Commentaire de la décision n° 2014-453/454 et autre QPC du ... · PDF fileLe pivot...

download Commentaire de la décision n° 2014-453/454 et autre QPC du ... · PDF fileLe pivot principal de cette répression, le délit d’initié, ... Le fait de tirer parti d’une information

If you can't read please download the document

Transcript of Commentaire de la décision n° 2014-453/454 et autre QPC du ... · PDF fileLe pivot...

  • Dcision n 2014-453/454 QPC et 2015-462 QPC du 18 mars 2015

    M. John L. et autres

    (Cumul des poursuites pour dlit diniti et des poursuites pour manquement

    diniti) Le Conseil constitutionnel a t saisi le 19 dcembre 2014, par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrt n 7607 du 17 dcembre 2014) dune question prioritaire de constitutionnalit (enregistre sous le n 2014-453 QPC) pose par M. John L. et un autre requrant, relative la conformit aux droits et liberts que le Constitution garantit de larticle 6 du code de procdure pnale (CPP). Il a t saisi le mme jour par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrt n 7608 du 17 dcembre 2014) dune QPC (enregistre sous le n 2014-454 QPC) pose par la socit Daimler AG et six autres requrants, relative la conformit aux droits et liberts que la Constitution garantit des articles L. 465-1, L. 466-1, L. 621-15-1, L. 621-16, L. 621-16-1 et L. 621-20-1 du code montaire et financier (CMF). Enfin, le Conseil constitutionnel a t saisi le 4 fvrier 2015, toujours par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrt n 652 du 28 janvier 2015), dune QPC (enregistre sous le n 2015-462 QPC) pose par M. Toufic A. et quatre autres requrants, relative la conformit aux droits et liberts que la Constitution garantit de lensemble des articles contests dans les QPC prcites et, en sus, de larticle L. 621-15 du CMF. Diverses personnes ont demand intervenir la procdure. Le Conseil, sil a admis les interventions de certaines dentre elles, a en revanche refus dadmettre lintervention de lAgence franaise de lutte contre le dopage (cons. 2). Dans sa dcision du 18 mars 2015 commente, le Conseil constitutionnel a dclar conformes la Constitution les mots la chose juge figurant au premier alina de larticle 6 du CPP et larticle L. 621-20-1 du CMF. En revanche, il a jug contraires la Constitution larticle L. 465-1 du CMF dans sa rdaction rsultant de la loi n 2005-842 du 26 juillet 2005 pour la confiance et la modernisation de lconomie, les mots sest livre ou a tent de se livrer une opration diniti ou figurant au c) et au d) du paragraphe II de larticle

  • 2

    L. 621-15 du mme code dans sa rdaction rsultant de la loi du 4 aot 2008 de modernisation de lconomie et, par voie de consquence, les dispositions contestes des articles L. 466-1, L. 621-15-1, L. 621-16 et L. 621-16-1 du mme code. Dans ces affaires, M. Guy Canivet a estim devoir sabstenir de siger. I. Dispositions contestes et contexte de la procdure A. Dispositions contestes 1. Larticle 6 du code de procdure pnale Comme lindique le CPP ds ses premiers articles, en matire pnale, une infraction peut donner naissance deux actions : laction publique pour lapplication des peines, ou plus simplement action publique, et laction civile en rparation du dommage caus par linfraction, action civile. Larticle 6 du CPP dtermine les conditions dextinction de laction publique et celles de son ventuelle reprise. Son premier alina, inchang depuis la loi n 57-1426 du 31 dcembre 1957 instituant un code de procdure pnale, prvoit les modes gnraux dextinction de laction publique : Laction publique pour lapplication de la peine steint par la mort du prvenu, la prescription, lamnistie, labrogation de la loi pnale et la chose juge . Ses second et troisime alinas, inchangs depuis la loi n 99-515 du 23 juin 1999, sont relatifs respectivement aux conditions de reprise de laction publique et aux modes spciaux dextinction de laction publique qui ne peuvent jouer quen vertu dune disposition expresse de la loi. 2. Les dispositions du code montaire et financier La rpression des infractions la lgislation boursire se caractrise, depuis la loi n 89-531 du 2 aot 1989 relative la scurit et la transparence du march financier, par un systme dual de sanctions, administratif et pnal. Sur le plan pnal, cette rpression est principalement assure par celle du dlit diniti ; sur le plan administratif, par le manquement diniti. Ces deux incriminations, ainsi quun certain nombre de dispositions tendant assurer une coordination entre ces deux rpressions, sont codifies dans le CMF.

  • 3

    a. - La rpression du dlit diniti Le droit boursier sest dot ds 1967, avec lordonnance n 67-833 du 28 septembre 1967 instituant une commission des oprations de bourse et relative linformation des porteurs de valeurs mobilires et la publicit de certaines oprations de bourse, de dispositions rpressives pnales sanctionnant les atteintes la transparence des marchs boursiers afin de protger les investisseurs. Le pivot principal de cette rpression, le dlit diniti, a t insr larticle 10-1 de cette ordonnance par la loi n 70-1208 du 23 dcembre 1970. Il a ensuite t modifi de nombreuses reprises avant dtre codifi larticle L. 465-1 du CMF par lordonnance n 2000-1223 du 14 dcembre 2000. Larticle L. 465-1 du CMF rprime ainsi le fait, pour une personne possdant des informations privilgies sur les perspectives ou la situation dun metteur dont les titres sont ngocis sur un march rglement ou sur les perspectives dvolution dun instrument financier admis sur un march rglement, de raliser ou de permettre de raliser, directement ou non, des oprations sur ce march avant que le public ait connaissance de ces informations. Lorsque lauteur des faits a acquis linformation privilgie loccasion de lexercice de sa profession ou de ses fonctions, les peines prvues par le premier alina de larticle L. 465-1 sont de deux ans demprisonnement et dune amende de 1 500 000 euros ou du dcuple du montant du profit ralis. Lorsque lauteur des faits na pas acquis linformation privilgie dans lexercice de sa profession ou de ses fonctions, les peines encourues sont dun an demprisonnement et de 150 000 euros damende ou du dcuple du montant du profit ralis. Enfin, le fait de communiquer une information privilgie un tiers en dehors du cadre normal de sa profession ou de ses fonctions est puni dune peine dun an demprisonnement et de 150 000 euros damende. Lorsque les faits sont commis par une personne morale, les peines damende sont, en application des articles 131-38 et 131-39 du code pnal et L. 465-3 du CMF, portes au quintuple et la dissolution de la personne morale peut, sous certaines conditions, tre prononce. b. - La rpression du manquement diniti Le fait de tirer parti dune information privilgie sur le march boursier constitue galement un manquement administratif, le manquement diniti pouvant tre sanctionn par le gendarme de la bourse , cest--dire depuis la loi n 2003-706 du 1er aot 2003, lAutorit des marchs financiers (AMF).

  • 4

    Larticle L. 621-15 du CMF est larticle central de la procdure rpressive devant la commission des sanctions de lAMF : il dtermine les conditions dans lesquelles une procdure de sanction est ouverte, la procdure applicable, les personnes et actes pouvant tre sanctionns et les sanctions pouvant tre prononces. Le paragraphe I de cet article indique que louverture dune procdure de sanction est dcide par le collge de lAMF qui notifie alors les griefs reprochs aux personnes concernes. La notification des griefs est transmise la commission des sanctions de lAMF qui dsigne un rapporteur parmi ses membres. En vertu du paragraphe II de ce mme article, aprs une procdure contradictoire, la commission des sanctions peut notamment dcider de prononcer une sanction lencontre : - dun certain nombre de personnes ou entits, ou des personnes physiques places sous l'autorit ou agissant pour le compte de ces personnes ou entits, au titre de tout manquement leurs obligations professionnelles dfinies par les lois, rglements et rgles professionnelles approuves par lAMF ; - de toute personne qui sest livre ou a tent de se livrer une opration diniti ou sest livre une manipulation de cours, la diffusion dune fausse information ou tout autre manquement mentionn au premier alina du paragraphe I de larticle L. 621-14, ds lors que ces actes concernent un instrument financier admis aux ngociations sur un march rglement ou sur un systme multilatral de ngociation ; - de toute personne qui, sur le territoire franais ou tranger, sest livre ou a tent de se livrer la diffusion dune fausse information lors dune opration doffre au public de titres financiers. Enfin, en ce qui concerne les sanctions pouvant tre prononces, le paragraphe III de larticle L. 621-15 permet la commission des sanctions de lAMF de prononcer lencontre dun certain nombre dacteurs des marchs financiers soumis des obligations professionnelles les sanctions suivantes : lavertissement, le blme, linterdiction titre temporaire ou dfinitif de lexercice de tout ou partie des services fournis ou des sanctions pcuniaires. Les autres personnes coupables dun manquement peuvent tre sanctionnes dune amende. Le montant des amendes pouvant tre prononces par la commission des sanctions de lAMF a vari. Dans la version de larticle L. 621-15 issue de la

  • 5

    loi n 2008-776 du 4 aot 2008, lamende pouvait slever, selon les hypothses jusqu 1,5 ou 10 millions deuros ou au dcuple du montant des profits raliss. Dans la version de ce mme article issue de la loi n 2010-1249 du 22 octobre 2010 et dans celle actuellement en vigueur, le montant maximum de ces amendes a t port 15 ou 100 millions deuros ou au dcuple du montant des profits raliss. c. - Les dispositions de coordination de ces deux rpressions Compte tenu de la coexistence de deux voies de poursuites en matire boursire, le CMF prvoit un certain nombre de dispositions, contestes par les requrants, tendant assurer une coordination, ou au moins la communication dinformations, entre lautorit judiciaire et lAMF. * Larticle L. 466-1 du CMF est relatif la saisine pour avis de lAMF par lautorit judiciaire. Il prvoit en particulier que cette saisine est obligatoire lorsque lautorit judiciaire engage des poursuites en excution de larticle L. 465-1 du CMF. * Larticle L. 621-15-1 du CM