Composition Et Esthétique Dans La Mise en Forme de l’Espace Urbain ;Cas de La Brèche à...

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Composition Et Esthétique Dans La Mise en Forme de l’Espace Urbain ;Cas de La Brèche à Constantine Et Du Cours de La Révolution à Annaba

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  • REPUBLIQUE ALGERIENNE DEMOCRATIQUE ET POPULAIRE

    MINISTERE DE LENSEIGNEMENT SUPERIEUR ETDE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE

    UNIVERSITE MENTOURIFACULTE DES SCIENCES DE LA TERRE, DE LA GEOGRAPHIE ET DE

    LAMENAGEMENT DU TERRITOIRE DEPARTEMENT DARCHITECTURE ET DURBANISME

    N dOrdre : 105/MAG/2007Srie : 001/ARC/2007

    MEMOIREPOUR LOBTENTION DU DIPLOME DE MAGISTER

    OPTION : URBANISME

    Prsent par: BENABDERRAHMANE Kas Amor

    THEME

    Sous la direction de : FOURA M. M.C. Universit de Constantine

    Jury dexamen :

    Prsident : - Pr ZEROUALA Mohamed-Salah

    Rapporteur : - Dr FOURA Mohamed

    Examinateurs : - Dr ROUAG-SAFIDINE Djamila

    - Dr BENZAGOUTA-DEBACHE Samira

    Soutenu le : 08/05/2007

    Composition et esthtique dans la mise en forme de lespace urbain ;

    Cas de la Brche Constantine et du Cours de la Rvolution Annaba.

  • SOMMAIRE

    Introduction :

    Chapitre I : Approche thorique et mthodologique

    I.1. Introduction 1. La ville comme uvre 2. La culture et la ville ; lordre culturel lorigine de la cit 3. Actualit et pertinence du sujet 4. Lenvironnement bti

    I.2. Le travail de recherche 1. Objectifs 2. Problmatique3. Hypothses 4. Mthodologie adopte5. Cheminement mthodologique

    Chapitre II : Essai de dfinitions

    II.1. Lesthtique urbaineII.2. La composition urbaine II.3. Prise en compte de lesthtique dans la composition urbaineII.4. Linteraction esthtique - composition urbaine

    1. Lart urbain 2. La scnographie urbaine

    Chapitre III : Origines et volution du sujet

    III.1. Naissance des valeurs de composition et desthtique urbaines1. Linfluence des dcouvertes sur lart de btir2. Les premires expriences :3. Lesthtique et lordre urbains, lapoge

    III.2. Lexportation du modle1. Lenchanement baroque2. Le 18-20me sicles3. Lembellissement urbain

    III.3. Exemples 1. Londres et bath2. Paris3. Lexportation vers lAmrique

    III.4. Essai dinterprtation de lvolution de lesthtique et de la

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  • composition urbaines 1. Lutopie et la qute de la cit idale 2. Lurbanisme rationaliste et la mort des compositions urbaines

    2.1. La condamnation de lenchanement baroque2.2. Lesthtique et la composition urbaines face lurbanisme Moderne2.3. Le divorce entre Architecture et Urbanisme2.4. Composition, esthtique et grands ensembles

    III.5. Conclusion et synthse

    Chapitre IV : Principes de composition et desthtique urbaines

    V.1. Composition urbaine et dessin de villesIV.2. Compositions, esthtique urbaine et architectures :

    1. Les typologies architecturales :2. Les styles architecturaux :

    IV.3. Lesthtique et la composition dans les interventions urbaines1. Les compositions ex-nihilo2. Les extensions3. Les substitutions

    IV.4. Les instruments de composition et desthtique urbaines1. Les tracs

    1.1. Lapparition des tracs 1.2. Les tracs concrets1.3. Les tracs visuels

    2. Les dcoupages3. Les occupations au sol

    IV.5. Compositions, esthtiques urbaines et facteur temps1. Le temps :2. La ville durable3. Compositions, esthtiques et hritages

    3.1. Lhritage des tissus urbains 3.2. Lhritage des lments naturels urbains3.3. Le patrimoine3.4. Patrimoine, esthtique et compositions urbaines3.5. Compositions urbaines et esthtiques des villes ; entre productions nouvelles et patrimoine

    IV.6. Conclusion et synthse:

    Chapitre V. Etude de cas ; Le Cours de La Rvolution Annaba, place de la Brche Constantine

    V.2. Etat des lieux des modles urbains prsents en Algrie

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  • 1. Le modle urbain arabo-islamique et ottoman2. Le modle urbain colonial3. Linterpntration Villes coloniales / Mdinas

    4. Lhritage postindpendance V.3. Slection des cas dtudeV.4. Mthode danalyseV.5. Cas de la place de la Brche Constantine

    1. Prsentation de la composition dans la place de la Brche 2. Composition et esthtique urbaines

    2.1. La Brche, un lment de composition urbaine2.2. Les composantes

    3. Analyse critique des principes de composition et desthtique urbaines

    3.1. La Brche, une composition par substitution et par extension3.2. Principes de composition et desthtique urbaines

    1. Les tracs2. Les dcoupages3. Les occupations au sol4. Lalignement5. Les typologies architecturales6. Lenchanement et lunit des composantes

    V.6. Cas du Cours de la Rvolution Annaba 1. Prsentation du cas dtude2. La composition dans le Cours

    2.1. Le Cours, un lment de composition urbaine 2.2. Les composantes du cours

    3. Analyse critique de la composition et de lesthtique prsentes dansLe Cours

    3.1. Les tracs 3.2. Les dcoupages3.3. Les occupations au sol3.4. Typologies des btiments

    3.4.1. Btiments de type ordinaire3.4.2. Type extraordinaire :

    3.5. Enchanement et unit des composantesV. 7. Conclusion et synthse

    Conclusion gnrale BibliographieFigures et schmasRsums

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    Introduction : A travers leurs volutions, les villes engendrent divers langages urbains et architecturaux symbolisant la culture et lurbanit des populations qui y habitent. Aussi, dans une mme ville, lapparence des tissus urbains obit diffremment aux manires de mise en forme et dordonnancement choisis. En se dplaant entre deux parties distinctes dune mme ville, lon se met souvent vouloir comprendre ce qui fait engendre lagencement et lesthtique des lments architecturaux composant lune et non lautre.

    Loccasion se prsente dexplorer un sujet dont les ides et les concepts essentiels, en rapport avec cette volont de mise en forme, nous aiderons mieux cerner des mcanismes que lurbanisme a peu peu ignors, et qui sont pourtant si ncessaires llaboration de quelque intervention urbaine que ce soit. Ces concepts sont relatifs la dfinition quon veut donner la ville : est-elle le fruit dune volont de cration ? Dinfluences dues aux divers pouvoirs qui la dirigent ? Sa transformation nest-elle influence que par des statistiques dmographiques et conomiques, ou bien alors, la ville serait-elle un simple fait de hasard, un amas duvres architecturales et urbaines disposes dans un primtre dfini juridiquement et administrativement ? Selon quil sagisse darchitecture, durbanisme, de gographie, de sociologie ou de quelque domaine en relation avec les transformations touchant lapparence de lespace urbain, des dfinitions attribues la ville relativement chaque discipline apparaissent, celles-ci trahissent souvent les principales ides que ces domaines essayent distinctement de faire jaillir dans celui de lurbanisme, influenant ainsi les procds et les priorits prises en compte dans ce dernier. Pour nous, initialement architecte et de formation de post-graduation en urbanisme, dont la partie pratique fut essentiellement acquise au sein dquipes pluridisciplinaire pratiquant dans des bureaux dtudes spcialiss, il est naturel quun point de vue particulier concernant la question de lurbain se soit affirm. Afin de clarifier et de faciliter lintroduction de ce travail de recherche et son droulement par la suite, la prsentation et le choix dune des dfinitions gnrales donnes la ville et lurbain nous semble capitale. En effet, nous pensons que cette seule option sera susceptible daider mieux exprimer des ides introductives constituant ainsi un socle de dpart au travail en question.

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    Par la suite, en formulant une problmatique et des hypothses et en nonant une mthodologie adquate en rapport avec les objectifs que nous nous aurons fixs, nous pourrons exposer les principales tapes que relatera ce travail

    Chapitre I : Approche thorique et mthodologique : I.1. Introduction : 1. La ville comme uvre : La ville est souvent le fruit et la mmoire de lvolution de lhomme par rapport son milieu originel ; La Nature.

    Il est difficile de dfinir le phnomne urbain dans labsolu ; la ville pose toujours la question de sa relation avec la campagne avoisinante. Dune manire gnrale, la ville reprsente un espace de domination ; Une domination de lHomme pour lHomme bien sur ; lutte des pouvoirs, politique, et puis celle de ltre humain pour la nature.

    Karl Marx pensait que la dualit ville/campagne constituait une dynamique essentielle dans lhistoire et quelle refltait les deux ides : travail matriel et travail spirituel qui, selon lui, seraient la base de la lutte des classes1. La thse nature et son antithse culture se retrouvent reprsentes dune manire trs claire dans tout ce qui est lurbain et qui reprsente la ville dune part, et dans tout ce qui sy oppose, cest dire le non urbain, reprsentant la campagne dune autre. Pricls, disait de la ville quelle tait la plus belle cration de lhomme ; beaut quelle devait, avant tout, la diversit des milieux et des cultures qui la composent2. Franoise Choay, rejoint ces mmes dfinitions mais prsente la ville avec plus de nuancement, pour elle : le mot franais Ville et qui vient du latin villa dsignant un tablissement rural autarcique qui a souvent constitu le noyau des cits mdivales- permet de souligner lappartenance de la cit europenne prindustrielle la campagne 3. Cela sous-entend aussi le contraste faisant la distinction entre un tablissement urbain de ce son environnement dit naturel qui en mme temps nen reste pas pour autant spar. Dautres penseurs ont contribu, eux aussi leur manire, dfinir lide de la Cit par rapport au rural, Ibn Khaldoun par exemple, connu pour ses crits socioculturels, dfinit lurbain Al Oumran relativement au rural Al Badou.

    1 Karl Marx, Le Capital, PUF, 1993.

    2 BRL Pierre, Pricls, l'apoge d'Athnes, Gallimard, coll. Dcouvertes , 1994.

    3 CHOAY Franoise, MERLIN Pierre, Dictionnaire de l'urbanisme et de l'amnagement, PUF, Paris, 1988.

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    Lauteur nous prsente dans son ouvrage Al oumrane al badaoui - lurbain rural -, la campagne comme tant lorigine de la ville, cette dernire dit-il puise sa force et est influence du monde rural avoisinant. En se basant sur ces dfinitions ; on peut comprendre que la ville, dont beaucoup ramnent lvolution un processus infini et non une finalit prcise, constitue un des meilleurs exemples des limites traces entre une matrialisation de la culture de lhomme et ce que lui offre dautre part la nature, des limites floues toutefois, mais permettant nanmoins au phnomne urbain au mme titre qu la Culture davoir des rgles et un langage distincts.

    2. La culture et la ville ; lordre culturel lorigine de la cit : Nous signifions par ordre culturel, toute action impliquant une transformation et une remise en cause dun ordre naturel. Ce dernier reprsente les lments et les phnomnes dont les sources sont la nature et dont ltat est brut et spontan. En dautres termes, lordre culturel constitue toutes les rvolutions faites par lHomme vis--vis de la Nature ; cest de cette dernire que provient la pluie par exemple mais cest lHomme que revient lutilisation dun parapluie symbolisant un acte rvolutionnaire et une non-acceptation de lordre naturel rgnant. Dans les villes, nous pensons que cet ordre Culturel sest manifest divers degrs et de manires diffrentes ; des nuances existent, elles sont relatives aux diffrents passages dune acceptation passive de lordre Naturel lmergence dune rvolution vis--vis de ce dernier. Nous pensons que la ville fait partie des manifestations culturelles majeures que lHomme a su mettre en uvre. Elle doit, par consquent, se dmarquer de lacceptation dun tat initial des choses, cette dmarcation puise ses sources dans les dbuts de la civilisation, Bernard Lebleu formule ce propos : "La cration des villes s'inscrit dans un mouvement de spiritualisation des socits : la culture, le raffinement des murs, des arts et des sciences devaient progressivement prendre l'ascendant sur la force brute et la puissance matrielle seuls principes, avant l'avnement de la civilisation grecque, capables d'assembler les hommes"4. Les manires de vivre des socits diffrent en fonction de leurs cultures et du degr de civilisation quelles adoptent ; les tablissements humains naissent dune volont dappropriation de lespace, ils se transforment par la suite progressivement passant de ltat

    4 LEBLEU Bernard, Les cits radieuses, Dossier "cit" encyclopdie L'agora.

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    de site naturel celui de lieu culturel induisant la mise en forme dun tablissement urbain. De plus, si lide de ville provient rellement de celle de culture , la sdentarisation est davantage une manifestation culturelle, elle incite lappropriation dun lieu, son dveloppement et sa mise en uvre suivant des influences politiques, cultuelles, militaires, ou autres ; cest, en somme, une volont de rguler et de matriser l'tat initial dun site. Dun autre ct, lespace urbain influence le mode de vie des citadins ; dans deux villes diffrentes, on vit forcment diffremment. Une sorte de relation rciproque se cre alors entre la ville et la culture, lune produit lautre et lautre lentretient.

    A propos de limportance de la relation entre lavenir dune socit et la mise en uvre de son destin et donc, dune manire plus prcise, celui de sa culture et sa relation avec la mise en forme de son environnement, J. Attali nous rapporte : "Les peuples qui refusent d'chafauder des plans pour leur propre avenir en donnant un sens leur mmoire s'excluent de la dfinition de leur destin. En renonant toute explication gnrale du mouvement du monde, ils excluent tout projet global autre que ceux que leur impose l'extrieur. Ils laissent d'autres le soin de faonner le monde, d'inventer ou de pressentir les moeurs, les dsirs, les objets, les techniques du futur. L'histoire nous apprend que, dans les lieux de cet abandon et de ce pointillisme, rien d'essentiel ne se joue plus; ni les masses ni les lites n'y sont plus en mouvement, la science n'y accomplit plus de progrs majeurs, la technologie ne s'y forge plus. La culture elle-mme y perd ses rvoltes et ses rves"5 . Il est essentiel de rappeler quel point peut compter le rle prsent et surtout avenir de la volont de produire des modles architecturaux et urbains. Limage dun modle urbain dont la mise en uvre est le fruit dun acte volontaire, diffre de celle dun modle dont laspect est un amas de productions architecturales sans liens formels ni structurels.

    Il est certain que la ville est une uvre part entire. Dun point de vue culturel, il est ncessaire quelle soit conue et mise en forme en tant quentit, cest pour cela que son image et son esthtique doivent tre abordes dune manire globale exprimant un acte volontaire et non une consquence inattendue doprations distinctes. La remise en cause lide dun mme souci esthtique appliqu lchelle de la ville implique celle de lurbanisme lui-mme en tant que discipline, ce fut un art lart de btir, lart urbain,- bien avant dtre un ensemble de techniques ou de rglements.

    5 ATTALI Jean, La figure de Fraser, Fayard, Paris, 1984.

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    Vouloir attribuer une esthtique urbaine un lieu donn nat dune volont de rguler laspect des composantes de ce lieu ainsi que celle de linteraction de leurs apparences, cette attribution nat dune dtermination matriser l'aspect global de lespace urbain.

    Fig. 1. Ordre culturel et ncessit de la composition et lesthtique urbaines

    Lors de llaboration dun espace urbain, comme ce qui est pour toute cration culturelle, le besoin de mise en uvre dun ordre culturel appelle une volont de donner une esthtique globale au cadre bti et non bti ; La composition urbaine devient une des principales manifestations et un moyen essentiel pour atteindre cet objectif.

    Culture =/= Nature Ordre culturel =/= Ordre naturel

    La ville, rsultat dun acte volontaire de cration.

    La ville en tant que cration voulue induit une matrise de ses formes et de son aspect

    globaux.

    Ncessit dun agencement de lespace urbain : art urbain, urbanisme oprationnel,

    composition urbaine,

    Lesthtique globale de la ville passe par une mise en forme commune des diffrents

    lments la composant.

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    3. Actualit et pertinence du sujet : La culture urbaine passe par limage que les lments entrant dans la composition de la ville laissent percevoir. Cette image est le fruit, parfois aussi une consquence inattendue, dinteractions entre diffrents langages artistiques, architecturaux et urbains. Une volont de donner une image urbaine prcise exige quon tienne compte de lexpression formelle de tous les lments composant lespace urbain. Aucune ville ne devrait ressembler une autre ; cest cette spcificit qui fait que limage dune ville ne peut appartenir qu elle et elle seule.

    De plus en plus, un besoin de composer ou de recomposer les architectures des villes se ressent, car il apparat clairement que la cit est avant tout une cration artistique et

    lexpression dune culture une poque prcise. Beaucoup dvnements touchant au devenir des villes et de leurs architectures induisent une prise de conscience par rapport ce sujet longtemps ignor. La pertinence dun retour vers la composition et lart urbains est due avant tout aux mauvaises consquences quune urbanisation standardise et une dyslexique des langages urbains et architecturaux ainsi que lincohrence des diffrentes architectures qui ont constitu jusqu prsent les tablissements humains, ont pu causer. Cet impratif se manifeste notamment au sein dorganisations grant les professions lies lavenir des villes ; cest ainsi que le conseil des Urbanistes Europens dclare dans La nouvelle charte dAthnes rdige en novembre 2003 ce qui suit : Ainsi, lart urbain et la composition urbaine seront les lments essentiels de la renaissance des villes. Ils permettent de corriger les dislocations entre les parties de la ville et de poursuivre la prservation du caractre propre chaque ville par diffrentes formes de politiques de lespace urbain et diffrentes catgories de mesures et dinterventions pour lesquelles lurbaniste jouera un rle-cl6. Ce retour intervient dans une priode de remise en cause des grands ensembles urbains, de larchitecture des banlieues priphriques et de lurbanisme de zoning qui sont peu peu abandonns pour des projets plus harmonieux avec la ville qui les accueille et qui sont ainsi mieux et plus rapidement adopts par les utilisateurs de ces espaces.

    6 Conseil Europen des Urbanistes, La Nouvelle Charte dAthnes 2003 ; La Vision du Conseil Europen des

    Urbanistes sur Les Villes du 21ime sicle. Lisbonne, 20 novembre 2003.

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    De nombreux travaux dmontrent limportance des effets de laspect du cadre bti sur le comportement des individus et des socits, et ce, suite aux consquences ngatives que la plastique de ce genre de projets a eu sur le mode de vie urbain. Les architectes et les urbanistes sont concerns plus que tous les autres par ce besoin en nouveaux modes dapproches du projet urbain et des projets pour la ville. Ces nouvelles pratiques devraient avant tout viser combler lchec des quelques recettes appliques jusqu prsent par ces mmes professionnels. La ncessit dun retour vers des mthodes tenant compte dune harmonie et dune cohrence des lments constitutifs de lespace urbain intervient un moment ou se dresse un bilan ngatif des politiques adoptes jusqu prsent. En effet, linflexibilit des rglements durbanisme et lincohrence des architectures intrieures des villes7 constitue un rel problme pour limage de ces dernires, car mme si cette rigueur peut savrer un avantage certain dans des domaines lis la scurit ou au fonctionnalisme, sa relation lesthtique et limage de la ville pose un problme. Comment ces rgles peuvent elles tre rigides et inflexibles alors quelles concernent la cit et que cette dernire est connue pour tre changeante chronologiquement ? La rponse est facile. La ville na pas toujours t luvre dartistes soucieux de sa beaut ; dans lhistoire de lurbanisme, lesthtique na pas tout le temps t considre comme une valeur primordiale dont doit se soucier lurbaniste et les autorits concernes. Dans une priode rcente, celle de lurbanisme moderne plus particulirement, lesthtique de la cit a t apprcie comme un surplus formel dont on pouvait se passer afin de traiter mieux et plus rapidement des problmes qui semblaient tre plus importants ; temps de crise ou dlais trop courts obligent. La consquence est quon se retrouve avec des morceaux de ville disparates que celle-ci rejette tels un corps auquel on grefferait des implants non compatibles. En effet, les disparits des espaces de la ville ne sont pas seulement concernes par la mauvaise rpartition des infrastructures (transports, programmation dquipements) ou lis au niveau de vie des habitants (quartiers dfavoriss pour populations pauvres, quartiers pour population aise). Elles sont en majorit relatives au cadre urbain, son image et son esthtique. Sil ne veut lignorer, lurbaniste joue un grand rle dans cette image rsultante, alors que sa responsabilit premire consiste avant tout orchestrer les langage et les plastiques des architectures qui composent la cit, il se retrouve souvent appliquer des recettes et des

    7 WILMOTTE Jean-Michel, Architecture intrieure des villes, Le Moniteur, janvier 1999.

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    rglementations pour le moins machinales, destines puisque l est leur essence mme- standardiser lapproche de problmes diffrents lorigine, par une redondance de rgles et une impermabilit aux changements culturels et sociaux enregistrs au fil du temps. Dune manire gnrale, des mmes rgles donnent lieu des solutions similaires, cette similarit engendre inluctablement des erreurs semblables. Pierre Riboulet note ce propos : L'acte crateur du compositeur est d'unifier dans un tout cohrent des parties diffrentes en sauvegardant et en exprimant ces diffrences dans l'oeuvre unique et en cela donne du sens.8. Il est donc primordial de tenir compte dune vision plus globale de limage urbaine. Lurbanisme qui connat actuellement une remise en cause des mthodes sur lesquelles a longtemps prim le fonctionnalisme ainsi que les longues planifications, se cherche

    nouveau. Parmi les retours annoncs, le projet urbain connat sans doute une rentre des plus remarqus, lart urbain de son ct se voit redfini en fonction des nouvelles influences artistiques et du design et la composition urbaine en tant qulment donnant lespace de la ville un aspect rsultant de linteraction des morphologies et des esthtiques de ses diffrentes composantes semble tre une solution adquate afin de combler les lacunes accumules des prcdentes dcennies.

    4. Lenvironnement bti : Aristote disait les personnes sont la matire de la cit, et son ordonnance et sa gouvernation en sont la forme 9. Les romains tudirent leur tour les composantes essentielles dune ville. Pour eux ces composantes sont : Urbs ; reprsentant le territoire physique de la ville, et Civitas ; ses habitants. Aujourdhui cette ide de deux lments composant la ville limage dun ordinateur ou un software et un hardware sopposent et se compltent la fois est toujours valable. La citadin, dans sa relation sa ville, sadapte cette dernire, car sil a pu se rvolter contre les lments de la nature, cette mme tche est devenue plus complexe lorsquil sest agit de sadapter loeuvre culturelle que peut tre la cit et qui est le fruit de sa propre cration. La ville construite par lHomme pour lHomme ne peut laisser ses habitants indiffrents ce qui les entoure. Tout lenvironnement urbain est charg de messages ; la culture, la politique,

    8 RIBOULET Pierre In La composition urbaine, Note et essai bibliographique, octobre 1996, centre de

    documentation de l'urbanisme, Ministre de l'quipement, du logement, des transports et du tourisme. 9 DOUANGMANIVANH Alain, Ville, dfinition, In revue Architecture, ville et territoire ; n216

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    la religion ou les pouvoirs, se voient exprims travers des monuments, des mmoriaux, des btiments officiels, des lieux cultuels ou culturels, des places etc. et surtout aussi, de lassemblage de ces derniers. On parle souvent dadaptation lorsquon traite de la vie dune personne ou dune communaut dans un milieu nouveau, des valeurs comme celle de la citoyennet ou la citadinit surgissent en particulier lorsque ce milieu est urbain. Le nationalisme moribond et le systme dtat nation svanouissant dans les macro structures conomiques et culturelle (Amrique, Europe, Asie du sud est), le monde daujourdhui, appelle de nouvelles valeurs. Ce seront sans doute les appartenances aux villes qui resurgiront une fois de plus afin de pouvoir offrir de nouveaux repres. Aujourdhui plus que jamais, la ville est llment essentiel capable de proposer une ducation lurbanit et la citadinit. En lan 2000, la moiti des habitants du globe vivait dans les villes, ce chiffre va en saccroissant. Bientt peut tre il ny aura dans les campagnes que trs peu de populations. La culture urbaine engendrera probablement des spcificits et des styles de vie nouveaux. Ne parle-t-on pas dj de citoyens du monde ou de population urbaine mondiale? Les rseaux de villes, et les cultures urbaines communes feront sans doute surgir une nation mondiale dont les valeurs et les modes de vie seront trs similaires. Ceci souligne limportance que prendraient alors les paysages urbains et ce quils pourraient offrir comme repres aux habitants des villes travers leurs images et leurs langages. On a cherch depuis toujours atteindre limage dune ville dont la principale vertu serait l'harmonie, cela a mobilis les nergies de gnrations entires. Lesthtique dune ville, charge de messages, influence incontestablement la manire de vivre des habitants, comme le rapporte Georges Rodenbach dans son recueil Le Carillonneur : L'esthtique des villes est essentielle. Si tout paysage est un tat d'me, comme on a dit, c'est plus vrai encore pour un paysage de ville. Les mes des habitants sont conformes leur cit. Un phnomne d'un genre analogue se produit pour certaines femmes qui, durant la grossesse, s'entourent d'objets harmonieux, de statues calmes, de jardins clairs, de bibelots subtils, afin que l'enfant futur s'en influence et soit beau. De mme on ne conoit pas un gnie originaire d'ailleurs que d'une ville magnifique. [...] Ce sont les belles villes, sans doute, qui font les mes belles 10.

    10 RODENBCH Georges, Le Carillonneur, E. Fasquelle, Paris, in-12, 325 p. 1897

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    Georges Rodenbach, traite de la beaut dune ville, or, mme si cette beaut reste relative lapprciation de chacun, lesthtique quant elle, ou du moins sa recherche et la volont de latteindre entant que qualit, ne pourrait moins laisser indiffrents.

    De nos jours, l'irruption des nouvelles technologies (tlphonie, Internet, tlvisions et autres NTIC...) modifie notre perception de l'espace urbain ; grce ces nouveaux mdias, lhabitant du petit village le plus recul peut avoir une apprciation et un jugement vis--vis dun espace urbain semblables ceux dun habitant dune mtropole. Il est clair quon assistera dans les annes venir de nouvelles exigences des populations urbaines car celles-ci nauront plus besoin de se dplacer pour se faire une ide, du moins concise, sur le rang quoccupe leur ville par rapport aux autres. Il nous faudra alors chercher amliorer limage de nos villes en fonction de la perception de leurs habitants ; cette perception sera sans doute de plus en plus universelle mais se mlera aussi aux cultures locales dj encres en chacun. Dans ce cas, aucun systme prtabli ni aucun rglement ne donnera des rsultats satisfaisants. Voici ce que souligne Pierre Riboulet propos de linadaptabilit des rglements dans des cas dinterventions diffrents : Le rglement par nature ne peut penser les diffrences, il uniformise, il organise la rptition, il n'est capable que d'une vision univoque des choses 11. Il est sans doute temps de chercher de nouvelles manires de concevoir lespace urbain, cela passera ncessairement par une remise en cause des mthodes actuelles et par une recherche de nouvelles approches. Des approches visant satisfaire, en premier lieu, les attentes des utilisateurs de lespace urbain.

    11 RIBOULET Pierre In confrences Paris darchitecte, pavillon de larsenal ed. Les mini PA, Paris, 1994.

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    I.2. Le travail de recherche : 1. Objectifs : Ce travail vise avant tout la comprhension du sujet de la composition et de lesthtique urbaines. A travers un cheminement mthodologique nous voulons aboutir : 1/ Cerner la relation entre lesthtique urbaine dun ct et la composition urbaine de lautre. 2/ Dceler les principes et les concepts capables de donner lieu des approches tenant compte de lesthtique globale du cadre bti dans des interventions urbaines diffrentes. 3/ A travers nos deux cas dtudes (La cas de la place de la Brche Constantine et celui du Cours de la rvolution Annaba), nous visons apporter notre participation lanalyse dune partie importante du cadre urbain algrien communment appel modle colonial . Ltude de ces cas nous aidera consolider les ides que nous aurons prsentes thoriquement afin doffrir des solutions palpables dj excitantes dans notre environnement urbain. Dune manire gnrale, ce travail apporte sa contribution ainsi quune sorte de plaidoirie la manifestation dun retour vers des moyens dagencements et de mise en formes autres que ce qua connut lurbanisme jusqu prsent ; ces manires sont selon nous susceptible de donner lieu une prise en compte des exigences dharmonie, de cohrence et desthtique dans le cadre urbain.

    2. Problmatique : A une poque ou la communication, limage et les langages visuels sont devenus des parties intgrantes de notre mode de vie, laspect des uvres faites par lHomme a pris plus dimportance relativement aux dernires dcennies. Limage est devenue aussi bien un moyen de communication (tlphones mobiles, banalisation de prsence dcrans et autres NTIC) quun outil de commercialisation (spot publicitaires, prospectus, flyers, vido-clips). Lapparence du cadre bti sera logiquement, linstar de tous les domaines artistiques et techniques, de plus en plus tenue en compte dans la mise en forme de lespace urbain. On voit dj, dans notre pays comme ailleurs, une plus grande valuation des paramtres daspect et desthtique dans les projets urbains. Ce renouveau se manifeste essentiellement travers les prsentations des bureaux dtudes spcialiss dans le domaine de larchitecture et de lurbanisme et des pouvoirs publics ainsi

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    que des citoyens qui y accordent une importance majeure ; les logiciels de PAO et CAO utiliss volont dans les prsentations de ces projets en sont un bon exemple.

    Nanmoins, sur le terrain, le problme semble tre tout autre. Bien quil y ait une meilleure qualit de travaux dans le domaine du btiment (amlioration des techniques et des matriaux de construction, notamment dans les projets des promoteurs privs), on ne voit pas, cependant, se dessiner une satisfaction quant linsertion de ces projets dans la ville ou linteraction de leurs esthtiques et de leurs langages architecturaux. Les instances officielles, les mdias et les habitants des villes crient luniformit et la dsorganisation des grands ensembles et des cits comme le souligne le rapport du CNES concernant les villes algriennes : Par certains cts, les villes renvoient fidlement limage des conceptions gnrales ayant prsid leur mode de gestion. Uniformit, dsorganisation, inadaptation sont la marque de ces conceptions qui ont contribu, des annes durant produire une accumulation de blocages directement rpercuts sur les villes, et auxquels il na pas t remdi en temps voulu .12 Il est donc opportun denvisager des mthodes autres que celles utilises jusqu prsent. Cette nouvelle rflexion se manifeste essentiellement par une remise en cause des penses issues de lurbanisme moderne qui, introduisant des manires dites rvolutionnaires mises en uvre afin daborder les projets lchelle urbaine (instruments durbanisme, zonages, production la chane du cadre bti ), a cr une rupture avec les mthodes acquise des temps passs. Limportance quont pris les projets et les interventions urbaines partir de la Renaissance, poque o on a pu recycler les procds hrits des temps antiques, et qui se sont perptus jusqu une poque trs rcente, sest vue estampe par le nihilisme et la ngation qui furent ports par le courant moderniste. Aujourdhui dans le monde, on remarque un retour vers la composition, le projet et lart urbains notamment dans les discours des professionnels, des colloques ou dans les projets lancs par les collectivits, les promoteurs privs ou les gouvernements. Ce sont les dbats dans les villes qui nourrissent ce retour tant attendu de nouveaux modes de conception. Ces discours touchant au cadre urbain, de la morphologie et de lesthtique des villes sortent peu peu des cercles ferms des professionnels et des reprsentant du pouvoir pour investir la rue elle mme.

    12 CNES, Rapport sur La Ville Algrienne ou Le Devenir Urbain du Pays (source : WWW.CNES.DZ)

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    Cest ainsi que des associations, des clubs de rflexion et des anonymes partagent des avis diffrents mais convergents sur lurbanisme des villes,le but tant dexprimer une insatisfaction par rapport lordre rgnant. Si lurbanisme moderne na pas su offrir de contentement quant une apparence esthtique et harmonique du cadre bti des villes, il existe des manires de faire capables doffrir au cadre urbain un aspect rsultant dune recherche esthtique et dun agencement de tous les lments le composant.

    Parmi ces procds, la composition urbaine a pu donner par le pass une importance lesthtique globale de ce cadre bti, ce que nous rapporte Pierre Riboulet : Depuis les premiers tracs de villes, la composition urbaine a eu pour rle de dfinir lorganisation de lespace de la ville ou du quartier amnager//ses objectifs sont :

    - Fournir une image globale. - Fixer des rgles relatives la localisation, limplantation et llaboration des

    projets successifs de construction. 13

    Ce qui nous intresse dans ses propos, cest bien sur le point dans lequel P. Riboulet nous annonce que limage globale de lespace de la ville rsulte de la composition urbaine ; on comprend que ltablissement dune esthtique du cadre bti ne peut tre que le rsultat dune vision globale de lespace urbain qui est elle-mme le fruit de la composition urbaine. Pour nous, saisir linteraction entre esthtique et composition urbaines sera sans doute favorable mieux concevoir le sujet dune esthtique globale applique au cadre bti. Toutefois, ce sujet en question implique, pour une meilleure conceptualisation, des questionnements du genre : - Quelle est linteraction entre la composition urbaine et lesthtique globale du cadre urbain ? - A quelle poque apparurent et furent intgres les valeurs de composition et desthtique urbaines dans lespace des villes et quelle fut lvolution chronologique de celles-ci depuis cette apparition jusqu lurbanisme moderne o lon dplore un abandon total en matire de souci appliqu lagencement et laspect de lespace urbain ? -Y a-t-il un certain nombre de principes ou de concepts susceptibles dapporter un aspect harmonique et esthtique globaux au cadre des villes ?

    13 RIBOULET Pierre In Confrence Paris darchitectes, Pavillon de larsenal, Ed. Le mini PA, Paris, 1994.

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    - Existe-il, en Algrie, des exemples de cadres btis rsultants dun agencement de la sorte ? Ces exemples ont-ils obit dans leurs conceptions aux principes de composition et desthtique urbaines ? Nous essayerons de rpondre ces questions et dautres interrogations au fur et mesure quavancera ce travail de recherche. Nanmoins, nous avons, ds maintenant, une ide sur dventuelles rponses certaines dentre elles.

    3. Hypothses : __Le souci doffrir au cadre urbain une image manant dune approche esthtique commune tous les lments le composant nest pas simplement un fait dactualit ou un sujet de mode ; il y eut, dans le pass, la recherche dune esthtique globale intgrant les composantes du cadre bti dans leur totalit en vue dune apparence commune dont lharmonie et lquilibre taient les buts atteindre. __ Lesthtique urbaine est le fruit dune manire particulire dagencer lespace des villes, celle-ci est diffrente des outils quutilise lurbanisme actuel. Il apparat que la composition urbaine, tant un moyen dont le but essentiel est de crer des relations spatiales et morphologiques entre les lments constitutifs du cadre urbain, offre ltablissement de cette esthtique urbaine. De plus, les instruments de base servant la composition urbaine sont ceux-l mmes capables doffrir une esthtique globale au cadre bti. Ils reprsentent linteraction entre les deux sujets ; compositions dun ct et esthtiques urbaines de lautre. __Il existe dans les villes algriennes, un modle urbain dont la mise en uvre sest faite en tenant compte de lintgrant de la notion desthtique et de composition urbaines ; Le modle urbain colonial est sans doute celui, parmi tous les modles existants dans lenvironnement urbain algrien, dont les rgles de conception obissent le plus aux principes de composition et desthtique urbaines.

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    4. Mthodologie adopte : Afin darriver aux objectifs susmentionns, nous nous baserons sur la mthode suivante : 1/ Pour ltude et lanalyse des origines de la composition et de lesthtique urbaines nous nous appuierons sur une diversit douvrages et de recherches traitant de lhistoire de larchitecture et de lurbanisme. Une lecture historique du sujet engendrera un cheminement chronologique visant expliquer lvolution du sujet ainsi que ses principales caractristiques que nous isolerons dans des priodes et des exemples diffrents. Dautre lon pourra tenter dy expliquer les raisons de labandon des anciennes mthodes aux profits des procds de lurbanisme moderne. 2/ Afin disoler les principes et les concepts engendrant les compositions et sur lesquelles se fondent les esthtiques globales du cadre bti, nous nous baserons sur une lecture analytique et conceptuelle dont le but est disoler ces concepts et ces bases en question. Ceux-ci nous serviront mieux analyser les cas dtudes choisis. 3/ Dans la partie consacre ltude de cas, nous aurons expliquer le choix des cas analyss. Pour cela, nous dresserons dabord un tat des lieux des modles urbains prsents en Algrie et nous argumenterons notre choix en consquence.

    Dans cette mme partie, une analyse critique et valuative serait adquate afin dapprcier lemploi des bases et des instruments de composition et desthtique urbaines que nous aurons distingus dans la deuxime tape de notre travail ainsi quune valuation gnrale de la prsence de la composition et de lesthtique urbaines dans chacun des cas dtude choisis.

    Les diffrentes parties de ce travail seront soldes par une synthse et/ou une conclusion, la somme de ces chapitres en question bnficiera quant elle dune conclusion gnrale et de recommandations correspondant aux rsultats qui ressortiront vers la fin.

    5. Cheminement mthodologique : Aprs avoir pris soin de dfinir les principales ides et notions touchant au sujet, nous aurons suivre un cheminement dans lequel chaque partie du travail ne pourra tre indpendante des autres.

    Une partie prcdant lautre, la seconde se basera sur les conclusions de la premire afin doffrir son tour dautres rsultats jusqu la conclusion finale qui sera la synthse de tous les rsultats trouvs. (Voir schma page 16).

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    Conclusion et/ou synthse

    Conclusion et/ou synthse

    Conclusion et/ou synthse

    Fig. 2 Rcapitulatif du cheminement mthodologique adopt

    Lecture historique

    Comprendre lvolution du sujet de recherche depuis son apparition jusqu lpoque actuelle

    en se basant sur des ouvrages traitant de lhistoire de lurbanisme et de larchitecture des

    villes.

    Lecture analytique et conceptuelle

    Dceler, grce la lecture historique ainsi que la consultation douvrages de rfrence, les

    principes et les mthodes servant la composition et lesthtique urbaines

    Analyse critique et valuative

    Aprs le choix des cas dtudes, valuer lesthtique globale et la composition prsentes dans les tissus choisis, analyser la composition

    urbaine et les lments donnant lieu une esthtique globale.

    Conclusion gnrale

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    Chapitre II : Essai de dfinitions : Avant dentamer la recherche proprement dite touchant exclusivement linteraction entre le sujet de lesthtique et celui de la composition urbaine, voyons ce quinduit chaque notion distinctement, puis linteraction de chacune delles avec lautre. Cette partie pourra par la suite constituer une sorte de toile de fond et servira, entre autre, baliser le travail de recherche afin de mieux le mener son terme.

    II.1. Lesthtique urbaine : Le mot Esthtique provient du grec aisthesis qui signifie sensation. Lesthtique est une : branche de la philosophie qui a pour objet l'tude du beau, son essence et sa perception. L'esthtique porte galement sur la question de savoir si le beau est objectivement prsent dans les choses ou s'il est une qualit que l'esprit attribue aux objets ; aussi cherche-t-elle dfinir les processus qui prsident la perception des uvres d'art, et s'interroge galement sur la diffrence entre le beau et le sublime 14. Un objet obissent une esthtique particulire est un objet dont lapparence est recherche travers un processus de production tenant compte des sensations que llment donne l'esprit humain. Cest moins la beaut dun objet que son obissance une volont de crer du beau qui est vise travers une approche esthtique.

    Viser lesthtique est ainsi dabord un souci plus quune volont datteindre une qualit prcise, et est donc moins une finalit atteindre que le choix dun moyen de production artistique prcis.

    La beaut, souvent rapporte tort lesthtique, reste relative lapprciation dun objet par des individus diffrents, car tant subjective, elle appartient linconscient. Lesthtique par contre est exprime travers une recherche qui, bien que parfois peut laisser insensible une quelconque beaut, donne quand mme une ides sur la volont dattribuer cette qualit un objet lors du processus de sa cration. Lexemple du design la fois discipline et vertu rsume assez bien cette ide ; un objet dit design est un objet ayant obit lors de sa cration un processus productif prcis (esquisse, maquette,) et a donc une proprit esthtique le diffrenciant dun objet non design.

    14 Source : Encyclopdie Encarta, 2003.

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    A lchelle de la ville, la recherche esthtique est exprime par une volont datteindre limage dun ensemble cohrent et harmonieusement agenc et est avant tout la prospection dune unicit et dun aspect assemblant les composantes de lespace urbain. En d'autres termes, en urbanisme, l'esthtique est la manire dagencer, dans un souci de beaut et de cohrence de l'image globale du cadre bti, laspect des objets composant la ville.

    Dun autre ct, lesthtique urbaine appelle lart urbain de la mme manire que lesthtique appelle lart, lart urbain est dailleurs lune des premires appellations de lurbanisme qui ds son apparition en tant que discipline distincte de lart de btir et donc de larchitecture permit de synthtiser, dans un souci dquit, les trois valeurs de beaut, solidit et fonctionnalit connues bien avant cela dans le domaine de larchitecture15. Nanmoins, mme si lesthtique urbaine est une qualit dont certaines villes peuvent jouir lors des interventions, grce une volont politique, de bonnes conditions conomiques ou autres, elle nest cependant pas intgre d'une manire franche et directe dans les processus de rflexion engendrant le cadre bti autant quelle lest dans le domaine de larchitecture o les influences artistiques concernant chaque btiment distinctement restent trs prsentes. En d'autres termes, le souci esthtique devrait se manifester davantage dans l'intgration de valeurs dart et d'esthtique au cur mme des thories de lurbanisme, chose qui nest souvent pas apparente dans les codes et les instruments durbanisme auxquels se rfrent en priorit toute intervention urbaine. Plus qu'une simple prsence dans les instruments d'urbanisme classiques, elle devrait tre l'origine de toute rflexion concernant le bti. Aussi, trs souvent, lon se retrouve choisir entre l'utilit d'une uvre et son esthtique. Voici ce que dit Robert de Souza ce propos: Aussi je considre que notre socit a le devoir de rappeler en premier lieu que non seulement lutilit ne saurait tre ncessairement par elle-mme de la beaut, mais quil nest pas de beaut qui ne soit pas elle-mme une utilit, que sans cette double mise au point lurbanisme fera de plus en plus faillite. Il est urgent de prsenter des vux pour que le mot esthtique ne soit pas ddaign ou redout dans les lois et dcrets ou il ne figure jusquici quavec une timidit qui en souligne lostracisme habituel pour quil entre au contraire toujours davantage dans lusage courant, pour quenfin ce quil reprsente ne soit jamais absent des actes de nos administrations 16.

    15 Les Dix Livres d'architecture, Vitruve, traduction intgrale de Claude Perrault, 1673, revue, corrige sur les

    textes latins et prsente par Andr Dalmas, Balland, Paris, 1979 16

    DE SOUZA Robert, In Jean-Pierre Gaudin, Desseins de villes, LHarmattan, 1991.

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    Lesthtique urbaine pose donc une problmatique relative lapprciation de sa recherche aprs que les "objets" composant la ville aient t mis en place, mais ne peut tre apprcie que rarement travers des impratifs de rflexion et des politiques urbaines en amont de toute intervention.

    Il apparat clairement que la ville, envisage en tant quobjet "artistique", ncessite que soient pris en compte un certain nombre dlments lis au devenir de son image, et ce, dans toute intervention urbaine.

    II.2. La composition urbaine : Depuis son apparition, la composition urbaine a eu pour rle de dfinir l'organisation de l'espace de la ville ou du secteur amnager. Elle eut pour double objectif de fournir une image globale de la ville ou de lespace urbain dun cot, et de fixer des rgles relatives lemplacement, l'implantation et lenchanement des projets successifs de construction de lautre. En dautres termes, parler de composition urbaine, cest se pencher dune manire certaine sur le paradoxe dune vision diachronique double dune volont de faonner une image de la ville au moment prsent.

    Voici ce que dit Pierre Riboulet propos du rle principal de la composition urbaine et de lurbaniste qui sen occupe ; L'acte crateur du compositeur est d'unifier dans un tout cohrent des parties diffrentes en sauvegardant et en exprimant ces diffrences dans l'oeuvre unique et en cela donne du sens. 17 Dans ce que lauteur appelle uvre unique , et qui peut dailleurs tre une ville, un quartier ou quelque tablissement humain que se soit, nous pouvons comprendre que le but ultime de ce genre de compositions est un objet fini et uniforme, ce qui nest pas totalement faux relativement la finalit que peut se fixer la composition urbaine. La nuance rside toutefois dans la diffrence entre lobjectif quelle vise et les moyens employs pour y arriver. En dautres termes, si la composition urbaine pour principal objectif darriver limage dune ville acheve, il reste que cette dernire, vu sa transformation continue et infinie, fait que les moyens darriver cette image doivent accompagner les principales mutations de lespace urbain en sadaptant chaque fois de nouvelles donnes.

    17 RIBOULET Pierre In confrences paris darchitecte, pavillon de larsenal ed..les mini PA Christian, Paris,

    1994.

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    La composition urbaine doit donc satisfaire une synthse indispensable des lments constitutifs et influents de lenvironnement urbain, et non un agencement visant imposer l'unique apparence formelle. C'est un procd de mise en forme, elle ne doit ni se restreindre aux buts quelle se fixe ni se rduire aux procds et aux manires dagir quelle induit.

    II.3. Prise en compte de lesthtique dans la composition urbaine : Il est important de souligner le rapport esthtique/composition urbaine dans lhistoire des villes et de lurbanisme. Ltude des modles urbains dmontre des impacts diffrents de lesthtique des btisses construites suivant un axe ou autour dune place par exemple, celle-ci diffre dun cas lautre ; que ce soit dans les villes antiques, dans les mdinas et les villes mdivales, les cits de la Renaissance ou les modles de lurbanisme moderne, on remarque un rapport troit entre la existence desthtiques et de langages architecturaux dun cot, et la prsence ou labsence des compositions de ces architectures en question de lautre. Comme on la vu dans la dfinition de la composition urbaine, celle-ci se base avant tout sur des lois et des rgles visant modeler lespace urbain, ces rgles bien qutablies parfois suivant les influences artistiques de lpoque, nen sont pas moins des sortes de balises et dlments rgulateurs visant avant tout donner du sens toute expression architecturale ou urbaine. Cest vers un rapport harmonieux que la composition urbaine vise mener les architectures composant la ville ainsi que leurs esthtiques.

    Les esthtiques sont indniablement lies aux influences artistiques de lpoque o luvre est rige. Cest le penchant artistique qui engendre dune manire ou dune autre le langage adopt dans luvre ou la cration car larchitecture, jusqu preuve du contraire, est essentiellement un domaine artistique. Il est donc primordial que lurbanisme tienne compte de ces arts influenant les architectures de notre environnement urbain. Le rapport entre composition et esthtique devrait tre celui dun dialogue perptuel afin de pouvoir chaque fois mettre en uvre des rgles nouvelles servant la production urbaine. On ne peut opter en une seule fois pour telle ou telle recette croyant avoir trouv l une

    chappatoire une remise en cause ncessaire et capable de nous guider dans linterminable production de lespace urbain. La composition urbaine a pour principal objectif de rguler limage extrieure de la ville, larchitecture pour reprendre Vitruve, soccupe de la fonctionnalit, de la solidit et de

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    lesthtique du btiment. Cette dernire, en labsence dune normalisation et dune rglementation du rsultat densemble attendu, dveloppe des rgles propres chaque difice, ce qui devient la longue assez hasardeux pour limage que nous attendons de nos villes. Lespace public est un bien commun, son image est celle que tous les habitants dune ville partagent, de ce fait son esthtique rsultante ne peut tre le fruit du temps et non celui de lHomme.

    En rgle gnrale, la composition urbaine dans sa dfinition prsente et passe, pose limportance des compositions esthtiques et cest ainsi que dans les villes, un monument ancien, un btiment public, et un building rcent doivent cohabiter avant tout dans leurs esthtiques. On ne veut pas impliquer par cela une uniformit des objets composant la ville, bien au contraire, la composition urbaine induit conjointement une volution de la ville et des esthtiques de ses architectures. Elle pose lobligation dune esthtique urbaine voulue et concrtise au lieu de la somme des esthtiques des architectures composant lespace urbain. Lesthtique est une valeur essentielle sur laquelle se base lart. Dans les villes, cet art se manifeste souvent dans larchitecture et il peut encore appartenir un domaine autre tel que ceux de la sculpture ou de la peinture (ces derniers, avec beaucoup dautres, entrent incontestablement dans la composition de lenvironnement urbain et donnent une image la ville). Il existe une relation entre ces expressions artistique dorigines diverses, celle-ci est reprsente par un change de langage entre les objets composant la ville. Lartiste, principale crateur de cette relation, est prsent des degrs diffrents- dans chacune delles ; En effet, lurbanisme, larchitecture, le design (mobilier urbain par exemple), et mme linfographie de plus en plus prsente dans les placards publicitaires, font partie par dfinition mme des domaines artistiques, et posent aussi dans un tout autre domaine que celui de lurbanisme le rle quils peuvent jouer dans la production de limage et de lesthtique urbaines.

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    II.4. Linteraction esthtique - composition urbaine : 1. Lart urbain : On peut, travers lanalyse de diffrents paysages urbains, comparer la prsence des principes dart et desthtique dans les cadres btis de ces villes. Cependant, nous devrons faire la distinction entre la simple prsence duvres dart (statues, fresques murales, objets design ou mobilier urbain) dans lespace dune ville, et lexistence dun souci global dagencement suivant des exigences artistiques, car mme sil y a prsence dart dans lun et lautre exemple, lart urbain se manifeste davantage dans le second ; il consiste faire en sorte que le cadre urbain dans sa globalit obisse des influences artistiques telles que les proportions, lharmonie, loption pour des perspectives particulires etc.

    Cette ide est soutenue par ce que nous rvle Michel RAGON propos de la prsence de lart dans la ville dans son ouvrage intitul les trois pouvoirs : Ce ne sont pas les monuments qui font Venise ou Rome un art urbain dans la ville. Cest la ville toute entire qui est uvre dart (...) Il est des notions quil faut rinventer. Cest le cas de lart urbain18. On remarque une relation troite entre composition et art urbain, pour nous en convaincre davantage, comparons la dfinition donne par Pierre Lavedan propos de lart urbain et dans laquelle il dclare : la rpartition et lamnagement de ces espaces libres, tel est lobjet de ce quon appelle Art Urbain 19, et celle de J.P. Lacaze qui dclare : elle -la composition urbaine- sintresse pour lessentiel lamnagement des espaces libres de la ville. 20. On comprend ainsi que, que ce soit pour la composition urbaine ou pour lart urbain, lessentiel des efforts doit tre mis en uvre pour lamnagement des espaces libres et des interstices urbaines, ces derniers sont les liens capables doffrir une continuit du bti et des composantes de la ville, et cest cette continuit qui donne la ville laspect dune uvre entire dont les parties sont lies harmonieusement. Dans le dictionnaire de lurbanisme et de lamnagement quelle a co-crit avec Merlin Pierre, Franoise Choay nous indique que la composition urbaine en plus de dcouler de peinture, est ne de lart urbain : LArt Urbain a introduit, dans les villes occidentales, la proportion, la rgularit, la symtrie, la perspective en les appliquant aux voies, places, difices au traitement de leurs rapports et de leurs lments de liaison (arcades, colonnades,

    18 RAGON Michel, les trois pouvoirs de lart urbain In Sminaire Robert Auzelle. www.arturbain.fr.

    19 COHEN Jean-louis, L'architecture urbaine selon Pierre Lavedan, Cahiers de la recherche architecturale ; n32-

    33, 3me trim. 1993. 20

    LACAZE Jean Pierre, Les mthodes de lurbanisme, Paris, presses Universitaires de France, 1990.

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    portes monumentales, arcs, jardins, oblisques, fontaines) On lui doit la notion de composition urbaine, drive de la peinture 21. Cest encore une fois la continuit du bti qui est vise, elle a pour objectif principal la cration de dune certaine cohrence de lespace bti afin dviter les ruptures lorigine de labsence dharmonie et de continuit. Lart urbain, plus que toute autre manire daborder lenvironnement bti, tend donner une certaine dimension artistique la ville ou tout terrain dintervention. Pour cela, il se base sur les compositions, qui en offrant de nouveaux lments sintgrant lensemble dj existant, donnent une image rsultante o le soucis esthtique semble pris en compte et donc ressenti par lutilisateur de lespace. La composition urbaine nest en ralit quune manire dinscrire lart dans lenvironnement urbain, afin de crer un espace public dcoulant de cet art en question et dont les notions de beaut et dharmonie sont une partie intgrante. Trs souvent, il est difficile pour les utilisateurs de lespace urbain de remarquer la prsence dun souci esthtique et artistique ainsi que la logique ayant t adopte par les concepteurs et, de ce fait, engendrant des lieux ou lart semble plus prsent que dans dautres. On confond gnralement prsence duvres artistiques et souci esthtique appliqu un la production dun ensemble. Dans ce second cas, cest la ville qui devient dans sa totalit uvre dart. Car mme si un mobilier urbain, des statues ou des crations artistiques (installations, fresques murales) viennent se greffer lensemble, le rsultat nest pas forcment satisfaisant.

    La ville et les espaces urbains en gnral, de par leur complexit, ne laissent pas facilement apparatre ce souci aux yeux dun public non averti. Cest lorsque lensemble est incohrent que tout utilisateur de lespace -profane ou dj initi soit-il - ressent un manque ou une absence dart dans lespace lentourant. A propos des de cette absence, Raymond Unwin nous rapporte : Il manque nos villes lesprit vivifiant de lart qui les et compltes et en et dcupl la valeur, il y manque quelque effort dans la conception des compositions urbaines,... Cest labsence de beaut, cest dire de ce qui plus que tout agrmente la vie, qui nous oblige dire que luvre de la construction des villes au cours du sicle pass a t imparfaite. Quelques relles quavaient t les amliorations apportes, les pauvres eux

    21 MERLIN Pierre, CHOAY Franoise, Dictionnaire de lurbanisme et de lamnagement, Paris, Presses

    Universitaires de France, 1988.

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    mmes qui en ont bnfici se sont rendus compte comme tout le monde, quelles ne visaient que les conditions matrielles de la vie urbaine ; sensibles eux aussi la beaut, ils ont eu la sensation que quelque chose leur manquait : lArt... 22 Dans le mme sens, le sminaire Robert Auzelle 23 quant lui, dfinit lart urbain comme tant : lEnsemble de dmarches pluridisciplinaires conduisant la cration ou la transformation des ensembles urbains dans un souci dvaluation de la qualit architecturale, de la qualit de la vie sociale et du respect de lenvironnement 24. Cependant, Il existe une diffrence entre lart urbain tel quil est trait dans lactualit, et les dfinitions quon tend lui donner en vue des expriences hrites du pass. Dune manire gnrale, cet art de dessiner les villes qui neut obir, un certain moment de lhistoire, qu des tendances autocratiques nous pensons par exemple aux villes de la Renaissance ou aux expriences dembellissement de la fin du 19me sicle dont les pouvoirs de lpoque ainsi que les classes dominantes taient seuls matres-. De nos jours, ces dfinitions sont compltement obsoltes, on voit merger, depuis quelques dcennies maintenant, un mariage et une entente entre les acteurs et les usagers ; on nimpose plus un modle donn, on essaye plutt de faire en sorte que le modle sinspire des dsirs et des attentes dun groupe ou dune population afin de mieux les satisfaire. Dans les meilleures expriences, le dessin urbain tient compte dun souci artistique et esthtique du cadre urbain. Cest le concept amricain de lurban design qui a permit un certain moment de lhistoire moderne de lurbanisme priode de laprs seconde guerre mondiale plus exactement- de sortir des schmas classiques de lurbanisme moderne, en offrant aux acteurs des outils de mariage entre les mthodes et les procds de lurbanisme et ceux de larchitecture, malheureusement cette discipline na t que rarement applique dans certain pays anglo-saxons.

    Mme si lart urbain a exist dans les villes dans le pass, comme le dclare Bernard HUET : Cest un savoir et une pratique relativement anciens, distincts de lurbanisme et de larchitecture, qui permettent de donner une forme la ville et plus particulirement aux espaces publics. Cest lart de dessiner un espace ouvert comme on projette un ensemble darchitecture ,25 cest son mariage avec des penses nouvelles telles que dveloppement

    22 UNWIN Raymond. L'tude pratique des plans de ville. Editions L'querre, Paris 1981.

    23 Le sminaire R. Auzelle : collectif denseignants universitaires franais dont la tche est de runir et de traiter

    des information relatives au sujet de lart urbain. www.arturbain.fr. 24

    Source : www.arturbain.fr : Sminaire Robert Auzelle . 25

    HUET Bernard, article : " Espaces publics, espaces rsiduels " In ARCHIFOLIO, Priorits Inverses, un parc public, www.aroots.org/notebook/article165.

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    durable ou gouvernance qui aide la reprise en compte de la ncessit dun art urbain nouveau .

    Si cet art se manifeste dune manire gnrale- travers la volont de donner une image urbaine intgrant les notions de beaut et desthtique, il est confront nanmoins la dimension temporelle qui -dans lvolution des villes- fait appel des procds diffrents des anciens dessins ayant donn aux villes du pass leurs images cohrentes et harmoniques. Parmi ces nouveaux procds, certains se basent sur la composition urbaine afin doffrir une vision temporaire marie une autre totalement diachronique de lespace urbain. A travers lintgration de concepts nouveaux lexemple de celui du dveloppement durable, les nouvelles compositions urbaines peuvent prconiser un double regard port sur la ville, car ce dernier permet dapprhender des actions immdiates visant plus de cohrence et dharmonie dans lespace dun cot, et doffrir, au mme moment, un dessein long terme visant anticiper les changements futurs dont la source est souvent lmergence de nouvelles cultures au sein des socits urbaines. Dautre part, il savre de plus en plus quaucune ville au monde ne peut se prmunir des diverses influences culturelles engendrant dans un ordre logique de nouvelles expressions spatiales.

    La phnomne de mondialisation produisant des comportements sociaux trs proches dune rgion une autre de la plante induit le fait que ce nouvel art urbain devient un outil sur lequel la plastique urbaine peut se baser afin soffrir un aspect issu dune recherche esthtique flexible pousant rapidement les changements pouvant subvenir car ceux-ci auront souvent lieu plus brusquement que dans le pass. Cette composition urbaine, en offrant des mariages harmoniques entre les lments composant la ville et en tenant compte, au mme moment, du paramtre temps, permet cet art dapporter aux villes les solutions requises pour un aspect plus esthtis et en mme temps davantage de flexibilit dans les actions mener. Bien que la prsence de lart soit indispensable dans la ville, il ne peut toutefois en tre loutil damnagement principal. En effet, des expriences du pass nous ont montr que le seul souci artistique ou esthtique consistant amnager les villes la manire dune cration architecturale plus tendue ne suffit pas pour que celles-ci y trouvent un quilibre sinscrivant dans la durabilit. La valeur esthtique reste essentielle lors de la cration dune ville, notamment celles de lpoque actuelle, mais elle ne devra en aucun cas tre le seul moteur dune transformation visant une image fige. Voici ce quen dit Jane Jacobs : Lart a ses propres formes dordre,

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    elles sont rigoureuses. Les artistes, quelle que soit leur discipline, oprent des slections partir dun abondant matriel fourni par la vie. Leur activit est essentiellement slective et discriminatoire, lencontre des processus vitaux, lart est arbitraire, symbolique et abstrait.// les urbanistes devraient sattacher une stratgie qui intgre lun lautre, lart et la vie, en clairant, clarifiant et explicitant lordre des cits 26. Jane Jacobs appelle vie, sans doute, tous les aspects dont doit tenir compte lurbanisme daujourdhui (scurit, foncier, servitudes, hygine), elle demande aux urbanistes, tant les premiers concerns par le devenir de la ville-, de ne pas sacrifier des problmes importants en la faveur dun penchant artistique, et en mme temps, on peut lire dans ses ides que le contraire -lart sacrifi pour la vie - ne serait pas admis non plus. Lauteur pose donc la pertinence de lexistence dun juste milieu des choses, ne sacrifiant aucun des deux paramtres (art et vie) pour lautre. ce propos Camillo Sitte dclare : il ne suffit pas de la science dun technicien, il faut encore le talent dun artiste 27 laissant comprendre que la ville ne peut tre uniquement luvre dun technicien ni celle dun artiste, une complmentarit doit donc soprer. Limpratif dune esthtique dans la composition des villes saccompagne dune ncessit de donner du sens cette esthtique en question. La composition urbaine offre sans doute, plus que toute autre manire damnager lespace des villes, cette complmentarit tant importante pour la scurit, le confort et le bonheur de ses utilisateurs. Rappelons toutefois que la composition urbaine dans notre conception ne part gnralement pas dune ide prtablie ou dun but atteindre, mais plutt dune ncessit rpondre aux besoins du moment prsent et de traduire cela en solutions tenant compte de lavenir. Dune manire plus globale, le paramtre esthtique devrait tre une ncessit dans llaboration et lamnagement des espaces urbains mais cela ne saurait tre suffisant. Cest ainsi que lesthtique de la ville doit sinscrire dans une vision de durabilit grce la composition urbaine, cette vision oblige lurbaniste et larchitecte, consolider tout choix artistique par des solutions techniques, et de le faire voluer en harmonie avec les autres composantes et paramtres dont doivent tenir compte les codes durbanisme et de construction.

    26 JACOBS Jane, Dclin et survie des villes amricaines, Mardaga, 1991.

    27 SITTE Camillo, Lart de btir les villes, Points -Essais- Le Seuil 1996.

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    Comme on vient de le voir, lart urbain donne lieu une mise en scne esthtique de lenvironnement bti, celle-ci intgre la mise en forme harmonique des lments composant lespace de la ville. Cette mise en scne engendrant des scnographies urbaines a connu un succs considrable dans les cits de la Renaissance. De nos jours, elle est de retour avec de nouveaux procds mais avec le mme but de faire de lespace urbain un dcor adroitement agenc. Voyons ce que sont ces scnographies et comment influencent-elles laspect du cadre bti.

    2. La scnographie urbaine : La scnographie reprsente lorigine un art touchant aux dcors et aux installations des scnes, notamment celles des thtres ou des spectacles. Dans la ville, des dcors sont mis en place de cette mme manire par les architectes, les urbanistes, les paysagistes ou les artistes. La notion de scnographie a cependant volu avec le temps. Elle existait certainement dans les villes antiques qui, grce des compositions complexes de formes et dlments constituant larchitecture des btiments et des autres composantes de lespace public, y offrait des agencements harmoniques des formes et des couleurs. Cest la Renaissance qui vit, avec le foisonnement des arts et des techniques, lemploi de nombreux dcors, non seulement dans les faades de btiments mais aussi dans les vgtations, les sols, les voies ainsi que ce qui pouvait meubler les espaces publics. Cet art sest perptu jusqu une poque trs rcente, comme nous lexplique Guidu Antonietti di Cinarca: Le terme "scnographies urbaines" (sans le confondre avec la scnographie dans lurbain) et les outils qui sy rattachent : axes de composition, articulations, alignements, dcentrements, limites, abstractions, superpositions, glissements, pannelages, rapports au ciel, ancrages au sol, ainsi que la trs vaste iconographie, qui depuis la Renaissance Urbino et ailleurs, na cess denrichir le regard et la pense des Architectes, nous paraissent toujours appropris, pour rpondre aux dfis que pose ladaptation de la ville historique, aux usages de lespace public de notre poque. Une belle ville, ou une ville embellie, serait donc : une succession articule de lieux publics

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    correctement scnographis, un effort dagencement des masses bties capable dengendrer et recevoir les pratiques sociales 28. Les jardins tendus et les grandes places publiques ne sont quun meilleur exemple de ces scnographies offrant au spectateur un plaisir des yeux que seules de rares villes modernes savent offrir. Cest pour le plaisir des yeux de ce public en question que furent mises en place des dcorations lchelle de lHomme ; les scnographies urbaines sont faites aussi bien pour des angles de vision des pitons et des randonneurs que pour un panorama ou une vue gnrale de la ville. On retrouve dailleurs, dans les espaces ayant bnfici de ces principes damnagement, un jeu savant bas sur les perces visuelles et sur la continuit des compositions. Lenchanement ne concernait pas seulement le bti mais plutt les diffrentes compositions spatiales donnant lieu de vritables thtres urbains, on parle alors dun enchanement de scnographies. Aujourdhui encore, les scnographies usent dautres lments pour produire les mmes effets ; les crans gants, les jeux de lumires et les mobiliers urbains design se font agencer de la mme manire pour les mmes raisons. Les scnographies offrent loccasion ltablissement dassemblages harmoniques que seules des conditions favorables dlaboration sont capables doffrir. Ces conditions sont relatives en premier lieu des interventions rflchies se basant sr la continuit et la synchronisation, car cest le tout qui donne cette impression d'achvement. Si ce tout est par exemple le centre dune ville ou mme une ville entire, la prsence des voies, de la verdure, des btisses, du mobilier urbain ainsi que les artifices artistiques ncessaires pour ce genre de dcors lchelle urbaine, ne seront pas suffisant sil manque un fil conducteur et une intention de composition gnrale. Cela donne lieu des parcours de ballades visuelles faisant passer le visiteur dune ambiance lautre sans interruption, le dcor offre ainsi, via ces parcours en question, une impression de continuit et de prolongement des scnographies et donc des espaces urbains.

    28 DI CINACRA Guidu Antonietti, In AROOTS NOTEBOOK Cours et tutoriaux, La scnographie, toile peinte

    ou projet urbain ? Source : www.aroots.com

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    Chapitre III : Origines et volution du sujet : Introduction : Bien que nous considrons la naissance de lurbain ainsi que les prmices de la composition et de lart de btir les ville aussi vieux que les cits antiques, nous croyons toutefois que le sujet ne fut rellement explor que depuis lapparition de la ville Moderne, celle-ci est souvent rapporte lpoque de la Renaissance et de la redcouverte des vestiges et des arts antiques qui, grce a leur recyclage en fonction de donnes nouvelles pour lpoque post-moyen age, ont pu donner loccasion ltablissement de nouveaux procds visant une image harmonique et esthtique de la ville. Ch. N. Schultze disait ce propos : La ville perspective de Brunelleschi et Alberti est la ville relle, elle se veut lannonce dun comportement humain laque et rationnel ...//En effet le traitement de lespace sloigne du concept dun organisme vivant pour se tourner vers un idal de pure perfection formelle.29. La Renaissance est relative la fin du moyen age (15me sicle) en Italie. Elle sest tendue au reste de lEurope peu de temps aprs. Cest la rupture avec lglise et les institutions religieuses qui a marqu plus que tout autre vnement cette priode l. Aussi, la Renaissance marque essentiellement une priode de dcouverte et de curiosit indites dans lhistoire de lhumanit. Ce fut ce moment l, lexploration de lAfrique australe et la dcouverte dun contient entirement vierge et nouveau, lAmrique. Cela offrit aux Europens les richesses ncessaires ainsi que des essors de rflexions, de dcouvertes et dinventions. La Renaissance a marqu un accroissement des richesses et un dveloppement de la pense dans divers domaines, accompagns dun accroissement dmographique de la population dans des pays tels que la France ou lAngleterre. On y vit lavnement dinstitutions politiques ainsi que lmergence de nouvelles valeurs comme celle de la lacit, cela offrit aux penseurs, aux artistes, aux princes et aux matres de lpoque, la libert ncessaire la cration artistique, lcole ne tarda pas non plus se dtacher de lglise veillant ainsi la curiosit des jeunes et leur offrant travers un pont historique lapprentissage hrit des plus anciens.

    29 In Architecture contemporaine, TAFURI Manfredo et DAL CO Francesco, coll. Histoire de l'architecture,

    Paris, Gallimard, 1991.

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    Ces artistes et matres duvres eurent, en plus de laide et du mcnat des clans les plus aiss, les conditions favorables pour lentreprise dune libre recherche artistique donnant lieu une esthtique indite. Srement que le point commun de toutes les crations ayant vu le jour durant la priode de la Renaissance est sans doute lattachement et lintrt de celles-ci pour les uvres antiques, il faut toutefois se mfier de lide que cette poque l ne fut que domine par une volont commune ractionnaire quelque mouvement que ce soit.

    Le mot Renaissance na vu son emploi que trs rcemment (seconde moiti du 19me sicle). Ce fut lune des poques les plus foisonnantes en matire de crations artistiques et de courants de penses, do notre intrt dexplorer le sujet de lesthtique et la composition urbaines dont nous souponnons les origines modernes dans cette priode en question. La rupture avec le moyen age na pas t aussi soudaine et aussi brutale quon a tendance le penser, cest dans des monastres que furent gards par exemple des ouvrages tels que celui de De architectura de Vitruve. En ralit, ce mouvement artistique et littraire na t que la consquence dun foisonnement antrieur de la socit qui, ayant fait appel sa propre remise en cause -celle-ci fut reprsente par la chute des socits fodales et des thocraties du moyen age- appela lmergence de nouvelles valeurs.

    III.1. Naissance des valeurs de composition et desthtique urbaines : Plus que toutes les autres poques, la Renaissance introduit essentiellement une thorisation et un foisonnement de la composition et de lart urbains, il y eut une exigence de donner du sens aux crations architecturales qui se devaient dtre une partie intgrante de la ville afin que cette dernire laisse apparatre une image globale dont les transformations allaient avoir pour principaux moteurs lharmonie, lordre et lesthtique. Durant cette poque, la dimension esthtique de lenvironnement urbain fut rvalue pour devenir un concept intgr part entire dans le dessin des villes. Cest lhumaniste Lon Batista Alberti qui, avec son ouvrage De reaedificatoria , a t lun des premiers formuler dune manire franche et directe lexigence dune vision urbanistique dans les transformations des cits. Pour cela, il fit rfrence Vitruve dont on a redcouvert les dix livres darchitecture en 1415. Alberti identifia ce moment l les principes qui allaient engendrer lurbanisme que nous connaissons de nos jours.

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    Il compara la cit un difice comme le fit Vitruve avant lui ; une ville se devait dtre un grand btiment et le btiment une petite ville. Les trois principes de lart de btir introduits par Vitruve furent ainsi ractualiss pour engendrer les principes devant rgir la ville-maison . Pour Alberti ces principes furent essentiellement : 1/ Les lois et les rglements concernant la ncessit necessitas-, et qui se traduisent par une volont de remdier aux problmes sociaux et aux exigences naturelles. 2/ La commodit commoditas-, dont des besoins ergonomiques et une volont darriver un fonctionnement gnral furent les principaux paramtres tenus en compte.

    3/ La volupt Voluptas-, qui, plus que la beaut ou lesthtique, incite une recherche de justesse et de proportions donnant une image globale au tout. Le mot volupt appelle aux ides de confort et de plnitude qui doivent tre mis en uvre dans la ville afin que tout utilisateur contemplant lespace public puisse prouver des sensations visuelles satisfaisantes.

    Ces concepts, ainsi que ceux issus de lHumanisme qui, introduisant luniversalisme, sous entend des valeurs communes comme celles dun mme intrt des hommes pour des sensations et des valeurs ou du comportement face au bonheur ou la beaut.

    1. Linfluence des dcouvertes sur lart de btir : Les premires dcouvertes faites durant la priode de la Renaissance sont directement lies celles des vestiges de lage antique. Parmi les explorations faites dans les sites historiques entourant les principales villes italiennes, celles qui ont rvl les techniques utilises dans le domaine de la construction par les romains sont sans doute les plus importantes. Ces dcouvertes archologiques taient souvent accompagnes de rditions de livres et de traits aussi vieux que les vestiges eux-mmes.

    Marcus Vitruvius Pollio , plus connut sous le nom de Vitruve fut, entre 70 av. J.-C. et. 25 av. J.-C., ingnieur militaire dans lartillerie romaine. Cest Vitruve qui rvolutionna posthumment larchitecture et lart de btir les villes dont on a encore les vestiges et les influences aux jours prsents. Grce la redcouverte en 1414 de ses dix livres darchitecture intituls De architectura et o il dcrivait les valeurs et les principes de lart de btir grco-romain tout en prsentant les fondements de ces valeurs tels que la proportion, lharmonie, lchelle ainsi que les contraintes techniques auxquelles il stait attaqu dune manire adroite et mthodique.

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    Vitruve, Les proportions du corps humain. Source : Dix livres dArchitecture de VITRUVE traduit par Claude Perrault en 1673, Balland, Paris, 1979

    De Vinci, Etude des proportions de lHomme selon Vitruve. Source : www.ac-strasbourg.fr

    De Vitruve Da Vinci et aux autres matres de la renaissance, lhritage des connaissances antiques permit leur rcupration et leur mise jour servant ainsi lart et larchitecture de lpoque moderne.

    Aussi, linnovation des matres italiens de la Renaissance se manifesta srement davantage dans linvention de reprsentations graphiques bases sur les principes de la perspective. En effet, ce qui semble vident de nos jours ne ltait nullement avant cette priode l. La reprsentation graphique allait jouer un rle important dans la prparation du projet ou de

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    lintervention. Des lments pouvaient tre rajouts ou enlevs tout en laissant apparatre, grce aux perspectives et aux dessins tablis par les artistes et les matres duvres, limage globale de ce qui allait advenir de lespace urbain et de lapparence gnrale de la cit. On pouvait ainsi commander une remise en valeur dun lieu ou sa destruction au profit dune image globale dont la beaut et la lisibilit allaient devenir les valeurs essentielles.

    2. Les premires expriences : Cest sans aucun doute lItalie qui a pu fournir, plus que tout autre pays dEurope ou du monde, un terrain dexprimentation et de thorisation de ce qui allait donner plus tard, lart de la Renaissance. La Renaissance a su offrir aux yeux du public de lpoque une parfaite manifestation artistique dont tous les domaines ont pu bnficier. Il eut, dans les sphres des artistes et des philosophes, un retour vers lage dor grco-romain qui fit la force et la beaut des villes dautrefois. Au moyen age, les artistes et les intellectuels semblaient stre compltement dtourn de livres dune importance capitale. Cest le cas par exemple de De Architectura de Vitruve qui joua un rle prpondrant dans lavnement de nouvelles expressions artistiques et spatiales.

    Cest en se basant sur ce genre dcrits que les artistes des 13me, 14me et 15me sicles ont explor de nouvelles manires de dessiner les difices et les villes. En mme temps, les cits de la renaissance, faute davoir pu remplacer totalement les tissus existants, se sont tablies sur des structures urbaines issues de la priode moyengeuse. Cela a contraint les artistes et les matres duvres de lpoque composer avec les traces du pass.

    Lun des premiers exemples de projet pour la ville que connut cette poque, et dont le but tait lembellissement et l'agencement de lespace urbain, est certainement celui de Filippo Brunelleschi, qui fut lun des pionniers du mouvement humaniste de lpoque. Grce ses tudes pousses sur la perspective ainsi que sa passion pour lart et la technique antiques, il se dtacha du gothique prdominant en son temps pour innover artistiquement et techniquement en arrivant des expressions plastiques et architecturales sans prcdents.

    A Florence sa ville natale, et o se trouve lessentiel de son travail-, Brunelleschi construit successivement le clbre dme dont fut dote la cathdrale Santa Maria Del Fiori, la chapelle Barbadori Santa Felicit, lhpital Degli Innocenti ainsi que la chapelle des Pazzi.

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    Lintrt urbanistique des travaux de Brunelleschi rside sans doute davantage dans linfluence quil eut sur la future image quil donna la ville de Florence. En effet, les btiments dont il dirigea les travaux ainsi que ceux qui furent construits aprs sa mort ont eu un effet catalyseur sur ce qui devait tre construit par la suite un peu partout dans la ville. De par leur importance -difices du pouvoir, de lglise ou publics-, les btiments construits par Brunelleschi ont t les repres symboliques et spatiaux des constructions futures en forant les matres duvres sintgrer relativement limage que devait avoir Florence partir de ce moment l. Michel-Ange contribua son tour au mouvement de lpoque en ramnageant la ville de Rome suivant diffrents axes (Religieux, Saint pierre ; Rsidentiel, palais Farnse ; Municipal, le Capitole), il la dota ainsi dune esthtique et dune composition cohrentes pour lensemble.

    La place du capitole Rome, Michel Ange. Sources : / www.ac-lyon.fr , Encarta 2003.

    Dans la place du Capitole Rome, cest lalliage du dallage, des faades, de la verdure et des monuments qui octroie au lieu toute son unit.

    On remarque que mme le motif gomtrique du dallage nest quune partie de lensemble et que son emploi ne pourrait tre justifi dans une autre composition ce qui en fait un lment dcoulant dune approche esthtique spcifique. De mme que pour la succession des btiments qui se compltent et qui, travers lemploi dlments dcoratifs semblables, crent un enchanement permettant une seule et unique lecture de laspect densemble. Ce sont entre autres les liaisons entre les diffrentes parties de la ville que Michel-ange a su mettre en uvre dans ce mme esprit denchanement.

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    La mme exprience place St Marco Venise, a pu donner une ide sur les modifications que pouvaient recevoir les anciennes cits.

    Notons que Michel-ange navait pas eut de plans lors de ses interventions, mais il tint une ide sur limage quallait avoir le projet suivant les modifications et les interventions quon allait faire subir lespace dans lequel pouvait avoir lieu lintervention. Cest sur lle San Giorgio Venise que Palladio difia, en se basant sur les fondations dun ancien monastre bndictin, lglise de San Giorgio Maggiore (1566_1580), hormis les rfrences larchitecture classique de par notamment le style des faades, la dimension urbaine du projet rside tout particulirement dans son intgration par rapport lensemble dont faisait aussi partie llment naturel (eau, verdure,) ainsi quaux btiments anciens lentourant.

    LIsle St Giorgio Maggiore Venise, Andra Palladio Source : Encyclopdie Encarta 2003.

    Dans les villes de la Renaissance, des concepts et des principes novateurs furent instaurs en comparaison avec ceux connus jusqu lors. Sans pour autant recourir des planifications et des plans rgulateurs , les artistes de lpoque se basaient sur des principes dj connus de lart ; les rythmes, les compositions, les proportions, lharmonie, en faisaient partie.

    Parmi ces principes de rgulations introduits, avant tout, afin de servir limage globale des cits, les tracs ont t les plus importants. Ceux-ci, pour la plupart concrets, furent mis en uvre afin doffrir des compositions obissant des principes communs qui ont engendr des aspects refltant une recherche esthtique globale.

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    Plan pour Ferrare 1550, Les tracs sont trs apparents dans la composition gnrale, lalignement des btisses suit ces tracs en question. Source : M. Tafuri, Architecture et humanisme, de la Renaissance aux rformes

    Lun des meilleurs exemples de lart de lagencement et de la composition de lespace urbain lpoque de la Renaissance est sans doute celui de la piazza de la Signoria , lune des plus importantes et des plus belles places de Florence. En plus des fontaines et des statues imposantes comme celle de Cosme 1er de Mdicis, on y remarque une composition entre lments architecturaux et uvres artistiques, leur

    disposition sert la fois les difices et la place entant quuvre globale, la varit de styles ainsi que la diversit des architectures et des lments entrant dans la composition dune place en font aussi lintrt.

    Bien que ceux-ci proviennent dpoques diffrentes, leurs langages rsultants sont en ralit le fruit dune volont dagencement et de composition artistiques visant produire un tout esthtiquement cohrent.

    La lisibilit de lespace est appuye par lalignement des faades ainsi que la disposition des uvres. On peut parler dans ce cas de figure dune relle composition rflchie visant en premier lieu assouvir les dsirs et la curiosit des visiteurs du lieu. Cest avant tout pour le plaisir des yeux que lart fut dploy lchelle urbaine.

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    Auparavant, il ny eut que les quelques villes antiques qui profitrent dun tel souci artistique appliqu lchelle de la cit. La Renaissance a donc renou avec cette tradition en explorant un cot plus important, celui de la composition urbaine. Mais contrairement ces exemples hrits des temps antiques, lesthtique du lieu nest pas seulement due une disposition rigoureuse dlments semblables, elle est plutt le rsultat dun agencement habile entre des parties diffrentes au dpart, des parties dont les dates d'difications, les styles et les langages ne furent pas forcment synchroniss. Tout le gnie consistait donc intgrer ces diffrentes composantes les unes part rapport aux autres.

    Venise, La piazza de la Signoria

    La piazza de la Signoria Venise. Source : Encyclopdie Encarta 2003, image 360 la piazza de la Signoria, Modification

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    3. Lesthtique et lordre urbains, lapoge : Lesthtique, qui fut auparavant une valeur dont pouvaient jouir les uvres artistiques et larchitecture des btiments, a dtermin, partir du 15me sicle, lapparence de lespace urbain et ce dune manire plus globale. Ce furent les crations artistiques qui, avec la naissance de styles tels que celui du Baroque ou du Classicisme, allaient meubler les villes travers des architectures indites, des statues ou des monuments intgrs dans lespace public. Ce fut aussi, travers le dveloppement de lesthtique urbaine, lavnement de lart urbain. Ce dernier, travers lordonnancement partiel de quelques villes europennes (Rome, Paris, Amsterdam, Bruxelles) ou lextension dautres (Nancy, Londres, Bath,), donna une nouvelle image aux cits et surtout une importance capitale pour lapparence de lespace public. Dun autre cot ce sont les reconstructions ou les constructions de villes ex-nihilo qui sont apparues en mme temps quune politique dembellissement et des actions visant lesthtique des villes (comme ce fut le cas pour Lisbonne), et la cration de villes nouvelles qui se sont manifest (Versailles ou Saint-Ptersbourg). Ces expriences dont ont pu bnficier les principales villes dEurope sont avant tout les premiers pas de ce qui allait donner lart urbain peu de temps aprs. Dans les temps antiques, les romains semployaient dans ldification des villes satisfaire les ides de commoditas et de voluptas (commodits et volupt). Ces deux principes appelaient dj lpoque, aux facteurs dunit et dordre tant importants satisfaire les conceptions perues par les utilisateurs de lespace. Vers la Renaissance, lemploi de ces mmes principes se manifestait souvent par la symtrie et lunit des lments composant lespace urbain, On eut besoin de recourir des instruments de base afin de matrialiser des ides abstraites comme celles de lordre, de lorganisation ou de la beaut. Cest lHomme, qui, encore une fois, fut pris comme base de proportion et dinspiration dans la plupart des interventions. lment constant par excellence, ltre humain, de par ses mesures et sa constitution, pouvait tre la base des actions sur le cadre urbain. De plus on sen inspira afin de trouver un sens objectif lide dorganisation spatiale Lorganisation dont beaucoup de modernes discutent la signification mme, fut la base des interventions sur les