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PRO Le style correct : clarté, concision, richesse Geneviève Fournier efficacité professionnelle vie professionnelle

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Geneviève Fournier

e f f i c a c i t é p r o f e s s i o n n e l l ev ie pro fess ionnel le

Le Style correct :clarté, concision, richesse

Geneviève Fournier

Les Éditions DEMOS20 rue de l’Arcade 75008 Paris

www.editionsdemos.fr

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S O M M A I R EIntroduction 7

Chapitre I • Employez des mots corrects 9• Évitez les mots inexistants, les emplois fautifs, les impropriétés 10• Méfiez-vous des faux amis : paronymes, homonymes 24• Chassez les redondances, les pléonasmes 30

Chapitre II • Employez des mots précis, concis, connus de tous 35• Quantifiez 36• Qualifiez 36• Évitez les mots longs 44• Évitez les constructions nominales, les locutions avec des verbes

passe-partout 45• Évitez le jargon 47• Utilisez les sigles à bon escient 49• N’abusez pas des néologismes 52• Évitez les tics et les clichés 56

Chapitre III • Rappel de quelques règles d’orthographe 61• Féminisation des noms de métier, de fonction 62• Majuscules - minuscules 65• Nombres en chiffres 71• Abréviations 73• Incertitudes et confusions possibles 74• Accords en nombre selon le sens 81• Verbes avec leurs sujets 83• Participes présents et adjectifs en -ent ou -ant 87• Participes passés 89

Chapitre IV • Vérifiez la correction syntaxique 95• Rappels de définitions utiles dans le domaine de la syntaxe 96• L'emploi des prépositions 97• L'emploi des pronoms 99• L'emploi des modes et des temps 104• Les propositions coordonnées 122• Les propositions subordonnées complétives 124• Les propositions subordonnées relatives 126• Les interrogatives directes 131

Chapitre V • Construisez des phrases dynamiques 133• Choisissez la place des propositions subordonnées, des groupes

prépositionnels 133• L'actif ou le passif ? 134

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• La tournure impersonnelle ou personnelle ? 136• L'affirmation ou la négation ? 137• Variez les tournures 140• Allégez 148

Chapitre VI • Ponctuez 157• Les trois fonctions de la ponctuation 159• Le point 162• Le point-virgule 163• La virgule 164• Les deux-points 173• Les guillemets 175• Les parenthèses 176• Les crochets 178• Le tiret 179• Le point d’interrogation 180• Le point d’exclamation 181• Les points de suspension 181

Chapitre VII • Liez vos idées 183• Marquer les rapports entre les idées 183• Introduire fait, idée, argument ; idées ordonner un développement,

une argumentation 187• Introduire des arguments successifs ; marquer une alternative 188• Ajouter un élément à l’information, à l’explication, à l’argumentation 189• Confirmer un fait ou une idée ; l'illustrer, introduire un exemple 191• Introduire une précision 193• Introduire une explication, une cause 194• Introduire une opposition, une objection, une réfutation 197• Introduire une restriction, une atténuation, émettre une réserve 198• Introduire une conclusion 200• Tableau des liens logiques 202

Conclusion 203

Bibliographie 205

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À mes amis, à mes élèves et à mes stagiaires.

Je leur dois la matière et l'idée de ce livre.

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I N T R O D U C T I O NPourquoi un livre sur le style « correct »?

Pour tous ceux qui occupent une fonction, exercent un métier, ont une responsabilité,écrire engage. Communiquer, c’est toujours faire circuler une information pourmodifier le savoir, les connaissances, le savoir-faire ; c’est vouloir convaincre,persuader, modifier les opinions, inciter à l’action.Pour y parvenir, il s’agit non pas d’impressionner par ses tournures, mais deproduire un texte où l’intelligibilité s’allie à la concision.Contrairement à l’échange verbal où l’interlocuteur peut intervenir pour s’expliqueret corriger ses formulations, le lecteur d’une lettre, d’une note, d’un compterendu, d’une synthèse est impuissant et démuni quand il est confronté à untexte qu’il ne comprend pas, d’où l’importance de la clarté qu’on a su lui garantirdans l’écriture.

Quand vous rédigez, vous cherchez vos idées ; vous vous concentrez d’abordsur le fond, sur ce que vous avez à dire. Vous voulez vous exprimer du mieuxpossible, mais bien vite vous vous interrogez sur l’orthographe ou le sens d’unmot, l’usage d’un signe de ponctuation, la correction de telle ou telle tournure.

Peut-être aussi avez-vous constaté que dans les écrits, notamment administratifs,les autorités de l’État incitent les rédacteurs à abandonner des formulesconventionnelles et guindées : j’ai l’honneur d’accuser réception…, par laprésente, je vous informe que j’ai bien reçu votre lettre du…, etc. Le style devientplus simple, plus dépouillé, sans rien perdre de sa convivialité. Mais le cheminest encore long.

La lisibilité d’un texte tient à la facilité, à l’aisance avec laquelle il sera déchiffréet compris. À la fois visuelle et textuelle, elle ne concerne donc pas seulementles mots, mais la façon de présenter les idées. Incombant intégralement aurédacteur, elle sera perçue plus ou moins consciemment par le lecteur. Il ne fautjamais compter sur l’effort que ce dernier devrait exercer pour compenser sesdifficultés à comprendre le texte écrit à son intention.

Les informations à connaître ou à retenir doivent être immédiatement intelligibles.Il importe donc de trouver un équilibre entre une concision qui tendrait versl’obscurité par accumulation d’implicite et de non-dit, et une abondance quitendrait au superflu.

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À qui s’adresse-t-il ?

À tous ceux qui, pour des raisons professionnelles ou personnelles, ont à écrirelettres, notes, courriels, comptes rendus, rapports.Aux personnes qui n’ont pas acquis au cours de leur vie, de leurs études, deleur pratique professionnelle la maîtrise souhaitable de l’expression et quidésirent élever le niveau de leurs connaissances et aptitudes en ce domaine.À ceux qui veulent prendre de l’assurance, lever les difficultés, trouver ouretrouver le plaisir d’écrire et être appréciés pour la clarté de leurs idées.

Quel est son objectif ?

Ce livre ne comporte ni citations ni théories sur le bon style, le style pur, l’artdu style… Il n’énumère pas davantage une série de règles, de prescriptions, denormes que le rédacteur devrait suivre. Mais il défend le « bon usage » si larègle est fondée sur une exigence de clarté syntaxique et sémantique. Il mentionneles tours condamnés par les grammairiens « puristes » et il en explique lesraisons. Il fait aussi référence aux recommandations officielles en matièred’orthographe et de terminologie, permettant ainsi au rédacteur d’être attentifaux évolutions de la langue.

Par l’observation de phénomènes de langue, par la comparaison d’expressionset de phrases, il se propose d’amener le rédacteur à prendre conscience de sesfautes et de ses erreurs, à en expliquer l’origine et les conséquences pour letexte. Il formule règles et principes pour rédiger dans un style correct, clair,concis, précis, courtois.

En conséquence, il montre comment obtenir la concision –non l’art de s’exprimeravec le moins de mots possible comme dans « le style télégraphique », maiscelui de n’employer que les termes nécessaires à une expression précise de lapensée, à la correction, voire à l’élégance de cette expression.

Comment est-il organisé?

Ce livre est composé de deux volets : l’un vise à la correction des propos pardes conseils qui aideront le rédacteur à choisir ses mots, à respecter leurorthographe, à construire des phrases bien structurées et bien ponctuées ;l’autre, une fois cette correction acquise, suggère des procédés d’améliorationqui lui permettront de rechercher des tournures variées et concises.

8 LE STYLE CORRECT : CLARTÉ, CONCISION, RICHESSE

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C H A P I T R E premier

(1) Cf. < www.culture.gouv.fr/culture/dglf/terminologie/base-donnees.html>.

Employez des mots correctsLa langue vit et se transforme: les mots naissent, se développent, s’usent,dépérissent, tombent en désuétude, meurent ; et d’autres les remplacent. Parexemple, complet est remplacé par costume, soulier par chaussure, étoffe partissu ; d’autres sont détournés de leur sens premier, coupés de leur racineétymologique et prennent de nouvelles acceptions (sens). D’autres encore,appartenant à un vocabulaire spécialisé, changent de sens dans le langagecommun jusqu’à signifier le contraire de leur acception originelle. Ainsi, au senspropre, faire une « coupe sombre » signifie faire un léger éclaircissement de laforêt par l’abattage de quelques arbres, le sous-bois restant obscur. Mais lesjournalistes, notamment, emploient cette expression au sens figuré quand ilsévoquent une suppression massive de crédits, d’emplois, etc., alors que dansce cas il s’agit bien de « coupe claire ». On observe le même glissement avecl’expression « l’œil du cyclone ». Ces phénomènes peuvent être sources deconfusion.

L'évolution de la langue se marque, en particulier, par la nécessité de créer denouveaux mots – les néologismes – qui permettent de rendre compte de notionset d'objets nouvellement apparus. Pour lutter contre les emprunts aux languesétrangères, l’État a institué un dispositif visant à proposer ces termes nouveaux.Ainsi, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France(DGLFLF) anime ce dispositif d’enrichissement et le coordonne via sa base dedonnées CRITER (1).Vous y trouverez les termes publiés au Journal officielpar la Commission généralede terminologie et de néologie.

Les expressionsincorrectes sontprécédées d’un

astérisque *.

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Utilisez les mots dans leur sens propre et précis, et non pas selon l’usage relâchédes médias ou de la conversation quotidienne. Par exemple, « unique », dontle sens est « qui n’existe qu’en un seul exemplaire » est employé de manièreabusive avec le sens de « exceptionnel », « remarquable », « incroyable »,« extraordinaire ». Et même entre ces divers termes, il existe une nuance. Onne peut donc substituer mécaniquement un synonyme à un autre.Vérifiez le sens exact des mots dans un dictionnaire et choisissez celui quisemble le plus approprié dans un contexte donné.

De plus, évitez les termes difficiles à comprendre. Autrement dit, pour êtrecompris, n’employez que le vocabulaire connu de votre lecteur ou interlocuteur.

En résumé, utilisez un vocabulaire :• soutenu plutôt que familier,• précis plutôt que vague,• riche plutôt que pauvre,• simple plutôt que technique, érudit, jargonneux.

Évitez les mots inexistants, les emplois fautifs,les impropriétés

Vérifiez dans un dictionnaire l’orthographe et le sens des mots et expressionsutilisés, car les logiciels de correction ne relèvent pas toutes les erreurs, enparticulier quand les mots existent.

L’origine des erreurs :– fausses étymologies : par exemple, *pantomine au lieu de pantomime, par

rattachement abusif de pantomime à mine, « expression du visage », cf. fairedes mines ;

– mots écorchés parce qu’incompréhensibles : entre deux mots qui existent,celui qui apparaît dans un contexte spécialisé technique tend à être remplacépar un autre plus familier. Ainsi, acception est confondu avec acceptation,rabattre avec rebattre ;

– confusion de mots qui ont des sonorités identiques ou des graphies proches :acquit et acquis, censé et sensé.

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� Vérifiez l’orthographe pour ne pas employer des mots forgés ou déformés

Les déformations ont pour origine des erreurs de prononciation, ou de perceptiondes sons, ou encore de rapprochements étymologiques.

Les inversions de lettres sont plus fréquentes à l’oral : *aréoport pour aéroport,*infractus pour infarctus, *obnibuler pour obnubiler, etc.

Au lieu de réécrire, réajuster, réouvrir, employez plutôt les formes : récrire,rajuster, rouvrir.

N’écrivezjamais

*pécunier

*dilemne

*disgression

*filigramme

*rénumérer

*succint(e)

Écrivez

pécuniaire (adj.)

dilemme (n. m.)

digression (n. f.)

filigrane (n. m.)

rémunérer

succinct(e) (adj.)

Explication

L’adjectif pécuniaire est identique au masculin et auféminin ; pour ne pas l’oublier, associez-le à desadjectifs comme monétaire, ordinaire et non à ceuxqui offrent l’alternance en -er, -ère comme financier/financière, rancunier/rancunière. Pécuniaire signifie « qui a rapport à l’argent ».

Le mot dilemme comporte deux « m ». Pour le sensde ce mot, voir : Quelques exemples de nuances,p. 40. Ne le confondez pas avec l’adjectif indemne,« sain et sauf ».Un truc : faites rimer dilemme avec problème, deuxnoms qui sont d’ailleurs liés dans leur définition.

C’est le préfixe latin di- qui commence le mot, commedans diversion, et non dis-, comme dans disparaître,dissocier, dissymétrie. Une digression est undéveloppement oral ou écrit qui s’écarte du sujet, duthème principal.

Le suffixe -grane appartient à la famille de grain.L’expression en filigrane signifie « d’une façonimplicite, entre les lignes ».

Ce verbe vient du latin munus, « cadeau,récompense », et non du latin numerus, « nombre »,qui a donné numéro, énumérer, etc.

Cet adjectif a la même graphie que distinct(e), mais seprononce sans en faire entendre le « c ».Il signifie « bref, concis, court, sommaire, qui vavite ».

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On appelle barbarisme l’emploi de mots qui n’existent pas.Étymologie de barbarisme : les Grecs désignaient l’étranger parle nom de « barbare », onomatopée imitant ce qu’ils entendaientde sa langue: «bar… bar…», sorte de bredouillis, de balbutiement.Le terme de «barbare» qui, à l’origine, avait une valeur strictementlinguistique a évolué, déjà chez les Grecs, vers un sens fortementpéjoratif, désignant des personnes rustres, impitoyables etinhumaines.

� Vérifiez le sens des mots et des expressions

Une impropriété est l’emploi d’un mot ou d’une expression dans un sens qu’iln’a pas. Contrairement au barbarisme, qui est une erreur touchant la forme d’unmot, l’impropriété est une erreur de vocabulaire qui porte sur le sens du mot.Le mot (ou l’expression) existe bien en français, mais il est employé dans unsens qui ne convient pas dans le contexte. Ainsi, dans la phrase : Prenez unimperméable, la température est incertaine, l’emploi de température est uneimpropriété; dans le contexte, c’est tempset non températurequ’il faut employer.

Certains mots sont employés avec un faux sens, voire d’une façon qui constitueun contresens. D’autres, dont le sens a évolué, sont sources d’ambiguïtés.

1 • NOMS ET LOCUTIONS NOMINALES

• Une alternative •

Une alternative est un choix entre deux possibilités, entre deux options, entredeux éventualités souvent opposées ; elle entraîne un résultat qui peut êtreheureux ou malheureux.

Vous avez une alternative : être remboursé ou recevoir un bon d'achat.

Ce choix entre deux partis ne peut constituer ni *une double alternative ni *deuxalternatives. «Deux» et «double» impliquent, en effet, deux éléments identiquesou non.En conséquence, ne dites pas :* Nous avons deux alternatives : recruter un employé ou prendre un intérimaire ;ni * Nous avons une *double alternative : recruter un employé ou prendre unintérimaire.Mais: Nous avons une alternative: recruter un employé ou prendre un intérimaire.

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Le plus

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Par un glissement de sens, alternative devient un synonyme du mot possibilité,sous l’influence du mot anglais alternative, qui désigne chacune des deuxpossibilités, alors qu’en français le même mot se réfère plutôt à un ensemblede deux solutions. Bien que fréquent, l'emploi d'alternative au sens de solutionde remplacement ou solution de rechange est un anglicisme critiqué.

Le commerce équitable : une solution de rechange au capitalisme.Ils sont convaincus qu’une politique restrictive est la seule solutionà la dévaluation du marché (plutôt que : la seule alternative à ladévaluation du marché).

Enfin, l’expression en dernière alternative constitue une impropriété lorsqu’elleest employée à la place de en dernier lieu ou de en dernier ressort.

• L’œil du cyclone •

Au sens propre, l’expression l’œil du cyclone désigne « la zone de calme aucentre d’un tourbillon, d’une tornade ». Mais aujourd’hui, l’expression être dansl’œil du cyclone est employée au figuré avec le sens d’« être au centre desdifficultés ».

• Une solution de continuité •

Une solution de continuité est une coupure, une rupture dans la continuité dequelque chose de concret ou d’abstrait. Elle désigne donc un point de rupture,une séparation. En conséquence, n’employez pas cette expression dans le sensd’« un moyen d’assurer la continuité ».

Toute solution de continuité dans le processus de fabrication entraînedes rebuts.

Sans solution de continuité signifie « sans interruption ».Le traitement doit être appliqué sans solution de continuité pendantquinze jours.

2 • ADJECTIFS

• Conséquent(e) •

Selon son sens étymologique, l’adjectif conséquent désigne une personne quiagit ou raisonne avec logique. Pensez à l’adjectif contraire : inconséquent(e) età ses synonymes absurde, incohérent.

EMPLOYEZ DES MOTS CORRECTS 13

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Au sens d’important, son emploi est critiqué. Remplacez-le par un synonymeplus riche selon le contexte (cf. p. 38).

• Coupe sombre ; coupe claire •

Une coupe sombre est un léger éclaircissement en forêt ; on abat quelquesarbres seulement, le sous-bois restant obscur.Une coupe claire est une suppression massive qui laisse le terrain à découvert.

Ainsi, faire une coupe claire de licenciements devrait signifier « effectuer denombreux licenciements ».Mais la 9e édition du dictionnaire de l’Académie française entérine pour coupesombre le sens figuré de « suppression très importante », contrairement au senspropre. Faire des coupes sombres s’emploie par exemple pour désigner le faitde pratiquer de larges coupures dans un texte, de fortes réductions de créditsou d’emplois dans un service, une entreprise, etc.En conséquence, pour être à la fois compris et en accord avec le sens d’origine,employez faire des coupes sévères, c’est-à-dire « effectuer une suppression trèsétendue ».

• Soi-disant ; prétendu •

Conformément à sa composition (pronom personnelsoisuivi du participe présentdisant), soi-disant signifie « qui dit de lui-même qu’il est, qui se prétend être » ;un soi-disant docteur est donc une personne qui se dit docteur.

Ce soi-disant médecin n’était pas inscrit à l’ordre des médecins.

Cet emploi de soi-disant pour parler des choses est courant, mais continue àêtre critiqué.Vous pouvez donc aussi bien dire :

Ce médecin m’a administré des remèdes soi-disant efficaces.Ce médecin m’a administré des remèdes supposés efficaces.Nous ne croyons pas à sa prétendue science.

Pour qualifier une personne ou des choses, n’écrivez ni *cette soit-disanttechnicienne ni *ces soit-disant cadeaux, car c’est le pronom soi, ni cette *soi-disante technicienne ni *ces soi-disants cadeaux, car le participe présent estinvariable.

Le client a dénoncé les conditions soi-disant avantageuses du contrat.

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Le salarié aurait soi-disant contracté une maladie professionnelle.Le brevet de cette découverte appartenait soi-disant à son père.Ils ont été condamnés soi-disant parce qu’ils auraient transmis desinformations confidentielles.

3 • VERBES ET LOCUTIONS

• S’avérer •

S’avérer signifie « se révéler vrai, se révéler juste, se vérifier ».Avéré signifie « reconnu, sûr, établi comme sûr et certain », par exemple un faitavéré.Par conséquent, ne dites pas : *cette nouvelle s’est avérée fausse, mais cettenouvelle s’est révélée fausse.

Cependant, le sens étymologique du verbe avérer semble avoir été peu à peuoublié, surtout dans le cas de l’emploi pronominal s’avérer, qui demeure le pluscourant de nos jours. On en est venu à employer s’avérer comme un synonymede « se révéler, se montrer, être ». Les exemples suivants sont donc jugés toutà fait acceptables.

Les essais réalisés sur le prototype s’avèrent concluants.Les procédures d’appels d’offres s’avèrent utiles.

Cette évolution de sens explique pourquoi l’emploi de s’avérer avec des adjectifscomme vrai, exact ou juste n’est plus jugée pléonastique.(sur les pléonasmes, cf. p. 30.)

• Initier •

Initier quelqu’un à quelque chose, c’est lui apprendre les rudiments de quelquechose.

Le moniteur initie les apprentis à la menuiserie.En conséquence, ne l’employez pas au sens de « commencer, aborder, engager »,comme cela tend à en être l’usage dans la langue courante. Au lieu de : * le président a initié la réunion par un rappel des faits, écrivez : le président acommencé ou a ouvert la réunion par un rappel des faits.

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• Vous n’êtes pas sans ignorer •

Une erreur courante consiste à dire vous n’êtes pas sans ignorer en voulant direvous savez.Ce procédé stylistique permet de donner une valeur positive à un énoncé etd'insister sur l'idée exprimée. L'expression signifie donc: vous ignorez sûrement.Ainsi Vous n'êtes pas sans savoir signifie : vous savez très bien, vous savezpertinemment.

Le procédé stylistique par lequel on juxtapose à la préposition sans une tournurenégative permet de donner une valeur positive à un énoncé et d’insister surl’idée exprimée.La logique est la même lorsque les formes négatives nonou ne passont employéesavec la préposition sans.

La réussite de ce projet n’est pas sans faire des jaloux (fait vraimentdes jaloux).L’entreprise a mis au point ce produit non sans peine (avec beaucoupde peine, de difficulté).

• Faire long feu •

L’expression est souvent prise à contresens.Au sens propre, elle se dit d’une arme à feu dont la poudre ne s’enflamme quelentement et qui, du fait de la déflagration imparfaite, ne part pas ou part mal.Faire long feu, c’est, dans le sens figuré le plus courant, « échouer à faire quelquechose, rater ». L’expression se dit d’une entreprise qui traîne en longueur, neréussit pas.Ne pas faire long feusignifiedonc «être de courte durée, ne pas durer longtemps»,et non « réussir ».

4 • ADVERBES - PRÉPOSITIONS

• Naguère ; jadis ; antan •

Naguère signifie « il n’y a guère, il y a peu de temps »; il désigne un passé peuéloigné, une époque antérieure à l’existence du locuteur.

Naguère encore, on pouvait voir dans les rues de Paris desrémouleurs ambulants.

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Mais l‘usage semble consacrer le sens contraire à l’étymologie de autrefois,jadis.

Il y avait naguère des trolleybus en banlieue parisienne.Tout dépend finalement de la nature, plus ou moins éloignée dans le temps parrapport au locuteur, des faits évoqués.

Jadis signifie : « il y a déjà des jours, dans le temps passé, autrefois ».Jadispilier de l’économie de la ville et du département, l’agroalimentairesubit saignée sur saignée depuis plusieurs années.

L’expression archaïque d’antan signifie au sens propre « il y a un an », et, parextension, « autrefois ».

Nous vous proposons des recettes fidèles aux saveurs d’antan maisadaptées à la cuisine moderne.

• Par le biais de •

La locution par le biais de signifie « par le moyen détourné et ingénieux outrompeur de résoudre une difficulté ou d’atteindre un but ».

Des entreprises de vente à distance attirent les clients par le biaisde chèques de réduction ou de cadeaux exceptionnels.

Le moyen détourné qu’évoque la locution par le biaisden’est pas nécessairementmalhonnête, mais il est rusé, hypocrite ou habile.En conséquence, suivant la phrase, employez plutôt : à l’aide de, au moyen de,grâce à, par l’entremise de, par l’intermédiaire de, par le truchement de, commedans les exemples suivants.

Notre association de lutte contre les maladies orphelines recueilledes dons grâce à sa campagne annuelle.L'envoi des questionnaires se fera par l'intranet ouà l’aide de l'intranet.Vous recevrez des informations sur votre dossier par l’intermédiairedu responsable administratif.Par l’entremise denos partenaires commerciaux, nous vous apporteronstoute l’aide dont vous aurez besoin.Le biochimiste réalise ses analyses au moyen de marqueurs sanguinsou avec des marqueurs sanguins.Les populations affamées reçoivent des vivres par le truchementd'organisations gouvernementales.

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Certaines formules sont animistes

Les formules animistes prêtent une âme, des attributs physiques, des gestes,des réactions à des choses, des événements, des institutions.

� Vérifiez les constructions avec les prépositions

DES CONSTRUCTIONS FAUTIVES

Ne faites pas l’ellipse des prépositions :– le local reprographie � le local de la reprographie– l’aspect santé � l’aspect de la santé ou la santé– suite à � en réponse à, après, à la suite de,

comme suite à– rapport au travail � par rapport au travail– au point de vue écologie � au point de vue de l’écologie

Sont acceptées des expressions telles que côté cour, côté jardin.

N’employez jamais la préposition seule :– *L’entreprise s’est alliée avec (Avec qui?)

D’ailleurs, vous ne diriez pas : *Elle a été embauchée par.

Les expressions voter pour, voter contre sont tolérées.

(Pour connaître les cas où la répétition de la préposition est obligatoire, facultativeou absente, cf. ch. IV p. 98).

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Au lieu de Dites plutôt

Ma demande n’a pas obtenu satisfaction.

Une erreur s’est glissée dans le texte.

Un fonctionnaire atteint par la limited’âge…

La ville voit sa population augmenter.

Votre projet a prévu un budget justifié.

� Je n’ai pas obtenu satisfaction.

� Le texte contient une erreur.

� Un fonctionnaire atteignant la limite d’âge…

� La population de la ville augmente.Nous constatons l’augmentation de la population de laville.

� Le budget de votre projet est justifié.

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� Vérifiez la construction de certains verbes

Débuter est un verbe intransitif, c’est-à-dire qu’il ne peut être suivi d’uncomplément d’objet direct.Employé avec des personnes, il a le sens de « faire ses premiers pas dans uneactivité, une carrière». L’informaticien débutedans la maintenance des systèmes.Employé avec des choses, il a le sens de « commencer ».

Les travaux débutent.La réunion débute par la présentation des nouveaux embauchés.

N’écrivez pas : *l’animateur débute la réunion (complément d’objet) par laprésentation des nouveauxembauchés, mais : l’animateur ouvre (oucommence)la réunion par la présentation des nouveaux embauchés.

Pallier est un verbe transitif direct, c’est-à-dire qu’il se construit avec uncomplément d’objet direct.N’écrivez pas : *l’embauche d’un stagiaire pallie au manque de personnel dansl’atelier, mais : l’embauche d’un stagiaire pallie le manque de personnel dansl’atelier.Pallier signifie « atténuer un inconvénient, un problème, remédier de façonprovisoire à un inconvénient, à un problème, compenser ».Dans la langue courante, pallier a subi la contamination de « remédier à » pourla construction fautive avec une préposition comme pour le sens qui, parextension, devient celui de « remédier à qqch., résoudre ».

� Des prépositions adéquates

• Devant des noms de ville et d’îles : à, au, à la, dans le, dans la, en?À Paris ; à Madagascar ; à/en Haïti (grandes îles : pas d’article défini) ; à laRéunion; à la Martinique (petites îles : article défini) ; aux Seychelles.

• Avoir affaire avec ; avoir affaire à ; avoir à faire avec ; avoir à faireLa confusion est fréquente.Avoir affaire avec qqun signifie « être en affaires avec, être en relation avec »:

Le service des espaces verts a affaire avec des entreprises deréinsertion.

Avoir affaire à qqun signifie « avoir à parler à qqun, avoir à débattre aveclui » :

Le responsable de la production veut avoir affaire à des techniciensautonomes.Si vous n’obtempérez pas, vous aurez affaire aux huissiers !

EMPLOYEZ DES MOTS CORRECTS 19

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Avoir à faire avec signifie « s’accommoder de, composer avec » :Pour réaliser l’audit, elle a eu à faire avec un personnel méfiant.

Quand la locution est suivie d’un complément d’objet direct, on écrit toujoursà faire :

Il a à faire un travail de précision ou il a un travail de précision à faire.Mais : elle a fort à faire avec ce rapport à rédiger.

• Mettre à jour ; mettre au jourMettre à jour, c’est « tenir en ordre » : j’ai mis à jour le fichier clients.Mettre au jour, c’est « faire sortir, révéler, porter à la connaissance de tous »:la sûreté générale a mis au jour un complot.

• Croire ; croire à ; croire enLes constructions de croire employé seul, avec la préposition à ou avec lapréposition en expriment des nuances de sens qui s’amenuisent parfois dansla langue courante.

– Croire qqch. ou qqun.Croire qqch. signifie « tenir quelque chose pour vrai » :Le directeur a cru les explications de l’ingénieur.Croire qqun signifie « considérer comme vrai ce que dit une personne »:Le directeur a cru l’ingénieur.

– Croire à qqch., à qqun signifie « être persuadé de la vérité, de l’efficacitéou de l’existence de quelque chose ou de quelqu’un, s’y fier ». Il s’agitplutôt d’une adhésion intellectuelle.

Il croit à l‘augmentation des ventes.Veuillez croire, Madame, à l’expression de mes sentiments respectueux.Certains croient aux astrologues, d’autres aux médiums.

– Croire en qqch., en qqun signifie « avoir confiance en quelque chose, enquelqu’un ».L’expression s’emploie à propos de choses ou de personnes sur lesquelleson fonde de l’espoir, dans lesquelles on met sa confiance. Il s’agit plutôtd’une adhésion du cœur.

Elle croit en sa bonne étoile pour réussir son entretien d’embauche.L’apprenti croit en son maître d’apprentissage.

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• Remercier de ; remercier pourLorsque le verbe est suivi d’un nom, employez de ou pour :Nous vous remercions de/pour votre accueil chaleureux.

Lorsque le verbe est suivi d’un infinitif, n’employez que de :Je vous remercie de m’avoir adressé le catalogue de vos produits duterroir.

De même après être reconnaissant, savoir gré, exprimer sa reconnaissance,exprimer sa gratitude:

Je vous saurais gré de m’envoyer un courrier de confirmation.

• Se rappeler ; se remémorer ; se souvenirSe rappeler et se souvenir sont deux verbes étroitement liés, qui se sontmutuellement influencés. À l’origine, souvenirn’était pas un verbe pronominal(on disait alors : il me souvient de… tour aujourd’hui archaïque ou littéraire) ;il l’est devenu au XVIe siècle sous l’influence de se rappeler. Par ailleurs, ona pris l’habitude d’employer se rappeler avec la préposition de sur le modèlede se souvenir de. Comme ces verbes présentent des différences syntaxiquesque la langue spontanée a tendance à neutraliser, voyons ce qui est considérécomme correct et ce qui l’est moins.

On se rappelle quelque chose, quelqu’un, on se remémore quelque chose,quelqu’un, mais on se souvient de quelque chose, de quelqu’un.

Les deux verbes se rappeler, se remémorer ne sont pas suivis de la prépositionde:

Ils se sont rappelé les gestes à faire en cas d’incident(et non: *des gestes).Ils se sont remémoré les circonstances de l’accident(et non: *des circonstances).

Le verbe se souvenir est suivi de la préposition de:Elle s’est souvenue de son professeur de musique.Ils se sont souvenus des gestes à faire en cas d’incident.

Logiquement, le verbe se rappeler demande un complément d’objet direct ;par conséquent, il ne peut se construire avec le pronom en qui sous-entendun complément indirect (en = de quelque chose; cf. ch. IV p. 102). Mais leverbe se souvenir peut, lui, se construire avec en. On dira donc je m’ensouviens, mais je me le rappelle.

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Ils se sont rappelé les gestes. Ils se les sont rappelés(et non: *ils s’en sont rappelé).Ils se sont souvenus des gestes : ils s’en sont souvenus. Souvenez-vous-en.Tu te souviens des gestes. Tu t’en souviens. Souviens-t’en(et non: *souviens-toi-z-en).

Pour la même raison, se rappeler s’emploiera avec que et non avec dont.C’est tout ce qu‘il se rappelle (et non : * c’est tout ce dont il se rappelle).C’est tout ce dont il se souvient.

Toutefois, se rappeler peut se rencontrer avec en ou dont lorsque ceux-cisont des compléments du nom de l’objet direct.J’ai lu une étude dont je me rappelle la conclusion (la conclusion de l’étude).Mais : je me rappelle la conclusion de l’étude que j’ai lue.

J’ai lu une étude intéressante. Je m’en rappelle la conclusion (je merappelle la conclusion de cette étude).

Enfin, lorsque le complément est un pronom personnel de la première ou dela deuxième personne, il est permis d’employer la préposition de.

Il se rappelle très bien de lui, ou : il se souvient très bien de lui.Quand il l’a revue, elle ne se rappelait plus de lui, ou : elle ne sesouvenait plus de lui.

Se rappeler de, sur le modèle de se souvenir de, est bien attesté depuis leXVIIIe siècle, chez les grands auteurs comme dans la langue générale ; maisles grammairiens, tout en constatant cet emploi très répandu, continuent àle condamner. Il est donc recommandé de respecter la norme grammaticale :se rappeler quelque chose.

• Quant àCette locution signifie « en ce qui concerne ». Elle peut être suivie d’un nomou d’un verbe:

Quant au rapport, je vous l’adresserai dès demain.Quant à vous envoyer le rapport dès demain, j’en suis capable.

Ne pas confondre quant à avec tant qu’à, locution populaire qui a le sens de« puisqu’il le faut ».

Tant qu’à faire un rapport, je le ferai détaillé.Tant qu’à venir de bonne heure, venez dès sept heures (puisque vousvoulez venir de bonne heure).

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