Cours d'Histoire Des Science 2011

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Cours d’histoire des sciences 1 ere année LMD ST Faculté des sciences et de la technologie Jijel ( 2010-2011) Définition de la Science Il paraît logique, avant d’entreprendre une histoire des sciences, de définir ce qu’on entend par science. Le mot lui- même vient du latin scientia dont la racine est scire, qui veut dire “savoir”. LE ROBERT définit la science comme Tout corps de connaissances ayant un objet déterminé et reconnu, et une méthode propre ; domaine du savoir, en ce sens. Il n’y a donc pas une science, mais des sciences, chacune caractérisée par un ensemble de pratiques plus ou moins différenciées, des mathématiques à la sociologie en passant par la comptabilité ! La définition de science utilisée dans ce cours est plus restrictive. Il s’agit plutôt d’une tentative systématique de connaissance de la Nature par des voies rationnelles . Autrement dit, nous ne considérons que les sciences de la Nature, ce qu’on appelait autrefois la Philosophie naturelle. En langage moderne, ceci signifie la physique, la chimie, la biologie et les disciplines connexes (astronomie, géologie, etc.), auxquelles on ajoute les mathématiques. La place des mathématiques est singulière, car il s’agit d’un ensemble de concepts et de méthodes dont l’objet n’est pas exclusivement l’étude de la Nature, mais qui s’étend à pratiquement toute l’activité humaine. Nous les incluons tout de même dans notre étude, en raison non seulement de leur importance fondamentale dans l’évolution des connaissances sur la Nature, mais de leur place centrale dans l’évolution de la pensée humaine. En contrepartie, ce cours se trouve à exclure les éléments suivants : 1. Les parties de la philosophie qui ne s’intéressent pas directement à la Nature ou au processus de connaissance de la Nature. 2. Les sciences humaines en général. 3. Les techniques et la technologie, sauf dans les cas où leur relation avec le développement scientifique est

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Cours d’histoire des sciences 1ere année LMD ST Faculté des sciences et de

la technologie Jijel ( 2010-2011)

Définition de la Science

Il paraît logique, avant d’entreprendre une histoire des sciences, de définir ce qu’on entend par science. Le mot lui-même vient du latin scientia dont la racine est scire, qui veut dire “savoir”. LE ROBERT définit la science commeTout corps de connaissances ayant un objet déterminé et reconnu, et une méthode propre ; domaine du savoir, en ce sens.Il n’y a donc pas une science, mais des sciences, chacune caractérisée par un ensemble de pratiques plus ou moins différenciées, des mathématiques à la sociologie en passant par la comptabilité !La définition de science utilisée dans ce cours est plus restrictive. Il s’agit plutôt d’une tentative systématique de connaissance de la Nature par des voies rationnelles. Autrement dit, nous ne considérons que les sciences de la Nature, ce qu’on appelait autrefois la Philosophie naturelle. En langage moderne, ceci signifie la physique, la chimie, la biologie et les disciplines connexes (astronomie, géologie, etc.), auxquelles on ajoute les mathématiques.La place des mathématiques est singulière, car il s’agit d’un ensemble de concepts et de méthodes dont l’objet n’est pas exclusivement l’étude de la Nature, mais qui s’étend à pratiquement toute l’activité humaine. Nous les incluons tout de même dans notre étude, en raison non seulement de leur importance fondamentale dans l’évolution des connaissances sur la Nature, mais de leur place centrale dans l’évolution de la pensée humaine.En contrepartie, ce cours se trouve à exclure les éléments suivants :1. Les parties de la philosophie qui ne s’intéressent pas directement à la Nature ou au processus de connaissance de la Nature.2. Les sciences humaines en général.3. Les techniques et la technologie, sauf dans les cas où leur relation avec le développement scientifique est particulièrement étroite, notamment dans le dernier chapitre, qui porte sur l’informatique.Les qualificatifs systématique et rationnel dans la définition de la science donnée plus haut sont essentiels.Le premier signifie que les connaissances acquises doivent former le plus possible un tout cohérent, autrement dit qu’on ne doit pas faire appel à de nouveaux principes à chaque fois que se présente un nouveau phénomène ou une observation nouvelle : en autant que faire se peut, les connaissances doivent former un système. Le deuxième signifie que les connaissances acquises doivent être soumises aux règles élémentaires de la logique et faire le plus possible abstraction des émotions, des pressions sociales, bref, de notre condition humaine. Ce qui précède est évidemment plutôt imprécis : c’est le rôle de l’épistémologie de préciser ces notions. Nous espérons qu’une idée plus claire de ce que constituent la science et la méthode scientifique émergera de ce cours.Certaines sociétés savantes, dans le but de démarquer la science de pratiques qu’elles considèrent plutôt comme des pseudo-sciences, tentent d’en donner une définition basée sur ses méthodes et ses effets plutôt que sur des champs d’étude précis. Ce qui suit est une définition de la science soumise par l’American Physical Society (APS) :La science agrandit et enrichit nos vies, ouvre notre imagination et nous libère des servitudes de l’ignorance et de la superstition. Les sociétés savantes soussignées désirent énoncer les préceptes de la science moderne qui sont responsables de son succès.

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La science est l’entreprise systématique d’acquérir des connaissances sur le monde, d’organiser et de synthétiser ces connaissances en lois et théories vérifiables.Le succès et la crédibilité de la science prend sa source dans la volonté des scientifiques de1) Soumettre leurs idées et résultats à la vérification et la reproduction indépendante par d’autres scientifiques, ce qui nécessite l’échange complet et ouvert des données, procédés et matériel.2) Abandonner ou modifier les conclusions acceptées lorsque confrontés à des évidences expérimentales plus complètes ou fiables.L’adhésion à ces principes procure un mécanisme d’auto-correction qui est le fondement de la crédibilité de la science.Science, techniques et technologie Une technique est un corps de connaissances pratiques visant à exercer une action de manière efficace sur la matière. En général, les techniques anciennes ont été mises au point sans qu’une connaissance rationnelle et systématique de la Nature soit nécessaire.Chaque domaine pratique disposait de règles empiriques, peut-être obtenues par essai et erreur au fil des générations et transmises sans explications générales. C’est la période des artisans et des corporations de métier. La contemplation des cathédrales gothiques ou des pyramides d’Égypte suffit à interdire tout mépris à l’égard des ces connaissances pratiques “non scientifiques”.Depuis environ deux siècles, les progrès de la science et des techniques s’influencent et se favorisent mutuellement. Il est donc impossible de séparer complètement science et techniques, car l’état de l’une dépend des progrès de l’autre. Les méthodes d’acquisition de connaissances pratiques sont de nos jours proches des méthodes utilisées dans l’acquisition de connaissances sur la Nature.L’ensemble de ces méthodes peut sans trop d’erreur être qualifié de “méthode scientifique” et les connaissances pratiques résultant de l’application de ces méthodes sont, avec raison, qualifiées de “scientifiques”. Ce mariage de science et de techniques porte le nom de technologie. De façon grossière, on peut affirmer que la technologie est la “science au service de l’humanité”. Il serait plus juste de parler de technologies au pluriel, car chaque domaine d’activité fait appel à des ressources scientifiques en proportions différentes, que ce soit la microélectronique, le génie mécanique, la médecine thérapeutique, etc. En résumé, la science (au sens strict) et la technologie diffèrent donc par leur objet, même si leurs méthodes sont apparentées.Ce cours, par choix, se limite à l’étude des sciences naturelles et des mathématiques. Les progrès techniques réalisés dans les temps anciens sont délibérément négligés, en dépit de leur immense intérêt. Cependant, les allusions aux progrès techniques se feront de plus en plus nombreuses au fur et à mesure que le récit se rapprochera de nous dans le temps.Thèmes couverts dans ce cours Avant de s’engager dans un cours d’histoire des sciences aux dimensions restreintes comme celui-ci, plusieurs avertissements sont de mise. Premièrement, le sujet lui-même est si vaste qu’un cours de trois mois ne peut absolument lui rendre justice et que les sujets couverts par le cours, ainsi que la profondeur de leur couverture, doit faire l’objet d’un choix judicieux. Il faut exercer un certain nombre de compromis en mettant en balance l’importance des sujets choisis dans l’histoire des idées (leur caractère plus ou moins fondamental), le niveau de préparation des étudiants à l’étude de ces sujets et, enfin, l’expertise particulière du professeur, adéquate dans certains sujets et minimale dans d’autres.L’importance des sciences physiques dans ce cours, par rapport à la biologie, tient d’une part à l’expertise du professeur et, d’autre part, à leur développement relativement ancien, bien adapté à l’étude de l’histoire. De plus, nous voulons insister sur l’histoire des sciences comme “histoire des idées” et ne voulons pas tomber dans une énumération de découvertes

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particulières qui, bien que fascinantes en soi, n’ont pas remis en cause notre vision du monde. Ceci justifie l’importance accordée aux concepts de mouvement, d’énergie, de structure de la matière, d’évolution des espèces et excuse que l’on néglige la mécanique des fluides, la synthèse organique ou la physiologie des plantes.

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Partie   : 01 Les sciences de l'Antiquité au Moyen Age

Au cours des siècles, de nombreuses cultures sont apparues, se sont développées, ont produit des connaissances puis ont disparues en emportant parfois leurs connaissances. Il est intéressant de revoir l'évolution des sciences pour comprendre la société actuelle et le fonctionnement de notre communauté scientifique. Cela nous permet de voir comment certains domaines ont pu être ignorés, comprendre comment le monde à perçu les grands changements et nous préparer nous même au changement. Pour cela, nous allons voir l'Histoire des sciences avec une série d'articles ainsi divisés :

- Les sciences de l'Antiquité au Moyen Age- L'empire Musulman et la fin du Moyen Age- De la Renaissance à la Révolution Industrielle : du XVIe au XIXe siècle

I) Production de savoir avant l’avènement des sciences en Mésopotamie et en Egypte (-3500 / -700)

1/ Naissance de l’écriture   : les raisons et les buts

En -3500 on observe l’apparition de l’écriture simultanément aux premières sédentarisations.Les écrits sont alors principalement des écrits de comptables, des agendas, c'est une littérature qui concerne les précisions de développement. La création de savoir passe par l’écriture. De même, la transmission du savoir se fait par les écrits.

2/ Evolution de l’écriture

L’apparition de l’écriture en Mésopotamie serait issue d’un système de comptage de jetons à valeurs différentes, d’où la création de différents pictogrammes pour cataloguer l’argent. Ces pictogrammes se seraient stylisés pour donner l’écriture.

Entre -3000 et -2000, les pictogrammes renvoient à des sons de la langue sumérienne. Il s’agit alors d’un système complexe, long à apprendre ce qui amènera l’apparition d’une nouvelle caste : les scribes.

Le développement est supposé similaire en Egypte mais l’on n’en garde aucune trace écrite car le support est alors le papyrus qui ne se conserve pas tandis qu’en Mésopotamie l’écriture se fait sur des plaquettes d’argile.

3/ Pourquoi   ne parle-t-on pas de savoir scientifique en Mésopotamie   ?

La fonction  de Scribe demande un apprentissage long et lent ainsi qu’un investissement monétaire important mais qui donne accès à une position de prestige et bien payée.L’école des scribes est hiérarchisée :

- les scribes copistes occupent le rang le plus bas- les scribes exorcistes, exerçant une profession «religieuse »- les scribes médecins- les scribes du grenier royal (responsables des réserves alimentaires)

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L’enseignement est basé sur le par cœur et les listes : on y apprend des listes de mots, de noms, d’animaux, de chiffres … Aucun raisonnement n’est développé.On apprend des « solutions » à des situations données et par des lois et on passe par des lois ou théorèmes généraux permettant de résoudre plus de problèmes. Cela obligeait les scribes à conserver des bibliothèques avec tout le savoir nécessaire à leur travail.Par exemple pour le scribe médecin : ils apprennent la manipulation à effectuer pour chaque acte mais pas plus. C’est un travail de mimétisme de la pratique initiale.Le système numérique est hexadécimal (c’est de la que vient le partitionnement du temps en 60 minutes et secondes) et un système de fraction est développé mais leur manipulation générale est difficile.On pense que les mathématiques égyptiennes étaient plus rudimentaires qu’en Mésopotamie.

Conclusion de ce premier point:

Avec la connaissance acquise, on sait résoudre les problèmes que l’on a appris à résoudre, rien de plus : aucune grande notion abstraite n’est développée. On ne peut alors pas parler de science en Egypte ou en Mésopotamie : la science est la capacité à la généralisation et à abstraire.

II) Le savoir autour du cosmo (astronomie)   :

En Mésopotamie on trouve des calendriers très précis divisé en 12 mois lunaires pour une année, chaque mois ayant 29 ou 30 jours. Ces calendriers vont être transmis aux grecs qui vont les réutiliser. Toutefois, tous les phénomènes sont expliqués par les dieux : il n’y a aucun développement d’une science, toutes les interprétations sont liées à la religion.

On voit aussi le développement des concepts des 4 éléments (Terre, Eau, Air et Feu) qui sont associés aux dieux. Les catastrophes naturelles sont alors considérées comme des conflits entre les dieux.Chez les grecs, les dieux sont mis de côté : on commence à voir l’apparition de vraie science. Chez les babyloniens on retrouve une astrologie très développée avec des bases mathématiques mais qui reste associée à la religion.Autre point intéressant à noter: il existe de nombreux écrits à propos de l’administration, de la comptabilité ou l’astrologie mais rien concernant la chimie malgré l’usage développé qui en est fait pour les soins apothicaires, la verrerie, … C’est le début d’une forme de distinction entre art et science : l’art s’enseigne par la pratique et à l’oral tandis que la science passe par l’écrit.

III) L’avènement des sciences grecques   : L'apparition de la science

1/ Les grecs sont les premiers à séparer les dieux du quotidien grâce â leurs philosophes

Les philosophes vont demander des preuves et des arguments pour expliquer les différents phénomènes. Les grecs élaborent donc des modèles pour expliquer le fonctionnement de l’univers basés sur leurs observations. L’utilisation d’analogie est très commune : les raisonnements par analogies et comparaisons permettent d’expliquer l’invisible et l’inaccessible (le début de la vie, les phénomènes microscopiques et moléculaires….).

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On voit aussi de nouvelles disciplines apparaître tel que l’épistémologie : elle consiste à travailler sur les possibilités de réaliser des modèles pour les différents sujets d’étude et leur fiabilité. On commence à s’interroger sur la qualité de la production de science.

En résumé, les grecs vont :

- Justifier le savoir qu’ils créent- Elaborer des modèles- S’interroger sur l’invisible- Tenter d’établir la composition de la matière- Vérifier la qualité de leur science

Cela ne s’est  pas passé facilement : il s’agit d’une minorité de la population qui à apporté tout cela et elle s’est faite persécutée pour l’avoir fait….

Scienca: mot d’origine latine.Episteme: mot d’origine grecque « science », « savoir »

2/ L'apparition et la dispersion du savoir grec.

Il y avait chez les grecs une attitude plus critique suite a leurs contacts importants avec d’autres cultures (rappelons qu’à l’époque le commerce se faisait majoritairement autour de la Méditerrané).D’autres facteurs ont pu jouer : l’alphabet grec étant assez simple à apprendre notamment en comparaison avec les hiéroglyphes égyptiens ou l’alphabet babylonien, on retrouve une proportion plus importante de personnes lettrées chez les grecs.De plus le système politique grec basé sur le discours et l’argumentation force l’éducation chez les citoyens grecs notamment pour la rhétorique. Cet enseignement se fait dans des écoles avec les philosophes. Cela aura une influence sur la pensée grecque.Ce besoin de formation des citoyens à la rhétorique va mener à la création de plusieurs écoles dirigées par les philosophes. Ces écoles vont permettre aux philosophes d’avoir une source de revenus et donc de pouvoir exercer leurs talents sans contraintes. On observe donc la naissance d’un nouveau moyen de transmission de la connaissance.

On peut distinguer 3 périodes :

a) présocratique, celle des premiers philosophes:

- Thales de Milet (VIe siècle avant J.C.)

Milet était la grande cité au VIe avant J.C.

Thalès va avoir une pensée non basée sur la religion et les dieux et va expliquer la nature avec un principe premier : l’eau.Pour lui, la Terre flotte sur l’eau comme le pensaient les mésopotamiens. De plus, la terre serait entourée d’eau, ce qui expliquerait la pluie, et les étoiles seraient de la vapeur au milieu de cette eau. Les vagues seraient donc des conséquences des tremblements de terre.Thalès de Milet sera un des premiers « savants » à établir de grands principes, se distinguant des Mésopotamiens dont il reprend les concepts physiques.

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b) Pythagore de Samos (VIe siècle av J.C., -560)

Il avait établit une école assez sectaire : toutes les connaissances enseignées devaient rester au sein d’un groupe d’élus. Son travail sera beaucoup en rapport avec les nombres, les équations et il développera de nombreuses connaissances mathématiques notamment en géométrie.Il développera aussi un concept sur la sphéricité de la Terre, une architecture de l’univers et sur les mouvements réguliers de l’univers.

c) La période classique : Platon et son élève Aristote. Ils vont développer des idées très différentes malgré leur lien professeur/élève.

- Platon (environ 347 av. J.C.) est lui-même l’élève de Socrate dont il mettra de nombreux enseignements a l’écrit.

Dans l’école de Socrate, on enseigne les mathématiques (arithmétique, géométrie, astronomie, harmonique/science du rythme). Platon va donc développer l’idée d’une Terre et d’un Univers sphériques centré autour de la Terre. Cette Terre est entourée d’autres sphères que sont Jupiter, la lune, Saturne …

La Lune joue un rôle important dans la physique Platonicienne : elle définit la limite de certains « espaces » comme le sublunaire et le supra lunaire. Le sublunaire  correspond a une sphère entourant la Terre est ans laquelle on retrouve 3 couches concentriques : la Terre, une couche d’eau, une couche d’air. Le supra lunaire quant à lui est constitué d’un autre élément non identifié.Partant de la, il va développer un modèle dans lequel les lois physiques du sub- et du supra lunaires ne sont pas les mêmes et qu’il va tenter de modéliser et expliquer par les mathématiques.

Platon va initier un programme de recherche pour expliquer le mouvement des 5 planètes connues à l’époque, de la lune et du soleil grâce à modèle géométrique avec un mouvement circulaire et uniforme en utilisant des données mésopotamiennes et des mesures grecques. Tout ceci aboutira à la découverte d’un système ordonné qui contredit la conception contemporaine du cosmos. C’est une des grandes tentatives de production de modèles.

Aristote (-384 ; -322 av. J.C.) va reformuler les modèles de Platon et sa physique restera une référence jusqu’au XVIIe siècle. Il laissera de très nombreux écrits. Il proposera notamment des synthèses élaborées et cohérentes qui influenceront la pensée occidentale et arabe jusqu’au Moyen Age.

Il sera le précepteur d’Alexandre le Grand qui le protégera mais a la mort d’Alexandre, Aristote sera condamné a l’exil pour impiété. Il fondera le Lycée en -335.Sa pensée est très qualitative, peu influencée par les mathématiques. Il conçoit un monde immuable en ce qui concerne le supra lunaire. Le sublunaire par contre est malléable : le mouvement y est possible et le changement aussi. Aristote en développe les lois physiques selon sa conception du monde basée sur les 4 éléments : Air, Terre, Eau et Feu.Pour lui, chaque élément est lié à des qualités sensibles : le sec, le froid, l’humide et le chaud. Et ces éléments peuvent se combiner.

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- Eau = froid et humide- Terre = froid et sec- Air = humide et chaud- Feu = chaud et sec-

Aristote limite les mouvements à 2 types :

- Le mouvement est Naturel : les objets sont attirés par leur composant principal.- Le mouvement violent : il s’agit de mouvements contraints.

Les mouvements violents sont temporaires, le mouvement naturel étant dominant. La physique développée par Aristote ne peut fonctionner que dans le modèle d’Aristote.

Comme Platon, Aristote va créer un groupe de travail autour de lui pour travailler sur la physique et l’astronomie. Mais contrairement à Platon, Aristote va développer une conception qualitative de l’astronomie tout en reprenant l’organisation qu’avait faite Platon de l’Univers :

- Dans le supra lunaire, le monde est parfait : les planètes, étoiles et autres astres sont des sphères parfaites et ont un mouvement uniforme. Tout est immuable : le monde ne subit aucun changement avec le temps.

- Dans le sublunaire on retrouve une organisation régie par les 4 éléments et chaque chose de la nature est liée à l’un ou plusieurs des éléments.

Cette façon de penser va persister jusqu’au Moyen Age. Ses théories seront maintenues jusqu'à Galilée et Copernic. La physique et la cosmologie d’Aristote sont très liés : l’un ne fonctionne pas sans l’autre.

3/L'héritage des sciences hellènes (grecque).

Au fur et à mesure que les sciences se développent, le centre culturel va se déplacer vers Alexandrie, ville fondée par Alexandre le Grand lors de sa conquête de l’Egypte.

A sa mort, ses 3 généraux vont se partager l’empire et Ptolémée 1 er Soter (non lié au philosophe qui séjourna à Alexandrie) va reprendre la partie égyptienne, se nommer roi et faire d’Alexandrie une capitale politique et culturelle active ou le mécénat pour les arts et les sciences est très présent comme en attestent les grandes bibliothèques.Ptolémée et son fils par la suite vont chercher à rassembler toute la connaissance du monde. C’est un système financé par l’état.De nombreux savants sont liés a Alexandrie comme Ptolémée, Euclide ou Aristos de Samos qui va créer un système héliocentrique qui fut refusé par les autorités scientifiques de l’époque et ira jusqu'à estimer plus ou moins correctement certaines distances dont la distance Terre Lune. Archimède aussi séjournera à Alexandrie et y fera des études.Le savant Ptolémée, qui vécut au IIe siècle avant J.C., fera de l’astronomie et de l’optique. Il commença à expérimenter, ce qui est alors une démarche encore rare. Il reprendra toutes les connaissances en astronomie pour arriver à un modèle complexe avec des planètes tournant sur elles-mêmes et autour d’un point qui n’est pas la Terre. Ce modèle sera largement répandu par la suite.Les médecins de l’Empire Romain étaient généralement d’origine grecque comme Galien (-131 av. J.C.) qui est un savant grec qui va exercer ses talents de médecin à Rome. Il voyagera dans l’empire et va vite s’illustrer par sa capacité à guérir et deviendra le médecin officiel de

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la famille de l’empereur Marc Aurel.  Il va développer une théorie du fonctionnement général du corps humain qui sera maintenue jusqu’au XVIIe siècle.     Il ne pratiquera aucune dissection toutefois, il se limitera à l’observation des gladiateurs. Les dissections qu’il pratiquera seront sur des animaux dont les singes. Il fera aussi quelques expérimentations.Il est notamment connu pour avoir développé une procédure de la pratique de la médecine : ce sont les premiers modes opératoires.Il va aussi établir le premier modèle de circulation sanguin avec une différenciation veine/artères et dont le moteur serait le foie, le cœur servant à fournir ce qu’il appelle la « chaleur animale » et l’air. Pour lui, le foie fournit les nutriments et propulse le sang. Dans ce modèle, le sang est consommé par les organes et renouvelé par le foie.On a donc l’apparition d’une idée du mouvement du sang bien qu’on ne puisse pas parler de circulation au sens strict du terme puisqu’il ne s’agit pas de circulation fermée.La tradition grecque est qualitative : on veut trouver des lois pour expliquer la nature mais ces lois ne sont pas quantitatives. A de rares exceptions, on ne trouve pas d’expérimentation dans la science grecque : ce sont les raisonnements théoriques et philosophiques associés à l’observation qui font la base de la science.On retrouve une hiérarchie des lois : on tente de généraliser le plus possible en établissant des modèles de plus en plus généraux.

Conclusion:

Cette science est la première production de savoir avec au départ des savants philosophes seuls mais qui ont étés accompagné par la création et le développement de mécénats.Cela ne se fait pas non plus sans problèmes : certains philosophes sont jugés impies car leur explication du monde n’intègre pas les dieux.On a affaire à une tradition encyclopédique : il y a accumulation de savoir.Chez les romains, les  choses évoluent différemment : on observe une énorme capacité technique et le développement de systèmes de gestion et d’urbanisation très complexes.Avec la chute de l’Empire, les bibliothèques seront pillées et brûlées et les villes détruites ce qui provoquera des pertes importantes de savoir et techniques. C'est le moyen Age qui débute. Heureusement, l'apparition de l'Islam va sauver les sciences.

Mais ceci est une autre Histoire…….

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Partie   : 02

Sciences et techniques arabes

Les sciences et techniques islamiques se sont développées au Moyen Âge, dans le contexte

politico-religieux de l'expansion arabo-musulmane. Le monde arabo-musulman est à son

apogée du VIIIe siècle au XIVe siècle : c'est l'âge d'or de la science arabe.

Cette culture scientifique a pris son essor à Damas sous les derniers Omeyyades, puis à

Bagdad sous les premiers Abbassides. Elle débute par une traduction accompagnée de lecture

critique des ouvrages de l'Antiquité en physique, mathématique, astronomie ou encore

médecine, traductions qui concourront à la genèse d'une culture arabe « classique ».

Dans ce contexte, la langue arabe, langue du corpus sacré de l'islam, jouera un rôle essentiel

comme outil et véhicule de cette culture qui n'est déjà plus une simple transmission de la

pensée grecque car elle comporte de nombreuses innovations. La situation de carrefour de

l'Empire arabe explique également en partie les influences indiennes voire chinoises.

I- La genèse et l'essor des sciences dans le monde arabo-musulman

1- L'extension du monde arabo-musulman a mis en contact plusieurs civilisations

différentes : l'empire arabe, construit à partir du VIIe siècle, prend le contrôle politique

des territoires anciennement hellénisés (Alexandrie d'Égypte par exemple). Les

savants musulmans ont donc pu consulter les ouvrages scientifiques de l’antiquité. Au

VIIe siècle, les Arabes détruisent l'empire sassanide et sauvegardent le savoir de

l'ancienne Perse.

2- Les conquérants arabes se sont trouvés en contact avec la civilisation indienne, à l'est.

Ils ont aussi rencontré les Chinois pendant le règne du premier abbasside Abû al-

`Abbâs à la victoire de Talas. Cette victoire a été l'occasion d'acquérir un certain

nombre de techniques chinoises dont celle de la fabrication du papier. Le papier a

rapidement remplacé le parchemin dans le monde musulman : des manufactures furent

créées à Samarkand, Bagdad, Damas et au Caire.

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3- Les dirigeants musulmans ont encouragé la recherche scientifique et la diffusion du

savoir : Harun ar-Rachid (calife de 786 à 809) imposa l'usage du papier dans toutes les

administrations de l'empire. Sous l'administration de ses vizirs barmécides, Bagdad

devint la capitale intellectuelle de son époque. Des écoles et des bibliothèques furent

construites. Al-Mamun, calife de 813 à 833, avait réuni à Bagdad des savants de tous

horizons, quelles que soient leurs croyances. Féru d'astronomie, il crée en 829, dans le

quartier le plus élevé de Bagdad, près de la porte Chammassiya (du Soleil), le premier

observatoire permanent au monde, l'Observatoire de Bagdad, permettant à ses

astronomes, qui avaient traduit le Traité d'Astronomie du grec Hipparque, ainsi que

son catalogue d'étoiles, d'étudier le mouvement des astres. En 832 fut fondée la

Maison de la sagesse (Baït al-hikma).

Abu Raihan al-Biruni calcule le diamètre de la Terre, et affirme que la Terre tournerait sur

elle-même, et cela bien avant Galilée, reprenant les écrits d'Eratosthène d'Alexandrie

(IIIe siècle av. J.-C.).

La langue arabe, commune à tout l'empire, a également été un facteur déterminant dans la

diffusion des connaissances et de l'élan scientifique.

II- Mathématiques arabes 

Dans l'Histoire des mathématiques, on désigne par l'expression de mathématiques arabes

une époque importante dans le développement de cette science. Il s'agit des contributions

apportées par les mathématiciens du monde musulman, du début de la conquête au milieu du

XVIIe siècle. Les textes sont essentiellement écrits en arabe, qui était une des langues des

sciences et de la culture à cette époque, d'où le nom, mathématiques arabes.

Les sciences arabes, et en premier plan, les mathématiques, s'exercent à travers les califats

islamiques, établis en Moyen-Orient, en Asie centrale, en Afrique du Nord, dans la péninsule

ibérique, et au sud de la France au VIIIe siècle.

Ils ont conservé l'héritage grec, mais de plus, de récentes recherches ont démontré que

beaucoup d'idées qu'on pensait apportées par les mathématiciens du XVIe, XVIIe, ou XVIIIe

siècle, furent en réalité développées par des mathématiciens arabes ou par des mathématiciens

grecs dont la traduction nous fut transmise en arabe quatre siècles auparavant.

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Les mathématiques grecques ont joué un rôle dominant dans les premiers

développements des mathématiques arabes. Beaucoup de textes grecs ont survécu à

travers leur traduction en arabe.

Les mathématiques indiennes ont influencé le développement des mathématiques

arabes.

Les mathématiques chinoises ont aussi eu une influence sur le développement des

sciences arabes.

En 476, la chute de Rome marque l'effondrement de l'Empire romain d'Occident. L'instabilité

politique en Europe ne fut pas favorable à la recherche scientifique qui de toute façon n'était

pas le fait de l'Empire romain. Parallèlement, l'islam connaît dès sa naissance au VIIe siècle

une fulgurante progression. En un siècle, les territoires musulmans s'étendent d'Espagne

jusqu'en Chine.

Le monde islamique a vu, vers la fin du huitième siècle, l'apparition de trois entités politiques

concurrent, abbassides, Idrissides et Omeyyades. Ce qui a mené à l'apparition de deux séries

différentes des chiffres:

0,1,2,3,4,5,6,7,8,9 Utilisé à Fez et à Cordoue .

, , , , , , , , ,٠ ١ ٢ ٣ ٤ ٥ ٦ ٧ ٨ ٩ Utilisé à Bagdad.

Fèz la capitale culturelle et spirituelle du Maroc. Où se trouve Quaraouiyine l'établissement

éducatif existant le plus âgé dans le monde.

Bagdad, ville créée par les califes abbassides pour servir de capitale de l'Empire, devint très

vite un centre culturel avec notamment la création d'une Maison de la Sagesse sous le règne

du calife Al-Mamun. Parmi les membres de cette maison on compte le mathématicien persan

Al-Khwarizmi. Deux de ses traités ont eu un impact considérable sur les mathématiques

européennes au XIIe siècle. Le premier, dont seule la traduction latine a été conservée,

transmet la numérotation décimale. Le second traité, Kitab fi'l-jabr wa'l-muqabala (Livre sur

la restauration et la confrontation) traite de manipulations sur les équations. Le mot al-jabr a

donné algèbre.

Al-Khwarizmi a expliqué clairement dans son traité comment résoudre des problèmes à une

inconnue en utilisant deux opérations :

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1. Al-jabr : transposer certains termes dans une équation pour éliminer les valeurs négatives.

Par exemple, transformer x = 40 − 4x en 5x = 40.

2. Al-muqabala : équilibrage des valeurs positives restant dans l’équation. Par exemple, 50+x2

= 29 + 10x devient x2 + 21 = 10x.

Al-Khwarizmi explique la solution à l’équation quadratique, en particulier le fait de compléter

le carré, de manière géométrique, en s’inspirant d’Euclide.

Voyons comment il procède par un exemple (fig. ci-dessus). Supposons qu’on ait à résoudre

l’équation x2 + 10x = 39. Soit AB la longueur représentant l’inconnue x. Construisons un carré

ABCD avec cette longueur. Prolongeons ensuite les segments DA vers DH et DC vers DF, de

sorte que les longueurs AH et CF soient la moitié du coefficient de x dans l’équation, soit 5.

La somme des surfaces des régions I, II et III est alors x2 + 2 · 5x, et donc égale à 39.

Complétons le carré en ajoutant la région IV, d’aire 5 · 5 = 25, de chaque côté de l’équation.

L’aire totale du grand carré est alors (x + 5)2 = 39 + 25 = 64. Il suffit ensuite de prendre la

racine carrée et x +5 = 8, ou encore AB+CF=8. Donc AB = 8-5 = 3, qui est la racine

recherchée. Bien sûr, cette approche géométrique interdit de considérer les racines négatives

(ici, x = −13) et encore moins les racines complexes. Notons encore que l’algèbre littérale

n’est utilisée ici que pour soutenir l’explication et était inconnue à l’époque.

L'algèbre, branche nouvelle des mathématiques, continuera de s'épanouir avec la civilisation

islamique. Il faut retenir les noms de Abu Kamil qui emploie les irrationnels, Al-Karaji. Autre

mathématicien arabe du IXe siècle, Tabit ibn Qurra qui s'emploie à traduire les textes grecs.

L'astronome et mathématicien Al-Battânî pose les bases de la trigonométrie moderne en

employant le sinus et la tangente dans ses calculs d'astronomie, et en réalisant des tables pour

les calculer.

Page 14: Cours d'Histoire Des Science 2011

Astronome et mathématicien perse, Al-Kashi a donné les 16 premières décimales de pi. Sa

mort en 1430 sonne le glas des mathématiques arabes.

Le premier déclin des sciences arabes commence au XIIe siècle suite à des conflits divisant le

monde musulman.

Partie   : 02

Sciences et techniques arabes (Suite)

Page 15: Cours d'Histoire Des Science 2011

III- Ibn al-Haytham (965 - 1038)

Ibn al-Haytham est l'un des plus grands savants en optique, mathématiques, sciences

naturelles, médecine et philosophie, ayant grandement contribué à leur développement.

Dénommé par les Occidentaux du nom «d'Alhazen», il est Abu Ali al-Hassan Ibn al-Hassan

Ibn al-Haytham, né à Bassora où il fit ses études.

Lorsque le Calife Fatimide, al-Hakem bi Amrillah, apprit qu'Ibn al-Haytham avait une

méthode susceptible de régulariser les inondations annuelles du Nil, il l'invita en Egypte et le

chargea de la mission visant à contrôler le débit du Nil face aux inondations. Ayant échoué

dans cette tâche, il simula la folie et ne reprit son état normal qu'au décès du Calife. Il s'attela

à la transcription des ouvrages de ses prédécesseurs en mathématiques et en sciences

naturelles, ainsi qu'à l'élaboration d'études dans divers thèmes.

Contributions scientifiques

Les historiens occidentaux sont unanimes quant à l’importance d'Ibn al-Haytham dans le

développement de l'optique. Dans son ouvrage «Héritage de l'Islam», Arnold écrit, à cet égard

: «L'optique a atteint son apogée avec l'apparition d'Ibn al-Haytham», (1) alors que Sarton dit,

pour sa part : «Ibn al-Haytham est le plus grand savant que l'Islam a connu dans les sciences

naturelles, voire le plus grand savant en sciences naturelles du Moyen Age, et parmi les rares

savants célèbres en optique de tous les temps, sans compter qu'il était aussi savant astronome,

mathématicien et médecin».(2)L'Encyclopedia Britannica le qualifie de pionnier des sciences

optiques après Ptolémée.(3)

Ibn al-Haytham est le premier à avoir énoncé que la lentille convexe agrandit les objets. Il est

aussi le premier à définir la composition de l'oeil, à illustrer ses constituants et à leur donner

les noms que les Occidentaux ont traduit dans leurs langues respectives, des noms qui sont

encore en usage de nos jours, tels que Retina, Cornea, Humour Vitreous et Humour Aqueous.

Il a laissé, en outre, des thèses sur l'agrandissement des lentilles qui ont permis la mise au

point des lentilles de correction des yeux.(1) Ses recherches ont abouti à la conclusion que la

vision procède de la projection vers l'oeil des rayons d'un corps qui traversent l'oeil. L'image

se dessine alors sur la rétine qui la transmet au cerveau à travers le nerf optique où se forme

alors la vision du corps concerné. Cette découverte d'Ibn al-Haytham a permis d'invalider la

théorie grecque d'Euclide et de Ptolémée en vertu de laquelle la vision provient de la

projection d'un rayon lumineux de l'oeil vers le corps visible. Al-Haytham a effectué

Page 16: Cours d'Histoire Des Science 2011

également des recherches sur la lumière, les couleurs et la réfraction dans le cadre

d'expériences entreprises pour la mesure des angles de diffraction et de réfraction.(2) Certains

chercheurs voient en lui le pionnier de la science en matière de lumière. Ibn al-Haytham était

aussi un mathématicien hors pair. Il appliqua la géométrie, les équations et les nombres à la

résolution des problèmes astronomiques. Il oeuvra, en outre, à la résolution des équations

cubiques et formula des lois exactes aux aires de la sphère, de la pyramide, du cylindre

oblique, du secteur rotatif et du segment circulaire.(3) Ibn al-Haytham s'est intéressé à

l'astronomie sur laquelle il a écrit quelques ouvrages et réalisé un certain nombre

d'observations. Sa nouvelle méthode permettant de déterminer l’altitude du pôle constitue

l'une de ses contributions majeures. Il a, en effet, élaboré une théorie sur le mouvement des

planètes dont l'influence reste encore perceptible de nos jours, et l'on peut voir, dans la

banlieue de Vienne une table, fabriquée en Allemagne en 1428, comportant un schéma du

mouvement des planètes conforme à la théorie d'Ibn al-Haytham. Celui-ci a également

découvert que tous les corps célestes, y compris les étoiles fixes, émettent des rayons, à

l'exception de la lune qui tire sa lumière du soleil.(4)

OEuvres

Ibn al-Haytham nous a légué un riche héritage scientifique dans tous les domaines des

sciences. Mais de ses plus importantes oeuvres, nous avons retenu les titres suivants :

- «Kitab al-Manadher» (Livre des perspectives) : L'ouvrage comporte les résultats de ses

recherches sur la lumière, la dissection de l'oeil, ainsi que sur la vue. Ce fut une véritable

révolution dans le domaine de l'optique, laissant un impact profond sur les connaissances en

Occident (Roger Bacon et Kepler), qui l'ont adopté comme source de référence durant de

nombreux siècles, et fut traduit en latin de nombreuses fois plusieurs siècles durant.

L'ouvrage contient sept essais, dont le premier et le troisième ont été authentifiés par le

professeur Abdel Hamid Sabra, qui les a publiés en 1983 à Koweït. De son côté, le professeur

Roshdi Rashed a authentifié le septième essai dans son ouvrage «Ilm al-Handassa wal

Manadher fil Qarn al-Rabea al-Hijri» (La science de la géométrie et de la perspective au

quatrième siècle de l'Hégire), imprimé à Beyrouth en 1996. Des manuscrits complets de

l'ouvrage, ou de certains essais, sont disponibles actuellement dans de nombreuses

bibliothèques, en particulier à Istanbul, Turquie ;

- «Hal Shukuk Eklides» (La solution des problèmes d'Euclide) ;

- «Makalat al-Shukuk ala Botlimus» (Essai sur les problèmes de Ptolémée) ;

- «Kitab Charh Usul Eklides fil Handassa wal Aadad» (Livre d'explication des principes

d'Euclide en géométrie et en nombres) ;

Page 17: Cours d'Histoire Des Science 2011

- «Kitab al-Jamee' fi Usul al-Hissab» (Livre complet des principes du calcul) ;

- «Kitab fi Tahlil al-Massa'il al-Handassia» (Livre d'analyse des problèmes de géométrie).

Il convient de noter qu'Ibn al-Haytham a indexé quatre-vingts ouvrages et thèses en matière

d'astronomie dans lesquels il a décrit la trajectoire des planètes, de la lune, des corps célestes,

ainsi que leurs dimensions.

La traduction en latin de certains ouvrages d'Ibn al-Haytham a eu une incidence profonde sur

les savants occidentaux, tels que Kepler et Francis Bacon. Le savant arabe, Mustapha Nathif,

affirme qu'Ibn al-Haytham a précédé Francis Bacon dans la mise au point de la méthode

expérimentale fondée sur l'observation, l'expérimentation et l'induction.(1) Pour sa part, Abbas

Mahmud al-Akkad indique, dans son ouvrage «Influence des Arabes sur la Civilisation

occidentale», que les Européens qui ont suivi, ont tablé, dans leur ensemble, sur la traduction

des ouvrages d'Ibn al-Haytham en matière d'optique.

IV- Al-Khuwarizmi (780 - 850)

Al-Khuwarizmi est considéré comme l'un des plus grands savants arabes, qui ont le plus

influencé les sciences mathématiques et astronomiques dans le monde. Aldo Mieli dit, à cet

effet : «Si nous nous penchions sur les mathématiques et l'astronomie, nous trouverions, dès le

départ, des savants de premier ordre, le plus célèbre étant Abu Abdullah Mohamed Ibn Musa

Al-Khuwarizmi». (1)

On ne connaît pas la date de naissance d'Al-Khuwarizmi, pas plus que la date exacte de sa

mort. Tout ce que l'on sait c'est qu'il a vu le jour à Khwârezm, ou Khiva (l'actuelle

Ouzbékistan), au sud de la mer d'Aral, qu'il a vécu à Bagdad à l'époque d'al-Maamoun al-

Abbassi, et que ce dernier le nomma son chef bibliothécaire, tout en lui confiant la charge de

réunir les ouvrages grecs et de les traduire.(2) Al-Khuwarizmi a tiré profit des ouvrages dont

disposait la bibliothèque d'al-Maamoune, s'attelant ainsi à étudier les mathématiques, la

géographie, l'astronomie et l'histoire, tout en puisant dans les connaissances grecques et

indiennes.

Contributions scientifiques

Al-Khuwarizmi est considéré comme le fondateur de l'algèbre, en tant que science

indépendante de l'arithmétique, avant d'en être reprise par les Européens. Il fut, par ailleurs, le

premier à utiliser le terme "jabr" pour désigner la science connue aujourd'hui comme

l'algèbre, nom qu'elle conserve, par sa racine arabe, dans toutes les langues européennes. Tous

Page 18: Cours d'Histoire Des Science 2011

les mots européens finissant par «algorithme» se rattachent, en fait, à al-Khuwarizmi. Il est

aussi le premier à avoir écrit sur l'algèbre. Il a également introduit les chiffres indiens (connus

aujourd'hui comme les chiffres arabes). Parmi les importantes contributions d'al-Khuwarizmi

figurent la découverte et le développement de certaines règles dans le domaine des

mathématiques, entre autres, la règle de la double erreur, la méthode géométrique de

résolution des carrés inconnus, connue aujourd'hui comme l'équation du second degré. Sans

oublier sa publication des premières tables des sinus et tangentes des triangles, traduites vers

le latin au XVIIIe siècle.

Outre ses considérables contributions à l'arithmétique, al-Khuwarizmi a intervenu également

dans le domaine astronomique où il réalisa de nouvelles études de recherche sur la

trigonométrie et mit au point de nouvelles tables astronomiques qui ont grandement influé sur

les autres tables élaborées ultérieurement par les Arabes, qui en ont fait leur outil de référence

et leur source d'inspiration.(1) Parmi les autres contributions scientifiques d'al-Khuwarizmi

citons les améliorations qu'il a apportées à la géographie de Ptolémée, tant au plan du texte

que des cartes.

OEuvres

Al-Khuwarizmi a élaboré de nombreux ouvrages, notamment :

- «Al-jabr wal-Mouqabala», un précis de mathématiques qui est le premier du genre, élaboré à

la demande du Calife al-Maamoun. Cet ouvrage «ne s'est pas seulement contenté de forger le

vocable 'algèbre' et lui donner sa dimension actuelle, il a surtout donné naissance à une ère

nouvelle en matière de mathématiques».(2) Cet ouvrage, traduit en latin au XIIe siècle, a

introduit cette science en Occident où il demeura des siècles durant une référence pour

l'Europe. Il a été authentifié par les professeurs Ali Mustapha Musharrafa et Mohamed Mursi

Ahmed, et publié pour la première fois au Caire, en 1939.

- «Sourat al-Ard» (configuration de la terre), un manuscrit actuellement à Strasbourg, France.

Il a été traduit en latin et les informations qu'il comporte ont été comparées à celles de

Ptolémée.(3)

- «Al-a'amalu bil Usturlab» (Comment utiliser l'Astrolabe) et «Aamalu al-Usturlab» (L'action

de l'Astrolabe).

- «Wasfu Ifriqia bil jughrafia warrahalate» (Description de l’Afrique par la géographie et les

voyages)

Page 19: Cours d'Histoire Des Science 2011

L'on peut dire, en résumé, qu'al-Khuwarizmi était l'un des plus grands savants de son époque,

car «c'est à lui que revient le grand mérite de faire connaître aux Arabes d'abord, et aux

Européens ensuite, le système de la numérotation avec les chiffres indiens».(1) Non seulement

il est l'inventeur de l'algèbre, mais il a énormément contribué, par ses travaux de recherche, à

l'arithmétique, à l'astronomie et à la géographie.

Aldo Mieli a mis l'accent sur la grandeur d'al-Khuwarizmi en indiquant que celui-ci avait

frayé la voie à une pléthore de grands mathématiciens qui ont pris la relève. (2) L'étude de ses

ouvrages s'était poursuivie dans les universités européennes jusqu'au XVIe siècle.

Partie   : 03

La révolution copernicienne

Page 20: Cours d'Histoire Des Science 2011

On considère généralement la publication des idées de Copernic, en 1543, comme un point

tournant dans l’histoire des sciences. En fait, ce qu’on appelle la révolution copernicienne ne

se fit pas en un jour et le système de Copernic, pris à part, n’aurait peut-être pas eu la vie

longue s’il n’avait été suivi d’une autre révolution, plus profonde celle-là : l’invention de la

mécanique. Dans ce cours, nous décrirons sommairement les travaux purement astronomiques

de quatre grandes figures de cette époque : Copernic, Kepler et Galilée.

1- Copernic

Nicolas Copernic (1473/1543) vécut la majeure partie de sa vie en Pologne (son pays natal),

bien qu’il étudia un temps en Italie (Padoue, Ferrare). Il bénéficia de l’appui de son oncle

évêque pour devenir membre de l’évêché et, de par cette fonction, reçut une rente à vie et

disposa de suffisamment de temps à consacrer à ses recherches astronomiques. Copernic se

construisit un petit observatoire à l’aide duquel il mesura les positions des planètes et

s’aperçut que la théorie de Ptolémée, décrite dans l’Almageste, ne donnait pas des résultats

suffisamment précis. Il entreprit alors de construire son propre système du monde. Sa théorie

fut publiée l’année de sa mort (on raconte qu’il reçut un exemplaire de son livre imprimé sur

son lit de mort), avec le titre : De revolutionibus orbium c_lestium libri sex (Des révolutions

des orbes célestes, en six livres). Copernic écrivit aussi, vers 1512, un court essai expliquant

une version moins développée de sa théorie. Notons qu’à l’époque de Copernic, l’invention de

l’imprimerie avait rendu les livres anciens accessibles comme jamais auparavant : l’Almageste

a connu sa première impression en 1515 et les Éléments d’Euclide en 1482. Ainsi, un savant

solitaire des confins de l’Europe pouvait étudier ces oeuvres dans le détail, ce qui aurait été

plus difficile un siècle auparavant.

Nicolas Copernic (1473/1543)

Page 21: Cours d'Histoire Des Science 2011

Le système de Copernic se démarque radicalement des systèmes astronomiques admis à son

époque car il reprend une hypothèse ancienne largement oubliée, l'héliocentrisme : il fait du

Soleil le centre de son système, et la Terre un objet tournant autour. La thèse majoritaire à

l'époque est le géocentrisme : la Terre est immobile au centre de l'univers, tous les astres

tournent autour. Cette théorie est en partie motivée par des considérations philosophiques et

théologiques, ce qui provoque un fort rejet du travail de Copernic.

Le système de Copernic repose sur l'observation que la Terre tourne sur elle-même et fait un

tour sur son axe en une journée, ce qui explique dans un premier temps le mouvement diurne

de la sphère céleste en un jour. Plus précisément, la Terre fait un tour sur elle-même en un

jour astronomique (23h 56m 4,09s), alors que le Soleil revient à la même position en un jour

solaire (24h). Copernic avait tenu compte de cette distinction introduite par son système.

Il avance également que la Terre fait le tour du Soleil (révolution), et non l'inverse, en un an.

Il affirme de plus que les autres planètes, comme la Terre, tournent toutes autour du Soleil.

Copernic suppose aussi que l'axe de la terre oscille comme celui d'une toupie, ce qui explique

la précession.

La théorie de Copernic contredit la théorie de Ptolémée : Copernic conserve toutefois certains

éléments de l'ancien système : ainsi l'idée aristotélicienne des sphères solides, ou la sphère

des fixes physique, est-elle conservée par Copernic.

Le nouveau système proposé par Copernic explique le mouvement journalier du Soleil et des

étoiles par la rotation terrestre. Il explique, en outre, certains phénomènes qui n'étaient

expliqués qu'à grand peine et de manière imparfaite, notamment le mouvement rétrograde des

planètes externes, (Mars, Jupiter, Saturne). Sa théorie prend également en compte les planètes

internes, Vénus et Mercure, qui sont situées plus près du Soleil que la Terre.

Copernic avance aussi une théorie sur l'ordre des planètes, leurs distances et, par conséquent,

leur période de révolution. En effet, Copernic contredit Ptolémée en affirmant que plus

l'orbite d'une planète est grande, plus il lui faudra de temps pour faire une révolution complète

autour du Soleil. Johannes Kepler obtint plus tard de ses observations des relations

mathématiques précises allant dans ce sens, et Isaac Newton les démontra par sa théorie de la

gravité.

Page 22: Cours d'Histoire Des Science 2011

2- Johannes Kepler

Johannes Kepler (1571/1630)

Kepler naît au sein d’une famille de religion protestante, installée dans la ville de Weil dans le

Wurtemberg, mais ville libre sous l´autorité immédiate de Empire. Né prématurément à sept

mois et hypocondriaque de nature chétive, il souffre toute sa vie d’une santé fragile. À l’âge

de trois ans, il contracte la petite vérole, ce qui, entre autres séquelles, affaiblit sévèrement sa

vue.

La famille Kepler est peu ordinaire et son ambiance n’est pas des plus saines. Le père,

Heinrich Kepler, est mercenaire dans l’armée du duc de Wurtemberg, et toujours en

campagne, étant ainsi rarement présent à son domicile.

Poursuivi pour ses convictions religieuses et ses idées coperniciennes, Johannes Kepler doit

quitter Graz en 1600. Il se réfugie à Prague, invité par l’astronome danois Tycho Brahe pour y

devenir son assistant. Les relations entre les deux personnages furent particulièrement

houleuses ; Tycho Brahe ne croyant pas à l’héliocentrisme de Copernic mais soutenant une

autre théorie dans laquelle la Terre est au centre, mais les autres planètes tournent autour du

Soleil.

Page 23: Cours d'Histoire Des Science 2011

Schéma du système de Copernic (à gauche) comparé à celui de Tycho Brahé (à droite), quipréserve la position centrale de la terre.

Kepler voyait en Tycho Brahe un homme plein de richesses (ses mesures étaient très précises)

mais qui ne savait les exploiter correctement.

Brahe lui demanda de calculer l’orbite précise de Mars, pour laquelle il avait remarqué une

excentricité dans sa trajectoire, considérée comme une anomalie à une époque où l’on pensait

encore que les planètes décrivaient des cercles, figure parfaite. Cette tâche était auparavant

assignée à son assistant qui passe alors à l’étude des mouvements de la Lune.

Pensant accomplir sa tâche en quelques semaines, il ne lui fallut pas moins de six ans pour

achever son travail. C’est durant ce travail que Johannes Kepler découvrit les deux premières

des trois lois fondamentales :

Les planètes décrivent des trajectoires elliptiques dont le Soleil est un foyer.

Le mouvement de chaque planète est tel que le segment de droite reliant le Soleil et la

planète balaie des aires égales pendant des durées égales.

Ces lois furent publiées dans Astronomia Nova en 1609, où Johannes Kepler fut également le

premier à émettre l’hypothèse d’une rotation du Soleil sur son axe.

Page 24: Cours d'Histoire Des Science 2011

En 1618 viendra sa troisième grande loi :

Pour toutes les planètes, le rapport entre le cube du demi grand axe de la trajectoire et

le carré de la période est le même, cette constante est indépendante de la masse de la

planète.

Ce travail fut d’autant plus long que Kepler dut mener en parallèle une étude sur l’optique

afin de mieux comprendre et interpréter ses observations, et qu’il était encore trop

« conditionné » par les anciennes croyances en astronomie : il doute à plusieurs reprises de la

nature circulaire de la trajectoire et pense alors à une ellipse, tout en continuant d’essayer de

prouver le contraire, en ressortant de vieilles idées faisant appel à l’utilisation d’épicycles.

Les soixante-dix chapitres de l’Astronomia Nova comprennent ainsi toutes les démarches

scientifiques et erreurs de Kepler qui lui permirent d’aboutir à ses deux premières lois, mais

aussi à d’autres conclusions intéressantes comme la nature de la force responsable du

mouvement des planètes, force « quasi magnétique », donc physique et non plus divine.

À la mort de Tycho Brahe en 1601, Johannes Kepler fut désigné comme mathématicien

impérial à la cour de Rodolphe II. Il garda ce statut jusqu’en 1612.

Partie   : 03 (suite)

Galilée

Page 25: Cours d'Histoire Des Science 2011

Galilée (1564/1642)

Galileo Galiléi (1564/1642) (ou Galilée) est, avec Newton, la plus grande figure de la

révolution scientifique. Nous verrons dans la section suivante comment il a été l’initiateur de

la mécanique classique. Pour le moment, c’est sa contribution en tant qu’astronome qui nous

intéresse.

Galilée était professeur à l’Université de Padoue (dans la république de Venise) au moment de

ses découvertes ; le fait mérite mention car la plupart des scientifiques importants de cette

époque n’étaient justement pas professeurs d’université !

En 1604, Galilée observa lui aussi une nova, comme Tycho en 1572, et parvint aux mêmes

conclusions, c’est-à-dire que cette étoile nouvelle n’appartenait pas au monde sublunaire et

que les cieux étaient donc sujets à changement. Sa plus grande contribution à l’astronomie

survint en 1609, quand il construisit une lunette astronomique (télescope à lentilles) et qu’il la

pointa vers les cieux.

Galilée n’est pas l’inventeur de la lunette, mais il entendit parler de cet instrument mis au

point indépendamment par plusieurs artisans dans les années qui précédaient et put en

construire un à partir des descriptions qu’il en reçut. Il décrivit ses observations dans Sidereus

Nuncius (le messager des étoiles) :

1. Il observa des montagnes et des plages sombres sur la surface de la Lune. Il remarqua que

les sommets de ces montagnes étaient éclairés même si leur base se trouvait dans la zone

d’ombre de la Lune. Il conclut aussi que la lumière cendrée observée quand la Lune est un

mince croissant est un éclairage causé par la lumière solaire réfléchie sur la Terre (clair de

Terre).

Page 26: Cours d'Histoire Des Science 2011

2. Il découvrit un grand nombre d’étoiles nouvelles : 80 étoiles dans le baudrier d’Orion au

lieu des 9 connues alors. Il s’aperçut que la Voie lactée est en fait constituée d’étoiles

distinctes très nombreuses et non pas une nébuleuse appartenant au monde sublunaire.

3. Il découvrit que Vénus présente des phases, comme la Lune, ce qui prouve hors de tout

doute possible qu’elle est éclairée par le Soleil, n’émet pas de lumière propre et qu’elle tourne

autour du Soleil.

4. Il découvrit 4 petites étoiles mobiles qui se tenaient à proximité de Jupiter et en conclut

qu’il s’agissait de satellites de cette planète (Io, Callisto, Europe et Ganymède ) comme la

Lune est un satellite de la Terre. Ainsi, la Lune n’est plus un cas d’exception (une objection

formulée contre le systèmes de Copernic) : il y a d’autres satellites dans l’Univers.

5. La vision de Saturne l’intrigua. Sa lunette n’ayant pas une résolution suffisante, il ne put

distinguer les anneaux de cette planète (Huygens le fit plus tard). Il eut l’impression que

Saturne était divisée en trois parties : “J’ai observé la plus haute planète et je l’ai trouvée

triple !”

6. Il observa des taches sur la surface solaire, ce qui contredit la notion de perfection et de

pureté qui entoure cet astre.

Ce que Galilée vit dans l’objectif de sa lunette changea sa vie et notre conception de

l’Univers. Il fut le premier, à notre connaissance et à la sienne, à utiliser un instrument pour

amplifier les sens naturels de l’être humain, ou pour y suppléer. Il vit ce que personne ne vit

avant lui et l’Univers dès lors “explosa”, c’est-à-dire que ses limites disparurent. Le caractère

artificiel des sphères célestes devint immédiatement évident.

Pendant ce temps, l’Église catholique (plus précisément, le Saint-Office), déclara “impie” la

doctrine qui place le Soleil au centre du monde. Galilée poursuivit ses recherches et publia Il

Saggiatore (L’essayeur) (1623) dans lequel il soutient énergiquement ses idées

coperniciennes et le Dialogue sur les deux principaux systèmes du monde (1632) écrit sous

forme d’un dialogue entre trois personnages (Simplicio, Salviati et Sagredo). Ce livre fut écrit

en langue courante (italien) dans le but d’atteindre un plus large public. Malheureusement, il

atteignit aussi la Sainte Inquisition, qui intenta un procès à Galilée. Après 21 jours de procès,

un tribunal de sept cardinaux déclara :

Soutenir que le Soleil, immobile et sans mouvement local, occupe le centre du monde, est une

proposition absurde, fausse en philosophie, et hérétique, puisqu’elle est contraire au

témoignage de l’Écriture. Il est également absurde et faux en philosophie de dire que la Terre

n’est point immobile au centre du monde ; et cette proposition, considérée théologiquement,

est au moins erronée dans la foi.

Page 27: Cours d'Histoire Des Science 2011

Galilée dut signer la formule d’abjuration et fut condamné à la réclusion perpétuelle dans sa

maison d’Arcetri. Il y mourut le 8 janvier 1642. La légende raconte qu’immédiatement après

avoir juré que le système de Copernic était faux et que la Terre était immobile, il dit tout bas :

“et pourtant, elle tourne. . .”

* Les travaux de Galilée

La formation que Galilée avait reçue à l’Université était tout à fait traditionnelle, dans la

lignée scolastique et aristotélicienne. Galilée dut plus tard lutter contre sa propre formation

pour réaliser ses découvertes, ce qui augmente d’autant son mérite. Les conceptions de

Galilée sur le mouvement sont principalement décrites dans son Dialogue de 1632 et dans son

dernier ouvrage, Discours et démonstrations concernant deux sciences nouvelles, paru en

1638.

Dans le Dialogue, Simplicio affirme que “la cause du mouvement descendant des parties de la

Terre, tout le monde le sait, est la gravité”, ce à quoi Salviati répond :

Tu te trompes, Simplicio. Tu devrais dire : ce que personne n’ignore, c’est que cette cause est

appelée gravité. Mais je t’interroge non pas sur le nom, mais sur l’essence de cette chose.

Excepté le nom imposé à cette chose et qui est devenu familier par l’usage, nous ne

comprenons rien à la chose, pas plus à la vertu qui fait descendre une pierre qu’à celle qui fait

tendre vers le haut une pierre projetée, ni qu’à celle qui meut la Lune sur son orbite. . .

Galilée soupçonne ici que l’orbite de la Lune et la chute des corps ont la même cause. D’autre

part, il s’élève contre la tendance scolastique à nommer les choses pour se dispendre de les

étudier et de les comprendre. Cependant, Galilée ne parviendra pas à élaborer une mécanique

complète et cohérente (Newton y réussira 50 ans plus tard). Il parvient cependant à clarifier

considérablement la cinématique (l’étude descriptive du mouvement).

Page 28: Cours d'Histoire Des Science 2011

Pendant la Renaissance, on croyait, à l’instar d’Aristote, que le mouvement d’un projectileétait constitué de deux phases : la première étant une trajectoire rectiligne (mouvement

violent) et la deuxième une chute verticale (mouvement naturel). Galilée prétendau contraire qu’en l’absence de résistance de l’air, la trajectoire doit être parabolique.

1-La chute des corps

Ainsi, Galilée montre, par expérimentation, que deux objets de masses différentes atteignent

le sol pratiquement en même temps lorsque relâchés du haut d’une tour. Au contraire, selon

Aristote, le temps que met un objet à tomber est inversement proportionnel à son poids. Cette

affirmation d’Aristote est correcte uniquement dans le cas où les objets atteignent rapidement

leur vitesse limite (déterminée par la résistance du milieu). L’air étant relativement peu dense,

la phase d’accélération initiale des objets est prépondérante et la différence de temps de chute

est négligeable. Galilée possédait le don d’imaginer ce qui se passerait dans des circonstances

idéales : il réalise une expérience mais attribue les petites imperfections des résultats aux

effets qui éloignent le problème de son idéalité. Ainsi, il conclut que, si ce n’était de la

résistance de l’air, les deux objets atteindraient le sol en même temps. De la sorte, Galilée

démontre clairement l’inexactitude de la physique d’Aristote, car l’objet deux fois plus lourd

n’atteint pas la Terre en deux fois moins de temps que l’autre objet : leurs temps de chute sont

à peine différents, de sorte qu’on entend un seul bruit lors de leur contact avec le sol.

2- Le mouvement uniformément accéléré

En pratiquant une expérience sur un plan incliné, Galilée arrive à la conclusion que les

distances parcourues en des temps égaux augmentent linéairement, ce qui implique que la

Page 29: Cours d'Histoire Des Science 2011

distance totale parcourue est proportionnelle au carré du temps écoulé : c’est la description

d’un mouvement uniformément accéléré. De même, la vitesse finale est proportionnelle au

temps de chute, résultat déjà obtenu par Nicole Oresme trois siècles plus tôt.

3- Le principe d’inertie

Galilée imagine aussi qu’un corps en mouvement sur une surface plane garde une vitesse et

une direction constantes si on néglige la résistance de l’air et le frottement.

C’est là le principe d’inertie, aussi connu sous le nom de “principe de Galilée”, mais Galilée

ne l’énonça jamais dans toute sa généralité. En fait, Galilée ne put imaginer un objet non

soumis à la force de gravité, et ignorait la notion de force centripète.

Mouvement parabolique comme composition d’un mouvement horizontal uniforme etd’un mouvement vertical uniformément accéléré.

4- La composition du mouvement

Enfin, Galilée décrit correctement la composition du mouvement : sachant qu’un objet en

roulement sur un plan se déplace à une vitesse constante et sachant qu’un objet relâché d’une

certaine hauteur tombe avec une accélération uniforme, il conclut que le mouvement d’un

objet qui, par exemple, roule sur une table jusqu’à son extrémité et tombe ensuite dans le vide

suit une trajectoire parabolique : son mouvement peut être décomposé en mouvement

horizontal, toujours uniforme en vitesse, et en mouvement vertical, uniformément accéléré.

Page 30: Cours d'Histoire Des Science 2011

Les deux mouvements, “en se mélangeant, ni ne s’altèrent, ni ne se troublent, ni ne

s’empêchent mutuellement”.

Ainsi, la nature vectorielle du mouvement, si longtemps ignorée, apparaît clairement à

Galilée, qui légua donc à l’humanité le vecteur-vitesse, comme Stevin lui avait légué le

vecteurforce.

Pour démontrer à quel point cette notion était confuse avant lui, signalons qu’on exprimait

souvent l’opinion qu’un projectile lancé horizontalement suit une trajectoire parfaitement

horizontale, jusqu’à ce qu’il s’arrête, pour ensuite tomber verticalement !

Partie 04

Page 31: Cours d'Histoire Des Science 2011

Isaac Newton

Isaac Newton (1642/1727) est placé très haut, sinon au plus haut rang, dans le temple de la

renommée scientifique. Il a lui même affirmé que s’il avait accompli beaucoup, c’est parce

qu’il s’appuyait sur les épaules de géants. Newton attribue même à Galilée la paternité de ce

qu’on appelle les “deux premières lois de Newton” : le principe d’inertie et F = ma. En fait,

Newton est trop généreux sur ce dernier point, même s’il est incontestable que Galilée eut une

énorme influence sur lui. Il fut même influencé par Descartes, quoiqu’il en dît plus tard.

Sa vie

Newton est né à la Noël 1642, à Woolsthorpe (Lincolnshire), prématuré de deux mois, dans

une modeste famille de fermiers propriétaires. Le père de Newton est mort avant sa naissance

et sa mère se remaria à un clergyman quand il avait deux ans, de sorte que Newton fut en

partie élevé par sa grand-mère et par son oncle. Ses études pré universitaires ne laissèrent pas

entrevoir le génie qui allait se manifester plus tard. Newton put entrer à l’université de

Cambridge en 1661, mais au bas de l’échelle sociale : il dut exécuter de basses besognes pour

ses camarades pour gagner un peu d’argent. À Cambridge, il trouva en Isaac Barrow, le

premier Lucasian professor of mathematics, un mentor de premier plan. Il lut les Dialogues

de Galilée et les Principes de philosophie de Descartes et obtint un premier diplôme en 1665.

Il aurait normalement continué en maîtrise lorsque la Grande Peste fit son apparition et

obligea les autorités à fermer l’Université.

Newton retourna chez lui jusqu’en 1667 et c’est là qu’il fit ses plus grandes découvertes :

“J’étais dans la plénitude de mes facultés d’invention et occupé par les mathématiques et la

philosophie [naturelle] plus qu’à aucune autre époque de ma vie.” Newton retourna à

Cambridge, reçut sa maîtrise en 1668 et l’année suivante Isaac Barrow renonça à sa chaire de

professeur au profit de son élève. En 1696, Newton quitte Cambridge pour devenir directeur

de la Monnaie Royale Britannique.

Il est fait chevalier, meurt en 1727 et est inhumé à l’abbaye de Westminster, aux côtés des rois

d’Angleterre.

Newton, membre de la Royal Society, quitta cette société savante en 1673, écoeuré par les

controverses suscitées par ses théories. Il aurait déclaré à ce moment “ne plus vouloir

s’occuper de questions de philosophie” (c’est-à-dire de science). Newton était d’une nature

craintive et renfermée, fuyant la controverse. Il est probable que ces traits de caractère lui

Page 32: Cours d'Histoire Des Science 2011

venaient de sa petite enfance maladive. N’étant pas marié, Newton consacra toute son énergie

à son oeuvre et supporta toujours très mal la critique. Il considérait les autres scientifiques

comme des rivaux et fut toujours très jaloux du crédit qu’on devait lui attribuer pour ses

découvertes.

Les Principia

Même si plusieurs de ses découvertes dates de la période 1665/1667, il ne les publia pas tout

de suite. C’est sur l’encouragement de l’astronome Edmund Halley qu’il publia, en 1687, ce

qui est souvent considéré comme le plus grand ouvrage scientifique de tous les temps : les

Principes Mathématiques de la Philosophie Naturelle, ou Philosophi_ Naturalis Principia

Mathematica

(nous dirons Principia, pour abréger ). Citons la préface de Newton à la première édition :

. . .nous qui avons pour objet, non les Arts, mais l’avancement de la philosophie, ne nous

bornant pas à considérer seulement les puissances manuelles, mais celles que la nature

emploie dans ses opérations, nous traitons principalement de la pesanteur, la légèreté, la

force électrique, la résistance des fluides & les autres forces de cette espèce, soit attractives,

soit répulsives : c’est pourquoi nous proposons ce que nous donnons ici comme les principes

mathématiques de la philosophie naturelle. En effet, toute la difficulté de la philosophie paraît

consister à trouver les forces qu’emploie la nature, par les phénomènes du mouvement que

nous connaissons, & à démontrer, par là, les autres phénomènes.

On reconnaît là les principes de la méthode hypothético-déductive, en particulier le souci

d’expliquer les phénomènes physiques par des lois mathématiques.

Les lois du mouvement

Dès le premier chapitre, Newton énonce les trois lois suivantes :

1. Tout corps persévère dans l’état de repos ou de mouvement uniforme en ligne droite dans

lequel il se trouve, à moins que quelque force n’agisse sur lui, & ne le contraigne à changer

d’état.

2. Les changements qui arrivent dans le mouvement sont proportionnels à la force motrice,

&le sont dans la ligne droite dans laquelle cette force a été imprimée [F = ma, en langage

moderne].

3. L’action est toujours égale et opposée à la réaction ; c’est-à-dire, que les actions de deux

corps l’un sur l’autre sont toujours égales, & dans des directions contraires.

Newton définit la masse comme quantité de matière et la quantité de mouvement comme le

produit de la masse par la vitesse. Il considère à la fois l’espace et le temps comme absolus.

La gravitation universelle

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La plus grande réussite des Principia est la théorie de la gravitation universelle, selon laquelle

deux corps de masses m1 et m2 exercent l’un sur l’autre une force d’attraction dirigée le long

de la droite qui joint les deux corps et proportionnelle au produit de leurs masses et

inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare :

F = G

L’adjectif “universelle” signifie que la force de gravité s’applique à tous les corps, terrestres

ou célestes. Il n’y a plus de distinction entre mécanique terrestre et mécanique céleste : les

mêmes principes fondamentaux s’appliquent partout. Newton racontait que, lorsqu’il

réfléchissait à la cause du mouvement de la Lune, dans le jardin de sa maison de

Woolsthorpe, il vit une pomme tomber soudainement de son arbre et heurter le sol à ses pieds.

Il eut alors l’intuition que la force qui entraînait la Lune sur son orbite autour de la Terre était

la même force qui attirait la pomme (et tous les objets terrestres) vers le centre de la Terre. Il

semblait naturel à Newton de supposer que cette force diminue comme l’inverse du carré de la

distance, car c’est ainsi que diminue l’intensité de la lumière quand on s’éloigne de la source.

Il put démontrer que la trajectoire d’un objet subissant une telle force est une ellipse et, plus

généralement, il put démontrer les trois lois de Kepler. Il dut pour cela développer le calcul

différentiel et intégral, véritable tour de force. Il dut aussi démontrer que la Terre attire les

objets comme si toute sa masse était concentrée en son centre, ce qui aussi nécessite le calcul

intégral. Newton put aussi affirmer que la Terre est légèrement aplatie, en raison de la force

centrifuge associée à sa rotation sur elle-même, et ainsi expliquer le phénomène de la

précession des équinoxes, en comparant la Terre à une toupie sur laquelle le Soleil exerce un

couple (ou moment de force).