation” (TNH p/ 146), pour le meilleur (cohésion, solidarité) et pour le pire (aveuglement de lafoule).

&11 La durée est une circonstance qui favorise aussi l'orgueil ou l'humilité = le caractère durablede l'objet de la passion : ce dernier doit être constant pour être source de plaisir et d'orgueil (si jesuis élu miss monde pour une seconde c'est moins fort que pour un an) ; la valorisation de soi exigeun objet constant qui mérite qu'on lui consacre du temps et sur lequel on puisse s'appuyer. La singularité de l'objet passionnel : il doit nous être particulier et nous distinguer des autres :différenciation sociale oblige ; le fait que l'objet ait une relation particulière ou exclusive avec lemoi (si tout le monde a un physique de miss monde cela perd de la valeur, l'être aimé nous semblelui aussi unique au monde ; par contre la meteo n'est pas reliée à moi donc pas source d'orgueil) ; la

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hiérarchie sociale compte aussi : les règles qui régissent la société ont un rôle à jouer dans l'ordredes passions. Les normes sociales et juridiques contribuent à motiver l'orgueil en privélégiant lalignée paternelle dans le nom qu'on porte, l'héritage etc. Ex : le pouvoir du nom des Hulot. Cf déjàp. 72Ex : certains affects apparaissent seulement dans certaines circonstances historiques comme réglerses dettes par duel ou par contrats selon les époques. (cf TN II, 3, pas ds DI). D'où une historicitédes passions (dimension historique et temporelle de l'existence humaine en situation), même s'il y ades cycles en histoire. Distinguer le temps long (coutumes ou habitudes passionnelles) du tempsbref (succession quotidiennes de nos passions). Ex : l'amour n'a pas toujours été associé à lagalanterie ; la haine pour un homme n'a pas toujours visé toutes sa famille par vengeance ; il n'y apas la même conception et pratique de l'amour chez les Grecs et chez les Français du XVIIIème.

Pbl se pose à ce stade de la réflexion = l'analyse de l'orgueil repose sur le fait que les objets quipeuvent le produire sont dotés qu'une excellence intrinsèque, qui leur est propre, qui ne vient pasque du moi, mais cela paraît impliquer un réalisme des valeurs incompatible avec le scepticisme deHume et qui justifierait les inégalités sociales (on donne le nom du père parce qu'on lui accorde plusd'importance qu'à la mère), comme si c'était dans la nature des choses alors que c'est une institutionarbitraire. Mais Hume ne fait qu'observer sans la juger sa propre société et reconnaît que la mère estsouvent pourvue de qualités supérieures (p. 72) ; de plus c'est l'affect de plaisir effectivementéprouvé de la même façon par tous qui est décrit et cela se diversifie dans l'imaginaire de chacun.

La deuxième section se termine sur une remarque méthodologique = il faut un certain temps pourque se produise par sympathie l'acquisition des règles ; les affects sont l'effet de l'habitude puiquel'articulation des passions répond à des règles, sur la répétition d'une même connexion. Humepropose une expérience de pensée consistant à imaginer un autre homme plongé dans notre mondepassionnel et surpris de nos habitudes, ne comprenant pas nos us et coutumes : il souligne par là ensociologue le rôle de l'accoutumance dans l'attribution des valeurs, la puissance du social dansl'engendrement et la construction des passions comme phénomènes culturels. La nature humaine estun ensemble de normes qui sont régulières mais qui peuvent évoluer. La sympathie opère commecomme norme sociale qui assure un ordre de valeur commun. TNH “les esprits humains sont le miroir les uns des autres”DONC = Cela confirme encore l'idée que la passion est une modalité d'organisation du rapport dumoi au monde, qui règle les conduites les plus variées en projetant sur le réél des significationspropres : le vaniteux s'approprie tout ce qui peut le faire briller, le jaloux interprète tous les faits etgestes de l'autre comme suspects, l'avare organise ses relations sociales selon ses intérêts pécuniers.

SECTION III = la haine et l'amour et les passions mixtes à la lumière du principe de doubleassociation Hume définit l'amour et la haine à partir de l'orgueil et de l'humilité car elles résultent des mêmesciconstances ou qualités (vertu, beauté, richesse) mais elles sont déplacées du moi vers autrui.

&1 Les qualités qui produisent l'orgueil et l'humilité produisent également l'amour et la haineNous éprouvons du plaisir à contempler les qualités des autres et cette relation produit l'amour parressemblance. L'amour se fixe sur une personne autre mais toute personne n'éveille pas en nouscette passion dont c'est une qualité de l'autre personne qui l'éveille. Si l'association des idéesn'intervenait pas, en voyant la bienveillance ou le mépris, je n'éprouverais que de la joie ou de latristesse. L'amour et la haine supposent que j'associe la bienveillance ou le mépris à la personned'autrui. Et la “transition facile” entre l'idée de mon ami et l'idée de bienveillance s'ancre d'autantplus en moi que j'aurai eu d'occasions de les relier dans mon expérience passée donc il y a un rôle

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déterminant de l'habitude là encore.# CF PASCAL : on n'aime jamais personne, mais seulement des qualités. C'est encore ici lesentiment agréable de l'amour ou désagréable de la haine qui fait la passion. Alors que l'amourdevrait permettre d'ôter les masques et nous livrer le vrai de l'être aimé, on apprécie qqun pour sabeauté ou ses qualités morales mais ce n'est jamais la personne elle-même qu'on aime, seulementdes qualités temporaires ou illusoires. Pascal “ On n'aime donc jamais personne mais seulement desqualités”. Cf Cyrano = Roxane croit aimer Christian mais elle aime les vers de Cyrano. Chez Hume,l'amour est bien distinct de ses causes : je n'aime pas l'autre pour ses qualités, cela reviendait àm'aimer moi-même à travers lui, à l'instrumentaliser en me disant que je l'aim car A il est beau B ilest riche etc. C'est la personne elle-même que j'aime et non ses qualités : causes efficientes et nonfinales de l'amour, elle l'ont provoqué, y ont contribué mais la personne ne s'y réduit pas, je l'aimepour ce qu'elle est, non pour faire usage de ses qualités. Pascal confond l'objet d'amour avec sescauses. Chez Hume l'amour n'est jamais concupiscence vulgaire : c'est un composé de plaisir, debienveillance et d'appétit naturel, une sorte de relation amoureuse qui s'accompagne de plaisirsexuel.

Amour et haine se nourrissent également de la double relation d'association des idées et desimpressions : tout ce qui est lié à leur objet partage la même affection&2 L'association des idées dans l'amour et la haine : j'associe le tort que j'ai subi à la personnequi me l'a causé puis à son entourage et mon amour / ma haine va se diffuser progressivement(parfois jusqu'à la société entière). Sorte de loi de transitivité par laquelle si A est lié à B et B lié àC alors A est lié à C : “Notre imagination s'élance du moi qui nous est toujous si intimementprésent, glisse sans entrave selon la relation ou la connexion et conçoit en toute sympathie lapersonne qui nous est étroitement liée” p. 79. La sympathie nous pousse à jouir du bonheur del'autre et à souffrir de son malheur : on passe de l'idée de son bonheur/malheur à une impressionvécue en propre.

&3 L'association des affections dans l'amour et la haine : le sentiment désagréable qu'engendrece tort est un affect proche de la colère et la colère un affect voisin de la haine. Effet de contagion.Il peut y avoir dans le circuit des passions réversibles ou asymétriques càd que certaines passionsont plus de facilité à en produire d'autres. Ex : haine et amour toujours suivies de colère etbienveillance. Les passions sont donc dynamiques puisqu'elles nous incitent à l'action en générantde la bienveillance ou de la colère. Ce qui différencie l'amour et la haine de l'orgueil et de l'humilitéc'est qu'elles ne se suffisent pas à ells-mêmes et nous incitent à l'action, càd le désir de bonheur etde malheur sont conjoints à ceux qu'on aime ou qu'on hait donc ils “portent l'esprit au-delà de lui-même” p. 80. Elles nous donnent la volonté d'agir et sont le moteur de nos désirs de bonheur ou demisère d'autrui. Par ex la colère et la haine “confèrent une force nouvelle à toutes nos pensées età toutes nos actions”.

En résumé = si les associations d'idées faisaient défaut, ma colère ne se diffuserait pas à l'auteur etson entourage (pas de vengeance chez les animaux) ; si l'association des émotions faisait défaut jene ressentirais qu'une émotion primaire (tristesse) sans passer à d'autres (colère ou haine). Mais nous aimons des êtres malgré leurs défauts (une mère aime son enfant même s'il est laid) doncil y a une autre cause que la double relation d'impressions et d'idées partant des qualités de l'autre :nos parents, nos familiers et ceux qui nous ressemblent sont les objets de notre amourindépendamment de leurs qualité. Or, l'esprit ne se soutient dans l'être que parce que la vivacité despassions des autres hommes avive notre esprit en devenant nôtres : genèse de l'humanité à partir dela sympathie.Les autres hommes sont les plus vivants des objets donc la seule existence des autresme détermine à les aimer. Etre un homme, c'est aimer les hommes, sans tomber dans un amourabstrait. On comprend mieux alors pourquoi les parents ou les familiers s'aiment du fait de leur

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contact durable et varié, qui éveille durablement l'agitation de l'esprit, plus que des inconnus. Etnous nous aimons car nous sommes leplus proche de nos familiers, par la même sympathie qui nousfait aimer les autres. Fin de l'opposition entre amour et amour-propre.Donc, la sympathie ici ne joue plus seulement le rôle de démultiplicateur de l'orgueil/humilitémais remplit une fonction encore plus capitale dans l'amour/haine dont elle constitue le fondultime. L'âme de toute passion c'est la sympathie va même jusqu'à affirmer le TNH p. 201:“quelles que soient les autres passions … leur âme ou leur principe animateur c'est lasympathie” car “nous ne pouvons former aucun souhait qui ne fasse référence à la société”.Société = réseau de sympathies qui sympathisent les unes avec les autres. La socialisation etl'individualisation ne s'opposent plus chez Hume : les individus à la fois constituent et sontconstitués par la société. Les relations sociales fabriquent la nature même de l'homme.Individualisme = Indifférence de l'individu à ce qui n'est pas lui (solipsisme) : cf écorchure doigt :« il n'est pas contraire à la raison de préférer la destruction du monde à une égratignure de mondoigt » (TNH) .

&4-7 Les espèces de l'amour et de la haine et leur mélanges : la compassion et l'envie (&4-5), lemépris (&6), le respect (&7). Toutes ces passions sont des impulsions, elles s'accompagnent dudésir d'agir : la bienveillance veut le bonheur de l'être aimé ; la méchanceté ou envie, le malheur dequiconque nous est supérieur. On sort de la pure émotivité affective car ces passions enveloppent legermes de toute action. Cela modifie la sympathie et la complexifie.& 4 Compassion ou pitié = “malaise qui nous saisit lors de souffrance d'autrui”p. 80, émotionirrésistible qui produit un élan vers l'action pour empêcher la souffrance d'autrui et favorisecertaines formes de l'amour, l'amour du prochain, notamment vouloir le bonheur de l'humanité.Fonction cardinale. Idée de la souffrance d'autrui se transforme en impression de malaise ; surgittoute seule de la spontanéité de l'esprit sans passion préliminaire : “notre imagination progressantde l'idée vive de la misère d'autrui à l'impression réelle de celle-ci” p. 80.En vertu des mécanismes de la sympathie, nous sommes déterminés à participer plus fortement auxmalheurs des autres qu'à leur bonheur car les émotions de souffrance sont plus vives. On se portenaturellement au secours de la victime. C'est la communauté de misère qui engendre l'homme plutôtque les distinctions de la grandeur.Auparavant la pitié est plutôt critiquée comme émotion signe de faiblesse car l'esprit ne doit pasêtre dirigé par les affects et la sensibilité (Platon) ; de même le devoir moral est au-delà de la pitiéparticulière et sensible selon Kant : on doit secourir autrui par obligation morale et non parsentiment pour lui (“penser en se mettant à la place de tout autre” et non “de tel autre” 3èmemaxime du sens commun). Hume rejoint plutôt Rousseau ici en faisant de la pitié un desfondements de la conduite morale, vertu naturelle à partir de laquelle se déclineront toutes les vertussociales : “ la pitié est un sentiment naturel, qui, modérant dans chaque individu l’activité del’amour de soi-même, concourt à la conservation naturelle de toute l’espèce. C’est elle qui nousporte sans réflexion au secours de ceux que nous voyons souffrir : c’est elle qui, dans l’état denature, tient lieu de lois, de moeurs et de vertu… C’est, en un mot, dans ce sentiment naturel, plutôtque dans des arguments subtils, qu’il faut chercher la cause de la répugnance que tout hommeéprouverait à mal faire, même indépendamment des maximes de l’éducation ».

# Méchanceté ou Envie révèle la nature et les effets de la comparaison ; c'est par la comparaisonque nous évaluons notre place dans le monde (cf cousine bette / adeline hulot) ; cela présupposebien une prise de conscience de soi réflexive et comparative incluant la conscience d'autrui puisquej'ai conscience de ma propre infériorité par rapport à tel autre auquel je me compare et qui medomine : “il semble bien que la comparaison de nous-mêmes avec les autres soit la source del'envie et de la méchanceté”p. 80. NB Chez LRF la compassion est aussi un vice caché : “il y a souvent plus d'orgueil à plaindre les

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malheurs de nos ennemis ; c'est pour leur faire sentir que nous sommes au-dessus d'eux que nousleur donnons des marques de compassion”. Maximes

&5 Ressemblance de tendance ou de direction, et non d'émotions, entrecompassion/bienveillance et envie/colère mais cela produit encore et toujours une association despassions entre elles. Principe de “direction parallèle”= pitié et tendresse, ou haine et envie vonttoujours ensemble, pitié produit amour, méchanceté de la haine etc. / pourtant la pitié est unsentiment désagréable et et l'envie un sentiment agréable. La pitié resemble donc à la haine de cepoint de vue là. Mais en fait la direction de la pitié et de l'amour restent parallèles car ce sont despassions actives qui veulent produire le bonheur de l'être aimé / de ceux qui souffrent. Leurimpulsion est donc analogue même si elles suscitent des émotions contraires. Elles ont la mêmedestination pratique. C'est pourquoi pitié, amour et bienveillance s'entremêlent toujours un peu. Il ya chez les humains une bienveillance mutuelle qui tend à promouvoir les intérêts de l'espèce etprocure le bonheur dans la société. La sympathie préiside à la genèse de la société civile.&6 = Mais les mêmes qualités ou causes (ex : pauvreté) peuvent produire des passions contraires(mépris ou compassion) selon la proximité et l'identification par sympathie avec autrui : la pauvretéde l'étranger nous indispose jusqu'au dégoût tandis que celle de l'ami nous indispose jusqu'àl'empathie et nous fait souhaiter son bonheur. Ainsi la souffrance des autres peut produire pitié oumépris selon l'élément prédominant : si la sympathie est faible, la gene aussi donc l'idée ne setransforme pas en impression ; un malheur plus fort produit une double sympathie : nous souffronsavec l'autre (sympathie désagréable) et cela produit de la bienveillance , par la double sympathieavec l'affect et la personne. La sympathie éveillera donc des passions contraires selon son degréde force : “à des degrés différents, le même objet produit des passions contraires” (TNH II, 2, 9).

Cf section V du TNH II, 2 sur l'estime pour les riches et les puissants = thèse scandaleuse nousaimosn les riches uniquement si nous sympathison avec eux. P195. On entre dans le plaisir que lesriches tirent de leurs biens, on les vit fictivement, même si les richesses sont d'abord le plaisir desriches avant d'être les miennes, on sympathise avec leur orgueil ; la sympathie des autres avecl'orgueil des riches fonde l'estime qu'on en a. Donc l'orgueil ne détruit pas le mouvementsympathique. Eux mêmes ne sont orgueilleux de leur richesse que parce qu'ils sympathisent avecnotr sympathie pour leur orgueil. “les esprits des hommes sont des miroirs les uns pour les autres”TNH II, 2, V&7 = Le Respect est lui même un sentiment qui relève d'un mélange d'humilité de soi et d'estime del'autre tandis que le mépris mélange l'orgueil de notre propre personne (la boursouflure du Moi)avec la perception de sa misère. A chaque fois on mélange ce qui est le cas (les qualités tellesqu'elles sont en elles-mêmes) et ce qui est comparé à nous (nous les comparons à nos propresqualités). Ainsi le même homme peut être source de respect ou de mépris “selon que sonobservateur passe d'une position inférieure à une position égale puis supérieure à la sienne” = miseen perspective qui souligne le relativisme des points de vue : “l'objet a beau rester le même, si nouschangeons de point de vue sur lui, nous modifions radicalement son rapport à nous-même” TNH p.232. Le sens des passions dépend donc du sens que nous projetons dans la réalité perçue. Et demanière générale ce qui nous dépasse, nous est supérieur nous donne un sentiment d'infériorirtétandis que ce qui nous est inférieur nous élève.

CF chez Kant : le seul sentiment moral qui pousse à considérer l'autre comme un fin en soi et noncomme le moyen d'autre chose mais il a pour fonction de réguler les passions, il n'en fait pas partie.

En somme = la ressemblance des passions ou des tendances (compassion, bienveillance, envie,colère) compose une association qui constitue le tout de la passion. Les passions sont toujours prisesdans un mélange affectif dont la tonalité dominante varie selon les circonstances.

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SECTION IV = Exemples complémentaires et difficultés particulières

Les idées qui suscitent les sentiments doivent s'ordonner selon le principe de simplicité et deproximité. Faute d'une telle relation le passions s'évanouissent. Implications de cettecaractéristique de la vie affective en IV.

&1 Rappel de l'utilité des exemples complémentaires pour illustrer la théorie de la double relation.Nouvelles illustrations envisageant le degré de proximité entre la cause et l'objet ainsi quel'influence des relations d'idées sur la naissance d'une passions.

&2 On passe aisément de l'amour à l'orgueil = transfusion de l'amour à l'orgueil ; prendre duplaisir aux qualités d'autrui nous pousse à aimer celui qui les possède et si il est proche de nous,nous sommes alors inclinés à nous aimer nous-même à travers lui, puisque nous aimons unepersonne aimable, c'est que nous ne sommes nous-mêmes aimables ; transition opérée parl'imagination, facilitant le passage du plus éloigné au plus proche, parce que la personne est la causeréelle de notre amour, ce qui entraîne le passage graduel de l'amour à l'orgueil ; fluidité dumouvement de l'imaginaire passionnel : les qualités causent notre estime, on éprouve du plaisiren sa compagnie, puis l'imagination conçoit le plaisir de cette relation mais aussi le privilège à êtrele seul à l'éprouver, ce qui devient motif d'orgueil.

&3 Mais l'orgueil ne nous pousse pas à aimer : la réciproque est moins aisée car il est plus difficilede passer de ce qui nous est proche ou contigu (le loi orgueilleux) à ce qui nous est lointain (l'êtreaimé) ; “Il n'y a pas de transfusion des passions aussi de l'orgueil à l'amour que de l'amour àl'orgueil” p. 83.Cf LRF “On passe souvent de l'amour à l'ambition, mais on ne revient guère del'ambition à l'amour” Maxime 490. On se situe ici non plus dans les variations de la loi, mais dansles variations des variations, ce qui atteste encore de la complexité des relations affctives.

&4 On est porté à aimer ceux qui sont liés à ceux que nous aimons. Idem pour les proches de cettepersonne, on passe alors de l'objet principal (l'autre) à des objets secondaires (ses proches) car lespassions descendent plus facilement qu'elles ne montent.

&5-6 L'association des idées peut être interrompue par une grande disproportion des idées : lesrelations d'idées ne sont effectives que si il y a une certaine proportion du lien de proximité entre lespassions et les individus : on ne saurait envier qqun qui est trop éloigné de nous (par sa professionou sa richesse) car la comparaison serait sans effet de même qu'on doit comparer deux objets de lamême epèce (deux chevaux entre eux et non un cheval et une montagne). Plus l'écart se creuse entrelui et moi et plus cruelle est l'humiliation, mais dans cette distance il doit y avoir une proximitépour qu'il y ait des éléments de comparaison commensurables ; on ne peut envier qqun avec qui onne partage rien, aucun point commun (principe de simplicité dans les transitions imaginaires parcontiguité). On ne va pas comparer une cathédrale à une pyramide, un poète à un philosophe, unprince à un mathématicien etc. Ne comparer que le comparable, de même que la relation se formedans l'imagination à condition d'être facilitée par des successions habituelles. Les hommes sontenvieux selon le principe relativiste “les objets paraissent plus grands ou plus petits par unecomparaison avec d'autres” (le bateau de mon oncle est plus grand que le chapeau de mon père maisplus petit que le jardin de mon frère). &5 = l'histoire passée peut servir de réservoir de cas à examiner, Hume a recours à l'histoire, jamaisà son propre cas personnel p. 84. Le lointain ne peut éveiller que des passions légères, sans

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conséquence lourdes (l'exotisme) ; il n'y a de véritable enjeu affectif que dans cesconfrontations avec le proche. Ex : les conflits les plus violents apparaissent entre nations proches.Ex de l'Italie longtemps déchirée par des guerres intestines entre principautés et petites républiquesjusqu'à son unification au XIXème et qui a même souvent préféré une domination étrangère à celled'un rival immédiat. L'orgueil devient ici un ressort affectif de l'histoire des Etats. Les analyseshumiennes permettent donc d'expliquer aussi bien les passions collectives (nationalistes, partisanes)que individuelles.

&6 = exemples tirés des beaux-arts confirmant que les passions traversent le monde. Proximité descontraires dans une oeuvre nous choquerait, il faut considérer les objets d'un même artiste commedeux oeuvres distinctes voire éloignée pour que cela produise du plaisir esthétique car dans ce cas lapremière et la deuxième lecture du poète anglias Prior n'entrent pas en contradiction l'une avecl'autre : “c'est par cette rupture dans les idées que se trouve interrompu le progrès dans lesaffections” p. 85, elles n'ont rien à voir, ne sont pas comparables donc cela ne nous choque pas. Laconfusion des genres (héroïque et burlesque) serait choquante dans un même tableau, mais pas àdeux coins opposés du salon.

&7 L'association des idées peut également être facilitée par l'imagination : la transition d'unepassion à une autre se produit sur le même modèle que la connexion entre les idées. Devantlimpossibilité d'un accès véritable au réel (constat sceptique), le passage d'une idée à une autre apour seul principe la fréquence de la conjonction. Ce qui vaut pour l'imagination vaut pour lespassions puisque les deux travaillent ensemble. Dernier exemple : si le pay que j'admire est sansconnexion avec moi, il produit une émotion sans passion, par contre si je contemple le mêmepaysage depuis mon manoir ou celui d'un ami, cela “donne une nouvelle direction au sentiment deplaisir” et produit de la vanité ou de l'estime (p. 86).

SECTION V A VI / RAISON , VOLONTE ET PASSION

Etant donnée la conception dynamique des passions il est logique que la réflexion se termine parl'influence décisive de celle-ci sur les actions humaines. On peut donc considérer la DIP comme unethéorie de la dimension mondaine des passions. Elles cimentent le monde humain et et tissent sondevenir.

SECTION V = La raison et les passions

&1 = la raison au sens strict de raison logique (Descartes “faculté de juger du vrai et dufaux”) ne commande jamais la volonté . Souvent définie par la négative : la raison n'est pas « le guide de la vie », elle ne peut pas« produire une action ni susciter une volition », n'a pas d' « influence originelle », et ne doit être que« l'esclave de passions ». Les idées abstraites et les raisonnement ou démonstrations sont objets decuriosité gratuite, spéculation désintéressée, mais pas de “volition” càd qu'ils ne servent pas demotifs pour agir ; autrement dit le motif de l'action ne peut être purement logique et rationnel. Laraison logique est dénuée de toute initiative pratique. La raison ne fait qu'énoncer des jugementssur les causes et les effets, ce qui ne nous fait pas balançer d'un côté plutôt qu'un autre. Prisisolément, l’entendement est passif ; il n’est qu’un ensemble de principes logiques interconnectés,mais pas une entité dotée de mouvement. La raison n'est pas absente (elle désigne des objets etdes moyens à la passion) mais elle n'a pas un rôle actif et ne peut rien contre la passion. Laraison sait dire froidement le vrai ; la passion agit et invente. Elle se contente d'établir des loisauxquels les faits obéissent (ce qui est le cas) mais elle reste muette sur les valeurs (ce qui devraitêtre). On ne peut pas dire que la raison produise une action ni qu'elle produise ou combatte les

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passions. La raison possède des effets pratiques seulement quand elle est alliée aux passions et leurest subordonnée ; ce n'est pas une prescription de la part de Hume, mais un constat. Ici, l’input(l'info externe, le stimulus) est toujours le même, mais l’output (le résultat) ne l’est plus. Si unentendement passif voit son savoir augmenter de manière exponentielle et linéaire avec le temps, àforce de recevoir passivement des perceptions et des expériences, les passions rendent l’espritactif et poussent l’individu à agir. Sans elles, l’individu ne bouge pas, l’esprit est mécanique ;avec elles, il ne l’est plus. Même si les passions sont elles aussi déterminées par la causalité, ellesconstituent une combinatoire si complexe et si subjective que nous ne pouvons pas les considérercomme un pur mécanisme logique. De notre propre point de vue d’humains, nous ne le pouvonspas ; nos croyances, nos mouvements, sont motivés et structurés par nos passions.

Les passions au contraire sont le principe de vie et d’action au sein de l’individu. Une passionsn'est ni vraie ni fausse. Elles constituent ce sans quoi l’individu n’agirait pas, elles incitent à la(dé)valorisation nécessaire à la prise de décision. Sans les passions ce serait le règne del'indifférence ou de l'inactivité, car seul le plaisir et la peine produits par un objet conduisent audésir ou à l'aversion qui nous font agir. Ce sont les passions qui donnent vie à l’entendement, quiempêchent l’individu d’être purement passif. Les passions sont le seul moteur de la raison cequi exclut celle-ci de toute initiative pratique. Comprendre les passions pour les innocenter.En morale, pas d'inférence possible contrairement à l'entendement qui repose sur des associations :“nous n'inférons pas qu'un caractère est vertueux de ce qu'il plaît, mais en sentant qu'il plaît decette manière particulière, nous sentons effectivement qu'il est vertueux” (TNH) c'est un état de faitimmédiat. C'est la passion qui donne sa valeur aux chose, et non la raison : elle a slt comme fonctiond'observer des limites ds lesquelles les appréciations de valeurs se font ; ce sont les passions quivalorisent les choses, la raison les décrit slt. Comme passion calme, la raison peut réorienter lespassions, jouer la passion contre les passions, les infléchir selon les circonstances, une passion quicanaliserait les autres passions. Il y a une jeu passionnel mm ds l'entdt par ex ds l'identification àautrui. La raison est inséparable de la nature. Les passions ne sont pas des facultés, pas de doctrinedes facultés toutes constituées chez Hume : c'est un jeu d'impressions et d'idées, comme l'endt, avecdes visions différentes ; c'est tjrs le meme matériau ; les relations se font et se défont ; on peut sltdétecter des groupes ou systèmes de relations. S'accoutumer à réfléchir pour surmonter ce dt onsouffre, c'est tt ce qu'on peut faire. Même si l'entendement et la passion sont distingués,l'entendement n'est que le mouvement que le mouvement de la passion qui devient sociale.

# Cf critique de la liberté d'indifférence chez Descartes, qu'il retourne contre elle-même : pourlui être libre c'est ne pas être déterminé, ne doit être précédée d'aucune cause, notamment par sesaffects, donc en être détaché ; mais dans ce cas on ne sait plus à qui attribuer la responsabilité denos actes s'il sont indépendants de moi et de mes passions, je ne saurais être blâmé ou loué pour ceque j'ai fait. Attribuer une liberté d'indifférence interdit donc de formuler un jugement moralà son encontre. S'oppose aux théories du libre arbitre ou de la liberté d'indifférence qui préparentune morale permettant le gouvernement de la volonté par la raison. Etant elle-même soumise auxobligations passionnelles, elle ne saurait créer de nouvelles obligations. Pas de volonté morale,seulement psychologisante, pas de faculté de vouloir autonome mais seulement des volontésparticulières ou volitions ; ce qui fait naître l'illusion de liberté (impression d'être à l'origine de nosactions). La volonté s'inscrit dans un système global nécessitariste. Se restreint à la question dupouvoir d'agir au lieu de préparer une morale du devoir. La volonté et le libre-arbitre, ou liberté dela volonté, sont analysés par Hume comme des passions. La discussion à propos de la liberté estl'occasion d'établir la motivation de nos actions et de décrire le système des passions d'une manièrecette fois dynamique. Le libre-arbitre décrit la propriété qu’aurait la volonté humaine de sedéterminer librement — voire arbitrairement — à agir et à penser, par opposition au déterminisme

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ou au fatalisme, qui affirment que la volonté est déterminée dans chacun de ses actes par des forcesqui l’y nécessitent. L'alternative que pose Hume est la suivante : ou bien nous n'avons aucun motiflorsque nous voulons, ou bien la volonté est toujours déterminée. La première partie de l'alternativese révèle absurde, car elle a pour conséquence que, si notre volonté est libre, alors nos volitions sontle fruit du hasard : ainsi serions-nous fous ou irresponsables, et nos actes ne refléteraient rien desubstantiel ou de fondamental en nous. La thèse de Hume est ainsi que la doctrine de la liberté dela volonté détruit la morale, alors que nous raisonnons quotidiennement d'après la doctrine de lanécessité : nous supposons en effet continuellement que les actes d'autrui ont une motivation, et ilne peut en aller autrement si nous supposons que le comportement d'autrui est intelligible. Parconséquent, ces actes sont déterminés et propres à un individu selon son tempérament et sesdispositions ; dans cette mesure seulement, un individu peut être blâmé ou loué.

&2= Critique de la définition de la raison au sens populaire et coercitif ;on n'accorde à la raisonun effet sur la volonté que parce qu'on confond communément la raison et les passions calmes ;quand on croit qu'un homme agit par raison, c'est en fait qu'il agit avec un désir tranquille desatisfaire ses intérêts. Pas de raison pratique au sens de conscience morale extérieure aux passions etaux affects. Tout est affecté : imagination, entendement, raison. La raison est incapable decorriger les passions puisqu'elle en fait partie, ni s'y opposer ni les surmonter : comments'opposer à une impression ? Ce serait comme vouloir aller contre nos caractéristiques physiques ousensibles. Les passions étant des faits incontestables et indépassables, le jugement peut seulementintervenir pour envisager les moyens de les satisfaire ou démontrer l'inexistence de l'objet visé oudes qualités qui l'ont déclenchée. Identifier ou mieux cerner les objets passionnels, tout au plus. Laraison est leur outil. Ex : un homme épris de sa maitresse (Hulot, W. ou Crevel) va faire intervenir à deux niveaux : pourjuger de certains faits pertinents (constater qui vient de sortir de chez elle, ce qu'elle aime que je luioffre) et pour calculer par le raisonnement les moyens de réaliser ses buts (comment aller la voirsans que personne ne le sache, comment dilapider l'argent familial pour lui offrir un appartement).

Seules les passions accompagnées d'un jugement faux peuvent être tenues pour déraisonnables saufque ce qui est contraire à la raison ce n'est pas la passion mais le jugement. La passion n'est niraisonnable ni déraisonnable, seul le jugement peut l'être. Les prédicats vrai et faux neconcernent que des relations d'idées, déductions ou inductions logiques. Or, les propositionsaxiologiques telles que la condamnation du meurtre n'expriment pas une vérité mais traduisent unsentiment qui lui-même exprime une passion (l'horreur de la mise à mort, la compassion etc.).

ENTENDEMENT ou raison empirique = figure achevée de l'imagination réglée par desprincipes d'association, il est limité par l'expérience d'où il est issu mais peut produire des véritésdémonstratives.RAISON = composée “des affections d'une espèce identique aux passions, mais telles qu'ellesagissent plus calmement, sans causer de désordre dans le caractère” TNH p. 288 = ultime figurede l'imagination, passion calme qui soumet le divers empirique à ses règles générales et peut ainsi, àdistance critique des choses, discerner le vrai du faux. Imagination formée par l'expérience àcomparer ses idées, à les unir par des principes d'association, à en tirer des règles de vérité ;c'est une raison empirique qui ne ferait nature et règle qu' a posteriori. La raison est le « pouvoirdes règles » et l'entendement la « faculté de croyance ». EEH p. 73 : “l'homme est un être raisonnable” mais aussi “il est continuellement à la recherche dubonheur” et donc “espère atteindre la satisfaction d'une passion ou d'une affection”.

# Hume s'oppose à 2 traditions :

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* celle d'une liberté de la volonté qui peut être infinie (Descartes : volonté « si vague et siétendue qu'elle n'est enfermée dans aucune borne ») car la volonté ne peut être que déterminée pard'autres forces qu'elles-mêmes, mue par les passions donc n'a pas de pouvoir absolu ; même lareligion a interêt à entretenir cette illusion du libre arbitre car peut responsabiliser le pécheur. Pas deresponsabilité morale, religieusen juridique sans déterminisme de la volonté. Hume prend leproblème du déterminisme à l'envers : ce n'est pas un problème métaphysique (comment la volontépourrait-elle être libre de ses choix si les passions la détermine?) mais plutôt un problèmescientifique : si l'homme était libre donc cause de soi, alors il ne pourrait plus faire l'objet d'unescience de l'homme ; le libre arbitre détruit la possibilité d'une science humaine et non pas lascience de l'homme (réduisant l'homme à une somme d'affects) détruit la possibilité du libre arbitre.* et celle qui croit pouvoir opposer le travail de la raison à la force des passions (héritagestoicien), car la raison ne peut mouvoir notre volonté si nos seuls mobiles sont passionnels(Descartes : soit opposer la raison à la passion, soit opposer les passions entre elles, seule ladernière solution vaut pour Rousseau). Refus de l'opposition traditionnelle entre raison et passions.Opposer raison et passion comme le fait Pascal (cf texte N°11 : “Guerre intestine de l’hommeentre la raison et les passions. S’il n’y avait que la raison sans passions. S’il n’y avait que lespassions sans raison. Mais ayant l’un et l’autre il ne peut être sans guerre”) c'est confondre laraison avec une passion calme : expression rhétorique d'une confusion entre raison sansvivacité et passion qaund elle est calme (à cause de la resemblance). Faire comme si un conflitentre différentes modalités de passions faisait l'emporter la plus violente. Même dire comme dans leTNH que “la raison est l'esclave des passions”, c'était encore supposer qu'elles sont extérieures l'uneà l'autre. En ce sens, la DIP voit plus loin que le TNH en remettant en cause l'idée même d'uncombat entre raison et passions.

CF SCHEMA 8 SUR RAISON OUTIL PASSIONS

CF Influence de SPINOZA / Lettre à Schuller1. La conscience d'une passion n'implique pas la connaissance de ses causes ni sa maîtrise ;mécanique passionnelle ne dépendant pas de notre libre arbitre ; si nous sommes touspersuadés de posséder une liberté, si nous nous sentons libres, c'est parce que nous avons l'illusionintérieure que notre esprit peut dominer la matière des choses et que nous ignorons les causes quinous déterminent. La conduite humaine est tout autant déterminée que celle de la matièrepuisqu'elle répond aussi à des expériences répétées produisant des habitudes chez Hume. Pas dedifférence, comme chez Spinoza, entre phénomènes naturels et phénomènes moraux : remet encause la prétendue causalité libre par liberté de la volonté. Le caractère imprévisible et capricieuxde l'homme ne prouve pas sa liberté mais plutôt l'incertitude de ses inférences. La liberté se réduit àl'efficacité pragmatique de nos motifs ou au pouvoir d'action, qui lui-même est un effet del'habitude. Nécessitarisme sceptique qui réconcilie l'idée de liberté (un « pouvoir d'agir ou ne pasagir suivant les déterminations de notre volonté ») et l'idée d'une possible illusion de liberté (« désirchimérique de montrer note liberté »). En somme c'est une liberté conditionnelle. Liberté renvoie ànotre ignorance de la complexité des causes et nécessité aux constances et inférences qui sont tiréesde ces causes : « bien que nous puissions imaginer que nous sentions en nous de la liberté, unspectateur peut inférer nos actions de nos motifs et de notre caractère ». cf texte N°9.

Mais pas d'irrationnalisme (refus de toute raison logique ou scientifique) pour autant carrecherche la vérité sans préjugé et veut résoudre autant de mystères que possible donc l'exercice dela raison même s'il est postérieur aux préférences du sentiment, vient étendre et corriger lesimpulsions affectives. Elle est donc indifférente puisqu'instrumentale (capable du meilleur commedu pire) mais peut permettre d'appréhender les choses avec modération, éroder les passions

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violentes, s'opposer à la folie des ignorants etc. Quand la passion nous fait désirer qqchose, la raisonlogique peut intervenir pour en préciser les moyens de l'atteindre. De plus, il y a des passions pluscalmes que d'autres et on peut tenter de favoriser celles-ci donc ce n'est pas tragique. Pas defatalisme ni vouloir enchainé par la nécessité car ce qui n'est que l'effet de l'habitude et de lacoutume (la causalité) peut toujours être corrigé. Et on peut même aller jusqu'à dire que lafiction du moi sujet de ses propres actes produit des effets, (croire) être à l'initiative de ses actes.Certes nos actes et nos motifs sont déterminés, mais la volonté reste à l'initiative de ses actes quandelle envisage des choses à faire comme possibles.

&3 = les objets que l'on rattache à la raison sont les mêmes objets que ceux des passions, sauf qu'ily a un éloignement, une mise à distance. Un mal venu de loin est plus facilement rationnalisé qu'unmal proche qui provoque directement des émotions. Paramètre de la distance et du proche.

&4 = Si l'entendement a un fond passionnel, le principe rationnel du meilleur choix possible nese vérifie pas toujours : le plus souvent les hommes ne suivent pas le jugement émanant de leurraison, ce qui prouve bien l'influence des passions.La volonté n'est jamais influencée que par les passions calmes ou violentes . La volonté n'est pasune passion en elle-même car c'est un ingrédient essentiel de toutes. Pour autant il faut distinguervolonté et désir = la volonté n'est pas seulement la simple expression consciente du désir mais ellesuit le désir sans pour autant s'y réduire ; la volonté apparaît quand il semble à l'esprit qu'il peut agirefficacement , quand les circonsatnce mettent l'esprit en situation de concevoir l'action sous lamodalité du possible ; ce n'est pas une pure réaction instinctive ou impulsive comme le désir, c'est laconscience que nous avons de créer une idée ou un geste nouveau : def volonté = “l'impressioninterne que nous sentons et dont nous sommes conscients lorsque nous donnons naissanceintentionnellement à un nouveau mouvement de notre corps ou de notre esprit” TNH II, III, 1 p.245. C'est une anticipation réfléchie de l'entendement sur les moyens d'atteindre un but, laréalisation du désir. Le désir enclenche l'acte volontaire car ce que nous voulons c'est toujourssatisfaire un désir et la volonté n'intervient que lorsqu'une initiative consciente et délibérée estpossible. Donc elle n'est réductible ni au désir (impulsion brute) ni à la raison (règles logiques sansvie). Rapport moyen/ fin comme volonté/désir. VOLONTE = provoquer sciemment un mouvement du corps ou une perception de l'esprit en visantl'apparition d'un plaisir ou la disparition d'une douleur donc toujours intéressée et affectée,déterminée par les expériences concrètes de plaisir et de douleur. Variante du désir qui appartientaux passions directes. Ne pas distinguer le pouvoir et l'exercice de la volonté. Non puissance dechoix symbolisant un commencement absolu. Elle “intervient à chaque fois que l'on peut seprocurer la présence d'un bien ou se débarrasser d'un mal par une action quelconque de l'esprit oudu corps” (I, 2). Mais ce n'est pas la raison qui décide de la différence entre bien et mal car seule ladimension affective de notre expérience décide de la valeur de nos jugements de valeur.

En cas de conflits passionnels, les passions calmes ou violentes prédominent selon le tempéramentet la disposition de la personne concernée. La force d'âme (vertu stoïcienne) n'est que la“prévalence des passions calmes sur les passions violentes”. Les passions calmes sont alorsdominantes et paradoxalement plus fortes que les violentes (les plus fortes ne sont pas toujours lesplys bruyantes) : ici Hume semble encore un peu tributaire de l'opposition entre raison et passionsauf qu'elle se déplace à l'intérieur des bonnes et mauvaises passions lesquelles ne sont pas figéesmais circonstancielles. A une passion ne peut s'opposer qu'une passion contraire et cette passion nepeut pas provenir d'une raison extérieure.Ce qui rend difficile la prévision des actes humains : le résultat d'une telle lutte est imprévisible et ladiversité des passions incommensurables. Au paramètre de la proximité vient s'ajouter celui del'intensité.“ Cette lutte de la raison et de la passion diversifie la vie humaine et rend les hommes

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non seulement différents les uns des autres mais encore différents d'eux-mêmes à des momentsdistincts” TNH p. 288

EN RESUME :

La pratique de l'entendement détermine le détail de la nature en procédant par extension car ds lanature tout objet peut être cause ou effet. Alors que dans la pratique morale les éléments sontimmédiatement donnés, et au lieu d'être , partielles, les parties sont exclusives, partiales. Dans ledomaine de l'affectivité, la même contrainte empiriste impose une genèse du moi pratique à partirdes passions (surtout indirectes) : genèse du moi propre qui résulte de la liaison des impressionsentre elles par plaisir et douleur mais aussi genèse du moi d'autrui, par sympathie. Le moi ne peutêtre cause ni principe, il est plutôt effet # cogito ou esprit cartésien.

“L'esprit n'est pas sujet, il est assujetti” DELEUZE (Empirisme et subjectivité)

Donc double csqce morale : il n'y a pas d'idée de causalité libre se déterminant par elle-même / iln'y a pas de morale absolue ou universelle puisque la raison est dominée par l'imagination et lespassions. C'est ds l'imagination que Hume cherche l'unité des hommes, montrant que même laraison qu'on lui opposait jusqu'ici ,est le fruit de notre imagination. La liberté n'est pas exclue maisle problème est posé différemment car on ne part plus du présupposé d'une volonté absolue etinfinie comme Descartes ni de la condamnation morale des passions : la liberté s'établit par lasatisfaction de l'intérêt sensible. La liberté est la mise en oeuvre de l'intelligence au service de lasatisfaction de la vie.

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SECTION VI= les causes de la violence ou du calme des passions

Cette dernière section porte sur la conversion d'une passion en une autre, y compris dans le casde passions différentes ou contraires, calmes (sentiment de beauté ou de laideur) et violentes(amour, haine, chagrin, joie). Puisque la raison logique ne peut agir sur les passions et que la notionde raison morale n'a pas de sens pour Hume, la véritable confrontation ne se produit qu'entredeux passions, l'une violente et l'autre calme, qui exerce une fonction d'équilibre, indipensable aumaintien de la vie. Jusqu'ici les lois et les circonstances des passions avaient été abordées en faisantabstraction de la question de l'intensité ; l'originalité de la dernière section vient de ce que ces loiset circonstances sont à nouveau parcourues mais comme source de puissance et de variationémotionnelle, l'intensité du vécu. L'écriture s'accèlère, les & sont plus courts, chacun amenant unenouvelle proposition sur ce qui fait décliner ou accroître les passions.On peut y distinguer deux séries de principes : * la combinatoire des passions entre elles (&1-4), quand nous sommes soumis à plusieursmouvements affectifs, l'intensité s'associe à la fusion des passions ;* les facteurs externes (&5-9) qui jouent sur l'intensité des passions : incertitude, absence,habitudes, imagination.

“Les passions violentes ont une influence plus puissante sur la volonté (…) les passions calmessont capables de les maitriser (…) une passion calme peut facilement se transformer en unepassion violente (...)” TNH p. 288

&1-2 = La fusion des passionsPremière constante dégagée par Hume = deux passions distinctes qui coexistent dans l'esprit nesauraient demeurer longtemps séparées. La puissance de l'une entraîne la connexion de l'autrecomme par un effet d'attraction. Et toute l'énergie accumulée des deux affects se concentre surl'objet de la passion dominante.De même que le mouvement d'un corps peut se trouver accéléréquand un autre lui imprimre une force nouvelle ; seule différence : ici les passions peuvent allerdans des directions différentes voire contraires. Lorsqu'une passion en avale une autre, elle le fait envertu de l'attraction ; une passion forte absorbe une passion plus faible pour en faire une partied'elle-même et s'accroître à partir de là. Cette propriété n'a rien de magique : elle résulte de la duréede l'émotion qui accompagne toute perception. L'émotion dure plus longtemps que la perceptionelle-même donc est capable de se transfuser dans une autre émotion au point de la convertir en elle.Et ce même quand le principe de ressemblance ne s'applique plus. Cf instrument à cordes.Référence à Virgile : “L'espoir qui s'ajoute à la colère l'attise” pour montrer la transfusion entrel'espoir (sentiment de la probabilité d'un bien à venir) en passion violente (la colère, parimpatience). Dynamique paradoxale donc. Les conflits entre passions contraires, loin de produireéquilibre ou atténuation réciproque, engendrent bcp d'agitation. Elles s'attisent mutuellement.

On ne peut donc changer les passions par un raisonnement, mais on peut les infléchir.CF Passions et politique = pour gouverner les hommes il est important de savoir jouer sur lespassions, utiliser les affects en alimentant la curiosité du peuple ou en provoquant l'anxiété dans lebut de paraître comme la seule issue possible (sans nous ce serait pire). De même, l'apparat militairepeut être utilisé pour donner du courage. Là encore il y a une ambivalence passionnelle.Même si l'existence humaine commence par l'égoïsme, la sympathie dépasse l'intérêt personnel et sedéploie par degrés vers le corps social : les passions ont utiles à la société, elles produisent du liensoial, ce que prouvent les hommes politiques et le militaires. L'exemple du courage militaire prouveencore que les mêmes objets (parade militaire) sont investis de passions opposées (courage, fiertéou peur, abbatement) selon les orientations et les points de vue.

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CF Sophistique et l'art de persuader comme mauvais usage de la rhétorique, cuisine de l'âme,contrefaçon de la justice, qui utilise les affects et les raisonnements fallacieux pour faire adhérer àune opinion, qui frappe l'imagination pour mieux susciter l'adhésion et parasiter la pensée. Fénelon :“A Athènes tout dépendait du peupe et le peuple lui-même dépendait des orateurs”.CF MACHIAVEL =

&3-4 = Les passions peuvent être rendues violentes lorsqu'elles se fondent entre elles alorsqu'elles ont des directions contraires D'où l'idée très nouvelle qu'il y a des passions calmes ou violentes selon leur force :traditionnellement (les métaphysiciens comme le sens commun) on ne considère qu'il n'existe queles passions violentes, sans tenir compte des variations d'intensité ; les grandes passions sontviolentes car sans distance à l'égard de l'objet passionnel et déterminent des comportements. Lespassions calmes sont plus stables, moins nettement éprouvées par le sujet et déterminent desjugements ou des lignes de conduite (sens moral, raison, sens de la beauté etc.). En réalité, cespassions ne diffèrent pas fondamentalement les unes des autres, mais diffèrent simplement en degré.CF SCHEMA 4 PASSIONS CALMES ET VIOLENTESCette différence de degré aura néanmoins un effet différent sur l’esprit.Les passions calmes, qui sont les plus courantes, existent longtemps dans l’esprit et conduisent lapensée d’une manière parfois insensible et inconsciente. Au contraire, les passions violentes sontépisodiques, puissantes, beaucoup plus sensibles. Elles s’épuisent aussi plus rapidement. Ces deuxtypes de passions font partie de la même échelle de degrés et sont tous deux indispensables aufonctionnement de l’esprit. Bien qu’une pensée « calme » soit plus propice à l’exercice de laphilosophie et moins dangereuse, les passions violentes sont également nécessaires : en effet, cesont les plus actives, et Hume compare lui-même la philosophie à la chasse en expliquant quel’enquête philosophique vise à débusquer des vérités qui ne se laissent pas prendre toutes seules.

Une passion dominante (l'amour) peut se nourrir de passions concomitantes mêmes si elles sontantagonistes (colère, haine). Cf Phèdre et l'hainamoration de Lacan. La passion amoureuse (plaisante) peut se nourrir desmorsures de la jalousie (déplaisante).

Voire même, le désir s'accroît grâce à cet antagonisme. L'évocation de devoirs (duty) aux enfants ouadultes ne permet pas toujours de se libérer des passions, comme les lois qui interdisent qqchoseengendrent le désir de transgression : le désir augmente avec l'interdit car il se nourrit de ce qui luimanque ou lui demeure inaccessible. Donc en cas d'opposition, la passion la plus forte grossit alorsqu'elle devrait être limitée par les obstacles qu'elle rencontre. Il n'est rien qui augmente plus lapassion que la confrontation à un obstacle car le voile ou l'obstacle stimule l'imagination. Il y auraitdonc une bonne et une mauvaise manière de faire se combattre devoir et passions : la mauvaisemanière serait d'aiguiser l'appétit immoral par la représentation du devoir, alors que le combat estperdu d'avanace ; la bonne manière serait de développer la “force d'âme” citée en section V p. 88càd que la notion de devoir devienne une passion calme dominant les autres, un amour ferme etconstant. Seule la culture des passions calmes semble efficace.(Cf Shakespeare Macbeth)

&5-6 = les autres facteurs peuvent jouer dans des directions opposées ; ainsi la certitude d'obtenirce qu'on désire peut autant si elle est faible attiser le désir que la certitude absolue peut l'affaiblir ;les effets de l'incertitude et de la dissimulation sont semblables à ceux de l'interdit ; en revanchesécurité et désespoir affaiblissent et calment les passions. Cf balancement espoir et crainte section Imais accentués du fait de la passion déjà existante.

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Cf stratégie de séduction liées au fait que l'être désiré n'est pas un objet fixe que l'on peut possédermais un être changeant, susceptible de nous échapper, autant de contuites imprévisibles quirenforcent la passion (cf Valérie)

&7= les effets de l'absence = ainsi, selon les situations, une même cause peut venir renforcer ouapaiser les passions ; ce sont les effets de l'absence. Les passions les plus vives ne sont pasforcément les plus fortes : c'est ce que révèle l'épreuve de l'absence.CF LRF, Maximes, 276 “L'absence diminue les médiocres passions et augmente les grandes,comme le vent éteind les bougies et allume le feu”.

&8 = les effets de l'habitude ou de l'inhabituel ; la force de l'habitude engendre un sentimentd'usure tandis que la faible habitude donne une intensité plus élevée au ressenti ; les passions sedistillent en fonction du tempérament des individus et de l'objet, ce qui multiplie les cas de figurepossibles.

&9 = les effets divers de l'imagination (proximité du souvenir, habitude, éloquence) sur lapuissance des passions sont à nouveau soulignés ce qui prouve encore que le noeud du problèmen'est pas dans la relation entre raison et passion chez Hume mais dans la relation entre imaginationet passions. Lorsque la manière dont nous imaginons qqchose est vive, la passion associée seraégalement intense. Mais si l'imagination rencontre un obstacle, elle peut également affaiblir lespassions. Tout cela confirme qu'une passion ne suarait être bonne ou mauvaise, car certains facteurspeuvent autant multiplier que diviser le coefficient de force des passions. Neutralité axiologique.

Sujet inépuisable. On ne saurait en proposer une science achevée mais on peut en étendre laconnaissance et faire accéder le champ de la morale au même degré de certitude que la philosophienaturelle. La mise en évidence des mécanismes des passions et de leurs transfusions montre qu'il estpossible d'étudier la régularité des phénomènes moraux comme les physiques. Hume termine surune note plus optimiste que dans le TNH.

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CONCLUSION GENERALE : Peut-on parler d'une morale humienne ?

La section VI a construit implicitement un pont entre dynamique et éthique, entre la théorie deslois des passions et une théorie cherchant les moyens de favoriser la domination des passionscalmes sur les passions violentes, même si elle ne prescrit aucune conduite à adopter face auxpassions et ne fait qu'énumérer des circonstances. Est-ce à dire qu'un usage réfléchi des passions estpossible ou souhaitable pour Hume ? La connaissance des passions est un prélude au pouvoirsur les passions, puisqu'en les comprenant on peut les faire varier, agir sur elles Pourtant Humesouligne plutôt la prééminence des passions sur la raison dans la détermination de la volonté.Les passions sont des faits (ce qui est le cas) : comment établir des normes (ce qui devrait être)à partir du pur constat de leur existence et des lois qui les gouvernent ? De plus, la diversitéévenementielle fait échouer d'avance toute tentative de morale a priori, même si leur pluralité estréduite à un certain nombre de cas exemplaires, grâce aux règles générales qui normalisentl'expérience. Or, la règle générale paraît elle-même issue d'une réflexion de la passion dansl'imagination d'où un pbl de circularité logique : ce qui est sensé réguler les passions est lui-mêmeun résultat des passions. Comment réguler le passionnel par du passionnel ?

Plusieurs points semblent interdire une morale humienne au sens classique =* La raison est impuissante = En effet, la conception d'une idée susceptible de constituer un motifpour la volonté ne suffit pas : il faut que cela s'accompagne d'un certain plaisir ou douleur, sanspassions elle restera sans effets pratiques. Le bien et le mal ne sont connus que par le sentiment, leplaisir ou le malaise qu'on éprouve devant certains actes ou attitudes. La raison est d'essencethéorique donc ne saurait nous révéler ce qui est désirable ou non. Elle n'intervient que pour juger lasituation présente (cet homme est ds le besoin) et des moyens de satisfaire les volontés, mais elle necause l'action que de manière oblique (pour l'aider il faut lui trouver un travail). Donc la morale nesaurait se déduire de manière logique et mathématique comme le prétendant Descartes grâce à unefaculté de juger du bien et du mal qui serait innée en chacun de nous. Fin de la suprématie de laraison comme faculté supérieure et absolue.* Réciproque du principe précédent = Les passions constituent le fond sur lequel nous nousconstruisons tous et entièrement. Le comportement moral, de ce fait, reste subordonné aupassionnel : ce qui devait combattre les passions repose sur les passions donc toute morale dudétachement semble sapée dans ses fondements mêmes. La morale est affaire de sentiment. C'est laforce seule des passions qui détermine le choix de la volonté. Règle de la liberté : la volonté qui estaussi une espèce de passion, produit une image d'elle-même et se meut ds tous les sens.PuisqueHume divise les perceptions de l'esprit, c'est-à-dire tout ce dont nous pouvons avoir connaissance,en impressions et idées, il s'ensuit que la morale relève soit d'un discernement rationnel (idée), soitd'une certaine impression qu'il s'agirait d'identifier. Pour établir le second terme de l'alternative, ildoit suffire, aux yeux de Hume, de réfuter la première hypothèse. Le Livre III du Traité commencedonc par une réfutation détaillée du rationalisme en morale.

* L'intérêt personnel semble prédominer puisque chacun ne recherche toujours que son propreplaisir en priorité :« Il n'est pas contraire à la raison de préférer la destruction du monde à uneégratignure de mon doigt » (TNH). Phrase qui fit scandale et qui empêcha de comprendre laphilosophie morale de Hume voire fit considérer qu'il n'y en avait pas. A l'atomisme passionnelrépondrait un individualisme moral = indifférence de l'individu à ce qui n'est pas lui (jusqu'ausolipsisme= solitude chaque conscience avec elle-même). C'est l'émotion agréable ou désagréablequi détermine l(a)'(dés)approbation morale. D'où la difficulté pour dériver les jugements moraux derègles rationnelles : la tradition sentimentaliste dont il hérite oblige à tenir compte de la variété,l'inégalité et la diversité des circonstances. Le sens moral n'est alors que le plaisir pris à la

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considération d'un acte, ce qui engendre notre assentiment. Or, dans la morale classique, touteintention ou action morale doit être désintéréssée (cf Kant). La vraie cause de la morale est lapassion, càs une impression seconde ou réflexive de plaisir ou de déplaisir : morale de l'utileet de l'agréable. Morale qui sait calculer et se rendre à l'évidence du sentiment : “Il n'est pas decréature humaine à laquelle la vue du bonheur ne donne du plaisir et celle du malheur, undéplaisir”. (EPM). L'homme des salons sait que l'on préfère toujours le gai luron au taciturne. Lebeau visage à un corps mutilé, que c'est une affaire de goût. Règle de l'intérêt : la femme ne peut pasphysiquement donner de certitude à son mari que les enfants sont biens de lui / donc une fois lapassion réfléchie ds l'imagination, cette passion prend un contenu social et fait apparaître l'exigencede vertu et de fidélité de la femme.

* La vertu est plus une convenance sociale qu'une conviction intime : la morale est affaire desens commun. S'il y a une certaine universalité des principe de moralité cela ne vient pas de leurpréexistence dans le monde des valeurs intelligibles mais d'une certaine unité de la nature humainequi s'accorde sur certaines règles fondamentales. La société ne se développe qu'en secondant lespassions au lieu de les contredire. La qualification morale d'un caractère vient de sa conformité à lamoyenne des sentiments, actes vertueux qui sont motivés par les passions les plus courantes. Lamorale est d'abord l'inscription des moeurs dans les coeurs.VERTU = disposition approuvée par les autres et répondant à deux principes : l'utilité etl'agrément ; le tableau des vertus peut se lire selon deux axes majeurs : naturalité / artificialitédes vertus ; utilité/agrément de leur manifestation. On ne peut la définir a priori car se reconnaîtau plaisir de sympathie éprouvé par le spectateur d'une disposition à la vertu (et non d'un actevertueux) ; chacun est l'herméneute du comportement d'autrui chez qui il décèle un caractèreplaisant ou non. Sentimentalisme qui est un intentionnalisme. On peut relever les décisionsmorales pour en faire un catalogue raisonné mais ce sont des pratiques déterminées par des passionsdont elles sont le signe, rien de plus, donc philosophie morale très modeste. Si on peut y remonterdirectement elles sont naturelles, spontanées, si on a recours au medium d'un intérêt, elles sontartificielles (« devoirs moraux dont on s'acquitte uniquement par un sentiment d'obligation » ; exjustice, fidélité, pudeur etc.). Les vertus artificielles ne peuvent s'accomplir qu'avec la participationde tous et dépendent de deux obligations : morale (coutume et sympathie) et naturelle (intérêtpour origine). On distingue celles qui sont utiles de celles qui sont agréables = Sentiment dont le principe est une impression de plaisir ou de douleur, considéré comme un effetde la sympathie ou de la bienveillance. Phénomène de contagion passionnelle, la sympathie esttoujours dotée de degrés de préférences, mais capable d'être étendue ou corrigée par des règlesgénérales. Pas de morale naturelle ni innée = La morale ne constitue pas directement l’homme, elle ne faitpas immédiatement partie de la nature humaine, elle ne structure pas naturellement son esprit nin’émane naturellement de lui (contrairement à l’entendement et aux passions). Si Hume s’yintéresse, c’est parce que les deux premiers moments seuls suffisent à modéliser l’individu. A la findu livre II du Traité, le modèle est achevé. Il n’y a plus grand-chose à y ajouter. Pourtant, en resterlà ne serait pas satisfaisant : il faut tester les input et les output de manière déductive, systématique,et plus seulement « au coup par coup » (ce que faisait Hume avec les exemples du livre I). Lephilosophe doit par conséquent mettre son modèle en situation pour voir ce qu’il donne. Cela,Hume le fait en décrivant la genèse de la société, et avec elle celle de la morale et des vertusartificielles (par opposition aux vertus dites naturelles et spontanées).La nature humaine ne change pas : elle est anhistorique (bien qu’elle ne puisse être connue,car expérimentée et progressivement comprise, qu’à travers l’histoire). C’est la morale, sonoutput normatif concret et changeant, qui l’est.La morale est faite de qualités que l’on loue ou que l’on blâme. Elle est faite de vertus et de vices.Parmi les vertus, certaines sont naturelles (c’est-à-dire apparaissent immédiatement et

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spontanément à partir de la seule nature humaine), d’autres sont artificielles (c’est-à-diren’apparaissent que progressivement, à travers l’histoire, et dans le cadre de circonstancesparticulières). De toutes les vertus artificielles, la plus importante est la justice. Hume la décritcomme une vertu artificielle, car elle dépend non seulement d’une passion (comme toutes lesvertus), mais aussi de la propriété. Si nous sommes vertueux c'est parce que la vertu est bénéfique à notre situation : l'expérienceprouve que nous sommes dans un monde où il faut composer des intérêts. Dans une sociétéd'abondance, les règles de justice sont moins nécessaires alors que dans la pénurie on a plus intérêtà respecter les règles de justice. Il entre du calcul dans la vertu mais nous sommes perfectiblesquand même : “Nous sommes naturellement partiaux envers nous-mêmes et nos amis ; mais noussommes capables d'apprendre les avantages qui résulteraient d'une conduite plus équitable”(EPM).

MAIS * Pas de relativisme moral pour autant : Les jugements moraux existent : on peut toujoursadmettre qu'il y a désaccord sur ce qui est moralement bon ou mauvais mais il y a des distinctionsmorales et elles ne sont pas que des illusions. Les jugements moraux sont des faits, et même si ils nesont pas fondés rationnellement, ils ne sont pas pour autant relatifs aux moeurs et aux époques. Il ya une certaine uniformité dans la nature humaine, des constantes morales : la fidélité commeprincipe moral par ex. “Nous ne pouvons pas plus changer nos propres sentiments que lesmouvements des cieux” TNH III, II, 5.* Pas de cynisme non plus : Une moralisation du caractère est encore possible ; elle repose surla victoire de certains affects sur d'autres. Les passions calmes constituent la nature humaine dansson cours ordinaire et font les moeurs et les manières des gens ou des peuples. Les passionsviolentes restent exceptionnelles, liées à des circonstances particulières, les passions calmes sontdes passions fondamentales qui demeurent les mêmes et constituent l'élément de la vie active(l'amour de la vie, la recherche du bien). Elles peuvent devenir offensives si elles sont en dangermais étant communes à tous les hommes et continuelles. Ex : l'avidité , qui pourrait être unepassion destructrice de la société, contraint les hommes à inventer l'économie, à régler les échangesdans le cadre du droit commercial etc. « Devoir » chez Hume n'est pas une obligation raisonnableissue du dehors et venant s'imposer aux passions du dehors = c'est une relation de fait entre raison etpassion. Il n'y a pas de raison pratique qui serait souveraine face à des passions rebelles. L'exercicede la raison même s'il est postérieur aux préférences du sentiment, vient étendre et corriger lesimpulsions affectives.

* Pour autant il ne tombe pas totalement dans l'utilitarisme de Bentham (doctrine éthique quiprescrit d'agir (ou ne pas agir) de manière à maximiser le bien-être global de l'ensemble des êtressensibles, une forme de conséquentialisme, évaluant une action (ou une règle) uniquement enfonction des conséquences escomptées, qui se distingue de la morale rationnelle kantienne où c'estl'intention qui compte ; le fondement de toute société étant la recherche du bien être) car l'agréabletempère l'utile : “il a toujours quelque objet en vue” et “il agit, parle, ou pense rarement sans but niintention” mais cela vise son bonheur donc plus pragmatique qu'utilitariste / ni dansl'hédonisme (le plaisir est le seul moyen de faire le Bien) car tous les plaisirs ne sont pas bons àprendre et risquent de contredire nos intérêts. Le jugement moral n'est pas une forme prise parl'intérêt personnel : même si la contemplation de la vertu est agréable et celle du vice pénible (ennous ou chez autrui), c'est un plaisir moral particulier qui est une conséquence mais non le butrecherché. L'appréciation di vice et de la vertu est une perception, une impression, comme tout lereste, qui a donc un objet (le caractère de telle personne) et une émotion correspondants (sentimentprovoqué). Apprécier moralement, c'est éprouver un plaisir particulier à contempler un caractère.

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* La sympathie : La sympathie est le coeur battant de toute cela au sens que l'on peut tenter dese mettre à sa place en épousant ses valeurs mm si c'est une fiction : on peut sympathiser avecdes situations qu'on ne vivra jamais. Elle fait entrer l'individu dans le point de vue de ceux qui luisont +/- proches. On épouse la partialité des autres, plutôt que l'intérêt de tous. La sympathie estl'adhésion désintéressée aux intérêts des autres, une sorte de générosité restreinte.L'approbation morale est une modification de l'amour produite par les seules qualités de l'esprit.C'est pourquoi l'orgueil peut être source de vertu comme conscience morale lucide, seuls ses excèsou son exubérance sont condamnables car alors devient illusoire. Ainsi, la vertu vient du plaisirauquel je participe en voyant une personnalité utile ou agréable à elle-même et aux autres : lamorale est donc essentiellement l'appréciation du spectacle des affaires humaines.

CL /TR = Les passions chez Hume forment un monde car 1) les passions sont une manièreoriginale de se rapporter au monde dlmo il rend compte des variations de notre rapport affectif aumonde selon la déclinaison des modes du plaisir et de la peine ; 2) système d'objets « naturels »descriptibles car possédant des mécanismes internes (il y a une nature en l'homme dlm où l'hommeest déterminé, passif r/ à ses affects ET une nature humaine dont le propre est d'être passionné) ;système où interagissent les éléments entre eux : les passions forment un système ordonné et onpeut faire ressortir leur régularité en se référant au modèle des sciences physiques ; on peut dégagerdes lois auxquelles toutes les passions obéiraient 3) les passions ne restent pas confinées dans la vieintérieure mais investissent et changent le monde autour d'elles puisqu'elles déterminent la volontéet l'action humaines : le monde humain est le monde des passions dlm où il en résulte ; le mondedes passions donne naissance à d'autres mondes comme celui de l'art, de politique ou de la religion.En quoi la comédie humaine de Balzac nous fait-elle pénétrer dans un monde passionnel ?

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