Coeurs d'ouvriers - Extrait de la publication

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Musée dauphinois Cœurs d’ouvriers Un travail photographique de Bernard Ciancia

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Extrait de la publication de l'exposition « Coeurs d'ouvriers - Un travail photographique de Bernard Ciancia. » Editions Musée dauphinois, décembre 2011

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Musée dauphinois

Cœurs d’ouvriersUn travail photographique de Bernard Ciancia

Cœurs d’ouvriersUn travail photographique de Bernard Ciancia

Ouvrage dirigé par Jean Guibal et Pascal Kober

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Trois ans après la riche exposition du

Musée dauphinois consacrée à l’histoire

ouvrière (Être ouvrier en Isère, XVIIIe-XXIe siècles), quelques mois

après l’inauguration de la Maison

Bergès – Musée de la Houille blanche

à Villard-Bonnot, l’occasion nous

est donnée de revenir sur le monde

du travail. Et de confirmer ainsi le

vif intérêt du Conseil général de

l’Isère pour le développement d’un

projet muséographique sur ce thème,

généralement ignoré des politiques

patrimoniales.

Il s’agit cette fois d’un travail

photographique contemporain, d’une

œuvre de création qui est aussi un

témoignage sur une catégorie particulière

de travailleurs et sur un territoire donné.

Car c’est bien du monde ouvrier isérois

qu’il s’agit, observé dans sa diversité

et dans l’exercice de ses compétences.

De nombreuses filières industrielles

sont représentées, en des lieux très

divers, livrant tout à la fois des portraits

d’individus – et l’on pressent que le

photographe, Bernard Ciancia, nourrit

une réelle estime pour ces hommes et

ces femmes –, un panorama très large

des métiers à l’œuvre aujourd’hui et un

tableau de l’industrie iséroise au début

des années 2010.

Ce tableau, on le sait, n’est pas des

plus réjouissants : en Isère comme

ailleurs, la production industrielle se

réduit, heureusement compensée sur

notre territoire par le développement

des activités de service ou liées à la

recherche. Les fermetures récentes dans

la filière papetière en sont un éloquent

témoignage ; ce qui rend évidemment les

ouvriers plus rares.

Le travail photographique de Bernard

Ciancia n’est pas pour autant un

relevé « pour mémoire » ! Tout au

contraire, il présente des hommes et

des femmes totalement engagés dans

leur travail et manifestant souvent,

par leur regard ou leur attitude, une

vraie compétence, et surtout une rare

fierté d’exercer leur métier et de susciter

l’intérêt d’un artiste.

André Vallini

Président du Conseil général

Sénateur de l’Isère

Préface

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Manifestation chez CaterpillarEn 2009, le groupe américain de BTP Caterpillar annonce un plan de restructuration qui conduit à la destruction de 25 000 emplois dans le monde. À Grenoble et à Échirolles, 733 ouvriers sont concernés, qui se mobilisent et manifestent (ici, le 3 mars 2009, une passante devant le site en grève). Finalement, 600 postes (dont 415 licenciements secs) seront supprimés. Cette photo d’actualité symbolique sera publiée dans de nombreux quotidiens : L’Humanité, Le Monde, Libération, etc.

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Avant-propos

Il reste toujours des ouvriers ! Tel est le pré-cepte autour duquel s’organise cette présenta-tion des photographies de Bernard Ciancia ; tel aurait pu être le titre, s’il n’avait été quelque peu dévalorisant pour les individus concernés, ainsi approchés comme les vestiges d’une autre ère. Sonnant comme un rappel pour tous ceux qui l’auraient oublié, cette exclamation vaut pour ce début de XXIe siècle, alors que les effets de la délocalisation de la production industrielle sont largement connus et com-mentés ; alors que le progrès des machines, désormais « assistées par ordinateur », a ten-dance à remplacer (ou à simplement dégui-ser ?) l’ouvrier par le technicien ; et surtout alors que l’histoire et la mémoire ouvrières entrent au musée ! Ce contexte donne un sens particulier à l’invitation adressée par le Musée dauphinois à Bernard Ciancia.Sans attendre d’y être invité, ce dernier s’était déjà donné lui-même la mission d’approcher le monde du travail, après bien d’autres centres d’intérêt. Sur les grands chantiers (le stade de Grenoble, le quartier de Bonne, le couvent Sainte-Cécile, etc.) comme dans les usines, il s’est efforcé d’observer les corps et les êtres plus que les techniques et les savoir-faire. Il a su aussi se faire reporteur, ramenant de la lutte des Caterpillar des photographies qui ont contribué à sa notoriété. Le Musée dauphinois, pour sa part, a de longue date exploré l’histoire industrielle (Cathédrales électriques, Les Maîtres de l’acier, Papetiers des Alpes, etc.) sans jamais oublier que derrière ces machines et objets que se disputent les collec-tionneurs et les conservateurs, œuvraient des hommes et des femmes, autrefois même des

enfants. Plus récemment, il a ouvert la voie de la mémoire et de l’histoire ouvrières en Isère (en 2008), préfigurant un futur musée théma-tique promu par le Conseil général. Un beau livre [L’Isère au travail (1870-1970) ; à l’ate-lier, à l’usine, 2007] a par ailleurs présenté les collections photographiques anciennes rela-tives au monde du travail conservées dans les musées départementaux ; tandis qu’un Atlas du patrimoine industriel de l’Isère (2007) venait rassembler le savoir accumulé sur l’his-toire industrielle et les vestiges qui nous sont demeurés.C’est dans le prolongement de ces opérations que l’équipe du Musée dauphinois a accom-pagné ce travail photographique, soutenant un regard original porté sur une population méconnue sinon cachée, et constituant ainsi des archives pour demain. Nul autre que Bernard Ciancia ne pouvait approcher ce monde et ces êtres ; lui seul disposait de cette sollicitude, de cette capacité à disparaître derrière son objec-tif et bien sûr de la technique si particulière qui fait l’originalité de son œuvre.Quelques fils d’ouvriers s’étant plu à se retrouver autour de ce projet, c’est naturellement à Pascal Kober, lui-même photographe et rédacteur en chef de la revue L’Alpe (Glénat et Musée dauphi-nois) qu’a été confié le soin de choisir, ordonner et commenter ces images ; avec la précieuse col-laboration de Hervé Frumy, graphiste ; et sous la coordination de Franck Philippeaux, conser-vateur au Musée dauphinois.

Jean Guibal

Conservateur en chef du patrimoine

Directeur du Musée dauphinois

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En double page précédente

Plate-forme pétrochimiquePont-de-Claix. Novembre 2010.

Ouvrier spécialisé Entreprise Payant. Domène. Mai 2009.

Peintre !Entreprise Visio-Technic. Sassenage. Mai 2011.

“ Il vient de finir de peindre une pièce en noir sur une chaine et il a enlevé son masque. ”

Les commentaires en légendes des images sont de Bernard Ciancia.

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Manœuvre "Aciérie Giraud. Pontcharra. Juin 2009.

Ouvrier papetier Papeterie du Domeynon. Domène. Mars 2009.

“ Une photo très particulière. Il est d’origine algérienne et il a trente-six ans de carrière dans l’entreprise. Mais il lui manque des trimestres pour prendre sa retraite. La liquidation de l’entreprise a été prononcée. C’est le dernier jour. À midi, les derniers rouleaux de papier sortent de l’usine. En même temps que les derniers ouvriers. ”

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Peintre Entreprise Visio-Technic. Sassenage. Février 2011.

Ouvrière !Dans l’atelier Berthier-Bessac, spécialiste des vitraux. Grenoble. Janvier 2009.

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Chaudronnier "Chantier de démontage de la conduite forcée d’EDF qui relie le lac Mort à la vallée de la Romanche, près de Séchilienne. Mai 2011.

Ouvrier de maintenance Chantier de nettoyage d’un réservoir d’eau sur le site de La Tronche. Avril 2011.

“ Il a vingt-deux ans et vient tout juste de se faire embaucher au Syndicat intercommunal des eaux de la région grenobloise (SIERG). ”

En double page suivante

Conducteur d’enginsFonderie de silicium Ferropem. Livet-et-Gavet. Octobre 2010.

“ L’une des rares photos que j’ai réalisées au téléobjectif. Si je m’approchais davantage, je prenais feu. Pour protéger le conducteur [dont on devine le visage à l'intérieur de la machine, en page de droite], le blindage de cet engin mesure plus de trente centimètres d’épaisseur. ”

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Maçon "Chantier du nouveau quartier de la caserne de Bonne. Grenoble. Juin 2007.

Conducteur d’engins !Chantier du nouveau quartier de la caserne de Bonne. Grenoble. Novembre 2008.

MERCIS

Bernard Ciancia tient à remercier tous les ouvriers qui ont accepté d’être photographiés

et les entreprises qui ont bien voulu lui ouvrir leurs portes ; ainsi que Claude Bertrand, ancien vice-président

à la culture du Conseil général de l’Isère, pour son amitié et sa confiance.

Dédicace spéciale aux équipes du Musée dauphinois qui ont réalisé l’accrochage de l’exposition, sous la cordination de Franck Philippeaux,

conservateur du patrimoine.

Ci-dessus : LamineurFonderie de Rives. Février 2010.

L’exposition Cœurs d’ouvriers

Un travail photographique de Bernard Ciancia au Musée dauphinois a bénéficié du partenariat

de la société Visio-Technic

www.visio-technic.com

Conception graphique : Hervé Frumy assisté de Francis Richard

Photogravure et étalonnage : Pierre-Jean Lecomte, Digimag

Impression : Imprimerie moderne de l’Est à Baume-les-Dames

© Patrimoine en Isère / Musée dauphinois

ISBN 978-2-35567-059-6

Dépôt légal : décembre 2011

Dans un monde délocalisé et désindustrialisé, on aurait presque oublié

que chaque jour (et souvent dès potron-minet), des millions de personnes

œuvrent en bleu de travail, outil en main et casque vissé sur la tête. Ce

sont ces gueules (de l’emploi), tantôt souriantes, tantôt tendues, parfois

goguenardes, que le photographe Bernard Ciancia est allé croquer au fil

de cinq années de rencontres dans plusieurs entreprises du département

de l’Isère. Comme un hommage rendu à ces femmes et ces hommes de

l’ombre qui, les doigts dans le cambouis, font tourner une grande partie

de notre économie. Le résultat ? Une galerie de portraits forte et poignante

qui dit les conditions de travail, l’environnement et l’humain, avec beau-

coup de tendresse et la maestria de l’artiste.

Un magnifique travail sur la mémoire ouvrière qui inaugure une nouvelle

série d’expositions que le Musée dauphinois consacre à la photographie,

alternant créateurs contemporains et fonds d’images patrimoniaux.

978-2-35567-059-614 €

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