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    ParAlhousseini MOULOUL

    Docteur en Droit

    COMPRENDRE LORGANISATION

    POUR LHARMONISATION ENAFRIQUE DU DROIT DES AFFAIRES

    (O.H.A.D.A.)2

    meEdition

    Dcembre 2008

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    DEDICACE

    A la mmoire du Prsident Kba MBAYE,

    ce grand architecte de lintgration juridique africaine.

    La mondialisation de lconomie exige lharmonisation des droits et des

    pratiques du droit . LOHADA est la fois facteur de dveloppement

    conomique et moteur de lintgration rgionale .

    M. Aregba Polo

    Secrtaire Permanent de lOHADA(Expos au Sminaire de sensibilisation au droit harmonis

    Niamey les 9 et 10 Juin 1999)

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    SOMMAIRE

    INTRODUCTION ................................................................................................................................. 5

    A- LA GENESE DE LOHADA : ...................................................................................... 6I- Les raisons de la cration de lOHADA .................................................................. 7

    1-Ltat des lgislations africaines post-coloniales .......................................... 72-Linscurit juridique et judiciaire ................................................................ 83-Les avantages de lintgration juridique ..................................................... 10

    a- Les avantages lis un espace conomique juridiquement intgr ...... 10b- Le droit, outil technique de lintgration conomique .......................... 12

    II- Les atouts en faveur de lharmonisation juridique ............................................... 14III- Le processus ayant conduit la naissance de lOHADA ................................... 16

    B- LE TRAITE PORTANT CREATION DE LOHADA : .......................................... 19I- Les objectifs de lOHADA .................................................................................... 20II- Les Etats membres ............................................................................................... 21III- Lentre en vigueur du Trait portant cration de lOHADA ............................ 22IV-Le choix de la technique dintgration ................................................................ 23

    1- Loption pour luniformisation ................................................................... 232- La prparation et ladoption des A. U. ....................................................... 25

    V- Caractres des instruments juridiques de lOHADA ........................................... 27

    C- LES INSTITUTIONS DE LOHADA : ..................................................................... 29I- La Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement .......................................... 30II- Le Conseil des Ministres ...................................................................................... 31

    1-Composition du Conseil des Ministres ....................................................... 312-Fonctionnement du Conseil des Ministres .................................................. 323-Attributions du Conseil des Ministres......................................................... 33

    III- Le Secrtariat Permanent .................................................................................... 341-Organisation du Secrtariat Permanent ....................................................... 342-Attributions du Secrtaire Permanent ......................................................... 35

    IV- La Cour Commune de Justice et dArbitrage (CCJA) ....................................... 361-Composition de la CCJA ............................................................................ 372-Comptences de la CCJA ............................................................................ 39

    a- Les fonctions judiciaires ........................................................................ 39b- Le rle de la CCJA dans une procdure darbitrage ............................. 43

    V- LEcole Rgionale Suprieure de la Magistrature (ERSUMA) .......................... 46

    D- LE FINANCEMENT DE LOHADA : ...................................................................... 47

    CONCLUSION .................................................................................................................. 50

    BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................ 53

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    SIGLES ET ABREVIATIONS

    Al. Alina

    Art. ArticleA.U. Actes Uniformes

    AU/DA Acte Uniforme sur le Droit de lArbitrage

    AU/DSC/GIE Acte Uniforme relatif au Droit des Socits Commerciales et du GIE

    AU/DCG Acte Uniforme sur le Droit Commercial Gnral

    AU/DS Acte Uniforme relatif au Droit des Srets

    AU/PCAP Acte Uniforme sur les Procdures Collectives dApurement du Passif

    AU/PSR/VE Acte Uniforme sur les Procdures Simplifies de Recouvrement et les

    Voies dExcution

    BAD Banque Africaine de Dveloppement

    BAMREL Bureau Africain et Mauricien de Recherches et dEtudes lgislatives

    CCJA Cour Commune de Justice et dArbitrage

    CEA Communaut Economique Africaine

    CEAO Communaut Economique de lAfrique de lOuest

    CEDEAO Communaut Economique des Etats de lAfrique de lOuest

    CEE Communaut Economique Europenne

    CEMAC Communaut Economique et Montaire de lAfrique Centrale

    CER Communaut Economique Rgionale

    CIMA Confrence Interafricaine des Marchs dAssurances

    CIPRES Confrence Interafricaine de Prvoyance Sociale

    C.M Conseil des Ministres

    ERSUMA Ecole Rgionale Suprieure de la Magistrature

    F CFA Franc de la Communaut Financire Africaine

    GEPGL Communaut Economique des Pays des Grands Lacs

    GIE Groupement dIntrt Economique

    G.P Gazette du Palais

    JAE Jeune Afrique Economie

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    J.O.R.N. Journal Officiel de la Rpublique du Niger

    OCAM Organisation Commune Africaine et Malgache

    OHADA Organisation pour lHarmonisation en Afrique du Droit des Affaires

    OUA Organisation de lUnit Africaine

    PAL Plan dAction de Lagos

    PNUD Programme des Nations Unies pour le Dveloppement

    PRN Prsidence de la Rpublique du Niger

    RA Rglement dArbitrage

    R.C.A. Rpublique Centre Africaine

    Rev. Revue

    RIDC Revue Internationale de Droit ComparU.A.M. Union Africaine et Mauricienne

    U.E. Union Europenne

    UEMOA Union Economique et Montaire de lAfrique de lOuest.

    UDEAC Union Economique et Douanire de lAfrique Centrale

    U.M.A Union du Maghreb Arabe

    UNIDA Association pour lUnification du Droit en Afrique

    ZLE Zone de Libre Echange

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    INTRODUCTION

    Depuis plus dune dcennie, les relations internationales sont marques par la

    mondialisation, ou globalisation des changes, qui se traduit par la construction despaces

    conomiques au sein desquels les frontires gographiques, vestiges de souverainets

    dcadentes, nont quune signification politique. La construction de ces espaces

    conomiques qui consacrent, le plus souvent, lintgration conomique des Etats membres,

    vise souvent, dune part, la promotion du dveloppement conomique et social, dautre

    part, celle de linvestissement priv en rendant les marchs plus attractifs et les entreprises

    nationales ou communautaires plus comptitives. A lheure de la mondialisation delconomie, lorsque les principaux pays du monde se regroupent pour constituer des

    unions conomiques et le cas chant montaires -, il tait impratif, pour tous les pays

    concerns, dadopter un mme droit des affaires moderne, rellement adapt aux besoins

    conomiques, clair, simple, scurisant les relations et les oprations conomiques 1. Il

    sen suit un phnomne de mondialisation du droit qui se traduit par :

    - un affaiblissement de la souverainet des Etats par suite du renforcement des facilitsdtablissement, de circulation des personnes, des biens, des services et des facteurs de

    production ;

    - une concordance plus ou moins grande et nette des rgimes juridiques applicables aux

    activits conomiques, quel que soit le lieu de leur accomplissement ;

    - un ensemble de droits et dobligations communs tous les acteurs conomiques o quils

    exercent leurs activits (Code de conduite des entreprises) ;

    - une tendance trs nette et constante la dnationalisation du rglement des conflits de

    nature conomique (arbitrage et procdures non juridictionnelles 2).

    Les Etats africains ne sauraient rester en marge de ce processus ; cest pourquoi des

    organisations ont t cres3, avec comme objectifs de raliser dabord lintgration

    1 Jean PAILLUSSEAU, Le droit de lOHADA. Un droit trs important et original , La Semaine

    Juridique n 44 du 28 octobre 2004, Supplment no 5, pp 1 5.2 Joseph ISSA-SAYEGH, Jacqueline LOHOUES-OBLE, OHADA Harmonisation du droit des affaires,Ed. BRUYLANT JURISCOPE, 2002, p. 5 et 6.3 LUMA ; la CEDEAO et lUEMOA pour lAfrique de lOuest ; la GEPGL et la CEMAC pour lAfriqueCentrale, etc.

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    conomique, aux niveaux sous-rgional et rgional, ensuite lavnement de la

    Communaut Economique Africaine (CEA) et lUnion Africaine (U. A.).

    Certaines de ces organisations ont eu une existence phmre pour navoir pas dispos de

    ressources humaines et financires consquentes, dautres survivent sous perfusion de la

    Communaut internationale, car les Etats membres sont souvent, eux-mmes, confronts

    des difficults financires qui se traduisent par des appels aux institutions de Breton

    Wood.

    Les Communauts Economiques Rgionales (CER) sont les socles sur lesquels devra

    reposer lintgration conomique du continent africain ; mais il est apparu que dans la

    plupart des cas, les CER ne placent pas lintgration juridique des Etats membres au rang

    des priorits alors que le droit, comme on le verra, est linstrument par lequel se raliseralintgration conomique. Les Traits fondateurs de quelques rares CER ont prvu les

    instruments de lintgration juridique, mais dans la grande majorit des cas celle-ci na pas

    connu les succs escompts. Finalement, lintgration juridique, qui devrait servir de

    locomotive lintgration conomique du continent africain, ne saurait se raliser travers

    lesdites CER. Cela explique, pour partie, que des Etats Africains aient initi des processus

    dintgration de certains pans du droit4 qui ne tiennent pas compte des espaces

    gographiques et conomiques ; ces expriences ont souvent donn satisfaction aux Etats

    parties. Cest dans ce contexte que lexprience duniformisation du droit des affaires des

    Etats africains a t lance travers lOrganisation pour lHarmonisation en Afrique du

    Droit des Affaires (OHADA).

    A- LA GENESE DE LOHADA5

    :

    LOHADA nest pas ne de la seule initiative des seuls Chefs dEtat africains de la Zone

    Franc ; elle est aussi et surtout une ide, voire une exigence, des oprateurs conomiques

    africains qui revendiquent lamlioration de lenvironnement juridique et judiciaire des

    entreprises afin de scuriser leurs investissements. En effet, devant le ralentissement des

    investissements conscutif la rcession conomique et linscurit juridique et

    4

    Droit du Travail, droit des assurances, droit bancaire, droit de la proprit intellectuelle, etc.5 Sur ce processus, voir Alhousseini MOULOUL, Le rgime juridique des socits commerciales danslespace OHADA : lexemple du Niger, Thse de Doctorat (Universit de Paris I Panthon Sorbonne),LGDJ EJA, mars 2005, pp13 20.

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    judiciaire qui svissaient dans cette rgion partir des annes 1980, il sagissait de

    redonner confiance aux investisseurs, tant nationaux qutrangers, afin de favoriser le

    dveloppement de lesprit dentreprise et attirer les investissements extrieurs.

    I- Les raisons de la cration de lOHADA :

    Outre lenvironnement conomique international qui limpose, plusieurs raisons sont

    gnralement voques pour justifier la cration de lOHADA. En effet la diversit qui

    caractrise les lgislations africaines est un handicap pour la cration dun espace

    conomique intgr, dune part, et, dautre part, cette diversit est accompagne dune

    inscurit juridique et judiciaire, consquence de la vtust et de la caducit des

    lgislations applicables, qui dcourage les investisseurs privs. Enfin, lintgration

    juridique prsente plusieurs avantages car elle permet au continent africain de sinsrerdans les circuits des changes internationaux.

    1- Ltat des lgislations africaines post-coloniales :

    Le droit hrit de la colonisation est souvent balkanis, variable dun Territoire un autre,

    en raison de la rgle de la spcialit lgislative en vertu de laquelle toute la lgislation

    coloniale ntait pas applicable ; son application aux colonies ncessite une extension

    spciale faite par dcrets. En effet, dans les anciennes colonies franaises le droit

    commercial applicable tait souvent celui du Code de commerce Franais de 1807 et les

    textes subsquents rendus applicables aux colonies ; le rgime gnral des socits tait

    rgi par le Code civil Franais de 1804, les Socits Anonymes et les SARL taient rgies,

    respectivement, par les lois franaises du 24 juillet 1867 et du 7 mars 1925 ; pour

    complter, adapter ou prciser ces textes de base, dautres textes ont t labors par le

    colonisateur pour tre appliqus dans les colonies6. Il rsulte de cette lgislation coloniale

    une certaine harmonisation juridique dans les colonies concernes. Cependant, cette

    pseudo - harmonisation ne concerne que ces colonies. Dans les premires dcennies qui

    ont suivi les indpendances, chaque Etat a lgifr dans les domaines quil estime

    prioritaires7, suivant maladroitement les adaptations et les modernisations ralises en

    France, avec comme consquence laccentuation de la balkanisation juridique du

    6 Voir Joseph ISSA SAYEGH, Jacqueline LOHOUES OBLE, OHADA Harmonisation du droit desaffaires, op cit, n 87, note n 7.7 Voir Joseph ISSA SAYEGH, Jacqueline LOHOUES OBLE, OHADA Harmonisation du droit desaffaires, op cit, n 87, notes 4 et 5.

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    continent. Finalement, la lgislation applique dans les Etats nouvellement indpendants

    est devenue caduque en raison de son inadaptation aux ralits socio-conomiques

    actuelles et les investisseurs se heurtaient dans chaque pays un droit disparate, confus

    et surann 8. Me Kba MBAYE crivait : le droit se prsente dans les quatorze (14)

    pays de la zone franc en habit darlequin fait de pices et de morceaux. Outre cette

    diversit des textes, lon note galement leur inadaptation au contexte conomique

    actuel 9 ; il ajoute aussi que beaucoup dinvestissements ne sont concevables que sur un

    plan inter - tatique . En effet la mondialisation des relations conomiques impose

    dsormais la constitution despaces conomiques intgrs ayant des cadres juridiques

    harmoniss. Cet environnement international va simposer en Afrique qui tente de

    rpondre aux nouveaux dfis en prnant lintgration conomique du continent traversdes Communauts Economiques Rgionales (CER) ; toutefois, lintgration conomique

    ne saurait se concevoir dans un espace caractris par la diversit juridique. Pour faire face

    ces dfis les Etats africains tentent, avec des succs souvent mitigs, des expriences

    dharmonisation juridique.

    2- Linscurit juridique et judiciaire :

    Me Kba MBAYE avait expos, loccasion du sminaire sur lOHADA, tenu Abidjan

    (Cte dIvoire) les 19 et 20 avril 1993, plusieurs raisons qui militent en faveur dune

    harmonisation ; il dclarait, entre autres, que lmiettement de notre droit commun est un

    facteur ngatif de notre progrs qui ne peut tre que commun , dune part, au plan

    national des textes sont promulgus alors que dautres, dans le mme domaine, ne sont pas

    abrogs. Il en rsulte des chevauchements et les oprateurs conomiques restent dans

    lincertitude de la rgle de droit applicable ; cette inscurit juridique est un trs srieux

    handicap pour linvestissement . En sa qualit de Prsident de la Mission ayant prpar

    lavnement de lOHADA, Me Kba MBAYE a effectu plusieurs missions dtudes

    dans les Etats membres ; loccasion du sminaire dAbidjan, il expose son constat en ces

    termes : Tout le monde est daccord sur la ncessit de procder lharmonisation. En

    8 Boris MARTOR et Sbastien THOUVENOT, Luniformisation du droit des affaires en Afrique par

    lOHADA , La Semaine Juridique n 44 du 28 octobre 2004, Supplment n 5, pp 5 11.9 In synthse des travaux du sminaire sur lharmonisation du droit des affaires dans les Etats africains dela zone franc. P. 14 et 15. Abidjan du 19 au 20/04/1993 ; propos de la ncessit de lharmonisation, voir

    aussi : Joseph ISSA SAYEGH lintgration juridique des Etats africains de la Zone Franc, RevuePenant n823 Janvier Avril 1997, p. 5 et suiv.

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    effet, tout le monde est daccord que le droit en vigueur nest plus adapt, que les rgles

    varient dun pays un autre, quil y a une incertitude indniable dans le corpus juridique

    de chaque Etat, quune inscurit judiciaire, due notamment la formation insuffisamment

    spcialise des magistrats, labsence de systme de formation continue, des questions

    de dontologie, lindigence de linformation juridique, la totale insuffisance de moyens

    mis la disposition des services judiciaires et bien dautres causes 10. Analysant la

    rglementation applicable au droit des socits dans les pays africains de la Zone Franc,

    Martin KIRSCH crivait son tour que : le constat unanime de la situation pouvait se

    rsumer par la formule suivante : inscurit juridique et judiciaire 11.

    Inscurit juridique car nombre de textes applicables au droit des affaires sont vtustes ;

    pour la plupart ils datent de la priode coloniale et souvent les oprateurs conomiques,comme les praticiens du droit, ont souvent des difficults pour connatre la rgle de droit

    applicable12. Il en rsulte une inscurit juridique dfinie par Philippe TIGER comme tant

    la situation dincertitude dans laquelle peut se trouver un oprateur conomique sur

    lissue dune ventuelle procdure laquelle il pourrait tre partie, et son impuissance

    inflchir le cours de la justice dans le sens de lquit si besoin tait 13. Cette situation

    cre une inscurit juridique handicapante pour les investissements.

    Linscurit judiciaire, quant elle, est la consquence de linsuffisance de la formation

    des magistrats et des auxiliaires de justice, notamment en matire conomique et

    financire, dune part, et, dautre part, de la modicit des moyens humains et matriels

    dont sont gnralement dotes les juridictions. Comme lcrit Philippe TIGER, elle se

    manifeste de faons trs diverses : dcisions contestables, dcisions en dlibr depuis

    plusieurs annes, excutions impossibles, ngligences diverses, mconnaissance des rgles

    de dontologie, accueil des moyens dilatoires les plus vidents et renvois rptition qui

    finissent par dcourager les demandeurs de bonne foi14 . Cette situation entrane deux

    consquences immdiates invitables : une jurisprudence instable et alatoire, et des

    10 In synthse des travaux du sminaire dAbidjan, p. 18.11 M. Kirsch Historique de lOHADA , Revue Penant n spcial OHADA n 827 mai Aot 1998 pp.129.12

    Sur la lgislation applicable au droit des affaires dans les Etats africains francophones au moment desindpendances, voir : Georges MEISSONNIER et Jean Claude GAUTRON, Analyse de la lgislationafricaine en matire de droit des socits RJPIC 1976 n 3 pp. 331.13 Philippe TGER, Que sais-je ? Le droit des affaires en Afrique OHADA . Ed. PUF, nov. 1999 P. 2.14 Philippe TIGER, op. cit. p. 24.

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    difficults dans lexcution des dcisions des juridictions. Elle entrane aussi comme

    consquence une perte de confiance dans le systme judiciaire des Etats africains et,

    subsquemment, la rticence des investisseurs.

    Le Ministre nigrien du Commerce et de lIndustrie dclarait, louverture du sminaire

    de sensibilisation au droit harmonis, organis Niamey le 09 juin 1998 : la scurit

    juridique et judiciaire est lune des conditions ncessaires pour instaurer de faon durable

    la confiance des investisseurs nationaux ou internationaux, dvelopper un secteur priv

    dynamique et promouvoir les changes commerciaux , dune part, et, dautre part, il ny

    a pas de dveloppement conomique et social durables sans un cadre juridique propice aux

    investissements 15.

    La situation qui vient dtre brivement dcrite nest pas propre aux seuls Etats africainsfrancophones, cest aussi celle qui prvaut sur lensemble du continent africain ; ds lors,

    lharmonisation juridique lchelle continentale devient inluctable.

    3- Les avantages de lintgration juridique16

    :

    Lharmonisation tant largement fonde, quels sont les avantages quelle prsente ? Ces

    avantages sont multiples : il sagit dabord des avantages quoffre un espace juridiquement

    intgr, ensuite, comme nous lavons dj voqu, lintgration juridique favorise

    lintgration conomique qui est la voie pour raliser lUnion Africaine. Ces avantages

    dterminent les Etats opter pour lintgration juridique.

    a- Les avantages lis un espace conomique juridiquement

    intgr :

    Sur le continent africain, en tant quelle vise lamlioration de lenvironnement juridique

    des entreprises, lharmonisation juridique doit tre perue comme tant un outil

    technique de lintgration conomique qui prsente plusieurs avantages17 :

    - la mise la disposition de chaque Etat, de textes juridiques simples ettechniquement performants, ce, quelles que soient ses ressources humaines ;

    - la facilitation des changes transfrontaliers et la cration des conditions de lalibre concurrence ;

    15 Le Sahel, n 5565 du Mercredi 10/06/1998 p.2.16 V. Kba MBAYE, Lhistoire et les objectifs de lOHADA , op cit.17 Voir M. KIRSCH, supra p. 1.

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    - la communication et le transfert des techniques modernes de gestion desentreprises ;

    - la restauration dun climat de confiance par le rglement du handicap queconstitue linscurit juridique et judiciaire ;

    - lencouragement de la dlocalisation des grandes entreprises vers lAfrique ;- la promotion de larbitrage comme instrument rapide et discret du rglement des

    diffrends commerciaux ;

    - llimination des conflits de lois dans lespace juridiquement harmonis ;- enfin, renforcer lunit africaine.

    Il faut galement noter que dans ltat actuel18 du droit des socits applicables dans les

    Etats africains, il est quasiment impossible de transfrer une socit dun Etat dans unautre sans procder une dissolution suivie dune reconstitution19, situation inconcevable

    dans le cadre dun espace conomique intgr. Avec lharmonisation ou luniformisation

    juridique, lexistence de socits de droit communautaire permet de remdier ce

    handicap. En outre, comme lcrivait Jean PAILLUSSEAU, il est vident que pour une

    entreprise qui exerce ses activits dans plusieurs pays, lunit des rgles applicables

    facilite considrablement ses oprations, quil sagisse de son organisation juridique, de

    son fonctionnement ou de ses changes commerciaux et financiers 20. Finalement, les

    rgions intgres sont plus attractives pour les investisseurs internationaux et possdent un

    ventail davantages en termes dinfrastructures et dinstitutions susceptibles de

    promouvoir un dveloppement durable. Elles constituent galement une voie daccs plus

    sre la concurrence dans une conomie globale. (.). Un droit africain des affaires

    lchelle continentale peut renforcer la voie vers la crdibilit de lAfrique, amliorer le

    flux dinvestissement et lacclration du dveloppement et avoir une influence sur la

    globalisation du droit des affaires dans son ensemble21 .

    18 Avant lentre en vigueur des Actes Uniformes.19 Dans ce sens voir E. CEREXHE, op. cit. p. 4520 Jean PAILLUSSEAU, Le droit de lOHADA Un droit trs important et original , op cit.21 Gilles CISTAC, Lintgration juridique dans tous ses tats : SADC et OHADA , op cit.

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    Concernant le modle spcifique de lOHADA, le Trait est incontestablement de nature

    favoriser lmergence au sein de la rgion dun vritable droit conomique indispensable

    pour le dveloppement durable des conomies22 .

    La pertinence des observations et analyses qui viennent dtre brivement voques, ne

    fait plus de doute.

    b- Le droit, outil technique de lintgration conomique23

    :

    Lintgration rgionale est prsente dans les stratgies de dveloppement des pays

    africains depuis les indpendances de la dcennie 1960 ; elle a motiv la cration de

    plusieurs Organisations, entre autres : lUnion Montaire de lAfrique de lOuest (UMOA)

    en 1962 ; lOrganisation de lUnit Africaine (OUA) et la Banque Africaine de

    Dveloppement (BAD) en 1963. Cette option a t rgulirement raffirme, notamment, travers : lUnion Economique et Douanire de lAfrique Centrale (UDEAC), en 1964,

    qui devient Communaut Economique et Montaire de lAfrique Centrale (CEMAC) en

    fvrier 1998 ; lUnion Douanire des Etats de lAfrique Occidentale, Abidjan (Cte

    dIvoire) le 3 juin 1966 ; la Communaut des Etats de lAfrique de lOuest (CEAO),

    Abidjan le 17 mars 1973, dissoute le 14 mars 1994 ; la Communaut Economique de

    Dveloppement des Etats de lAfrique de lOuest (CEDEAO) en 1975 ; lUnion

    Economique et Montaire de lAfrique de lOuest (UEMOA) ne de la fusion de la CEAO

    et de lUMOA en 1994. Au niveau continental loption pour lintgration a t raffirme

    travers : le Plan dAction de Lagos (PAL) en 1980, le Trait dAbuja de 1991, entr en

    vigueur en 1994 et crant la Communaut Economique Africaine (CEA), la cration de la

    Confrence Interafricaine des Marchs dAssurances (CIMA) en 1992 et de la Confrence

    Interafricaine de Prvoyance Sociale (CIPRES) en 1993, enfin la Dclaration de Syrte en

    1999.

    22 Franois GAULME, Lintgration rgionale dans le cadre de la Zone Franc : un mouvementprometteur , Marchs tropicaux du 15/11/1991.23 Voir Alhousseini MOULOUL, Lintgration juridique des Etats de la SADC et les perspectivesdadoption du droit des affaires de lOHADA pour lassainissement de lenvironnement juridique desaffaires , Actes de la Premire Confrence internationale sur les questions de lintgration rgionale et

    le droit de la SADC , Universit Eduardo Mondlane du Mozambique, Maputo du 23 au 25 avril 2008 ;Adde Gilles CISTAC, Lintgration rgionale dans tous ses tats : SADC et OHADA , Actes de la Confrence internationale sur lharmonisation du droit commercial et ses avantages sur lesinvestissements Chinois en Afrique , Universit de Macao, Facult de Droit, Macao le 27 novembre2007.

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    Les Etats africains ont fait le choix de lintgration conomique au niveau continental

    travers les Communauts Economiques Rgionales (CER)24. La CEA devra tre ralise

    en six (6) phases qui schelonnent sur trente quatre (34) ans ; la premire phase porte sur

    le renforcement des CER afin quelles soient transformes en Zones de Libre Echange

    (ZLE), en unions douanires et en march commun. La poursuite de ces objectifs a motiv

    la cration dune multitude dorganisations, dont les plus dynamiques sont aujourdhui la

    CEDEAO, lUEMOA, la CEMAC et le COMESA, pour ne citer que celles-ci, avec les

    diffrentes institutions qui en relvent.

    Lintgration juridique est-elle ncessaire pour btir un espace conomique fiable et

    viable ? Le professeur Joseph ISSA-SAYEGH dfinit lintgration juridique acheve

    comme tant le transfert de comptences tatiques de deux ou plusieurs Etats uneorganisation internationale dote de pouvoir de dcision et de comptences

    supranationales ou super -tatiques pour raliser un ensemble juridique unique et cohrent

    dans lequel les lgislations nationales sinsrent ou se fondent pour atteindre les objectifs

    conomiques et sociaux que les Etats-membres se sont assigns 25.Etienne CEREXHE26,

    en parlant de lintgration des conomies des Etats de la CEE, crivait : lintgration des

    conomies des neuf (9) pays de la CEE par la ralisation de liberts communautaires et le

    rapprochement des politiques conomiques pourrait difficilement sortir ses effets dans un

    ensemble domin par une diversit, voire une divergence des droits. Un minimum dunit

    juridique simposait si lon voulait garantir la fluidit du march et lapplication uniforme

    des politiques communes. En dautres termes, lintgration conomique, et cest le propre

    de toute intgration, suppose un environnement juridique plus ou moins harmonis . En

    effet, comme lcrit Jean PAILLUSSEAU, pour raliser lintgration conomique des

    Etats africains, il faut :

    a- Un droit unique.,

    b- Un droit adapt au particularisme des conomies africaines ;

    c- Un droit adapt aux besoins rels des entreprises, en particulier dans le domaine du

    financement et du management ;

    24

    Afrique Australe, Afrique Centrale, Afrique de lEst, Afrique du Nord et Afrique de lOuest.25 Pr. Joseph ISSA-SAYEGH lIntgration juridique des Etats Africains de la zone franc , RevuePENANT n 823 Janvier Avril 1997 pp. 5.26 E. CEREXHE, Problmatique de lentreprise et de lharmonisation du droit des socits, RJPIC.1978 n1

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    14

    d- Un droit qui assure la scurit des cranciers, des tiers et des investisseurs ;

    e- Un droit qui peut favoriser et accompagner lessor conomique des conomies des

    paysde la rgion toute entire 27. Selon le Pr Gilles CISTAC, lharmonisation du

    droit est non seulement une condition pour la russite dun phnomne dintgration mais

    elle peut aussi constituer un lment moteur dune intgration et ce, double titre : comme

    lment de rapprochement des peuples et comme lment de rapprochement des

    conomies 28. Convenons, enfin, avec le Pr Yves GUYON que ce nest un secret pour

    personne que si le droit nest pas une condition suffisante du dveloppement, il en est une

    condition ncessaire 29.

    La pertinence de ces observations ne fait aucun doute pour le cas des Etats africains. Au

    regard du processus actuel de globalisation, les Etats africains nont dautre choix que deconsolider lintgration de leurs conomies, rduire lextraversion de ces conomies et

    crer des conditions favorables linvestissement. La tendance actuelle tant

    linternationalisation des affaires, lharmonisation juridique devient un impratif car une

    harmonisation bien mene favorise les changes, la libre concurrence, restaure la

    confiance et prpare lintgration conomique.

    Dans ce contexte et dans cette perspective la ncessit de lintgration juridique nest plus

    dmontrer ; les Chefs dEtat Africains en sont dsormais convaincus et sattelleront la

    concrtisation dun vieux rve facilite par plusieurs atouts.

    II- Les atouts en faveur de lharmonisation juridique :

    Les atouts30 sont un gage de russite car une intgration ne saurait russir que si elle

    repose sur des fondements solides et si elle est conforte par une relle volont politique

    rgler des problmes communs. Evoquant ces atouts, Me Kba MBAYE crivait : Il est

    certain que cest dans des groupements o il y a dj des traditions juridiques communes,

    une monnaie commune et, dans une certaine mesure, une histoire commune et une mme

    27 Jean PAILLUSSEAU, Le droit de lOHADA Un droit trs important et original , La SemaineJuridique, no 44 du 28 octobre 2004, Supplment no 5, pp 1 5. Adde Joseph ISSA SAYEGH,Jacqueline LOHOUES OBLE, OHADA- Harmonisation du droit des affaires, op cit, n 86.28 Gilles CISTAC, Lintgration juridique dans tous ses tats : SADC et OHADA , Actes de la

    Confrence Internationale sur Lharmonisation du droit commercial et ses avantages sur lesinvestissements Chinois en Afrique , Universit de Macao, Facult de droit, le 27 novembre 2007.29 Yves GUYON, Conclusion , in Petites Affiches no205 du 13 octobre 2004, pp 59-63.30 Voir Philippe TIGER, Que sais-je ? Le droit des affaires en Afrique, Editions PUF, juillet 2001, pp 12

    18.

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    15

    manire de concevoir et de btir lavenir, quil est plus facile de raliser lintgration

    conomique31 ; en outre, les projets qui ont le plus de chance de russir, il faut le

    rpter, sont ceux qui concident avec un espace conomique, culturel et montaire

    uniforme32 . Pour certains Etats, il faut galement ajouter : lexistence dune mme

    langue officielle ; le phnomne de lIslam et lexistence dun droit africain traditionnel33

    .

    Ce sont l des conditions propices la russite dune intgration, et dans lespace que

    constituent les Etats africains de la Zone Franc la quasi-totalit de ces conditions est

    runie. Mais ces conditions ne sont pas suffisantes elles seules car sans volont politique

    aucune construction de ce type ne saurait tre prenne. Compte tenu de la clrit avec

    laquelle le projet OHADA a t ralis et lenthousiasme quil a suscit34, nous sommes en

    droit de penser que la volont politique est relle. En effet, il sest pass moins de deux anspour que le Trait de Port Louis soit sign, moins de deux ans pour quil entre en

    vigueur et moins de cinq ans pour que les sept premiers Actes Uniformes (A. U.) soient

    adopts35.

    Ce projet est galement sous-tendu par des programmes ambitieux dintgration

    conomique dans toutes les rgions africaines ; des organisations furent cres cet effet

    (BAMREL, CEAO, CEDEAO, UEMOA, etc).

    Enfin, lexistence dexpriences dunification est galement un atout non ngligeable36.

    Ce sont l des atouts indniables dont nont pas disposs certains groupes dEtats, comme

    les Etats membres de la CEE, ce qui a ralenti, voire entrav, lharmonisation de leurs

    droits et leur intgration conomique.

    En considration de tout ce qui prcde, on ne peut stonner de lavnement de

    lOHADA.

    31 In Revue PENANT n 827, Mai Aot 1998, p. 126 et suiv., N Spcial OHADA. Adde AlhousseiniMOULOUL, Le rgime juridique des socits commerciales dans lespace OHADA : lexemple du Niger,op cit, p 12 et 13.32 Ibidem. Voir aussi : Kba MBAYE, in synthse des travaux du sminaire dAbidjan, pp. 14 et 15.33 Sur ces aspects voir : Philippe TIGER, Que sais-je ? Le Droit des Affaires en Afrique OHADA , Ed.PUF, Nov. 1999, p. 15 et 16.34

    Voir aussi infra, communiqu final de la runion des chefs dEtat tenue Dakar les 5 et 6/10/1992.Le projet a t ralis en moins de quatre ans et des associations et clubs OHADA ont t crs dans denombreux pays membres.35 Voir infra.36 Notamment : la CEE, les Etats Unis, le Commonwealth, lALENA, le MERCOSUR.

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    16

    III- Le processus ayant conduit la naissance de lOHADA :

    Lide dharmoniser les droits africains remonte Mai 1963 loccasion dune runion

    des Ministres de la Justice anime par le Pr. Ren David. Cette ide fut reprise par

    dminents juristes africains et elle connut un premier aboutissement au sein de lUnion

    Africaine et Mauricienne (U.A.M.) et dans la convention de lOrganisation Commune

    Africaine et Malgache (O.C.A.M.). Larticle 2 de la Convention Gnrale de coopration

    en matire judiciaire conclue entre les Etats de lOCAM, dispose : Les Hautes Parties

    contractantes sengagent prendre toutes dispositions en vue dharmoniser leurs

    lgislations commerciales respectives dans la mesure compatible avec les exigences

    pouvant rsulter des exigences de chacune delle ; en outre, aux termes de larticle 3 de

    la Convention du 5 juillet 1975 portant cration du Bureau Africain et Mauricien deRecherches et dEtudes lgislatives (B.A.M.R.E.L.), celui-ci a pour objet dapporter son

    concours aux Etats signataires, afin que les rgles juridiques qui y sont applicables,

    slaborent dans des conditions qui permettent leur harmonisation . Malheureusement,

    lOCAM et le BAMREL, comme nombre dorganisations africaines, nont pas t dots de

    crdits suffisants et eurent une existence phmre.

    Il a fallu attendre 1991 pour que lide dharmoniser les droits africains soit nouveau

    reprise loccasion des runions des Ministres des Finances de la Zone Franc, tenues

    dabord Ouagadougou (Burkina Faso) en Avril 1991, puis Paris (France) en octobre

    1991 ; loccasion de cette dernire runion, les Ministres des Finances mirent sur pied

    une Mission compose de sept (7) membres, juristes et spcialistes des affaires, prside

    par Me Kba MBAYE.

    De mars septembre 1992, la Mission fit ltat des lieux en visitant les pays de la Zone

    Franc. Le 17 septembre 1992, Me Kba MBAYE prsente son rapport dtape la

    runion des Ministres des Finances.

    Les 5 et 6 octobre 1992, les Chefs dEtat de la Zone Franc se runissent Libreville ;

    loccasion de cette runion le Prsident Abdou DIOUF (Sngal) prsente lconomie du

    projet labor par la Mission dExperts. Les chefs dEtat dcident de ltendre

    lensemble des Etats africains et non plus seulement aux seuls Etats de la Zone Franc.

    Dans le communiqu final de cette runion on pouvait lire que les Chefs dEtat et de

    dlgation ont approuv le projet dharmonisation du droit des affaires conu par les

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    17

    Ministres des Finances de la Zone Franc, dcid de sa mise en uvre immdiate et

    demand aux Ministres des Finances et de la Justice de tous les Etats intresss den faire

    une priorit . Les Chefs dEtat ont ainsi adopt le rapport des sept (7) personnalits ; ils

    dsignent un Directoire de trois (3) membres37, charg de coordonner la prparation du

    Trait portant cration de lOHADA.

    Le Directoire prpare le projet de Trait et le soumet la runion des Ministres de la

    Justice, tenue Libreville les 7 et 8 juillet 1993. Le projet est adopt aprs avoir t

    amend et enrichi. Il est finalis Abidjan les 21 et 22 septembre 1993, par la runion des

    Ministres de la Justice puis celle, conjointe, des Ministres des Finances et de la Justice,

    runion prcde dun rapport dexperts.

    Enfin, le 17 octobre 1993, se tient, Port Louis (Ile Maurice), la Confrence des Paysayant en Commun l'usage du Franais. A cette occasion le projet fut soumis la signature

    des Chefs dEtat et de dlgations des pays africains francophones ; le Trait portant

    cration de lOHADA est sign par quatorze (14) Etats38, et deux autres39 y adhrent

    ultrieurement pour totaliser aujourdhui seize (16) Etats parties.

    Ainsi, les principales tapes ayant abouti loprationnalisation de lOHADA peuvent tre

    rsumes comme suit40

    :

    1. Ouagadougou (Burkina Faso), Avril 1991 : Runion des Ministres des Finances :

    conception du Projet dharmonisation du Droit des Affaires en Afrique .

    2. Paris (France), Octobre 1991: Runion des Ministres des Finances : formation de la

    Mission de sept (7) membres.

    3. De Mars Septembre 1992 : la Mission effectue des visites dans les diffrents Etats

    de la Zone Franc : information et sensibilisation des autorits ; tat des lgislations

    appliques.

    4. Yaound (Cameroun), 16 Avril 1992 : Runion des Ministres des Finances ; Me Kba

    MBAYE prsente son premier rapport.

    37 Prsident : M.K. MBAYE ; membres : Martin KIRSCH, Conseiller Honoraire de la Cour de cassationfranaise, Avocat au Barreau de Paris, et Michel GENTOT, Prsident de la section du contentieux auconseil dEtat franais.38

    Bnin, Burkina Faso, Cameroun, Centrafrique, Comores, Congo (Brazza), Cte dIvoire, Gabon,Guine Equatoriale, Mali, Niger, Sngal, Tchad et Togo.39 La Guine - Conakry et la Guine - Bissau.40 Pour la chronologie complte, voir Alhousseini MOULOUL, Comprendre lOHADA, Annexe I,Editions NIN Avril 2000.

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    18

    5. 17 septembre 1992 : Runion des Ministres des Finances de la Zone Franc. Me Kba

    MBAYE prsente son rapport de mission. Le projet est adopt.

    6. Libreville (Gabon), les 5 et 6 octobre 1992 : Confrence des Chefs dEtat de France et

    dAfrique :

    - Le Prsident Abdou DIOUF (Sngal) prsente lconomie du projetOHADA ;

    - Le projet est adopt par les Chefs dEtat africains de la Zone Franc ;- Ouverture du projet aux Etats autres que ceux de la Zone Franc ;- Formation dun Directoire de trois (3) membres prsid par le Juge Kba

    MBAYE et compos de Martin KIRSCH, et Michel GENTOT.

    7. Dakar (Sngal), novembre 1992 : Runion des Ministres de la Justice ; dcision decration dans chaque Etat, dune Commission de 5 membres.

    8. Dakar (Sngal), les 18 et 19 dcembre 1992 : Runion des Ministres de la Justice. Les

    Ministres demandent au Directoire de prparer le futur Trait et dtablir lordre des

    priorits des matires harmoniser.

    9. Abidjan (Cte dIvoire), les 19 et 20 avril 1993 : Sminaire sur lharmonisation du Droit

    des affaires dans les Etats de la Zone Franc. Le sminaire teste la technique de prparation

    des textes prvue par le Directoire. Constitution des Commissions Nationales.

    10. Libreville (Gabon), les 7 et 8 juillet 1993 : Runion des Ministres de la Justice.

    Examen du projet de Trait.

    11. Abidjan (Cte dIvoire), les 21 et 22 septembre 1993 : Runion des Ministres de la

    Justice suivie de celle des Ministres des Finances. Le projet de Trait est finalis.

    12. Port-Louis (Ile Maurice), le 17 octobre 1993 : Runion de la Confrence des Pays

    ayant en commun lusage du Franais. Signature du Trait portant cration de lOHADA.

    13. Ouagadougou (Burkina Faso), les 14 et 15 mars 1994 : Premier Sminaire des

    Commissions Nationales. Adoption dune mthode de travail commune. Une Commission

    Centrale, dans laquelle chaque Etat partie est reprsent, dgage un consensus permettant

    de finaliser chaque projet dActe Uniforme.

    14. Lom (Togo), le 24 octobre 1994 : Runion des Prsidents des Commissions

    Nationales. Examen des avants projets des premiers Actes Uniformes.

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    15. Lom (Togo), les 25 et 26 octobre 1994 : Runion des Ministres de la Justice des Etats

    signataires du Trait. Examen du projet de cration de lEcole Rgionale Suprieure de la

    Magistrature (ERSUMA) et de la mise en place des institutions de lOHADA.

    16. Biarritz (France), le 8 novembre 1994 : Confrence des Chefs dEtat de France et

    dAfrique. Les Etats signataires du Trait OHADA soulignent son importance et dcident

    de se concerter pour dterminer la localisation des institutions.

    17. Bangui (RCA), du 6 au 8 fvrier 1995 : Runion des Prsidents des Commissions

    Nationales. Adoption de lavant-projet dActes Uniforme sur le Droit Commercial Gnral

    (AU/DCG).

    18. Bangui (RCA), le 21 Mars 1995 : Runion des Ministres de la Justice. Les Ministres

    jettent les bases de la localisation des institutions de lOHADA.19. Le 11 avril 1995 : Publication de la loi (nigrienne) n 95-006 du 4 juin 1995

    autorisant le Prsident de la Rpublique ratifier le Trait OHADA.

    20. Le 18 septembre 1995 : Aprs rception des instruments de ratification de la

    Rpublique du Niger, par lEtat dpositaire (Sngal), le nombre de ratifications

    ncessaire la mise en vigueur du Trait est runi. Le Trait OHADA entre en

    vigueur.

    B- LE TRAITE PORTANT CREATION DE LOHADA :

    Sur le plan de la forme le Trait est compos de 63 articles rpartis entre IX titres. Le

    dispositif juridique quil instaure est dune simplicit remarquable.

    Dans le prambule les Chefs dEtat et de dlgation ont ritr leur dtermination

    raliser progressivement lintgration conomique de leurs Etats ce qui suppose la mise en

    place et lapplication dun droit des affaires harmonis afin de garantir la scurit juridique

    aux investisseurs. En outre, larticle 2 du Trait dtermine son objet et les domaines qui

    relvent du droit des affaires41. Le Trait prsente galement les instruments par lesquels

    se ralisera lintgration juridique (les Actes Uniformes) et les organes chargs de la

    supervision de la mise en uvre du projet, du contrle de lapplication des Actes et de la

    vulgarisation du droit harmonis.

    41

    Sur la dfinition du droit des affaires voir Henri - Dsir MODI KOKO BEBEY, La rforme du droitdes affaires de lOHADA au regard de la mondialisation de lconomie , p 2, www.ohada.com . Sur ledomaine du droit des affaires et les controverses quil suscite, voir Henri Dsir MODI KOKOBABEY, Lharmonisation du droit des affaires en Afrique : regard sous langle de la thorie gnraledu droit , p 2 et pp 13 15. www.ohada.com

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    Compar aux autres Traits de mme type, le Trait OHADA prsente plusieurs

    particularits42 :

    - il envisage une unification progressive et gnrale des lgislations des Etats

    concerns ;

    - lunification envisage est dune grande ampleur car elle concerne tous les secteurs de

    la vie des affaires et lchelle continentale ;

    - la lgislation communautaire dont le Trait envisage la mise en uvre a un caractre

    supranational renforc dans la mesure o elle est obligatoire, abrogatoire et

    directement applicable dans tous les Etats parties ;

    - originalit aussi quant aux moyens et mthodes retenus pour atteindre les objectifs

    poursuivis.I- Les objectifs de lOHADA

    43:

    Le Prambule du Trait OHADA, ainsi que ses articles 1 et 2, exposent, en termes

    gnraux, son objet et son domaine. Aux termes de larticle 1er Le prsent trait a pour

    objet lharmonisation du droit des affaires :

    - par llaboration et ladoption de rgles communes simples, modernes et adaptes la

    situation de leurs conomies ;

    - par la mise en uvre de procdures judiciaires appropries ;

    - par lencouragement au recours larbitrage pour le rglement des diffrends

    contractuels . Larticle 2, quant lui, numre les matires qui rentrent dans le domaine

    du Trait et dont la rglementation doit faire lobjet dharmonisation.

    LOHADA rentre dans le cadre dune vision plus globale de lintgration africaine

    travers une union conomique et un grand march commun 44. Cet objectif global ne

    peut tre atteint dans une situation de crise conomique gnralise caractrise par le

    ralentissement des investissements extrieurs au cours de la dcennie 1980-1990 ; ds lors

    il est apparu ncessaire damliorer et de rationaliser lenvironnement juridique des

    42 Voir Joseph ISSA SAYEGH, Jacqueline LOHOUES OBLE, OHADA Harmonisation du droit desaffaires, op cit, n 198.43 Voir Me Kba MBAYE, Lhistorique et les objectifs de lOHADA , Petites Affiches, n 205, du 13

    octobre 2004, pp 4-7. Adde Jean PAILLUSSEAU, Le droit de lOHADA. Un droit trs important etoriginal , op cit ;Boris MARTOR et Sbastien THOUVENOT, Luniformisation du droit des affaires en Afrique parlOHADA , La Semaine Juridique n 44 du 28 octobre 2004, Supplment no 5, pp 5 9.44 V. Kba MBAYE, Lhistorique et les objectifs de lOHADA , op cit.

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    entreprises afin de rendre les marchs africains plus attractifs, en rduisant, voire en

    mettant fin linscurit juridique et judiciaire. En outre, lAfrique, comme la plupart

    des pays, est concerne par la mondialisation de lconomie. Sa consquence est la

    ncessit dune intgration rgionale, avec, partout, le mme droit des socits, ce qui

    facilite singulirement les investissements45

    . LAfrique ne peut chapper au phnomne

    de la mondialisation, ce qui implique une adaptation continue des rgles qui rgissent les

    activits conomiques46.

    II- Les Etats membres :

    En vertu de larticle 53 du Trait OHADA ladhsion la nouvelle organisation est

    ouverte tout Etat membre de lUnion Africaine (UA) et tout Etat, non membre de lU.

    A., invit y adhrer dun commun accord des Etats parties. La gnralit de cetteouverture suggre que ladhsion lOHADA est ouverte aux Etats non africains. Cette

    gnralit est heureuse car dans le cadre de la construction des espaces conomiques, des

    Etats pourront y adhrer mme sils ne sont pas membres de lUnion Africaine, dune part,

    et, dautre part, mme sils ne sont pas situs sur le continent africain ; cependant, il est

    difficilement concevable que des Etats situs hors du continent africain adhrent

    lOHADA, aussi doit-on comprendre que louverture concerne les Etats africains non

    membres de lUnion Africaine.

    Le nombre des Etats membres de lOHADA va augmenter dans les annes, voire les mois

    venir car la Rpublique Dmocratique du Congo (RDC) a engag le processus de son

    adhsion imminente et Sao Tom et Principe a annonc son adhsion prochaine. Enfin,

    Madagascar et le Ghana, ont annonc leur intrt pour lOHADA. Ladhsion dun nouvel

    Etat se fera dans les conditions prvues par le Trait et suivant la procdure prvues par la

    Constitution dudit Etat ; en effet certaines Constitutions nationales prvoient lintervention

    du Parlement national qui doit autoriser ladhsion.

    Il faut galement noter que lOHADA nest pas rserve aux Etats francophones47 ; dj

    deux Etats, hispanophone et lusophone, en font partie tandis que le Cameroun, Etat

    45 Jean PAILLUSSEAU, LActe Uniforme sur le droit des socits , Petites Affiches, n 205 du 13

    octobre 2004, pp 19-29.46 Voir en ce sens Jean PAILLUSSEAU, Le droit de lOHADA Un droit trs important et original ,op cit.47 Sur cette ouverture, voir Alhousseini MOULOUL, Lintgration juridique des Etats de la S. A. D. C.et les perspectives dadoption du droit des affaires de lOHADA pour lassainissement de

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    membre de lOHADA, est un pays bilingue. Certains pays anglophones, notamment le

    Ghana, ont manifest leur intrt pour lOHADA. Pour favoriser ladhsion des Etats non

    francophones,la Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement de lOHADA, runie

    Qubec le 17 octobre 2008, a procd la rvision du Trait et introduit une disposition

    selon laquelle les langues de travail de lOHADA sont : le Franais, lAnglais,

    lEspagnol et le Portugais 48. Dsormais, les documents de lOHADA seront traduits dans

    ces diffrentes langues mais en cas de divergence entre les traductions, la version en

    Franais fait foi.

    Laccroissement du nombre et la diversit des Etats membres de lOHADA fera de cette

    organisation le vritable moteur de lintgration juridique africaine.

    III- Lentre en vigueur du Trait portant cration de lOHADA :Aux termes de larticle 52 al. 2 du Trait, celui-ci entre en vigueur soixante (60) jours

    aprs la date de dpt du septime (7) instrument de ratification. Les instruments des

    ratifications et dadhsion doivent tre dposs auprs du gouvernement sngalais, qui est

    le gouvernement dpositaire49, qui en dlivre copie au Secrtariat Permanent. Le

    Gouvernement dpositaire procdera lenregistrement du Trait auprs du Secrtariat de

    lUnion Africaine et auprs de celui de lONU conformment larticle 102 de la Charte

    des Nations Unies et dlivrera une copie enregistre au Secrtariat Permanent.

    Le 18 septembre 1995, le nombre de ratifications ncessaires lentre en vigueur du

    Trait fut runi la suite du dpt par le Niger de son instrument de ratification50 ; le

    Trait OHADA est ainsi entr en vigueur conformment son article 52 al.2.

    Aucune rserve nest admise au Trait51, conclu pour une dure indtermine ; il ne peut

    tre dnonc avant dix (10) annes dater de son entre en vigueur52.

    En cas dadhsion dun nouvel Etat, le Trait lui sera appliqu soixante jours aprs le

    dpt de son instrument dadhsion53.

    lenvironnement des affaires , Actes de la Confrence Internationale sur les questions de lintgrationrgionale et le droit de la SADC , Universit Eduardo Mondlane du Mozambique, Maputo du 23 au 25avril 2008. Adde Gilles CISTAC, Lintgration rgionale dans tous ses tats : SADC et OHADA ,op cit.48 Art. 42 du Trait rvis.49

    Art. 57 du Trait.50 En Rp. Du Niger la loi n 95-006 du 4/4/1995 (publie au JORN du 15/04/1995 p. 341) autorise lePRN ratifier le Trait portant cration de lOHADA.51 Art. 54 du Trait.52 Art. 62 al.1 du Trait.

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    23

    Le 17 octobre 2008, la Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement de lOHADA

    procde la rvision du Trait de Port Louis et prcise les conditions dans lesquelles le

    Trait OHADA peut tre rvis savoir54 sur demande dun Etat partie adresse au

    Secrtariat Permanent qui la communique au Conseil des Ministres ; celui-ci apprcie la

    demande et ltendue de la modification suggre. La rvision ou lamendement est

    ensuite adopte la diligence du Conseil des Ministres, dans les mmes conditions que le

    Trait. Le Trait rvis ou amend est rdig en double exemplaires, dans chacune des

    langues de travail de lOHADA et dpos aux archives du Gouvernement Sngalais qui

    en remet une copie certifie conforme chaque Etat membre.

    IV- Le choix de la technique dintgration juridique :

    Les expriences dintgration juridique ont souvent vari entre deux techniquesprincipales : lharmonisation et luniformisation.

    1- Loption pour luniformisation :

    Pour la prparation des instruments juridiques de la nouvelle organisation, il a fallu choisir

    entre luniformisation ou lharmonisation. Le Pr. Joseph ISSA-SAYEGH55 dfinit ces

    deux mthodes en ces termes : lharmonisation ou coordination est lopration

    consistant rapprocher les systmes juridiques dorigine et dinspiration diffrentes (voire

    divergentes) pour les mettre en cohrence entre eux en rduisant ou en supprimant leurs

    diffrences et leurs contradictions de faon atteindre des rsultats compatibles entre eux

    et avec les objectifs communautaires recherchs , tandis que luniformisation ou

    lunification du droit est, priori, une forme plus brutale mais aussi plus radicale

    dintgration juridique. Elle consiste instaurer, dans une matire juridique donne, une

    rglementation unique, identique en tous points pour tous les Etats membres, dans laquelle

    il ny a pas de face, en principe, pour des diffrences .

    A loccasion du sminaire dAbidjan, Me Kba MBAYE explique, dans son expos

    introductif, le choix du Directoire : une convention unifiante peut tre applicable sans

    entraner lobligation dabroger le droit national ds lors que celui-ci ne lui est pas

    53 V. Boris MARTOR et Sbastien THOUVENOT, Luniformisation du droit des affaires en Afrique

    par lOHADA , op cit.54 Voir articles 61 et 63 du Trait rvis.55 Joseph ISSA SAYEGH, Lintgration juridique des Etats africains de la zone franc, Revue.PENANT n 823 janvier avril 1997, p. 5 et suiv. Adde Joseph ISSA SAYEGH, JacquelineLOHOUES OBLE, OHADA, Harmonisation du droit des affaires, op cit, n 92.

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    contraire , et les lois uniformes contiennent des rgles substantielles qui doivent tre

    introduites dans chaque Etat pour y tre applicables. Cest la technique qui semble

    rencontrer la faveur des autorits politiques de nos pays les lois uniformes doivent

    devenir lois nationales et tre aussi compltes que possible afin de ne pas donner lieu

    interprtations divergentes 56

    . Analysant le modle dintgration choisi, Gaston

    KENFACK DOUAJNI crivait que le Trait de lOHADA vise doter les Etats parties

    dun droit uniforme dans chacune des disciplines57 numres par larticle 2 dudit Trait.

    Cette apprciation est galement celle de Georges TATY qui crivait que les auteurs du

    Trait mettaient le cap vers un droit unifi58 . Nonobstant la qualification donne par

    ces minents jurisconsultes, larticle 1er du Trait dispose que le Trait a pour objet

    lharmonisation du droit des affaires des Etats parties , dune part, et, dautre part,lOrganisation elle-mme, sappelle Organisation pour lHarmonisation en Afrique du

    Droit des Affaires ; enfin, Me Kba MBAYE, Responsable de la Mission dExpert puis

    du Directoire, crivait : Finalement, loption retenue a t lharmonisation, bien que

    lanalyse du systme actuellement en vigueur au sein de lOHADA, cest--dire ladoption

    par le Conseil des Ministres de la Justice et des Ministres des Finances, dactes uniformes

    qui sont immdiatement applicables sur le territoire de chaque Etat partie, soit

    vritablement une uvre dunification59 . A lexamen du contenu des Actes Uniformes

    dj adopts, on est fond conclure quil sagit plutt dune uniformisation, do leur

    appellation Actes Uniformes . Cette unification est ralise au moyen desdits Actes et

    par linstitution dune Cour Commune qui veille lapplication du droit unifi dans tous

    les Etats membres. Cependant, il sagit dune uniformisation inacheve ; en effet chaque

    Acte Uniforme contient des vides juridiques quil revient aux Etats de combler,

    notamment en ce qui concerne les sanctions pnales. Au terme de ce processus, des

    56 In synthse des travaux du sminaire dAbidjan, p. 20.57 G. KENFACK DOUAJNI, Labandon de souverainet dans le Trait OHADA , Revue PENANT n830, Mai Aot 1999, p.125 et suiv. Adde Henri Dsir MODI KOKO BEBEY, Lharmonisation dudroit des affaires en Afrique : regard sous langle de la thorie gnrale du droit , op cit, pp 13 15.58 G. TATY, Brves rflexions propos de lentre en vigueur dune rglementation commune du droit

    des affaires des Etats membres de la zone franc , Revue PENANT n 830, Mai Aot 1999, p. 227 etsuiv. Adde Yves GUYON, Conclusion , Petites Affiches n 205 du 13 octobre 2004, pp 59-63 ; JeanPAILLUSSEAU, Le droit de lOHADA : un droit trs important et original , La Semaine Juridique, n44 du 28 octobre 2004, Supplment no 5, pp 1 5.59 In Lhistoire et les objectifs de lOHADA , op cit.

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    disparits apparatront, dune part, on parlera dune harmonisation juridique, et, dautre

    part, lattractivit juridique de chaque Etat sera apprcie.

    2- La prparation et ladoption des Actes Uniformes60 :

    1. En novembre 1992, les Ministres de la Justice runis Dakar (Sngal), dcident de

    crer dans chaque Etat membre une Commission Nationale61

    compose de cinq (5)

    membres et charge, au niveau national, de contribuer ltude des Actes Uniformes. Ces

    Commissions tiennent leur premier sminaire Ouagadougou (Burkina Faso) les 14 et 15

    mars 1994. Ce sminaire consacre ladoption dune mthode de travail commune.

    Les Actes Uniformes sont destins instaurer une lgislation commune aux Etats

    membres pour rgirles matires identifies comme faisant partie du droit des affaires .

    Le Secrtariat Permanent prpare les projets dActes Uniformes quil propose auxGouvernements des Etats parties ; ceux-ci disposent dun dlai de quatre-vingt dix (90)

    jours pour transmettre leurs observations au Secrtariat Permanent. Aux termes de larticle

    7 al 2 du Trait rvis, ce dlai peut tre prorog dune dure quivalente en fonction des

    circonstances et de la nature du texte adopter, la diligence du Secrtariat Permanent .

    A lexpiration du dlai imparti le Secrtaire Permanent tablit un rapport auquel il joint les

    observations sus - vises et le projet dActe Uniforme ; lensemble est transmis la CCJA

    pour avis. Celle-ci dispose de soixante (60) jours pour mettre son avis. Au terme de ce

    dlai, le Secrtaire Permanent prpare le texte dfinitif du projet dActe Uniforme quil

    propose lordre du jour de la prochaine session du Conseil des Ministres.

    Cependant, une procdure non prvue par le Trait est souvent utilise : en effet, chaque

    Gouvernement fait examiner le projet par sa Commission Nationale qui fait des

    observations ou propose des amendements qui seront transmis au Secrtariat Permanent.

    Aprs rception des observations des Commissions Nationales, le Secrtariat Permanent

    60 Sur cette procdure, voir Joseph ISSA SAYEGH, Jacqueline LOHOUES - OBLE, OHADA Harmonisation du droit des affaires, op cit, n 279 288, pp 123-126.61 Au Niger, larrt n15/MJ du 1er/04/1993 porte cration et composition dune commission nationale ad- hoc charge de lharmonisation du droit des affaires dans la Zone Franc. Aux termes de larticle 2 de cet

    arrt la commission est prside par le vice-prsident de la Cour dAppel et comprend 5 autres membres.Cet article fut modifi par un autre arrt (n21/MJ/GS/SG) du 11/06/1993 qui, lui mme a t modifipar larrt n27/MJ//GS du 2/08/1995. Aux termes de larticle 2 de ce nouvel arrt, la commission ad -hoc est prside par le secrtaire gnral du Ministre de la Justice et comprend huit (8) membres dont unvice-prsident reprsentant le Ministre des Finances et du Plan.

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    organise une session desdites Commissions62 avant que le projet ne soit transmis la

    CCJA pour avis.

    Au regard de la procdure63 qui vient dtre dcrite, tous les Etats participent

    llaboration des Actes Uniformes et il est tenu compte des spcificits de chaque Etat

    membre travers la prise en compte des observations mises.

    Ainsi, bien que cela ne soit pas explicite dans le Trait, trois organes interviennent dans la

    prparation des Actes Uniformes : le Secrtariat Permanent, les Commissions Nationales

    (Etats) et la CCJA, avant quils ne soient adopts par le Conseil des Ministres de

    lOHADA.

    Cette procdure enlve aux Parlements et aux organes de lexcutif leur pouvoir lgislatif

    et rglementaire car les Actes Uniformes dterminent non seulement les principesgnraux mais aussi leurs modalits dapplication64. Dornavant, le pouvoir lgislatif est

    exerc, dans lespace OHADA, pour toutes les matires concernes par lharmonisation,

    par le Conseil des Ministres de cette Organisation.

    2.Pour ladoption dun Acte Uniforme les deux tiers (2/3) au moins des Etats membres

    doivent tre prsents ou reprsents, et lActe est valablement adopt lunanimit des

    Etats prsents et votants. Il rsulte de cette disposition que, dune part, labstention dun

    Etat ne fait pas obstacle ladoption dun Acte, car seul le vote ngatif y fait obstacle, et,

    dautre part, chaque Etat dispose dune prrogative analogue un droit de veto pour

    sopposer ladoption dun Acte par un vote ngatif.

    3.Une fois adopt, lActe est publi par le Secrtariat Permanent au Journal Officiel de

    lOHADA dans les soixante (60) jours de cette adoption. Les Actes Uniformes sont

    applicables dans les Etats parties, sauf disposition particulire qui pourrait tre prvue

    dans un Acte, quatre vingt dix (90) jours dater de la publication sus - vise. LActe

    Uniforme doit aussi tre publi dans le Journal Officiel de chaque Etat membre ; cette

    62Bamako (Mali) les 11 et 17 octobre 1995 : Session des Commissions Nationales pour ladoption duprojet dActe Uniforme sur les Socits Commerciales et le Groupement dIntrt Economique(AU/DSC/GIE). Dakar (Sngal), les 11 et 16 dcembre 1995 : Session des Commissions Nationales

    pour lexamen des avants projets dActes Uniformes sur les Srets, les Voies dExcution, le DroitComptable : Adoption de ces textes.63Sur llaboration des Actes Uniformes voir Jacqueline LOHOUES-OBLE, Lapparition dun droitinternational des affaires en Afrique , RIDC-3 1999, p. 542 et suiv.64 En ce sens voir G.KENFACK DOUAJNI, op. cit

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    dernire publicit peut tre ralise par tout autre moyen appropri 65, dune part, et,

    dautre part, elle na aucune incidence sur lentre en vigueur de lActe.

    4. Les Actes Uniformes peuvent tre modifis la demande dun Etat membre ou du

    Secrtariat Permanent, suivant la procdure prvue aux articles 6 et 9 nouveau du Trait.

    Dsormais, les Actes Uniformes font partie de lordre juridique interne de chaque Etat

    partie ; les juridictions nationales comme les professionnels du droit doivent tenir compte

    de cette nouvelle ralit.

    V- Caractres des instruments juridiques de lOHADA :

    1- Les dispositions du Trait et celles des Actes Uniformes sont dordre public. Toutefois,

    bien que la plupart des dispositions soient impratives, certains Actes peuvent contenir des

    dispositions suppltives ou optionnelles

    66

    .Lorsquun Acte Uniforme est entr en vigueur, il devient directement applicable et

    obligatoire nonobstant toute disposition contraire de droit interne, antrieure ou

    postrieure 67 ; il se substitue aux rgles de droit interne. Lapplicabilit directe est

    consacre par larticle 10 du Trait qui dispose : les Actes Uniformes sont directement

    applicables et obligatoires dans les Etats parties, nonobstant toute disposition contraire de

    droit interne, antrieure ou postrieure . Lapplicabilit directe, les caractres obligatoire

    et abrogatoire distinguent les Actes Uniformes des Directives europennes dont

    lapplication dpend de la volont des Etats qui doivent les transposer dans le droit

    interne ; toutefois, les Actes Uniformes se rapprochent des Rglements europens car ils

    sont directement applicables dans les Etats membres68.

    2- Le Trait ainsi que les Actes Uniformes ont un caractre supranational. Cette

    supranationalit est une manifestation de labandon partiel de souverainet par chaque Etat

    partie au profit de lOHADA pour les matires concernes par lharmonisation69. La

    procdure dadoption des Actes Uniformes et leurs caractres obligatoire et abrogatoire

    consacrent aussi la supranationalit des instruments juridiques de lOHADA.

    65 Article 9 du Trait.66 Voir Boris MARTOR et Sbastien THOUVENOT, Luniformisation du droit des affaires en Afrique

    par lOHADA , op cit.67

    Article 10 du Trait68 Georges A. CAVALIER, Lenvironnement juridique des affaires en Afrique noire francophone ,contribution la Confrence Internationale sur lharmonisation du droit commercial en Afrique et sesavantages pour les investissements Chinois en Afrique , Universit de Macao, le 27 novembre 2007.69 Voir en ce sens Gaston KENFACK DOUAJNI op. cit. . Adde Philippe TIGER, op. cit. p. 32.

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    28

    Leffet abrogatoire et le caractre supranational se trouvent confirms par un avis rendu

    par la CCJA et aux termes duquel larticle 10 du Trait contient une rgle de

    supranationalit, parce quil prvoit lapplication directe et obligatoire des actes uniformes

    et institue, par ailleurs, leur suprmatie sur les dispositions de droit interne antrieures ou

    postrieures70

    . 3- Si la suprmatie du droit communautaire sur les normes nationales de

    caractre lgislatif ou rglementaire ne semble pas poser de difficult, la question est

    plutt controverse en ce qui concerne la primaut de ce droit sur les Constitutions des

    Etats membres. En Europe, la supra constitutionnalit des Traits est loin de faire

    lunanimit71, tandis que dans le cas de lOHADA72, le Trait fondateur semble

    reconnatre implicitement la supriorit des Constitutions nationales.

    Quiddes conflits possibles entre une norme de droit communautaire OHADA et une autrenorme de droit international ?

    Da Cruz Rodrigues propose des critres prendre en compte pour solutionner les conflits

    entre normes internationales, en crivant quen rgle gnrale, ce conflit tant considr

    comme quivalent au conflit entre normes de droit interne, il est tranch selon les rgles

    usuelles (lex superior, lex posterior, hirarchie des valeurs, moindre grief, proportionnalit

    et harmonisation des intrts en prsence) quand on naboutit pas une interprtation qui

    russisse harmoniser les normes73 ; tandis que Filiga Michel SAWADOGO et Luc

    Marius IBRIGA74 suggrent de tenir compte galement du caractre universel ou non de

    la convention ou du trait, du nombre effectif de signataires et surtout des membres ayant

    ratifi le trait ; selon les mmes auteurs M. Carreau affirme la supriorit du droit

    universel sur le droit international rgional, de ce dernier sur le droit dorigine bilatrale

    ainsi que la supriorit de la charte constitutive des organisations internationales sur leurs

    droits drivs 75.

    Enfin, quid des conflits entre normes de droit international communautaire, notamment

    entre les Actes Uniformes de lOHADA et les normes de lUEMOA ?

    Dans ce cas, deux hypothses doivent tre distingues :

    70 Avis no 001/2001 PC, sance du 30 avril 2001.71 Sur la supra constitutionnalit du droit communautaire, voir Filiga Michel SAWADOGO et Luc

    Marius IBRIGA, op cit.72 Voir article 52 al 1eret article 116 du Trait OHADA.73 In Filiga Michel SAWADOGO et Luc Marius IBRIGA, op cit.74 Op cit.75 Ibidem.

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    29

    - Lorsquil sagit dun conflit entre un A. U. et une norme UEMOA adopte sous la forme

    de Loi Uniforme (par exemple une Directive) par les Parlements nationaux, qui sont des

    normes de droit interne, ce sont les Actes Uniformes qui prvaudront en vertu de leur

    supriorit sur les lois internes 76 ;

    - Lorsquil sagit de conflits entre normes dapplication directe, notamment un Rglement

    UEMOA et un Acte Uniforme de lOHADA, on ne peut se satisfaire de ce que ces deux

    normes semblent, a priori, de mme niveau, et appliquer soit le critre chronologique,

    donc la rgle lex posterior derogant priori, ou le critre de spcialit pour appliquer la

    rgle specialia generalibus derogant ou la rgle generalia specialibus non derogant77.

    Pour solutionner ce conflit, Filiga Michel SAWADOGO et Luc Marius IBRIGA suggrent

    la prise en compte de quelques considrations dont il ressort que les A. U. delOHADA prvalent : la finalit des organisations communautaires dont les normes sont

    en conflit, le nombre dEtats participant chaque trait constitutif et le mcanisme

    judiciaire du contrle de lapplication des normes 78.

    Finalement, dans les deux hypothses les Actes Uniformes prvalent sur les normes de

    lUEMOA.

    C- LES INSTITUTIONS DE LOHADA :

    Les diffrentes institutions de lOHADA, aprs la rvision du Trait intervenue Qubec

    le 17 octobre 2008, sont:

    - La Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement ;

    - le Conseil des Ministres ;

    - le Secrtariat Permanent ;

    - la Cour Commune de Justice et dArbitrage (CCJA) ;

    - et lEcole Rgionale Suprieure de la Magistrature (ERSUMA).

    Le Trait et des Rglements fixent les rgles gnrales qui dterminent lorganisation et le

    fonctionnement de ces institutions79.

    76

    Filiga Michel SAWADOGO et Luc Marius IBRIGA, op cit.77 Voir Filiga Michel SAWADOGO et Luc Marius IBRIGA, op cit.78 Ibidem.79 V. Boris MARTOR et Sbastien THOUVENOT, Luniformisation du droit des affaires en Afrique

    par lOHADA , op cit.

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    30

    A loccasion de la runion du Conseil des Ministres de la Justice tenue NDjamna

    (Tchad), le 8 avril 1996, suivie de la runion conjointe des Ministres de la Justice et des

    Ministres des Finances, les siges des institutions ont t rpartis ainsi quil suit :

    - CCJA : Abidjan (Cte dIvoire)

    - Secrtariat Permanent : Yaound (Cameroun)

    - ERSUMA : Porto Novo (Bnin)

    Le 26 septembre 1996, les Ministres de la Justice et des Finances, runis Paris (France),

    procdent lattribution des siges des Institutions et la nomination des premiers

    responsables et des membres de la CCJA.

    Pour permettre lOHADA de privilgier la comptence et lintgrit dans le choix de ses

    cadres, la Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement de lOHADA, runie Qubec le 17 octobre 2008, a adopt une Dclaration mettant fin aux mesures transitoires

    dfinies par les Arrangements de NDjamna distribuant les postes entre certains Etats

    membres. En outre,larticle 49 du Trait rvis donne plus de prcisions que larticle 49

    originel quant aux privilges et immunits diplomatiques dont bnficient les personnels

    de lOHADA. En effet, jouissent de limmunit diplomatique, non seulement les juges de

    la CCJA, mais aussi les fonctionnaires et employs de lOHADA.ainsi que les arbitres

    nomms ou confirms par (la Cour) . Toutefois, les immunits et privilges peuvent tre

    levs par le Conseil des Ministres, selon les circonstances.

    I- La Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement :

    Le Trait de Port Louis , dans sa version originelle, nayant pas prvu de

    Confrence des Chefs dEtat ,le Sommet de Qubec du 17 octobre 2008 a remdi

    cette absence en prvoyant une Confrence des Chefs dEtat et de Gouvernement comme

    institution suprme de lOHADA.

    La Confrence est compose des Chefs dEtat et de Gouvernement des Etats

    parties. Elle est prside par le Chef de lEtat ou de Gouvernement dont le pays assure la

    prsidence du Conseil des Ministres 80.

    Elle est comptente pour connatre de toutes les questions relatives au Trait et,

    linstar des autres organisations multinationales, elle se runit linitiative de son

    80 Art. 27/1 du Trait rvis.

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    31

    Prsident ou celle des deux tiers des Etats membres. La Confrence est valablement

    runie lorsque les deux tiers des Etats parties sont reprsents, et les dcisions sont prises

    par consensus ou, dfaut, la majorit absolue des Etats prsents81.

    II- Le Conseil des Ministres :

    Le Conseil des Ministres de lOHADA, compar aux Conseils des Ministres des autres

    organisations multinationales, se trouve tre original tant par sa composition que par ses

    attributions.

    1- Composition du Conseil des Ministres :

    Il est compos des Ministres de la Justice et des Ministres des Finances des Etats

    membres. Il sagit l dune composition originale car en rgle gnrale les Conseils des

    Ministres des organisations sous-rgionales ou rgionales sont composs de Ministres dunmme dpartement. Trois raisons peuvent expliquer cette composition conjointe :

    - Dabord une raison historique car dune part, il sagit des matires judiciaires et, dautre

    part, lide du projet dharmonisation est une ide des Ministres de la Justice qui a t

    reprise par les Ministres des Finances ;

    - Ensuite, les domaines relevant du droit des affaires ont surtout une prdominance

    conomique et financire ;

    - Enfin et surtout, notre sens, pour responsabiliser des Ministres des Finances quant au

    devenir de lOHADA. En effet, nombre dorganisations ont cess dexister par manque de

    crdits, les Ministres des Finances tant souvent rticents pour effectuer des inscriptions

    budgtaires et/ou dbloquer des crdits pour des contributions aux organisations sous-

    rgionales ou rgionales, alors mme quil existe dautres urgences ou priorits. Rticence

    que lon comprend aisment quand on sait les difficults financires auxquelles sont

    confronts ces Etats.

    Au del de ces considrations, la mixit de cette composition peut tre rvlatrice de

    la volont des Chefs dEtat de faire de cette Organisation un instrument dintgration

    techniquement performant et bien conduit. En effet, la prsence du Ministre de la Justice

    est un gage du respect des normes juridiques pour llaboration des Actes, tandis que celle

    du Ministre des Finances est un gage de respect des engagements conomiques et

    81 Art. 27/1 du Trait rvis.

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    32

    financiers, pris par les Etats membres dans le cadre de leur intgration, le tout constituant

    un ensemble cohrent.

    2- Fonctionnement du Conseil des Ministres :

    1- La prsidence du Conseil est assure, tour de rle et par ordre alphabtique, par

    chaque Etat membre pour un mandat dun an. Toutefois, les Etats adhrents assurent

    pour la premire fois la prsidence du Conseil des Ministres dans lordre de leur adhsion,

    aprs le tour des pays signataires du Trait82. Lorsquun Etat nest pas en mesure dassurer

    la prsidence, quand elle lui revient, il est remplac par celui qui vient immdiatement

    aprs lui suivant lordre alphabtique ; lorsque la cause de lempchement aura cess, ledit

    Etat saisit en temps utile, le Secrtariat Permanent pour dcision prendre par le Conseil

    des Ministres, relativement son tour de prsidence.Le Trait OHADA ne mentionne pas lequel du Ministre des Finances ou de celui de la

    Justice, dun mme Etat, assure la prsidence du Conseil. Dans le silence dudit texte il

    convient de considrer que la prsidence est assure suivant la pratique dans chaque Etat

    membre ; aussi, le Conseil sera sans doute prsid par lun ou par lautre suivant que lEtat

    qui en assure la prsidence considre la prminence des aspects juridiques ou celle des

    aspects conomiques ou financiers.

    Cependant, il faut admettre quil sagit l dun dbat thorique car en rgle gnrale,

    sagissant surtout de questions judiciaires, le Conseil est prsid par le Ministre de la

    Justice.

    2- Le Conseil des Ministres se runit au moins une fois par an sur convocation de son

    Prsident son initiative ou linitiative dun tiers des Etats parties. Lordre du jour de la

    runion est arrt par le Prsident du conseil sur proposition du Secrtaire Permanent de

    lOHADA.

    3- Lorsquil est runi le Conseil dlibre valablement lorsque les deux tiers (2/3) des Etats

    parties sont reprsents. Chaque Etat dispose dune voix et les dcisions sont valablement

    adoptes la majorit absolue des Etats prsents et votants. Toutefois, les dcisions

    relatives ladoption des Actes Uniformes sont prises lunanimit des Etats prsents et

    votants.

    82 Art. 27/2 al 4 du Trait rvis.

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    34

    - lActe Uniforme relatif au Droit des Socits Commerciales et du GIE (AU/DSC/GIE),

    entr en vigueur le 1er/01/1998 ;

    - lActe Uniforme relatif au Droit Commercial Gnral (AU/DCG), entr en vigueur le

    1er/01/1998 ;

    - lActe Uniforme sur le Droit des Srets (AU/DS), entr en vigueur le 1er

    /01/1998 ;

    - lActe Uniforme sur les Procdures Simplifies de Recouvrement et des Voies

    dExcution (AU/PSR/VE), entr en vigueur le 10/07/1998 ;

    - lActe Uniforme sur les Procdures Collectives dApurement du Passif (AU/PCAP),

    entr en vigueur le 1er/01/1999 ;

    - lActe Uniforme relatif qu Droit de lArbitrage (AU/DA), entr en vigueur

    conformment larticle 9 du Trait, le 11 juin 1999 ;- lActe Uniforme portant Organisation et Harmonisation de la Comptabilit des

    Entreprises (AU/HCE)85, entr en vigueur en deux phases :

    . Les comptes personnels des entreprises : le 1er janvier 2001 ;

    . Les comptes consolids et les comptes combins : le 1er janvier 2002.

    - lActe Uniforme relatif aux Contrats de Transport de Marchandises par Route

    (AU/CTMR), entr en vigueur le 1er

    janvier 2004.

    Dautres Actes Uniformes sont en chantier ; il sagit notamment de lActe Uniforme sur le

    Droit des Contrats et de lActe Uniforme sur le Droit du Travail.

    III- Le Secrtariat Permanent :

    Cest lorgane excutif de lOHADA. Le 30 juillet 1997, le Gouvernement Camerounais et

    lOHADA signent un Accord de sige en vertu duquel le sige du Secrtariat Permanent

    est fix Yaound (Cameroun)86.

    1- Organisation du Secrtariat Permanent :

    Il est dirig par un Secrtaire Permanent nomm par le Conseil des Ministres pour un

    mandat de quatre (4) ans renouvelables une fois. Le Secrtaire Permanent est assist de

    trois Directeurs chargs des affaires suivantes :

    - Affaires juridiques et relations avec les institutions ;

    - Finances et comptabilit ;

    85 A cet A. U. est annex le Systme Comptable de lOHADA (le SYSCOHADA).86 Adresse : B.P 10071 Yaound (Cameroun). Tl. (237) 22 21 09 05 ; Fax. (237) 22 21 67 45 ;www.ohada.org

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    - Administration gnrale et Journal Officiel de lOHADA.

    Les Directeurs sont nomms par le Secrtaire Permanent dans les conditions prvues par

    larticle 40 Alina 2 du Trait.

    2- Attributions du Secrtaire Permanent :

    Le Secrtaire Permanent reprsente lOHADA et assiste le Conseil des Ministres ; il a

    pour principales attributions87 :

    1- lvaluation des domaines dans lesquels, luniformisation du droit est ncessaire et

    propose au Conseil des Ministres, pour approbation, le programme annuel

    dharmonisation.

    Lorsque le Directoire a t mis en place par les Chefs dEtat, il a dabord procd au

    listing de toutes les matires pouvant tre harmonises

    88

    . Les matires ainsi retenues fontlobjet de larticle 2 du Trait, mais il ne sagit pas dune liste fige car larticle 2 dispose

    que rentrent galement dans le domaine du droit des affaires, toutes matires que le

    Conseil des Ministres dcide lunanimit dy inclure conformment lobjet du Trait.

    Ainsi, sur proposition du Secrtariat Permanent, plusieurs autres matires ont t ajoutes

    par une dcision du Conseil des Ministres de lOHADA du 23 mars 200189 comme faisant

    partie du domaine du Trait90

    .

    Le Directoire a effectu un inventaire exhaustif et comparatif des textes qui existent dans

    tous les Etats et a mandat des experts chargs de rechercher la formulation juridique

    commune la plus simple, la plus moderne, la mieux adapte et donc la plus efficace 91.

    Le domaine du droit des affaires ayant t circoncis, il appartient dsormais au Secrtaire

    Permanent de proposer chaque anne un programme dharmonisation.

    2- le Secrtaire Permanent prpare les projets dActes Uniformes : cet effet il coordonne

    le travail des experts et des autorits participant llaboration des Actes dans chaque Etat

    87 Pour les attributions du Secrtaire Permanent, voir aussi les arts. 6, 7, 11, 29, 40 et 61 du Trait.88 Les matires suivantes ont t retenues : le droit des socits ; le droit commercial gnral ; le droit destransports ; le droit de la vente de marchandises ; le droit des procdures collectives ; le droit des srets ;le droit du recouvrement des crances ; le droit de larbitrage. Le droit du travail a t ajout la demandedes chefs dEtat et des oprateurs conomiques.89 Dcision no 002/2001/CM relative au programme dharmonisation du droit des affaires en Afrique.90

    Il sagit : du droit bancaire, du droit de la proprit intellectuelle, du droit des socits coopratives etmutualistes, du droit des socits civiles, du droit de la concurrence, du droit des contrats et du droit dela preuve ; voir cet gard : Boris MARTOR et Sbastien THOUVENOT, LUniformisation du droitdes affaires en Afrique par lOHADA , op cit.91 M. KIRSCH, Penant n 827 op. cit

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    partie. Il requiert ensuite lavis de la CCJA. Aprs adoption des Actes par le Conseil des

    Ministres, il assure leur publication au Journal Officiel de lOHADA.

    3- Il coordonne les activits des diffrents organes de lOHADA et suit les travaux de

    lOrganisation.

    4- Le Secrtaire Permanent propose au Prsident du Conseil des Ministres lordre du jour

    du Conseil ; organise llection des membres de la CCJA ; assure la tutelle de lERSUMA

    dont il est Prsident du Conseil dAdministration.

    5- Enfin, le Secrtaire Permanent est comptent pour procder la nomination de ses

    collaborateurs.

    IV- La Cour Commune de Justice et dArbitrage (CCJA)92 :

    Deux autres proccupations animent les Chefs dEtat comme les oprateurs conomiqueset les praticiens du droit, il sagit de luniformisation de la jurisprudence des affaires dune

    part, et, dautre part, celle de linterprtation des Actes Uniformes.

    A loccasion du sminaire dAbidjan, les 19 et 20 avril 1993, les travaux de latelier nIII

    se sont focaliss sur la question de savoir sil nest pas plus adquat de crer deux

    juridictions distinctes : lune pour la fonction juridictionnelle et lautre pour la fonction

    darbitrage. Les participants ont galement mis des inquitudes quant au cot lev pour

    les justiciables93 et ont suggr de faciliter laccs la Cour en organisant des sessions

    foraines ou encore en dplaant les juges dans les Cours Suprmes nationales.

    Finalement, face ces proccupations, le lgislateur communautaire a trouv les rponses

    adquates :

    - Il est plus consquent de crer une seule juridiction eu gard aux problmes financiers

    auxquels sont confronts les Etats membres et compte tenu de la raret du personnel

    qualifi ;

    - La Cour ninterviendrait quen lieu et place des Cours Suprmes ou Cours dEtat, dune

    part, et, dautre part, la procdure peut tre orale ou crite. Enfin larticle 19 du Rglement

    de Procdure de la CCJA dispose que la Cour peut se runir sur le territoire dun Etat

    partie, autre que lEtat du sige.

    92 Voir Joseph ISSA SAYEGH, Jacqueline LOHOUES OBLE, OHADA Harmonisation du droit desaffaires, op cit, no 390 582, pp 163 222.93 Sur les dpens voir Art. 43 du Rglement de Procdure de la CCJA.

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    Pour uniformiser la jurisprudence la solution consiste dsormais soumettre tout diffrend

    relatif lapplication des Actes dabord aux juridictions nationales du premier et second

    degrs puis la censure dune juridiction suprieure commune tous les Etats membres.

    En outre, pour uniformiser linterprtation des Actes Uniformes, cette interprtation est

    dsormais confie la juridiction commune.

    Enfin, le souci de vulgarisation de lutilisation de larbitrage pour le rglement des

    diffrends commerciaux, associ la volont de promouvoir une nouvelle conception de

    larbitrage, qui ne doit plus tre peru comme une dfiance au magistrat, amnent le

    lgislateur communautaire faire intervenir la juridiction communautaire dans le

    processus de la dcision arbitrale.

    En considration de tout ce qui prcde, le Conseil des Ministres runi NDjamna(Tchad) le 18 avril 1996, adopte les textes suivants:

    - Le Rglement de Procdure de la Cour Commune de Justice et dArbitrage (CCJA) ;

    - Les statuts de la CCJA ;

    - Le Rglement de Procdure dArbitrage.

    La Cour est officiellement installe Abidjan, lieu de situation de son sige94, et devient

    rapidement oprationnelle95

    . Apprciant la pertinence de la cration de la CCJA, le Pr

    Gilles CISTAC crit : Lattractivit du systme OHADA procde largement de la

    confiance en une instance judiciaire supranationale, labri de lincomptence, de la

    corruption, des pressions politiques et du trafic dinfluence. Ainsi, la cration dune

    juridiction supranationale contribue promouvoir la scurit judiciaire96 .

    1- Composition de la CCJA :

    La CCJA est compose de neuf (9) juges97 ; toutefois le Conseil des Ministres peut,

    compte tenu des ncessits de service et des possibilits financires, fixer un nombre de

    juges suprieur (.)98.

    94 Adresse : (01) B.P 8702 Abidjan (01) Cte dIvoire ; Tl. : (225) 20 33 60 51/52 ; fax : (225) 20 33 6053 ; www.ohada.org95 Abidjan (Cte dIvoire), le 22 juillet 1996 : mise en place de la CC