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À découvrir page 4 Journal de l’Association ouvrière des Compagnons du Devoir du Tour de France Septembre 2006 - Numéro 146 Compagnon du Devoir Dans ce numéro... FEUILLE DE ROUTE PAS À PAS Lors de nos dernières Assises qui se sont tenues à Toulouse, à la demande de notre Premier Conseiller, les membres du Conseil, les délégués de métiers, les Provinciaux et les représentants des Provinces et des métiers m’ont élu Conseiller au Secrétariat. Par la promesse faite, j’ai accepté et décidé de servir le Compagnonnage du Devoir, en tant que Conseiller, pour les cinq ans à venir. Auparavant, après plusieurs rencontres et échanges sur le rôle et la fonction de Conseiller au Secrétariat, notre Premier Conseiller m’avait remis une feuille de route déterminant ma mission au sein du Conseil du Compagnonnage. Celle-ci s’oriente sur quatre axes et peut se résumer en quatre points : accompagner, poursuivre, engager et favoriser. - Accompagner les Provinciaux dans leur gâche pour animer la vie du Compagnonnage dans leur Province (mettre une âme), assumer avec le délégué régional les décisions des Assises et du Conseil d’Orientation et favoriser leur mise en œuvre, mener à bien les actions nécessaires. Mais aussi, sensibiliser les Provinces pour qu’elles proposent des objectifs et des projets adaptés qui tiennent compte de l’environnement professionnel, économique, culturel et humain afin que chacune d’elles puisse exprimer au mieux le caractère qui lui est propre et garder sa singularité au sein du Compagnonnage. - Poursuivre la réflexion avec les Mères, les Dames-Hôtesses et les Maîtresses de Maison, pour leur permettre de vivre, pleinement et en harmonie, d’une part leur mission à nos côtés et d’autre part leur vie personnelle et familiale. Avec elles, savoir anticiper l’évolution de nos communautés afin d’y apporter une action éducative appropriée. - Engager le suivi des actions nécessaires, en réponse à la réflexion sur l’initiation, afin que chaque Aspirant, Compagnon, itinérant ou sédentaire vive et témoigne de l’enseignement reçu lors de son Adoption ou de sa Réception. - Favoriser la mise en place de projets innovants en mettant en perspective la dimension humaine de notre Association au regard des exigences et des besoins de la société dans laquelle les progrès techniques et technologiques nécessiteront une autre approche et un investissement personnel différent pour aborder la façon d’être et de transmettre. Ce dernier point n’est pas le moindre. Le point commun aux quatre axes ci-dessus résumés demeure la place de l’Homme, ici et maintenant, au sein de notre mouvement, dans son métier, au cœur de la cité, pour construire demain. Un métier toujours à l’écoute… Feuille de route pas à pas, par Hubert l’Ile de France ............................................................................................................................................................1 Un demi-siècle de Compagnonnage, par Les Compagnons Charrons Carrossiers du Devoir ................................................................................ 2 Rencontre à Saumur, par Flamand la Constance .................................................................................................................................................................... 4 Chanvre et construction bio, par La Persévérance de Grandchamps-des-Fontaines ................................................................................................ 6 Charpentier en Hongrie, par Nantais ........................................................................................................................................................................................ 8 Un week-end consacré aux arts de la forge, par L’Equipe itinérante du stage forge ............................................................................................. 10 Carnet du Tour de France ............................................................................................................................................................................................................ 12 Assemblée générale de l’A.O.C.D.T.F. à Kerpen, par Luc l’Ardennais ........................................................................................................................ 13 À la découverte de la Norvège, par Albigeois ...................................................................................................................................................................... 15 À l’heure où le cheval a retrouvé toutes ses lettres de noblesse, nos Compagnons Maréchaux- Ferrants doivent plus que jamais s’intéresser au devenir de leur métier. Leur rencontre à Saumur s’inscrit dans ce cadre. Éditorial Hubert l’Ile-de-France À lire page 15 Un autre regard Suite page 2 P rofessionnel mais aussi touristique, le regard de nos itinérants s’affine au contact de l’étranger car, si l’expérience professionnelle prime, la découverte du pays dans lequel elle se situe ne doit pas être négligée. Albigeois nous en donne un bon exemple.

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À découvrir page 4

Journal de l’Association ouvrière des Compagnons du Devoir du Tour de France

Septembre 2006 - Numéro 146

Compagnon du Devoir

Dans ce numéro...

FEUILLE DE ROUTE PAS À PAS

Lors de nos dernières Assises qui se sont tenues à Toulouse, à la demande de notre Premier Conseiller, les membres du Conseil, les délégués de métiers, les Provinciaux et les représentants des Provinces et des métiers m’ont élu Conseiller au Secrétariat.

Par la promesse faite, j’ai accepté et décidé de servir le Compagnonnage du Devoir, en tant que Conseiller, pour les cinq ans à venir.

Auparavant, après plusieurs rencontres et échanges sur le rôle et la fonction de Conseiller au Secrétariat, notre Premier Conseiller m’avait remis une feuille de route déterminant ma mission au sein du Conseil du Compagnonnage. Celle-ci s’oriente sur quatre axes et peut se résumer en quatre points : accompagner, poursuivre, engager et favoriser.

- Accompagner les Provinciaux dans leur gâche pour animer la v ie du Compagnonnage dans leur Province (mettre une âme), assumer avec le délégué régional les décisions des Assises et du Conseil d’Orientation et favoriser leur mise en œuvre, mener à bien les actions nécessaires. Mais aussi, sensibiliser les Provinces pour qu’elles proposent des objectifs et des projets adaptés qui tiennent compte de l’environnement professionnel, économique, culturel et humain afin que chacune d’elles puisse exprimer au mieux le caractère qui lui est propre et garder sa singularité au sein du Compagnonnage.

- Poursuivre la réf lexion avec les Mères, les Dames-Hôtesses et les Maîtresses de Maison, pour leur permettre de vivre, pleinement et en harmonie, d’une part leur mission à nos côtés et d’autre part leur vie personnelle et familiale. Avec elles, savoir anticiper l’évolution de nos communautés afin d’y apporter une action éducative appropriée.

- Engager le suivi des actions nécessaires, en réponse à la réf lexion sur l’ initiation, afin que chaque Aspirant, Compagnon, itinérant ou sédentaire vive et témoigne de l’enseignement reçu lors de son Adoption ou de sa Réception.

- Favoriser la mise en place de projets innovants en mettant en perspective la dimension humaine de notre Association au regard des exigences et des besoins de la société dans laquelle les progrès techniques et technologiques nécessiteront une autre approche et un investissement personnel différent pour aborder la façon d’être et de transmettre. Ce dernier point n’est pas le moindre.

Le point commun aux quatre axes ci-dessus résumés demeure la place de l’Homme, ici et maintenant, au sein de notre mouvement, dans son métier, au cœur de la cité, pour construire demain.

Un métier toujours à l’écoute…

Feuille de route pas à pas, par Hubert l’Ile de France ............................................................................................................................................................1Un demi-siècle de Compagnonnage, par Les Compagnons Charrons Carrossiers du Devoir ................................................................................ 2Rencontre à Saumur, par Flamand la Constance .................................................................................................................................................................... 4Chanvre et construction bio, par La Persévérance de Grandchamps-des-Fontaines ................................................................................................ 6Charpentier en Hongrie, par Nantais ........................................................................................................................................................................................ 8Un week-end consacré aux arts de la forge, par L’Equipe itinérante du stage forge ............................................................................................. 10Carnet du Tour de France ............................................................................................................................................................................................................ 12Assemblée générale de l’A.O.C.D.T.F. à Kerpen, par Luc l’Ardennais ........................................................................................................................ 13À la découverte de la Norvège, par Albigeois ...................................................................................................................................................................... 15

Àl’heure où le cheval a retrouvé toutes ses lettres de noblesse, nos Compagnons Maréchaux-Ferrants doivent plus que jamais s’intéresser au devenir de leur métier. Leur rencontre à Saumur s’inscrit dans ce cadre.

ÉditorialHubert l’Ile-de-France

À lire page 15

Un autre regard

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P rofessionnel mais aussi touristique, le regard de nos

itinérants s’affi ne au contact de l’étranger car, si l’expérience professionnel le prime, la découverte du pays dans lequel elle se situe ne doit pas être négligée. Albigeois nous en donne un bon exemple.

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compagnonnage et reconnaissance

Un demi-sièclede CompagnonnageLe 21 mai 2006, les Compagnons Charrons-Carrossiers du Devoir de la Chambre de Paris, auxquels s’étaient joints quelques Compagnons de Lyon, Macon et Souillac, ainsi que leurs familles, au total une cinquantaine de personnes, se retrouvaient à la Fondation de Coubertin pour rappeler le demi-siècle de Compagnonnage de trois des leurs : André Trouillet, Dauphiné le Bien Décidé, Marcel Gentreau, Vendéen la Persévérance et Roger Deschamp, Limousin l’Ami du Travail.

Les Compagnons Charrons Carrossiers du Devoir

Y annick Patriarca, Lyonnais l’Ami du Trait, prenait la parole pour retracer le parcours de Dauphiné le Bien Décidé.

« André Trouillet, tu as cette année cinquante ans de Compagnonnage. Tu as été reçu le 21 novembre 1951, à Paris, Compagnon Charron Carrossier du Devoir, sous le nom de Dauphiné le Bien Décidé. Souvenons-nous. Tu fais un apprentissage de charron dans ton Dauphiné natal et, à la fi n de celui-ci, tu décides d’évoluer vers la carrosserie et de rejoindre les Compagnons du Devoir. Tu passes successivement par les villes de Lyon, Paris, Toulouse, Marseille, Nice, Bordeaux, Grenoble, Valence et Strasbourg.

Pendant ton Tour de France, tu te fais remarquer par ton sens de l’observation, ta mémoire des noms propres, ton sens d’entreprendre. En passant dans les entreprises de carrosserie, tu n’hésites pas à te lancer dans des chantiers dépassant tes capacités. Tes patrons n’apprécient pas toujours et cela te vaut parfois quelques railleries de la part de tes camarades. Ce qu’ils ne perçoivent pas, c’est que tu acquiers ainsi des expériences qui te seront précieuses pour l’avenir.

Arrivé à Lyon avec le Compagnon Henri Linard, Quercy la Bonne Humeur, vous achetez aussitôt, tous deux, une entreprise que vous revendrez à votre départ de la ville.

Etant toujours itinérant, en banlieue parisienne, tu n’hésites pas à te porter volontaire pour prendre la direction d’un atelier de plusieurs centaines de personnes. Tu tiens bon pendant deux mois puis tu es licencié. Aux réfl exions des copains, tu rétorques “ Regardez ma paye et comparez-la avec la vôtre pendant ce temps ! ”

Tu te lances et rejoins un bureau d’étude en carrosserie industrielle, en tant que dessinateur. Dans une entreprise, on fabrique des cellules constituées de panneaux en tôle nervurée, panneaux terminés par des bords tombés, assemblés entre eux par boulonnage. Ce sera une observation capitale pour toi.

Marié, tu ouvres une entreprise de carrosserie industrielle à Vanves, près de Paris. A l’époque, la fi n des années cinquante, toutes les carrosseries de fourgons sont à ossature, en profi lé acier tôlé. Il y a des rampes de pavillon avec des coins ronds formés à la main et l’on passe environ 450 heures à fabriquer une caisse de fourgon de six mètres environ.

Tu décides d’acquérir une presse-plieuse, ce qu’aucune autre carrosserie industrielle ne possède à l’époque. Tu conçois des caisses que l’on désignera “ en tôle f lutée ” de 15/10e, constituées de panneaux nervurés à la presse-plieuse, panneaux assemblés par recouvrement à plat par quelques cordons de

soudure à l’arc. Résultat, on passe moins de 250 heures à fabriquer une caisse. Tes clients sont des loueurs d’abord attachés au prix. La profession crie au scandale mais reprendra le principe par la suite. Ton entreprise sera aussi la première à fabriquer des fourgons blindés.

Plus tard, tu ouvriras d’autres entreprises à travers la France, jusqu’à devenir le premier carrossier industriel français. Nombreux sont les itinérants carrossiers passés dans tes entreprises et auxquels tu confi eras parfois des chantiers aux limites de leurs capacités. Certains deviendront sédentaires dans ces entreprises.

Lors des salons professionnels, tu innoves en emmenant avec toi toute une équipe de collaborateurs. Là, parmi les autres, tu conserves ton sens de l’orientation et l’on remarque aussi ton excellente mémoire du passé. »

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Cet hommage terminé, Jean-Luc Momper, Lorrain la Fraternité, poursuivait en s’adressant à Vendéen la Persévérance.

« Marcel Gentreau, voilà cinquante ans tu étais reçu, le 21 avril 1956 à Paris, Compagnon Charron Carrossier du Devoir, sous le nom de Vendéen la Persévérance.

EDITORIAL SUITE

Répondre d’une manière certaine et définitive à chacun de ces points serait illusoire et ce n’est pas l’objectif visé. Mais il nous faut cependant nous mettre en chemin, suivre ces pistes de réf lexion, y travailler, proposer des actions simples et concrètes, partager, écouter, approfondir certains sujets, faire ensemble pour mettre en perspective. Nous devrons donc, ensemble, nous interroger sur notre manière d’être et de transmettre, sur ce qui se transmet et sur ce qui s’acquiert.

Cette feuille de route s’ inscrit dans la continuité d’actions et de réflexions déjà entreprises. L’éditorial de janvier 2006 « Engagement et participation », du Compagnon Thierry Courtin, mon prédécesseur dans cette gâche, est riche de sujets sur lesquels il nous faudra revenir.

Ces dernières années, nous avons porté nos efforts sur l’accueil et l’accompagnement des jeunes hommes et des jeunes femmes dans les métiers et sur le Tour de France. Il nous faut continuer et faire mieux.

Nous devrons également réaffirmer que nos Maisons sont des lieux de vie, de formation, de rencontre, de culture et de partage où chacun est à sa place dans le respect de l’autre. Il n’y a pas d’âge pour partager et faire partager.

Nous devrons nous interroger au sein des corps de métiers, des communautés et individuellement sur la manière dont l’enseignement des Compagnons peut enrichir et nourrir une vie au quotidien et en quoi cela nous oblige.

Là encore, il n’y a pas de réponse toute faite. Elle ne peut être que personnelle, mais partagée, selon son parcours et les âges de la vie. Si, en conscience, nous nous posons cette question, c’est que nous sommes déjà en chemin et, pas à pas, ensemble, nous répondrons aux besoins et aux attentes exprimés.

Tel est le plan de la feuille de route qui m’a été transmise. Je compte sur la générosité et l’adhésion de toutes et de tous pour la mener ensemble, le plus loin possible.

Hubert JourdainHubert l’Ile-de-France

Compagnon Serrurier du DevoirConseiller au Secrétariat

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Tu fais ton apprentissage de charron dans ta Vendée natale et, à l’instar de tous les Anciens de cette époque, tu sens que ton métier de charron est en plein déclin. Aussi, après l’Armée, tu décides de partir sur le Tour de France, chez les Compagnons du Devoir, pour te perfectionner dans un métier d’avenir : la carrosserie. Tu passes successivement dans les villes de Cerisay, Nantes, Tours, Lyon, Strasbourg et Paris.

Pendant ce périple, tu acquiers le soir des connaissances en dessin et en traçage menuiserie voiture en bois, tout en travaillant la journée dans différentes entreprises de carrosserie industrielle. C’est aussi la pleine époque où l’on construit en profi lés à froid, en acier, ce qui te permet de te familiariser avec le métal en tant que monteur-ferreur.

Devenu sédentaire, tu es brigadier-traceur à la Carrosserie Industrielle Legros, puis tu entres chez Renault, en qualité de ferreur.

Là, au sein de l’entreprise et en dehors de ton travail, tu suis diff érents cours de mathématiques, de descriptive, d’anglais. L’un de tes professeurs se nomme Pierre Bézier, il est aujourd’hui mondialement connu au travers de la courbe de Bézier.

Le sérieux de ton travail te permet d’accéder au bureau de style et de travailler à la réalisation de maquettes, puis par la suite au bureau d’étude. Pour toi, c’est l’accès à l’outil informatique au travers des méthodes Unisurf, puis Euclid, toutes deux inventées par Pierre Bézier.

En dehors de ton emploi, les Compagnons Deschamp, Labate et Marcel Chambéron feront appel à toi en 1983 pour réaliser le dessin de la voiture Delamarre-Debouteville. Il s’agit de la réplique du break de chasse équipé d’un moteur, la première voiture au monde à moteur quatre temps, ayant roulé en 1884 près de Rouen. La réalisation de la carrosserie et des roues en bois sera assurée en Auvergne par le Compagnon Claude Avril, Tourangeau la Prudence, et tant le montage que la mécanique seront réalisés aux ateliers Sainte-Catherine, à Epône, ceci en vue de la manifestation en mai 1984 célébrant les “ Cent ans d’automobile française ”.

Aujourd’hui, tu viens souvent à la charronnerie d’Epône pour conseiller les jeunes Aspirants carrossiers lors de la restauration de véhicules hippomobiles, ces Aspirants poursuivant là leur formation compagnonnique. Tu es également souvent sollicité en tant que surveillant et correcteur d’examens, tels le CAP, le BEP, le BP et le Baccalauréat professionnel en carrosserie. »

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Ces hommages se terminaient par celui rendu par Roland Labate, Angevin l’Ami des Compagnons, à Limousin l’Ami du Travail.

« Roger Deschamp, cela fait déjà cinquante ans, le 21 avril 1956, que tu as été reçu à Paris Compagnon Charron Carrossier du Devoir, sous le nom de Limousin l’Ami du Travail.

Tu fais un apprentissage de charron dans ton Limousin natal, chez ton père. Mais sorti de là, tu as envie d’évoluer. Comme il l’a déjà fait pour plusieurs, le Compagnon Albert, de l ’Union Compagnonnique, à Brive, te conseille de partir sur le Tour de France, chez les Compagnons du Devoir, en vue de te diriger vers le métier de carrossier. Tu vas ainsi successivement passer dans les villes de Lyon, La Rochelle, Bordeaux, Strasbourg et enfi n Paris.

Pendant ce périple, ton principal centre d’intérêt est la tôlerie forme, ce qui fait qu’à ton Adoption, tu reçois une couleur rouge à laquelle tu ajouteras une couleur bleue plus tard. Tu te révèles être un jeune de caractère.

Lors de ton passage à Strasbourg, tu participes à la construction de la Maison des Compagnons en aidant les maçons et les tailleurs de pierre. A Paris, tu élabores une série de planches de géométrie descriptive appliquée. C’est un temps de vaches maigres pour toi car tu fais ce travail à temps plein, sans salaire. Tu dois faire appel aux copains pour te faire off rir un café.

Devenu sédentaire à Paris, tu entres chez Renault en qualité de tôlier. Puis tu gravis les échelons de l’encadrement à l’atelier de tôlerie prototype et enfi n tu accèdes, au bureau d’étude, au Grand Plan. Là, au sein de l’entreprise mais en dehors de ton travail, tu suis diff érents cours : mathématiques, descriptive, dessin de recherche de forme. L’un de tes professeurs est Pierre Bézier, qui a participé à l’Encyclopédie des Métiers La Carrosserie et qui est aujourd’hui mondialement connu au travers de la courbe de Bézier.

Tu transmets tes nouvelles connaissances, notamment en recherche de forme, au maître de cours de dessin de nos cours du soir que je suis à cette époque. Il s’ensuit une application en cours sur divers éléments de carrosserie.

Tu prends la suite du Compagnon Pierre Aubard, Berry la Gaîté du Tour de France, comme délégué au Collège des Métiers des Compagnons Charrons Carrossiers du Devoir. Tu assureras cette fonction pendant près de trente ans.

Tu quittes Renault pour t’ impliquer dans la carrosserie industrielle à la Carrosserie André Trouillet, à Vanves, en qualité de chef d’atelier. Mais une idée te trotte par la tête. Tu en parles souvent avec le Compagnon Jean Bernard, La Fidélité d’Argenteuil, alors Premier Conseiller de l’Association ouvrière : la création d’un atelier école pour recevoir, chaque année, des itinérants carrossiers du Tour de France. Après plusieurs projets non aboutis, c’est l’ouverture des Ateliers Sainte-Catherine, en mai 1968, à Vitry-sur-Seine, avec, en perspective, le développement ultérieur à Epône, en 1974.

Dès le départ, tu fais transformer le vieil atelier de charronnage-carrosserie de Vitry en le munissant d’une presse-plieuse, d’une cisaille-guillotine. Ce matériel est équipé d’outils pour le travail des métaux légers pliés, peu utilisés à l’époque en structures.

Ces ateliers de Vitry, puis d’Epône, seront un outil performant pour l’enseignement des Compagnons Carrossiers pendant vingt-deux ans jusqu’à la décision de fermeture en 1990 par l’Association ouvrière. C’est notamment le cas des cours à distance élaborés à partir de 1984 et diff usés à l’ensemble du Tour de France des itinérants Carrossiers sous ta direction.

Cet outil te permettra aussi d’exprimer ton esprit inventif, avec le dépôt de plus de vingt brevets et l ’obtention de plusieurs premiers prix de l’innovation.

Les cours à distance permettront à plusieurs de nos jeunes Compagnons Carrossiers d’obtenir le baccalauréat professionnel de carrossier dès le début de sa création dans les années 1980.

À la fi n de ces mêmes années, tu signales à la Fédération Française de la Carrosserie, à la suite d’un vote de notre congrès, notre souhait de voir œuvrer pour la création d’un Brevet de Technicien Supérieur en Carrosserie. Cela se fera au début des années 1990. Ce sera le B.T.S.

Conception et Réalisation de Carrosseries. Plusieurs Compagnons Carrossiers participeront à l’élaboration du référentiel d’examens.

Dès la décision prise de fermeture des ateliers, tu œuvres pour la poursuite de l’activité industrielle avec la création, par le personnel des ateliers et une soixantaine de Compagnons Carrossiers extérieurs, de la Société Coopérative de Production ASCA.

L’heure de la retraite venue, tu ne restes pas inactif. Tu te consacres à la Fédération Française de la Carrosserie, à la formation en carrosserie industrielle avec la réalisation d’un fi lm et à la conservation du patrimoine dans les métiers du charronnage et de la carrosserie. Espérons que dans ce dernier cadre, une solution durable sera trouvée pour la conservation de nos charrettes parties de la Charronnerie d’Epône en 2000 et accueillies aujourd’hui en Touraine par l’Association des Métiers du Charronnage et de la Carrosserie dont tu es la cheville ouvrière à sa création. »

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Et Roland Labate de poursuivre, s’adressant aux trois Compagnons :

« Ces quelques mots que nous savons incomplets montrent combien vous avez, chacun à votre manière, et selon les circonstances, apporté à l’édifi ce de la formation de la jeunesse ouvrière qu’est le Compagnonnage du Devoir et, tout particulièrement, à celui des Compagnons Charrons-Carrossiers du Devoir. Tous les Compagnons et les itinérants ici présents vous en sauront toujours gré.

Saluons aussi vos épouses et compagne, vos enfants et petits-enfants, en les remerciant de leur compréhension pour les nombreuses journées que leur a prises le Compagnonnage.

Recevez, chers Pays, nos salutations les plus fraternelles et compagnonniques. »

Un livre est remis en souvenir à chacun de nos trois Pays accompagné d’une feuille bristol paraphée par tous les Compagnons et Aspirants présents. Chacune des dames de nos trois Pays reçoit une rose de la main de trois jeunes stagiaires carrossiers.

Cette agréable journée ensoleillée se poursuit par un repas où nous sommes chaleureusement accueillis par la maîtresse de maison, Madame Perret. Nous terminerons cette journée par une visite de la Fonderie de Coubertin, savamment commentée par Jean Dubos, Angevin la Sagesse, Compagnon Chaudronnier du Devoir et responsable de celle-ci.

Les Compagnons Charrons Carrossiers du Devoir

Les cours à distance permettront à plusieurs de nos jeunes Compagnons Carrossiers d’obtenir le baccalauréat professionnel de carrossier dès le début de sa création dans les années 1980.

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compagnonsmétier

Rencontre à SaumurFlamand la Constance

L a quatrième édition des RMVO « Rencontres Maréchaux et Vétérinaires de l’Ouest » s’est

tenue en février 2006. Cette manifestation, comme son nom l’indique, a pour but de rassembler les hommes de ces deux métiers qui, pendant deux jours, vont se retrouver autour d ’ateliers et participer à des conférences abordant des thèmes de réfl exion communs à leurs professions.

La première édition eut lieu en l ’an 2000. Monsieur Pascal Fanuel, docteur vétérinaire, et le Pays Mopin, Compagnon Maréchal-Ferrant, sont à l’initiative de cet événement. Forts de leurs expériences, tous deux déploraient que les vétérinaires et les maréchaux-ferrants n’aient aucun moment pour traiter en commun des sujets les intéressant. Suite à ce constat, ils décidèrent d’organiser un moment de rencontre pendant lequel les membres de leurs deux métiers pourraient aborder des thèmes tels que les différentes ferrures, l ’anatomie, l ’utilisation de nouvelles technologies etc. Le but de ces échanges étant de mieux comprendre l’activité de l’autre, mieux communiquer et apprendre à se connaître tout simplement.

Le vétérinaire et le maréchal doivent parler le même langage pour pouvoir échanger leurs points de vue sur un équidé et défi nir le traitement le plus approprié à pratiquer et ce dialogue n’est possible que si les deux interlocuteurs connaissent exactement l’anatomie du cheval et les moyens matériels disponibles. De telles journées permettent le rapprochement de ces deux professions si complémentaires et la découverte ensemble des nouveaux outils.

Actuellement, la présidence de l’Association régissant RMVO est tenue par Madame Emmanuelle Druoton, docteur vétérinaire. Cette dame est également responsable de la commission sur la maréchalerie au sein de l’Association Vétérinaire Equine Française et siège au sein du comité d’orientation de l’Institut de la Maréchalerie mis en place en 2004 par les Compagnons du Devoir. De nombreuses personnes, maréchaux-ferrants, vétérinaires, professionnels ou étudiants s’investissent également dans l’organisation de ces rencontres et leur bon déroulement.

Leur lieu d’accueil se situe à l ’Ecole Nationale d’Equitation (E.N.E) qui se trouve à Saumur. En 1972, cette école se constitue autour du Cadre Noir de Saumur, corps enseignant, composé de dresseurs et de formateurs, qui privilégie l’étude et l ’enseignement. Le Cadre Noir découle des nombreuses écoles d’équitation qui l’ont précédé. La première de celles-ci fut créée en 1814 afi n de former des instructeurs d’équitation (ou écuyers),

chargés de l’instruction dans les régiments de cavalerie. Aujourd’hui, le Cadre Noir est composé de civils et de militaires. Il est placé sous la tutelle du ministère de la Jeunesse et des Sports et continue

sa mission de formation et de prestige. Il exprime ses conceptions équestres par l’enseignement qu’il dispense afi n de perpétuer « l’équitation à la française ».

La mission de cette école est donc de former les cadres supérieurs de l ’équitation,

l’enseignement dispensé recouvrant l’ensemble des disciplines équestres mais aussi la formation généra le . L’Ecole Nat iona le d ’Equitat ion propose, avec diff érents partenaires, un éventail

Le vétérinaire et le maréchal doivent parler le même langage pour pouvoir échanger leurs points de vue sur un équidé et défi nir le traitement le plus approprié à pratiquer et ce dialogue n’est possible que si les deux interlocuteurs connaissent exactement l’anatomie du cheval et les moyens matériels disponibles.

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de stages ou de formations supérieures destinés aux enseignants et compétiteurs, français et étrangers. Cette école possède de nombreux atouts : plus de 400 chevaux, plusieurs manèges, une salle de conférences, un centre de documentation qui détient quelques livres rares de maréchalerie et une immense forge. En résumé, c’est le lieu idéal pour recevoir RMVO...

Pendant deux jours, ce fabuleux outil nous a été confi é pour échanger, partager des connaissances et des expériences de vie… Les années antérieures, seuls les professionnels de l’Ouest de la France avaient été conviés mais cette édition 2006 était ouverte à tous et, comme les précédentes, ces rencontres se sont tenues à guichet fermé… Les places ont été réservées très rapidement et à notre grande surprise par des personnes venant des quatre coins du monde.

Le pays Mopin, membre de l’organisation, m’avait demandé mon concours en tant que bénévole. Mes missions étaient simples et convenaient très bien à un jeune Compagnon. Je devais faire un reportage photographique, prêter main-forte aux préparatifs et accueillir les femmes et les hommes venus de La Réunion, d’Allemagne, du Canada, d’Espagne, du Maroc, de Suisse, de Guadeloupe ou encore d’Italie… Aussi, point de vue rencontres, j’étais aux premières loges… De plus, le Compagnon Mopin devait donner une conférence sur les grandes évolutions de la maréchalerie. Cette rencontre était également l’occasion pour l’Institut de la Maréchalerie d’exposer des ouvrages édités par la Librairie du Compagnonnage.

Arrivé la veille du jour J avec le Compagnon Mopin, je rencontrais les membres organisateurs. La préparation battait son plein. Plus de 150 personnes étaient attendues le lendemain sans compter les organisateurs, les conférenciers et les exposants… Il fallait établir l’intendance, assurer le bureau de réception et la mise en place des exposants… Tout cela se passa bien sûr dans une ambiance chaleureuse, gaie, mais avec minutie. Le soir, chacun connaissait son rôle et était heureux de se retrouver avec certains conférenciers autour d’un verre de l’amitié. Les discussions étaient animées. J’ai ainsi fait connaissance avec des personnes désirant partager et faire évoluer nos professions et parmi celles-ci je citerai Bernard Duvernay, membre du conseil d’orientation de l’Institut de la Maréchalerie et Hans Castelijns, formateur pour le prochain stage des itinérants. Ces deux maréchaux reconnus internationalement demandèrent des nouvelles de nos jeunes Compagnons dispersés à travers le monde et je dois dire que c’est toujours très encourageant de savoir que la plupart des Compagnons sont connus de tels personnages.

Il faut savoir que les itinérants maréchaux-ferrants ont trois objectifs à atteindre pendant leur Tour : Être disponible, devenir bilingue et compétent.

■ Disponible, pour s’adapter sans cesse, rester ouvert et refuser la routine.

■ Bilingue, si ce n’est trilingue, afi n de favoriser la rencontre et le partage avec les autres.

■ Compétent, pour savoir répondre aux besoins du moment, quelle que soit la discipline équestre.

Nos buts s’avèrent donc correctement défi nis et atteignables…

Pour l’heure, le lendemain matin, on préparait les diff érents ateliers. Dans la forge, des démonstrations sur le travail de l’aluminium, sur la transformation

des fers mécaniques, sur les diff érentes façons de coller les matériaux modernes sur les pieds du cheval étaient au programme mais la dissection et l ’anesthésie n’étaient pas oubliées.

Sur d’autres sites, l’anatomie du membre, l’analyse d’un cheval ou encore la manière de déferrer et referrer un cheval étaient aussi présentées. Les participants pouvaient donc circuler entre ces diff érents endroits, encadrés de guides facilitant leurs déplacements…

Vers midi, les premiers maréchaux et vétérinaires arrivaient… Je rencontrais nos invités venus de si loin, et les discussions s’engageaient. Je déjeunais avec deux maréchaux canadiens. J’avais déjà rencontré l’un d’eux lors d’un congrès durant notre voyage d’étude en Suisse. La conversation s’orientait sur leurs soucis de trouver des professionnels compétents e t su r le s for mat ions ultrarapides proposées dans leur pays… Je leur expliquais le Compagnonnage et ils s’intéressèrent très rapidement à nos objectifs, la formation par le voyage et les échanges. Par la même occasion, je leur présentais l’Institut de la Maréchalerie et ses projets… Les mêmes problèmes se rencontrent dans nos deux pays et il serait fort intéressant d’étudier ce phénomène. Les numéros de téléphone et les adresses Internet étaient échangés. Peut-être un jour, un itinérant pourra-t-il travailler là-bas, ou l’Institut avoir une mission sur l’étude des problèmes communs à notre profession. Je rencontrais aussi un Espagnol, un Guadeloupéen, un Français insta l lé en Allemagne… Toutes ces personnes accordaient de l ’ importance à une telle réunion, elles étaient venues pour la technique mais aussi pour la rencontre.

Peu de rencontres comme celles-ci sont organisées pour les maréchaux, leur permettant d’échanger et de partager sur notre métier. Aujourd’hui, notre identité n’est plus établie et, comme l’a souligné le Compagnon Mopin lors de sa conférence, personne maintenant ne sait où classer les maréchaux. Pour exemple, notre code NAF se trouve dans un sous-groupe d’autres activités récréatives. Ce dernier terme nous semble peu représentatif de notre métier…

Mais revenons à RMVO. Après un après-midi plein d’activités et de découvertes, les participants étaient invités à un apérit i f of fer t par les sponsors, suivi d’une dégustation d’huîtres à volonté accompagnée de vins élevés dans les magnifiques caves de Saumur… Là encore, je me retrouvais à une table pleine de vie et de voyage. J’étais en compagnie des deux conférenciers maréchaux Bernard et Hans, du photographe Alain Laurioux, photographe officiel de l’E.N.E, ayant fait plusieurs tours du monde, et d’autres jeunes personnes désirant aussi voyager… La soirée fut riche en débats et s’orienta sur l’Inde et la photographie. Bernard part régulièrement en Inde comme consultant et formateur, je suis parti l ’année dernière dans ce très beau pays grâce à lui pour assurer une formation, et deux personnes de la table devaient partir là-bas la semaine suivante. Donc l’Inde était naturellement le sujet à l’ordre du jour.

Le lendemain, la matinée se passait en amphithéâtre pour des conférences. Les sujets abordés étaient la biomécanique, l’os, les rectifications sur les poulains et en fin de matinée l’évolution de la maréchalerie…. Cette dernière conférence, réalisée par le Compagnon Mopin en tant que responsable de l’Institut de la Maréchalerie, se voulait percutante afi n de faire réagir sur le devenir de notre métier.

Elle permit également de présenter l’étude sur la formation des maréchaux en France réalisée par ce dernier. L’objectif fut atteint et l’Institut reconnu. De nombreuses personnes, dont plusieurs formateurs, désirèrent intervenir à la suite de cette conférence sur l’évolution de la maréchalerie ainsi que sur des points alarmants de cette profession.

L’après-midi, je continuais à me déplacer entre les animations pour prendre des photos. Grâce aux conseils des professionnels présents, le résultat fut bien plus intéressant que la veille… La vente des fascicules et des livres édités par la Librairie du Compagnonnage permit aussi de mettre en avant les actions de l’Association ouvrière.

Cette journée se terminait par un apéritif dînatoire. Tout le monde avait l’air très heureux de ces deux journées basées sur l’échange. J’ai quant à moi rencontré des gens de tous les horizons et découvert des personnes cherchant à mieux exercer leur métier et à partager leurs soucis, leurs expériences ou leurs questions sur le devenir du métier. La création de l’Institut de la Maréchalerie répond à une véritable attente des professionnels, tant par son Centre de Recherche que pour la recherche... Les ouvrages édités par la Librairie du Compagnonnage ont fait sensation car en phase avec les besoins des écoles.

La participation à un tel événement est bénéfi que et profi table. Elle m’a permis de mettre des visages sur des noms, d’avoir des contacts pouvant servir aux itinérants, de rencontrer des vétérinaires et des étudiants vétérinaires cherchant à mieux comprendre notre métier… Rencontre, découverte de nouvelles techniques et recherche sont les mots-clés pour défi nir RMVO. Sachant que la mission première des Compagnons est de former des hommes de métier et de les rassembler, ce qui me semble se réaliser lors de tels événements, j’encourage tous les jeunes à s’investir dans ces moments…

Merci aux organisateurs et bravo pour leur dévouement.

Bertrand SonnevilleFlamand la ConstanceCompagnon Maréchal-Ferrant du Devoir

Il faut savoir que les itinérants maréchaux-ferrantsont trois objectifs à atteindre pendant leur Tour :Être disponible, devenir bilingue et compétent.

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compagnonnage et matériaux bio

Chanvre et construction bio

La Persévérance de Grandchamps-des-Fontaines

O mniprésent dans les campagnes françaises vers 1850, un siècle plus tard le chanvre avait pratiquement disparu. Aujourd’hui,

il prend sa revanche face à des fi bres qui avaient largement contribué à sa mise à l’écart et, bien que sa culture ait sans doute été l’une des plus anciennes pratiquées par l’homme, on le redécouvre.

Ainsi, à la fi n du XIXe siècle, il y avait en France près de 176 000 hectares de terres cultivées en chanvre, répartis sur l ’ensemble du territoire. C’était un acteur incontournable du quotidien et de l’économie et il servait aussi bien à la confection des vêtements ou des draps qu’à celle des cordages et des voiles pour la marine, en passant par l’huile d’éclairage. De nos jours, près de 10 000 hectares sont ensemencés chaque année avec des graines conformes aux normes européennes car sa culture est très réglementée. En eff et, le chanvre, dont le nom botanique est Cannabis Sativa, fait partie de la famille des cannabinacées dont chacun sait que certaines variétés (le chanvre indien par exemple, communément appelé cannabis) peuvent servir à des usages très éloignés des préoccupations industrielles.

Pourtant, le chanvre a de nombreuses qualités qui en font une culture très intéressante. Grâce à sa vitalité, les apports en engrais chimiques sont réduits. Il ne nécessite ni désherbant, ni insecticide ou fongicide, ni irrigation. De plus, bénéfi ciant d’une croissance très rapide, de 2,5 à 3 mètres en moins de cinq mois, il produit jusqu’à quinze tonnes de matière sèche à l’hectare.

De par sa transformation après la récolte, notamment par un défi brage mécanique utilisant peu d’énergie, toute la plante est valorisée.

■ Le chènevis, qui est la graine du chanvre, sert à l’alimentation du bétail et est également utilisé comme appât pour la pêche (la carpe en est friande) ou comme nourriture pour oiseaux. Cette graine oléagineuse contient une huile (non psychotrope) qui peut aussi servir dans les lampes à huile ou être utilisée comme composant de vernis…

■ La chènevotte, qui est la partie non fi breuse de la tige du chanvre, est utilisée comme litière pour les animaux ou comme isolant dans les matériaux de construction mais aussi comme support de cultures spécifi ques : champignons, horticulture.

■ Les fi bres sont utilisées pour la pâte à papier, la corderie, la ficellerie. Elles entrent également dans la composition de la laine isolante, des fi bres techniques, des matériaux composites et des textiles.

Présentement, c’est le chanvre utilisé dans les matériaux de construction qui nous intéresse.

Mélangée à un liant de base, la chènevotte permet de confectionner des mortiers et des bétons performants, présentant des caractéristiques spécifi ques. Aussi la nature du liant a-t-elle fait l’objet de recherches tant sur le terrain qu’en laboratoire car le liant doit non seulement assurer une liaison fi able aux

granulats de chènevotte mais aussi permettre l’évacuation de l’eau à tous les stades de la vie du matériau. La chaux aérienne fut rapidement retenue comme liant spécifi que et, à ce jour, ces produits permettent la confection de mortier et de béton répondant aux exigences requises de mise en œuvre, de fi abilité, de durabilité, de performances techniques et économiques.

Les mortiers et les bétons de chanvre sont ainsi des matériaux particulièrement satisfaisants grâce aux qualités que leur donne le mariage de la chaux et du chanvre, à savoir : masse volumique très faible, pouvoir isolant élevé, correction acoustique, perméabilité à la vapeur d’eau, élasticité importante.

Culture de chanvre industriel en Haute-Saône

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Ces caractéristiques les rendent performants dans les applications suivantes : dalle de béton léger isolant (neuf et restauration) ; remplissage des murs ossature bois, rénovation de maisons à colombages ; construction neuve ; isolation de toiture ; enduit à caractère isolant ; amélioration du confort thermique ; correction acoustique ; régulateur hygrométrique ; décor (épaisseur jusqu’à douze centimètres).

Le béton de chanvre

Par contre, le chanvre n’étant pas un matériau porteur, la réalisation d’une ossature bois porteuse d’une section 4/15e et eff ectuée par un charpentier sera nécessaire ainsi que la réalisation d’un coff rage en contreplaqué de 19 mm d’épaisseur vissé sur l’ossature bois et écarté de celle-ci de 6 cm, un côté du mur devant être coff ré sur toute la hauteur tandis que l’autre le sera au fur et à mesure de l’avancement du coulage. Le mur fi ni devra avoir 27 centimètres d’épaisseur, ce qui engendrera une isolation thermique de grande qualité.

Le béton sera réalisé en granulats de chanvre et de chaux Tradical 70, dosé à 220 kg au m3 et 30 litres d’eau. Le mélange ainsi obtenu sera mis en place dans le coff rage et tassé par couches successives de 20 cm, ce qui permet de décoff rer et de remonter le coff rage à l’avancement du coulage. Le mélange se fait exclusivement en bétonnière.

Les dalles en chanvre

Ces dalles sont réalisées sur un hérisson de pierres de 20 centimètres d’épaisseur minimum, d ’une granu lométr ie pouvant aller de 40 à 100 millimètres, de préférence en galets de rivière ou, à défaut, en pierre calcaire. Ce hérisson doit être ventilé par des entrées d’air à la périmétrie de la construction. Il ne faut absolument pas mettre de fi lm plastique, ce qui provoquerait la condensation et empêcherait la respiration du chanvre, il ne faut pas non plus de treillis soudé, ce sont les fi bres du chanvre qui servent d’armature au béton. Le béton se réalise de la même façon que pour les murs, le dosage est de 270 kg au m3 de chaux Tradical 70 (le sac de chaux pèse 22 kg). Le dallage se tire comme une chape ordinaire sur une épaisseur de 12 à 15 cm. Le revêtement de fi nition se posera obligatoirement au mortier de chaux, le ciment et tout autre liant hydraulique étant à proscrire car ils empêcheraient le chanvre de respirer.

Le mortier léger

En isolation de toiture ou en rattrapage de niveau sur les planchers anciens (restauration), dosé à 220 kg de Tradical 70 au m3, le mortier léger se met en place sur un coff rage perdu en toiture ou directement sur un plancher neuf ou ancien sans film plastique, l ’épaisseur minimum étant de 8 cm, son faible poids de 330 kg au m3 en faisant un matériau performant.

Les enduits isolantsau mortier de chanvre

Employés principalement en restauration sur les murs intérieurs en pierre, en brique et en pisé, leur dosage est de 600 kg de chaux Tradichanvre et 100 kg de chaux grasse Tradical 98, soit 700 kg pour 1 m3 de chanvre. Le Tradichanvre est une chaux formulée qui contient une charge minérale permettant l’enrobage et la liaison des granulats. Le malaxage se fait dans une bétonnière à raison de 100 l de chanvre par gâchée. Il faut 500 l d’eau par m3 de mortier. La mise en place se fait soit manuellement ou au sablon, par couches

successives de 2 cm. On peut charger 6 cm par jour. Une fi nition semblable à celle d’un enduit normal à la taloche et un lissage à la truelle sont recommandés pour un fi ni digne d’un intérieur d’habitation. Il est possible d’ajouter des colorants naturels au malaxage. Le même enduit peut être utilisé en extérieur sur les mêmes supports mais il devra être recouvert d’un enduit de fi nition au mortier de chaux.

Un nouveau produit se trouve sur le marché depuis un an et de manière confi dentielle et expérimentale. I l s’agit du parpaing de chanvre fabriqué artisanalement et qui présente l’avantage d’avoir les mêmes qualités que le mur banché avec, de surcroît, une mise en place beaucoup plus rapide.

La section de ce produit est de 30 cm par 60 cm et de quatre épaisseurs : 10 cm, 15 cm, 20 cm et 30 cm. Comme le mur banché, il n’est pas porteur mais une étude européenne actuellement en cours devrait déboucher dans deux ans sur un parpaing permettant d’exécuter des murs porteurs. La pose se fait au mortier de chaux Tradical 70.

J’emploie depuis quatre ans du chanvre sous les diff érentes formes énumérées ci-dessus et je constate un intérêt grandissant pour ce produit de la part d’une clientèle avertie, souhaitant des matériaux sains dans son habitation.

« Je veux une maison bio », tels furent les termes employés par un client me commandant sa future maison. J’ai accepté, ne sachant pas vraiment ce à quoi je m’engageais, mais le client savait ce qu’il voulait et avait étudié très sérieusement la question. Une maison bio, fabriquée avec des matériaux sains, sans produits chimiques et surtout sans un gramme de ciment. En voici le descriptif :

Les fondations sont en béton de chaux composé de sable de rivière et de galets 20/80, dosé à 400 kg de chaux naturelle Tradical 70. Un soubassement de 60 cm de hauteur était nécessaire qui fut également réalisé en béton de chaux en 50 cm d’épaisseur. Il a fallu 40 m3 de béton pour réaliser ces ouvrages entièrement eff ectués à la bétonnière car aucune centrale à béton ne fabrique du béton de chaux.

Le dallage fut réalisé en béton de chanvre de 15 cm d’épaisseur sur un hérisson de galets, ventilé comme indiqué précédemment. Les murs furent bâtis en béton de chanvre sur ossature bois, le bois

choisi étant du douglas car il est imputrescible et ne nécessite aucun traitement. La charpente fut également eff ectuée en totalité avec ce bois, la couverture étant quant à elle en terre cuite posée sur liteaux en peuplier, bois également imputrescible et donc sans traitement.

L’installation sanitaire a fait l ’objet de soins particuliers, la mise en place de toilettes sèches avec compostage étant retenue pour éviter toute pollution extérieure, une fosse toutes eaux était nécessaire pour les eaux usées. Sachant que mes clients sont végétariens, aucune graisse animale n’est à détruire, ce qui allège considérablement le travail des bactéries et permet un traitement non polluant.

Il a également été installé une cuve de 15 000 litres pour la récupération des eaux pluviales et un appareil de traitement pour consommer cette eau. Des canalisations en polyéthylène ont été préférées au PVC, ce type de canalisations est plus sain, il contamine moins l ’eau et ne traverse pas la construction. Elles ont été installées en périphérie et pénètrent à l’intérieur à l ’emplacement des apparei ls à alimenter.

Pour l’électricité, il en fut de même. Toutes les lignes électriques sont en

périmétrie pour éviter toutes contaminations intérieures. Des interrupteurs de champs empêchent toute circulation de courant électrique à l’intérieur de l’habitation dès l’extinction de la dernière lampe, le soir. Les menuiseries sont en chêne traité et peintes avec des produits bio. Les enduits sont au mortier de chaux grasse, le revêtement de sol est en terre cuite posée au mortier de chaux avec des joints au coulis de chaux et sablon. Un poêle en pierre est placé au centre de l’habitation et deux heures de chauff e par jour sont suffi santes pour garantir une chaleur convenable (moins de combustion, donc moins de pollution).

Pour conclure, je dirai que cette expérience fut très enrichissante. De plus, ma participation à plusieurs salons bio pour la promotion du chanvre m’a permis de constater l’intérêt grandissant du public pour des constructions saines, avec l’emploi de matériaux non polluants et préservant l’environnement. Il me paraît donc important de nous intéresser à ce marché qui sera porteur dans les années à venir car si ce n’est pas nous qui nous y intéressons, d’autres le feront.

Bernard TigéLa Persévérance de Grandchamps-des-FontainesCompagnon Maçon du Devoir

Les mortiers et les bétons de chanvre sont des matériaux particulièrement satisfaisants grâce aux qualités que leur donne le mariage de la chaux et du chanvre, à savoir : masse volumique très faible, pouvoir isolant élevé, correction acoustique, perméabilité à la vapeur d’eau, élasticité importante.

Un nouveau produit se trouve sur le marché depuis un an et de manière confidentielle et expérimentale. Il s’agit du parpaing de chanvre fabriqué artisanalement et qui présente l’avantage d’avoir les mêmes qualités que le mur banché avec, de surcroît, une mise en place beaucoup plus rapide.

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voyage et découverte

Charpentier en HongrieNantais

J e viens de passer une année en Hongrie dans le cadre de mon Tour de France qui, comme

vous le savez, passe maintenant par les pays étrangers.

Cette expérience m’est apparue suffisam-ment particulière pour que l ’envie me prenne de vous la relater. Rassurez-vous, je ne vais pas ici vous parler de la géographie ou de l’histoire de la Hongrie. Je sais que le Journal, à plusieurs reprises, a évoqué ces deux aspects du pays des Magyars. Non, je vais essayer de vous faire partager la vie d’une famille hongroise, puis l ’expérience professionnelle d’un Aspirant Charpentier au sein d’un atelier à l’étranger.

Je suis , comme beaucoup d ’autres itinérants, parti par l ’ intermédiaire de Evosz et comme mes camarades j’ai commencé mon séjour en Hongrie par des cours de hongrois afin de faciliter mon intégration. Je dois vous dire que ce ne fut pas ce que l ’on peut appeler « une partie de plaisir ». Il n’est pas évident d ’apprendre une langue à l ’a lphabet différent du nôtre et l ’accent n’est pas non plus facile à acquérir. Cette approche de la langue a duré un mois, un mois qui m’est apparu particulièrement long, où j’ai eu l’impression d’être complètement « ramolli du cerveau » le soir venu.

Hébergement

A l’issue de ce stage de langue, j’ai rejoint ma famille d’accueil et, là, nouvelles observations. La vie dans une famille hongroise se déroule de la manière suivante : La mère de famille assume toutes les tâches ménagères, ou presque. Elle assure l’entretien de la maison, prépare les repas et les sert. Elle ne prend pas ses repas en même temps que le reste de la famille car elle est à ce moment à la disposition de sa famille. Il ne viendrait à l’idée de personne de se lever pour aller chercher le sel ou le poivre ou même d’attraper quelque chose qui se trouve à portée de main. C’est assez difficile à comprendre mais on ne peut rien y changer et ce n’est pour moi pas faute d’avoir essayé. Le père de famille a pour tâches d’entretenir l’extérieur de la maison, d’assurer le bricolage et de rapporter de l’argent à la famille pour la faire vivre. Heureusement, la mentalité des jeunes change un peu et l’homme commence à prendre un peu plus d’initiatives pour le ménage.

Les enfants de la famille vivent en général jusqu’à vingt-cinq ans avec leurs parents. Cela leur permet de faire des économies pour la suite. La plupart des familles hongroises aident leurs enfants en leur payant des études, leur première voiture, etc., en fait en les prenant en charge jusqu’à leur départ de la vie familiale.

Les Hongrois ont une mentalité généreuse et sont polis. Par exemple, les jeunes dans le tramway n’hésitent pas à se lever pour céder leurs places aux personnes plus âgées, aux femmes enceintes, etc. J’ai aussi remarqué qu’à la campagne l’accueil était toujours très cordial et il n’est pas rare d’être invité à partager le repas.

Dans ma famille d’accueil, la mère était née à vingt kilomètres de la frontière roumaine tandis que le père était originaire du Sud-Est de la Hongrie, Jaszapati, une petite ville. Ce monsieur était également mon patron et avait, durant sa jeunesse, voyagé. Il a vécu six années en Mongolie et trois en Russie pour son travail. Ce couple est venu s’ installer à Budapest et a construit sa maison au fur et à mesure du temps et des besoins. La maison terminée, ils ont construit l’atelier.

Chez eux, je v ivais à l ’ étage tandis qu’ i ls occupaient le rez-de-chaussée, cela m’a permis d ’être assez libre et d ’avoir l ’ impression de vivre dans un petit studio même si je partageais leurs repas. A ce propos, en Hongrie, les repas se prennent plus tôt que chez nous et cela m’a parfois paru contraignant mais m’a aussi permis de découvrir la cuisine hongroise et de parler hongrois. Néanmoins, il y a des jours où je n’en pouvais plus de voir la manière dont la vie se déroulait au sein d’une famille hongroise !

Vie professionnelle

Le travail du charpentier en Hongrie est relativement diversifi é. Il va du terrassement à la maçonnerie en passant par la couverture, la pose de menuiserie ou de placoplâtre et, bien sûr, la charpente.

Durant cette année, j’ai participé à plusieurs chantiers. Le premier se situait dans la rue où j’habitais. Il s’agissait de faire un abri pour deux voitures et une terrasse en bois. Nous avons commencé par faire le terrassement de ces deux constructions. A ce sujet, cela fait un peu bizarre de creuser à la pelle pendant deux semaines et de rouler à la brouette ! Puis, nous avons coulé la dalle en béton, préparé la charpente, l’avons posée puis couverte. Durant le taillage de cette première charpente, je me suis retrouvé tout seul et cela m’a étonné. J’ai compris par la suite que, ce jour-là, les ouvriers présents sur le chantier avaient préféré observer la manière dont je me servais des machines car, dans les petites entreprises hongroises, le travail est en grande partie eff ectué avec des outils à main ou à la tronçonneuse et rarement avec les machines que nous utilisons en France. Elles sont trop onéreuses pour une entreprise hongroise qui n’aura pas l’occasion de s’en servir tous les jours.

Par la suite, mon travail fut surtout de la restauration : couverture, isolation, lambris intérieurs… J’ai aussi fabriqué et posé des petits

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préaux pour maison ou des abris de jardin. Nous avons également eu à construire la charpente d’une maison neuve. Durant l’hiver, à cause du froid, je suis resté à l’atelier à fabriquer des lambris et à préparer deux chantiers pour l’été. Il y eut aussi des périodes creuses pendant lesquelles nous n’avions pas de travail. A ce moment, nous sommes allés repeindre une maison en bois, nous avons fabriqué des portes de sécurité en métal et nous avons fait une table de ping-pong…

Cette année en Hongrie ne m’a pas apporté beaucoup au niveau professionnel mise à part la conception d’une charpente hongroise qui est une charpente germanique. Elle est construite avec des poteaux qui sont placés sous les pannes et faîtages. Par la suite, les chevrons sont placés face à face sur les deux versants et sont reliés par des entraits qui forment un triangle, ce qui rigidifie la charpente. Ce style de charpente est relativement plus simple à réaliser que la charpente traditionnelle française car il suffit juste de préparer les chevrons et les entraits à l’atelier. En France, cette charpente est visible en Alsace.

Par contre, j’y ai acquis une certaine polyvalence dans des métiers proches de celui de la charpente. Comme je vous l’ai dit, j’ai effectué différents travaux, notamment de menuiserie. J’ai ainsi fabriqué des portes extérieures en bois et quelques fenêtres, travail que je n’avais jamais fait en France mais qui m’a donné les bases du métier de menuisier. Nous avons aussi restauré de viei l les tables trouvées sur les chantiers et ce type de travail m’a appris à être plus consciencieux et à travailler avec plus de finesse. J’ai également appris à faire du terrassement tout en faisant l’implantation des murs et à faire des coffrages pour couler des ceintures en béton, en tête de mur. Ce travail se faisait généralement dans mon entreprise avec des planches devant ensuite servir pour le toit et, pour les petites longueurs, nous prenions tous les bois susceptibles de tenir le temps du séchage du béton ! Nous renforcions les coffrages avec des fils de fer placés tous les cinquante centimètres. Pour ces coffrages, nous fabriquions nous-mêmes les ferraillages, nous les posions et nous coulions le béton.

L’outillage possédé par l’entreprise était suffisamment complet, les machines n’étaient pas forcément de bonne qualité pour un professionnel mais il suffisait d’en prendre soin et de ne pas trop forcer pour que tout se passe bien. En Hongrie, le matériel est beaucoup plus respecté qu’en France, il est très bien entretenu afin qu’il dure le plus longtemps possible.

Durant cette année, j’ai aussi appris à me débrouiller avec des machines pas forcément adaptées au travail demandé et je pense que tout cela pourra me servir en France ou ailleurs.

La manière de travailler en Hongrie est relativement différente de ce que nous connaissons chez nous, surtout au niveau de l’organisation du travail et de la structure de l’entreprise.

Le travail est prévu au jour le jour. Ainsi l’on recevait les plans et l’on taillait directement les chevrons ou les pannes sans même prendre le temps d’aller sur le chantier relever les cotes au cas où les maçons les auraient changées. Bien sûr, il n’était pas question à l’avance d’envisager un éventuel problème et lorsque je le faisais remarquer, on me répondait que ce n’était pas grave, qu’on verrait sur le chantier et que tout se passerait bien ! Ce n’est pas ainsi en France où l’on essaie de faire un maximum à l’atelier pour ne pas avoir de problèmes une fois sur le chantier. Dans cette entreprise, la plupart des choses étaient exécutées sur le chantier, seuls chevrons et pannes étaient réalisés à l’atelier car il fallait pouvoir les peindre. Une fois sur le chantier, les pièces de charpente étaient rapidement posées et il était rare de vérifier les niveaux des pièces de bois car, aux dires de mon patron, les maçons étaient passés par là et avaient fait le béton de niveau. Il était donc inutile de vérifier. Tout devait se faire rapidement, la pose comme la résolution des problèmes qui pouvaient survenir, le tout avec les moyens du bord et avec les machines présentes sur le chantier.

Cette manière de travailler faisait que la conception du chantier changeait au fur et à mesure des problèmes rencontrés. Cela n’aurait pas été ainsi si nous avions passé un ou deux jours de plus à l’atelier à envisager les problèmes qui pouvaient se poser. Le souci en Hongrie, c’est que les ouvriers ont rarement étudié le métier à l’école. Ils l’ont appris sur le tas et ont ainsi du mal à se projeter dans l’avenir.

Parmi les ouvriers ayant appris leur métier à l’école, peu prennent des décisions. Pour toute chose, l’on attend le retour du patron. C’est ainsi que l’on perd beaucoup de temps car s’il ne vient pas de la journée sur le chantier, on tourne en rond. En Hongrie, les patrons dans le bâtiment ont pour la plupart le titre de « maître », ce qui signifie qu’ils ont réussi un examen correspondant pour nous au brevet professionnel ou brevet de maîtrise. Les ouvriers peuvent aussi passer cet examen, ce qui leur permet de prendre des responsabilités et surtout d’être mieux payés car en général la paie n’est pas très élevée. En fait, peu d’entre eux ont passé cet examen et du coup beaucoup sont contraints de travailler le week-end pour améliorer leur niveau de vie.

Lorsque le patron avait besoin d’un coup de main supplémentaire, il faisait appel à une ou deux personnes de sa connaissance qui immédiatement venaient aider mais il fallait faire très attention à la manière dont ces hommes travaillaient car pour eux toutes les solutions étaient bonnes et parfois cela faisait peur. On trouve en Hongrie un nombre important de journaliers comme ceux auxquels faisait appel mon patron. Pour ces gens, seul l’argent compte, la conscience professionnelle n’existe pas et il faut vraiment les surveiller de près.

Découverte de la Hongrie et des pays voisins

Pendant cette année de mon Tour de France étendu à l’étranger, j’ai profité de mes moments de liberté pour faire ce que l ’on appelle du « tourisme ». Je suis ainsi allé en compagnie d’autres itinérants séjournant aussi sur le sol hongrois, pendant les longs week-ends ou les vacances, en République Tchèque, en Slovaquie, en Autriche, en Roumanie.

Mais avant de franchir les frontières, nous avons visité Budapest qui est comme Paris divisée en arrondissements. Ma famille d’accueil habitait le vingt-deuxième arrondissement qui ref létait bien la diversité des quartiers que l ’on trouve dans cette ville. Des quartiers résidentiels, vraies petites vil les en soi, jouxtent des quartiers beaucoup moins aisés, couverts de HLM, mais se rapprochant néanmoins de par leur physionomie et le mode de vie de leurs habitants beaucoup plus de la campagne.

Parmi les autres villes que j’ai visitées en Hongrie, se trouvent Esztergom, Visigrad, Vac situées sur ce que l’on appelle « le coude du Danube » mais aussi Sopron, Szombathely ou encore les villes qui entourent le lac Balaton.

Nous avons profité du week-end de la Pentecôte pour partir en voiture à Prague, en passant par

Bratislava. Prague est vraiment une très belle ville. Les bâtiments y sont magnifiques. En Roumanie où nous sommes allés à un autre moment, nous avons été aff ligés par la misère des gens. Elle est particulièrement visible à Bucarest. Par contre, les Carpates, la Transylvanie offrent des paysages magnifiques.

À l’heure du bilan

Vivre une année en Hongrie m’a appris beaucoup de choses. Je ne vous citerai pas l’adaptation dans le travail, l’apprentissage d’une langue étrangère, la culture personnelle, toutes choses communes à tout itinérant passant par l’étranger. Non, je préfère vous parler de la solitude que j’ai dû affronter les premiers mois, de l’obligation que j’ai eue d’aller vers les autres alors que je ne me sentais pas à l’aise, de celle de parler leur langue pour mieux les connaître, ce qui m’obligea à aller au fond de moi-même, à changer mon caractère et mon comportement. D’un naturel réservé, il ne m’a pas été facile d’oser aller à la rencontre des autres, ce que je n’aurais peut-être pas fait en France. Mais tous ces efforts n’ont pas été vains car ils m’ont permis de connaître beaucoup de monde, parfois très brièvement et parfois en langue anglaise. Cette expérience m’a donné envie de partir encore plus loin.

Romain BrochardNantaisAspirant Charpentier du Devoir

La plupart des familles hongroises aident leurs enfants en leur payant des études, leur première voiture, etc., en fait en les prenant en charge jusqu’à leur départ de la vie familiale.

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compagnonsdémonstration

Un week-end consacréaux arts de la forge

L’équipe itinérante du stage forge

I l y a maintenant trois ans, Florian Gardet, Florian le Franc-Comtois, Compagnon Serrurier Métallier

du Devoir, mettait en place, à Château-Chalon, une démonstrat ion de forge. Originaire du Jura, Florian avait, alors qu’il effectuait un stage de forge à Muizon, souhaité fêter « la Saint-Pierre » dans ce charmant village du Jura situé près de chez lui. Depuis, tant les habitants que les élus et les associations de Château-Chalon perpétuent cette manifestation qu’ils organisent chaque Saint-Pierre avec plaisir. L’intérêt de ce week-end est tel que les élèves préparant le CAP forge, au lycée Fi l lot de Saint-Amour, ont souhaité se joindre aux Compagnons.

Pour cette année 2006, un premier contact est établi dès décembre 2005 entre Florian et les organisateurs de la manifestation. Un sujet nous est envoyé, il faut que nous réalisions des pièces d’aspect sculptural ayant pour symbole la vigne : végétal, faune et f lore du paysage viticole, outils de vigneron, approches symboliques de la cave, etc. Rappelons à cet effet que Château-Chalon n’est pas seulement un village, mais aussi une AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) pu isque ce ter r itoi re produ it le cé lèbre « vin jaune ». Suite à ce premier contact, les personnes intéressées réalisent chacune un dessin. Ceux-ci sont envoyés à Château-Chalon et une sélection est faite. Sur neuf dessins envoyés par les Compagnons, cinq sont retenus : un tire-bouchon,

un pied de vigne, un tonneau, une grappe de raisin et une bouteille. Du côté du lycée de Saint-Amour, quatre ceps représentatifs des quatre saisons de la vigne sont retenus.

La sélection faite, nous avons récupéré les dessins et choisi la matière que nous allions mettre en œuvre. Après avoir passé commande de celle-ci, nous avons étudié le travail sachant que les pièces devaient être réalisées sur place et en un week-end.

Afi n que tout se passe dans les meilleures conditions, nous nous sommes mis en rapport avec Christian Guillaume, l’un des responsables de la manifestation. Puis, le vendredi 12 mai, nous avons pris la route pour le Jura après avoir pris livraison des véhicules de location et avoir chargé le camion-plateau de sept forges et le fourgon des maquettes destinées à l’exposition. A 13 heures de ce même jour, notre convoi s’ébranlait et nous arrivions, après quatre heures trente de route, sur le site, un des plus beaux village de France.

Château-Chalon bénéfi cie d’une vue imprenable, au bord du premier plateau jurassien, à l’entrée de la célèbre reculée de Baume-les-Messieurs. La

vue s’étend jusqu’à la côte de Baume et de Chalon, suscitant la rêverie au soleil couchant. Côté nord, la petite vallée du Chambon est reliée au plateau par une voie pavée bordée d’un mur de 5 mètres de haut et devenue une allée piétonnière. Elle témoigne d’un peuplement à l’époque gallo-romaine.

Château-Chalon bénéfi cie d’une vue imprenable, au bord du premier plateau jurassien, à l’entrée de la célèbre reculée de Baume-les-Messieurs. La vue s’étend jusqu’à la côte de Baume et de Chalon, suscitant la rêverie au soleil couchant.

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Une fois sur place, nous installions les forges et le matériel afi n d’être prêts dès l’ouverture de la manifestation. Puis nous étions conviés à un apéritif régional et faisions connaissance avec les élèves du lycée Fillot. Un repas concocté par des bénévoles du village nous permettait de rencontrer les organisateurs de ce week-end mais aussi d’échanger entre participants. Notre hébergement pour la nuit avait été prévu dans un magnifi que couvent réaménagé en école (tout au moins pour ceux d’entre nous qui ne s’étaient pas perdus en route !), situé à Voiteur. Monsieur Alain Maigrot, président des Amis de Château-Chalon, nous y conduisit. Ce magnifi que village se trouve au pied des vignobles qui recouvrent les pentes du promontoire rocheux de Château-Chalon

Une bonne nuit de sommeil et nous étions opérationnels… pour une petite heure ! En eff et, quelques soucis avec l’électricité retardaient notre travail qui allait commencer aux alentours de 10 heures 30 pour s’interrompre une heure plus tard afin d’écouter attentivement les discours d’inauguration, suivis d’un vin d’honneur et du repas de midi… Celui-ci terminé, nous pensions nous mettre sérieusement au travail mais c’était compter sans la pluie qui se mettait à tomber vers 17 heures, faisant fuir les spectateurs.

S’ensuivait une ruée vers la buvette. La fondue jurassienne au vin jaune, initialement prévue devant les forges, se déroulait sous un chapiteau. Une centaine de personnes partageait dans la convivialité et la bonne humeur cet intermède. Enfin, vers 21 heures, la pluie cessant de tomber, Florian relançait ses troupes pour une nocturne des plus extravagantes qui allait durer jusqu’à minuit. Abritées sous leurs parapluies, les personnes venues pour la fondue s’étaient rassemblées devant les forges pour assister à ce merveilleux jeu de lumière, encore accentué par la transparence des vitraux de l’église située juste derrière et mis en valeur par l’éclairage intérieur de celle-ci.

Cette longue journée de forge était suivie d’un repos bien mérité.

Le lendemain, un réveil « difficile » ne nous empêchait pas d’être sur le site vers 8 heures 15 car le travail était loin d’être terminé. Si le beau temps était avec nous, le temps nous était compté. Nous avons dû nous dépêcher pour atteindre l’objectif que nous nous étions fi xés mais, soutenus par les nombreux spectateurs venus admirer le travail réalisé tant par les Compagnons que par les élèves du lycée de Saint-Amour, nous terminions nos réalisations vers 18 heures 30. Chacun était remercié par Christian Guillaume et chaque participant prenait le temps d’expliquer aux spectateurs, venus des villages avoisinants mais parfois aussi de très loin, le travail accompli pendant ces deux jours.

Nous pensions repartir dès la clôture de cette manifestation afi n de ne pas rentrer trop tard à Muizon, ou plutôt ne pas y arriver trop tôt. Mais, là encore, c’était compter sans les imprévus. En eff et, à notre grande surprise, une excellente soupe à l’oignon nous attendait afi n que nous ne reprenions pas la route le ventre vide. De telles attentions entraînèrent bien évidemment de longs « Au revoir », d’autant que, pour nous remercier de notre venue à Château-Chalon, deux cartons de vin du Jura et une bouteille de vin jaune (l’un des quatre meilleurs vins au monde) nous étaient off erts.

De retour à Muizon, nous tenons, avant de clore ces quelques lignes, à renouveler nos remerciements à tous les bénévoles qui ont œuvré à la bonne marche de cette rencontre et sans lesquels nous n’aurions pu bénéfi cier d’un week-end si bien organisé et d’un accueil si chaleureux.

L’équipe itinérante du stage forge

Un sujet nous est envoyé, il faut que nous réalisions des pièces d’aspect sculptural ayant pour symbole la vigne : végétal, faune et fl ore du paysage viticole, outils de vigneron, approches symboliques de la cave, etc.

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compagnonscarnet

Carnet du Tour de FranceADOPTIONS

Wintzenheim, le 19 novembre 2005Frédéric Vilde, Nivernais, Charpentier.Wintzenheim, le 17 décembre 2005Jérémie Poirot, Vosgien, Plombier.Wintzenheim, le 28 janvier 2006Maxime Amiard, dit Champagne, Maçon,Franck Le Nestour, Alsacien, Couvreur.Le Mans, le 25 février 2006Matthieu Benard, dit Normand, Maçon,Marc Phelpin Ruffie, dit Ile-de-France, Maçon,Jean Wattel, Picard, Carrossier.Wintzenheim, le 4 mars 2006Romain Cappadona, dit Provençal, Menuisier,Olivier Saliou, Breton, Carrossier.Angoulême, le 22 avril 2006Julien Beneteau, dit Angoumois, Menuisier,Gaël Moles, Quercy, Tonnelier Doleur,Adrien Rochard, dit Angoumois, Menuisier.Strasbourg, le 22 avril 2006Brendan Buffet, dit Rennais, Métallier,Théo Jallet, dit Ardennais, Métallier,Allal Rouane, dit Ardennais, Chaudronnier.Toulouse, le 22 avril 2006Thibault Blanc, dit Bigourdan, Boulanger,Benjamin Chanut, dit Champagne, Pâtissier,Jérémy Clergue, dit Gâtinais, Ebéniste,Joël Fracca, dit Toulousain, Menuisier,Jérôme Giorgetti, dit Provençal, Menuisier,Jonathan Lamothe, dit Béarnais, Menuisier.Troyes, le 29 avril 2006Pierre Emmanuel Begue, dit Normand, Electricien,Emeric Thiebault, dit Champagne, Menuisier,Goeffroy Robert, dit Franc-Comtois, Electricien.Strasbourg, le 30 avril 2006Jean-Pierre Amisset, dit Languedoc, Métallier,Pauline Llopis, dite Provençale, Sellier,Pierre-Louis Maréchal, dit Flamand, Boulanger,Maxime Parent, dit Artésien, Maçon,Guillaume Rique, dit Ile-de-France, Métallier,Eric Schach, Alsacien, Couvreur.Saint-Egrève, le 6 mai 2006Alan Boret, dit Gâtinais, Menuisier,Emeric Daviet, Savoyard, Charpentier,Simon Douay, dit Vosgien, Menuisier,Théodore Tissot, Dauphiné, Charpentier.Eauze, le 6 mai 2006Thomas Pousserau, Basque, Charpentier,Nathan Verneuil, dit Périgord, Maçon.Saint-Etienne, le 12 mai 2006Yannick Coronas, Béarnais, Couvreur,Denis Desmoulières, Ile-de-France, Couvreur.Troyes, le 12 mai 2006Jérôme Meyer, Berry, Couvreur.Blois, le 13 mai 2006Jérémy David, dit Normand, Menuisier,Damien Lelais, dit Vendéen, Menuisier,Antoine Vivier, dit Champagne, Menuisier.Le Mans, le 13 mai 2006Alrick Bruneau, Manceau, Charpentier,Adrien Clep, dit Manceau, Tailleur de Pierre,Nicolas François, Normand, Charpentier,Alain Maillard, dit Forézien, Menuisier,Emmanuel Petitprêtre, Lorrain, Charpentier,Jérémie Peschet, Normand, Charpentier,Jonathan Riant, dit Canarien, Tailleur de Pierre.Toulouse et Colomiers, le 13 mai 2006Nicolas Bacci, dit Languedoc, PaysagisteLoïc Bezain, Champagne, Carrossier,Medhi Bouslah, dit Languedoc, Paysagiste,Joël Fouquet, Bordelais, Carrossier,Jérémy Le Clere, dit Breton, Ebéniste,Simon Rumen, dit Rwandais, Boulanger,Sébastien Russo, Provençal, Carrossier,Florence Turion, dite Nîmoise, Tapissier.Quimper, le 13 mai 2006Michaël Lion, dit Breton, Boulanger,Jean-Baptiste Roumier, Normand, Couvreur,Thomas Vandeville, dit Parisien, Chaudronnier.

Lille, le 19 mai 2006Renaud Michel, Briard, Plombier.Lyon, le 19 mai 2006Cyril Demets, Bourguignon, Couvreur.Pont-de-Veyle, le 19 mai 2006Benjamin Guillain, Manceau, Charpentier,Marcellin Masson, dit Forézien, Menuisier.Auxerre, le 20 mai 2006Maxime Cuvelot, dit Bourguignon, Menuisier,Romain Moucheroud, Champagne, Charpentier,Mickaël Pennone, dit Alsacien, Menuisier.Brest, le 20 mai 2006Jérémy Boulet, dit Artésien, Menuisier,Romuald Coince, dit Lorrain, Serrurier,Nicolas Mouline, dit Bordelais, Menuisier,Sébastien Pasdeloup, dit Franc-Comtois, Menuisier,Benjamin Schmitt, dit Ardennais, Menuisier.Cepoy, le 20 mai 2006Julien Devauchelle, Provençal, Plombier,Mickaël Dodard, dit Angevin, Menuisier,Floryan Vicq, Normand, Charpentier.Cologne, le 20 mai 2006Florent André, dit Picard, Maréchal-Ferrant.Dijon, le 20 mai 2006Julien Payen, Manceau, Couvreur,Simon Thillou, dit Poitevin, Serrurier Métallier.Nancy, le 20 mai 2006Gaétan Crouail, dit Bourguignon, Menuisier,Florent Garret, dit Franc-Comtois, Serrurier Métallier,Camille Gicquel, dit Breton, Tapissier,Thomas Lugand, Normand, Couvreur,Quentin Neyt, dit Ile-de-France, Tailleur de Pierre,Pierre Pannetier, dit Ile-de-France, Ebéniste.Nîmes, le 20 mai 2006Clément Avias, dit Vivarais, Boulanger,Nicolas Babel, dit Languedoc, Menuisier,Emmanuel Marcenac, dit Languedoc, Menuisier,Marius Melnikoff, dit Ardéchois, Sellier.Poitiers, le 20 mai 2006Laura Auvolat, dite Poitevine, Tapissier,Cédric de Rosso, dit Toulousain, Maçon,Jean-Aimé Douchy, dit Cévenol, Menuisier,Jérôme Perona, dit Provençal, Tailleur de Pierre,Maxime Vernaz, Breton, Couvreur.Rennes, le 20 mai 2006Vincent Balcon, Breton, Charpentier,David Fernandez, Bourguignon, Peintre,Jérôme Guedon, dit Poitevin, Chaudronnier,Alexis Perin, Breton, Charpentier,Aurélien Perroche, Angevin, Charpentier.Rodez, le 20 mai 2006Jean-Baptiste Duchene, dit Breton, Ebéniste,Cédric Foucaud, dit Breton, Menuisier,Jeremy Orge, dit Saintonge, Ebéniste,Nicolas Pain, dit Provençal, Menuisier.Saint-Etienne, le 20 mai 2006Guillaume Bernaud, dit Forézien, Menuisier,Guillaume Dincq, dit Ile-de-France, Menuisier,Fabien Madelenat, Ile-de-France, Plombier,Baptiste Pierson, dit Champagne, Menuisier.Saint Nazaire, le 20 mai 2006Charles Quinard, dit Breton, Paysagiste,Quentin Ruffin, dit Poitevin, Ebéniste.Saône, le 20 mai 2006Pierre-Yves Hauck, Alsacien, Couvreur,Michel Robert, dit Vosgien, Mécanicien Outilleur.Villaz, le 20 mai 2006Alban Berna, dit Auvergnat, Maçon,Gautier Deleuze, dit Provençal, Maçon.Wintzenheim, le 20 mai 2006Arnaud Loubet, dit Toulousain, Chaudronnier,Yves Scheer, Alsacien, Couvreur.Bruxelles, le 10 juin 2006David Ballot, dit Forézien, Menuisier,Julien Lemer, dit Tourangeau, Boulanger.Nîmes, le 10 juin 2006Florian Nicastro, dit Toulousain, Maçon,Romain Vergne, dit Picard, Paysagiste.

Saint-Etienne, le 10 juin 2006Benoît Coffin, Ile-de-France, Carrossier.Strasbourg, le 10 juin 2006Benoît Bailly, dit Provençal, Pâtissier,Philippe Comte, dit Ile-de-France, Boulanger,Guillaume Despert, Angevin, Plâtrier,Thomas Fouillet, dit Nantais, Ebéniste,André Reynaud, Alsacien, Couvreur,Othmane Ziani, Provençal, Plombier.Villaz, le 10 juin 2006Adrien Ollagnier, dit Lyonnais, Maçon.Rodez, le 16 juin 2006Laurent Peyrot, Lyonnais, Plombier.

Compagnon du Devoir se fait un plaisir de présenter au Tour de France les Aspirants adoptés à :

RÉCEPTIONSLe corps de métier des Compagnons Menuisiers du Devoir est heureux de faire part au Tour de France de la Réception à :- Angers, le 21 janvier 2006, à l’occasion de la fête

de Noël, du Compagnon Sébastien Rince, Sébastien le Nantais,

- Toulouse, le 29 avril 2006, à l’occasion de la fête de Pâques, du Compagnon Pierre Lenain, Pierre l’Ile-de-France,

- Nîmes, le 6 mai 2006, à l’occasion de la fête de Pâques, du Compagnon Alexandre Bilski, Alexandre le Provençal,

- Rennes, le 6 mai 2006, à l’occasion de la fête de Pâques, des Compagnons Paul Carissant, Paul-Olivier le Rennais, Sylvain Sorge, Sylvain le Bordelais, Marc Spieser, Marc le Lorrain, Florent Renaud, Florent le Saintonge,

- Angers, le 20 mai 2006, à l’occasion de la fête de Pâques, des Compagnons Christophe Le Duff, Christophe le Breton et Yannick Senechal, Yannick le Breton,

- Périgueux, le 10 juin 2006, à l’occasion de la Sainte-Anne, des Compagnons Jérémie Combalot, Jérémie le Dauphiné, Romain Ferrus, Romain le Dauphiné et Arnaud Savry, Arnaud le Champagne,

- Toulouse, le 10 juin 2006, à l’occasion de la Sainte-Anne, du Compagnon Julien Gauthier, Julien le Quimper.

La fête de l’Ascension fut l ’occasion pour les Compagnons passants Couvreurs du Devoir de la Province d’Angers de Recevoir, le 10 juin 2006, les Coteries Thomas Demelle, Toulousain la Clef des Cœurs et Jean-Baptiste Menu, Berry Cœur Vaillant.

Le corps de métier des Compagnons Boulangers Pâtissiers du Devoir fait part au Tour de France de la Réception à Toulouse, le 30 avril 2006, à l’occasion de la fête de Pâques, du Compagnon Boulanger du Devoir Guillaume Carmantrand, Champagne le Franc Dévoué, et du Compagnon Pâtissier du Devoir Gilles Heron, Provençal le Franc Courage.

Le corps de métier des Compagnons Plombiers du Devoir est heureux de présenter au Tour de France trois nouveaux enfants du Père Soubise reçus à l’occasion de la fête de l’Ascension, le Compagnon Timothy Hemery, Landais la Sérénité, le 27 mai 2006, à Strasbourg, et les Compagnons Benjamin Boulet, Nivernais la Générosité et Raphaël Castel, Dauphiné Va Sans Crainte, le 10 juin 2006, à Angers.

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DÉCèSC’est un adieu au Compagnon Henri Chaminade, Périgord l’Ami du Trait, une reconnaissance qui lui sont ici adressés au travers de son épouse et de ses enfants, de la part de ses amis et de ses frères en Devoir, pour tout ce qu’il leur a légué du meilleur de lui-même, durant son passage sur cette terre de Provence qu’il a tant aimée et qu’il a servie de son mieux.

Je lui dédie cette poésie inspirée par Doria Lussier, intitulée « Le chantier de notre vie ».

Là où l’on construit une maison,Un foyer, un chantier,Dans la cité des hommes, Là où le bois chante sous la main du charpentier,Compagnon et artisan de métier,Là est l’homme vrai, toujours en recherche de sens et de vérité.Pendant des mois et des mois,On ne voit que des échafaudages,Et tout le désordre apparentQui accompagne toujours les travaux : Bras de grues, matériaux entassés,

Câbles et tuyaux, machines en tous genres.Et puis, un beau jour, tout cela disparaît,Et où l’on s’était habitué à ne voir que désordre, Se dresse soudain un bâtiment, net, pur,Qui affirme sa présenceEt qui prend sa place dans le quartier,Comme une personnalité nouvelle.Nos vies ressemblent à ce chantier.À travers toutes nos allées et venues, À travers nos paroles, nos démarches,Nos actes grands et petits,On ne voit que le chantier et son apparent désordre.

Puis, un jour, vient la mort.Et ce n’est pas, comme on croît, la ruine du bâtiment :C’est seulement la disparition des échafaudages.Et alors, au contraire, le bâtiment paraît notre vie,Telle que nous l’avons faite,Dépouillée de tous les détails,Ne montrant plus que ses lignes essentielles,Dressant sa silhouette authentique,Prenant sa place dans le quartier de l’éternité.

Périgord l’Ami du Trait croyait à cette éternité.Il croyait à la vie, à ce monde,Et à l’esprit qui anime nos corps et nos âmes.Il était devenu, au cours des temps,Et au travers de ses multiples engagements,Une des pierres angulaires du nouveau Compagnonnage,D’un métier en pleine évolutionEt d’une tradition qui se perpétue, de jour en jour, auprès d’une nouvelle jeunesse, Qui, selon nos usages, continuera à faire preuve de création et de fraternité.

Ce jour est un jour de tristesse mais aussi d’espérance pour le devenir de nos métiers.

Merci à toi Périgord l’Ami du Trait.

André RivièreAndré le TourangeauCompagnon Menuisier du DevoirProvince de Marseille, 6 juin 2006

MARIAGESElodie et Gauthier Martin, Gauthier le Catalan, Compagnon Serrurier du Devoir, sont heureux de faire part au Tour de France de leur mariage célébré le 27 mai 2006, à Perpignan.

Patricia et Gaétan Roubin, Forézien la Persévérance, Compagnon Plombier du Devoir sont heureux de vous annoncer leur mariage célébré le 3 juin 2006, en l’église de la Terrasse, à Saint-Priest en Jarez.

NAISSANCESLe Compagnon Menuisier du Devoir Dany Brulin, Dany l’Artésien, et son épouse Pascale sont heureux de faire part au Tour de France de la naissance de Ewald, le 28 avril 2006. La maman et l’enfant se portent bien et les grands frères sont ravis.

Coline et ses parents, Virginie et Raphaël Juge, Le Bon Cœur de Doizieux, Compagnon Plâtrier du Devoir, sont heureux de faire part au Tour de France de la naissance de Noah, le 2 mai 2006, à Martigues.

compagnonscarnet (suite)

compagnonnage et réflexion

Assemblée Générale de l’A.O.C.D.T.F. à Kerpen

Luc l’Ardennais

C ette assemblée, dite générale, ne pouvait mieu x s’ int itu ler. En ef fet , sous l’impulsion du Premier Conseiller de

l ’Association ouvrière, le Compagnon Michel Guisembert, étaient venus pour nos travaux le Conseil d’Orientation ainsi qu’une vingtaine de jeunes itinérants voyageant dans notre belle province d’Allemagne.

Pour rappel, le Conseil d’Orientation se réunit environ tous les trimestres et se compose des Provinciaux, des délégués de métiers et, bien sûr, du Conseil du Compagnonnage.

Le Conseil d ’Orientation, qui a pour usage de se réunir dans une de nos provinces, était invité pour ces deux jours à se rendre dans celle d’Allemagne afin de faire le point sur l’activité de cette dernière.

La première journée de travail fut consacrée aux travaux du Conseil d’Orientation puis, en fin

d’après-midi, un intervenant exposait la situation actuelle de l’artisanat et de l’économie en Rhénanie du Nord.

La soirée se passa, comme à l ’accoutumée en Allemagne, dans une brasserie de Cologne.

La seconde journée, le Provincial nous souhaitait la bienvenue et laissait rapidement la parole au Compagnon Adam, prévôt d’Allemagne. Celui-ci rappelait l’ordre du jour et insistait sur le respect des horaires. En effet, les membres du conseil d’orientation devaient reprendre le bus à destination de Cologne pour onze heures. Hormis ces derniers, notre Mère nous honorait de sa présence, entourée des Compagnons sédentaires de la province d’Allemagne.

La parole était donnée à nos itinérants qui nous faisaient part de leurs expériences dans notre province et en Autriche. Dans le même temps, des photographies d’ouvrages exécutés par les différents métiers nous étaient projetées.

Ce fut le Compagnon Charpentier qui commença, indiquant que son séjour avait débuté à Cologne puis s’était poursuivi à Münster comme le veut l’usage chez nos Soubises germaniques. Ses deux employeurs ont des effectifs respectifs de vingt et soixante-dix personnes. Entre autres ouvrages de charpenterie, notre Coterie a réalisé du pan de bois. Il loge en colocation et se déclara tout simplement enchanté de son séjour.

Intervint ensuite Benoît, stagiaire tailleur de pierre. Il se trouve à Grima, au sud-est de Berlin. Côté travail, c’est de la restauration. Le Coterie évoqua les différences de pierre entre nos deux pays mais aussi les façons de faire. Il avait à l’origine souhaité faire une expérience en territoire anglo-saxon, mais s’avoue fort satisfait de son séjour à Berlin. Il rencontre les Compagnons une fois par mois dans cette même ville. Benoît loge à l’entreprise. Son expérience, si particulière, suscite de nombreuses questions, notamment sur la vie communautaire inexistante et sur l ’Adoption. Le contexte est

les 9 et 10 décembre 2005

Suite page 14

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différent de celui d’une Maison du Tour de France, néanmoins le Coterie retrouve mensuellement le noyau compagnonnal de Berlin, jeunes et Anciens réunis. De plus, nos itinérants communiquent aisément grâce aux techniques de notre société actuelle. Quant à l’Adoption, notre stagiaire sait de quoi il s’agit et s’y prépare doucement.

Ce fut ensuite Champagne, Aspirant plombier, qui nous présenta son séjour purement colognais. L’entreprise est de tradition et emploie des Coteries depuis près de dix ans. Le métier est différent et c’est tant mieux. Champagne vit en colocation. Côté culture, il n’hésite pas à passer les frontières des nombreux pays voisins et cela en compagnie d’autres itinérants.

Après son intervention, le métier de la taille de pierre était de nouveau à l’honneur. Ce fut au tour d’Ile-de-France, très « locker », comme l’on dit chez nous, très décontracté, de nous raconter son périple depuis la Slovénie jusqu’à Cologne. Il nous fi t part de ses remarques sur l’esprit de corps régnant dans l’entreprise ainsi que sur la rigueur, facteur d’effi cacité. Pour terminer son intervention, le Coterie nous dit combien la vie d’une Maison lui manquait, un sentiment rarement exprimé !

Expérience peu commune également que celle d’Alsacien, Aspirant Menuisier, qui séjourne actuellement dans une bourgade du Baden-Würtemberg, jumelée avec son village natal. Cela ne tient pas du hasard. Le Pays avait pris ses dispositions. L’entreprise qui l’accueille emploie soixante-dix personnes, et est spécialisée dans l’agencement. Alsacien s’est retrouvé chef d’équipe au poste de montage. L’atelier est équipé de machines à commandes numériques. Le Pays se trouve impressionné par la technique allemande ainsi que par la rigueur du personnel. C’est en colocation que loge Alsacien. Les activités majeures de la région sont la fabrication de céramique et la mécanique de précision.

Le Tour d’Allemagne se poursuivait avec le récit de deux Pays mécaniciens outilleurs, un Aspirant et un stagiaire qui voyagent en Bavière. Nos Pays mettaient l’accent sur les diffi cultés linguistiques. Conscients que la maîtrise de la langue ouvre de nouvelles perspectives sur le séjour, ils bénéfi cient de cours off erts par leur employeur. Celui-ci leur a d’ailleurs réservé un accueil chaleureux. Nos Bavarois profi tent bien de leur séjour, appréciant tout particulièrement la disponibilité de leur chef d’atelier pour leur expliquer le fonctionnement de machines à commandes numériques. Le stagiaire envisage de postuler à l’Adoption, cela en concertation avec ses aînés qu’il rencontre régulièrement. Ce Pays, à cause de vieux clichés sur l’Allemagne, ne pensait pas venir y séjourner. Il espère pouvoir de nouveau partir à l’étranger.

De Munich, nous sommes repartis à Berlin où Alsacien, Aspirant Menuisier, travaille dans une entreprise d’agencement. La majorité des clients se trouve en Allemagne de l’Ouest. Le Pays est fasciné par la capitale qui compte de nombreux espaces verts et lacs.

Voyageons encore avec cet Aspirant Maçon, arrivé en septembre à Berlin, qui nous dit y avoir subi le chômage et être parti pour Karlsruhe. Là, la médiocrité du travail le décidera à rejoindre de nouveau la capitale dans sa partie Nord, à Neurepin. Il logera en famille d’accueil et son

travail sera celui de briquetier. L’entreprise fermant en hiver, i l embauchera dans une nouvelle ville, Leipzig. Il s’apprête à rejoindre la Suisse Romande où quelques amis pourront l ’aider. Notre Coterie sou l ig nera les d i f férences de dialectes mais confiera s’être attendu toutefois à plus de clivages entre l’Est et l’Ouest.

Ce fut Nantais , Aspirant Charpentier, qui termina ce voyage. Il travaille sur Cologne et loge en colocation, à deux minutes de l’entreprise, e t découv re les joies de la cu isine fa ite « maison ». Côté travail, c’est très varié, il sent une nette différence avec la France tant sur les matériaux (sections plus fortes) que sur les quincailleries et, bien sûr, sur la façon de faire. Il est fort satisfait de son expérience.

Suite à ces témoignages, les Compagnons firent part de leur enthousiasme. Nous avons là le début d’un nouveau Compagnonnage.

Un Compagnon s’exprima ainsi : « Vous nous donnez une leçon de souplesse, l ’exemple de l’adaptation. C’est une richesse que de pouvoir envisager le Compagnonnage autrement. »

A propos d’Adoption à l’étranger, le Compagnon Renier invitait les délégués de métiers à se prononcer pour plus de f lexibilité. Propos repris par d’autres Compagnons afin d’encourager les

Sédentaires d’Allemagne à prendre les devants en la matière et ainsi acquérir une certaine liberté pour adopter leurs stagiaires.

Le Premier Conseiller aura ces mots à notre intention : « Vous aurez peut-être un jour à nous montrer ce que vous vivez. Rien ne dit que la France ne vive pas cela. Faites-vous inviter dans les congrès de métiers. Tendez la main vers ceux qui se sont éloignés. Cela ne peut que grandir le Compagnonnage. »

Un Compagnon s’enquérait du fait que les Sédentaires d ’Al lemagne ont besoin, pour améliorer le voyage, de leurs jeunes. Plusieurs thèmes étaient alors abordés par le président de l’Assemblée :

■ L’étalement des changements de ville au gré des besoins des métiers, ce qui favoriserait la mobilité. On envisage en France 4 ou 5 changements de ville différents.

■ Un bagage l inguist ique conséquent était de nouveau souhaité par les Compagnons

allemands. Nous avions déjà évoqué cet aspect lors d ’une rencontre avec les délégués des charpentiers et des menuisiers.

■ Le Conseiller au Tour de France proposait qu’un corps de métier comme celui des menuisiers mette en place une action visant à ce que les jeunes apprennent une langue en amont. Le Compagnon Frouin rappelait simplement ce principe de bon sens : apprendre la langue du pays où l’on vit.

Le Compagnon Adam s’exprimait alors sur le voyage dans les pays à langue germanique : « Des jeunes furent envoyés en Autriche notamment parce que l’embauche y est bien plus fl orissante qu’en Allemagne. L’idée de faire six mois en Allemagne et six mois en Autriche fait son chemin, cela serait plus attrayant que l’Allemagne comme destination unique. Quant au Luxembourg et à la Suisse Romande, il n’y a encore rien de planifi é. » Le prévôt terminait son propos en souhaitant que l’on change l’image fi gée de l’Allemagne.

Cette assemblée générale fut particulière en bien des points. Nous avons pu apprécier le progrès de nos actions depuis la fermeture de notre Maison. Cela devient presque une coutume d‘avoir, à chaque rencontre importante de l A.O.C.D.e.V., le Conseil à nos côtés. Qu il soit ici remercié pour sa constance.

Nous sommes confondus par les encouragements qui nous furent adressés. Des plus émouvants furent les témoignages de nos jeunes, nous expliquant avec quelle facilité l’on peut s’adapter.

Nous avons pu débattre de l’Adoption dans nos contrées éloignées, souhaitons et engageons-nous à en reparler l’année prochaine, comme d’un usage bien de chez nous.

Luc DuvalLuc l’ArdennaisCompagnon Menuisier du DevoirSecrétaire de Province d’Allemagne

La parole était donnée à nos itinérants qui nous faisaient part de leurs expériences dans notre province et en Autriche.

A propos d’Adoption à l’étranger, le Compagnon Renier invitait les délégués de métiers à se prononcer pour plus de flexibilité.

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voyage et découverte

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A la découvertede la Norvège

Albigeois

L a Norvège est un pays qui, si on l ’examine d’un point de vue artistique ou culturel, semble

bien éloigné du reste de l’Europe. Pourtant, la culture bois y est très riche et pour tout homme travaillant le bois sa découverte est essentielle.

Etant menuisier de mon état , plus exactement Aspirant Menuisier, je me devais d’aller à sa rencontre et c’est ce que je fi s après que les Compagnons de la Chambre de Brest m’en aient donné l’autorisation. A ce sujet, il faut rappeler que les Compagnons du Devoir encouragent toujours les jeunes itinérants à ouvrir leur Tour de France au monde.

Muni de ce sésame, il me restait une chose à faire et non des moindres : me perfectionner en anglais car mon niveau ne me permettait pas d’engager dans cette langue la moindre discussion. J’encourage d’ailleurs tous les jeunes désirant partir à l’étranger à ne pas négliger cette matière lors de leur cursus scolaire car elle est essentielle à la bonne intégration en terre étrangère.

Aussi, quelques cours ayant amélioré ma pratique de l’anglais, me voici parti pour un an et trois mois en pays scandinave. Je parle à la première personne du singulier mais en fait nous sommes deux, le Pays Gilles Perrier, Gilles le Manceau, Compagnon Menuisier du Devoir, m’accompagne. Lui aussi est désireux de connaître le pays des Vikings. A Bergen, nous sommes accueillis par le Pays Damien Boisanfray, dit Normand. Il restera trois semaines avec nous pour nous familiariser avec le travail qu’il nous a trouvé et nous aider dans les démarches administratives indispensables.

Bergen est une ville portuaire. Adossée à une colline, toute son activité se concentre autour de son petit port bien protégé. La ville fut créée au XIe siècle. Elle est riche de son histoire et de ses traditions. Bien que très arrosée, elle est peut-être aussi la ville la plus agréable du pays. D’ailleurs, je vous rassure, j’ai eu l’occasion entre deux averses de la voir sous le soleil.

En Norvège, le temps peut être très beau, très chaud pendant plusieurs jours puis subir en un clin d’œil une grosse baisse de température. Cela fait partie du charme du pays ! Bien sûr, on ne part pas dans les pays nordiques pour pouvoir exhiber à son retour un bronzage à faire pâlir d’envie. Bon, en Norvège, le soleil est un peu capricieux mais lorsqu’il se montre, il ne compte pas ses rayons et éclabousse tout, partout et même la nuit. C’est ainsi que plusieurs fois je me suis retrouvé surpris qu’il soit cinq heures du matin alors que je pensais que la nuit n’était pas encore tombée. Au début, cela surprend mais ensuite l’on s’habitue et c’est très agréable car l’on peut ainsi, le soir venu, visiter la ville sous une très jolie lumière et prendre un petit apéritif avec comme décor un superbe coucher de soleil sur le fj ord.

A ce propos, attention avec l’alcool en Norvège. Car si la semaine, les Norvégiens ne consomment pas trop d’alcool, à partir du vendredi soir, hommes et femmes, jeunes et vieux, riches et pauvres, ensemble, sortent et dansent et surtout boivent et reboivent. Et, comme ailleurs, au bout d’un certain temps, l’alcool échauff e les esprits. Cependant, à la diff érence de beaucoup de peuples, les Norvégiens n’en deviennent pas agressifs pour autant, sans doute l’héritage de la culture Viking ! Encore un mot sur ce sujet, il faut être âgé de dix-huit ans pour avoir le droit de consommer du vin et de vingt ans pour les alcools forts qui ne peuvent d’ailleurs pas être servis avant treize heures.

Bien évidemment, ainsi que je vous le disais précédemment, je suis parti en Norvège pour sa culture du bois mais aussi pour y admirer la nature et là je n’ai pas été déçu. Etant depuis presque un an dans le pays, j’ai pu voir les fj ords sous les quatre saisons. Au printemps, j’ai pu admirer la fl oraison des arbres fruitiers près des cascades et, l’automne venu, le merveilleux paysage des fj ords qui se colorent de couleurs inoubliables. Je me suis également rendu compte que tant la fl ore que la faune dominent toute la Norvège.

Le réseau routier étant dangereux à cause des nombreux virages et tunnels et les routes n’étant pas larges, on est obligé de rouler doucement et c’est tant mieux car il y a tant de choses à voir que l’on ne s’ennuie pas. J’ai réellement vu en roulant de très beaux paysages qui sont entrés

dans ma mémoire pour ne jamais en ressortir. J’ai aussi visité plein de petits villages typiquement norvégiens. On s’aperçoit à ce moment que le patrimoine architectural est très riche. J’ai pu voir la célèbre église de Vik, tout en bois debout. Elle fut construite au XIIe siècle mais l’extérieur en a été refait en 1895. A l’intérieur, c’est à vous couper le souffl e. Des colonnes massives soutiennent la toiture et chacune d’elles porte un chapiteau dont la base est en forme de cloche. L’église renferme également de très belles sculptures.

Carte d’identité

Super� cie 324 230 km2Longueur 1 752 kmLargeur de 6 à 430 kmCapitale OsloPopulation 4 514 000 hab.Monnaie Couronne norvégienneLangue Norvégien avec deux variantes

le bokmal et le nynorskRégime Monarchie parlementaire Harald V règne depuis 1991Chef du gouvernement Kjell Magne BondevikReligion Luthérienne à 88 %Fête nationale 7 mai

Norvège

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Nous savons que la tradition architecturale européenne est née de l ’architecture de bois, la Norvège n’est donc pas la seule concernée ; par contre, à la diff érence des pays de la communauté européenne, la Norvège a conservé cette technique de construction moyenâgeuse et n’a jamais cessé de l’utiliser, les Norvégiens ont donc une responsabilité particulière dans la préservation de cette partie de leur héritage.

Les toute premières constructions de Bergen furent établies sur les quais, à Bryggen, quartier qui au fil des siècles a conservé ses dénominations : « animé » et « central ». Il est en Norvège l’un des quartiers urbains les plus renommés de l’époque médiévale et cela est dû à la Ligue Hanséatique, association professionnelle de marchands allemands de la Hanse, qui en 1360 a établi ses comptoirs à Bryggen et qui durant quatre siècles va dominer ce quartier de la ville.

Aujourd’hui Bryggen a été classé « Patrimoine de l’Humanité » par l’Unesco. Ce quartier a pourtant été ravagé par les incendies à de nombreuses reprises, notamment par celui de 1702 qui, particulièrement dévastateur, le réduisit en cendres. Sa reconstruction eut lieu à l’identique de ce qu’il avait été. C’est de nos jours un quartier essentiellement touristique avec nombre de restaurants et de boutiques en tout genre.

Bergen ne se résume pas à ce quartier et le « vieux Bergen » est à mon avis tout aussi charmant avec ses ruelles étroites et ses maisonnettes en bois.

Beaucoup datent des XVIIe et XVIIIe siècles et ont été soigneusement restaurées au cours des dernières décennies.

À Bergen, le port est le cœur de la ville. Torget (le nom de ce quartier) jouit d’une grande renommée par son inoubliable marché aux poissons situé à l’extrémité du port et où l’on peut acheter toutes sortes de poissons. Je n’ai pas hésité à déguster sur place des sandwiches au saumon et au crabe, qui n’ont rien à voir avec les célèbres Kebabs. Le saumon domine le marché mais l’on trouve également de la baleine, fumée ou non fumée, qui est en vente libre en Norvège. Sur le marché et aux alentours, des crieurs invitent le passant à venir en déguster une tranche ! Bien évidemment, je ne pouvais résister à la tentation et je peux vous dire que son goût est entre le poisson et le foie de volaille. La chasse à la baleine est en Norvège une activité traditionnelle (choquant, non !) et les pêcheurs se font un point d’honneur de le rappeler à tout arrivant dans la ville. En fait, la Norvège est un pays qui vit de la pêche et en est très fi ère.

Je terminerai ce petit aperçu de mon séjour à l’étranger par un encouragement à tous les Pays

et Coteries. Il ne faut pas craindre de franchir nos frontières car on ne le regrette pas. Bien sûr, le Tour de France est riche et apporte beaucoup mais la découverte d’un pays et de sa culture fait mûrir. Il est bon de voir ce qui se passe dans les autres pays, cela ouvre l’esprit. Aussi, je dis merci aux Compagnons. Il me reste quatre mois pour parfaire ma connaissance de la Norvège et de ses habitants, donc je vous laisse car l’aventure continue.

Sylvain Cougouledit AlbigeoisAspirant Menuisier

Journal mensuel de l’Association ouvrièredes Compagnons du Devoir du Tour de France

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En Norvège, le temps peut être très beau, très chaud pendant plusieurs jours puis subir en un clin d’œil une grosse baisse de température. Cela fait partie du charme du pays ! Bien sûr, on ne part pas dans les pays nordiques pour pouvoir exhiber à son retour un bronzage à faire pâlir d’envie.

Un peu d’histoireLes origines de ce peuple remonteraient à la fi n de la dernière période glaciaire. Il y a 6 000 ans, peut-être 8 000, voire 10 000, lorsque des peuplades commencent à occuper le terrain. En fait, l’histoire de la Norvège ne commence à être connue qu’à partir du IXe siècle avec l’arrivée des Vikings. Le XIIIe siècle marque l’âge d’or de la Norvège qui jouit d’une organisation et d’une culture très en avance par rapport au reste de la Scandinavie. C’est également l’époque de la construction des églises en bois sculpté. A partir du XIVe siècle, c’est le déclin, le commerce est détenu par les Allemands et la Hanse contrôle l’économie. La Norvège passe successivement aux mains de la Suède, puis du Danemark avant qu’elle n’entre dans l’Union de Kalmar (alliance conclue en 1397 entre les Royaumes de Danemark, de Suède et de Norvège). Le Luthéranisme s’installe. Il faudra attendre le début du XIXe siècle pour que renaisse une volonté nationale chez le peuple norvégien et l’année 1905 marquera l’avènement au trône de Norvège du roi Haakon VII, grand-père de l’actuel roi de Norvège Harald V.Aujourd’hui, la Norvège est l’un des pays du monde où le niveau de vie est le plus élevé, elle consacre énormément d’efforts à l’aide extérieure mais les Norvégiens n’ont toujours pas adhéré à l’Union européenne.