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ouvrages de claude corbo

Mon appartenance. Essais sur la condition québécoise, Montréal, VLB Éditeur, « Études québécoises », 1992, 121 p. Ouvrage récipiendaire du prix Richard-Arès.

Matériaux fragmentaires pour une histoire de l’UQAM, Montréal, Éditions Logiques, « Théories et pratiques dans l’enseignement », 1994, 367 p.

Lettre fraternelle, raisonnée et urgente à mes concitoyens immigrants, Outremont, Lanctôt Éditeur, 1996, 137 p.

À la recherche d’un système de déontologie policière juste, efficient et frugal (avec la colla bo ration de Michel Patenaude), Québec, Gouvernement du Québec, 1997, xxiii+208 p.

Vers un système intégré de formation policière (avec la collaboration de Robert Laplante et Michel Patenaude), Québec, Gouvernement du Québec, 1998, viii+342 p.

La mémoire du cours classique. Les années aigres-douces des récits autobiographiques, Montréal, Éditions Logiques, « Théories et pratiques dans l’enseignement », 2000, 446 p.

Repenser l’école. Une anthologie des débats sur l’éducation au Québec de 1945 au rapport Parent (avec la collaboration de Jean-Pierre Couture), Montréal, Presses de l’Université de Montréal, « PUM-Corpus », 2000, 667 p.

Pour rendre plus sécuritaire un risque nécessaire (avec la collaboration de Ygal Leibu), Québec, Gouvernement du Québec, 2001, vi+326 p.

L’idée d’université. Une anthologie des débats sur l’enseignement supérieur au Québec de 1770 à 1970 (avec la collaboration de Marie Ouellon), Montréal, Presses de l’Université de Montréal, « PUM-Corpus », 2001, 377 p.

L’éducation pour tous. Une anthologie du rapport Parent, Montréal, Presses de l’Univer sité de Montréal, « PUM-Corpus », 2002, 432 p.

Les Jésuites québécois et le cours classique après 1945, Sillery, Éditions du Septentrion, « Cahiers des Amériques », 2004, 404 p.

(Conception et direction) Monuments intellectuels québécois du xxe siècle. Grands livres d’érudition, de science et de sagesse, Sillery, Éditions du Septentrion, 2006, 290 p.

Art, éducation et société post-industrielle. Le rapport Rioux et l’enseignement des arts au Québec 1966-1968, Sillery, Éditions du Septentrion, 2006, 363 p.

En collaboration :

BÉLAND, Claude, Inquiétude et espoir. Valeurs et pièges du nouveau pouvoir économique. Extraits de conférences choisis et ordonnés par Claude Corbo, Montréal, Québec Amérique, 1998, 401 p.

LAMONDE, Yvan, et Claude CORBO, Le rouge et le bleu. Anthologie de la pensée politique au Québec de la Conquête à la Révolution tranquille, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, « PUM-Corpus », 1999, 581 p.

TOCQUEVILLE, Alexis de, Regards sur le Bas-Canada. Choix de textes et présentation de Claude Corbo, Montréal, Typo, 2003, 323 p.

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publications de frédérick gagnon

Ouvrages dirigés :

Le Congrès des États-Unis, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2006, 336 p.

Articles dans des revues avec comité de lecture :

« Le grand retournement : Obama et les midterms de 2010 », Politique américaine, vol. 18 (hiver 2010-2011), p. 117-130.

GAGNON, Frédérick, et Catherine GOULET-CLOUTIER, « Exorcistes américains : la Heritage Foundation, la guerre culturelle et la sauvegarde du mariage et des valeurs traditionnelles », Canadian Review of American Studies, vol. 40, no 3 (décembre 2010), p. 327-350.

« Invading Your Hearts and Minds : Call of Duty® and the (Re)Writing of Militarism in U.S. Digital Games and Popular Culture », European Journal of American Studies, vol. 2 (2010), p. 1-18.

« Quelle guerre culturelle ? Les médias américains et québécois et le mythe de la polarisation de la société américaine », Études internationales, vol. 40, no 3 (septembre 2009), p. 395-416.

« En conformité avec la Maison-Blanche. Le Congrès et la politique de sécurité nationale des États-Unis durant le premier mandat de George W. Bush », Études internationales, vol. 36, no 4 (2005), p. 501-525.

Chapitres de livres :

GAGNON, Frédérick, et Ryan HENDRICKSON, « The United States versus Terrorism : From the Embassy Bombings in Tanzania and Kenya to the Surge in Afghanistan », dans Ralph Carter (dir.), Contemporary Cases in U.S. Foreign Policy : From Terrorism to Trade, 4e édition, Washington D.C., CQ Press, 2010, p. 11-37.

GAGNON, Frédérick, et Marc DESNOYERS, « Les Québécois sont-ils davantage antiaméricains que les Canadiens ? », dans Guy Lachapelle (dir.), Le destin américain du Québec : américanité, américanisation et anti-américanisme, Québec, Presses de l’Université Laval, 2010, p. 89-114.

GAGNON, Frédérick, et Guillaume MASCOTTO, « Le néoconservatisme », dans Alex Macleod et Dan O’Meara (dir.), Théories des relations internationales : Contestations et résistances, deuxième édition revue et augmentée, Outremont, Athéna, 2010, p. 177-193.

HENDRICKSON, Ryan, et Frédérick GAGNON, « The United States vs. Terrorism : Clinton, Bush, and Osama Bin Laden », dans Ralph G. Carter (dir.), Contemporary Cases in U.S. Foreign Policy : From Terrorism to Trade, 3e éd., Washington DC : CQ Press, 2007, p. 1-25.

« L’influence indéniable, mais limitée du conservatisme au Sénat américain », dans Charles-Philippe David et Julien Tourreille (dir.), À droite toute ? Le conservatisme et la société américaine, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2007, p. 87-102.

« Dealing with Hegemony at Home: From Congressional Compliance to Resistance to George W. Bush’s National Security Policy », dans Charles-Philippe David et David Grondin (dir.), Hegemony or Empire ? The Redefinition of US Power under George W. Bush, Aldershot, Asghate, 2006, p. 87-114.

« L’élection des représentants et des sénateurs », dans Frédérick Gagnon (dir.), Le Congrès des États-Unis, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2006, p. 37-66.

« Les règles et les procédures à la Chambre des représentants et au Sénat », dans Frédérick Gagnon (dir.), Le Congrès des États-Unis, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2006, p. 95-125.

GAGNON, Frédérick, et Vanessa MARTIN VANASSE, « Le Congrès et la population américaine », dans Frédérick Gagnon (dir.), Le Congrès des États-Unis, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2006, p. 265-295.

« Le président et le Congrès », dans Élisabeth Vallet (dir.), Le président des États-Unis, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2005, p. 87-116.

GAGNON, Frédérick, et Karine PRÉMONT, « Le président et l’opinion publique », dans Élisabeth Vallet (dir.), Le président des États-Unis, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2005, p. 249-261.

GRONDIN, David, Anne-Marie D’AOUST et Frédérick GAGNON, « Les imaginaires sécuritaires et les alliés à l’heure de la guerre en Irak », dans Alex Macleod et David Morin (dir.), Diplomaties en guerre. Sept États face à la crise irakienne, Montréal, Athéna, 2005, p. 191-238.

« L’influence de la politique étrangère américaine dans les élections présidentielles », dans Élisabeth Vallet et David Grondin (dir.), Les élections présidentielles américaines, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2004, p. 149-168.

GAGNON, Frédérick, et Anne-Marie D’AOUST, « La place des enjeux de politique intérieure dans les élections présidentielles américaines », dans Élisabeth Vallet et David Grondin (dir.), Les élections présidentielles américaines, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2004, p. 169-201.

GAGNON, Frédérick, et Jean-Philippe RACICOT, « L’avenir de la puissance militaire américaine », dans Charles-Philippe David et la Chaire Raoul-Dandurand, Repenser la sécurité : Nouvelles menaces, nouvelles politiques, Montréal, Éditions Fides/La Presse, 2002, p. 155-179.

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Les éditions du Septentrion remercient le Conseil des Arts du Canada et la Société de dévelop pement des entreprises culturelles du Québec (SODEC) pour le soutien accordé à leur programme d’édition, ainsi que le gouvernement du Québec pour son Programme de crédit d’impôt pour l’édition de livres. Nous reconnaissons éga-lement l’aide financière du gouvernement du Canada par l’entremise du Fonds du livre du Canada (FLC) pour nos activités d’édition.

Photo de la couverture : Frédérick Gagnon

Révision : Solange Deschênes

Chargée de projet : Sophie Imbeault

Mise en pages et maquette de couverture : Pierre-Louis Cauchon

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© Les éditions du Septentrion Diffusion au Canada :1300, av. Maguire Diffusion DimediaQuébec (Québec) 539, boul. LebeauG1T 1Z3 Saint-Laurent (Québec) H4N 1S2Dépôt légal :Bibliothèque et Archives Ventes en Europe :nationales du Québec, 2011 Distribution du Nouveau MondeISBN papier : 978-2-89448-664-1 30, rue Gay-LussacISBN PDF : 978-2-89664-642-5 75005 Paris

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Préface

« vivre en ce pays, c’est comme vivre aux États-Unis », chantait Charlebois. Une boutade aussi révélatrice qu’excessive. Nous tenons toujours à ce que notre culture et notre mode de vie se démarquent de la manière américaine avec laquelle nous demeurons cependant très familiers. Nous connaissons bien ce grand voisin. Du moins, nous le prétendons. Combien de questions demeurent sans réponse à son sujet ! Combien de ses paradoxes continuent de nous étonner !

Pourquoi faut-il que ce pays de la liberté soit aussi un lieu de confor-misme étouffant ? Comment concilier l’accueil qu’on y fait souvent aux idées nouvelles et le conservatisme ambiant ? Déjà Alexis de Tocqueville, pourtant grand admirateur de la démocratie américaine, écrivait en 1835 : « Je ne connais pas de pays où il règne, en général, moins d’indépendance d’esprit et de véritable liberté de discussion qu’en Amérique » (deuxième partie, chapitre VII). Le même auteur était aussi fasciné par la coexistence des libertés protégées par la constitution et des fortes contraintes de la pratique religieuse.

Et que dire de l’énorme diversité des opinions, des origines eth-niques et des comportements d’une population toujours encline aux grandes manifestations de nationalisme, comme cela s’est vu après les événements du 11 septembre 2001 ? Que dire encore de l’individualisme profond qui s’accompagne facilement de multiples appartenances communautaires ? Et puis comment concilier un capitalisme aussi triomphant et omniprésent qu’amoral avec le poids des valeurs et des principes moraux ?

Les États-Unis sont devenus une hyperpuissance. En dépit des indéniables signes de déclin de leur hégémomie, ils constituent toujours un véritable pouvoir impérial. Et pourtant, ce pays entend demeurer une république et se garde d’exercer son pouvoir directement sur d’autres populations, sauf d’une manière temporaire. Non pas que

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les Américains ne cherchent pas à s’imposer, à contrôler la politique internationale. Mais, pour le meilleur ou pour le pire, ils n’ont pas voulu, sauf en de rares exceptions, ériger leur drapeau sur d’autres territoires. Ils ont porté la guerre en Afghanistan et en Irak, mais ils entendent remettre les formes du pouvoir aux Afghans et aux Irakiens. La plupart y verront non sans raison la continuation du contrôle par des intermédiaires. Il n’en demeure pas moins que cette façon de faire se distingue du colonialisme classique comme l’hégémonie diffère de l’impérialisme. Quant à nous, au Canada, au Québec, nous savons bien que les Américains exercent une influence profonde sur nos vies, mais nous nous permettons toujours une certaine indépendance que d’autres empires n’auraient pas tolérée.

Tous ces paradoxes, apparaissant souvent comme des contradictions non résolues, alimentent nos perceptions ambivalentes au sujet des États-Unis. Il nous arrive de détester les Américains, du moins une cer-taine image qu’ils projettent, mais il nous arrive aussi de les admirer, de nous émouvoir de leurs étonnantes aptitudes à rebondir et à produire des merveilles après avoir donné lieu à d’exécrables malversations. Que nous n’arrivions pas le plus souvent à résoudre ces contradictions nous montre bien que nous connaissons encore mal le pays voisin. Nous connaissons mal ses origines, son histoire et ses institutions politiques.

Peut-être parce que le jeu politique, de plus en plus axé sur les images et les perceptions, un phénomène qui n’apparaît guère différent d’un pays à l’autre en Amérique du Nord, nous arrivons mal à mesurer la dis-tance qui sépare nos institutions de celles des États-Unis. Encore ici, les questions sont nombreuses. Pourquoi un candidat défait à la présidence des États-Unis est-il voué à une quasi-retraite prématurée et, du moins, ne s’impose pas comme un chef de l’opposition et un candidat à l’élection suivante ? Qu’est-ce que ce Collège électoral qui complique grandement une élection présidentielle ? Pourquoi toutes ces élections primaires en vue de déterminer un candidat ? Pourquoi le taux de participation est-il si faible au pays de la démocratie ? Pourquoi est-on parfois si peu critique de la personne du président qui peut tout de même être soumis à des procédures de destitution ? Les médias américains sont-ils tous vraiment au service du pouvoir ? Quel est le sens du fédéralisme américain dans un pays où la plupart des gens n’habitent plus l’État où ils sont nés ? À quoi tient la persistance du bipartisme américain ? Quelle différence y a-t-il entre les deux Chambres du Congrès ? Le président n’est-il qu’une simple marionnette à la disposition de puissants groupes d’intérêt ?

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L’ouvrage qui suit offre des réponses à la plupart de ces questions. Des réponses complexes mais claires et solidement informées. Des réponses qui tiennent compte de l’évolution d’un système dont la per-manence tient sans doute à ses facultés d’adaptation. Claude Corbo et Frédérick Gagnon observent avec une attention et un intérêt soutenus les institutions politiques américaines depuis plusieurs années. Plus de trente ans dans le cas de Corbo, depuis moins longtemps pour Gagnon qui, prenant la relève, s’avère déjà le grand spécialiste du Congrès et du système électoral. Les nombreux étudiants qui ont suivi leurs cours à l’Université du Québec à Montréal vous diront à quel point ces professeurs sont à la fois savants et pédagogues. Le lecteur pourra le constater dans les pages de ce livre qui fait un tour à peu près complet des institutions politiques des États-Unis. Neuf chapitres font le point de la structure et du fonctionnement du système américain. En voici une sorte d’avant-goût qui pourra peut-être orienter le lecteur.

Le cadre constitutionnel

Le premier chapitre traite, comme il se doit, de la Constitution, la loi fondamentale du pays. Les Américains sont très fiers de leur constitu-tion qui fut rédigée en l’espace d’un été, en 1787, par des hommes à la fois érudits, intelligents et préoccupés, semble-t-il, autant de leurs intérêts que des grands principes libéraux élaborés au xviiie siècle par nombre de penseurs européens. On considère ce document comme une habile et opportune synthèse entre les principes et les nécessités de la construction d’une société politique et d’un gouvernement stables. La grande idée qui anime cette construction, une véritable obsession chez les fondateurs de la république américaine, est celle de la liberté. Entendez d’abord la liberté des personnes individuelles. La plupart des habitants des treize colonies britanniques d’Amérique s’en étaient déjà inspirés depuis les origines. La déclaration d’indépendance a affirmé solennellement les paramètres de cette liberté en 1776 : « Nous tenons ces vérités pour indépendantes par elles-mêmes : que tous les hommes naissent égaux, que leur Créateur les a dotés de certains droits inaliénables, parmi lesquels la vie, la liberté et la poursuite du bonheur ; que, pour garantir ces droits, les hommes instituent parmi eux des gouvernements dont le juste pouvoir émane du consentement des gouvernés. » Voilà l’essentiel pour les Américains d’aujourd’hui comme pour ceux d’hier. À eux seuls cependant, ces principes ne suffisaient

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pas à construire un pays, à donner une structure gouvernementale commune à treize États différents. C’est pourquoi Hamilton, Madison et leurs collègues ont voulu s’attaquer à la tâche de fournir une struc-ture solide et viable à l’application de ces principes. Ils ont eu l’audace de concevoir, pour ce faire, la notion d’une identité commune et de l’inscrire dans la première phrase du texte constitutionnel : « Nous, le peuple des États-Unis… » Cette notion allait servir de fondement au fédéralisme américain et permettre de réfuter l’argument selon lequel l’union américaine reposait d’abord sur la volonté des États.

On verra aussi comment l’idée de liberté et la méfiance de l’ordre politique qui en découle animent tout l’édifice gouvernemental améri-cain, tel qu’il a été conçu par la Constitution. Tout est mis en œuvre, en particulier en raison de l’astucieux système de poids et de contrepoids, les fameux checks and balances, pour atténuer l’exercice du pouvoir et prévenir sa tendance naturelle à l’arbitraire. On peut dire du système américain, et cela se voit dans tous les articles de la Constitution, qu’il rend extrêmement difficile et complexe le passage d’une loi. Tout se passe comme si l’absence de loi et de gouvernement était préférable à un mauvais gouvernement et à de mauvaises lois.

Cette constitution fut ratifiée par les législatures de tous les États originels dès l’année 1788. Mais le texte fondamental alors approuvé ne peut être considéré à lui seul comme l’héritage constitutionnel. Il faut lui annexer les 27 amendements qui y furent apportés au cours des années en raison d’un processus complexe de ratification, dont les 10 premiers, de 1789, constituent ce qu’on appelle la Charte des droits, le Bill of Rights. Il faut encore ajouter les grands jugements interprétatifs de la Cour suprême qui se sont imposés dès 1803 en raison de ce qu’on appelle la judicial review, la révision judiciaire ou le contrôle de constitutionnalité. Enfin, quelques lois fédérales ont aussi affecté la structure de l’édifice constitutionnel.

Le fédéralisme

Le premier compromis réalisé par la Constitution fut celui du fédéra-lisme. Les treize États originels ne se sont pas tout à fait fondus dans le pays dont le nom même rappelle leur existence. C’est un système fort complexe qui a été mis sur pied et qui préserve une structure politique considérable au niveau de chaque État et un partage de pouvoirs entre ces États et le gouvernement central. Le rédacteur de la Déclaration

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d’indépendance, Thomas Jefferson, s’est fait d’abord le champion des pouvoirs des États, plus propices, selon lui, à l’exercice d’une véritable démocratie. Après être devenu président cependant, il a graduellement évolué vers une forte affirmation du pouvoir central.

On peut dire du système fédéral américain qu’il s’est d’abord révélé comme un système beaucoup plus décentralisé que celui du Canada. Le pouvoir résiduel y est accordé aux composantes de la fédération dont plusieurs s’étaient déjà donné ou se sont donné par la suite des constitutions propres. Mais l’union fédérale américaine a évolué avec le temps vers une plus forte centralisation. Après la guerre civile surtout, et encore au moment de la reconnaissance des droits civiques pour les minorités noires au cours des années 1950 et 1960, l’État fédéral s’est imposé comme l’État national de tous les Américains. Ses incursions dans des domaines de compétence des États sont beaucoup moins contestées que ne le sont celles du gouvernement fédéral canadien. Même si certains États se distinguent parmi d’autres en raison de leurs traditions, il n’existe pas, aux États-Unis de revendications autono-mistes comparables à celles de la province francophone du Québec. En conséquence, en raison de la grande mobilité territoriale et des fortes manifestations de nationalisme, l’allégeance nationale est beaucoup plus forte aux États-Unis qu’au Canada. On va même jusqu’à substituer au nom légal et fédéral du pays, The United States of America, un nom plutôt usurpateur mais affecté d’une grande charge affective : America.

Malgré tout, le fédéralisme est encore étonnamment vivant aux États-Unis. Les Américains aiment les petites structures gouvernemen-tales et régionales et entendent conserver un grand nombre de pouvoirs aux États. Par exemple, comme on l’a vu au moment du célèbre imbroglio électoral de l’automne 2000, c’est encore chacun des États qui est responsable de l’organisation des élections à tous les niveaux, même lorsqu’il s’agit d’élire un président pour tout le pays.

La complexité des institutions politiques de chaque État est tout à fait déconcertante. Corbo et Gagnon nous révèlent qu’il existe, aux États-Unis, plus de 89 527 instances gouvernementales, dont la plupart sont soumises au processus électoral.

Les médias et les groupes d’intérêt

Comme si le fédéralisme américain n’était pas assez complexe, il faut encore tenir compte de ces acteurs politiques qui sont devenus avec

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le temps incontournables et auxquels plusieurs assignent un pouvoir plus considérable que celui des acteurs officiels proprement dits. Déjà à la fin du xixe siècle, les seuls médias imprimés étaient devenus assez puissants et influents pour galvaniser l’opinion publique, pousser le Congrès des États-Unis à déclarer la guerre à l’Espagne (1898) et jeter les bases d’un impérialisme américain. Que dire de notre époque où les médias électroniques se sont ajoutés à la presse écrite pour influer non plus quotidiennement mais d’heure en heure sur la population, peut-être autant par la désinformation que par l’information proprement dite ? Au pays de l’entreprise privée, ces médias sont presque tous entre les mains de grandes sociétés qui, le plus souvent, ne se gênent pas pour biaiser l’information dans la ligne de leurs intérêts corporatifs. Malgré tout, en raison de la liberté fondamentale de la presse, de la compétition et de la pression de leurs lecteurs, certains grands jour-naux et parfois des réseaux de télévision et de radio fournissent une information de qualité. Il arrive aussi que les médias américains, pour conformistes et prudents qu’ils soient habituellement, se fassent assez agressifs pour mordre sur le pouvoir, probablement plus qu’ailleurs. On a fait démissionner deux présidents au cours de la seconde moitié du xxe siècle !

Il faut signaler aussi un phénomène relativement peu connu de la population canadienne. C’est celui de la télévision et de la radio publiques aux États-Unis. On connaît mieux le réseau télévisuel PBS (Public Broadcasting System) dans certains milieux instruits, mais on connaît mal l’admirable réseau radiophonique NPR (National Public Radio) qui est relayé par un nombre considérable de stations à travers tout le pays et dont la qualité est inégalée au Canada. Ces deux chaînes sont alimentées par une faible subvention fédérale et surtout par les contributions individuelles de son auditoire passablement restreint en comparaison de celui des grandes chaînes commerciales.

Les groupes d’intérêts agissent plus précisément et plus directement sur tout le processus politique américain. Les États-Unis sont le pays de l’individualisme, mais aussi celui des groupes. L’individu américain a horreur de la contrainte, surtout de celle d’une communauté qui serait naturelle, imposée. Il se tourne par contre volontiers vers une appartenance volontaire et conjoncturelle à de multiples groupes qui tissent la trame de la société américaine. L’individu se défend fort mal dans la machine américaine, en dépit de tous les mythes qui célèbrent ses succès. Il fera valoir ses intérêts économiques ou autres,

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ses croyances, ses préférences au sein des groupes qui exerceront toutes sortes d’influences tant sur les législateurs américains que sur le pouvoir exécutif et la fonction publique. Ces groupes, pour la plupart fort bien financés, sont devenus des bastions de pouvoir, au cœur du système politique. Ils constituent avec les deux grands pouvoirs du Congrès et de la présidence ce qu’on a appelé le triangle de fer de la politique américaine. Si leur influence est considérable, leur nombre et leur diversité sont tels qu’ils en viennent souvent à se neutraliser mutuellement, du moins à voir leurs forces diminuées par des forces rivales.

Les partis politiques

L’existence des partis politiques n’est pas prévue comme telle dans la Constitution. Il n’y est fait aucune référence. On peut penser cependant que les Pères fondateurs prévoyaient déjà leur rôle. Déjà des factions rivales s’étaient formées parmi eux. Tout naturellement, dès les premières années de la république américaine, de grands courants d’opinion se sont manifestés et, très tôt, sont apparus deux partis politiques, en quelque sorte, une gauche et une droite. Le parti des fédéralistes a occupé le champ du conservatisme et de l’ordre établi bien représenté par le premier secrétaire au Trésor, Alexander Hamilton. Celui des républicains a été animé d’abord par Thomas Jefferson, apôtre de la démocratie, favorable à la Révolution française au cours de ses premières années. Andrew Jackson, en 1828, transforme le parti de Jefferson en Parti démocrate en lui insufflant une forte touche populiste. Les fédéralistes cèdent leur place aux républicains nationaux, aux whigs puis au Parti républicain d’Abraham Lincoln, fondé en 1856.

Les partis politiques américains sont à la fois fort bien structurés et peu disciplinés. Ils se manifestent et s’affirment à tous les niveaux de l’appareil politique. Ils savent provoquer de grands rassemblements, en particulier autour de candidats à la présidence et au moment de leurs conventions quadriennales. Le système de division des pouvoirs des États-Unis ne permet pas cependant la stricte discipline de partis du système britannique. Ainsi un président ne commande pas nécessaire-ment le vote de son parti au Congrès, comme le fait un premier ministre au Canada auprès du Parlement. De plus, sans doute en corrélation avec cette absence de discipline, la gamme idéologique est très étendue au

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sein de chaque parti. Même si l’on convient de situer le Parti démocrate à gauche du Parti républicain, on a pu parler de démocrates fortement conservateurs, surtout ceux du Sud, jusqu’à une époque récente. On a pu aussi considérer des républicains comme « libéraux » (au sens américain de ce mot), une espèce cependant de plus en plus rare. On a encore identifié des Reagan Democrats, favorables au président républicain et des New Democrats qui, sous la gouverne de Clinton, se rapprochaient d’un certain centre plus près des républicains. On a parlé plus récemment des Blue Dog Democrats tandis que, du côté républicain, sont apparus les membres du Tea Party. En fait, on peut dire que l’indétermination idéologique des grands partis américains a donné lieu à de multiples orientations partisanes qui diversifient l’horizon politique américain en dépit de ce qu’on appelle le bipartisme.

En raison des nécessités de la publicité et de l’organisation de plus en plus complexe des campagnes électorales, le financement pèse de plus en plus lourdement sur les partis, ce qui les rend évidemment dépendants dans une bonne mesure des contributions privées qu’ils reçoivent, même après les efforts récents pour encadrer et réglementer ces contributions. Cette obligation du financement est sans doute l’un des facteurs qui rend très difficiles la création et le maintien de tiers partis aux États-Unis. Il faut tout de même noter que ces partis ont été fort nombreux tout au long de l’histoire du pays. Elles ne sont pas rares, les élections présidentielles où un tiers parti a agi comme un trouble-fête. Ainsi, en 1992, le Parti réformiste du milliardaire Ross Perot a reçu assez de votes (environ 20 %) pour contribuer à la victoire de Bill Clinton sur George H. W. Bush. En 2000, les quelque 3 % de votes recueillis par le Parti vert de Ralph Nader auraient fait gagner Al Gore facilement s’ils avaient été en sa faveur.

Il demeure cependant que jamais un président n’a été élu sous la bannière d’un tiers parti. Jamais non plus l’un de ces partis n’a représenté une véritable force au Congrès. Cela est peut-être dû à la complexité du processus électoral.

Le processus électoral

Dans peu de pays au monde les citoyens sont invités à voter aussi souvent et sur un aussi grand nombre de sujets. Les États-Unis sont fondés sur un parti pris d’intervention citoyenne et surtout de contrôle du pouvoir gouvernemental. Le « consentement des gouvernés »

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proclamé dans la Déclaration d’indépendance doit donc se manifester à tous les échelons politiques, dans ces quelque 89 500 structures gouvernementales américaines. Il en résulte un effet contraire de ce à quoi on pouvait s’attendre. En définitive, les Américains sont moins nombreux à voter que dans la plupart des autres démocraties. Pourquoi le taux de participation est-il aussi faible, même pour l’élection présidentielle où il dépasse rarement 60 % ? Sans doute pour plusieurs raisons. En voici quelques-unes.

D’abord le sacro-saint principe de la liberté individuelle. La démarche électorale, aux États-Unis, doit être strictement personnelle. Les listes électorales ne sont donc pas constituées à l’avance par des fonctionnaires, mais par l’inscription volontaire de chaque électeur. Chacun doit s’inscrire lui-même sur la liste en vue de pouvoir voter. Ajoutez à cela nombre de restrictions imposées pendant longtemps dans les États du Sud en vue le limiter le vote des citoyens de race noire.

Le processus électoral est encore compliqué par le fait que chaque État de l’Union établit ses propres règles. Il y a donc au moins cinquante façons de voter aux États-Unis. Cinquante façons d’organiser les élections primaires qui doivent décider soit de l’investiture d’un candidat, soit du choix des délégués à la convention qui choisira ce candidat. Ces élections sont parfois restreintes aux membres d’un parti, parfois ouvertes à tous les citoyens de la circonscription.

Enfin, au pays de la démocratie, une certaine réticence des Pères fon-dateurs, due à la crainte de la mob democracy, la démocratie de masse, les a amenés à encadrer les élections. On a voulu que le président ne soit pas élu par « nous le peuple » mais par de grands électeurs d’abord désignés par les législatures des États, puis enfin, comme c’est le cas aujourd’hui, par l’ensemble de la population. De même les membres de la Chambre haute, le Sénat, n’ont été élus directement par le peuple que depuis 1914. Ils étaient autrefois désignés par les assemblées de chaque État.

Cette démocratie tant célébrée par les dirigeants américains se trouve donc diminuée par ce lourd processus qui place le citoyen devant une quantité innombrable de choix tous les deux ans. On pourrait aller jusqu’à dire que la limitation du pouvoir importe davan-tage aux Américains que la participation des citoyens. Cette limitation est assurée par le système de poids et contrepoids et la stricte séparation des trois grands pouvoirs, celui du Congrès, celui du président et le pouvoir judiciaire.

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Le Congrès

Le Congrès, de par ses deux Chambres, le Sénat et la Chambre des représentants, constitue le pouvoir fondamental aux États-Unis. Souvenons-nous que cette institution est la première en date. C’est un Congrès, dit continental, qui a d’abord déclaré l’indépendance du pays. Les pouvoirs exécutif et judiciaire sont venus par la suite. Le Congrès américain demeure seul dépositaire du pouvoir de faire des lois, de par le premier article de la Constitution qui déclare d’emblée que « tous les pouvoirs législatifs […] seront accordés à un Congrès des États-Unis ». Toutes les lois du pays doivent donc passer par cette institution.

Toujours en raison de cette obsession de la limitation du pouvoir, le Congrès lui-même est divisé en deux Chambres passablement différentes l’une de l’autre. L’une est composée d’élus qui représentent l’ensemble d’un État tandis que l’autre représente des circonscriptions locales définies au prorata de la population. Les 50 sénateurs (à raison de deux par État) sont élus pour six ans, dont le tiers tous les deux ans, les 435 représentants pour deux ans. Ces derniers sont toutefois susceptibles de siéger pendant de nombreuses années en vertu de machines électorales locales à toute épreuve. Le rôle particulier de chacune des Chambres est défini par la Constitution. Le Sénat est responsable de la surveillance étroite des institutions de la présidence, tout particulièrement de la ratification des traités et des nominations importantes du président. La Chambre est d’abord responsable de l’élaboration du budget. Les deux Chambres ont la prérogative de déclarer la guerre, de lever et d’entretenir des forces armées.

Les leaders de chaque Chambre exercent une grande influence et un certain contrôle sur les membres de leurs partis respectifs ; mais, en raison de la faible discipline des partis, le vote des membres n’est généralement pas prévisible. Il en résulte de constantes manœuvres d’échange de bons services entre les législateurs (give and take) et un jeu incessant d’influences de toutes sortes, des lobbies, de l’exécutif et de l’ensemble des électeurs. De plus, sénateurs et représentants jouissent d’un abondant personnel de recherche et ont l’occasion de se spécialiser sur certaines questions, par leur participation aux commissions permanentes.

Une loi ne peut être sanctionnée par le président que si elle a parcouru le cheminement complexe qui conduit à l’approbation du Congrès : dépôt dans chacune des deux Chambres, étude élaborée dans

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des commissions, possibilité d’amendements, vote de l’ensemble de la Chambre et finalement conciliation des deux formulations par une commission conjointe. Enfin, si le président peut opposer son veto à une loi, le Congrès peut le renverser par un vote des deux tiers de chacune des deux Chambres. On verra en détail au chapitre 7 toutes les périlleuses étapes du passage d’une loi.

La présidence

Le pouvoir du président est donc passablement limité par celui du Congrès, mais il n’en demeure pas moins considérable, de par ses prérogatives et de par le prestige de la personne qui occupe cette fonction suprême. On a dit du président des États-Unis qu’il était un roi élu. On peut penser en effet que les Pères fondateurs songeaient au pouvoir royal britannique en instituant la fonction de premier magistrat, puisque c’était l’exemple par excellence du pouvoir exécutif qu’ils avaient sous les yeux. Obsédés qu’ils étaient par les méfaits du pouvoir arbitraire de George III, ils ont sans doute voulu encadrer le pouvoir présidentiel, mais ils ont aussi voulu lui donner tout le prestige qui entourait la royauté de même que sa capacité d’agir d’une manière efficace. En fait, le président est devenu plus puissant que le souverain britannique, puisqu’il est doté à la fois de l’autorité morale de la monarchie et des pouvoirs du premier ministre.

Le président est le chef de l’État et le détenteur du pouvoir exécutif, il est commandant en chef des forces armées, il a le pouvoir de sanctionner les lois, sous réserve du renversement de son veto par les deux tiers des deux Chambres du Congrès. Même si le pouvoir législatif est réservé au Congrès, le président n’en est pas moins un législateur à sa façon, puisqu’il est en mesure de proposer des lois aux Chambres et qu’il dispose de multiples moyens de persuader les législatures d’entériner ses projets.

Bien qu’il soit susceptible d’être soumis à une procédure de destitu-tion, le président jouit d’un prestige beaucoup plus grand que celui des chefs de gouvernement dans notre système. Le président n’est pas qu’un personnage politique qui a atteint le faîte du pouvoir. Il est auréolé par sa fonction de chef d’État, de premier magistrat, de représentant de la nation. Il est certes exposé à de nombreuses critiques, mais il jouit en même temps d’un ascendant tout à fait particulier. Contrairement au premier ministre dans notre système parlementaire, il n’est pas soumis à quelque processus de reddition des comptes auprès du Congrès. C’est

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lui qui prend l’initiative de rassembler les deux Chambres pour leur soumettre ses politiques, au début de chaque année, dans un discours sur l’état de l’Union et à d’autres moments selon son bon vouloir.

La fonction la plus importante du président, hors des périodes de crise qui ont été nombreuses au cours des cent dernières années, est probablement celle de persuader, voire de manipuler les leaders du Congrès en vue de leur faire accepter son budget et les diverses mesures dont il entend marquer son mandat. Il dispose, pour ce faire, de multiples moyens d’apprivoiser et de récompenser les légis-lateurs. Surtout s’il jouit d’une grande popularité dans l’opinion publique, il bénéficie toujours de la capacité de s’adresser directement à la population qui retransmet le message à ses commettants. Avec les moyens de communication modernes, ce pouvoir du président est considérablement renforcé. Nul autre que le président ne peut invoquer aussi péremptoirement les intérêts supérieurs de la nation.

Enfin, cela sera illustré abondamment au chapitre 8, le président dispose d’énormes instruments, d’un appareil exécutif complexe qui lui est, en principe, tout à fait soumis. Rappelons que le pouvoir exécutif américain n’est pas collectif comme c’est le cas dans notre système de Conseil de ministres, mais bien personnel. Tous les membres du Cabinet américain, de même que tous les membres de la fonction publique dépendent du bon vouloir du chef du gouvernement.

Le pouvoir judiciaire

Il n’en va pas de même des juges qui constituent le troisième pouvoir dans le système politique américain. Ceux qui siègent aux cours les plus élevées, Cour suprême, Cours d’appel, sont sans doute nommés par le président ; et cela n’est pas sans conséquence. Car ces institutions sont souvent marquées par les principes propres à un président donné. Mais les juges sont nommés à vie et exercent généralement leur fonction indépendamment du pouvoir exécutif. De plus, leur nomination est beaucoup moins arbitraire que ce n’est le cas au Canada, du moins au moment où ces lignes sont écrites. La nomination des juges des Cours fédérales est soumise au processus de ratification du Sénat et il arrive fréquemment qu’un président doive retirer ses candidats en raison de fortes oppositions de la part des législateurs.

C’est la Cour suprême, tout particulièrement, qui est détentrice d’un véritable pouvoir qui fait contrepoids à celui du législatif et de l’exécutif.

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En effet, depuis le fameux arrêt Marbury c. Madison de 1803, s’est institué et s’est avéré, de par l’initiative du juge en chef John Marshall, le pouvoir de révision judiciaire ou contrôle de constitutionnalité (judicial review). En raison de ce contrôle, les juges deviennent de véritables législateurs dans la mesure où ils révoquent des lois en les déclarant non conformes à la Constitution et vont même jusqu’à proposer des lois d’application des principes constitutionnels. Ils peuvent aussi agir sur le pouvoir exécutif en l’enjoignant de se conformer à la Constitution.

Claude Corbo et Frédérick Gagnon font état, dans le chapitre 9, de deux grandes tendances qui ont marqué le rôle de la Cour suprême. Une tendance passive selon laquelle la Cour se contente de son rôle strict d’interprétation de la loi, en se gardant de toute ingérence politique et en prenant soin que ses jugements ne contribuent pas à modifier le cours normal de l’exercice du pouvoir politique. La tendance active a au contraire caractérisé les jugements de la Cour suprême durant certaines périodes, dont la plus récente. Les juges ont alors fortement contribué à orienter l’évolution sociopolitique des États-Unis, par exemple en décrétant les droits des minorités raciales et la liberté de choix en ce qui a trait à l’avortement (Roe c. Wade, 1973). Durant les années de George W. Bush (2001-2009), la Cour suprême des États-Unis est devenue plus conservatrice et l’a fait sentir dans ses jugements.

Le lecteur trouvera donc dans les pages qui suivent une multitude de réponses à ses questions. Il n’y trouvera cependant que fort peu de jugements de valeur. Les auteurs de cet ouvrage ont voulu seulement fournir toute la matière nécessaire à ces jugements, tout particuliè-rement à ceux qui concernent les avantages et les désavantages du système américain. Ce dernier est comparé fréquemment au système britannique qui est le nôtre, laissant toujours au lecteur le soin de tirer ses propres conclusions.

Les paradoxes de la puissance américaine ne s’en trouveront sûrement pas tous résolus. On peut tout de même compter que ce livre contribuera à mieux en saisir les multiples dimensions et à mieux comprendre les fascinantes péripéties de la politique américaine.

Louis BalthazarCoprésident,

Observatoire sur les États-Unis,Chaire Raoul-Dandurand,

Université du Québec à Montréal

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Introduction à la troisième édition

Parvenu à une troisième édition avec, en prime, un deuxième auteur, ce livre commence à avoir une histoire.

Le livre tire son origine d’une discussion impromptue, il y a mainte-nant quelques années, entre l’éditeur Denis Vaugeois et Claude Corbo à propos des mérites respectifs du système parlementaire d’inspiration britannique, qui prévaut au Québec depuis deux siècles, et du système présidentiel des États-Unis, en place depuis 1789. L’éditeur, mesurant à la fois l’intérêt professionnel et personnel et la réserve sceptique de son interlocuteur quant aux vertus du système de gouvernement de nos voisins américains, lui a dit son goût de publier un livre sur le sujet et lui a proposé, avec un soupçon de défi, de l’écrire. L’invitation était irrésistible. Un livre a donc pris forme et il en arrive aujourd’hui à sa troisième édition.

Avant toute autre chose, il faut bien préciser que le livre que l’on s’apprête à lire se veut une introduction générale aux institutions politiques des États-Unis, une introduction destinée à un grand public, y incluant les étudiants de collèges et du premier cycle universitaire. Il ne s’agit donc pas d’un ouvrage pour les spécialistes des États-Unis qui n’y apprendront rien qu’ils ne connaissent déjà. Le livre présente d’abord le cadre constitutionnel (y incluant le fédéralisme) des États-Unis, à la lumière du bagage génétique institutionnel des treize colonies originaires et de l’expérience politique du pays depuis ses origines. On examine ensuite les plus importants acteurs politiques qui occupent la scène politique du pays, les citoyens eux-mêmes, les groupes ethniques, les forces religieuses, les médias, les groupes d’intérêt et, évidemment, les partis. Cela prépare à une présentation du très complexe processus électoral américain. Dans un dernier temps, le livre analyse les grandes institutions dirigeant l’appareil gouvernemental : le Congrès, la présidence et le pouvoir judiciaire et en particulier la Cour

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CHAPITRE IXLa Cour suprême et le pouvoir judiciaire 373IX.1 Fondements et caractéristiques politiques 373IX.2 Le pouvoir judiciaire dans le cadre fédéral 377IX.3 Les tribunaux d’États 379IX.4 Les tribunaux fédéraux 383IX.5 La Cour suprême 390

Bibliographie 426Politique américaine et culture populaire 437Index thématique 450

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cette troisième édition estcomposée en minion corps 10,5

selon une maquette réalisée par pierre-louis cauchonet achevé d’imprimer en juillet 2011

sur les presses de l’imprimerie marquisà cap-saint-ignace, québec

pour le compte de gilles hermanéditeur à l’enseigne du septentrion

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