Chapitre 5 Compression

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Chapitre 5 5-1 5. MEMBRURES COMPRIMEES 5.1 Introduction Une structure comporte généralement certains types d'éléments dont la fonction essentielle est de résister à des efforts de compression; citons notamment les piliers, les poussards, les diagonales ou membrures comprimées en treillis, ... Ces éléments structuraux sont rarement, voire jamais, soumis aux seuls efforts de compression axiale. Cependant, lorsque la charge appliquée est telle que la restreinte rotationnelle aux extrémités est faible ou que la flexion peut être négligée vis-à-vis de la compression, l'élément peut être dimensionné comme une pièce chargée centriquement, communément désignée sous le nom de colonne, ou encore de poteau. 5.2 Généralités La mise en charge d'un élément comprimé s'effectue généralement, tout comme pour un élément tendu, par l'intermédiaire des assemblages d'extrémité; la mise en charge par contact direct constitue en effet l'exception. Ceci amène donc à s'interroger, ici encore, sur les effets des trous et des excentrements des efforts appliqués. Lorsque les trous sont remplis par des organes d'assemblage (rivets, boulons, axes), ils ont normalement une influence peu significative sur le comportement de la pièce. En effet, ces organes sont susceptibles, soit de venir en butée sur les bords des trous, transmettant ainsi des efforts par pression diamétrale, soit, s'il s'agit de boulons fortement préserrés, de transmettre les efforts par la friction mobilisée au pourtour des trous. A la différence des membrures tendues, il n'est donc normalement pas nécessaire, pour le calcul de l'aire résistante, de déduire une quelconque aire des trous de fixation de l'aire brute de la section. Une telle déduction n'est requise que dans le cas de trous surdimensionnés, de trous oblongs et de trous non remplis. Ainsi, la section résistante est en général l'aire A de la section brute; si besoin est, on y substitue l'aire A eff de la section efficace en compression uniforme. Les excentrements de l'effort de compression aux extrémités d'un élément comprimé induisent des flexions parasites. Ils proviennent principalement des différences éventuelles entre la position de la ligne d’attache et celle de l'axe longitudinal passant par le centre de gravité de la section résistante. Lorsque ces excentrements restent faibles, il est possible dans certains cas (cornières simples ou doubles) d'en tenir compte par une pénalisation de la section résistante en compression. Dans le cas contraire, la barre doit être vérifiée à la flexion composée. Il est essentiel de réduire autant que possible ces excentrements par une saine conception des assemblages, voire par une disposition judicieuse des éléments structuraux constituant la membrure comprimée. Par exemple, une section comprimée constituée de deux cornières opposées par le sommet ou par deux tés adossés par leur semelle (Figure 5-1) peut être assemblée à ses extrémités de manière à transmettre l'effort sensiblement au centre de gravité de l'élément résultant. Ceci postule toutefois que ce dernier se comporte comme une pièce composée monolithe; à cet effet, les cornières/tés doivent être reliés de place en

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Chapitre 5 5-1

5. MEMBRURES COMPRIMEES

5.1 Introduction

Une structure comporte généralement certains types d'éléments dont la fonction essentielle est de résister à des efforts de compression; citons notamment les piliers, les poussards, les diagonales ou membrures comprimées en treillis, ... Ces éléments structuraux sont rarement, voire jamais, soumis aux seuls efforts de compression axiale. Cependant, lorsque la charge appliquée est telle que la restreinte rotationnelle aux extrémités est faible ou que la flexion peut être négligée vis-à-vis de la compression, l'élément peut être dimensionné comme une pièce chargée centriquement, communément désignée sous le nom de colonne, ou encore de poteau.

5.2 Généralités

La mise en charge d'un élément comprimé s'effectue généralement, tout comme pour un élément tendu, par l'intermédiaire des assemblages d'extrémité; la mise en charge par contact direct constitue en effet l'exception. Ceci amène donc à s'interroger, ici encore, sur les effets des trous et des excentrements des efforts appliqués.

Lorsque les trous sont remplis par des organes d'assemblage (rivets, boulons, axes), ils ont normalement une influence peu significative sur le comportement de la pièce. En effet, ces organes sont susceptibles, soit de venir en butée sur les bords des trous, transmettant ainsi des efforts par pression diamétrale, soit, s'il s'agit de boulons fortement préserrés, de transmettre les efforts par la friction mobilisée au pourtour des trous. A la différence des membrures tendues, il n'est donc normalement pas nécessaire, pour le calcul de l'aire résistante, de déduire une quelconque aire des trous de fixation de l'aire brute de la section. Une telle déduction n'est requise que dans le cas de trous surdimensionnés, de trous oblongs et de trous non remplis. Ainsi, la section résistante est en général l'aire A de la section brute; si besoin est, on y substitue l'aire Aeff de la section efficace en compression uniforme.

Les excentrements de l'effort de compression aux extrémités d'un élément comprimé induisent des flexions parasites. Ils proviennent principalement des différences éventuelles entre la position de la ligne d’attache et celle de l'axe longitudinal passant par le centre de gravité de la section résistante. Lorsque ces excentrements restent faibles, il est possible dans certains cas (cornières simples ou doubles) d'en tenir compte par une pénalisation de la section résistante en compression. Dans le cas contraire, la barre doit être vérifiée à la flexion composée.

Il est essentiel de réduire autant que possible ces excentrements par une saine conception des assemblages, voire par une disposition judicieuse des éléments structuraux constituant la membrure comprimée. Par exemple, une section comprimée constituée de deux cornières opposées par le sommet ou par deux tés adossés par leur semelle (Figure 5-1) peut être assemblée à ses extrémités de manière à transmettre l'effort sensiblement au centre de gravité de l'élément résultant. Ceci postule toutefois que ce dernier se comporte comme une pièce composée monolithe; à cet effet, les cornières/tés doivent être reliés de place en

Chapitre 5 5-2

place par des barrettes de liaison, évitant ainsi qu'un flambement individuel des constituants se produise prématurément au flambement de l'élément composé.

Figure 5-1 Pièce comprimée composée de cornières ou de tés

5.3 Eléments comprimés courts

Une membrure comprimée est dite courte lorsque sa résistance est conditionnée par celle de sa section transversale. Ceci postule donc que le flambement - phénomène d'instabilité propre aux pièces comprimées axialement - n'est pas à craindre.

Un essai de compression axiale sur un élément court en acier de classe 1, 2 ou 3

ayant un axe longitudinal rectiligne et une section uniforme fournit un diagramme σ-ε, déduit du diagramme charge-raccourcissement, similaire à celui relevé sur une éprouvette de traction faite du même matériau. On observe toutefois une limite de proportionnalité significativement plus faible en compression, conséquence de l'existence de contraintes résiduelles longitudinales. La distribution de celles-ci est auto-équilibrée (état d'autocontraintes) et a ainsi une résultante longitudinale nulle; elle est donc sans effet sur la charge d'écoulement plastique Npl dont il est généralement admis qu'elle constitue la charge ultime en compression d'une section de classe 1, 2 ou 3. La résistance à la compression de calcul de l’élément est donc prise égale à la résistance plastique de calcul de la section:

(5-1)

où A est l'aire résistante de la section transversale brute de l’élément comprimé. Il n'est donc pas d'usage, pour la pratique du dimensionnement, de prendre en considération l'écrouissage du matériau.

Pour les sections transversales de classe 4 – sections dites à parois minces – le voilement élastique local dans une ou plusieurs parois de la section transversale empêche d’atteindre la charge d’écoulement plastique, et donc la résistance à la compression de calcul est limitée à la résistance au voilement local :

(5-2)

où Aeff désigne l'aire efficace de la section.

y y

z

z

Gy y

z

z

u

u

G

v

v

G

z

z

yy

Barrettes de liaison

Chapitre 5 5-3

Pour rappel, la classe à laquelle appartient une section transversale dépend de l’élancement de chaque élément (rapport largeur/épaisseur) et de la distribution des contraintes de compression, uniforme ou linéaire. Pour chaque paroi, il est donc nécessaire de calculer son élancement et de le comparer aux valeurs limites définissant les classes 1, 2 et 3. Lorsque la limite de la classe 3 n'est pas respectée pour l'une ou l'autre des parois de la section, celle-ci est de classe 4. Il y a donc voilement élastique local avant d'avoir atteint la charge plastique de la section. Le phénomène de voilement local ainsi que la classification des sections font l’objet du chapitre 3.

5.4 Eléments comprimés élancés

Un élément comprimé (colonne, poteau, … ) est dit élancé lorsqu' il ne répond pas au critère de l’élément court. Sa résistance est alors gouvernée par le phénomène d'instabilité, appelé flambement, qui régit le comportement de l’élément en l’empêchant d’atteindre sa charge d’écoulement plastique. Ce dernier est sensiblement différent selon que l'on considère l’élément idéal ou réel, dit industriel.

5.4.1 Comportement d'un élément idéal à section constante sous compression centrique constante

Considérons une colonne à axe rectiligne, à section doublement symétrique, dont la section uniforme a une aire résistante A et qui est soumise à un effort de compression rigoureusement centré. La théorie de la stabilité élastique nous apprend que l'état limite ultime d'un tel élément correspond à une instabilité par flexion dans un plan principal d'inertie pour une charge Ncr, appelée charge critique élastique de flambement par flexion ou encore charge critique d'Euler, donnée par :

(5-3)

où EI et Lcr désignent respectivement la raideur flexionnelle de la section transversale d'aire A et la longueur de flambement pour la flexion dans le plan de flambement considéré. Le flambement survient par flexion autour de l'un des axes principaux yy et zz de la section transversale de la barre, auquel correspond une valeur de la charge critique.

La charge critique d’Euler correspond à la résistance au flambement d’un poteau comprimé axialement et dont le matériau constitutif est supposé être indéfiniment élastique (Figure 5-2 b).

Chapitre 5 5-4

Figure 5-2 Poteau comprimé à matériau élastique

Supposons que cette barre, de longueur L, soit initialement déformée (semi-sinusoïde d’amplitude e0 à mi-travée) (Figure 5-2 a) dans le plan de flambement considéré.

Sous l’action de l’effort axial N naissent, sur toute la longueur de l’élément, des moments de flexion résultant de l’excentricité de l’effort appliqué (moment valant Ne0 à mi-travée). Ces moments provoquent une déformation complémentaire de la barre, qui amplifient à leur tour les moments existants, qui augmentent de nouveau la déformation latérale, qui …

L’amplification progressive des déformations latérales et des moments internes peut conduire à la perte de stabilité de l’élément comprimé, en cas d’application d’un effort N trop important (e tend alors vers l’infini). Dans le cas contraire, un équilibre entre l’effort appliqué et les efforts intérieurs dans la barre (moments et force axiale) peut être atteint (e se stabilise). La limite de stabilité, située à la frontière de ces deux états, est appelée la charge critique d’Euler.

Pour la déterminer, appliquons l’équation de l’élastique à la barre déformée (Figure 5-2 a) :

(5-4)

où : x définit la position d’une section le long de la barre;

v0 est la déformée initiale de la barre dans la section située à une distance x de l’extrémité

= e0 sin(x/L);

v est la déformée latérale supplémentaire de la barre, dans la section située à une distance x de l’extrémité, résultant de l’application de l’effort N;

E est le module d’élasticité de l’acier;

I est l’inertie de la section pour le sens de flambement considéré.

Chapitre 5 5-5

Si l’on exprime que la déformée latérale de l’élément est nulle à ses deux extrémités (v = 0 en x = 0 et x = L), la solution de cette équation différentielle s’écrit :

(5-5)

La représentation graphique de cette solution est reprise à la Figure 5-3.

Figure 5-3 Bifurcation et divergence de l’équilibre

Quelle que soit l’importance de la déformée initiale, la charge d’instabilité est systématiquement atteinte pour une valeur de l’effort appliqué égal à Ncr. Pour une valeur de e0 non nulle, on assiste à une augmentation progressive de la déformée latérale : on parle alors de « divergence » de l’équilibre. Pour le cas limite correspondant à une barre initialement rectiligne, aucune déformation transversale n’apparaît tant que la charge critique d’Euler n’est pas atteinte. On dit alors que le flambement se produit par « bifurcation » de l’équilibre.

Si l’élément est parfaitement rectiligne, mais que la charge est appliquée avec une excentricité, même faible, le flambement se produit alors par divergence de l’équilibre, toujours pour un effort de compression égal à la charge critique d’Euler.

Le concept de charge critique d’Euler est appliqué ci-dessus à une barre articulée à ses deux extrémités. Il peut être étendu à des éléments possédant d’autres conditions d’appui au travers de la définition d’une longueur de flambement appropriée, notée Lcr. Pratiquement, la longueur de flambement est la distance séparant deux points d’inflexion consécutifs de la déformée. Cette dernière est évaluée en multipliant la longueur physique de l’élément, L, par un coefficient de flambement K, celui-ci dépend des conditions d'appui aux extrémités de l’élément, ou, plus précisément, du niveau des restreintes flexionnelles d'extrémité, d'une part, et de la possibilité de translation latérale relative des extrémités, d'autre part. Quelques valeurs caractéristiques de K sont fournies Tableau 5-1.

Chapitre 5 5-6

Tableau 5-1 Coefficients de flambement K

La charge critique d’Euler s’exprime alors comme suit :

(5-6)

La contrainte critique d’Euler σcr vaut alors :

(5-7)

En introduisant, pour le mode de flambement approprié, le rayon de giration i pour la flexion, selon :

(5-8)

et l'élancement λ :

(5-9)

L’expression de la contrainte critique vaut alors :

(5-10)

Chapitre 5 5-7

En traçant la courbe σcr en fonction λ sur un graphique (Figure 5-4), et en faisant apparaître la ligne horizontale, σ = fy, représentant la plasticité parfaite, il est intéressant de remarquer les zones idéalisées représentant la ruine par flambement, la ruine par plastification et la zone de sécurité.

Figure 5-4 Courbe de flambement d’Euler et modes de ruine

Le point d'intersection P des deux courbes représente la valeur théorique maximale de l'élancement d'un poteau comprimé jusqu'à la limite d'élasticité. Cet élancement

limite, où σcr est égal à la limite d'élasticité de l'acier, est donné par l'expression :

(5-11)

λ1 vaut donc 93,9 pour la nuance d'acier S235, 86,8 pour la nuance d’acier S275 et 76,4 pour la nuance d'acier S355.

La Figure 5-4 peut être redessinée sous une forme adimensionnelle, en divisant la contrainte critique d'Euler par la limite d'élasticité (σcr / fy) et l'élancement par

l'élancement réduit (λ / λ1) (Figure 5-5). Ceci est utile car le même tracé peut alors être appliqué à des éléments comprimés possédant différents élancements et différentes résistances de matériau.

Ruine par plastification

Ruine par

flambement

Courbe deflambement d'Euler

Pf

y

1

Chapitre 5 5-8

Figure 5-5 Courbe de flambement adimensionnelle

L’Eurocode 3 définit l’élancement réduit (élancement normalisé) de la façon suivante :

(5-12)

qui peut s’écrire et s’utiliser sous la forme plus pratique suivante :

(5-13)

où βA = 1 pour les sections transversales de classe 1, 2, 3 et βA = Aeff / A pour les sections de classe 4.

La courbe de flambement d’Euler a donc pour équation:

La valeur limite de la sollicitation réduite d'une barre comprimée élancée

idéale est donc égale à (Figure 5-5) :

Le point P, point d’intersection entre l'horizontale et l'hyperbole vaut

l'élancement réduit qui correspond à l'élancement maximal pour lequel la section transversale de la barre comprimée idéale reste utilisée au maximum de sa capacité de résistance.

fy

1P

1

1

Chapitre 5 5-9

5.4.2 Comportement d’un élément industriel sous compression constante et centrique

Le comportement réel des poteaux en acier est assez différent du comportement idéalisé décrit ci-dessus. En général, les poteaux subissent une ruine par flambement inélastique avant d'atteindre la charge de flambement d'Euler en raison de diverses imperfections de l'élément "réel": défaut de rectitude initial, contraintes résiduelles, excentricité des efforts normaux appliqués et écrouissage. Toutes ces imperfections affectent le flambement et, par conséquent, la résistance ultime du poteau. Les résultats d'essais conduits sur des barres industrielles comprimées centriquement fournissent des points représentatifs qui peuvent s'écarter très significativement de la courbe de flambement théorique (Figure 5-6). Cette situation est due aux effets des imperfections, d'une part et de l'écrouissage, d'autre part.

fy

P

Elancement moyen Elancement élevé

Pointd'inflexion

1

Figure 5-6 Courbes de flambement et résultats d’essais de poteaux réels

Dans le domaine des faibles élancements, la résistance des éléments est peu sensible au flambement. Les effets favorables de l'écrouissage - non pris en compte dans le calcul - compensent largement les effets défavorables des imperfections. Ceci explique que l'on trouve des points expérimentaux au-dessus de la courbe σ = fy. Dans le domaine des grands élancements, le flambement se produit pour ainsi dire élastiquement, donc sans plastification marquée, pour de faibles taux de contrainte; les points expérimentaux se situent sous l'hyperbole d'Euler mais restent proches de celle-ci. C'est dans le domaine des élancements intermédiaires auquel appartiennent la plupart des éléments fortement comprimés rencontrés en pratique, que l'interaction entre la plastification et l'instabilité est la plus marquée, et en

particulier aux abords de λ1. La courbe limite inférieure, représentée à la Figure 5-6, est obtenue par une analyse statistique de résultats d'essais et représente la limite de sécurité pour le chargement.

On observe donc que la capacité portante des poteaux industriels évolue continûment, lorsque l'élancement croît, entre la charge plastique et la charge critique d'Euler, tout en restant (parfois très significativement) inférieure à la plus petite de ces deux charges. Ceci est dû principalement aux effets des imperfections géométriques, d'une part, et des imperfections structurales, d'autre part.

Chapitre 5 5-10

Un poteau peut être considéré comme élancé si son élancement est supérieur à celui correspondant au point d'inflexion de la courbe limite inférieure indiqué dans la Figure 5-6. La charge de ruine ultime pour ces poteaux élancés est proche de la charge critique d'Euler (Ncr) et elle est donc indépendante de la limite d'élasticité de

l’acier.

Les poteaux moyennement élancés sont ceux dont le comportement s'écarte le plus de la théorie d'Euler. Lorsque le flambement se produit, certaines fibres ont déjà atteint la limite d’élasticité et la charge ultime n'est pas simplement fonction de l'élancement; plus les imperfections sont nombreuses, plus grande est la différence entre le comportement réel et le comportement théorique.

5.4.2.1 Imperfections géométriques

Parmi les imperfections géométriques, le défaut de rectitude de l'axe du poteau comprimé joue de très loin le plus grand rôle. Un élément comprimé qui présente un défaut de rectitude initial vo(x) est soumis, dès le début de sa mise en charge, à de la flexion composée. Dès l'application d'un effort axial, si faible soit-il, l'amplitude de la déformée initiale augmente en raison du bras de levier offert à l'effort sollicitant, et des moments de flexion qui en résultent. On est ainsi amené à substituer au concept de flambement par bifurcation de l'équilibre celui de flambement par divergence de l'équilibre. L’élément comprimé reste stable aussi longtemps qu'il existe une configuration déformée d'amplitude finie permettant d'assurer l'équilibre entre les efforts intérieurs et les efforts extérieurs.

L'équation fondamentale d'équilibre d'une colonne comprimée à courbure initiale vo(x) s'écrit :

(5-14)

où v(x) désigne la déformée additionnelle prise suite à l'action de l'effort axial N. Si l'on considère une colonne bi-articulée (Lcr = L) pour laquelle on admet une déformée initiale en demi-onde de sinusoïde (cette forme, étant affine au mode fondamental de flambement du poteau, est la plus défavorable), l'intégration de l'équation différentielle ci-dessus fournit la déformée additionnelle :

(5-15)

La déformée finale sous la charge N vaut :

(5-16)

Chapitre 5 5-11

Si l'on remarque que

n'est autre que Ncr, la charge critique d'Euler, la déformée

est maximale à mi-longueur et la flèche s'obtient selon :

(5-17)

Cette section est la plus sollicitée; la sollicitation y est composée de l'effort de

compression N et du moment fléchissant au second ordre

. Le moment

, dit moment primaire parce que évalué par référence à la configuration

initiale de l’élément, est amplifié par le facteur

dit facteur d'amplification.

La flexion a pour effet d'accroître la contrainte de compression du côté concave de la déformée de l’élément. Cette contrainte peut ainsi atteindre d'autant plus rapidement la limite d'élasticité que l'amplitude de la déformée initiale est importante.

Dès qu'une fibre est plastifiée, elle ne possède plus aucune raideur axiale; elle devient dès lors inopérante lors de tout accroissement de l'effort de compression. Tout se passe donc comme si la zone plastifiée de la section ne participait plus à la raideur flexionnelle de la section. On imagine donc aisément que l'effet d'un défaut de rectitude initial sur la capacité portante d'un poteau comprimé sera d'autant plus défavorable que l'amplitude de ce défaut est importante.

5.4.2.2 Imperfections structurales

Les imperfections structurales résident, d'une part, dans la variation de la limite d'élasticité à l'intérieur d'une même section, voire de section à section et, d'autre part, dans les contraintes résiduelles dont l'origine est discutée au chapitre 1.

La dispersion des valeurs mesurées de la limite d'élasticité dans une section donnée résulte du mode d'élaboration du produit, elle est en particulier liée à l'épaisseur des parois constituant la section : pour un acier de nuance donnée, la limite d'élasticité diminue avec l'accroissement de l'épaisseur de la paroi et des écarts de l'ordre de 10 % peuvent être observés. Au niveau des calculs, on néglige ces variations mais on se réfère à une valeur nominale de la limite d'élasticité, qui est aussi une valeur minimale garantie par le producteur.

La principale source d'imperfections structurales réside dans les contraintes résiduelles présentes dans toute section. Celles-ci sont essentiellement d'origine thermique (refroidissement différentiel lors du laminage ou après soudage). Les contraintes résiduelles maximales présentes dans un profilé laminé de type H sont de l'ordre de 140 à 160 MPa. Ces valeurs, qui sont pour ainsi dire indépendantes de la valeur de la limite d'élasticité, sont principalement gouvernées par les dimensions et la configuration de la section transversale, et, accessoirement, par les conditions d'ambiance lors du refroidissement (Figure 5-7a).

L'existence de contraintes résiduelles dans une section - dont, faut-il le rappeler, la distribution est auto-équilibrée - est la cause d'une plastification prématurée dans la mesure où celle-ci survient avant que la contrainte moyenne induite par l'effort

Chapitre 5 5-12

intérieur de compression n'atteigne la limite d'élasticité. Elle a donc pour effet de précipiter le développement de la plastification en section produisant une perte de raideur et qui, par conséquence, accroit le taux de variation de la déformée totale. On comprend ainsi que la réduction de la capacité portante d'un élément comprimé sera d'autant plus grande que la valeur maximale des contraintes résiduelles de compression sera importante (Figure 5-7 b).

Figure 5-7 Schéma des contraintes résiduelles

La combinaison des types d’imperfections est d’autant plus défavorable qu’elle additionne les 2 effets expliqués ci-dessus. Ainsi, un défaut de rectitude initial eo,

provoque un moment fléchissant donnant une contrainte de flexion maximale σB (Figure 5-8 a), qui, lorsqu'elle est ajoutée à la contrainte résiduelle σR donne la

répartition élastique de contraintes indiquée dans la Figure 5-8 b. Si σmax est supérieure à la contrainte limite d'élasticité, la répartition finale sera partiellement plastique et des zones de certaines sections de l'élément subiront une plastification en compression, comme indiqué dans la Figure 5-8 c.

0,3 fcompression

y

0,2 ftraction

y

0,2 fcompression

y

Exemple de contraintes résiduellesprovoquées par le laminage à chaud

Exemple de contraintesrésiduelles provoquées

(a)

N= N/A

+ = ou

fyR

n < fy

n atteignant fy

Combinaison avec contraintes normales

(b)

par le soudage

Chapitre 5 5-13

Figure 5-8 Elément comprimé partiellement plastifié

On peut donc conclure que tant les défauts de rectitude que la présence de contraintes résiduelles affectent le comportement sous charge des poteaux comprimés et ce, dans un sens défavorable. Une description correcte du phénomène de flambement des poteaux réels requiert donc la prise en compte, explicite ou implicite, des non-linéarités tant matérielles que géométriques. Les courbes européennes de flambement, qui constituent l'outil de dimensionnement, ont été établies pour répondre à ces desiderata.

5.4.3 Résistance d’un élément élancé à section constante sous compression centrique

Selon l'Eurocode 3, la résistance de calcul d'un élément comprimé élancé à section constante et soumis à une compression constante centrique s'écrit :

(5-18)

avec : pour les sections pleinement efficaces en compression (classes 1 à 3);

Pour les sections partiellement efficaces en compression (classe 4).

N

N

e

N= N/A

P

P

Zonesplastifiées

(a)

(b)

(c)

e 0

B

BRmax

+ + =

Chapitre 5 5-14

Le coefficient de réduction χ est destiné à tenir compte du fait que la résistance ultime de l’élément est inférieure à celle de la section transversale en raison du

phénomène de flambement. Le facteur γM1 est le coefficient partiel de sécurité qui s'applique à toutes les fonctions de résistance gouvernées par l'instabilité.

Normalement γM1 est pris égal à 1.

La relation ci-dessus régit le flambement par flexion, c'est-à-dire le mode de flambement plan dans un des plans principaux de la section. Elle s'applique en particulier aux sections laminées à chaud doublement symétriques, communément utilisées pour réaliser des barres comprimées (sections ouvertes en I ou en H, sections creuses circulaires ou rectangulaires1).

Pour les éléments comprimés à section transversale constante, sollicités en compression axiale uniforme sur leur longueur et articulés à leurs extrémités, la

valeur du coefficient de réduction χ est fonction de l'élancement réduit :

(5-19)

où :

= paramètre d’imperfection généralisée

(5-20)

La valeur du coefficient χ ne peut excéder l'unité sous peine de voir la résistance de calcul de l’élément dépasser celle de la section.

Les courbes sont connues sous le nom de courbes européennes de flambement. Ces courbes, qui fournissent des valeurs caractéristiques de résistance, sont fondées sur les résultats de plus de 1000 essais réalisés sur divers types d'éléments (I H T ), avec différentes valeurs d'élancement (de 55 à 160). Une

1 Les éléments comprimés à section ouverte et à parois minces, monosymétriques ou ne présentant

aucun axe de symétrie, peuvent flamber par torsion ou par flexion-torsion. Ce mode de flambement n'est pas examiné ici; il reçoit toutefois une attention particulière dans le cadre du cours de Structures à Parois Minces.

Chapitre 5 5-15

approche probabiliste, utilisant la résistance expérimentale, associée à une analyse théorique, permet de dessiner des courbes décrivant la résistance des poteaux en fonction de l'élancement de référence. Une imperfection géométrique demi-sinusoïdale de grandeur égale à 1/1000 de la longueur du poteau, ainsi que l'effet de contraintes résiduelles concernant chaque type de section transversale, sont pris en compte.

L'examen critique des résultats obtenus a révélé que les effets des imperfections sur la résistance ultime des éléments comprimés dépendent de divers facteurs :

la forme de la section transversale (I, H, sections creuses, caissons soudés, ...);

le plan de flambement (flexion autour de l'axe fort ou autour de l'axe faible);

la massivité de la section transversale, mesurée par le rapport hauteur/largeur;

l'épaisseur des parois;

le mode d'élaboration de la barre comprimée (laminage à chaud ou à froid, soudage).

Tous ces facteurs régissent principalement la distribution et l'intensité des contraintes résiduelles et, plus accessoirement, la forme et l'amplitude des défauts de rectitude. Leurs effets sont pris en charge à l'aide d'une valeur appropriée du paramètre

d'imperfection α, qui croît avec l'intensité des imperfections.

Il est également apparu qu'il n'est pas possible, sous peine d'être indûment pénalisant, de couvrir toute la gamme des types de sections à l'aide d'une courbe de flambement unique. Il a donc été décidé de sélectionner quatre courbes de flambement (désignées respectivement par a, b, c et d) représentées à la Figure 5-9

et caractérisées par les valeurs du paramètre α reprises au Tableau 5-2.

Courbe a0 a b c d

α 0,13 0,21 0,34 0,49 0,76

Tableau 5-2 Valeurs du paramètre d'imperfection

Figure 5-9 Courbes européennes de flambement

Chapitre 5 5-16

L'identification de la courbe de flambement à utiliser s'opère à partir d'une table de sélection faisant intervenir les facteurs précités (Tableau 5-3).

Tableau 5-3 Table de sélection des courbes européennes de flambement

Chapitre 5 5-17

On notera que les courbes européennes de flambement n'opèrent aucune réduction

de la résistance en section dans le domaine . Ceci s'explique par le fait que l'écrouissage du matériau, qui fournit un surcroît de résistance, est négligé dans les calculs.

La structure de l'expression analytique des courbes de flambement est déduite d'un modèle physique simple.

Selon celui-ci, la contrainte maximum existant dans la section à mi-hauteur de la colonne comprimée, sous l'effet de l'effort de compression N et du moment du

second ordre

crN

N

oNeIIM

1

, est posée égale à la limite d'élasticité du matériau

lorsque l'effort de compression atteint sa valeur ultime NK. On a ainsi :

*

(1 )A

N N eoK K fyNKA WNcr

où W désigne le module de flexion élastique pour le plan de flambement considéré. Ce faisant, on utilise un critère strictement élastique; toutefois, la plastification partielle qui peut exister dans la section lorsqu'on atteint la charge ultime est implicitement prise en compte ultérieurement par une calibration appropriée (voir ci-après).

Il est facile de voir que la relation ci-dessus peut s'écrire sous la forme d'Ayrton-Perry :

( )( )1 12

avec l'imperfection généralisée :

e A

Wo A

ou, ce qui est équivalent :

)v/i(

où i/v est le diamètre relatif à l'ellipse d'inertie de la section efficace en

compression pour la direction de flambement considérée et un coefficient représentant la fraction de la longueur de flambement de la barre adoptée comme flèche initiale :

eo L /

Les courbes européennes de flambement peuvent être représentées de manière très satisfaisante à condition d'adopter une imperfection généralisée de type :

),( 20

et de calibrer de manière à ajuster au mieux les valeurs tirées de la relation d'Ayrton-Perry déduites aux valeurs expérimentales (essais en simulation numérique). On prend ainsi implicitement en compte la plastification dans la section.

Chapitre 5 5-18

Aux fins de vérification, l'expression analytique des courbes européennes de

flambement est fournie sous forme de )(f qui n'est autre que (5-19).

5.4.4 Détermination des longueurs de flambement

L’hypothèse d’éléments articulés à leurs extrémités, sans restreinte par des moments fléchissants, est rare en pratique. Le plus souvent, de telles restreintes existent et les points d’inflexion de la déformée se situent ailleurs qu’aux extrémités de l’élément, de sorte que la longueur de celui-ci ne s’identifie plus à la longueur de flambement. On définit alors celle-ci comme la distance séparant deux points d’inflexion consécutifs de la déformée de flambement, réels ou imaginaires, dans le plan de flambement considéré. Il n’en reste pas moins que l’évaluation du degré de restreinte procuré à une colonne par les membrures qui la contreventent, par la présence de remplissages, par les fondations ou tout simplement par la complète interaction entre tous les éléments d’une structure reste une affaire délicate, voire difficile. C’est pourquoi on en est le plus souvent réduit à utiliser des règles simples résultant de la conjonction d’un souci de sécurité et d’une certaine expérience.

La longueur de flambement d'une colonne comprimée à section constante et soumise à compression constante centrique, dont les extrémités sont maintenues latéralement en position de manière effective (structure à nœuds fixes), peut être prise égale à la longueur d'épure L de l’élément. La longueur d'épure n'est rien d'autre que la distance entre deux points consécutifs de l’élément dont le déplacement latéral dans un plan donné est empêché, ou entre un tel point et l'extrémité de l'élément.

Ce faisant, le concepteur prend une attitude sécuritaire puisqu'il néglige tout effet de restreinte flexionnelle existant aux extrémités de la longueur d'épure. De telles restreintes existent toujours dans une certaine mesure puisqu’elles sont dues à la présence du reste de la structure. Elles ne savent avoir qu'un effet favorable, c'est-à-dire fournir un coefficient de longueur de flambement inférieur à l'unité.

Pour les ossatures à mailles rectangulaires et à nœuds rigides, on peut en tenir compte de manière approchée en déterminant K à partir de l'abaque de la Figure 5-10.

Chapitre 5 5-19

Figure 5-10 Valeurs de K pour les ossatures à nœuds fixes

Lorsque les extrémités d'une colonne ne sont pas maintenues latéralement en position de manière effective (structure à nœuds déplaçables), le comportement d'une colonne est plus complexe car la déformée de la colonne offre un bras de levier à l'effort de compression, ce qui fait naître une flexion additionnelle de second ordre dite effet P-Δ, Δ représentant le déplacement latéral relatif des extrémités de la colonne.

On peut alors vérifier la résistance d'une colonne de deux manières :

a) soit en déterminant les efforts réels au second ordre (effort normal et moment de flexion) et en vérifiant la colonne au flambement avec une longueur de flambement déterminée comme si la colonne était à nœuds fixes;

b) soit en considérant la seule compression, et négligeant ainsi le moment P-Δ, mais en déterminant la longueur de flambement de la colonne à nœuds mobiles en translation, ce qui revient à pénaliser la longueur de flambement.

Dans le premier cas, on fait donc usage de l'abaque de la Figure 5-10, dans le second cas, on se référera à l'abaque de la Figure 5-11.

Chapitre 5 5-20

Figure 5-11 Valeurs de K pour les ossatures à nœuds déplaçables

On notera que pour une colonne à nœuds fixes, le coefficient de longueur de flambement est compris entre 0,5 et 1 tandis que pour une colonne à nœuds mobiles, il se situe entre 2 et l'infini.

Il est clair que les abaques des Figure 5-10 et Figure 5-11 ne peuvent avoir été établis qu'en faisant un certain nombre d'hypothèses simplificatrices, en principe sécuritaires. En particulier :

a) le comportement de toutes les barres est indéfiniment élastique;

b) les barres sont supposées prismatiques;

c) toutes les colonnes de l'ossature atteignent leur charge de flambement simultanément;

d) si le déplacement latéral est empêché, on admet que les rotations aux extrémités des poutres sont égales mais opposées (courbure simple). Si le déplacement latéral est permis, les dites rotations sont supposées égales et de même signe (courbure double);

e) tous les nœuds sont rigides de sorte que la distribution des moments en un nœud se fait au prorata des raideurs des éléments assemblés;

f) les poutres ne sont pas soumises à des charges axiales significatives;

g) les cadres sont à géométrie et à chargement vertical symétriques, avec les éléments constitutifs disposés orthogonalement.

Dans ces conditions, il devient possible d'analyser le comportement d'une colonne donnée en considérant la sous-structure composée de cette colonne et de son

Chapitre 5 5-21

environnement immédiat, c'est-à-dire des seuls éléments - poutres et colonnes - qui lui sont connectés à ses deux extrémités.

On entre dans les abaques précédents à l'aide de coefficients d'encastrement ks et ki, respectivement au nœud supérieur et au nœud inférieur de la colonne, déterminés selon :

(5-21)

ou mieux encore, pour tenir compte de la continuité de la colonne au-delà de ses extrémités :

(5-22)

où Rc est la raideur de la colonne dont on cherche la longueur de flambement. Rs et Ri représentent les raideurs des colonnes prolongeant respectivement la colonne

considérée vers le haut (s) et vers le bas (i), tandis que et désignent

respectivement la somme des raideurs des poutres connectées. soit au sommet de la colonne, soit en base de celle-ci (Figure 5-12).

Figure 5-12 Modèle pour le calcul de ki et ks

Les raideurs des poutres Rp et les raideurs des colonnes Rs, Rc et Ri sont définies comme suit :

(5-23)

Chapitre 5 5-22

où ξ est un facteur dépendant de la forme de la déformée de cette poutre, ou plus précisément du rapport des rotations ϕ1 et ϕ2 des extrémités 1 et 2 de la poutre, comptées positivement dans le sens horlogique. Il vaut :

simple courbure : ϕ2 / ϕ1 = -1, ξ = 2 (cas des poutres des portiques à nœuds fixes);

double courbure : ϕ2 / ϕ1 = 1, ξ = 6 (cas des poutres des portiques à nœuds mobiles);

empêchement de rotation à l'extrémité : ϕ1 = 0, ξ = 4;

rotation libre à l'extrémité : ϕ2 / ϕ1 = -0.5, ξ = 3;

cas général :

(5-24)

Lorsque la colonne considérée a une extrémité encastrée dans une fondation ou une dalle de très grande raideur, il suffit d'assimiler cet encastrement à des poutres de raideur infinie, donc et le coefficient k à cette extrémité vaut k = 0. Au

contraire, si une extrémité est articulée, cette rotule est assimilée à une liaison à des poutres de raideur nulle, donc et le coefficient d'encastrement à cette

extrémité vaut k = 1.

Lorsque les poutres sont soumises à des efforts axiaux N superposant leurs effets à ceux de la flexion primaire, il en résulte une flexion secondaire qui a pour effet de modifier la valeur des angles de rotation aux extrémités des poutres. En d'autres termes, les efforts normaux affectent la rigidité effective des poutres. Celui-ci peut être déterminé à partir du concept complexe des fonctions de stabilité. A des fins pratiques, il est préférable de recourir à une alternative simple, consistant à :

a) négliger le gain de rigidité dû à la traction axiale;

b) prendre en compte la perte de rigidité due à la compression axiale à l'aide

d'approximations sécuritaires en multipliant le facteur ξ introduit plus haut par un coefficient de pénalisation approprié tiré du Tableau 5-4.

Chapitre 5 5-23

Condition de maintien en rotation à l’extrémité opposée de la poutre

Coefficient de pénalisation de la rigidité de la poutre en présence d’un effort axial de calcul NEd

Encastrée

Articulée

Simple courbure

Double courbure

Cas général

Tableau 5-4 Coefficient de pénalisation

Plutôt que de recourir aux abaques, on peut calculer en fonction de ks et ki

à partir des formules approchées suivantes :

colonne à nœuds fixes2 :

(5-25)

colonne à nœuds mobiles :

(5-26)

On remarquera l'importance du déplacement latéral dans le calcul des longueurs de flambement. Il est donc crucial de déterminer quand les extrémités d'un poteau peuvent ou non se déplacer latéralement. Lorsque la stabilité latérale d'une

2 Une formule alternative pour le cas de la colonne à nœuds fixes est la suivante :

Chapitre 5 5-24

charpente est totalement ou en grande partie assurée par un système structural adéquat de résistance aux charges horizontales (par exemple : murs de refend ou contreventements en treillis), on pourrait considérer que l'on a affaire à une charpente contreventée dont le déplacement latéral est nul, à condition toutefois que les charges horizontales ainsi que les charges du deuxième ordre (charges de stabilité) soient entièrement reprises par le système de contreventement.

Une distinction aussi nette est boiteuse dans la mesure où des études ont montré que les bâtiments à murs de refend ou à contreventements subissent parfois des déplacements latéraux appréciables. Il importe donc de définir un critère permettant de faire la distinction entre portiques à nœuds latéralement déplaçables et ceux à nœuds non latéralement déplaçables. Ce problème sera abordé ultérieurement.

Pour les pièces à moment d'inertie variable et les pièces chargées axialement en divers points de leur axe, on peut adopter une longueur moindre à condition de la justifier par la théorie de la stabilité élastique.

Si le moment de calcul excède le moment de résistance élastique dans l'une ou l'autre section d'une ou plusieurs des poutres se connectant aux extrémités de la colonne considérée, on admettra qu'une rotule plastique existe dans cette(ces) section(s) et qu'une articulation est présente au niveau de cette(ces) section(s). Par ailleurs, si une poutre possède des assemblages semi-rigides à ses extrémités, sa rigidité effective doit être réduite en conséquence.

On peut ramener le calcul au flambement d'une colonne à section non uniforme à celui d'une colonne de section constante, sous conditions similaires de chargement et d’appuis d’extrémité par la détermination d'une longueur de flambement équivalente.

De même, on peut ramener le calcul au flambement d'une colonne soumise à compression non uniforme à celui d'une colonne, par ailleurs similaire, soumise à compression uniforme par la détermination d'une longueur de flambement équivalente.

Ces deux derniers points seront développés au paragraphe 5.8.

En d'autres termes, les effets d'une section/d'une compression non uniforme se trouvent reportés sur la valeur de la longueur de flambement.

5.5 Vérifications aux E.L.U.

Considérons un poteau de section A et longueur L soumis à un effort axial N de compression. La procédure de vérification est la suivante :

compte tenu des conditions d'appui aux extrémités, on détermine la longueur de flambement dans chacun des deux plans principaux d'inertie, soient et

où K1 et K2 sont les coefficients de longueur de flambement;

Chapitre 5 5-25

on calcule les élancements réduits et à partir des efforts critiques d’Euler Ncr,1 et Ncr,2 et de la résistance en section de l’élément qui dépend de la limite d’élasticité fy du matériau ;

on détermine, à partir de la table de sélection, les courbes de flambement qui sont respectivement d'application pour le flambement suivant les deux plans;

on calcule, à partir de valeurs tabulées, ou mieux, des expressions analytiques

des courbes de flambement, les valeurs des coefficients de réduction χ1 et χ2 ,

associés aux élancements réduits et ;

on sélectionne la plus petite valeur χmin = minimum (χ1 , χ2) et on vérifie que la résistance ultime au flambement Nb.Rd satisfait l'inégalité :

(5-27)

où NEd est l'effort de compression sollicitant de calcul et βA un coefficient d'efficacité

de la section à l'effort normal .

On notera que le coefficient de réduction minimum ne correspond pas nécessairement au moment d'inertie minimum parce que, d'une part, les longueurs de flambement dans les deux plans peuvent être différentes en raison de conditions d'appui spécifiques et que, d'autre part, des courbes de flambement différentes régissent généralement le comportement de la pièce comprimée dans ces deux plans.

Si, plutôt que d'un problème de vérification, il importe à proprement parler de dimensionner une colonne destinée à transmettre un effort de compression NEd déterminé, il faut d'abord choisir un type de profil. L'économie commanderait

d'essayer d'atteindre χ1 = χ2 puisque, dans ce cas, on a la même sécurité au flambement dans les deux plans principaux d'inertie. On choisit ensuite un profil dont la section A est comprise entre et , ce qui situe l'élancement λ

sensiblement entre 80 et 200. On se trouve alors ramené au problème de vérification exposé plus haut. Si le profil choisi ne convient pas, il y a lieu de modifier la section et/ou l'inertie dans le sens convenable et de recommencer les calculs jusqu'à obtenir satisfaction. Le dimensionnement d'une barre comprimée procède donc par tâtonnements et le processus est d'autant plus rapide que l'expérience du calculateur est grande.

Dans les sections éventuellement déforcées de la barre, il importe évidemment d'y vérifier en outre la condition de résistance en section :

(5-28)

Chapitre 5 5-26

mais, normalement, cette condition est rarement déterminante en pratique.

5.6 Vérifications aux E.L.S.

Selon l'Eurocode 3, aucune condition explicite n'est requise qui viserait à la vérification aux états limites de service.

Cela peut paraître paradoxal dans la mesure où les éléments comprimés, et en particulier les poteaux, prendront, sous charge de service, une déformée transversale qui ne sera jamais qu'une amplification de la déformée initiale due aux imperfections géométriques.

Bien que cela ne soit pas expressément requis, il est néanmoins recommandé de limiter l'élancement λ des éléments comprimés aux valeurs suivantes :

250: pour les contreventements et éléments secondaires; 200 : pour les pièces isolées exposées au vent; 200 : pour les éléments porteurs principaux; 160 : pour les éléments sollicités en fatigue.

5.7 Forme des barres comprimées

Actuellement, les barres comprimées sont réalisées à partir de sections laminées à chaud ou formées à froid. Dans le choix de la section, il importe de concilier les exigences concernant la forme optimum des barres, à savoir obtenir un coefficient de réduction au flambement aussi grand que possible dans les deux plans principaux, ce qui revient à tenter de minimiser l'élancement dans ces mêmes plans. Assez souvent, compte tenu des conditions d'appui, on essaie d'avoir les mêmes caractéristiques selon les deux plans principaux.

La Figure 5-13 montre une série de sections transversales fort utilisées pour réaliser des barres comprimées. Pour des charpentes légères, on emploie généralement des profilés laminés uniques ou associés (cornières, fers U) tandis que les charpentes de moyenne importance font appel à des profils renforcés et à des sections composées, de manière à obtenir des rayons de giration aussi grands que possible. Quant aux barres comprimées des charpentes lourdes (halls d'usine, ponts, ...), elles sont ordinairement composées de plats et de profils soudés les uns aux autres.

Il faut remarquer que les sections ouvertes à parois minces n'ont qu'une très faible résistance à la torsion et que dès lors, il importe de les vérifier au flambement par flexion et torsion. Par ailleurs les parois minces peuvent voiler prématurément avant que la charge ultime de flambement ne soit atteinte. Il faudra donc soit les raidir, soit ne prendre en compte qu'une certaine largeur effective pour le calcul des caractéristiques géométriques de la section transversale.

Chapitre 5 5-27

Figure 5-13 Section transversale des principaux types de membrures comprimées

5.8 Pièces comprimées à section variable

Dans les halles industrielles, nous distinguons principalement deux types de pièces comprimées à section variable:

ceux dont la hauteur d’âme varie très significativement, mais de manière continue, sur la hauteur du poteau tandis que les semelles conservent des propriétés quasi constantes (Figure 5-14.a);

ceux qui sont constitués de tronçons dont les propriétés sont sensiblement constantes par tronçon mais varient significativement de tronçon à tronçon (Figure 5-14.b).

raidisseurs

( c ) CHARPENTE LOURDE

( b ) CHARPENTE MOYENNE

Barre en treillis

Barre étrésillonnée ou diaphagmée

Barres creuses composées soudéesBarres creuses

laminées

Laminés ou composés

( a ) CHARPENTE LEGERE

Barres composées

Laminés Profils en tôle pliée

Chapitre 5 5-28

Figure 5-14 Poteaux à moment d'inertie variable

Le premier type de poteau se rencontre fréquemment dans les halles industrielles réalisées à partir de sections reconstituées par soudage. La base de telles pièces comprimées est normalement admise articulée de sorte qu’il n’y existe qu’un effort normal. La tête du poteau est en principe assemblée rigidement à la ferme et est de ce fait soumise à effort normal et moment de flexion. Si la hauteur d’âme du montant et donc sa section et son inertie sont adaptées à la variation des efforts à transmettre, on obtient une forme pratique de poteau qui présente une variation linéaire de la hauteur d’âme.

Le second type de poteau convient particulièrement lorsque, outre la charge reportée par la traverse en tête du poteau, il faut transmettre une charge axiale significative à un certain niveau de la hauteur du poteau. Ce cas se rencontre fréquemment dans les pièces comprimées supportant une poutre de roulement pour pont-roulant de forte capacité de levage. Un tel poteau est assez souvent conçu comme encastré à sa base et libre en tête. Nous pouvons toutefois rencontrer des situations où les deux extrémités sont assimilées à des articulations. Le poteau est donc soumis à des efforts essentiellement axiaux dont l’intensité varie brusquement par tronçons.

Nous ne pouvons traiter du flambement de l’ensemble des pièces comprimées à section variable que l’on peut rencontrer, tant il est possible d’imaginer de dispositions pratiques différentes. Nous nous bornons donc à examiner les deux seuls cas évoqués plus haut.

5.8.1 Charge critique de flambement élastique d’un poteau à moment d’inertie continûment variable et chargé en bout

Nous considérons un poteau constitué d’une âme et de deux semelles et en examinons le flambement d’axe fort, c’est-à-dire dans le plan de l’âme. Nous admettons donc implicitement que le flambement du poteau dans le plan perpendiculaire à son âme est empêché par des dispositions constructives appropriées.

(a) continûment (b) par tronçons

Chapitre 5 5-29

Figure 5-15 Poteaux à moment d'inertie continûment variable

En toute généralité, le moment d’inertie de la section transversale du poteau varie proportionnellement à une certaine puissance de sa distance à un point fixe O (Figure 5-15.a). Ce moment d’inertie d’une section courante, située à une abscisse x de ce point fixe, peut s’exprimer selon:

(5-29)

où Imin désigne le moment d’inertie minimal (x=a) et n est un facteur qui dépend de la manière dont le moment d’inertie d’axe fort I évolue le long du montant. La valeur n=2 représente avec une exactitude suffisante le cas d’un poteau constitué de semelles de section constante et réunies par une âme de hauteur linéairement variable selon l’abscisse x. Pour s’en convaincre, il suffit en effet de remarquer que le moment d’inertie est dû principalement aux deux semelles dont l’inertie propre est par ailleurs négligée devant le terme de transport.

Le flambement d’un poteau bi-articulé de longueur L, de moment d’inertie variable paraboliquement (n=2) sur sa longueur et chargé en bout peut être ramené à celui d’un poteau prismatique de même longueur ayant un moment d’inertie, dit équivalent, constant sur cette longueur. Ce moment d’inertie équivalent Iequ vaut :

(5-30)

L1

L1

P PP

P PP

Imin Imin

IminImin

I max

I max

I max

I max

I max

La

O

x

(a) (b) ( )c

Chapitre 5 5-30

C est un coefficient, donné en fonction d’un paramètre auxiliaire r :

(5-31)

selon :

(5-32)

Si le poteau comporte en outre un tronçon d’extrémité de longueur L1 à moment d’inertie constant Imax (Figure 5-15.b), le coefficient C devient :

(5-33)

Dans le cas d’un poteau symétrique possédant un tronçon central à moment d’inertie constant Imax adjacent à deux tronçons d’extrémité à moment d’inertie variant paraboliquement de Imax à Imin (Figure 5-15.c), le coefficient C s’écrit :

(5-34)

Ces diverses expressions de C, C1 et C2 sont bien sûr des approximations; elles sont soumises à la condition que L1 < 05 L. On adopte C (ou C1 , C2)=1 pour L1 > 0,8 L et on utilise une interpolation linéaire entre les valeurs de C (ou C1 , C2) relatives respectivement à L1 = 0,5 L et L1 = 0,8 L dans le cas où L1 est compris entre ces limites.

Les expressions du coefficient C et de ses formes C1 et C2 reposent sur le concept d’élancement équivalent. Elles sont tirées de l’égalité des charges critiques élastiques de flambement respectives du poteau réel, d’une part, et du poteau de substitution à moment d’inertie constant Iequ, d’autre part. En d’autres termes, nous calculons l’élancement du poteau en considérant le rayon de giration:

(5-35)

où est la section moyenne de la barre ou, mieux, l’aire de la section transversale correspondant à Iequ .

La détermination de la charge critique de flambement élastique est alors immédiate:

(5-36)

Chapitre 5 5-31

5.8.2 Charge critique de flambement élastique d’un poteau à moment d’inertie variable par tronçons et chargé en bout

Il n’est pas possible de traiter ici l’ensemble des cas possibles. Nous nous limiterons à traiter le cas du poteau comportant seulement deux tronçons, qui est, de loin, le plus fréquemment rencontré en pratique. Le moment d’inertie est constant sur chaque tronçon mais varie brusquement lorsqu’on passe d’un tronçon au suivant, l’axe longitudinal ne subissant toutefois aucune discontinuité à l’interface des tronçons (Figure 5-16). La recherche de la charge critique de flambement d’un tel montant s’effectue généralement par la méthode de l’énergie, qui, en l’espèce, est longue et assez fastidieuse. Elle est grandement facilitée en pratique par l’usage

d’abaques déduits des résultats d’une telle étude. Ils fournissent un facteur ρ tel que la charge critique de flambement élastique, calculée ici par référence au moment d’inertie maximal, est donnée selon:

(5-37)

où n = 1 si le poteau est articulé (Figure 5-16.a,b) et n = 2 si le poteau est encastré-libre (Figure 5-16.c).

Figure 5-16 Poteaux à moment d'inertie variable par tronçons

I1 I1 I1

I1

I2

I2

I2

P P P

P P

L1

L1

L1

L1

L2

L2

2 L

2

LL L

(a) Bi-articulé non symétrique

(b) Bi-articulé symétrique

Encastré libre( ) c

Chapitre 5 5-32

Le facteur sans dimension ρ dépend des rapports et . Il est tel

que:

(5-38)

Il traduit donc l’influence, sur la longueur de flambement d’une pièce de référence à moment d’inertie constant Imax, de la variation brusque d’inertie de Imax à Imin et des longueurs sur lesquelles ces moments d’inertie existent respectivement. Comme la pièce réelle comporte un tronçon d’inertie moindre que Imax , la longueur de

flambement Lcr est donc supérieure à nL, ce qui entraîne ρ < 1.

Les abaques de la Figure 5-17 fournissent les valeurs de ρ pour le cas d’un montant constitué de deux tronçons - bi-articulé ou encastré-libre - chargé en bout.

Chapitre 5 5-33

Figure 5-17 Abaques de pour poteaux à moment d'inertie variable par tronçons et chargés en bout

1.0

0.8

0.6

0.4

0.2

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5 0.6 0.7 0.8

L / nL1

I1I2

= 1.0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

(a) Biarticulé non symétrique

1.0

0.8

0.6

0.4

0.2

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

L / nL1

I1I2

= 1.0

0.1

0.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

2

(b) I > I Biarticulé symétrique ou encastré libre12

1.0

0.8

0.6

0.4

0.2

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

L / nL1

I1I2

= 1.0

0.10.2

0.3

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

0.9

1

( > I Biarticulé symétrique ou encastré libre21c) I

Chapitre 5 5-34

Pour les divers cas examinés, la charge critique de flambement élastique se détermine comme suit:

Cas du poteau bi-articulé non symétrique (Figure 5-16.a)

(5-39)

où I2 = Imax et ρ est donné par l’abaque de la Figure 5-17.a.

Cas du poteau bi-articulé symétrique (Figure 5-16.b)

Nous devons ici distinguer le cas où le grand moment d’inertie se trouve dans le tronçon central de celui où il se trouve dans les deux tronçons d’extrémité:

a) I2 ( = Imax) > I1

(5-40)

avec ρ2 donné, pour n =1, par l’abaque de la Figure 5-17.b.

b) I1 ( = Imax) > I2

(5-41)

avec ρ1 donné, pour n = 1, par l’abaque de la Figure 5-17.c.

Cas du montant encastré-libre (Figure 5-16.c)

Ici encore, nous devons considérer deux cas selon que le grand moment d’inertie est adjacent à l’encastrement ou à l’extrémité libre. Ce cas est une application directe du cas précédent à condition d’utiliser l’abscisse L1 / 2L.

a) I2 ( = Imax) > I1

(5-42)

b) I1 ( = Imax) > I2

(5-43)

avec ρ1 et ρ2 donnés respectivement, pour n = 2, par les abaques des Figure 5-17.b et c.

Chapitre 5 5-35

5.8.3 Charge critique de flambement élastique d’un poteau à moment d’inertie variable par tronçons et soumis à des forces concentrées appliquées en des points différents

Le poteau à moment d’inertie variable par tronçons est, ainsi que nous l’avons déjà dit, particulièrement bien adapté pour transmettre un effort axial plus important en base qu’en tête, l’effort différentiel étant normalement appliqué dans la section où le moment d’inertie du poteau change brusquement (Figure 5-18).

Pour traiter ce problème, nous transformons l’effet d’une variation d’effort normal entre les extrémités du poteau en une modification de la longueur de flambement. Cependant la longueur de flambement se trouve ici affectée à un double titre: en raison de la variation du moment d’inertie, d’une part, et de la variation de l’intensité de l’effort normal, d’autre part. Nous obtenons une approche simple pour la solution de ce problème en remarquant que l’équation différentielle de la déformée d’un tronçon quelconque i du poteau ne fait intervenir que le quotient Pi /EIi entre l’effort normal dans le tronçon i et la rigidité flexionnelle EIi de ce tronçon. Il en résulte que la déformée de flambement et, par conséquent, la charge critique de flambement élastique ne se trouvent pas modifiées si l’on change les quantités Pi et Ii à condition toutefois de conserver leur quotient constant. Nous profitons dès lors de cette remarque pour substituer au poteau à étudier (Figure 5-18.a) un montant prismatique à moment d’inertie constant égal à I1 et chargé de forces Qi telles que l’effort normal P’i dans le poteau de substitution (Figure 5-18.b) satisfasse, dans chaque tronçon, la relation de proportionnalité suivante:

(5-44)

Il est facile d’établir que, dans le cas d’un poteau à deux tronçons seulement, les valeurs à donner aux efforts Q1 et Q2 pour satisfaire cette condition sont:

(5-45)

Chapitre 5 5-36

Figure 5-18 Poteaux à moment d'inertie et effort axial variables

Le problème du flambement élastique d’un poteau prismatique symétrique bi-articulé à moment d’inertie constant I = I1 - nous noterons que le poteau encastré-libre est la moitié du poteau étudié-, chargé de plusieurs forces axiales concentrées peut, à son

I1I1

I1

(a) Réel (b) 1ère substitution (c) 2ème substitution

I1

I2

P

P

P

L1

L2

L

1

2 Q2

Q2 = P1Q1 = P1

I *

P* P1

Montant encastré-libre et effort normal variable

(a) Réel (b) Substitution

Montant bi-articulé symétrique

I1 I1I1

I1I1

I1

I1

I2

L1

L1

2 L

2

L

P1 P

1

Q 2

P1

P2

P1

P1

Q2

P1

P2

I*

Chapitre 5 5-37

tour, se ramener à celui d’un poteau de substitution (Figure 5-18.c) à moment d’inertie variable par tronçons mais chargé en bout. Cette équivalence postule:

(5-46)

d’où :

(5-47)

Nous constatons donc que l’on pourra évaluer la charge critique de flambement élastique du poteau étudié de la Figure 5-18.b selon :

(5-48)

avec n = 1 pour le poteau bi-articulé symétrique et n = 2 pour le poteau encastré-libre.

En principe, les abaques des Figure 5-17.b et c s’appliquent donc directement au problème de la Figure 5-18.a. Nous observons cependant que la procédure peut conduire à ce que certains tronçons du montant de substitution soient soumis à des efforts de traction. Il faut, pour ces cas, construire de nouveaux abaques. Ceci a pour effet de multiplier les cas possibles. Pour faciliter les applications, nous avons reproduit les abaques utiles, en y indiquant les nouveaux paramètres à utiliser.

Cas P1 > 0 et Q2 > 0

(5-49)

avec 1 donné par l’abaque de la Figure 5-19.a.

Cas P1 > 0 et Q2 < 0 avec P1 > Q2

(5-50)

avec ρ2 donné par l’abaque de la Figure 5-19.b.

Cas P1 < 0 et Q2 > 0 avec P1<Q2

(5-51)

avec ρ3 donné par l’abaque de la Figure 5-19.c.

Chapitre 5 5-38

Cas P1 > 0 et Q2 < 0 avec P1 < Q2|

(5-52)

avec 4 donné par l’abaque de la Figure 5-19.d.

Cas P1 = 0 et Q2 = 0

(5-53)

La procédure décrite ci-dessus, fondée sur le principe de pièces comprimées de substitution, peut être généralisée au cas du poteau à plus de deux tronçons.

Un éventail plus complet d’abaques relatifs à des conditions d’appui autres que celles examinées ici peut être trouvé dans la littérature3

Vérification de la résistance d’un poteau à section variable

La vérification d’un poteau à section variable comporte, comme pour un poteau à propriétés constantes en long :

la vérification de la résistance en section;

la vérification de la résistance du montant à la compression ou à la combinaison de flexion et compression.

La résistance en section ne pose pas de difficulté particulière. La variation de la section/l’inertie sur la longueur de l’élément structural a pour seul effet d’accroître le nombre de sections dans lesquelles une vérification est nécessaire.

3 Petersen Ch., Statik und Stabilität der Baukonstruktionen, F. Vieweg und Sohn, Braunschweig/

Wiesbaden, 1982. Pluger A., Stabilitätsprobleme der Elastostatik (Dritte Auflage), Springer-Verlag, Berlin, 1975.

Chapitre 5 5-39

Figure 5-19 Abaques de ρ pour poteaux à moment d'inertie et effort axial variables par tronçons

Quant à la résistance du poteau, elle doit incorporer les instabilités potentielles, à savoir le flambement, en raison de la compression axiale, et éventuellement le déversement si l’élément est fléchi en plus d’être comprimé. La variation de la section/l’inertie soulève principalement le problème de l’interprétation des coefficients d’élancement gouvernant les phénomènes d’instabilité précités. On verra au chapitre 6 la manière d’évaluer le coefficient d’élancement servant au calcul de la résistance ultime au déversement. Quant au flambement, nous disposons de l’expression appropriée de la charge critique de flambement élastique (voir plus haut). La question se pose de savoir quelle valeur de charge plastique Npl utiliser dans la relation exprimant le coefficient d’élancement au flambement, à savoir:

1.0

0.8

0.6

0.4

0.2

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

1

1 2P > 0 Q > 0(a)

L / nL2

V P /(P + P ) =1 1 2 0.9

0.8

0.7

0.6

0.5

0.4

0.3

0.2

0.1

1.0

0.8

0.6

0.4

0.2

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

2

L / nL1

1 2P > 0 Q < 0 I P I > I Q I (b) 1 2

V (P + P ) / P =11 20.9

0.1

0.30.2

0.4

0.5

0.6

0.7

0.8

- 20

- 16

- 12

- 8

- 4

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

3

L / nL2

1 2P < 0 Q > 0 I P I< I Q I© 1 2

0.2

0.4

0.6

0.8

1.0

1.2

1.4

1.6

1.8

= V - P /(P + P ) 1 1 22.0- 5

- 4

- 3

- 2

- 1

0

0 0.1 0.2 0.3 0.4 0.5

4

L / nL1

1 2P > 0 Q < 0 I P I < I Q I(d) 1 2

1.8

1.6

1.4

1.2

1.0

0.8

0.6

0.4

0.2

V- (P + P ) / P 11 2=2.0

Chapitre 5 5-40

(5-54)

Pour un montant à inertie continûment variable du type étudié et chargé en bout, nous pouvons adopter la charge plastique de la section soumise à la contrainte la plus élevée. Il s’agit de toute évidence de la section d’extrémité ayant l’inertie et l’aire minimales. Pour un montant à inertie variable par tronçons et chargé en bout ou par des forces concentrées appliquées entre les extrémités, nous procédons de façon similaire : il est clair que, dans ce cas, la section déterminante pour la valeur de Npl peut être une section intermédiaire.

Moyennant ces ajustements, la vérification de la résistance au flambement ou à la combinaison de flexion et compression se conduit à l’aide des formules de dimensionnement et selon les principes généraux déjà exposés.

5.9 Eléments comprimés des poutres à treillis et contreventements triangulés

Les structures triangulées, telles que poutres à treillis et contreventements triangulés, soumises à des charges de nature essentiellement statique, peuvent être analysées en supposant que les extrémités des barres constitutives sont nominalement articulées.

Dans une poutre en treillis, les axes théoriques admis pour les calculs doivent correspondre aux axes effectifs. On essayera, dans la mesure du possible, que les axes des barres aboutissant en un même nœud convergent en un même point. Des barres excentriques par rapport au plan du treillis ne peuvent en principe être utilisées que pour des poutres triangulées secondaires. Il y aura lieu de tenir compte des excentricités éventuelles pour le calcul de stabilité.

Dès lors, le calcul des barres des structures triangulées chargées statiquement s'effectue conformément aux règles régissant les pièces simplement comprimées ou les pièces comprimées et fléchies. Normalement, si la conception est saine au point d'éviter des excentrements significatifs, le calcul au flambement est conduit en négligeant les moments secondaires et en utilisant des valeurs forfaitaires pour les longueurs de flambement.

En cas de mises en charge répétées induisant un danger de fatigue, il importe d'évaluer l'amplitude de variation des contraintes. Il y a alors lieu de serrer la réalité de plus près et d'évaluer efforts normaux et moments de flexion.

5.9.1 Membrures

Pour le flambement dans le plan du treillis, la longueur de flambement Lfl des éléments de membrure est prise forfaitairement égale à la longueur d'épure L, c'est-à-dire la longueur théorique des barres de nœud à nœud. Donc K = 1.

Pour le flambement hors du plan du treillis, la longueur de flambement Lfl des éléments de membrure est égale à la distance théorique entre nœuds consécutifs constituant des appuis efficaces vis-à-vis du flambement considéré. Donc K = 1.

Chapitre 5 5-41

Pour une membrure AB (Figure 5-20), contreventée en A et B, et supportant un effort axial F1 entre A et C et F2 entre C et B (C étant un nœud du treillis plan), la longueur de flambement est prise égale à :

(5-55)

où F2 < F1.

Figure 5-20 Membrure avec effort axial variable

Pour les membrures non contreventées à chaque nœud, il y a lieu de tenir compte du flambement en masse de ces membrures (Figure 5-21). Dans un tel cas, la longueur de flambement pour le flambement hors plan est supérieure à la distance entre nœuds. On peut évaluer la valeur de K en se basant sur le modèle d'une barre comprimée reposant sur une fondation élastique.

Figure 5-21 Flambement d'une membrure non contreventée en chacun de ses nœuds

En faisant les hypothèses simplificatrices suivantes :

l'effort de compression N et la rigidité EI de la barre sont constants le long de la barre;

les appuis d'extrémité sont des appuis à rotule;

LL

F2F1

A C B

a aB

BA

A

membrure comprimée

y

N

EI : constante

LK

VN

x

entretoise

f

F=1 F=1

f

Chapitre 5 5-42

la barre repose sur un milieu uniformément élastique (et non sur un nombre fini de supports élastiques),

on peut aisément établir l'équation différentielle du phénomène :

(5-56)

où v(x) est la déformée transversale de la membrure, la constante de ressort et

donc

la force de rappel.

En adoptant, pour la barre comprimée sur fondation élastique, une déformée de flambement de type :

(5-57)

où Lk est la demi-longueur d'onde de la déformée de flambement, on trouve l'expression de la charge critique :

(5-58)

La valeur de Lk doit minimiser Ncr. De la condition de minimum dNcr / dLk = 0, on tire:

(5-59)

d'où, après substitution dans l'expression de la charge critique :

(5-60)

En égalant cette expression à celle de la charge critique d'Euler d'une barre bi-

articulée de longueur de flambement Lcr, à savoir

, on obtient :

(5-61)

où n'est autre que le déplacement que subirait un appui intermédiaire sous l'effet d'une force transversale H = 1.

Chapitre 5 5-43

5.9.2 Barres intérieures

Pour le flambement dans le plan du treillis, la longueur de flambement des barres intérieures (montants et diagonales) peut être inférieure à la longueur d'épure pour autant que les membrures puissent assurer une certaine restreinte d'extrémité et que les assemblages d'extrémité assurent un degré de fixation suffisant, par exemple en ayant recours à au moins deux boulons pour les assemblages boulonnés. Dans ces conditions, on adopte habituellement K = 0,9 sauf pour les cornières simples.

Pour le flambement hors du plan de treillis, la longueur de flambement des barres intérieures est prise sécuritairement égale à la longueur d'épure. Donc K = 1.

Pour les poutres triangulées constituées de profils creux, on imagine volontiers que les assemblages entre sections, réalisés le plus souvent par soudage, puissent s'apparenter davantage à des encastrements élastiques qu'à des rotules. Il est possible, dans certains cas, d'attribuer aux barres intérieures du treillis une longueur de flambement dans le plan du treillis différente de 0,9 L et pouvant être substantiellement plus faible. On se reportera à la littérature spécialisée à cet égard (voir notamment le carnet n°2 du CIDECT « Structural Stability of Hollow Sections », chapitre 7.)

5.9.3 Problèmes des cornières simples

Pour éviter des excentrements, il est recommandé, dans les structures triangulées faites de cornières, de réaliser les barres comprimées à l'aide de cornières doubles disposées dos à dos avec un espace entre elles destiné à recevoir des goussets permettant une exécution correcte du nœud. Dans ce cas, il est bien sûr nécessaire de garantir que les deux cornières vont se comporter comme une section monolithe; on disposera donc, de place en place, des fourrures reliant les cornières entre elles de telle manière que la charge de flambement d'une cornière simple entre les points de liaison soit supérieure à la charge de flambement d'ensemble de la barre composée. Il reste que si les efforts de compression restent faibles, il est tentant de n'avoir recours qu'à une cornière simple.

Le problème se pose donc de vérifier la résistance d'une barre comprimée ou d'un tronçon d'une telle barre, faite d'une cornière simple. Lorsqu'on effectue une telle vérification, il importe de se rappeler que l'axe de faible inertie d'une cornière simple ne coïncide pas avec l'un des axes rectangulaires de repère habituel.

Les règles de calcul des barres composées de cornières simples sont largement basées sur des données empiriques en raison des difficultés associées d'une part, à la quantification des restreintes d'extrémité et, d'autre part, aux excentricités de la charge générées par les dispositions constructives des assemblages.

Chapitre 5 5-44

L'instabilité d'une cornière peut survenir par flambement, par flexion, par voilement local ou par flambement d'ensemble par flexion et torsion. Le voilement local des parois n'est pas à craindre si la minceur des parois constituant la section n'excède pas :

pour une cornière à ailes égales;

pour une cornière à ailes inégales;

avec et b, b1, b2 la largeur hors-tout des ailes de la cornière. Les

cornières qui ne satisfont pas cette condition sont dites à parois minces et sont l'objet d'une interaction entre modes d'instabilité, qui est étudiée dans le cours de structures à parois minces.

Les cornières simples sont le plus souvent fixées par une seule aile. Dès lors, l'effort axial de compression ne sait être transmis qu'avec un excentrement hors du plan de treillis. A condition que les membrures assurent aux barres intérieures du treillis un encastrement approprié (en d’autres termes, si les cornières sont assemblées à des éléments plus rigides qu’elles) et que les assemblages d'extrémité de ces barres assurent un degré de fixation suffisant (par exemple : au moins 2 boulons pour un assemblage boulonné), les excentrements précités peuvent être négligés en cas de chargement statique et le degré de fixation des extrémités peut être pris en compte

dans le calcul des cornières simples en adoptant un élancement réduit efficace

obtenu de la manière suivante :

Flambement selon l'axe v-v (inertie minimum) :

Flambement selon l'axe y-y : yeff 70.050.0 (5-62)

Flambement selon l'axe z-z : zeff 70.050.0

L'élancement réduit est calculé avec une longueur de flambement égale à

l'entre-axes théorique des nœuds et est à utiliser avec la courbe européenne de flambement c.

L'incidence d'excentrements autres que ceux générés par le fait que la cornière calculée est attachée par une aile sur un gousset centré n'est pas couverte par les formules données ci-dessus.

Il est possible de constituer des membrures composées à l'aide de quatre cornières identiques, disposées parallèlement et réunies à intervalles réguliers par des diagonales lattices ou par des étrésillons. Dans ce cas, le flambement d'ensemble du poteau composé est influencé par des effets géométriques de second ordre. Ce type de problème est abordé plus loin.

Si les assemblages d'extrémité d'une cornière simple sont réalisés à l'aide d'un seul boulon ou si les dispositions constructives rendent la rigidité de ces assemblages particulièrement faible, il y a lieu de prendre l'excentrement en compte, d'effectuer la vérification en pièce comprimée et fléchie et d'adopter une longueur de flambement égale à la longueur d'épure.

Chapitre 5 5-45

Les cornières destinées à la construction de pylônes électriques font partie d'un domaine d'utilisation très particulier, régi par des règles spécifiques dont le calcul est basé sur des résultats d'essais destructifs en grandeur nature. A ce sujet, on consultera utilement les Recommendations for Angles in Lattice Transmission Towers, préparées par la C.E.C.M.

5.10 Flambement des colonnes composées à treillis et à étrésillons

Les poteaux des bâtiments industriels servent souvent de support à des poutres de roulement de ponts roulants. Ils sont alors soumis à des charges axiales importantes à leur partie inférieure seulement et l'économie conduit parfois à concevoir des poteaux composés, constitués de membrures, réunies entre elles :

a) soit par des montants et des diagonales, constituant ainsi un poteau triangulé (poteau à treillis);

b) soit par des étrésillons disposés transversalement aux membrures et reliés à celles-ci de manière rigide (poteau à étrésillons).

Par ailleurs, dans le passé, on a réalisé nombre de barres de structures triangulées à l'aide de pièces composées à treillis ou à étrésillons.

La constitution même de ces éléments composés est source de certains effets secondaires susceptibles d'avoir une action préjudiciable sur la résistance au flambement des barres et, dès lors, d'invalider les procédures développées plus haut. Parmi ces effets, on note plus particulièrement une plus grande déformabilité en cisaillement, d'une part, et le flambement/voilement local prématuré de l'un des éléments constitutifs, d'autre part. A cet égard, on distingue essentiellement trois types de barres composées. Le premier type - les poteaux à section à parois pleines - couvre les profils reconstitués par soudage sans ouvertures ou trous (Figure 5-22.a). Ces éléments tombent normalement sous le coup des règles de vérification au flambement décrites plus haut. Le second type (Figure 5-22.b) fait usage de sections constituées de membrures en sections laminées ou composées réunies entre elles par des faces triangulées ou encore par des étrésillons. Le troisième type (Figure 5-22.c) a recours à des sections laminées ou reconstituées par soudage dont les faces comportent des évidements importants. Ce type de poteau se situe à la frontière des deux premiers.

Chapitre 5 5-46

(c) Poteaux composites (avec évidements)

Figure 5-22 Types de barres composées

Pour la détermination des efforts intérieurs dans les membrures et les assemblages internes, ainsi que dans tous les composants secondaires (treillis et étrésillons), il doit être tenu compte de la déformée prise par l'élément composé. En plus des efforts axiaux, il convient au besoin de tenir également compte des effets du poids propre et de la prise au vent.

Le calcul d'un élément composé comportera :

la vérification de la résistance au flambement d'ensemble de l'élément composé comprimé, qui tiendra compte des effets de la déformabilité en cisaillement;

la vérification de la résistance à la traction et/ou à la compression des composants principaux et secondaires, à savoir les tronçons de membrures et les montants et/ou diagonales, pour un élément composé à treillis, ou les tronçons de membrures et les étrésillons pour un élément composé à étrésillons;

( a ) Poteaux reconstitués par soudage

( b ) Poteaux à treillis ou à étrésillons

Chapitre 5 5-47

la vérification des assemblages d'extrémité des barres intérieures sur les membrures, pour un élément composé à treillis, ou des étrésillons sur les membrures pour un élément composé à étrésillons.

5.10.1 Effets de la déformabilité en cisaillement sur la charge de flambement

Lorsque toute barre comprimée centriquement flambe, elle est soumise à effort normal et flexion. Cette flexion varie sur la longueur puisque le moment de flexion en toute section y est égal au produit de l'effort axial et de l'amplitude de la déformée transversale en cette section. Cette variation du moment de flexion induit un effort tranchant.

L'influence de la déformabilité à l'effort tranchant sur la capacité portante de la barre est d'autant plus importante que la déformée additionnelle due à la déformabilité en cisaillement sont appréciables. Pour les éléments composés du premier type (voir plus haut), les effets de la déformabilité en cisaillement sont suffisamment faibles pour pouvoir être négligés sans danger. Il n'en va plus de même pour les éléments composés des deuxième et troisième types.

Figure 5-23 Déformabilité au cisaillement

Considérons une barre comprimée sollicitée par un effort axial N et se trouvant en cours de flambement (Figure 5-23). On sait que la flexion d'une barre de rigidité flexionnelle EI est régie par l'équation de l'élastique :

(5-63)

où v désigne la déformée transversale de flexion prise par la barre et M le moment fléchissant sollicitant. On sait par ailleurs que l'effort tranchant V a pour effet de générer une déformée additionnelle vs répondant à la relation :

V = dM

dx

xx

N

LMmax

N

Chapitre 5 5-48

(5-64)

où G est le module de Coulomb et A' la section réduite de la barre, qui est habituellement rapportée à la section réelle selon :

(5-65)

où n est un coefficient numérique dépendant de la forme de la section transversale

(n = 0.83 pour une section rectangulaire et n 0.5 pour un double té laminé à larges ailes fléchissant autour de son axe fort). Il en résulte donc une courbure additionnelle :

(5-66)

La courbure totale vaut donc :

d v

dx

d v

dx

d v

dx

M

EI nGA

d M

dxt s

2

2

2

2

2

2

2

2

1

(5-67)

Si l'on remarque que le moment M dans une section est égal au produit Nvt, la

relation (5-67) devient :

d v

dx

N

EIN

nGA

vt

t

2

2

1

0

( )

(5-68)

Cette équation différentielle est tout à fait analogue à celle établie en (5-4) : la seule différence réside dans le facteur (1-N/nGA) apparaissant au dénominateur du second terme. En suivant la même procédure que pour le flambement par flexion, il est facile d'établir :

2

2

1

EI

KL

N

N

nGA

( )

(5-69)

Chapitre 5 5-49

La charge critique Ncr tenant compte des déformations d'effort tranchant s'écrit donc :

N

N

N

nGA

cr

E

E

1

(5-70)

où NE désigne la charge eulérienne de flambement par flexion, c'est-à-dire sans prise en compte de l'effort tranchant :

N

EI

KLE 2

2( ) (5-71)

Par (5-70), on voit clairement que l'influence de la déformabilité en cisaillement est de fournir une charge critique élastique inférieure à la charge eulérienne NE. La réduction n'est toutefois pas très importante : à titre d'exemple, pour n=0,5 (profilé

laminé) et =0,3, on obtient les résultats ci-dessous pour trois valeurs de

l'élancement :

=Lfl/i 20 80 140

Ncr/NE 0,897 0,994 0,998

Si l'on veut se rappeler que les élancements de 20 et 80 se situent dans le domaine inélastique pour tous les aciers de construction, on a donc appliqué à tort la relation (5-67); c'est cependant sécuritaire puisqu'on sait que le flambement inélastique est moins affecté par l'élancement que le flambement élastique.

On peut donc conclure que l'effet de la déformabilité en cisaillement reste faible pour les pièces comprimées courtes et pratiquement négligeable pour les pièces comprimées d'élancements moyens ou grands. La pratique courante de la négliger pour les sections à parois pleines s'en trouve donc pleinement justifiée.

5.10.2 Eléments comprimés à treillis

On admet que l'élément composé à treillis est constitué de deux membrures parallèles semblables de section constante, espacées et réunies entre elles par des treillis identiques uniformes sur toute la longueur de l'élément. Les membrures peuvent être des barres à section pleine ou être elles-mêmes des éléments composés à treillis ou à étrésillons dans le plan perpendiculaire.

Les relations développées au § 5.10.1 sont évidemment applicables aux éléments composés de pans de treillis à condition de désigner par A' la section de l'âme fictive présentant la même déformabilité au cisaillement que le treillis réel. La valeur de A' dépend des dimensions générales du treillis et de sa configuration (treillis en N, en K, ...).

La déformabilité au cisaillement d'un tel treillis résulte de la mise en traction ou en compression des diagonales et des montants, qui assurent les liaisons entre les membrures lors de la flexion, provoquant ainsi un déplacement transversal s sous le

Chapitre 5 5-50

seul effet de l'effort tranchant. Examinons, à titre d'exemple, le treillis en N de la Figure 5-24.

Figure 5-24 Eléments comprimés à treillis

Sous l'effet de l'effort tranchant V agissant sur un panneau du treillis, des efforts Fi naissent dans la diagonale et le montant, valant respectivement :

VF

VF

m

d

cos/ (5-72)

où désigne l'inclinaison des diagonales sur les montants.

En vertu du théorème de la force unité, le déplacement transversal s est calculé selon :

i i

iii

EA

LFFs 1. (5-73)

où Li et Ai représentent respectivement la longueur et l'aire de la section transversale d'une barre i et Fi.1 est l'effort existant dans cette barre pour un effort unitaire V=1 appliqué à l'endroit et dans la direction du déplacement cherché. La somme s'étend aux seules barres du panneau constituant l'âme du treillis, eu égard au sens de flambement considéré.

On obtient ainsi :

s

Vd

EA

Vh

EAd

o

cos2 v

(5-74)

où ho est la distance entre les centres de gravité respectifs des membrures et d la longueur de la diagonale.

Chapitre 5 5-51

La rigidité au cisaillement Sv d'un treillis en N est l'effort tranchant requis pour produire une déformation unitaire de cisaillement ( / ) s a 1 ; elle est donc donnée

par :

S

nEA ah

dA h

A d

v

d o

d o

v

2

3

3

31

(5-75)

où n est le nombre de plans de treillis et Ad et Av sont donnés pour un seul plan.

De manière similaire, on peut établir pour un treillis en V:

S

nEA ah

dv

d o

2

32

(5-76)

pour un treillis en K :

S

nEA ah

dv

d o

2

3 (5-77)

Moment d'inertie de flexion

Le moment d'inertie de flexion efficace Ieff d'un élément composé à treillis comprimé comportant deux membrures est calculé selon :

foeff AhI 25,0

(5-78)

où Af est l'aire de la section transversale d'une des deux membrures. Cette inertie sert à calculer la charge critique de flambement eulérien :

2

2

fl

eff

EL

EIN

(5-79)

Efforts dans les composants

L'effort axial Nf.Ed dans chaque membrure à mi-longueur de l'élément composé (x=0.5L) est déterminé par la formule :

.

. .0,5

2

s o f

f Ed Ed

eff

M h AN N

I

(5-80)

où MS est le moment de flexion incorporant les effets de second ordre :

Chapitre 5 5-52

( 0.5 )

1

I

Ed o EdS x L

Ed Ed

E v

N e MM

N N

N S

(5-81)

Ainsi qu'on l'a déjà dit, on adopte eo=L/500.

Si l'on admet une imperfection sinusoïdale de type eosinx/L, le moment MS(x) est lui-même sinusoïdal de sorte que l'effort tranchant VS(x) vaut :

V x

LM

x

LS S x L( ) cos( . )

0 5

(5-82)

et atteint sa valeur maximum aux extrémités :

V

LMS x L S x L( , ) ( . ) 0 0 5

(5-83)

Cette dernière valeur sert au calcul des efforts dans les barres intérieures du treillis aux extrémités du poteau et il est d'usage d'admettre sécuritairement ces mêmes efforts sur toute la longueur du poteau.

Il est donc clair que le défaut de rectitude d'amplitude eo introduit un surcroît de compression dans une des membrures et génère des efforts dans les barres intérieures du treillis. (Ces derniers seraient nuls en l'absence de tout défaut de rectitude). On mesure donc toute l'importance de la prise en compte des imperfections. La méconnaissance de ce fait a été à la base de l'accident historique du pont de Québec en 1907.

Longueurs de flambement

La longueur de flambement du poteau composé est conditionnée par les conditions d'extrémité comme pour une pièce à section pleine.

La longueur de flambement d'une membrure dans le plan d'un treillis est normalement prise égale à la longueur a entre points d'épure du treillis.

Pour un élément composé de quatre membrures en cornières à ailes égales avec treillis dans les deux directions, la longueur de flambement Lfl suivant l'axe de plus faible inertie dépend de la topologie des treillis (voir Figure 5-25).

Une barre intérieure de treillis a une longueur de flambement normalement prise égale à sa longueur d'épure.

Chapitre 5 5-53

Figure 5-25 Longueurs de flambement des membrures en cornières d'un poteau composé en treillis

On peut s'interroger sur l'utilité de recourir à des éléments en treillis, puisque à même moment d'inertie qu'une barre à section pleine, ils présentent une charge ultime inférieure, tout en demandant plus de main-d'œuvre pour leur réalisation. La raison en est que les éléments composés à treillis sont structuralement très efficients car, en raison d'une meilleure distribution effective du matériau, une même inertie y est obtenue avec moins de matière que dans une barre à section pleine.

Il est clair que l'angle d'inclinaison des diagonales du treillis joue un grand rôle dans l'importance de la réduction de la capacité portante en raison de l'effet de

l'effort tranchant. La fonction sin cos2 , qu'il est possible de faire apparaître dans

(5-75) moyennant quelques transformations élémentaires, est maximum pour 35°

mais présente un maximum relativement très plat pour 30° < < 45°. On comprend dès lors qu'il soit recommandé de ne constituer que des éléments composés à treillis dont les diagonales sont inclinées approximativement à 45° sur les membrures, ce qui permet par ailleurs de faciliter la réalisation des assemblages d'extrémité des barres intérieures.

5.10.3 Eléments comprimés à étrésillons

On admet que l'élément composé à étrésillons est constitué de deux membrures parallèles semblables de section constante espacées et réunies entre elles par des étrésillons, appelés aussi barrettes ou traverses de liaison, disposés à intervalles réguliers sur toute la longueur de l'élément composé et attachés rigidement aux membrures. Les membrures peuvent être des barres à section pleine ou être elles-mêmes des éléments composés à treillis ou à étrésillons dans le plan perpendiculaire.

Chapitre 5 5-54

Moment d'inertie de flexion

Le moment d'inertie de flexion efficace d'un élément composé à étrésillons comprimé comportant deux membrures est calculé selon :

I h A Ieff o f f 0 5 22. (5-84)

où Af et If sont l'aire de la section transversale et l'inertie (dans le plan des étrésillons), d'une des deux membrures, ho la distance entre les centres de gravité

respectifs des membrures et un coefficient d'efficacité. Celui-ci dépend de

l'élancement L io/ avec i I Ao f 0 5 1, / (I1 étant la valeur de Ieff pour =1) selon :

= 1 si < 75

= 2 - /75 si 75 < < 150

= 0 si > 150.

Efforts dans les composants

L'effort axial Nf.Ed dans chaque membrure à mi-longueur de l'élément composé (x=0.5L) est déterminé par la formule :

)/(5.0. efffoSEdEdf IAhMNN (5-85)

où MS=MS(x=0.5L) est encore donné par la relation :

( 0,5 )

1

I

Ed o EdS x L

Ed Ed

E v

N e MM

N N

N S

(5-86)

où la rigidité en cisaillement Sv est donnée simplement par :

S

EI

av

f

2 2

2

(5-87)

si l'on peut négliger la flexibilité des étrésillons, ce qui est licite si ceux-ci satisfont le critère :

nI

h

I

ab

o

f 10 (5-88)

avec :

n : nombre de plans d'étrésillons; Ib : moment d'inertie de flexion d'un étrésillon, dans le plan des étrésillons.

Chapitre 5 5-55

Si le critère (5-88) n'est pas satisfait, il importe de prendre en compte la flexibilité des étrésillons et de calculer Sv selon :

)anI

hI21(a

EI24S

b

of2

fv

mais 2

f

2

a

EI2

(5-89)

Les étrésillons, leurs assemblages avec les membrures et les membrures elles-mêmes doivent être vérifiées sous les sollicitations existant dans le panneau d'extrémité (Figure 5-26), l'effort tranchant interne trouvant la même justification que pour les éléments composés à treillis et étant pris égal à :

V

LMS s x L

( . )0 5 (5-90)

Pour procéder à ces vérifications, on peut prendre l'effort axial dans chaque membrure égal à 0,5 NEd.

Figure 5-26 Distribution des efforts dans un élément composé à étrésillons

Longueurs de flambement

La longueur de flambement de l'élément composé est conditionnée par les conditions d'extrémité comme pour une pièce à section pleine.

La longueur de flambement d'une membrure dans le plan des étrésillons est normalement prise égale à la distance a entre les axes des étrésillons.

5.11 Eléments composés à membrures faiblement espacées

On réalise parfois des éléments composés comprimés dont les membrures sont soit en contact, soit faiblement espacées et liaisonnées à travers des fourrures (Figure 5-27). Il n'est pas nécessaire de les considérer comme des éléments composés à étrésillons à condition que la fixation des membrures soit assurée par des boulons ou

Chapitre 5 5-56

cordons de soudure dont l'espacement n'excède pas 15 imin, où imin est le rayon de giration minimal d'une membrure.

Les boulons et cordons de soudure de liaison sont dimensionnés pour transmettre en toute sécurité le cisaillement longitudinal existant entre les membrures. Celui-ci est déterminé à partir d'un effort tranchant VS, pris forfaitairement égal à 2,5 % de l'effort axial dans l'élément composé.

L'effort tranchant longitudinal par liaison est pris égal à 0,25 VS a/imin où a est la longueur des membrures entre centres d'épure des liaisons.

Figure 5-27 Eléments composés à membrures faiblement espacées

5.12 Eléments composés de cornières avec barrettes montées en croix

L'élément composé constitué de deux cornières identiques, réunies par des paires de barrettes montées en croix (

Figure 5-28) peut être vérifié au flambement selon l'axe y-y comme s'il s'agissait d'un seul élément homogène. Ceci exige toutefois que les longueurs de flambement dans les deux plans perpendiculaires y-y et z-z soient égales et que l'espacement des paires de barrettes n'excède pas 70imin , où imin est le rayon de giration minimal d'une cornière.

Dans le cas de cornières à ailes inégales, on admet iy=io /1,15, où io est le rayon de giration minimal de l'élément composé.

Figure 5-28 Eléments composés de cornières avec barrettes de liaison montées en croix

Chapitre 5 5-57

5.13 Flambement par flexion et torsion

Pour une pièce comprimée à section non doublement symétrique, le centre de gravité ne coïncide pas avec le centre de torsion. Il importe alors d'effectuer aussi une vérification vis-à-vis du flambement par flexion et torsion. Celle-ci peut devenir d’autant plus déterminante vis-à-vis du flambement par flexion que les parois constituant la section transversale ouverte sont de grande minceur.

La détermination de la contrainte critique idéale du flambement élastique par flexion et torsion d'une pièce idéalement parfaite fait l'objet de la théorie de la stabilité élastique, développée par ailleurs. L'expression mathématique de cette contrainte critique est très complexe et dépend notamment du gauchissement libre ou empêché et des conditions d'appui. Il est généralement difficile d'apprécier exactement ces diverses conditions aux limites. Encore pourrait-on le faire qu'il faudrait tenir compte de l'effet des imperfections géométriques et structurales sur la capacité portante.

Plusieurs types de sections non doublement symétriques sont couramment utilisés en construction métallique : cornières et sections en té ou en U. Pour ces sections, il a été possible de dresser des abaques fournissant la contrainte critique de flambement par flexion et torsion dans l'hypothèse sécuritaire, mais très souvent réaliste, que le gauchissement est libre aux extrémités. Soit cr ft, cette contrainte

critique. A partir de celle-ci, on définit alors, pour la barre considérée, un élancement équivalent de flambement par flexion et torsion equ ft, qui n'est autre que

l'élancement de cette même barre, pour laquelle la charge critique (eulérienne) de flambement par flexion seule serait égale à cr ft, . On a donc :

equ ft cr ftE, ,/ (5-91)

Ayant cet élancement, on calcule l'élancement réduit equ ft E, / , avec lequel on

entre dans la courbe européenne de flambement applicable à la section considérée,

pour en tirer la charge normale réduite , d'où la charge ultime.

En procédant comme ci-dessus, on tient compte de l'effet préjudiciable des imperfections et on suppose implicitement que celui-ci est identique en flambement par flexion et en flambement par flexion et torsion.

Pour les cornières et fers en té à branches égales, et pour les fers U, la contrainte critique de flambement par flexion et torsion peut être déduite des abaques dressés

aux Figures 30, 31et 32, qui fournissent k = f(), avec :

k

cr ft

E

, (5-92)

où E E 2 2/ est une contrainte critique de flambement par flexion de référence.

Le paramètre fait intervenir à la fois l'élancement de la barre et la minceur des parois constituant la section. Le facteur k, inférieur à l'unité, apparaît donc comme une mesure de l'affaiblissement de la capacité portante, entraîné par le caractère

Chapitre 5 5-58

spatial du phénomène d'instabilité. Il résulte de la définition de k que equ,ft peut aussi se mettre sous la forme :

equ ft

k, (5-93)

Le processus de vérification se poursuit alors comme indiqué plus haut.

On attirera plus particulièrement l'attention sur ce qui suit :

a) l'abaque de la Figure 5-29 (cas des cornières à ailes égales) distingue le cas de la charge centrique, c'est-à-dire appliquée au centre de gravité de la section, de celui de la charge appliquée au milieu de l'aile, qui est fréquent en pratique, en raison des types d'assemblages;

b) l'abaque de la Figure 5-30 (cas des fers U à parois d'épaisseur t constante

chargés centriquement) contient diverses courbes, associées à des valeurs différentes du rapport hauteur/largeur du fer U;

c) l'abaque de la Figure 5-31 (cas des tés à branches égales) comporte trois courbes

relatives respectivement à trois modes fondamentaux de mise en charge; d) dans chacun des abaques, Lfl désigne la longueur de flambement servant à la

détermination de E, prise sécuritairement égale à la distance entre nœuds; e) la contrainte critique de flambement servant de référence dans la définition de k

est relative à la flexion autour de l'axe d'inertie faible pour les cornières à ailes égales et les tés de largeur égale à la hauteur. Pour les fers U, elle est arbitrairement choisie pour le flambement autour de l'axe de symétrie. Ceci explique les limites de k à la Figure 5-30, car le flambement par flexion et torsion

ne peut survenir que si cr,ft reste inférieur à la contrainte critique d'Euler. On doit donc plafonner k à la valeur Ix/Iy, ce qui, tous calculs faits, conduit à :

k

m

m m mlim

( )

( )( )

4 2 1

2 62 (5-94)

avec mh

b ;

f) indépendamment de l'élancement de la barre, on notera le rôle prépondérant joué

par la minceur des parois sur la valeur du facteur k.

On notera que ce qui est exposé plus haut n'apporte qu'une solution partielle aux problèmes puisque la minceur des parois est prise en compte sans toutefois que celle-ci soit susceptible de rendre la section partiellement efficace. Les effets du voilement local des parois sont couverts par le concept de largeur efficace de paroi et donc de section efficace. Ce point particulier n'est pas discuté davantage ici. Il fera l'objet d'une attention particulière dans le cours de Structures à Parois Minces.

Chapitre 5 5-59

Figure 5-29 Abaque pour cornières à ailes égales

Figure 5-30 Abaque pour fers U

k = cr,ft

EE

2

2;

h

b=

0.5

1.0

1.5

=eb

m =h

b;

12(m+2)

L

bm (m+6)2

e z

h

y

G

ee

b

chargées centriquement

chargées au milieu de l’aile

e

v

bu

oG

e

bk =

cr ,ft

EE

2

2;

L L

i v b24 : =

e

b

K = 0.572lim

K = 0.156lim

k = cr,ft

EE

2

2;

h

b=

0.5

1.0

1.5

=eb

m =h

b;

12(m+2)

L

bm (m+6)2

e z

h

y

G

ee

b

chargées centriquement

chargées au milieu de l’aile

e

v

bu

oG

e

bk =

cr ,ft

EE

2

2;

L L

i v b24 : =

e

b

K = 0.572lim

K = 0.156lim

Chapitre 5 5-60

Figure 5-31 Abaque pour fers en té à branches égales

k =

cr

EE

2

2;

L Li z b

24 : =eb

au centre de torsion

au centre de gravité

au milieu de l’aile saillante

chargées

E

e

b

z

oG

e

b y