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Concilier démocratie et efficacité économique : l’exemple mutualiste RAPPORT DÉCEMBRE 2014

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efficacité économique : l’exemple mutualiste

R A P P O R T D É C E M B R E 2 014

L’Institut Montaigne est un laboratoire d’idées - think tank - créé fin 2000 par Claude Bébéar et dirigé par Laurent Bigorgne. Il est dépourvu de toute attache partisane et ses financements, exclusivement privés, sont très diversifiés, aucune contribution n’excédant 2 % de son budget annuel. En toute indépendance, il réunit des chefs d’entreprise, des hauts fonctionnaires, des universitaires et des représentants de la société civile issus des horizons et des expériences les plus variés. Il concentre ses travaux sur quatre axes de recherche :

Cohésion sociale (école primaire, enseignement supérieur, emploi des jeunes et des seniors, modernisation du dialogue social, diversité et égalité des chances, logement)

Modernisation de l’action publique (réforme des retraites, justice, santé)

Compétitivité (création d’entreprise, énergie pays émergents, financement des entreprises, propriété intellectuelle, transports)

Finances publiques (fiscalité, protection sociale)

Grâce à ses experts associés (chercheurs, praticiens) et à ses groupes de travail, l’Institut Montaigne élabore des propositions concrètes de long terme sur les grands enjeux auxquels nos sociétés sont confrontées. Il contribue ainsi aux évolutions de la conscience sociale. Ses recommandations résultent d’une méthode d’analyse et de recherche rigoureuse et critique. Elles sont ensuite promues activement auprès des décideurs publics.

À travers ses publications et ses conférences, l’Institut Montaigne souhaite jouer pleinement son rôle d’acteur du débat démocratique.

L’Institut Montaigne s’assure de la validité scientifique et de la qualité éditoriale des travaux qu’il publie, mais les opinions et les jugements qui y sont formulés sont exclusivement ceux de leurs auteurs. Ils ne sauraient être imputés ni à l’Institut, ni, a fortiori, à ses organes directeurs.

Il n’est désir plus naturel que le désir de connaissance

Concilier démocratie et efficacité économique : l’exemple mutualiste

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PRÉFACE ........................................................................................ 3

INTRODUCTION .............................................................................. 5

I - RICHE D’UNE HISTOIRE COMPLEXE ET VARIÉE, LES MODÈLES DE COOPÉRATIVES ET DE MUTUELLES SONT AUJOURD’HUI MAJORITAIRES EN BANQUE DE DÉTAIL ET SUR LES MARCHÉS DE PERSONNES ....................................................................... 7

1.1. Définition et historique du modèle mutualiste en France notamment ......................................................................... 7

1.2. Le modèle français : des services financiers résolument ancrés dans le mutualisme ................................................. 30

II - UN MODÈLE MUTUALISTE QUI DOIT S’ADAPTER À UN NOUVEL ENVIRONNEMENT .................................................................. 47

2.1. Des mutations structurelles des services financiers en général ......................................................................... 47

2.2. Des évolutions spécifiques aux établissements mutualistes qui contribuent à renforcer le sentiment de complexité du modèle ......................................................................... 54

2.3. Des acteurs mutualistes qui ont participé aux mouvements de consolidation / mutualisation / diversification, avec une accélération des consolidations ces dernières années ...... 57

III - LES PISTES D’ACTION ............................................................. 61

ANNEXES .............................................................................................. 71

REMERCIEMENTS ................................................................................ 93

SOMMAIRE

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Les acteurs coopératifs et mutualistes jouent aujourd’hui un rôle majeur dans la protection des français et le financement de l’économie et des territoires. Les banques coopératives représentent les deux tiers des encours de dépôts et plus de 70 % des crédits aux particuliers ; les mutuelles sont largement majoritaires s’agissant de l’assurance des biens et des personnes.

Ces entreprises ont des histoires et des statuts très variés. Mais elles ont en commun un modèle de service et de développement original, caractérisé par leur caractère non lucratif, une gouvernance démocra-tique, assise sur le sociétariat et le principe « un homme une voix », un ancrage territorial, et des valeurs de long terme orientée vers la satisfaction des adhérents et des clients plutôt que vers la maximisation de la rentabilité.

Ce modèle a su accompagner avec succès l’évolution de la société depuis la fin de XIXe siècle, et jouer un rôle social important notamment en zones rurales et auprès des clientèles fragiles.

Aujourd’hui, alors que le secteur financier dans son ensemble est soumis à des transformations profondes, le mutualisme doit continuer à s’adapter et à démontrer sa modernité pour pérenniser la force de son modèle.

Il doit faire face à deux enjeux.

Le premier enjeu est d’ordre réglementaire. Les changements considé-rables des dernières années, souvent décidés dans l’urgence et à une échelle internationale ou européenne, n’ont pas toujours pris en compte les spécificités et la valeur ajoutée du mutualisme. Ils imposent des

PRÉFACE

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défis nouveaux : diversification des risques là où certaines institutions ont justement construit leur expertise sur la protection d’un risque unique ou d’un territoire défini ; exigence accrue de fonds propres qui rend nécessaire un accès aux marchés de capitaux ; besoin de rechercher une taille critique, notamment à l’échelle européenne, mais sans qu’il existe un cadre juridique européen réellement adapté ; nécessité de défendre le rôle des élus, qui est mal compris de certains régulateurs, et plus généralement l’intérêt pour les citoyens de voir coexister une diversité de modèles d’institutions plutôt qu’un modèle uniforme.

Le second enjeu plus important encore est le risque de la banalisation : banalisation des valeurs avec le développement de la responsabilité sociale des entreprises portée activement par les entreprises « capita-listes » ; relâchement du lien géographique sous l’effet d’internet ; attentes nouvelles des clientèles plus jeunes et plus individualistes.

Adaptation aux exigences de taille et de gestion des risques ; transpa-rence et exemplarité ; retour aux fondamentaux du service et du finan-cement de l’économie : tels sont les enjeux du mutualisme en ce début du XXIe siècle. La récente crise nous l’a montré : notre économie a tout à gagner d’un modèle mutualiste robuste, pérenne et démocratique.

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Quand elles naissent à la fin du XIXe siècle, les banques coopératives se logent dans les failles du capitalisme et partagent une vocation commune : financer les activités non couvertes par le système bancaire traditionnel. De même, les mutuelles d’assurance visent à élaborer une solidarité minimale entre les travailleurs d’un même secteur, en cas d’accidents ou de maladie, s’inscrivant ainsi dans la tradition des caisses de secours mutuel du Moyen-Age.

Il en va tout autrement à la fin du XXe siècle où banques et assurances mutualistes sont parvenues à se hisser au tout premier plan de leur secteur et constituent aujourd’hui un modèle majoritaire. « Spécialisées dans la banque de détail, [les banques coopératives] se sont particu-lièrement bien adaptées à la bancarisation de la société française1 ».

Le modèle de gouvernance démocratique des mutuelles, leur ancrage territorial, les valeurs de long terme dont elles sont porteuses leur ont permis de constituer une offre alternative aux sociétés anonymes, répondant ainsi aux aspirations d’une partie de la population à consom-mer, produire, se développer, se financer, s’assurer autrement.

Or, aujourd’hui, dans le secteur financier, le contexte de mutations s’accélère. Mutation du comportement des ménages, pression concur-rentielle renforcée dans des marchés parvenus à maturité, durcissement de la réglementation en matière de fonds propres et de couverture des risques, poids accru du rôle du régulateur européen, moins sensible aux spécificités de la gouvernance mutualiste… Comme l’ensemble des acteurs financiers, les banques coopératives et mutuelles d’assurance

1 André Gueslin, professeur d’histoire contemporaine, Université Paris VII.

INTRODUCTION

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doivent s’adapter. Mais la vraie menace est sans doute ailleurs, celle qui tient au risque de banalisation des valeurs mutualistes, dès lors que des assureurs et des banques opérant sous statut capitalistique, mettent aussi au cœur de leurs priorités la qualité de service rendue à l’assuré et s’inscrivent dans des démarches ambitieuses de Responsabilité sociale d’entreprise.

Si la réussite du modèle mutualiste est aujourd’hui incontestable en France, en quoi reste-t-il un modèle moderne résolument tourné vers l’avenir ? Quelles sont les pistes d’action qui permettront aux mutuelles d’assurance et aux banques coopératives de constituer un modèle attractif tout au long du XXIe siècle qui vient de débuter ?

Ce rapport présente plusieurs propositions concrètes pour relever ces défis dans les prochaines années. Elles s’articulent autour de quatre thèmes : • un effort renouvelé d’explication et de communication sur l’intérêt

du mutualisme auprès des clients, sociétaires, adhérents, des collaborateurs et des pouvoirs publics ;

• une modernisation du lien avec les clients, sociétaires, adhérents pour le rendre plus actif et plus participatif à travers une relation de long terme fondée sur la transparence, l’éthique, la proximité et le conseil ;

• une évolution du cadre juridique et financier permettant de renforcer les fonds propres, et de disposer de plus d’agilité dans l’organisation des activités et le développement des groupes mutualistes à l’international;

• une modernisation des mécanismes de gouvernance permettant d’assu-rer leur vitalité (formation et information des élus, diversité de la composition des conseils).

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RICHE D’UNE HISTOIRE COMPLEXE ET VARIÉE, LES MODÈLES DE COOPÉRATIVES ET DE MUTUELLES SONT AUJOURD’HUI MAJORITAIRES EN BANQUE DE DÉTAIL

ET SUR LES MARCHÉS DE L’ASSURANCE DE PERSONNES

1.1. Définition et historique du modèle mutualiste en France notamment

Les acteurs de la coopération et du mutualisme s’identifient tous à un corpus de valeurs commun. Toutefois, leur histoire, leurs activités, les formes juridiques qu’ils revêtent ainsi que leurs modalités de gouvernance sont extrêmement diverses.

a. Un corpus commun de valeurs

En dépit de leurs différences, les établissements mutualistes convergent fortement vers un corpus de valeurs qui imprègne leur modèle économique. Celles-ci sont, à l’origine, au nombre sept :• adhésion volontaire et ouverte à tous ;• pouvoir démocratique exercé par les membres ;• participation économique des membres ;• autonomie et indépendance ;• éducation, formation et information ;• coopération entre les entités locales du groupe ;

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• engagement envers la communauté (développement de l’ancrage local par la proximité).

Ces valeurs reposent sur deux principes :• le sociétariat est au cœur du modèle, ce qui se traduit par :

– un ancrage territorial fort, – une association volontaire des membres en tant que sociétaires/

adhérents et clients, – une réelle cohésion entre les membres individuels ou collectifs

du groupe mutualiste, – une gestion démocratique qui a pour objectif de satisfaire les

besoins des sociétaires et des clients plutôt que de rechercher la maximisation de la rentabilité ;

• une vision de long terme qui conduit à affecter les résultats en réserve, à privilégier le ré-investissement des profits au sein de l’organisation ou au profit des sociétaires/adhérents.

Ces marqueurs de l’ADN mutualiste se traduisent en outre par :• un modèle social plus protecteur des organisations mutualistes

vis-à-vis de leurs salariés ; • le statut de mandataire social des dirigeants ; • l’engagement et l’attachement à la mutuelle, ainsi que le caractère

militant des administrateurs, souvent issus de la base de sociétariat.

b. Des histoires diverses

Le mouvement mutualiste plonge ses racines dans la dureté de l’histoire sociale du XIXe siècle. Face à la misère qui touche une large partie de la population et pour pallier l’incurie des pouvoirs publics, les citoyens s’associent pour créer les premiers organismes

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de solidarité. De nombreux courants d’idées structurent le mutua-lisme : • la tradition des solidarités pré-industrielles telles que les confréries,

confessionnelles ou professionnelles, et le compagnonnage, qui a perduré malgré la loi Le Chapelier de 1791 ;

• l’école libérale qui considère le mutualisme comme un puissant moyen de promotion du crédit à l’artisanat et aux petites entreprises (modèle de Schultze-Delitzsch2 qui est à l’origine des banques populaires allemandes - Volksbanken - notamment) ;

• le modèle chrétien-social de Friedrich Raiffeisen qui donnera lieu au premier réseau de coopératives de crédit agricoles et au Crédit mutuel ;

• le communautarisme de Proudhon et de Saint-Simon qui laissera une empreinte indélébile sur les fondements de l’économie solidaire moderne ;

• les doctrines solidaristes de la seconde moitié du XIXe siècle, comme celles de Léon Bourgeois, qui voient dans les institutions de l’économie mutualiste la « voie médiane », entre capitalisme et socialisme, entre libéralisme et étatisme.

2 Économiste allemand, né en 1808, Hermann Schultze-Delitzsch est l’un des promoteurs du crédit populaire en Allemagne. Son journal, La revue coopérative, défend l’idée de la supériorité à la fois économique et sociale d’une organisation coopérative, en raison de la solidarité qu’elle permet de créer. En 1850, il fonde la première banque coopérative, visant à consentir des prêts à court terme à ses membres à partir de l’épargne déposée par l’ensemble des sociétaires. Il se distingue des Caisses de crédit mutuel, créées à la même époque par Raiffeisen, par le public visé (des petites entreprises, et non des consommateurs), mais aussi par le fait que les administrateurs sont rémunérés et que les sociétaires sont intéressés aux plus-values (source : Alternatives économiques).

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Relations entre l’État et les institutions financières mutualistes

Selon une vision assez répandue, mais aussi réductrice, les institutions financières mutualistes se sont créées et développées grâce à l’encouragement et à la protection de l’État. Cette affir-mation n’est pas totalement erronée car l’appui de l’État a, dans certains cas, contribué au développement du secteur financier mutualiste :• soutien financier au Crédit Agricole lors des turbulences éco-

nomiques des années 1930 ;• traitement réglementaire et fiscal privilégié à leur création dont

les acteurs mutualistes ont bénéficié et qui a permis, par exemple, aux banques coopératives d’occuper une place de premier ordre dans la collecte de l’épargne populaire ou dans le financement de certaines activités.

Cette vision est, cependant, incomplète. L’État n’a pas toujours joué un rôle de protecteur bienveillant comme en témoigne le déclin du mouvement coopératif en Italie durant les années 1930 et en Espagne pendant la période franquiste. Au Royaume-Uni, la tolérance du pouvoir vis-à-vis des associations permettra le développement de mutuelles de crédit dès le début du XIXe siècle. En France, en revanche, l’esprit de la Révolution est hostile à tout vestige de l’Ancien Régime et ira jusqu’à rejeter l’esprit associa-tionniste (loi Le Chapelier de 1791). La coopération s’est construite pour répondre à certaines carences soit dans la protection sociale via les mutuelles, soit dans le crédit pour répondre aux besoins des artisans commerçants et petits entrepreneurs.

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Cette relation ambivalente a incontestablement laissé des traces sur le modèle coopératif et mutualiste. C’est la législation sociale du tournant du XXe siècle qui va tenter de protéger et d’encadrer le mouvement mutualiste en accélérant, par la même occasion, l’atténuation du caractère religieux des mutuelles et la rupture avec la tradition révolutionnaire ouvrière. C’est encore l’évolution de la réglementation qui va ouvrir la voie de la « banalisation » du champ d’intervention aux banques coopératives et aux mutuelles d’assurance même si elle n’est pas la seule à les y avoir entraînées.

Mais les institutions mutualistes sont également le résultat d’expé-rimentations, de projets pragmatiques et entrepreneuriaux qui ont connu une histoire diverse. Ainsi, chacune des entreprises coopé-ratives s’est développée pour remplir certaines fonctions auprès de populations bien définies (rôle du Crédit Mutuel dans les milieux confessionnels, des banques Raiffeisen auprès des agriculteurs, contribution des Banques Populaires ou des Volksbanken au finan-cement des artisans et des petits entrepreneurs).

S’agissant des banques coopératives, elles s’adressent aux ménages, en pleine Révolution industrielle, alors que les banques privées sont absorbées par les grands projets d’infrastructures du XIXe siècle. En dépit des exemples d’institutions bancaires mutualistes ancêtres des Buildings Societies en Grande Bretagne, le modèle de banque coo-pérative se développera surtout en Europe continentale, en Allemagne plus précisément, d’où il va s’exporter, avec un succès incontestable, vers les pays limitrophes.

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Les origines de l’assurance mutualiste sont encore plus lointaines que celles des banques coopératives. On en retrouve des éléments fondateurs dans les caisses d’entraide des tailleurs de pierre qui existaient au IVe millénaire avant J.C. en Egypte ou dans les caisses de secours mutuel qui se développent au Moyen Âge pour porter assistance aux personnes blessées dans des accidents. On trouve aussi quelques exemples de sociétés mutuelles bien avant le XIXe siècle : Mutuelles d’assurance pour les moulins (Pays Bas, 1663), British Amicable Society for Perpetual Insurance Office (Angleterre, 1706), Caisses de secours contre l’incendie et les intem-péries (France, XVIIIe siècle).

La forme moderne de l’assurance mutualiste commence, toutefois, à se dessiner entre le milieu du XIXe siècle et le début du XXe siècle sous l’effet de l’urbanisation et des différentes « vagues » de Révolution industrielle qui détruisent les cadres sociaux traditionnels et menacent les anciennes formes de solidarité. Le rôle des mutuelles au XIXe siècle est marqué par une double évolution :• leur fonction économique va progressivement s’élargir : consacrées,

à leurs débuts, quasi-exclusivement à l’assurance maladie, les sociétés de secours mutuel vont peu à peu mettre en place et développer des mécanismes d’assurance vieillesse, d’assurance vie, d’assurance chômage, de formation professionnelle … Leurs fonctions extra-économiques – de socialisation et de contestation – vont, en revanche, s’effacer ;

• la reconnaissance officielle de l’assurance mutuelle viendra en France avec la Charte de la mutualité (1898) qui va définir les contours du cadre moderne de l’activité des sociétés mutuelles d’assurance.

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A partir du XXe siècle, l’essor du mutualisme se caractérise par plusieurs tendances :• l’élargissement de la base d’activité des institutions financières

coopératives va s’accompagner d’une atténuation progressive, quoiqu’inégale, de leur ancrage catégoriel et d’une diversification de leur clientèle. Cette mutation sera accompagnée et encouragée par l’évolution des réglementations nationales. Elle sera davantage marquée dans la banque (loi Debré de 1966 qui atténue la spé-cialisation des banques), où les caisses coopératives vont non seulement capter une clientèle de sociétaires de plus en plus nombreuse, mais aussi commencer à accepter, de plus en plus massivement, des clients non sociétaires. Des institutions telles que le Crédit Agricole, Rabobank (Pays Bas) ou RZB (Autriche) ont ainsi évolué d’un positionnement de niche, spécialiste de l’agriculture et servant essentiellement une clientèle rurale, vers un modèle de réseau universel à stature internationale. Le statut mutualiste étant plus contraignant de ce point de vue, le profil de la clientèle des assureurs et banques mutualistes (comme les Buildings Societies britanniques) va évoluer plus lentement. Afin de contourner cette contrainte, certains groupes vont créer des structures ad hoc pour capter des clients qui ne répondent pas à leurs exigences statutaires ;

• l’élargissement des bases de clientèle a incité les acteurs mutua-listes à diversifier leurs activités, diversification de plus en plus poussée vers des métiers de plus en plus éloignés, non seulement de leurs compétences, mais aussi de leur mission d’origine. Cette diversification se caractérise en banque comme en assurance par un élargissement de l’activité aux personnes morales et aux grands groupes industriels, exportateurs et multinationaux. Pour les banques, l’offre s’élargit également aux activités de marchés.

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C’est aussi dans la période récente que certaines des institutions mutualistes vont commencer à s’affranchir du cadre de leur marché domestique. Malgré certaines réussites remarquées, cette « inter-nationalisation » des banques coopératives reste encore une ébauche. Le modèle mutualiste est, au départ, un idéal « international » qui a réussi à s’exporter au-delà même des frontières européennes. Pourtant, malgré des origines, des valeurs et même certains principes de fonctionnement communs, les institutions mutualistes ont eu du mal à franchir les frontières de leur marché domestique. Seuls quelques grands groupes se sont donné les moyens nécessaires pour franchir cette étape et établir une présence internationale effective. Pour ne prendre qu’un exemple, face aux difficultés liées à la crise actuelle, le groupe autrichien OVAG a opté pour le repli et a cédé, en 2011, l’ensemble de ses activités en Europe centrale.

En matière d’assurance aussi, le regroupement d’institutions mutua-listes sur le plan international reste rare. À partir des années 1970, vont ainsi s’esquisser deux tendances de fond dans la plupart des pays. D’une part, un mouvement de consolidation au sein de chaque pays se traduisant par des regroupements d’institutions locales : leur couverture géographique va s’élargir, mais leur nombre va avoir tendance à diminuer. En Allemagne, le nombre de banques locales est ainsi passé de 7 000 en 1970 à 1 138 en 2010. De même, aux Pays Bas, le nombre de banques locales a diminué de 481 en 1997 à 153 en 2008. Par ailleurs, on assiste à la construction de véritables groupes coopératifs de plus en plus intégrés, même si, à ce niveau, les différences entre pays sont significatives. Ces regrou-pements et mises en commun de moyens sont justifiés, tour à tour, par la recherche d’économies d’échelle, par les avantages que les grandes structures offrent en matière de gestion des liquidités ou de risques ou encore par l’accès au marché de capitaux.

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Les transformations de l’activité ont laissé une empreinte sur la perception du modèle de gouvernance mutualiste et coopératif :• le regroupement des structures locales de nombreux groupes coopé-

ratifs contribue à renforcer la dimension régionale des établissements alors que les structures locales conservent un poids important dans la gouvernance au travers notamment des Assemblée générales ;

• on assiste à une hybridation des formes juridiques et économiques. On observe la même tendance, quoiqu’à un degré moindre, dans l’assurance. Ainsi, rencontre-t-on des cohabitations de structures mutualistes et capitalistes à quasiment tous les étages des insti-tutions mutualistes.

c. Des formes variées qui ont évolué pour s’adapter aux besoins de développement et de diversification

Issus d’expérimentations liées à une géographie, un risque, une typologie de clients spécifique, les statuts mutualistes sont extrême-ment variés : il en existe près de 36 au sein de l’Union européenne. S’agissant de la France, sur les marchés de la banque et de l’assu-rance, on dénombre trois grandes familles :• les coopératives, encadrées par la loi de 19473, concernent les

banques coopératives ; chaque groupe (Banque Populaire, Caisse d’Épargne, Crédit Agricole, Crédit Mutuel) étant régi par des dis-positions législatives propres ;

• les mutuelles régies par le Code de la mutualité et les institutions de prévoyance régies par le Code de la Sécurité sociale qui sont spécialisées dans l’assurance des personnes ;

3 Voir en Annexe 1 la présentation détaillée de la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.

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• les sociétés d’assurance mutuelles régies par le Code des assu-rances qui traitent tous types d’assurance.

Les banques mutualistes sont des coopératives présentant des caractéristiques communes mais des histoires spécifiques

Les banques coopératives se caractérisent par deux éléments communs :• d’une part, un échelon local qui prend la forme d’une

coopérative :– les banques coopératives émettent des parts sociales et respectent le

principe « un homme ; une voix ». Ce principe connaît toutefois des exceptions, notamment pour les Banques Populaires, mais en ce cas le nombre de voix qui peuvent être exercées par un sociétaire est très limité (0,25 % des droits de vote pour les Banques Populaires) ;

– les banques coopératives n’ayant pas de contrainte de distribution des résultats ont une base de fonds propres souvent en forte croissance par mise en réserve ;

– les parts sociales ne sont pas des instruments financiers au regard du droit financier, c’est-à-dire qu’elles ne sont pas négociées sur un marché. Les sociétaires en outre n’ont pas de droit aux réserves. Les règles applicables aux sociétés coopératives impliquent en effet que les réserves ne peuvent pas être partagées et attribuées aux sociétaires. Ceux-ci ne sont pas rémunérés par un dividende mais par un intérêt plafonné au taux moyen de rendement des obligations privées (TMO). Sociétés coopératives, elles peuvent choisir en outre une forme sociale du droit des sociétés. C’est ainsi que les Banques Populaires et les Caisses d’Épargne sont des sociétés anonymes et appliquent le droit des SA sauf les règles spécifiques issues du droit coopératif ;

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• d’autre part, une structure nationale dite « en pyramide inversée », les banques régionales étant actionnaires d’une structure com-mune, qui est également organe central (investie à ce titre de prérogatives visant, pour l’essentiel, à garantir la solvabilité et la liquidité des réseaux, leur solidité, et visant aussi à être l’interlo-cuteur des autorités bancaires). Les représentants des sociétaires siègent au sein de Fédération, le cas échéant.

Les divers réseaux mutualistes4, du fait de leur histoire, ont adopté des organisations diverses, notamment en conservant pour certains des caisses locales, (Crédit Mutuel, Crédit Agricole), pour d’autres une organisation sans structures intermédiaires (le sociétaires des banques populaires sont sociétaires directement de leur banque, ce qui peut représenter un nombre important de sociétaires, plus d’un million pour CASDEN). Les Caisses d’Épargne ont une organisation spécifique, les Sociétés locales d’Épargne ayant pour objet de regrou-per et animer le sociétariat à l’échelon local, et de capter leurs attentes en leur qualité de clients et de sociétaires, notamment au travers des Assemblées générales.

En assurance, deux principaux types de statuts cohabitent en fonction de leur rattachement au Code de la mutualité ou à celui des assurances

1) Les mutuelles régies par le Code la mutualité ne traitent que de l’assurance de personnes.

Les mutuelles du Code de la mutualité (communément nommées « mutuelles 45 ») sont des groupements à but non lucratif, qui

4 Voir en Annexe 2 les origines et l’histoire des grands réseaux coopératifs français.

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interviennent dans le champ de la protection sociale principale-ment pour fournir une couverture sociale complémentaire à l’assu-rance maladie des organismes de Sécurité sociale mis en place en 1945. Elles proposent notamment des complémentaires santé, de la prévoyance (capital et rentes décès, indemnités journalières maladie et accident, capital et rentes invalidité, garanties emprun-teurs…) et des complémentaires retraite. Elles gèrent également des réalisations sanitaires et sociales5.

Ces organismes, souvent fondées autour d’une communauté professionnelle, comme la MGEN (mutuelle des fonctionnaires) se caractérisent par une expertise sur des risques spécifiques à une activité pris en compte sur le long terme.

La Mutualité française, qui fédère l’essentiel des mutuelles de 1945, assume ainsi trois rôles : un rôle institutionnel (représen-tation au sein des Agences régionales de santé, des CPAM et de la CNAM), un rôle dans le mouvement social (par le biais des offres de soins) et un rôle d’assureur santé.

2) Régies par le Code des assurances, les Sociétés d’assurance mutuelles (SAM) présentent les caractéristiques essentielles de la mutualité d’assurance.

Le terme de Société d’assurance mutuelle définit une structure juridique particulière aussi appelée « mutuelle d’assurance ». Il s’agit d’organismes à but non lucratif, sur le modèle des mutuelles régies par l’ordonnance du 19 octobre 1945 donc, mais qui s’en distinguent par le fait qu’ils dépendent du Code des assurances et

5 Voir en Annexe 3 la présentation détaillée du statut des mutuelles régies par le Code de la mutualité.

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non de celui de la mutualité. Les distinctions entre les différentes structures juridiques possibles pour les organismes de complé-mentaire santé sont relativement fines. Il n’est pas évident de ne pas confondre les sociétés d’assurance mutuelle et les mutuelles6.

Les institutions de prévoyance présentent des spécificités distinctes des autres acteurs mutualistes

Les institutions de prévoyance sont des sociétés de personnes de droit privé, à but non lucratif. Elles sont régies par le Code de la Sécurité sociale. Elles se distinguent par une gestion paritaire : la mise en place et la révision de la protection sociale complé-mentaire sont subordonnées au consensus de la collectivité concernée, soit par une convention collective, soit par un accord entre employeur et la majorité des travailleurs intéressés.

Les institutions de prévoyance sont créées et gérées par les par-tenaires sociaux d’une entreprise, d’une branche ou de plusieurs branches d’activité : elles sont créées dans le seul but de protéger l’intérêt de leurs participants (les salariés) et de leurs adhérents (les entreprises). En conséquence, elles ne proposent que des contrats d’assurance de personnes à caractère collectif.

On distingue trois types d’institutions de prévoyance, en fonction de l’accord qui a été au fondement de leur création :• les institutions professionnelles : elles peuvent recouvrir une

profession, une catégorie professionnelle ou bien une branche professionnelle. L’acte juridique de leur création peut être soit une convention collective, soit un accord collectif ;

6 Voir Annexe 4 la présentation détaillée du statut des mutuelles régies par le Code des assurances.

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• les institutions interprofessionnelles : elles représentent les entre-

prises et les salariés qui créent ce type d’organisme d’assurance. Elles peuvent rassembler plusieurs entreprises et/ou professions, et/ou recouvrir plusieurs branches professionnelles ;

• les institutions d’entreprise : elles rassemblent les employeurs et salariés travaillant au sein d’une même entreprise. L’acte juridique à l’origine de leur constitution est la conclusion d’une convention collective ou d’un accord collectif au sein de l’entreprise.

En termes d’activités, les institutions de prévoyance proposent des prestations dans le domaine des assurances de personnes qui s’ins-crivent dans la continuité de celles fournies par la Sécurité sociale. Le Code de la Sécurité sociale recense, à l’article R931-2-1, les branches dans lesquelles les institutions de prévoyance sont auto-risées à exercer des opérations d’assurance.

L’acte fondateur des institutions de prévoyance est la création, le 14 mars 1947, du régime complémentaire des cadres instaurant une garantie en cas de décès. C’est sur cette base que s’est développée la prévoyance au sein des caisses de retraite et de prévoyance. Le 8 août 1994, la loi relative à la protection sociale complémentaire marque une évolution fondamentale, en donnant aux institutions de prévoyance une réelle personnalité juridique, notamment pour les adapter aux directives européennes. La loi donne ainsi naissance aux institutions de prévoyance sous leur forme actuelle ; les couvertures de prévoyance étant assurées auparavant dans le cadre des caisses de retraite complémentaire. La loi a obligé les caisses à se scinder entre institution de retraite complémentaire et institution de prévoyance.

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Néanmoins, les partenaires sociaux gestionnaires des institutions de retraite complémentaire comme des institutions de prévoyance issues de la réforme ont cherché le moyen de conserver ses activités dans un cadre commun. Ceci donnera naissance aux groupes paritaires de protection sociale (GPS), qui trouvent leur premier cadre légal dans l’accord du 24 avril 1996 (instaurant la solidarité financière entre l’AGIRC et l’ARRCO) puis dans l’accord sur la gouvernance des groupes paritaires de protection sociale signé le 8 juillet 2009 entre les partenaires sociaux.

La majorité des institutions de prévoyance font ainsi partie de groupes paritaires de protection sociale qui rassemblent des institutions de retraite complémentaire, une ou plusieurs institu-tions de prévoyance, des mutuelles, voire des sociétés d’assurance ou de gestion d’épargne salariale. Ces groupes permettent une mutualisation des moyens pour les acteurs de la protection sociale ainsi que la mise en place d’un interlocuteur unique pour les entreprises adhérentes aussi bien pour la retraite, la prévoyance que la santé. Un groupe de protection sociale est un ensemble d’organismes créé, piloté et contrôlé par les partenaires sociaux. Il met en œuvre des régimes obligatoires de retraite complémen-taire, AGIRC et ARRCO, ainsi que des couvertures de protection sociale complémentaire dans le cadre de contrats collectifs d’entre-prise ou dans le cadre de contrats individuels.

d. Des différences de gouvernance entre les acteurs mutualistes

Le cas des banques coopératives

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Les organes centraux institués par les lois fondatrices de chaque groupe mutualiste français constituent traditionnellement l’entité en charge de la gouvernance globale, de la solidarité financière entre les membres et des relations avec les régulateurs. Cependant, les évolutions récentes dans les réseaux coopératifs sont à l’origine d’une structure d’autorité parfois circulaire :• d’une part, les entités locales sont propriétaires et exercent un

contrôle sur l’activité des institutions centrales (autorité top down), comme par exemple dans le cas du Crédit Mutuel ;

• d’autre part, les institutions centrales ont acquis, au fur et à mesure, des moyens de contrôle sur l’activité des entités locales (autorité bottom up confiée par la loi aux organes centraux des groupes mutualistes).

Le modèle du Crédit Mutuel

• Organisation à l’échelon fédéral– L’échelon fédéral est structuré en groupes régionaux, com-

posés de 18 fédérations régionales et 7 caisses fédérales,– Les entités régionales disposent d’une très forte autonomie et

peuvent posséder leurs propres filiales.

• Organisation à l’échelon central– La Confédération nationale de Crédit Mutuel (association

loi 1901) est dédiée aux fonctions d’organe central. Elle représente le Groupe auprès des pouvoirs publics et assure la défense et la promotion de ses intérêts,

– La Caisse centrale de Crédit Mutuel, banque affiliée au réseau et dédiée aux fonctions d’organe financier du réseau (gère la liquidité et la solvabilité).

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• Les filiales ne sont pas détenues au niveau national, mais

par des entités inter-régionales– Chaque caisse interfédérale peut avoir des filiales

concurrentes,– Le CIC, a ainsi été racheté par la Caisse fédérale du Centre

Est-Europe, via la Banque Fédérative du Crédit Mutuel,– Les filiales ne sont pas affiliées à la CNCM.

Structure actuelle du Groupe Crédit Mutuel

7,2 millions de sociétaires

2 065 Caisses locales

18 Groupes régionaux :(18 fédérations et 7 Caisses fédérales)

Centre Est Europe

Banque Fédérale du Crédit Mutuel

(holding)

Arkea Nord AnjouAntillesOcéanMaine

CIC Autres filiales (ex. : Targobank)

Autres filiales (ex. : Fortuneo par Arkea)

Confédération nationale du Crédit Mutuel(organe central et politique)

Caisse centrale(fonctions bancaires)

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Ce schéma général est aujourd’hui reconnaissable au sein de tous les réseaux coopératifs. Cependant, l’organisation de ceux-ci varie aujourd’hui fortement d’une institution à l’autre, et ce à plusieurs niveaux :• niveaux hiérarchiques : certains réseaux ont une structure plus

simple, comprenant seulement deux niveaux – une entité centrale et des entités locales ou régionales. Le mutualisme allemand a, par exemple, évolué vers ce type de structure. C’était également le cas du groupe Banques Populaires en France. D’autres groupes comportent trois niveaux hiérarchiques : des entités régionales en plus des entités locales et des entités nationales (Crédit Agricole par exemple) ;

• force des liens d’intégration, de la nature et du périmètre du pouvoir de l’entité centrale : les coopératives néerlandaises, finlandaises et, dans une certaine mesure, françaises, se distinguent par l’im-portance de l’autorité exercée par l’entité centrale sur les institutions décentralisées. Dans le cas des coopératives hollandaises, la structure faîtière du groupe est également chargée (par la banque centrale) de la supervision des banques locales du groupe. Elle doit ainsi superviser toute opération de croissance géographique ;

• activités qui font l’objet de centralisation : les banques coopératives en Allemagne fonctionnent de manière très décentralisée. Elles conservent une grande marge de manœuvre et leur indépendance dans la plupart des domaines. De même, très peu de services sont centralisés dans les réseaux italiens : seuls le conseil, l’analyse et la recherche sont l’objet d’une centralisation complète ; les moyens de paiement faisant l’objet d’une centralisation partielle ;

• liens de solidarité entre membres du réseau : les liens de solidarité entre banques membres d’un réseau coopératif n’ont pas tous la même intensité. Ainsi, bien que la quasi-totalité des réseaux

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coopératifs se soient dotés au cours du XXe siècle d’un système de cautionnement mutuel, le fonctionnement de celui-ci présente d’importantes différences concernant :

– l’importance des garanties accordées, qui peuvent aller de la simple caution à la responsabilité jointe (joint liability),

– le périmètre des établissements qui y participent : généralement la totalité des banques d’un réseau mais pas toujours,

– la nature de ce système : obligatoire et automatique dans certains cas, simplement optionnel dans d’autres.

Si quelques grands principes de gouvernance sont partagés par la plupart des institutions mutualistes, les modalités d’organisation du gouvernement d’entreprise sont très différentes d’un pays à l’autre.

Groupe BPCEOrganisation simplifiée

3,9 millions de sociétaires

4,9 millions de sociétaires

100 % 100 %230 sociétés

localesd’épargne

FNBP FNCE

50 % 50 %

BPCE Organe central

BanquePALATINE

CréditFoncier

BPCE Natixis

Flottant

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Cette hétérogénéité tend à se renforcer avec l’hybridation du modèle mutualiste. On a ainsi des banques presque 100 % coopératives où ce modèle prévaut à tous les étages (Rabobank) ; d’autres qui combinent la structure mutualiste pour les banques locales et action-nariale pour les banques régionales et centrales ; d’autres encore qui permettent la cohabitation des structures mutualistes et action-nariales au sein même des banques locales (Italie). Il est à noter que les traitements réglementaires différenciés tendent à accentuer les différences entre les modèles coopératifs des pays européens. Dans certains pays (Allemagne, Autriche), la loi reconnaît les coo-pératives financières comme une forme juridique à part entière et définit des principes et des règles de fonctionnement spécifiques. À l’opposé, certains pays appliquent des règles juridiques identiques à toutes les institutions financières (Norvège, Danemark).

Entre ces deux extrêmes, dans la plupart des pays, la réglementation reconnaît la spécificité des institutions coopératives mais le cadre réglementaire qui leur est appliqué est simplement une extension du cadre légal général (France, Royaume-Uni, Italie, Belgique). Le traitement différencié des banques coopératives atteint probablement son paroxysme en Italie où les autorités réglementent différemment les deux types de banques coopératives. Les BCC (Bance di Credito Cooperativo) sont réglementées de manière très différenciée, béné-ficiant certes d’avantages (exonération fiscale des profits mis en réserve) mais au prix de nombreuses contraintes (pas de possibilité d’émission de titres négociables, au minimum 70 % des profits mis en réserve, périmètre des activités délimité, sociétaires bénéficiant d’une préférence, expansion géographique des activités limitée). Les Bance Popolari sont, elles, réglementées de manière plus souple, et à bien des égards, plus proches des banques privées.

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Ces hétérogénéités multiples entre institutions mutualistes ont des conséquences à plusieurs niveaux :• l’hétérogénéité des statuts explique la réduction de la capacité de

rapprochement, notamment transfrontière. Dans cette ouverture internationale, la voie capitalistique (Raiffeisen, CASA…) a été la forme privilégiée, mais pas exclusivement (OVAG, DZ, Banques Populaires, partenariat Crédit Mutuel avec le mouvement Desjardins) ;

• la possibilité ou non d’émettre des titres négociables influence le coût et l’accès aux financements externes et cet accès, plus ou moins facile, affecte dans une certaine mesure la capacité des banques coopératives à effectuer directement des opérations de croissance externe classiques ;

• l’organisation des systèmes de solidarité et garanties croisées permet aux banques coopératives de se refinancer grâce à une notation « groupe » ;

• les différents degrés d’intégration débouchent sur un traitement différencié par les superviseurs réglementaires. Par exemple, l’éva-luation des risques et des fonds propres peut se faire sur une base consolidée ou non.

La gouvernance des autres typologies d’acteurs

Les autres acteurs mutualistes étant par nature « auto-portés » en termes de fonds propres, le contrôle des organisations ne s’exerce pas par le biais du lien capitalistique mais à travers une représen-tation démocratique des sociétaires / adhérents / membres. Il existe une grande diversité de structures de gouvernance au sein des SAM, des mutuelles de santé et des institutions de prévoyance reflétant la diversité des statuts. Néanmoins, des axes structurants se dégagent en fonction des formes juridiques :

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• les SAM : tout comme les SA, elles sont administrées généralement par un Conseil d’administration (ou parfois par un Conseil de surveil-lance) qui doit représenter la diversité du sociétariat et concrétiser l’organisation démocratique de la société. Le Conseil d’administration détermine les orientations de l’activité de la société et veille à leur mise en œuvre. Selon les statuts, la direction générale de l’entreprise peut être confiée soit au président – directeur général, soit à un directeur général en charge d’assurer la gestion et l’administration de l’entreprise, dans le cadre des orientations et des limitations fixées par le Conseil d’administration. La principale différence avec les SA réside dans le mode de désignation du Conseil d’administration, dans lequel le sociétaire joue un rôle primordial, au cœur de la gouvernance démo-cratique. Le sociétaire est en effet, au centre du système avec le principe « un homme, une voix » et la seule condition pour participer aux élections est d’être à jour des cotisations. La plupart des groupes mutualistes majeurs constitués en SAM donnent une part importante à l’échelon régional, avec une représentation propre dans la vie politique de la mutuelle en région. Cet ancrage territorial symbolise et concrétise la notion de proximité des mutuelles vis-à-vis de leurs sociétaires ;

• les mutuelles de santé : régies par le Code de la mutualité, elles disposent d’un modèle démocratique de gouvernance comme les SAM. L’adhérent est au cœur de la gouvernance et élit directement ou indirectement les membres de l’Assemblée générale qui élisent à leur tour les membres du Conseil d’administration. De nombreuses mutuelles intègrent une dimension locale / régionale à travers des « sections locales » qui constituent le premier palier de représentation et de vie démocratique de la mutuelle. Ces sections, qui conduisent l’action mutualiste localement et qui permettent l’expression des adhérents, élisent à leur tour les représentants en Assemblée géné-rale. Comme pour les SAM, la direction générale de l’entreprise peut

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être confiée, en fonction des statuts, soit au président soit à un directeur général ;

Les institutions de prévoyance :

Pour les institutions de prévoyance, c’est le paritarisme qui prime. Elles sont régies par un Conseil d’administration constitué paritaire-ment de représentants des organisations syndicales et de représen-tants des fédérations d’employeurs. Le Conseil d’administration a pour fonction principale, dans le cadre de la préservation des intérêts des entreprises et des salariés, de veiller directement à la mise en œuvre et à la gestion des garanties des contrats collectifs. D’autre part, il assure le suivi et l’évolution des garanties et des services proposés. L’Assemblée générale est composée paritairement des représentants des adhérents (entreprises) et des représentants des participants (salariés) qui forment deux collèges distincts et qui sont désignés par les organisations syndicales et les fédérations d’em-ployeurs. Les organisations syndicales et les fédérations veillent, par les désignations qu’elles opèrent, à assurer la représentation de l’ensemble des membres adhérents et participants de l’institution.

Les groupes paritaires de protection sociale, dont font souvent partie les institutions de prévoyance, sont quant à eux dotés d’une association sommitale gérée également de manière paritaire. Le Conseil d’administration de l’association sommitale définit les orientations politiques et stratégiques du groupe. Ce dernier, à direction unique, met en commun des moyens de gestion au service des entreprises, des salariés et des retraités.

Selon les statuts, le Conseil d’administration nomme un directeur général en charge de conduire les orientations qu’il définit.

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1.2. Le modèle français : des services financiers résolument ancrés dans le mutualisme

a. Un modèle dominant tant en assurance qu’en banque de détail

Le modèle économique du mutualisme domine largement les marchés de la banque et de l’assurance en France. En effet, ce modèle se développe dès le XIXe siècle et connaît un essor rapide fondé sur :• une proximité de la clientèle ;• une association des sociétaires à la gestion de l’entreprise ;• un ancrage géographique fort.

Ainsi, en 2012, près des deux tiers de l’activité en banque de détail, en assurance des biens et des personnes pour les particuliers sont-ils réalisés par des acteurs mutualistes.

Part de marché des acteurs mutualistes en France (2011-2012 estimation)

Banque de détail (2012)

Maximum 1,5 TE

Encours de dépôts Encours de crédits

Autres 5 % 5 %

Groupe CM-CIC 15 % 17 %

BPCE 25 % 23 %

Groupe Crédit Agricole 27 % 31 %

La Banque Postale 10 % 3 %

BNP Parisbas 8 % 10 %

Société Générale 9 % 11 %

PDM acteurs mutualistes 67 % 71 %

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Assurances de biens (2011)Maximum 15 MdsE

Maximum 8 MdsE

Primes auto 4 RP Primes MRHAutres acteurs 10 % 15 %Autres bancass - 2 %Bancass mutualistes 10 % 13 %Matmut 6 % 4 %Maif 8 % 9 %Groupama 10 % 12 %Macif 11 % 7 %Aviva 2 % 2 %Generali 6 % 4 %Allianz 7 % 6 %AXA 12 % 10 %

PDM acteurs mutualistes 64 % 60 %

Assurances de personnes (2011)Maximum 125 MdsE Maximum 59 MdsE

Collecte vie Cotisations santéAutres groupes 12 % -Autres assureurs - 12 %Natixis 3 % -Autres mutualistes - 39 %Covéa (GMF-MMA-Maaf) 3 % 3 %Groupama 3 % 5 %AG2R 3 % 4 %CNP - BPCE 8 % -Crédit Mutuel 7 % -Crédit Agricole 14 % 2 %Aviva 3 % -Allianz 4 % 4 %Société Générale 7 % -Générali 6 % 3 %BNP 8 % -AXA 8 % 7 %CNP-LBP 9 % -Humanis - 3 %MGEN - 3 %Union Harmonie - 4 %

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Assurances de personnes (2011)Maximum 125 MdsE Maximum 59 MdsE

Collecte vie Cotisations santéPro BTP - 4 %Malakoff Médéric - 5 %Swiss Life - 2 %

PDM acteurs mutualistes 42 % 71 %

Source : FFSA, Argus de l’assurance, analyses A.T. Keamey.

Dans le domaine de la banque de détail, les acteurs mutualistes (Groupe Crédit agricole, BPCE et Fédération du Crédit Mutuel) asso-ciés à leur filiale ayant le statut de SA (LCL et CIC principalement) cumulent près de 67 % des encours de dépôts et 71 % des encours de crédit aux particuliers et professionnels.

Longtemps pionnier et entrepreneurial, le modèle mutualiste s’est imposé comme un modèle économique incontournable dans le domaine de l’assurance au cours de la seconde moitié du XXe siècle. En effet, les acteurs mutualistes cumulent aujourd’hui près de 64 % des primes sur le marché de l’assurance automobile (quatre roues des particuliers) et 60 % de celles du Multi Risques Habitation. Dans le domaine de l’assurance des personnes, les acteurs mutua-listes rencontrent le même succès avec près de 71 % des cotisations Santé (brutes de réassurance et nettes d’acceptation). S’agissant de l’assurance vie, les acteurs mutualistes disposent également d’une assise importante quoique non majoritaire avec 42 % de la collecte vie (exprimée en affaires directes et après réintégration de la collecte CNP générée par les réseaux des Caisses d’Épargne).

De la même manière à l’échelle européenne, le modèle mutualiste semble avoir été particulièrement adapté aux attentes des ménages et des professionnels s’agissant de leurs besoins bancaires (argent

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au quotidien, financement et épargne) ainsi que de couverture des risques afférents à leurs biens et personnes. Ainsi, les acteurs mutua-listes concentrent-ils plus du tiers du marché de la banque de détail aux Pays Bas, en Autriche, en Italie et en Finlande et occupent des positions significatives en Allemagne (avec plus de 15 % de part de marché dépôts et crédits). Dans le domaine de l’assurance, le modèle mutualiste est encore plus largement prégnant avec des parts de marché (en prime d’assurance dommages et vie en 2010) dépassant 50 % en Autriche et aux Pays Bas et supérieures à 30 % du marché dans la majorité des pays d’Europe continentale à l’exception de la Finlande, la Belgique, l’Italie et le Luxembourg.

Le mutualisme est un modèle prégnant en banque de détail et en assurance partout en Europe

20 %19 %

Allemagne 17 %19 %

Finlande 33 %33 %

Italie 32 %34 %

Autriche 33 %37 %

Pays-Bas 29 %40 %

France 73 %

Chypre

Royaume-Uni

3 %

Hongrie

Danemark

2 %

7 %

Portugal

5 %Espagne

5 %

1 %

3 %

5 %

1 %

9 %

Luxembourg 11 %11 %

77 %

Crédits Dépôts

Part de marché des banques mutualistes en Europe(Volume de crédits et dépôts, 2010)

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Les banques coopératives contribuent donc largement au financement de l’économie et ce d’autant plus que ces établissements réalisent une transformation à l’échelle nationale : l’épargne des ménages et des entreprises collectées en France est majoritairement réinjectée sous forme de financements en France.

Si l’importance du modèle mutualiste traduit une appétence naturelle de ces acteurs au développement et à la recherche des effets de taille, ces caractéristiques ne correspondent toutefois qu’à une branche de la philosophie mutualiste. Ainsi, si les établissements mutualistes, notamment en France, cherchent en permanence à élargir leur base de clientèle au-delà de leur sociétariat, certains acteurs mutualistes européens privilégient une vision plus réductrice

Autres 11 %

Luxembourg 21 %

Finlande 24 %

Suède 27 %

Bulgarie 29 %

Espagne 33 %

Rép. Tchèque 34 %

Islande 34 %

Hongrie 35 %

France 39 %

Norvège 39 %

Slovaquie 43 %

Roumanie 43 %

Allemagne 44 %

Danemark 46 %

Pays-bas 51 %

Autriche 60 %

Part de marché des assurances mutualistes en Europe(Volume de primes d’assurance vie et dommages, 2010)

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de leur rôle et se contentent du service rendu aux seuls sociétaires selon une conception moins centrée sur la croissance externe et le développement.

b. Ce constat se confirme à l’examen du poids du modèle mutualiste dans l’économie française

Forts de leur tradition de proximité et d’ancrage territorial profond, les acteurs mutualistes offrent notamment en banque de détail un maillage serré des territoires avec près de 60 % des 36 200 agences bancaires affiliées à un établissement mutualiste alors que les autres banques (hors La Banque Postale) ne représentent 12 % des agences. Ce dispositif territorial a un impact social important sur l’ensemble du territoire notamment en zones rurales et sensibles et permet une accessibilité des services bancaires pour une forte pro-portion de ménages, professionnels et petites entreprises.

Ainsi les banques mutualistes servent-elles près de 74 % des ménages français et 71 % des professionnels et petites entreprises avec un positionnement de banques universelles s’adressant à l’ensemble des typologies de clientèle sans exclusive et un rôle déterminant pour l’accès aux services bancaires des ménages les plus défavorisés.

L’importance de l’assise des établissements mutualistes se mesure également par leur notoriété auprès des ménages français avec, d’après le baromètre 2011 « les Français, l’assurance et la banque » réalisé par Opinion Way, la présence de deux acteurs mutualistes de l’assurance parmi les trois premiers établissements financiers préférés des français.

C O N C I L I E R D É M O C R AT I E E T E F F I C A C I T É É C O N O M I Q U E : L’ E X E M P L E M U T U A L I S T E

3 6

Le nombre d’agences et de clients illustre également la prédominance du mutualisme –

exemple de la banque de détail

Source : Rapports annuels.

36 200

Autresbanques

28 %

12%

Banquescoopératives

et filiales

La BanquePostale

60 %

Total

Poids en termes de nombre d’agences(France, 2012)

• Un rôle prédominant dans l’accessibilité de services bancaires pour les ménages français• Un rôle social sur l’ensemble du territoire, notamment en zones rurales et en zones sensibles

71 %74 %

Professionnels& entreprises

26 %Autresbanques

Particuliers

Banquescoopératives

et filiales

29 %

Poids en termes de nombre de clients(France, 2012)

• Un positionnement de banques universelles servant l’ensemble des typologies de clientèle• Un rôle déterminant pour l’accès aux services bancaires des ménages les plus défavorisés (clients fragiles)

I . R I C H E D ’ U N E H I S T O I R E C O M P L E X E E T V A R I É E , L E S M O D È L E S D E C O O P É R A T I V E S E T D E M U T U E L L E S S O N T A U J O U R D ’ H U I M A J O R I T A I R E S E N

B A N Q U E D E D É T A I L E T S U R L E S M A R C H É S D E L ’ A S S U R A N C E D E P E R S O N N E S

3 7

Les établissements mutualistes sont des employeurs de premier plan dans l’industrie financière

Source : Rapports annuels, icmil, FFSA, analyses A. T. Keamey.

282 000

Banquescoopératives1

Total banques Autres typesde banques

73 %

27 %

1. Y compris filiales bancaires de banques coopératives (LCL, CIC).

Poids en termes de salariés - banque (Nombre d’employés banques, France, 2012)

146 400

Autres types d’assurances

43 %

Acteursmutualistes

57 %

Totalassurances

Poids en termes de salariés - assurance (Nombre d’employés assurances, France, 2012)

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3 8

c. Un relais essentiel au-delà du rôle économique (rôle dans la vie sociale / associative, rôle dans le développe-ment durable / l’insertion / la prévention…)

Le modèle mutualiste est source d’externalités positives non seulement sur la communauté financière mais aussi dans le fonctionnement de l’économie et de la société notamment à l’échelon territorial. En effet, la coopération structure et associe. Elle contribue à l’intégration des clientèles fragiles. Par ailleurs, la coexistence au sein d’un même système bancaire de différentes formes institutionnelles qui ont des attitudes face au risque, des incitations, des business models, des pratiques managériales, des politiques et des comportements différents est favorable à la stabilité de l’ensemble du système - via l’absence de corrélation des comportements, (Drake et Llewellyn, 1998) et offre aux clients un choix plus diversifié de produits financiers (Michie, 2010 ; Ayadi et al., 2011). L’existence de diversité dans les structures institutionnelles d’un système financier est ainsi favorable à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté (Cuevas et Fisher, 2006). Enfin, le secteur coopératif contribuerait à l’accélération du développement financier et économique. Usai et Vannini (2005) montrent ainsi que c’est la structure, c’est-à-dire la présence de différentes types d’organismes financiers, plus que la taille du secteur financier qui joue un rôle catalyseur dans le développement des économies nationales.

Au-delà de littérature académique, les établissements mutualistes contribuent également à remplir un certain nombre de services de manière concrète et souvent à l’échelle territoriale. On citera ici quelques exemples :• formation au fonctionnement de la sphère économique et accul-

turation financière des sociétaires et élus ;

I . R I C H E D ’ U N E H I S T O I R E C O M P L E X E E T V A R I É E , L E S M O D È L E S D E C O O P É R A T I V E S E T D E M U T U E L L E S S O N T A U J O U R D ’ H U I M A J O R I T A I R E S E N

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• assurance climatique notamment pour le risque agricole par Groupama, BPCE et le Crédit Agricole ;

• prévention des risques climatiques avec, par exemple, l’initiative de Groupama de mettre sur pied avec 18 200 communes des plans d’évacuation en cas d’inondation ou des risques liés à la sécurité routière (formation post-permis des jeunes conducteurs, des conducteurs d’engins agricoles…) ;

• prise en compte de risques professionnels spécifiques par les mutuelles (MACSF, SMA BTP…) ;

• maintien d’un lien social et d’un tissu médical en zone rurale au travers des partenariats avec les MSA ;

• rôle des Caisses d’Épargne et de leur fédération dans l’engagement sociétal au travers notamment du financement du logement social ;

• structuration des réseaux de soin (2 500 Services de Soins et d’Accompagnement Mutualistes), initiatives dans les domaines de la prévoyance, de la préparation de la retraite, de l’accompa-gnement au vieillissement, du bien-être au travail par les Mutuelles et Institutions de Prévoyance ;

• projets de méthanisation ayant pour impact une réduction des émissions de CO2.

Cependant, il arrive que certaines initiatives constituant une contri-bution réelle au maintien du lien social, au renforcement de la prévention ou à la prise en charge d’activités relevant autrefois des prérogatives publiques soient menées sans suivi ou sans objectifs par leurs promoteurs, sans quantification de ces opérations qui constituent une vertu extra économique du mutualisme. Il convien-drait de recenser ces initiatives diffuses, de les quantifier selon une nomenclature à définir de manière harmonisée par l’ensemble des acteurs mutualistes en prolongement d’une démarche de type RSE. Ce travail de nomenclature permettrait de disposer d’un support de

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4 0

communication externe plus puissant notamment vis-à-vis du régulateur.

d. Un modèle économique dont la performance est soutenue

La performance économique du modèle mutualiste est démontrée en banque de détail : les établissements mutualistes génèrent plus des 2/3 de profitabilité des établissements en France. Ainsi les banques coopératives représentent-elles près de 57 % du PNB banque de détail en 2012 (près de 40Mdse sur 58 Mdse pour le secteur) ; et cette proportion s’établit même à 69 % en adjoignant les parts de marché du CIC et de LCL). Leur contribution à la for-mation du Résultat de l’activité banque de détail (près de 9,8 Mdse en 2012) se situe entre 60 % et 73 % selon que les filiales SA de ces groupes sont ou non intégrées.

Fortement contributrice à la profitabilité du secteur de la banque de détail, les banques mutualistes sont également performantes en terme opérationnel avec un coefficient d’exploitation inférieur à celui des autres acteurs (63 % contre 71 % en 2010 et 2011) lors des trois derniers exercices et ce, en dépit d’une légère dégradation en 2012 (66 % contre 70 %).

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4 1

Les établissements mutualistes génèrent plus des 2/3 de la profitabilité de la banque de détail en France

Source : Rapports annuels, analyses A. T. Keamey.

Il convient en outre de noter que le modèle mutualiste français s’est révélé plus résilient que les banques de détail européennes (y compris les banques coopératives étrangères). Ainsi, aucun réseau coopératif français n’a connu les déboires de leurs homologues italien (Banca Popolare), espagnol (Cajas), néerlandais (Rabobank) ou anglais

Coefficient d’exploitation des banques de détail françaises(2012, %)

63 %71 %

63 %

2012

66 %71 %

2011

70 %

2010

Autres acteursMutualistes1

1. Y compris filiales de groupes mutualistes (LCL, CIC).

Résultat Net

70 %

RBE

70 %

PNB

66 %

39,8Valeur enMds€

14,1 7,1

Part des acteurs mutualistes1 dans la performance de la banque de détail en France (2012, %)

1. Y compris filiales de groupes mutualistes (LCL, CIC).

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4 2

(Coop bank). En effet, si l’État a été contraint en France d’assurer un soutien transitoire en termes de liquidité et de renforcement des fonds propres, aucun réseau mutualiste n’a fait défaut contraignant les États à élaborer un plan de bail-out ou de protection des déposants.

En assurance, la performance des acteurs mutualistes se compare de manière légèrement moins favorable avec leurs pairs banques assurances ou assureurs classiques. En effet, le ratio S/P d’un échantillon significatif d’établissements mutualistes (Macif, Groupama, Maaf et Maif) ressort sur la période 2007-2012 comme légèrement supérieur à 100 % alors que ceux d’AXA, Générali, Allianz ou Crédit Agricole assurances sont inférieurs. Cette situation s’explique par :• une modération tarifaire et une faible discrimination des risques

conformes aux valeurs du mutualisme alors que les assureurs classiques disposent d’une plus forte latitude pour opérer des repositionnements techniques par des hausses tarifaires et une sélection au sein des portefeuilles ;

• une logique de rationalisation des coûts (informatique, gestion des sinistres, back-office, fonctions support…) qui a été menée naturellement par les acteurs classiques alors que les établisse-ments mutualistes l’ont initié plus tardivement notamment par le regroupement de moyens (Covea) ;

• une forte performance des captives de banques mutualistes qui s’appuient sur une bonne performance opérationnelle et technique ainsi qu’un réservoir de clientèle important.

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B A N Q U E D E D É T A I L E T S U R L E S M A R C H É S D E L ’ A S S U R A N C E D E P E R S O N N E S

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Évolution du ratio combiné dommages - sélection d’acteurs (2007-2011, %, estimation)

Source : Rapports annuels, analyses A. T. Keamey.

Macif Groupama

Maaf Maif

201220112010200920082007

103,9%103,2%103,6%107,1%104,7%102,5%

201220112010200920082007

100,7%100,8%104,2%106,1%

101,8%

99,7%

201220112010200920082007

102,0%

97,5%

103,5%101,9%

98,5%95,5%

201220112010200920082007

99,0%98,0%

103,1%102,8%

99,6%

100,1%

Allianz France

201220112010200920082007

96,9%97,9%

102,7%106,8%

97,5%97,3%

AXA France

201220112010200920082007

95,1%95,7%99,1%99,1%93,0%

97,0%

201220112007

Generali France

2010200920082007

98,9%98,7%99,0%97,9%96,7%

CA Assurances

201220112010200920082007

94,7%97,5%98,5%97,9%96,0%

101,3%

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4 4

Dans le domaine de la santé, les acteurs mutualistes sont également des intervenants majeurs qui disposent de coûts d’intervention (coûts de gestion et d’acquisition) sensiblement plus faibles que les assu-reurs classiques. Ainsi, en 2011 en pourcentage des primes acquises, les coûts d’acquisition et de gestion s’établissaient-ils entre 14 % et 17 % pour les institutions de prévoyance et mutuelles contre 23 % pour les assureurs. Cette situation s’explique par la forte part de contrats collectifs captés par les Institutions de prévoyance qui leur permet de bénéficier d’économie d’échelle mais dont le corollaire est un ratio S/P dégradé. Les Mutuelles s’efforcent néanmoins de garder un certain équilibre entre contrats collectifs et contrats individuels.

Toutefois, les mutuelles sur le marché de la santé sont fragilisées par leur faible taille dans un contexte de durcissement des règles prudentielles qui pénalise plus particulièrement les établissements dont l’activité est peu diversifiée7. Il en résulte une forte diminution du nombre d’acteurs sur le marché de la santé (682 en 2011 contre 942 en 2007) qui touche principalement les mutuelles et institutions de prévoyance (588 acteurs en 2011 contre 849 en 2007 alors que le nombre d’assureurs demeure stable). Ainsi, les mutuelles et institutions de prévoyance ont su réagir au contexte de marché en regroupant leurs moyens (solidarité financière, mise en commun de moyens et d’investissements, expression politique commune…) donnant lieu à l’émergence de grands pôles d’adossement tels qu’Istya (regroupant MGEN, MNH, MNT, NGEFI, MGET, MCDF, MAEE), acteur majeur de la santé prévoyance derrière AXA, Malakoff-Médéric, Humanis, AG2R-LM ou Harmonie mutuelle.

7 Néanmoins, en dépit de la diversité de la taille des mutuelles santé, les derniers stress tests réalisés ont montré que la quasi-totalité des mutuelles étaient d’ores et déjà en capacité d’intégrer les évolutions liées à Solvabilité II

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Évolution du nombre d’OCAM Santé (France, 2007-2011)

Source : CMU, FFSA, DREES, Analyse A. T. Kearney.

3836

3534

– 8%

2011

68229

2010

715

587

94

2009

784

656

93

2008

880

751

93

2007

942

811

93

559

94

MutuellesAssureursInstitutions de Prévoyance

TCAM1

– 7 %0 %

– 9 %

1. Taux de croissance annualisé moyen.

4 7

II

UN MODÈLE MUTUALISTE QUI DOIT S’ADAPTER

À UN NOUVEL ENVIRONNEMENT

2.1. Des mutations structurelles des services financiers en général

a. Le modèle relationnel entre la clientèle de personnes physiques et les institutions financières évolue fortement. En effet, les particuliers ont des attentes croissantes et nouvelles :

• les critères de choix des consommateurs sont axés sur la proximité géographique mais aussi sur la temporalité avec un souhait de plus de réactivité qui conduit à la recherche de services disponibles 24h/24h et en tout lieu. Le client souhaite dans son rapport à la banque et à l’assureur conserver le contrôle de la relation et adopte parfois un comportement consumériste focalisé sur le prix plus que sur le maintien d’une relation de long terme. Ceci se traduit par la banalisation des offres, des tarifs, des comportements commerciaux, des attitudes contentieuses et, in fine, des relations avec les clients et l’environnement ;

• la recherche d’une personnalisation de l’offre et du service rendu ;• le relâchement du lien territorial. La coopération est née au sein de

collectivités fortes. Les liens horizontaux (peer monitoring) instituaient une forme de régulation puissante, capable de contrebalancer l’intérêt économique immédiat. Ces liens ont tendance à se distendre dans le domaine de l’assurance. En revanche, dans le domaine bancaire, les

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4 8

acteurs notent en réaction à un environnement mondialisé un renfor-cement de la proximité et du lien territorial ;

• le recul des solidarités inter-temporelles. La coopération s’est déve-loppée dans des milieux à faible mobilité géographique et profes-sionnelle, favorables à la solidarité intergénérationnelle. L’accélération de la mobilité, le développement des solidarités publiques (Sécurité sociale) ont contribué à amoindrir le rôle de ce type de liens, paral-lèlement aux évolutions des modes de relation ;

• la montée des individualismes. Alors que le territoire et le métier jouaient comme facteurs d’appartenance commune, facilitaient la résolution des conflits et instituaient un principe d’intérêt commun supérieur, chaque acteur est à présent appelé à poursuivre son propre intérêt, les règles et normes actuelles privilégiant dans certains cas les droits des individus par rapport à ceux du collectif.

Ces comportements sont favorisés par l’émergence de nouvelles technologies qui :• multiplient les points et modalités d’accès aux conseillers bancaires

et d’assurance ;• créent de nouvelles formes de communauté, dont l’axe n’est plus

seulement géographique. Dans le même temps on assiste à une baisse du trafic en agence et à une multiplication des points de contact, ce qui pousse les banques coopératives à réinventer une « relation de proximité » qui n’est plus forcément physique notam-ment pour des actes engageants comme la souscription d’un crédit immobilier ou certaines opérations d’épargne.

Cette dynamique devrait être accentuée dans les prochaines années avec un accroissement du taux de pénétration du digital de 85 % attendu d’ici 2020. En effet, à l’échelle européenne, les taux de

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4 9

pénétration des Smartphones et d’internet devraient respectivement passer de 20 % à 65 % et de 70 % à 85 %. Il devrait en résulter une progression du taux de pénétration de la relation banque-assu-rance digitalisée de 40 à 60 % pour le volet transactionnel, aux côtés d’une relation humaine pour le conseil.

Ces évolutions constituent pour l’ensemble des banques et assu-rances un défi à relever pour répondre correctement aux nouvelles attentes et apporter une proposition attractive reflétant leurs valeurs. En particulier les acteurs mutualistes doivent transposer leurs valeurs en termes de service, de connaissance client et de relation de long terme dans un univers plus largement digitalisé tout en conservant un ancrage territorial fort.

b. Un contexte de marché de plus en plus tendu pour les acteurs de la banque et de l’assurance

Depuis 2007, dans un contexte de crise les établissements bancaires et financiers voient leur profitabilité se contracter significativement (– 7 % par an pour les activités bancaires et -12 % en assurance en France). Toutefois les résultats 2013 (17,4 Mde de résultat net pour les six premiers groupes bancaires) illustrent un mouvement de sortie de crise.

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5 0

Source : Banque de France, ACP, Analyse A. T. Kearney.

Évolution du résultat net - assurance(Mds €, 2007-2012)

8798

1214

– 12 %

2011 20122007 2008 2009 2009

2011 20122007 2008 2009 2009

Évolution du résultat net - banque(Mds €, 2007-2012)

15

11

25

20

– 3

21

– 7 %

I I . U N M O D È L E M U T U A L I S T E Q U I D O I T S ’ A D A P T E R À U N N O U V E L E N V I R O N N E M E N T

5 1

c. Des vagues réglementaires structurantes qui modifient sensiblement l’environnement bancaire et assurantiel (Bâle III et Solvabilité II notamment)

La crise financière de 2007 s’est traduite par une inflation réglemen-taire visant à encadrer de manière plus stricte les risques afférents aux activités de banque et d’assurance, améliorer la protection des consommateurs et renforcer la solidité financière des acteurs de ces marchés. Ce mouvement est mondial ; il présente un caractère glo-balisant qui ne s’attache pas forcément aux spécificités de statuts des acteurs et, d’une manière générale, est conçu pour un modèle de SA et d’entreprise cotée ayant recours aux investisseurs institutionnels. Ainsi, on a pu noter depuis 2007 trois vagues réglementaires concer-nant :• la séparation des activités et la résolution des situations de crise

(bail in debt, proposition Liikanen, taxes sur les transactions finan-cières à l’échelle de l’UE, règle Schauble, règle Volcker…) ;

• la solidité financière des banques assurances (Solvabilité II, Bâle III, CRD IV, refonte des grands risques, ratios de liquidité NSFR et LCR, réglementation sur la titrisation, IFRS 9 et 13) ;

• le renforcement de l’encadrement des risques (Mifid 2, UCITS, règles de lutte anti-blanchiment, reporting renforcé sur les opéra-tions et instruments de marchés).

L’institution mutualiste n’est pas construite sur le même modèle que l’entreprise capitaliste. Elle n’obéit pas à la même logique. Le droit européen s’applique aux mutuelles comme à n’importe quelle autre forme de société. En pratique, cependant, certains textes, en n’inté-grant pas les spécificités des mutuelles, ont pour effet, de les exclure des avantages dont bénéficient les entreprises privées. Et d’autres textes ont de surcroît pour effet de pénaliser les institutions mutua-

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5 2

listes par rapport à leurs concurrentes directes. N’oublions pas que le droit européen s’est bâti autour d’un modèle qui est celui de l’entre-prise privée et de l’économie de marché et que tout écart par rapport à ce modèle est a priori suspect aux yeux des régulateurs européens.

Les mutations réglementaires dont la crise accélère la mise en œuvre impactent de manière spécifique les acteurs mutualistes :• le surplus de transparence, de contrôle des risques et de renforce-

ment du dispositif de contrôle interne (volet « fit and proper » de Solvabilité II et pilier 3 de Bâle III) qu’exigent ces nouvelles normes n’est pas toujours cohérent avec certains principes fondateurs du mutualisme et pousse ainsi les institutions mutualistes à s’aligner sur le mode de fonctionnement des entreprises privées. En effet, la complexité croissante de la réglementation bancaire conduit l’en-semble des dirigeants à s’adapter à la technicité croissante ;

• la possibilité pour l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Régulation (ACPR) de s’assurer de la compétence des élus/administrateurs des établissements coopératifs bancaires et des mutuelles d’assurance constitue un garde-fou contre d’éventuelles limites du principe participatif qui caractérise la gouvernance des institutions mutua-listes. Ainsi, assurer le développement des compétences des élus devient en banque et en assurance un réel enjeu pour les établis-sements mutualistes ;

• l’évolution des normes prudentielles internationales (Bâle III et Solvabilité II) met l’accent sur la préservation de la rentabilité et la diversification des risques, ce qui pénalise les assureurs mutualistes de petite taille faiblement diversifiés géographiquement (corollaire de l’ancrage territorial) ainsi qu’en termes d’activités (notamment dans le domaine de la santé et de la prévoyance) ;

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5 3

• l’entrée en vigueur de la directive Solvabilité II devrait obliger les organismes d’assurance à accroître la quantité mais surtout la qualité de leurs fonds propres. En effet, les études d’impact successives ont montré que le cadre prudentiel Solvabilité II conduirait à réduire les surplus de marges de solvabilité des assureurs. Si la hausse des exigences de capital explique partiellement cet effet, il provient également du durcissement des règles d’admissibilité des outils de financement (dettes subordonnées en particulier) comme fonds propres prudentiels ;

• Solvabilité II comme Bâle III négligent également les spécificités des groupes mutualistes en termes d’entité consolidante. Ainsi, l’entité faîtière du groupe Crédit Mutuel est une association n’ayant donc pas statut d’établissement de crédit, ce qui apparaît diffici-lement compréhensible pour le régulateur européen. Pour les groupes d’assurance mutualistes, il est plus difficile d’être organisés avec des paliers de sous consolidation qui reflèterait une organi-sation par métier à l’instar de ce qui est possible pour une SA. Autoriser une SGAM à adhérer à une autre SGAM serait un assou-plissement de la règlementation actuelle (article L 322-1-3 du Code des assurances) qui permettrait d’adopter une organisation par pôle mutualiste et /ou par métier.

Les réglementations prudentielles élaborées à l’échelle internationale (Bâle III et Solvabilité II) ne tiennent pas compte de réalités très contrastées. Le mutualisme financier est si divers qu’il requiert une vaste réflexion juridique au niveau européen pour que soient rendus compatibles des statuts historiquement variés sans pour autant gommer les particularismes locaux qui fondent la spécificité et l’effi-cacité des institutions mutualistes. Ce cheminement a été engagé par le régulateur européen en matière bancaire et d’assurance.

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2.2. Des évolutions spécifiques aux établissements mutualistes qui contribuent à renforcer le sentiment de complexité du modèle

Les évolutions récentes des institutions mutualistes suscitent de vifs débats concernant notamment :• la croissance externe faite par le biais de SA cotées en bourse pour

certaines d’entre elles. Il convient à cet égard de noter que la crois-sance externe par voie de SA pour les activités de production et l’international est à ce stade le seul axe praticable ;

• la diversification des activités d’origine, qui demeurent néanmoins prépondérantes compte tenu du recentrage récent des acteurs sur leur cœur de métier : le développement des activités de banque de détail sur le périmètre du territoire et la sortie de nombreuses activités du périmètre des entités régionales placent toujours celles-ci dans une position prépondérante mais avec une contribution moins importante dans la formation du résultat ;

• la complexité perçue de la répartition des pouvoirs et des méca-nismes de solidarité financière (liquidité et fonds propres notam-ment) dans les sociétés coopératives et dans les mutuelles. Cette répartition des pouvoirs est liée à la notion d’intérêt collectif mais s’exerce parfois au détriment d’une plus grande efficacité écono-mique et est mal perçue par les marchés financiers sans un effort de communication important que certains acteurs mutualistes de forte taille sont parvenus à réaliser.

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Ces évolutions coïncident avec certaines tendances lourdes qui impactent le modèle mutualiste :

a. Une démographie « plate »

Vers la fin des années 1980, s’est amorcé un mouvement de dému-tualisation, notamment dans les pays anglo-saxons, que certains ont interprété comme le « début de la fin » de la finance mutualiste dans les pays industrialisés. Ainsi, vers la fin des années 1980, en invoquant les limites que leur imposait le statut mutualiste en matière de croissance géographique et industrielle, certaines Building Societies britanniques ont opté pour la démutualisation. La dému-tualisation bancaire au Royaume-Uni a concerné 13 sociétés qui représentaient 75 % du marché des Building Societies. Ce mouve-ment a également touché l’assurance De surcroît, le mouvement mutualiste ne se renouvelle plus : en dehors du monde émergent, il n’y a plus de nouvelles institutions mutualistes créées et la crois-sance des groupes existants ne revêt plus la forme mutualiste. Ainsi, lorsqu’AXA a voulu acquérir Equitable et National Mutual pour se développer respectivement aux États-Unis et en Asie Pacifique, l’entreprise est passée par la voie de la démutualisation, même si les deux cibles étaient à l’origine des mutuelles.

b. Une diminution de la proportion des sociétaires des banques coopératives et une problématique d’adéquation entre les élus et les adhérents pour les Mutuelles et Institutions de Prévoyance dans le domaine de la santé

Afin de poursuivre leur croissance, les banques coopératives ont progressivement élargi leur offre à des non-sociétaires. D’où un

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affaiblissement de leur base sociétaire. Ainsi, au sein des groupes Crédit Agricole, BPCE, Crédit Mutuel (hors filiales SA) la proportion de sociétaires parmi leurs clients oscille-t-elle entre 26 et 66 %, ce qui traduit la croissance rapide de ces établissements par conquête commerciale classique sans développement symétrique au même rythme de la base de sociétaires. Toutefois, dans le contexte de crise financière certaines banques mutualistes ont vu croître le nombre de ceux-ci, à l’instar des Banques Populaires et des Caisses d’Épargne qui en ont gagné plus d’un million entre 2009 et 2013. Par ailleurs, en 1999 lors de leur transformation, les Caisses d’Épargne ont constitué leur sociétariat à partir de leurs clients. Dans le même esprit, le groupe Crédit Agricole ambitionne de faire croître le nombre de sociétaire de 7,5 à près de 10 millions d’ici 2016.

Les Mutuelles de santé et les Institutions de Prévoyance sont confron-tées à une inadéquation entre le profil des adhérents et celui des élus. Malgré les efforts entrepris en faveur de la parité et du rajeu-nissement des administrateurs, il n’y a en 2013 que 24 % de femmes (22 % en 2005) dans les conseils d’administration des Mutuelles santé ; et 88 % des élus ont plus de 50 ans (62 % plus de 60 ans). On attendrait de la part des mutuelles un comportement plus exemplaire.

c. Une recherche des effets de taille et de l’optimisation des coûts

Les institutions mutualistes devront chercher tous les moyens pos-sibles pour faire jouer entre elles des économies d’échelle qui seules leur permettront d’affronter la concurrence à armes égales. Ceci exigera d’elles des abandons de souveraineté managériale, mais ceux-ci, que de nombreuses banques privées ont déjà consentis en réponse à la crise, devraient être moins pénalisants a priori, car les

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ressorts du jeu concurrentiel ne sont pas les mêmes pour les insti-tutions mutualistes que pour les banques privées.

2.3. Des acteurs mutualistes qui ont participé aux mouvements de consolidation / mutualisation / diversification, avec une accélération des consolidations ces dernières années

Une consolidation et une recherche des effets de taille, facilitées notamment par le statut de SGAM (ou du côté des Mutuelles 45, par la possibilité de créer des UGM ou UMG) et par les autres formes de groupements mutualistes (exemples de Covéa, SFEREN, AG2R-LM, Istya) ont eu lieu ces dernières années. Ainsi, on observe dans le domaine de la santé l’émergence de partenariats autour de plateformes de soins ayant notamment pour objectifs de gérer des professionnels de soins, d’analyser les devis médicaux et d’optimiser les frais de prestation : c’est le cas de Sévéane avec Groupama et pro BTP, Kalivia autour de Malakoff-Médéric et Harmonie Mutuelle ou Itélis (Axa, UFR, Mutuelles mieux être) et Santéclair (Allianz, Maaf, MMA…). On observe également une mutualisation des achats de prestations liés à la gestion des sinistres IARD ayant pour objectif d’optimiser les coûts à travers les effets d’échelles (pouvoir de négo-ciation vis-à-vis des réparateurs, achats directs auprès des construc-teurs, …) : création de Covéa AIS par MMA, MAAF et GMF, création du GIE Kareo par Generali et Aviva, annonce par Pacifica, Sogessur et Thélem Assurances de l’intention de rejoindre le GIE Kareo afin de mutualiser les achats « assurance ».

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Après avoir vécu une phase de fusion de Caisses/Banques (les caisses régionales de Crédit Agricole sont passées de 89 à 39 entre 1990 et 2010 alors que les caisses locales se sont contractées de 6 462 à 2 533 entre 1933 et aujourd’hui), les différents groupes coopératifs bancaires procèdent de la même manière à une intégration progres-sive de leurs systèmes d’information et ont effectué le regroupement des filiales métiers et des Caisses/Banques sous une marque com-mune. Enfin, les banques coopératives nouent également des alliances et des partenariats dans la perspective non seulement de bénéficier d’économies d’échelle mais surtout d’étendre leurs activités à l’international.

Exemple partenariats/alliances

Groupes Mutualistes Principaux partenariats

Crédit Agricole

• Partenariat avec les Caisses d’Épargne dans CACEIS : Crédit Agricole et les Caisses d’Épargne regroupent leurs activités de services sur les titres. Le Crédit Agricole détient actuellement 85 % de la structure et Natixis 15 %.

• Partenariat avec Fiat dans Fiat Group Automobiles (FGA) Capital : Crédit Agricole conclut un partenariat à 50/50 avec le constructeur automobile FIAT.

• Partenariat avec la Société Générale dans Amundi : Crédit Agricole et la Société Générale mettent en com-mun leurs forces dans la gestion d’actifs. Le Crédit Agricole détient 75 % de la structure.

• Partenariat avec Banco Popolare dans Agos Ducatos : Crédit Agricole détient 61 % de la structure/

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Groupes Mutualistes Principaux partenariats

Rabobank

• Rabobank conclue une alliance avec Eureko/Achmea dans l’assurance dommages et acquiert 5 % d’Eureko group.

• Rabobank acquiert 35 % de la banque polonaise BGZ Bank.• Accord entre Rabobank et Rothschild pour le développement

des activités de fusion et acquisition dans le secteur de l’agri business et agro alimentaire au niveau mondiale.

• Accord entre Rabobank, FGH Bank, et Bouwfonds pour développer les activités dans l’immobilier international (Rabobank Real Estate Group)

• Achat de 30 % de Banco coopérativo Sicredi au Brésil (138 banques coopératives).

• Accord de coopération stratégique avec Agricultural Bank of China.

Les modèles de consolidation sont toutefois différenciés : ainsi au-delà des regroupements de moyens, certaines opérations de rappro-chement ont un objectif stratégique notamment la constitution du pôle Covéa, de SFEREN et de BPCE qui sont l’occasion non seulement d’optimiser des éléments de structure de coûts mais aussi de créer des mécanismes de solidarité financière, de disposer d’effets d’échelle et de complémentarités fortes en termes bilanciel, de réseaux de distribution et des clientèles différentes, voire de savoir-faire métiers.

Il convient de noter que les mutuelles du Code de la mutualité ne disposaient pas jusqu’à la loi sur l’Économie Sociale et Solidaire de la même souplesse que les établissements coopératifs en termes de regroupement et d’association à d’autres groupes mutualistes8.

8 Les UMG et les UGM existent pourtant dans le Code de la mutualité. De même, une mutuelle 45 peut rejoindre une SGAM. Le projet de loi sur l’Économie sociale et solidaire élargit ce dispositif aux mutuelles de livre III (établissements sanitaires et sociaux) et permet des mécanismes de co-assurance.

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Afin de poursuivre leur croissance et leur développement, les établissements mutualistes qui souhaitent de manière légitime rester au contact de leurs compétiteurs SA sont également confron-tés au défi de l’internationalisation. Celle-ci a été pour l’heure essentiellement réalisée par des acquisitions de banques ou d’assurance ayant le statut de SA et beaucoup plus rarement par croissance organique dans l’univers mutualiste, ce qui tient tant à la diversité des modèles mutualistes qu’à l’absence de recon-naissance du statut de mutuel à l’échelle européenne. On doit noter cependant l’évolution récente avec les déclarations du Commissaire européen aux industries et à l’entrepreneuriat qui a annoncé une initiative sur le statut de mutuelle européen avant juin 2014 pour une mise en œuvre en 2015-2016.

À cet égard, les mutuelles d’assurance prennent appui sur des organismes / syndicats professionnels pour harmoniser à l’échelle nationale (FFSAM, ROAM, GEMA) ou européenne (AMICE) leurs positions afin de structurer un lobbying européen efficace.

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III

LES PISTES D’ACTION

Les institutions mutualistes se sont développées sur la base d’expé-riences concrètes de terrain et l’hétérogénéité de ce mouvement n’est que le reflet de cette approche pragmatique de type bottom-up.

Cette hétérogénéité est le fruit d’évolutions divergentes et de circons-tances historiques spécifiques. Il faut souligner, par ailleurs, que des différences existent non seulement entre marchés nationaux mais parfois aussi au sein d’un même marché.

Au total, l’adaptation du modèle mutualiste aux évolutions des comportements des ménages, aux pressions sur les modèles éco-nomiques de la banque et de l’assurance et au durcissement des exigences réglementaires requiert de relever un quadruple défi pou-vant faire l’objet de 17 propositions. Les propositions 8 à 13 ne concernent que le secteur des assurances.

Mieux expliciter et communiquer sur le modèle coopératif et mutualiste auprès des clients/sociétaires/adhérents, des collaborateurs et des pouvoirs publics :

1. Mieux faire connaître aux clients, sociétaires et adhérents les valeurs fondamentales du mutualisme :

• un ancrage territorial fort se manifestant notamment par la recherche d’un maintien des emplois sur le territoire ;

• une association volontaire des membres en tant que sociétaires/adhérents et clients ;

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• une vocation universelle qui privilégie une offre s’adressant à tous plutôt qu’une approche segmentée ou exclusive ;

• une cohésion entre les membres individuels ou collectifs du groupe mutualiste ;

• une gestion démocratique qui a pour objectif de satisfaire les besoins des sociétaires et des clients plutôt que de rechercher la maximisation de la rentabilité, ce qui peut être source d’une meilleure maîtrise des risques ;

• une vision de long terme qui conduit à affecter les résultats en réserve, à privilégier le ré investissement au sein de l’organisation ou au profit des sociétaires/adhérents et des territoires.

Face à la défiance des clients vis-à-vis du secteur financier depuis la crise de 2008, la progression du consumérisme et l’accroissement de la concurrence dans le domaine des services financiers, les établissements mutualistes doivent mettre en avant leurs valeurs qui permettent de se démarquer des banques et assurances clas-siques en termes de modèle relationnel, de modèle opérationnel, de distribution et de profils de risque. Ainsi, le corpus de valeurs mutua-listes doit-il permettre de faire ressortir une relation de long terme avec le client/sociétaire/adhérent fondée sur la transparence, l’éthique, la proximité et le conseil plutôt qu’un avantage lié au produit proposé dans le cadre d’une relation transactionnelle.

2. Mettre en exergue les externalités positives du modèle mutualiste au-delà de la sphère commerciale auprès des clients mais aussi des pouvoirs publics

Les établissements mutualistes, de manière diffuse à l’échelon local, assurent souvent un rôle majeur dans le domaine du maintien du lien social, de la prévention des risques, dans le développement

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territorial, dans l’éducation financière et économique des sociétaires et adhérents. Ces actions sociétales, inhérentes au fonctionnement même du mutualisme, distinguent clairement les établissements mutualistes des autres banques et assurances. Toutefois, ces mesures ne sont pas toujours recensées au même niveau, quantifiées (en termes de budget alloués, de temps consacrés par les équipes) selon une nomenclature cohérente et, le cas échéant, partagée par les établissements mutualistes qui le souhaiteraient afin de nourrir la communication sur les spécificités du modèle mutualiste et ce, au-delà des rapports Responsabilité Sociale des Entreprises.

3. Communiquer auprès des collaborateurs dans le cadre des formations sur les spécificités des valeurs (équité, approche de long terme, non distribution des profits…) et du modèle économique :

• recherche de la satisfaction du client pour atteindre la rentabilité ;• recherche de la rentabilité pour satisfaire les contraintes pruden-

tielles et assurer sur le long terme la pérennité de la structure.

Les établissements mutualistes sont à l’instar de toutes les banques et assurances confrontés au renouvellement de leurs collaborateurs qui sont les vecteurs de leurs valeurs dans la relation clientèle mais aussi dans l’animation de la vie des entreprises et des assemblées générales.

4. Former les futurs dirigeants aux spécificités (statuts juridiques, gouvernance…) mutualistes en amont (Grandes écoles et Université), afin de disposer d’un réservoir de jeunes talents sensibilisés et formés aux spécificités du mutualisme et mieux faire connaître le modèle mutualiste

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5. Mieux communiquer auprès du régulateur européen, fortement marqué par le modèle de la SA, sur le modèle coopératif et mutua-liste afin d’accroître la lisibilité de la gouvernance et des structures mutualistes et que leurs spécificités soient prises en compte.

Alors que les grands groupes bancaires européens vont être assujettis à un régulateur européen, les établissements mutualistes usent avec plus de modération que les SA des actions de lobbying directement ou au travers de fédérations. Il conviendrait qu’ils veillent, avec l’européa-nisation croissante de la régulation en matière de services financiers, non seulement à renforcer leurs actions de lobbying mais aussi à expliciter les spécificités et avantages du modèle mutualiste français.

Moderniser le lien avec ses clients/sociétaires/adhérents

6. Adapter les modes de relation afin de tirer avantage des nou-velles technologies et répondre aux attentes spécifiques de certaines clientèles :

• tout en restant attaché au caractère universel de l’offre mutualiste, il serait souhaitable d’adapter les modes de relation et l’offre produit notamment vis-à-vis des jeunes et de la clientèle entreprise qui ont des besoins spécifiques et qui sont moins sensibles au posi-tionnement classique des acteurs mutualistes ;

• la modernisation de la relation avec le client/sociétaire/adhérent peut s’appuyer sur une démarche multicanale en apportant la relation internet au sein des réseaux de distribution. En effet, le vecteur internet constitue pour les établissements mutualistes une occasion d’enrichir les modes de contacts avec les clients sans

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délaisser la relation en agence et d’accompagner un lien commu-nautaire au-delà d’une zone géographique. Il s’agit en outre de développer le sentiment d’appartenance au sein de nouvelles communautés nées des réseaux sociaux par exemple et d’adapter les valeurs mutualistes à la relation digitale.

7. Promouvoir la co-création avec les sociétaires (produits, expé-rience client, distribution…) en s’appuyant sur les valeurs de :• confiance et loyauté,• proximité,• transparence,• relation de long terme.

Les acteurs mutualistes peuvent s’appuyer, dans cette dimension, sur le caractère unique de leur gouvernance qui met le sociétaire / adhérent au cœur du débat démocratique de l’organisation. Les représentants des sociétaires au sein des différentes instances sont ainsi un relais essentiel pour faire remonter les besoins et attentes, dans une logique de co-création.

Les propositions 8 à 13 ne concernent que le secteur des assurances

Se doter des outils financiers et juridiques afin de per-mettre le renforcement des fonds propres, une plus grande agilité dans l’organisation et le développement interna-tional (à la fois pour les banques et les assurances) :

8. Accentuer l’effort de pédagogie auprès des élus de sociétaires pour faire accepter l’endettement externe comme une possibilité de refinancement normale dans la mesure où les Conseils de

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mutuelles ont été longtemps habitués au processus de mise en réserve comme seule source de constitution de fonds propres.

9. Encourager le regroupement de mutuelles autour de pôles d’adossement mutualistes ou favoriser la mutualisation de moyens entre petites entités

L’inflation réglementaire en termes de contrôle des risques, de besoins de fonds propres mais aussi la forte concurrence et les tensions sur le modèle économique conduisent les établissements mutualistes à rechercher une taille critique et une maîtrise de leurs structures de coûts. Aussi, l’adossement autour de pôles mutualistes ou la mise en place de SA outils apparaît nécessaire à l’instar de ce que réalisent les groupes bancaires ou assurantiels classiques.

10. Doter le statut de SGAM d’une possibilité de créer des paliers de consolidation (ou « sous-SGAM ») ou en autorisant des SGAM de SGAM

Pour les groupe d’assurance mutualiste, il est plus difficile d’être organisé avec des paliers de sous consolidation qui reflèterait une organisation par métier à l’instar de ce qui est possible pour une SA. Autoriser une SGAM à adhérer à une autre SGAM serait un assou-plissement de la règlementation actuelle qui permettrait d’adopter une organisation par métier.

11. Permettre une consolidation des mutuelles et ne pas pénaliser la détention de titres de contrôle de SA outils

Sous l’effet de la pression concurrentielle et des impacts de la régu-lation, les acteurs mutualistes recherchent par des alliances une

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amélioration de leur profitabilité, ce qui passe notamment par la mise en commun de certains maillons de la chaîne de valeur (mar-keting, informatique…) avec le cas échéant des acteurs non mutua-listes. Ce type de montage, dont les fins sont purement opérationnelles, est pénalisé par les demandes de fonds propres au titre des risques de marché par Solvabilité II.

12. Améliorer et harmoniser les modalités de contrôle, de reporting et de gouvernance des petites mutuelles afin de rendre plus lisible le modèle au niveau européen

Les statuts des établissements mutualistes européens sont extrême-ment divers (près de 36 statuts différents recensés) et mal connus par le régulateur à l’échelon européen. Aussi, les établissements mutualistes doivent-ils poursuivre la mise en œuvre de Solvabilité II pour mettre en œuvre les règles de bonne gestion en matière de gestion des risques et de contrôle interne. En effet, ces aspects critiques et régaliens sont particulièrement scrutés par les investis-seurs et régulateurs depuis la crise financière et les établissements mutualistes se doivent d’apporter toutes les garanties aux tiers sur leur solidité dans ce domaine en dépit de leurs spécificités.

13. Poursuivre l’effort de promotion et de défense du projet de statut de mutuelle européenne pour permettre un développe-ment organique ou la structuration d’un groupe transfrontalier

Les assureurs mutualistes ne disposent pas d’instruments alternatifs permettant leur développement international alors que Solvabilité II favorise les assureurs diversifiés et pénalise les établissements mutua-listes à double titre :

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• les demandes de fonds propres pénalisent les assureurs mono-activité et présents sur une seule géographie ;

• les demandes de fonds propres au titre des risques de marché pénalisent quant à elles la détention de titres (notamment non cotés) alors que les mutualistes ne bénéficient pas contrairement aux SA de la possibilité de restructurer leur capital dans le cadre du statut de société européenne.

En outre, les instruments juridiques existants ne sont pas compatibles avec un développement mutualiste en Europe :• la libre prestation de service est incompatible avec la proximité requise

par le modèle mutualiste (sociétariat, gouvernance) même si ce modèle peut être efficace opérationnellement pour certains produits ;

• le GIE européen, adapté aux fonctions support, ne permet pas d’intégration financière et de gouvernance ;

• l’adoption du statut de société coopérative européenne obligerait les sociétaires à souscrire au minimum une part sociale, ce qui peut conduire à un départ de sociétaires non désireux de réaliser la souscription. Par ailleurs, le statut de coopérative européenne, peu utilisé, requiert une reconnaissance effective de la part des régula-teurs nationaux ;

• la Directive sur les fusions transfrontalières s’applique uniquement aux sociétés de capitaux et non aux mutuelles.

Les propositions 14 à 17 concernent le secteur des banques et des assurances

Moderniser la gouvernance qui requiert la mise en œuvre de quatre bonnes pratiques :

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14. Généraliser des parcours de formation pour les administrateurs élus par les sociétaires ou leurs délégués (Solvabilité, IFRS, nouvelles réglementations bancaires, spécificités des statuts de mutuelles dans la perspective d’opérations de rapproche-ment…) afin de les associer pleinement aux décisions

L’une des conditions de la nomination d’un administrateur est son expérience qui ne peut pas toujours s’étendre à l’ensemble des activités de l’entreprise. Aussi, les élus doivent-ils bénéficier lorsque cela est nécessaire d’une formation aux métiers de l’entreprise, à sa gouvernance et à la réglementation encadrant l’activité. Cette for-mation pourrait être personnalisée, renouvelée au cours du mandat afin de tenir compte des fréquentes modifications d’environnement intervenant en banque et en assurance et faire l’objet d’évaluations (dans le cadre des procédures d’évaluation du conseil prévue dans le cadre de Solvabilité II notamment).

15. Mettre en place un processus permettant de détecter des jeunes talents pour former de nouveaux administrateurs selon les normes d’évaluation de la profession et en accord, quand il existe, avec le Comité de Sélection

16. Veiller à ce que les Conseils des groupes mutualistes se dotent des processus et des moyens permettant le renouvellement régulier des membres et de disposer de l’expertise requise pour exercer pleinement leurs responsabilités

Le Conseil des établissements mutualistes doit pouvoir se caractériser par une composition équilibrée dans la compétence de ses membres. Aussi, il convient d’assurer un renouvellement régulier et transparent des membres (par des limites d’âge ou du nombre de mandats par

exemple) afin de tenir compte des évolutions de l’environnement de l’entreprise et du sociétariat.

Il s’agit également d’organiser un processus de décision octroyant le temps aux élus de s’approprier les dossiers et d’obtenir les infor-mations complémentaires nécessaires.

17. Inciter à l’engagement des membres et sociétaires afin que la participation à la gouvernance ne se démente pas, notam-ment par l’usage des nouveaux moyens technologiques (intra-net, réseaux sociaux …)

L’Assemblée générale est l’organe souverain des coopératives et des mutuelles. C’est un lieu de débat et de décision, ce qui requiert une information claire et précise. Il convient de renforcer la participation à la vie mutualiste et notamment aux Assemblées générales en :

• utilisant toutes les formes de participation (préparation par internet, visio-conférence, votes à distance…) ;

• maintenant des relations informelles entre élus et sociétaires et élus à l’échelon territorial ou via internet afin de faire circuler l’information sur la vie de l’entreprise (stratégie, projets, résultats, fonctionnement de la vie démocratique du groupe…) ;

• construisant un sentiment d’appartenance par la mise à disposition de lieux de rencontre et de temps de concertation pour recueillir leurs attentes.

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ANNEXES

Annexe 1. Présentation de la loi du 10 septembre

1947 portant statut de coopération

Peu de sociétés coopératives ont été constituées sous le régime de la loi du 10 septembre 1947. Celle-ci fait davantage figure de loi-cadre irriguant d’autres textes que d’outil opérationnel utilisé par les porteurs de projet pour créer et faire vivre leur société. Ainsi, la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération a-t-elle donné un cadre général au droit coopératif en précisant les points sur lesquels le droit des sociétés coopératives se distingue du droit des autres sociétés. Sans créer un droit coopératif autonome, cette loi complète le droit des sociétés pour l’adapter aux particularités du projet coopé-ratif, dont elle fixe le principe fondamental : la prééminence de la personne sur le capital. Cette prééminence s’exprime à tous les niveaux de la structuration juridique des sociétés coopératives dans :• leur objet tout d’abord, qui est de répondre aux besoins communs

de leurs membres. C’est le constat d’un besoin partagé qui conduit certaines personnes à co-entreprendre en vue de le satisfaire et qui ancre les coopératives dans un affectio societatis fort ;

• la composition du sociétariat, ensuite. Le droit coopératif pose en effet des règles strictes concernant l’adhésion, le retrait et l’exclusion des associés. Les règles statutaires et/ou fiscales assurent aux associés qui participent aux activités de la coopérative une place prépondérante dans la détention du capital. Cette double qualité d’apporteur de capital et d’utilisateur de la coopérative est en effet essentielle pour éviter les divergences d’intérêts qui existent géné-ralement, dans toute société, entre, d’un côté, les actionnaires de l’entreprise et, de l’autre, ses utilisateurs. Grâce à cette double

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qualité, le pouvoir reste entre les mains des utilisateurs, ce qui garantit que la stratégie de la société correspond bien à son objet principal, à savoir répondre aux besoins des coopérateurs. D’autres règles donnent également aux coopératives les moyens de maintenir la force de l’affectio societatis. La cession des parts sociales (nomi-natives) est ainsi soumise à approbation de l’assemblée générale ou des administrateurs et gérants. Les sociétaires peuvent également être exclus sous certaines conditions ;

• la répartition du pouvoir. Les décisions sont prises sur la base de la règle « une personne, une voix », quelle que soit la part du capital social détenue par chacun. Si la loi autorise des aménagements à ce principe, c’est dans des limites précises. Le droit de vote propor-tionnel au capital, s’il est possible, reste en effet optionnel (les statuts ont la faculté de le prévoir). De plus, l’application d’une règle de proportionnalité des voix par rapport au capital détenu ne peut conduire un sociétaire à être majoritaire en voix ni conduire un sociétaire à disposer de moins d’une voix. Ce sont donc bien les coopérateurs qui, collectivement, détiennent le pouvoir dans la société ;

• la répartition des bénéfices. Les règles de répartition des excédents nets de gestion dans une coopérative donnent la priorité au renfor-cement de l’entreprise commune (avec des obligations de mise en réserve des bénéfices qui vont bien au-delà de celles que connaissent les autres types de société) et à la rémunération des utilisateurs des services de la coopérative à travers le système de la ristourne (ver-sement d’une partie des bénéfices aux coopérateurs au prorata de leur participation à l’activité de l’entreprise). La rémunération du capital stricto sensu est strictement limitée ;

• les droits des sociétaires sur l’actif de la société. D’une part, en cas de sortie du capital, les sociétaires voient leurs parts rembour-sées par la coopérative à leur valeur nominale. D’autre part, en

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cas de dissolution de la coopérative, l’actif net subsistant après extinction du passif et remboursement du capital effectivement versé est dévolu par décision de l’Assemblée générale, soit à d’autres coopératives ou unions de coopératives, soit à des œuvres d’intérêt général ou professionnel.

Sans remettre en cause la cohérence et la force des principes fonda-mentaux du droit coopératif, le législateur a assoupli leur rigueur initiale afin de lever certains freins au développement des sociétés coopéra-tives. C’est essentiellement la loi n° 92-643 du 13 juillet 1992 relative à la modernisation des entreprises coopératives qui opère les chan-gements susceptibles de faciliter le recours des coopératives aux capitaux externes nécessaires au financement de leur croissance :• possibilité d’ouverture du capital social à des associés non coopéra-

teurs : des associés extérieurs peuvent disposer de droits de vote proportionnels à leur part dans le capital social, sans toutefois que ces associés extérieurs puissent détenir plus de 35 % de ces droits de vote (49 % si l’associé extérieur est lui-même une coopérative) ;

• possibilité de mieux valoriser les parts sociales en autorisant, sous certaines conditions, leur remboursement au-dessus de leur valeur nominale – par l’augmentation de la valeur nominale de chaque part ou du nombre des parts sociales et par la distribution gratuite aux associés des parts supplémentaires ;

• création des parts à avantages particuliers tels qu’un droit de priorité dans l’attribution des intérêts servis au capital, un supplément de rémunération par rapport aux parts normales ou encore un droit à remboursement immédiat en cas de sortie du capital ;

• création de titres distincts des parts sociales de manière à diversifier les outils de rémunération du capital émis par les coopératives : parts à intérêt prioritaire sans droit de vote susceptibles d’être souscrites ou acquises par des associés extérieurs ou par des tiers

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non associés ; des titres participatifs, qui ne sont remboursables qu’en cas de liquidation de la société ou, à son initiative, à l’expi-ration d’un délai qui ne peut être inférieur à sept ans, et qui constituent donc des quasi fonds propres ; certificats coopératifs d’investissement qui sont des titres représentatifs de droits pécu-niaires attachés à une part de capital, librement négociables, sans droit de vote, émis pour la durée de la société, qui offrent une rémunération déterminée chaque année par l’assemblée générale en fonction des résultats de l’exercice. Par dérogation aux règles coopératives usuelles, les titulaires de certificats coopératifs d’inves-tissement disposent d’un droit sur l’actif net dans la proportion du capital qu’ils représentent, droit qu’ils peuvent exercer à l’occasion de la liquidation ou de la dissolution de la coopérative.

Il convient de noter que la spécificité coopérative est reconnue par le droit européen contrairement au statut de mutuelle. Ainsi, les principes fondamentaux du droit coopératif national sont-ils repris dans le règlement CE n° 1435/2003 du 22 juillet 2003 relatif aux statuts de la société coopérative européenne. En outre, dans son arrêt du 8 septembre 2011, Ministerio dell’Economia e delle finance c/ Paint Graphose. La Cour de justice de l’Union européenne reconnaît que :• l’application uniforme du droit de la concurrence peut exercer un

effet de discrimination à rebours au détriment des coopératives ;• le législateur national peut en conséquence édicter des règles

spécifiques, notamment fiscales, destinées à compenser certains des handicaps structurels que rencontrent les coopératives, notam-ment dans l’accès aux marchés de capitaux. Les pouvoirs publics nationaux disposent en effet de marges de manœuvre réelles, et sans doute imparfaitement exploitées, sur le plan fiscal et dans le domaine des appuis financiers directs, qu’il est possible d’utiliser sans risquer d’enfreindre les règles du droit de la concurrence.

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Annexe 2. Origines et spécificités des grands réseaux coopératifs bancaires français

Groupe BPCE

Le groupe BPCE est issu du rapprochement en 2009 des groupes Banques Populaires et Caisses d’Épargne via la fusion de leur organe central respectif (BFBP et CNCE). La première Banque Populaire a été fondée en 1878 par un père capucin très investi dans les réflexions sur la condition ouvrière, Ludovic de Besse. Cette banque a été créée à Angers sous le nom de « La Banque des Travailleurs Chrétiens » et constituait la réponse des classes moyennes de producteurs, artisans et commerçants aux lois de la concurrence et à l’usure. Bien que religieux catholique, Besse s’inspire du modèle libéral de Schulze-Delitsch pour fonder ses établissements du Crédit Populaire. Avec l’industrialisation, l’ouverture de grands magasins et l’avènement d’un capitalisme agressif, ces classes « populaires » rencontraient des difficultés pour obtenir un financement. Les Banques Populaires ont financé les projets des artisans et ceux des PME.

Un grand pas a été franchi avec la loi du 13 mars 1917 qui a posé les statuts types pour les Banques Populaires, leur laissant le choix de la forme sociale à laquelle elles allaient se soumettre : société régie par les dispositions du Code de commerce ou société sui generis dont les contours seraient déterminés par voie statutaire. C’est un avis du Conseil d’État du 11 janvier 1949 qui a reconnu que la loi du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération s’appliquait aux Banques Populaires, même lorsque celles-ci n’utilisaient pas l’appellation de coopératives.

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Fondées à partir du 22 mai 1818 sous l’influence de la pensée philanthropique (date de la création par le baron Benjamin Delessert et le duc de la Rochefoucault-Liancourt de la Caisse d’Epargne de Paris), les Caisses d’Épargne, bien que constituées en tant que sociétés anonymes, ne disposaient pas à l’origine de capital social et étaient qualifiées de sociétés sui generis. Inspirées par l’idée que l’argent peut être facteur de progrès et que ses vertus doivent être diffusées à tous les échelons de la société, les Caisses d’épargne étaient qualifiées, dès juin 1835 d’établissements privés d’utilité publique. Leur unique fonction a longtemps consisté à recevoir les dépôts et les transmettre à la Caisse des Dépôts et Consignations. Elles exécutaient ainsi une mission d’intérêt général en favorisant l’épargne des personnes de condition modeste. Le nombre limité d’opérations autorisées aux établissements a incité des auteurs tels que J. Hamel et R. Laurent à exclure les Caisses d’Épargne du domaine du droit bancaire.

L’évolution progressive, entamée en 1950 avec la loi Minjoz9, de la gamme d’activités auxquelles se livrent Caisses d’Épargne a mis en exergue le caractère inadapté du régime juridique qui leur était applicable. Dépourvues de propriétaires, les Caisses d’Épargne étaient confrontées à une problématique de gouvernance, d’où un contrôle des activités bancaires et financières par la Caisse des Dépôts et Consignations. En outre, elles étaient contestées comme bénéficiant d’un important avantage concurrentiel puisque n’ayant ni action-naires, ni sociétaires, elles mettaient systématiquement leurs résultats nets en réserve. Cette difficulté, due à la précocité des Caisses d’Épargne en tant qu’institutions de l’économie sociale, a été résolue par la loi du 25 juin 1999 qui dispose que les Caisses d’Épargne

9 Dans le cadre de la reconstruction de la France, la loi Minjoz du 24 juin 1950 les autorise à octroyer des prêts bonifiés aux collectivités et organismes publics.

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doivent désormais constituer des fonds propres à partir d’un capital social et sont qualifiées d’établissements bancaires à caractère coopératif.

C’est suite à la loi du 25 juin 1999 que les Caisses d’Épargne ont dû constituer leur capital social de toute pièce. La cession du capital aux sociétaires est ouverte en janvier 2000, par la souscription de parts dans les sociétés locales d’épargne qui elles-mêmes contrôlent les Caisses d’Épargne.

Le groupe BPCE intègre également en son sein le réseau du Crédit coopératif qui était affilié à la BFBP avant la fusion de 2009. Créés par le décret-loi du 17 juin 1938 et qualifiés de sociétés coopératives de banque par la loi, les établissements du réseau Crédit coopératif sont des sociétés à capital fixe dont le capital n’est ouvert qu’à certaines catégories d’institutions (sociétés coopératives, sociétés mutualistes...). En 2011, il comptait, parmi ses 48 000 sociétaires, environ 32 000 personnes morales dont 43 % d’associations, 18 % de coopératives, 15 % d’autres entreprises d’économie sociale.

Groupe Crédit Mutuel

La première Caisse du Crédit Mutuel a été fondée en 1882 près de Strasbourg, à Wantzenau (Alsace) sur le modèle des caisses rurales allemandes de Raiffeisen. Quatorze caisses sont créées en Alsace la même année. A partir de 1893, sous l’impulsion de Louis Durand, avocat lyonnais, des Caisses sont établies sur le reste du territoire français, notamment dans l’Ouest et dans les Pyrénées. Ce sont des caisses rurales qui, à la différence des caisses du Crédit Agricole et des établissements du Crédit populaire, cherchent à préserver leur liberté vis-à-vis de l’État. La Confédération nationale du Crédit Mutuel

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a été créée en 1958 pour organiser les établissements au plan national. L’ordonnance n° 58-966 du 16 octobre 1958 a soumis les caisses du Crédit Mutuel aux dispositions de la loi du 10 sep-tembre 1947 portant statut de la coopération. C’est ainsi que les œuvres d’inspiration religieuse se sont transformées en banques mutualistes. Si le but initial était de procurer du crédit à des per-sonnes de condition modeste en mettant en œuvre la solidarité mutualiste, peu à peu les activités des caisses du Crédit mutuel se sont diversifiées de telle sorte que les opérations offertes par les établissements du groupe Crédit mutuel couvrent aujourd’hui l’en-semble des activités bancaires. Ce groupe est structuré en trois niveaux. Il comporte des caisses locales, établissements de crédit constitués sous forme de sociétés coopératives à capital variable ; des fédérations régionales, contrôlant les caisses locales et des caisses fédérales et, au niveau national, la CNCM ; ainsi que la caisse centrale du Crédit Mutuel constituée sous forme d’une société coopérative à capital variable.

Groupe Crédit Agricole

Si les nouveaux établissements bancaires connaissent un certain succès auprès des artisans, ouvriers et commerçants, les paysans sont tout au long du XIXe siècle confrontés à l’inadaptation structurelle du financement de l’agriculture. En 1861, sous l’impulsion de Napoléon III, une société de Crédit Agricole a vu le jour, mais, victime de la spéculation, elle a fait faillite quinze ans plus tard. Président du Conseil sous la Troisième République, Jules Méline propose de créer des Caisses mutuelles de premier degré, exerçant seulement une activité financière et disposant d’un statut fiscal privilégié. Pour que ces institutions puissent prêter à court terme aux seuls agricul-teurs à des taux très réduits, il prévoit un capital social composé de

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parts d’un montant modique et rémunéré très faiblement. Suite à la loi Méline votée le 5 novembre 1894, apparaissent les petites caisses locales du Crédit Agricole qui sont constituées sur le modèle de la caisse créée en 1885 à Poligny (Jura) par Louis Milcent. Le capital social de ces caisses était constitué par des parts sociales et non des actions. Pour éviter la spéculation, les parts ne devaient être cessibles qu’en cas d’agrément de la société.

Le niveau local s’est avéré insuffisant et il a fallu le compléter soit par une banque à compétence nationale (conception de Jean Jaurès), soit par les Caisses régionales (conception de Jules Méline). C’est finalement la conception de Jules Méline qui l’a emporté et a donné lieu à une loi de 1899. Celle-ci a permis à ces caisses locales de se regrouper pour constituer des caisses régionales qui, avec la loi du 5 août 1920, ont créé la Caisse Nationale de Crédit Agricole. Cette même loi de 1920 a confirmé le caractère rural du Crédit Agricole, mais a ouvert le sociétariat au-delà des syndicats agricoles.

C’est à travers les réformes de 1982 (autorisation d’octroi des prêts aux ménages pour leurs besoins familiaux ou de logement) et de 1985 (autorisation de financer les PME sans restrictions territoriales) que le Crédit Agricole entre dans les zones urbaines et dépasse son caractère exclusivement rural. La CNCA, initialement constitutive d’un établissement public industriel ou commercial, a été « mutua-lisée » par une loi n° 88-50 du 18 janvier 1988. Elle est devenue une société anonyme dont le capital est détenu par un sociétariat. Depuis 2001, CNCA devenue Crédit Agricole – Société Anonyme (CASA) est cotée. L’ensemble des établissements coopératifs dis-posent d’un statut juridique commun.

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Bien qu’ayant des racines très distinctes, l’évolution des établissements coopératifs bancaires se caractérise par trois grandes étapes ayant parfois des durées et des formes diverses. Ainsi, l’ensemble des banques mutualistes ont-elles connu trois phases de développement, à l’instar du reste du secteur bancaire, dans le but de se transformer en banque universelle :• la banalisation réglementaire (1945-1980) qui a permis l’élargis-

sement de la gamme :– la loi lève progressivement les dispositions spécialisant les banques

d’affaires et de dépôt,– ces dernières sont ainsi graduellement autorisées à offrir l’ensemble

des services bancaires à l’ensemble des clients et peuvent accom-pagner la bancarisation de masse de la population française sur la période,

– l’autonomisation des organes centraux des groupes mutualistes vis-à-vis de la sphère publique complète ce mouvement de bana-lisation réglementaire,

• l’intensification commerciale (dans les années 1980) avec la crois-sance des réseaux et du nombre de clients et le développement de nouvelles activités (Assurance, Gestion d’actifs et BFI, Immobilier) ;

• la croissance externe avec des opérations de fusion-acquisition (LCL, CIC, CFF10) afin de renforcer le cœur d’activité (banque de détail) ou de s’adjoindre de nouvelles activités ou territoires et la mise en place de véhicules cotés pour soutenir, notamment, cette croissance externe en permettant un appel au marché.

10 Les pouvoirs publics ont soutenu le secteur mutualiste lors de la restructuration du secteur public financier

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Annexe 3 : Présentation détaillée de l’origine et du statut des mutuelles régies par le Code de la mutualité

Ces institutions tirent leur origine des premières unions départemen-tales mutualistes avec la création du grand conseil des sociétés de secours mutuel des Bouches-du-Rhône. En 1850, la loi sur les sociétés de secours mutuels reconnaît la séparation entre les syn-dicats et les mutuelles. La loi du 1er avril 1898 octroie à la mutualité un véritable statut. Elle autorise, sur simple déclaration, la création de sociétés libres. En donnant à la mutualité la possibilité d’organiser des unions et de créer des caisses autonomes, la loi lui ouvre notam-ment tous les champs d’activité de la protection sociale : assurance-vie, assurance invalidité, retraite, œuvres sanitaires et sociales (dispensaires et pharmacies par exemple), allocations chômage. En 1902, la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF) est créée, institution qui fédère aujourd’hui la quasi-totalité des mutuelles régies par le Code de la mutualité. Aujourd’hui, les Services de soins et d’accompagnement mutualistes sont 2500, présents sur l’en-semble du territoire et ouverts à tous (pas seulement donc aux adhérents des mutuelles). Ces services de soins comprennent : des centres optiques, des ehpad, des cliniques, des crèches, des centres de santé ou dentaire – il reste désormais peu de pharmacies mutualistes.

À la Libération, le contexte politico-social est favorable aux organi-sations syndicales, au détriment du mouvement mutualiste. L’ordonnance du 19 octobre 1945 abroge la Charte de la mutualité de 1898 et définit de nouvelles orientations aux « sociétés mutua-listes », en complémentarité avec la Sécurité sociale. La loi du 26 avril étend la Sécurité sociale à l’ensemble de la population. Celle

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du 19 octobre sur la Fonction publique assujettit l’ensemble des fonctionnaires. De puissantes mutuelles vont alors se constituer : la Fédération nationale des mutuelles de fonctionnaires et agents de l’Etat, la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN), la Mutuelle générale des PTT (MGPTT)...

La loi du 27 février 1947 fait participer la mutualité au fonctionne-ment de la Sécurité sociale en lui reconnaissant le droit de gérer certains de ses centres. La loi du 9 avril 1947 confie aux mutuelles de fonctionnaires la gestion de leur régime spécial de Sécurité sociale. Depuis les lois du 19 mars 1947 (dite loi Morice) et du 9 avril 1947, la possibilité est offerte aux mutuelles de gérer la part obligatoire des prestations d’assurance maladie servies par le régime général aux salariés et aux fonctionnaires. Les sociétés mutualistes peuvent s’organiser en sections locales de la Sécurité sociale, options que seules les mutuelles de fonctionnaires exerceront. Puis la gestion des prestations obligatoires pour les étudiants est confiée aux mutuelles d’étudiants par la loi du 23 septembre 1948. L’assurance maladie des exploitants agricoles est confiée à la mutualité agricole ou à l’assurance commerciale (GAMEX) par la loi du 25 janvier 1961 et celle des professions non salariées non agricoles à la mutualité et à l’assurance commerciale par la loi du 12 juillet 1966. En 1955, le Code de la mutualité stabilise le cadre de fonctionnement des mutuelles Le congrès de la FNMF en mai 1967 marque la recon-naissance définitive de la mutualité d’entreprise et du bien-fondé d’une coopération avec le syndicalisme.

Les mutuelles sont des organismes à but non lucratif qui n’ont pas pour vocation de réaliser des excédents et de les distribuer à leurs membres. Leur vocation est d’organiser pour et avec leurs adhérents les réponses aux besoins sociaux qu’ils expriment. La vocation des

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mutuelles est la prévoyance, la solidarité et l’entraide afin de contribuer au développement culturel, moral, intellectuel et physique des membres et à l’amélioration de leurs conditions de vie. L’activité des mutuelles se situe donc dans le domaine de la protection sociale exclusivement en ce qui concerne la personne humaine. Les mutuelles sont administrées par un Conseil d’administration élu par les membres de l’Assemblée générale réunissant les adhérents ou les délégués. Les fonctions d’administrateur sont gratuites. Les mutuelles mettent en œuvre la solidarité entre leurs membres. Elles ne procèdent pas à une sélection personnalisée des risques à l’adhésion et elles n’instituent pas des conditions tarifaires personnalisées. La Mutualité développe une action d’intérêt général en favorisant l’accès aux soins de tous et l’amélioration de la protection de l’adhérent.

L’adhésion à ces groupements est facultative, à la différence de l’affiliation aux régimes de Sécurité sociale. Les membres acquittent des cotisations qui leur ouvrent droit à des prestations, ainsi que l’accès à différents services créés et gérés dans le cadre de l’action sociale des mutuelles. Ces réalisations sociales sont à caractère sanitaire, médico-social, social ou culturel (pharmacies, cliniques, dispensaires, maisons de retraite, centres de loisirs et de vacances, etc.). Les mutuelles peuvent constituer entre elles des unions, elles-mêmes susceptibles de se regrouper en fédérations. Ces groupements ont notamment pour objet de gérer les réalisations sociales communes aux mutuelles adhérentes et de leur permettre de se réassurer ; par ailleurs, ils font mieux connaître la mutualité et assurent la coordination et la représentation des mutuelles auprès des pouvoirs publics.

Les mutuelles sont des sociétés de personnes qui se financent essentiellement au moyen des cotisations de leurs membres. Elles

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peuvent émettre des titres participatifs. L’État assure un contrôle juridique et financier des mutuelles.

La réglementation actuelle prescrit aux mutuelles garantissant des engagements longs à titre accessoire (incapacité, invalidité, vieillesse, décès, vie) de gérer ces risques au sein de structures propres, dotées de l’autonomie comptable et financière, mais non de la personnalité morale. Il s’agit des caisses autonomes. Cette gestion peut être également déléguée à la Caisse nationale de prévoyance. Les caisses autonomes sont soumises à des règles de provisionnement technique et de représentation des provisions par les actifs équivalents analo-gues à celle des sociétés d’assurance et des institutions de prévoyance.

À la différence des SAM (Sociétés d’assurance mutuelle), qui per-çoivent des primes en rapport avec des risques, qu’elles gèrent cependant de façon plus mutualisante et solidariste que les compa-gnies traditionnelles, les mutuelles du Code la mutualité peuvent percevoir des cotisations proportionnelles aux revenus des adhérents, comme le font les mutuelles de fonctionnaires, ce qui est en assu-rance santé une habile manière de rompre avec la solidarité inter-générationnelle. Rien n’empêche non plus les mutuelles interprofessionnelles d’introduire des cotisations variables en fonction de l’âge, comme certaines le pratiquent compte tenu du contexte concurrentiel dans lequel elles vivent. À la différence également des SAM, elles interviennent dans le domaine de la protection sociale complémentaire, c’est-à-dire de la couverture des risques sociaux liés à la personne (maladie, maternité, incapacité, invalidité, dépen-dance, décès) qui s’ajoute à celle organisée par le régime de base obligatoire de la sécurité sociale. Certaines d’entre-elles (MGEN, LMDE) gèrent également le régime obligatoire pour le compte de la

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Sécurité sociale et sont rémunérées à ce titre par des « remises de gestion ».

Les groupements mutualistes versent également des rentes ou des capitaux correspondant aux risques accident, invalidité, vie-décès et vieillesse. Ce type de prestations ne peut être versé que par l’inter-médiaire d’une caisse autonome mutualiste, seul groupement mutua-liste habilité à gérer les risques à long terme. Ces caisses n’ont pas de personnalité juridique distincte de celle de la mutuelle fondatrice, mais tiennent une comptabilité complètement séparée.

Le terme de groupement utilisé pour désigner les mutuelles, les unions et fédérations rappelle leur appartenance à l’économie sociale aux côtés des associations et des coopératives. Les unités constituant ces familles juridiques sont des groupements de membres reposant sur un fonctionnement démocratique. Celui-ci implique la liberté d’adhésion et l’égalité des membres dans l’exercice de leur respon-sabilité pour le développement d’actions menées solidairement. Dans le cas des mutuelles, ce fonctionnement repose sur l’élection par l’Assemblée générale des membres d’un Conseil d’administration et d’une commission de contrôle, tous deux constitués de bénévoles choisis parmi les adhérents.

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Annexe 4. Présentation détaillée du statut des mutuelles régies par le Code des assurances

Ces groupes volontaires de personnes (physiques et morales) fonc-tionnent selon le principe de la solidarité entre membres, et tentent avant tout de répondre aux besoins de ceux-ci plutôt que d’obtenir un retour sur investissement. Leurs caractéristiques essentielles sont les suivantes :• un but non lucratif ; • des cotisations fixes ou variables, susceptibles de faire l’objet d’une

ristourne et, le cas échéant, d’un rappel de cotisation lorsqu’elles ont adopté la forme variable de celle-ci ;

• l’assurance des risques des seuls sociétaires qui sont à la fois individuellement les assurés et collectivement les assureurs ; une absence de capital social et donc de titres représentatifs ; un exercice démocratique du pouvoir (un homme, une voix), qui n’est donc pas lié au montant des apports de cotisation d’assurance.

Pour des raisons juridiques (champ d’application, règles prudentielles, souplesse de fonctionnement), les Sociétés d’assurance mutuelle (SAM) doivent néanmoins être distinguées des mutuelles régies par le Code de la mutualité, qui ont pour objet la prévoyance et la pro-tection sociale des personnes.

Contrairement aux sociétés anonymes, les mutuelles d’assurance sont des sociétés de personnes qui fonctionnent sans capital action (décret-loi de 1938), avec seulement un fonds d’établissement ayant la nature de fonds propres, car constitué le plus souvent à fonds perdus par les fondateurs et les sociétaires. Elles se diffé-

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rencient par là également des coopératives, qui remettent à leurs sociétaires des titres représentatifs de leur capital social. Conformément au Code des assurances, les Sociétés d’assurance mutuelle sont des sociétés civiles par nature soumises à un statut particulier. Les SAM ont également comme spécificité que les excédents non ristournés appartiennent à la collectivité indivise et intemporelle des sociétaires. C’est la raison pour laquelle, en cas de dissolution, l’excédent d’actif net est dévolu soit à d’autres sociétés d’assurance mutuelle, soit à des associations reconnues d’utilité publique. Enfin, il faut souligner le lien très fort de la relation juridique établie entre le sociétaire assuré et sa mutuelle, et les deux principes qui en découlent : • tout sociétaire doit pouvoir, directement ou indirectement, participer

aux instances dirigeantes de la société ;• chaque sociétaire dispose de droits égaux ; aucun traitement

préférentiel ne peut être accordé à un sociétaire, par exemple en fonction d’élément financier. La démocratie mutualiste repose sur les principes propres aux organismes de l’économie sociale, à savoir : « un homme, une voix ».

Le statut de la SAM a été assoupli en 2001 par la création de la SGAM (Société de groupement d’assurance mutuelle) afin de per-mettre à celles-ci de : • nouer et gérer des liens de solidarité financière importants et

durables avec d’autres entreprises du secteur mutualiste. Cette solidarité pourra résulter de la création d’un fonds de solidarité, de la capacité de la SGAM d’emprunter au profit des entreprises affiliées ou de cautionner des emprunts souscrits par ces mêmes entreprises ;

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• prendre et gérer des participations dans d’autres entreprises d’assu-rance ou de réassurance, qui sont par définition des sociétés de capitaux11.

Respectueuse des particularités de chaque affilié, la SGAM n’en réalise donc pas moins une intégration extrêmement poussée entre eux et dont le droit tire toutes les conséquences. Les autorités de la concurrence considèrent que la création d’une SGAM constitue une « fusion de fait » pour les besoins du contrôle des concentrations. En outre, la SGAM doit en principe établir des comptes combinés conformément à l’article L. 345-2 du Code des assurances.

Enfin, si les groupes capitalistes traditionnels connaissent depuis longtemps le régime de l’intégration fiscale, la possibilité pour les SGAM d’opter pour ce régime d’imposition n’a été reconnue que récemment. La définition de l’objet de la SGAM par le Code des assurances en fait potentiellement un instrument privilégié de crois-sance externe. De manière pragmatique, le Code des assurances indique en effet que la SGA, et donc la SGAM, a pour objet la prise et la gestion de participation dans d’autres entreprises d’assurance ou de réassurance. Enfin, la SGAM peut jouer un rôle important de financement du groupe. Les SGAM peuvent en effet procéder à des émissions obligataires, et notamment de dette subordonnée, ou se porter caution de telles émissions par les affiliés, afin de renforcer leur solvabilité.

11 Les liens entre la SGAM et les affiliés sont définis par des conventions d’affiliation qui matérialisent les obligations financières et politiques de chaque affilié envers les autres et envers la SGAM et qui déterminent le contrôle et qui matérialise le transfert de pouvoirs de gestion à la SGAM. La conclusion d’une convention d’affiliation à la SGAM fait l’objet d’une déclaration préalable auprès de l’Autorité de Contrôle Prudentiel. Il en est de même en matière de résiliation de ladite convention ou d’exclusion prononcée à titre de sanction. Dans ces deux cas, l’Autorité peut s’opposer à l’opération si elle lui apparaît contraire aux intérêts des assurés.

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De la même manière, pour les mutuelles et les Institutions de Prévoyance, les UMG et les GPP sont des structures permettant la combinaison de mutuelles et d’IP.

Annexe 5 : La démutualisation

Le mouvement de démutualisation a commencé dans les pays anglo-saxons à la fin du siècle dernier.

Lorsque le mouvement de baisse des taux d’intérêt s’est amorcé, d’importantes mutuelles Vie qui avaient vendu des contrats offrant des taux garantis pour des périodes longues sans avoir, volontairement ou involontairement, investi dans des actifs de duration correspondante ont été confrontées à une insuffisance de marge. Pour pallier ce défaut, elles ont en réaction accru le profil de risque de leur portefeuille d’investissements en augmentant la part de l’immobilier, des actions et des obligations à haut rendement. A la première crise, elles se sont retrouvées avec des moins-values sur leurs actifs en sus de leur problème de passif.

En raison de leur insuffisance de marge de solvabilité et de couverture des passifs par les actifs, le régulateur leur a demandé de reconstituer leur marge de solvabilité. Les solutions traditionnelles étaient le rappel de cotisations ou la fusion avec une autre mutuelle. Elles se sont avérées impossibles. La taille des sociétés et l’opacité du déficit ren-daient l’exercice périlleux. De surcroît les autres mutuelles n’étaient pas désireuses de prendre un risque alors que la disparition d’un concurrent leur offrait une voie de croissance organique plus sûre.

Le législateur s’est alors préoccupé de trouver une troisième voie en donnant aux sociétés mutuelles la possibilité de changer de statut

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et ainsi d’accéder au marché des capitaux. L’expérience a montré qu’il ne s’agissait pas d’une panacée. Faute d’expérience, le corpus législatif était imprécis bien que complexe. Le processus s’en est trouvé allongé alors que l’état des mutuelles requérait des mesures correctives rapides.

Il est intéressant de noter deux éléments pouvant faciliter l’opération et en réduire le délai. Alors que dans le cas d’une fusion entre mutuelles, le régulateur a « seulement » à se préoccuper de la viabilité du nouvel ensemble, qui devra honorer les engagements des deux entités fusionnant, dans le cas d’une démutualisation, il doit également veiller à ce que les intérêts « capitalistiques » des mutualistes soient protégés, à savoir que leur contribution écono-mique au nouvel ensemble soit justement représentée. C’est un rôle auquel le régulateur n’est pas préparé. Un corpus législatif très détaillé sans être administratif sera au final un progrès dans la mesure où établissant un cahier des charges précis il encadrera la respon-sabilité du régulateur.

Les investisseurs sont légitimement préoccupés que les mêmes erreurs ne se reproduisent pas. L’intervention d’une société capitalistique du secteur comme actionnaire de référence tend à les rassurer par l’apport de l’expertise et des ressources managériales en sus de l’injection de capital. Les droits et devoirs de cet investisseur de référence pourraient être utilement précisés dans la loi de démutualisation.

La démutualisation est donc une corde supplémentaire à l’arc des solutions pour une mutuelle en difficulté. Que le corpus législatif et réglementaire en la prévoyant ait ménagé cette possibilité, a en l’occurrence efficacement protégé les assurés dans d’autres pays que la France.

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Il convient toutefois de mentionner que les expériences de dému-tualisation concernent essentiellement des exemples étrangers. En France, les mécanismes de solidarité financière interne des groupes mutualistes actionnés par les organes centraux ont permis d’éviter les processus de démutualisation dans le domaine bancaire. Par ailleurs, dans le domaine des assurances, des dispositions législatives font obstacle au principe même de la démutualisation.

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L’Institut Montaigne remercie particulièrement les personnes sui-vantes pour leur contribution. Celle-ci est le résultat de leur inves-tissement personnel et n’engage en rien leur entreprise ou institution de rattachement.

Membres du groupe de travail

• Thierry Martel, directeur général, Groupama, co-président du groupe de travail

• Michel Mathieu, directeur général délégué, Crédit Agricole SA, co-président du groupe de travail

• Renaud Arzel, directeur des affaires générales, AXA France

• André Bernay, inspecteur des affaires sociales, ancien commissaire-contrôleur des assurances

• Arnaud Blandin, directeur de la Planification Stratégique & du Pilotage Stratégique des Métiers, BPCE

• Julien Collin, Direction de la Stratégie, Crédit Agricole SA

• Sébastien Declercq, président, AT Kearney France

• Lucile Desmoulins, maître de conférences en Sciences de l’infor-mation et de la communication, Université Paris-Est-Marne la Vallée

• Christophe Dupont-Madinier, administrateur, AXA Belgique

• Julien Fontaine, directeur de la stratégie, CASA

• Thomas Fournier d’Hennezel, directeur des études économiques, COVEA

• Bethy Alexandra Galian, directrice juridique et Conformité, MACIF

REMERCIEMENTS

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• Jean-Luc Garde, directeur des activités mutualistes, Malakoff-Médéric

• Philippe Giraudel, directeur juridique, Groupama

• Julien Guez, directeur Stratégie, Marketing et Affaires publiques, Malakoff-Médéric

• Marcel Kahn, alors directeur général, MACSF

• Anne-Françoise Marzio, DRH, Crédit Agricole SA

• Virginie Le Mée, direction des risques et du contrôle interne, MACSF

• Othman Omary, alors directeur, AT Kearney France, co-rapporteur du groupe de travail

• Céline Ringot, responsable analyse marches et coordination bancaire, La Banque postale

• Dominique Salvy, directeur de l’international, COVEA

• Guillaume Sarkozy, délégué général, Malakoff-Médéric

• Ravi-François Thillier, alors directeur AT Kearney France, co-rapporteur du groupe de travail

Personnalités auditionnées

• Patrick Amis, directeur en charge des établissements mutualistes à l’ACP

• Gérard Andreck, président, MACIF

• Philippe Brassac, secrétaire général de la Fédération Nationale du Crédit Agricole

• Charles de Courson, député, président de la Caisse Mutuelle Marnaise d’Assurance

• Stéphane Dedeyan, directeur général de Generali

R E M E R C I E M E N T S

9 5

• Jean Yves Grall, directeur général de la Santé, Ministère des Affaires Sociales et de la Santé

• Claude Le Pen, professeur à l’Université Paris-Dauphine

• Jérôme Sadier, alors chef de cabinet de Benoît Hamon

• Philippe Trainar, président de la Commission d’analyse des risques de la FFSA et Chief risk officer de la SCOR

• Hilde Vernaillen, présidente de l’AMICE

• Michel Yahiel, conseiller social du président de la République

Les opinions exprimées dans le présent rapport n’engagent ni les personnes citées, ni les institutions qu’elles représentent.

9 7

• Prévention des maladies psychiatriques : pour en finir avec le retard français (octobre 2014)

• Temps de travail : mettre fin aux blocages (octobre 2014)• Réforme de la formation professionnelle : entre avancées,

occasions manquées et pari financier (septembre 2014)• Dix ans de politiques de diversité : quel bilan ?

(septembre 2014)• Et la confiance, bordel ? (août 2014)• Gaz de schiste : comment avancer (juillet 2014)• Pour une véritable politique publique du renseignement

(juillet 2014)• Emploi : le temps des (vraies) réformes ? Propositions pour la

conférence sociale de juillet 2014 (juillet 2014)• Rester le leader mondial du tourisme, un enjeu vital pour la

France (juin 2014)• Pour une fonction publique audacieuse et « Business friendly »

(avril 2014)• Passion française. Les voix des cités (avril 2014)• Alléger le coût du travail pour augmenter l’emploi : les clés de

la réussite (mars 2014)• 1 151 milliards d’euros de dépenses publiques :

quels résultats ? (février 2014)• Une nouvelle ambition pour l’apprentissage : dix propositions

concrètes (janvier 2014)• Comment renforcer l’Europe politique (janvier 2014)• Améliorer l’équité et l’efficacité de l’assurance chômage

(décembre 2013)

LES PUBLICATIONS

DE L’INSTITUT MONTAIGNE

C O N C I L I E R D É M O C R AT I E E T E F F I C A C I T É É C O N O M I Q U E : L’ E X E M P L E M U T U A L I S T E

9 8

• Santé : faire le pari de l’innovation (décembre 2013)• Afrique-France : mettre en œuvre le co-développement

Contribution au XXVIe sommet Afrique-France (décembre 2013)• Chômage : inverser la courbe (octobre 2013)• Mettre la fiscalité au service de la croissance (septembre 2013)• Vive le long terme ! Les entreprises familiales au service de la

croissance et de l’emploi (septembre 2013)• Habitat : pour une transition énergétique ambitieuse

(septembre 2013)• Commerce extérieur : refuser le déclin

Propositions pour renforcer notre présence dans les échanges internationaux (juillet 2013)

• Pour des logements sobres en consommation d’énergie (juillet 2013)

• 10 propositions pour refonder le patronat (juin 2013)• Accès aux soins : en finir avec la fracture territoriale (mai 2013)• Nouvelle réglementation européenne des agences de notation :

quels bénéfices attendre ? (avril 2013)• Remettre la formation professionnelle au service de l’emploi et

de la compétitivité (mars 2013)• Faire vivre la promesse laïque (mars 2013)• Pour un « New Deal » numérique (février 2013)• Intérêt général : que peut l’entreprise ? (janvier 2013)• Redonner sens et efficacité à la dépense publique

15 propositions pour 60 milliards d’économies (décembre 2012)

• Les juges et l’économie : une défiance française ? (décembre 2012)

• Restaurer la compétitivité de l’économie française (novembre 2012)

• Faire de la transition énergétique un levier de compétitivité (novembre 2012)

L E S P U B L I C A T I O N S D E L ’ I N S T I T U T M O N T A I G N E

9 9

• Réformer la mise en examen Un impératif pour renforcer l’État de droit (novembre 2012)

• Transport de voyageurs : comment réformer un modèle à bout de souffle ? (novembre 2012)

• Comment concilier régulation financière et croissance : 20 propositions (novembre 2012)

• Taxe professionnelle et finances locales : premier pas vers une réforme globale ? (septembre 2012)

• Remettre la notation financière à sa juste place (juillet 2012)• Réformer par temps de crise (mai 2012)• Insatisfaction au travail : sortir de l’exception française

(avril 2012)• Vademecum 2007 – 2012 : Objectif Croissance (mars 2012)• Financement des entreprises : propositions pour la présiden-

tielle (mars 2012)• Une fiscalité au service de la « social compétitivité »

(mars 2012)• La France au miroir de l’Italie (février 2012) • Pour des réseaux électriques intelligents (février 2012)• Un CDI pour tous (novembre 2011)• Repenser la politique familiale (octobre 2011)• Formation professionnelle : pour en finir avec les réformes

inabouties (octobre 2011)• Banlieue de la République (septembre 2011)• De la naissance à la croissance : comment développer nos PME

(juin 2011)• Reconstruire le dialogue social (juin 2011)• Adapter la formation des ingénieurs à la mondialisation

(février 2011)• « Vous avez le droit de garder le silence… »

Comment réformer la garde à vue (décembre 2010)

C O N C I L I E R D É M O C R AT I E E T E F F I C A C I T É É C O N O M I Q U E : L’ E X E M P L E M U T U A L I S T E

1 0 0

• Gone for Good? Partis pour de bon ? Les expatriés de l’enseignement supérieur français aux États-Unis (novembre 2010)

• 15 propositions pour l’emploi des jeunes et des seniors (septembre 2010)

• Afrique - France. Réinventer le co-développement (juin 2010)• Vaincre l’échec à l’école primaire (avril 2010)• Pour un Eurobond. Une stratégie coordonnée pour sortir de la

crise (février 2010)• Réforme des retraites : vers un big-bang ? (mai 2009)• Mesurer la qualité des soins (février 2009)• Ouvrir la politique à la diversité (janvier 2009)• Engager le citoyen dans la vie associative (novembre 2008)• Comment rendre la prison (enfin) utile (septembre 2008)• Infrastructures de transport : lesquelles bâtir, comment

les choisir ? (juillet 2008)• HLM, parc privé

Deux pistes pour que tous aient un toit (juin 2008)• Comment communiquer la réforme (mai 2008) • Après le Japon, la France…

Faire du vieillissement un moteur de croissance (décembre 2007)

• Au nom de l’Islam… Quel dialogue avec les minorités musulmanes en Europe ? (septembre 2007)

• L’exemple inattendu des Vets Comment ressusciter un système public de santé (juin 2007)

• Vademecum 2007-2012 Moderniser la France (mai 2007)

• Après Erasmus, Amicus Pour un service civique universel européen (avril 2007)

L E S P U B L I C A T I O N S D E L ’ I N S T I T U T M O N T A I G N E

1 0 1

• Quelle politique de l’énergie pour l’Union européenne ? (mars 2007)

• Sortir de l’immobilité sociale à la française (novembre 2006)• Avoir des leaders dans la compétition universitaire mondiale

(octobre 2006)• Comment sauver la presse quotidienne d’information

(août 2006)• Pourquoi nos PME ne grandissent pas (juillet 2006)• Mondialisation : réconcilier la France avec la compétitivité

(juin 2006)• TVA, CSG, IR, cotisations…

Comment financer la protection sociale (mai 2006)• Pauvreté, exclusion : ce que peut faire l’entreprise

(février 2006)• Ouvrir les grandes écoles à la diversité (janvier 2006)• Immobilier de l’État : quoi vendre, pourquoi, comment

(décembre 2005)• 15 pistes (parmi d’autres…) pour moderniser la sphère

publique (novembre 2005)• Ambition pour l’agriculture, libertés pour les agriculteurs

(juillet 2005)• Hôpital : le modèle invisible (juin 2005)• Un Contrôleur général pour les Finances publiques

(février 2005)• Les oubliés de l’égalité des chances

(janvier 2004 - Réédition septembre 2005)

Pour les publications antérieures se référer à notre site internet : www.institutmontaigne.org

3i FranceAdminext

Aegis Media FranceAffaires Publiques Consultants

Air France - KLMAllen&Overy

AllianzAreva

Association PasserelleAT Kearney

August & Debouzy AvocatsAXA

Baker & McKenzieBearingPoint

BNI France et BelgiqueBNP Paribas

BolloréBouygues

BPCECaisse des Dépôts

Cap GeminiCarbonnier Lamaze & Rasle

CarrefourCGI France

CiscoCNP Assurances

La Compagnie financière Edmond de RothschildCrédit Agricole

CremoniniDavis Polk & Wardwell

De Pardieu Brocas MaffeiDevelopment Institute International

EADSEDF

Egon Zehnder InternationalEurazeoEurostar

France TelecomGDF SUEZ

Générale de SantéGroupama

Hamer & CieHenner

HSBC FranceIBM

International SOSISRPJalma

Jeantet AssociésKPMG SA

Kurt SalmonLa Banque Postale

Lazard Frères Linedata Services

LIRLVMHM6

S o u t i e n n e n t l ’ i n S t i t u t M o n t a i g n e

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Kurt SalmonLa Banque Postale

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S o u t i e n n e n t l ’ i n S t i t u t M o n t a i g n e

MACSFMalakoff Médéric

MazarsMcKinsey & Company Média Participations

Mercer Michel Tudel & Associés

Microsoft FranceNgo Cohen Amir-Aslani & Associés

OBEAOndra PartnersPAI Partners

Pierre & VacancesPriceWaterhouseCoopers

RadiallRaise

Rallye - CasinoRandstad

RATPRBS France

RedexRéseau Ferré de France

REXELRicol, Lasteyrie & Associés

Roland Berger Strategy ConsultantsRothschild & Cie

RTESanofi aventis

SantéclairSchneider Electric Industries SA

Servier MondeSFR

Sia PartnersSiaci Saint Honoré

SNCFSodexo

Sorin GroupStallergènes

Suez EnvironnementTecnet Participations

The Boston Consulting GroupTilderTotal

VallourecVediciVeolia Vinci

VivendiVoyageurs du monde

Wendel WordAppeal

S o u t i e n n e n t l ’ i n S t i t u t M o n t a i g n e

Imprimé en FranceDépôt légal : décembre 2014

ISSN : 1771-6756Achevé d’imprimer en décembre 2014

COMITÉ DIRECTEUR

Claude Bébéar PrésidentHenri Lachmann Vice-président et trésorier

Emmanuelle Barbara, Managing partner, August & Debouzy AvocatsNicolas Baverez avocat Gibson Dunn & CrutcherJacques Bentz Président, Tecnet ParticipationsMireille Faugère Conseiller Maître, Cour des comptesChristian Forestier, Ancien recteurMarwan Lahoud, Directeur général délégué, Airbus GroupNatalie Rastoin Directrice générale, Ogilvy FranceJean-Paul Tran Thiet Avocat associé, White & CaseArnaud Vaissié PDG, Président-directeur général, International SOS Philippe Wahl Président-directeur général, Groupe La PosteLionel Zinsou Président, PAI partners

PRÉSIDENT D’HONNEUR

Bernard de La Rochefoucauld Président, Les Parcs et Jardins de France

CONSEIL D’ORIENTATION

PRÉSIDENT

Ezra Suleiman Professeur, Princeton University

Benoit d’Angelin, président d’Ondra PartnersFrank Bournois Co-Directeur du CIFFOPPierre Cahuc Professeur d’économie, École PolytechniqueLoraine Donnedieu de Vabres Avocate, associée gérante, JeantetAssociésPierre Godé Vice-président, Groupe LVMHMichel Godet Professeur, CnamFrançoise Holder, Administrateur, Groupe HolderPhilippe Josse Conseiller d’ÉtatMarianne Laigneau Directrice des ressources humaines, EDFSophie Pedder Correspondante à Paris, The EconomistHélène Rey Professeur d’économie, London Business School

Laurent Bigorgne Directeur

I L N ’ E S T D É S I R P L U S N A T U R E L Q U E L E D É S I R D E C O N N A I S S A N C E

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Concilier démocratie et efficacité économique : l’exemple mutualisteModèle économique original, sans but lucratif et sans actionnaire, le mutualisme fonctionne depuis deux siècles autour d’un mode de gouvernance fondé sur le principe « un homme – une voix » et constitue aujourd’hui une voie complémentaire aux sociétés anonymes. Au-delà de l’attachement à un corpus de valeurs commun structuré par le sociétariat et porté par une vision de long terme, le mutualisme se caractérise par une très grande diversité des statuts juridiques et des secteurs d’activité qu’il recouvre (santé, assurance banque, grande distribution, production agricole…).

Ce rapport Concilier efficacité économique et démocratie : l’exemple mutualiste s’est attaché aux secteurs de la banque et de l’assurance afin d’en analyser les indiscutables réussites et de formuler 17 propositions en matière de communication, de financement et de gouvernance, afin d’en pérenniser l’efficacité.

Institut Montaigne 59, rue La Boétie - 75008 Paris

Tél. +33 (0)1 53 89 05 60 - Fax +33 (0)1 53 89 05 61 www.institutmontaigne.org - www.desideespourdemain.fr

10 ISSN 1771- 6764Décembre 2014