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Construire l'avenir en puisant dans lesrecettes du passé relève d'unescolastique insoutenable, qui ignore

à la fois la raréfaction des ressources, laprotection du climat et le progrès technique.Pour construire notre avenir énergétique, onne peut plus commencer par calculer lesbesoins. Il faut partir des conditions-cadres:

1. La production pétrolière amorcera proba-blement son déclin au cours de la présentedécennie. Annoncé dès 1971 par Hubbert, lepeak oïl, marquant l'extraction de la moitié dustock exploitable, est imminent. Des Etats-Unisà l'Indonésie, en passant par la mer du Nord etla Russie, la baisse a commencé. Quant auxréserves de l'OPEP, elles sont certainementsurévaluées par intérêt géostratégique. Lesdécennies à venir seront donc marquées parune vigoureuse hausse des prix des énergiesnon renouvelables qui limitera la consomma-tion au niveau d'une production décroissante.Le fort renchérissement du pétrole se trans-mettra aux autres énergies. Tabler sur unehausse de la consommation est ainsi irréaliste.

2. Comme l'a résumé Bill Clinton, «leréchauffement climatique a le potentiel dedétruire la civilisation». Les dommages liésaux événements climatiques extrêmes explo-sent. La Suisse et les Etats-Unis en ont faitles frais en 2005. La protection du climatexige une réduction massive de la consom-mation des combustibles fossiles. La Suisses'y est engagée dans le cadre du Protocolede Kyoto. Le scénario de la FRE exigerait quenotre pays méprise la menace climatique ets'assoie sur ses engagements internatio-naux. Indéfendable.

3. Le potentiel technique de réduction de laconsommation, à prestations égales, esténorme. Pour une bonne part, son exploita-

tion est économiquement rentable. Réduired'un facteur deux à trois la consommationde chauffage des bâtiments est aisé. Auxprix actuels de l'énergie, l'économie deconsommation couvre les frais d'investisse-ment. De surcroît, le remplacement duchauffage direct au gaz ou mazout par lacombinaison couplage chaleur-force etpompe à chaleur permet de diviser par deuxla consommation de combustible. Quant àl'énergie du bois, elle est aujourd'hui moinschère que celle du mazout. Le potentiel desforêts suisses permettrait de couvrir 10% dela demande de chauffage, soit 20 à 30% desbesoins d'un parc immobilier assaini. Laconsommation moyenne des véhicules misen circulation est encore proche de 8 litresaux 100 km. Diviser cette valeur par deuxest possible aujourd'hui déjà, au prix il estvrai d'une limitation de la liberté de choix duvéhicule.

4. Le prix des énergies renouvelables décroîtde manière constante. Cette baisse dépendde la taille du marché qu'on leur offre, illus-trant l'adage «on ne choisit pas une tech-nique parce qu'elle est rentable, mais c'estparce qu'on la choisit qu'elle devientrentable». Les premières installations hydro-électriques fournissaient un courant plusonéreux que le photovoltaïque actuel. Si laFRE avait existé à l'époque, elle aurait préditque l'hydraulique ne serait jamais rentable.Quant au nucléaire, il aurait eu bien de lapeine à s'imposer s'il n'avait bénéficié de lacontribution d'installations hydrauliquesamorties, d'une sous-couverture du risque etdu report du coût de ses déchets sur unnombre indéterminé de générations futures.L'électricité éolienne est déjà très compéti-tive au Danemark (20% de la consommation)ou en Espagne. Elle le devient progressive-ment dans toute l'Europe. Sa production y atriplé en quatre ans et couvre la consomma-tion de plus de 52 millions d'Européens. Lephotovoltaïque est encore onéreux mais sonprix diminue de 5% par an. En 2030, il devraitatteindre 20 à 30 ct/kWh, de quoi rivaliser

avec le prix du courant de pointe. Le vent etle soleil sont certes fluctuants mais en phaseavec la demande, hivernale pour l'éolien etde climatisation pour le photovoltaïque.L'hydraulique à accumulation, dont la Suisseest riche, permet de compenser les fluctua-tions. Et le nucléaire n'est pas forcémentprévisible non plus: la centrale de Leibstadt aconnu cinq mois de panne en 2005.

Notre avenir énergétique ne peut plus sedessiner en courant après la demande parl'importation croissante de combustiblestoujours plus rares. Il doit être construit entenant compte des limites physiques de notremonde. Ces limites exigent de réduire laconsommation d'agents non renouvelablesde 50% au moins. C'est sur cette base queles scénarios doivent être développés et lesdécisions prises pour exploiter l'énormepotentiel d'économies et de productionrenouvelable. Non seulement cela peut êtreréalisé de manière économiquement rentablemais notre économie bénéficiera du dévelop-pement de ses capacités dans un marché quisera le plus vaste du XXIe siècle.

Pierre BonhôteConseiller aux Etats

Extrait d'un article paru dans la rubriqueForum du Temps du 23 février 2006.

Construire notre avenir énergétique

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Eclairage

Ancien étudiant à l'Université deNeuchâtel, le conseiller aux EtatsPierre Bonhôte est un fervent défen-seur des énergies renouvelables. Ilnous livre sa vision de l'avenir énergé-tique.

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ImpressumUniCité n Magazine de l’Université de Neuchâtel, n° 32, avril 2006, 6’000 exemplairesRédaction n Université de Neuchâtel, Service de presse et communication, Faubourg du Lac 5a, CH-2001 NeuchâtelResponsable de rédaction n Service de presse et communication, Virginie BorelConception graphique n Fred Wuthrich, Université de NeuchâtelMise en page n Yves Maumary, Université de NeuchâtelCrédits photographiques n IMT (couverture); Nicolas Wyrsch (p. 2 à 4); CREGE (p. 10); Michel Aragno (p. 12, 13); Matthieu Honegger (p. 22, 23)Impression n Imprimerie Actual SA, BienneISSN 1424-5663

DOSSIER4-14 n

Energies renouvelables: penser l’avenir

Photovoltaïqueune histoire qui ne s'arrête jamais !

Géothermiepremière anée d’activité du CREGE à Neuchâtel

Indedu biogaz aux bio-inoculants

16 n CampusMichel Dubois, doyen des sciences économiques«Ce ne sont pas les moyens qui conditionnent les ambitions»

Masters ès artsune véritable carte de visite

22 n Qui cherche trouveArchéologieKerma, cité reine au cœur des pharaons noirs

Ethnologieà la rencontre du projet Neuchàtoi

28 n BobinoscopeCommerce équitablemilitantisme vs pragmatisme

Archéologie et histoirelorsque les sciences creusent leur passé

32 n Bibliographie

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Les objectifs visés par le photovoltaïque sont clairs: meilleur rendement de conversion et abaissement des coûts.

DOSSIER

n Energies renouvelables:penser l'avenir…

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Depuis 1950, notre consommationd'énergie a été multipliée par six.Plus de 80% de l'énergie que nous

consommons est importée. Malgré deuxchocs pétroliers et des avertissementsconstants, les conditions-cadres en matièred'énergie en Suisse n'ont pas suivi. Depuis1998, le cours du pétrole a sextuplé. Laproduction stagne et déclinera bientôt alorsque la demande augmente: la flambée desprix n'est pas près de faiblir. Investir massi-vement dans les économies d'énergie et lesénergies renouvelables semble vital pour lasociété. La chaleur du bois, la géothermie etl'électricité éolienne sont aujourd'hui renta-bles, le solaire le sera demain.

A l'Université de Neuchâtel, les chercheurssont nombreux à travailler sur l'une ou l'autrede ces énergies: le laboratoire de photovol-taïque, dirigé par le professeur ChristopheBallif, vient de signer coup sur coup deuximportants contrats avec l'Europe en vue dedévelopper des cellules solaires en couchesminces à une plus grande échelle; le Centresuisse de géothermie, basé à l'Université deNeuchâtel et placé sous la responsabilité deFrançois-David Vuataz, vient de fêter sapremière année d'activité en présentant denombreux projets prometteurs pour déve-lopper cette énergie venue du sol. Quant aumicrobiologiste Michel Aragno, il poursuit sesrecherches pour aider l'Inde à réduire drasti-quement l'usage d'engrais chimiques enrecourant à des techniques naturelles respec-tueuses de l'environnement. Non loin de

l'UniNE, l'association Ecoparc à Neuchâtel -qui vise à la sensibilisation en matière dedéveloppement durable construit - est dirigéepar le géographe Alain Guye alors que lechimiste et conseiller aux Etats et députéneuchâtelois socialiste Pierre Bonhôte se bataux niveaux politiques cantonal et nationalpour que la Suisse adopte les conditions-cadres nécessaires au développement desénergies renouvelables.

Assainir nos bâtiments et développer lesressources indigènes seraient en effet favo-rable pour l'économie et l'emploi dans notrepays: en Allemagne par exemple, 130'000emplois ont ainsi été créés par le développe-ment des énergies renouvelables.

A l'Université de Neuchâtel, l'avenir se cons-truit activement… n

Virginie Borel

L'avenir se prépare aujourd'hui. Partant de cette lapalissade, UniCité a décidé

de partir à la rencontre de celles et ceux qui, au sein de l'Université de

Neuchâtel ou à son abord immédiat, s'activent à rendre les énergies de demain

encore plus performantes, à amener des solutions durables et écologiques à

des problématiques mondiales ou à

faire mieux connaître leurs avantages

au sein de la société.

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Depuis près de 25 ans, le Laboratoire de photovoltaïque et

couches minces électroniques de l'Institut de microtechnique,

créé par le professeur Arvind Shah, est à la pointe de la

recherche mondiale sur l'énergie solaire grâce notamment à

ses techniques de fabrication de couches minces de silicium.

Dirigé depuis octobre 2004 par le professeur Christophe

Ballif, ce poumon de la

recherche solaire entend

bien sortir cette énergie

propre de son confinement

en continuant à abaisser son

coût.

Lorsque Arvind Shah, fonda-teur du Laboratoire dephotovoltaïque à l'Université

de Neuchâtel, a mis au pointune technique exclusive defabrication de couches mincesde silicium - de l'ordre du micro-mètre d'épaisseur - déposéessur du verre ou des plaques deplastique, il imaginait certaine-ment qu'un jour de nombreusesfamilles recourraient à l'énergiesolaire en remplacement ou enappoint des réseaux électriquestraditionnels…

Vingt ans plus tard, le pas n'estpas encore complètementfranchi, mais les barrièrestombent les unes après les

autres…«Le photovoltaïque estune histoire qui ne s'arrêtejamais !» , lance ChristopheBallif, 35 ans, successeur duprofesseur Shah à la tête de ceprestigieux laboratoire qui fonc-tionne avec un budget de fondsde tiers de 2 à 2,5 millions defrancs par an. Les découvertesmajeures qui ont fait progresserle photovoltaïque à l'IMT rési-dent essentiellement dans deuxétapes: la première consiste enun dépôt par procédé plasma(comme à l'intérieur d'une sortede tube fluorescent) à hautefréquence d'excitation (dit VHFpour Very High Frequency) descellules solaires, la deuxième enl'utilisation d'une nouvelle formede silicium, dit microcristallin,qui peut se combiner avanta-geusement avec les cellulessolaires en silicium amorphe.Les objectifs visés sont clairs:obtenir un meilleur rendementde conversion de l'énergiesolaire en électricité, tout enabaissant les coûts: «Nouscherchons en permanence àcomprendre les interactionsdans des systèmes hautementcomplexes (en partant deplasma pour arriver à des dispo-sitifs fonctionnels), et à trouverde nouvelles manières pourfabriquer des cellules solairesnovatrices, à des prix potentiel-lement imbattables», s'en-flamme le jeune scientifique quinourrit une véritable passionpour le photovoltaïque, «uneréunion de deux centres d'in-térêt, la physique d'une part

avec les propriétés de la matièreet, d'autre part, les problèmesde société en général etd'énergie en particulier».

Aujourd'hui, l'entreprise Unaxisest bénéficiaire de plusieurslicences de l'IMT pour la fabri-cation de modules solairesdéposés sur du verre: grâce àdes investissements deplusieurs dizaines de millionsde francs: la division UnaxisSolar emploie actuellementprès de 80 collaborateurs etsouhaiterait commercialiserrapidement des lignes deproduction pour la fabricationde modules de 1,4m2.

DOSSIER

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Le photovoltaïque est une histoire

qui ne s'arrête jamais !

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L'entreprise VHF-Technologiesissue de l'IMT (cf article D. Fischer) développe elle lesprocédés de fabrication decellules sur de simples feuillesde plastique et vend déjà direc-tement des modules souplesphotovoltaïques appelés Flexcell.

Suisse:conditions-cadres attendues !Si la Suisse a été pionnièredans le développement detechnologies liées au photovol-taïque, sa production y est enstagnation: «L'énergie n'est pasun bien de consommationcomme les autres», relèveChristophe Ballif. Selon lui et

d'autres acteurs actifs dans ledomaine des énergies renouve-lables, il faudrait cependant quela population, les milieux poli-tiques et économiques accep-tent que certaines de ces éner-gies aient un fort potentiel etqu'il faille mettre en place unprogramme de soutien pour lesmettre en place… Des condi-tions-cadres sont attendues -une loi visant à favoriser lerecours aux énergies renouvela-bles est actuellement endiscussion aux Chambres fédé-rales - afin d'encourager l'em-ploi à grande échelle de cesénergies, comme c'est déjà lecas au Japon, en Allemagne, en

Espagne et dans certains Etatsdes USA.

Le solaire a un véritable potentiel:au niveau mondial, le marchédes modules photovoltaïques aconnu en 2005 une expansionde 35 à 40%... En Suisse, si l'onse contentait d'aménager desinstallations solaires sur dessurfaces de toit les plus appro-priées, on pourrait couvrirquelque 20% de notre consom-mation actuelle d'électricité. Siles prix de production dessystèmes photovoltaïques pour-suivent leur mouvement à labaisse, on peut imaginer d'ici2020 un prix de revient du

courant solaire de l'ordre de15-25 centimes le kilowattheure(contre 60 à 80 centimes actuel-lement), de l'ordre des tarifsélectriques locaux, ce qui impli-quera un changement de struc-ture de la distribution d'électri-cité… «Mais le marché pourraou devra s'adapter !», lanceChristophe Ballif, convaincu etconvaincant ! n

Virginie Borel

Le laboratoire du professeur Ballif fonctionne avec un budget de fonds de tiers de plus de deux millions de francs par ans.

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alors un problème fondamentalde fiabilité à l'extérieur desproduits livrés par l'entreprise.«On était proches du dépôt debilan», confie Diego Fischer. VHFréussit toutefois à rectifier le tir età trouver un investisseur depoids, en 2001, avec l'arrivée dugroupe sud-africain Richemont.Trois ans plus tard, l'entreprisechange de nom pour devenirFlexcell et déménage à Yverdonpour accéder à une plus grandevisibilité en réalisant des applica-tions orientées «grand public»: à

l'image de toiles solaires enroula-bles à emmener en camping ou àplacer sur son bateau de plai-sance pour recharger son maté-riel électronique.

Aujourd'hui, l'unique ligne deproduction de Flexcell permet deréaliser 2000m2 de cellulessolaires par an. L'objectif de l'en-trepreneur est clair: «Grâce à unenouvelle ligne de productiondisponible dans la premièremoitié de 2007 et avec uneconjoncture favorable, nous

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DOSSIER

Lorsque la recherche devient… «Flexcell»

Exemple concret du passage de la théorie à la pratique, la

start up de l'Institut microtechnique Flexcell développe depuis

1999 des produits basés sur les cellules solaires flexibles et

légères. Rencontre avec

Diego Fischer, créateur de

l'entreprise et président de

la section Jura-Neuchâtel

de la Société suisse pour

l'énergie solaire.

«C'est dans les crises que lesénergies alternatives se dévelop-pent», lance Diego Fischer, l'undes patrons de l'entreprise decellules solaires yverdonnoiseFlexcell. Si on ne connaissait pasla passion du jeune entrepreneurpour le solaire, on pourraitpresque le surprendre à lessouhaiter ! Il faut dire que l'émer-gence du solaire a coïncidé, dansle milieu des années 70, avec laflambée du prix du pétrole. Lacrise actuelle de l'or noir permetdès lors d'entrevoir un nouveaubond en avant de l'électricitésolaire, dont le prix est encoreenviron quatre fois plus élevé quel'électricité traditionnelle. Quant àl'application thermique del'énergie solaire (chauffage, eauchaude), elle est déjà aujourd'huibeaucoup plus proche de lacompétitivité économique.

VHF devient FlexcellDocteur de l'Institut de micro-technique, Diego Fischer décidede lancer son entreprise activedans la création de cellulessolaires flexibles, une start-upbaptisée VHF-Technologies, audébut de l'année 1999 dans lecadre de la foire industrielle deHanovre. Pendant quatre ans,VHF fait partie de l'incubateurd'entreprises de l'Ecole d'ingé-nieurs du Locle: «C'est là quenous avons conçu notre premièremachine de production avec nospropres moyens», raconte-t-il.Le conte de fées aurait pu s'ar-rêter là puisque l'on découvre

Diego Fischer présente du solaire flexible «grand public».

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espérons produire bientôt40'000m2 de cellules solaires,soit 20 fois plus qu'actuellementet tendre à la rentabilité». A noterque pour alimenter un ménagesuisse moyen en élctricité, il fautactuellement compter 50m2 decellules solaires.

Besoin de conditions-cadresL'énergie solaire sera-t-elleaccessible au plus grand nombreun jour prochain ? «Si Flexcell vabien aujourd'hui et compte 12collaborateurs, c'est parce qu'il ya un consensus politico-écono-mique international qui soutientl'importance de figurer parmi lespremiers à développer cetteforme d'énergie», affirme DiegoFischer, président de la sectionJura-Neuchâtel de la Sociétésuisse pour l'énergie solaire.

En Allemagne et au Japon, desconditions politiques cadres faci-litent l'accès à l'énergie solaire:une tendance que pourrait biensuivre notre pays qui se situe à lapointe de la recherche dans cedomaine, mais qui peine à déve-lopper son utilisation… LeConseil des Etats, qui devrait seprononcer lors de la session deprintemps, tient le couteau par lemanche: la Suisse doit-elleexploiter sa «vision» dans ledomaine des énergies renouvela-bles en encourageant leur utilisa-tion ou uniquement exporter sonsavoir-faire ? n

Virginie Borel

Renseignements : www. flexcell.com

n Les rêves solaires du professeur Shah

Ancien directeur de l'Institut de microtechnique, leprofesseur Arvind Shah a développé tout au long desa carrière, dans le cadre de son laboratoire, sonsavoir-faire en matière de cellules solaires. Lespanneaux solaires rigides sur des supports en verresont désormais développés par l'entreprise Unaxisqui a acquis un brevet dans ce domaine, alors queFlexcell a misé sur la version flexible. C'est d'ailleurspour cette spécificité «solaire» que Diego Fischer achoisi de venir faire sa thèse à Neuchâtel.Aujourd'hui, le professeur Christophe Ballif a reprisle flambeau des mains de son collègue Shah etentretient notamment des contacts avec les deuxentreprises tout en continuant à développer la technologie solaire… (vb)

n SSES Jura-Neuchâtel:le solaire proche du public

La section Jura-Neuchâtel de la Société suisse pourl'énergie solaire (SSES) est très active, à l'image deson président, Diego Fischer: forte de 150membres, elle œuvre essentiellement dans l'infor-mation, que ce soit par le biais de la course debateaux solaires sur les trois lacs, de la présenceactive lors de la Fête de la terre de Cernier au côtédes autres énergies renouvelables ou des «Bullesde soleil», un itinéraire initiatique à travers LaChaux-de-Fonds visant à découvrir les installationsd'énergies renouvelables présentes en ville.

Renseignements: http://www.sses.ch/juraneuchatel/

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Source d'énergie prometteuse issue de la Terre, la

géothermie dispose depuis plus d'un an d'un Centre de

recherche (CREGE) basé à l'Université de Neuchâtel. Fondé le

19 novembre 2004 sous la

forme d'une association à

but non lucratif, le CREGE

réunit aujourd'hui 38

membres représentant des

institutions publiques et

privées.

Forme d'énergie encorepeu exploitée mais aupotentiel gigantesque, la

géothermie présente de multi-ples avantages: disponible entout temps et en tout lieu, indé-pendante du climat et dessaisons, elle ne requiert ni stoc-kage ni transport de combusti-bles. «La géothermie représentede plus une contribution essen-tielle à la diminution des émis-sions de gaz à effet de serre etest appelée à devenir unesource de plus en plus indispen-sable dans notre futur mix d'ap-provisionnement énergétique»,souligne François-David Vuataz,directeur du CREGE.

La chaleur venue de la TerreLa géothermie représente l'ex-ploitation de la chaleur de la Terresous toutes ses formes, quelsque soient la profondeur, latempérature et le mode d'utilisa-tion. Les deux principaux modesd'exploitation sont d'une partl'usage direct de la chaleur pourdes applications dans le domainedu chauffage et d'autre part laconversion de l'énergie ther-mique en électricité.

Sachant que 99% de la massede la Terre se trouve à unetempérature supérieure à1000°C, les ressources sontimmenses, bien au-delà de tousles besoins énergétiques de l'hu-manité pour de nombreusesgénérations, même si seule unetrès petite partie de cette énergiepeut être exploitée. La chaleur de

la Terre représente à l'échelle duglobe la plus grande ressourceénergétique. Même si l'investis-sement initial reste bien souventélevé, la géothermie disposed'applications nombreuses etson coût d'exploitation est faible,ce qui lui confère une place dechoix parmi les énergies renou-velables. D'autre part, grâce à defaibles impacts sur la biosphèreet à une gestion durable, lagéothermie est une énergie favo-rable à l'environnement.

Parmi les énergies renouvela-bles, elle est aussi l'une des pluséconomiques. L'utilisation de lachaleur de la Terre se partage endeux catégories principales. Lesressources géothermiques debasse et moyenne température(10-100°C) sont utilisées demanière directe pour des appli-cations de chauffage (bâtimentslocatifs ou industriels, serresagricoles, pisciculture, centresthermaux, piscines, etc.). Lesressources géothermiques à

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DOSSIER

Première année d'activité duCREGE à Neuchâtel:

Géothermie: lorsque l’énergie vient du sol.

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haute température (120-350°C)permettent de convertir l'énergiecalorifique en électricité par lebiais de turbines à vapeurcouplées à des générateurs. Lesressources géothermiques dehaute température sont répartiesinégalement sur les continents,surtout dans les régions volca-niques. Au total, 24 pays produi-sent une partie de leur électricitégrâce à la géothermie, parexemple les Philippines,l'Indonésie, le Japon, le Mexique,la Californie, l'Islande ou près dechez nous la Toscane.

Géothermie et NeuchâtelLa Suisse ne possède pas devolcans. Cependant, notre paysfait partie des pionniers du déve-loppement de la géothermie debasse température et de faibleprofondeur. En effet, la Suisse estbien placée dans le peloton detête des 71 nations géother-miques. Il faut savoir que plus de35'000 maisons familiales sontchauffées au moyen d'une sondegéothermique verticale couplée àune pompe à chaleur, et que25% de toutes les nouvellesvillas en Suisse en sont équi-pées. La même technologie,exploitée à plus grande échellepar la mise en place de champsde sondes géothermiques, estutilisée avec profit pour desgrands bâtiments. Cette tech-nique est intéressante à plusd'un titre, puisque la pompe àchaleur ne requiert que 25% del'énergie nécessaire au chauffagedes locaux, alors que le sous-sol

en fournit 75%. De plus, unegestion saisonnière de la chaleuret du froid dans le sous-solpermet également de combineravec une grande efficacité éner-gétique, du chauffage à bassetempérature et un rafraîchisse-ment estival des locaux, sansavoir besoin d'une machine frigo-rifique.

Selon Jacques Rognon, prési-dent du CREGE, «le centre etson réseau de compétencessont amenés à jouer un rôleimportant dans la promotionde la géothermie en Suisse etpour son arrivée à maturité.L'établissement du CREGE àNeuchâtel est dû à l'existencedepuis plus de 15 ans àl'Université de compétencesdans le domaine de lagéothermie au sein de Centred'hydrogéologie. Le CREGEcontribuera à préserver la placede la Suisse parmi les pays detête du développement de lagéothermie dans le monde». n

Virginie Borel

Renseignements : Dr. François-D. Vuataz:tél. 032 718 26 92;[email protected]

un centre de recherche pour soutenir le développementde la géothermie en Suisse

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n Le CREGE actif dans trois domaines

Placé sous l'égide de la Société suisse pour lagéothermie (SSG), le CREGE est actif dans troisdomaines essentiels: recherche appliquée, promo-tion et formation ainsi que conseil et expertise. Sesbuts sont:n Agir en tant que centre national de recherche et

de formation en géothermie.n Conduire des programmes de recherche et de

développement en matière de géothermie.n Faire connaître les potentialités de la géothermie

et ses applications.n Diffuser les travaux de recherche et l'information

spécialisée.n Renforcer la coordination et la coopération entre

les différents acteurs de la scène géothermiquesuisse.

Le CREGE bénéficie notamment du soutien impor-tant de trois partenaires: L'Université de Neuchâtel,représentée par l'Institut de géologie et d'hydrogéo-logie; Groupe E, qui soutient le CREGE dans larecherche appliquée. Quant à Energie Ouest Suisse(EOS), elle soutient le CREGE dans le domaine dela formation.

La fondation du CREGE répond à la nécessité d'of-frir à la géothermie les moyens d'un développementà la mesure de son potentiel, qui prend d'autantplus d'importance dans le contexte d'une politiqueénergétique suisse axée sur le long terme etsoucieuse des aspects environnementaux.

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L'utilisation des énergies renouvelables et la gestion durablede la fertilité des sols peuvent être menées de concert, àl'image des travaux en Inde de l'équipe du microbiologisteMichel Aragno, de l'Université de Neuchâtel. Le rôle desrecherches neuchâteloises ? Renforcer les plantes en lesinoculant par des micro-organismes bio-fertilisantsafin de maintenir la produc-tion tout en abaissant drasti-quement l'usage d'engraischimiques. Mais il fautfournir à ces organismes unhabitat favorable par l'ap-port au sol de matièresorganiques…

On pourrait débuter ladescription des recher-ches menées conjointe-

ment par l'équipe du microbiolo-giste neuchâtelois MichelAragno, en collaboration avec unlaboratoire de l'Université deBâle et deux équipes indiennes,par «il était une fois»…

«Il était une fois, dans la régionde Delhi, un terrain pilote enfriche d'un hectare environ, trèspauvre en sels minéraux et enmatières organiques. On yentame alors un cycle en ajou-tant de l'engrais et du fumierpour y produire du blé et du four-rage, ainsi qu'un élevage debufflonnes et de vaches dans unenclos. Le grain du blé et le laitsont utilisés pour l'alimentationhumaine, alors que le reste de laplante est donné aux animaux enmême temps que le fourrage.»

Les deux «sous-produits» desbovidés, lait et bouse, sontexploités puisque la bouse estintroduite dans un «digesteur àbiogaz», une cuve fermée, sortede machine digne des plus follesinventions du grand Léonard:en l'absence d'oxygène, cesystème anaérobie transfsormeles matières organiques enbiogaz, un mélange de gazcombustible utilisable commesource d'énergie locale (chauf-fage, lumière, cuisson). Le diges-teur à biogaz produit par ailleurs

un résidu partiellement stabilisé,comparable à du fumier, qui peutalors être dispersé dans leschamps: ces matières ayant lacapacité de régénérer l'humus,elles augmentent la teneur du solen matières organiques. Unbienfait nécessaire, lorsque l'onsait que les sols de la plaine duGange ont perdu, à cause d'uneexploitation intensive, deux tiersde leurs matières organiques en60 ans… «Si l'on continue surcette voie, on peut légitimementse demander ce que seront cessols en 2050», commente MichelAragno.

Gestion durable des sols«Ce nouveau système vise unecertaine autarcie, note le scien-tifique. On évite d'une partl'appauvrissement des sols parl'apport exclusif d'engraischimiques. L'adjonction continuedes résidus ainsi recyclés devraitpermettre, d'autre part, d'amé-liorer la fertilité des sols parl'augmentation de leur teneur enmatière organique; par ailleurs,ce système assure une produc-tion d'énergie utilisable par lefermier, en lieu et place de l'utili-sation traditionnelle des bousesséchées comme combustible».

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Inde… du biogaz aux bio-inoculants :

vers une production accrue et durable

DOSSIER

Energies renouvelables et gestion durable de la fertilité des sols en Inde.

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A Neuchâtel, le travail de l'équipedu professeur Aragno consiste àétudier la possibilité d'ajouteraux semences des micro-orga-nismes bio-inoculants (bactéries,champignons) qui favorisent lacroissance et la nutrition de laplante: «C'est une approchecomplémentaire qui vise àaugmenter l'absorption de selsminéraux par les plantes, abais-sant ainsi le recours à desapports externes sans diminuerla production». Dans des labora-toires des universités deNeuchâtel et Bâle, on étudiedonc l'effet des bio-inoculants etleurs performances, afin que laplante soit fortifiée. «Ce qu'onignore encore, c'est si ces micro-organismes vont s'installer dura-blement dans le milieu ou s'il vafalloir reproduire cette opérationchaque année», explique MichelAragno, «c'est pourquoi oncherche à combiner à la bio-inoculation un apport de matièreorganique visant à assurer à cesprécieux auxiliaires des végétauxdes conditions leur permettantd'agir mieux et à long terme».

Co-financé par la DDC suisse(Direction du développement etde la coopération) et leDépartement de biotechnologiede l'Etat indien dans le cadre del'«Indo Swiss Collaboration inBiotechnology», ce projet , quis'achèvera en 2007, aura permisà plusieurs jeunes chercheurs dulaboratoire de Michel Aragnod'apporter leurs compétences àl'essentielle question du maintiende l'écosystème et de la gestiondurable des sols… n

Virginie Borel

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n La biomasse:une énergie durable de base

La biomasse comprend tout ce qui est dérivé de la matière orga-nique des végétaux; lorsqu'elle est transformée, elle peut produiredu biogaz, mais également du bio-diesel (à l'exemple d'une planteappelée Jatropha, poussant sur des sols semi-désertiques et dontles graines fournissent un succédané du pétrole). Si le biogaz estune source d'énergie intéressante, sa production s'intègre particuliè-rement bien à une gestion globale des espaces cultivés, et ce enpriorité dans les régions du monde où la terre est la principalesource d'existence. En permettant le recyclage des matières orga-niques, il vaut bien mieux que la pratique traditionnelle qui vise àutiliser les bouses séchées comme combustible, détruisant irréversi-blement les précieuses matières organiques génératrices de l'humus.

Favoriser la croissance et la nutrition de la plante grâce aux bio-inoculants.

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Deuxième représentant neuchâtelois au Conseil des Etats

depuis décembre 2005 - il y a remplacé Jean Studer - le

socialiste Pierre Bonhôte s'est toujours engagé en faveur

des énergies renouvelables. Docteur en chimie - il a aupa-

ravant obtenu son diplôme à l'Université de Neuchâtel - il

occupe un poste d'ingé-

nieur à temps partiel dans

le bureau d'ingénieurs

Planair SA à La Sagne.

«Aussi loin que je me souvienne,j'ai toujours été intéressé par desquestions d'environnement et dechimie… le choix de ma filièred'étude remonte d'ailleurs àl'école primaire», sourit PierreBonhôte. Son intérêt pour lanature est proportionnellementlié à son intérêt de comprendreson fonctionnement «avec laconviction que la résolution desproblèmes de l'humanité face àl'environnement nécessite desprogrès techniques», lance cequadragénaire arborant fière-ment sa couleur partisane.

Dans le cadre se sa thèse dedoctorat, Pierre Bonhôte atravaillé sur la vitamine B12,recourant à une vision prospec-tive de la manière dont il fallaitréformer la chimie pour la rendremoins nocive pour l'environne-ment: «En chimie, on trouve desvoies de spécialisation quiportent sur des questions d'envi-ronnement et d'énergie», défendcelui qui a obtenu un postdoc auprestigieux MIT de Boston avantde travailler pendant sept ansdans le laboratoire du professeurMichaël Grätzel à l'Ecole poly-technique fédérale où il s'occu-pait évidemment… d'énergie !

Besoin de conditons-cadresPierre Bonhôte le chimiste alonguement hésité lorsqu'il s'estagi de choisir de faire de la poli-tique une profession à pleintemps (ndlr: il a été conseillercommunal pendant quatre ans àNeuchâtel avant d'être élu àBerne). Aujourd'hui, l'hommeparvient à lier ses deux pôlesd'intérêt puisqu'il collabore à unbureau d'ingénieurs soucieuxde préserver l'environnement etles ressources énergétiques en

mettant en valeur les énergiesrenouvelables tout en respectantles impératifs économiques. «LaSuisse avait une belle avancetechnologique pour ce qui estdes énergies renouvelables,puisque c'est elle qui a déve-loppé l'énergie hydraulique demanière très performante», notePierre Bonhôte. Faute de condi-tions-cadres, cette avance a bienvite été grignotée par des payscomme l'Allemagne: «Sans lapolitique pour stimuler le marché,le progrès avance mais à pas desénateur», sourit l'homme auxdeux casquettes.

Or, le monde se dirige vers unepénurie d'énergie en raison dudéclin imminent de la productionpétrolière: «Il faudra réduire notreconsommation énergétique, onest à l'aube d'une crise énergé-tique majeure», prédit PierreBonhôte qui lançait une premièreintervention dans ce sens-là auGrand Conseil neuchâtelois en1989 déjà...

Pour pallier cette situation, leConseil national a désormaisproposé une rétribution au prixcoûtant - selon le modèle alle-mand - visant à encourager lerecours aux énergies renouvela-bles par le marché. A l'heureactuelle, la question est débattuedans le cadre de la Commissionenvironnement, aménagementdu territoire et énergie (CEATE)du Conseil des Etats qui devraitse prononcer lors de sa sessiond'été. Le socialiste a bon espoirque le projet passe la rampe:«car les mentalités évoluent, lesexpériences faites à l'étrangerportent leurs fruits». n

Virginie Borel

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«On est à l'aube d'une crise énergétique majeure»

DOSSIER

n Le chimiste Pierre Bonhôte formé à l'école neuchâteloise

Le conseiller aux Etats Pierre Bonhôte a passé plus dequatre ans sur les bancs de l'Institut de chimie del'Université de Neuchâtel. Malgré les hésitations légi-times - notamment avec l'EPFL -, le Neuchâtelois aopté pour la proximité et la qualité de l'encadrementafin de ne pas être «perdu dans la masse». Il sesouvient avec bonheur d'André Jacot-Guillarmod, sonprofesseur distant et scolastique «mais qui aimait bienla contradiction», mais aussi de Klaus Bernauer,Raphaël Tabacchi ou encore Fritz Stöckli… autantd'enseignants qui ont vu éclore une carrière.

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«Ecoparc ? Le 111 de la construction durable et du management

environnemental en Suisse romande !»

développement durable misentre les mains de ses princi-paux utilisateurs a une adresse:www.quartierecoparc.ch. «Parce que tout projet de cons-truction majeur devrait sedonner un accompagnementdéveloppement durable impli-quant un surcoût minime à l'in-vestissement, mais avec desbénéfices économiques, socio-culturels et écologiques nonnégligeables à l'exploitation»,lance Alain Guye.

Quant au système de manage-ment EcoEntreprise, il consisteen un programme Internet,lancé en septembre de l'annéedernière, visant à évaluer, géreret valoriser la durabilité de touteentreprise ou collectivitéspubliques, par exemple pour semettre en valeur sur le marchéou sur la scène publique, autravers d'une certification déve-loppement durable (CertificatEcoEntreprise), environnemen-tale (ISO 14001) ou encoresanté-sécurité (OHSAS 18'001).Ecoparc y a notamment intégré,en collaboration avec un spécia-liste du management environ-nemental, une liste d'auto-évaluation contenant plus de180 questions précises tellesque «Existe-t-il un tri sélectifdes déchets dans votre insti-tution ?». A l'heure actuelle,plus de 100 entreprisesutilisent ou testent l'outil(www.ecoentreprise.ch).

L'agenda d'Ecoparc affichedes semaines chargées… àl'image de l'organisation desplateformes d'échanges (voirwebsite Ecoparc) ou duprochain Forum qui se dérou-lera en février 2007 sur le

thème «Défricher la Ville ? Régé-nération des friches urbainesdans une perspective d'agglo-mérations durables». En cinqans, Ecoparc a donné du corps àun concept de départ un peu flougrâce à des actions concrètes,dont les publics sont aussi diversque l'est la société… n

Virginie Borel

Association EcoparcEspace de l'Europe 3a Case postale 347 2002 NeuchâtelTél. +41 032 721 1174 E-mail [email protected]://www.ecoparc.ch/

La construction de l'imposant bâtiment de l'Office fédéralde la statistique à Neuchâtel - pièce maîtresse de la cons-truction durable en Suisse - a coïncidé avec la naissanced'Ecoparc, l'association qui s'attache avec succès àstimuler l'application dudéveloppement durabledans l'environnement cons-truit et la gestion d'entre-prise. Rencontre avec AlainGuye, géographe formé àl'école neuchâteloise etdirecteur d'Ecoparc.

n Le singulier parcours d'un géographe

Passionné de géographie du développement, Alain Guye n'imaginait pas que son goût l'emmènerait… à quelques pas de la gare de Neuchâtel ! Le jeunehomme a en effet rapidement faitses premières expériences profes-sionnelles au sein de la FondationTerre des hommes: il lui a mêmeconsacré son mémoire de licence,en 1996, en évaluant lesprogrammes conduits parl'Organisation non gouvernementale(ONG) à Madagascar avant detravailler pour elle comme chargéde programmes, puis commedélégué adjoint en Guinée.Incongruité de parcours, le jeunehomme a étudié durant un an enAfrique du Sud pendant soncursus neuchâtelois: Alain Guyedécroche à l'Université duKwazulu-Natal un postgrade enenvironnement et développement…deux ans avant d'obtenir salicence !

Lorsque les architecteschargés de construire lenouveau bâtiment de

l'Office fédéral de la statistiqueà Neuchâtel ont décidé de s'im-poser de nouvelles exigencesécologiques en matière deconstruction, nul ne sait s'ilsimaginaient faire de ce projetarchitectural un modèle dugenre… Née de ce conceptpluridisciplinaire, l'associationEcoparc ambitionnait à l'originede faire de la sensibilisation audéveloppement durable àl'échelle d'un quartier pionnier.C'était sans compter l'intérêtdes entreprises d'intégrer à leuroffre ou à leur système lesprincipes du développementdurable. Embarqué dans lebateau en mai 2001, Alain Guyes'est dit «charmé par l'idée queson lieu de travail puissedevenir le centre de promotionpratique du développementdurable de la région».

Progressivement, la promotions'est transformée en mandatspour la mise en œuvre des théo-ries du développement durabledans l'environnement construit,premier axe de travail de l'asso-ciation. Les contacts avec lescollectivités publiques et lesentreprises ont suivi, désireuses

d'intégrer pour leur part cettenotion dans la gestion d'entre-prise. «Ecoparc est désormaisune des ONG actives dans cesdomaines, elle est devenue enquelque sorte le 111 de la cons-truction durable et du manage-ment environnemental en Suisseromande», assène dans unsourire son dynamique directeur.Les activités d'informationd'Ecoparc n'ont également cesséde se multiplier avec la créationd'un magazine, d'un forumthématique et d'une plateformed'échanges liés au développe-ment durable.

Deux projets pharesDepuis ses débuts, Ecoparc afait du chemin: elle proposedésormais deux outils phare: leGuide Use it et le ProgrammeEcoEntreprise. Le premier s'ap-puie directement sur l'exempledu quartier pilote de la gare deNeuchâtel: il s'agit d'un premierguide pratique, sur Internet, pourconnaître et expliquer les possi-bilités de mise en œuvre de ladurabilité dans son quartier (lamobilité, l'accessibilité), son bâti-ment (l'eau, la construction), sonlogement (les déchets)… Le

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Campus n Campus n Campus n Campus n Campus n

Le doyen de la Faculté des scienceséconomiques, Michel Dubois, s'ex-prime sur les coupes budgétairesannoncées et leurs conséquencesprobables pour l'Université. Cette interview est la seconde d'unesérie censée alimenter le débat surl'avenir de l'Université dans noscolonnes.

Les efforts d'économies ducanton de Neuchâtel s'adressentaussi à l'Université dont l'enve-loppe budgétaire risque d'êtreréduite de 10%, soit de près de

quatre millions de francs par anjusqu'en 2009. Votre réaction ? Je dirais que ce n'est pas la bonne manièred'aborder la question. Quelle que soit l'institu-tion concernée, il convient d'abord de définir la

stratégie: que veut-on faire ? Il endécoule des consé-quences financièreset, par une séried'allers-retours, lesobjectifs et lesmoyens à disposi-

tion sont ajustés. Ce ne sont pas les moyensqui conditionnent les ambitions, mais lesambitions qui sont conditionnées par lesmoyens.

La question est de savoir s'il faut considérerl'Université comme un coût ou comme uninvestissement, ce qui est radicalement diffé-rent. La considérer comme un coût relèved'une vision comptable à court terme qui faitabstraction de la richesse générée par unehaute école. Chaque franc investi par l'Etatdans l'Université produit trois francs dépensésdans le canton de Neuchâtel. Si l'Universitévenait à disparaître, Neuchâtel serait une villemorte, une petite ville de province. Par ailleurs,quel serait le montant versé par notre cantonau titre des contributions intercantonales ?Voilà les enjeux.

Puisque l'Université est nécessaire au cantonde Neuchâtel, il convient de se demander cequ'on veut faire et avec quels moyens. Cetravail a été fait il y a un an. Fondamentalement,je déplore la remise en cause de la stratégievalidée par le Grand Conseil en mars 2005.Est-ce à dire que le Plan d'intentions, s'il avaitété présenté en novembre 2005, n'aurait paspassé la rampe ?

Demandez-vous une exception universi-taire au plan d'austérité décrété par lesautorités cantonales ? Je ne comprends pas quelles économies sontdemandées et à qui elles le sont. Dans unpremier temps, nous avons été invités à déve-lopper des formations et à créer des filières

attrayantes. Une foisle programme missur pied, il faut leréduire, et nousdevons faire despropositions d'éco-nomies. Combiencoupe-t-on dans le

budget et sur quelle base ? En cas de réduc-tion proportionnelle, la Faculté des scienceséconomiques perdrait 14% de son budget,soit environ 300 000 francs par an. Nousserions forcés de supprimer un programme demaster sur les quatre que nous proposons,car nous sommes déjà à la limite des critèresd'encadrement fixés par la Confédération.

Cela nous ramènerait aux années 2001-2003quand il était question de fusionner la Facultédes sciences économiques avec la HECLausanne. Quand les politiciens y ontrenoncé, nous les avons prévenus: si laFaculté reste à Neuchâtel, il faudraaugmenter le budget, engager des profes-seurs et multiplier les cours afin de pouvoiroffrir des diplômes de master.

Que dire de la nouvelle réalité qui metles universités en concurrence tout enles obligeant à collaborer ? Je constate qu'au niveau mondial, les univer-sités de proximité ont le vent en poupe, quitteà répartir les spécialités entre elles, non paspar solidarité, mais par un jeu stratégique

bien compris. C'estpossible entre gensde bonne volontéqui comprennentqu'une guerre ferades dégâts desdeux côtés. Si l'onveut créer un jour

une Business School en Suisse romandeayant une visibilité internationale, il n'y enaura qu'une seule mais elle sera multisites !

Ce qui est frustrant, c'est qu'on nousdemande de jouer le jeu avec les universitésvoisines, de travailler en réseau, pour reveniren arrière sur les engagements financiers.

D'où l'impression de ne pas avancer et lerisque d'apparaître comme des partenairespeu fiables.

Vous sentez-vous incompris par les politiciens ?Non, car nous sommes conscients qu'il estdifficile de comprendre, de l'extérieur, l'ef-fort que demande la mise sur pied deprogrammes universitaires. Les médias onttendance à dépeindre les professeurscomme des privilégiés enfermés dans leurtour d'ivoire. Or il n'en est rien, la réformede Bologne a été une chance que nousavons su saisir et je crois que nous enavons fourni la preuve.

Par ailleurs, la gestion budgétaire n'incitepas à l'efficacité. Pourquoi ? Parce quel'Etat s'engage à combler le passif del'Université. Autrement dit, si nous réussis-sons à augmenter nos ressources, àrecruter par exemple davantage d'étu-diants, l'Etat paiera moins mais nous nebénéficierons pas du fruit de nos efforts.

Il manque donc une réelleincitation à recruter des étudiants ?Le système suisse de recrutement, notam-ment celui des étudiants étrangers, n'est pasoptimal. En principe, les étudiants sont touségaux, tout le monde paie la même chose oupresque. Or avons-nous, dans ces condi-tions, intérêt à recruter des étudiants étran-gers ? Non, car ils ne paient pas le prix réeldes études: leurs parents n'ont jamais verséun sou pour financer le système universitairesuisse. Ce n'est certainement pas ce quesouhaite le contribuable. Entendons-nous:avec quatre universités romandes dans unbassin de 1,5 million d'habitants, nous avonsabsolument besoin d'attirer des étudiantsétrangers pour faire vivre nos universités.Mais ceux-ci devraient payer le juste prix desétudes, participer de manière raisonnable ausystème, comme cela se pratique en Grande-Bretagne, par exemple.

Avec les coupes budgétaires telles quecelles proposées par le Conseil d'Etat,l'Université de Neuchâtel est-elle réelle-ment en danger, comme l'affirme lerecteur ?A terme, oui. Le déclin sera progressif. Onparviendra à vivoter pendant quelquetemps. La loi sur le financement des univer-

Interview «Ce ne sont pas les moyens qui conditionnent les ambitions, maisles ambitions qui sont conditionnées par les moyens»

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sités entrera en vigueur en 2010 ou 2011. LaConfédération mettra en place des critèrespour l'obtention du financement fédéral.Certaines branches devront être ferméesfaute de moyens et l'on assistera à une sorted'implosion. Il faudra une quinzaine d'an-nées pour que la bête meure… Il y aura uneréaction en chaîne: les rumeurs, la diminu-tion de l'offre de cours, le départ des profes-seurs les plus jeunes, la morosité générale…autant d'éléments peu stimulants pour unétudiant.

Avez-vous l'impression que les étudiants comprennent les enjeux ?Je ne suis pas sûr qu'ils voient réellement lesenjeux. Ils s'élèvent surtout contre le fait qu'onait asséné des vérités dans les différentesréformes, des vérités qui n'en étaient pas !Bologne pose un cadre très souple pour lebachelor (au moins trois ans d'études) et lemaster (au moins un an). Alors, s'agit-il de 3 +2 ou de 4 + 1, de 180 crédits ou de 180 créditsau minimum ? Nous n'avons jamais réellementdiscuté de cela au niveau suisse.

Cela dit, les décisions du Plan d'intentionsétaient frappées à l'aune du bon sens et ellesauraient dû être prises depuis longtemps. On atourné autour du pot pendant des années etquand la décision a été prise, cela a suscitédes mécontentements! Différer la résolutiondes problèmes n'aide en rien à les résoudre.

Que voudriez-vous dire aux politiques ?Premièrement: laissez-nous le temps demontrer que ce que nous sommes en train deconstruire fonctionne. Tirons un bilan danstrois ans.

Deuxièmement: puisque nous coûtons tropcher, donnez-nous les coudées franches etlaissez-nous le bénéfice de nos efforts pouraccroître nos ressources auprès de ceux qui«consomment» nos services.

Vous proposez donc de relever les taxes universitaires ?Le mot «taxe» est inapproprié car il ne s'agitpas d'un impôt. Il s'agit de payer la contre-partie d'un service qui peut être obtenu en

d'autres lieux. Nous avons fait un effortcolossal de réorganisation. Je suis fier que nosétudiants puissent s'inscrire «en ligne» auxexamens, consulter les résultats et les notesde cours sur le Web, etc. C'est bien fait, c'estconvivial. Globalement, nous offrons une pres-tation de haute qualité comme l'attestentdiverses enquêtes.

Malheureusement, il y a toujours des mécon-tents. Ce sont eux qui se manifestent enpremier, mais il n'est pas de leur ressort de

décider de la poli-tique de l'institution.Je ne veux nulle-ment priver desjeunes de la possibi-lité de faire desétudes, mais chacundoit comprendre ce

que cela coûte de faire partie de ce système.Les études ne sont pas un dû ! n

Propos recueillis parThérèse Obrecht

Depuis le début de l'année Rolf Klappert,ex-chef de projet au laboratoire R&D dugroupe Swatch ASULAB, a ouvert unBureau de transfert de technologies (TT)à l'Université de Neuchâtel. C'est luiaussi qui assume désormais la respon-sabilité de l'antenne régionaled'Euresearch.

Rolf Klappert, quelles sont vos fonctions ?Je suis responsable du Bureau régional del'association Euresearch. Le but de cette asso-ciation, qui est financée par le Secrétariatd'Etat à l'éducation et à la recherche (SER), estd'encourager la participation suisse à desprojets et à des programmes de recherchefinancés par la Commission européenne.Euresearch occupe 60% de mon temps, les40% restants sont consacrés au Bureau detransfert de technologies (TT) qui vient d'ouvrirses portes à l'Université de Neuchâtel et dontle but est de valoriser les résultats de larecherche de notre Université.

Qui peut s'adresser à vous ?Notre bureau Euresearch offre ses servicesaux chercheurs des hautes écoles et auxindustries situées dans les cantons du Jura etde Neuchâtel et dans la partie francophonedu canton de Berne. Mais Euresearch étant

organisé en réseau,les personnes inté-ressées peuvents'adresser à tousles bureaux duréseau. En ce quiconcerne le Bureaude transfert de tech-

nologies, il est ouvert aux chercheurs del'Université de Neuchâtel.

Quels sont les services que vous offrez ?Euresearch informe, motive et conseillegratuitement et d'une manière ciblée lespersonnes et les organisations qui s'intéres-sent à participer à des projets de rechercheeuropéens. Concrètement, nous pouvonsorienter des chercheurs ou des industriels versdes programmes de recherches qui concer-nent leurs domaines. Nous pouvons aussiaider ces mêmes personnes à faire les démar-ches nécessaires et à remplir les dossiers, cequi n'est pas toujours une mince affaire !

Quant au Bureau de transfert de technologie, ilappuie les chercheurs dans toute une série dedomaines: en collaboration avec le Servicejuridique, il vérifie les contrats de collaborationavec les autres universités ou avec les indus-tries et aide les chercheurs dans leurs négo-

ciations. Il les conseille en matière de brevetset de licences et surtout, il valorise et faitconnaître leurs travaux en vue d'augmenterleur visibilité et celle de notre Université.

Relevons que l'Université de Neuchâtel estpartenaire du consortium Alliance. Par l'inter-médiaire de du Bureau TT, les chercheurs ontdonc également accès aux prestationsd'Alliance qui s'étendent sur l'ensemble de laSuisse romande.

Où peut-on vous rencontrer ?Mon bureau est situé dans le bâtiment durectorat, Faubourg du Lac 5a. Je reçois lespersonnes intéressées sur rendez-vous. Deplus nous organiserons prochainement deuxmanifestations: une présentation du BureauTT et d'Alliance, le 9 mai prochain, dans unlieu qui reste encore à déterminer et uneprésentation du 7e programme-cadre derecherche de l'Union européenne, le 1er juin,à l'Aula des Jeunes-Rives.

Propos recueillis par Claudine Assad

Tél.: 032 718 1051; [email protected]

Un appuipour les chercheurs

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«Soyons créatifs ! » le mot d'ordre estlancé… les Maîtrises universitaires quela Faculté des lettres et scienceshumaines proposera à partir d'octobre2007 répondront au critère de la créati-vité et de l'originalité sans négliger lacrédibilité académique. Visite guidée encompagnie du doyen, Jean-JacquesAubert.

«Notre université a tous les atouts pour resterparmi les meilleures: soyons créatifs», lancedans un sourire le doyen de la Faculté deslettres et sciences humaines, Jean-JacquesAubert. Les masters que proposera la Facultérépondront donc à cette injonction: créativitéet rigueur seront à l'honneur ! «Nous avonstenté de conserver la diversité en satisfaisantles exigences de la CRUS» (ndlr: la Conférencedes recteurs des universités suisses a émisdes critères stricts de masses critiques pourl'obtention des finances fédérales).

Neuf piliers homogènes«Le point de départ réside dans le fait demettre ensemble des petites disciplines,réunissant peu d'étudiants, avec des grandes,à l'exemple du Master en littératures»,

explique le doyen qui s'enthousiasme: «Nousavons tenté de dégager l'étude de la contin-gence nationale: dans ce cas, la littératuretranscende la discipline.»

La consigne principale transmise aux institutsen vue de la création des masters ès artsneuchâtelois était simple: les plans d'étudesimaginés ne devaient en rien être condi-tionnés à la création de postes mais, aucontraire, utiliser les ressources à disposition.On a ainsi imaginé les projets de manièretransversale sur la base de troncs théoriquescommuns et de spécialisations pointues.Quant aux bachelors, ils sont très discipli-naires, respectant ainsi les exigences dumarché du travail.

De ces réflexions sont nés neuf piliers demaîtrise homogènes comprenant des spécifi-cités en fonction des spécialisations:

1. Sciences humaines et sociales (anthropo-logie, géographie humaine, sociologie,migration et interculturalité, psychologieet éducations)

2. Journalisme et communication 3. Sciences du langage

4. Linguistique historique et philologiefrançaises

5. Histoire (ancienne, médiévale, moderne,contemporaine)

6. Littératures (littératures de l'Antiquité,français, allemand, anglais, espagnol,littérature et culture)

7. Philosophie8. Rhétorique (voir l'encadré à ce propos)9. Histoire de l'art10.Logopédie

A ces piliers internes à la Faculté s'ajoutentdeux piliers communs: 1. Muséologie (avec l'Université de Lausanne)2. Archéologie (avec les universités de

Berne et Fribourg)

La Faculté a fourni d'importants efforts pourque l'Europe de la formation fasse une entréeremarquée à Neuchâtel: il reviendra auxétudiants de trancher en marquant leurconfiance à ces maîtrises universitaires d'ungenre nouveau ! On en attend au minimum 20par an et par pilier … n

Virginie Borel

Les Masters ès arts de l'UniNE ? Une véritable carte de visite !

n La perspective transnationale de la Maîtrise «Littératures»

Parfaite illustration de la transversalité desnouveaux Masters ès arts, la maîtrise univer-sitaire «Littératures» a l'ambition d'offrir auxétudiants qui ont étudié une ou plusieurslangues et littératures en Bachelor unenseignement qui vise à appréhenderl'œuvre littéraire dans une perspective trans-nationale et multiculturelle: «La richesseactuelle du questionnement sur la littératuremondiale, ainsi que le succès éditorial destraductions, sont favorables à la créationd'un enseignement portant de manièreconvergente sur les littératures», légitimentles membres du groupe de travail chargésd'élaborer ce Master que les premiersétudiants pourront rejoindre dès l'automne.Le dynamisme de ce Master sera notam-ment assuré par la promotion d'activitésinternes ou parallèles à l'enseignement afinque la Faculté soit reconnue en tant quepôle culturel.

n Art et technique de l'écriture: une originalité neuchâteloise

Il ne suffit pas d'écrire juste pour écrire bien.L'Université a longtemps cru que l'écritureallait de soi, pour autant que l'on maîtrise lesprincipales règles orthographiques… avantde s'apercevoir que les étudiants ne sont pastous égaux devant l'art de convaincre et queleurs bonnes idées sont souvent altérées parla méconnaissance de la rhétorique. Unnouveau cours vise à pallier cette carence.

Les résultats ne sont pas tout: encore faut-ilsavoir les expliciter en fonction des publics,maîtriser l'argumentation et l'écriture. Lenouveau cours qui vient d'entamer sa phasepilote avec le semestre d'été visera donc, aumoyen de nombreux exercices pratiques, àrenouer avec les trois qualités essentiellesdes textes universitaires que sont la rigueur,la clarté et l'intérêt.

Linguiste spécialiste en rhétorique - il estl'auteur d'une thèse sur l'art oratoire du

général de Gaulle -, Thierry Herman a étéchargé de ce nouvel enseignement parl'Institut de français. Il défend avec convic-tion que «la rhétorique redevient à lamode». Avant de poursuivre: «On a cons-taté un manque dans ce domaine: les textessont mal structurés, peu argumentés, maiségalement à l'endroit du monde profes-sionnel où la communication a pris uneplace prépondérante.»

«Argumenter, écrire et convaincre. Pratiquesde la rhétorique» a une vocation totalementinterdisciplinaire, malgré un dénominateurcommun: il s'adresse aux étudiants évoluantdans une discipline où l'on rédige en fran-çais. Après une phase d'essai afin de rôderles techniques, le cours de rhétoriquedeviendra annuel en renforcement duBachelor et comportera 10 crédits ECTS. Auniveau du Master, le cours sera intégré dansun pilier secondaire de rhétorique de 30crédits comprenant plusieurs autres ensei-gnements.

Renseignements: [email protected]

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L'Université de Neuchâtel met un coupd'accélérateur à la mise en place del'Assurance Qualité: l'AQ -enseignementd'une part et l'AQ - filière et recherche,d'autre part. Elle répond ainsi auxexigences de la Confédération qui condi-tionne l'attribution de ses subventions à lamise sur pied de ce processus. Et il fautfaire vite: tout doit être prêt avant l'au-tomne 2007, date du prochain audit del'Organe d'accréditation et d'assurancequalité des hautes écoles mis en placepar Conférence universitaire suisse (CUS).

En décembre dernier, tous les étudiants ontrempli des questionnaires concernant chacunde leurs cours. Ainsi, ce ne sont pas moins de11 812 questionnaires concernant 468 ensei-gnements qui ont été dépouillés. Cettepremière approche a permis d'évaluer lamanière dont les étudiants percevaient laqualité de l'enseignement.

Les résultats ont été globalement positifspuisque la moyenne des notes attribuées parles étudiants aux enseignements se situe auxalentours de 5.

Cette démarche doit être systématique et laprochaine évaluation indicative des enseigne-ments se déroulera du 2 au 12 mai 2006selon les mêmes modalités que celle dedécembre dernier.

Mais le lancement de ce questionnaire neconstituait que le point de départ de la misesur pied d'une véritable Assurance Qualité del'enseignement.

Le conseiller àl ' ense ignementEdouard Paulino,qui remplacePhilippe Jeanneretà ce poste depuisle 1er février dernier,est égalementchargé de mettreen place les autres services que l'UniNEentend offrir, en particulier:n effectuer les évaluations approfondies

des enseignements lorsque cela estsouhaité par un enseignant, sachant quecette démarche restera strictement confi-dentielle

n animer des ateliers de pédagogie univer-sitaire tels que «Favoriser la participationdes étudiants» (11 avril), «Théâtralisermon cours» (20 avril) ou «Préparer unexamen écrit» (1er juin)

http://www2.unine.ch/aq-e/page10267.html.

L'UniNE a par ailleurs adhéré au réseau romandde conseil, formation et évaluation pour l'ensei-gnement universitaire, ce qui permet auxenseignants de participer aux nombreuxateliers qui sont offerts dans ce cadrehttp://www.unige.ch/formev/rcfe/accueil.html.

Le conseiller à l'enseignement s'adresseaussi aux doctorants. A leur intention, il aprévu de mettre sur pied plusieurs séminaires(par exemple: les communications scienti-fiques et une préparation à la défense et à lasoutenance des thèses).

Assurance Qualité filière et rechercheCe n'est pas seulement l'enseignement quidoit être évalué et soutenu. La qualité desfilières et de la recherche doit aussi êtreévaluée. Dans cette optique, la conseillèreà la recherche,Susy Wagnières,s'est attelée à lamise en placed'instruments demesures par lebiais de plusieursprojets.

Dans un premier temps, deux filières vont êtreévaluées, tant sur le plan de l'enseignementque sur le plan de la recherche: la chimie, enFaculté des sciences et le pilier de français enFaculté des lettres et sciences humaines.

Cette phase prototype a démarré en janvier2006 et se terminera en septembre prochain.Les deux filières concernées font l'objetd'une auto-évaluation interne par les institutset les doyens des facultés mais aussi d'uneévaluation externe par des groupes d'expertsqui procéderont à une visite sur place.

Les résultats de ces évaluations permettrontde mettre en place un catalogue de mesures.

Dès 2007, toutes les filières seront évaluéesde la même manière.

Une autre mission de la conseillère à larecherche consiste à mettre en applicationla procédure de nomination des professeurset la procédure de confirmation de nomina-tion après 4 ans prévue par le nouveaurèglement de juillet 2005. «Un certainnombre de critères doivent obligatoirementêtre remplis pour qu'une nomination ou uneconfirmation soit acceptable», expliqueSusy Wagnières. Exemple: un candidat pourun poste de professeur doit avoir l'expé-rience nécessaire pour assumer un telposte: expérience en matière d'enseigne-

ment, bien sûr, mais expérience aussi enmatière de direction de thèses, d'obtentionde fonds, de publications, etc. Il y a en outreune claire distinction à faire entre un postede professeur assistant ou un poste deprofesseur ordinaire.

Enfin, la dernière tâche à laquelle SusyWagnières devra s'atteler sera l'évaluation dela recherche stricto sensu. Là aussi, cetteévaluation devra se faire selon des indica-teurs mesurables: bibliométrie (nombre depublications), soutien externe, nombre dethèses supervisées, nombre de brevets (selonle domaine) ou nombre de prix reçus etc.

Ces critères peuvent varier en fonction duniveau auquel se situe l'évaluation (niveauindividuel, groupe de recherche, institut,faculté ou université) et bien sûr en fonctiondu domaine de recherche.

Que ce soit au niveau de l'enseignement, desfilières et de la recherche, la mise en place del'Assurance Qualité répond, certes, à desexigences légales, mais elle répond aussi etavant tout à la mission de l'Université qui sedoit de garantir un niveau qualitatif élevé deses prestations appuyé sur des démarchesprécises et des critères clairs et explicites.

Mais, et Susy Wagnières y tient beaucoup:«Cette mise en place doit se faire dans latransparence, avec tous les partenaires impli-qués afin de tenir compte des spécificités dechacun.» n

Claudine Assad

L'Assurance Qualité à toute vapeur

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L'Université de Neuchâtel en estconvaincue : l'avenir des archives scien-tifiques passe par leur accessibilité auplus grand nombre. Le point avec KarimChèvre, responsable des bibliothèquesde la Faculté des sciences en charge duprojet «archives ouvertes» à l'heure où lacommunauté scientifique suisse s'en-gage officiellement dans cette mêmedirection.

Les chercheurs le savent mieux quequiconque: la reconnaissance scientifique estindissociable des publications et de leurarchivage. Or, depuis les années 80, Interneta vu naître et s'amplifier le phénomène desarchives ouvertes, en particulier en Europe oùleur progression est la plus rapide au monde.Il faut dire que les avantages de ce type d'ar-chives sont légions: la gratuité, la durabilité,la possibilité d'être accessible au plus grandnombre, la rapidité de la mise en réseau(référencement) et l'extension mondiale.Certaines disciplines, à l'image des mathé-matiques, de l'informatique et de la physique,n'ont pas attendu pour proposer leursarchives accessibles au plus grand nombre:elles disposent depuis une quinzaine d'an-nées de leur propre «open source». «LeCERN ayant mis au point le WorldWide Web,les physiciens, informaticiens et mathémati-ciens se servent toujours de cet outil pourarchiver leurs données», rappelle KarimChèvre, acquis au principe des archivesouvertes.

L'avantage des «peer-reviews»Les archives ouvertes entrent-elles enconcurrence avec les éditions payantes ? Lesmaisons d'éditions scientifiques proposentelles aussi un accès à leurs archives moyen-nant un tarif d'abonnement: depuis quelquesannées, les prix sont sans cesse revus à lahausse et les institutions affiliées sontamenées à réévaluer la nécessité de sous-crire de tels abonnements: «C'est le casd'Elsevier, un des plus grands éditeurs depériodiques en ligne dont les tarifs sontdevenus inabordables pour des universitéscomme Neuchâtel ou Fribourg», souligneKarim Chèvre. Encore faut-il pouvoirproposer des archives ouvertes de qualité:dans le cas des périodiques payants, le prin-cipal atout réside dans les «peer-reviews»,soit la validation des articles par des pairsavant leur publication en ligne. Si cette

démarche tend à se développer dans lesarchives ouvertes, elle n'est pas encoreperformante aux dires des spécialistes.

Dans le cas des archives ouvertes, on trouvela référence au journal qui a publié l'article etle lien vers l'éditeur. «RERO DOC, biblio-thèque numérique intégrée dans le réseaudes bibliothèques de Suisse occidentale,RERO - auquel appartient l'Université deNeuchâtel -, est référencée dans plusieurssites d'archives ouvertes dont OAIster, le plusconnu ; ce dernier donne actuellement accèsà plus de 6.5 millions de travaux publiés dansplus de 600 institutions ou réseaux d'institu-tions», relève Karim Chèvre. «Les archivesouvertes ne sont pas de la publication aurabais», rappelle le bibliothécaire en étayantson propos: «Un article en archive ouverte eststatistiquement cité plus souvent et plus rapi-dement que le même article qui figure chezun éditeur payant.»

On le constate, les scientifiques sontconfrontés à un dilemme: la promotion «idéo-logique» de la publication en montrant quecette dernière ne doit pas être onéreuse enopposition aux coûts prohibitifs exigés parles maisons d'éditions en ligne qui conser-vent un vrai prestige.

Oui suisse aux archives ouvertesLa Déclaration de Berlin sur le libre accès à laconnaissance en sciences exactes, sciencesde la vie, sciences humaines et sociales, àlaquelle vient d'adhérer la communautéscientifique suisse - dont le Fonds nationalsuisse et la Conférence des recteurs desuniversités suisses - est un signal fort pourque la connaissance scientifique ouvre sesrayons virtuels au plus grand nombre. Le libreaccès aux publications concerne 2,5 millionsd'articles paraissant chaque année dans24'000 revues scientifiques dans le mondeentier et portant la désignation «peer-reviewed scholarly and scientific journals». Ilentend mettre en oeuvre deux mesures prin-cipales: d'une part, le chercheur devrait auto-archiver les articles qu'il a publiés dans desrevues sur son propre site Web, le serveur del'Université ou une plate-forme institution-nelle. Quelque 92% des 24'000 revues auto-risent d'ores et déjà les auteurs à le faire;d'autre part, il s'agit de les publier aussi dansdes «Peer-Reviewed Open Access Journals».10% des 24'000 revues référencées dispo-

sent aujourd'hui d'un tel système. C'est lecas notamment de BioMed Central, maisond'édition britannique au portefeuille de 170revues dont 137 disponibles en libre accès,ou de l'organisation à but non lucratif PublicLibrary of Science.

Aucune étude n'a été réalisée en Suisse pouranalyser le profond changement survenu surle marché de la publication scientifique. Unerécente enquête de la DeutscheForschungsgemeinschaft (DFG) montre queplus de 80% des chercheurs interrogés danstous les domaines scientifiques sontconvaincus par le libre accès car il développel'échange de connaissances. Ils saluent aussil'auto-archivage d'articles déjà parus dansdes revues renommées.

Aide pratique aux chercheurs En signant la Déclaration de Berlin, les insti-tutions académiques suisses invitent leschercheurs à recourir à l'auto-archivage. Ellesles soutiendront en développant une infra-structure technique pour accéder rapidementet confortablement aux contenus scienti-fiques, et en les aidant sur le plan techniqueet organisationnel: c'est déjà le cas enFaculté des sciences puisque Karim Chèvrese charge, dans la mesure du possible, de lamise en ligne rapide des articles signés pardes scientifiques neuchâtelois; les autresfacultés y sont également invitées si elles lesouhaitent. Au niveau international, diversesquestions juridiques et relatives à la politiquescientifique devront encore être clarifiées. (vb) n

Le site des bibliothèques de l'UniNE informeplus en détail sur les archives ouvertes:http://www2.unine.ch/biblio/page6829.html

«Déclaration de Berlin sur le libre accès à laconnaissance en sciences exactes, sciencesde la vie, sciences humaines et sociales»:h t tp : / /www.z im.mpg.de/openaccess-berlin/berlindeclaration.html

Informations scientifiques: les archives ouvertes, libre accès aux publications

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La mémoire collective n'aretenu des pharaons queceux d'Egypte. Car peu

nombreux sont ceux quiconnaissent la dynastie despharaons noirs. Ces souverainsnubiens ainsi appelés pour lesdifférencier de leurs envahissantsvoisins. Tour à tour adversaires etpartenaires, Nubiens etEgyptiens se sont disputé lazone d'échange entre laMéditerranée et l'Afrique noire. Sil'histoire est riche de connais-sances sur la civilisation égyp-tienne, elle l'est beaucoup moinsde la civilisation napatéenne despharaons noirs du Soudan…

Entre Nil et mer Rouge, Kermaest un site archéologique qui n'apas à rougir de ses prestigieuxvoisins égyptiens: éloignée par15 heures de bus sur routesablonneuse de la capitaleKhartoum, Kerma est le centredu premier royaume de Nubie.C'est l'archéologue genevois,Charles Bonnet, qui y a entamédes fouilles voilà 30 ans, trans-mettant ensuite le virus à

Matthieu Honegger, actuelle-ment maître-assistant enarchéologie préhistorique àl'Université de Neuchâtel. «Jeme rends au Soudan depuis 12ans, glisse dans un sourire lechef de ce projet aux dimen-sions… pharaoniques ! C'estune mission archéologique quis'inscrit définitivement dans ladurée.»

Kerma ne porte pas uniquementun nom digne d'une reine, elle enpossède les richesses ! La cités'est en effet développée entre2500 et 1500 avant Jésus Christ;elle comprend notamment unenécropole de 70 hectares dont300 tombes ont été fouillées en20 ans. Quant à la ville de ceroyaume, elle couvre 20 hectaresdont Charles Bonnet a pu étudierun plan complet. Suite à sadestruction par les Egyptiensvers 1500 av. J.-C., une nouvelleville est construite, 1 km plus aunord. C'est à cet endroit précisque sept précieuses statues, lesfameux «pharaons noirs» ont étédécouvertes en janvier 2003…

n «En archéologie, on devrait réfléchir au moins dans un rayon de 500 km»

A l'Université de Neuchâtel, dans le fabuleux contexte duLaténium à Hauterive, on enseigne tant la préhistoire euro-péenne qu'africaine: il est d'abord question d'apprentis-sage de techniques qu'il s'agit alors de transposer d'unesociété à une autre. «En archéologie, on devrait réfléchir aumoins dans un rayon de 500 km en termes scientifiques»,lance Matthieu Honegger… qui en sait quelque chose, luiqui a rédigé un mémoire en archéologie africaine avant des'intéresser à l'Europe dans le cadre de sa thèse.

L’équipe d’archéologues neuchâtelois fouilleun site prestigieux au nord du Soudan.

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Depuis l'automne 2005, une équipe d'archéologues neuchâtelois emmenée par Matthieu

Honegger dirige - grâce au soutien du Fonds national suisse - une des plus importantes missions

conduites par la Suisse à l'étranger: dans la vallée du Nil, au nord du Soudan, Kerma n'en finit

pas de surprendre les archéo-

logues par sa richesse infinie.

Un musée réalisé avec le

soutien de la Suisse y sera

inauguré en janvier 2007.

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Urbanisme et sédentarité…3000 ans avant notre èreA l'heure actuelle, Kerma est unerégion de 10 kilomètres par 30sur laquelle il est aisé de sedisperser… La ligne directriceentre le «maître» et «l'élève» estclaire, comme a été serein lepassage de témoin: CharlesBonnet, aujourd'hui retraité,continue à entretenir sa passionen fouillant la «nouvelle ville»fondée par les Egyptiens etoccupée durant près de 2000ans; quant à Matthieu Honegger- directeur du projet depuis quatreans - et son équipe, ils ont mis enlumière les antécédents duroyaume de Kerma, entre 10'000à 2000 avant Jésus Christ. «De10'000 à 6000 av. J.-C., la popu-lation va progressivementadopter une économie deproduction fondée sur l'élevagepuis l'agriculture, note le maîtreassistant. Nous travaillonsnotamment sur un projet portantsur l'urbanisme et le début de lasédentarité.»

L'équipe de fouille a notammentmis la main sur une cabane semi-enterrée datant de 7500 av. J.-C.ainsi que sur la première ville detradition totalement africaine, enbois et en terre, datant de 3000av. J.-C. «La fouille de cette villeest assez ingrate, car on trouvedans le sol, non sans peine, desvestiges fugaces de matériauxpérissables», relate l'archéologuequi se rend sur le terrain environ5 à 6 semaines par année. Et depoursuivre: «C'est un jeu d'en-quêtes très difficile car on sesitue alors sous la nécropole deKerma.»

Un musée archéologique à Kerma !Une fouille de plus de 30 ans nelaisse personne indifférent ! Lamission suisse forme notammentdes inspecteurs soudanais pour

garder les sites en dehors de saprésence; une étudiante deKerma particulièrement brillantereçoit par ailleurs un soutiendans le cadre de son Master. Ducôté neuchâtelois, deux à troisétudiants avancés accompa-gnent chaque année MatthieuHonegger dans son «pèlerinage

soudanais» et se plongent dèslors fréquemment dans la rédac-tion de travaux de mémoire enarchéologie africaine.

Le Soudan, le pays le plus impor-tant d'Afrique, est actuellementen mutation et se montre particu-lièrement sensible à son passé.Dès lors et au vu du nombre deSoudanais qui épaulent lesarchéologues suisses dans leurstravaux, il n'est pas si étonnantqu'un musée soit érigé à Kerma,au niveau de la troisième cata-racte de la vallée du Nil. «C'estune bonne manière pour s'ap-proprier son patrimoine», relèveMatthieu Honegger, très respec-tueux. A partir de janvier 2007,indigènes et touristes pourrontdonc franchir la porte d'unmusée-site muni d'un petit labo-ratoire et financé par des fondsprivés dont une aide de laConfédération. n

Virginie Borel

Kerma, cité reinedes archéologues au cœur du pays des pharaons noirs

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Les études d'ethnologieneuchâteloises ont à cœurde «faire parler la réalité»

au travers du regard anthropolo-gique: aussi depuis 1999,l'Institut d'ethnologie propose-t-il un séminaire exclusif demuséographie et, depuis 2002,un autre en anthropologiefilmique: «Les étudiants sontalors en charge d'un projetconcret, que ce soit le montaged'une exposition ou la réalisa-tion d'un film», relèvent les deuxassistants en charge de cesactivités pratiques orientéesvers le monde professionnel,Nicolas Yazgi et Grégoire Mayor.

«Faire sa place»En plein «boom», le courant del'anthropologie filmique nedispose pas encore d'un ensei-gnement très répandu en Europefrancophone. A Neuchâtel, c'està Ellen Hertz et Grégoire Mayorque l'on doit son introductiondans le cursus: «Dès l'origine ducinéma, les ethnologues se sontintéressés à cet outil, remarqueGrégoire Mayor, nouveau conser-vateur adjoint du Musée d'ethno-graphie (MEN). Ce type de

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trouve

n Faire du virtuel vertu: la Maison d'analyse des processus sociauxdevient réalité !

La MAPS, qui réunit les membres fonda-teurs et compagnons de route dans unestructure qui permet échanges, partageet confrontation des savoirs et desméthodes en sciences humaines etsociales, met en ligne son site Web:www.unine.ch/maps.

n Altérités en scène

Dans le cadre de l'un des Masters en sciences humaines et sociales qui sera proposé àpartir de 2007 à l'Université de Neuchâtel, orientation anthropologie, une spécialisationprovisoirement appelée «altérités en scène» proposera des cours d'ethnomusicologie,de filmographie et d'ethno-muséographie…

Nicolas Yazgi et Grégoire Mayor associent la muséographie etl’anthropologie filmique au thème de l’identité neuchâteloise.

Une partie des membres de la MAPS

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cinéma a vécu un renouveauthéorique dans les années 70»,raconte le jeune scientifique quiapprécie cette façon de faire «duterrain» et de négocier avec lesgens tout en se positionnantderrière une caméra. En ethno-logie, l'utilisation du supportvisuel peut en effet viser deuxobjectifs: la collecte de donnéesou la réalisation d'un récit ethno-logique, basé sur la représenta-tion visuelle et sonore. En pour-suivant une réflexion sur lesconventions esthétiques et narra-tives à l'œuvre dans les filmsethnographiques Grégoire Mayora d'ailleurs remporté un prix àLocarno en 2004 pour son court-métrage intitulé «Paul Maillard,facteur de langues de bois».

Dans le cadre de l'exerciceNeuchàtoi, une dizaine d'étu-diants avancés vont devoir définireux-mêmes une approchevisuelle du thème, l'identiténeuchâteloise, passant de lathéorie à la confrontation directeavec les gens. Pour ce faire, ilsvont être encadrés non seule-ment par Grégoire Mayor, maiségalement par une assistante

éclairée dans ce domaine spéci-fique, Olivia Killias. Parallèlement,avec le soutien du Centre derecherches ethnologiques, cinqfilms portant sur la politique demigration en Suisse serontprojetés en présence des réalisa-teurs en mars et avril. Enfin, encollaboration avec GianniD'Amato du SFM, d'autresétudiants travaillent d'ores et déjàsur un thème donné, «Faire saplace», en s'intéressant à desétrangers vivant à Neuchâtel quisont parvenus à s'intégrer, à«faire leur place» dans la société.Ces portraits seront présentés aupublic en septembre.

L'art de mettre en scèneJusqu'à la Deuxième Guerremondiale, les liens qui unissent lemonde académique et les muséesreprésentent le fondement del'ethnologie. «Graduellement, leschoses se sont séparées jusquedans les années 80», expliqueNicolas Yazgi, chargé d'ensei-gnement formé, comme soncollègue Mayor, à l'école del'ethnologie neuchâteloise. «Parl'usage de mises en scène origi-nales, le MEN a été l'un des

premiers à rapatrier des théma-tiques orientées sur soi-même»,poursuit-il.

C'est dans le cadre du coursd'ethno-muséographie donnépar Jacques Hainard - l'anciendirecteur charismatique du MEN- que s'inscrit le séminaire donnépar Yazgi qui excelle, comme sonillustre aîné, dans l'art de mettredes idées et des concepts enscène. Le semestre d'hiver apermis de fixer le cadre théoriqueen analysant notamment lesdocuments existants concernantNeuchàtoi et d'élaborer desscénarios envisageables. Auterme d'une séance commune,les muséographes en devenir ontarrêté leur choix sur une méta-phore liée aux Appellations d'ori-gine contrôlée et aux produits duterroir: «Il sera question de laconstruction de l'authenticitéalimentaire pour réfléchir à laquestion de l'identité», détailleNicolas Yazgi…

Intrigués ou simplement curieuxde voir le résultat des réflexionsdes étudiants ? La fameuse «fosse » du Musée d'ethnogra-

phie, un lieu ouvert aux exercicespratiques des étudiants, lèvera levoile sur sa dernière création le 2juin à 18h00. n

Virginie Borel

* Sous l'appellation Neuchàtoi, laCommunauté de travail pour l'in-tégration des étrangers et lebureau du délégué aux étrangers,en étroite collaboration avec denombreux partenaires, lance demars à novembre 2006 uneopération culturelle inédite degrande envergure sur le thème del'identité neuchâteloise. Du côtéde l'Université, Neuchàtoiimplique également le SFM,l'Institut de géographie, l'Institutd'histoire, le Laténium et l'Institutde psychologie: une premièresérie d'activités culturelles propo-sées par la Maison d'analyse desprocessus sociaux (MAPS).

Jamais à court d'idées, l'Institut d'ethnologie neuchâtelois, en collaboration avec le Forum

suisse d'étude des migrations et de la population (SFM) et d'autres instituts membres de la

Maison d'analyse des processus sociaux, a décidé de rejoindre l'opération culturelle cantonale

Neuchàtoi* en associant deux de ses activités - la muséo-

graphie et l'anthropologie filmique - au thème de l'identité

neuchâteloise. Exposition et films seront à découvrir ces

prochains mois.

L'ethnologie va à la rencontre du projet Neuchàtoi…

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L'ouragan Lothar, qui avait décimé les forêts suisses en décembre 1999, apeu altéré l'efficacité des exploitations forestières publiques en Suisse. C'estce que révèle une étude conduite par l’Institut de recherches économiques(irene) de l'Université de Neuchâtel etmandatée par l'Office fédéral de l'environne-ment, des forêts et du paysage (OFEFP).L'efficacité des exploitations forestièresserait sujette à des variations annuelles etrégionales, indépendantes des subventionspubliques.

L'économie forestière suissese caractérise par unestructure complexe com-

prenant une grande diversitéd'activités et de types d'entre-prises: les trois quarts des forêtssont exploités par des orga-nismes publics. Selon le recense-ment fédéral de 2000, le nombredes établissements forestierspublics est de 1073, mais cechiffre s'élève à 3300 voire plus,si l'on en croit la statistique fores-tière de l'OFS.

La majorité des exploitationspubliques est constituée desbourgeoisies, des corporations

de droit public ou des sociétéscoopératives occupant 38% dela surface boisée totale. Laseconde catégorie, comptantpour 29% de la surface totale,est celle d'exploitations géréespar les communes. Leurs résul-tats financiers sont en généralmoins bons que ceux dupremier groupe. Finalement,environ 5% de la surface boiséese trouve exploitée par laConfédération et les cantons.Leurs résultats sont les moinsbons des trois catégories.

Subventions en hausse après LotharSuite à l'ouragan Lothar, endécembre 1999, on a observépour l'année 2000 une hausse dumontant global des subventions

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trouve Exploitations forestières suisses

sous la loupe des chercheurs neuchâtelois

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des collectivités publiques et detiers pour l'exploitation de la forêtde 45 millions de francs (soitquelque 50%). Parallèlement, lesdépenses d'exploitation ontaugmenté de 35% et les recettesde seulement 9%, creusant ainsile déficit d'exploitation du boisde 89 millions (130%).L'augmentation des subventionsà l'exploitation n'a donc pasempêché une détérioration desrésultats financiers. La perteréalisée sur chaque mètre cubede bois exploité s'est élevée à 30francs en 2000, passant même à40 francs en 2002 !

L'effet des subventions, et plusparticulièrement de celles liées àLothar, sur le comportement desexploitations forestières mérite

toutefois un examen plus complet.Pour ce faire, les chercheurs del'irene ont analysé les comptesd'exploitation détaillés de plusde 700 exploitations forestièrespubliques ! Grâce à cette basede données, il a été possible defaire ressortir les facteurs quiinfluencent l'efficacité desétablissements, qu'ils soientexternes (topographique, carac-téristiques de la forêt), internes(organisation, méthodes), ouimposés par la politique fores-tière (production de bois, parexemple).

On a ensuite cherché à analyserempiriquement l'efficacité pro-ductive des exploitations fores-tières publiques en Suisse. Enconduisant l'étude sur la période

1998-2002, soit deux annéesprécédant l'ouragan et deux àtrois années de réparation desdégâts, on a pu vérifier l'hypo-thèse selon laquelle Lothar acontribué à améliorer l'efficacitéde ces exploitations grâce aurecours accru à la sous-traitance.La comparaison entre les diffé-rentes exploitations (benchmar-king) a permis l'identification desexploitations les plus efficacesainsi que leurs caractéristiquesdominantes. Par ailleurs, elle apermis d'établir si le système desubventionnement mis en placesuite à l'ouragan a affecté l'effica-cité des exploitations forestières.

Les résultats montrent que l'effi-cacité productive des exploita-tions forestières suisses varie de

manière significative d'uneannée à l'autre et à travers lesrégions analysées. On nedétecte pas pour autant unetendance à l'amélioration del'efficacité au cours des années,ni un quelconque effet positif dûà l'ouragan Lothar. En ce quiconcerne l'impact des subven-tions sur les résultats financiersdes exploitations, il se trouveque les effets positifs ont étécompensés par certains effetsdéfavorables. Cela remet enquestion le mécanisme actuelde subventionnement et appelleà une réforme du système. n

Milad Zarin

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Bobinoscope Commerce équitable:militantisme vs pragmatisme

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le courant du commerce équi-table a débuté voilà plus de 40ans. A l'époque, certaines orga-nisations voulaient vendre desproduits du tiers monde directe-ment aux consommateurs sanspasser par des intermédiairesafin de «repersonnaliser» lecommerce. C'est ainsi que sontnés les magasins du monde,proposant aux clients une vastegamme de produits importésdirectement.

Progressivement, le mouvements'est structuré: c'est à la fin desannées 80 qu'apparaissent leslabels à l'image de Max Havelaaren Suisse (lire l'encadré à cesujet): «En créant un label quipermet aux produits d'êtrevendus dans les supermarchés,on s'écarte de l'idée de militan-tisme pour se rapprocher dupragmatisme», explique le jeune

chercheur. Quant à la perspec-tive idéologique, elle vise unchangement dans les règles etpratiques du commerce interna-tional: «Il se crée alors une situa-tion inconfortable avec les super-marchés et les grands importa-teurs qui représentent lecommerce conventionnel etparallèlement bénéficient ducommerce équitable», commenteValéry Bezençon. Dans lesmilieux concernés par cetteforme de commerce, on ne niepas la valeur ajoutée de la doublecommercialisation: on est géné-ralement favorable à la grandedistribution mais on craint qu'ellene minimise la crédibilité dumouvement. «Y a-t-il un risqueque la grande distribution n'avalela distribution originale ?» lancele doctorant qui prévoit desoutenir sa thèse sur le sujetdébut 2008.

Les produits issus du commerce équitable ne sont plus le

seul fait d'une poignée de militants convaincus: leur distri-

bution dans les grandes chaînes de supermarchés les a

rendus très «tendance».

Doctorant en gestion d'en-

treprise, Valéry Bezençon

cherche à analyser les

pratiques de gestion qui se

cachent derrière le déve-

loppement du commerce

équitable.

Plus besoin de vous rendredans un magasin dumonde pour acheter

altruiste… Sur les bananes ou lepaquet de café glanés dans uncommerce de grande distribu-tion, figure en bonne place unlabel souvent assimilé à unemarque: Max Havelar est pourainsi dire devenu le ticket «bonneconscience» des consomma-teurs occidentaux… Ces deuxpratiques sont-elles complémen-taires, visent-elles les mêmesobjectifs ? Doctorant en gestiond'entreprise, Valéry Bezençon achoisi de mettre sur le devant dela scène cette problématiqueoriginale: celle du développe-ment du commerce équitableque les principales organisationsconcernées s'accordent à définircomme un partenariat commer-cial visant à une plus grandeéquité dans le commerce inter-national. «Pour bénéficier desavantages du commerce équi-table, les producteurs doiventrespecter des standards sociauxet environnementaux», relèveValéry Bezençon. Dans le cadred'une présentation faite enjanvier au Viêt-nam, il a cherchéà analyser les canaux de distri-bution qui sous-tendent cetteforme de commerce.

La crédibilité du commerce équitableEn matière de commerce équi-table et respectueux, deuxvisions cohabitent avec plus oumoins de bonheur. Initialement,

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Diplômé en informatique del'Ecole polytechnique fédérale deLausanne, Valéry Bezençon atoujours voué un intérêtpersonnel au commerce équi-table. Il ne pensait pas pourautant qu'il pourrait en faire sontravail de thèse en… gestiond'entreprise ! Engagé en 2004 àNeuchâtel comme assistant duprofesseur Sam Blili, le jeunehomme s'est chargé des travauxpratiques de commerce électro-nique tout en acquérant desconnaissances pointues engestion. Sa communicationprésentée à la conférence inter-nationale de Hanoi en débutd'année, validée par des pairs, luipermet de conforter son choix dethèse… n

Virginie Borel

n Max Havelar: la Suisse consomme à fond !

Max Havelaar est une fondation à but non lucratifqui labélise les produits répondant aux normesfixées par le commerce équitable: en Suisse, lelabel Max Havelaar consiste en une assurancequalité pour le consommateur… qui s'y réfère lesyeux fermés ou presque puisque la Suisse repré-sente à elle seule plus de 10% du chiffre d'affairesglobal des ventes de produits labélisés commerceéquitable dans le monde (136 millions d'euros devente en Suisse pour un total mondial de 830 miosd'euros en 2004 !). L'ancienne directrice de MaxHavelaar, Paola Ghillani, a permis aux produits ducommerce équitable de faire leur entrée dans leschaînes de grande distribution, augmentant ainsileur vente de manière drastique. Elle s'est volon-tairement positionnée sur la voie de la professionna-lisation du commerce équitable en s'éloignant dubénévolat. Quant aux supermarchés, ces produitsleur permettent de se targuer d'être socialement responsables…

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Bobinoscope Lorsque les sciencescreusent leur histoire…

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«J'ai vraiment eu envie de revenirà l'Université de Neuchâtel, s'en-thousiasme Marc-Antoine Kaeser.L'institution est suffisammentpetite en dimension pour qu'il yait des contacts réguliers etétroits avec d'autres disciplines.»Depuis le 1er mars, c'est l'Institutd'histoire qui accueille ce jeunescientifique prometteur qui asuivi des études d'archéologieet d'histoire à Neuchâtel avantde devenir l'assistant de deux«maîtres à penser», DenisKnoepfler et Michel Egloff. C'està cette période que Marc-Antoine Kaeser rédige une thèseen préhistoire et en histoire dessciences à l'Université deNeuchâtel et à l'Ecole deshautes études en sciencessociales de Paris.

De retour à ses origines acadé-miques neuchâteloises - aprèsavoir enseigné la préhistoire auxuniversités de Fribourg,Neuchâtel, Zurich et Paris I ettout en travaillant en muséogra-phie au Musée cantonal d'ar-chéologie de Lausanne et auMusée national suisse à Zurich -,Marc-Antoine Kaeser concen-trera ses recherches dans ledomaine de l'histoire dessciences, complétant les activitésdu professeur Laurent Tissot enhistoire des techniques: «Je vaisessayer de développer uneapproche sociale et culturelle dessciences», lance le jeune profes-seur avec conviction…

A travers le filtre de deux siècles de muséologieAu cours de son mandat d'unedurée de quatre ans, le scienti-fique financé par le Fonds nationalsuisse (FNS) entend donner unedimension culturelle à l'histoiredes sciences alors que les autresuniversités se focalisent davan-tage sur la philosophie et la tech-nique: «J'aimerais étudier l'acti-vité des musées des 19e et 20e

siècles, coïncidant avec le débutdes musées modernes, pour voircomment les pratiques decollections ont en partie déter-miné la construction du savoir»,explique-t-il.

En effet, l'ordre opéré dans lesdépôts et les vitrines des muséesa orienté le fonctionnement de la

science et la construction desméthodes de recherche, modi-fiant par là même le regard desvisiteurs. Et Marc-Antoine Kaeserd'étayer son propos en citantl'exemple des archéologues dontles gestes sont déterminés parl'usage en muséographie: «C'estvraiment radical: l'épistémologiede nos disciplines tient audialogue qu'entretiennent lacommunauté scientifique et lepublic», lance-t-il en faisantdarder son regard bleu.

Ces questions renvoient à unenjeu patrimonial et muséogra-phique d'actualité. Les énormescollections anciennes de nosmusées ne correspondentsouvent plus aux critères et auxbesoins de la science moderne.

Or, face aux exigencescoûteuses de leur gestion, lesmusées sont encouragés à s'endébarrasser ! De fait, cesderniers offrent de moins enmoins d'emplois liés à larecherche, mais davantagedans la médiation culturelle.Etroitement insérée dans le richemilieu des musées neuchâtelois,l'Université peut dès lors s'in-vestir pour alimenter lesréflexions sur cette orientation:ce sera notamment l'un des rôlesque souhaite jouer Marc-AntoineKaeser en développant les possi-bilités de stage d'étudiants ausein d'institutions culturelles.

«L'un des objectifs de l'étudeque je vais conduire à Neuchâtelavec mon équipe de recherche -Géraldine Delley et Serge Reubi -consiste à montrer que, surl'expérience de deux sièclesd'histoire des musées, ceséléments nous permettent demieux comprendre comment lascience s'est construite, etcomment elle peut encoreprofiter de son héritage muséo-graphique», explique Marc-Antoine Kaeser, qui se réjouit dudéfi que constitue le lien entreenseignement et recherche inter-disciplinaire. n

Virginie Borel

Archéologie, histoire et muséographie sont les trois amoursscientifiques de Marc-Antoine Kaeser, professeur boursierdu Fonds national suisse en place à Neuchâtel depuis le 1er

mars. Il entend travailler en synergie pour souligner ledialogue de la science avecla muséologie à travers deuxsiècles d'histoire.

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Raspille qui marque cette fron-tière à la hauteur de Salquenen,le Raspille-Graben», sourit lajoviale Sarah Maytain, qui a passéune bonne partie de son été 2005à sillonner son propre canton afinde mieux en saisir la richesse…

Les facteurs de cohésion y sontpourtant multiples: une valléetraversante commune, les monta-gnes alentour, l'importance dutourisme, une religion principale,le catholicisme, un parti politiquedominant, le PDC, la nécessité dequitter le canton pour suivre uneformation supérieure. Toutefois, laprésence de deux médias (LeNouvelliste et le Walliser Bote) etune économie largement inégale -la plupart des entreprises sesituent dans le Bas Valais - justi-fient aisément une différence desensibilité entre les deux régionsqui cohabitent essentiellementsur un plan administratif.

L'identité valaisanne comme fil rougeSi deux des principales localitésdu canton que sont Sierre et Sioncomptent des minorités aléma-niques bien vivantes - elles dispo-sent même d'écoles spécifiques -ces Alémaniques se sont complè-tement fondus dans l'atmosphèrefrancophone. Sarah Maytain adonc décidé de procéder à desentretiens individuels avec deshabitants des deux régions deson canton… «Mais j'ai vite cons-taté que je ne connaissaispersonne dans le Haut Valais,la partie alémanique de moncanton», lance-t-elle dans unregard gêné devant un telconstat… Devant la difficulté des'adapter aux différents dialectesalémaniques parlés dans lesvallées du Haut Valais, la jeunefemme a donc opté pour un ques-tionnaire rédigé en bon allemand:«Ce qui a constitué un effort

d'adaptation de part et d'autre»,relève Sarah Maytain. « Mais d'unautre côté, nous sortions fiers decette expérience, persuadésd'avoir trouvé la solution idéalepour la communication entreHaut- et Bas-Valaisans: chacunfaisait l'effort de parler une langueétrangère !»

Si les contacts sont rares etproblématiques entre les deuxparties du canton, la questionlinguistique en est largementresponsable: en effet par mécon-naissance, la représentation desBas-Valaisans à l'égard dudialecte haut-valaisan et mêmede l'allemand en général esttrès négative: «Incompréhensible,épouvantable», lancent certains.Quant à la minorité du Haut-Valais,elle se montre généralement plussouple et tolérante et saitsouvent s'exprimer en français. «Mais peut-être ne m'ont-ils pasvraiment dit toujours le fond deleur pensées, à moi la Bas-Valaisanne», s'interroge SarahMaytain soudain songeuse…Malgré ces opinions pour lemoins tranchées, haut et bassurmontent cependant leurs diffé-rences «autour d'une raclette etd'un verre de fendant»… En effet,il ressort avec évidence que tousles deux se sentent avant tout…Valaisans ! Cette identité affirmée- on est bien davantage Valaisanque l'on ne se sent Romand ouAlémanique - crée un attache-ment particulier à ce canton et unimportant facteur de cohésion.

Quant à Sarah Maytain, elle portedésormais sur le Haut Valais unregard différent: «J'admire avanttout l'authenticité des Haut-Valaisans et la qualité de la viequ'il y règne dans un environne-ment naturel et sauvage.» n

Virginie Borel

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Haut et Bas Valais:la cohabitation linguistique de deux frères qui se tournent le dos

Valaisanne de naissance et de cœur, Sarah Maytain a dû

attendre la fin de ses études à l'Université de Neuchâtel

pour réaliser pleinement la

signification du bilin-

guisme de son canton

d'origine et en faire son

sujet de mémoire.

Rencontre aux saveurs

d'un canton à l'identité

très marquée.

Le cordonnier est souvent leplus mal chaussé dit ledicton… Sarah Maytain, la

Valaisanne, n'était pas loin deconfirmer l'adage tant elle igno-rait la diversité de son canton -normal lorsqu'on appartient àune majorité ! - avant de déciderde se pencher sur ce sujet dansle cadre de son travail demémoire… Elle a pourtantlonguement hésité, en tant quefrancophone, avant de sedécider à présenter un travail enlinguistique allemande commepoint d'orgue à ses études enlettres à l'Université deNeuchâtel… Et pourtant, soncanton d'origine a offert bien desdécouvertes à Sarah Maytain.

Le saviez-vous, Haut et Bas Valaissont deux territoires de mêmetaille ? Géographie et histoireobligent, le bas Valais est cepen-dant bien plus peuplé que le hautet les deux régions ne parlent pasle même idiome (195'774 habi-tants romands pour l'une contre76'625 alémaniques pour l'autre):«On dit parfois aujourd'hui que lafrontière linguistique se situe àSierre. Or, c'est la rivière

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Bibliographie

L'échantillonnage en question

Publié dans la prestigieuse collec-tion Springer Series in Statistics del'éditeur américain Springer-Verlag, le nouveau livre du profes-seur de statistiques Yves Tilléest entièrement consacré à laquestion de l'échantillonnage,autrement dit «comment choisirles unités d'observations, entre-prises, ménages, individus, pourconstituer un échantillon».

Ce livre fait un inventaire desimportants progrès qui ont étéréalisés ces dernières années,depuis les plans de sondage

simples, jusqu'aux techniques lesplus sophistiquées. Les méthodesd'échantillonnages équilibréspermettent de sélectionner dansdes registres des échantillons quiont les mêmes moyennes quedans la population pour toutes lesvariables connues, ce qui permetdes gains de précision trèsimportants. Plusieurs nouvellesméthodes ont par ailleurs déjà étéappliquées dans des opérationsd'envergure. En France, parexemple, dans le recensementrénové de la population, uncinquième des petites communesest recensé chaque année. Lesgroupes de rotation ont été sélec-

tionnés au moyen d'une méthoded'échantillonnage équilibré. Al'heure où beaucoup de paysenvisagent de supprimer lesrecensements pour les remplacerpar une utilisation mixte de regis-tres et d'enquêtes par échantillon-nage, l'importance des tech-niques d'échantillonnage s'estencore accru. Les statisticiensd'enquêtes trouveront des algo-rithmes décrits rigoureusement,ce qui permet une implémentationdirecte des méthodes proposées.

Sampling Algorithms for yourapproval

Chargé de cours à l'Institutde journalisme, MarcelBurger dirige avec GuylaineMartel un ouvrage collectifsur les jeux et les enjeux dela complexité de l'argumen-tation et de la communica-tion dans les médias.

Cet ouvrage traite du discours etde l'argumentation dans lacommunication médiatique. Ilaborde plus précisément le rôle dudiscours comme ressource essen-tielle dans les phénomènes decommunication. Le propos prendappui sur la réalité actuellementmanifeste d'une reconfigurationdes limites de l'espace public de lacitoyenneté et de l'espace privé del'individu. Ainsi, distingue-t-on,

pour les analyser, les stratégiespropres à l'argumentation spécia-lisée des politiques et celles de l'ar-gumentation ordinaire du citoyenlambda. Comment les enjeux poli-tiques et sociaux déterminent-ilsl'argumentation ? Comment lesmédias eux-mêmes s'ancrent-ilsdans le jeu argumentatif ? Quellessont les contraintes des genres de la communication médiatiquecomme le débat ou le clip élec-toral ? Quels sont les mots de l'ar-gumentation et quel rôle jouent-ilsdans la communication ?

Dix auteurs mènent une réflexioninterdisciplinaire sur les jeux et lesenjeux de la complexité de l'argu-mentation et de la communicationdans les médias. Une grande

variété de discours est analyséedans le détail et inclut le débat poli-tique télévisé, l'éditorial, la publi-cité de presse écrite, le clip élec-toral. Sans délimitation en chapi-tres, le livre permet d'être parcouruselon les intérêts des lecteurs. Ils'adresse à un public varié et plusparticulièrement aux chercheurs etenseignants en sciences dulangage et en sciences de lacommunication et des médias.

Avec des textes de: Jean-Michel Adam, Ruth Amossy,Philippe Breton, Marcel Burger,Patrick Charaudeau, Suzanne Cotte, Gilles Gauthier,Guylaine Martel, Véronique Nguyên-Duy, Olivier Turbide.

«Argumentation et communica-tion dans les médias», 247 p. estparu aux éditions Nota Bene

Femmes et politiques urbaines

Cet ouvrage présente la manièredont les rapports sociaux entrehommes et femmes - les «rela-tions de genre» - interviennentdans des initiatives prises par deshabitants pour améliorer lesconditions matérielles et socialesde leur cadre de vie. Son objectifest de transmettre à un publiclarge les principaux résultatsd'une expérience de recherche-action en réseau avec les popula-tions de sept villes. Il montre

comment les processus de l'em-powerment des femmes appor-tent un éclairage aux difficultés etopportunités ouvertes pour leschangements sociaux urbains.

La publication est le fruit d'unecollaboration entre des équipes detravail de quartiers précaires danssept pays du Sud ou en transition:de Santo Domingo (RépubliqueDominicaine), de Ouagadougou(Burkina Faso), de Lambol(Bulgarie), de Bucarest (Roumanie)et de trois quartiers situés à la péri-phérie de Dakar (Sénégal), de

Buenos Aires (Argentine) et de SaoPaulo (Brésil). Ces équipes, organi-sées en réseau depuis 1997 dansle cadre du Programme MOST del'UNESCO, dévoilent des enjeuxapparus autour de la gestion del'environnement et des négocia-tions avec des responsables tech-niques et des décideurs politiques.

«Femmes et politiques urbaines,ruses, luttes et stratégies» estsigné François Hainard etChristine Verschuur. 103 pp.parues aux éditions Unesco-Karthala.