Commentaire littéral de la somme Théologique - RP Thomas Pègues (Tome 19)

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    COMMENTAIRE FRANAIS LITTRAL

    SOMME THOLOGIQUESAINT THOMAS D'AQUIN

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    Droilx fie Iraduction et de reprodiirlinn r/^ervspour loiis pays.

    Copyright by Edouard Privt, 1930.

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    R. P. Thomas PGUES. 0. P.MATRE EN THOLOGIEMEMBRE DE l'aCADMIE ROMAINE DE SAIN T-T H O M A S-D ' A Q f 1 N

    PROFESSEUR DE SAINT THOMAS AU COLLEGE ANGLIQUE (ROME)

    COMMENTAIRE FRANAIS LITTRAL

    SOMME THOLOGIQUESAINT THOMAS D'AQUIN

    XIX

    LES SA^CREIMENTSPNITENCE EXTRME-ONCTION

    (Saint Jean DaniHSi'ne)

    TOULOUSEDOUAUD PKI VA

    MHRAIRK'UITKtKI 'j, UK DKS AUT8, I i-

    PAIUSPIKKKK TCJLl

    MIIHAIRI-: KDITKUK8j. kuk honapaute, 8j.

    1930

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    NUI IL OBSTAT :Fm. Antomn CICOIRA,

    Dos Frt'iTs-I'rcheurs.

    Fk. Albert ZLCCHI,Des Frres-Prcheurs.

    IMPRIMATUR :Rome, 7 mars igSo.

    Fr. Louis FANFAM,Prieur Provincial.

    Toulouse, 25 mars igSo.J. DLIES,

    Vie. gn.AUG 3 1953

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    AVANT-PROPOS

    Ce tome XIX de notre Commentaire franais litiral de laSomme thologiqae continue la partie de la Somme qui trai-tait des sacrements. Elle n*a pas t acheve par le saintDocteur. Et le prsent volume de notre Commentaire mar-que la transition de la partie rdige par saint Thomas celle qui a t ajoute sous le nom de Sapplment. Xousdonnerons, au moment mme, les explications requises ce sujet.

    Qu'il nous suffise, ici, d'avertir nos lecteurs que mme leSupplment appartient saint Thomas. Tous les articles quile composent ont t pris dans l'uvre du saint Docteurqui fut sa premire uvre thologique et qu'on dsignesous le nom de Commentaire sur les Sentences. C'est donctoujours saint Thomas que nous entendrons et que nouslirons en lisant le Supplment. Et s'il est vrai, comme nousaurons le dire, que la premire uvre du saint Docteurn'a pas la plnitude de perfection qui devait tre celle de laSomme thotogique, c'est toujours sa doctrine qu'elle exposeet qui, sauf de rares exceptions, est toujours demeure lamme depuis le premier moment o saint Thomas com-mena d'enseigner.Dans la Somme, saint Thomas tait arriv au trait du sa-

    crement de pnitence. Les sept premires questions de cetrait avaient t rdiges par le saint Docteur quanil son

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    VIII AVANT-PROPOS.travail fut interrompu par la mort. Les autres questions quicompltent ce trait de la pnitence ont t prises dans leCommentaire des Sentences et forment le dbut du Suppt-ment. Elles seront suivies, dans notre prsent volume, desquestions qui forment le trait de rExtrme-Onction.

    Le prochain volume, dont le manuscrit est dj l'im-pression et qui, nous l'esprons, ne tardera pas paratre,comprendra les deux traits de l'Ordre et du Mariage, quitermineront la partie sacramentelle.

    Il ne restera plus qu'un dernier volume paratre, celuide la Rsurrection, qui sera le digne couronnement de toutel'uvre du saint Docteur.Que nos lecteurs veuillent bien nous continuer le secours

    de leurs prires pour que l'uvre de notre Commentaire,entreprise sous les auspices de saint Thomas, il y a plusde vingt-cinq ans, puisse tre mene bonne fin par sonintercession.

    Pistoia, Couvent de Saint-Dominique,7 mars 1980,

    en la fte de saint Thomas d'Aquin.

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    LA SOMME THOLOCxIQUETROISIEME PARTIE

    Dans sa division du Irail des sacrements considrs enparticulier, saint Thomas nous avait annonc qu'aprs le traitde l'Eucharistie viendrait le trait de la Pnitence. C'est qu'eneffet, les trois premiers sacrements que nous avons dj tudis,le baptme, la confirmation et l'Eucharistie, avaient trait lapromotion de la vie spirituelle chrlienne dans l'individu,quant ce qui est, de soi, requis ou ncessaire pour l'existence,la perfection et la conservation de celle vie. Par le baptme,l'individu humain nat la vie chrtienne; par la confirma-tion, il y grandit; par l'Eucharistie, il s'y conserve. Et si unefois tabli dans la vie chrlienne, lindividu humain ne pou-vait plus la perdre, tout serait dit dsormais dans l'ordre dessacrements destins promou\oir l'individu humain dans cellevie. Nous n'aurions pas d'autre sacrement tudier de cechef.

    Mais il n'en est pas de la sorte. Nous avons dj dit et nousaurons le redire au cours du nouveau trait que nous abor-dons, quelque parfaite que soit, dans l'individu humain bap-tis, confirm et nourri spirituellement par l'Eucharistie, lavie chrtienne que lui ont assur ces premiers sacrements, ildemeure toujours possible, tant que linilividu humain vit surcelte terre, que la vie chilienne dont il jouit, se perde par lepch. Ds lors, il tait ncessaire que deux autres sacrementsfussent institus : l'un, pour lui rendre celte vie, quand il l'a

    T. \l\. Les Sacreinenis : Lu Piiilence. i

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    SOMME TUEOLOGIQUl.perdue; raulre, pour le rtablir dans la perfection de cellevie ainsi retrouve. Ces deux sacrements s'appellent la pni-tence et rExtreme-Onction.

    Aussi bien, aprs avoir trait du baplnie, de la confirma-lion et de l'Eucharistie, nous devons consquemment traitermaintenant du sacrement de pnitence .

    Et, ce sujet, poursuit saint Thomas, nous aurons trai-ter : premirement, de la pnitence elle-mme (questions 8'i et85); deuximement, de son eflet (q. 8G-89) ; troisimement, deses parties (q. 90 ; et, dans le supplment, q. i-i5) ; quatrime-ment, de ceux qui reoivent ce sacrement (q. 16); cinquime-ment, du pouvoir des ministres ou du pouvoir des cls (q. 17-27); siximement, du rite solennel de ce sacrement ,ou de la pnitence publique (q. 28).Comme on le voit par le chiffre des questions indiqu lasuite de chacune des subdivisions marques par saint Thomas,si tout le sommaire a l fait par le saint Docteur au momento il crivait celle dernire partie de la Somme Ihologiqne, iln'a pu raliser que les deux premires sections. Il commenaitla troisime et venait d'en crire la premire question, quandil s'est arrt dans son travail. Nous savons, par le tmoignagedes contemporains, notamment de Fr. Rginald, son compa-gnon, que le saint Docteur cessa d'crire aprs la fameusevision dont il avait t favoris pendant qu'il clbrait le saintsacrifice de la messe, Naples, dans la chapelle de Saint-Nico-las, le jour mme de la fte de ce saint, le (j dcembre 1273.Toute la fin de la Somme qu'il laissa inacheve fut supplepar le Fr. Rginald lui-mme, qui, pntr de l'esprit du Ma-Ire, s'en alla chercher, dans le Commentaire sur les Sentences,les questions et les trails qui correspondaient au plan tracpar le saint Docteur.Nous allons voir, d'abord, les six questions crites ou dictes

    ici par saint Thomas ; nous verrons ensuite les questions duSupplment empruntes au Commentaire sur les Sentences.

    Au sujet de la pnitence elle-mme , faisant l'objet desquestions 8/1, 85, saint Thomas nous avertit que nous'avons considrer deux choses: premirement, la pnitence, en tant

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    LE SACREMENT DE PE.MTENCE. Oqu'elle est un sacrement; secondement, la pnitence en tantqu'elle est une vertu . La considration de la pnitence commevertu vient aprs la considration du sacrement, parce quenous sommes ici dans le trait des sacrements et que c'est enfonction de la pnitence comme sacrement que nous ludionsla pnitence comme vertu.

    C'est donc de la pnitence comme sacrement que nous de-vons d'abord nous occuper. El tel est l'objet de la questionsuivante.

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    QUESTION LXXXIVDE L\ PENITENCE SELON QU'ELLE EST UN SACREMENT

    Cette question comprend dix articles :1 Si la pnitence est un sacremcnl .'2 De la matire propre de ce sacremcnl,H" De sa forme.A Si l'imposition dos mains est requise pour ce sacrement ?5" Si ce sacrement est do ncessite de salut !'{')" De l'ordre de ce sacrement aux autres sacrements.7 De son institution.8 De sa dure.9 De sa continuit,

    lo" S'il peut tre ritr?

    L'ordre de ces dix articles apparat de lui-mme. Venonsdonc tout de suite l'article premier.

    Article Premier.

    Si la pnitence est un sacrement?Trois objections veulent prouver que^ la pnitence n'est

    pas un sacrement . La premire apporte un texte que saintThomas attribuait saint Grgoire et qui est de saint Isidore,au livre VI des lymologles, ch. xix, o il est dit, et on letrouve dans les Dcrets (I, q. i) : Les sacremenls sont le bap-tme, le chrme, le corps et le sang du Christ : on les dit sacre-ments, parce que sous le voile de choses corporelles la vertu divineopre au i)lus intime le salut. Or, cela n'arrive pas dans la pni-tence; car on n'y trouve pas des choses corporelles .sous les-quelles la vertu divine opre le salut. Donc la pnitence n'est|)as un sacrement . La deuxime objection dit que u les

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    Q. LXXXIV. LA PNITENCE SELON QU'eLLE EST UN SACREMENT. 5sacrements de l'glise sont confrs par les ministres du Christ,selon cette parole de la premire ptre aux Corinthiens, ch. iv(v. i) : Que rhomme nous considre comme les ministres du Christet les dispensateurs des mystres de Dieu. Or, la pnitence n'estpas donne par les ministres du Christ, mais elle est inspireintrieurement aux hommes par Dieu, selon celte parole deJrmie, ch. xxxi (v. 19) : Aprs que tu m'as converti, fai faitpnitence. Donc il semble que la pnitence n'est pas un sacre-jjjent . La troisime objection fait observer que dans lessacrements dont nous avons parl plus haut , savoir dans lebaptme, la confirmation et l'Eucharistie, il est quelquechose qui est sacrement seulement; quelque chose, qui estchose et sacrement; et quelque chose, qui est chose seulement,comme il ressort de ce qui a t dit auparavant (q. 60, art i ;q. 73, art. i, ad 3""')- Or, cela ne se trouve pas dans la pni-tence. Donc la pnitence n'est pas un sacrement .

    L'argument sed contra dclare que comme le baptme estdonn pour purifier du pch; de mme aussi la pnitence :et c'est pourquoi Pierre dit Simon le Mage, dans lesActes, ch. vin (v. 22) : fais pnitence de cette malice qui est tatienne. Or, le baptme est un sacrement; comme il a t ditplus haut (q. 65, art. 1). Donc, pour la mme raison, la pni-tence aussi .Au corps de l'article, saint Thomas rpond que comme

    saint Grgoire (saint Isidore) le dit, au chapitre marqu plushaut, te sacrement est dans une certaine clbration quand la chose(jui se pratique est Jaite en vue de nous amener accepter, sous lachose qui signifie, la chose sainte qu ilfaut accepter. Ov, il est mani-feste que dans la pnitence la chose qui se pratique est faiteen telle sorte (lu'elle signifie quelque chose de saint, soit ducot du pcheur pnitent, soit du cot du prtre qui absout.Le pcheur pnitent, en elVet, par les choses qu'il fait et qu'ildit, signifie que son cur s'est loign du pcli ; el, pareille-ment aussi, le prtre, par ce qu'il fait et qu'il dit l'endroit dupnitent, signifie l'uvre de Dieu qui remet le pch. D'oil suit manifestement que la pnitence qui se pratique dansr]lise est un sacrement . On aura remarqu comment,

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    6 SOMME TIIEOLOGIQUE.ds ce premier article, saint Thomas, du seul fait qu'il voquaitla pratique, si bien dcrite par lui, du chrtien venant deman-der au prtre l'absolution de ses pchs, qui constitue celamme que tout le monde, dans l'glise catholi(iue, appelle dunom de sacrement de pnitence, a su montrer qu'en effet, danscette pratique, tait ralis tout ce qui constitue l'essence d'unsacrement de la loi nouvelle : savoir quelque chose d'extrieurou de sensible qui porte et signifie la chose sainte par excel-lence, le recouvrement de la grce de Dieu, perdue par le pch.Vad prinuwi fait observer que sous le nom de choses cor-porelles, dans un sens large sont compris aussi les actes ext-

    rieurs eux-mmes sensibles, qui jouent, dans ce sacrement, lerle de l'eau dans le baptme ou du chrme dans la confirma-tion. Il est d'ailleurs remarquer que dans ces sacrements oest confre une grce excellente qui dpasse toute facult del'acte humain, on use d'une matire corporelle extrieure. Ainsien est-il dans le baptme, o se fuit la rmission plnire despchs quant la coulpe et quant la peine; et dans la confir-mation, o est donne la plnitude de l'Esprit-Saint ; et dansl'Extrme-Onclion, o est confre la parfaite sant spirituelle.Une telle grce provient de la vertu du Christ comme d'uncertain principe extrieur. Et c'est pourquoi si certains acteshumains se trouvent dans ces sacrements, ils ne font point partiede la matire de ces sacrements, mais ne sont qu'une dispositionaux sacrements. Dans ces sacrements, au contraire, qui ont uneffet correspondant aux actes humains, les actes humains sensi-bles sont eux-mmes au lieu et place de la matire ; comme ilarrive dans la pnitence et dans le mariage. C'est ainsi, du reste,que mme dans les remdes corporels, il en est qui sont deschoses extrieures qu'on emploie, tels les empltres et leslectuaires; et d'autres qui sont des actes de ceux qui doiventtre guris, comme certaines pratiques ou certains exercices .Vad secundam dit que dans les sacrements qui ont une

    matire corporelle, il faut que cette matire soit mise en uvrepar le ministre de l'Eglise qui reprsente la personne du Christ,pour signifier que l'excellence de la vertu qui opre dans lesacrement vient du Christ. Mais dans le sacrement de pni-

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    Q. LXXXIV. LA PENITENCE SELON QU ELLE EST UN SACREMENT. 7lence, comme il vient d'tre dit {ad /"'"), les actes humainstiennent lieu de matire; et ils procdent de l'inspiration int-rieure. Et, cause de cela, la matire n'est pas apporte par leministre, mais vient de Dieu qui agit l'intrieur. Toutefois,le complment du sacrement est apport par le ministre, alorsqu'il absout le pnitent .

    L\id tertlani dclare que mme dans la pnitence, il estquelque chose qui est sacrement seulement; savoir l'acte quiest fait soit par le pcheur pnitent, soit par le prtre quiabsout. La chose et le sacrement est la pnitence intrieure dupnitent. La chose seulement et non sacrement est la rmissiondu pch. De ces trois choses, la premire, prise dans son ensem-ble, est cause de la deuxime ; et la premire et la deuximesont cause de la troisime . On remarquera, dans cette der-nire observation de saint Thomas, que la pnitence intrieure,ou les sentiments du pcheur qui se repent, pour autant qu'ilssont parfaits et ont raison de sacrement cooprant la rmis-sion du pch, sont l'uvre ou l'ef'et du sacrement extrieurconstitu par les actes extrieurs du pnitent et l'absolution duprtre. Nous aurons souligner plus loin cette doctrine en cequi est de l'attrition du dbut change en contrition par lavertu du sacrement. Nous la trouvons dj formule par lesaint Docteur dans la rponse que nous venons de lire.

    La pnitence est un sacrement. Toute pratique rituelle ext-rieure o l'acte qui s'accomplit signifie et ralise un quelquechose ayant trait aux mystres de la grce qui assurent au fidledu Christ l'panouissement de sa vie chrtienne a laison desacrement dans la loi nouvelle. El tel est bien le cas de celteprati(|ue rituelle en usage dans l'Eglise catholi(iue, qui consisteen ce que le pcheur repentant vient s'adresser au prtre, luicotj fesse ses pchs, manifeste son regret de les avoir commis,son feiine propos de ne plus les commettre, et lui demande delui en accorder, au nom de Dieu, le pardon ; dmarche laquellele prtre lpond en accordant, en el'et, par l'absolution (ju'ilpiononce, le pardon demand. Nous avons dit que cette pra-tique rituelle a raison de sacrement de la loi nouvelle. Gomme,

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    8 SOMME TUKOLOGIQUE.d'aulrc part, les sacrements de la loi nouvelle ont tous unematire et une forme, il faut donc que nous assignions lamatire et la forme du sacrement de pnitence. Dj, dans lesrponses aux objections de l'article prcdent, saint Thomasnous a fait entrevoir que la matire de la pnitence se ratta-chait aux actes du pnilent lui-mme. Mais il importe de pr-ciser ce point de doctrine. Le saint Docteur \.a le faire l'article qui suit.

    Article II.Si les pchs sont la matire propre de ce sacrement ?

    Trois objections veulent prouver que les pchs ne sontpas la matire propre de ce sacrement . La premire ditque la matire, dans les autres sacrements, est sanctifie parcertaines paroles, et, ainsi sanctifie, elle opre l'effet du sacre-ment. Or, les pchs ne peuvent pas tre sanctifis; puisqu'ilssont contraires l'effet du sacrement, qui est la grce remet-tant les pchs. Donc les pchs ne sont pas la matire proprede ce sacrement o. - La deuxime objection est un mot de(( saint Augustin , qui, au livre De la pnitence, s'exprimeainsi : iSul ne peut commencer une vie nouvelle, s il ne se repentde son ancienne vie. Or, l'ancienne vie appartiennent non seu-lement les pchs, mais aussi les pnalits de la vie prsente.Donc les pchs ne sont pas la matire propre de la pnitence . La troisime objection prcise que parmi les pchs, il ya le pch originel, le pch mortel et le pch vniel. Or, lesacrement de pnitence n'est pas ordonn contre le pch ori-ginel, qui est enlev pur le baptme; ni, non plus, contre lepch vniel, qui est enlev par le fait de se fiapper la poi-trine, de prendre de l'eau bnite et autres pratiques du mmegenre. Donc les pchs ne sont pas la matire propre do cesacrement .

    L'argument sed contra oppose que l'Aptre dit, dans laseconde [)tre aux Corinthiens, ch. xii (v. i?i) : Ils ne firent

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    Q. I.WMV. l,A l'KMTENCE SELON QUELLE EST UN SACREMENT. Qpoint pnitence sur les souillures, les fornications, les impudicilsilont ils s'taient rendus coupables .Au corps de l'article, saint Tliomas, par une distinction trs

    approprie, va prparer la solution qui se dgagera d'elle-mme et dissipera la difficult, d'apparence insurmontable,que soulevaient les objections. Il nous avertit qu' il est unedouble matire : l'une, prochaine ; et l'autre, loigne. C'estainsi que la matire prochaine de la statue est le mtal ; et lamatire loigne, l'eau , d'oii le mtal est tir, u Or, il a tdit (art. i, ad 7'"" et ad 2""') que la matire prochaine de cesacrement sont les actes du pnitent. Et les actes du pnitentont eux-mmes pour matire les pchs dont il se repent, qu'ilconfesse, et pour lesquels il satisfait. 11 demeure donc que lamatire loigne de la pnitence sont les pchs, non pour trecommis, mais pour tre dtests et dtruits .Vad primuni fait remarquer que u l'objection procde de lamatire prochaine du sacrement : cette matire, en effet,n'est pas autre que les actes du pnitent. Mais les actes dupnitent ont, eux-mmes, pour matire, les pchs, qui sont,ainsi., la matire loigne du sacrement de pnitence.Vad secunduni fait observer que la vie ancienne et mor-telle , appele par saint Augustin la vieille vie qu'il oppose la nouvelle vie, est objet de la pnitence, non en raison dela peine, mais en raison de la coulpe unie la peine .Uad lertium dclare que la pnitence porte, en quelque

    sorte, sur tous les genres de pch, mais non de la mmemanire. Car, s'il s'agit du pch actuel morlel, la pnitenceporte sur lui proprement et principalement : proprementparce que, au sens propre, nous sommes dits faire pni-tence de ce que nous avons nous-mmes commis parnotre volont ; principalement, [)arce que c'est |)our effacei- lepch morlel que ce sacrement a t institu. S'il s'agit despchs vniels, la pnitence porte pn^premcnt sur eux, pourautant qu'ils sont produits par notre volont; mais ce n'estpoint contre eux principalement (pie ce sacrement a t ins-titue. Pour ce (|ni est ilu pch originel, la j^nitence neporte pas sur lui priiicipalcmenl, paiTC (pie contre lui ce n'est

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    lO SOMME IIEOLOGIQUE.pas ce sacrement qui se trouve ordonn, mais plutt le bap-tme. Elle ne porto pas non plus sur lui au sens propre, lepch originel n'ayant pas t commis par notre volont : sice n'est peut-tre pour autant que la volont d'Adam nous estimpute comme si elle tait ntre, selon le mode de parler quifuit dire l'Aptre, dans l'ptre aux Romains, ch. v (v. 12).:lai, en qui tous ont pch. Toutefois, prendre la pnitencedans un sens large pour la dtestation de n'impoile quellechose passe, la pnitence peut se dire du pch originel : c'estamsi qu'en parle saint Augustin, au livre De la pnitence (serm. CGCLI). Ce n'est gure que pour justifier celte manirede parler de saint Augustin, que saint Thomas accorde qu'onpuisse invoquer la pnitence, au sujet du pch originel. Avrai dire, la pnitence, soit comme vertu, soit comme sacre-ment, ne porte que sur les pchs commis par le sujet lui-mme : principalement, sur les pchs mortels ; secondaire-ment, sur les pchs vniels. Gomme sacrement surtout, lapnitence est ordonne directement contre les pchs mortelsqu'un sujet baptis a commis aprs son baptme : car, de soi,dans l'ordre des remdes sacramentels, contre ces pchs, il n'ya pas d'autre remde que le sacrement de pnitence. Au con-traire, le pch originel a son remde propre, qui est le sacre-ment de baptme ; et le pch vniel n'a pas besoin de sacre-ment proprement dit : les sacramentaux y suffisent.

    Les pchs mortels actuels commis aprs le baptme sont lamatire propre et principale du sacrement de pnitence. Ilssont, en effet, la matire des actes du pnitent, qui sont eux-mmes la matiie procliaine du sacrement. C'est de ces sortesde pchs que le pnitent se repent ; c'est eux qu'il confesse;c'est pour eux qu'il satisfait. Nous connaissons la matiredu sacrement de pnitence. Mais tout sacrement de la nouvelleloi a aussi une forme. Quelle sera donc la forme du sacrementqui nous occupe. Saint Thomas va s'en enqurir dans l'articlequi suit.

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    Q. LWMV. - LA l'EMTENCfc; SKLO.N QU ELLE EST L'N SAGUEME.M'. II

    Article III.Si c'est l la forme de ce sacremant : Je t'absous ?

    Cinq objections veulent prouver que " ce n'est point l laforme de ce sacrement : Je fabsous w. La premire dclareque les formes des sacrements se tirent de linstilution duChrist et de l'usage de l'Eglise. Or, nous ne lisons pas que leChrist ait institu celte forme. Elle n'est pas non plus d'unusage commun. Il est mme certaines absolutions qui se fontpubliquement dans l'Eglise, comme Prime, Compiles, et la Cne du Seigneur ou au moment de la communion, dans lesquelles l'glise n'use pas de formule indicati\e, en.ces termes : Je vous absous, mais de formule dprcalive, disant :Que le Seigneur tout-puissant ail piti de vous, ou encore : Quele Seigneur tout-puissant vous donne fabsolution. Donc ce n'estpoint l la forme de ce sacrement : Je t'absous . La secondeobjection apporte un texte de saint Lon, pape (I) , oia ilest dit (p. CVIII, ch. ii) : Le pardon de Dieu ne peut treobtenu que par les supplications des prtres. Et il parle du par-don de Dieu qui est accord aux pnitents. Donc la forme dece sacrement doit tre par mode de prire et non par modeaffirmatif d'acte que le prtre lui-mme est cens accomplir. La troisime objection fait observer que absoudre dupch est la mme chose que remettre le pch. Or, Dieu seulremet les pchs, Lui qui est aussi le seul purifier du pch Int-rieureineid, comme le dit saint Augustin, sur saint Jean {contreles Donatisles, liv. V, ch. \\\). Donc il semble que Dieu seulabsout du i)ch. Et, par suite, le prtre ne doit pas dire : JeCaljsous ; pas plus qu'il ne dit : Je te remets les pchs . Laqualrime objection dit que

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    12 SOMME THEOLOOIOUr:.infirmes, les Aptres n'usaient point de ces mots : Je le guris ;mais : Que le Seigneur Jsus-Christ te gurisse. Donc il sembleque les prtres ayant le pouvoir donn par le Christ aux Ap-tres ne doivent pas user de ces mots : Je t'absous ; mais deceux-ci : Que le Christ te donne ldissolution . La cinquimeobjection fait remarquer- que quelques-uns, usant de cetteforme, l'expliquent ainsi : Je Catjsous, c'est--dire, je te montreabsous. Mais, cela mme, le prtre ne peut pas le faire, moinsque cela ne lui soit rvl par Dieu. Aussi bien, comme on lelit en saint Matthieu, ch. xvi, avant qu'il ft dit Pierre(v. 19) : Tout ce que tu lieras sur la terre, sera etc., il lui avaitcl dit (v. 17) : Tu es heureux, Simon, fils de Jean, parce que lachair et le sang ne te l'ont pas rvl, mais mon Pre qui est dansles cieux. Donc il semble que le prtre qui n'a pas t faitede rvlation, est prsomptueux de dire : Je t'absous, mme sion l'explique en ce sens : Je te montre aljsous .

    L'argument scd contra oppose que comme le Seigneur ditaux disciples, en saint Matthieu, chapitre dernier (v. 19) : Aile:,enseigne: toutes les nations, tes txiptisant, etc. ; de mme 11 dit Pierre, en saint Matthieu, ch. xvi (v. 19) : Tout ce que ludlieras. Or, le prtre, fort de l'autorit de ces paroles, dit : Jete baptise. Donc, par la mme autorit, il doit dire, dans cesacrement : Je t'absous .Au corps de l'article, saint Thomas prcise d'abord ce qui

    constitue le caractre propre d'une forme. En toute chose,dit-il, la perfection est attribue la forme : la matireappartient l'ordre de la prparation ou de la disposition pas-sive ; c'est la forme qui fixe la matire dans le degr de perfec-tion qui doit correspondre la disposition ou la prparationvoulue. (I Or, il a t dit plus haut (art. i , ad :?"'"), que ce sacre-ment reoit sa perfection par ce qui se tient du ct du prtre. Ilfaudra donc que ce qui se tient du ct du pnitent, paroles ouactes, soient une certaine matire de ce sacrement, et que cequi est du ct du prtre soit l par mode de forme. D'autrepart, les sacrements de la loi nouvelle fidsanl ce qu'ils figurent,comme il a t dit plus haut ((|. (iu, art. 1, ad /"'"), il faut quela forme du sacrement signilie ce (|ui se l'ait dans le sacre-

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    Q. LXXXIV. LA PNITENCE SELON Ql'eLLE EST UN SACREMENT. l3ment, proportionnellement la matire du sacrement. De lvient que la forme du baptme est : Je le baptise ou je telave, et la forme de la confirma lion : Je te marque da signe dela croie et je te confirme da chrcme da salut, parce que ces sorlesde sacrements se paifont dans l'usage de la matire. Dans lesacrement de l'Eucharistie, qui consiste dans la conscrationmme de la matire, on exprime la vrit de la conscrationquand il est dit : Ceci est mon corps. Le sacrement dont nousparlons maintenant, savoir la pnitence, ne consiste pas dansla conscration d'une matire, ni dans l'usage d'une matiresanctifie, mais plutt dans l'loignemcnt d'une certainematire, c'est--dire le pch, pour autant que les pchs sontdits constituer la matire de ce sacrement, ainsi qu'on le voitpar ce qui a t dit plus haut (art. 2). Or, cet loignement estsignifi par le prtre quand il est dit : Je l'absous. Les pchs,en effet, sont des espces de liens, selon celte parole des Pro-verbes, ch. V (V. 22) : Ses iniquits saisissent l'impie et chacun estli par les cordes de ses pchs. Par o l'on voit que c'est l, dansune convenance souverainement parfaite, la forme de ce sacre-ment : Je t'absous .Vad primum fait remarquer que cette forme se prend des

    paroles mme du Christ disant Pierre (S. Matthieu, ch. nvi.V. 19) : Tout ce que lu dlieras sur la terre, etc. Et c'est de cetteforme qu'use lglise dans l'absolution sacramentelle. Quant ces autres absolutions faites en public , dont parlait l'objec-tion, elles ne sont pas sacramentelles. Elles sont des priresordonnes la rmission des pchs vniels. Aussi bien, dansl'absolution sacramentelle, il ne suffrail pas de dire : Que leDieu tout-paisscmt ail piti de vous ; ou encore : Que Dieu vousaccorde Cabscjlufion et la rmission. Ces paroles, en eiet, nesignilenl pas, de la part du prtre, que l'absolution est faite ;il demande seulement qu'elle se fasse. Toutefois, mmedans l'absolution sacramentelle, celte prire est dite d'abord,pour que l'cffel du sacrement ne se trouve pas empch du cotdu pnitent, dont les actes ont raison de inalire dans ce sacre-ment ; chose (pii n'existe pas dans le baptme ou la confir-mation .

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    l/| SOMME TflOLOCrQUE.Uwl seciindiirn larncnc ce qui vient d'elre dil le lexle que

    cilait Tobjeclion. Celte parole du pape saint Lon doit s'en-lendre au sens de la prire qui se dit avant l'absolution. Maiselle n'innpliquc pas que les prtres n'absolvent pas .

    l.'atl triiium accorde que Dieu seul, par voie d'autoiil,absout du pch et remet les pchs. Mais les prtres font l'unet l'autre par voie de ministre : en ce sens que les paroles duprtre, dans ce sacrement, agissent d'une faon insliumentalc,comme, du reste, dans les autres saciements ; et, en cl'et, c'estla vertu divine qui agit intrieurement dans lous les signessacramentels, que ce soient des choses ou que ce soient desparoles, ainsi qu'on le voit par ce qui a t dit plus haut(q. 62, art. i; q. 04, art. 1). Aussi bien le Seigneur exprimales deux effets , savoir l'absolution et la rmission, Car,en saint Matthieu (ch. xvi, v. 19), Il dit Pierre : Tout ce quela dlieras sur la terre, etc.; et, en saint Jean, ch. xx (v. 2.3), Ildit aux disciples : Ceux dont vous remettre: les pchs, les pchsleur sont remis. Que si, pourtant, le prtre dit plutt : Je Vah-sous, que : Je te remets les pchs, c'est qu^ cela convientmieux aux paroles que profra le Seigneur indiquant la vertudes clefs par lesquelles les prtres absolvent. Toutefois, parceque le prtre absout comme ministre, c'est propos qu'onappose quelque chose qui a trait la premire autorit deDieu; comme, par exemple : Je t'absous au nom da Pre et duFils et du Saint-Esprit ; ou encore : par la vertu de la Passiondu Christ ; ou encore : par l"autorit de Dieu ainsi que l'expliquesaint Denys, au chapitre xni de la Hirarchie cleste. Mais,parce que ceci n'a pas t dtermin par les paroles du Christ,comme dans le baptme, cette addition est laisse au jugementdu prtre , Il est bon qu'elle se fasse; mais elle n'est pas dencessit pour la validit de la formule,

    \^\id quartam dit qu' a aux Aptres ne fut pas donne lapuissance de gurir eux-mmes les infirmes, mais que lesinfirmes fussent guris leur prire. 11 leur fut donn, au con-traire, la puissance d'agir, comme instruments ou comme mi-nistres, dans les sacrements. Et c'est pourquoi ils peuvent plu-tt expriinei' Icui- acte dans les formes sucramenlellcs que dans

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    Q. LXXXIV. LA PENITENCE SELON OU ELLE EST UN SACREMENT. l5les gurisons des infirmits. Cependant, nnme l, ils n'usaientpas toujours du mode dprcatif, mais quelquefois aussi dumode indicatif et impratif. C'est ainsi qu'on lit, dans lelivre des Actes, chapitre m (v. 6), que Pierre dit au boiteux :('.e que f ai, Je le le donne : Au nom de Jsus-CIirist, lve- toi etmarche.Vad quintum rpond que celle explication : Je t'absous,c'est--dire je te montre atisous, est vraie en un certain sens;mais cependant elle n'est point parlaite. C'est qu'en effet, lessacrements de la loi nouvelle ne signifient pas seulement; ilsfont aussi ce qu'ils signifient. De mme donc que le prtre,quand il baptise quelqu'un, montre l'homme purifi intrieu-rement par les paroles et par les actes, non pas seulement enle signifiant, mais aussi en le faisant ; pareillement, quand ildit : Je t'absous, il montre l'homme absous, non pas seulementen le signifiant, mais aussi en le faisant. Et, toutefois, il neparle pas d'une chose incertaine. Car, de mme que les autressacrements de la loi nouvelle ont, de soi, un elVet certain parla vertu de la Passion du Christ, bien qu'il puisse tre emp-ch du ct du sujet qui les reoit; ainsi en est-il aussi dans cesacrement. Et aussi bien saint Augustin dit, dans le livre Dumariage adultre {\[\. 11, ch. ix) : La rconciliation entre lespoux ne saurait tre honteuse ou difficile aprs les adultres ac-complis et purifis, puisqu'il n'est pas douteux que par les clefs duRoyaume des deux se fcdl la rmission des pchs. Il suit del que le prtre n'a pas besoin qu'une rvlation spciale luisoit faite; la rvlation gnrale de la foi sufft, par laquelle nous savons que les pchs sont remis. Et c'est pour celaqu'il est dit que la rvlation de la foi a t faite Pierre . Aprs cette justification conditionnelle de l'explication de laformule d'absolution que plusieurs avaient donne, saint Tho-mas ajoute, en finissant : L'explication serait plus parfaite,si l'on disait : Je t'absous, c'est--dire Je te confre le sacrementde ral)soluti()n >

    En tout siicrcrnont de la loi nouvelle, les paroles (pii cons-tituent la forme doivent exprimer l'elVet du saortMuenl, ralis

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    l6 SOMMR TIIOLOGIQUR.loul ensemble par celle forme el la matire qui lui est propor-tionne. Ici, dans le sacrement de pnitence, la matire pro-chaine ou immdiate consiste dans les actes du pnitent quisignifient la rupture des liens spirituels du pcli, matireloigne ou mdiate du sacrement ; et qui, unis la formesacramentelle ajoute par le prtre, opreront, en effet, cetterupture. La forme sera donc excellemment constitue par cesmots, que le prtre prononcera sur le pcheur repentant : Jefabsous ; c'est--dire je te dlie ; je brise pour jamais, au nomde Dieu et par sa vertu, les liens du pch qui te retenaientcaptif. Toujours au sujet de celle forme ou de la partdu prtre dans le sacrement de pnitence, saint Thomas sedemande si Timposition des mains est ici requise, comme elleest requise en tels ou tels autres sacrements, tels que la con-firmation el l'Ordre. Nous auions la rponse l'article quisuit.

    Article IV.Si l'imposition des mains du prtre est requisepour ce sacrement ?

    Trois objections veulent prouver que l'imposition desmains du prtre est requise pour ce sacrement , La pre-mire cite la parole o il est dit, en saint Marc, chapitre der-nier (v. i8) : Ils imposeront leurs mains aux malades et ils serontguris. Or, les malades spirituels sont les pcheurs qui reoi-vent la sanl par ce sacrement. Donc, dans ce sacrement, ondoit faire l'imposition des mains. La seconde objectiondclare que a dans le sacrement de pnitence, l'homme recou-vre l'Espril-Sainl qu'il avait perdu ; aussi bien il est dit, dansle psaume (ps. l, v. i/i), en la personne du pnitent ; Rendez-moi la joie de votre salut et confirmez-moi dans votre Esprit d'au-trefois. Or, l'Espiil-Saint est donn par l'imposition des mains :nous lisons, en effet, au livre des Actes, ch. vni (v. 17), que lesApnlres imposaient les mains sur eux el ils reccraient rFsprit-Saint ; cl, en saint Mullliieu, ch. xi\ (v. i,')), il csl dit cpic des

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    Q. LXXXIV. LA P.MTENCE SELON Qu'eLLE EST UN SACUEME.NT. ITpetits enjants furent prsents au Seigneur pour quil leur impostles mains. Donc, dans ce sacrement, l'imposition des mains doittre faite . La troisime objection fait observer que lesparoles du prtre, dans ce sacrement, ne sont pas d'une plusgrande elTicacit que dans les autres sacrements. Or, dans lesautres sacrements, les paroles du ministre ne suffisent pas, moins qu'il n'exerce quelque action : c'est ainsi que, dans lebaptme, avec cela que le prtre dit : Je te baptise, est requisel'ablution corporelle. De mme donc, avec ceci que le prtredit : Je t'absous, il faut qu'il fasse quelque acte l'endroit dupnitent, en lui imposant les mains .L'argument sed contra en appelle ce que u le Seigneur dit'

    Pierre (en S. Matthieu, cli. xvi (v. 19) : Tout ce que tu dlierassur la terre, etc., ne faisant aucune mention de l'imposition desmains ; 11 ne le fit pas, non plus, quand II dit tous les Ap-tres : Ceux dont vous remettre: les pchs, les pchs leur serontremis. Donc, dans ce sacrement, n'est pas requise l'impositiondes mains .Au corps de l'arlicle, saint Thomas nous avertit que d l'im-

    position des mains, dans les sacrements de l'glise, se fait pourdsigner quelque ellet abondant de la grce, par lequel ceux qui les mains sont imposes continuent, en quelque sorte, parune certaine similitude, les ministre!? en qui l'abondance doittre. Et c'est pourquoi l'imposition des mains se fait dans laconfirmation, o est confre la plnitude de l'Esprit-Saint ; etdans le sacrement de l'Ordre, o est confie une certaineexcellence de jouissance dans les divins ministres : ce qui faitqu'il est dit, dans la seconde Eplrc Timotlie,'ch. i (v. G) :Ressuscite la grce de Dieu qui est en toi prw rimposition de mesmcdns. Or, le sacrement de la pnitence n'est pas ordonn obtenir quelque excellence de la grce, mais la rmissiondes pchs. 11 suit de l que, pour ce sacrement, l'impositionn'est pas reciuisc ; pas plus, d'ailleurs, que pour le baptme,dans lequel cependant se fait une |)lus pleine rmission despchs .

    \2\id prlmum dit que celle imposition des mains doiitparlait l'objection, u n'est pas sacrameniclle ; elle est ordonne

    T. .\1\. Les S(tcreinenls : La l'r/iilt'iiff. a

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    l8 SOMME TIIEOLOGIQLE. l'accomplissement des miracles : c'est--dire que par le con-tact de la main de l'homme qui est saint, mme l'infirmitcorporelle soit enleve. C'est ainsi (jue nous lisons, au sujetdu Seig-neur, en saint iMarc, ch. vi (v. 5), quaycml impos lesmains aux iiilirnies, H les giiril ; et, en saint Matthieu, chapi-tre vin (v. ',\), fions lisons que par son contact II gurit unlpreux .Vad secimdum rpond que ce n'est pas toute acception de

    l'Esprit-Saint qui requiert l'imposition des mains ; puisqueaussi bien dans le baptme l'homme reoit l'Esprit-Saint, etcependant il ne se fait point, l, d'imposition. C'est l'acceptionde l'Esprit-Saint avec plnitude qui requiert l'imposition desmains, comme il arrive dans la confirmation .Vad leiiiam explique que a dans les sacrements qui se par-

    font dans l'usage de la matire, le prtre a un certain acte cor-porel exercer l'endroit de celui qui reoit le sacrement ;comme dans le baptme et la confirmation et l'Extrme-Onc-tion. Mais ce sacrement ne consiste pas dans l'usage d'unematire applique au dehors, ce sont les actes du pnitent quitiennent, ici, lieu de matire. Et c'est pourquoi, de mme quedans l'Eucharistie, le prtre, par la seule prolation des parolessur la matire, parfait le sacrement, de mme, ici, les seulesparoles du prtre qui absout prononces sur le pnitent par-font le sacrement de l'absolution. Si quelque acte corporeltait ici du ct du prtre, ce serait aussi bien le signe decroix dont on use dans l'Eucharistie, plutt que l'impositiondes mains, pour signifier que par le sang de la Croix du Christles pchs sont remis. Et toutefois, ce n'est pas de ncessitpour ce sacrement, pas plus d'ailleurs que pour l'Eucharistie .

    Aucun signe ou acte extrieur n'est requis, du cte du pr-tre, pour la validit du sacrement, quand il donne l'absolution.Il sulFit qu'il prononce les simples paroles marques l'articleprcdent : Je ^absous. Toutefois, la [)ratiqueet la loi de l'gliseest que le prtre, en dehors du cas d'absolue ncessit qui nelaisserait que le temps ou la possibilit ddire ces paroles, ajouteles autres parties de la formule d'absolution marques dans le

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    Q. LXXXIV. LA PEMTENCli: SELON QU F.LLE EST U\ SACUEMENT. If)rituel et fasse le signe de la croix sur le pnitent en pronon-ant ces mots : Au nom du Pre et du Fils et du Saint-Esprit. Cette pnitence, dont nous avons dit qu'elle est un sacre-ment, un sacrement de la loi nouvelle, compos des actes dupcheur repentant qui vient trouver le prtre pour obtenir delui la rmission de ses fautes, et de la parole du prtre pro-nonant, en effet, l'absolution ou la rmission des fautes dupcheur repentant, ce sacrement de pnitence est-il nces-saire pour le salut, au point que si on n'y avait pas recours onne pourrait pas tre sauv.' La question, on le voit, est d'im-portance. Elle l'est d'aulant plus que les hrtiques protestantsqui se sont spars de l'Eglise, ont prcisment pour piincipede rejeter ce sacrement et de ne pas recourir lui.

    Saint Thomas va nous rpondre l'arlicle qui suit.

    Article Y.Si ce sacrement est de ncessit pour le salut?

    Tiois objections veulent prouver que ce sacrement n'estpas de ncessit pour le salut . La premire fait remarquerque sur ces mots du psalmiste (ps. cxxv, v. 3), Ceux qui s-ment dans les larmes, etc., la Glose dit : Ae sois point triste, situ as la bonne volont, (Ton l'on moissonne la paix. Or, la tris-tesse est essentielle la pnitence ; selon celte parole de la secondeptre aux Corinthiens, ch. vu (v. lo) : La tristesse qui est selonDieu, opre la pnitence qui assure le salut. Donc la bonne vo-lont, sans la pnitence, sullil pour le salut . La deuximeobjection en appelle ce qu' il est dit, dans les Proverbes,ch. X (v. 12) : La charit couvre tous tes pchs; et, plus bas,ch. XV (v. 17) : Par la misricorde et la foi les pchs sont purifis.Or, ce sacretnent n'est que pour purifier les pchs. Donc enayant la charit, la foi et la misricorde, chacun peut obtenirle salut, mme sans le sacrement de pnitence . La troi-sime objection dit que k les sacrements ont leur origine del'institution du Christ. Or, comme on le lit on saint Jean,

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    O SOMME TIIKOLOGIQUE.cil. VIII (v. Il), le Christ a absous la femme adultre sans lapnitence. Donc il semble que la pnitence n'est pas de nces-sit pour le salut .L'argument sed coiilra apporte le texte o le Seigneur dit,

    en saint Luc, ch. xni (v. 5) : Si vous ne falles pas pnitence,vous prirez lous en mme temps .Au corps de l'article, saint Thomas icpond qu' une chose

    est ncessaire au salut de deux manires : absolument; ou parsupposition. Est absolument ncessaire ce sans quoi nul nepeut obtenir le salut : telle la grce de Dieu, tel aussi le sacre-ment de baptme par lequel on renat dans le Christ. Le sacre-ment de pnitence est ncessaire par supposition ; car il n'estpas ncessaire tous, mais ceux qui sont soumis au pch.Il est dit, en effet, au second livre des Paralipomnes, chapi-tre dernier (prire de Manass) : Et vous, Seigneur des Justes,vous n'avez pas institu la pnitence pour les justes, Abraham,Isaac, et Jacob, qui ne pchrent point contre vous . C'est doncpour ceux qui ont pch que la pnitence est ncessaire. Mais,pour eux, elle l'est en vrit. Le pch, en effet, quand il a tconsomm, engendre la mort, ainsi qu'il est dit en saint Jacques,chapitre i (v. i5). Et voil pourquoi, il est ncessaire, pour lesalut du pcheur, que le pch soit loign de lui. Or, celane peut tre fait sans le sacrement de pnitence dans lequelopre la vertu de la Passion du Christ par l'absolution du pr-tre ensemble avec l'uvre du pnitent qui coopre la grcepour la destruction du pch; comme, en effet, le dit saint Au-gustin, sur saint Jean (serm. CLXIX) : Celui quitta cr sans loi,ne te justifiera pas sans toi. Par o l'on voit que le sacrementde pnitence est ncessaire pour le salut, aprs le pch. C'estainsi, du reste, que le remde corporel est ncessaire aprsque l'homme est tomb dans une maladie qui met sa vie enpril .Vad prlmum dit que celte Glose cite par l'objection,

    semble devoir s'entendre de celui (jui a la bonne volontsans l'interruption que cause le pch : ceux-l, en elTet, n'ontpas de cause de tristesse. Mais ds l que la bonne volont estenleve par le i)ch, elle ne peut pas tre rtablie sans la tris-

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    g. LXXXIV. LA PENITENCE SELON OU ELLE EST UN SACREMENT. 2 1tesse par laquelle on a la douleur du pch pass ; ce qui appar-tient la pnitence .Vad secundam dclare que ds l que quelqu'un encourt

    le pch, la charit et la foi et la misricorde ne librent pointl'homme du pch sans la pnitence. La charit requiert, eneffet, que l'homme s'afflige de l'offense commise contre un amiet qu'il travaille se rconcilier avec lui, La foi, aussi, re-quiert que par la vertu de la Passion du Christ qui opre dansles sacrements de l'Eglise, l'homme pcheur cherche se jus-tifier de ses pchs. Et la misricorde ordonne requiert elle-mme que l'homme subvienne, en faisant pnitence, samisre qu'il a encourue par le pch, selon cette parole desProverbes, ch. xiv (v. 3/|) : Le pch rend les hommes malheureux;d'o il est dit, dans VEcclsiastique, ch. xxx (v. 24) : Aie pitide ton me, en plaisant Dieu n. On aura remarqu cesbeaux textes cits par saint Thomas, et l'harmonie que lesaint Docteur a su montrer entre les vertus de charit, de loi,de misricorde, et la pnitence.Vad terlium fait observer qu' il appartint la puissance

    d'excellence que seul le Christ a eue, comme il a t dit plushaut(q. 64, art. k,ad /'"", 3""';q. 72, art. \,ad i"'"), que le Christconfra la femme adultre, sans le sacrement de pnitence,l'effet de ce sacrement, qui est la rmission des pchs. Et,toutefois, mme cette femme II ne confra point l'effet dusacrement, sans la pnitence intrieure que Lui-mme par sagrce produisit dans son me .

    C'est dans la rponse ad secundam de l'article que nous ve-nons de lire, conjointement avec le corps de l'article, que.saint Thomas nous a donn expressment la raison pour la-quelle il faut tenir que la pnitence, mme en tant que sa-crement, est de ncessit de salut pour tous ceux qui ont perdula vie de la grce aprs le baptme. C'est que la vie perdue parle pch mortel ne peut plus tre retrouve que par la vertu de laPassion du Christ oprant dans le sacrement de pnilence. Lafoi nous enseigne cette doctrine. Et nul ne peut se flaller derevenir la vie par une autre voie. Il va bien sans dire (jue

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    22 SOMME THEOLOGIQUE.la bonne foi peut excuser devant Dieu. A ce titre, ceux-lmme qui tant dans l'erreur ne recourent pas au sacrementde pnitence pourront bnficier de la grce du sacrement queDieu leur accordera par misricorde, comme II l'accorde ceuxqui n'ayant pas toutes les dispositions requises dont nous au-rons parler dans la suite, mais sans qu'il y ait de leur fauteet alors qu'ils croient les avoir, s'approcbent du sacrementLui-mme. Toutefois ces exceptions ne font que confirmer largle. Et les catboliques clairs de la pleine lumire sur lancessit du sacrement de pnilence n'apprcieront jamais as-sez leur bonheur de pouvoir recourir comme ils le doivent cemoyen de salut mis leur porte par la misricorde infinie deDieu. A l'effet de mieux nous dmontrer l'excellence de cemoyen de salut, saint Thomas considre une expression uni-versellement reue dans l'glise, qui consiste appeler le sacre-ment de pnitence : la seconde planche aprs le naufrage.L'tude de celte formule va faire l'objet de l'article qui suit.

    Article VI.Si la pnitence est la seconde planche aprs le naufrage ?

    Trois objections veulent prouver que la pnitence n'estpas la seconde planche aprs le naufrage . La premire enappelle ce que sur cette paiole d'Isae, m (v, 9), Ils ontannonc leur pch comme Sodome, la Glose dit : La secondeplanche aprs le naufrage est de cacher ses pchs. Or, la pni-tence ne cache pas les pchs, mais plutt elle les rvle. Doncla pnilence n'est pas la seconde planche i>. La deuximeobjeclion dit que le fondement, dans l'difice, ne tient pasla seconde place, mais la premire. Or, la pnilence est le fonde-ment dans l'difice spirituel ; selon cette parole de l'^ptre auxHbreux, ch. vi (v. i) : Ne Jelanl pas de nouveau le fondementde la pnitence des uvres mortes. Et, aussi bien, elle prcdele baptme, selon celte parole des Actes, ch. 11 (v. .38) : Faitespnilence; et (juc rlutcnn de vous soit baptis. Donc la [)nitence

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    Q. LXXXIV. - LX PNITENCE SELON QU'eLLE EST UN SACBEMENT. 23ne doit pas lre dUe la seconde planche . - La troisime ob-ieelion dclare que tous les sacrements sont de cerlamesplanches >, de salut. c'est--dire des

    remdes contre le pche.Or la pnitence ne tient pas la deuxime place parm. les sa-cremenls, mais plutt la quatrime, comme on le vo.t par ceni a t dit plus haut (q. 05. art. .). Donc la pem.ence nedoit pas tre dite la seconde planche aprs le naufrage .

    L'argument sed coalra cite Tautorit de saint Jroure qu, dans une de ses pilres ( Dfmlrmde. sur la virginit. d,t quela seconde pkmehe aprs le naufrage est

    la pnaence .^u corps de l'article, saint Thomas va justifier celle parole

    de saint Jrme. Il nous dit que ce qui est par soi est natu-rellement antrieur ce qui est accidentellemenl ; c est ams,nue la subtance est antrieure l'accident. Or, parm. les saere-,nents, il en est qui par soi sont ordonns au salut de 1 homme :lels le baptme, qui est la gnration spirituelle; et la conhr-

    mation, qui est la croissancespirituelle; et l'tuehar.st.e. q.

    est l'alin,ent spirituel. La pnitence, au contraire, est ordonneau salut de l'homme, comme accide,.lellement, et en supposantquelque chose, c'est--dire le pch. Si, en en'et 1 hommen'avait pas de pch actuel, il n'aurait pas beso.n de la pem-lence. Et, cependant, il aurait besoin du baptme, de la confir-mation et de l'Eucharistie. C'est ainsi, du reste, que, dans la viecorporelle, l'homme n'aurait pas besoin de

    remde s il n taitnas malade. Et cependant, de soi il a besoin de natre, de gran-dir de se nourrir. De l vient que la pnitence tient la secondeplace par rapport l'tat d'intgrit ou de sanl spirituelle'. qui est confr et conserv par les sacremenls prcits. C estpour cela que mlaphoriqucmeni elle est appele lu seconde'tancke aprs le naafra.je. Car le premier remde pour ceuxnui passent la mer est qu'ils soient

    conservs dans le navireintact; mais le second, aprs que le navire est hrise. est quel'on s'altachc une planche. Do mme." aussi, le premierlemde. dons la mer de la vie prsente, est que l'homme garde,n inlgrit de vie surnaturelle et chrtienne revue par lebaptme ; mais le second remde, s'il perd celle intgrit irle pch, esl (p.'il V revienne par la pnilcncc .

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    2/i SOMME TIIEOLOGIQUE.\j\i(l pr'umun fait observer que c'est d'une double manire

    qu'il arrive de cacher les pchs. Prennirement, au momento ils se font. Or, c'est pire de pcher publiquement que depcher en secret : soit parce que le pcheur public sembleapporter plus de mpris dans son pch ; soit aussi parce qu'ilpche avec le scandale des autres. Et voil pourquoi c'est uncertain remde dans les pchs que le pch se commette ensecret. A ce titre, la glose dit que la seconde planche aprc's lenaufrage est de cacher les pchs : non que par l le pch soitenlev comme par la pnitence ; mais parce que de la sorte lepch devient moindre. Dune autre manire, quelqu'uncache le pch prcdemment commis en ngligeant de le con-fesser. Et ceci est contiaire la pnitence. Cacher de la sorteson pch n'est pas une seconde planche de salut, mais pluttson contraire : il est dit, en effet, dans les Proverbes, ch. xxviu(v. i3) : Celai qui cache ses crimes ne sera pas conduit dans tavrcde voie . On remarquera cette premire affirmation sinette de la ncessit de la confession ou de l'aveu de ses pchspour en obtenir le pardon. Nous aurons y revenir longue-ment plus loin.Vad secundam dclare que la pnitence ne peut pas tre

    dite le fondement de l'difice spirituel purement et simple-ment, c'est--dire quant sa premire construction. Elle n'estle fondement que dans la seconde constiuction qui se fait aprsla destruction du pch : lorsque, en eflet, on revient Dieu,c'est la pnitence qui se rencontre d'abord. Et toutefois, dansle texte que citait l'objection, l'Aptre parle du fondement dela doctrine spirituelle. Quant la pnitence qui picde lebaptme des adultes, elle n'est pas le sacrement de pni-tence dont nous parlons maintenant.

    L\ad tertinm dit que les trois sacrements qui prcdent la pnitence appartiennent l'intgrit du navire, c'est--dire l'lat d'intgiit ou de premire sant spirituelle recouvrepar le baptme. El c'est par rapport cet lut d'intgrit ,devant tre rtabli quand il a t perdu par le pch actuel,(( que la pnitence est dite la seconde planche .

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    Q. L\\\l\ . - r,A l'KMTENCE SrXON OU KLLK EST UN SACHEMENT. 20Ce sacrement de pnitence dont nous avons vu la nature, la

    ncessit, la place dans l'conomie de la vie spirituelle, quelmoment convenait-il qu'il ft institu. tait-ce bien dans lanouvelle loi, qu'il devait l'tre, et par le Christ, et au momento il l'a t. Saint Thomas va nous rpondre l'article quisuit.

    Article VII.Si ce sacrement a t convenablement institu

    dans la loi nouvelle ?Quatre objections veulent prouver que ce sacrement n'a

    pas t convenablement institu dans la loi nouvelle . Lapremire dit que les choses qui sont de droit naturel n'ontpas besoin d'institution. Or, se repentir des maux que quelqu'una faits est de droit naturel : nul, en effet, ne peut aimer le bienqu'il ne s'afflige du mal contraire. Donc la pnitence n'a past convenablement institue dans la loi nouvelle . Ladeuxime objection dclare que ce qui fut dans l'ancienne loin'avait pas tre institu dans la nouvelle. Or, mme dansl'ancienne loi tait la pnitence ; et, aussi bien, le Seigneur seplaint, dans Jrmie, ch. vni (v. 6), disant : // iiesl personnequi fasse pnitence de son pch et qui dise : qiii-Je fait ? Doncla pnitence n'a pas d tre institue dans la nouvelle loi . La troisime objection fait observer que la pnitence vientaprs le baptme, puisqu'elle est la seconde planche, ainsi qu'ila t dit plus haut (art. G). Or, il scm*ble que la pnitence a tinstitue par le Seigneur avarU le baptme ; car nous lisons quele Seigneur dit au dbut de sa prdication : Faites pnitence,parce que le Royaume des deux s'est /ait proche. Donc ce sacre-ment n'a pas t convenablement institu dans la loi nou-velle . La (piatriine objection rappelle que les sacre-ments de la nouvelle loi liiciit leur institution du Christ, i)arla \eiiu de qui ils oprent, ainsi qu'il a t dit plus haut(q. (., art.' 5 ; q. ()/|, art. 3). Or, il ne semble pas que le Christait institu ce sacrement; car II n'en a pas us Lui-mtne,comme II a us des autres sacrements (pi'll a institus. Donc

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    26 SOMME THOLOGIQUE.ce sacrement n'a pas t convenablement institu dans la nou-velle loi .

    L'argument sed contra oppose que le Seigneur dit, ensaint Luc, chapitre dernier (v. 40, 47) : // fallaU (/ue le Christsoaljrit et ressuscitt des morts, le troisime jour ; et que fussentprches, en son nom, l

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    Q. L\\\l\ LA PENITENCE SELON QU ELLE EST UN SACREMENT. 2-mouvement coopre, titre de matire dans un sacrement, la justification du pnitent. Que l'homme fasse pnitence entelle ou telle manire >, de telle sorte que les actes qu'il accom-plit constituent la matire d'un sacrement qui le justifie, cecivient de l'institution divine. Et, aussi bien, le Seigneur, audbut de sa prdication, ne prescrit pas seulement aux hom-mes de se repentir, mais encore de Jaire pnitence, signifiantpar l les modes dtermins des actes qui sont requis pour cesacrement. Quant ce qui appartient roffce des ministres,Il le dtermina en saint Matthieu, quand II dit Pierre (ch. xvi,V. 19) : Je le donnerai les clejs du Royaume des cieax, etc. Maisl'efficacit de ce sacremement et l'origine de sa vertu. Il lesmanifesta, aprs sa rsurrection, en saint Luc, chapitre der-nier (v. 46, 47), o II dit qu'tV fallait que fassent prches, enson nom, la pnitence et la rmission des pchs dans toutes lesnations, aprs avoir fait mention de sa Passion et de sa Rsur-rection. C'est, en effet, par la vertu du nom de Jsus-Christayant souffert et tant ressuscit, que ce sacrement a l'efficacitde remettre les pchs.

    Par o l'on voit que ce sacrement a t convenablementinstitu dans la nouvelle loi .Uad primam explique qu' a il est du droit naturel que quel-

    qu'un se repente des maux qu'il a faits, quant ce qui estd'prouver de la douleur d'avoir fait ces maux, et de chercherun remde sa douleur en quelque manire, et, aussi, demontier quelques signes de sa douleur; comme le firent lesNinivites, ainsi qu'on le lit dans le livre de Jonas, ch. in (v. !iet suivants). |]t en eux encore, cependant, quelque chose futajout par la foi qu'ils eurent en la prdication de Jonas; savoir([u'ils feraient cela dans l'espoir d'obtenir de Dieu le pardon,selon que nous lisons au mme endroit (v. 9) : Qui sait siDieu ne chamjera pas et ne pardonnera pas, revenant de sa fu-reur, en telle sorte (/ue nous ne prissions pas? Mais, commetoutes les autres choses (jui sont de droit naturel, ont eu leurdtermination par l'instilulion de la loi divine, ainsi qu'il at dit dans la Seconde Partie (/'-//", (j. 100, art. 1 1); tle mmeaussi pour la [)iiitence .

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    r>8 soMMii; thologiquf:.Lfcl secanduin fait observer que

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    Q. L\.\XIV. LA PENITENCE SELON OU ELLE EST UN SACUEMENT. 2()Vad lerliani fait observer que si quelqu'un y prend soigneu-sement garde, ce que le Seigneur dit de la ncessit du bap-

    tme, en saint Jean, ch. ni (v. 3 et suivants), a prcd dans letemps ce qu'il dit, en saint Matthieu, ch. iv, de la ncessit dela pnitence. Car ce qui! dit Mcodme touchant la ncessitdu baptme eut lieu avant l'incarcration de Jean, dont il estdit postrieurement l'enlrelien avec Nicodme, qu'il bap-tisait. Or, ce qu'il dit de la pnitence, en saint Matthieu, eutlieu aprs l'incarcration de Jean (v. 12) . L'entretien avecNicodme se rapporte ce que nous avons appel (Jsus-Christdans l'Evangile, 1, p. 98) la priode judenne de la vie deJsus; tandis que l'invitation la pnitence eut lieu au dbutde la priode Calilenne, venue aprs l'autre. La remarque desaint Thomas est donc, ici, trs juste. Que si, toutefois ,'ajoute le saint Docteur, l'invitation la pnitence avait tlaite avant qu'il et t question du baptme, la raison enserait que avant le baptme aussi est requise une certainepnitence. C'est ainsi que saint Pierre dit, dans le livre desAcles, ch. II (v. 38) : Fuites pnilencc, et que chucuri de voussoit baptis .

    L'ad quartuni dclare que le Christ n'a point us du bap-tme qu'il a institu Lui-mme. Il a t baptis du baptme deJean, comme il a t dit plus haut (q. 89, art. 2). Bien plus,Il n'a pas administr Lui-mme son sacrement ; car Lui-mmene baptisait pas d'ordinaire, mais ses disciples, comme il est diten saint Jean, ch. iv (v. 2), quoique nous devions croire, sem-ble-t-il, qu'il avait Lui-mme baptis ses disciples, ainsi quele dit saint Augustin, Steucien (p. CGLXV). C'est qu'eneffet, l'usage de ce sacrement institu par Lui, ne lui convenaiten aucune manire : ni pour faire pnitence Lui-mme, enqui ne se trouva aucun pch; ni pour ce qui et t de ch^n-ner Lui-mme ce sacrement aux autres, parce que, poui mon-Irei- sa misricorde et sa vertu, Il donnait Teffct de ce sacre-ment sans le sacrement, comme il a t dit plus haut (art. 5,ad .7"'"). Pour ce qui est du sacrement de ILucliaristie, Il leprit Lui-mme et 11 le donna aux autres. Soit pour recomman-di'i- rexcellcncc de ce sacrement. Soit [)arce que ce sacrement

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    3o SOMME TIIOLOGIQUE.est le rnmoi'ial de sa Passion dans laquelle le Clirisl est prtreet hostie ou victime. On aura remarque cet aperu quevient de nous donner saint Tliomas sui- les sacrements tousinstitus par le Christ, mais dont II n'avait pas user Lui-mme, sauf en ce qui est de l'Eucharistie dont l'excellence etlr> caiaclrc inolivait souverainement une telle exception.

    Le sacrement de pnitence ne pouvait tre institu quedans la nouvelle loi et par le Christ Lui-mme. Il appartenaitau Christ de dterminer que l'homme accomplirait tels actesen repenlance et pnitence de ses pchs et que tels ministres,aprs sa Passion et sa Pvsurrection, appliqueraient au pcheurl'eflicace et la vertu de sa Passion pour la rmission despchs. Cette pnitence ainsi comprise et leve la dignitd'un sacrement de la loi nouvelle appliquant d'une maniresi souveraine la vertu et l'efTicace de la Passion du Christ,doit-elle tre conue comme quelque chose de transitoire dansla vie du chrtien renouvel par elle; ou, au contraire, faut-ildire qu'elle doit durer toujours, quand une fois le chrtien aeu besoin d'y lecourir ayant pch aprs son baptme. SaintThomas va nous rpondre l'article qui suit.

    Article YlII.Si la pnitence doit durer jusqu' la fin de la vie?

    Trois objections veulent prouver que la pnitence ne doitpas durer jusqu' la fin de la vie . La premire dit que(I la pnitence est ordonne effacer le pch. Or, c'est toutde suite que le pnitent obtient la rmission des pchs,selon cette parole d'Ezchiel, ch. xvni (v. 21) : Si impie Jailpcnilence de ses pchas qiiil a commis, il aura la vie el Une mourrapas. Donc il n'y a pas prolonger la pnitence au del dumoment mme o le pnitent reoit le sacrement. Ladeuxime objection dclare (juc faire pnitence appni'tiei\l l'tat des commenants, [)armi les trois tats de vie (jui son!

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    Q. LXXXIV. LA PNITENCE SELON Qu'eLLE EST UN SACREMENT. 3lcelui des commenants, celui de ceux qui progressent, celui deceux qui sont parfaits. Or , prcisment, l'homme doitpasser de cet tal des commenants l'tat de ceux quiprogressent, et ultrieurement l'tat des parfaits (cf. //'-//"^q. -Jifi, art. 9). Donc l'homme ne doit pas faire pnitence jusqu'la fin de sa vie . La troisime ohjection en appelle ceque comme dans les autres sacrements l'homme doit garderles statuts de l'glise, pareillement aussi dans ce sacrement.Or, selon les canons, certains temps sont dtermins poui* lapnitence : en ce sens que celui qui a commis tel ou tel pchdoit faire pnitence pendant tant d'annes. Donc il semble quela pnitence ne doit pas s'tendre jusqu' la fin de la vie .

    L'argument sed contra cite un texte de saint Augustin ,au livre de la Pnitence (ch. xin, apoc. parmi les uvres desaint Augustin), o il est u dit : Que nous resle-t-il sinon d'tredans la douleur pendant notre vie? Car si la douleur finit , la pni-tence finit aussi. Et si la pnitence Jinil , que reste-i-il du pardon ? Au corps de l'article, saint Thomas rpond qu' il est unedouble pnitence : la pnitence intrieure et la pnitence ext-

    rieure. La premire est celle qui fait qu'on a la douleur dupch commis. Cette pnitence doit durer jusqu' la fin e lala vie. C'est, en effet, toujours qu'il doit dplaire l'hommed'avoir pch. Car s'il lui plaisait, s'il avait du plaisir d'avoirpch, dj par le fait mme il encourrait le pch et perdraitle fruit du pardon. D'autre part, le dplaisir cause la douleuren celui qui est capable de la ressentir, comme c'est le cas del'homme en cette vie . Quand il est dit que l'homme doit tou-jours avoir du dplaisir d'avoir pch, cela doit s'entendre dudplaisir qui est dans la volont. Il se pourrait, en elTel, quela pense ou le souvenir du pch commis, pour autant quecette pense ou ce souvenir agirait sur la partie affective sensi-ble n'y caust point du dplaisir, mais, au contraire, ft pluttde nature rveiller le sentiment sinon la sensation d'un cer-tain plaisir inhrent cela mme qui constituait l'ancienpch. Mais, par l'eiroVt de la volont cpie la i-aison et la loidirigent, dans la mesure mme oij la pnitence de l'hommeest sincre et elTective, ce (|n'il pourrait y avoir encore d'iLiO-

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    32 SOMME TIIlOLOOIQLE.tion dans la partie affective sensible, au souvenir ou la pensede l'ancien pch, doit tre transform en dplaisir et en dou-leur d'ordre moral. C'est ce dplaisir, celte douleur d'ordremoral qui doivent demeurer toujours tant que l'homme vitsur cette terre. Aprs cette vie, les saints dans le ciel

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    Q. LXXXIV. LA PNITENCE SELON QU'eLLE EST UN SACREMENT. 33des uvres satisfactoires dont le ct pnible ou afflictif doittout ensemble expier les anciennes fautes et dtourner lepcheur de la pente qu'il pourrait avoir commettre de nou-velles fautes l'avenir.Vad seciindam accorde que la pnitence intrieure et ext-rieure tout ensemble appartient l'tat des commenants quisortent nouvellement de leur pch. Mais la pnitence int-rieure a sa place mme en ceux qui progressent et dans lesparfaits; selon cette parole du psaume (lxxxui, v. 6, 7) : //dispos les ascensions dans son cur en celle valle de larmes. Etde l vient que saint Paul lui-mme disait, dans la premireptre aux Corinthiens, ch. xv (v. 9) : Je ne suis pas digne d'lreappel apcjlre ; car feu perscut l'glise .Vad lertium dit que ces temps dtermins dont parlait

    l'objection sont marqus aux pnitents quant h l'action dela pnitence extrieure .

    Le pcheur qui a renonc son pch, et qui, pour en ob-tenir le pardon, vient trouver le prtre et se soumettre auxsanctions divines que le prtre lui imposera en lui donnantl'absolution, accomplit des actes qui font partie du sacrementde pnitence. Ces actes, comme tels et pour autant qu'ils cons-tituent, en effet, la matire du sacrement, demeurent nette-ment dtermins quanta leur nature et quant au moment 011ils doivent tre pratiqus. Ils n'impliquent aucunement l'obli-eation de se continuer durant tout le cours de la vie prsente.Toutefois, la base de ces divers actes doit se trouver un sen-timent de dplaisir caus par la seule pense ou le seul souve-nir des fautes commises. Ce sentiment de dplaisir, motivpar le caractre de dsordre moral essentiel tout pchou toute faute, ne saurait jamais disj^nratre du cur del'homme qui a une fois pch. H durera ternellement. Maisil n'a point, dans le cur de l'homme, le mme effet, selon quel'homme vit encore sur cette terre ou selon qu'il est dj dansla patrie du ciel. Sur celte terre, le sentiment de dplaisir cjuialVectc le cur de l'homme pnitent au souvenir de ses fautespasses, mme pardonnes, revt un caractre afflictif. 11 cause

    'l\ \i\. i^es Sucrcnicnls : Iji l'riiili'iicc ^

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    3/ SOMMK TIIKOLOGIQUE.la tristesse et la douleur : tristesse et douleur qui (ont partiede la pnitence salutaire. Kt, ce titre ou de ce chef, la pni-tence doit durer jusqu' la fin do la vie prsente. Aprs cettevie et quand l'me justifie est entre au ciel, il n'y a plus place"pour la douleur ou la tristesse. 11 n'y a donc plus parler depnitence. Muie le souvenir des pchs comnnis se rsout enjoie toute divine, pour autant qu'il est accompagn de la pen-se des misricordes infinies de Dieu et de la juste satisfactionofferte par le pcheur en union avec les satisfactions surabon-dantes de la Passion du Christ. Nous avons dit que la pni-tence, au sens expliqu, devait durer jusqu' la fin de la vieprsente. Mais peut-elle durer ainsi d'une faon continue etsans interruption. C'est ce qu'il nous faut maintenant consi-drer. Et tel est l'objet de l'article qui suit.

    Article IX.Si la pnitence peut tre continue?

    Trois objections veulent prouver que la pnitence ne peutpas tre continue . La premire argu de ce qu' il est'dit, dans Jrmie, ch. xxxi (v. 16) : Que voire voix s'arrte degmir ; que vos yeux s'arrtent de pleurer. Or, cela ne pourraitpas tre, si la pnitence tait continue, puisqu'elle consistedans les gmissements et les larmes. Donc la pnitence nepeut pas tre continue . La deuxime objection dit que l'homme doit se rjouir de toute uvre bonne; selon cetteparole du psaume (xcxn, v. 2) : Serve: le Seigneur dans la Joie.Or, faire pnitence est une uvre bonne. Il s'ensuit quel'homme doit s'en rjouir. Mais l'homme ne peut pas simulta-nnienl s'allrisler et se rjouir, comme on le voit par Aristote,au livre IX de Vlhique (ch. iv ; de S. Th., le. iv). Et, parconsquent, il ne se peut pas f}uc le pnitent s'attriste en mmetemps de ses pchs, chose essentielle la pnitence . Doncla pnitence ne peut pas tre continue. Elle s'exclut en quel-que soite elle-mme, dans la 'mesure mme o elle devierU

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    Q. LXXXIV. L.\ PKMTENCE SELON Qu'kLLE EST UN SACREMENT. 35parfaite. La Iroisime objection apporte un texte de l'Aptre, dans la seconde ptre aux Corinthiens, ch. n (v. 7) ,o il est dit : Console: le pnitent, de peur quil ne soit(ihsort) par une trop grande tristesse. Or, la consolation chassela tristesse, qui est essentielle la pnitence. Donc la pni-tence n'est pas continue .

    L'argument sed eontra en appelle ce que saint Augustin,dit, au livre De /a Pnitence (ch. xiii, apocr. parmi les uvresde saint Augustin) : Que la douleur dans la pnitence soU garded'une faon continue .Au corps de l'article saint Thomas nous avertit que fairepnitence s'entend d'une double manire : quant l'acte, et

    quant l'habilus. D'acte, il est impossible que l'hommefasse pnitence continuellement; car il est ncessaire quel'acte de celui qui fait pnitence, qu'il s'agisse de l'acte int-rieur ou de l'acte extrieur, soit interrompu, fout le moinspar le sommeil et les autres choses que requiert la ncessitdu corps. D'une autre manire, faire pnitence se dit ausens de l'habitas : et cola veut dire qu'on est habituelle-ment dans la disposition d'me que la vertu de pnitencerequiert. En ce sens, il faut que l'homme fasse pnitencecontinuellement : pour autant quil ne doit jamais rien fairede contraire la pnitence par o serait enleve la dispositionhabituelle du pnitent; et aussi pour autant qu'il doit avoirdans son propos de ressentir toujours le dplaisir de ses pchspasss , selon qu'il a t expliqu l'article prcdent.Vad prinmni fait observer que les gmissements et les

    larmes appartiennent l'acte extrieur de la pnitence :et cet acte non seulement n'a pas tre continu, mais iln'est mme pas ncessaire qu'il dure jusqu' la lin de lavie, ainsi qu'il a t dit (art. 8). Aussi bien est-il ajout in-tentionnellement, dans le texte de Jrmie que citait l'ob-jection, au sujet des gmissements et des larmes, que cesactes cuiront leur rcompense. Et, prcisment, la rcompenseou le salaire de l'acte du pnitent est la pleine rmission deson pch, quant la coulpe et quant la peine, l ne fois cettermission oblenue, il n'est plus ncessaire que l'homme fasse

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    3() SOMMF, TMKOLOr.IQlE.uUiicui'crncnl acte extrieur de pnilcncc. Mais cela n'exclutpas la continuit de la pnitence, au sens qui n t dit .

    L'ad secundnin explique qu' au sujet de la douleur et dela joie nous pouvons parler d'une double manire. D'abord,selon qu'il s'agit de j)assions ou de mouvements affectifs de l'apptit sensible. Et, les entendre ainsi, la douleur etla joie ne peuvent en aucune manire se trouver ensemble.Elles sont, en elTct, totalement contraires : soit du cot del'objet, quand elles portent sur une mme chose; soit, toutle moins, du cot du mouvement du cur, attendu que lajoie implique la dilatation du cur, tandis que la tristesse leresserre. C'est en ce sens que parle Aristote, au livre IX deVthique cit par l'objection. D'une autre manire,nous pouvons parler de la joie et de la tristesse, selon qu'ellesconsistent dans un simple acte de la volont laquelle unechose plat ou dplat , dans le domaine propre de la volontqui est celui du bien ou du mal d'ordre rationnel et non plusseulement d'ordre sensible.

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    Q. LXXXIV. LA PNITENCE SELON QUELLE EST UN SACUEMENT. 3"sa tristesse elle-mme lui est un sujet de joie. C'est ce qui faitdire saint Augustin, dans le livre De la pnitence (endroitprcit) : Que le pnilent soit sans cesse dans la douleur et que sadouleur le rjouisse. Au surplus, mme si la tristesse n'admet-tait en aucune manire avec soi la joie, cela ne ferait pas queft enleve la continuit habituelle de la pnitence, mais seu-lement sa continuit actuelle .

    L'ad terliurn dclare que selon la doctrine d'Aristote, aulivre II de Vthique (ch. vi ; de S. Th., \c. vi), il appartient la vertu de garder le milieu dans les passions. Or, la tristessequi suit dans l'apptit sensible du pnitent quand sa volontressent du dplaisir est une certaine passion. Il suit de lqu'elle doit tre modre selon la vertu : l'excs en seraitvicieux, car il conduirait au dsespoir. Et c'est ce qu'a signifil'Aptre, au mme endroit (cit par l'objection), quand il dit :de peur que sa trop grande tristesse ne l'absorbe. Par o l'onvoit que la consolation dont parle l'Aptre en cet endroit,modre la tristesse, mais ne l'enlve pas totalement , mmes'il s'agit de la tristesse sensible, prise comme mouvement af-fectif passionnel. A combien plus forte raison n'enlve-t-ellepas la tristesse au sens de dplaisir dans la volont, puisquece dplaisir portant sur le pch commis ne disparatra jamaiset doit tre d'autant plus grand que la vertu est plus parfaite.

    Prise au sens de disposition habituelle de la volont s'altris-tant d'avoir commis le pch, la pnitence ne doit ni ne peutjamais connatre d'interruption dans l'me du juste. S'il entait autrement, le juste perdrait, parle fait mme, son tat dejustice. Il est essentiel cet tat, ([uand une fois on l'a recou-vr aprs avoir pch, ou, mme, s'il s'agit du pch vnielqui ne su|)posc pas l'interruption dans l'tat de jusiico o l'mequi n'auiait point commis de pch actuel aurait t placepar la grce du baptme, a[)rs avoir encouru la responsabi-lit d'un acte moral dsordonn quelconque, de conserver lou-jouis, dans la partie supcrieuic de l'me qu'est la volont,sous forme de dis|)osilion habituelle que rien jamais ne devraaltrer ou tltruirc, le dplaisir d'avoii- ainsi encouru la ros-

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    38 SOMMIi; TIIliOLOGIQUE.ponsabilil du dsordre moral. La piiilcnce ainsi entendue estsans trve ni ropil. El loin de s'opposer au boniieur de l'rnejuste, elle entre, comme lment essentiel, dans la joie de sabatitude. Il ne nous reste plus qu'un dernier point consi-drer pour terminer cette premire question o nous devionstudieren elle-mme la pnitence sous sa raison de sacrement;et c'est de savoir si le sacrement de pnitence doit tre ritrou renouvel. Saint Thomas va nous rpondre l'article quisuit.

    Article X.Si le sacrement de pnitence doit tre ritr?

    Cet article a six objections. Elles veulent prouver que lesacrement de pnitence ne doit pas tre ritr . La pre-mire apporte le fameux texte oii l'Apotre dit, dans l'ptreaux Hbreux, ch. vi (v. 4, 6) : Il est impossible pour ceux quiont t une Jois illumins et qui ont got le don cleste et quiont t Jaits participants de rEsprit-Saint , et sont ensuite tombs,d'tre de nouveau rtablis par la pnitence. Or, tous ceux quifont pnitence, avaient t illumins par la grce et ilsavaient reu le don du Saint-Esprit. Donc quiconque pcheaprs la pnitence, ne peut plus de nouveau faire pnitence . La deuxime objection est un texte de saint Ambroise, aulivre de la pnitence (liv. II, ch. x), oij il est u dit : lien estqui pensent quon peut trs souvent Jaire pnitence. Ceux-l sontdes luxurieux dans le Christ. Et, en effet, s'ils avaient Jait pnitencevritablement, ils ne penseraient pas qu'on puisse la renouveler :car, de mme qu'il n'y a qu'un baptme, il n'y a aussi qu'unepnitence. Puis donc que le baptme n'est pas ritr, la pni-tence ne l'est pas non plus . La troisime objection ditque les miracles par lesquels le Seigneirr gurit les infirmi-ts corporelles signifient les gurisons des'infirmits spirituelles,par lesquelles gurisons les hommes sont librs des pchs.Or, nous ne lisons pas que le Seigneur ait deux fois illuminquelque aveugle, ou qu'il ait deux fois ressuscit quelque mort.

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    Q. LXXXIV. LA PENITENCE SELON QU ELLE EST UN SACREMENT. SqDonc il semble qu'il n'accorde pas non plus deux fois le par-don au pcheur par la pnitence . La quatrime objectioncite un double texte de saint Grgoire et de saint Isidore. Saint Grgoire dit, dans une homlie quadragsimale (hom.XXXIV sur l'vangile) : La pnilence consiste pleurer les pchsautrefois commis et ne plus commettre des pchs qu'on ait pleu-rer. Et saint Isidore dit, au \i\re Du souverain bien {\i\. Il, ch. xvi) :Celui-l se moque et ne Jail point pnitence, qui commet encoredes actes pour lesquels il doive faire pnilence. Si donc quelqu'unfait vraiment pnitence, il ne pchera point de nouveau. Et,par suite, il ne se peut pas qu'il fasse de nouveau pnitence . La cinquime objection dclare que comme le baptme ason efficacit de la Passion du Christ, de mme aussi la pni-tence. Or, le baptme n'est pas ritr, cause de l'unit de laPassion et de la mort du Chiist. Donc, pour la mme raison,la pnitence non plus n'est pas ritre . La sixime ob-jection en appelle ce que saint Grgoire (ou plutt saintAmbroise, sur le psaume cxviii, v. 58) dit que la Jacilil dupardon est un excitant pcher . On sait que les protestantsappuient beaucoup sur cette pense pour battre en brche lesacrement de pnitence, ce Si donc poursuit ici l'objection,allant au fond de la difficult que ce texte soulve, si Dieu ac-corde frquemment le pardon l'aide de la pnitence, il sembleque Lui-mme fournil aux hommes un excitant pcher. Et, parsuite, il semblera qu'il se complat dans le pch. Chose quine convient pas sa bont et constituerait, si on l'aHirmaitde Lui, un horrible blasphme. (( Donc la pnitence ne peutpas tre ritre . On peut voir, par le seul nonc de ces ob-jections, combien dlicate et dilFicile rsoudre pouvait trela question i)Osc, et (|ui, en efl'et, a t si mal com|)risc et sip(!rniciensciMcnt dnature par les hrtiques, noiammcnt ausein de la Rforme.L'argument sed contra oppose que ci l'homme est induit

    la niisricoide par l'exemple de la misricorde divine, seloncelte parole marque en saint Luc, ch. vi (v, 3G): Soye: misri-cordieux comme votre Pre est misricordieux. Or, le Seigneur aimpos cette misricoide ses disciples, de remettre souvent

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    4o SOMME THOLOGIQUE. leurs IVies leurs torts quand ils pcheraient contre eux; et,aussi bien, lorsque saint Pierre, comme il est dit en saintMatthieu, ch. xvrii (v, 21, 22), lui demanda : Combien de Joispchera contre mol mon frre et devrai-Je lui remettre son of-Jense : jasqa sept fois? Jsus rpondit : Je ne le dis pas Jusqu'sept fois, mais Jusqu' soixanle-dix-sept Jois sept fois. DoncDieu aussi souvent accorde le pardon aux pcheurs par la p-nitence; alors surtout qu'il nous enseigne demander : Remel-lez-nous nos dettes, comme nous remettons nous-mmes ceux quinous doivent n. On aura remarqu avec quel propos divinsaint Thomas est all chercher ce beau passage de l'vangilepour l'opposer aux diflculls que soulevaient les objections,^et qui, manifestement ne sauraient tenir contre un tel exem-ple et un tel prcepte donns par le Christ Lui-mme.Au corps de l'article, saint Thomas dbute par un rapideaperu des erreurs qui se sont produites au sujet de la questionactuelle. Au sujet de la pnitence, d'aucuns ont err en di-sant que l'homme ne pouvait point, par la pnitence, obtenirune seconde fois le pardon des pchs. Les uns, savoir lesNovatiens, poussrent cela jusqu'au point de dire qu'aprs lapremire pnitence qui se fait dans le baptme, ceux qui p-chent ne peuvent plus par la pnitence tre de nouveau rta-blis. Il y eut d'autres hrtiques, comme le dit saint Augustinau livre De la pnitence (ch. v, apocr. parmi les uvres deS. Augustin), qui disaient qu'aprs le baptme la pnitencetait utile, mais non pas plusieurs fois, une fois seulement .

    Ces erreurs , ajoute saint Thoinas, semblent avoir pro-cd de deux choses. Dabord, de ce que l'on errait sur lanature de la vraie pnitence. Parce que, en effet, pour la vraiepnitence est requise la charit, sans laquelle les pchs nesont pas effacs, ils croyaient que la charit une fois possdene pouvait plus tre perdue; d'o il suivait que la pnitence,si elle tait vraie, n'tait jamais enleve par le pch de faon devoir tre ritre. Mais ceci a t rejet dans la SecondePartie (//"-//"^ q. 2^1, art. 11), o il a t montr que la cha-rit une fois possde peut tre j)erdue en raison du libre arbi-tre ; et, par consquent, aprs la pnitence vraie, l'homme

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    Q. LXXXIV. LA PENITENCE SELON QU ELLE EST UN SACREMENT. 4lpeut pcher mortellement. En second lieu, on errait en cequi touche l'estimation de la gravit du pch. Ils pensaient,en effet, que le pch commis aprs avoir obtenu le pardontait tellement grave, qu'il ne pouvait plus tre remis. Mais,en cela, ils erraient soit du ct du pch, qui, mme aprs lepardon obtenu, peut tre et plus grave et plus lger mme quene l'lit le premier pch remis ; soit, bien plus encore, con-tre l'infinit de la misricorde divine qui est au-dessus de toutnombre et de toute grandeur des pchs, selon celte parole dupsaume (l, v. 3) : Ayez piti de moi, Seigneur, selon votre grandemisricorde ; et selon la multitude de vos pardons, ejfacez moniniquit. Aussi bi^n est rprouve la parole de Gain qui disait.Gense, ch. iv (v. i3) : Mon iniquit est trop grande pour quej'obtienne le pardon. Et c'est pourquoi la misricorde de Dieuoctroie aux pcheurs le pardon dans la pnitence sans aucunelimite. De l vient qu'il est dit, au livre II des Paralipomneschapitre deiTiier : Les misricordes de vos promesses sont im-menses et insondables a-dessus de toutes les malices des hom-mes.

    Par o il est manifeste que la pnitence peut tre ritreplusieurs fois .Vad primum dit que parce que chez les Juifs taient insti-

    tues, selon la loi, certaines ablutions qui permettaient de sepurifier plusieurs fois de ses impurets, quelques-uns desJuifs croyaient que mme par l'ablution du baptme onpouvait tre plusieurs fois purifi. C'est pour exclure celaque l'Aptre crit aux Hbreux (ju'il est impossible que ceuxqui ont t une fois illumins, savoir par le baptme, soientde nouveau rtablis faire pnitence, savoir par le baptme,qui est le lavacre de la rgnration et de la rnovation der Esprit-Saint, comme il est dit, Tite, ch. m (v. 5). Et ilen assigne la laisoii en ce que par le baptme l'hommemeuil avec le Christ; de l Nient qu'il ajoute : cruci/iani denouveau en eux-mmes le Fils de Dieu ). Nous retrouvons, ici,rex|)lication que saint Thomas nous avait dj donne dansle Trait du baptme, au sujet de ce |)assage de ri]plie auxHbreux, qui, mal compris, ne laisserait pas que de prsenter

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    !\'i SOMMli: THOLOGIQUI.une giaiulc difficull, une difficult presque insoluble, et qui atromp, en effet, certains hrtiques, touchant la possibilit derenouveler plusieurs fois l'administration et la rception dusacrement de pnitence. Pour saint Tliomas, il ne s'agit pas dela pnitence, dans ce passage de l'Eptre aux Hbreux. 11 s'agitdu baptme.

    h\ul secunduin fait observer que saint Ambroise , dans letexte que citait l'objection, parle de la pnitence solennelle,laquelle, en el'et, ne se ritre pas dans l'glise, comme il seradit plus loin (cf. Supplment, q. 28, art. 2).Vad terlium rpond que comme le dit saint Augustin (ouplutt l'Anonyme) au livre De la pnitence (endroit prcit), leSeigneur a illumin de nombreux aveugles en diverses circons-tances, et Jortifi de nombreux injirmes, montrant en eux que lesmmes pchs pouvaient rire remis : c'est ainsi quil gurit d'abordle lpreux et qu' un autre moment, l illumina Caveugle. S'il gu-rit tant d'aveugles et de boiteux et de perclus, c'est pour que celuiqui pche souvent ne dsespre pas. Et si nous ne lisons pas qu'ilait guri le mme plusieurs Jois, c'est pour que chacun craigne detomber dans le pch. Il se dit le mdecin venu non pas pour ceuxqui vont bien, mais pour ceux qui sont malades. Mais quel seraitce mdecin qui ne pourrait gurir du mal encouru de nouveau ?Le propre des mdecins est de gurir cent fois le malade quiretombe cent fois. El fl serait infrieur aux autres, s'il ne pou-vait ce que les autres peuvent .

    L'ad quartum dclare que d faire pnitence est pleurer lespchs prcdemment commis et ne pas commettre ce quidviait tre pleur, en mme temps qu'il pleure, soit en acte, soitde dsir. Celui-l, en eflet, se moque et ne fait point pni-tence, qui, au moment mme o il fait pnitence, commet cedont il fait pnitence, soit qu'il se picjpose de faire ce qu'il adj fait, soit mme qu'il pche actuellement du mme genreon d'un autre genre de pch. Mais que quelqu'un, dans la suite,pclie, en acte ou par le dsir, cela n'exclut pas que sa pre-mire pnitence n'ait t vraie. Jamais, en effet, la vrit dupremier acte n'est exclue par l'acte contraire qui vient aprs :car, de mme ([ue celui qui s'assied, a[)rs avoir couru, a vri-

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    Q. L\\\l\ . LA PENITENCE SELON QU ELLE EST UN SACUEMENT. l\3tablemeiit coiiiu, de mme il a vritablement fait pnitencecelui qui pche dans la suite , en raison de la flexibilit deson libre arbitre.Uad qainlani repond que le baptme a la vertu de la Pas-sion du Christ comme une certaine rgnration spirituelleavec la mort spirituelle de la prcdente vie. Or, ce n'est qaanefois qail a cl statu pour fhomme, de mourir, et, une fois aussi,de natre. De l vient que l'homme ne doit tre baptis qu'unefois. Mais la pnitence a la vertu de la Passion du Christcomme remde spirituel, et le remde peut tre frquemmentritr .

    L'ad sextuni se rfre ce que (( saint Augustin (ou pluttl'Anonyme) dit, au livre De la pnitence (endroit prcit) quecela mme prouve que le pch dplat souverainement Dieu, quilest toujours prt le dtruire, pour que ne prisse pas ce quIl acr et que ne disparcdsse pas ce quIl a aim, chose qui arrive-rait par le dsespoir , s'il n'y avait plus possibilit de pardon .Un des points de doctrine qui sont la plus belle gloire de

    l'enseignement calholif|ue et qui prouvent le plus excellem-ment sa divine origine est bien celui que l'Eglise a maintenudepuis toujours avec tant de fermet contre la rigidit de cer-tains hrtiques, affirmant que le pcheur, tant qu'il vit surcelte terre, a la possibilit de recourir, avec l'espoir assurd'obtenir son pardon, la misricorde de Dieu touj