Chronique de jurisprudence / Rechtspraakoverzicht...

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154 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/III LARCIER Chronique de jurisprudence / Rechtspraakoverzicht Chronique de Droit bancaire et financier 2003 (Luxembourg) 1 Alex SCHMITT Avocat aux barreaux de Luxembourg et Bruxelles Etude Bonn Schmitt Steichen, Luxembourg LL.M. Harvard Law School Maître d’Enseignement à la Faculté de Droit de l’Université libre de Bruxelles Elisabeth OMES Avocat au barreau de Luxembourg Etude Bonn Schmitt Steichen, Luxembourg Maître en Droit Privé (Université Robert Schuman – Strasbourg) DEA en Droit Comparé (Université libre de Bruxelles) Table des matières PARTIE I. LÉGISLATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 I. La loi du 27 juillet 2003 (a) portant approbation de la Convention de La Haye du 1 er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, (b) portant nouvelle réglementation des contrats fiduciaires et (c) modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155 A. L’approbation de la Convention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 1. Champ d’application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 2. La loi applicable au trust . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 3. Reconnaissance du trust . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 4. Précisions luxembourgeoises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156 B. La nouvelle réglementation des contrats fiduciaires . . . . . . 157 1. Définition des contrats fiduciaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 2. Les contrats fiduciaires soumis à la Loi . . . . . . . . . . . . . . . . 157 3. Les effets du contrat fiduciaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 4. La preuve du contrat fiduciaire et son opposabilité aux tiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 157 5. Les contrats fiduciaires conclus à titre de garantie . . . . . . . 158 C. Dispositions fiscales applicables aux contrats fiduciaires et aux trusts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 1. Les transcriptions de droits réels immobiliers . . . . . . . . . . . 158 2. Les inscriptions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 3. L’enregistrement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 158 4. Les droits de donation, de mutation et de succession . . . . . 158 II. La loi du 2 août 2003 (a) portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier, (b) modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998 portant création d’une commission de surveillance du secteur financier et (3) modification de la loi modifiée du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés . . . . 158 A. L’étendue de la surveillance prudentielle de la CSSF . . . . . . 159 B. Les nouvelles catégories de PSF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 1. Les dépositaires professionnels de titres ou d’autres instruments financiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 2. Les agents de transfert et de registre . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159 3. Les professionnels effectuant des opérations de prêt . . . . . . 160 4. Les professionnels effectuant des prêts de titres . . . . . . . . . 160 5. Les professionnels effectuant des services de transfert de fonds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 160 6. Les administrateurs de fonds communs d’épargne . . . . . . . 161 7. Les gestionnaires d’OPC non coordonnés. . . . . . . . . . . . . . 161 C. Les PSF exerçant une activité connexe ou complémentaire à une activité du secteur financier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 161 1. Les agents de communication à la clientèle. . . . . . . . . . . . . 161 2. Les agents administratifs du secteur financier . . . . . . . . . . . 162 3. Les opérateurs de systèmes informatiques et de réseaux de communication du secteur financier . . . . . . . . . . . . . . . 162 4. Les professionnels effectuant des services de constitution et de gestion de sociétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 PARTIE II. JURISPRUDENCE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 1. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 10 juillet 2002, rôle n° 65154 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 Société de droit des îles vierges britanniques O. contre la Banque D. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162 2. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 16 janvier 2003, rôle n° 72800 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 Société de droit des îles vierges britanniques F. contre la Banque C. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163 3. Cour d’appel 22 janvier 2003, rôle n° 23568 . . . . . . . . . . . 164 W. contre la Banque H. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 4. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 23 janvier 2003, rôle n° 73197 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 W. contre la Banque N. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164 5. Cour d’appel 6 février 2003, rôle n° 25817 . . . . . . . . . . . . 165 Banque C. contre I. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165 6. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 17 février 2003, rôle n° 74832 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 Banque P. contre les consorts F. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166 7. Cour d’appel 19 février 2003, rôle n° 26642 (inédit) . . . . . 166 Société de droit de Gibraltar C. contre la Banque N. . . . . . 166 1. Les précédentes Chroniques de Droit bancaire et financier (Luxembourg) ont été publié dans cette revue en 2002 (pp. 349-367) et 2003 (pp. 280-300).

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154 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

Chronique de jurisprudence / Rechtspraakoverzicht

Chronique de Droit bancaire et financier 2003 (Luxembourg)1

Alex SCHMITTAvocat aux barreaux de Luxembourg et Bruxelles

Etude Bonn Schmitt Steichen, Luxembourg

LL.M. Harvard Law School

Maître d’Enseignement à la Faculté de Droit de l’Université libre de Bruxelles

Elisabeth OMESAvocat au barreau de Luxembourg

Etude Bonn Schmitt Steichen, Luxembourg

Maître en Droit Privé (Université Robert Schuman – Strasbourg)

DEA en Droit Comparé (Université libre de Bruxelles)

Table des matièresPARTIE I. LÉGISLATION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155

I. La loi du 27 juillet 2003 (a) portant approbation de la Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, (b) portant nouvelle réglementation des contrats fiduciaires et (c) modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 155

A. L’approbation de la Convention . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1561. Champ d’application . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1562. La loi applicable au trust . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1563. Reconnaissance du trust . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1564. Précisions luxembourgeoises . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 156B. La nouvelle réglementation des contrats fiduciaires . . . . . . 1571. Définition des contrats fiduciaires. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1572. Les contrats fiduciaires soumis à la Loi. . . . . . . . . . . . . . . . 1573. Les effets du contrat fiduciaire . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1574. La preuve du contrat fiduciaire et son opposabilité

aux tiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1575. Les contrats fiduciaires conclus à titre de garantie . . . . . . . 158C. Dispositions fiscales applicables aux contrats fiduciaires

et aux trusts . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1581. Les transcriptions de droits réels immobiliers . . . . . . . . . . . 1582. Les inscriptions . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1583. L’enregistrement . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1584. Les droits de donation, de mutation et de succession . . . . . 158II. La loi du 2 août 2003 (a) portant modification de la loi

modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier, (b) modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998 portant création d’une commission de surveillance du secteur financier et (3) modification de la loi modifiée du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés . . . . 158

A. L’étendue de la surveillance prudentielle de la CSSF . . . . . . 159B. Les nouvelles catégories de PSF . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1591. Les dépositaires professionnels de titres ou d’autres

instruments financiers . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1592. Les agents de transfert et de registre . . . . . . . . . . . . . . . . . . 159

3. Les professionnels effectuant des opérations de prêt. . . . . . 1604. Les professionnels effectuant des prêts de titres . . . . . . . . . 1605. Les professionnels effectuant des services de transfert

de fonds . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1606. Les administrateurs de fonds communs d’épargne . . . . . . . 1617. Les gestionnaires d’OPC non coordonnés. . . . . . . . . . . . . . 161C. Les PSF exerçant une activité connexe ou complémentaire

à une activité du secteur financier. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1611. Les agents de communication à la clientèle. . . . . . . . . . . . . 1612. Les agents administratifs du secteur financier. . . . . . . . . . . 1623. Les opérateurs de systèmes informatiques et de réseaux

de communication du secteur financier . . . . . . . . . . . . . . . 1624. Les professionnels effectuant des services de constitution

et de gestion de sociétés . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162

PARTIE II. JURISPRUDENCE. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1621. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 10 juillet 2002,

rôle n° 65154 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162Société de droit des îles vierges britanniques O. contre la Banque D. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 162

2. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 16 janvier 2003, rôle n° 72800 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163Société de droit des îles vierges britanniques F. contre la Banque C. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 163

3. Cour d’appel 22 janvier 2003, rôle n° 23568 . . . . . . . . . . . 164W. contre la Banque H. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164

4. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 23 janvier 2003, rôle n° 73197 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164W. contre la Banque N. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 164

5. Cour d’appel 6 février 2003, rôle n° 25817 . . . . . . . . . . . . 165Banque C. contre I. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 165

6. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 17 février 2003, rôle n° 74832 . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166Banque P. contre les consorts F. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 166

7. Cour d’appel 19 février 2003, rôle n° 26642 (inédit) . . . . . 166Société de droit de Gibraltar C. contre la Banque N. . . . . . 166

1. Les précédentes Chroniques de Droit bancaire et financier (Luxembourg) ont été publié dans cette revue en 2002 (pp. 349-367) et 2003 (pp. 280-300).

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 155

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

8. Cour d’appel 11 mars 2003, rôle n° 27001. . . . . . . . . . . . . 167

Consorts C. contre la Banque D. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 167

9. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 26 mars 2003, rôle n° 50630 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

Société de droit des îles vierges britanniques B. contre la Banque C. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 168

10. Cour d’appel 2 avril 2003, rôles n° 26050 et 26256 . . . . . . 169

Consorts S. contre la Banque K. (1re espèce)Consorts H. contre la Banque K. (2e espèce) . . . . . . . . . . . . 169

11. Cour d’appel 14 mai 2003, rôle n° 26567 (inédit) . . . . . . . 169Banque O. contre la Banque B. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 169

12. Cour d’appel 18 juin 2003, rôle n° 26375 . . . . . . . . . . . . . 170

Consorts H. contre la Banque L. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17013. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 10 juillet 2003,

rôles n° 72353 et 77133 (inédit). . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 171F. contre la Banque I. et la société B. . . . . . . . . . . . . . . . . . 171

14. Cour d’appel 28 octobre 2003, rôle n° 27599 . . . . . . . . . . 172A. contre la Banque B. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 172

15. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 29 octobre 2003, rôle n° 81083 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173Société U. contre la Banque I. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173

16. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 25 novembre 2003, rôle n° 74864 (inédit) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173S. contre Banque U. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 173

En 2003, le législateur luxembourgeois a entrepris deuxréformes importantes: la loi du 27 juillet 2003 sur lecontrat fiduciaire et la loi du 2 août 2003 modifiant la loidu 5 avril 1993 relative au secteur financier.

La réforme du contrat fiduciaire luxembourgeois s’estaccompagnée de la ratification de la Convention de LaHaye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trustet à sa reconnaissance. Il était essentiel aux yeux du légis-lateur d’adopter cette convention, afin de donner auxjuges et aux autorités luxembourgeoises un instrumentqui leur permette de régler les nombreuses difficultés demise en œuvre que suscite le trust lorsqu’il prolonge seseffets sur le territoire luxembourgeois. Les modificationsapportées au contrat fiduciaire luxembourgeois ont étémotivées non seulement par le souci d’améliorer le régimejuridique de la fiducie, mais également par la recherched’une meilleure reconnaissance de cette institution àl’étranger, dans le cadre de la Convention de La Haye.

La loi modifiée sur le secteur financier a été mise à jour parl’introduction de nouvelles catégories de professionnels,apparues avec une spécialisation accrue dans ce secteur.Les intervenants sur ce secteur ont en effet actuellementtendance à se concentrer sur l’une ou l’autre activité, envue de rentabiliser leurs investissements, et ont recours àl’outsourcing de certaines de leurs activités. Il était dès lorsessentiel non seulement d’encadrer ces nouvelles activitésmais également de les soumettre à une surveillanceprudentielle.

Faute d’espace, nous ne commenterons pas cette année lescirculaires de la Commission de Surveillance du SecteurFinancier (ci-après ‘CSSF’), laquelle a, entre autres,apporté des précisions sur la loi du 20 décembre 2002concernant les organismes de placement collectif2, trans-posant les directives 2001/107/CE et 2001/108/CE endroit luxembourgeois3, ainsi que sur la mission élargie desréviseurs d’entreprises4.

La Chronique se termine par une série de jurisprudencesrendues en 2003.

Partie I. Législation

I. La loi du 27 juillet 2003 (a) portant approbation de la Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, (b) portant nouvelle réglementation des contrats fiduciaires et (c) modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels5

Par cette loi (ci-après ‘la Loi’), le Luxembourg ratifie laConvention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loiapplicable au trust et à sa reconnaissance (ci-après ‘laConvention’) (A) et réforme le régime légal des contratsfiduciaires. Cette réforme tend ‘à assurer la meilleureharmonisation possible entre le trust et la fiducie et (...) àadapter le régime du contrat fiduciaire aux nouveaux

2. Circulaire CSSF 03/87 du 21 janvier 2003 sur l’entrée en vigueur de la loi du 20 décembre 2002 concernant les organismes de placement collectif.Circulaire CSSF 03/88 du 22 janvier 2003 sur la classification des organismes de placement collectif soumis aux dispositions de la loi du 20 décembre 2002concernant les organismes de placement collectif.Circulaire CSSF 03/108 du 30 juillet 2003 sur les sociétés de gestion de droit luxembourgeois soumis au chapitre 13 de la loi du 20 décembre 2002 concernant lesorganismes de placement collectif, ainsi que les sociétés d’investissement autogérés de droit luxembourgeois soumises à l’article 27 ou à l’article 40 de la loi du20 décembre 2002 concernant les organismes de placement collectif;Circulaire CSSF 03/122 du 19 décembre 2003 contenant des précisions sur le prospectus simplifié.

3. Loi du 20 décembre 2002 concernant les organismes de placement collectif et modifiant la loi modifiée du 12 février 1979 concernant la taxe sur la valeur ajoutée,Mémorial A 2002, p. 3660; commentée dans Chronique de Droit bancaire et financier 2002 (Luxembourg), Dr. banc. fin. 2003/V, p. 280.

4. Circulaire CSSF 03/113 du 21 octobre 2003 sur les règles pratiques concernant la mission des réviseurs d’entreprises auprès des entreprises d’investissement.5. Loi du 27 juillet 2003 portant approbation de la Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, portant

nouvelle réglementation des contrats fiduciaires, et modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels, Mémorial A 2003, p. 2620.

156 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

besoins de la pratique bancaire et financière’ (B)6. La Loicontient également des dispositions fiscales applicablesaux contrats fiduciaires et aux trusts (C).

A. L’approbation de la Convention

La Convention a pour objet de fixer les règles de droitapplicable aux trusts et la reconnaissance de ceux-ci.

1. Champ d’application

Aux fins de la Convention, le trust vise les relations juri-diques créées par une personne, le constituant (par acteentre vifs ou à cause de mort) lorsque des biens ont étéplacés sous le contrôle d’un trustee dans l’intérêt d’unbénéficiaire ou dans un but déterminé. Conformément àl’article 20 de la Convention, le Luxembourg étend lesdispositions de celle-ci également au trust créé par déci-sion de justice.

Le trust présente les caractéristiques suivantes:a. les biens du trust constituent une masse distincte et ne

font pas partie du patrimoine du trustee;b. le titre relatif aux biens du trust est établi au nom du

trustee ou d’une autre personne pour le compte dutrustee;

c. le trustee est investi du pouvoir et chargé de l’obliga-tion, dont il doit rendre compte, d’administrer, de gé-rer ou de disposer des biens selon les termes du trust etles règles particulières imposées au trustee par la loi.

2. La loi applicable au trust

Le trust est régi par la loi choisie par le constituant. Cechoix doit être exprès ou au moins se dégager des disposi-tions de l’acte créant le trust ou en apportant la preuve.Ces dispositions sont interprétées au besoin à l’aide descirconstances de la cause.

A défaut de choix explicite ou implicite, le trust est régipar la loi avec laquelle il présente les liens les plus étroits,en tenant compte des critères suivants:

a. le lieu d’administration du trust désigné par le consti-tuant;

b. la situation des biens du trust;c. la résidence ou le lieu d’établissement du trustee;

d. les objectifs du trust et les lieux où ils doivent être ac-complis.

La loi déterminée par ces critères régit la validité du trust,son interprétation, ses effets et son administration.

3. Reconnaissance du trust

D’après la Convention, un trust valablement créé serareconnu en tant que tel. Cette reconnaissance a pourconséquence minimale que les biens du trust sont distinctsdu patrimoine personnel du trustee et que le trustee puisseagir en justice comme demandeur ou défendeur, oucomparaître en qualité de trustee devant un notaire outoute personne exerçant une autorité publique.

Suivant le contenu de la loi applicable au trust, la recon-naissance de celui-ci peut également impliquer que:

a. les créanciers personnels du trustee ne peuvent pas sai-sir les biens du trust;

b. les biens du trust sont séparés du patrimoine du trusteeen cas d’insolvabilité ou de faillite de ce dernier;

c. les biens du trust ne font pas partie du régime matri-monial ni de la succession du trustee;

d. la revendication des biens du trust est permise, dans lescas où le trustee, en violation des obligations résultantdu trust, a confondu les biens du trust avec ses bienspersonnels ou en a disposés. Toutefois, les droits etobligations d’un tiers détenteur des biens du trust de-meurent régis par la loi déterminée par les règles deconflit du for.

4. Précisions luxembourgeoises

La Loi précise que pour la mise en œuvre de la Conven-tion, quant aux biens faisant l’objet d’un trust et situés auLuxembourg, la situation du trustee est celle d’un proprié-taire. La référence à la situation d’un propriétaire nepréjudicie cependant pas au principe de séparation entrele patrimoine formé par les biens du trust et le patrimoineconstitué par les biens personnels du trustee, conformé-ment à l’article 11 de la Convention.

Les contrats fiduciaires soumis au droit luxembourgeoistombent dans le champ d’application de la Convention, cequi permettra à cette institution luxembourgeoise d’êtrereconnue comme trust au sens de la Convention dans tousles Etats l’ayant ratifiée7.

6. Projet de loi n° 4721 portant approbation de la Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, portantnouvelle réglementation des contrats fiduciaires, et modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels, Arrêté grand-ducal de dépôt, Exposédes motifs, p. 2.

7. Au moment du dépôt de l’instrument de ratification par le Luxembourg, la Convention liait les Etats suivants: Australie, Canada, Hong Kong, Italie, Malte,Pays-Bas et le Royaume-Uni.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 157

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

B. La nouvelle réglementation des contrats fiduciaires

Même si la Loi abroge le règlement grand-ducal du19 juillet 1983 relatif aux contrats fiduciaires des établis-sements de crédit8, les parties peuvent décider, par décla-ration expresse, exprimée par écrit dans les six mois de lapublication de la Loi, de rester soumises à l’ancienneréglementation. A défaut d’une telle déclaration, la Lois’applique aux effets futurs des contrats fiduciairesconclus avant son entrée en vigueur, sous l’empire del’ancienne réglementation.

1. Définition des contrats fiduciaires

Le contrat fiduciaire est défini par la Loi comme ‘uncontrat par lequel une personne, le fiduciant, convientavec une autre personne, le fiduciaire, que celui-ci, sous lesobligations déterminées par les parties, devient proprié-taire de biens formant un patrimoine fiduciaire’9.

2. Les contrats fiduciaires soumis à la Loi

La Loi s’applique uniquement aux contrats fiduciairesdans lesquels le fiduciaire est un établissement de crédit,une entreprise d’investissement, une société d’investisse-ment à capital variable ou fixe, une société de titrisation,une société de gestion de fonds commun de placement oude fonds de titrisation, un fonds de pension, une entreprised’assurance ou de réassurance ou un organisme nationalou international à caractère public opérant dans le secteurfinancier.

3. Les effets du contrat fiduciaire

Le patrimoine objet du contrat fiduciaire est distinct dupatrimoine du fiduciaire, comme de tout autre patrimoinefiduciaire. Il s’ensuit que les biens composant le patri-moine fiduciaire peuvent uniquement être saisis par lescréanciers dont les droits sont nés à l’occasion du patri-moine fiduciaire, à l’exclusion expresse des créancierspersonnels du fiduciaire. En raison de cette ségrégationdes patrimoines, le fiduciaire est tenu de comptabiliser lepatrimoine fiduciaire séparément de son patrimoinepersonnel et des autres patrimoines fiduciaires.

Les relations entre le fiduciaire et le fiduciant sont régies

par les règles du mandat, sauf celles reposant sur la repré-sentation, et pour autant qu’il n’y est pas dérogé par la Loiou par les parties. Les limitations contractuelles despouvoirs du fiduciaire sont opposables aux tiers qui enont connaissance, sans préjudice des règles d’opposabilitéapplicables notamment en raison de la nature des bienscomposant le patrimoine fiduciaire.

Le contrat fiduciaire peut prévoir que le fiduciant renonceà son droit de donner des instructions au fiduciaire. Cettepossibilité de renonciation a été introduite par le législa-teur aussi bien dans l’intérêt des parties que du tiers béné-ficiaire.

Sauf convention contraire, ni le fiduciant, ni le fiduciairene peuvent mettre fin unilatéralement au contrat fidu-ciaire conclu pour une durée déterminée. Cette dispositionlégale est justifiée par la stabilité souhaitable de l’opéra-tion fiduciaire.

Le fiduciant, le fiduciaire ou un tiers bénéficiaire ducontrat fiduciaire peuvent demander en justice, pourmotifs graves10, le remplacement provisoire ou définitifdu fiduciaire ou l’extinction anticipée du contrat fidu-ciaire. Cette possibilité s’impose, alors qu’en raison despouvoirs étendus attachés à la fonction de fiduciaire, cedernier peut mettre en péril les intérêts du fiduciant et/oudu tiers bénéficiaire. Il se pourrait également que c’est lefiduciaire qui demande à ce qu’il soit remplacé ou qu’ilsoit mis fin au contrat fiduciaire, s’il est, par exemple,dans l’impossibilité d’exécuter sa mission, et qu’il avaitrenoncé à la possibilité d’y mettre fin unilatéralement11.

4. La preuve du contrat fiduciaire et son opposabilité aux tiers

D’après l’article 9 de la Loi, la preuve du contrat fiduciairedoit être rapportée par écrit.

Le contrat fiduciaire est opposable aux tiers dès sa conclu-sion, sous réserve des règles applicables notamment enraison de la nature des biens composant le patrimoinefiduciaire. Sous les mêmes réserves, les limitationscontractuelles des pouvoirs du fiduciaire sont inopposa-bles aux tiers de bonne foi, lesquels n’ont pas connais-sance de ces limitations.

8. Règlement grand-ducal du 19 juillet 1983 relatif aux contrats fiduciaires des établissements de crédit, Mémorial A 1983, n° 59, p. 2.9. Article 5 de la loi du 27 juillet 2003 portant approbation de la Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance,

portant nouvelle réglementation des contrats fiduciaires, et modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels, Mémorial A 2003, p. 2620.10. Par exemple: la confusion de fait entre le patrimoine fiduciaire et le patrimoine personnel, la dissipation des biens confiés, des comportements gravement répréhensibles

du fiduciaire au regard de la législation financière, la mésentente grave entre le fiduciaire et le fiduciant qui s’immisce dans la gestion du patrimoine fiduciaire.11. Projet de loi n° 4721 portant approbation de la Convention de La Haye du 1er juillet 1985 relative à la loi applicable au trust et à sa reconnaissance, portant

nouvelle réglementation des contrats fiduciaires, et modifiant la loi du 25 septembre 1905 sur la transcription des droits réels, Arrêté grand-ducal de dépôt,Commentaire des articles, p. 12.

158 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

En cas de transfert fiduciaire de créances, ce transfert estopposable aux tiers, partant au débiteur, dès sa conclu-sion. Cependant, le débiteur se libère valablement entre lesmains du fiduciant, aussi longtemps qu’il n’a pas connais-sance du transfert.

5. Les contrats fiduciaires conclus à titre de garantie

Les parties peuvent conclure un contrat fiduciaire en vuede garantir des créances nées ou à naître. La conventionfiduciaire peut dans ce cas prévoir que le patrimoineévoluera en fonction des engagements garantis ou d’autresfacteurs choisis par les parties contractantes.

Au jour de la réalisation de la garantie, le fiduciaire esttenu de verser au fiduciant ou au tiers bénéficiaire le soldenet résultant de la différence entre la valeur, à ce jour, desbiens constituant la garantie et le montant des créancesgaranties. Toute stipulation contraire est nulle.

C. Dispositions fiscales applicables aux contrats fiduciaires et aux trusts

1. Les transcriptions de droits réels immobiliers

La Loi prévoit que les mentions de trustee ou de fiduciairedoivent être mentionnées sur la transcription des actesportant transfert de propriété et les actes qui constituent,transfèrent, modifient ou éteignent un droit qui doit êtretranscrit sur un immeuble inclus dans un patrimoine fidu-ciaire ou un trust, ou destiné à intégrer un tel patrimoinefiduciaire ou trust.

2. Les inscriptions

En cas d’inscription sur un registre public de la qualité depropriétaire, quelles qu’en soient la cause et l’occasion, lefiduciaire et le trustee doivent demander à ce qu’il y soitmentionné leur qualité, après celle de propriétaire.

3. L’enregistrement

La conclusion et la modification d’un contrat fiduciaire,tout comme les actes constitutifs ou modificatifs d’untrust, ne doivent pas impérativement être enregistrés, saufs’ils affectent des biens ou des droits devant être transcrits,

immatriculés ou enregistrés12. L’enregistrement des actesd’un trust soumis à une transcription obligatoire13 n’estsoumis à aucun délai, si cet acte a été conclu avant l’entréeen vigueur de la Loi.

L’enregistrement des contrats fiduciaires ou leur modifica-tion portant sur des biens ou des droits que le fiduciaire nedoit pas conserver plus de trente ans, est effectué au droitfixe. Le même droit fixe est appliqué à l’enregistrementdes actes constitutifs ou modificatifs d’un trust portant surdes biens ou des droits que le trustee ne doit pas conserverplus de trente ans, et des actes assurant le retour des biensou droits au fiduciant ou au constituant après trente ans.

Si le contrat fiduciaire ou le trust ont été enregistrés audroit fixe, l’attribution définitive au fiduciaire ou autrustee, en cours ou à l’issue du contrat fiduciaire ou dutrust, des biens ou des droits qui leur ont été transférésdoit être enregistrée, à la demande du fiduciaire ou dutrustee, dans les conditions du droit commun.

4. Les droits de donation, de mutation et de succession

Si le fiduciaire ou le trustee transfère, à titre gratuit, unbien ou un droit à un tiers bénéficiaire, les droits de dona-tion seront calculés en fonction du degré de parenté entrele bénéficiaire et le fiduciant ou le constituant.

Il en est de même pour le calcul des droits de succession etdes droits de mutation par décès.

II. La loi du 2 août 2003 (a) portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier, (b) modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998 portant création d’une commission de surveillance du secteur financier et (3) modification de la loi modifiée du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés 14

Cette loi (ci-après ‘la Loi’) a le double objectif desoumettre tous les intervenants du secteur financier à unesurveillance prudentielle par la CSSF et de définir denouvelles catégories spécifiques de professionnels nonbancaires du secteur financier15.

12. Il s’agit notamment des immeubles situés au Luxembourg, des aéronefs, des navires ou des bateaux de navigation intérieure immatriculés au Luxembourg ou desdroits qui portent sur un tel bien.

13. Les actes transférant à un trustee la propriété d’un immeuble situé au Luxembourg, les actes constituant, transférant ou modifiant au profit du trustee.14. Loi du 2 août 2003 portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier; modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998

portant création d’une commission de surveillance du secteur financier; modification de la loi du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés, Mémorial A

2003, p. 2364.15. Projet de loi n° 5085 portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier; modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998

portant création d’une commission de surveillance du secteur financier; modification de la loi du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 159

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

En marge de ces modifications substantielles de la loi du5 avril 1993 relative au secteur financer16 (ci-après ‘la Loide 1993’), elle adapte la loi du 31 mai 1999 régissant ladomiciliation des sociétés, pour permettre aux sociétés degestion d’exercer l’activité de domiciliation. En effet, enmatière d’OPC, ces sociétés interviennent souvent commedomiciliataire de sociétés d’investissement ou d’autressociétés de gestion pour lesquelles elles agissent égalementcomme agent d’administration centrale.

A. L’étendue de la surveillance prudentielle de la CSSF

Doit désormais disposer d’un agrément délivré par laCSSF toute personne juridique de droit luxembourgeoisexerçant à titre professionnel une activité du secteur finan-cier ou une des activités connexes ou complémentairesvisées aux articles 29 à 29-4 de la Loi de 1993. Les acti-vités connexes ou complémentaires sont exposées aupoint III. ci-après.

La Loi de 1993 précise que les professionnels du secteurfinancier autres que les établissements de crédit et lesentreprises d’investissement17 peuvent être désignés par lesigle ‘PSF’.

Suite à cette modification, la surveillance prudentielle dela CSSF s’étend désormais à toutes les personnes juridi-ques de droit luxembourgeois qui offrent des servicesfinanciers non spécifiquement réglementés et qui relèventdes dispositions générales relatives à l’agrément des PSF.Il en résulte que les professionnels qui exercent uneactivité de recouvrement de créances de tiers et lesprofessionnels qui effectuent des opérations dechange-espèce sont aujourd’hui soumis à la surveillancede la CSSF. Ces PSF n’étaient pas surveillés par la CSSFavant la réforme.

La modification de l’encadrement des PSF par leur misesous surveillance prudentielle de la CSSF est complétéepar la soumission obligatoire de leurs documentscomptables au contrôle d’un réviseur d’entreprisesexterne18.

La Loi introduit également une nouvelle catégorie expres-sément exclue de la catégorie des PSF, à savoir les entre-

prises qui exercent une activité du secteur financier autrequ’un service d’investissement, mais exclusivement à uneou plusieurs entreprises appartenant au même groupequ’elles.

B. Les nouvelles catégories de PSF

Parmi ces ‘nouvelles’ catégories de PSF figurent des acti-vités qui existaient déjà avant la réforme, comme l’octroide crédits, et les activités de prêt et emprunt de titres. S’yajoutent des activités pour lesquels il a paru utile deprévoir un statut spécifique, comme par exemple lesagents de transfert et de registre et les gestionnairesd’organismes de placement collectif de droit étranger.

1. Les dépositaires professionnels de titres ou d’autres instruments financiers

Le nouvel article 24 (F) (1) de la Loi de 1993 précise que‘sont dépositaires professionnels de titres ou d’autresinstruments financiers les professionnels dont l’activitéconsiste à recevoir en dépôt des titres ou d’autres instru-ments financiers de la part des seuls professionnels dusecteur financier, à charge d’en assurer la garde et l’admi-nistration et d’en faciliter la circulation’19.

L’accès à cette activité est réservé aux seules personnesmorales, qui justifient d’un capital social minimal de2.500.000 EUR.

La classification des dépositaires de titres et d’autresinstruments financiers parmi les entreprises d’investisse-ment est motivée par le fait que leur activité s’étendaujourd’hui au-delà de la simple conservation et del’administration de titres et d’autres instruments finan-ciers, et englobe également des services accessoires,comme la réception, la transmission et l’exécution desordres des clients, en particulier dans le cadre des opéra-tions de mises en pension lesquelles ont connu au Luxem-bourg une croissance exponentielle20.

2. Les agents de transfert et de registre

Sont visés les professionnels dont l’activité consiste dansla réception et l’exécution d’ordres portant sur un ouplusieurs instruments visés à la section B de l’annexe II de

16. Loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.17. L’article 13 (2) énumère les professionnels du secteur financier qui ne font pas partie des personnes regroupées sous le sigle ‘PSF’.18. Nouvel article 22 de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.19. Nouvel article 24 (F) (1) de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.20. Projet de loi n° 5085 portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier; modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998

portant création d’une commission de surveillance du secteur financier; modification de la loi du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés, Arrêté dedépôt, Commentaire des articles, p. 11.

160 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

la Loi de 199321. L’exécution de ces ordres comporte latenue du registre pour l’émetteur.

Les agents de transfert et de registre sont particulièrementactifs dans le domaine des OPC. Ils procèdent essentielle-ment à la vérification des sommes entrantes et à l’émissiondes titres afférents une fois que le paiement a été effectué.Ils annulent les certificats émis au nom du cédant, effec-tuent la transcription dans le registre des actionnaires ouporteurs de parts et délivrent les certificats nouveaux aunom de l’acquéreur.

Cette activité peut uniquement être exercée par despersonnes morales justifiant d’un capital social minimalde 1.500.000 EUR.

Les PSF agréés comme agent de transfert et de registresont autorisés de plein droit à exercer l’activité d’agentadministratif du secteur financier ainsi que celle d’agentde communication à la clientèle22. Contrairement auxagents administratifs, dont l’activité se limite aux servicesadministratifs, les agents de transfert et de registre assu-ment également le traitement des transactions pourcompte de leurs clients et en supportent le risque financier.

3. Les professionnels effectuant des opérations de prêt

D’après le nouvel article 28-4 de la Loi de 1993, ‘sontprofessionnels effectuant des opérations de prêt, lesprofessionnels dont l’activité professionnelle consiste àoctroyer, pour leur compte, des prêts au public’23.

Tombent dans cette catégorie les professionnels qui effec-tuent des opérations de crédit-bail financier24 et desopérations d’affacturage avec ou sans recours25.

Sont expressément exclues de l’application des disposi-tions légales régissant cette activité les personnes qui effec-tuent des opérations de titrisation, ainsi que les personnesqui octroient des crédits à la consommation, y compris desopérations de crédit-bail financier, à condition que cetteactivité est exercée de manière accessoire dans le cadre

d’une activité prévue par la loi du 28 décembre 1988 surle droit d’établissement. L’article ne vise pas non plus lesprofessionnels qui octroient des crédits à des entreprissesappartenant au même groupe, exclus de l’application de laLoi de 1993, telle que modifiée.

Seules les personnes morales justifiant d’un capital socialminimal de 1.500.000 EUR peuvent être agréées commeprofessionnels effectuant des opérations de prêt.

4. Les professionnels effectuant des prêts de titres

Il s’agit des professionnels dont l’activité consiste à prêterou à emprunter des titres pour leur propre compte. L’agré-ment requis pour l’exercice de cette activité est donnéexclusivement aux personnes morales qui justifient d’uncapital social minimal de 2.500.000 EUR.

Ne sont pas concernés, les intermédiaires professionnelsen matière de prêt de titres qui agissent pour le compte detiers. Ceux-ci relèvent soit du statut de commissionnaire,soit de celui de courtier.

5. Les professionnels effectuant des services de transfert de fonds

La création de cette catégorie répond au souci du législa-teur luxembourgeois d’encadrer les activités de transfertimmatériel de fonds ‘en raison du risque de blanchimentde capitaux que cette activité comporte’26. Il a égalementparu impératif que cette activité soit réglementée, afind’éviter qu’elle ne soit exercée par certains négociants.

L’activité de service de transfert de fonds consiste:– à recevoir des fonds d’un donneur d’ordre et à transfé-

rer ces fonds pour compte de celui-ci à un correspon-dant tiers moyennant une inscription comptable, envue de mettre ces fonds à la disposition d’un bénéficiai-re désigné par le donneur d’ordre; ou

– à tenir à disposition et à remettre les fonds visés au tiretprécédent au bénéficiaire désigné par le donneur d’or-dre.

21. Il s’agit des instruments suivants: valeurs mobilières, parts d’un OPC, instruments du marché monétaire, contrats financiers à terme (futures), y compris lesinstruments équivalents donnant lieu à un règlement en espèces, contrats à terme sur taux d’intérêts (FRA), contrats d’échange (swaps) sur taux d’intérêt, sur devisesou les contrats d’échange sur des flux liés à des actions ou à des indices d’actions (equity swaps), ainsi que les options visant à acheter ou à vendre tout instrumentrelevant des instruments précités (y compris les instruments équivalents donnant lieu à un règlement en espèces ainsi que les options sur devises et sur tauxd’intérêts).

22. Cette catégorie est décrite ci-après au point III. B.23. Nouvel article 28-4 de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.24. Opérations qui consistent en des opérations de locations de biens mobiliers ou immobiliers spécialement achetés en vue de cette location par le professionnel qui

en demeure propriétaire, lorsque le contrat réserve au locataire la faculté d’acquérir en cours ou en fin de bail la propriété de tout ou partie des biens louésmoyennant un prix déterminé dans le contrat.

25. Opérations par lesquelles le professionnel acquiert des créances commerciales et en assure le recouvrement pour son propre compte.26. Projet de loi n° 5085 portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier; modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998

portant création d’une commission de surveillance du secteur financier; modification de la loi du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés, Arrêté dedépôt, Exposé des motifs, p. 2.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 161

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

L’agrément est réservé aux personnes morales et est subor-donné à la justification d’un capital social de1.500.000 EUR au moins.

6. Les administrateurs de fonds communs d’épargne

La protection des épargnants a poussé le législateur àréglementer cette activité et à définir les tâches et obliga-tions des personnes responsables de systèmes de place-ment en commun de l’épargne.

Les administrateurs de fonds communs d’épargne sont lespersonnes physiques ou morales dont l’activité consistedans l’administration d’un ou de plusieurs fonds communsd’épargne. Le nouvel article 28-7 (1) de la Loi de 1993 sou-ligne que ‘nul autre qu’un administrateur de fonds com-muns d’épargne ne peut exercer, même à titre accessoire,l’activité d’administrateur de fonds communs d’épargne’27.

Dans ce contexte, on entend par fonds commun d’épargne‘toute masse indivise de dépôts espèces administrée pourcompte d’épargnants indivis dont le nombre est au moinségal à 20 personnes, dans le but d’obtenir des conditionsfinancières plus avantageuses’28.

La Loi rend obligatoire la conclusion d’une conventiond’administration entre l’administrateur et l’épargnant.Cette convention doit clairement établir les obligationsrespectives et les conditions de sortie du fonds commund’épargne.

La Loi précise que l’administrateur est responsable enversles épargnants conformément aux règles générales dumandat. Il est tenu d’administrer le fonds en conformitéavec la convention d’administration et dans l’intérêtexclusif des épargnants29. Le même article 28-7 (4)souligne que l’administrateur ‘ne peut effectuer que lesplacements expressément prévus dans la conventiond’administration. Il ne peut en aucun cas utiliser les actifsdu fonds commun d’épargne pour ses propres besoins’30.

Les actifs du fonds peuvent uniquement être investis endépôts à terme ou à vue auprès d’un ou de plusieursétablissements de crédit ayant leur siège statutaire auLuxembourg ou dans un pays membre de l’Union euro-péenne. L’établissement de crédit dépositaire des fondsdoit recevoir une copie de la convention d’administration.

7. Les gestionnaires d’OPC non coordonnés

Il s’agit des professionnels dont l’activité consiste dans lagestion d’OPC autres que des OPC établis au Luxem-bourg et autres que les OPCVM agréés conformément à ladirective modifiée 85/611/CEE.

L’agrément est accordé uniquement aux personnesmorales justifiant d’un capital social minimal de1.500.000 EUR.

C. Les PSF exerçant une activité connexe ou complémentaire à une activité du secteur financier

1. Les agents de communication à la clientèle

D’après le nouvel article 29-1 la Loi de 1993, les agents decommunication à la clientèle sont les professionnels dontl’activité consiste dans la prestation pour compted’établissements de crédit, PSF, OPC ou fonds de pension,d’un ou de plusieurs des services suivants:

– la confection, sur support matériel ou électronique, dedocuments à contenu confidentiel, à destination per-sonnelle de clients d’établissements de crédit ou de PSF,d’investisseurs d’OPC et de cotisants, affiliées ou béné-ficiaires de fonds de pension;

– l’archivage de ces documents;

– la communication aux personnes précitées, de docu-ments ou d’informations relatives à leurs avoirs ainsiqu’aux services offerts par le professionnel en cause;

– la consolidation, sur base d’un mandat exprès, des po-sitions que les personnes précitées détiennent auprès dedifférents professionnels financiers.

Seules des personnes morales justifiant d’un capital socialminimal de 1.500.000 EUR peuvent obtenir l’agrémentd’agent de communication à la clientèle. Par dérogationaux autres PSF, il a été jugé que la disposition légaleconcernant l’expérience professionnelle des dirigeantsétait trop restrictive pour pouvoir s’appliquer à cette caté-gorie. L’agent devra cependant justifier d’une expérienceadéquate dans le domaine de l’activité envisagée etdisposer des moyens techniques et humains requis pourmener à bien ses fonctions31.

27. Nouvel article 28-7 de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.28. Nouvel article 28-7 (1) de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.29. Nouvel article 28-7 (4) de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.30. Nouvel article 28-7 (4) de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Texte coordonné, Mémorial A 2003, p. 3202.31. Projet de loi n° 5085 portant modification de la loi modifiée du 5 avril 1993 relative au secteur financier; modification de la loi modifiée du 23 décembre 1998

portant création d’une commission de surveillance du secteur financier; modification de la loi du 31 mai 1999 régissant la domiciliation des sociétés, Arrêté dedépôt, Commentaire des articles, p. 16.

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CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

2. Les agents administratifs du secteur financier

Sont visés par le nouvel article 29-2 de la Loi de 1993, lesprofessionnels dont l’activité consiste à effectuer pour lecompte d’établissements de crédit, PSF, OPC ou fonds depension, dans le cadre d’un contrat de sous-traitance, desservices d’administration qui sont inhérents à l’activitéprofessionnelle du donneur d’ordre. Les professionnelsqui sont agréés comme agent administratif du secteurfinancier sont de plein droit autorisés à exercer l’activitéd’agent de communication à la clientèle.

L’obtention de l’agrément est réservée aux seulespersonnes morales justifiant d’un capital social minimalde 1.500.000 EUR.

3. Les opérateurs de systèmes informatiques et de réseaux de communication du secteur financier

Il s’agit des professionnels qui sont en charge du fonction-nement de systèmes informatiques et de réseaux decommunication faisant partie du dispositif informatiqueet de communication propre d’établissements de crédit,PSF, OPC ou fonds de pension. Cette activité comporte letraitement informatique ou le transfert des données stoc-kées dans le dispositif informatique32.

En vue de garantir une ségrégation efficace des donnéesrelevant de secteurs différents, les opérateurs en causedoivent agir exclusivement pour le compte de profession-nels du secteur financier. Rien ne s’oppose cependant à cequ’ils fournissent d’autres services à ces professionnels dusecteur financier, tels que la mise en place et la mainte-nance de systèmes informatiques.

L’activité d’opérateur de systèmes informatiques et deréseaux de communication du secteur financier estréservée aux personnes morales justifiant d’un capitalsocial minimal de 1.500.000 EUR.

4. Les professionnels effectuant des services de constitution et de gestion de sociétés

D’après le nouvel article 29-4 de la Loi de 1993, lesprofessionnels effectuant des services de constitution et degestion de sociétés sont les personnes physiques oumorales dont l’activité consiste à effectuer des servicesayant trait à la constitution ou à la gestion d’une ou deplusieurs sociétés. L’agrément de ces personnes est subor-

donné à la justification d’assises financières d’une valeurde 370.000 EUR.

En raison de la relation étroite entre les services de domi-ciliation et les services de constitution et de gestion desociétés, les personnes admises à exercer des services dedomiciliation sont autorisées de plein droit à exercerl’activité de professionnel effectuant des services de cons-titution et de gestion de sociétés, sans cependant êtresoumis à l’agrément préalable et la surveillance pruden-tielle de la CSSF.

Suite à l’adoption de ces modifications, un texte coor-donné de la Loi de 1993 a été publié au Mémorial33.

Partie II. Jurisprudence

1. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 10 juillet 2002, rôle n° 6515434

Société de droit des îles vierges britanniques O. contre la Banque D.

(Ordre de bourse – Contrat de mandat – Accomplisse-ment du mandat)

Le banquier qui a reçu de son client un ordre d’achat oude vente de valeurs mobilières ne peut considérer sonmandat comme accompli ni après transmission de l’ordreà l’agent de change, ni après l’achat ou la vente des titrespar ce dernier, mais uniquement après la livraison desditstitres à son client, respectivement après l’inscription encompte des fonds résultant de l’opération.

Le 29 avril 1994, la société de droit des îles vierges britan-niques O. (ci-après ‘la Société’) conclut avec la Banque D.(ci-après ‘la Banque’) un contrat intitulé Custodian Agree-ment, par lequel la Banque devient le dépositaire du porte-feuille de valeurs mobilières de la Société.

La Société affirme avoir donné le 24 septembre 1997l’instruction à la Banque, de procéder au rachat de 2.219actions d’un fonds d’investissement, avec valeur au30 septembre 1997.

En janvier 1998, elle constate cependant que cette instruc-tion n’a pas été exécutée, de sorte qu’elle reformule sonordre de rachat le 10 février 1998. Entretemps, la valeur

32. Les dispositifs informatiques et les réseaux peuvent ou bien être la propriété de l’établissement de crédit, du PSF, de l’OPC, ou du fonds de pension, ou bien leurêtre mis à disposition par l’opérateur.

33. Texte coordonné de la loi du 5 avril 1993 relative au secteur financier telle qu’elle a été modifiée dans la suite, Mémorial A 2003, p. 3202.34. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 61.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 163

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

de rachat des actions est tombée de 246,31 USD à179,17 USD. La Société intente une action contre laBanque et lui reproche de ne pas avoir exécuté correcte-ment le premier ordre de vente. Elle lui demande del’indemniser de son préjudice chiffré à 48.983,66 USD,représentant la perte de valeur des actions vendues.

Après avoir conclu qu’au moment des faits litigieux, lesparties étaient toujours liées par le Custodian Agreement,ce qui était contesté par la Société, le Tribunal analyse lesobligations contractuelles à charge de la Banque. Celle-ciconteste toute faute dans son chef et estime qu’elle avaitcorrectement transmis le premier ordre de vente au fondsd’investissement concerné.

Le Tribunal relève que dans la transmission des ordres debourse, le banquier joue le rôle d’un mandataire, qui esttenu d’accomplir le mandat tant qu’il en demeure chargé,et qui répond des dommages-intérêts qui pourraientrésulter de son inexécution. Le banquier n’a accompli sesengagements qu’au moment où il obtient la livraison destitres, respectivement leur inscription en compte oul’inscription en compte des fonds résultant de l’opération.

Le Tribunal conclut que la responsabilité de la Banque estengagée, alors que celle-ci devait assurer la régularité etl’efficacité des actes accomplis: elle aurait dû non seule-ment vérifier et se renseigner auprès de son correspondantsi ce dernier avait effectivement reçu les instructionsenvoyées par fax, mais également s’assurer que l’opéra-tion demandée par son client ait effectivement étéexécutée à la date indiquée.

Le Tribunal nomme un expert pour chiffrer le préjudicesubi par la Société, préjudice équivalent à la perte subiepar la Société en raison de la différence de valeur desactions en cause, entre la date initialement prévue pourl’opération de rachat et la date du rachat définitif.

2. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 16 janvier 2003, rôle n° 72800 (inédit)

Société de droit des îles vierges britanniques F. contre la Banque C.

(Bénéficiaire économique – Pouvoir de représentation)

La banque ne doit pas se conformer aux instructionsdonnées par le bénéficiaire économique d’une société. Cesinstructions sont dépourvues de toute valeur juridique.

Le 24 mai 2000, la société du droit des îles vierges britan-niques F. (ci-après ‘la Société’) ouvre un compte auprès de

la Banque C. (ci-après ‘la Banque’), afin de placer unecertaine somme sous gestion discrétionnaire.

En date du 16 août 2000, les représentants légaux de laSociété signent un mandat de gestion discrétionnaire auprofit de la Banque. Le 29 août 2000, la Société ouvre unsecond compte, destiné à la gestion discrétionnaire et ytransfère la somme de 7.500.000 FRF. La Banquecommence la gestion le 4 septembre 2000.

Par fax du 1er septembre 2000, le bénéficiaire économiquede la Société dénonce le mandat de gestion. Les représen-tants légaux de la Société terminent le contrat le19 septembre 2000.

Estimant que la Banque aurait dû commencer les opéra-tions de gestion dès l’ouverture du premier compte etcesser la gestion dès la dénonciation effectuée par sonbénéficiaire économique, la Société intente une actioncontre la Banque et lui reproche d’avoir failli à son obliga-tion d’exécution de bonne foi et de loyauté à son égard.

Elle chiffre son dommage total à 222.635,22 EUR, lequelse compose notamment du préjudice résultant de l’omis-sion par la Banque d’avoir investi les fonds conformémentau contrat de gestion, de celui résultant du retard pris parla Banque dans le transfert du portefeuille suite à la rési-liation du contrat de gestion, ainsi que celui représenté parla baisse du capital investi.

Aux termes du contrat de gestion, le mandat entre envigueur dans un délai de 8 jours au plus tard après sasignature. Etant donné que les fonds à gérer n’ont ététransférés sur le compte destiné à la gestion discrétion-naire qu’en date du 29 août 2000, le Tribunal conclut queles opérations d’investissement n’ont pas commencé tardi-vement.

Il estime ensuite que la dénonciation du contrat de gestionpar le bénéficiaire économique est dépourvue de toutevaleur juridique, étant donné que ce dernier n’est pas lecocontractant de la Banque. Le Tribunal rejette lesdemandes de la Société, au motif que la Banque n’avaitpas commis de faute pour avoir agi sur base des seulesinstructions des représentants légaux.

Il relève également que la Société n’a pas justifié en quoi letransfert de son portefeuille de la Banque vers un autreétablissement de crédit aurait nécessité un temps anorma-lement long, et que même à supposer que cette preuve soitrapportée, ‘il faudrait encore pour que la demande de larequérante soit justifiée que ce transfert tardif ait causéconcrètement un préjudice à la demanderesse. Or une tellepreuve n’est absolument pas rapportée’.

164 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

3. Cour d’appel 22 janvier 2003, rôle n° 2356835

W. contre la Banque H.

(Gage sur valeurs mobilières – Obligation de conservation– Dépréciation de la valeur des avoirs gagés – Obligationde réaliser le gage (non))

Les pertes de valeur d’avoirs gagés ne sont pas imputablesà la Banque, si les conditions générales prévoient que leclient est tenu de veiller lui-même à la conservation desvaleurs nanties en faveur de la Banque.

La Banque n’est pas tenue de réaliser le gage en vue decouvrir un solde débiteur, si une clause des conditionsgénérales ne lui en réserve que la simple faculté.

W. est titulaire d’un compte auprès de la Banque H.(ci-après ‘la Banque’). Le compte renseigne un solde débi-teur, qui n’a pas pu être apuré après la réalisation par laBanque d’un gage sur titres.

Lors de l’action en recouvrement introduite par laBanque, W. reproche à celle-ci d’avoir manqué à l’obliga-tion de conservation lui incombant en tant que créanciergagiste, en s’abstenant de réaliser les garanties avant quecelles-ci ne perdent en valeur.

La Banque conteste toute faute dans son chef et fait étatd’une clause contenue dans les conditions générales, selonlaquelle le client est tenu de veiller lui-même à la conser-vation et à la protection des avoirs et droits nantis enfaveur de la Banque.

La Cour rejette le moyen soulevé par W., et estime qu’ilappartenait à ce dernier de veiller lui-même à la conserva-tion des valeurs nanties en faveur de la Banque, d’autantplus que celle-ci n’avait pas la gestion de ces avoirs.

W. reproche ensuite à la Banque de ne pas avoir réalisé entotalité les avoirs nantis, en vue d’apurer le solde débiteur.La Banque se base sur une disposition des conditionsgénérales en vertu de laquelle la Banque a le droit, maisnullement l’obligation de procéder à la réalisation desgaranties consenties pour couvrir les obligations du débi-teur.

La Cour déboute W. également sur ce point, en estimantque la Banque en s’abstenant de réaliser le gage en ques-tion dans sa totalité, a uniquement fait application d’unefaculté que lui a offerte une disposition des conditions

générales, de sorte qu’elle ne s’est pas constituée en fauteen agissant de la sorte.

4. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 23 janvier 2003, rôle n° 73197 (inédit)36

W. contre la Banque N.

(Inscription en compte d’actions – Contrat de mandat –Obligation de diligence du mandataire)

A défaut de délai contractuel prévu entre parties poureffectuer une opération, l’obligation de diligence à chargedu banquier d’exécuter le mandat qui lui est conféré, dansles meilleurs délais, n’est qu’une obligation de moyens.

Le 2 février 2000, W. remet à la Banque N. (ci-après ‘laBanque’) un certificat représentant un certain nombred’actions de la société de droit américain A., afin que cestitres soient portés sur son compte. Les titres y sontinscrits le 17 avril 2000. Entre la remise à la Banque etl’inscription en compte, les titres sont indisponibles. Les25 et 26 avril 2000, W. donne des ordres à la Banque envue de procéder à la vente des titres.

Se référant à la baisse de la valeur des titres entre la remiseà la Banque et leur inscription en compte, W. estime qu’illui était impossible de vendre les actions au moment où lecours des titres était le plus haut, en raison du retard prispar la Banque dans l’exécution de ses obligations.

W. assigne la Banque, en lui reprochant de ne pas avoirexécuté l’ordre d’inscription en compte des titres demanière correcte et diligente. Il base son action principa-lement sur l’article 1147 du Code civil, et subsidiairementsur les articles 1134 et suivants du même code.

Le Tribunal déboute W. de sa demande principale, baséesur l’article 1147 du Code civil, en relevant qu’enl’absence de mise en demeure ou de délai d’exécution fixéd’un commun accord, l’article 1147 était inapplicable.

La juridiction saisie rejette également le moyen subsi-diaire, tiré de la violation des articles 1134 et suivants duCode civil. Elle retient que la Banque avait agi commemandataire et accepté de procéder à l’inscription encompte des titres.

D’après le Tribunal, le mandataire est tenu de se justifiers’il n’a pas rempli sa mission, tandis que le mandant doitprouver sa faute lorsque le mandat est mal exécuté. L’obli-

35. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 85.36. W. a interjeté appel contre la décision.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 165

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

gation de la Banque d’exécuter sa mission constitue uneobligation de résultat, ‘mais à défaut de délai contractuelprévu entre parties pour effectuer cette opération, l’obli-gation de diligence d’effectuer son mandat dans lesmeilleurs délais, n’est qu’une obligation de moyens’.

Le Tribunal admet que la procédure avait pris un tempsanormalement long. Il estime cependant que la responsa-bilité de la Banque, limitée contractuellement aux cas defraude, de faute intentionnelle ou de négligence grave,n’était pas engagée, étant donné que W. n’avait pasrapporté la preuve que le retard était imputable à laBanque.

5. Cour d’appel 6 février 2003, rôle n° 2581737

Banque C. contre I.

(Gage sur valeurs mobilières – Obligation de conservation– Dépréciation de la valeur des avoirs gagés)

Le banquier créancier gagiste est tenu non seulementd’une obligation générale de veiller sur la chose, maiségalement d’une obligation particulière positive, l’obliga-tion de conserver la chose. Une banque manque à sonobligation de conserver la chose mise en gage, lorsque,d’une part, elle ne prend aucune mesure utile en vued’endiguer le dépérissement du gage destiné à garantir ledécouvert de son client, et que d’autre part elle refuse à cedernier tout droit de formuler un ordre de stop-loss.

I. détient un compte titres auprès de la Banque C. (ci-après‘la Banque’), et obtient une facilité de caisse, en vued’investir en bourse. Le jour de l’obtention de cette faci-lité, il consent un nantissement portant sur les titresdétenus en portefeuille au profit de la Banque. Parmi cestitres figurent les valeurs KWG, lesquelles connaissent unechute considérable fin 1997-début 1998. Cette chute est àl’origine d’un découvert important, dont la Banqueréclame remboursement à son client.

Dans le cadre de l’action en recouvrement du solde débi-teur introduite par la Banque, I. formule une demandereconventionnelle et reproche à la demanderesse de ne pasavoir respecté un ordre de stop-loss aux fins de voirvendre les titres KWG au plus tard au cours d’environ4,50 par action. Il estime que le non-respect de cet ordreest à l’origine du découvert dont la Banque réclame leremboursement.

La Banque conteste l’argumentation de I. et estimequ’étant donné que les titres étaient gagés en sa faveur, I.n’avait pas pu valablement donner un ordre de stop-lossles concernant. Par ailleurs, le droit conféré au créanciergagiste de procéder à l’exécution de la garantie, est insti-tuée au seul bénéfice de la Banque, de sorte que le clientne peut lui reprocher de ne pas avoir procédé à cetteexécution.

La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 2080 alinéa 1du Code civil, ‘le créancier répond ... de la perte ou dété-rioration du gage qui serait survenue par sa négligence’, etque par conséquent, le texte établit à la charge du créan-cier gagiste non seulement une obligation générale deveiller sur la chose, mais également une obligation parti-culière positive, l’obligation de conserver la chose.

‘Dès lors, si l’objet engagé périt ou est détérioré par le faitou la négligence du créancier gagiste, celui-ci doit réparerle préjudice causé et peut être condamné à desdommages-intérêts qui se compenseront à due concur-rence avec sa créance’.

La Cour concède que l’initiative de la procédure de réali-sation du gage a été instituée au seul profit de la Banqueet que rien n’oblige celle-ci à exécuter la garantie. Elleprécise cependant que la Banque ne peut pas, d’une part,soutenir qu’il appartenait au client de suivre l’évolutiondes titres achetés et, d’autre part, lui dénier le droit deformuler un ordre de stop-loss. Elle fait état du droit derétention existant au profit du créancier gagiste, et del’obligation corrélative de conservation du gage, pourrejeter l’argument de la Banque, consistant à dire qu’ellen’avait pas eu à mettre en œuvre ses propres mécanismesde surveillance interne et qu’elle n’avait ni l’obligationd’avertir le client de la chute des cours, ni de mettre enœuvre le gage dont elle a bénéficié.

En l’espèce, le cours des titres KWG n’a cessé, depuis leurmise en gage, de chuter, jusqu’à perdre 100% de leurvaleur. Jusqu’à cette date, la Banque n’avait pris aucunemesure utile en vue d’endiguer le dépérissement du gagedestiné à garantir le découvert de I., et avait refusé à cedernier tout droit de formuler un ordre de stop-loss.

La Cour conclut de ces éléments que la Banque a manquéà son obligation de conserver la chose mise en gage, etnomme un expert, estimant qu’elle ne disposait pasd’éléments suffisants pour toiser immédiatement lesrevendications des parties au litige.

37. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 63.

166 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

6. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 17 février 2003, rôle n° 7483238

Banque P. contre les consorts F.

(Virement exécuté sans ordre du client – Action en répéti-tion de l’indu exercée par le banquier)

Le banquier qui a effectué un transfert de fonds sans avoirreçu d’ordre ou pour une somme supérieure à l’ordre reçureste débiteur à l’égard de son client. L’établissementbancaire n’a pas disposé des fonds du client, mais a à tortinscrit un montant débiteur au compte du client, de sortequ’il a qualité pour introduire une action en répétition del’indu contre la personne ayant reçu le montant qui ne luiétait pas destiné.

Depuis 1993, la Banque P. (ci-après ‘la Banque’) exécutesur ordre de son client un ordre permanent au profit desconsorts F. Suite au courrier du 13 octobre 1998, parlequel F. informe la Banque de son nouveau numéro decompte, celle-ci modifie l’ordre permanent de son client.Par la suite, il s’est avéré que les consorts F. n’avaient plusdroit aux paiements mensuels de la part du client de laBanque, de sorte qu’ils ont été crédités indûment pendant25 mois du montant de 1.115,52 EUR, soit entotal 27.888,02 EUR.

Les consorts F. contestent la qualité à agir de la Banque,en précisant que l’action en répétition de l’indu seraituniquement ouverte à celui qui aurait procédé au paie-ment indu, et non pas à son mandataire.

Le Tribunal rejette le moyen d’irrecevabilité et précise que‘l’action en répétition de l’indu doit être exercée par lesolvens, c’est-à-dire par celui qui prétend qu’il a indûmentdéboursé, que son patrimoine s’est appauvri de façonindue. L’action appartient encore aux cessionnaires etsubrogés de la personne qui a effectivement payé. Lorsquec’est un mandataire qui a payé, l’action lui appartient dela même façon qu’à son mandant. Elle peut également êtreintentée par un tiers qui a agi au nom et pour le compted’autrui comme représentant légal ou conventionnellorsqu’il a payé avec ses propres deniers’.

Comme en l’espèce, la Banque est le dépositaire des fondsde ses clients, le Tribunal estime que le dépôt de fonds enbanque implique le droit du banquier de disposer libre-ment des fonds et n’engendre à sa charge qu’une obliga-tion de restitution. ‘Par le dépôt le client devient un créan-cier de la banque à qui les détournements et erreurs

commis à l’intérieur de l’établissement ne causent aucunpréjudice’.

Le Tribunal précise encore que ‘le caractère monétaire dudroit conféré au bénéficiaire par l’inscription au crédit deson compte implique qu’il soit détaché et indépendant desrapports juridiques antérieurs et qu’il soit protégé parl’inopposabilité des exceptions qui peuvent affecter d’unepart les rapports entre le donneur d’ordre et son banquieret d’autre part, l’inopposabilité des exceptions ou diffi-cultés qui affectent les rapports entre banques’.

Le moyen d’irrecevabilité soulevé par les consorts F. estrejeté pour les motifs que ‘le banquier qui a effectué untransfert de fonds sans avoir reçu d’ordre ou pour unesomme supérieure à l’ordre reçu reste débiteur à l’égard deson client. L’établissement bancaire n’a pas disposé desfonds du client, mais a à tort inscrit un montant débiteurau compte du client’. A l’égard de la personne ayant reçule montant qui ne lui était pas destiné, la banque a disposéde ses propres deniers, et peut partant lui réclamer lessommes perçues indûment en exerçant l’action en répéti-tion de l’indu.

7. Cour d’appel 19 février 2003, rôle n° 26642 (inédit)

Société de droit de Gibraltar C. contre la Banque N.

(Contrat de dépôt titres – Obligation d’information et deconseil du banquier)

Si le banquier auprès duquel un compte de dépôt titres estouvert n’a traditionnellement que les obligations d’undépositaire de titres avec les accessoires inhérents à ladétention de titres, aux droits qui y sont attachés et à leurrestitution, il n’en reste pas moins qu’il a une obligationd’information et de conseil envers son client si leur rela-tion n’est pas limitée au seul compte de dépôt. Cette obli-gation d’information et de conseil est fonction de l’expé-rience respectivement de l’inexpérience du client.

La société de droit de Gibraltar C. (ci-après ‘la Société’)est titulaire d’un compte de dépôt de valeurs auprès de laBanque N. (ci-après ‘la Banque’).

Dans ses relations avec la Banque, la Société est repré-sentée par Monsieur B., professionnel en matière finan-cière. Sur ce compte de dépôt ont figuré notamment desobligations de type zerobonds libellés en rand sud-afri-cains.

38. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 62.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 167

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

En date du 28 août 1998, au vu de la situation perturbéedu marché financier, la Banque contacte Monsieur B. pourl’informer du fait que le marché obligataire subissait uneforte baisse, que le rand sud-africain était frappé par unesérieuse dévaluation et qu’il fallait envisager de vendre lesobligations précitées.

Sur conseil de la Banque, Monsieur B. prend la décision devendre les obligations. D’après la Société, cette vente nes’est pas réalisée dans les meilleures conditions, mais à unprix anormalement bas.

Par conséquent, elle introduit une demande en justice envue d’obtenir principalement l’annulation pour vice duconsentement, des ordres relatifs à la vente des obliga-tions, en reprochant à la Banque d’avoir donné uneprésentation erronée de la situation. Subsidiairement, laSociété estime que la Banque a engagé sa responsabilitécontractuelle dans l’exécution de l’ordre de vente pour nepas avoir exécuté correctement l’obligation d’informationet de conseil à sa charge.

La Cour écarte le moyen tiré de la nullité de la vente pourvice de consentement, au motif que ‘les relations entreparties ne permettent pas d’analyser l’instruction donnéepar B. comme un accord ou une convention entre partiesqui serait annulable ou rescindable pour cause de vice deconsentement’.

Quant à la base subsidiaire de la demande, la Cour estimeque ‘si le banquier auprès duquel un compte de dépôttitres est ouvert n’a traditionnellement que les obligationsd’un dépositaire de titre avec les accessoires inhérents à ladétention de titres, aux droits qui y sont attachés et à leurrestitution, il n’en reste pas moins qu’il a une obligationd’information et de conseil envers son client si, comme enl’espèce, leur relation n’est pas limitée au seul compte dedépôt’.

La Cour qualifie cette obligation de conseil d’obligationde moyens, eu égard aux aléas du marché financier etprécise que, si le banquier ne gère pas lui-même les affairesde son client en vertu d’un contrat de gestion, l’obligationd’information et de conseil à sa charge est fonction del’expérience respectivement de l’inexpérience du client.

En l’espèce, la Cour conclut que la Société, par l’intermé-diaire de son mandataire Monsieur B., est un investisseurhabitué et averti, et devait être en mesure d’évaluer lesrisques de l’opération conseillée par la Banque.

La Cour rejette l’action de la Société, en retenant finale-ment que la Banque n’avait pas commis de faute en suggé-rant de vendre les obligations dans cette situation excep-tionnelle.

8. Cour d’appel 11 mars 2003, rôle n° 2700139

Consorts C. contre la Banque D.

(Clause de juridiction conventionnelle – Validité)

La clause de juridiction disposant que les différends serontsoumis à une juridiction déterminée, et réservant à labanque la faculté de déroger à cette attribution de juridic-tion si elle le considère comme opportun est valable.

Les 30 avril 1992, la Banque D. accorde à une société B.une ligne de crédit portant sur la somme de40.000.000 LUF, augmentée de 5.500.000 LUF le 28 août1993. Chaque fois, les consorts C. se portent cautionssolidaires et indivisibles envers la Banque D., pour lessommes accordées au débiteur principal.

Comme la société B. tombe en faillite, la Banque met lescautions en demeure de payer la somme de447.637,88 EUR. Suite au refus des consorts C. des’exécuter, la Banque introduit une action contre euxdevant le Tribunal de Diekirch. D’après la Banque, cettejuridiction est compétente ratione loci, étant donné que ladette dont les consorts C. sont tenus se rapporte à unimmeuble situé dans l’arrondissement de Diekirch et doitpartant être payée dans cet arrondissement.

Les consorts C., domiciliés en Belgique contestent lacompétence de la juridiction saisie, estimant que la clausede juridiction est contraire aux dispositions du Nouveaucode de procédure civile.

En instance d’appel, la Cour précise que ‘les clauses dejuridictions sont parfaitement valables et elles peuvent dèslors, si les parties en conviennent, écarter l’application desdispositions du nouveau code de procédure civile’.

La clause de juridiction sur laquelle la Banque se base estrédigée comme suit: ‘Toutes les contestations serontsoumises au tribunal d’arrondissement de Luxembourg.Toutefois, la banque se réserve la faculté de déroger à cetteattribution de juridiction si elle le considère commeopportun’.

39. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 154.

168 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

La Cour estime que cette clause attributive de juridictionqui prévoit la compétence des Tribunaux de Luxembourg,tout en donnant à la banque la faculté de choisir, s’il y alieu, un autre tribunal ne saurait être préjudiciable auxconsorts C.

La Cour confirme le Tribunal de Diekirch lequel s’étaitdéclaré compétent, et ajoute que ‘cette clause ne peut eneffet être interprétée qu’en ce sens que la banque est auto-risée à assigner la caution non seulement devant letribunal de Luxembourg, lieu conventionnellement prévu,mais encore en tout autre lieu autorisé par les dispositionsdu nouveau code de procédure civile voire des conven-tions internationales régissant la matière et plus particu-lièrement devant les tribunaux du lieu où l’obligation a étéou doit être exécutée ou encore celui où les défendeurssont domiciliés ou encore du lieu de la situation del’immeuble hypothéqué du profit de la banque, c.-à-d.dans tous les cas de figure soit à Luxembourg, soit àDiekirch, soit à A... (Belgique)’.

9. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 26 mars 2003, rôle n° 50630 (inédit)40

Société de droit des îles vierges britanniques B. contre la Banque C.

(Obligation d’information et de conseil du banquier –Investisseur averti)

Quelles que soient les relations du client et de la banque,celle-ci a le devoir particulier de l’informer des risquesencourus dans les opérations spéculatives sur les marchésà terme hors les cas où il en a connaissance, laquelle estprésumée chez les spéculateurs avertis.

Le 23 décembre 1996, la Banque C. (ci-après ‘la Banque’)accorde une ouverture de crédit à la société de droit desîles vierges britanniques B. (ci-après ‘la Société’) portantsur le montant de 34.000.000 LUF. Par la suite, la ligne decrédit est augmentée à 65.000.000 LUF.

Les lignes de crédit sont utilisées par la Société pourprocéder à des investissements en bourse, dont notam-ment des opérations de vente d’options put et call. Engarantie du remboursement des crédits, la Banque béné-ficie d’un gage sur les actifs composant le portefeuille dela Société.

En raison d’une baisse des marchés boursiers, la valeur desactifs gagés diminue et les risques liés aux opérations suroptions put augmentent.

La Banque met la Société en demeure de rétablir la couver-ture et de réapprovisionner le compte de la somme de15.000.000 LUF. La mise en demeure est adressée non pasau siège social de la Société, mais en Belgique, à l’adressede son bénéficiaire économique, lequel est également sonmandataire.

La Société reproche à la Banque d’avoir manqué à sonobligation d’information et de conseil en s’abstenant del’avertir des risques inhérents aux opérations spéculatives,de ne pas avoir correctement imputé les options sur laligne de crédit, et d’avoir violé son secret bancaire, enadressant à la Société des courriers de mise en demeure audomicile de son mandataire et bénéficiaire économique,résidant en Belgique.

Après avoir rappelé que ‘quelles que soient les relations duclient et de la banque, celle-ci a le devoir particulier del’informer des risques encourus dans les opérations spécu-latives sur les marchés à terme hors les cas où il en aconnaissance (...)’, et que celle-ci est présumée chez lesspéculateurs avertis, le Tribunal se réfère à l’objet social dela Société qui consiste notamment dans l’achat, la vente etd’autres transactions sur des valeurs mobilières comme lesoptions, pour la qualifier de spéculateur averti, qui estprésumé avoir connaissance des risques liés aux opéra-tions réalisées.

Le Tribunal rejette également le moyen tiré du manque-ment reproché à la Banque de ne pas avoir correctementimputé les options put sur la ligne de crédit, et d’avoirmodifié unilatéralement les pondérations des actifsdonnés en gage.

D’après le Tribunal, le fait d’exiger une augmentation dela marge de couverture n’est pas constitutif d’une fautedans le chef de la Banque, étant donné qu’en applicationd’un clause contenue dans le contrat relatif à l’ouverturede crédit, elle était autorisée de modifier les coefficients depondération des titres donnés en gage, et d’exiger uneaugmentation de la marge de couverture au regard del’actualisation de la valeur des options put émises par laSociété.

Enfin, le Tribunal rejette également le troisième reprocherelatif à la violation par la Banque du secret bancaire, enestimant qu’au vu de la situation d’urgence, et du délai de

40. La Société B. a interjeté appel contre la décision.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 169

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

48 heures donné à la Société pour rétablir la marge decouverture, la Banque était en droit d’adresser sa mise endemeure au domicile du représentant légal de la Société, etnon pas au siège social de celle-ci, à Tortola, aux Ilesvierges britanniques.

10. Cour d’appel 2 avril 2003, rôles n° 26050 et 2625641

Consorts S. contre la Banque K. (1re espèce)Consorts H. contre la Banque K. (2e espèce)

(Secret bancaire – Caractère d’ordre public – Obligationde résultat à charge du banquier)

Il est dans le cours normal des choses que les renseigne-ments confiés lors de la conclusion d’un contrat de dépôtavec une banque puissent être gardés secrets. Il n’y a pasd’aléa particulier que ce résultat, qui rentre dans les prévi-sions des parties au contrat et que le législateur protègepar des sanctions pénales, ne soit pas atteint.

Les deux litiges trouvent leur origine dans un vol de docu-ments permettant l’identification de titulaires de comptessecrets commis au sein de la Banque K. (ci-après ‘laBanque’). Suite à ce vol, attribuable à un ou plusieursemployés de la Banque, les documents parviennent entreles mains du Ministère public belge, lequel a autorisé lefisc belge à en prendre connaissance.

Grâce aux documents volés, le fisc belge a procédé à desredressements fiscaux à charge des consorts S. et H.Ceux-ci introduisent une action en justice contre laBanque, en lui reprochant un manquement à son obliga-tion au secret. Ils demandent indemnisation de leur préju-dice matériel et de leur préjudice moral.

Contrairement aux premiers juges, qui avaient déclaré lesactions irrecevables pour défaut d’intérêt légitime, juridi-quement protégé dans le chef des demandeurs, la Courestime que le terme ‘intérêt légitime’ n’est plus le résultatque le demandeur peut retirer de son action: ‘L’intérêt estla lésion d’un droit (appelé cause de l’action par HenriMazeau). A intérêt légitime juridiquement protégé celuiqui peut se prévaloir de la lésion d’un droit’.

Etant donné que la loi confère à celui qui a conclu uncontrat de dépôt avec une banque un droit au secret de lapart de la banque, et que ce droit au secret est d’ordre

public, la Cour conclut que les consorts S. et H. ‘se préva-lent de la lésion de leur droit au secret bancaire, dontl’existence ne fait pas de doute et qui est un droit légitime,droit d’autant plus légitime qu’il est d’ordre public’,partant que l’action est recevable.

Au fond, la Cour qualifie l’obligation du secret de laBanque d’obligation de résultat, en estimant qu’il est ‘dansle cours normal des choses que les renseignements confiéslors de la conclusion d’un contrat de dépôt avec unebanque puissent être gardés secrets. Il n’y a pas d’aléaparticulier que ce résultat, qui rentre dans les prévisionsdes parties au contrat et que le législateur protège par dessanctions pénales, ne soit pas atteint’.

Pour ce qui est du préjudice matériel, la Cour estime lespaiements de dettes fiscales et d’amendes à l’étranger nesont pas constitutifs d’appauvrissements dans le chef desconsorts S. et H., et ne peuvent dès lors être considéréscomme préjudice subi.

La Cour considère cependant que la violation du secretbancaire a porté atteinte à l’intimité de la vie privée desconsorts S. et H. et alloue à chaque demandeur qui s’estvu subir un redressement fiscal la somme de 25.000 EURà titre de dommage moral.

11. Cour d’appel 14 mai 2003, rôle n° 26567 (inédit)42

Banque O. contre la Banque B.

(Cautionnement – Absence de terme contractuel – Facultéde résiliation)

Le cautionnement n’est pas réalisable du seul faitqu’aucun terme n’est stipulé, étant donné que la référenceau contrat principal, inhérente à la nature accessoire ducautionnement, empêche la faculté de résiliation dès lorsque le contrat principal comporte lui-même un terme.

En juillet 1998, une opération de financement a été miseen place de manière à ce que cinq sociétés puissent bénéfi-cier de prêts à hauteur de 20.000.000 DEM, par l’émis-sion de promissory notes. Les notes ont été cédées à laBanque B. Comme celle-ci était le bénéficiaire d’une decla-ration of pledge, par laquelle la Banque O. s’est engagée àgarantir les engagements des cinq sociétés envers laBanque B., et que les cinq sociétés étaient en défaut

41. J.T. 2003, p. 315; par arrêt du 18 mars 2004, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt n° 26256 (2e espèce).42. Cet arrêt confirme partiellement le jugement rendu le 7 décembre 2001 par le Tribunal d’arrondissement de Luxembourg, commenté dans notre Chronique de

2001.

170 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

d’exécuter leurs obligations résultant de l’émission desnotes, la Banque B. a débité le compte ouvert en ses livrespar la Banque O., et gagé en sa faveur, du montant dû.

La Banque O. introduit une action contre la Banque B. etdemande la restitution du montant débité. Elle estimequ’étant donné qu’elle avait résilié son engagement endate du 22 février 1999, et que la cession des créances à laBanque B. n’avait pas été notifiée aux cinq sociétés à cettedate, la Banque B. n’avait aucune créance à l’encontre deces sociétés et n’était pas en droit d’utiliser la garantiedonnée par elle. La Banque B. conteste la régularité decette résiliation et conclut que l’engagement de la BanqueO. ne pouvait pas être résilié.

La declaration of pledge signée par la Banque O., et quali-fiée par la Cour de cautionnement réel, est conçue entermes très généraux, comportant un engagement pourune catégorie indéterminée de dettes, sans limitation demontant et sans limitation de durée.

La Cour estime que dans ce cas, la faculté de résiliation deson engagement ne pourrait en principe être refusée à lacaution, celle-ci ne pouvant en effet être tenue indéfini-ment. ‘Toute tentative d’éluder cette faculté de résiliation,dès lors du moins que l’engagement est réellement à duréeindéterminée, tombe sous le coup de la prohibition desengagements perpétuels, sanctionnée par la nullité’.

Néanmoins, même dans ce cas, la caution reste tenue pourles dettes déjà nées, son engagement ne prend fin que pourl’avenir.

Un cautionnement n’est pas résiliable du seul faitqu’aucun terme n’est stipulé. La référence au contrat prin-cipal, inhérente à la nature du cautionnement, empêche lafaculté de résiliation dès lors que le contrat principalcomporte lui-même un terme.

La Cour estime qu’il était ab initio dans l’intention desparties que l’engagement fourni par la Banque O. étaitdestiné à garantir les obligations découlant d’une opéra-tion limitée dans le temps, agencée d’avance et ce au su detoutes les parties concernées et conclut que la Banque O.n’était pas en droit de résilier son engagement avantl’échéance de l’opération principale. Elle déboute laBanque O. de sa demande en restitution du montantdébité par la Banque B.

12. Cour d’appel 18 juin 2003, rôle n° 2637543

Consorts H. contre la Banque L.

(Exécution du contrat de gestion discrétionnaire – Obli-gation de moyen)

Le banquier gestionnaire discrétionnaire doit agir aveccompétence et faire un choix judicieux dans ses opérationsd’investissement, selon le contenu du mandat dont il estinvesti. Il doit donc respecter les objectifs assignés à lagestion dont il assume la charge, c’est-à-dire soit se lancerdans des opérations spéculatives, si l’objectif donné est larecherche d’un profit maximal, soit préserver le capital, cequi nécessite une répartition équilibrée des placements.Son mandat repose sur la liberté du gérant, ce quiimplique que le client n’a pas à s’immiscer, tout au moinssi le mandat ne comporte pas de disposition contraire.

Le 19 février 1993, les consorts H. concluent un contratde gestion de fortune avec la Banque L. (ci-après ‘laBanque’). Estimant que la gestion mise en œuvre par laBanque serait en contradiction flagrante avec la brochuredistribuée lors de la première prise de contact, ils intententune action contre la Banque et demandent réparation dupréjudice qu’ils attribuent aux fautes commises par laBanque.

Ils reprochent notamment à la Banque d’avoir ignoré leursinstructions et refusé de placer une partie des fonds remisen actions, ce qui les aurait privés de pouvoir profiter del’évolution très favorable du marché des actions pendantles années 1995 à 1998.

Tout en rappelant que la primauté de l’intérêt du mandantdomine l’ensemble des obligations du gérant, la Courestime que cet intérêt est tempéré par le respect de l’inté-grité, de la transparence et de la sécurité du marché. LaCour déduit de la directive 93/22/CEE du 10 mai 1993 surles services d’investissement que les principales obliga-tions du gérant sont la loyauté, la diligence, l’informationet le conseil.

Les obligations de loyauté et de diligence impliquent quele gérant use de son pouvoir d’initiative en vue d’accom-plir sa mission de la manière la plus conforme aux intérêtsdu mandant. ‘Il doit agir avec compétence et faire unchoix judicieux dans ses opérations d’investissement,selon le contenu du mandat dont il est investi. Il doit doncrespecter les objectifs assignés à la gestion dont il assumela charge, c’est-à-dire soit se lancer dans des opérations

43. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 192.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 171

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

spéculatives, si l’objectif donné est la recherche d’un profitmaximal, soit préserver le capital, ce qui nécessite unerépartition équilibrée des placements’.

Dans l’exécution de cette obligation, le gérant de fortunen’est tenu que d’une obligation de moyens, étant donnéque la gestion d’un portefeuille dépend de circonstancesindépendantes de sa diligence, telles que les variations dela conjoncture économique. La Cour précise qu’en raisondu caractère aléatoire des résultats, le gérant s’engageseulement à agir au mieux en vue d’obtenir les bons résul-tats espérés, sans cependant les garantir. ‘Il n’engage saresponsabilité que s’il commet une faute qui doit êtreprouvée, étant entendu que sa gestion doit être appréciéed’après son résultat global’.

S’agissant d’une gestion discrétionnaire, la Cour rajouteque le gérant n’engage en principe pas sa responsabilité s’ilrefuse de suivre les instructions du client concernantl’achat de valeurs déterminées: ‘son mandat repose sur laliberté du gérant, ce qui implique que le client n’a pas às’immiscer, tout au moins si le mandat ne comporte pas dedisposition contraire’.

Même si le contrat de gestion discrétionnaire dispose quela portion du capital devant servir à l’achat d’actions nedevait pas dépasser 30%, la Banque était libre de prendretoute décision d’investissement jusqu’à ce plafond, etn’était pas obligée d’investir une certaine portion ducapital en actions. La Cour en conclut que la Banque n’apas failli à ses obligations contractuelles et déboute lesconsorts H.

13. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 10 juillet 2003, rôles n° 72353 et 77133 (inédit)44

F. contre la Banque I. et la société B.

(Obligations ‘Reverse Convertible’ – Obligation alterna-tive – Exclusions de l’article 1193 du Code civil enprésence d’un risque rémunéré pris par le créancier –Responsabilité délictuelle de l’émetteur)

Lorsque la raison d’être d’une opération est la spécula-tion, entraînant pour le débiteur l’obligation derembourser sa dette, à son choix entre deux possibilitéscontractuellement retenues et au risque du créancier, enfonction des variations de la bourse, et si ce risque est laseule justification de la prime élevée payée au créancier,

l’application de l’article 1193 alinéa 1 du Code civil estnécessairement exclue.

Le 4 juillet 2000, F. souscrit auprès de la Banque I.(ci-après ‘la Banque’) des obligations émises par la sociétéB. (ci-après ‘l’Emetteur’). Les obligations souscrites sontremboursables en numéraire ou échangeables en actionsde la société de droit belge Lernout & Hauspie SpeechProducts (ci-après ‘les actions LHSP’) au gré de l’Emet-teur, à l’échéance, soit le 26 juillet 2002.

A cette date, les actions LHSP n’avaient plus aucunevaleur, étant donné que LHSP avait été déclarée en failliteen Belgique.

F. se base en premier lieu sur l’article 1193 du Code civil,et estime qu’au vu de l’engagement de l’Emetteur derembourser les titres soit en actions LHSP soit en nominal,celui-là aurait souscrit une obligation alternative. F. enconclut qu’étant donné qu’à la suite de la déclaration enfaillite de la société LHSP, les actions LHSP avaient perdutoute valeur, l’obligation alternative de l’Emetteur étaitdevenue pure et simple, de sorte que celui-ci devaits’exécuter par le remboursement du nominal.

Le Tribunal estime que les conditions d’application del’article 1193 du Code civil ne sont pas remplies, parceque la faillite ne met pas fin à l’être social. La chosepromise par l’Emetteur, les actions LHSP, n’a pas péri,même si elle n’a plus aucune valeur. Pour couper court àl’argumentation de F., le Tribunal précise en outre quel’article 1193 du Code civil ‘ne peut pas s’appliquer à uneopération dont la seule motivation était la spéculation, sil’application de l’article 1193 alinéa 1 du Code civil apour effet d’enlever a posteriori tout risque pour la partiecréancière, bien que le risque qu’elle a acceptée de prendrelui ait déjà valu une rémunération élevée. Lorsque laraison d’être d’une opération est la spéculation, entraî-nant pour le débiteur l’obligation de rembourser sa dette,à son choix entre deux possibilités contractuellement rete-nues et au risque du créancier, en fonction des variationsde la bourse, et si ce risque est la seule justification de laprime élevée payée au créancier, l’application de l’article1193 alinéa 1 du Code civil est nécessairement exclue.L’article 1193 du Code civil vise l’hypothèse où le débiteurs’est réservé le droit de s’acquitter de sa dette par la déli-vrance de l’une de deux choses qui étaient comprises dansl’obligation et où l’une de ces choses vient à disparaître.Le débiteur doit alors délivrer la chose qui existe encore.L’article 1193 du Code civil procure une garantie à la

44. Par arrêt du 28 avril 2004 (rôle n° 28219), la Cour d’appel a déclaré nul l’acte d’appel signifié par F.

172 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

partie créancière, pour le cas où l’une des deux chosesvient à disparaître. Dans un tel contrat, les parties neconviennent pas de la rémunération du risque encouru partelle ou telle partie au contrat pour le cas où l’une deschoses vient à disparaître. Or, la rémunération de cetteprise de risque, exclut que la partie qui a subi les consé-quences défavorables de cette prise de risque, puisse ulté-rieurement se prévaloir de l’article 1193 du Code civil etréclamer la chose qui n’a pas péri. En acceptant la rému-nération de la prise de risque, le créancier a nécessaire-ment renoncé à se prévaloir de l’article 1193 du Codecivil’.

En ordre subsidiaire, F. demande l’annulation du marchéintervenu entre lui et la Banque, et estime également quela responsabilité délictuelle des deux parties défenderessesétait engagée.

Le Tribunal rejette l’action en annulation dirigée contre laBanque, en relevant que la Banque n’est intervenue qu’ensimple intermédiaire, et qu’il ne lui incombe aucuneresponsabilité quant aux qualités du produit, objet de latransaction. La Banque, ‘en sa qualité d’intermédiaire,n’est certainement pas responsable, si le requérant s’esttrompé quant aux qualités substantielles de l’opérationqu’il a contractée’.

Pour ce qui est des moyens tirés de la responsabilité délic-tuelle, le Tribunal estime que la Banque n’a pas violé sonobligation de renseignement. Tout en concédant que laBanque ‘a l’obligation de renseigner son client sur lerisque encouru par le type d’opération spéculative qu’ilenvisage de faire’, il précise qu’elle n’a pas l’obligation dele renseigner sur les risques particuliers à une opérationdéterminée, ni celle de renseigner sur le jeu boursier engénéral, surtout en présence d’un investisseur averti.

F. reproche finalement à l’Emetteur d’avoir engagé saresponsabilité délictuelle, en s’abstenant de vérifier lasituation financière de la société LHSP avant de procéderà l’émission des titres. Le Tribunal déboute F. égalementde cette demande, et se réfère à la Circulaire CaB 98/6 duCommissariat aux Bourses, relative aux informationsdevant figurer dans le prospectus d’offre publique oud’admission à la cote officielle de certains emprunts obli-gataires dont le revenu et/ou le remboursement sont/estlié(s) à des actions sous-jacentes pour conclure que leprospectus d’émission était conforme à cette circulaire, etque l’Emetteur n’avait pas à procéder à un audit de lasociété LHSP.

14. Cour d’appel 28 octobre 2003, rôle n° 2759945

A. contre la Banque B.

(Cautionnement – Distinction avec garantie autonome)

Le cautionnement présente la particularité qu’il est parnature accessoire à une obligation principale et se singula-rise par le fait qu’il est à tous égards directement et étroi-tement dépendant de cette obligation. Une garantie auto-nome est un engagement de payer une certaine somme,pris en considération d’un contrat de base et à titre degarantie de son exécution mais constitutif d’une obliga-tion indépendante du contrat garanti. Pour que l’engage-ment pris le soit à titre de caution, il est indispensable quele caractère accessoire soit établi de façon non équivoque.

Le 20 mars 2001, la Banque B. (ci-après ‘la Banque’)conclut un contrat de crédit-bail avec la société T (ci-après‘la Société’). Le contrat de crédit prévoit comme conditionparticulière l’engagement solidaire et personnel des troisassociés de la Société, dont A. Suite à la faillite de laSociété, la Banque introduit une action en recouvrementcontre A. et lui réclame le montant de 3.195.000 LUF.

A. qualifie son engagement de cautionnement, mais que cecautionnement était irrégulier, étant donné que les forma-lités prévues par l’article 1326 du Code civil n’avaient pasété respectées.

La Cour précise que ‘le cautionnement présente la particu-larité qu’il est par nature accessoire à une obligation prin-cipale. Il se singularise par le fait qu’il est à tous égardsdirectement et étroitement dépendant de cette obligation:son existence et sa validité, son étendue, les conditions deson existence et de son extinction sont déterminées par celien. Par contre une garantie autonome est un engagementde payer une certaine somme, pris en considération d’uncontrat de base et à titre de garantie de son exécution maisconstitutif d’une obligation indépendante du contratgaranti. Pour que l’engagement pris le soit à titre decaution, il est indispensable que le caractère accessoire soitétabli de façon non équivoque’.

Elle conclut que l’engagement de A. n’était pas accessoireà l’obligation principale, mais qu’il avait pris un engage-ment solidaire et indivisible en sa qualité d’associé de laSociété. D’après la Cour, la condition juridique du codébi-teur ne se distingue pas, à l’égard du créancier, de celle dudébiteur principal, auquel le codébiteur a accepté d’iden-tifier son statut et son sort.

45. Publié par la Conférence du Jeune Barreau, Bulletin d’information sur la jurisprudence 2003, p. 171.

LARCIER FORUM FINANCIER / DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2004/I II 173

ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG)

La Cour rejette également le moyen tiré de la violation desformalités prévues par l’article 1326 du Code civil. Cetarticle s’applique uniquement aux actes sous seing privéqui contiennent une promesse unilatérale ayant pour objetune somme ou une quantité, et non pas aux contratssynallagmatiques créant des obligations réciproques.

D’après la Cour, la Banque, en sa qualité de bailleur, aassumé l’obligation de mise à disposition des biens louéset le débiteur A. a trouvé un intérêt dans l’opération en saqualité de dirigeant, de gérant administratif de la Société.Elle écarte l’application de l’article 1326 du Code civil, etfait droit à la demande de la Banque.

15. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 29 octobre 2003, rôle n° 81083 (inédit)46

Société U. contre la Banque I.

(Aménagement conventionnel des obligations dubanquier – Ratification des opérations – Défaut de récla-mation en temps utile)

Même lorsque les dispositions légales précisent la portéedes obligations contractuelles (résultat ou moyen), il n’estpas exclu que les parties puissent parfois modifier par uneclause expresse le contenu que la loi assigne en principe àtelle ou telle obligation. La description légale des obliga-tions normalement attachées aux types les plus usuels decontrats ne s’impose en effet pas impérativement danstous ses détails à la volonté de contractants.

A défaut de réclamation, le client approuve et/ou ratifie lesdifférentes opérations et est forclos à contester la régula-rité de ces ordres.

La société U. (ci-après ‘la Société’) avait ouvert troiscomptes auprès de la Banque I. (ci-après ‘la Banque’). Elleestime qu’à l’aide d’ordres de virements portant des signa-tures falsifiées et de prélèvements, des montants substan-tiels auraient été détournés à son préjudice, entre le 6 marset le 21 décembre 2001.

Le Tribunal estime que les parties sont liées par un contratde dépôt, et qu’en application de l’article 1937 du Codecivil, ‘le banquier, même en l’absence de faute de sa part,et sauf faute de la part du titulaire du compte ou despréposés dont il répond, n’est libéré envers celui-ci de sonobligation de restitution des fonds reçus en dépôt qu’en

vertu d’un ordre de paiement revêtu de sa signatureauthentique’.

Tout en concédant que l’obligation de restitution à chargedu banquier dépositaire est une obligation de résultat, leTribunal admet que même lorsque les dispositions légalesprécisent la portée des obligations contractuelles (résultatou moyen), il n’est pas exclu que les parties puissentparfois modifier par une clause expresse le contenu que laloi assigne ne principe à telle ou telle obligation. ‘Ladescription légale des obligations normalement attachéesaux types les plus usuels de contrats ne s’impose en effetpas impérativement dans tous ses détails à la volonté decontractants’.

En l’espèce, la responsabilité de la Banque a été atténuéepar l’inclusion d’une clause dans les conditions générales,limitant sa responsabilité en matière de conformité designature avec le spécimen de signature aux cas de fautelourde.

La Banque conteste toute responsabilité dans son chef etaffirme d’une part, que le caractère falsifié, à le supposerétabli, n’était pas aisément décelable, et, d’autre part, quetoutes les opérations auraient été ratifiées par le titulairedu compte, lequel a réclamé pour la première fois près detreize mois après l’exécution du dernier virement contestéet près de dix mois après la cessation des relationscontractuelles.

D’après le Tribunal, la Société aurait accepté, sinon pourle moins ratifié les différentes opérations, en s’abstenantde réclamer en temps utile. Les juges en concluent que laSociété est forclose à contester la régularité des ordrescontestés par elle. A titre superfétatoire, le Tribunal relèveencore que les signatures que la Société qualifiait de falsi-fiées étaient fortement similaires à des signatures noncontestées et que les circonstances générales n’étaient pasde nature à éveiller la méfiance de la Banque.

16. Tribunal d’arrondissement de Luxembourg 25 novembre 2003, rôle n° 74864 (inédit) 47

S. contre Banque U.

(Obligation d’information et de conseil à charge dubanquier – Investisseur averti)

Etant entendu que si la qualité de spéculateur invétéré dudonneur d’ordre doit être prise en compte dans l’apprécia-

46. La Société U. a interjeté appel contre la décision.47. S. a interjeté appel contre la décision.

174 FINANCIEEL FORUM / BANK- EN FINANCIEEL RECHT 2004/I II LARCIER

CHRONIQUE DE DROIT BANCAIRE ET FINANCIER 2003 (LUXEMBOURG) ALEX SCHMITT & ELISABETH OMES

tion du conseil prodigué par la banque, elle ne dispensecependant pas le banquier de toute obligation de conseilenvers son client.

Client depuis le 4 mai 1999, S. reproche à la Banque U.(ci-après ‘la Banque’) d’avoir effectué des opérations surson compte à son insu et en violation d’un ordre exprèsdonné par fax en date du 3 mars 2000 de ne plus acheterd’actions pour son compte. Il estime que les opérationsexécutées par la Banque sans son accord lui auraient causéun préjudice financier considérable, évalué aux montantsde 4.880.145,70 EUR et 620.990 USD.

D’après S., la Banque aurait, délibérément ou par négli-gence, effectué des dépassements en compte courant en nesuivant pas au jour le jour l’évolution du volume desinvestissements effectués pour son compte, et elle n’auraitpas géré ses avoirs avec les soins et diligences contractuel-lement convenues.

Après avoir constaté que les parties n’étaient pas liées parun mandat de gestion discrétionnaire, le Tribunal conclutque la Banque était uniquement obligée de suivre les

instructions de son client, et constate que S. est en défautde préciser les opérations effectuées par la Banque sansson assentiment.

Quant au reproche tiré de la violation par la Banque deson obligation d’information et de conseil, le Tribunalestime que cette obligation doit être appréciée au niveaude connaissances du client, ‘étant entendu que si la qualitéde spéculateur invétéré du donneur d’ordre doit être priseen compte dans l’appréciation du conseil prodigué par labanque, elle ne dispense cependant pas le banquier detoute obligation de conseil’.

Après avoir constaté que depuis l’ouverture du compte, S.a réalisé 785 opérations titres pour un volume globald’environ 202.000.000 EUR, le Tribunal déboute S. de sademande, estimant qu’il est en défaut d’indiquer à proposde quelles opérations la Banque l’aurait mal conseillé etqu’il se serait borné à se présenter comme profane dumarché, amené par la Banque à se transformer d’investis-seur conservateur en spéculateur agressif.