Compétitivité de la filière anacarde au Bénin

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Cashew; competitiveness; Benin; Anacardium occidental;

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Compétitivité de la filière anacarde au Bénin: une analyse des effets aux prix de référence*

ADEGBOLA Y. Patrice1, OLOUKOÏ Laurent, SOSSOU C. Hervé et AROUNA Aminou

Institut National des Recherches Agricoles INRAB Programme Analyse de Politique Agricole PAPA

Résumé Depuis quelques années, de profonds changements s’opèrent dans la politique agricole du Bénin. En effet, les différentes imperfections du marché (l’absence d’acheteurs officiels, la forte fluctuation des prix, les risques liés à la monoculture, etc.) ont amené l’Etat à se lancer dans une politique de diversification agricole. Cette étude utilise la Matrice d’Analyse des Politiques (MAP) pour évaluer la compétitivité des différents segments de la filière anacarde au Bénin. Une enquête quantitative est menée auprès des différents acteurs à savoir 198 producteurs, 61 commerçants et 7 transformateurs. Les résultats issus de l’étude montrent que les systèmes de production, de commercialisation et de transformation de la filière sont tous compétitifs. Les systèmes de production les plus compétitifs sont ceux utilisant les plantules issues de sélection des semences améliorées comme mode de semi de l’anacarde. L’étude conclut aussi que la filière avec le système de transformation voit sa compétitivité s’améliorée. Par contre, le système de commercialisation, dans son organisation actuelle ne favorise pas les producteurs. De tout ce qui précède, il est à retenir que toute politique de diversification orientée vers le développement de la filière anacarde sera bénéfique pour les acteurs concernés et pour la nation. Cette politique devra surtout viser à amener les producteurs à pratiquer les systèmes de production les plus compétitifs et à résorber les divergences d’intérêts observées entre les producteurs qui sont les plus grands perdants et les commerçants. Mots clés: Compétitivité, système, MAP, filière Abstract Since some years, deep changes operate themselves in the agricultural politics of Benin. Indeed, the different imperfections of the market (the official purchaser absence, the strong fluctuation of prices, risks bound to the monoculture, etc.) brought the state to get involved in an agricultural diversification politics. This survey uses the Policy Analysis Matrix (PAM) to access the competitiveness of the different segments of cashew nut sub-sector in Benin. A quantitative investigation is led close to the different actors to know 198 producers, 61 tradesmen and 7 transforming. The descended results of the survey show that systems of production, merchandising and transformation of the path are all competitive. The most competitive production systems are those using the descended beddings plants of seed selection improven like fashion of semi of the cashew nut. The survey also concludes that the path with the system of transformation sees its improven competitiveness. On the other hand, the system of merchandising, in his actual organization doesn't encourage producers. Of everything that precedes, it is to keep that all politics of diversification oriented toward the development of path cashew nut will be beneficial for the concerned actors and for the nation. This politics should especially aim to bring producers to exercise the most competitive production systems and to resorb divergences of interests observed between producers who are the biggest losers and tradesmen. Key words: Competitiveness, system, MAP, sub-sector

* Cet article a fait l’objet d’une communication à la IIIè édition de l’atelier scientifique de l’INRAB du 19 au 22 Décembre 2006 1 Correspondances aux auteurs [email protected]

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1. Introduction

La filière anacarde au Bénin utilise un grand nombre d’acteurs différents les uns des autres par leurs fonctions, rôles, objectifs, etc. Ces acteurs sont, en effet les producteurs qui sont les premiers dans la chaîne, les intermédiaires (commerçants, collecteurs, grossistes, courtiers, etc.), les exportateurs et l’Etat. Le souci pour chaque acteur de sauvegarder ses intérêts, de maximiser ses profits par le développement de bon nombre de stratégies, génère des conséquences qui ne favorisent pas toujours l’amélioration de la compétitivité de la filière. L’une des conséquences de cette situation est que les prix du marché réellement constatés ne reflètent pas la vraie valeur économique des produits. Les raisons de cette distorsion entre les prix du marché et leur valeur économique réelle sont nombreuses. Généralement, les principales raisons de ces distorsions selon FAO (2005) sont sans doute l’existence de certaines situations de monopoles ou d’oligopoles, d’une mauvaise circulation de l’information parmi les agents économiques, certaines formes de l’intervention de l’État – plus généralement des facteurs extra économiques – perturbant les processus économiques (par des taxes, des règlementations, des contingentements, des fixations de prix et toutes sortes de mesures de politiques économiques). Dans le cas du Bénin, ces distorsions peuvent être réparties suivant trois niveaux: production, commercialisation, régulation étatique. Au niveau de la production en effet, l’on observe une absence de coordination dans la vente des produits, une absence d’informations fiable sur les opportunités qui s’offrent, etc. ne favorisent pas une amélioration des prix aux producteurs. Au niveau de la commercialisation, l’on observe une inorganisation totale. Ce qui s'explique par la faible position de négociation des producteurs et qui a pour conséquence une rémunération sous optimale de ces derniers. Les commerçants sont en effet soupçonnés de réaliser des bénéfices au détriment des paysans. Hormis la culture cotonnière, pour laquelle la commercialisation est suffisamment organisée avec un prix garanti et fixé avant les semis, la production de l’anacarde ne bénéficie pas encore de la part de l’Etat d’une intervention rigoureuse.

Cette étude est une application de la Matrice d’Analyse des Politiques (MAP) pour évaluer la compétitivité de l’anacarde au Bénin. Cette méthodologie se base sur l’analyse par les prix de référence qui vise à corriger ces distorsions.

2. Objectifs Cette étude vise de manière globale à évaluer la compétitivité de la filière anacarde au Bénin. De façon spécifique, il s’agira de:

- analyser la compétitivité et la rentabilité financière des différents systèmes de production, de commercialisation et de transformation;

- mesurer l’effet des distorsions sur les différents systèmes (production, commercialisation, transformation);

- mesurer, par des simulations l’effet à court et à long terme des politiques (réglementation de la commercialisation, suppression de certains acteurs de la chaîne, etc.) sur la compétitivité de la filière.

3. Méthodologie 3.1. Echantillonnage Les producteurs enquêtés sont ceux des départements des collines, du Borgou, de l’Atacora et de la Donga. Ces quatre (4) départements sont les zones de production des noix d’anacarde au Bénin. Dans chacun de ces départements, les principales communes ont été parcourues. Ils

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sont une zone de Savane. Le climat est de type subéquatorial à soudano-guinéen et constitue une transition entre le climat à une saison pluvieuse (mi-avril à fin octobre-début novembre) et celui à deux saisons de pluies (mi-mars à fin juillet et début septembre à début novembre). La Période de Croissance Végétative (PCV) est inférieure à 240 jours. La pluviométrie annuelle varie entre 900 et 1.200 mm. Cette situation climatique permet, toutefois, de réaliser deux cultures par an. Ce climat est favorable à la production de l’anacarde. Tableau 3.1 1. Producteurs enquêtés par zone agro écologique et par commune

Zones agroécologiques Communes Effectif des enquêtés Pourcentage (%) Z2 Kérou 19 9,6

Sous-total 19 9,6 N'Dali 15 7,57 Nikki 25 12,62 Pèrèrè 14 7

Z3

Kouandé 16 8 Sous-total 70 35,19

Z4 Djougou 21 10,6 Sous-total 21 10,6

Glazoué 9 4,54 Bantè 25 12,62 Ouessè 32 16,16

Z5

Bassila 22 11,11 Sous-total 88 44,43 TOTAL 198 100 Source: Enquêtes, 2005. Pour ce qui est des commerçants, on les retrouve un peu partout sur toute l’étendue du territoire national. Ils sont au total 61 à être enquêtés. Sept (7) transformateurs ont été enquêtés à savoir 4 transformateurs artisanaux localisés dans les départements de l’Atlantique et du Littoral et 3 transformateurs semi-industriels dans le département des collines. 3.2. Constitution de systèmes Deux grands critères ont guidé la constitution des systèmes. Il s’agit du type de mise en culture (semis directs, utilisation de plantules) et du type de cultures associées au cours des premières années d’installation des plantations (céréales, racines et tubercules, coton et légumineuses). Au total huit (8) systèmes sont constitués. La complexité de ces critères réside dans le fait qu’un seul et même enquêté peut se retrouver dans plus d’un système. Ceci est en effet fonction du nombre de parcelles dont dispose l’enquêté. Les combinaisons ainsi constituées de même que les zones agro-écologiques correspondantes sont présentées au tableau 2.2.2. Ce dernier indique aussi le nombre de parcelles étudiées au niveau des différents systèmes.

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Tableau 3.2.1. Répartition des parcelles par système et par zone agroécologique

SYSTEME Zone agroécologique

Types de miseen culture

Types de cultures associées

Nombre De parcelles

% par Zone agroécologique

% national

2 20 8 3

3 68 28 10

4 28 11 4 S1

5

Semis Céréales

128 52 19

Sous total 244 100 36

2 9 5 1

3 53 30 8

4 27 15 4 S2

5

Semis Racines et Tubercules

89 50 13

Sous total 178 100 26

2 17 15 2

3 46 40 7 S3

5

Semis Coton

52 45 8

Sous total 115 100 17

2 5 5 1

3 7 7 1

4 4 4 1 S4

5

Semis Légumineuses

83 84 12

Sous total 99 100 14 S5 3 Plants Céréales 18 100 3

Sous total 18 100 3

S6 3 Plants Racines et Tubercules 8 100 1

Sous total 8 100 1 S7 3 Plants Coton 12 100 2

Sous total 12 100 2 S8 3 Plants Légumineuses 9 100 1

Sous total 9 100 1

TOTAL 683 100 (2) zone cotonnière du Nord Bénin, (3) zone vivrière du Sud Borgou, (4) zone ouest Atacora, (5) zone cotonnière du Centre Bénin Source: Enquêtes PAPA, 2005. 3.3. Méthode d’analyse La matrice d’analyse des politiques (MAP) est un système de comptabilité en partie double. Elle est le produit de deux identités: l’une qui définit la rentabilité comme la différence entre les revenus et les coûts, et l’autre qui mesure les effets des divergences (politiques qui déforment les stimulants économiques et défaillances du marché) comme la différence entre les paramètres observés et les paramètres qui existeraient si les divergences étaient supprimées. La MAP prend en considération, de manière complète et conséquente, toutes les influences des politiques sur les rendements et les coûts de production agricole. On pourra alors évaluer l’impact des politiques des produits et des politiques macroéconomiques en comparaison avec la situation où ces politiques sont absentes. Dans l’approche MAP, des données sur le budget agricole (revenus des ventes et coûts des intrants) sont rassemblées pour les systèmes agricoles principaux. La détermination des profits que les paysans, les commerçants ou les transformateurs ont effectivement obtenus est un résultat initial simple et important de l’analyse, qui montre quels paysans, commerçants ou transformateurs sont

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concurrentiels actuellement et comment leurs profits pourraient changer si les politiques de prix étaient modifiés. Avec la méthode MAP, les revenus et les coûts qui sont indiqués dans les budgets des fermes, de la transformation et de la commercialisation sont réexaminés. L’analyse des rentabilités et l’impact des incitations sur ces dernières sont faits à l’aide de la Matrice d’Analyse des Politiques MAP. Le tableau 3.3.1 présente la MAP; la rentabilité est mesurée en suivant les colonnes de la matrice horizontalement. On calcule les profits, présentés dans la colonne de droite, en soustrayant les coûts, présentés dans les deux colonnes du centre, des revenus indiqués dans la colonne de gauche. Cet outil d’analyse a été utilisé dans plusieurs études: Houndékon ( 1996), dans l’analyse économique des systèmes de production du riz dans le Nord Bénin; Yao (1997) dans Comparatif advantages and crop diversification; Adésina et Coulibaly (1998) sur les technologies agro forestières; Quenum (1999) sur les jachères améliorées; Aitchédji (2001) sur la rentabilité des nouvelles technologies de la culture du Niébé; Adégbola et al (2002) sur la compétitivité des systèmes rizicoles au Bénin; Adégbola (2003) sur la compétitivité de l’huile de palme; Mohanty et al (2003) sur la compétitivité du coton indien; Aminou (2004) sur la compétitivité de l’ananas, etc. Deux autres indicateurs qui peuvent être calculés à partir de la MAP sont le coefficient de protection effective CPE et le coût en ressources domestiques CRD. Tableau 3.3.1. Structure de la MAP

Coûts Produits Intrants Echangeables Intrants Non Echangeables

Profits

Prix du marché A B C D Prix de référence E F G H Divergence I J K L Source: Adapté de Monke et Pearson (1989), p. 19. Le critère du coefficient de protection effective (CPE) est un indicateur du rapport entre la valeur ajoutée aux biens échangeables par le processus de production, de commercialisation ou de transformation aux prix du marché d’une part, et aux prix de référence d’autre part:

Coeff. de protect° effective = référence de prix

marché de prix

es)échangeabl Biens(Produites)échangeabl Biens(Produit

−−

Ou bien

CPE = (A - B) ÷ (E - F) En mesurant le rapport des valeurs ajoutées aux prix domestiques et aux prix internationaux, le CPE donne une mesure de l’incitation créée par la politique économique nationale en faveur de la filière. Le CPE agrège le rôle des biens échangeables – et donc de la politique de prix les concernant – dans la mesure de la protection de la filière par rapport au marché international. Il constitue donc un indicateur plus exact du degré réel d’incitation relative par rapport au marché mondial. Un CPE inférieur à 1 signifie que la combinaison des transferts sur les produits, d’une part, et sur les consommations intermédiaires (biens échangeables), d’autre part, résulte en une distribution effective de revenus inférieure à ce qu’elle serait en cas d’application, toutes choses égales par ailleurs, des prix internationaux [AE]. Le ratio de coût en ressources domestiques est le pendant du précédent indicateur, mesuré en prix de référence:

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Ratio de coûts ressources domest = réf. de prixréf. de prix

référence de prix

échang BienProduitsdomestique Facteurs

CRD = G ÷ (E - F) Ou bien

Il s’agit d’un critère essentiel, puisqu’il mesure l’efficacité économique globale de la filière en comparant le coût des facteurs domestiques «consommés» dans le processus de production, de la commercialisation ou de la transformation et le gain en devises que représente la valeur ajoutée aux biens échangeables. Il s’agit de la mesure la plus pertinente du «rendement» économique de la filière pour la collectivité. Un CRD supérieur à 1 signifie que le coût des facteurs domestiques utilisés est supérieur à la valeur créée mesurée en prix internationaux; globalement, il y a donc une perte de richesse pour la collectivité. Minimiser le CRD revient donc à maximiser le profit pour la collectivité. 4. Résultats et discussions 4.1. Analyse de la compétitivité et de l’avantage comparatif des systèmes de production des noix d’anacarde Le tableau 4.1.a. ci-dessous fait un état des différents systèmes étudiés par zone. Le système S1 correspond à celui du semis direct des noix avec les céréales comme cultures associées. Le système S2 correspond au semis direct avec comme cultures associées les racines et tubercules. Le système S3 correspond au semis avec le coton comme cultures associé. Le système S4 est celui de semis et des légumineuses comme culture associées. Le système S5 correspond à l’utilisation de plantules avec céréales comme cultures associées. Le système S6 correspond à l’utilisation de plantules avec comme cultures associées les racines et tubercules. Le système S7 est celui de l’utilisation des plantules avec le coton comme culture associée. Enfin, le système S8 correspond à l’utilisation de plantules avec les légumineuses comme cultures associées. Notons que certains producteurs pratiquent sur une même parcelle à la fois les deux types de mise en culture (à savoir semis et plants) et d’autres comme cultures associées les cultures maraîchères. Mais compte tenu de la faiblesse de leur effectif, ils n’ont pas été pris en compte dans ce travail.

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Tableau 4.1.a Les systèmes étudiés par zone

Zones agroécologiques Systèmes Nombre d'enquêtés Pourcentage (%) S1 20 39 S2 9 18 S3 17 33

Z2

S4 5 10 Sous total 51 100

S1 68 31 S2 53 24 S3 46 21 S4 7 3 S5 18 8 S6 8 4 S7 12 5

Z3

S8 9 4 Sous total 221 100

S1 28 47 S2 27 46 Z4 S4 4 7

Sous total 59 100 S1 128 36 S2 89 25 S3 52 15

Z5

S4 83 24 Sous total 352 100 TOTAL 683 - Source: Enquêtés PAPA 2005 L’examen du tableau 4.1.a montre que dans toutes les zones agroécologiques, le système S1 à savoir semis-céréales est dominant. Dans les zones 3; 4 et 5 la deuxième culture associée sont les racines et tubercules suivies du coton qui est d’ailleurs la deuxième culture associée dans la zone 2. Il est à remarquer que les systèmes S5 à S8 se pratiquent seulement dans la zone 3. Le tableau 4.1.b ci-dessous présente quelques résultats issus de la Matrice d’Analyse des Politiques MAP. Tableau 4.1.b Indicateurs d’analyse de la MAP pour système de production

Indicateurs S1 S2 S3 S4 S5 S6 S7 S8 RechercheRentabilité financière (FCFA/ha) 19622 30724 60218 57072 34367 55778 166550 21004 204327 Rentabilité économique (FCFA/ha) 22990 72869 74361 50527 33740 59211 179538 26022 165714 Divergences (FCFA/ha) -3368 -42146 -14143 6545 534 -4929 -12987 -5018 38613 Coûts en Ressources Intérieures CRI 1,17 0,71 0,73 0,77 0,82 0,53 0,64 0,70 0,196 Coefficients de Protection Effective CPE 0,98 0,89 0,97 1,07 0,99 0,97 0,96 0,97 1,190 Source: Résultats des analyses, 2005. Rentabilité financière des systèmes de production L’analyse du tableau 4.1.b montre que tous les systèmes ont une rentabilité financière positive. Les systèmes de production des noix d’anacarde dégagés sont rentables pour les producteurs. Ainsi donc, les recettes tirées de l’activité de production d’anacarde sont largement supérieures aux coûts consentis. Les producteurs peuvent utiliser efficacement leurs

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ressources dans ces systèmes. Ces résultats montrent que tout projet d’investissement dans le secteur de la production des noix brutes d’anacarde est à encourager vu la compétitivité des différents systèmes. Aussi, peut-on constater que des huit (8) systèmes étudiés, le système le plus rentable pour les producteurs est le système S7 qui correspond à l’utilisation de plantules comme type de mise en culture avec le coton comme la culture associée les quatre (4) premières années de la plantation d’anacardier. Vient ensuite le système S3 (semis direct avec coton comme culture associée). Le système le moins rentable pour les producteurs est le système S1 qui est celui de la pratique de semis direct avec les céréales comme cultures associées. Par ordre décroissant de rentabilité financière, nous avons donc:

S7-S3-S4-S6-S5-S2-S8-S1 Lorsqu’on rapporte les résultats obtenus sur la période considérée (15 ans), le système S7 dégage une valeur actuelle nette de 666416 FCFA/ha contre respectivement en FCFA/ha 240950; 228362; 223184; 137513; 122936; 84043; 78513 pour S3, S4, S6, S5, S2, S8 et S1. Ces résultats permettent de conclure que le système S7 est:

- 2,77 fois plus rentables que le système S3, - 2,92 fois plus rentable que le système S4, - 3 fois plus rentable que le système S6, etc.

Le système qui consiste à utiliser les plants comme mode de semis de l’anacardier avec le coton comme culture associée les premières années de plantation de l’anacardier est de loin le plus rentable financièrement. Cependant, l’on constate que la rentabilité du système le plus rentable à savoir S7 est largement faible par rapport au niveau souhaité par la recherche. En effet, la recherche obtient une rentabilité financière de 204327 FCFA/ha; ce qui est 1,23 fois supérieure à celle du système S7. Mesure de la compétitivité et de l’avantage comparatif des systèmes de production L’on peut remarquer à l’examen du tableau 4.1.b que tous les systèmes étudiés ont une rentabilité économique positive. La production dans ces différents systèmes entraîne des coûts sociaux plus faibles que le revenu net qu’en tire la communauté (la nation). De tous les systèmes, seul le système S1 dégage un coût en ressources intérieures supérieur à un. Les activités de production dans ce système ne permettent pas à la nation de gagner des devises. Du coup c’est un système qui ne dispose pas d’avantage comparatif: il n’est pas compétitif. Par contre tous les autres systèmes ont un CRI positif et inférieur à 1. L’analyse du tableau 4.1.b. montre que c’est le système S6 qui correspond à l’utilisation de plants avec comme cultures associées les racines et tubercules, est plus rentable économiquement (CRI=0,53). Le pays gagnera plus de devises en s’investissant dans un tel système. Mesure des incitations à la production Plusieurs indicateurs permettent de savoir si les producteurs bénéficient ou non d’incitation à produire. Ces indicateurs sont entre autres les transferts nets (divergences), les coefficients de protection nominale. A la lecture du tableau 4.1.b, l’on constate qu’en dehors des systèmes S4 et S5, tous les autres systèmes présentent un transfert net négatif. Ceci signifie pour ces systèmes que la rentabilité financière est plus faible que la rentabilité économique. Ainsi donc, les producteurs de ces systèmes (S1, S2, S3, S6, S7 et S8) subissent une taxe implicite sur leurs revenus. On dira par exemple que les producteurs du système S1 subissent une taxe implicite de 3368 FCFA/ha. Le système le plus taxé ici est S2 (42146 FCFA/ha). Les producteurs de ces systèmes ne bénéficient pas du tout d’une incitation à produire. Par contre, les systèmes S4 et S5 bénéficient d’un transfert net positif (respectivement 6545 et 534 FCFA/ha). Même il faut constater que des deux systèmes, c’est seulement le système S4 qui

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bénéficie réellement d’une incitation à produire car il est le seul système dont le CPE est supérieur à 1 (CPE=1,07). Au regard des différents résultats obtenus, il convient de retenir ce qui suit: - Le système S7 qui consiste à utiliser les plants comme mode de semis de l’anacardier avec le coton comme culture associée les premières années de plantation de l’anacardier est le plus rentable pour les producteurs (rentabilité financière=166550 FCFA/ha). - le système S6 qui correspond à l’utilisation de plants avec comme cultures associées les racines et tubercules, est plus rentable économiquement (CRI=0,53). C’est le système qui dispose d’un avantage comparatif pour la nation. - Seul le système S4 bénéficie d’une incitation positive à produire et dans une moindre mesure le système S5. Il faut noter en général que les systèmes où les plants sont utilisés comme mode de semis sont les plus compétitifs et les plus disposant d’avantage comparatif pour la nation. 4.2. Système de commercialisation Le tableau 4.2. présente les indicateurs d’analyse de la MAP pour le système de commercialisation par zone agroécologique. Tableau 4.2 Indicateurs d’analyse de la MAP pour commercialisation par zone

Indicateurs Zone 2 Zone 4 Zone 3 Zone 5 Rentabilité financière (FCFA/kg) 16,05 17,66 -10 26 Rentabilité économique (FCFA/kg) 23,46 25,11 17 20 Coût en ressources intérieures 0,73 0,72 0,8 0,77 Transferts (FCFA/kg) -7 -7 -27 6 Coefficient de protection effective 0,94 0,94 0,79 1,09 Source: Résultats des analyses, 2005. Mesure de la rentabilité financière des systèmes de commercialisation Les systèmes de commercialisation des zones 2; 4 et 5 sont rentables pour les commerçants (rentabilités financières supérieures à 0). Les systèmes les plus rentables pour les commerçants sont ceux de la zone 5. En effet dans cette zone on rencontre les systèmes de production S1 et S2, qui font partie des systèmes les moins rentables pour les producteurs. En outre le système S2 est d’ailleurs le système le plus taxé donc le système qui ne bénéficie pas du tout d’une incitation positive à produire. Par contre les systèmes de commercialisation de la zone 3 ne sont pas rentables financièrement. Or c’est seulement dans la zone 3 qu’on rencontre les systèmes de production les plus rentables pour les producteurs utilisant les plants comme mode de semis (S5, S6, S7 et S8). Il se pose alors le problème de divergences d’intérêts entre les producteurs et les commerçants. Mesure de la compétitivité et de l’avantage comparatif des systèmes de commercialisation Tous les systèmes des quatre (4) zones disposent d’un avantage comparatif (rentabilité économique positive et CRI positif et inférieur à 1). Mais les systèmes les plus rentables économiquement sont les systèmes de la zone 4 avec une rentabilité économique plus grande égale à 25,11 FCFA/kg et un CRI plus petit de 0,72.

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Mesure des incitations L’on peut déjà constater dans le tableau 4.2. qu’en dehors des systèmes de la zone 5, les systèmes des zones 2; 4 et 3 ont un transfert net négatif respectivement de 7; 7 et 27 FCFA/kg. Les mêmes systèmes, avec un CPE inférieur à 1 ne bénéficient d’une incitation positive à continuer leurs activités de commercialisation. Seuls les systèmes de la zone 5 bénéficient d’une incitation positive. Il ressort des analyses que: - Les systèmes de la zone 5 sont les plus rentables pour les commerçants avec une rentabilité financière de 26 FCFA/kg. Les mêmes systèmes bénéficient d’une incitation positive à continuer leurs activités, - les systèmes les plus rentables économiquement sont les systèmes de la zone 4 avec une rentabilité économique plus grande égale à 25,11 FCFA/kg et un CRI plus petit de 0,72, Il faut aussi constater qu’il y a de divergences d’intérêts entre les systèmes de production et de commercialisation. En effet, les systèmes de commercialisation de la zone 3 ne sont pas rentables financièrement (rentabilité financière négative et égale à – 10 FCFA/kg). Or en se référant au tableau 4.1.a, c’est seulement dans cette zone qu’on rencontre les systèmes de production utilisant les plants comme type en mise en culture qui sont d’ailleurs les plus compétitifs et ayant un avantage comparatif pour la communauté. 4.3. Transformation des noix d’anacarde au Bénin Le tableau 4.3. ci-dessous dresse quelques indicateurs d’analyse de la MAP pour 100 kg de noix d’anacarde transformées. La comparaison est faite ici entre la transformation artisanale et la transformation semi-industrielle (usine).

Tableau 4.3. Indicateurs d’analyse de la MAP pour 100 kg de noix transformée

Indicateurs Individuel Usine Rentabilité financière (FCFA/100kg) 20314 26457 Rentabilité économique (FCFA/100kg) 15016 32973 Coût en ressources intérieures 0,00 0,28 Transferts 5298 -6516 Coefficient de protection effective 1,352 0,942 Source: Résultats des analyses, 2005. L’analyse du tableau montre une rentabilité financière positive pour les deux modes de transformation. Mais avec une rentabilité financière de 26457 FCFA/100kg, la transformation semi-industrielle est plus rentable pour les acteurs. De la même façon, la transformation semi-industrielle dispose d’un avantage comparatif pour la nation. Cependant, cette forme de transformation est la plus taxée (6516 FCFA/100kg) et ne bénéficie pas d’incitation positive à transformer. 4.4- Analyse globale de la filière Ce paragraphe consiste à évaluer la performance globale de la filière anacarde par des indicateurs de la Matrice d’Analyse des Politiques MAP. La contribution de chaque acteur de la filière est aussi évaluée. Le tableau 4.4.1. présente les différents résultats pour toute la filière. Il se dégage de l’analyse de ce tableau que la filière anacarde, avec une rentabilité financière de 100,65 FCFA/kg, est

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rentable pour tous les acteurs. Ces derniers peuvent donc utiliser efficacement leurs ressources dans la filière. Egalement la filière dispose d’un avantage comparatif avec une rentabilité économique positive et égale à 108,75 FCFA/kg et avec un CRI positive et inférieur à 1. Cependant, il existe une taxe implicite de 8,09 FCFA/kg qui est perçue sur la filière. De plus la filière bénéficie d’une très petite incitation positive pour son expansion (CPE = 1,03).

Tableau 4.4.1. Indicateurs d’analyse de la MAP pour toute la filière

Indicateurs Ensemble filière Rentabilité financière (FCFA/kg) 100,65 Rentabilité économique (FCFA/kg) 108,75 Transferts (FCFA/kg) -8,09 Coût en ressources intérieures CRI 0,63 Coefficient de protection effective CPE 1,03 Source: Résultats des analyses, 2005. Le tableau 4.4.2. ci dessous présente quelques scénarise en vue de mesurer la participation de chaque acteur dans la filière Tableau 4.4.2. Indicateurs d’analyse de la MAP

Indicateurs Filière sans transformateur Filière sans commerçant Rentabilité financière (FCFA/kg) 34,05 144,76 Rentabilité économique (FCFA/kg) 43,15 152,43 Transferts (FCFA/kg) -9,09 -7,76 Coût en ressources intérieures 0,88 0,57 Coefficient de protection effective 0,97 1,07 Source: Résultats des analyses, 2005. Le premier scénario consiste à examiner le comportement des différents indicateurs sans les transformateurs dans la filière. Le résultat est que: - la rentabilité financière que dégage la filière baisse de 66,6 FCFA/kg, - la rentabilité économique baisse de 65,6 FCFA/kg, - le niveau de la taxation implicite augmente de 1 FCFA/kg, - l’avantage comparatif de la filière s’affaiblit (CRI passe de 0,63 à 0,88) et - la filière ne bénéficie plus d’incitation positive pour son expansion (CPE passe de 1,03 à 0,97). Le deuxième scénario consiste à mesurer les différents indicateurs d’analyse sans la présence des commerçants dans la filière. Il ressort donc que: -- la rentabilité financière que dégage la filière augmente de 44,11 FCFA/kg, - la rentabilité économique augmente de 43,68 FCFA/kg, - le niveau de la taxation implicite baisse de 0,33 FCFA/kg, - l’avantage comparatif de la filière s’améliore (CRI passe de 0,63 à 0,57) et - la filière bénéficie d’incitation positive pour son expansion (CPE passe de 1,03 à 1,07). Au regard de ces différents résultats, peut-on affirmer que certains acteurs sont nuisibles à l’expansion de la filière et par conséquent les supprimer de la chaîne? 5. Conclusion et recommandations Selon la théorie économique, l’agriculture peut contribuer à la croissance à trois niveaux: la contribution par la production, la contribution par le marché et la contribution par les marchés des facteurs de production. La filière anacarde, qui n’est qu’un secteur de l’agriculture peut

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Page 12: Compétitivité de la filière anacarde au Bénin

aussi contribuer à la croissance de l’économie nationale. Les résultats auxquels a abouti cette étude à savoir que la filière globalement prise est compétitive et dispose d’un avantage comparatif permet de soutenir l’affirmation ci-dessus. L’incitation positive dont bénéficient les acteurs de la filière pris globalement amène à dire que les activités de production, de commercialisation et de transformation vont continuer. La contribution par la production de la filière à la croissance sera assurée par l’augmentation de la production, des rendements, etc. L’augmentation des revenus des producteurs et donc de leurs capacités à s’acheter des biens non agricoles favorisera la contribution par le marché de la filière à la croissance. La contribution par les facteurs de production sera une réalité parce que la filière anacarde, par ses ressources contribuera à financer les autres secteurs de l’économie par l’injection du surplus de la filière dans les autres secteurs (taxes, emprunts, etc.). Cependant, plusieurs étapes restent à franchir avant d’arriver à la croissance du fait de la filière anacarde. Les résultats de l’étude ont montré que le système de production le plus compétitif à savoir celui utilisant les plantules se retrouve seulement dans la zone écologique 3. Or il reste encore trois zones concernées par la culture de l’anacarde au Bénin. Il va falloir, pour tous les acteurs impliqués dans la filière et l’Etat en particulier, mettre en œuvre une politique visant à étendre ce type de système dans les autres zones. Les différents acteurs (surtout producteurs et commerçants) ont souvent des objectifs contradictoires. Ils se livrent à un véritable jeu à somme nulle où ce que perdent les uns est immédiatement gagné par les autres. Cette situation ne garantit pas un meilleur avenir pour la filière surtout que les premiers concernés dans la filière (producteurs) sont souvent les plus grands perdants. Il est donc impérieux pour l’Etat, les organisations paysannes et tous autres acteurs concernés de revoir l’organisation générale de la filière. Enfin, la prospérité de la filière anacarde au Bénin dépend en grande partie de la capacité du pays à transformer sur place les noix brutes et à exporter les produits semi finis. En effet, l’étude a montré que la filière sans les transformateurs voit sa compétitivité largement baisser. Alors toute politique visant à promouvoir et à créer les unités locales de transformation et à développer une consommation intérieure des amandes sera d’une grande utilité pour la nation. Références

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- CBCE (2004). Rapport de mission du tour d’orientation sur le marché de noix d’anacarde auVietnam.

- Fang, C. et Beghin, J. (1999). Self-sufficiency, Comparative Advantages, and Agricultural Trade: A Policy Analysis Matrix for Chinese Agriculture.

- JITAP (2003). Formulation de stratégies sectorielles et de stratégies de produits pour tirer avantage des opportunités du système commercial multilatéral. Bénin. Secteur anacarde/noix de cajou. Offre Nationale.

- Mohanty, S., Fang, C. et Chaudhary, J. (2003). Assessing the Competitiveness of Indian Cotton Production: A Policy Analysis Matrix Approach.

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- Winter-Nelson, A. (1997). Rural taxation in Ethiopia, 1981-1989: a policy analysis matrix assessment for net producers and net consumers.

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