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COMPORTEMENT PSYCHIQUE DE L’ADULTE ET PRATIQUE DENTAIRE Docteur Christian GARCIA L’homéopathie se veut, par essence et par définition, la médecine de « l’homme total », c’est-à-dire appréhendé dans sa globalité réactionnelle, psychique et somatique. Et cette conception découle directement des résultats des pathogénésies. C’est dire que le médicament « homéopathique » qui correspond exactement aux signes et symptômes du malade doit comporter non seulement les symptômes bucco- dentaires qui motivent la consultation du chirurgien-dentiste, mais encore les signes et symptômes psychiques et généraux, s’il y en a bien entendu, même au degré faible. Cela signifie, sur le plan de la pratique, que la présence de symptômes psychiques au cours d’une pathologie bucco-dentaire valorise le médicament choisi sur les signes locaux et influence la dilution prescrite et inversement, la constatation de signes psychiques caractéristiques d’un médicament oblige à vérifier la présence ou non des signes bucco-dentaires (connus par la matière médicale), afin de les prévenir éventuellement, de les traiter si nécessaire. Dans la valorisation hiérarchique qualitative des symptômes, ceux concernant le comportement psychique ou psychologique du patient arrivent en seconde place, juste après les circonstances étiologiques. La valeur diagnostique des symptômes psychiques pour le choix du remède homéopathique n’avait évidemment pas échappé à la sagacité de HAHNEMANN, et c’est même à sa suite que nous nous plaçons, comme tout le monde bien-sûr. Dans le § 210 de l’Organon 1 ,, HAHNEMANN affirme: « car il n’existe aucune maladie dite somatique où l’on ne puisse découvrir des modifications constantes de l’état psychique du malade ». Et il donne deux exemples: « Combien de fois ne rencontre-t-on pas des malades qui, bien qu’en proie depuis plusieurs années à des affections très douloureuses, ont conservé néanmoins une humeur douce et paisible de sorte qu’on se sent pénétré de respect et de compassion pour eux ! Mais dès que la maladie est vaincue et le malade rétabli - ce qui est souvent possible par la méthode homéopathique - n’assiste-t-on pas parfois avec étonnement et avec effroi aux changements inopinés du caractère, lorsqu’on voit reparaître l’ingratitude, la dureté de coeur, la méchanceté raffinée, l’humeur détestable, les attitudes méprisables et indignes qui étaient l’apanage du sujet avant cette maladie ? Souvent des individus patients alors qu’ils se portaient bien, deviennent impatients, agités, violents, insupportables, obstinés et exclusifs ou même désespérés lorsqu’ils tombent malades. Ceux qui étaient pudiques et chastes deviennent alors licencieux et 1 6° édition allemande, traduction de Pierre SCHMIDT.

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COMPORTEMENT PSYCHIQUE

DE L’ADULTE

ET PRATIQUE DENTAIRE

Docteur Christian GARCIA

L’homéopathie se veut, par essence et par définition, la médecine de « l’homme total », c’est-à-dire appréhendé dans sa globalité réactionnelle, psychique et somatique. Et cette conception découle directement des résultats des pathogénésies. C’est dire que le médicament « homéopathique » qui correspond exactement aux signes et symptômes du malade doit comporter non seulement les symptômes bucco-dentaires qui motivent la consultation du chirurgien-dentiste, mais encore les signes et symptômes psychiques et généraux, s’il y en a bien entendu, même au degré faible. Cela signifie, sur le plan de la pratique, que la présence de symptômes psychiques au cours d’une pathologie bucco-dentaire valorise le médicament choisi sur les signes locaux et influence la dilution prescrite et inversement, la constatation de signes psychiques caractéristiques d’un médicament oblige à vérifier la présence ou non des signes bucco-dentaires (connus par la matière médicale), afin de les prévenir éventuellement, de les traiter si nécessaire. Dans la valorisation hiérarchique qualitative des symptômes, ceux concernant le comportement psychique ou psychologique du patient arrivent en seconde place, juste après les circonstances étiologiques. La valeur diagnostique des symptômes psychiques pour le choix du remède homéopathique n’avait évidemment pas échappé à la sagacité de HAHNEMANN, et c’est même à sa suite que nous nous plaçons, comme tout le monde bien-sûr. Dans le § 210 de l’Organon

1,, HAHNEMANN affirme:

« car il n’existe aucune maladie dite somatique où l’on ne puisse découvrir des modifications constantes de l’état psychique du malade ». Et il donne deux exemples: « Combien de fois ne rencontre-t-on pas des malades qui, bien qu’en proie depuis plusieurs années à des affections très douloureuses, ont conservé néanmoins une humeur douce et paisible de sorte qu’on se sent pénétré de respect et de compassion pour eux ! Mais dès que la maladie est vaincue et le malade rétabli - ce qui est souvent possible par la méthode homéopathique - n’assiste-t-on pas parfois avec étonnement et avec effroi aux changements inopinés du caractère, lorsqu’on voit reparaître l’ingratitude, la dureté de coeur, la méchanceté raffinée, l’humeur détestable, les attitudes méprisables et indignes qui étaient l’apanage du sujet avant cette maladie ? Souvent des individus patients alors qu’ils se portaient bien, deviennent impatients, agités, violents, insupportables, obstinés et exclusifs ou même désespérés lorsqu’ils tombent malades. Ceux qui étaient pudiques et chastes deviennent alors licencieux et

16° édition allemande, traduction de Pierre SCHMIDT.

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dépravés. Il n’est pas rare qu’une maladie rende stupide un être intelligent, qu’elle fasse d’un esprit faible une tête plus capable et d’un être apathique et irrésolu un homme plein de présence d’esprit et de résolution ». D’où la suite logique du § 211:

« Car cela va si loin que l’état moral du malade devient souvent, dans la sélection du remède homéopathique, l’élément le plus déterminant, parce qu’il constitue une des manifestations les plus caractéristiques et les plus essentielles de celles qui, entre toutes, doivent le moins échapper au médecin habitué à faire des observations exactes ». On pourrait citer encore les paragraphes suivants. Pour en finir avec les

citations, voici une remarque contenue dans le § 213: « L’Aconit ne produit que rarement, jamais même, une guérison rapide et durable sur un esprit tranquille, calme

et patient; ni la Noix vomique quand le caractère est docile et flegmatique; ni la

Pulsatille quand il est têtu, jovial et voit tout en rose, ou la Fève de St Ignace sur un homme d’humeur égale, qui ne s’effraie de rien et supporte calmement les vexations ». Ces considérations données en préambule sont inspirées d’un article publié par le Dr Jacqueline BARBANCEY intitulé: « Connaissance homéopathique du psychisme et pratique dentaire »

2. J. BARBANCEY développe l’intérêt de la « connaissance

homéopathique du psychisme en art dentaire » en trois plans:

1. Celui de l’abord et du contact avec le malade ou le patient que l’on rencontre pour la première fois, qui permet ainsi au praticien « d’ajuster » son attitude en fonction des dispositions psychiques qu’il devine par le type sensible et la morpho-psychologie homéopathique.

2. La prévision des réactions psychiques et par delà des réactions somatiques: par exemple, traiter l’appréhension, l’hypersensibilité à la douleur, les réactions psychiques lors de la nécessité d’une avulsion, différemment ressentie selon les individus. On connaît le « type sensible » de ANTIMONIUM CRUDUM et l’on sait que sa matière médicale précise: « ne supporte pas les soins dentaires ».

3. La prévision de certaines réactions somatiques, comme la tendance hémorragique de PHOSPHORUS, l’œdème de SULFUR ou de APIS, ou encore de BELLADONA et de BRYONIA, la suppuration de HEPAR SULFUR ou de MERCURIUS, l’alvéolite interminable du timide SILICEA, les revendications de LACHESIS...

J. BARBANCEY donne deux exemples des répercussions psychologiques d’une avulsion. Bien acceptée par de nombreux patients surtout provenant du monde rural car les soins conservateurs sont considérés comme trop onéreux et surtout nécessitant trop de pertes de temps. Alors que chez une femme, J. BARBANCEY affirme qu’il y a souvent une composante sexuelle. « La situation est vécue comme humiliante, mutilante et peut même jusqu’à amener à l’infra-conscience une comparaison avec des relations sexuelles mal acceptées - « Je n’avais jamais autant pleuré depuis ma nuit de noces ! » m’a dit il y a 3 mois une très belle femme de 52 ans, en avouant comme elle l’eût fait d’une tare honteuse sa première et récente avulsion dentaire. A cette blessure d’orgueil causée par un amoindrissement esthétique, assortie d’une signification de vieillissement, de pertes de charme, à cet arrière-plan sexuel plus ou moins inavoué mais toujours sous-jacent, vous opposerez avec succès PLATINA ».

2Voir Les Annales Homéopathiques Françaises 1968 n°5.

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Combien d’entre nous ont-ils conscience en enlevant une dent d’une petite fille de commettre un viol ou une castration chez un petit garçon « pour peu que l’opérateur, désireux de vaincre la peur de l’enfant (souvent de type Causticum ou Mercurius) se montre trop sévère, s’impose de façon brutale » ? Dans ce cours, nous allons d’abord décrire le comportement habituel des patients selon leur biotype, car à l’évidence c’est d’abord la morphologie qui apparaît au premier contact, au premier regard que pose le praticien sur son nouveau patient. Ensuite seront décrits quelques grands remèdes dans leur type sensible, leur comportement au cabinet dentaire et les enseignements que l’on peut en tirer pour deviner les risques potentiels somatiques. Mais il faut rappeler que les cadres morphologiques ou diathésiques ne sont forcément que schématiques et doivent être compris selon une approche strictement individualisée.

LE BREVILIGNE C’est l’un des mérites de Roland ZISSU

3 que d’avoir bien compris et décrit que

pour chaque biotype, il existe deux types différents: d’abord le type équilibré avec ses caractères propres, psychiques et somatiques, qui présente certaines prédispositions

qui restent potentielles parfois très longtemps selon le mode de vie, ensuite le type

décompensé ou déséquilibré, c’est-à-dire celui qui réalise ses potentialités morbides en raison d’un mode de vie défavorable ou d’une circonstance étiologique fortuite. C’est évidemment ce dernier qui consulte le plus souvent son médecin, ou son dentiste. Mais le type équilibré présente l’avantage, notamment lorsqu’il vient consulter son dentiste pour une carie banale, d’offrir une perspective préventive par une action sur les facteurs d’agression selon son mode de vie et par la prescription de son remède de fond, qu’il est alors parfois difficile de mettre en évidence du fait de l’absence de symptômes significatifs, ne laissant au praticien que quelques signes d’appel, dont la morphologie avec les restrictions déjà évoquées, car les signes biotypologiques ne sont pas d’origine pathogénétiques, puis les signes diathésiques déjà plus précieux dans la mesure où ils traduisent une tendance réactionnelle que l’on peut retrouver dans l’anamnèse du patient ou chez les parents ou dans sa famille. Il est classique de décrire le type équilibré du bréviligne comme un sujet ordonné, posé, méthodique, opiniâtre, plus sensible au raisonnement qu’à ses instincts. Le bréviligne est par nature enclin à la passivité et à l’économie des gestes, tout simplement par qu’il a dès le départ un ralentissement de ses métabolismes fondamentaux. Lorsqu’il se trouve dans des conditions de vie stressantes, comme celle des cités urbaines, il se sent déphasé par rapport à l’agitation ambiante. D’où son besoin de se replier sur lui-même. Dans le type équilibré, le bréviligne s’épanouit dans l’ordre, dans la paix et dans la patience. On devine d’emblée qu’au cabinet dentaire ce patient arrive toujours à l’heure, domine plus ou moins aisément son appréhension et d’autant mieux que le dentiste lui explique ce qu’il a et ce qu’il va faire. En cas de soins prolongés, comme par exemple le traitement de plusieurs caries du collet sous anesthésie locale, le praticien peut être assuré de l’assiduité de son patient. Le type déséquilibré apparaît encore plus lent que d’habitude, lenteur qui s’exprime physiquement dans ses gestes et occupations, psychiquement par la

3R. ZISSU: « Matière Médicale Homéopathique Constitutionnelle ».

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paresse pour tout effort physique ou mental. A cela s’ajoute la faiblesse et l’apathie. Ce patient ne viendra pas à tous ses rendez-vous pour peu qu’il se sente fatigué ou qu’il

ait autre chose à faire. Puis apparaît ce qui était potentiel, l’anxiété avec de

nombreuses peurs, qui vont compliquer la réalisation des soins. Ces peurs peuvent devenir obsessionnelles lorsque le déséquilibre s’accroît et l’on devine déjà l’indication probable de THUYA dans une évolution psoro-sycotique. Or, on constate des caries du collet dans CALCAREA CARBONICA, remède constitutionnel du départ de la décompensation et dans THUYA, remède d’évolution fréquent chez ce type morphologique.

Bertrand de Névrezé (1877-1951) a particulièrement bien étudié les conséquences bucco-dentaires pour chaque biotype. Rappelons que ce médecin stomatologiste est devenu homéopathe avant la première guerre mondiale, après un traitement personnel conduit par Léon VANNIER, qu’il a ensuite appris cette méthode au C.H.F., créé par le même Léon Vannier. De Névrezé a alors admis les conceptions minérales de la biotypologie d'Antoine NEBEL, mais vues à travers le prisme personnel de Léon VANNIER. Il s’est ensuite illustré dans la description de la morphologie bucco-dentaire au travers des trois types constitutionnels de base et a déterminé pour chaque type des prédispositions morbides sur le plan stomatologique.

La bouche et les dents du bréviligne: Normalement bien minéralisées, les dents du bréviligne sont à l’image du biotype: dents trapues, carrées ou rectangulaires, racines courtes mais larges, arcades larges, engrènement cuspidien faible, minéralisation alvéolaire convenable ou plus dense que normalement. D’où les perspectives suivantes: peu ou pas de carie, ou alors fréquence des caries du collet, sans explication rationnelle à ce jour - abrasion dentaire du fait d’une bonne résistance de l’os alvéolaire aux forces de mastication (puissantes chez ce sujet), absence ou rareté de la pathologie orthodontique. On peut voir chez des vieillards de ce type morphologique des abrasions considérables, notamment antérieures, parfois jusqu’aux collets, sans la moindre alvéolyse. En cas de nécessité d’extraction, plusieurs précautions sont à prendre. Chez le type équilibré, il faut d’abord expliquer en quoi consiste l’intervention. Chez le type déséquilibré, le problème de l’anxiété impose parfois une prescription (GELSEMIUM, IGNATIA, CALCAREA CARBONICA...). Ensuite, la radiographie pré-opératoire confirme la morphologie des racines dentaires avec la possibilité fréquente, surtout chez l’adulte mûr d’une calcification des ligaments alvéolo-dentaires imposant souvent une syndesmotomie. L’hypercalcification osseuse expose le sujet à des fractures des tables externes ou internes, avec risque d’hémorragie post-opératoire ou d’alvéolite. Le bréviligne décompensé est exposé aux complications infectieuses: mettre un pansement antiseptique et antihémorragique dans l’alvéole (SANGUISORBA TM) et prescrire CALENDULA TM et/ou ECHINACEA TM en bains de bouche et prévoir: CHINA 4 CH, HEPAR SULFUR 4 ou 7 CH. Chez le bréviligne hypertendu, donner systématiquement ARNICA 7 ou 9 CH, avant et après l’intervention. Une autre difficulté opératoire est constituée par la fréquence de l’hypercémentose, surtout chez l’adulte mûr ou chez le vieillard.

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Comme on peut le voir avec ces quelques précisions: les renseignements obtenus reposent uniquement sur le type morphologique, équilibré ou décompensé. C’est déjà un avantage notoire que possède le dentiste homéopathe sur ses confrères.

Remarque: Nous-mêmes, après d’autres plus éminents, avons dit que d’une manière générale, le bréviligne présente peu de carie dentaire, parce que sa croissance est certes ralentie, mais elle se fait convenablement. Le bréviligne n’est pas un déminéralisé. Mais il peut le devenir. Comme on le sait, la constitution bréviligne résulte en partie d’un développement excessif du feuillet endoblastique, ce qui revient à dire combien le tube digestif domine ses préoccupations, tant sur le plan pathologique que sur le plan psycho-somatique (par exemple la boulimie de ANTIMONIUM CRUDUM surtout en cas de déception psychique ou de frustration). Le nourrisson bréviligne, déjà, est souvent un gros mangeur. Les excès alimentaires sont l’une des causes principales de la mise en oeuvre du mode psorique. Mais il arrive parfois que tel ne soit pas le cas et certaines mamans peuvent céder à la tentation d’obliger bébé à finir des biberons. C’est alors le risque de vomissements et de troubles digestifs. Et il y a souvent chez

ces bébés, surtout décompensés, l’apparition d’une intolérance au lait qui va perdurer toute la vie. On pense alors aux troubles digestifs qui en résultent, avec notamment l’indication fréquente à ce moment de MAGNESIA CARBONICA. Mais on oublie une conséquence fréquente: chez le nourrisson ou le jeune enfant = le lait est la principale source de calcium et de minéraux. S’il n’y a pas compensation, il y a risque de carences minérales, grave de conséquence au niveau de la minéralisation des dents, qui expliquera l’apparition inhabituelle de caries dentaires lors de l’éruption des premières dents permanentes, c’est-à-dire vers 6 ans. Michel GUERMONPREZ

4 souligne de plus que l’obésité fréquente du bréviligne

est souvent et inconsciemment « sécurisante » et « tout amaigrissement chez eux, même s’il est demandé, est anxiogène et cette anxiété, si elle n’est pas clairement exprimée, se manifeste sous un camouflage somatique, cardiaque par exemple, ou entéralgique ».

LE LONGILIGNE La constitution longiligne résulte d’un métabolisme accéléré, avec prédominance du feuillet ectoblastique, c’est-à-dire celui qui s’ouvre au monde extérieur. Sur le plan psychique, cela explique une hypersensibilité nerveuse et psychique = vite exalté mais vite déprimé du fait d’une seconde caractéristique => la fatigabilité. Il faut en tenir compte dans tous les aspects de la vie: scolaire, professionnelle et lors des soins dentaires. A l’image du phosphore qui s’enflamme rapidement et s’éteint aussi vite, le longiligne est vite emporté par l’enthousiasme mais celui-ci cède rapidement la place à l’abattement. C’est le biotype le plus cyclothymique. R. ZISSU précise que « tout acte, pour être réussi, doit être de courte durée ». Au contraire de ce que l’on peut faire avec un bréviligne équilibré, les séances de soins dentaires ne doivent pas être trop longues

4Voir « Approche psycho-somatique des constitutions homéopathiques » - Revue L’Homéopathie Française 1966

n°2.

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chez le longiligne, capable de soutenir un effort de volonté mais à condition qu’il ne dure pas trop longtemps. Ensuite, le longiligne est particulièrement sensible sur le plan affectif. PHOSPHORUS représente un prototype du romantique sentimental (CHOPIN, SCHUMANN par exemple). Et l’on connaît les répercussions particulièrement profondes des déceptions sentimentales, des amitiés ou des amours trahies, comme dans NATRUM MURIATICUM. Sans exagérer, il y a transfert affectif sur le praticien et ce sujet a besoin d’une relation de confiance. Mais attention, il est vite déçu, que sa déception soit justifiée ou non. Et alors il se referme comme une « huître » et peut abandonner les soins. Le type équilibré présente la cyclothymie mais avec un équilibre satisfaisant. Parce qu’il n’est pas encore asthénique, il peut dominer un temps son mauvais penchant, mais à condition qu’on lui ménage les phase de repos, les pauses nécessaires. Au cabinet dentaire, il faut en tenir compte: tenter d’établir déjà une relation de confiance, voire d’amitié; puis éviter les séances trop longues. Le type déséquilibré est plus difficile au cabinet dentaire. R. ZISSU le décrit ainsi: « ses aspirations le rendent infatué de lui-même, ambitieux, avide de gloire, don Juan impénitent, beau parleur, superficiel et mesquin, avec des phases de dépression mélancolique pendant lesquelles la conscience du vide de sa vie peut le conduire au suicide ». Voilà donc au cabinet dentaire un patient impatient, il faudra beaucoup de tact et de patience au praticien pour conduire des soins importants. D’autant plus que ses prédispositions bucco-dentaires imposent très souvent des soins précoces et répétés.

La bouche et les dents du longiligne: Selon les auteurs, et surtout B. de Névrezé, les dents du longiligne (phosphorique selon le langage de l’époque, encore souvent utilisé), les dents du longiligne sont longues (et oui!), notamment les incisives, souvent triangulaires. Les molaires ont des racines longues et souvent parallèles. On constate également un fréquent encombrement des 10 dents antérieures, dû à une endognathie. Dans ce biotype, les dents ont des cuspides plus longues, avec un engrènement plus profond. Cela signifie que les dents subissent davantage les forces latérales de la mastication. Aussi longtemps que l’os alvéolaire reste convenablement minéralisé, il résistera à ces efforts. Mais dans le cas contraire, il est fréquent de constater une mobilité dentaire et une poly-alvéolyse, qui expliquent, entre autres facteurs, la fréquence, la précocité et parfois la gravité de la maladie parodontale chez ces sujets. Encore du fait de problèmes de minéralisation, l’os alvéolaire est fragile et souvent souple en raison d’une densité osseuse moins importante. D’où la possibilité, en chirurgie, de saisir la dent à extraire assez haut avec le davier, ce qui est heureux car très souvent l’avulsion est imposée par une carie globale de la couronne. Du fait de la longueur des racines, qui constituent un bras de levier plus grand, il y a un risque de fracture de la table osseuse externe, souvent compensée par la labilité osseuse, mais pas toujours. Enfin, il ne faut jamais oublier chez le longiligne la tendance hémorragique per et post-opératoire, dont PHOSPHORUS est le remède le plus fréquemment indiqué. Le longiligne réagit plus volontiers qu’un autre sur le mode tuberculinique, parce qu’il y a adéquation entre l’accélération du métabolisme chez l’un et dans ce mode réactionnel. Aussi est-il facile de comprendre que la consommation accrue des

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minéraux puisse parfois aboutir à une carence au moment où les dents sont en cours de minéralisation, expliquant alors les caries globales et d’évolution rapide que l’on peut parfois constater chez ces sujets. Dont la carence en fer, que le sujet exprime par une anémie et une pâleur inhabituelle et qui peut expliquer la tendance hémorragique.

LE DYSTROPHIQUE: Ce biotype a longtemps été appelé « fluorique » et l’on a longtemps incriminé la syphilis comme seule responsable. Aujourd’hui, la conception a bien changé et l’assise étiologique a été élargie à tous les facteurs susceptibles de dévier la croissance: alcoolisme, intoxications dont celles par métaux lourds, par le fluor et certains médicaments, irradiations, traumatisme obstétrical, etc...

Le comportement est dominé par deux caractères: l’instabilité et le paradoxe. Comme le précise R. ZISSU, l’instabilité du longiligne est due à la fatigabilité alors que celle du dystrophique est « innée », « constitutionnelle », sans doute à l’image de l’instabilité chimique du fluor qui se combine facilement à différents produits. Citons encore cet auteur: « Dans un ordre supérieur, c’est l’intuitif qui assimile vite sans besoin d’apprendre, aux « traits de génie », qui comprend tout dans un seul élan de pensée, qui agit sans réflexion mais « tombe juste » par suite d’un sens remarquable de compréhension et d’observation. Incapable d’un long mûrissement, sa pensée se fait acte, non pas dans la patience d’un travail bien construit, mais dans l’opposition du milieu qui seule permet le jaillissement spontané d’une « illumination » immédiatement traduite en actes. C’est un réalisateur immédiat, génial, qui doit atteindre rapidement son but, sinon c’est l’échec aussi retentissant que le succès ». Mais chaque médaille a son revers: le dystrophique décompensé devient rapidement désabusé, irréfléchi, perd tout scrupule et sombre facilement dans la dépravation, la perversion, l’alcoolisme ou la toxicomanie. Bref, c’est souvent un asocial et parfois un délinquant. Au cabinet dentaire, et heureusement, tous les dystrophiques ne sont pas des dépravés. Mais leur instabilité de fond rend les traitements prolongés plus difficiles dans la mesure où ces sujets ne sont pas toujours capables d’assiduité et de persévérance. Et c’est d’autant plus regrettable qu’ils ont très souvent d’énormes problèmes bucco-dentaires.

La bouche et les dents du dystrophique: Tout a été dit sur les dents du dystrophique, de leur forme, de leur nombre, de leur position sur des arcades parfois dysharmonieuses (au sens orthodontique). Ce qui est certain c’est qu’on trouve souvent, mais pas toujours, des anomalies de forme et de position. Ensuite toute est affaire de subtilités et de nuances. Il est possible qu’un sujet dystrophique ait des dents bien minéralisées et bien rangées. Mais il est fréquent, hélas, qu’il ait les troubles sus-décrits. En fait, ce qu’il faut bien comprendre, c’est que le dystrophique réagit plus volontiers qu’un autre sur le mode luétique. Et il est de constatation clinique que des parents réagissant eux-mêmes sur le luétique engendrent des enfants dystrophiques. « On s’étonne à tort que des monstres engendrent des monstres » disait le Dr J. QUENOT. Or, le mode luétique

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aboutit à des troubles plus ou moins graves de la croissance, par le biais de la vascularisation. Quand nous parlons de « subtilités » et de « nuances », cela signifie que l’on peut voir des troubles mineurs et sectoriels, pouvant épargner les dents et les maxillaires et des troubles plus généralisés comprenant l’appareil maxillo-dentaire. Un autre fait mérite un commentaire. Le mode luétique atteint plus volontiers les tissus issus du feuillet ectoblastique, dont les nerfs, les fibres élastiques (hyperlaxité ligamentaire et pathologie vasculaire) et l’émail dentaire. Ainsi la dent peut-elle être mal minéralisée au niveau de l’émail, donnant l’aspect souvent décrit dans les ouvrages: émail déficient, parfois absent par zone, couleur grisâtre, taches blanchâtres, etc... Notons que l’on voit des lésions semblables dans les intoxications par le fluor (le darmous) ou par certains médicaments comme les tétracyclines. On peut voir également chez certains enfants dystrophiques une denture lactéale complètement délabrée, donnant ce que l’on appelle la mélanodontie. Cette situation aboutit parfois à des conséquences orthodontiques du fait de l’extraction précoce de certaines dents de lait sans maintien des espaces. Il est logique de nourrir aussi une inquiétude légitime pour la denture permanente. Or, on constate parfois qu’il n’en est rien. Cela signifie d’abord qu’il y a eu pendant la gestation puis dès le début de la première enfance, certains facteurs pathogènes qui ont entraîné les troubles, mais que l’enfant a pu ensuite surmonter ces facteurs défavorables, grâce à un mode de vie adapté et les dents permanentes sont alors intactes. Ensuite, il y a souvent des rapprochements entre le mode tuberculinique et le mode luétique par le biais de l’hyperthyroïdie avérée ou seulement apparente par les signes cliniques sans confirmation biologique. Cette affirmation est argumentée par l’indication de médicaments comme CALCAREA FLUORICA, FLUORIC ACID., ou IODUM chez des sujets dystrophiques, tous remèdes de l’hyperthyroïdie. Or, la mise en oeuvre de ces deux modes réactionnels constitue toujours une menace pour les dents, car à la désorganisation possible de la croissance s’ajoute le risque des carences minérales. B. de Névrezé dispense les conseils suivants avant une avulsion chez un dystrophique:

La syndesmotomie doit être soigneuse malgré l’apparente facilité de l’acte, ne serait-ce que pour ne pas déchirer l’anneau fibro-muqueux périphérique, source d’hémorragie importante.

La mobilisation de la dent doit être suffisante et prudente car il y a risque de fracture des apex, souvent très fins.

Attention aux sinus maxillaires.

Danger de luxation des dents voisines.

Danger de luxation de l’A.T.M. pendant l’intervention.

Le risque d’alvéolite est fréquent (ne pas oublier que MERCURIUS, remède luétique, est le plus fréquent des remèdes d’alvéolite).

A cela il faut ajouter deux problèmes particuliers: d’abord la tendance à faire des complications apicales avec fistules du fait des caries importantes et aussi de la négligence habituelle à les faire soigner en temps utile - ensuite la fréquence des manifestations ulcéreuses (aphtoses par exemple) ou ulcéro-nécrotiques (gingivite, parodontopathie...).

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Anecdote: en avril 1995, nous avons donné quelques soins à un sujet dystrophique de 20 ans, très sympathique et conscient de l’état de ses dents. Sa denture constitue un véritable « chantier » tant sont nombreuses les caries, débris dentaires à extraire, etc... La première note d’honoraires a été réglée sans problème par chèque postal. Mais le patient n’est pas venu au rendez-vous suivant sans prévenir et sans s’excuser par la suite. L’explication est simple: le chèque était sans provision. Plusieurs lettres de rappel sans réponse aucune ont entraîné une plainte auprès du Procureur. Puis avec la même décontraction et le même sourire insouciant, ce jeune patient est venu régler en espèces, sans la moindre excuse, sans même avoir conscience de son attitude désobligeante, protestant même contre son centre de CCP qui lui a retiré son carnet de chèques pour répétition de chèques sans provisions. Ce n’est pas de sa faute, tout de même !

EN RESUME

(Et selon J. BARBANCEY 5)

Le bréviligne type CALCAREA CARBONICA tend à se conformer au réel: il l’accepte raisonnablement, s’y adapte, au besoin « y fait son trou », quitte à s’y faire oublier pour vivre heureux...

Le longiligne type CALCAREA PHOSPHORICA incline à se tenir à distance

du réel, et devant les contraintes qu’il peut subir, s’en évade par « en haut », c’est-à-dire par la fuite dans l’imaginaire....

Le normoligne type SULFUR prend en compte le réel, il l’appréhende à la fois avec réalisme et avec le projet de le maîtriser, de le conformer si possible à son désir.

Le dystrophique type CALCAREA FLUORICA court le risque de déformer

le réel, ce qui est à la fois expression et conséquence de sa dysharmonie mais traduit aussi, peut-être, une sorte de refus, le reflet de sa difficulté à accepter sa propre image, car il a sans doute précocement conscience latente d’une certaine disgrâce esthétique qui est son sort et avec laquelle il doit vivre.

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5 »Psychisme de CALCAREA FLUORICA » - Annales Homéopathiques Françaises 1977 n°1)

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PORTRAITS DE QUELQUES PATIENTS

TELS QU’ON LES RENCONTRE AU GRE

DES CONSULTATIONS AU CABINET

DENTAIRE

Etude comparée des trois anti-psoriques majeurs (selon HAHNEMANN) d’après J.

HUI BON HOA6

Outre leurs indications dans divers troubles à tous niveaux relevant du mode réactionnel psorique, PATERSON fait remarquer que lorsque ses trois médicaments sont indiqués successivement chez un même patient, on trouve dans les selles le même germe (le B. MORGAN de Bach). Rappelons que SULFUR peut être indiqué chez un sujet bréviligne qui a longtemps bénéficié de CALCAREA CARBONICA lorsqu’il est encore sthénique et réagit sur le mode psorique.

CALCAREA

CARBONICA

SULFUR LYCOPODIUM

ASPECT

PHYSIQUE

Bréviligne, épais, souvent gras ou obèse, tissus mous.

Souvent maigre, parfois aspect mal soigné et négli-geant (sauf si sa femme est ARS. ALBUM !)

Maigre, muscles peu développés, ventre un peu gros, air fatigué ou préoccupé

CAUSALITES Vent froid et humide Temps humide Efforts physiques et psychiques. Suppression: sueurs, éruptions, règles. Dentition. Frayeur. Alcool. Carences en cal-cium.

Sédentarité. Suppressions de troubles cutanés. Surmenage. Excès alimentaires (dont sucreries). Chaleur ou froid.

Excès alimentaires (dont huîtres et, oignons. Vexations, colères. Anxiété. Alcoolisme. Tabagisme.

COMPORTEMENT

PSYCHIQUE

PEUREUX. Il a peur de tout. On doit tout lui expliquer, le rassurer. Faible et

Souvent optimiste et sympathique mais humeur chan-geante, vite IRRI-TABLE, égocen-

Coléreux, irritable, intolérant à la contradiction, mauvaise humeur, arrogant et

6Les Annales Homéopathiques Françaises 1967 n°2

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LENT, parfois apathique.

trique. Parfois déprimé.

méprisant. Cache souvent sa « trouille » par son aspect hautain.

MOTIVATION

DE LA CONSUL-

TATION DU

CHIRURGIEN-

DENTISTE

Dentition = retardée, difficile, avec troubles digestifs ou ner-veux. Gingivite avec saignement, sensation de brûlure. Caries, collets +++

Aphtes, gingivite érythémateuse, sécheresse, brû-lure.Maladie paro-dontale avec mo-bilité, alvéolyse, ulcérations (pha-gédéniques)

Maladie parodon-tale avec poches suppurées. Herpès, aphtes. Sécheresse haleine fétide (le matin). Vésicules brûlantes

MODALITES

GENERALES

< FROID HUMIDE EXERCICE PHYSIQUE ou MENTAL < temps sec

< CHALEUR < périodiquement < lavage > temps sec et tempéré. > élimination

< CHALEUR < entre 16h-20h > grand air, froid

Toujours selon J. HUI BON HOA, = le Pr BOGER de Chicago recommandait lors de l’étude d’un cas clinique de rechercher systématiquement la présence chez le malade des 7 principales sensations suivantes:

BRULURE SULFUR LYCOPODIUM

CRAMPE Sulfur CALCAREA

CARB.

LYCOPODIUM

COUPURE SULFUR Calcarea carb. Lycopodium

ECLATEMENT Sulfur Calcarea carb.

MEURTRISSURE SULFUR

PULSATION Sulfur CALCAREA

CARB.

SOIF SULFUR CALCAREA

CARB.

Lycopodium

INTERPRETATION DIATHESIQUE DE CES TROIS MEDICAMENTS

CALCAREA CARBONICA SULFUR LYCOPODIUM

Remède préventif chez l’enfant bréviligne répon-dant au type sensible et d’autant plus que sont présents quelques signes,

Remède indiqué soit au début d’un traitement d’un sujet psorique sthénique: gingivite érythémateuse, aphtose, éruptions autour

Remède de troubles bucco-dentaires soit en-core réversibles soit déjà très avancés, reflet de l’état de la fonction

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notamment pour les troubles de la dentition. Chez l’adulte, remède de prévention puis de soutien lorsque commence une maladie parodontale. No-tamment lorsque ces troubles peuvent être compris comme une tentative d’intériorisation de manifestations patho-logiques du fait du ralentissement métabo-lique: mode psorique plus ou moins sthénique, puis asthénique et déjà mise en oeuvre du mode sycotique.

de la bouche. Puis de fin de traitement lorsque d’autres médicaments in-diqués par le contexte ont amélioré l’état général et local = début d’alvéolyse, gingivorragies, mobilité dentaire. Attention à la tendance centrifuge et à l’état des émonctoires avant toute prescription.

hépatique, des émonc-toires et du reten-tissement sur la nutrition. Tout tourne autour du FOIE. Attention = remède à maniement délicat chez l’adulte âgé, ayant des émonctoires saturés. A ne pas répéter trop souvent (voir plus bas).

ATTENTION A LYCOPODIUM: Il est important de ne pas répéter ce médicament trop souvent sous peine d’aggravation, parfois très fâcheuse. Dans un article

7, R. DUFILHO rapporte deux cas malheureux de

LYCOPODIUM. En voici un. « J’eus l’occasion de soigner avant la guerre de 1940 un client qui devint un ami. Sa santé

était bonne et en tous cas je n’avais à son sujet aucune raison de m’inquiéter. Il avait 43 ans.

Un matin sa femme me téléphone pour m’apprendre que son mari était mort subitement

vers 4 heures du matin d’une angine de poitrine. Etait-ce un infarctus ? A cette époque le

diagnostic d’angine de poitrine était à la mode. Mon étonnement et mon émotion furent tels que

je partis aussitôt pour essayer de comprendre cette mort brutale et presque subite.

Mon ami et client avait souffert du cœur vers 3 heures du matin d’une façon atroce et le

Dr Pradal, médecin homéopathe de Pau fut appelé. Ce confrère le soigna quelques instants et très

vite le malade mourut presque subitement.

Dès que je fus arrivé au domicile de mon ami, je dis à sa femme: « Je ne comprends pas

cette mort rapide car votre mari n’avait pas une mauvaise santé. Voulez-vous me montrer les

remèdes qu’il prenait pour ses troubles fonctionnels habituels ? ».

Sa femme me porte les remèdes et me tend en premier LYCOPODIUM 5 CH. Aussitôt je

m’écrie: « Oh celui-là importe peu car il n’en prenait qu’au maximum une fois par mois ».

« Comment, s’écria-t-elle, mais Docteur il en prenait régulièrement tous les soirs ».

Le problème était posé et je ne savais pas le résoudre. A cette époque j’avais un maître

étranger auquel je posai le problème. La réponse fut nette et brutale. « C’est votre remède

LYCOPODIUM qui l’a tué. Il ne fallait pas lui dire quel était son remède de fond, il fallait le lui

donner vous-même sans qu’il sache ce qu’il prenait ».

7Voir L’Homéopathie Française 1977 n°5

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Le lecteur de cet article se demande pourquoi il prenait ce remède. Je l’avais deviné dès

que sa femme m’eut révélé qu’il en prenait tous les soirs. Reportez-vous cher lecteur à la page 61

de NASH (Leaders in Homeopathy) où on peut lire:

« Un vieil homme épouse sa 2° ou 3° femme et peut se rendre compte qu’il n’est pas à la

hauteur de la situation...Une dose de LYCOPODIUM arrange bien les choses... ».

Pour comprendre ce qui s’est passé avec mon malade décédé, il faut apprendre ce que je

savais depuis quelque temps à savoir que cette homme avait une jolie maîtresse espagnole et

qu’il avait dû se rendre compte qu’en prenant LYCOPODIUM, il avait des possibilités sexuelles

remarquables ou bien qu’il avait appris par d’autres le pouvoir particulier de ce remède dans

certains cas, sur certains organismes car il faut toujours se reporter à notre grande loi de

similitude ». Conclusion: ne pas répéter trop souvent LYCOPODIUM et demander au malade de renoncer à avoir une maîtresse, surtout espagnole. R. ZISSU

8 recommande de commencer par des satellites jusqu’à reprise des

fonctions des émonctoires, puis commencer LYCOPODIUM par une 7 CH espacée: « Attention à son caractère centripète profond, la préparation de son action doit être « soignée ».

UN PORTRAIT EN OR ! Dans tous les ouvrages de référence, on décrit le type sensible de AURUM METALLICUM comme convenant à un sujet congestionné, qui explique son visage rouge, voire vermeil, le sanguin classique. Mais comme c’est souvent le cas, la réalité clinique est plus complexe. Il convient de rappeler ici que les patients qui viennent au cabinet dentaire ne sont pas obligatoirement très malades, ils ne répondent donc pas forcément au type sensible classique, mais cache le plus souvent leur personnalité sous différents aspects. Par exemple, nous avons souvent dit que NUX VOMICA, présenté partout comme un impatient irascible, capable de colères violentes ou d’un comportement odieux, est parfaitement capable de masquer sa personnalité profonde face à un inconnu ou à un étranger qu’il craint ou respecte, son dentiste par exemple. Pour en revenir à AURUM, il peut venir au cabinet dentaire dans une période de relative bonne santé, c’est-à-dire qu’il n’a pas alors l’aspect rougeâtre de la congestion artérielle, ou l’air triste de déprimé qui se rencontre parfois. Le Dr LEFORT

9 le décrit

ainsi, lorsqu’il vient consulter à un moment où sa santé n’est pas trop menacée: « Avantageux, d’aspect floride, fat, gros, voire puissant, le visage sanguin, le cheveu généralement noir et dur, le geste aisé et rapide accompagnant une conversation facile, une parole chaleureuse, c’est un personnage qui respire la santé... ». Mais continue cet auteur: « Hélas, cette façade d’invulnérabilité n’est qu’apparente. Ce visage coloré qui fait l’admiration des non-initiés, n’est ainsi que parce qu’il traduit un

8 »Les principaux remèdes des états chroniques » A.F.M.C.H. 1983.

9Voir Les Annales Homéopathiques Françaises 1959 n°4.

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état congestif à la fois plein d’inconvénients et source de danger ». Et derrière le sourire de ...façade, LEFORT décrit le mouvement de recul que peut avoir son dentiste: « Il est de ceux avec lesquels on aime autant ne pas échanger de confidences, car une odeur putride émane de cet orifice (la bouche) où s’abritent, baignant dans une salive hypersécrétée, de vieilles caries, des chicots infectés et souvent ces nécroses maxillaires, et surtout palatines qui sont l’un des signes majeurs d’AURUM. ». Tout ce qui brille n’est pas d’or !!! D’abord, avant d’étudier davantage le comportement, pourquoi AURUM METALLICUM vient-il consulter son dentiste ?

Haleine fétide comme du « vieux fromage », goût putride, haleine fétide chez des jeunes filles lors de la puberté.

Douleurs dentaires surtout au niveau de dents cariées, au moindre froid, douleurs rongeantes, ou sensation de contusion lors de la mastication. Douleurs perforantes du palais. Ostéite du palais. Ulcérations, ulcérations syphilitiques du palais.

Gingivite ulcéreuse, avec sialorrhée, suppuration alvéolaire, tendance à la nécrose osseuse (voûte palatine, ulcérations du voile du palais avec douleurs térébrantes. Mobilité dentaire (2° degré).

Adénopathie sous-maxillaire douloureuse; hypertrophie et ulcérations des amygdales.

La tendance à la nécrose du palais et les ulcérations syphilitiques concernent effectivement un sujet syphilitique, surtout ayant abusé de sels de mercure. Il faut reconnaître qu’on n’en rencontre qu’exceptionnellement au cabinet dentaire. La Matière Médicale est discrète sur d’autres signes, que l’on retrouve dans le Répertoire de KENT: aphtes (sur la langue), lichen plan, caries du collet, bruxisme, sensations de brûlure (notamment au niveau de la langue), verrues de la langue.

Et nous retrouvons là une difficulté que rencontre chaque jour le dentiste. Une haleine fétide, une gencive enflammée, une mobilité dentaire, des douleurs dentaires ou des aphtes sont le lot quotidien. Et le plus souvent, ces troubles banals en eux-mêmes sont présents chez des patients qui par ailleurs semblent en bonne santé. Il n’est donc pas facile de mettre en évidence l’indication d’un médicament homéopathique précis. Si le patient accepte une consultation homéopathique, c’est essentiellement la réunion de nombreux signes, à différents niveaux, qui permet le diagnostic du remède, et c’est pour nous, l’avantage fondamental du répertoire informatisé de permettre de déterminer un médicament auquel on n’avait pas pensé spontanément, faute d’éléments suffisants, et cela en quelques minutes. Comme pour tous les toxiques étrangers à l’organisme, l’or a une action diphasique: d’abord excitation, puis dépression. On rencontre AURUM excité chez un adulte d’âge mûr que le mode de vie a décompensé (alcoolisme notamment). C’est alors qu’on voit un sujet congestionné (teint coloré, rouge, mais souvent couperosé, avec un nez rouge, bourgeonnant, marqué de varicosités). Le comportement peut faire penser à NUX VOMICA: sujet remuant, excité, précipité, autoritaire, irritable et surtout susceptible d’où ses colères: soudaines, violentes, après contradiction, mais parfois rentrées (suite d’amour déçu, de

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chagrin, d’humiliations, de contrariétés, de peur...), intolérant à la contradiction, hypersensible au bruit, hypocondriaque, facilement indigné. L’autre versant est un sujet timide, pudique, triste et peureux (bruit, foule, mort, voleurs). Son manque de confiance en lui, sa misanthropie, ajoutés aux signes précédents, évoquent aussi LYCOPODIUM. Pour ces trois médicaments, il y a encore en commun l’hypertension artérielle, mais avec AURUM elle s’accompagne d’une tendance à la sclérose plus affirmée. Encore des points communs avec NUX VOMICA: tous deux ont tendance à la bonne chair, ils aiment les bons repas, surtout arrosés d’alcool et de café. Et tous deux connaissent leur foie: gros, congestionné, cirrhose. Dans une étape d’aggravation, on constate alors des points communs avec LYCOPODIUM, puis avec LACHESIS lorsque la congestion s’exprime, mais avec une différence: AURUM aime bien la chaleur (mais il ne faut pas exagérer !), ce qui est paradoxal mais ce sujet n’est pas à une contradiction près. Il aime le grand air, l’air frais, mais pas le froid, surtout humide, ni l’hiver. Il est aggravé la nuit (note luétique commune à LACHESIS). C’est dans ce contexte qu’on verra un tel sujet AURUM venir consulter pour une aphtose ou pour une gingivite ulcéreuse avec déjà quelques poches suppurées. L’autre versant d’AURUM est celui de la phase dépressive qui s’exprime au mieux chez un vieillard artérioscléreux. R. ZISSU

10le décrit ainsi: « Les accès de colère

se terminent dans la tristesse, l’activité et l’agitation font place à l’inaction taciturne et au désir de solitude, l’atmosphère d’autorité qui l’entourait se fond dans une introspection obsédante avec pleurs sur ses fautes, sur ses malheurs et sur son impuissance. Le dégoût de la vie s’installe avec idée obsédante du suicide malgré sa peur de la mort ». Voilà donc deux versants d’un même sujet, certes à des âges différents de sa vie. Dans le second type, inutile de dire que sa maladie parodontale s’est aggravée au point de rendre vaines les solutions chirurgicales. Et nul ne sera étonné que le praticien hésitera entre AURUM et BARYTA CARBONICA, ou CARBO VEGETABILIS. Pour terminer, voici quelques réflexions sur AURUM qu’on peut lire sou la plume d’Alain HORVILLEUR

11 : « ...ce n’est qu’après 25 ans de pratique que j’ai vraiment

compris AURUM. Jusque-là je le prescrivais avec succès chez des hypertendus organiques, « rougeauds », quelques femmes porteuses de fibromes, et surtout dans les syndromes mélancoliques au sens psychiatrique du terme: syndrome de désespoir avec culpabilité entraînant une douleur morale pouvant conduire au suicide. Mais à côté de ce risque majeur, il y a des personnalités « Aurum non décompensé » à côté desquelles on passe trop souvent. J’avais seulement repéré qu’AURUM aime bien agir seul contre tous... ». AURUM aime bien le risque, il peut être casse-cou ou téméraire (au 2° degré, puis Capsicum, Menyanthes et Pulsatilla).

10

Voir « Matière Médicale Homéopathique Constitutionnelle ». 11

A. HORVILLEUR: « Stratégies en homéopathie » Maloine 1995, cité dans « Le Journal de l’homéopathie » -

BOIRON - hors série n°5 - juin 1995.

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PORTRAITS DE QUELQUES « KALI »

Il existe 44 médicaments à base de potassium. C’est donc une gageure que de n’en décrire que deux = KALI CARBONICUM et KALI PHOSPHORICUM. Ce sont sans doute les deux que l’on rencontre le plus souvent au cabinet dentaire. Ce n’est pas par oubli que KALI BICHROMICUM n’est pas traité ici, mais ses signes psychiques étant insignifiants, il n’entre pas dans le cadre de ce sujet, même s’il rend de nombreux services en pratique dentaire. Tous les KALI ont en commun les signes et symptômes qui dépendent de l’action de la potasse = asthénie, dépression avec quelques poussées d’irritabilité, douleurs, irritation des muqueuses avec ulcération et nécrose. L’originalité de chacun est expliquée par l’autre élément.

KALI CARBONICUM: Deux signes frappent lorsqu’on rencontre un sujet KALI CARB. = d’abord un signe physique précieux (mais inconstant) - l’œdème de l’angle interne des paupières supérieures - puis un signe psychique - une extrême fatigue mentale et physique. Il faut bien-sûr nuancer ce dernier. Il est possible de voir un sujet encore peu décompensé, la fatigue ne saute pas alors aux yeux du praticien. Mais il suffit de poser deux ou trois questions pour s’en rendre compte. L’aspect physique rend compte de la décompensation: au départ, c’est un sujet très proche physiquement de CALCAREA CARBONICA, c’est-à-dire un sujet plutôt « enrobé », voir plus ou moins obèse. Puis sous l’effet de diverses causes (maladies graves, accouchements ou avortements compliqués, surmenage, soucis divers, erreurs alimentaires...), le sujet devient déprimé, maigrit, présente un aspect maladif. C’est alors qu’on peut le voir au cabinet dentaire avec la face pâle, les traits tirés, le tout exprimant une extrême lassitude. Ce sujet réagissant jusque-là sur le mode psorique devient sensible aux facteurs sycotiques: il devient « infiltré » et présente des oedèmes disséminés qui peuvent masquer l’amaigrissement, dont l’œdème de l’angle interne des paupières supérieures. Le fond potassique s’exprime par la dépression profonde, avec lassitude, peurs (de la maladie, de la mort, de l’avenir, de la solitude avec désir de compagnie), inquiétude notamment pour sa santé. Et sur ce fond dépressif, il y a des sursauts d’irritation: mauvaise humeur, hypersensibilité aux bruits, au contact, horreur de tout effort, désir le calme, susceptibilité, colère... Et en plus il est devenu très frileux, ne supporte pas le froid, le froid humide et surtout les courants d’air au point d’en avoir une phobie. Évidemment, lorsque tous ces signes sont présents, il est facile de reconnaître KALI CARB., mais avant cette décompensation ce n’est pas facile. Il y a encore un signe qui peut être utile: lorsqu’il a peur, ce qui peut être le cas au cabinet dentaire, il ressent son anxiété au niveau de l’estomac avec une tendance à la défaillance. C’est que l’appareil digestif est souvent au centre de ses préoccupations, comme pour tous les carboniques: insuffisance gastro-hépatique (lenteur du transit, digestion lente des féculents ou des aliments gras, fermentations abondantes, ballonnement important). En dehors des repas, il se plaint d’une sécheresse buccale intense, malgré une salivation abondante, sa langue devient blanchâtre ou jaunâtre. Peu après le repas, voire aussitôt après, le patient se trouve ballonné, même s’il a peu mangé, avec la sensation que son estomac est plein d’eau, avec des régurgitations et de la nausée, ou même une céphalée. Longtemps après le repas, et souvent au milieu de la nuit, entre 2h et 4h, la

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nausée réapparaît, de même que les régurgitations (aigres) et des douleurs abdominales ou à l’hypocondre droit, les fermentations provoquent des gaz nombreux et fétides. Elles sont aussi responsables de véritables débâcles diarrhéiques sur fond de constipation opiniâtre (selles énormes, dures, exigeant de gros efforts = blocage de l’émonctoire intestinal) et hémorroïdes volumineuses (saignement, douleurs brûlantes, > applications froides). Comme ces troubles digestifs deviennent chroniques, le patient développe progressivement une gingivite parfois ulcéreuse ou des ulcérations banales dans toute la bouche. Avec le temps, cette gingivite évolue vers une véritable maladie parodontale: « les gencives se décollent des dents et s’en séparent; les dents alors se gâtent et il faut les arracher de bonne heure, pus suintant entre des gencives et les dents » (LATHOUD). Et comme si ce n’était pas suffisant, le patient peut présenter de nombreux troubles, parfois graves, au niveau du cœur (palpitations, anxiété entre 2h et 4h du matin, extrasystoles, ralentissement veineux expliquant les gingivorragies passives - sensation que le cœur est suspendu à un fil (sensation précieuse si on la trouve); insuffisance rénale avec oedèmes (dont ceux des paupières supérieures), oligurie, hyper-uricémie..., le tout pouvant expliquer la parodontopathie; au niveau de la peau = transpiration abondante au moindre effort même par temps froid, surtout en cas de constipation, disparition des sueurs en cas de diarrhée... Voilà encore une illustration de la thèse que nous défendons depuis des années. Si

l’on peut mettre en évidence l’indication de ce médicament à un stade précoce, avant la maladie parodontale, on peut avoir une action préventive, afin d’empêcher la réalisation de ce que la Matière Médicale prévoit. Mais justement là est la difficulté, car les symptômes et les troubles divers ne sont pas encore très affirmés. Il reste les cadres diathésiques. KALI CARB. est un sujet autrefois CALCAREA CARB., qui a été plus ou moins longtemps sthénique et qui a alors réagit sur le mode psorique dont SULFUR était le remède de fond. Et puis la décompensation s’est développée, le plus souvent lentement, au point que le sujet a mis en oeuvre le mode sycotique avec ce qu’il comprend de sensibilité au froid humide, d’infiltrations, de ralentissement des diverses fonctions, dont la fonction digestive et la fonction sexuelle qu’il est difficile d’aborder au cabinet dentaire, de scléroses diverses (dont les rhumatismes).

KALI PHOSPHORICUM: La première grande différence avec le médicament précédent est que KALI PHOSPHORICUM n’est pas un remède de troubles chroniques, il est moins, voire pratiquement pas impliqué dans un mode réactionnel. Ce qui frappe dès le premier abord est la grande fatigue, voire un épuisement profond aussi bien physique que psychique, notamment à la suite d’un surmenage intense (intellectuel, sexuel) ou de chagrins et soucis.

Le type sensible le plus fréquent est un adolescent grand et maigre (biotype longiligne = phosphorique) épuisé par un surmenage intellectuel comme ce peut être le cas chez un étudiant préparant un concours ou un examen, qui a donc beaucoup travaillé, souvent tard le soir. Il n’est pas impossible qu’à ce surmenage psychique puisse s’ajouter une déception sentimentale, ou pour rester optimiste un surmenage sexuel. On peut répéter ces mêmes phrases pour PHOSPHORIC ACID., qui

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correspond au même type sensible et aux mêmes circonstances étiologiques avec les mêmes conséquences psycho-somatiques. Aussi est-il intéressant de les comparer points par points. PHOSPHORIC ACID. est sans doute le moins caustique des acides, il y a donc peu d’ulcérations des muqueuses et peu d’hémorragies. Mais on retrouve l’atonie musculaire et l’aggravation nocturne (deuxième partie de la nuit), communes à tous les acides. Ensuite, PHOSPHORIC ACID. est déjà un peu plus chronique que le précédent et se trouve impliqué dans les troubles du mode tuberculinique. On peut affirmer qu’il y a aggravation des troubles de KALI PHOSPHORICUM vers PHOSPHORIC ACID., puis vers PHOSPHORUS. Si l’on imagine que ces deux types de patients se présentent au cabinet dentaire, il faut bien admettre que le chirurgien-dentiste se trouve embarrassé pour différencier ces deux médicaments sur leur seul comportement ou aspect morphologique, d’où l’intérêt du tableau suivant qui permet une comparaison plan par plan:

COMPARAISON KALI PHOSPHORICUM / PHOSPHORIC ACID.

KALI PHOSPHORICUM PHOSPHORIC ACID.

ASPECT PHYSIQUE Sujet grand et maigre, surtout adolescent, face pâle, yeux enfoncés, traits tirés.

idem

CIRCONSTANCES

ETIOLOGIQUES

Surmenage intellectuel, sexuel et nerveux. Soucis et chagrins

Surmenage intellectuel ou sexuel. Chocs moraux, deuils répétés, déceptions sen-timentales. Pertes de liquides (dont allaitement)

SYMPTOMES

PSYCHIQUES

Dépression: n’a plus confiance en lui, fuit les conversations mais a peur de la solitude. Ne peut plus fournir d’effort mental (céphalée occipitale consécutive), sensation de vide cérébral. Inquiet de son état. Désespéré, anxieux, irritable, tressaille au moindre bruit et au toucher («épine dorsale). Peurs: dans la foule, de la maladie, de la solitude avec agoraphobie.

Dépression, se sent « vidé », pertes de mé-moire, apathique, indif-férent, tout l’ennuie, incapable de réfléchir, ne pense à rien, veut rester seul, qu’on lui fiche la paix. qu’on ne lui parle pas. Ne trouve plus les mots justes. Peur de ne pas guérir. Aggravation par l’effort mental: sensation intense de fatigue le long du rachis.

SYMPTOMES

GENERAUX ASSOCIES

Epuisement. Frilosité. Agitation nerveuse des

Epuisement. Sensation de fatigue

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pieds, sensibilité au bruit et au toucher (épine dorsale+++) = tressaillements, irritabilité. Palpitations à la moindre émotion. Sommeil agité avec cauchemars, insomnie, se réveille fatigué. Céphalées des étudiants.

ressentie le long de l’épine dorsale. Transpirations faciles, la nuit ou le matin. Douleurs osseuses avec sensation de raclement. Vertiges qd debout, marche, par effort mental. Sensation de poids au vertex. Diarrhée profuse mais non épuisante.

DESIRS, AVERSIONS,

MODALITES

Désir d’eau glacée, de vinaigre, de sucre. < tous efforts, froid, courant d’air, solitude. > en mangeant, distraction, mouvement lent.

Désir de lait froid, aversion: pain, café. < tous efforts, émotions, bruit, froid, courant d’air. > repos, sommeil, chaleur.

SIGNES

BUCCO-DENTAIRES

Gingivite: aspect scor-butique, gencive spon-gieuse et rétractée, gingivorragies, ulcérations, douleurs dentaires (nuit, mastication). Bruxisme. Mobilité dentaire, alvé-olyse. Brûlure: bouche, langue. Haleine fétide. Salive épaisse. Bouche et langue sèches.

Sécheresse buccale. Gingivite: gencive

enflée, rétractée, ulcérée, gingivorragie, goût acide et putride. Haleine fétide. Douleurs dentaires (nuit, mastication), mobilité dentaire, alvéolyse. Brûlure: bouche, langue, palais. Ulcérations du palais. Morsure de la langue.

Comme on peut le voir, les comparaisons plan par plan, chapitre par chapitre, montrent de très grandes similitudes entre ces deux médicaments. Il n’est pas facile de les distinguer. Heureusement, le répertoire informatisé simplifie la tâche. Mais ne pas oublier la grande différence: KALI PHOSPHORICUM est certes déprimé et apathique, mais il peut sortir de cet état, il devient alors particulièrement irritable. PHOSPHORIC ACID. est plus profondément déprimé, et ne peut s’en sortir, ce qui l’aggrave. Cela est sans doute dû à la fonction acide.

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UN AUTRE PORTRAIT (le médicament sera précisé plus loin)

Voici un homme jeune, mince, avec une face pâle, jaunâtre, ridée, les yeux cernés, la lèvre inférieure sèche et fissurée, des gerçures aux commissures labiales. Il est couvert alors qu’il fait plutôt chaud. Il est maigre, voire amaigri car il semble souffreteux. Il souffre d’une gingivite ulcéreuse très importante et sans doute d’une pulpite aiguë. Les premiers contacts sont déjà désagréables pour le praticien. Ce patient semble impatient ! Il est particulièrement anxieux, se demande ce qu’il a et surtout si l’on va le soulager rapidement. Il veut qu’on lui explique ce qu’il a, pourquoi il souffre autant et demande ce qu’on va lui faire. Il est irritable, contient une colère qu’on sent prête à éclater. Dès que le miroir est introduit dans sa bouche, il le repousse d’un geste brutal et demande méchamment de faire attention car il a mal. On entend des craquements dans ses A.T.M. lorsqu’il ouvre la bouche. Il faut convenir que ce client ne semble pas un client commode. C’est le moins qu’on puisse dire. Mais qui peut deviner le remède possible ? C’est encore trop tôt. Trop tôt ? Voyons ce qu’en pense le répertoire informatisé. Si l’on commence en sélectionnant les seuls signes généraux: amaigrissement ou maigreur, anxiété, colère, frilosité et irritabilité, l’ordinateur fournit 6 médicaments: ARSENICUM ALBUM, CALCAREA SILICATA, NATRUM MURIATICUM, NITRI ACID., SILICEA et TUBERCULINUM. Lorsqu’on ajoute les signes locaux: craquements dans les A.T.M., gencive ulcérée, commissures fissurées, douleurs dentaires, face pâle, face maladive, lèvres sèches, lèvres craquelées, yeux cernés - seul NITRIC ACID. possède ces 14 signes ou symptômes, juste devant ARSENICUM ALBUM.. Voilà déjà une première réponse à ceux qui dénigrent l’utilité de l’informatique. Combien de temps gagné dès les premières minutes, car il ne reste ensuite qu’à confirmer le choix de l’ordinateur. C’est tout de même le praticien qui décide.

PORTRAIT D’UNE PATIENTE

DE MAUVAISE HUMEUR Une dame me demande au téléphone si je suis bien un spécialiste des « aphtes » !!! « Parce que vous comprenez, des médecins et des dentistes, j’en ai vu des tas, tous leurs traitements ont été nuls, j’ai toujours mes aphtes, et j’en ai marre! ». Lorsqu’elle pénètre dans mon cabinet, je suis surpris de sa maigreur car malgré sa quarantaine apparente, son cou semble particulièrement ridé et son visage, outre quelques boutons, semble plus vieux que le reste de son physique. Sa peau est sèche et on remarque des grosses veines sur le dos des mains, très colorées en bleu. Et

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observation que je garde pour moi, je constate qu’elle semble ne pas avoir de seins, tant ils paraissent petits. Comme elle est arrivée en retard malgré mes mises en garde au téléphone et que je le lui fais remarquer, elle rouspète qu’elle n’est pas responsable des embouteillages et que mon cabinet n’est pas facile à trouver !!! Cela commence bien. A l’interrogatoire, je constate qu’elle est très fatiguée, elle répond avec lenteur à mes questions comme si elle ne les comprenait pas bien. Mais surtout elle est découragée, profondément, en raison des nombreux traitements qu’elle a suivis et subis, sans résultat. Discrètement, tout en l’interrogeant, je pianote sur l’ordinateur, ce qu’elle n’apprécie pas. Mais l’ordinateur indifférent à sa mauvaise humeur me livre un seul médicament lorsque je lui demande à quel remède correspondent les signes suivants: aphtes, asthénie, amaigrissement, mauvaise humeur, lenteur, découragement. Un seul médicament est indiqué. Malheureusement je ne le connais que très peu. Je poursuis donc mon examen et mon interrogatoire. Ses aphtes siègent presque toujours au niveau de la langue et du palais. Elle se plaint de sécheresse buccale, de brûlure de la langue, même en dehors des poussées d’aphtes. La salive est abondante, elle a un goût acide, parfois métallique. Son haleine est fétide malgré de nombreux bains de bouche. La langue est saburrale. Cela provient sans doute de troubles digestifs: pas d’appétit ni de soif, nausées rien qu’en pensant aux aliments, constipation opiniâtre nécessitant de gros efforts et la selle est douloureuse. Il est difficile de lui faire admettre qu’elle aime bien les alcools. Elle craint l’humidité, surtout le froid humide qui aggrave son humeur !!! Elle affirme que depuis des années, elle a les jambes lourdes, avec des veines épaisses et quelques varices. La peau est sèche, plissée notamment au cou, elle a quelques crevasses discrètes aux mains et aux orteils. Et puis elle se plaint de boutons disgracieux sur le visage, souvent pruriants, qui reviennent trop souvent à son goût, notamment avant les règles et plus particulièrement au printemps, ou encore elle a quelques fois de l’herpès sur la lèvre supérieure. Enfin, elle a déjà eu plusieurs coliques néphrétiques et a encore souvent une pollakiurie et des douleurs à la miction. Je prescris SARSAPARILLA 7 CH, une fois par jour, médicament indiqué par l’ordinateur dès le début de la consultation et confirmé ensuite par les autres symptômes. Je la revois deux mois plus tard. Cette fois elle arrive à l’heure, souriante et apparemment de bonne humeur, car: « Docteur, c’est un miracle, depuis que je prends vos pilules, je n’ai plus d’aphtes ». En reprenant l’interrogatoire, il semble que ses aphtes ont commencé il y a trois ans, peu après une série de vaccinations qu’elle a dû subir avant un long séjour au Laos. La deuxième prescription comprend: SARSAPARILLA 15 CH tous les 15 jours, SULFUR 7 CH une fois par semaine. Depuis plus de 8 mois, tout semble aller bien. Pourvu que cela dure ! Je dois avouer que je n’avais jamais vu d’aphtose relevant de ce remède, connu surtout pour ses troubles urinaires et cutanés, sans doute participant au mode psorique, ce que HAHNEMANN avait déjà affirmé il y a bien longtemps. J’avais pensé à NATRUM MURIATICUM ou à LYCOPODIUM. Ce dernier parce qu’il y a avait une

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latéralité droite (aphtes, boutons, coliques néphrétiques) et la mauvaise humeur, son comportement un peu hautain. Mais j’avais tort. Merci à l’ordinateur.

EN CONCLUSION

Après cette étude, certes incomplète, nous espérons avoir montré l’intérêt de l’homéopathie dans la pratique quotidienne au cabinet dentaire. Lorsqu’on connaît suffisamment cette méthode thérapeutique, on ne peut plus échapper aux extrapolations dès que l’on voit un nouveau patient et que l’on découvre son type sensible, avec le risque maintes fois répété d’une erreur d’interprétation, car il faut le redire encore et encore: on ne prescrit pas sur un type sensible, qui n’est pas défini par des signes pathogénétiques. Le type sensible n’est qu’un élément d’appréciation, comme l’est l’aspect morphologique. Mais le comportement du patient participe davantage à la résolution de l’équation de la similitude. Le médicament homéopathique, du fait de l’originalité de la pathogénésie, complétée par la toxicologie et surtout par l’expérience de nombreux praticiens, offre l’avantage, sur le médicament classique, de donner une vision vivante du patient ou du malade. Pour un homéopathe, un malade SULFUR ou NATRUM MURIATICUM ou CAUSTICUM (et limitons-nous à ces trois là) évoque un ensemble considérable de données psychiques et somatiques, à tous les niveaux, ouvrant autant de perspectives préventives que curatives. A-t-on jamais décrit avec autant de détails vivants un malade ASPIRINE ou NIFLURIL ?

Ch. GARCIA