CHAPITRE IV ETUDE ELECTROCHIMIQUE DU COMPORTEMENT...

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion 91 CHAPITRE IV ETUDE ELECTROCHIMIQUE DU COMPORTEMENT DES MATERIAUX A LA CORROSION IV. 1. Introduction La technique d’émission acoustique nous a confirmé dans le chapitre précédent l’importance des processus électrochimiques dans l’amorçage et la propagation de la corrosion feuilletante des deux alliages étudiés ; importance variable selon les traitements thermiques effectués. Pour préciser dans chacun des cas cette « contribution électrochimique » au phénomène globale de dégradation , nous avons complété notre analyse par une étude spécifique. C’est l’objet de ce chapitre. Dans une première partie nous présentons les résultats obtenus par essais électrochimiques classiques. La seconde partie est consacrée à la caractérisation de la corrosion feuilletante par la technique du bruit électrochimique. Enfin, une troisième partie regroupe les résultats obtenus par des mesures électrochimiques, sur l’influence respective des divers constituants du milieu.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

91

CHAPITRE IV

ETUDE ELECTROCHIMIQUE DU COMPORTEMENT DES

MATERIAUX A LA CORROSION

IV. 1. Introduction

La technique d’émission acoustique nous a confirmé dans le chapitre précédent l’importance

des processus électrochimiques dans l’amorçage et la propagation de la corrosion feuilletante

des deux alliages étudiés ; importance variable selon les traitements thermiques effectués.

Pour préciser dans chacun des cas cette « contribution électrochimique » au phénomène

globale de dégradation , nous avons complété notre analyse par une étude spécifique. C’est

l’objet de ce chapitre.

Dans une première partie nous présentons les résultats obtenus par essais électrochimiques

classiques.

La seconde partie est consacrée à la caractérisation de la corrosion feuilletante par la

technique du bruit électrochimique.

Enfin, une troisième partie regroupe les résultats obtenus par des mesures électrochimiques,

sur l’influence respective des divers constituants du milieu.

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IV. 2. Caractérisation de la corrosion feuilletante par méthodes

électrochimiques classiques

IV. 2. 1. Méthodes stationnaires.

L’évolution du potentiel libre de corrosion (potentiel d’abandon) au cours d’un test de

corrosion est un premier indice pour estimer l’évolution de la sévérité potentielle de la

dégradation pendant l’immersion. Les courbes de suivi du potentiel libre au cours de la

corrosion feuilletante des deux matériaux étudiés sont présentées sur la figure IV. 1.

(a) Al 2024 T3

-700

-680

-660

-640

-620

-600

0 10 20 30 40 50

durée (heures)

pote

ntie

l lib

re (

mV

/EC

S)

(b) Al 7449 T6

-820

-800

-780

-760

-740

-720

0 10 20 30 40 50

durée (heures)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

-820

-800

-780

-760

-740

-720

pot

entie

l (m

V/E

CS

)

l

n

c)

O

Figure IV. 1 : Suivi du potentie

libre durant la corrosion

feuilletante : (a) Al 2024 T3 e

milieu EXCO standard, (b) et (

Al 7449 T6 et T7 en milieu EXC

modifié.

(c) Al 7449 T7

0 10 20 30 40 50

durée (heures)

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Ces courbes montrent, après une étape d’importante évolution du potentiel vers des valeurs

plus élevées , une grande stabilité du potentiel libre. Les valeurs ci dessous résultent d’un

grand nombre d’essais :

El (2024 T3) = -640 ± 30 mV/ECS

El (7449 T6) = -795 ± 30 mV/ECS

El (7449 T7) = -795 ± 30 mV/ECS

La forte évolution du potentiel libre au début de l’immersion est liée soit à l’activation de la

réaction cathodique du phénomène de corrosion, soit à un abaissement de l’activité de la

réaction anodique. Puis, la stabilité du potentiel libre montre que les systèmes oxydant /

réducteur qui participent à la corrosion sont de même cinétique tout au long de l’immersion

des échantillons dans leur milieu d’étude. La stabilisation du potentiel libre de l’alliage 7449

T6 et T7 en milieu EXCO modifié se fait autour de la même valeur (-795 mV/ECS). Les

cinétiques des systèmes oxydant / réducteur mis en jeu lors de la corrosion de l’alliage 7449

en milieu agressif sont donc indépendantes de l’état thermomécanique du matériau. La

comparaison avec l’évolution du potentiel libre de l’alliage 2024 n’est en revanche pas

significative car le suivi de ce potentiel est réalisé dans le milieu EXCO standard (non

modifié) et cet alliage contient beaucoup de cuivre (élément très noble par rapport à

l’aluminium). La mesure d’un paramètre lié au courant de corrosion en cours d’essai est

indispensable pour évaluer convenablement la sévérité réelle de l’endommagement à divers

instants de l’immersion. L’évolution de Rp des deux alliages est présentée figure IV. 2.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

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(a) Al 2024 T3

10

100

1000

0 10 20 30 40 50

durée (heures)

Rp

(Ohm

.cm

2 )

(b) Al 7449 T6

10

100

1000

0 10 20 30 40 50

durée (heures)

Rp

(Ohm

.cm

2 )

(c) Al 7449 T7

10

100

1000

0 10 20 30 40 50 60

durée (heures)

Rp

(Ohm

.cm

2 )

Trois étapes sont observées :

- La première étape correspond à une chute de Rp. Celle-ci traduit une accélération de la

cinétique de corrosion pour laquelle on observe simultanément une croissance du potentiel

libre. Ce phénomène, dont la durée varie d’un échantillon à l’autre, paraît lié à la

dépassivation des alliages et à l’amorçage de l’activité de certains sites passifs. La croissance

du potentiel libre est alors attribuée à une activation de la réaction cathodique.

- La seconde étape, dont la durée dépend du matériau étudié, fait apparaître une croissance

de Rp. Trois phénomènes peuvent être considérés pour expliquer cette évolution :

- la croissance des produits de corrosion à la surface des matériaux ont un effet

barrière qui ralentit la corrosion,

- l’accentuation du caractère localisé de la corrosion entraîne une baisse de la

surface active du matériau et induit artificiellement une croissance de Rp,

- la chute d’agressivité du milieu, liée par exemple, à l’augmentation du pH,

entraînant ainsi un ralentissement de la corrosion [8].

Figure IV. 2 : Evolution de Rp au

cours de la corrosion : (a) Al

2024 T3 en milieu EXCO

standard, (b) et (c) Al 7449 T6 et

T7 en milieu EXCO modifié.

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- Enfin, la troisième étape correspond à une stabilisation de Rp qui apparaît après 10 à 20

heures d’essai. Ce palier de Rp correspond à une stabilisation de la cinétique de propagation

de cette corrosion.

En complément, des enregistrements de courbes de polarisation sont réalisés à divers temps

d’immersion selon la protocole décrit au chapitre II (§ II. 2. 3 – a) (figure IV. 3).

(a) Al 2024 T3 en milieu EXCO standard

-6

-5

-4

-3

-2

-1

-700 -650 -600 -550

potentiel (mV/ECS)

log

(I)

(A.c

m2 )

0 h5 h

30 h

(b) Al 7449 T6 en milieu EXCO modifié

-7

-6

-5

-4

-3

-2

-880 -860 -840 -820 -800 -780 -760 -740

potentiel (mV/ECS)

log

(I)

(A.c

m2 )

o h

5 h

30 h

(c) Al 7449 T7 en milieu EXCO modifié

-7

-6

-5

-4

-3

-2

-870 -820 -770 -720

potentiel (mV/ECS)

log

(I)

(A.c

m2 )

0 h

5 h

30 h

Les courbes de voltampéromètrie montrent que le comportement des alliages en milieu

agressif est régi globalement par un mécanisme d’activation. Ainsi, le potentiel de corrosion

(Ecor) et la densité de courant de corrosion (Icor) sont mesurés à partir du tracé des droites de

Tafel pour lesquelles les branches anodiques et cathodiques montrent que la réaction de

corrosion est sous contrôle thermodynamique (non diffusionnel) [102]. Les valeurs des

caractéristiques électrochimiques obtenues à partir de ces courbes sont présentés tableau IV.

1.

Figure IV. 3 : Courbes de

polarisation obtenues lors de

l’immersion des échantillons en

milieu agressif.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

96

Tableau IV. 1 : Valeurs caractéristiques électrochimiques relevées à partir des courbes de

polarisation.

matériau Durée d’immersion (h) Ecor (mV/ECS) I cor (µA.cm2)

0 -650 10

5 -643 1302024 T3

30 -640 70

0 -802 10

5 -793 1107449 T6

30 -790 80

0 -820 10

5 -788 1307449 T7

30 -791 75

Cependant, bien que ces résultats soient intéressants pour aborder les mécanismes de

corrosion, il ne nous est pas possible de différencier le comportement à la corrosion de

l’alliage 7449 selon son état T6 ou T7.

IV. 2. 2. Spectroscopie d’Impédance Electrochimique (SIE).

La spectroscopie d’impédance électrochimique (SIE) a été appliquée avec succès pour l’étude

des mécanismes de corrosion feuilletante des alliages d’aluminium [8, 35-37]. Elle permet en

effet de séparer les diverses contributions du mécanisme de corrosion par leur cinétique. Les

phénomènes rapides sont observés à hautes fréquences tandis que les phénomènes plus lents

sont analysés aux plus faibles fréquences.

Les diagrammes de SIE en représentation de Nyquist obtenus sur l’alliage 2024 à divers

temps d’immersion en milieu EXCO standard sont présentés figures IV.4.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

97

-100

0

100

200

0 100 200 300

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

début d'essai (0h)

5h

fin d'essai (48h)

10 Hz

1 Hz

Figure IV. 4 : Evolution des diagrammes de SIE lors de l’immersion de l’alliage Al 2024 T3

en milieu EXCO standard.

Au début de l’immersion, le diagramme présente une grande boucle capacitive haute et basse

fréquence (HF) (f > 1 Hz) bien définie et une boucle inductive très basse fréquence (TBF) (f

<0,1 Hz). L’évolution de ces boucles, dans les 5 premières heures d’immersion, montre une

décroissance de leur diamètre. Les fréquences caractéristiques ne diminuent que très

faiblement au cours de l’immersion des échantillons. Au delà de 5 heures d’immersion, on

note l’apparition d’une deuxième boucle capacitive, basse fréquence (BF), mal séparée de la

première. La partie très basse fréquence présente une grande dispersion et il n’apparaît plus de

boucle inductive TBF.

L’exploitation de la partie capacitive des diagrammes de SIE nécessite une modélisation de

l’interface matériau/électrolyte à l’aide de schémas électriques équivalents. Les montages

électriques modèles donnent alors la même réponse que notre système et permettent une réelle

approche physique du phénomène de corrosion étudié. Ces schémas électriques équivalents,

utilisés conformément aux travaux de Conde et col [36, 37] et Keddam et col [35], sont

présentés figure IV. 5.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

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Re

RHF

CHF

Re

RHF

CHF

Re

CHF

RHF

CBF

RBF

Re

CHF

RHF

CBF

Re

CHF

RHF

CBF

RBF

Schéma A Schéma B

Figure IV. 5 : Schémas électriques utilisés pour modéliser l’interface métal/électrolyte.

Le schéma A est classiquement utilisé pour expliquer l’état de l’interface lorsque les

diagrammes d’impédance électrochimique en représentation de Nyquist sont constitués d’une

unique boucle capacitive bien définie (un demi cercle parfait). Les paramètres RHF et CHF

correspondent alors respectivement à la résistance de transfert de charge du phénomène

électrochimique, et à la capacité de double couche de l’interface métal / électrolyte. Les

relations entre les paramètres du circuit électrique équivalent et les points caractéristiques des

diagrammes de SIE sont présentées figure IV. 6.

0

10

20

30

40

50

60

70

80

0 50 100 150 200 250

R e (Z)

-Im

(Z

)

Re RHF

ωc = 1 / (RHF CHF)

ωc est la pulsation propre du phénomène. Elle est liée à la fréquence du point de la boucle capacitive dont la

partie imaginaire est maximale, par la relation ωc = 2 π fHF.

Figure IV. 6. Caractéristiques électriques d’un diagramme de SIE constitué en représentation

de Nyquist d’une unique boucle capacitive parfaite (demi-cercle).

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

99

La résistance Re (Ω.cm2) représente la résistance de l’électrolyte définie par la relation :

Re = ρe . l = l / σe (10)

Avec ρe : résistivité de l’électrolyte, σe : conductivité de l’électrolyte et l : la distance

échantillon/électrode de référence.

Cette résistance correspond à la partie réelle de la limite haute fréquence des diagrammes. Sa

valeur, dans le cas de l’immersion de l’alliage 2024 en milieu EXCO standard est de l’ordre

de 4 Ω.cm2. Ce résultat est cohérent avec la valeur de la résistivité de la solution EXCO

standard estimée par Keddam et col 5.3 Ω.cm [35].

Le schéma B est utilisé pour modéliser l’état de l’interface en fin d’immersion des alliages

lorsqu’il apparaît une deuxième boucle capacitive. Ce phénomène est traduit électriquement

par l’ajout d’une nouvelle résistance RBF et d’une nouvelle capacité CBF dans le schéma

électrique équivalent précédent. Les paramètres Re, RHF, CHF, RBF et CBF, ajustés

convenablement, permettent d’obtenir des diagrammes d’impédance en parfaite corrélation

avec les résultats obtenus expérimentalement (écart entre les deux diagrammes – expérimental

et simulé - inférieur à 4%) (figure IV. 7).

Figure IV. 7 : Exemple de corrélation entre diagrammes de SIE expérimental et modélisé.

Cas de l’alliage 2024 T3 après 20 heures d’immersion en milieu EXCO standard.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

100

Les valeurs des paramètres ainsi définis et ajustés pour les diverses durées d’immersion de

l’alliage 2024 en milieu EXCO sont présentés tableau IV. 2.

Les fréquences notées fHF et fBF sont les fréquences correspondant aux points, respectivement

des boucles HF et BF, dont la partie imaginaire est maximale sur les diagrammes de Nyquist.

Tableau IV. 2 : Paramètres électriques de l’interface métal - solution lors de l’immersion de

l’alliage 2024 T3 en milieu EXCO.

Durée

(h)

RHF

(Ω.cm²)

CHF

(µF / cm²)

fHF

(Hz)

RBF

(Ω,cm²)

CBF

(µF / cm²)

fBF

(Hz)

0,5 270 47,1 12,5 / / /

5 30,1 528 10 / / /

48 46,2 34,4 10 210 1190 0,6

Au début de l’immersion, la valeur de CHF correspond à celle du métal passivé. Cette capacité

croît dans les premières heures d’essai parallèlement à une décroissance de RHF. Cela indique

une dissolution de la couche passive et une accélération de la corrosion du matériau [37].

Cette destruction de la couche passive est par ailleurs confirmée par la disparition de la boucle

inductive au cours de l’essai. En effet, conformément à ce qui est présenté dans la littérature,

la partie inductive des diagrammes d’impédance est attribuée dans ce cas à des phénomènes

d’adsorption/désorption au niveau des perturbations de la couche passive du matériau [103].

En fin d’immersion, on note une décroissance de CHF traduisant ainsi un développement de

produits de corrosion et une diminution de la surface active « primaire » du matériau.

L’apparition, dans ces conditions, d’une deuxième boucle capacitive BF est attribuée au

développement de cloques à la surface de l’alliage [36, 37]. En effet, il apparaît sous ces

cloques de nouvelles surfaces qui se corrodent en milieu confiné. La corrosion de ces surfaces

est alors régie par des phénomènes différents dont la signature en spectroscopie d’impédance

électrochimique apparaît à plus faible fréquence.

Les diagrammes de SIE enregistrés sur l’alliage 7449 en début et en fin d’immersion dans la

solution EXCO modifiée sont présentés figures IV. 8 et IV. 9.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

101

-500

0

500

1000

1500

2000

0 500 1000 1500 2000 2500

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

début d'essai (0h)

fin d'essai (48h)

10 Hz

1 Hz

Figure IV. 8 : Evolution des diagrammes de SIE lors de l’immersion de l’alliage Al 7449 T6

en milieu EXCO modifié.

-500

0

500

1000

1500

2000

0 500 1000 1500 2000 2500

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

début d'essai (0h)

fin d'essai (48h)

10 Hz

1 Hz

Figure IV. 9 : Evolution des diagrammes de SIE lors de l’immersion de l’alliage Al 7449 T7

en milieu EXCO modifié.

Les paramètres électriques caractéristiques extraits de ces diagrammes sont regroupés dans les

tableaux IV. 3 et IV. 4.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

102

Tableau IV. 3 : Paramètres électriques de l’interface métal solution lors de l’immersion de

l’alliage 7449 T6 en milieu EXCO modifié.

Durée

(h)

RHF

(Ω.cm²)

CHF

(µF / cm²)

fHF

(Hz)

RBF

(Ω.cm²)

CBF

(µF / cm²)

fBF

(Hz)

0.5 2028 10 12.5 / / /

48 376 33 12.5 1565 101 1

Tableau IV. 4 : Paramètres électriques de l’interface métal solution lors de l’immersion de

l’alliage 7449 T7 en milieu EXCO modifié.

Durée

(h)

RHF

(Ω.cm²)

CHF

(µF / cm²)

fHF

(Hz)

0.5 2123 12 10

48 346 45 10

Dans le cas de l’alliage 7449 T6, le diagramme de SIE présente au début d’immersion une

grande boucle capacitive HF et une boucle inductive TBF. Puis, la boucle HF décroît et, en fin

d’essai, ce diagramme est constitué de deux boucles capacitives HF et BF. La présence de des

deux boucles capacitives est par ailleurs confirmée par la présence, dans ce domaine de

fréquence, de 2 points d’inflexion sur les diagrammes de SIE en représentation de Bode. La

partie TBF présente en fin d’immersion une grande dispersion et on n’observe plus clairement

de boucle inductive. L’évolution des diagrammes de SIE obtenus sur l’alliage 7449 T6 est

ainsi semblable à celle des diagrammes obtenus sur l’alliage 2024 T3. L’exploitation des

diagrammes de SIE enregistrés au cours de la corrosion feuilletante de l’alliage 7449 T6 en

milieu EXCO modifié est donc effectuée de façon analogue à celle des diagrammes

enregistrés sur l’alliage 2024 T3 en milieu EXCO standard. La boucle HF qui apparaît au

début d’immersion est attribuée aux interactions solution / métal à travers sa couche de

passivité. Quant à la disparition de la boucle inductive TBF au cours de cette immersion, elle

peut être attribuée à la destruction progressive de cette couche passive initiale [103]. Cette

destruction entraîne naturellement une activation de la corrosion qui se traduit par la

décroissance de la boucle capacitive HF observée en fin d’immersion. L’apparition de la

boucle capacitive BF en fin d’immersion montre le développement de cloques à la surface du

matériau.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

103

Quant à l’alliage 7449 T7, le diagramme de SIE obtenu dès l’immersion est aussi constitué

d’une boucle capacitive HF et d’une boucle inductive TBF. En revanche, le diagramme

obtenu en fin d’essai sur cet alliage est constitué uniquement d’une boucle capacitive HF. Ce

diagramme en représentation de Bode ne présente en effet qu’un seul point d’inflexion dans la

gamme de fréquence considérée. L’évolution des boucles, capacitive HF et inductive TBF

sur cet alliage est du même type que celle observée sur l’alliage 7449 T6. Cette évolution est

donc attribuée de façon analogue à une activation de la corrosion par destruction du film

passif et augmentation de la surface active. Toutefois, l’absence d’une deuxième boucle

capacitive BF en fin d’immersion de l’alliage 7449 T7 montre que la corrosion développée

sur l’alliage 7449 T7 en milieu EXCO modifié ne conduit pas à l’apparition de cloques de

taille significative à la surface de l’alliage.

La comparaison des constantes de temps caractéristiques des boucles HF relatives aux

alliages 2024 T3, 7449 T6 et 7449 T7 montre qu’elles sont du même ordre. Les réactions

représentées par ces boucles HF ont donc une cinétique comparable.

Les deux boucles capacitives observées en fin d’immersion sur l’alliage 7449 T6 sont moins

bien séparées que celles obtenues sur l’alliage 2024 T3. Ceci suggère que les cloques

développées sur l’alliage 7449 T6 sont moins nombreuses et moins profondes et / ou plus

ouvertes que celles qui apparaissent à la surface de l’alliage 2024 T3.

IV. 3. Caractérisation par la technique du bruit électrochimique (BE).

IV. 3. 1. Différents régimes de bruit électrochimique

Les techniques électrochimiques, stationnaires ou non, que nous avons mis en œuvre rendent

compte de l’évolution générale des interfaces métal / électrolyte au cours de la dégradation de

matériaux testés, mais ne permettent pas (ou mal) la séparation des diverses étapes ou

composantes dans le processus électrochimique en particulier au niveau de l’amorçage de la

dégradation. De plus, hormis le suivi du potentiel libre, elles induisent une forte perturbation

extérieure du système étudié. L’utilisation de la technique dite du bruit électrochimique a pour

objectif de s’affranchir de ces inconvénients.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

104

Le suivi du potentiel libre des échantillons 2024 T3, enregistré à partir de cette technique

utilisée selon le protocole décrit au chapitre II (§. II. 2. 4), lors leur immersion en solution

EXCO, présente trois régimes de bruit différents (Figures IV. 10).

(a)

-650

-640

-630

-620

-610

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

(b)

-625,2

-624,6

-624

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

(c)

-643

-642,4

-641,8

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

Dans un premier temps, le potentiel libre présente une grande dérive, analogue à celle

observée figure IV. 1. Dans un deuxième temps (après quelques heures d’immersion), le

potentiel se stabilise autour des valeurs comparables à celles mesurées précédemment par

électrochimie classique. Cette stabilisation du potentiel permet cependant de distinguer de

faibles fluctuations de potentiel pseudo périodiques (de fréquence environ 12 Hz). Ces

fluctuations sont alors notées « signaux I » (figure IV. 10. b). Dans un troisième temps, de

Figure IV. 10 : Evolution du BE en

potentiel enregistré sur l’alliage

2024 T3 en milieu EXCO standard ;

(a) dès l’immersion, (b) après 5 h

d’immersion, (c) après 48 h

d’immersion.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

105

brèves impulsions vers le domaine cathodique apparaissent et s’ajoutent au bruit constitué des

signaux I.

Dans le cas de l’alliage 7449 T6 immergé en milieu EXCO modifié, l’évolution du bruit

électrochimique en potentiel est analogue à celle observée dans le cas de l’alliage 2024 T3 en

milieu EXCO standard. Après une dérive initiale du potentiel, le système se stabilise. Des

signaux de type I et plus tard des impulsions apparaissent (figure IV. 11).

(a)-824

-823,4

-822,8

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

(b)-769,2

-768,6

-768

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

Figure IV. 11 : Signaux de bruit électrochimique en potentiel enregistré sur l’alliage 7449 T6

en milieu EXCO modifié, (a) après 5 h d’immersion, (b) après 48 h d’immersion.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

106

Quant à l’alliage 7449 T7, le bruit électrochimique en potentiel présente, de façon similaire à

ce qui est observé sur les alliages 2024 T3 et 7449 T6, trois régimes différents au cours de la

corrosion feuilletante. Toutefois, les impulsions de potentiel observées en fin d’essais sur

l’alliage 7449 T7 sont beaucoup moins bien définies que lors de la corrosion feuilletante des

deux autres matériaux étudiés (figure IV. 12).

(a)-792,6

-792

-791,4

-790,8

-790,2

-789,6

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

(b)-790,4

-789,8

-789,2

0 2 4 6 8 10 12

durée (min)

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

Figure IV. 12 : Signaux de bruit électrochimique en potentiel enregistré sur l’alliage 7449 T7

en milieu EXCO inhibé, (a) après 5 h d’immersion, (b) après 48 h d’immersion.

Le bruit électrochimique en courant enregistré sur les trois matériaux révèle les mêmes

régimes de bruit. Des signaux de bruit électrochimique de type « signaux I » et des impulsions

de courant apparaissent de façon simultanée à ceux observés sur les courbes de bruit en

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

107

potentiel. A titre d’exemple, les figures IV. 13 et IV. 14 présentent une superposition de

courbes obtenues en courant et en potentiel lors de la corrosion feuilletante de l’alliage 2024

T3.

307

307,5

308

308,5

0 1

durée (s)

cour

ant (

µA)

-632,8

-632,7

-632,6

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

courantpotentiel

Figure IV. 13 : Signaux I types enregistrés après 5h d’immersion de l’alliage 2024 T3 en

solution EXCO standard.

80

90

100

110

120

0 3durée (s)

cour

ant (

µA)

-642,7

-642,6

-642,5

-642,4

pote

ntie

l (m

V/E

CS

)

Courant potentiel

Figure IV. 14 : Signaux II types enregistrés après 48h d’immersion de l’alliage 2024 T3 en

solution EXCO standard.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

108

IV. 3. 2. Analyse des signaux de bruit électrochimique

IV. 3 . 2. a- Analyse statistique

La bibliographie fait état de divers modes de traitements analytiques pour l’étude des signaux

de bruit électrochimique. Le tracé des diagrammes de SIE de bruit électrochimique (SIBE, cf

Annexe II) est, dans ce cadre, un outil fort intéressant car il permet de faire le lien entre les

mesures électrochimiques classiques et les signaux observés par BE [37]. La figure IV. 15

présente les diagrammes de SIBE obtenus sur l’alliage 2024 T3 après différentes durées

d’immersion en milieu EXCO standard.

(a)

0

5

10

15

0 5 10 15

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

(b)

0

5

0 5

Re (Z) (Ohm.cm2)

- Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

1

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

e

4

en

n

24

Figure IV. 15 : Diagrammes d

SIBE obtenus sur l’alliage 202

T3 en milieu EXCO standard

fonction de la durée d’immersio

(a) après 1 heure, (b) après

heures, (c) après 48 heures .

(c)

0

5

0

0 5 10

Re (Z) (Ohm.cm2)

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

109

Le diagramme de SIBE enregistré au début de l’immersion est constitué d’une boucle

capacitive HF et d’une boucle inductive BF mal définies. Ce diagramme a une allure

comparable à celle du diagramme de SIE classique obtenu au début de l’immersion de cet

alliage en milieu EXCO standard (cf § IV. 2. 2). L’amplitude des boucles du diagramme de

SIBE est toutefois plus petite. En effet, comme lors de la détermination de Rn (résistance de

bruit électrochimique) (cf § I. 3. 2. b. β), les valeurs obtenues pour tracer les diagrammes de

SIBE sont directement dépendantes des paramètres d’acquisition du bruit électrochimique

[42]. La taille des boucles observées sur les diagrammes de SIBE n’est donc pas à considérer

comme un résultat absolu et dans notre cas, seule une étude qualitative par suivi de ces

boucles peut être effectuée.

Durant l’immersion, les diagrammes de SIBE obtenus sur l’alliage 2024 T3 présentent une

dispersion de plus en plus marquée. Après quelques heures de test, il n’est plus possible de

décrire ni analyser correctement ces diagrammes. Cette dispersion s’accroît encore lors de

l’apparition des impulsions. Cela s’explique par le fait que les impulsions, qui apparaissent de

façon discrète, induisent de façon aléatoire des fluctuations importantes de l’amplitudes des

fonctions sinusoïdales utilisées pour le calcul des diagrammes, conduisant ainsi à la grande

dispersion des points (cf Annexe I). C. Bataillon explique cette dispersion par un écart à la

relation de Nyquist qui relie les diagrammes de SIE et les diagrammes de SIBE [38]. Cet écart

est alors attribué à l’apparition de phénomènes stochastiques généralement plus localisés que

les phénomènes vérifiant la relation de Nyquist. Ces derniers sont de même nature que les

phénomènes analysés par SIE classique.

Les signaux de type I, qui, d’une part, ont une fréquence propre semblable à la fréquence

caractéristique des boucles HF observées sur les diagrammes de SIE classique (environ 12

Hz), et d’autre part, conduisent, en début de test, au tracé de diagrammes de SIBE analogues à

ceux obtenus par SIE classique (composés d’une boucle capacitive HF) sont attribués aux

mêmes phénomènes de dissolution électrochimique du matériau que ceux détectés par

l’apparition de la boucle capacitive HF sur les diagrammes de SIE classique. En revanche, les

impulsions qui se développent après une certaine durée d’immersion paraissent relatifs à

d’autres phénomènes plus localisés et sont étudiées en détail dans le paragraphe suivant.

La figure IV. 16 présente l’évolution des diagrammes de SIBE obtenus sur l’alliage 7449 T6

en milieu EXCO modifié.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

110

(a)

0

50

100

150

200

250

300

350

0 50 100 150 200 250 300 350

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

(b)

0

10

20

30

40

50

0 10 20 30 40 50

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

(c)

0

10

20

30

40

0 10 20 30 40

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

Le diagramme de SIBE obtenu sur cet alliage au début de l’immersion présente une boucle

capacitive HF importante et une boucle inductive BF mal définie et déformée par la

dispersion des points. Après quelques heures d’immersion, le diagramme est constitué d’une

boucle capacitive HF plus petite et la partie BF présente à nouveau une grande dispersion. En

fin d’immersion, la dispersion des points est générale et ne permet plus de décrire

correctement le diagramme de SIBE. Durant les premières heures d’immersion, l’évolution

des diagrammes de SIBE est semblable à celle des diagrammes de SIE dans les mêmes

conditions (cf § IV. 2. 2 – figure IV. 8). De même que pour l’alliage 2024 T3, il apparaît que

les signaux de type I enregistrés sur l’alliage 7449 T6 en milieu EXCO modifié, sont relatifs

aux phénomènes de dissolution électrochimique de l’alliage. Les impulsions obtenues sur

l’alliage 7449 T6 sont alors pressenties pour être responsable de la dispersion qui apparaît en

Figure IV. 16 : Diagrammes de

SIBE obtenus sur l’alliage 7449 T6

en milieu EXCO modifié en

fonction de la durée d’immersion

(a) après 1 heure, (b) après 24

heures, (c) après 48 heures.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

111

fin d’immersion. Ces impulsions sont attribuées, de façon analogue à l’alliage 2024 T3, à

d’autres phénomènes que ceux de dissolution électrochimique du matériau et sont étudiées

dans le paragraphe suivant.

La figure IV. 17 présente l’évolution des diagrammes de SIBE obtenus durant l’immersion de

l’alliage 7449 T7 en milieu EXCO modifié.

(a)

0

100

200

300

400

500

0 100 200 300 400 500

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

(b)

0

40

80

120

0 40 80 120

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

(c)

0

40

80

120

0 40 80 120

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

(d)

0

10

20

0 10 20

Re (Z) (Ohm.cm2)

-Im

(Z

) (O

hm.c

m2 )

Figure IV. 17 : Diagrammes de SIBE obtenus sur l’alliage 7449 T7 en milieu EXCO modifié

en fonction de la durée d’immersion (a) après 1 heure, (b) après 24 heures, (c) après 48

heures, (d) après 72 heures.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

112

L’évolution des diagrammes est similaire à celle observée sur l’alliage 7449 T6. Les signaux I

enregistrés sur cet alliages sont aussi attribués aux phénomènes de dissolution

électrochimique de l’alliage. La dispersion des points intervient toutefois plus tardivement

dans le cas de l’alliage 7449 T7 et montre ainsi que les impulsions observées au paragraphe

IV. 3. 1 sont relativement moins importantes dans le cas de cet alliage que lors de la corrosion

de l’alliage 7449 T6.

IV. 3 . 2. b- Analyse des impulsions

Les impulsions enregistrées en courant sur les trois matériaux sont présentées figure IV. 18.

Ces impulsions en courant, anodiques ou cathodiques, ne sont pas réparties régulièrement

dans le temps. Elles sont décrites comme une évolution brutale de courant suivi d’un retour

plus progressif à la valeur initiale (partie de la courbe de forme exponentielle). Ces

transitoires de courant sont désormais appelés « signaux II ». Les transitoires en courant sont

simultanés aux transitoires en potentiel (figure IV. 14) qui sont eux toujours vers le domaine

cathodique. Ces transitoires correspondent donc à l’apparition soudaine de nouveaux sites

anodiques à la surface du matériau (évolution brutale du courant). Ces sites réagissent alors

avec l’électrolyte et se couvrent peu à peu de produits de corrosion (retour lent au valeurs

initiales de courant et de potentiel) [46].

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

113

0

20

40

60

80

100

120

140

160

0 2 4 6 8 10 12

durée(min)

inte

nsite

(µA

)

80

90

100

110

120

952 955

durée (s)

ampl

itud

e (µ

A)

(a)

0

20

40

60

80

100

120

140

160

0 2 4 6 8 10 12

durée(min)

inte

nsite

(µA

)

80

90

100

110

120

952 955

durée (s)

ampl

itud

e (µ

A)

80

90

100

110

120

952 955

durée (s)

ampl

itud

e (µ

A)

(a)

(b)

320

325

330

335

0 1 2

durée (s)

inte

nsité

(µA

)

(c)

80

85

90

95

0 1 2

durée (s)

inte

nsité

(µA

)

Figure IV. 18 : Transitoires impulsionnels (signaux II) types observés sur (a) alliage 2024 T3

en solution EXCO standard, (b) et (c) alliage 7449 T6 et T7 en solution EXCO modifiée.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

114

Les amplitudes de ces signaux II de courant et les charges électriques impliquées dans ces

transitoires sont reportées dans le tableau IV. 5. Les charges électriques sont alors calculées

par la relation :

tf

Q=∫(I(t)-I i dt (11)

ti

Avec :

Q = charge impliquée dans le transitoire

t1 = date du début du transitoire

tf = date de fin du transitoire (déterminée par la relation I(tf) = Ii)

Ii = intensité du courant initial

I(t) = intensité du courant à l’instant t

Tableau IV. 5 : Caractéristiques des transitoires (signaux II) enregistrés par mesure du bruit

électrochimique sur les trois matériaux étudiés.

Matériau Charge (µC) Amplitude (µA) Amplitude (mV)

2024 T3 2 à 6 25 à 30 0,15 à 0,25

7449 T6 0,7 à 5 5 à 10 0,10 à 0,15

7449 T7 - 5 à 10 0,10 à 0,15

Les charges électriques impliquées dans les signaux II lors de la corrosion de l’alliage 2024

T3 et de l’alliage 7449 à l’état T6 sont du même ordre que celles classiquement déterminées

dans les cas de propagation de corrosion sous contrainte [46]. De plus, ces transitoires

n’apparaissent qu’en fin d’immersion lorsque des cloques (détectées par SIE) se forment à la

surface des matériaux. Enfin, les résultats présentés dans le tableau IV. 5 montrent que

contrairement aux signaux I, les signaux II sont plus prononcés (charges impliquées et

amplitudes plus importantes) sur les enregistrements effectués sur l’alliage 2024 que sur

l’alliage 7449 à l’état T6 ou T7. Cette tendance est aussi en accord avec le caractère

« cloquant » de la corrosion feuilletante des matériaux tel que nous l’avons déterminé par SIE

(cf § IV. 2. 2). Ces signaux II enregistrés par bruit électrochimique sont donc attribués à

l’apparition de nouvelles surfaces anodiques fraîches lors du décollement des feuillets

métalliques, sous l’effet de contraintes exercées par les produits de corrosion.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

115

La prédominance des signaux II en fin d’immersion de l’alliage 2024 T3, et la faible

amplitude des signaux I enregistrés sur ce matériau (grande dispersion des diagrammes de

SIBE), confortent l’idée que le mécanisme de propagation de la corrosion feuilletante sur ce

matériau est très étroitement lié aux contraintes exercées par les produits de corrosion.

L’amplitude des transitoires (signaux II) enregistrés en courant et en potentiel sur l’alliage

7449 à l’état T7 et à l’état T6 est comparable. Cela indique que la surface fraîche qui apparaît

est sensiblement égale pour les deux matériaux. Cependant, l’importance relativement moins

significative des signaux II en fin d’immersion de cet alliage par rapport à l’alliage 2024 T3

suggère que les contraintes ont un rôle moins prédominant dans la dégradation de cet alliage.

En revanche, contrairement à ce qui est observé pour l’alliage 7449 T6, la charge électrique

impliquée dans les transitoires sur alliage 7449 T7 n’est pas calculable car le courant après

transitoire ne rejoint pas immédiatement son niveau initial. Ce non retour du courant à son

niveau initial montre qu’après apparition de la surface fraîche, la dissolution de l’alliage 7449

T7 se propage d’avantage qu’avant l’apparition de cette surface. La dissolution de ce matériau

ne se limite donc pas à l’attaque de la surface fraîche. L’apparition d’une telle surface semble

ainsi activer plus largement le phénomène de dissolution du matériau. Cette « activation »

peut être liée, soit à l’apparition de nouveaux sites anodiques proches de la surface fraîche,

soit au renforcement de l’agressivité locale du milieu. Quoiqu’il en soit, la propagation (même

avancée) de la corrosion feuilletante de l’alliage 7449 T7 est principalement liée à la

dissolution du matériau (forte présence des signaux I et bonne définition des diagrammes de

SIBE même après 48 heures d’immersion en milieu agressif). Cette dissolution est alors

occasionnellement accélérée et facilitée par l’effet des contraintes des produits de corrosion.

L’importance relativement faible des signaux II observés lors de la propagation de la

corrosion feuilletante de l’alliage 7449 T6 suggère que l’effet des contraintes des produits de

corrosion est moins grand dans le mécanisme de dégradation de ce matériau que dans celui de

l’alliage 2024 T3. Cependant, la bonne définition de ces transitoires pour l’état T6 (retour du

courant à sa valeur initiale) nous incite a penser que la dissolution électrochimique de l’alliage

7449 T6 est beaucoup moins prédominante dans le mécanisme de propagation de la corrosion

de ce matériau que lors de la propagation de la dégradation de l’alliage 7449 T7. Le

mécanisme de propagation de la corrosion feuilletante de l’alliage 7449 T6 apparaît donc, à

nouveau, c’est-à-dire en accord avec les résultats du chapitre III obtenus par caractérisation de

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

116

l’émission acoustique, intermédiaire entre celui de l’alliage 2024 T3 (fortement lié aux

contraintes exercées par les produits de corrosion) et celui de l’alliage 7449 T7 (grandement

dépendant de la dissolution électrochimique du matériau).

IV. 4. Influence respective des constituants et paramètres du milieu d’essai

La bibliographie ne rapporte que très peu de travaux concernant l’influence respective des

différents constituants du milieu d’étude vis à vis de la tenue des matériaux à la corrosion

feuilletante des alliages d’aluminium (cf chapitre I). C’est ainsi que la norme ASTM

recommande empiriquement de travailler avec une solution EXCO standard à pH 0.4 pour

l’étude de la corrosion feuilletante de l’alliage 2024 et avec une solution EXCO modifiée à

pH 3.2 pour les alliages de la série 7XXX [99]. Afin de mieux comprendre le mécanisme de

corrosion et les effets de ces constituants, nous avons complété notre étude par une

caractérisation du comportement des matériaux dans divers milieux.

IV. 4. 1. Alliage 2024 en milieu EXCO modifié.

Le milieu EXCO est trop agressif pour étudier le comportement de l’alliage 7449 à la

corrosion feuilletante. Aussi, afin d’estimer malgré tout l’effet de la modification du milieu

sur la corrosion des matériaux nous avons testé l’alliage 2024 en solution EXCO modifiée. Le

potentiel libre de l’alliage 2024 T3 en milieu EXCO modifié est de l’ordre de –700mV/ECS.

Les mesures de Rp effectuées lors de l’immersion de cet alliage dans le milieu EXCO modifié

présentent des valeurs de résistances de polarisation bien supérieures à celles obtenues lors de

la corrosion de l’alliage 2024 T3 en milieu EXCO standard. Ces deux constats confirment un

ralentissement de la cinétique de corrosion liée à une diminution de l’agressivité du milieu.

Une étude de la corrosion de l’alliage 2024 T3 développée en milieu EXCO modifiée a aussi

été menée par la technique de bruit électrochimique. Cette étude montre alors que des signaux

de type I et II apparaissent aussi dans ces conditions. Ainsi, le mode de dégradation

développée sur l’alliage 2024 T3 en milieu EXCO modifié semble être identique à celui

constaté en milieu EXCO standard . Seule, la cinétique de la dégradation est grandement

ralentie par la modification du milieu.

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

117

IV. 4. 2. Plan d’expériences

Le changement du milieu EXCO standard au milieu EXCO modifié n’ayant pour effet qu’un

ralentissement de la dégradation, nous avons étudié en détail l’influence de chaque paramètre

du milieu standard (dont le nombre de constituants est moindre que pour le milieu modifié).

Pour ce faire, un plan d’expérience a été mis en oeuvre. L’effet de la température, déjà étudié

par d’autres auteurs, n’est pas considéré ici [8, 97, 98]. Ces études montrent en effet que la

température n’a, elle aussi, qu’un effet accélérateur sur la corrosion et qu’elle n’a aucune

influence sur la morphologie de la dégradation. Les paramètres retenus pour notre étude sont

donc : le pH, la concentration en ions chlorure et la concentration en ions nitrate.

Deux niveaux extrêmes (notés + et -) sont définis pour chacun des paramètres :

Paramètre A (pH) : + : pH = 0.4, - : pH = 5.4 (pH eau permutée)

Paramètre B (concentration en NaCl) ; + : NaCl = 234 g/L, - : NaCl = 0 g/ L

Paramètre C (concentration en KNO3) ; + : KNO3 = 44 g/L, - : KNO3 = 0 g/L

L’influence de ces paramètres sur le comportement des matériaux est étudiée par suivi de Rp-1

(paramètre proportionnel à la vitesse de dégradation) au cours de l’immersion des échantillons

dans les huit solutions d’essais nécessaires à ce plan d’expérience (tableau IV. 6).

Tableau IV. 6 : Suivi de Rp-1 (Ohm-1.cm-2) au cours de la corrosion de l’alliage 7449 T6 dans

les différents milieux du plan d’expérience.

1/Rp -A-B-C +A-B-C -A+B-C -A-B+C +A+B-C +A-B+C -A+B+C +A+B+C

1h 6E-4 4E-3 2,22E-4 1,82E-5 2,5E-1 3,48E-4 2,86E-4 1E-1

5h 6,25E-4 8,69E-3 3,39E-4 3,03E-5 2E-1 1,08E-3 4E-4 8,69E-2

10h 3,89E-5 8E-3 4,55E-4 3,13E-5 6,25E-2 4E-3 4,35E-4 1,67E-2

15h 3,13E-5 7,69E-3 3,45E-4 2E-5 4E-2 8E-3 4,44E-5 3,33E-2

20h 2,94E-5 7,69E-3 2,5E-4 2,78E-5 2,85E-2 8E-3 5,26E-5 3,22E-2

24h 2,78E-5 8E-3 2,02E-4 4,76E-5 2,5E-2 8E-3 5,88E-5 2,77E-2

Il est ainsi possible de déterminer l’effet relatif des différents constituants du milieu sur la

sévérité de la dégradation à diverses durées d’immersion. L’évolution de l’effet de chacun des

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Chapitre IV : Etude électrochimique du comportement des matériaux à la corrosion

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trois paramètres sur la sévérité de la dégradation est semblable pour les trois matériaux. A

titre d’exemple, les résultats obtenus sur l’alliage 7449 T6 sont présentés tableau IV. 7.

Tableau IV. 7 : Effets relatifs des divers constituants du milieu EXCO sur la sévérité de la

corrosion de l’alliage 7449 T6 (%).

Temps

d’immersionA B C AB AC BC ABC

1 h 27,5 26,3 5,2 26,3 5,2 4,7 4,8

5 h 29,8 26,3 5,0 26,3 4,9 3,7 3,8

10 h 31,8 18, 9,6 17,2 9,6 6,8 6,8

15 h 53,5 22,9 0,3 22,4 0,2 0,4 0,3

20 h 58,4 20,7 0,1 20,3 0,2 0,1 0,1

24 h 63,1 18,4 0,1 18,0 0,2 0,1 0,1

Le pH (paramètre A) et la concentration en NaCl (paramètre B) paraissent grandement

déterminants pour la sévérité de la dégradation des matériaux. Ce résultat peu significatif en

début d’immersion devient de plus en plus évident au cours de l’essai. Cela est lié au fait que

dans les premières heures d’immersion, le phénomène de corrosion présente une phase

d’amorçage durant laquelle l’effet des divers constituants est différent et moins bien défini

que durant la phase de propagation. L’effet des chlorures s’estompe légèrement au cours du

temps ce qui peut être dû à leur consommation lors de la dépassivation [9] et surtout lors de la

formation des produits de corrosion. En effet, les ions chlorures, qui facilitent la destruction

du film passif lors de l’étape d’amorçage de la corrosion feuilletante des alliages

d’aluminium, sont susceptibles de stabiliser les produits de corrosion. Ils pourraient alors

jouer un rôle majeur dans le développement de la composante mécanique de la propagation

de la corrosion. En revanche, l’effet relatif du pH croît durant l’immersion. Ce résultat

apparaît alors en contradiction avec l’hypothèse, selon laquelle, le ralentissement de la

corrosion, observé par suivi de Rp, serait principalement lié à l’augmentation du pH durant la

corrosion (cf § IV. 2. 1). Quant aux nitrates, ils semblent abaisser l’agressivité de la solution.

Cette inhibition de la corrosion de l’aluminium par les ions nitrate a déjà été rapportée [8,42].

Cependant, le rôle de ces ions reste encore discuté. Les ions nitrate sont en effet de puissants

oxydants [2]. S. Hœrlé montre que la présence d’ions nitrate en solution agressive, lors de la

corrosion par piqûre des alliages d’aluminium, accroît significativement le caractère

déterministe de ce mode de dégradation des alliages [43]. Le caractère inhibiteur des ions

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nitrates réduirait, selon lui, le nombre de site d’amorçage des piqûres. Le caractère oxydant

aurait un effet qui stabiliserait les quelques piqûres métastables apparues à la surface des

alliages d’aluminium. Ainsi, S. Hœrlé attribue le déterminisme de la corrosion par piqûre des

alliages d’aluminium à l’effet conjugué des caractères oxydants et inhibiteur de corrosion des

ions nitrate. Un raisonnement analogue nous conduit à penser que le rôle de ces ions nitrate,

dans le mécanisme de corrosion feuilletante des alliages étudiés, est d’accentuer la

localisation et donc le caractère feuilletant de la corrosion. Cependant, les mesures à caractère

global, c’est-à-dire relatives à l’ensemble de la surface étudiée, utilisées pour ce plan

d’expériences ne permettent malheureusement pas de confirmer cette hypothèse.

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IV. 5. Conclusion.

L’étude du comportement des alliages 2024 T3, 7449 T6 et 7449 T7 par les techniques

électrochimiques stationnaires révèlent diverses étapes dans la cinétique de corrosion

feuilletante de ces matériaux (dépassivation et amorçage de la corrosion, propagation rapide et

propagation plus lente). La spectroscopie d’impédance électrochimique permet de différencier

la morphologie de l’attaque et il apparaît que l’alliage 2024 immergé en solution EXCO

standard développe des cloques tandis que l’alliage 7449 T7 subit une corrosion sans

formation de cloques. L’alliage 7449 T6 accuse une dégradation avec développement de

cloques moins importantes que pour l’alliage 2024.

Ces résultats sont confirmés par les essais de bruit électrochimique pour lesquels l’apparition

en fin d’immersion de transitoires est attribuée au développement de surfaces fraîches sous

l’effet des contraintes des produits de corrosion. Un autre type de signal, moins ample mais

plus fréquent et qui apparaît de façon plus précoce, apparaît lié à la dissolution

électrochimique des matériaux. L’analyse de ces deux types de signaux montre que la

dégradation de l’alliage 7449, en particulier à l’état T7, est étroitement liée au phénomène de

dissolution électrochimique tandis que celle de l’alliage 2024 résulte en partie des effets de

contraintes des produits de corrosion.

L’analyse des milieux agressifs montre que la modification du milieu EXCO n’a pour effet

que le ralentissement de la cinétique de corrosion. En effet, la dégradation garde dans les deux

milieux les mêmes caractéristiques. L’étude des divers paramètres et constituants du milieu

montre que le pH est le paramètre le plus déterminant pour l’agressivité globale du milieu. En

revanche, les ions nitrate semblent avoir un effet « localisateur » de la corrosion. Les ions

chlorures, qui facilitent la destruction du film passif en surface du matériau, et en cela ont un

rôle important lors de l’étape d’amorçage, pourraient aussi être déterminants quant à la nature

des produits de corrosion et au développement des contraintes liées à ces produits de

corrosion.