CHOLÉRA EPIDÉMIOLOGIE ET RÉPONSE FACTSHEET …Choléra Epidémiologie et Réponse Factsheet...

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Choléra Epidémiologie et Réponse Factsheet CAMEROUN CHOLÉRA EPIDÉMIOLOGIE ET RÉPONSE FACTSHEET CAMEROUN APERÇU DU CHOLÉRA Le choléra est apparu pour la première fois au Cameroun en 1971. Depuis 1990, des épidémies importantes ont été enregistrées en 1991, 1996, 1998, 2004, 2010 et 2011. La tendance générale montre une augmentation annuelle du nombre de cas (Fig. 1). Entre 2004 et 2013, la surveillance épidémiologique a notifié 46 172 cas avec 1 817 décès, soit un taux de létalité élevé de 3,9 % 1 . Les principales épidémies ont été enregistrées dans le nord, dans les régions du Nord et de l’Extrême Nord et dans le sud du pays dans la région du Littoral qui abrite la capitale économique Douala (Fig. 2 et Tab. I). Le pays est touché par des épidémies transfrontalières, en particulier le long de ses frontières avec le Tchad et le Nigeria. DISTRIBUTION DU CHOLÉRA Dans le nord du Cameroun, les régions du Nord et de l’Extrême Nord ont enregistré 47,3 % des cas de choléra entre 2004 et 2013. Le taux de létalité moyen est élevé (8 %). Il est expliqué en partie par un faible accès aux services de santé et un nombre élevé de décès communau- taires (Tab I.). Dans le sud du Cameroun, la région du Littoral a notifié près d’un tiers (29,6 %) des cas principalement dans la ville de Douala. De plus, la région voisine du Sud-Ouest à la frontière avec le Nigeria a rapporté environ 8 % des cas (Tab I.). La région du Centre où est située la capitale Yaoundé enregistre moins de cas que Douala, mais plus fréquemment (six années sur dix). Deux saisonalités distinctes du choléra sont observées au Cameroun. Dans le nord, les épidémies se produisent en mai/juin (semaine 23 à 26). Il y a une augmentation du nombre de cas enregistrés au cours de la saison des pluies, entre juin et octobre et une forte diminution à la mi-novembre (Fig. 3). Dans le sud, les épidémies se produisent à la fin de la saison sèche autour de janvier/février. Le nombre de cas est généralement en hausse à partir de février/mars 5,6 . La récente augmentation de la taille des épidémies (2009) peut s’expli- quer en partie par une sensibilité réduite à la ciprofloxacine de souches de Vibrio cholerae O1et de l’existence d’un génotype atypique de type B de la toxine cholérique (ctxB). 7 Figure 1. Nombre annuel de cas de choléra et taux de létalité au Cameroun, 1990 – 2013 1 Figure 2. Incidence cumulée du choléra par région au Cameroun, 2004 – 2013 2 Tableau I. Paramètres épidémiologiques des épidémies de choléra par région principalement affectée au Cameroun, 2004 – 2013 2 Note : [1] Total des cas = 46 924 et total des décès = 2453 pour la période 2004-2013 ; [2] Moyenne en semaines pour la période 2010-2013. Région Cas / Décès [1] Cas (%) Nombre d’épidémies Durée [2] Extrême Nord 16457 / 979 35.1 4 20 Littoral 13886 / 766 29.6 4 20 Nord 5744 / 335 29.6 2 37 Sud Ouest 3829 / 70 8.2 2 31 Centre 3669 / 166 7.8 6 15 Ouest 2526 / 86 5.4 2 26 Sud 414 / 14 0.9 3 7 Adamaoua 205 / 19 0.4 1 25 Nord Ouest 144 / 11 0.3 1 12 Est 50 / 7 0.1 1 13 Figure 3. Nombre hebdomadaire de cas de choléra et médiane des précipita- tions par intervalle de 10 jours au Nord Cameroun, 2004 - 2013 2,3

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Choléra Epidémiologie et Réponse Factsheet CAMEROUN

CHOLÉRA EPIDÉMIOLOGIE ET RÉPONSE FACTSHEET CAMEROUN

APERÇU DU CHOLÉRA

Le choléra est apparu pour la première fois au Cameroun en 1971. Depuis 1990, des épidémies importantes ont été enregistrées en 1991, 1996, 1998, 2004, 2010 et 2011. La tendance générale montre une augmentation annuelle du nombre de cas (Fig. 1).

Entre 2004 et 2013, la surveillance épidémiologique a notifié 46 172 cas avec 1 817 décès, soit un taux de létalité élevé de 3,9 %1.

Les principales épidémies ont été enregistrées dans le nord, dans les régions du Nord et de l’Extrême Nord et dans le sud du pays dans la région du Littoral qui abrite la capitale économique Douala (Fig. 2 et Tab. I).

Le pays est touché par des épidémies transfrontalières, en particulier le long de ses frontières avec le Tchad et le Nigeria.

DISTRIBUTION DU CHOLÉRA

Dans le nord du Cameroun, les régions du Nord et de l’Extrême Nord ont enregistré 47,3 % des cas de choléra entre 2004 et 2013. Le taux de létalité moyen est élevé (≈ 8 %). Il est expliqué en partie par un faible accès aux services de santé et un nombre élevé de décès communau-taires (Tab I.).

Dans le sud du Cameroun, la région du Littoral a notifié près d’un tiers (29,6 %) des cas principalement dans la ville de Douala. De plus, la région voisine du Sud-Ouest à la frontière avec le Nigeria a rapporté environ 8 % des cas (Tab I.).

La région du Centre où est située la capitale Yaoundé enregistre moins de cas que Douala, mais plus fréquemment (six années sur dix).

Deux saisonalités distinctes du choléra sont observées au Cameroun. Dans le nord, les épidémies se produisent en mai/juin (semaine 23 à 26). Il y a une augmentation du nombre de cas enregistrés au cours de la saison des pluies, entre juin et octobre et une forte diminution à la mi-novembre (Fig. 3). Dans le sud, les épidémies se produisent à la fin de la saison sèche autour de janvier/février. Le nombre de cas est généralement en hausse à partir de février/mars5,6.

La récente augmentation de la taille des épidémies (2009) peut s’expli-quer en partie par une sensibilité réduite à la ciprofloxacine de souches de Vibrio cholerae O1et de l’existence d’un génotype atypique de type B de la toxine cholérique (ctxB).7

Figure 1. Nombre annuel de cas de choléra et taux de létalité au Cameroun, 1990 – 20131

Figure 2. Incidence cumulée du choléra par région au Cameroun, 2004 – 20132

Tableau I. Paramètres épidémiologiques des épidémies de choléra par région principalement affectée au Cameroun, 2004 – 20132

Note : [1] Total des cas = 46 924 et total des décès = 2453 pour la période 2004-2013 ; [2] Moyenne en semaines pour la période 2010-2013.

Région Cas / Décès [1] Cas (%) Nombre

d’épidémies Durée [2]

Extrême Nord 16457 / 979 35.1 4 20

Littoral 13886 / 766 29.6 4 20

Nord 5744 / 335 29.6 2 37

Sud Ouest 3829 / 70 8.2 2 31

Centre 3669 / 166 7.8 6 15

Ouest 2526 / 86 5.4 2 26

Sud 414 / 14 0.9 3 7

Adamaoua 205 / 19 0.4 1 25

Nord Ouest 144 / 11 0.3 1 12

Est 50 / 7 0.1 1 13

Figure 3. Nombre hebdomadaire de cas de choléra et médiane des précipita- tions par intervalle de 10 jours au Nord Cameroun, 2004 - 20132,3

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RECOMMANDATIONS STRATÉGIQUES

Les démarrages épidémiques et les diffusions transfrontalières ont lieu principalement dans les régions de l’Extrême Nord, du Nord, du Sud-Ouest et du Littoral (Douala). Ces régions sont des voies d’échange avec les pays voisins principalement le Nigéria et le Tchad, soulignant l’impor-tance des activités transfrontalières8 (Fig. 2). Les actions stratégiques prio-ritaires dans les régions de démarrage comprennent la détection précoce, la surveillance à base communautaire, les activités transfrontalières, les activités spécifiques de préparation et de réponse aux épidémies. En raison de la létalité élevée, des formations sur la gestion des épidémies sont fortement recommandées en particulier dans la région de l’Extrême Nord.

Région de l’Extrême-Nord du CamerounEn général, les districts régulièrement affectés avec une durée et une inci-dence de moyenne à élevée dans la région de l’Extrême Nord sont situés dans la ville principale (Maroua) et dans les districts voisins, autour du lac Tchad (Mora, Mada, Kousseri), le long du fleuve Logone à la frontière avec le Tchad (Maga, Guéré, Vele, Yagoua, Moutourwa) et à la frontière avec le Nigeria (Kolofata, Mogode, Bourha, Hina, Tokombere) (Tab. III).

Les programmes durables d’accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hy-giène devraient être réalisés en priorité dans les districts régulièrement affectés et avec une durée élevée (Tab. III - Type 1). Une étude intégrée WASH-Epidémiologie menée en 2010 dans les quatre pays du bassin du lac Tchad a montré que l’utilisation de l’eau de puits ouverts dans les régions du Nord, de l’Extrême Nord et de l’Adamaoua était significati-vement associée aux épidémies choléra8. Cette étude recommande le remplacement des puits ouverts par des forages ou des puits protégés et le développement d’une méthode de traitement de l’eau à domicile et l’intensification de l’assainissement piloté par la communauté dans les zones rurales d’intervention prioritaire.

Une étude anthropologique menée en 2011 à la frontière tchado-camerou-naise dans la partie nord du pays donne des éléments sur la perception du choléra et des interventions d’urgence9.

Voie à suivreDes données épidémiologiques supplémentaires et des analyse sont néces-saires pour identifier les foyers récurrents de choléra (hotspot(s)) dans les régions du Nord, du Sud-Ouest et à Douala. De plus, une étude multidis-ciplinaire devrait être menée pour identifier les réponses programmatiques durables en milieu rural et urbain dans les zones d’intervention prioritaires.

Catégories socio-professionnelles et pratiques à risque à prendre en compte dans les stratégies de prévention, de préparation et de réponse8,10:

• Les marchés transfrontaliers, les rites funéraires, les soins aux patients à domicile et les visites de courtoisie (régions du Nord et de l’Extrême Nord) ;

• Le commerce formel et informel et les communautés nomades le long des rives du lac Tchad (Mora, Mada, Kousseri, Makari, Goulfey) ;

• Les communautés de pêcheurs migrants sur le Lac Tchad, le long de la rivière Logone (frontière avec le Tchad) et dans les îles situées en face de Douala (communautés du Nigeria, Togo, Bénin et Ghana) ;

• Les zones densément peuplées dans la ville de Douala sans accès adéquat à l’eau potable ou aux installations sanitaires de base (bidonville de Bepanda).

Références1. Atlas de la santé mondiale, OMS. (http://apps.who.int/globalatlas).2. Ministère de la santé du Cameroun, données choléra 1994-2013.3. FEWSNet (Famine Early Warning Systems Network,

http://www.fews.net).4. Multiple Indicator Cluster Surveys (MICS) and Demographic and

Health Surveys (DHS), 2012.5. Garrigue E, La résistance aux antibiotiques des souches de Vibrio

cholerae El Tor isolées dans Douala (Cameroun), Bull Soc Pathol Exot Filiales. 1986; 79(3):305-12.

6. Garrigue E, Météo et choléra: épidémie à Douala, Cameroun en 2004, Med Trop (Mars). 2010 Aug; 70(4):407-8.

7. Quilici ML, Vibrio cholerae O1 Variant avec une sensibilité réduite à la ciprofloxacine, Afrique de l’Ouest, Emerg Infect Dis. 2010 Nov; 16(11): 1804–1805.

8. P.-Y. Oger , Sudre, B., 2011. Eau, Assainissement et Hygiène et épidé-miologie du choléra : Une évaluation intégrée dans les pays du bassin du lac Tchad. UNICEF.

9. Kouokam Magne, E., 2011. Anthropologie des modes de transmission du choléra à la frontière Tchado-Camerounaise.

10.Garrigue E, Les facteurs qui contribuent au choléra endémique dans Douala, Cameroun, Med Trop (Mars). 2006 Jun; 66(3):283-91.

RemerciementsDjao R. and Ndong Ngoe C., MD, Ministère de la Santé Cameroun, Dunoyer J. (coordination, UNICEF WCARO), Sudre B., MD PHD (conseil scientifique), Green HK., PHD, (analyse des données), Rossi M. (gestion des données spatiales).

Tableau II. Synthèse de la classification des zones prioritaires et des activités stratégiques dans l’Extrême Nord Cameroun

Note : Type 1 : Zone de haute priorité avec une fréquence élevée (> 80ième percentile) et une durée longue (> 40ième percentile). Type 2 : Zone de priorité moyenne avec une fréquence modérée (entre 60ième et 80ième percentile) et une durée longue (> 40ième percentile). Type 3 : Zone de priorité moyenne avec une fréquence élevée, une durée courte (<40ième percentile) et une incidence élevée (> 40ième percentile). Type 4 : Zone de basse priorité avec une fréquence modérée, de courte durée et une incidence élevée.

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MADA 6 18 21 26 [17-33] Oui T.1 √ √ √ √ √ √

KOUSSERI 4 25 17 22 [12-33] Oui T.1 √ √ √ √ √ √

MAGA 3 19 16 30 [23-30] Oui T.1 √ √ √ √ √ √

MORA 3 15 10 31 [30-37] Oui T.1 √ √ √ √ √ √

GUERE 2 31 47 17 [13-21] Oui T.2 √ √ √ √ √ √

HINA 2 13 5 33 [26-40] Non T.2 √ √ √ √ √

MAROUA RURAL 2 16 4 29 [29-30] Non T.2 √ √ √ √ √

MAROUA URBAIN 2 17 29 30 [30-30] Non T.2 √ √ √ √ √

VELE 2 18 19 30 [23-37 Oui T.2 √ √ √ √ √ √

YAGOUA 2 20 6 26 [23-29] Oui T.2 √ √ √ √ √ √

KOLOFATA 5 9 9 34 [25-37] Oui T.3 √ √ √

MOGODE 3 12 8 30 [20-37] Oui T.3 √ √ √

BOURHA 2 9 6 34 [33-35] Non T.4 √ √

MOUTOURWA 2 9 8 36 [30-42] Non T.4 √ √

TOKOMBERE 2 12 13 30 [30-31] Non T.4 √ √

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Figure 4. Estimation de l’accès à l’eau et à l’assainissement au Cameroun, 20124