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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 1 CHAPITRE 15 ANESTHESIE LORS DE CARDIOPATHIE CONGENITALE CHEZ L’ADULTE Mise à jour: Juillet 2012 Précis d’Anesthésie Cardiaque PAC

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 1

CHAPITRE 15

ANESTHESIE LORS DE

CARDIOPATHIE CONGENITALE

CHEZ L’ADULTE

Mise à jour: Juillet 2012

Précis d’Anesthésie Cardiaque

PAC •

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Table des matières Introduction 2 Nomenclature et physiopathologie 2 Analyse segmentaire 5 Shunts 9 Calcul des pressions droites 11 Fonction ventriculaire 13 Approche par pathologie 14 Retours veineux anormaux 14 Communication interauriculaire 15 Canal atrio-ventriculaire 22 Maladie d’Ebstein 24 Communication interventriculaire 26 Hypoplasie ventriculaire 31 Tétraloge de Fallot 37 Shunt mixte 44 Sténose pulmonaire 44 Anomalies du cône éjectionnel VG 45 Transposition des gros vaisseaux 49

TGV naturellement corrigée 52 Coartcation de l’aorte 53 Anomalies artérielles 55 Considérations générales pour l’anesthésie 58 Effets des shunts 59 Hypoxémie et cyanose 62 Hypertension pulmonaire 63 Dysfonction ventriculaire 69 Arythmies 71 Dysfonction respiratoire 71 Techniques d’anesthésie 71 Impact de l’ETO 77 Grossesse 78 Risque d’endocardite 81 Conclusions 85 Bibliographie 86 Auteurs 92

Introduction Les progrès réalisés ces quarante dernières années en chirurgie cardiaque pédiatrique ont permis la survie jusqu'à l'âge adulte de nombreux enfants jusque-là condamnés à ne pas dépasser l'adolescence. Actuellement, 85 % des enfants nés avec une malformation cardiaque atteignent l'âge adulte [186]; la survie à 15 ans est de 80% pour les cas complexes et de > 95% pour les cas simples [115,155,186]. De plus, cette population s'accroît de 5% par an [125]. Comme les cardiopathies congénitales sont assez fréquentes - elles surviennent dans 0.5-1% des naissances -, les patients adultes (GUCH : grown-up congenital heart) représentent une cohorte de 1.8 million de malades en Europe et sont actuellement plus nombreux que les enfants [33,126]. Les malformations complexes sont plus rares, puisqu'elles n'apparaissent que dans 1‰ des naissances [29], mais la moitié de ces cas a maintenant plus de 25 ans [118,186]. Les congénitaux demandent un suivi médical spécifique et présentent un taux d’hospitalisations itératives très élevé, notamment pour le contrôle d’arythmies ou d’insuffisance ventriculaire. Ils subissent des interventions de chirurgie non-cardiaque plus fréquemment que la population générale [155]. En-dehors des pathologies simples, il est impératif que ces malades soient suivis dans des centres de références dotés de services de cardiologie, de chirurgie et de réanimation investis dans le domaine. Leur prise en charge réclame des connaisances particulières qui sont différentes de celles que l’on acquière dans le domaine conventionnel de la cardiologie, de l’anesthésie et de la cardiochirurgie. Néanmoins, même s'il ne pratique pas dans un centre spécialisé, chaque anesthésiste peut rencontrer un de ces malades à l'occasion d'une opération non-cardiaque urgente telle une appendicectomie, une

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reconstruction urologique, une ostéosynthèse de fracture ou une césarienne. Comme les cas complexes requérant le transfert dans un centre spécialisé sont peu fréquents, puisqu'on en comptabilise 600-800 par année pour l'Allemagne et la Suisse [93], son rôle est central dans la prise en charge de ces malades en milieu non spécialisé [137]. Il doit donc avoir quelques notions fondamentales pour comprendre la physiopathologie de ces situations particulières. Lorsqu'ils se présentent à l'âge adulte, les malades souffrant de malformation cardiaque relèvent de trois catégories différentes.

Patients ayant bénéficié d'une correction totale. Même si la lésion est anatomiquement

corrigée, la malformation et l'intervention peuvent laisser des séquelles importantes; l'hémodynamique est plus ou moins perturbée selon la gravité de l'affection première et du remodelage des cavités cardiaques. La survie à 20 ans des malades opérés de communication interauriculaire (CIA) est de 98%, celle des malades opérés d'une tétralogie de Fallot est de 90%, celle des porteurs d'une transposition des gros vaisseaux (TGV) est de 95% après switch artériel mais de seulement 20% après switch des retours veineux au niveau auriculaire (opération de Mustard ou de Senning) [124]. Seuls le canal artériel, la CIA de type ostium secundum et une petite CIV isolée opérés avant l’âge de 3 ans permettent un avenir sans séquelle. Pour les autres, l'importance des lésions résiduelles est fonction de l'âge auquel a eu lieu la correction chirurgicale: plus l'enfant est opéré tôt, moins les séquelles sont importantes. Néanmoins, d’une manière générale, les cardiopathies congénitales peuvent être corrigées, mais rarement guéries.

Patients ayant subi une correction partielle ou une intervention palliative. L'hémodynamique de ces cas est particulièrement complexe, car leur physiologie est très différente de la norme; une correction selon Fontan, par exemple, ne permet un débit pulmonaire optimal qu'en respiration spontanée.

Patients non opérés. Certaines malformations ne sont diagnostiquées que tardivement parce qu'elles sont bénignes (CIA ou bicuspidie aortique, par exemple), ou parce qu'elles ne deviennent symptomatiques que lorsque apparaît une défaillance ventriculaire ou un déséquilibre entre les circulations systémique et pulmonaire (maladie d'Ebstein, TGV naturellement corrigée). Il arrive aussi qu'une vicariance physiologique permette une survie quasi normale, comme le développement d'une circulation collatérale importante dans une sténose pulmonaire. Enfin, certains enfants vivent dans des pays sans accès à la chirurgie cardiaque pédiatrique, et ne sont pris en charge que lors d'immigration ou de programmes d'aide médicale aux pays en voie de développement.

Pour l'anesthésiste, ces patients sont des cas à haut risque, surtout lorsque leur état général est déficient. Cinq facteurs sont particulièrement associés aux complications périopératoires [9,11,71]:

Hypertension pulmonaire (PAPmoy > 25 mmHg au repos), Cyanose (SaO2 ≤ 85%), Arythmies, Dysfonction ventriculaire, Réopération, lésions résiduelles.

En devenant plus âgés, ces malades développent également des pathologies propres à l'adulte, comme une hypertension artérielle, un BPCO, un diabète ou une coronaropathie. La population de ces malades va en augmentant, car leur espérance de vie ne cesse de s’améliorer. D’autre part, la chirurgie cardiaque néonatale a fait de tels progrès que de nombreux enfants, jusqu’ici non viables, peuvent grandir grâce à des opérations complexes et souvent palliatives, et se retrouvent à l’âge adulte avec des pathologies nécessitant une transplantation cardiaque comme seule chance de survie. La greffe cardiaque dans ces conditions est techniquement difficile à cause des malformations vasculaires et des opérations itératives.

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Après une description de la nomenclature anatomique, on abordera les problèmes soulevés par les cardiopathies congénitales les plus fréquentes de l'adulte, puis les problèmes majeurs auxquels est confronté l'anesthésiste. L'étendue accordée aux données physiopathologiques peut paraître excessive, mais elle est nécessaire à bien comprendre les mécanismes avec lesquels l'anesthésiste doit jouer lorsqu'il prend en charge un patient souffrant de cardiopathie congénitale [33,35,59,111,153].

Cardiopathies congénitales de l’adulte

Grâce aux succès de la cardiologie pédiatrique, le nombre de cardiopathies congénitales adultes est en augmentation (0.5% de la population). L’anesthésiste peut rencontrer trois situations :

- Cardiopathie corrigée, mais non guérie, car laissant des séquelles ± significatives - Intervention palliative, créant une physiologie particulière - Cardiopathie non-opérée

Tout anesthésiste peut être confronté à l’un de ces cas, notamment en situation d’urgence, et doit donc connaître les principes physiopathologiques qui gouvernent la prise en charge de ces affections

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Nomenclature et physiopathologie Analyse segmentaire L'extrême diversité des malformations cardiaques demande une classification. Il est pratique de se référer à un concept de base adopté par les anatomo-pathologistes, qui est celui d'une analyse segmentaire; celle-ci divise le coeur en trois segments [159,181]:

Le segment auriculaire, qui comprend les oreillettes et les grandes veines ; Le segment ventriculaire, qui comprend les ventricules et les valves auriculo-ventriculaires ; Le segment artériel, qui comprend l'aorte et l'artère pulmonaire avec leurs valves respectives.

Ces trois segments sont liés entre eux par deux jonctions (Figure 15.1):

La jonction atrio-ventriculaire ; La jonction ventriculo-artérielle.

Chaque segment est défini par sa morphologie intrinsèque, car la position et la taille des cavités cardiaques ne permettent pas de les identifier à coup sûr: chacune peut être permutée, atrophique, hypertrophiée ou même absente. Cinq critères sont utilisés pour déterminer les structures anatomiques du cœur [52]:

Situs: il peut être solitus (normal) ou inversus: comme le situs est concordant avec le status

abdominal, il est essentiellement défini par la position de l'oreillette droite (OD) qui reçoit la veine cave inférieure (VCI) ou, à défaut, les veines sus-hépatiques en provenance du foie;

La concordance ou la discordance de deux segments successifs: au lieu de se suivre dans une position normale (concordance), deux segments peuvent être dans une position relative inappropriée (discordance);

Les connections segmentaires: les parties jonctionnelles entre les segments sont le canal atrio-ventriculaire entre les oreillettes et les ventricules, et l'infundibulum entre les ventricules et les artères;

Les marqueurs propres de chaque chambre cardiaque; le VG, par exemple, est défini par la présence de deux piliers, d'une valve mitrale bicuspide, de trabéculations fines et d'une chambre de chasse partiellement fibreuse;

Segment auriculaire

Segment ventriculaire

Segment artériel

Jonction ventriculo- artérielle

Jonction auriculo-ventriculaire

Figure 15.1 : Analyse segmentaire du coeur. Celui-ci est divisé en 3 segments (auriculaire, ventriculaire et artériel) reliés entre eux par 2 jonctions (auriculo-ventriculaire et ventriculo-artérielle). Le retour veineux fait partie du segment auriculaire ; les valves auriculo-ventriculaires font partie du segment ventriculaire et les valves ventriculo-artérielles du segment artériel [19,34].

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Les anomalies associées: ce peut être une structure dysmorphique, une lésion obstructive ou un défaut dans un septum.

Les descriptions anatomiques des structures et des pathologies faites dans ce chapitre seront essentiellement basées sur l'imagerie échocardiographique [19,34,122,155,168,192]. Elles seront illustrées par des schémas et des images obtenues par échocardiographie transoesophagienne (ETO).

Segment auriculaire Le situs cardiaque est déterminé par la position des oreillettes. Dans la vaste majorité des cas, il est identique au situs abdominal; les discordances trans-diaphragmatiques ne surviennent que dans des pathologies sévères et très rares, qui ne se rencontrent pas chez l'adulte. C'est la jonction avec la veine cave inférieure (VCI) qui permet d'identifier l'OD; en son absence, ce sont les veines sus-hépatiques qui se jettent dans l'OD. L'OD et le foie, facile à repérer, sont donc du même côté. Les veines pulmonaires peuvent s'aboucher ailleurs que dans l'oreillette gauche (OG) en cas de retour veineux pulmonaire anormal. Les oreillettes peuvent encore se différencier par leur anatomie propre. L'OD a un appendice auriculaire court, obtus et pyramidal; elle abrite la fossa ovalis du septum interauriculaire et reçoit l'insertion de la valve d'Eustache; sa paroi est partiellement trabéculée. L'OG, dont la paroi est entièrement lisse, a un appendice auriculaire en forme de doigt, long et pectiné.

Jonction auriculo-ventriculaire La jonction entre le septum interauriculaire, le septum interventriculaire, le feuillet septal de la valve tricuspide et le feuillet antérieur de la valve mitrale forme la crux interne du coeur. Ces quatre structures peuvent présenter un défaut de coalescence et laisser un orifice au centre du coeur: c'est le canal atrio-ventriculaire (canal AV), ou endocardial cushion defect. Normalement, l'insertion septale de la valve tricuspide est distale de 5-10 mm par rapport à celle de la valve mitrale (0.7 cm/m2) (Figure 15.2). Les deux valves sont sur le même plan en cas de canal atrio-ventriculaire [139]. La jonction atrio-ventriculaire est concordante quand les oreillettes et les ventricules se suivent dans le bon ordre. Elle est discordante lorsque chaque oreillette est connectée au ventricule contro-latéral. En cas de discordance, la valve tricuspide reste attachée au ventricule droit (VD) et la mitrale au

1 cm

Situation normale Canal AV

© Chassot 2012

OD OG

VG VD

OG OD

VD VG

Figure 15.2 : jonction auriculo-ventriculaire. Dans la situation normale, l’insertion septale de la valve tricuspide est dans une position plus apicale que celle de la valve mitrale. Le décalage est de l’ordre de 1 cm chez l’adulte. Les deux valves sont sur le même plan lors de canal auriculo-ventriculaire commun (canal AV).

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ventricule gauche (VG). Lorsque les deux oreillettes sont reliées à un seul ventricule, on parle de ventricule à double entrée, ou double-inlet ventricle. Si une valve atrio-ventriculaire s'ouvre sur les deux ventricules à la faveur d'une communication interventriculaire (CIV), on parle d'overriding; cette malformation peut être complétée de straddling lorsque des cordages de la valve vont s'insérer à travers la CIV sur une paroi du ventricule controlatéral (Figure 15.3). Segment ventriculaire

Un ventricule est composé de trois parties: une chambre d'admission, un corps trabéculé et une chambre de chasse. On considère comme un ventricule une chambre qui reçoit plus de 50% de l'ouverture de la valve auriculo-ventriculaire correspondante; en dessous de cette valeur, on la considère comme une chambre rudimentaire. La position, la forme et la taille sont des repères traîtres pour définir quel ventricule est le droit ou le gauche, car ces données peuvent être profondément perturbées. D'autres critères sont utilisés pour les différencier (Figure 15.4). Un ventricule droit se distingue par:

La présence d'une valve tricuspide, insérée plus bas que la valve mitrale (sauf dans le canal AV);

Figure 15.3 : Jonction atrio-ventriculaire. A: surplomb (overriding); la valve mitrale surplombe le septum, son orifice s'abouche dans les deux ventricules, mais l'appareil sous-valvulaire est du même côté. Elle est connectée au ventricule qui reçoit > 50% de sa surface. B: Straddling; l'appareil sous-valvulaire de la valve qui surplombe, en l’occurence la mitrale, est inséré des deux côtés du septum ; une partie des cordages croise la CIV.

OG OD

VD

CIV

OD OG

VG VD

CIV

© Chassot 2012

A B

LV

7

6 6

5

4

3

2

1 8

Ventricule droit

Ventricule gauche

© Chassot 2012

Figure 15.4 : différentiation du VD et du VG. Le VD est relié à une valve tricuspide (1) et contient 3 piliers dont un est situé sur le septum (2) ; il présente une forte trabéculation (3) et en général une bande modératrice musculaire bien différenciée (4). Le VG est connecté à une valve à 2 feuillets (5) et ne contient que 2 piliers (antéro-latéral et postéro-médian) (6), dont aucun n’est implanté sur le septum ; il est faiblement trabéculé (7). Le décalage entre les insertions septales de la tricuspide et de la mitrale (8) différencie le VD (insertion basse) du VG (insertion haute) (vue 4-cavités 0-20°). Le VD a une chambre de chasse entièrement musculaire, alors que celle du VG comprend une continuité fibreuse entre la valve aortique et le feuillet antérieur de la mitrale.

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Trois muscles papillaires (ou plus), dont un a une insertion sur le septum interventriculaire; Des trabéculations épaisses et la présence d’une bande modératrice (travée musculaire qui

traverse la cavité); Une chambre de chasse conique et entièrement musculaire (infundibulum).

Un ventricule gauche se reconnaît à:

La présence d'une valve bicuspide (mitrale), insérée au-dessus de celle de la valve tricuspide (sauf dans le canal AV);

Deux muscles papillaires, parfois fusionnées en un seul, dont aucun n'a une insertion sur le septum interventriculaire;

Des trabéculations plus fines; Une chambre de chasse partiellement fibreuse, avec une continuité fibreuse entre la valve

mitrale et la valve aortique. Jonction ventriculo-artérielle La jonction est concordante ou discordante selon que le ventricule est connecté au vaisseau approprié ou non; la transposition des gros vaisseaux (TGV) est le cas le plus fréquent de discordance ventriculo-artérielle : le VD est connecté à l’aorte et le VG à l’AP (Figure 15.5). Un ventricule à double issue (double-outlet ventricle) est caractérisé par une disposition dans laquelle plus de 50% d'une valve ventriculo-artérielle est connecté au même ventricule, qu'il soit droit, gauche ou unique. Les valves peuvent manifester un overriding, mais le straddling est impossible puisqu'elles n'ont pas de cordages. Figure 15.5 : Pathologies de la jonction ventriculo-artérielle. A : situation normale, l’aorte (Ao) et l’artère pulmonaire (AP) se croisent à 45°, l’AP étant antérieure. L’AP se reconnaît au fait qu’elle se bifurque en deux branches 4-5 cm après son origine ; l’aorte ascendante est un long tube qui ne donne aucune branche avant les vaisseaux de la crosse ; les nombreuses anomalies coronariennes ne permettent pas d’utiliser l’implantation des coronaires comme un critère définissant l’aorte. B : ventricule droit à double issue (VDDI, double-outlet right ventricle ou DORV) ; le bascule du septum, avec ou sans CIV, fait que les deux vaisseaux sont originaires du VD. C : transposition des gros vaisseaux (TGV) ; l’aorte est issue du VD et l’AP du VG ; à l’échocardiographie, les deux vaisseaux sont parallèles en vue long-axe 120°, les deux valves sont sur le même plan en court-axe (0-40°). Les gros vaisseaux sont antéro-postérieurs en cas de D-TGV et côte-à-côte en cas de L-TGV.

AP

Ao

VD

VG

AP

Ao

VD VG

Ao

AP

VD

VG

A C B © Chassot 2012

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Segment artériel Deux vaisseaux sont issus du coeur, l'aorte, qui est postérieure, et l'artère pulmonaire (AP), qui est antérieure; en situation normale, ils se croisent dès leur origine. L’aorte ne donne ses premières branches que distalement dans la crosse, alors que l’AP se bifurque en deux branches après 4-5 cm. Les coronaires ne sont pas un critère de différenciation car elles peuvent être issues de l'aorte ou de l’AP. Examens cliniques En clinique, la connaissance précise de son anatomie est capitale pour comprendre le fonctionnement d’une cardipathie congénitale. Plusieurs méthodes d’examens sont à disposition [11,82].

Echocardiographie: c’est l’élément primordial. Elle fournit des renseignements sur l’anatomie de base, sur la morphologie des chambres cardiaques, des valves et de leur fonction; le Doppler mesure les flux, les gradients, les shunts et, de manière indirecte, la pression du VD et/ou de l’AP (voir Chapitre 27 page 103, Cardiopathies congénitales). Pour davantage de précision sur des structures fines ou postérieures, elle peut être complétée par une échocardiographie transoesophagienne. L’échocardiographie est moins performante pour l’évaluation du VD et inadaptée à celle des vaisseaux extra-cardiaques.

IRM: elle permet une reconstruction tridimensionnelle très fine de l’anatomie et surpasse l’écho pour l’évaluation du VD, de la fonction bi-ventriculaire, du volume des cavités, des caractéristiques tissulaires et des vaisseaux extracardiaques (veines pulmonaires, aorte, collatérales). L’IRM permet également la mesure des flux et le calcul des shunts, des gradients ou de la fraction de régurgitation.

CT-scan: plus disponible et plus rapide que l’IRM, il offre également une excellente définition anatomique des structures, notamment extracardiaques, mais présente l’inconvénent d’utiliser des radiations ionisantes et des produits de contraste.

Angio-cathétérisme: il est réservé aux situations peu claires, à la définition des vaisseaux extracardiaques et à la mesure précise des pressions droites (PAP, RAP) et de la réactivité vasculaire pulmonaire (test au NO).

Nomenclature

L’analyse segmentaire divise le cœur en 3 segments (auriculaire, ventriculaire et artériel) et 2 jonctions (auriculo-ventriculaire et ventriculo-artérielle). L’examen anatomique d’une cardiopathie congénitale comprend 5 étapes : - Définition du situs à partir de l’OD - Définition des différentes chambres (nombre, position) - Examens des jonctions AV et venriculo-artérielle (concordance ou discordance) - Recherche de shunts - Recherche de lésions obstructives Shunts Les communications (shunts) peuvent survenir au niveau du septum interauriculaire (CIA), du septum interventriculaire (CIV), ou au niveau de la crux (canal AV). Les shunts peuvent aussi apparaître au niveau des veines centrales (connexions veineuses pulmonaires anormales) ou des grands vaisseaux (canal artériel, fistule aorto-pulmonaire ou coronaire). Un shunt présente quatre caractéristiques.

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La direction du flux. Elle peut être droite → gauche (D-G), gauche → droite (G-D), ou

bidirectionnelle. Un shunt D-G est cyanogène. Le flux d'un shunt est systolo-diastolique, avec deux pics de vélocité; la valeur maximale de cette dernière est habituellement de 1 à 4 m/s. A dimension égale, le débit d'un shunt augmente si la pression d'amont s'élève ou si celle d'aval s'abaisse. En cas de vasodilatation artérielle systémique, le débit d'un shunt G-D (non-cyanogène) s'abaisse, alors que celui d'un shunt D-G (cyanogène) s'élève. Pour diminuer un shunt cyanogène, il faut baisser la postcharge droite ou augmenter la postcharge gauche (voir Figures 15.56 et 15.57, page 60).

La dimension de l'orifice. S'il est de petite taille, un orifice est dit restrictif; il donne lieu à un fort gradient de pression mais à un petit débit, alors qu'un shunt de grande taille, dit non-restrictif, génère peu ou pas de gradient mais a un grand débit. La direction du shunt dépend de celle du gradient de pression ; elle peut varier au cours du cycle cardiaque. Plus la taille du shunt est grande, c’est-à-dire moins il est restrictif, plus son débit dépend du rapport entre les résistances artérielles pulmonaires (RAP) et systémiques (RAS).

La dilatation des cavités de réception. Les shunts situés en amont de la jonction auriculo-ventriculaire (CIA, retour veineux pulmonaire anormal) entraînent une dilatation des cavités droites, alors que ceux situés en aval de la jonction auriculo-ventriculaire (CIV, canal artériel) causent une dilatation des cavités gauches (Figure 15.6). Dans les deux cas, l'artère pulmonaire (AP) est dilatée. Les shunts situés au niveau ventriculaire et artériel dépendent du rapport entre les RAP et les RAS, alors que les shunts situés au niveau auriculaire dépendent davantage de la complicance des cavités droite et gauche.

Le débit pulmonaire. Celui-ci peut être augmenté (shunt G-D) ou diminué (shunt D-G, sténose pulmonaire). Une augmentation de longue durée du débit pulmonaire peut conduire à une hypertension pulmonaire, alors que la réduction du débit pulmonaire conduit à la cyanose.

Figure 15.6 : Surcharge ventriculaire en cas de shunt G→D. A : Lorsque le shunt est situé en amont des valves auriculo-ventriculaires (CIA, retour veineux pulmonaire anormal), le VD subit une surcharge de volume ; l’OD, le VD et l’AP sont dilatés ; une insuffisance tricuspidienne (IT) est fréquente. B : Lorsque le shunt est situé en aval des valves auriculo-ventriculaires (CIV, canal artériel), c’est le VG qui subit la surcharge de volume, car le volume sanguin dont il assure la propulsion lui revient après un passage transpulmonaire ; l’AP, l’OG et le VG sont dilatés ; le VD ne se dilate et ne s’hypertrophie que lorsque s’installe une hypertension pulmonaire. La valeur d'un shunt (Qp/Qs) est le rapport entre le débit pulmonaire et le débit systémique. Il peut se calculer à l'échocardiographie ou au cathétérisme par le rapport du débit ou du volume systolique à travers l'artère pulmonaire et à travers l'aorte (ou la chambre de chasse systémique). Un shunt G-D

LV

VD

A

LV

OG OD

VD VG

© Chassot 2012

B

OG

VG

OD

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peut aussi se calculer par l'enrichissement en oxygène de l'artère pulmonaire, c'est-à-dire par le rapport des saturations:

Qp / Qs = (SaO2 - SvO2) / (SvpO2 - SapO2) où: SaO2: saturation artérielle SvO2: saturation veineuse centrale (2 • SvO2 VCI + SvO2 VCS) / 3 SvpO2: saturation des veines pulmonaires SapO2: saturation de l'artère pulmonaire or: SvpO2 ≈ SaO2 donc: Qp / Qs = (SaO2 - SvO2) / (SaO2 - SapO2) Dans l'exemple suivant, le sang veineux mêlé (SvO2 74%) est enrichi par un shunt G-D jusqu'à une valeur de 90% en artère pulmonaire:

(98% - 74%) / (98% - 90%) Qp / Qs = 24 / 8 = 3:1 Dans ce cas, le rapport entre le flux pulmonaire et le flux systémique est 3:1. En cas de shunt D-G, le flux pulmonaire est diminué; un rapport de 0.5:1, par exemple, indique que le débit pulmonaire est la moitié du débit systémique.

Shunts

Un shunt présente 4 caractéristiques - Sa direction (G-D non-cyanogène, D-G cyanogène)

- Sa taille (restrictif ou non-restrictif) - La dilatation des cavités de réception - L’augmentation ou la diminution du débit pulmonaire

Le shunt est défini par son rapport au débit systémique : Qp / Qs

Calcul des pressions droites Il n'est pas nécessaire de disposer d'un cathéter pulmonaire pour mesurer les pressions de l'AP. On peut en réaliser une estimation fiable par échocardiographie, pour autant que le malade présente une insuffisance tricuspidienne (IT). Or celle-ci existe physiologiquement dans plus de la moitié des individus normaux, et survient dès que la pression droite augmente, c'est-à-dire chez presque tous les patients souffrant d’hypertension pulmonaire. La vélocité maximale du jet systolique de l'IT est fonction du gradient de pression qui règne en systole entre le VD et l'OD. L'équation simplifiée de Bernoulli établit la relation entre la vélocité et la pression:

ΔP = 4 (Vmax)2

où ΔP est le gradient de pression entre le VD et l'OD et Vmax la vélocité maximale de l'IT.

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 12

La pression de l'OD est estimée (10 mmHg en moyenne) ou mesurée par la PVC. En l'absence de lésion au niveau de la chambre de chasse droite et de la valve pulmonaire, la pression systolique du VD est égale à la pression systolique de l'AP. L'équation devient:

PAPs = 4 (Vmax IT)2 + POD A l'échocardiographie, le capteur Doppler est aligné avec le jet de l'IT et la machine opère directement le calcul (Figure 15.7). Chez les congénitaux, ce calcul peut être faussé par deux situations [35]:

Une sténose sur la voie d’éjection du VD; la PAs du VD n’équivaut pas à la PAPs; Une CIV; la pression du VD est contaminée par celle du VG.

La pression diastolique pulmonaire est calculable s'il existe une insuffisance pulmonaire (IP), presque toujours présente en cas d'hypertension pulmonaire. Comme la POD et la PdiastVD sont équivalentes puisque la valve tricuspide est ouverte en diastole, on obtient le calcul suivant en mesurant la Vmax de l'IP:

PAPd = 4 (Vmax IP)2 + POD En présence d'une CIV, il est possible de calculer la pression systolique du VD par la vélocité du flux dans le shunt G-D. La vélocité maximale du shunt donne la différence de pression en systole entre le VG et le VD; soustraite de la pression artérielle systémique (en l'absence de pathologie aortique), elle donne la pression systolique du VD:

PsystVD = PAsyst - 4 (Vmax CIV)2

Calcul de la pression pulmonaire

A l’échocardiographie : PAPsyst = 4 (Vmax IT)2 + POD

ΔP = 4 (Vmax)2 ΔP = 4 (VIT)2 PAPs = 4 • 2.52 + POD PAPs = 36 mmHg

OD

VD

Figure 15.7 : Calcul échocardio-graphique de la pression pulmonaire systolique (PAPs) par la vélocité de l'insuffisance tricuspidienne (IT). Dans la vignette supérieure droite, le capteur Doppler est aligné avec le jet de l'IT à travers la valve tricuspide. L'affichage spectral donne la vélocité maximale de l'IT, en l’occurrence 2.5 m/s. L’équation simplifiée de Bernoulli (ΔP = 4 V2) permet de calculer le gradient de pression (ΔP) qui règne entre le VD et l’OD en systole en mesurant la vélocité maximale (V) de l’IT. Il faut ajouter à ce résultat (4 x 2.52 = 26 mmHg) la pression de l’OD (en l’occurrence 10 mmHg) pour obtenir la valeur de la pression dans le VD en systole. En l’absence de sténose pulmonaire ou de CIV, cette pression est la même que la pression artérielle pulmonaire systolique.

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Fonction ventriculaire D’une manière générale, les anomalies anatomiques, le remodelage des cavités et les conditions hémodynamiques particulières limitent les capacités fonctionnelles des ventricules [147]. Ventricule gauche Une augmentation de postcharge (sténose aortique, coarctation) entraîne une hypertrophie de type concentrique qui peut être massive; mais ce ventricule présente une diminution fonctionnelle par unité de masse, même s’il est en mesure de générer de hautes pressions. Une surcharge de volume cause une hypertrophie dilatative du VG, qui peut accomoder une augmentation de volume télédiastolique de l’ordre de 40%. Toutefois, l’efficience de ce VG est diminuée, car il travaille sur un grand diamètre (loi de Laplace); il devient très sensible à toute augmentation de postcharge. La fonction du VG est altérée par l’anomalie anatomique qui modifie sa forme, en général devenue plus sphérique. Elle est également modifiée par la cyanose et l’hypoxémie, de manière proportionnelle à leur intensité et à leur durée en cas de correction tardive. Dans le ventricule unique (VU), la fonction est moins altérée si le VU est anatomiquement de type gauche; s’il est de type droit, la performance du ventricule est rapidement déficiente. Dans toutes ces conditions, la fraction d’éjection (FE) échocardiographique n’a que peu de validité pour définir la performance du VG, car les hypothèses géométriques sur lesquelles elle repose sont inappliquables. La capacité de l’IRM à mesurer les volumes en fait un meilleur examen à cet effet. Ventricule droit Une augmentation chronique de postcharge dès la naissance (sténose pulmonaire, HTAP) n’induit pas de dilatation du VD mais une hypertrophie de type concentrique. La fonction droite reste adéquate tant que la pression intraventriculaire est < 50% de la pression gauche et qu’il n’y a pas de surcharge de volume associée. Les patients deviennent symptomatiques lorsque la pression du VD dépasse la moitié de la pression systémique [185]. Lorsqu’il fonctionne comme ventricule systémique (hypoplasie du VG, transposition des gros vaisseaux), le VD s’adapte à une postcharge élevée et ressemble de plus en plus au VG: la contraction circulaire devient plus importante que la contraction longitudinale, comme dans le VG mais contrairement au VD normal; par contre, la torsion systolique est absente [138]. Lorsque ses capacités de compensation sont dépassées, le VD se dilate et devient sujet à de fréquentes arythmies ventriculaires. La correction chirurgicale de la cardiopathie ne permet plus une récupération fonctionnelle adéquate lorsque la taille du VD est > 150 mL/m2 [185].

Fonction ventriculaire

D’une manière générale, la fonction ventriculaire des cardiopathies congénitales adultes est diminuée, à cause de la malformation, des anomalies de charge, du remodelage et de la cyanose.

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Approche par pathologies

Les pathologies cardiaques congénitales sont habituellement classées par leur retentissement sur le débit pulmonaire (normal, abaissé, ou élevé), ou par la présence ou non de cyanose. Nous y reviendrons à propos des considérations générales sur l'anesthésie. Pour l'instant, nous allons suivre le schéma anatomique par segments, et envisager les spécificités des différentes affections et leur retentissement pour la conduite de l'anesthésie. Comme il est hors de question de passer en revue toutes les anomalies cardiaques, qui sont légion, seules seront envisagées ici celles qui sont les plus fréquentes et celles qui se rencontrent chez l'adulte. Pour compléter ces informations, on peut se référer au Chapitre 14 (Chirurgie cardiaque pédiatrique). Les illustrations sont tirées de l'imagerie échocardiographique transoesophagienne (ETO) que l'anesthésiste peut réaliser en salle d'opération. Retours veineux anormaux Il n'est pas exceptionnel de découvrir une veine cave supérieure gauche (VCSG) à l'examen ETO peropératoire; elle existe dans 0.3-1‰ de la population et dans 5% des cardiopathies congénitales [168]. Elle se draine très généralement dans le sinus coronaire, qui est très élargi (Figure 15.8). La veine cave supérieure droite (VCSD) peut être présente, hypoplasique ou absente. La VCSG ne présente aucun intérêt en tant que pathologie, mais comporte des risques en cas de chirurgie.

Risque thrombo-embolique lié à un cathéter veineux central, qui pourrait occasionner une thrombose du sinus coronaire; un cathéter placé en jugulaire ou sous-clavière doit être retiré dès que possible; le cathéter de Swan-Ganz est contre-indiqué. Si la VCSD est hypoplasique, un cathéter droit peut être quasi-occlusif.

Problème de canulation veineuse lors de CEC: la VCSG doit être drainée, ou exclue si la VCSD est de bon calibre.

En cas de cardioplégie rétrograde, le perfusat fuit dans la VCS et ne perfuse pas le coeur. Fréquence des blocs AV associés. En cas de drainage dans l’OG : CIA de type sinus coronaire; En cas de pacing endoveineux.

Une veine pulmonaire peut avoir un trajet aberrant vers l'OD au lieu de s'aboucher normalement dans l'OG. Il s'agit le plus souvent d'une veine pulmonaire supérieure droite qui se connecte à la racine de la VCS dans l'OD (Figure 15.9). Cette anomalie entraîne une surcharge droite avec dilatation de la VCS

Figure 15.8 : Veine cave supérieure gauche (VCSG). A : dilatation du sinus coronaire (SC) (≥ 1.5 cm). Une injection de microbulles dans une veine du membre supérieur gauche les fait apparaître dans le sinus coronaire avant d’arriver dans l’OD. B : vue court-axe de la VCSG (flèche) qui apparaît entre la veine pulmonaire supérieure gauche (VPSG) et l’appendice auriculaire gauche (AAG).

OD OG

Ao

CCVD

AAG

VPSG

OG OD

VD VG

A B

© Chassot 2012

SC

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ou de la VCI selon l’abouchement, de l'OD et du VD; elle est fréquemment associée à une CIA de type sinus venosus. Un retour veineux pulmonaire anormal complet (voir Figure 14.26) ne se rencontre pas chez l'adulte, soit qu'il ait été opéré dans l'enfance, soit qu'il ait entraîné le décès en bas âge. Après correction chirurgicale de retour veineux anormal, le flux doit présenter la morphologie biphasique systolo-diastolique des flux veineux centraux à l'échocardiographie. La vélocité maximale doit rester en dessous de 1.0-1.5 m/s. Un flux continu non-oscillant avec une Vmax > 1.5 m/s indique une restriction prohibitive et commande une révision chirurgicale [183]. Communication interauriculaire (CIA) La CIA est la deuxième anomalie congénitale la plus fréquente, après la bicuspidie aortique. Son incidence est de 7% de toutes les anomalies congénitales, et de 30% de celles rencontrées chez l'adulte [28]. Le septum interauriculaire peut présenter cinq types de défauts (Figure 15.10) [11,187].

Ostium secundum situé au centre du septum au niveau de la fosse ovale, représentant 75% des cas;

Ostium primum: défaut situé près de la valve tricuspide, qui fait partie du canal atrio-ventriculaire (15% des cas);

VPSD

VCS

APD Figure 15.9 : Retour veineux pulmonaire anormal partiel. La veine pulmonaire supérieure droite (VPSD) se jette dans la veine cave supérieure (VCS) juste au dessus de son abouchement dans l’OD. APD: artère pulmonaire droite (vue court-axe de l’aorte ascendante 0° avec rotation horaire de la sonde).

Figure 15.10 : Vue du septum interauriculaire depuis l'OD. A : emplacement des différentes possibilités anatomiques de communications interauriculaires [29]. B : image ETO tridimensionnelle d’une CIA de type ostium secundum, située au milieu du septum interauriculaire.

Sinus coronaire

FOP

Ostium secundum

Ostium primum

Valve tricuspide

Sinus venosus

Sinus venosus

© Chassot 2012

A B

VCS Valve tricusp

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Sinus venosus situé à l'origine d'une veine cave (le plus fréquement la VCS), souvent associé à un retour veineux pulmonaire anormal partiel (5-10% des cas);

Absence de toit du sinus coronaire qui le met en communication avec l'OG (< 1%); Cas particulier: foramen ovale perméable (FOP).

Le débit du shunt gauche → droit (G-D) est fonction de sa taille (diamètre de 5 à 30 mm) et de la compliance des cavités droites. Il conduit à une surcharge de volume à droite, donc à une dilatation de l'OD, du VD et de l'AP (Figure 15.11, Figure 15.12 et Figure 15.13). Le VD est dilaté et hypertrophié pour accommoder la surcharge de volume. Le diamètre la l'AP est plus grand que celui de l'aorte, et le flux y est accéléré. Le rapport normal de 0.6 entre les dimensions droites et gauches et entre la vélocité de l'AP et celle de l'aorte est plus que doublé. Le diagnostic échocardiographique est posé sur un défaut visible dans le septum (Figure 15.11), un flux systolo-diastolique entre les deux oreillettes (Figure 15.13) et une dilatation des chambres droites.

OG

VD

OD

VG

AP

Ao

D C

B A Figure 15.11 : Communications inter-auriculaires (CIA). A : CIA de type ostium secundum, située au milieu de la fosse ovale. B : CIA de type ostium primum dans le cadre d’un canal AV ; l’aspect ourlé du feuillet septal de la tricuspide indique la fermeture spontanée d’une CIV sous-jacente. C : CIA de type sinus venosus supérieur, située à l’abouchement de la veine cave supérieure (VCS). D : dilatation de l’artère pulmonaire, dont le diamètre en diastole est presque le double de celui de l’aorte ascendante.

Figure 15.12 : Communication interauriculaire. A : Schéma de la silhouette des 4 chambres cardiaques en cas de CIA avec un shunt gauche → droit important (flèche). L'OD et le VD sont dilatés; le VD est hypertrophié. L’apex du cœur est formé par le VD, non par le VG.

LV

VD

OG

VG

© Chassot 2012

OD

AP

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Le flux à travers le shunt a un aspect biphasique typique (Vmax 0.5-1.5 m/s): il présente un pic télésystolique – protodiastolique correspondant à l'onde "v" et un pic durant la contraction auriculaire correspondant à l'onde "a" (Figure 15.14) [18,34]. Entre deux, il existe deux périodes pendant lesquelles le flux est ralenti, voire renversé; elles correspondent aux descentes de pression "x" et "y" [90,109]. Cette morphologie est liée à l'évolution des pressions dans les oreillettes au cours du cycle cardiaque [106]. En effet, l'amplitude des variations de pression est plus grande dans l'OG que dans l'OD: la pression est donc plus élevée à gauche qu'à droite pendant les pics de pression, mais plus basse pendant les nadirs de pression, ce qui permet une inversion du flux à ce moment (Figure 15.14B) [18]. Le renversement le plus significatif a lieu en systole, car la descente de l'anneau mitral provoque une augmentation brusque du volume de l'OG et une diminution importante de sa pression. La composante D-G du shunt s'accentue lorsque le remplissage de l'OD augmente à la faveur d'une chute de la pression endothoracique (relaxation après Valsalva, manoeuvre de Müller); il en est de même lorsque la POD augmente parce que la postcharge et la pression de remplissage du VD s'élèvent, comme pendant un inspirium en IPPV ou une PEEP (Figure 15.15) [90]. Ainsi même un shunt à prédominance G-D peut occasionner une embolie paradoxale à la faveur d'une manoeuvre de Valsalva ou d'une PEEP excessive (Figure 15.16). En anesthésie, ceci oblige à une "chasse aux bulles" dans toutes les voies veineuses pour éviter des embolies gazeuses cérébrales ou coronaires. Figure 15.14 : Représentations spectrales du flux à travers une CIA. A : le shunt est à large prédominance gauche - droit (flux en dessous de la ligne de base, s'éloignant du capteur situé dans l'oesophage), avec deux composantes (flèches rouges); il présente aussi deux petites composantes droite - gauche au-dessus de la ligne de base (flèches bleues). B : représentation des courbes de pression de l'OG (rouge) et de l'OD (jaune) [71, 86, 88]. Les variations de pression sont plus amples à gauche. De ce fait, la POG est plus élevée que la POD lors des pics de pression, mais plus basse lors de nadirs de pression. Le flux sera donc gauche - droit pendant les ondes a et v (flèches rouges), mais droite - gauche pendant les descentes x et y (flèches bleues) [106].

OG

OD

VAo

Figure 15.13 : Image échocardio-graphique transoesophagienne du flux Doppler couleur à travers de CIA situées au milieu de la membrane de la fosse ovale (ostium secundum) ; le flux du shunt va de l’OG vers l’OD (shunt G-D). VAo : valve aortique.

A B

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Figure 15.15 : Effet de la ventilation sur le flux d'une CIA. En apnée (A), le flux est presque exclusivement gauche - droit. En IPPV (B), la vélocité du flux gauche – droit diminue. L'adjonction de 10 cm H2O de PEEP (C) réduit encore la composante gauche - droite, et augmente la composante droite - gauche. Malgré une ventilation adéquate, la saturation artérielle va baisser [35]. Une petite CIA peut rester asymptomatique fort longtemps; le seul indice est un souffle systolique 3/6 de haut débit à travers la valve pulmonaire, que l'on entend au bord supérieur gauche du sternum, et un deuxième bruit dédoublé et fixe. L'ECG présente une déviation axiale droite et la radiographie du thorax un agrandissement des cavités droites et du bord de l'AP. Mais les adultes présentent le plus souvent une dyspnée d'effort, des arythmies sus-jonctionnelles et des épisodes de décompensation droite. Les CIA associées à une augmentation de plus de 50% du flux pulmonaire (Qp : Qs > 1.5), à des embolies paradoxales et à une dilatation droite doivent être fermées afin de prévenir les arythmies (tachyarythmies sus-jonctionnelles) et la décompensation droite [70,100]. Il n'y a pas de séquelles si l'opération a lieu avant 3 ans, alors que l’hypertrophie ventriculaire droite persiste si la correction a lieu au-delà de 5 ans. La mortalité opératoire tend à augmenter au-delà de 40 ans. La surcharge de volume dilate le VD et l'anneau tricuspidien; ceci provoque une insuffisance tricuspidienne, en général de degré 1-2 sur 4. S'il est très important, le shunt induit une hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) modérée (rarement > 500 dynes•s•cm-5), une hypertrophie puis une défaillance du VD. Dans ce cas, le débit du shunt diminue, comme le gradient de pression entre l'OG et l'OD; le shunt devient bidirectionnel. Il peut même s'inverser, et le malade devient cyanosé. Toutefois, le syndrome d'Eisenmenger (HTAP fixée) est rare : il survient chez moins de 5% des malades de plus de 40 ans [11,28]. Une insuffisance mitrale apparaît dans 15% des cas non-opérés [108]. Lorsqu'elles sont centrales (ostium secundum ou PFO) et entourées de bords de bonnes dimensions (≥ 5 mm), les CIA de moins de 40 mm sont occluses par une prothèse placée par voie percutanée (occluders Amplatzer™, PFO Star™, Helex™, etc) [11,36,162,187]. Bien que le taux de complication

A B C

OG

VD

VAo OD

Figure 15.16 : Lorsque la pression dans l'OD est momentanément supérieure à celle de l'OG, le flux se renverse à travers la CIA (flèche); une embolie paradoxale peut survenir à ce moment, comme l'indique le passage de microbulles de l'OD dans l'OG en présence de PEEP. VAo : valve aortique.

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soit ≤ 1%, les résultats à très long terme restent mal connus. Lorsqu’elles sont grandes ou d’un autre type que l’ostium secundum, les CIA sont fermées par voie chirurgicale (patch de péricarde autologue ou fermeture directe) ; la mortalité opératoire est < 1% [11]. Le devenir optimal est assuré par une fermeture de la CIA avant l’âge de 25 ans, sur la base du shunt G-D (Qp / Qs > 1.5), de la dilatation droite, de la dyspnée ou de l’anamnèse d’embolies paradoxales [11]. En présence d’HTAP, la fermeture d’une CIA n’est indiquée que si le shunt est majoritairement G-D et si le rapport RAP/RAS est < 0.6 [11,162,187]. Foramen ovale perméable (FOP) Un FOP est une découverte courante dans la population normale; son incidence varie de 5-10% à l'échocardiographie bidimensionnelle, à 24% lors d'autopsie ou 27% à l'inspection directe peropératoire, où il se présente comme une fente d’environ 20 mm [2,16,99,157]. Il est fréquemment associé à une élongation de la membrane de la fosse ovale formant une membrane flottante (63% des cas) ou à un anévrysme du septum interauriculaire (42% des cas) [1]. Normalement, la membrane de la fosse ovale fusionne avec la partie fibro-musculaire du septum interauriculaire dans la première année de vie. Lorsque cette fusion n'a pas lieu, la membrane est simplement accolée par le jeu de la pression plus haute de l'OG; elle laisse en général un petit passage sous forme d'un shunt G-D permanent mais minime. Mais si la pression de l'OD devient momentanément supérieure à celle de l'OG (manoeuvre de Valsalva, PEEP, embolie pulmonaire), le FOP s'ouvre par bascule de la membrane dans l’OG et constitue alors un shunt D-G qui présente un risque de désaturation artérielle et d'embolisation systémique [170]. Le FOP se diagnostique à l'échocardiographie par la présence d'un flux couleur (Figure 15.17) et par un test aux microbulles (Figure 15.18) [2,110].

Le Doppler couleur met en évidence un flux de shunt G → D dans 80% des FOP ; L'épreuve de contraste permet de détecter l’éventuelle composante D → G du shunt.

L’épreuve de contraste se fait par l'injection rapide, de préférence par voie centrale, de 10 ml NaCl 0.9% dans lesquels on a créé des microbulles par cavitation entre deux seringues. Elle démontre une opacification de l'OD et une apparition immédiate de microbulles dans l'OG et dans l'aorte; si ces dernières arrivent dans l'OG plus de 5 cycles cardiaques après leur apparition dans l'OD, elles sont

Microbulles dans l'OD

Membrane du septum

Passage dans l'OG

CCVG

Figure 15.17: Foramen ovale perméable (FOP). Image ETO du flux couleur qui passe entre la membrane de la fosse ovale et la partie fibro-musculaire du septum interauriculaire. Ao : valve aortique.

Figure 15.18: Test aux microbulles. Passage de microbulles depuis l'OD vers l'OG. L'OD est remplis de contraste; à chaque cycle cardiaque, une bouffée de microbulles est éjectée dans l'OG à travers le FOP.

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probablement dues au passage transpulmonaire. Pour favoriser le passage D-G, on réalise deux manœuvres différentes [77].

Une augmentation de pression dans l’OD en élevant la postcharge du VD par une PEEP importante (20-25 cm H2O);

Une augmentation de volume de l’OD en relâchant brusquement la pression dans les voies aériennes ; ceci a pour effet d'augmenter le retour veineux vers l'OD mais de freiner momentanément celui vers l'OG.

Ces deux manoeuvres de provocation augmentent le taux de diagnostic à 92% des FOP [1,2]. Le FOP comme la CIA, peut donner lieu à des embolies paradoxales, bien plus rares que l'incidence de la lésion, puisqu'elles surviennent dans 1-2% des cas seulement [25]. Ces embolies peuvent quelquefois conduire à des accidents vasculaires cérébraux [105]. Elles surviennent probablement pendant des manoeuvres de Valsalva, en cas d'hypertension pulmonaire aiguë sur embolie pulmonaire massive, ou en cas d'embolisation gazeuse, par exemple lors de coelioscopie, d'interventions neurochirurgicales en position assise (12-39% des cas) ou de décompression après plongée sous-marine [27,57]. La plongée sous-marine non-professionnelle n’est toutefois pas considérée comme une indication à une recherche systématique de FOP ni à sa fermeture [176]. Les embolies paradoxales sont favorisées par la présence d’un anévrysme du septum interauriculaire, par la persistance de la membrane d’Eustache, qui dévie le sang de la VCI vers le FOP, et par les arythmies sus-jonctionnelles [84]. Le problème majeur du FOP est son degré d’association à un AVC de nature embolique. De nombreux travaux démontrent que la lésion est significativement corrélée à des AVC cryptogéniques (OR 3.0 - 3.7) [25,78,133]. Lors d’embolie pulmonaire, par exemple, la présence d’infarctus cérébraux silencieux est plus fréquente chez les malades porteurs de FOP (OR 34.9) [39], et la mortalité de ces derniers est 3 fois plus élevée que celle des malades sans FOP [101]. La relation est plus étroite lorsque le FOP est associé à un anévrysme du septum interauriculaire (OR 15.6) [133]. Il semble aussi exister une relation avec la migraine réfractaire avec aura [84]. La découverte fortuite d'un FOP lors de chirurgie cardiaque pose la question de sa fermeture au cours de la CEC, ce qui implique une double canulation veineuse et un prolongement de l'intervention. Une enquête récente a montré que 28% des opérateurs le fait systématiquement, mais que la majorité ne ferme le FOP que s'il est de grande taille, si le malade a une anamnèse d'embolie artérielle, ou si la pression dans l'OD est élevée [169]. La fermeture peropératoire d’un FOP asymptomatique ne modifie pas la morbi-mortalité postopératoire, mais semble au contraire augmenter le risque d’AVC (OR 2.47) [102]. D’ailleurs, les recommandations restent très conservatrices sur l’indication à occlure un FOP, qui n’est proposée que lors de récidive d’embolie paradoxale occasionnant un AVC clinique ou cryptogénique, ou des occlusions artérielles à répétition [55,120]. En effet, les données cliniques ne sont pas assez robustes pour déterminer une relation de cause à effet directe entre le FOP et l’AVC, et la fermeture d’un FOP n’exclut pas la récidive d’ictus ni celle d’embolie paradoxale. La découverte fortuite d’un FOP asymptomatique à l’ETO peropératoire ne peut donc inciter à sa fermeture "en passant" que s’il est important, s’il est bidirectionnel, s’il est accompagné d’un anévrysme du septum et s’il existe un risque que la POD soit supérieure à la POG. Anesthésie en cas de CIA L’impact de la CIA sur le déroulement de l’anesthésie dépend de l'importance du shunt, de sa direction préférentielle et de la présence d'une éventuelle hypertension pulmonaire (HTAP) (Tableau 15.1).

La prise en charge hémodynamique vise à réduire l'importance du shunt. On l'obtient par une baisse des résistances artérielles systémiques (RAS) et une légère augmentation des résistances artérielles pulmonaires (RAP) (voir Figure 15.57, page 60). Pour autant qu'il n'y ait

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 21

pas d'HTAP, ceci s’obtient par vasodilatation systémique et discrète hypoventilation (FiO2 0.3, PaCO2 45 mmHg).

La ventilation en pression positive (IPPV) et, a fortiori la PEEP, élèvent la postcharge du VD; elles freinent la composante G-D du shunt mais augmentent la composante D-G; lors de shunt partiellement bidirectionnel, elle peuvent induire une désaturation artérielle. Il est recommandé de ventiler à basse pression avec une FiO2 de 0.3, en maintenant une légère hypercapnie.

En cas d'HTAP, la ventilation en pression positive augmente encore la postcharge droite. Toutefois, cette augmentation de pression est faible par rapport à la pression pulmonaire au repos; elle représente même une plus faible augmentation de postcharge que chez un individu normal. D'autre part, la ventilation contrôlée permet de baisser les RAP par hyperventilation et hypocapnie (voir Hypertension pulmonaire, page 63).

La vasodilatation artérielle systémique baisse les pressions gauches et diminue le volume du shunt G-D. De ce point de vue, l'isoflurane et l'anesthésie loco-régionale rachidienne sont de bons choix. Mais si le shunt est déjà bidirectionnel parce que la surcharge droite a induit une HTAP, c'est la composante D-G du shunt qui va augmenter, et avec elle la désaturation artérielle.

L'hypovolémie est mal supportée, car le patient a besoin d'un haut volume circulant pour maintenir son débit systémique, vu qu'une partie du volume est obligatoirement séquestrée par le shunt entre l'OD et l'OG via le circuit pulmonaire à basse pression; ceci est d'autant plus marqué que les RAS sont élevées.

La mesure de PVC est un piètre indice de précharge, car la POD est élevée à cause du shunt et de l'éventuelle insuffisance tricuspidienne.

Le VD a besoin d'une précharge d'autant plus importante qu'il est hypertrophié. La fonction ventriculaire droite peut être améliorée en augmentant la contractilité et la fréquence (dobutamine, milrinone).

Toute élévation de pression dans l'OD augmente le risque d'embolie paradoxale; celle-ci peut survenir sur thrombo-embolie périphérique ou sur injection intempestive d'air ou de particules par des voies veineuses. Il faut méticuleusement éliminer toute bulle d’air dans les perfusions.

La fermeture d’une CIA rend le malade brusquement hypervolémique : le volume précédemment "volé" dans le circuit pulmonaire par le shunt et ne circulant qu’entre l’OD et l’OG se retrouve additionné au volume circulant systémique.

Tableau 15.1 Cardiopathies congénitales avec shunt G → D

Flux pulmonaire augmenté (Qp ↑) Pathologies non-cyanogènes: CIV, canal AV, CIV, connections veineuses anormales, canal artériel. Le flux pulmonaire est augmenté:

• CIA: surcharge de volume du VD (HVD) • CIV: surcharge de volume du VG (HVG)

Le shunt G – D de longue durée (CIV) conduit à l'hypertension pulmonaire et à la surcharge de pression du ventricule droit Pour ↓ le shunt: ↓ RAS, ↑ RAP. La prise en charge anesthésique vise à:

• ↓ RAS (AG isoflurane, rachianesthésie ou péridurale); • ↑ RAP (hypoventilation, légère hypercarbie, FiO2 = 0.3); • ↑ précharge; l'hypovolémie est mal tolérée à cause de la séquestration du volume dans le lit

pulmonaire. L'induction par des agents intraveineux est un peu retardée; l'effet des gaz est accéléré. Les shunts palliatifs (Blalock-Taussig) et les collatérales aorto-pulmonaires sont différents:

• Le débit du shunt est fixe et proportionnel à la PA systémique; • La baisse des RAS diminue le débit du shunt, donc le débit pulmonaire; • L'hypotension artérielle diminue la SaO2.

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Communication interauriculaire (CIA)

Caractéristiques:

- Shunt G → D non cyanogène avec augmentation du débit pulmonaire (Qp ↑, Qp/Qs > 1.5) - Petite composante D → G possible (risque ↑ si HTAP ou ↑ P OD) - Dilatation des chambres de réception: OD, VD, AP - Surcharge de volume pour le VD - HTAP peu fréquente (< 10% des adultes: RAP 300-500 dynes•cm•s-5) - Indications opératoires: Qp/Qs > 1.5, dilatation du VD

Indications à la fermeture d’un FOP: récidive d’embolie paradoxale occasionnant un AVC ou des occlusions artérielles; en cours d’opération cardiaque: FOP bidirectionnel et risque de POD > POG.

Pour diminuer le shunt, il faut baisser les RAS et augmenter les RAP Recommandations pour l’anesthésie: - AG avec isoflurane - ALR rachidienne (rachianesthésie, péridurale) - Ventilation: FiO2 0.3, normo- ou discrète hyper-carbie, P ventil basse, pas de PEEP - Hypovolémie mal tolérée à cause de la séquestration de volume dans la circulation pulmonaire

Canal atrio-ventriculaire (Canal AV) Le canal AV est une absence de septation au centre du coeur. Il consiste en une CIA de type ostium primum, une CIV dans la chambre d’admission, et une valve auriculo-ventriculaire à 5 feuillets entourant un orifice central (Figure 15.19). Il se présente comme une CIA, une CIV et une fente (cleft) dans le feuillet septal de la valve tricuspide et dans le feuillet antérieur de la mitrale. Ces orifices communiquent entre eux, et le shunt peut prendre de nombreuses directions: VG→VD, VG→OD, OG→OD, OG→VD; sont fréquemment associées une insuffisance mitrale (VG→OG) et une insuffisance tricuspidienne (VD→OD) par les fentes (Figure 15.20). Dans certains cas, le canal AV est partiel, et ne comprend qu’une CIA avec ou sans cleft. A l'échocardiographie, les deux valves tricuspide et mitrale sont typiquement situées sur le même plan (Figure 15.2 et Figure 15.21) [34]. Le canal AV est associé à la trisomie 21 dans 35% des cas [139].

IM par la fente mitrale

© Chassot 2012

CIV membraneuse

CIA ostium primum

Fente centrale dans les

feuillets septaux des valves tricuspide et mitrale

Figure 15.19 : Schéma du canal AV. Il existe une CIA de type ostium primum (flèche horizontale), une CIV périmembraneuse (flèche incurvée), un cleft dans les feuillets septaux de la valve tricuspide et de la valve mitrale (losange), et une fuite mitrale par le cleft du feuillet antérieur (flèche verticale). Ceci résulte d'une non-fusion du septum interauriculaire, du septum interventriculaire et des deux bourgeons valvulaires auriculo-ventriculaires (endocardial cushion defect).

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 23

Figure 15.20 : Images de flux à travers un Canal AV. A : présence de deux régurgitations mitrales, l'une par le cleft (flèche verte), l'autre par la commissure physiologique (flèche jaune, IM). B : présence de deux insuffisances valvulaires par deux clefts différents, l’un à travers le feuilet septal de la tricuspide (IT), l’autre à travers le feuillet antérieur de la mitrale (flèche verte) ; ils sont séparés par le septum interauriculaire. Figure 15.21: Image ETO de canal AV. A: combinaison d’une CIA située très bas entre les oreillettes (type ostium primum) (flèche jaune), et d’une CIV haute (type chambre d’admission) (flèche verte). Les insertions septales de la valve tricuspide et de la valve mitrale sont sur le même plan ; le VD est très hypertrophié à cause de l’hypertension pulmonaire liée à la large CIV. B: CIA de type ostium primum (flèche verte) ; il s’agit en fait d’un canal AV partiel ; le VD ne présente qu’une dilatation liée à la surcharge de volume due à la CIA. La présentation clinique est déterminée par la lésion dominante, qui est le plus souvent la CIV. L'OD est dilatée, le VD et le VG sont hypertrophiés et dilatés. Le risque d'HTAP est beaucoup plus important que pour la CIA à cause de la présence d'une CIV. L'hypertension pulmonaire se développe assez tôt dans l'évolution de la maladie; elle est fonction de l'importance de la CIV. Les complications à long terme de la correction chirurgicale pratiquée dans l'enfance sont une persistance de la régurgitation mitrale, une sténose dynamique sous-aortique (obstruction de la chambre de chasse gauche) et un bloc AV. La correction chirurgicale du canal AV consiste à refermer la CIA et la CIV avec des patches et à plastier les feuillets qui présentent un cleft. La fermeture par cathétérisme percutané n’est pas réalisable [11]. L'examen échocardiographique post-correction doit porter sur la compétence des valves mitrale et tricuspide, et sur la recherche d'éventuelle fuite résiduelle autour des patches. Les petites fuites résiduelles disparaissent en général spontanément, notamment avec l'administration de protamine; seules les fuites significatives justifient une réopération. La comparaison des saturations en VCI et VCS avec celle de l'AP donne une idée de l'importance du shunt occasionné par ces fuites. Environ 10% des patients corrigés dans l’enfance doivent être réopérés à l’âge adulte à cause

B A

IM

IT

IM

A B

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d’insuffisance mitrale ou tricuspidienne, de shunt G-D résiduel, d’obstruction de la CCVG (gradient moyen > 50 mmHg) ou de dysfonction du VG [15,187]. Anesthésie Les contraintes de l'anesthésie sont dominées par la CIV, par l'hypertension pulmonaire (voir CIV page 26, et Hypertension pulmonaire page 63), et, le cas échéant, par la sténose de la chambre de chasse gauche ou la dysfonction du VD ou du VG. En cas d'ostium primum isolé, le comportement hémodynamique est celui d'une CIA simple.

Canal auriculo-ventriculaire (canal AV)

Défaut de septation centrale du cœur avec association de : - CIA ostium primum - CIV au niveau de la chambre d’admission - Fente dans le feuillet septal de la valve tricuspide et dans le feuillet antérieur de la mitrale - Shunt complexe entre OG-OD, VG-VD, OG-VD - Insuffisances tricuspidienne et mitrale Si la CIV est majeure : risque élevé d’HTAP et de dysfonction du VD. Si la CIV est minime, évolution comme une CIA ou une IM.

Maladie d'Ebstein L'anomalie d'Ebstein est caractérisée par un déplacement apical de l’implantation des feuillets septal et postérieur de la valve tricuspide de plus de 10 mm (> 0.8 cm/m2) à l'intérieur du VD (Figure 15.22). Ces deux feuillets présentent une mobilité réduite à cause du raccourcissement et de la fibrose progressive des cordages, alors que le feuillet antérieur reste en général souple, mobile et normalement positionné. La cavité ventriculaire droite est petite; la chambre d'admission du VD se retrouve faire partie de l'oreillette droite; elle est dite "atrialisée". L'OD est très dilatée (Figure 15.23). Une CIA est présente dans > 50% des cas [187]. Le VD est très restrictif malgré son aspect arrondi ; il est fonctionnellement insuffisant. La valve tricuspide peut être insuffisante, sténotique, ou les deux. L’importance de l’insuffisance tricuspidienne est facilement sous-estimée à cause de l’immensité de l’OD et de la basse vélocité du flux lié à la grande taille de l’orifice de régurgitation et/ou à la dysfonction droite, elle-même souvent sous-estimée à cause du remodelage ventriculaire (Figure 15.24). Des faisceaux de conduction accessoires sont fréquents. Il n'y a que peu de corrélation entre la morphologie à l'échocardiographie et le retentissement fonctionnel de la maladie [14]. L'auscultation est caractérisée par un dédoublement large du premier bruit au bord inférieur gauche du sternum et par un souffle précoce d'insuffisance tricuspidienne. La maladie se manifeste cliniquement par une limitation du débit ventriculaire droit: stase systémique, hépatomégalie et insuffisance congestive droite. Une cyanose apparaît lorsqu’une CIA ou un FOP sont associés (shunt D-G). Les symptômes surgissent souvent à la fin de l’adolescence ; sans traitement, 80% des patients décèdent avant 30 ans [11]. Dans 25-30% des cas, les malades présentent des arythmies graves sous forme de blocs AV et de Wolf-Parkinson-White, qui peuvent être la première manifestation de la maladie [137]. Le pronostic est lié au status fonctionnel, à l’importance de la défaillance droite, à la gravité des arythmies et, le cas échéant, à la cyanose. La correction chirurgicale consiste en une atrioplastie de réduction et en une plastie de la tricuspide avec transformation en une monovalve dont l’occlusion n’est assurée que par le feuilet antérieur, ou en une bicuspidie lorsqu’un seul feuillet est bas-

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imnplanté. Ceci n’est possible que si le feuillet antérieur est assez grand et assez mobile et si la cavité fonctionnelle du VD est au moins le tiers de sa cavité totale. Un remplacement de la valve ne peut pas toujours être évité. Si le VD est hypoplasique, une anasotomose cavopulmonaire supplémentaire est parfois nécessaire pour assurer un débit pulmonaire satisfaisant [11]. Anesthésie L'anesthésie est gérée en fonction de deux données essentielles: la limitation de volume du VD (insuffisance droite restrictive) et les arythmies. L’éjection du VD est facilitée par une vasodilatation pulmonaire (voir Tableau 15.4 page 66) et une faible pression endothoracique (IPPV à basse pression). La pose d'une voie centrale peut déclencher des arythmies très dangereuses parce qu'une partie de la paroi auriculaire droite est de la paroi ventriculaire. Après correction chirurgicale, le flux tricuspidien

VG

© Chassot 2012

OD

VG

VD

OG IT

Figure 15.22 : Maladie d’Ebstein. Les feuillets septal et postérieur de la tricuspide (en jaune) sont bas insérés (> 1.5 cm en dessous de l’insertion de la valve mitrale), alors que le feuillet antérieur (en rouge) est en position normale ; la chambre d’admission du VD se retrouve dans l’OD (flèches vertes). L’OD est très dilatée, le VD est restrictif. L’insuffisance tricuspidienne (IT) est en général importante. S’il existe un FOP ou une CIA, le shunt est fréquemment D-G et cyanogène (flèche violette) parce que l’OD est en surpression. Le rapport entre la longueur de l’atrialisation du VD (flèches vertes) et celle de la cavité fonctionnelle du VD (flèche bleue) doit être < 0.5 pour permettre une plastie valvulaire.

Figure 15.23: Images d'une anomalie d'Ebstein. Les flèches indiquent la basse insertion des feuillets postérieur (rouge) et septal (vert). La double flèche jaune représente la portion du VD qui est atrialisée. Le VD est petit et triangulaire alors que l'OD gigantesque.

Figure 15.24: Vue échocardiographique transoesophagienne d'une insuffisance tricuspidienne massive dans un cas d’anomalie d'Ebstein. La flèche verte indique la basse insertion du feuillet septal.

OD

VD

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ne doit pas être limitatif; le gradient moyen à travers la valve ne doit pas dépasser 5 mmHg; une fuite résiduelle 2/4 est acceptable. La dysfonction droite est fréquente et mal tolérée ; elle peut nécessiter une ECMO. Les blocs AV complets ne sont pas rares.

Maladie d’Ebstein

Implantation apicale des feuillets postérieur et septal de la tricuspide avec rétrécissement de la cavité du VD, atrialisation de sa chambre d’admission, dilatation de l’OD et insuffisance tricuspidienne Hémodynamique : insuffisance ventriculaire droite (VD restrictif), arythmies réfractaires Anesthésie : abaisser la postcharge du VD (vasodilatation pulmonaire, IPPV à basse pression), soutien inotrope du VD, éventuellement ECMO

Communication interventriculaire (CIV) La CIV représente 10% des cardiopathies congénitales rencontrées chez l'adulte et 30% de celles découvertes à la naissance [11]. Le septum interventriculaire est musculaire, à l'exception de sa partie supérieure située sous la valve aortique, qui est membraneuse. Une communication entre les deux ventricules peut survenir à quatre endroits différents (Figure 15.25) [6].

CIV membraneuse ou périmembraneuse (Figure 15.26) : la plus fréquente (70% des cas) ; elle

est typique de la tétralogie de Fallot. Elle peut se fermer progressivement de manière spontanée.

CIV musculaire (20% des cas): elle est souvent multiple (swiss cheese septum) et peut se refermer par hypertrophie du septum (Figure 15.27).

Trablculaire- musculaire

Membraneux

Admission

Infundibulaire

Septum membraneux

Canal AV

Valve tricuspide Musculaire

Infundibulaire

Ao AP

© Chassot 2012

Figure 15.25 : Schéma représentant les différentes communications inter-ventriculaires (CIV). Les CIV basales (septum membraneux, canal AV et infundibulaire ou supracristale) sont situées près de la chambre de chasse du VD ; leur flux court-circuite la cavité du VD (flèche violette). Ci-dessous, schéma du septum inter-ventriculaire vu depuis le VD [34,35].

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 27

CIV de la chambre d'admission (5-10% des cas): elle fait partie du canal AV et apparaît en dessous et entre les feuillets septaux de la valve mitrale et de la valve tricuspide (Figure 15.28) ; elle peut être spontanément occluse par le feuillet septal de la tricuspide.

CIV infundibulaire ou supracristale (5% des cas) (Figure 15.29): elle se situe juste en dessous de la valve pulmonaire et communique avec la chambre de chasse gauche sous la valve aortique; ce voisinage induit fréquemment le prolapsus d'un ou de deux feuillets de la valve aortique (coronaire droit et plus rarement non-coronaire), ce qui conduit à une insuffisance aortique.

Figure 15.26 : CIV membraneuse. A : orifice bien visible là où devrait se trouver la partie membraneuse du septum interventriculaire ; cette CIV est typique de la tétralogie de Fallot. B : CIV en voie de fermeture par un accolement du feuillet septal de la valve tricuspide. La fermeture spontanée est un évènement assez fréquent dans les CIV de la chambre d’admission, périmembraneuses et musculaires, puisque ceci survient dans 40% des cas [135]. La CIV réalise un shunt G-D non-cyanogène qui surcharge la circulation pulmonaire. Contrairement aux CIV acquises qui sont musculaires, inférieures et apicales, la majorité des CIV congénitales se situent anatomiquement très haut au niveau de la chambre d'admission et de la chambre de chasse des

OG

OD

VD

VG

OG

OD

VD

VG VAo

A B

VD

VG

OD

OG

OD

OG

VD

VG

Figure 15.27 : Image ETO de CIV musculaire. Bien qu’elle serpente habituellement entre les trabéculations, la CIV de cette image offre un aspect à l'emporte-pièce, ce qui est assez rare.

Figure 15.28 : Images ETO de CIV de la chambre d’admission, situées sous la valve tricuspide, dans la partie proximale du septum interventriculaire. Ce type de CIV fait partie du canal AV (insertions septales de la mitrale et de la tricuspide au même niveau), en l’occurrence partiel puisqu’il n’y pas de CIA ostium primum.

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ventricules. Le sang qui emprunte le shunt court-circuite en quelque sorte la cavité ventriculaire droite; le travail de pression et de volume est effectué par le VG. Le VD n'est mis à contribution et ne s’hypertrophie que lorsque se développe une hypertension pulmonaire. La CIV provoque donc une surcharge de volume pour le VG (Figure 15.30), qui doit propulser le sang à travers le shunt dans le circuit pulmonaire; ce volume lui revient par l'OG (Figure 15.31). C'est donc en premier lieu une insuffisance gauche qui guette le malade porteur d'une CIV. L'auscultation révèle un souffle systolique râpeux irradiant en roue de char depuis le bord gauche du sternum, avec un thrill systolique prononcé. Les patients adultes peuvent se subdiviser en quatre groupes en fonction du retentissement hémodynamique de la lésion [98,127,188].

CIV fermée spontanément ou chirurgicalement; il n'y a plus de shunt, ou seulement un débit résiduel minime sans importance hémodynamique; les pressions droites sont normales; l'espérance de vie de ces patients est normale si la fermeture a eu lieu avant l'âge de 3 ans.

CIV petite et restrictive avec un shunt faible; le débit pulmonaire est peu augmenté et les pressions pulmonaires sont à la limite supérieure de la norme, mais il ne se développe pas d'HTAP; même si le risque d'endocardite est augmenté, l'espérance de vie est bonne.

OG

Ao

CCVD

CCVG

OG

CIV

VD VG

Figure 15.30 : Surcharge de volume et dilatation du VG en cas de CIV.

Figure 15.29 : Image de CIV infundibulaire ou supracristale, située sous la valve aortique ; le passage est démontré par le flux Doppler couleur. Cette CIV fait communiquer les deux chambres de chasse entre elles.

Figure 15.31 : Représentation schématique du shunt d'une CIV. Le sang propulsé par le VG à travers la CIV est éjecté dans l’AP, d’où il revient à l’OG et au VG. La surcharge de volume est donc pour le ventricule gauche. Le ventricule droit fonctionne comme un conduit passif et ne s'hypertrophie que lorsque la pression pulmonaire devient élevée.

LV

OG

VD VG

© Chassot 2012

OD

AP

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CIV modérée avec shunt significatif; les pressions pulmonaires sont élevées; le VD est hypertrophié; l'espérance de vie est de 86% à 25 ans.

CIV non-restrictive et HTAP sévère avec syndrome d'Eisenmenger (RAP > 800 dynes cm s-5) et shunt bidirectionnel (voir HTAP, page 63); la surcharge de pression provoque une défaillance ventriculaire droite avec dilatation du VD, insuffisance tricuspidienne et stase systémique. Le débit du shunt diminue à cause de l'égalisation progressive des pressions entre le VG et le VD; 40% des patients décèdent avant 25 ans. Un rapport RAP/RAS > 0.7 est une contre-indication à la correction chirurgicale car le risque est prohibitif [46].

A l'examen échocardiographique, l'artère pulmonaire et les cavités gauches sont dilatées parce que ce sont les chambres de réception du shunt [18,34,122]. Le VD est dilaté et hypertrophié en fonction du degré d'hypertension pulmonaire. Le flux couleur révèle le passage G-D et le tourbillon de réception dans le VD; la dimension de la zone d'accélération concentrique (Figure 15.32) dans le VG est proportionnelle à l'importance du shunt si celui-ci est restrictif [123]. Lorsque le shunt est majeur, ces images sont systolo-diastoliques, mais il n’y a plus de PISA; dans les petits shunts, elles ne sont présentes qu'en systole. En présence d'une CIV, la pression qui règne dans le VD en systole est contaminée par celle du VG qui propulse le flux du shunt, ce qui biaise le calcul de la pression pulmonaire par l’intermédiaire de la vélocité de l'IT (voir Figure 15.7, page 12). Par contre, il est possible de calculer la pression systolique du VD par la vélocité du flux du shunt. La vélocité maximale (Vmax) du shunt donne la différence de pression en systole entre le VG et le VD; soustraite de la pression artérielle systémique (PAs) (en l'absence de pathologie aortique), elle donne la pression systolique (Ps) du VD [34]: PsVD = PAs - 4 (Vmax CIV)2. Figure 15.32 : Caractéristiques du flux d’une CIV. Au Doppler couleur, on voit un une zone d’accélération concentrique (PISA) en amont de l’orifice, du côté ventriculaire gauche, et des tourbillons au sein de la cavité du VD ; on peut suivre le flux à travers la CIV. Au Doppler spectral, l’image est celle d’un flux systolo-diastolique à prédominance systolique. La vélocité du flux est fonction du gradient de pression entre le VD et le VG ; elle va diminuer au fur et à mesure que s’installe une hypertension pulmonaire et une décompensation droite. Le flux diastolique peut s’inverser (D-G) en cas de défaillance droite, la Ptd devenant plus haute à droite qu’à gauche. La trace pointillée est celle d’un flux de CIV musculaire, dont le conduit est obstrué momentanément par la contraction myocardique en systole. La fermeture chirurgicale de la CIV (patch ou fermeture directe) est impérative si le shunt est modéré ou majeur (Qp / Qs ≥ 2.0), si le VG est dilaté à cause de la surcharge de volume, si la lésion fait partie d'un syndrome anatomique complexe (canal AV, tétralogie de Fallot), ou si elle est située entre les chambres de chasse à cause du risque d'insuffisance aortique [112,162]. Une correction intervenue dans les deux premières années de vie assure une conservation de la fonction ventriculaire et une circulation pulmonaire normale. Mais la proximité des faisceaux de conduction rend fréquents les blocs de branche ou blocs AV complets dans le postopératoire, avec une forte proportion de malades dépendant d'un pace-maker définitif [137]. Beaucoup de CIV musculaires et certaines CIV

PISA

VD

VG

Systole Diastole

Vmax

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périmembraneuses peuvent être occluses par voie percutanée avec une morbi-mortalité très basse (1-2%). Après correction, les complications les plus courantes sont l’insuffisance aortique ou tricuspidienne, la CIV résiduelle, l’obstruction d’une chambre de chasse et les blocs AV. La fermeture de CIV est contre-indiquée si le rapport RAP/RAS est > 0.7 ou en cas d’HTAP irréversible [162,187]. Anesthésie Afin de ne pas déséquilibrer l'hémodynamique, on recherche les conditions qui diminuent le débit du shunt G-D (voir Figure 15.57 page 60). Ce sont:

Une diminution des pressions systémiques (vasodilatation artérielle); Une augmentation des pressions droites (vasoconstriction pulmonaire).

L'anesthésie générale sera conduite sous légère hypercarbie, FiO2 basse (0.3) et PEEP, par exemple avec de l’isoflurane. Ceci est valable pour autant qu'il n'existe pas d'hypertension pulmonaire préalable, auquel cas cette dernière pathologie est prioritaire. En chirurgie non-cardiaque, l'anesthésie loco-régionale rachidienne rempli bien les conditions requises [35]. Les patients porteurs de CIV sont très sensibles à l'hypovolémie. Bien que leur volume circulant soit augmenté, une partie de celui-ci ne fait que tourner dans les poumons par le shunt; or cette portion est obligatoire (elle dépend du diamètre de l'orifice), et se trouve sous un régime de pression inférieur à la pression systémique. Une perte de volume circulant se fera donc essentiellement aux dépens du volume qui circule en périphérie. La vasoconstriction artérielle de l'hypovolémie ne fait que déverser une plus grande proportion de volume dans le circuit du shunt au détriment de la perfusion systémique. Par ailleurs, la CIV est la cardiopathie qui occasionne le moins d’arythmies [11]. Après correction de CIV par patch, une petit fuite résiduelle est tolérable pour autant que les conditions suivantes soient remplies [173]:

Diamètre de la CIV résiduelle < 2 mm; Pas de zone de convergence de flux du côté gauche; Enrichissement de la saturation dans l'AP < 5%.

Un examen attentif de la tricuspide est recommandé, car le feuillet septal peut être soumis à une traction lors de la fermeture d'une CIV périmembraneuse ou de la chambre d’admission. Lors d'une réparation de CIV infundibulaire, c'est le feuillet coronarien droit ou le feuillet non-coronaire de la valve aortique qui peut être rétracté et conduire à une insuffisance aortique. La technique de réparation trans-auriculaire droite nécessite une désinsertion partielle de la tricuspide, qui doit être reconstruite; le degré de fuite résiduelle doit être clairement évalué.

Communication interventriculaire (CIV) (I)

Caractéristiques : - Shunt G → D non cyanogène, débit pulmonaire augmenté (Qp ↑, Qp/Qs > 1.5) - Chambres de réception dilatées : AP, OG, VG - Surcharge de volume pour le VG - Shunt restrictif : PAP à la limite supérieure de la norme - Shunt non-restrictif : HTAP, surcharge de pression pour le VD, HVD - HTAP sévère chez 50% des adultes (RAP 500-800 dynes•cm•s-5)

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 31

Communication interventriculaire (CIV) (II)

Pour diminuer le shunt : abaisser les RAS, augmenter les RAP (en l’absence d’HTAP) Recommandations pour l’anesthésie : - AG avec isoflurane - ALR rachidienne (rachianesthésie, péridurale) - Ventilation : FiO2 0.3, hypercarbie (sauf si HTAP) - Hypovolémie mal tolérée à cause de la séquestration de volume dans la circulation pulmonaire - Le cas échéant, prise en charge spécifique de l’insuffisance du VG et de l’HTAP (HVD)

Hypoplasie ventriculaire Le segment ventriculaire peut présenter des degrés variables d'hypoplasie d'une cavité, allant jusqu'à l'absence complète d'un ventricule (coeur univentriculaire). En général, le ventricule hypoplasique se présente comme une chambre accessoire positionnée antérieurement en cas d'hypoplasie du VD ou postérieurement lors d'hypoplasie du VG (Figure 15.33). La valve atrio-ventriculaire correspondante est également hypoplasique, imperforée ou absente. Le ventricule principal (ventricule unique) est connecté à l’aorte et à l’artère pulmonaire (ventricule à double issue); la répartition des flux tient à l'équilibre entre les résistances systémiques et pulmonaires. Le syndrome d’hypoplasie ventriculaire comprend différentes pathologies, comme l’hypoplasie du VD avec atrésie tricuspidienne, l’hypoplasie du VG et de l’arc aortique, le ventricule unique de morphologie indéterminée, le VG ou le VD à double entrée. La cavité principale subit une surcharge de volume et le degré de son remodelage, plus ou moins sphérique, a une valeur pronostique pour l'évolution fonctionnelle [156]. Un shunt au niveau auriculaire est crucial pour la survie de l'enfant. Ces malades ne survivent pas à l'âge adulte sans une intervention chirurgicale, le plus souvent de nature palliative [11].

Si la circulation pulmonaire est largement ouverte à la pression systémique, un banding de l’AP permet de restreindre le flux pulmonaire et de protéger des conséquences de l’HTAP;

Si le flux pulmonaire est très restrictif, un shunt de Blalock ou préférentiellement une anastomose cavo-pulmonaire de Glenn permet d’améliorer le flux de l’AP; ce montage est en général suivi d’une intervention selon Fontan;

Les rares cas qui ont une circulation pulmonaire adéquate peuvent survivre jusqu’à l’âge adulte.

Les malades se présentent à l’âge adulte avec un degré variable de cyanose, de nombreuses arythmies, de fréquentes lésions neurologiques (AVC, abcès cérébral) et souvent une anamnèse d’endocardite. Comme il doit assurer seul le débit systémique et le débit pulmonaire, le ventricule unique se dilate et défaille après quelques années, ce qui occasionne une régurgitation de la valve auriculo-ventriculaire. La raison pour laquelle cette pathologie est mentionnée dans ce chapitre tient au fait que les interventions réalisées dans l'enfance permettent la survie jusqu'à un âge adulte (82% > 15 ans), mais en imposant une hémodynamique très particulière [85]. C'est notamment le cas des opérations de Fontan (voir Chapitre 14, Hypoplasie ventriculaire). Pour l’anesthésie, les contraintes majeures sont la défaillance du ventricule unique, plus fréquente et plus difficile à traiter si celui-ci est de type anatomiquement droit, et le maintien du rapport entre les RAP et les RAS pour assurer un équilibre optimal entre le débit pulmonaire et le débit systémique

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 32

(maintien d’une SaO2 stable). Le but n’est pas d’obtenir la meilleure SaO2 possible, mais une égalité des flux aortique et pulmonaire (Qp/Qs = 1) (voir Chapitre 14, Cœur univentriculaire). Figure 15.33 : Hypoplasie ventriculaire. A : hypoplasie du VD avec atrésie tricuspidienne ; le VD apparaît comme une chambre accessoire antérieure reliée au ventricule unique (VU) anatomiquement gauche par une CIV; il n’y a pas de communication entre l’OD et le VD, mais une CIA entre les deux oreillettes. B : hypoplasie du coeur gauche ; le VG est une petite chambre accessoire postérieure, l’aorte ascendante est hypotrophique; le VU est anatomiquement le VD, connecté à la valve tricuspide et à l’OD. L’OD reçoit le sang systémique par les veines caves, et le sang veineux pulmonaire par une CIA. Physiologie de Fontan Il existe plusieurs types de palliation selon Fontan, qui consistent toutes à court-circuiter la valve tricuspide et le VD en déroutant le sang veineux central directement dans l'artère pulmonaire. On obtient ainsi deux circulations en série (Figure 15.34) :

Un ventricule unique qui pompe le sang oxygéné dans la circulation systémique; Un système veineux central qui alimente la circulation pulmonaire sans l’aide d’une pompe

(flux non-pulsatile).

A

B

A

© CCV, CHUV

B

© CCV, CHUV

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 33

Figure 15.34 : Atrésie tricuspidienne et sa palliation selon Fontan. A : La valve tricuspide est une membrane fibro-musculaire (flèche verte), le VD est hypoplasique et communique avec le VG par une petite CIV (flèche bleue). Le VG est l’unique ventricule fonctionnel (VU) ; il reçoit du sang venant de l’OG par la valve mitrale et communique avec l’aorte et l’AP. B : Le sang veineux passe de l’OD dans l’OG par une CIA, où il se mélange au sang artérialisé des veines pulmonaires. Ce mélange est expulsé dans l’aorte par le ventricule unique. C : tunnel latéral de Fontan ; le sang de la veine cave inférieure (VCI) se draine dans l’OD puis dans l’artère pulmonaire (AP) par l’anastomose entre la racine de la VCS et l’artère pulmonaire droite (APD) ; la CIA sert de soupape en cas de surpression. D : conduit de Fontan externe (tube prothétique) qui achemine le sang de la VCI dans l’AP ; il est souvent fenestré dans l’OD pour éviter une surcharge. En C et en D, le shunt de Glenn est une anastomose termino-latérale de la veine cave supérieure (VCS) à l'artère pulmonaire droite (APD). La première étape est l'opération de Glenn, qui consiste à anastomoser la veine cave supérieure (VCS) à l'artère pulmonaire droite (APD) séparée du tronc de l'AP (shunt unidirectionnel), ou à l'aboucher latéralement près de la bifurcation pulmonaire en maintenant la continuité de l'AP (shunt bidirectionnel). Chez l'enfant, la VCS draine la moitié du retour veineux systémique, ce qui donne un Qp/Qs de 0.5, mais chez l'adulte elle en draine moins du tiers (Qp/Qs 0.3). La deuxième étape (1-3 ans plus tard) est la procédure de Fontan, qui a subi plusieurs modifications depuis sa description originale

Ao AP

OD OD

Ao

AP

AP

VU

APD

OD

VCS

VCI

OG

VU

OG OD

AP

Ao

VD

OD

OG

VD

VG = VU

B

Ao AP

OD OD

AP

VU

VCS

Ao

© Chassot 2012 VCI

A

D C

OD

APD

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en 1971: anastomose directe de l'OD à l'AP (abandonnée), tunnel latéral reliant la VCI à l'AP via la VCS, ou conduit externe prothétique de la VCI à l'AP [61,103,107,114]. L’anastomose OD-AP aboutit à une dilatation massive de l’OD, ce qui augmente le risque d'arythmie et de thrombose ; elle n’est plus pratiquée [10]. Le tunnel latéral constitué par le conduit VCI → OD → VCS → AP a l’avantage de grandir avec l’enfant, mais le conduit externe VCI → AP offre une meilleure hémodynamique et maintient une POD plus basse (Figure 15.34). Une fénestration du conduit de Fontan dans l'oreillette permet de limiter le risque de surpression dans le circuit veineux central et de maintenir la précharge du ventricule systémique en cas d’augmentation des RAP et de baisse du débit pulmonaire, mais au prix d'une certaine désaturation artérielle [53]. La mortalité opératoire du Fontan est actuellement < 5% et la survie à 10 ans > 90% [11,62]. L'hémodynamique de la circulation de Fontan est caractérisée par un flux pulmonaire entièrement passif, dont le débit n’est assuré que par la pression veineuse centrale ; celle-ci doit donc rester élevée (≥ 15 mmHg). Certaines conditions sont requises pour le fonctionnement d’un Fontan.

Un lit pulmonaire adéquat, Des résistances vasculaires pulmonaires (RAP) basses, Une POG basse, Une valve auriculo-ventriculaire compétente, Un rythme sinusal Un ventricule systémique ayant une bonne fonction systolique et diastolique.

La pression auriculaire gauche ne doit pas dépasser 5-8 mmHg, car il faut un gradient transpulmonaire de 6-10 mmHg pour assurer le flux entre l'OD et l'OG [50]. Toute augmentation des RAP (hypoxie, atélectasies, pneumonie), de la pression intrathoracique (Valsalva, IPPV) ou de la POG (défaillance gauche, insuffisance auriculo-ventriculaire, rythme non-sinusal) diminue dramatiquement le débit pulmonaire et, de ce fait, la précharge du ventricule systémique. La saturation artérielle est normalement de 90 - 95% à l'air ambiant; une saturation inférieure à 90% signe un débit pulmonaire insuffisant. La tolérance à l'effort est la moitié de celle d'adultes du même âge [79]. Le taux de survie à 20 ans est ≥ 80% [72,85,177]. La survie est meilleure en cas d'hypoplasie du VD, parce que dans ce cas le ventricule unique systémique est un ventricule anatomiquement gauche. Dans un conduit de Fontan, la vélocité du flux est de l'ordre de 0.2 – 0.5 m/s, comme dans les grandes veines centrales. En l’absence de pompe ventriculaire, le flux y est dépulsé ; il oscille au cours du cycle cardiaque avec une composante systolique et une composante diastolique (Figure 15.35). La perte de la pulsatilité diminue la production de NO, car celle-ci est liée au stress cyclique de la paroi vasculaire pulmonaire ; ce phénomène contribue malheureusement à une augmentation des RAP [107]. Une vélocité élevée (> 1.5 m/s) signe une sténose, et la perte d'oscillation une obstruction [67]. Le débit pulmonaire moyen est en grande partie assuré par l'augmentation de flux qui a lieu à chaque inspirium en respiration spontanée. En IPPV, par contre, le flux est diminué, voir interrompu, avec chaque inspirium du respirateur. Malgré ses succès, le système de Fontan n’assure pas une survie normale à long terme. Sa défaillance se manifeste par une dyspnée, une cyanose, une rétention liquidienne, des palpitation et des syncopes. Les causes sont multiples [53].

Les tachy-arythmies susjonctionnelles sont fréquentes (40-50% à 20 ans) et mal supportées car elles augmentent la pression d’aval du circuit pulmonaire [53,165]. Elles sont fréquemment associées à la dilatation auriculaire.

Le ventricule unique doit assurer la circulation systémique et fournir l’énergie nécessaire à maintenir une pression veineuse centrale suffisante pour la circulation pulmonaire. Lorsque sa fonction diminue, sa pression diastolique augmente, ce qui élève la pression d’aval du lit pulmonaire et freine immédiatement le débit pulmonaire. Une insuffisance ventriculaire est manifeste dans 50% des cas au-delà de 30 ans [130]. Comme la réserve de précharge est faible, le débit augmente essentiellement par la tachycardie.

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 35

Comme la PVC doit rester élevée pour assurer le débit pulmonaire, la stase veineuse systémique est fréquente; 28% des patients présentent une rétention liquidienne, une hépatomégalie, de l'ascite et une entéropathie exsudative [62]. Ces effets secondaires, qui peuvent être limités par une fénestration du conduit de Fontan, sont associés à des pertes protéiques et à une dysfonction hépatique pouvant conduire à une cirrhose à long terme, qui se soldent par une hypoprotéinémie et des modifications importantes dans la synthèse des facteurs de coagulation, conduisant à un risque hémorragique significatif [179].

A cause de l’hypertension veineuse et du bas débit systémique, le taux de dysfonction rénale est de 50% chez le Fontan adulte [49].

Le taux de thrombo-embolie est en moyenne de 25% et celui d’AVC de 3-20% [53,182]. Comme la saturation normale à l’air ambiant n’est que 90-95%, la moindre diminution du

débit pulmonaire provoque une cyanose. Anesthésie en cas de Fontan La conduite de l’anesthésie vise à favoriser le flux pulmonaire, qui est passif, et à maintenir la fonction du ventricule systémique [53,86,107]. Un bas débit cardiaque est dû essentiellement à une baisse de précharge (hypovolémie), à une élévation des RAP, à une dysfonction ventriculaire ou à des arythmies.

Les RAP doivent rester basses pour maintenir le débit à travers les poumons; il faut donc

éviter l'acidose, l'hypoxémie et l'hypercapnie. Il est impératif de maintenir une hypocarbie (PaCO2 35 mmHg, pH 7.45) par légère hyperventilation. La FiO2 est réglée à 0.5-0.8.

Les RAP peuvent être abaissées par hyperventilation hypobarique, par inhalation de NO (10-20 ppm), par des prostaglandines ou par un inodilatateur comme la milrinone.

L'inspirium en respiration spontanée assure un appel de sang qui augmente le débit pulmonaire. La ventilation contrôlée, au contraire, diminue ou interrompt le débit pulmonaire à chaque inspirium du respirateur (Figure 15.35B). Il s'agit donc de laisser autant que possible ces patients en spontanée, à la condition qu'ils n'hypoventilent pas. Si l’IPPV est requise, la pression de ventilation moyenne doit être la plus faible possible. La meilleure technique de ventilation est celle qui évite l'hypoxie, l'hypercarbie et les atélectasies et maintient la pression

C

B

A Figure 15.35 : Enregistrement Doppler spectral du flux dans un circuit de Fontan. A: flux pulmonaire normal dans une circulation de Fontan ; le flux est de type veineux central, avec une composante systolique et une composante diastolique clairement séparées et pulsatiles. La Vmax est normale pour une veine centrale (< 0.8 m/s). B: en IPPV, le flux est interrompu pendant chaque inspirium en pression positive du ventilateur. C: en respiration spontanée, le flux subit au contraire une accélération considérable pendant l'inspirium, lorsque la pression intrathoracique s'abaisse en dessous de la pression atmosphérique. En B et C, le flux est enregistré par voie transgastrique, raison pour laquelle le flux est en dessous de la ligne de base (il s'éloigne du capteur en allant de la VCI vers l'AP) [34,35].

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 36

intrathoracique moyenne la plus basse possible (hyperventilation hypobarique). L'ETO permet de surveiller l'adéquation du flux dans le Fontan.

L'hypovolémie est extrêmement mal tolérée, car la baisse de précharge diminue instantanément le débit pulmonaire (baisse de la PVC). Seule la tachycardie permet d'augmenter le débit cardiaque.

La fonction ventriculaire est en général limitée, et demande le plus souvent une stimulation inotrope; la combinaison la plus efficace est une association de milrinone et d'adrénaline. Toute diminution de la fonction ventriculaire systémique augmente la pression dans l’OG et diminue le gradient transpulmonaire, donc le débit pulmonaire. Les agents d'anesthésie doivent être choisis en fonction de cette faible performance ventriculaire.

La voie veineuse centrale (PVC) mesure en réalité la pression motrice de l'artère pulmonaire (PAP). Le monitorage de cette dernière est très utile, mais le risque de thrombose est élevé; le cathéter doit être enlevé dès que possible. Une technique moins dangereuse est de mesurer la pression veineuse en jugulaire externe (cathéter court type Venflon 14-16G) ou en veine fémorale (cathéter 20 cm 14-16G). L'ETO est une manière moins invasive et plus sûre de surveiller la précharge. La PVC doit être maintenue à environ 15 mmHg.

Monitorage recommandé: SpO2, ECG, cathéter artériel, pression veineuse, PetCO2, ScO2, si possible ETO.

Pour l’induction, le propofol et le midazolam abaissent dangereusement la précharge; l’étomidate est un agent plus sûr. Le thiopental est cardiodépresseur, et la kétamine augmente les RAP chez l’adulte; ils sont contre-indiqués.

L'anesthésie loco-régionale rachidienne, particulièrement la péridurale, est une bonne solution si l'on prend soin d'éviter toute hypovolémie qui pourrait baisser la pression de perfusion pulmonaire en veillant à une installation très lente du bloc.

Dans le postopératoire, la respiration spontanée doit reprendre le plus rapidement possible, de même que l'anticoagulation ou l’antiaggrégation prophylactique. Il est judicieux d’éviter les nausées et vomissements à cause de l’augmentation de pression intrathoracique pendant les manoeuvres de Valsalva.

Une opération non-cardiaque élective n’est envisagée que si le malade est bien équilibré. La chirurgie laparoscopique est difficile, voir dangereuse, dans le contexte du Fontan, car la surpression abdominale freine le retour veineux, l’absorption du CO2 conduit à une hypercarbie, donc à une augmentation des RAP, et le risque d’embolie gazeuse paradoxale est élevé en cas de fénestration [107]. Elle est possible selon la tolérance du patient et à condition de maintenir la pression abdominale < 10 mmHg.

Circulation de Fontan

Caractéristiques : - Court-circuit du VD par dérivation VCS + VCI → AP

- Flux pulmonaire diminué (Qp ↓) ; pression motrice : PVC - Pression de perfusion pulmonaire : PVC – POG (ΔP min : 6-10 mmHg) - SpO2 normale : 90-95%

Conditions de fonctionnement : - PVC ≥ 15 mmHg - POG < 8 mmHg - RAP basses - P intrathoracique basse - Fonction VG et valve auriculo-ventriculaire normales - Absence d’arythmie

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 37

Circulation de Fontan : anesthésie Séquelles : arythmies, stase veineuse, ascite, thrombose, dysfonction VG Recommandations pour l’anesthésie: - Ventilation spontanée si possible; éviter toute hypoventilation - Ventilation: FiO2 ↑, hypocarbie, alcalose, Pmoy intrathoracique basse, pas de PEEP, NO - Hypovolémie mal tolérée (baisse du débit pulmonaire par baisse de la PVC)

Tétralogie de Fallot La tétralogie de Fallot (TdF) est la troisième affection congénitale la plus fréquemment rencontrée chez l'adulte (10% des cas). Son origine est le sous-développement de l'infundibulum droit; la bande pariétale embryonnaire est mal alignée et déviée, résultant en une obstruction de la chambre de chasse droite et en une large CIV sous-aortique [180]. La malformation associe quatre anomalies (Figure 15.36, Figure 15.37 et Figure 15.38).

Une CIV sous-aortique (septum membraneux), Une aorte à cheval sur les deux ventricules, Une sténose de la chambre de chasse droite et de la valve pulmonaire, Une hypertrophie du VD.

© Chassot 2012

Sténose pulmonaire

OG OD

VD VG

Ao

Ao

CIV

AP

HVD

Aorte à cheval

Figure 15.36 : Schéma de tétralogie de Fallot, qui comprend 4 anomalies : la valve aortique est à cheval (1) sur une large CIV périmem-braneuse (2), la valve et l'artère pulmonaire sont sténosées (3) et le VD est hypertrophié (4). L’aorte reçoit un mélange de sang artérialisé du VG et de sang veineux en provenance du VD à travers la CIV.

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 38

Figure 15.37 : Images échocardiographiques transoesophagiennes d’une tétralogie de Fallot. A: vue 5-cavités à 0° de l'aorte s'ouvrant à cheval sur les deux ventricules ; la flèche indique la CIV; la valve aortique reçoit du sang du VG et du VD; ce dernier est hypertrophié. B : vue long-axe à 120° de la racine aortique ; la valve surplombe la CIV (flèche) ; la paroi du VD mesure > 1.2 cm d’épaisseur et ses trabéculations sont hypertrophiées. Figure 15.38 : Images ETO long-axe 100-120° d’une tétralogie de Fallot. A: sténose musculaire pulmonaire dans la chambre de chasse droite ; diamètre 0.44 cm (flèche) ; la valve et l’artère pulmonaires sont hypoplasique. B : atrésie de la valve pulmonaire, qui ne présente qu’un orifice minuscule (flèche) suivi d’une artère pulmonaire hypoplasique et tubulaire. La sténose de la chambre de chasse droite (CCVD) est de nature dynamique puisque cette partie est entièrement musculaire ; toute augmentation de la contractilité ou baisse de la précharge en diminue le diamètre, accentue la sténose et freine le flux pulmonaire. La stimulation sympathique aggrave la cyanose, raison pour laquelle ces malades sont souvent béta–bloqués. Souvent, la valve pulmonaire est petite et restrictive, et l'artère pulmonaire hypoplasique; on peut parfois rencontrer une membrane dans la CCVD. Les patients sont cyanosés parce que l'aorte reçoit un mélange de sang veineux du VD et de sang artérialisé du VG. Le débit et la pression pulmonaires sont bas à cause de la sténose pulmonaire, qui protège les poumons d'une hypertension. Si les résistances vasculaires systémiques (RAS) augmentent, la proportion de sang artérialisé reçu par l'aorte augmente, parce que la composante D-G du shunt diminue. Comme il est soumis à la pression systémique, le VD dysfonctionne progressivement et se dilate. La valve aortique est compétente chez l'enfant, mais elle se dilate peu à peu avec les années, si bien qu'une insuffisance aortique (degré I-II) est présente chez 75% des adultes (Figure 15.39) [116]. Il arrive qu'une CIA compète les lésions; on parle alors de pentalogie. Plusieurs lésions peuvent être associées à la TdF, comme un arc aortique droit ou des anomalies coronaires (10% des cas) [153].

VAo VG

VD

B OG

VG OD

VD

A

VAo

A

OG

VD

AP VAo

B

CCVG

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 39

Les malades sont cyanosés et présentent des doigts en baguette de tambour. On ausculte un souffle systolique 3/6 accompagné d'un thrill systolique au bord sternal gauche vers le 2ème ou 3ème espace intercostal; un souffle méso-diastolique de fréquence moyenne au même endroit est typique d'une insuffisance pulmonaire. Les patients non opérés ont un taux de survie de 30% à 10 ans, mais de moins de 3% au-delà de 40 ans [17]. Leur existence dépend de la vicariance du flux pulmonaire par les collatérales issues des artères bronchiques; il arrive parfois que ces dernières maintiennent un débit suffisant pour atteindre l'âge adulte (Figure 15.40). On reconnaît cette situation au fait que la pression diastolique systémique est basse, car le sang de l'aorte thoracique s'échappe dans le circuit pulmonaire à basse pression en diastole. Figure 15.40 : Flux collatéral dans une tétralogie de Fallot. Le flux est visible entre une grosse collatérale issue de l'aorte descendante et une branche de l'artère pulmonaire (AP). Le flux est continu systolo-diastolique, puisque la pression systémique est constamment plus élevée que la pression pulmonaire. En nombre suffisant, ces collatérales peuvent assurer un débit pulmonaire normal au repos. Il existe un éventail de lésions voisines de celle de la tétralogie. On rencontre un certain degré de sténose pulmonaire chez 10% de tous les congénitaux [94]. Leur anatomie est voisine de celle d'un Fallot, mais sans CIV ni déplacement de l'aorte; ils ne sont pas cyanosés au repos. On parle parfois dans ces cas de Fallot rose. L'image échocardiographique est caractéristique [18,122]. La valve aortique est très grande et surplombe une CIV, ce qui l'ouvre sur les deux ventricules. Le sang s'écoule dans l'aorte depuis le VG et le VD, sans qu'il y ait de vrai shunt entre les deux ventricules. Un flux étroit et très accéléré est repérable dans la CCVD, dont la musculature est hypertrophiée. La sténose pulmonaire peut aussi

OG

CCVG

CCVG

Ao

CIV

Figure 15.39 : Image ETO de tétralogie de Fallot. Présence d'une insuffisance aortique (jet coloré) à cheval sur la CIV chez un malade adulte non opéré.

AP

Collatérale

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consister en une membrane sous-pulmonaire et/ou une hypoplasie de la valve pulmonaire qui peut être bicuspide; l'arbre pulmonaire est plus ou moins hypoplasique. Habituellement, la vélocité pulmonaire maximale (environ 3-4 m/s, correspondant à un gradient de pression de 35-65 mmHg) affiche un pic protosystolique en cas de sténose fibrotique, mais un pic télésystolique en cas de sténose musculaire dynamique. Les collatérales aorto-pulmonaires apparaissent sous forme de flux systolo-diastoliques continus et turbulents situés dans le médiastin postérieur; il arrive qu'on puisse les suivre entre l'aorte et une artère pulmonaire. Dans les années soixante-dix, il était habituel d'opérer les malades en deux temps. On procédait d'abord à un shunt G→D pour augmenter le flux pulmonaire : shunt de Blalock-Taussig (artère sous-clavière → artère pulmonaire droite ou gauche), shunt de Potts (aorte descendante → AP gauche) ou shunt de Watterston (aorte ascendante → AP droite) ; la taille du shunt réglait son débit. Cette première intervention était suivie d’une correction totale entre 5 et 10 ans. Malheureusement, cette stratégie maintenait une hypoxie et une surcharge de pression sur le VD pendant trop d'années; elle occasionnait aussi une déformation des artères pulmonaires. Actuellement, on procède à une correction totale dans la petite enfance (entre 6 et 18 mois), ce qui supprime la cyanose, normalise le flux pulmonaire et favorise la croissance de l'arbre vasculaire des poumons [47,140]. L'opération consiste à occlure la CIV par un patch ou par une fermeture directe avec réalignement du septum, et à élargir la chambre de chasse droite et la valve pulmonaire, avec ou sans patch; on peut aussi intercaler un conduit valvé entre le VD et l'AP (Figure 15.41). L'élargissement de la CCVD comporte le risque d'une insuffisance pulmonaire s'il est trop généreux ou d’une sténose persistante s’il est trop restrictif; la correction est donc un compromis entre une régurgitation minime et le plus petit gradient résiduel; le gradient maximal accepté est de 20-30 mmHg [189]. Un flux de > 3 m/s ou un gradient de > 40 mmHg sont considérés comme excessifs. Lors de résection d'une hypertrophie dynamique de la chambre de chasse, il se peut que le gradient résiduel soit fonctionnel et non anatomique; il se réduit par baisse du tonus sympathique et élévation des conditions de charge. La mortalité opératoire de la correction totale en bas âge est < 1% et la survie est de 90% à 36 ans [129]. La plupart des enfants opérés à 6-12 mois ont besoin d’une deuxième intervention en raison d’une insuffisance ou d’une sténose pulmonaire, ou pour placer un conduit plus large, alors que seuls 10-15% des cas opérés à l’âge adulte requièrent une réopération ultérieure [163].

Figure 15.41 : Correction chirurgicale d’une tétralogie de Fallot. Le patch de la CIV divise les flux en dirigeant le sang veineux systémique vers l’AP et le sang artérialisé vers l’aorte ; un patch d’élargissement lève la sténose pulmonaire et sous-pulmonaire. La flèche indique la possibilité d’un conduit valvé entre le VD et l’AP lorsque le patch n’est pas réalisable.

OD

VD

Ao

Ao AP

© Chassot 2012 Patch

sur CIV

OG

VG Patch

d’élargis-sement

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La correction peut laisser des séquelles majeures [91]:

Arythmies dans > 50% des cas : bloc de branche droit ou bloc bifasciculaire (60-100%), extrasystolie ventriculaire, FA, mort subite (40% des causes de décès à long terme) ;

CIV résiduelle (10-20%) ; Insuffisance de la valve pulmonaire (IP) avec dilatation du VD ; Sténose résiduelle du conduit pulmonaire ou de la CCVD ; Sténose résiduelle sur les artères pulmonaires périphériques; Dilatation de la racine aortique et insuffisance de la valve aortique.

Le degré de l'IP postopératoire est un facteur pronostique important pour la fonction ventriculaire droite ultérieure. L’IP est en général bien tolérée, mais lorsqu’elle est importante (degré III-IV), le VD se dilate massivement et dysfonctionne ; il s'installe une insuffisance tricuspidienne majeure (Figure 15.42). La correction chirurgicale ne permet plus une récupération fonctionnelle adéquate du VD lorsque sa taille est > 150 mL/m2 [185]. Lors de sténose résiduelle de la CCVD, le VD est soumis à une surcharge de pression; un rapport de pression VD/VG > 0.6 est mal toléré à long terme et le ventricule défaille (Figure 15.43). Figure 15.42 : Insuffisance pulmonaire massive plusieurs années après une correction de tétralogie de Fallot. A : vue long-axe de la chambre de chasse droite (CCVD) et de la racine de l’artère pulmonaire (AP). La valve pulmonaire est inexistante, le reflux diastolique occupe tout le diamètre du conduit et ne présente pas de turbulence car les pressions s’égalisent de suite entre l’AP et le VD en diastole. B : flux dans la racine de l’AP ; le reflux diastolique est massif (flèche). La surface sous la courbe et l’intégrale des vélocités (ITV) de la composante diastolique sont plus grandes que celles de la composante systolique ; toutefois, le volume systolique est le produit de l’ITV et de la surface de section du vaisseau ; comme l’AP est dilatée en systole et diminue de taille en diastole à cause de sa pulsatilité, ce produit reste plus grand en systole qu’en diastole [34].

OG

CCVD

AP

A B

AP

Zone d’accélération du flux

Patch

VD

CCVG Sténose

Figure 15.43 : Sténose pulmonaire après correction chirurgicale de TdF. Dix-huit ans après l'opération, le VD (au centre de l'image) est hypertrophié et dilaté à cause de la sténose résiduelle de la valve pulmonaire. Le flux est accéléré et turbulent à travers un orifice pulmonaire extrêment réduit. Le patch de la CIV est visible en dessous de la valve aortique, entre la CCVG et la CCVD.

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L’IP et la sténose pulmonaire sont la principale cause de réopération des Fallot à l’âge adulte (15% des cas à 20 ans) [163]. En cas d’IP, une intervention est indiquée si le VD est dilaté, insuffisant ou arythmique ; en cas de sténose, l’indication opératoire est un gradient maximal ≥ 50 mmHg et/ou un rapport de pression VD/VG ≥ 0.7 [187]. Une réopération pour mise en place d'un conduit valvé entre le VD et l'AP est en général nécessaire; elle protège le ventricule droit et freine l'apparition des arythmies, mais elle ne permet pas une récupération fonctionnelle complète du VD [11,56,175]. Or la dysfonction droite est le prédicteur majeur de la survie de ces patients, d'autant plus que l’incidence et la gravité des arythmies lui sont directement liées. La dysfonction droite et la correction incomplète ou tardive sont les principaux facteurs favorisant les arythmies et les morts subites (incidence : 5%) [69]. La dysfonction du VG est proportionnelle au délai jusqu’à la correction totale, à l’importance de la cyanose et à la durée pendant laquelle le flux pulmonaire était assuré par un shunt palliatif (Blalock, Potts, etc). Anesthésie en cas de TdF non-corrigée Lorsque la malformation n'est pas corrigée, les conditions hémodynamiques sont très contraignantes. Le but est double: diminuer le shunt et augmenter le débit pulmonaire (Tableau 15.2).

Tableau 15.2 Cardiopathies congénitales avec shunt D → G cyanogène

Flux pulmonaire diminué (Qp ↓) Pathologies: ventricule unique*, tétralogie de Fallot, Fallot avec palliation, transposition des gros vaisseaux*, atrésie pulmonaire, physiologie de Fontan. Cyanose (SaO2 < 85%), Ht élevé (> 55%). Pour ↓ le shunt et ↑ SaO2: ↑ RAS, ↓ RAP Surveillance Qp/Qs par la SaO2 La PetCO2 sous-estime la PaCO2 La prise en charge anesthésique vise à:

• ↑ RAS (stimulation α1); l'ALR rachidienne est contre-indiquée; • ↓ RAP; l'anesthésie générale avec hyperventilation normobarique est

préférable (hypocarbie, alcalose); • Après opérations de Fontan: éviter hypoxie, hypercarbie et

atélectasies; si possible respiration spontanée; • ↓ de l'obstruction dynamique de la CCVD par β-bloqueur; • Pour ↑ SaO2: ↑ RAS (stimul α1); ↑ FiO2 est sans effet;

SaO2 idéale: 85%; • Maintenir Ht > 40% si gros shunt D-G ou Qp ↓ (SaO2 ≤ 75%).

L'induction avec des agents intraveineux est accélérée; l'effet des gaz est retardé. *: en cas de TGV non corrigée ou de ventricule unique, situations rares chez l'adulte, le Qp doit correspondre au Qs (1:1); on maintient un équilibre adéquat entre RAS et RAP.

Augmenter les résistances artérielles systémiques: ceci diminue le shunt D-G cyanogène, mais au prix d'une baisse de la perfusion systémique si la vasoconstriction est intense (voir Figure 15.56, page 60). D'autre part, une hypertension artérielle augmente la postcharge du VG et du VD, ce dernier étant déjà en difficulté car soumis à une pression d'éjection systémique. La SpO2 est un monitorage efficace et immédiat de l'importance du shunt.

Augmenter le flux pulmonaire: en cas d'obstruction fixe, la vasoconstriction artérielle (stimulants alpha) est indiquée, mais lorsque l'obstruction est dynamique, le béta-blocage est nécessaire pour relâcher la musculature de la CCVD; les béta-stimulants sont alors contre-indiqués.

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Maintenir la normovolémie; en cas d'hypovolémie, la composante D-G du shunt augmente, comme lors d'une baisse de pression systémique.

En présence d'une simple palliation par un shunt systémique → pulmonaire, la perfusion pulmonaire n'est assurée que si la pression systémique est satisfaisante. Toute vasodilatation artérielle diminue le débit du shunt, donc le flux pulmonaire; la cyanose augmente. De plus, l’hypotension fait courir un risque d’ischémie coronarienne. Ces patients bénéficient donc également d’une augmentation des RAS. La pression artérielle diastolique est chroniquement abaissée lorsque le shunt débite de manière satisfaisante, parce que la pression dans l'arbre pulmonaire est très basse. Comme c'est le VG qui doit assurer la perfusion systémique et pulmonaire, il travaille en surcharge de volume et à la limite de la défaillance. Il en est de même chez les patients qui ont survécu jusqu'à l'âge adulte grâce à un réseau très développé de collatérales reliant l'aorte thoracique à l'arbre pulmonaire. Anesthésie en cas de TdF corrigée La fonction des deux ventricules est d'autant mieux conservée que la correction a eu lieu plus tôt, mais les arythmies sont fréquentes dans tous les cas [59].

Ventricule droit: en cas d'insuffisance pulmonaire à travers la zone patchée, le VD dilate et défaille sur une surcharge de volume. Il faut donc éviter tout ce qui augmente sa postcharge et provoquer une vasodilatation pulmonaire (hyperventilation normobarique, alcalose, etc). En cas de surcharge de pression (PVD / PVG > 0.5) , le risque d'ischémie sous-endocardique du VD demande le maintien d'une pression de perfusion coronarienne adéquate et d'une fréquence cardiaque normale. Dans les deux cas, un vasopresseur (noradrénaline) et un soutien inotrope (dobutamine, milrinone) sont le plus souvent nécessaires.

VG: sa surcharge est fonction des collatérales qui alimentent le réseau pulmonaire. Arythmies: blocs de branche (le plus souvent droit) dans 60% des cas, tachycardie

ventriculaire dans 5% des cas. Un pace-maker prophylactique peut être indiqué. Mesure de la pression artérielle au bras opposé au côté du shunt palliatif.

Tétralogie de Fallot non-opérée

Caractéristiques : - CIV sous-aortique (septum membraneux) - Aorte à cheval sur la CIV - Sténose pulmonaire (CCVD, valve pulmonaire, tronc de l’AP) - HVD (VD connecté à la pression systémique) Shunt D → G cyanogène, débit pulmonaire abaissé (Qp ↓, Qp/Qs < 1.0) Pour diminuer le shunt, augmenter les RAS (stimulation alpha), diminuer les RAP (hyperventilation) Si composante dynamique (CCVD) : béta-bloqueur SaO2 proportionnelle au Qp/Qs Recommandations pour l’anesthésie : - AG sevoflurane ou midazolam/propofol - ALR rachidienne contre-indiquée - Ventilation : hypocapnie, FiO2 sans effet - Augmenter les RAS pour ↑ SpO2 - Eviter la vasodilatation systémique - Maintenir la précharge : l’hypovolémie augmente le shunt D → G cyanogène

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Tétralogie de Fallot opérée Si le débit pulmonaire est assuré par un shunt palliatif (type Blalock-Taussig) ou des collatérales Ao → AP (flux fixe) - Qp proportionnel à la PA systémique - Maintenir les RAS ↑ - Hypovolémie/hypotension : Qp ↓, cyanose ↑ Après correction chirurgicale : - Séquelles : sténose ou insuffisance pulmonaire

- Arythmies - Dysfonction VD - Dilatation de la racine aortique et IA - Dysfonction VG

Shunt mixte De nombreuses malformations cardiaques entraînent un mélange du sang veineux et du sang artérialisé au niveau de l’éjection ventriculaire : tétralogie de Fallot, ventricule unique, transposition des gros vaisseaux, truncus arteriosus, etc. Bien qu’elles permettent rarement une survie jusqu’à l’âge adulte, ces cardiopathies sont très instructives du point de vue physiopathologique. Dans la tétralogie de Fallot, l’arbre pulmonaire est protégé par la sténose pulmonaire, mais ce n’est plus le cas dans les autres pathologies mentionnées : le flux pulmonaire y est proportionnel au rapport entre les RAS et les RAP. Si l’on augmente les RAS, on court le risque d’un flux pulmonaire excessif et d’une surcharge pulmonaire; bien que la SpO2 augmente, le flux systémique peut devenir insuffisant, et le patient souffrir d’une acidose métabolique par bas débit. Le but recherché est donc un équilibre entre les deux circulations (Qp/Qs voisin de 1:1), et non la meilleure SpO2 possible. Une SaO2 de 80-85% sans acidose est un résultat très satisfaisant. Il peut donc être nécessaire d’augmenter les RAP lors de l’anesthésie : FiO2 basse (0.3), hypercarbie par hypoventilation ou par adjonction de CO2 en CEC. Sténose pulmonaire Une sténose pulmonaire est présente dans environ 10% des cardiopathies congénitales, mais peut aussi exister de manière isolée et se manifester à l’âge adulte par une hypertrophie ventriculaire droite, puis une défaillance du VD. Celui-ci est souvent ischémique, car la demande en O2 est augmentée mais l’apport en O2 compromis par l’hypertension intraventriculaire en systole. Une augmentation de postcharge qui débute dès la naissance, comme c’est le cas dans la sténose pulmonaire, n’induit pas de dilatation du VD mais une hypertrophie de type concentrique. La fonction droite reste adéquate tant que la pression intraventriculaire est < 50% de la pression gauche; les patients deviennent symptomatiques lorsque la pression du VD dépasse la moitié de la pression systémique ou lorsqu’une surcharge volémique est associée (IT, shunt) [187]. La valve a une forme en dôme avec une ouverture centrale rétrécie. L’indication opératoire est posée lorsque le gradient maximal est ≥ 50 mmHg et le gradient moyen ≥ 30 mmHg [11,163,187]. La valvuloplastie percutanée par dilatation d’un ballon est le traitement de choix ; chez l’adulte, elle s’accompagne d’une insuffisance pulmonaire importante dans 25% des cas [58]. La valvulotomie chirurgicale, plus invasive, donne d’excellents résultats et une survie de 95% à 25 ans. La prise en charge anesthésique lors de sténose pulmonaire est dominée par quatre contraintes :

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Risque ischémique du VD; maintenir la pression systémique avec des vasoconstricteurs artériels pour assurer la perfusion coronarienne droite;

Risque de l’hypovolémie; le débit du VD hypertrophié est très dépendant de sa précharge; ajoutée à l’effet de la sténose, une hypovolémie entraîne ainsi une baisse significative du débit pulmonaire et une désaturation artérielle;

Prise en charge de la dysfonction droite; Prise en charge des arythmies.

Anomalies de la voie éjectionnelle du VG La zone d'éjection du ventricule gauche est l'objet de plusieurs malformations fréquemment rencontrées chez l'adulte, décrites dans les chapitres des valvulopathies (voir Chapitre 11, Sténose aortique) et de l’aorte thoracique (voir Chapitre 18, Aorte ascendante). La sténose congénitale du cône éjectionel gauche peut avoir 3 localisations différentes :

Sous-aortique dans la chambre de chasse du VG; Valvulaire proprement dite; Supravalvulaire à la racine de l’aorte ascendante.

Obstruction de la chambre de chasse La sténose sous-aortique peut être fixe ou dynamique. Dans le premier cas, il s'agit d'une membrane plus ou moins circulaire qui ceint la chambre de chasse du septum interventriculaire au feuillet antérieur de la valve mitrale, et occasionne l'équivalent d'une sténose aortique (Figure 15.44). La valve, située distalement à la membrane, est hypoplasique et incompétente dans > 50% des cas, car la sténose réduit le flux dès la naissance et le jet post-sténotique traumatise les cuspides [187]. Ce phénomène oblige à intervenir tôt dans l’évolution de la maladie pour sauvegarder la valve aortique, soit dès que le gradient moyen est > 30 mmHg [163,187]. L’association avec la coarctation de l’aorte ou une CIV est fréquente. Figure 15.44 : Images long-axe d’une sténose sous-aortique. Les flèches indiquent la membrane insérée sur la septum et sur la valve mitrale (feuillet antérieur). La sténose peut aussi être dynamique et se comporter comme une cardiomyopathie obstructive (CMO) (voir Chapitre 13 Cardiomyopathie obstructive). Caractérisée par une vélocité > 2.5 m/s (norme: 1.0-1.5 m/s) et un gradient maximal > 25 mmHg dans la CCVG, elle est aggravée par la stimulation sympathique béta, par l'hypovolémie et par la baisse des résistances périphériques. La prise en charge

VAo VG

CCVD

OG

VAo

OG

CCVD

VG

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implique un β–bloqueur, une hypervolémie et un α–stimulant. Le traitement chirurgical consiste en une résection de la membrane ou une myectomie élargie de la chambre de chasse; le risque opératoire est la création d'une CIV par résection excessive, ou un gradient persistant par résection insuffisante. L'ETO peropératoire est d'une grande importance pour diagnostiquer une CIV iatrogène ou un gradient résiduel excessif; dans 12-25% des cas, une révision chirurgicale immédiate est indiquée en fonction de cet examen [151,167]. Sténose supravalvuaire Le rétrécissement se présente comme un diaphragme ou une déformation en sablier. Il est situé à la jonction sino-tubulaire ou au-delà des sinus de Valsalva. De ce fait, les coronaires sont en amont de la sténose et soumises au régime de l’hypertension systolique. Cette situation induit une dilatation de ces vaisseaux, accélère leur dégénérescence athéromateuse et force à intervenir tôt dans l’évolution de la maladie [187]. L’intervention consiste en une reconstruction de la racine aortique avec réimplantation des coronaires. Elle est indiquée si le gradient de pression moyen est ≥ 50 mmHg ou le patient symptomatique [163]. Bicuspidie aortique La bicuspidie aortique est la malformation congénitale la plus fréquente de l'adulte, puisqu'on la rencontre chez 1-2% des patients [65]. Elle est fréquemment associée à la coarctation de l'aorte et plus rarement à la CIV périmembraneuse. Les anomalies de la racine aortique qui lui sont liées peuvent conduire à une dilatation aortique, à un anévrysme ou à une dissection [11]. La bicuspidie se reconnaît à la présence de deux valvules au lieu de trois (Figure 15.45). Elle est dite vraie lorsque ces deux valvules sont de taille plus ou moins égale, avec deux points commissuraux et une ouverture ellipsoïde. On parle de fausse bicuspidie lorsqu'il existe trois points commissuraux et que deux valvules ont secondairement fusionné, laissant la trace de cette fusion sous forme d'un raphé; l'ouverture est en forme de banane. Figure 15.45 : Bicuspidie aortique. A: il n'y a que deux commissures, l'ouverture (flèche) est ellipsoïde. B: bicuspidie dans le cadre d'un syndrome de Marfan; l'ouverture de la valve est ellipsoïde, les bords des deux feuillets n'atteignent pas les parois de l'aorte en systole. La valve aortique bicuspide est fragile, ses valvules sont soumises à un stress plus intense que celui d'une valve normale. Ses bords ne peuvent pas rejoindre la paroi des sinus de Valsalva à l'ouverture et vibrent pendant la systole, ce qui donne naissance à un souffle systolique. Lorsqu'elle se fibrose et se calcifie, elle devient sténotique, en général vers 40-50 ans (Figure 15.46). Elle peut aussi devenir insuffisante par dilatation de l'anneau, par bascule ou par déchirure d'un feuillet; ceci survient en général à un âge plus précoce que la sténose. Le plus souvent, il s’agit d’une maladie aortique avec

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combinaison à des degrés variables de sténose et d’insuffisance. La progression est d’autant plus rapide que l’ouverture est plus excentrique. L'auscultation de la sténose aortique consiste en un souffle éjectionnel 5/6 avec un thrill, un dédoublement paradoxal du deuxième bruit, et un click d'éjection audible à l'apex. Figure 15.46 : "Fausse" bicuspidie aortique; il y a trois commissures (1, 2 et 3), mais l'ouverture est ellipsoïde parce que les feuillets non-coronaire (NC) et coronarien droit (CD) sont fusionnés au niveau d'un raphé calcifié (flèche) et ne forme plus qu'un seul feuillet. A droite : pièce anatomo-pathologique du cas présenté. Options chirurgicales Dans la bicuspidie aortique sténotique, l’indication opératoire est posée lorsque le gradient moyen est ≥ 50 mmHg, la surface ≤ 0.6 cm2/m2, le patient symptomatique ou le VG en voie de dilatation [163,187]. En cas d’insuffisance, l’indication est fondée sur la sévérité de l’IA et sur la dilatation du VG. Chez l’enfant et chez le jeune adulte, on évite de mettre en place une prothèse valvulaire, car une prothèse mécanique réclame une anticoagulation à vie et une prothèse biologique ne dure que 10 à 15 ans (voir Chapitre 11 Prothèses valvulaires). Si la valve est souple, non-calcifiée et sans insuffisance, une valvotomie percutanée par un ballon gonflable permet de lever l’obstacle et d’empêcher le remodelage ventriculaire. Le risque est de créer une insuffisance résiduelle. Le taux de succès à long terme est équivalent à celui d’une prothèse [153]. Si la situation ne se prête pas à une valvulotomie, on peut procéder à une plastie aortique (voir Chapitre 11 Autres plasties valvulaires) ou à une opération de Ross (Figure 15.47). Lors de celle-ci, on transpose la valve pulmonaire en position aortique (avec réimplantation des coronaires) et on met en place une homogreffe en position pulmonaire. Cette technique évite l’anticoagulation et permet la croissance de la valve. La raison de ce croisement est que le taux d’usure des homogreffes est élevé en position aortique (30% à 10 ans); il est alors préférable d’avoir une incompétence sur la voie pulmonaire qui peut accommoder de grandes variations de volume, ou d’avoir une sténose que l’on peut dilater par cathétérisme sans risque d’embolie systémique; les mêmes lésions d’usure en position aortique imposeraient la mise en place d’une prothèse. L’opération de Ross est contre-indiquée s'il existe une insuffisance pulmonaire, une bicuspidie pulmonaire ou une dysfonction ventriculaire importante. La mortalité opératoire de l’opération de Ross est de 3% et la mortalité à long-terme < 1%/an ; le taux de détérioration de l’autogreffe aortique est de 1%/an, mais celui de l’homogreffe de la voie droite est plus élevé (2-3%/an). Une insuffisance de la néovalve aortique se développe chez 30% des malades [66]. Le taux de réopération au-delà de 12 ans est de 10% pour la valve aortique et de 20-30% pour l'homogreffe pulmonaire [171]. Au-delà de 40 ans, la valve est remplacée par une prothèse, de préférence mécanique. La prothèse biologique est réservée aux patients qui ne peuvent pas être anticoagulés ou qui sont âgés de plus de 65 ans. L’implantation transcathéter (TAVI) n’est pas adaptée

CD

CG NC

1

3 3

2

2

1

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à la bicuspidie aortique, mais peut traiter une sténose ou une incompétence de l’homogreffe pulmonaire de manière non-invasive. Figure 15.47 : Opération de Ross. Elle consiste à réséquer la valve aortique malade, à y implanter la valve pulmonaire du patient, et à remplacer cette dernière par un conduit valvé entre le VD et l'AP. Anesthésie Les contraintes de l’anesthésie sont celles d’une sténose aortique (voir Chapitre 11, Sténose aortique, Anesthésie).

Maintien de la précharge; Maintien de la normocardie; Maintien de la pression de perfusion systémique par des vasoconstricteurs artériels; Prise en charge d’une éventuelle dysfonction du VG; En résumé, le malade doit être: plein – régulier - fermé.

La prise en charge est modifiée lorsqu’une insuffisance aortique est présente (voir Chapitre 11, Insuffisance aortique, Anesthésie).

Maintien de la précharge ; Tachycardie (fréquence 80 batt/min) ; Baisse de la pression systémique par des vasodilatateurs artériels; Prise en charge de la dysfonction du VG, qui est dilaté; En résumé, la malade doit être : plein – rapide – ouvert.

Dans la sténose sus-aortique, le flux sanguin est dévié de telle manière que le flux s’engouffre dans le tronc brachiocéphalique, où la pression est plus élevée que dans la crosse distale [11]. De ce fait, il est important de placer le cathéter artériel en position radiale gauche ou fémorale. Dans les reconstructions de la racine aortique, l’emplacement du cathéter varie selon la stratégie chirurgicale et la canulation de CEC (voir Chapitre 18, Aorte ascendante, Monitorage).

Autogreffe pulmonaire

Autogreffe pulmonaire

Hétérogreffe pulmonaire

Autogreffe pulmonaire

Valve aortique lésée

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Lésions de la voie éjectionnelle gauche

Trois affections congénitales :

- Sténose sous-aortique membraneuse (dysplasie valvulaire et IA fréquentes) ; - Biscupidie valvulaire (sténose et/ou insuffisance) ; - Sténose supra-aortique.

La prise en charge anesthésique est celle d’une sténose aortique (Plein – Régulier - Fermé) ou d’une insufisance aortique (Plein – Rapide – Ouvert) selon la lésion prédominante.

Syndrome de Marfan Le syndrome de Marfan est une maladie du tissu conjonctif autosomale dominante dont la prévalence est de 0.3‰. Une dilatation de la racine de l’aorte et de l’aorte ascendante est retrouvée chez 60-80% de ces malades (Figure 15.48); la dissection en est une complication classique (voir Chapitre 18, Aorte ascendante) [11]. La force éjectionnelle du VG doit être abaissée par un béta-bloqueur et la pression artérielle strictement contrôlée par des vasodilatateurs (PAsyst < 120 mmHg). L’indication opératoire est posée lorsque le diamètre de l’aorte ascendante est ≥ 5.0 cm (≥ 2.75 cm/m2) ou lorsqu’il augmente de > 5 mm/an [11,163]. L’intervention consiste à remplacer la racine de l’aorte (voir Figures 18.21 et 18.22) en épargnant la valve aortique si cela est possible (voir Figures 18.23 et 18.24). L’anesthésie est décrite au Chapitre 18 (Aorte ascendante, Anesthésie). Figure 15.48 : Syndrome de Marfan. A : dilatation massive de la racine aortique ; la valve aortique est bicuspide ; elle ne s’ouvre pas complètement en systole. B : insufffisance aortique majeure dans une cas de Marfan avec dilatation de la racine aortique. Transposition des gros vaisseaux (TGV) Dans la TGV, il existe une discordance complète de la jonction ventriculo-artérielle: l'aorte sort du ventricule anatomiquement droit, qui fonctionne donc comme ventricule systémique; l'artère pulmonaire est issue du ventricule morphologiquement gauche. Dans une D-TGV les deux vaisseaux sont parallèles, l’aorte est antérieure et l’artère pulmonaire est postérieure (Figure 15.48) ; dans une L-TGV, les vaisseaux sont côt-à-côte [122]. La circulation systémique et la circulation pulmonaire tournent en parallèle et non en continuité, ce qui est incompatible avec l’existence. C’est un mélange des sangs veineux et artérialisé par une CIA, une CIV (30-40% des cas) ou un canal artériel qui assure la survie. Les enfants porteurs d'une TGV ne survivent pas sans une intervention précoce.

OG

IA

Aorte CCVG

A B

Aorte

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Opération de Rashkind: par cathétérisme, on déchire le septum interauriculaire pour créer ou agrandir la CIA; on procède à cette intervention dans les premières heures après la naissance.

Opération de Mustard ou de Senning: un patch complexe positionné entre les deux oreillettes (interatrial baffle) permet de rediriger le sang veineux systémique vers le ventricule sous-pulmonaire et le sang artérialisé vers le ventricule sous-aortique (Figure 15.50). Malheureusement, le ventricule anatomiquement droit reste le ventricule systémique, ce qui ne permet pas une survie normale; il dysfonctionne vers 20-25 ans [76].

Opération de Jatene (switch artériel): avant que le remodelage des ventricules ne soit significatif (< 2-3 semaines de vie), on croise les gros vaisseaux en reconnectant l'AP sur le VD et l'aorte sur le VG; les coronaires sont réimplantées dans l'aorte (Figure 15.51). Passée la mortalité périopératoire (3%), l'espérance de vie est quasi normale (97% à 10 ans) [87,194].

Opération de Rastelli: le ventricule anatomiquement gauche est connecté à l’aorte par un patch sur la CIV et le ventricule anatomiquement droit à l’artère pulmonaire par un conduit valvé (voir Figure 27.142); elle est réservée aux cas complexes avec CIV.

Les adultes les plus âgés ont en général subi un switch auriculaire de type Mustard ou Senning, alors que ceux qui sont nés dans les années quatre-vingt ont déjà bénéficié d’un switch artériel. Anesthésie Ce sont donc des patients déjà opérés que l'on rencontre à l'âge adulte, mais qui n'ont pas pour autant une hémodynamique normale.

Après switch auriculaire (opérations de Mustard ou Senning), la dysfonction ventriculaire droite est la règle; le VD est dilaté, une insuffisance tricuspidienne apparaît [48]. Le VG est petit et le septum interventriculaire bombé dans la gauche rétrécit encore son volume diastolique. Une obstruction au retour veineux systémique et/ou pulmonaire par le patch interauriculaire est présente dans > 25% des cas. Ceci peut induire un syndrome de la VCS (le plus fréquent), une entéropathie hypoprotéinémique ou une stase pulmonaire [187]. Les tachy-arythmies sus-jonctionnelles, les bradycardies sinusales et les blocs AV sont fréquents (50-60% des cas) et réfractaires au traitement médicamenteux [37,81]. Une obstruction dynamique de la CCVG est possible car le VG est connecté à un circuit à basse pression. Lors d’une

AP

Ao

VD

VG

Ao

AP

VD

VG

VD

Ao

AP

VG

A

B C © Chassot 2012

Figure 15.49 : Illustration schématique d'une transposition des gros vaisseaux (TGV). A : vue long-axe de l’aorte et de l’AP qui apparaissent parallèles au lieu de se croiser à 45°. Le ventricule anatomiquement droit est hypertrophié (ventricule systémique sous-aortique). B : position normale de l'aorte et de l'AP. C : position des vaisseaux dans une TGV.

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anesthésie, le ventricule anatomiquement droit doit bénéficier d’un soutien inotrope et d’une perfusion coronarienne optimale, car c’est lui qui assure la perfusion systémique.

Après switch artériel, la physiologie est quasi normale. Deux complications dominent le tableau clinique: ce sont la dilatation de la racine aortique (> 50 mm) avec insuffisance de la néovalve aortique (30% des cas) et l'ischémie sur les réimplantations coronariennes (5-10% des cas) [41,63,172]. On peut aussi rencontrer des obstructions dynamiques de la CCVD ou de la CCVG, et une dysfonction du VG [40]. Ces malades sont sensibles à l'hypovolémie et à la stimulation béta, mais par ailleurs présentent une réactivité hémodynamique normale [41,194].

Après opération de Rastelli, une CIV résiduelle peut occasionner une surcharge de volume pour le VG; une sténose secondaire du conduit doit être corrigée si le gradient de pression maximal est > 50 mmHg ou le rapport de pression VD/VG > 0.7 [11,164,187].

Figure 15.50 : Opération de Mustard pour TGV: un patch positionné entre les deux oreillettes (interatrial baffle) permet de rediriger le sang veineux systémique vers le ventricule sous-pulmonaire (VG) et le sang artérialisé vers le ventricule sous-aortique (VD). Le ventricule systémique est le ventricule droit. A : les veines pulmonaires (VP) se drainent dans une oreillette veineuse postérieure (OVP) connectée au VD sous-aortique. B : la veine cave inférieure (VCI) se draine dans la partie basse d’une oreillette veineuse antérieure (OVA) connectée au VG sous-pulmonaire. La veine cave supérieure se draine de la même manière dans la partie haute de l’OVA [168].

Transposition des gros vaisseaux (TGV)

Malades opérés dans l’enfance (pas de survie sans traitement ou palliation) Croisement des retours veineux (opérations de Mustard et de Senning) - Le VD reste le ventricule systémique, d’où défaillance droite vers 20-30 ans - Obstruction dynamique de la CCVG - Stase veineuse - Arythmies Décroisement artériel (opération de Jatène, switch artériel) - IA (néo-valve aortique) - Ischémie myocardique (réimplantation coronaraire) - Obstruction dynamique de la CCVG et/ou de la CCVD Caractéristiques pour l’anesthésie

- Après switch auriculaire : défaillance droite (ventricule systémique), arythmies auriculaires, stase veineuse - Après switch artériel : physiologie normale ; risque : IA, ischémie coronarienne

VD VD

OVP

VG VG

OVS

OVP

OVA

A B

VP VP

VCI

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TGV naturellement corrigée Si une discordance auriculo-ventriculaire se rajoute à la discordance ventriculo-artérielle, la survie devient possible, car les circulations systémique et pulmonaire sont de nouveau en continuité. C'est le cas de la transposition naturellement corrigée des gros vaisseaux. Dans cette anomalie, l'AP et l'aorte sont transposées comme dans la TGV, mais les ventricules sont également inversés (Figure 15.52). De ce fait, le sang suit une séquence physiologique à travers des cavités croisées: OD → VG → AP → poumons → OG → VD → Ao.

Figure 15.51 : Opération de Jatene (switch artériel): croisement des gros vaisseaux en reconnectant l'AP sur le VD et l'aorte sur le VG. A : trans-section de l’aorte et excision des coronaires. B : l’AP est excisée et les coronaires sont réimplantées dans la partie proximale de l’AP connectée au VG. C : l’AP est positionnée antérieurement à l’aorte (manœuvre de Lecompte) ; l’AP proximale est anastomosée à l’aorte distale. D : les sites de prélèvement des coronaires sont patchés et l’aorte proximale, connectée au VD, est anastomosée à l’AP distale. Cette reconstrucion présente un risque d’ischémie myocardique.

A B

C D

Figure 15.52 : Transposition des gros vaisseaux (TGV) naturellement corrigée. A la discordance ventriculo-artérielle (TGV) s’ajoute une discordance auriculo-ventriculaire. L’OD est connectée à une valve mitrale (VM) et à un ventricule anatomiquement gauche (VG), puis à l’AP. Le sang oxygéné revient à l’OG par les veines pulmonaires ; l’OG se draine à travers une valve tricuspide dans un ventricule anatomiquement droit, connecté à l’aorte. Le malade n’est pas cyanosé, mais son ventricule systémique est un ventricule droit, qui défaille après 20-30 ans.

OG OD

VG VD

VTr VM

AP

© Chassot 2012

Ao AP

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 53

Ces malades ne sont pas cyanosés, mais le ventricule anatomiquement droit se retrouve en position sous-aortique. Lorsqu’il fonctionne ainsi comme ventricule systémique, le VD s’adapte à une postcharge élevée et ressemble de plus en plus au VG: la contraction circulaire devient plus importante que la contraction longitudinale, contrairement au VD normal [138]. Mais après une vingtaine d’années à ce régime, il se dilate, développe une insuffisance tricuspidienne sévère, et devient insuffisant vers 25-30 ans (Figure 15.53) [43]. C'est souvent à ce moment-là que le diagnostic est posé. Les blocs AV sont fréquents. La plupart des patients présentent une CIV périmembraneuse et des anomalies des valves auriculo-ventriculaires, notamment de type Ebstein [7,187]. Chez l’adulte, le traitement chirurgical est centré sur l’insuffisance tricuspidienne, qui doit être opérée avant que la fonction du VD ne se détériore [11,164]. Comme il assure la perfusion systémique, le VD doit bénéficier d’un soutien inotrope et d’une perfusion coronarienne optimale. Les contraintes de l’anesthésie sont dominées par le risque ischémique du VD et par les tachyarythmies sus-jonctionnelles. Figure 15.53 : TGV naturellement corrigée. La VCI se draine dans l’OD (situs solitus) connectée au VG, lui-même connecté à l’AP ; l’OG est connectée au VD, que l’on reconnaît à la bas-insertion de la tricuspide (flèche) ; le VD est en position sous-aortique. Le VD est hypertrophié, mais sa haute postcharge (pression systémique) a induit une insuffisance tricuspidienne massive. Coarctation de l'aorte La coarctation de l'aorte est un rétrécissement en sablier plus ou moins étendu ou une sténose sous forme de membrane située juste après le départ de l’artère sous-clavière gauche, au niveau du ligamentum arteriosum (Figure 15.54). Elle survient dans 0.3‰ des naissances [92]; elle est fréquemment associée à la bicuspidie aortique (plus de 50% des cas) et à un canal artériel (20% des cas). Elle est caractérisée par une hypertension aux membres supérieurs et une hypotension aux membres inférieurs; le gradient de pression entre les mesures au MS et au MI est supérieur à 20 mmHg. Les différences de pouls peuvent n’apparaître qu'à l'effort. A l'ETO, la pulsatilité de l'aorte thoracique est élevée au-dessus de la lésion, mais très faible en dessous. Elle impose une très forte postcharge au VG, qui s'hypertrophie de manière concentrique comme dans une sténose aortique. La fonction systolique est en général conservée, mais la fonction diastolique très altérée. Un réseau collatéral très important par les artères périscapulaires, mammaires internes, cervicales et intercostales assure une perfusion en dessous de la lésion; les intercostales dilatées sont à l'origine des entailles que l'on aperçoit à la radio du thorax au bord inférieur des côtes. L'auscultation révèle une souffle systolique 3/6 dans la région médiothoracique gauche postérieure. Ces patients meurent en général au début de l'âge adulte (âge de survie moyenne: 34 ans) d'insuffisance congestive gauche, d'endocardite, de rupture aortique haute ou d'hémorragie cérébrale [193]. L’indication opératoire est posée lorsque le

OD

VD

OG

VG

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gradient est ≥ 20 mmHg, ou en présence d’une forte collatéralisation même si le gradient est moindre [11,187]. Même corrigée dans l'enfance, la coarctation de l'aorte peut récidiver chez le jeune adulte [30]. D'autre part, 20-30% des malades opérés présentent une hypertension artérielle persistante alors même que l'obstacle à été levé [118]. Figure 15.54 : Coarctation de l’aorte. A : membrane au niveau de l’isthme. B : flux Doppler couleur avec une zone d’accélération concentrique (PISA) en amont et des turbulences en aval de la membrane (flèche). Lorsque l’anatomie est favorable, la dilatation percutanée avec ou sans stent est un traitement de choix chez le jeune adulte ; elle est moins invasive et évite le risque du clampage aortique et de l’ischémie médullaire [11,163]. Par voie chirurgicale, le risque opératoire principal est le clampage de l'aorte. Le danger est fonction de la densité des collatérales intercostales qui "pontent" la sténose (voir Chapitre 18, Aorte descendante Anesthésie). Il est plus grand lorsque le gradient de pression entre le bras droit et les membres inférieurs est faible, car la collatéralisation est alors peu développée. La sténose est habituellement courte et l'anastomose peut se réaliser bout-à-bout ; un patch réalisé avec l'artère sous-clavière gauche évite une sténose résiduelle. La durée du clampage n'excède pas 30 minutes. Lorsque la lésion est longue, elle nécessite une résection et un pontage tubulaire. Pendant le clampage, la pression d’amont est mesurée au bras droit (cathéter radial) et la pression d’aval en voie fémorale (cathéter fémoral). La pression distale en dessous du clamp doit être maintenue à ≥ 60 mmHg avec des vasoconstricteurs artériels (noradrénaline, néosynéphrine) de manière à faciliter le débit par les collatérales, où le flux est pression-dépendant, et à réduire les risques d’ischémie médullaire. Comme l'intervention se fait par thoracotomie gauche, un tube 2-lumières est recommandé pour pouvoir exclure le poumon gauche. Après l'opération, la chute de la pression diastolique est un bon marqueur de la disparition du gradient de pression. Le taux de paraplégie postopératoire secondaire à l'ischémie médullaire est de 0.1-0.4% des patients [95]. L'hypertension artérielle est fréquente après cure de correction [142]. Cette hypertension post-opératoire présente un pic à 12-24 heures, probablement dû aux décharges des baroréceptereurs réglés pour l'hypertension sus-lésionnelle, et une seconde phase après 2 à 3 jours liée à un taux excessif de rénine et d'angiotensine. Elle persiste chez 20-50% des patients, de même que l'hypertrophie du VG [113]. Dans les premiers jours postopératoires, une artérite mésentérique est fréquente; elle est due à l'hyperactivité sympathique et se traduit par des douleurs abdominales.

A B PISA

Turbulences

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Coarctation de l’aorte

Caractéristiques : - HTA aux membres supérieurs, hypoTA aux membres inférieurs (ΔP > 20 mmHg) - HVG concentrique - Réseau collatéral thoracique Recommandations pour l’anesthésie : - Tube 2-lumières (thoracotomie gauche) - Pression artérielle préductale par cathéter radial droit, post-ductale par cathéter fémoral - Pendant le clampage : maintenir la PA post-ductale > 60 mmHg (vasoconstricteur alpha) - Post-clampage : poussée hypertensive, artérite mésentérique, risque de paraplégie

Anomalies artérielles Outre la coarctation, de nombreuses anomalies sont possibles au niveau de l'arc aortique: hypoplasie, ductus arteriosus, fistules aorto-pulmonaires, anomalies coronariennes. Anomalies coronariennes L’arbre coronarien est sujet à de multiples variations anatomiques (Figure 15.55). Celles-ci peuvent poser des problèmes chirurgicaux considérables, notamment lorsque l’IVA passe au-devant de la CCVD lors d’une correction de tétralogie de Fallot ou de sténose pulmonaire. Une coronaire peut aussi se dilater et donner lieu à un anévrysme, parfois monstrueux (voir Figure 27.1D). Dans le syndrome ALPACA (anomalous left coronary artery from the pulmonary artery), l’implantation coronarienne dans l’AP compromet la perfusion myocardique du territoire concerné et oblige à une revascularisation chirurgicale précoce. Une coronaire peut avoir une origine anormale sur l'aorte, ou se terminer dans le VD ou l'AP, ce qui crée une fistule gauche - droite. Dans ce cas, le shunt est significatif, de l'ordre de ≥ 1/1.6, et une correction est nécessaire [23]. Canal artériel (ductus arteriosus) Le canal artériel relie l’aorte descendante juste après le départ de la sous-clavière gauche à la racine de l’artère pulmonaire gauche. Certains malades conservent un canal artériel perméable jusqu'à l'âge adulte; il est responsable d'un shunt G-D qui surcharge le VG et peut induire sa défaillance. Le débit du shunt dépend de la taille du canal et du rapport des résistances systémiques et pulmonaires (RAS/RAP). S'il est de faible calibre, le shunt G-D devient symptomatique vers la trentaine à cause de la surcharge de volume du VG. Le diagnostic est posé à l'auscultation: souffle 4/6 continu avec un crescendo systolique à l'extrémité supérieure du sternum, irradiant dans le dos. A l'échocardiographie, on aperçoit un flux turbulent continu suspendu dans l'artère pulmonaire et une zone d’accélération concentrique du flux dans l’aorte à l’entrée du canal ; ces flux sont essentiellement visible en diastole [122]. La persistance d’un canal de diamètre important induit une dilatation du VG et une hypertension pulmonaire ; cette dernière conduit secondairement à une hypertrophie et à une défaillance du VD. Lorsque l’HTAP rejoint les valeurs de pression de l’aorte, le shunt devient bidirectionnel, même si la diastolique pulmonaire reste longtemps inférieure à la diastolique systémique.

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 56

Un petit canal silencieux n’est pas une indication opératoire [162]. L’indication est posée si le souffle est audible, si le VG souffre d’une surcharge de volume ou s’il existe une anamnèse d’endocardite. Le shunt doit être exclusivement G-D et le rapport des RAP et des RAS inférieur à 0.7 ; lorsque le shunt est bidirectionnel, seul un banding pour diminuer le flux est encore possible [162]. L’intervention se pratique de plus en plus fréquemment par voie percutanée (Transcatheter coil closure) ou par thoracoscopie. L’indication à ligaturer le canal par thoracotomie est désormais réservée au canaux trop larges, trop calcifiés ou trop tortueux pour une fermeture par voie endovasculaire [11,187]. En peropératoire, il est intéressant de monitorer la SpO2 à la main droite et au pied droit. A SpO2 constante au membre supérieur, la SpO2 du pied se modifie de manière inversement proportionnelle au débit à travers le canal. En cas de shunt bidirectionnel, la SpO2 du pied est significativement plus basse que celle de la main parce que le shunt débite partiellement D-G. Tant que la PAP est significativement plus basse que la pression systémique, une vasodilatation artérielle diminue le shunt, mais si les deux pressions sont voisines et le shunt bidirectionnel, il faut éviter toute baisse de pression systémique qui augmenterait la composante D-G du shunt et aggraverait la cyanose post-ductale. La ligature du canal induit immédiatement une élévation de la diastolique systémique, qui était basse, et une surcharge de volume circulant, par remise en circulation du volume détourné dans les poumons. Fistule aorto-pulmonaire On rencontre de temps en temps chez l’adulte une petite communication entre l’aorte ascendante et le tronc de l’artère pulmonaire (fistule aorto-pulmonaire) qui crée un shunt G-D analogue à celui d’un

© Chassot 2010

A B

C D E

F G H

IVA

CX IVA

CD

AP

CX CD

CX

IVA

CD

IVA

CX

CD

CX

CD

CD

IVA IVA

IVA

CX

CX

CD CX CD

IVA

Figure 15.55 : Représentation schématique des anomalies coronariennes les plus fréquentes. A : situation normale, avec la position de la valve pulmonaire (AP). B à H : exemples d’anomalies. En B, C, E, F et H, un vaisseau contourne l’AP par devant et peut poser problème lors de chirurgie de la chambre de chasse droite. G : implantation intramurale [19].

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canal artériel persistant. La taille de la fistule détermine l’importance de ce shunt et le degré de surcharge de volume pour le VG. A l’échocardiographie, elle apparaît comme un petit jet dans le tronc de l’AP sur sa face antéro-latérale droite, surtout visible en diastole car il est masqué par le flux de l’AP en systole. Le traitement est une fermeture chirurgicale.

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Considérations générales pour l’anesthésie Indépendamment des particularités de chaque pathologie, les congénitaux adultes présentent de nombreux problèmes communs et des différences notables par rapport aux enfants [9,33,35,59,80, 111,147,187].

Des facteurs de risque qui sont par ordre de gravité: • Hypertension pulmonaire (PAPmoy > 25 mmHg au repos) ; • Cyanose (SaO2 ≤ 85%) ; • Réopération, séquelles ; • Arythmies ; • Dysfonction ventriculaire ; • Obstruction sévère sur la voie d’éjection.

Une mortalité opératoire moyenne de 5%, qui est supérieure à celle de l'enfant pour des pathologies appariées (chirurgie cardiaque).

Un taux d'arythmies très élevé: 58% versus 15% chez l'enfant. Un remodelage ventriculaire responsable d'une dysfonction du VD, du VG, ou des deux;

l'insuffisance ventriculaire est liée à la pathologie, à la durée d'évolution et à la présence de cyanose.

Une anomalie de la circulation pulmonaire: hypertension (HTAP) ou bas débit (cyanose). Des effets systémiques dus aux effets à long terme de l'hypoxie, de l'hyperviscosité ou de la

stase veineuse: rénaux, neurologiques, pulmonaires, hématologiques, hépatiques. Ces effets peuvent entraîner des décompensations postopératoires graves sur des modifications même mineures des conditions de perfusion.

Des modifications de la coagulation. La présence supplémentaire de maladies cardio-vasculaires liées à l'âge: diabète,

coronaropathie, hypertension artérielle, bronchopathie. L'opérabilité d'un malade relève à la fois du cardiologue, du chirurgien et de l'anesthésiste. Ce dernier doit avoir une expérience suffisante des cardiopathies congénitales pour comprendre leurs implications dans la chirurgie prévue. L’anamnèse doit rechercher des épisodes d’arythmies, de décompensation cardiaque ou de cyanose, une cardiopathie ischémique, une insuffisance rénale, une anémie et un AVC. En préopératoire, certaines améliorations peuvent être obtenues par des interventions cardiologiques particulières, telles que la dilatation percutanée de la CCVD, l’ablation de circuits aberrants par radiofréquence, l’embolisation de collatérales aorto-pulmonaires, ou l’évaluation de la réponse d'une HTAP au NO. Les congénitaux adultes (GUCH : grown-up congenital heart) subissent des interventions de chirurgie non-cardiaque plus fréquemment que la population générale [153]. Ils présentent des pathologies très particulières qui réclament des connaisances différentes de celles que l’on acquière dans le domaine conventionnel de la cardiologie, de l’anesthésie et de la cardiochirurgie. En-dehors des pathologies simples, il est impératif que les malades à haut risque soient pris en charge dans des centres de références dotés de services de cardiologie, de chirurgie et de réanimation investis dans le domaine, aussi bien pour la chirurgie cardiaque que pour la chirurgie non-cardiaque. Ceci est particulièrement le cas pour les malades cyanosés, porteurs de malformations complexes, souffrant d’HTAP ou sujets à des arythmies malignes [187]. Les principales questions que doit se poser l’anesthésiste avant d’aborder un patient adulte souffrant de cardiopathie congénitale sont au nombre de cinq (Tableau 15.3) :

Existe-t-il un shunt ? Quelle est la pression artérielle pulmonaire ? Le malade est-il cyanosé ? Quelle est sa fonction ventriculaire ?

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Quel est le risque d’arythmie ?

Tableau 15.3 Risque opératoire en chirurgie non-cardiaque

des cardiopathies congénitales de l’adulte

Risque élevé o Hypertension pulmonaire (PAPmoy > 35 mmHg) o Maladie cyanogène (SaO2 < 85%) o Arythmies malignes o Signes cliniques de défaillance cardiaque (NYHA III-IV) o Dysfonction sévère du ventricule systémique o Obstruction sévère de la voie d’éjection gauche

Risque modéré o Valve ou conduit prothétique o Shunt intracardiaque o Obstruction modérée de la voie d’éjection gauche o Dysfonction modérée du ventricule systémique

D’après référence 187.

Effets des shunts Les shunts peuvent être de type droit → gauche (cyanogène), gauche → droit (non-cyanogène), ou thérapeutique (pour améliorer le débit pulmonaire). Leur débit est fonction du diamètre de l'orifice (ou du conduit) et du rapport des impédances entre la cavité d'amont et la cavité d'aval. Ils augmentent si la pression d’amont s’élève ou si la pression d’aval s’abaisse, et diminuent si la pression d’amont s’abaisse ou si la pression d’aval s’élève. On peut donc modifier le débit d’un shunt en jouant sur les résistances artérielles systémiques (RAS) et pulmonaires (RAP).

Shunt D-G (TdF, CIV + atrésie pulmonaire, TGV, ventricule unique, Fontan) (Figure 15.56) (Tableau 15.2, page 42): il augmente si les RAS baissent ou si les RAP s’élèvent; la cyanose est proportionnelle à la baisse de pression systémique. On cherche donc à maintenir les RAS hautes et les RAP basses. Les variations de la SpO2 suivent celles du rapport Qp/Qs; l'augmentation de la FiO2 a un effet minime sur la cyanose due à ce shunt. Le passage direct du retour veineux systémique vers la voie artérielle accélère l'induction par des agents intraveineux; par contre, la captation et l'élimination des agents halogénés sont ralenties à cause du faible débit pulmonaire [89]. La PetCO2 sous-estime la PaCO2 réelle à cause de l'effet espace-mort induit par le volume sanguin court-circuitant les poumons [135].

Shunt G-D (CIA, CAV, CIV, canal artériel) (Figure 15.57) (Tableau 15.1, page 21): il diminue si les RAS baissent ou si les RAP augmentent; on cherche plutôt à baisser la pression systémique. Le problème majeur est souvent celui de la présence d'une hypertension pulmonaire. Une SpO2 élevée n'est pas la garantie que le transport d'O2 (DO2) soit satisfaisant. Avec un rapport Qp/Qs ≥ 3:1, le DO2 diminue même si le sang artériel est correctement oxygéné [80]. L'induction avec des agents intraveineux est ralentie à cause de la dilution du sang veineux par le sang artérialisé; la captation et l'élimination des halogénés sont accélérées par le haut débit pulmonaire, mais l’effet clinique est négligeable [104].

Shunt palliatif G-D (Blalock-Taussig, shunt central de Waterston ou de Potts, collatéralisation aorto-pulmonaire) (Figure 15.58 et Figure 15.59): le débit est fixé par le diamètre du conduit et peut conduire à une surcharge ventriculaire gauche. Le débit pulmonaire est directement fonction de la pression systémique. La SpO2 diminue ainsi avec les RAS. Une hypotension systémique a donc des effets désastreux sur la saturation artérielle; un alpha-stimulant

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(néosynéphrine, nor-adrénaline) s'impose en cas de désaturation artérielle. La pression diastolique est basse (PAP < PA systémique en diastole) et peut compromettre la circulation coronarienne.

Figure 15.56 : Shunt droit → gauche. Il augmente lorsque les RAS baissent, ce qui diminue le flux artériel pulmonaire (Qp). Le shunt diminue si les RAS augmentent et si les RAP baissent ; de ce fait, le flux pulmonaire augmente et la SaO2 s’améliore. La prise en charge anesthésique cherche à diminuer l’importance du shunt, donc tend vers une situation analogue à celle du schéma de droite. Figure 15.57 : Shunt gauche → droit. Il augmente lorsque les RAS s’élèvent et que les RAP baissent ; le flux pulmonaire (Qp) est alors excessif. Le shunt diminue si les RAS baissent et si les RAP augmentent ; c’est le but visé en anesthésie. L’anesthésie tend à transformer la situation de gauche vers un état proche de celle de droite.

OD OG

VD

Ao

AP

VG

RAP ⇑ RAS ⇓

Qp ⇓

Ao

VG

OD OG

VD

Ao AP

VG

Qp ⇑

RAP ⇓ RAS ⇑

© Chassot 2012

OD OG

VD

Ao AP

VG

RAP ⇓ RAS ⇑

Qp ⇑

VG

AP

OD OG

VD

Ao AP

VG

RAP ⇑ RAS ⇓

Qp ⇓

VG

© Chassot 2012

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Figure 15.58 : Shunt correctif gauche → droit pour augmenter le débit pulmonaire (Qp) lors de sténose pulmonaire. Son débit diminue lorsque les RAS baissent et augmente avec celles-ci. L’anesthésie vise donc à maintenir les RAS élevée pour protéger le débit plmonaire. La prise en charge d’un malade porteur de shunt vise à équilibrer les flux pulmonaire et systémique, et à obtenir un rapport Qp/Qs voisin de 1:1. Pour ce faire, on manipule les RAP et les RAS de manière à baisser le Qp dans un shunt G-D (RAP élevées et RAS basses) et à augmenter le Qp dans un shunt D-G (RAP basses et RAS élevées), le but étant d’obtenir la meilleure SaO2 sans acidose métabolique. D’autre part, la présence d’un shunt potentialise les effets de l’hypovolémie sur la pression artérielle, à cause de la fuite constante de volume dans le circuit pulmonaire à basse pression. Figure 15.59 : Shunt de Blalock-Taussig. A : flux dans l’artère sous-clavière avant la construction du shunt ; le flux est exclusivement systolique comme dans toute artère systémique. B : après connexion à l’artère pulmonaire, le flux devient systolo-diastolique comme dans un shunt G→D.

OD OG

VD

Ao AP

VG

RAP ⇓ RAS ⇑

Qp ⇑

VG

AP

OD OG

VD

Ao AP

VG

RAP ⇑ RAS ⇓

Qp ⇓

VG

© Chassot 2012

A B

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Shunts et anesthésie

Shunt D – G : maintenir RAS élevées et RAP basses pour diminuer le shunt cyanogène - induction iv accélérée - induction-réveil par inhalation ralentis Shunt G – D : maintenir RAS basses et RAP élevées pour diminuer le shunt (non-cyanogène) - induction iv ralentie - induction-réveil par inhalation accélérés Shunt G – D palliatif : maintenir RAS élevées pour améliorer le flux pulmonaire

Hypoxémie et cyanose La cyanose est due à un débit pulmonaire insuffisant (sténose pulmonaire, atrésie tricuspidienne, Fontan, par exemple), ou à une contamination du sang artérialisé par un shunt D-G (TdF, TGV, ventricule unique). Dans ce dernier cas, le sang qui court-circuite les poumons correspond à une augmentation du mélange veineux (effet espace-mort) au niveau des échanges gazeux. La pression télé-expiratoire de CO2 (PetCO2) sous-estime donc la PaCO2 réelle. Ces patients conservent une réponse ventilatoire normale à l'hypercarbie, mais ont une réaction amoindrie à l'hypoxémie [32]. Ils hyperventilent chroniquement pour compenser la faible épuration de CO2. Leur capacité d'exercice maximale est proportionnelle au flux pulmonaire [161]. Leur VO2 n'augmente que très progressivement à l'effort [160]. Lorsque la désaturation artérielle est due à un shunt, l'augmentation de la FiO2 a peu d'influence sur la SaO2. La cyanose est plus rapidement manifeste lorsque l'Ht est élevé; son apparition est retardée en cas d'anémie parce que la profondeur de la cyanose dépend de la concentration en Hb désaturée (> 50 g/L) [11]. La cyanose apparaît pour des valeurs de SaO2 à l’air ambiant de 85-90% (selon l’Ht). Pour que le transport d'O2 puisse correspondre à la consommation d'O2, l'hématocrite (Ht) augmente, parfois au-delà de 65%; ceci entraîne une hyperviscosité du sang et des risques de thromboses spontanées, notamment en cas de déshydratation, comme lors du jeûne préopératoire ou d'une administration liquidienne insuffisante en salle d'opération. Le seuil de transfusion de ces malades est évidemment bien au-dessus des recommandations habituelles (Hb > 100 g/L). La phlébotomie périopératoire n’est indiquée que si l’Ht est > 65% en l’absence d’hypovolémie, de déshydratation et de déficience en fer [11,187]. Les maladies cyanogènes ont des effets multisystémiques majeurs.

Effets hématologiques: augmentation de la masse et de la rigidité des érythrocytes (microsphérocytose due au manque relatif en fer), hyperviscosité, occlusions micro-vasculaires, lithiase biliaire secondaire à un excès d'anneau hème à métaboliser. Le risque thrombo-embolique est élevé.

Effets sur la coagulation: diathèse hémorragique due à une diminution du facteur de von Willebrand et des facteurs dépendants de la vitamine K, à une fibrinolyse primaire, et à une diminution de la fonctionnalité des plaquettes [74,174]. La thrombocytopénie n'est en général qu'apparente, due à l'augmentation de la masse des globules rouges. Le risque hémorragique est élevé. Les mesures de TP et TPT sont erronées lorsque l'Ht est supérieur à 55%, à cause de l'excès relatif de citrate dans les tubes de prélèvement par rapport à la réduction du volume plasmatique du malade [42].

Effets myocardiques: dysfonction ventriculaire chronique (systolique et diastolique) et risque ischémique accentué [59].

Augmentation du risque infectieux: endocardite, abcès cérébral, pneumonie; la prophylaxie antibiotique est recommandée chez tous les patients cyanotiques [11,164].

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Effets neurologiques: le taux d'abcès cérébraux est élevé, mais celui d'AVC n'est pas en relation avec l'hyperviscosité chez les adultes, quoiqu'il soit augmenté chez les enfants [5,136]. Les embolies paradoxales sont toujours à craindre en cas de shunt D-G, particulièrement lors des nombreuses injections intraveineuses durant l'anesthésie.

Effets rénaux: l'hypoxémie entraîne une prolifération cellulaire dans les glomérules et un épaississement des membranes basales; il s'ensuit une protéinurie et une augmentation de l'acide urique; ce dernier est un bon marqueur de l'hémodynamique rénale chez les cyanosés [152].

Cyanose et hypoxémie

Causes de la cyanose (SaO2 < 85%) : shunt D-G ou bas débit pulmonaire. Augmenter la FiO2 est sans effet. Conséquence du DO2 abaissé : augmentation de l’Ht (55-70%). La cyanose est d’autant plus marquée que l’Ht est élevé. Risque majeur : thrombose en cas de sous-hydratation. Effets systémiques de la cyanose :

- Risque thrombo-embolique élevé - Altérations de la coagulation - Dysfonction ventriculaire - Risque infectieux élevé - Dysfonction rénale

Effet du shunt D-G : embolies paradoxales (AVC)

Hypertension pulmonaire Physiopathologie L'hypertension pulmonaire (HTP) est définie par une PAP moy > 25 mmHg au repos ou des résistances vasculaires pulmonaires (RAP) > 300 dynes•cm•s-5 [68]. L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) est plus spécifiquement une augmentation de la pression précapillaire (voir Chapitre 5 Hypertension pulmonaire, et Chapitre 12 Physiopathologie de l’HTAP). Chez les congénitaux, sa cause la plus fréquente est un shunt G-D non restrictif. Elle survient dans 50% des cas de CIV et de Canal AV, où il y a surcharge de volume et de pression, mais dans seulement 10% des CIA, où il y a surcharge de volume uniquement. Elle apparaît dans l'enfance déjà lors de CIV, mais seulement à l'âge adulte en cas de CIA [131]. Le stress pariétal vasculaire provoqué par le flux pulmonaire excessif cause une extension de la musculature lisse dans les vaisseaux périphériques qui ne sont normalement pas musculaires; à ce stade, la pression reste à la limite supérieure de la norme [144]. L'accroissement continu de pression est associé à une hypertrophie de la média des artères plus proximales, accompagnée d’une prolifération intimale progressive et d’une fibrose, puis d’épaississement de l’adventice, de réaction inflammatoire et de thrombus disséminés [134] (Figure 15.60). Finalement, le nombre des vaisseaux distaux diminue, l'HTAP est fixée et irréversible. C'est le syndrome d'Eisenmenger, caractérisé par une PAP moyenne > 50 mmHg au repos, des RAP > 800 dynes•cm•s-5 et un shunt bidirectionnel (shunt G-D + composante D-G) accompagné de cyanose. Le renversement du shunt G-D est la principale origine de l'apparition d'une cyanose chez les congénitaux adultes [46]. L’irréversibilité de l’HTAP est démontrée par un test de vasoréactivité au NO, dans lequel la réversibilité potentielle est définie par une réduction de la PAP moyenne de > 10 mmHg et une baisse de celle-ci ≤ 40 mmHg, sans modification du débit cardiaque [12,68]. Face à cette surcharge de pression, le VD réagit par une hypertrophie dès le plus jeune âge et s’épaissit considérablement. Le pronostic de l’HTAP est étroitement lié à la fonction droite. Il est sombre dès

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que le VD dysfonctionne et se dilate. Bien que la correction chirurgicale ne soit plus possible lorsque la rapport RAP / RAS est supérieur à 0.7, le devenir des congénitaux adultes est meilleur que celui des patients souffrant d'HTAP primaire, médicamenteuse ou thrombo-embolique [44] : la survie à 3 ans est de 77% au lieu de 35% [83]. Pour l’anesthésiste, l'hypertension pulmonaire des congénitaux adultes présente certaines caractéristiques physio-pathologiques qui sont communes à toutes les formes d’HTAP, à l’exception de la première qui lui est propre [11,24,35,60,68,96].

Une baisse de pression systémique par hypovolémie ou par vasodilatation systémique aggrave la composante D-G du shunt, diminue le débit pulmonaire et péjore la cyanose.

L’hypotension systémique diminue la pression de perfusion coronaire et menace la perfusion sous-endocardique du VD.

Le débit pulmonaire est abaissé et fixe ; toute compliance aux variations de débit et de volume circulant est perdue ; une augmentation du Qp est impossible lors d’une augmentation de la demande en O2 ; le malade est cyanosé au moindre effort.

Plus il est hypertrophié, plus le VD se comporte comme le VG ; sa courbe de Starling se redresse et son débit devient dépendant de sa précharge ; dans ce cas, l’hypovolémie conduit à une baisse du débit pulmonaire.

En diastole, la pression du VD hypertrophié et surchargé est supérieure à celle du VG ; le septum interventriculaire bombe dans le VG (effet Bernheim) et en réduit le remplissage diastolique.

Malgré l’épaississement des parois vasculaires, la réactivité des vaisseaux pulmonaires est conservée: l'hypercarbie, l'acidose et l'hypoxémie augmentent encore les RAP, alors que l'hyperventilation les abaisse [24,31]. L'anesthésiste doit donc éviter toute les manoeuvres qui peuvent aggraver les RAP [35]:

o Hypoventilation: hypercarbie, hypoxémie, atélectasies; o Surpression endothoracique; o Acidose; o Hypothermie; o Stimulation sympathique, stress, douleur.

L’HTAP est un des principaux déterminants du risque opératoire chez les congénitaux. Seules des interventions vitales sont envisageables chez ces patients [33].

1

2

3 Figure 15.60 : Image anatomo-pathologique d’une artériole pulmonaire en cas de syndrome d’Eisenmenger. 1 : hypertrophie de la média. 2 : prolifération intimale. 3 : fibrose [134]. La paroi d’une telle artère ne peut plus être collabée par les pressions ventilatoires en ventilation mécanique.

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Traitement de l’hypertension pulmonaire L'anesthésiste doit prendre toutes les mesures possibles pour abaisser la pression pulmonaire; elles sont détaillées dans le Tableau 15.4 (voir Chapitre 12 Traitement de l’HTAP) [35]. Il est capital que le patient soit profondément anesthésié (stress-free anaesthesia, fentanyl, sufentanil ou remifentanil en doses importantes) et qu'il reste normotherme. Le premier moyen hypotenseur pulmonaire est ventilatoire: assurer l'hypocarbie et la normoxie, c'est-à-dire éviter l'acidose respiratoire:

Hyperventilation: l'hypocapnie (PaCO2 30-35 mm Hg) et l'alcalose (pH 7.5) sont les seuls vasodilatateurs pulmonaires sans effet significatif sur le lit systémique. La FiO2 doit être élevée, les pressions de ventilations basses et le volume courant proche de la CRF (6-8 ml/kg.); c'est le pH et non la pCO2 qui règle le tonus vasculaire pulmonaire. La réactivité des RAP à l'acidose et à l'alcalose est accentuée en cas d'hypoxie et d'hypertension pulmonaire [24]. Le meilleur moyen de régler le ventilateur est d'assurer la pression de ventilation moyenne minimale (6-10 mmHg) pour une PetCO2 située entre 25 et 30 mmHg.

Administration d’O2 (lunettes, masque) en dehors de la salle d’opération, bénéfique surtout lorsque l’érythrocytose est marquée (Ht > 55%).

Viennent ensuite une série de moyens pharmacologiques. Hormis le NO et les agents nébulisés, tous ces vasodilatateurs pulmonaires présentent des effets hypotenseurs systémiques plus ou moins accentués [88,96].

NO: 10 – 30 ppm dans le circuit inspiratoire du ventilateur; sans effet systémique, le NO altère la fonction plaquettaire. Dans les cas d'hypertension pulmonaire, ou dans les situations où la PAP doit rester basse (Fontan, par exemple), le NO doit être administré dès l’induction et/ou la reprise de la ventilation après CEC, avant que ne survienne une poussée hypertensive.

Nébulisation dans le circuit inspiratoire du ventilateur: iloprost (0.2-0.3 mL/min d’une solution de 10-20 mcg/mL), milrinone (1 mg/mL à 0.2-0.3 mL/min pendant 10-20 minutes).

Prostaglandines: par stimulation de l'adénylate cyclase, elle accroissent le taux de cAMP et provoquent une vasodilatation; utilisées en traitement chronique et aigu, elles ont un effet additif avec le NO [149,158].

o Iloprost (Ilomedin®) en spray nasal (20 mg en 15 min) ou en nébulisation; o Epoprosténol (Flolan®) en perfusion (2-5 ng/kg/min); o Treprostinil sous-cutané (1.25-2.5 ng/kg/min).

Inhibiteurs de l’endothéline: Bosentan (Tracleer, 125-250 mg 2 x/j), sitaxentan (100 mg/j), efficaces sous forme orale pour le traitement chronique [68,154].

Sildénafil (Viagra®): cet anti-phosphodiestérase-5 (50-100 mg/j) est particulièrement efficace en association à la L-arginine; il s'utilise simultanément au NO et aux prostaglandines [73,121].

Losartan (anti-angiotensine) à raison de 50-100 mg/j. Les bloqueurs calciques sont inutiles, voir dangereux, chez les congénitaux [68].

En peropératoire, on utilise plutôt des substances à action inotrope positive simultanée: Inodilatateurs: les anti-phosphodiestérases-3 diminuent la PAP et les RAP, et augmentent la

FE par effet inotrope positif; amrinone (Inocor®), milrinone (Corotrop® 0.5 mcg/kg/min); Dobutamine (Dobutrex®): par augmentation de la cAMP (stimulation β1), elle induit une

vasodilatation pulmonaire significative; Isoprénaline (Isuprel®), aussi efficace mais provoque une tachycardie et une hypotension

systémique importantes (stimulation β1 + β2); Ouverture ou non-fermeture du péricarde et du sternum pour décomprimer le VD et diminuer

l'interdépendance ventriculaire. La nitroglycérine a un léger effet vasodilatateur pulmonaire, mais surtout elle diminue la précharge et le volume télédiastolique du VD, ce qui diminue son éjection lorsqu’il est hypertrophié; elle n'est

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 66

indiquée chez les congénitaux qu’en cas d’insuffisance congestive du VD (régurgitation massive de la valve pulmonaire, par exemple). Les vaisseaux pulmonaires étant quasi dépourvus de récepteurs α1, les vasodilatateurs artériolaires (nitroprussiate, phentolamine) ont essentiellement un effet systémique et ne sont pas utiles dans le traitement sélectif de l'HTAP. Ils ont un effet catastrophique en présence de shunt D-G ou d'alimentation du débit pulmonaire par une vicariance systémique (shunt G-D de Blalock, collatérales aorto-pulmonaires).

Tableau 15.4 Traitement de l'hypertension pulmonaire

Approfondissement de l'anesthésie (fentanyl, sufentanil, remifentanil), réchauffement du patient, sédation si anxiété (benzodiazépines à dose sans dépression respiratoire) Hyperventilation: PaCO2 30 mmHg, pH > 7.45 Hyperoxie: FiO2 1.0 IPPV avec basse P intrathoracique (Pmoy: 6-10 mmHg) NO: 10-30 ppm dans le circuit inspiratoire Aérosol de prostanoïde (iloprost 20 mcg en 15 min) Sulfate de magnesium (5-10 mmol) Catécholamines β: dobutamine, isoprénaline Anti-phosphodiesterases-3: milrinone (0.5 mcg/kg/min) Noradrénaline (↑ pression de perfusion coronarienne) Adaptation de la précharge du VD (PVC) Ouverture/non-fermeture du péricarde et du sternum Contrepulsion intra-aortique (↑ pression coronarienne) Perfusion d'époprostenol (2-5 ng/kg/min) Adénosine (6-12 mg iv) Anti-phosphodiesterases-5:

sildénafil (50-100 mg/j per os) + L-arginine Anti-endothéline: bosentan (125-250 mg/j per os) Anti-angiotensine: losartan (50-100 mg/j per os) Dans les cas de surcharge droite extrême, une septostomie auriculaire (CIA iatrogène) permet de décomprimer le VD et d’améliorer la précharge du VG, mais au prix d’une désaturation artérielle. Le gain tient à l’équilibre obtenu entre l’amélioration du transport d’O2 d’une part, et la désaturation artérielle due au shunt D-G de l’autre [3].

Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) des congénitaux (I)

Définition de l’HTAP : PAPmoy > 25 mmHg au repos Syndrome d'Eisenmenger (HTAP irréversible): PAP moy > 50 mmHg, RAP > 800 dynes•cm•s-5 et shunt bidirectionnel avec cyanose (shunt G-D + composante D-G) Critère d’inopérabilité: rapport RAP/RAS > 0.7 Caractéristiques hémodynamiques

- Hypotension systémique: aggravation de la composante D-G du shunt - Débit pulmonaire bas et fixe - Réactivité vasculaire pulmonaire partiellement conservée - HVD: débit du VD dépendant de sa précharge - Risque ischémique du VD si hypotension systémique

Traitement aigu sans effet vasodilatateur sur les RAS

Traitement de l'insuffisance du VD

Traitement aigu et chronique avec effet vasodilatateur sur les RAS

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 67

Hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) des congénitaux (II) Prise en charge et traitement

- Hyperventilation hypobarique et normoxie - Maintien des RAS élevées - Maintien de la précharge - NO - Inodilatateurs (dobutamine, milrinone) - Prostaglandines (iloprost, époprosténol) - Inhibiteurs de l’endothéline (bosentan) - Inhibiteurs de la phospho-disetérase-5 (sildenafil) - Non-fermeture ou réouverture du sternum et/ou du péricarde

Ventilation et hypertension pulmonaire La ventilation est un compromis entre une hyperventilation active et le maintien d'une pression intrathoracique moyenne (Pit) basse. Si le volume courant est faible, on risque des atélectasies, une hypercarbie, et une augmentation des RAP dans les petits vaisseaux péri-alvéolaires; s'il est élevé, l'hyperinflation augmente la Pit et comprime les gros vaisseaux extra-alvéolaires [60]. Le volume courant idéal correspond à celui de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF) (Figure 15.61). Il faut jouer sur le volume courant, la fréquence et le mode ventilatoire (mode en pression contrôlée) pour obtenir la PaCO2 et la Pit moy les plus basses possible. De ce point de vue, la durée de l'inspirium augmente davantage la Pit moy que la valeur du pic inspiratoire de pression [111]. Toutefois, la partie droite du graphique de la Figure 15.61 ne s’applique pas réellement au patient souffrant d’HTAP, parce que la paroi épaissie et rigide de ses vaisseaux pulmonaires empêche toute compression par une ventilation à haut volume courant. Il n’y a donc pas lieu de craindre une augmentation supplémentaire de la PAP lors d’une hyperventilation mécanique.

Souvent, on préfère proposer une anesthésie loco-régionale par crainte des interférences ventilatoires d'une anesthésie générale. Dans le cas présent, cette crainte est infondée. En effet, l'accroissement de postcharge pour le VD que représente l'IPPV est très faible par rapport à sa postcharge habituelle: ajouter une Pit moy de 10 mmHg à une PAPmoy de 50 mmHg modifie moins les conditions hémodynamiques que lorsque la PAPmoy est normale (≤ 15 mmHg). De plus, l'IPPV offre la possibilité d'hyperventiler le patient et, ce faisant, de diminuer ses RAP. A l'inverse, la vasodilatation artérielle d'une anesthésie loco-régionale rachidienne risque d'aggraver la composante D-G du shunt, de provoquer une désaturation artérielle et d'accentuer la cyanose [4]. La réaction hémodynamique du patient à l'IPPV peut être testée en préopératoire en lui faisant réaliser une manoeuvre de Valsalva une fois le cathéter artériel en place et en observant l'évolution de la pression artérielle. Le plus souvent, les variations respiratoires sont atténuées et la pression moyenne (PAM) est stabilisée à une valeur très légèrement inférieure (< 10%) à sa valeur en spontanée. Ceci laisse présager une bonne tolérance à l’IPPV. Anesthésie et hypertension pulmonaire A l'exception de la kétamine, du N2O et du desflurane qui provoquent une stimulation sympathique et une augmentation des RAP chez l’adulte [38,54], les agents d'anesthésie ont peu d'influence sur la circulation pulmonaire. Les recommandations pour l’anesthésie du patient souffrant d’HTAP peuvent se formuler de la manière suivante [35,60,64,96,111]:

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 68

Anesthésie profonde (stress-free) à base d’un fentanil et d’un agent hypnogène (halogéné,

propofol) ; Hyperventilation normobarique (IPPV), alcalose respiratoire; utilisation du NO (10-20 ppm) ; Normothermie ; Maintien de la précharge : éviter toute hypovolémie ; Maintien des RAS : pression de perfusion coronarienne, diminution de la composante D-G du

shunt. L’anesthésie générale avec hyperventilation mécanique remplit mieux ces critères qu’une anesthésie loco-régionale (ALR) rachidienne. En effet, cette dernière diminue les RAS et la précharge droite, ce qui augmente la composante D-G du shunt et limite le débit pulmonaire. Ceci est particulièrement marqué pour la rachi-anesthésie ; lorsqu’elle est requise, la péridurale est possible à condition que le bloc s’installe très lentement et que ses effets hémodynamiques soient bien compensés. D’une manière générale, l’ALR est donc plutôt contre-indiquée en cas d’HTAP. Figure 15.61 : Evolution des résistances artérielles pulmonaires (RAP) avec la ventilation. A : Situation normale. A bas volume courant, les RAP s'élèvent dans les petits vaisseaux par hypoventilation et hypercapnie. A haut volume courant, elles s'élèvent dans les gros vaisseaux périalvéolaires qui sont étirés et comprimés mécaniquement. La résultante (courbe rouge) montre que le meilleur compromis est obtenu au volume de la capacité résiduelle fonctionnelle (CRF). Ceci correspond à une ventilation à 6-8 ml/kg [60]. B : En cas d’hypertension pulmonaire chronique, les parois artérielles sont épaissies, avec une média muscularisée, une prolifération sous-endothéliale et une fibrose de l’externa (coupe d’une artère pulmonaire en cartouche). Ces vaiseaux ne sont plus compressibles par la pression intrathoracique. La courbe corrrespondant aux gros vaisseaux est donc aplatie, et les RAP totales n’ont plus une forme en "U" ; elles n’augmentent plus à haut volume courant. Ces patients tolèrent donc très bien l’hyperventilation en IPPV.

Gros vaisseaux Petits vaisseaux

RAP totales

RAP

Volume courant pulmonaire

CRF

RAP

Volume courant pulmonaire A B

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 69

Anesthésie et HTAP

Eviter toute augmentation des RAP : hypoventilation, hypercarbie, atélectasies, surpression endothoracique, acidose, hypothermie, stimulation sympathique, stress, douleur Anesthésie:

- Anesthésie et analgésie profondes - Hyperventilation normobarique, alcalose respiratoire, normoxie, NO - Maintien de la précharge - Maintien des RAS - Normothermie - Rachianesthésie mal tolérée, péridurale possible si bloc d’installation très lente

L’IPPV est bien tolérée pour 3 raisons

- L’augmentation de postcharge droite est faible par rapport à la PAP chroniquement haute - Le VD hypertrophié supporte une augmentation de postcharge - Les vaisseaux pulmonaires épaissis et fibrosés ne sont pas compressibles par l’IPPV

Dysfonction ventriculaire Une dysfonction ventriculaire est fréquente chez les congénitaux [147]. Elle est liée à plusieurs phénomènes.

Remodelage ventriculaire dû à la malformation: insuffisance droite d'un VD sous-aortique fonctionnant comme ventricule systémique, sphéricisation d'un ventricule unique (VU), par exemple; la fonction est meilleure lorsque le VU est de type anatomique gauche. La dysfonction diastolique avec baisse de compliance est courante; elle réclame des pressions de remplissage supérieures à la norme.

Durée de vie avec la malformation: plus la correction chirurgicale est tardive, plus le remodelage est important. Même une malformation bien supportée chez le jeune comme une CIA finit par décompenser le VD vers la cinquantaine. D’autre part, les opérations palliatives ne protègent pas les ventricules comme le font les corrections totales.

Type de surcharge: une surcharge de volume est mieux supportée qu'une surcharge de pression. Cette dernière conduit à une aggravation de la tension de paroi, à une inadéquation du débit coronaire et à une faible tolérance aux déséquilibres peropératoires entre l'apport et la demande en oxygène. Dans un shunt G-D, le VD décompense lorsque la pression systolique pulmonaire augmente au-delà de 60 mmHg (50% de la valeur systémique).

Cyanose: la VO2 myocardique dépasse le DO2 au moindre effort; les épisodes de dysfonction sont fréquents. La baisse de la pression de perfusion myocardique due au shunt et les occlusions microvasculaires de l'hyperviscosité induisent une ischémie chronique qui se traduit par des lésions irréversibles.

Ischémie: elle peut être due à la malformation, à la correction chirurgicale, à la cyanose, aux occlusions microvasculaires de l'hyperviscosité, ou à une athéromatose coronarienne de l'adulte. En cas d’HTAP, elle menace le VD dès que la pression systémique baisse.

Le VD fonctionnant comme ventricule systémique et le ventricule unique sont deux situations particulièrement problématiques. Vu les modifications morphologiques des cavités ventriculaires dans ces conditions de charge très spéciales, la fraction d'éjection n'est pas un critère satisfaisant de la fonction systolique. Les dimensions systoliques et diastoliques sont de meilleurs éléments d'appréciation (valeurs limites des diamètres du VG en court-axe: 2.5 cm/m2 en systole et 4.5 cm/m2

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en diastole). Le traitement de l'insuffisance ventriculaire droite, fréquente chez les congénitaux, est décrite dans le Tableau 15.5. Après CEC, la dysfonction ventriculaire peut être très sévère dans les cas de cardiopathies complexes. La plupart du temps, les combinaisons de dopamine, dobutamine et noradrénaline se révèlent insuffisantes dans ces cas; une association de milrinone et d'adrénaline est le plus souvent la seule solution efficace. Le levosimandan peut être une aide efficace.

Tableau 15.5 Traitement de l'insuffisance ventriculaire droite aiguë

Hyperventilation normobarique

• Hypocapnie : PaCO2 = 30 mmHg, alcalose: pH = 7.5 • FiO2 = 1.0 • V courant 6-8 ml/kg, pression ventilatoire (Pmoy) 6-10 cm H2O

NO• : 10 – 30 ppm dans le circuit inspiratoire du ventilateur Optimalisation de la précharge

• ↑ PVC 15 mmHg si dimensions normales du VD • ↓ PVC si dilatation du VD, insuffisance tricuspidienne et stase droite

Stimulation β1 + β2 • Dobutamine (Dobutrex®) 3-10 mcg/kg/min • Isoprénaline (Isuprel®) bolus 10 mcg, perfusion 0.01 à 0.1 mcg/kg/min • Adrénaline 0.01 – 0.1 mcg/kg/min (associée à la milrinone)

Anti-phosphodiestérases-3 : milrinone (Corotrop®) ; dose de charge 50 mcg/kg, perfusion 0.5 mcg/kg/min Prostaglandines:

• Iloprost® en spray nasal (9-15 mcg) à répéter toutes les 3-4 heures ; nébulisation 20 mcg/2 heures

• Epoprosténol (Flolan®): 2-5 ng/kg/min en perfusion • Treprostinil (1.25-2.5 ng/kg/min) sous-cutané

Nitroglycérine (0.5-5 mcg/kg/min) si PVC haute Maintien de la pression de perfusion coronaire

• Nor-adrénaline (0.1-0-5 mcg/kg/min) si hypotension systémique • Vasopressine (0.1-0.4 U/h) • CPIA si bas débit systémique

Non-fermeture ou réouverture du péricarde et du sternum. Assistance ventriculaire droite.

Dysfonction ventriculaire

A l’exception de la CIA, de la petite CIV et du canal artériel opérés en bas âge, la fonction ventriculaire des congénitaux ne peut jamais être considérée comme normale. Le manque de réserve, la dysfonction ou la défaillance ventriculaire tiennent à plusieurs phénomènes :

- Remodelage anatomique, opération palliative - VD sous-aortique (systémique), ventricule unique - Longue durée de vie avant correction - Surcharge de pression, moins bien tolérée que surcharge de volume - Cyanose - Ischémie chronique

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Arythmies Les arythmies compromettantes sont très fréquentes, puisqu'elles représentent plus de la moitié des motifs d'hospitalisation d'urgence des congénitaux adultes [93]. Elles peuvent être intrinsèques à la malformation : par exemple, certains malades ont deux nœuds atrio-ventriculaires, le bloc AV est fréquent dans le canal AV. Elles peuvent aussi être secondaires à la chirurgie : bloc AV après cure de VSD périmembraneuse, tachyarythmies supraventriculaires après cure de CIA, Fontan ou Senning [184]. Les tachyarythmies sus-jonctionnelles sont courantes chez les patients qui ont des oreillettes distendues, et les blocs de branche chez ceux qui ont une hypertrophie ventriculaire. La prévalence d’arythmie auriculaire augmente avec l’âge ; elle est de 38% > 50 ans [26]. Les arythmies auriculaires doublent le risque de complications et augmentent la mortalité de 50% [26]. Les arythmies par ré-entrée résistent aux traitements médicamenteux et nécessitent une ablation des faisceaux aberrants qui peut être difficile lorsque l’anatomie est très modifiée [137]. La tachycardie ventriculaire peut survenir dans toutes les pathologies, mais est particulièrement fréquente chez les Fallot corrigés qui développent une insuffisance pulmonaire et une dilatation du VD [69]. Le taux de mort subite est plus élevé que dans la population normale ; il augmente de 2-5% par décade [11,184]. Les affections les plus à risque de mort subite sont la TdF, la sténose aortique, le cœur univentriculaire, la TGV et la TGV corrigée. Lorsqu’elles surviennent en peropératoire, les arythmies doivent être immédiatement traitées de manière agressive, car elles ont une forte tendance à dégénérer en arythmies malignes. L’implantation de pace-maker et/ou de défibrillateur n’est pas rare chez ces patients. Malheureusement, les modifications anatomiques dues à leurs malformations rendent souvent impossible la mise en place d’électrodes par voie endoveineuse. On a donc fréquemment recours à des électrodes épicardiques qu’il faut implanter par sternotomie sous anesthésie générale [187]. Dysfonction respiratoire Les congénitaux adultes ont des fonctions pulmonaires statiques anormales comparées à celles d'individus du même âge [150]. Lors de shunt G-D, la compliance est abaissée car le volume sanguin intrapulmonaire est élevé; le travail ventilatoire est accru. En cas de shunt D-G, la réponse à l'hypercarbie est normale, mais la réponse hypoxémique est très diminuée [32]. A cela s'ajoutent les éventuelles séquelles d'interventions cardiaques précédentes et les déformations squelettiques d'anomalies associées (scoliose, par exemple).

Technique d'anesthésie Le choix de la technique est moins important que la bonne compréhension de l'hémodynamique particulière du patient. Celle-ci commence par une connaissance adéquate des données de l'échocardiographie, de l'IRM et du cathétérisme, et par une recherche des données sur des opérations précédentes ou d'éventuelles malformations associées. Il est important de connaître la SpO2 à l'air ambiant en préopératoire, indépendamment des effets de tout médicament. Certaines malformations s’acompagnent de déformation du tissu conjonctif et du squelette qui peuvent occasionner des difficultés d'intubation ; il est judicieux de les reconnaître à l'avance. Examens préopératoires L’ECG, la radiographie du thorax et les examens de laboratoire habituels, y compris la crase sanguine, font partie de la routine. L’élément qui apporte le renseignement le plus essentiel est la saturométrie artérielle (SaO2, SpO2), car elle traduit la diminution du débit pulmonaire et le degré de shunt D-G. Plusieurs examens spécifiques complètent ces données [11,82].

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Echocardiographie: c’est l’élément primordial. Elle fournit des renseignements sur l’anatomie de base, sur la morphologie des chambres cardiaques, des valves et de leur fonction; le Doppler mesure les flux, les gradients, les shunts et, de manière indirecte, la pression du VD et/ou de l’AP (voir Calcul des pressions droites, page 11). Pour davantage de précision sur des structures fines ou postérieures, elle peut être complétée par une échocardiographie transoesophagienne. L’échocardiographie est moins performante pour l’évaluation du VD et inadéquate pour celle des vaisseaux extra-cardiaques.

IRM: elle permet une reconstruction tridimensionnelle très fine de l’anatomie et surpasse l’écho pour l’évaluation du VD, de la fonction bi-ventriculaire, du volume des cavités, des caractéristiques tissulaires et des vaisseaux extracardiaques (veines pulmonaires, aorte, collatérales). L’IRM permet également la mesure des flux et le calcul des shunts, des gradients ou de la fraction de régurgitation.

CT-scan: plus disponible et plus rapide que l’IRM, il offre également une excellente définition anatomique des structures, notamment extracardiaques, mais présente l’inconvénent d’utiliser des radiations ionisantes et des produits de contraste.

Angio-cathétérisme: il est réservé aux situations peu claires, à la définition des vaisseaux extracardiaques, et à la mesure précise des pressions droites (PAP, RAP) et de la réactivité vasculaire pulmonaire (test au NO). En chirurgie cardiaque, la coronarographie est indiquée chez les hommes de > 40 ans et chez les femmes ménopausées.

La tolérance à l’effort est jugée par l’anamnèse du patient et par une ergométrie avec mesure de la consommation maximale d’O2. La capacité fonctionnelle est l’élément le plus important pour décider à quel moment intervenir. Prémédication Chez les malades qui ont un bas débit pulmonaire ou un shunt cyanogène, l'hypoventilation et l'hypoxie sont catastrophiques. La prémédication doit donc être légère et éviter les opiacés. Le jeûne préopératoire peut entraîner une déshydratation chez les patients cyanosés dont l'Ht est élevé et dont l'hyperviscosité sanguine est un facteur de risque supplémentaire. Lorsqu'ils sont opérés en deuxième partie de journée ou lorsqu'il fait très chaud, ces malades doivent bénéficier d'une perfusion liquidienne. Les congénitaux adultes sont très dépendants de leur entourage familial et médical ; ils paniquent facilement dans un milieu inconnu ou ressenti comme hostile et anxiogène. Ce phénomène est particulièrement marqué chez les trisomiques. Il est donc important d’avoir beaucoup d’empathie à leur égard et de ne pas laisser percevoir le stress que leur pathologie impose à l’équipe soignante. Equipement Les accès vasculaires sont souvent limités par les opérations précédentes et par les contraintes anatomiques. Par exemple, la pression artérielle n'est pas mesurable au bras situé du côté d'un shunt de Blalock-Taussig, il n'y a pas d'accès veineux au coeur droit après un Fontan, la VCI est souvent interrompue lors de syndrome hétérotaxique. Chez tout malade porteur d'un shunt, il faut prendre des précautions compulsives contre l'injection accidentelle d'air dans les voies veineuses: aspiration de sang avant injection, robinet 3-voies sur toutes les tubulures, vidange de l'air résiduel des seringues, injection avec la seringue verticale pour que les bulles restent collées au piston. Monitorage La SpO2 est un indice extrêmement précieux chez les congénitaux; il faut donc rechercher un signal de qualité, et positionner le capteur en fonction de la pathologie. Les variations de RAS et de RAP, le débit pulmonaire effectif et sur le rapport Qp/Qs sont bien traduites par les variations de la saturation artérielle (SaO2, SpO2) ou tissulaire (ScO2, saturation cérébrale mesurée par spectroscopie infrarouge).

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Mais celles-ci ne renseignent pas sur le transport d'O2 en présence d'un gros shunt G-D (Qp/Qs ≥ 3:1). En cas de shunt D-G, la PetCO2 sous-estime la PaCO2 à cause de l'effet espace-mort du volume sanguin évitant les poumons. Une mesure invasive de la pression artérielle est le deuxième monitorage le plus important [35]. Il renseigne instantanément sur les RAS, la volémie et la fonction systolique. En outre, il permet de faire fréquemment des gazométries. Il est impératif de l’installer avant l’induction. L'accès veineux central peut être problématique en cas de veine cave supérieure gauche ou de switch auriculaire après TGV. Après une opération de Glenn, le cathéter placé en jugulaire ou sous-clavière mesure la pression de l'artère pulmonaire droite; la PVC est obtenue par voie fémorale. Après détournement du retour veineux dans l'AP selon une procédure de Fontan, un cathéter veineux central mesure en réalité la pression d'amont de la circulation pulmonaire, qui doit être d'au moins 15 mmHg. Dans ces situations très thrombogènes, le cathéter doit être laissé en place le moins longtemps possible. D'autre part, les conditions hémodynamiques très spéciales des congénitaux ne permettent pas d'interpréter les pressions de remplissage en terme de volémie; la PVC ou la PAPO ne sont pas utiles pour déterminer si le patient est hypo- ou hypervolémique. Le cathéter pulmonaire de Swan-Ganz n'est pas l'élément le plus important, et son apport est plutôt décevant chez les congénitaux. Bien que la mesure des pressions pulmonaires soit rassurante, elle est rarement indiquée en dehors de quelques cas de chirurgie cardiaque. Les pressions de remplissage sont des critères de volémie encore moins bons chez les congénitaux que chez les individus normaux, parce qu’elles dépendent en premier lieu des conditions anatomo-pathologiques. Le positionnement du cathéter peut être impossible en cas de switch auriculaire (opération de Mustard/Senning) ou de sténose pulmonaire serrée, ou déconseillé en cas de Fontan (pas de VD). Lors de CIA ou de shunt D-G, le cathéter risque de passer à gauche. D’autre part, la présence d'un shunt ou d'une insuffisance de la valve auriculo-ventriculaire biaise les calculs du débit cardiaque et des résistances. Le système PiCCO évite les pièges du cathéter pulmonaire, mais son calcul du débit cardiaque est faussé en présence de shunts. Il est particulièrement utile pour le postopératoire de chirurgie cardiaque, c’est-à-dire après correction des shunts. L'échocardiographie transoeosophagienne (ETO) peropératoire est certainement un monitorage moins invasif et beaucoup plus performant. Elle apporte de multiples renseignements sur l'anatomie, le remodelage, la physiopathologie et la volémie des patients, d'autant plus que les mesures de pression de remplissage sont peu fiables pour évaluer la volémie chez les congénitaux (voir Impact de l'ETO, page 75). Induction Il est bon de faire précéder l'induction par une manoeuvre de Valsalva pour tester la répercussion de la ventilation en pression positive sur la pression artérielle (cathéter en place avant l’induction). Le passage direct du retour veineux systémique vers la voie artérielle en présence d'un shunt D-G accélère l'induction par des agents intraveineux; par contre, l'induction et l'élimination des agents halogénés est ralentie à cause du faible débit pulmonaire [89]. Lors de shunt G-D, l'induction avec des agents intraveineux est quelque peu ralentie; l'effet sur l'induction aux halogénés est négligeable [104]. Dans la pratique, ces notions n'ont que peu d'impact sur le déroulement de l'anesthésie. Le choix des agents d'induction est fonction des conséquences hémodynamiques de la pathologie, mais beaucoup ont des effets qui rendent leur utilisation problématique chez les congénitaux: baisse de la précharge et des RAS (propofol, midazolam), effet inotrope négatif (thiopental, propofol), tachycardie (thiopental) [8]. La substance qui a le moins d'effet délétère est certainement l'étomidate, recommandé pour toute l'anesthésie cardiaque complexe, mais l’association fentanyl - midazolam est une bonne alternative. Le fentanyl et le sufentanil sont les opiacés les plus stables et les mieux

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maîtrisés ; ils bloquent la réaction de stress de manière dose-dépendante et freinent les poussées d’HTAP. Le rémifentanil est pratique pour les cas de courte durée, mais la bradycardie qu’il induit peut être rédibitoire. Le fentanyl et le sufentanil sont les opiacés les plus stables et les mieux maîtrisés. La kétamine est utile chez les enfants, mais elle est inadaptée chez l'adulte, parce qu'elle augmente les RAP et la consommation d'O2 myocardique, et parce qu’elle possède un effet cardiodépresseur direct important masqué par sa stimulation sympathique [111]. Conduite de l'anesthésie (voir Tableau 15.6) Le maintien de l'anesthésie est le plus simple avec un halogéné. Le sevoflurane présente le plus de stabilité; l'isoflurane est indiqué si l'on cherche à baisser les RAS; le desflurane est contre-indiqué à cause de sa stimulation sympathique et de sa particularité de provoquer une hausse des RAP lorsqu'on modifie la concentration inspirée [38,54]. La kétamine et le N2O ont un effet hypertenseur pulmonaire chez l’adulte. Une anesthésie et une curarisation profondes sont en général recommandées pour abaisser la consommation d'O2 et améliorer la saturation artérielle. Un point capital dans la conduite de l'anesthésie est le maintien de la normothermie: salle chauffée, couverture isolante et chauffante, etc. Ceci est particulièrement important pour diminuer le risque de poussée hypertensive pulmonaire et de troubles de la coagulation [64].

Tableau 15.6 Anesthésie des congénitaux adultes en chirurgie non-cardiaque

Facteurs de risque (par ordre de gravité décroissant):

• Hypertension pulmonaire (PAPmoy > 35 mmHg) • Cyanose (SaO2 < 85%, Hb > 160 g/L, Ht > 55%) • Réopération, séquelles d’intervention précédente • Arythmies (60% des cas) • Dysfonction ventriculaire • Obstruction sévère sur la voie d’éjection

Monitorage: • SpO2 (ScO2) • Cathéter artériel • ETO, voie centrale (cas complexes, chirurgie majeure) • PiCCO selon besoins

Anesthésie générale • Recommandée si shunt D-G, shunt palliatif, obstruction, HTAP • Induction: etomidate, midazolam (éventuell propofol lent) • Maintien de la précharge et de la postcharge (RAS ↑) • Si shunt G-D: abaisser les RAS • Hyperventilation, alcalose, P ventil basse • Sevoflurane (isoflurane si ↓ RAS) • Fentanyl sufentanil, remifentanil si bradycardie supportée • Contre-indiqués si HTAP: kétamine, N2O, desflurane

Anesthésie loco-régionale rachidienne • Bien adaptée en cas de shunt G → D • Maintien de la volémie, installation du bloc lente

Eviter toute hypovolémie et baisse de précharge Maintien de la normothermie

Anesthésie loco-régionale versus générale (chirurgie non-cardiaque) Dans une situation hémodynamiquement complexe, on a souvent tendance à croire qu'une anesthésie loco-régionale est moins risquée qu'une anesthésie générale. Si cela est vrai pour les blocs distaux des

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membres, ce n'est certainement pas le cas pour l'anesthésie rachidienne, et particulièrement pour la rachi-anesthésie. En effet, celles-ci ont trois inconvénients majeurs: elles provoquent une vasodilatation artérielle systémique, abaissent la précharge et ne permettent pas d'hyperventiler le patient. La baisse des résistances artérielles systémiques aggrave un shunt D-G (Figure 15.56, page 60), un shunt bi-directionnel avec HTAP ou sténose pulmonaire, et un shunt correctif G-D pour bas débit pulmonaire (Figure 15.58, page 61). Par contre, elle diminue un shunt G-D, comme dans les CIA ou les CIV (Figure 15.57, page 60). L'anesthésie loco-régionale rachidienne est donc recommandée en cas de shunt G-D, mais contre-indiquée dans les shunts D-G. La péridurale thoracique haute (C7-D5) ne diminue pas les RAP car les vaisseaux pulmonaires sont peu innervés et très pauvres en récepteurs α1 ; par contre elle induit une sympatholyse cardiaque qui baisse le débit et la fréquence. Lors d'hypertension pulmonaire ou de situations où il est souhaitable de baisser les RAP, une anesthésie générale est préférable, car elle permet l'hyperventilation. Ceci compense largement le risque d'augmenter la postcharge du VD, car les RAP sont déjà tellement élevées (PAPmoy 30-50 mmHg) que l'IPPV n'augmente proportionnellement que très peu l'impédance à l'éjection droite (voir Ventilation et HTAP, page 67).

Anesthésie des congénitaux adultes Facteurs de risque peropératoire (par ordre de gravité) - HTAP (PAPmoy > 25 mmHg) - Cyanose (SaO2 < 85%) - Réopération, séquelles d’intervention précédente - Arythmies - Dysfonction ventriculaire - Obstruction sévère sur la voie d’éjection Monitorage essentiel - ECG, SpO2, si possible ScO2 - Cathéter artériel (position selon la pathologie) en place avant l’induction - Echocardiographie transoesophagienne

Anesthésie générale - Technique préférentielle pour la chirurgie non-cardiaque

- Indications particulières: shunt D-G, shunt palliatif, HTAP, obstruction - Hyperventilation, alcalose, P ventilation basse - Etomidate, midazolam, éventuellement propofol lent - Sevoflurane (isoflurane pour baisser RAS), éventuellement propofol - Fentanyl ou sufentanil, remifentanil si bradycardie tolérée - Contre-indiqués si HTAP : kétamine, N2O, desflurane - Maintien rigoureux de la précharge et de la normothermie

Anesthésie loco-régionale rachidienne

- Indication particulière: shunt G-D - Maintien de la précharge - Installation du bloc lente

Les conditions hémodynamiques recherchées et les recommandations proposées par les auteurs pour l’anesthésie chez les congénitaux adultes sont résumées dans les Tableaux 15.7 et 15.8.

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Tableau 15.7

Hémodynamique recherchée dans les cardiopathies congénitales de l’adulte Cardiopathie RAS RAP Précharge Contractilité Fréquence CIA ↓ ↑ ↑ N N Canal AV ↓ ↑ ↑ N-↑ N CIV ↓ ↑ ↑ N-↑ N Shunt septal avec dominance D-G ↑ ↓ ↓ N-↑ N Shunt G-D palliatif, collatérales AP ↑ ↓ ↑ ↑(VG) N Maladie d’Ebstein N ↓ ↓ ↑(VD) Arythmies HTAP (Eisenmmenger) ↑ ↓ ↑ ↑(VD) N Circulation de Fontan N ↓ ↑ ↑(VG) N Tétralogie de Fallot ↑ ↓ ↑ ±* ±* Sténose pulmonaire dynamique ↑ ↓ ↑ ↓ ↓ Sténose pulmonaire N ↓ ↑ ↑(VD) ↓ Insuffisance pulmonaire N ↓ ↑ ↑(VD) ↑ Sténose aortique ↑ N ↑ N-↑ ↓ Syndrome de Marfan, insuff aortique ↓ N ↑ N-↑ ↑ TGV naturellement corrigée ↓ N ↓ ↑(VD) Arythmies Canal artériel ↓ ↑ ↑ N-↑ N Coarctation de l’aorte ↓ N ↑ N-↑ N Fistule aorto-pulmonaire ↓ ↑ ↑ N-↑ N *: selon la prédominance de la sténose pulmonaire dynamique (↓ contractilité) ou de l’insuffisance ventriculaire (↑

contractilité). CIA: communication interauriculaire. CIV: communication interventriculaire. AP: aorto-pulmonaire. HTAP: hypertension artérielle pulmonaire. TGV: transposition des gros vaisseaux. N: normale.

Tableau 15.8 Propositions des auteurs pour l’anesthésie des cardiopathies congénitales de l’adulte

Cardiopathie Induction Maintien Ventilation ALR Risque

particulier

CIA E, M, P Iso, M, P PVentil basse oui Embol D-G Canal AV E, M Iso, M PVentil basse ± HTAP CIV E, M, P Iso, M PVentil basse oui HTAP Shunt D-G E Sevo, M PVentil basse Ø Cyanose Shunt G-D palliatif E, M Sevo, M PVentil basse Ø Flux pulm ↓ Maladie d’Ebstein E, M Sevo, M PVentil basse ± Insuff VD HTAP E Sevo, M Hyperventil Ø Crise HTAP Circulation de Fontan E Sevoflurane Spontanée oui Flux pulm ↓ Tétralogie de Fallot E Sevoflurane PVentil basse Ø Ob dyn CCVD St pulm dynamique E, M Sevo, M PVentil basse Ø Flux pulm ↓ Sténose pulmonaire E, M Sevo, M PVentil basse ± Flux pulm ↓ Insuff pulmonaire E, M Sevo, M PVentil basse ± Insuff VD Sténose aortique E, M, (P) Sevoflurane PVentil norm oui Ischémie VG Marfan, insuff aortique E, M, P Isoflurane PVentil norm oui Crise HTAS TGV corrigée E Isoflurane PVentil norm oui Insuff VD Canal artériel E Isoflurane PVentil norm oui HTAP Coarctation de l’aorte E, M, (P) Isoflurane PVentil norm ± HTA sus-coa Fistule aorto-pulmonaire E, M, P Isoflurane PVentil norm oui Insuff VG

P: propofol lent en veillant à ce que la précharge ne baisse pas. ALR Ø: non recommandée ou rachianesthésie contre-indiquée; ±: seulement péridurale avec installation lente du bloc. Dans tous les cas, veiller au maintien de la précharge. HTAS: hypertension artérielle systémique. E: etomidate. M: midazolam. Iso: isoflurane. Sevo: sevoflurane.

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 77

Impact de l'ETO

L'utilité de l’ETO en salle d’opération et en soins intensifs relève de quatre domaines [19,34]:

L’évaluation de l’anatomie et de l'hémodynamique complexe des congénitaux; L’évaluation de la fonction ventriculaire et de la volémie ; L’examen avant correction met en évidence des lésions inattendues dans 7% des cas ; L’éxamen après correction (post-CEC) justifie une reprise immédiate dans 8% des cas.

L’ETO est utilisée aussi bien en salle de cathétérisme qu’en salle d’opération ou aux soins intensifs. Elle est un complément à la voie transthoracique pour la définition des lésions postérieures (retour veineux anormaux), septales (CIA, CIV, canal AV) ou mitrales. Elle est indispensable pour guider les interventions endovasculaires (dilatation valvulaire, occlusion de CIA) et les reconstructions complexes. Outre les précisions supplémentaires qu’elle fournit, l’ETO est très utile à l’anesthésiste et à l’intensiviste pour comprendre l’hémodynamique complexe de ces pathologies et pour évaluer la fonction ventriculaire, la volémie ou l’ischémie myocardique [122]; ceci est d’autant plus pertinent que les indices fonctionnels habituels et les pressions de remplissage sont inopérants dans ces situations. Après correction en CEC, elle permet de contrôler immédiatement l’adéquation de l’intervention chirurgicale. L'impact clinique de l'ETO est variable selon les pathologies. Elle est particulièrement utile en cas d'obstruction de la chambre de chasse droite ou gauche, de réparation valvulaire ou de discordance auriculo-ventriculaire [145]; elle permet de diagnostiquer immédiatement des fuites résiduelles après correction de shunts ou des sténoses après réalisation d'anastomoses ou de conduits. Lors de réimplantation coronarienne, l'ETO est nécessaire à l'évaluation de la fonction pariétale segmentaire des ventricules pour diagnostiquer une éventuelle ischémie. Dans ces cas, il est facile de compléter la correction ou de réparer la lésion résiduelle dans le même temps opératoire, ce qui évite une deuxième intervention (Tableau 15.9). Le fait que ceci survienne dans 8-14% des cas rend l'ETO peropératoire médicalement indispensable et économiquement rentable [22]. Dans toutes les pathologies, l'ETO est également utile pour évaluer et corriger la volémie du patient et la fonction de chaque ventricule [22]. Cet apport est d'autant plus pertinent chez les congénitaux que leur hémodynamique très particulière rend les mesures de pression peu évocatrices du remplissage et de la fonction systolique. Toutefois, les mesures simplifiées de la fraction d'éjection s'appliquent mal à ces ventricules remodelés dont les conditions de charge sont très spéciales [20]. Il est judicieux de procéder à des mesures de volume des cavités dans deux plans perpendiculaires pour calculer la fraction d'éjection (règle de Simpson) ou d’utiliser les nouvelles technologies tridimensionnelles.

Tableau 15.9 Impact de l’ETO peropératoire

CHUV + USZ (Lausanne & Zürich) 854 cas Exclusion diagnostique 5 % Modification chirurgicale pré-CEC: 7 % Retour en CEC 8 % Défaut résiduel "acceptable" 17 % Défaut résiduel non améliorable 4 % Corrections "médicales" (inotrope, volume) 25 %

D’après référence 22

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L’impact de l’ETO dans la chirurgie cardiaque congénitale a été analysé en pédiatrie essentiellement, mais tout laisse à penser qu’il est de la même importance dans la chirurgie congénitale adulte. Le taux de découvertes fortuites et de modifications de la stratégie chirurgicale est plus élevé chez les congénitaux que chez les patients présentant des lésions acquises. Avant la CEC, il oscille entre 3% et 13% (moyenne: 7%) [22,122,145]. Un retour en CEC sur la base d’une image ETO insatisfaisante survient dans 5 à 16% des cas (moyenne: 8%); ce taux est le plus élevé lors de pathologies complexes, de valvuloplasties et de lésions des chambres de chasse. La décision d’un éventuel retour en pompe après une correction jugée insatisfaisante appelle quelques commentaires.

Les lésions résiduelles non diagnostiquées sont une des causes principales de complications postopératoires, de reprise chirurgicale ultérieure et de faible survie à long terme.

Dans 4% des cas, les lésions résiduelles ne peuvent pas être corrigées sans occasionner des dégâts majeurs; elles doivent être tolérées malgré leurs conséquences.

L’extrême sensibilité de l’ETO met en évidence beaucoup de lésions sans signification clinique (moyenne: 15% des cas) [22,151,178]; il faut souvent beaucoup d’expérience pour différencier ce qui porte à conséquence à long terme de ce qui est sans importance.

Le but de l’opération est d’obtenir un résultat clinique adéquat, non une image échocardiographique parfaite (Treat the patient, not the image!); une deuxième CEC pour corriger un défaut sans conséquence est un mauvais calcul de risque.

La pertinence des découvertes post-CEC est directement liée aux connaissances échocardiographiques de l’examinateur; le taux de reprise pour correction incomplète tombe de 9.6% à 0% et le taux de lésions non-diagnostiquées augmente de 21% à 74% lorsqu’un échocardiographeur aîné est remplacé par un collègue sans expérience [166].

Le rapport coût/bénéfice de l’ETO de routine est très favorable chez les congénitaux. Il a été calculé en chirurgie cardiaque pédiatrique. En se basant sur un taux de reprise immédiate post-CEC de 5% et sur la complexité des différents cas, l’analyse financière de l’utilisation de l’ETO montre que celle-ci permet de réaliser une économie de 700 à 2’200 € par cas, donc à autofinancer les investissements nécessaires [13,21].

Impact de l’ETO

L'utilité de l’ETO en salle d’opération et en soins intensifs relève de quatre domaines - Evaluation de l’anatomie et de l'hémodynamique complexe des congénitaux - Evaluation de la fonction ventriculaire et de la volémie - Examen avant correction: lésions inattendues dans 7% des cas - Examen après correction: reprise immédiate justifiée dans 8% des cas Les lésions mises en évidence fortuitement sont sans signification thérapeutique dans 15% des cas L’efficacité de l’ETO chez les congénitaux est directement liée aux connaissances de l’examinateur

Grossesse et cardiopathies congénitales La grossesse provoque des modifications hémodynamiques importantes: le volume circulant augmente (+ 50%), les RAS baissent, le débit et la fréquence cardiaques s’élèvent (+ 30-40%) (voir Chapitre 22, Hémodynamique maternelle). Un shunt non-cyanogène G-D est en général bien toléré pour autant que la fonction ventriculaire gauche soit conservée et que la pression pulmonaire soit encore normale. Lorsqu’ils sont importants, toutefois, les shunts G-D peuvent décompenser le VG et s’accompagner

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d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) ; dans ce cas, c’est le degré d’HTAP qui domine le pronostic [141]. Un shunt cyanogène D-G est augmenté par le stress du travail et de l'accouchement parce que les RAP augmentent sous l'effet de la décharge sympathique. En cas d'HTAP, les RAP sont fixes et ne baissent pas avec la vasodilatation artérielle de la grossesse; la composante D-G du shunt va augmenter et la malade se cyanoser; la mortalité maternelle en présence d'HTAP est de 30-70% selon les pathologies [191]. Elle survient souvent plusieurs jours après la délivrance [146]. Dans les lésions où le débit cardiaque est diminué par une sténose éjectionnelle, comme dans la coarctation de l'aorte, l'augmentation du débit cardiaque de la grossesse ne peut se faire que par le biais d'une élévation de la fréquence cardiaque, parce que le volume systolique ne peut pas augmenter; il faut éviter toute bradycardie chez ces patientes [132]. D'une manière générale, le taux de complications cardiaques pendant la grossesse est de 11-32% (moyenne 19%) chez les femmes souffrant d'une cardiopathie congénitale [51,97,143,153]: décompensation cardiaque, cyanose, poussée d’HTAP, dissection aortique, thrombo-embolie, arythmie, endocardite. La mortalité maternelle varie de 1% à 40% selon les pathologies [190]. En présence de cyanose marquée au repos (SpO2 ≤ 85%) ou d'HTAP sévère et fixée (syndrome d'Eisenmenger : PAPm > 50 mmHg), elle est de 30-50% [148]. Le décès survient souvent plusieurs jours après la délivrance. La cyanose présente avant la grossesse est un facteur aggravant le pronostic: alors qu'il n'est que de 15% chez les femmes non cyanosées, le taux de morbi-mortalité peut dépasser 50% lorsque la cyanose est marquée [51]. La survie périnatale du nouveau-né est < 12% lorsque la SpO2 maternelle est < 85% [11]. Les facteurs de mauvais pronostic sont :

SpO2 ≤ 85% au repos, Hb > 160 g/L avant la grossesse, PAPs ≥ 50 mmHg au repos (PAPmoy > 25 mmHg, RAP > 300 dynes•s•cm-5), Dysfonction ventriculaire.

Environ 28% des nouveaux-nés souffrent d’un problème majeur : prématurité, faible poids de naissance, mort in utero ou décès périnatal [97]. La mortalité infantile moyenne est de 4% et le taux de prématurité de 16%, ce qui est plus de quatre fois supérieur aux taux normaux dans les pays industrialisés [51]. La mortalité s’élève jusqu’à 40-65% dans le syndrome d’Eisenmenger et les cardiopathies cyanogènes sévères, proportionnellement au degré d'hypoxie de la mère. Dans ces pathologies, la prématurité survient dans 22-65% des cas, et le poids de naissance des enfants est plus bas que la norme [51]. L’HTAP et la cyanose sévères sont donc une indication à un avortement thérapeutique en début de grossesse (Tableau 15.10). La transmission génétique à la descendance de la même maladie qu’un des parents est de 2-4% en moyenne, mais de 8% lors de CIV, de 15% lors de sténose aortique et de 50% lors de Marfan [187]. La contraception doit être basée sur des pilules à base de progestérone, car les oestrogènes comportent trop de risque de thrombo-embolie [11,187]. D'une manière générale, l'anesthésie loco-régionale rachidienne, et particulièrement la rachi-anesthésie, est vivement déconseillée dans les situations où la vasodilatation artérielle systémique aggrave la situation: shunt D-G, shunt bi-directionnel avec HTAP ou sténose pulmonaire, shunt correctif pour bas débit pulmonaire (shunt de Blalock). Par contre, elle est recommandée dans les situations où il faut éviter une augmentation des RAS: shunt G-D, CIA, CIV. Lors d'hypertension pulmonaire ou de situations où il est souhaitable de baisser les RAP, une anesthésie générale avec hyperventilation est préférable; toutefois, une anesthésie péridurale avec un bloc d'installation très progressive est possible, pour autant que la précharge du VD soit maintenue [117]. Anesthésie pour les affections principales Les recommandations peuvent être résumées brièvement (voir Tableau 15.10) [75,132,146].

CIA, CIV et tout shunt G-D simple: éviter toute augmentation des RAS ; la vasodilatation de la grossesse leur est favorable. Anesthésie rachidienne (péridurale et intrathécale)

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recommandée pour l'accouchement par voie basse et pour la césarienne; anesthésie générale possible pour la césarienne.

Tétralogie de Fallot, shunt D-G: la baisse des RAS et le travail de l’accouchement aggravent la cyanose et sont responsables d’une hypoxémie fœtale. L'anesthésie générale est préférée; halogéné avec esmolol et néosynéphrine en cas de crise hypoxique. La péridurale n'est pas recommandée, mais elle est éventuellement possible avec une installation très progressive du bloc et un maintien de la précharge du VD. La rachi-anesthésie est formellement contre-indiquée (baisse excessive des RAS).

Shunt palliatif ou correctif (Blalock-Taussig, Waterston): éviter la baisse des RAS, car elles déterminent le débit pulmonaire. Anesthésie générale recommandée; la péridurale est possible si l'installation du bloc est très progressive et la sympathicolyse minimale.

Syndrome d'Eisenmenger (HTAP fixée): le débit pulmonaire est fixe et ne peut pas suivre une augmentation de la demande en O2 ; l’élévation du volume circulant augmente encore la PAP ; la baisse des RAS aggrave la cyanose (augmentation de la composante D-G du shunt). L'anesthésie générale avec hyperventilation est recommandée; une péridurale est exceptionnellement possible, mais avec installation très progressive du bloc et maintien de la précharge du VD. La rachi-anesthésie est formellement contre-indiquée.

Tableau 15.10 Recommandations concernant la grossesse dans les cardiopathies congénitales

Cardiopathie Risque Avortement Transmission à

congénitale d’une grossesse conseillé la descendance CIA bas si pas d’HTAP non 3-10% Canal AV bas si correction complète non 11% élevé si non-opéré oui CIV bas si pas d’HTAP et non 6-10% fonction VG normale Maladie d’Ebstein possible si asymptomatique non 6%

excessif si cyanose oui HTAP proportionnel à la PAP de préfér oui selon origine Syndrome d’Eisenmenger excessif oui Ventricule unique excessif si cyanose, bas débit oui mort-né: 85% pulm ou insuff du ventricule Fontan élevé de préfér oui Tétralogie de Fallot excessif si non-opéré oui 3% élevé même si opéré de préfér oui Sténose pulmonaire bas si sténose bien tolérée non élevé si gradient > 50 mmHg oui

ou insuff VD Sténose aortique (sous-aort) excessif si serrée/symptomat oui 5% TGV excessif après switch auriculaire oui bas bas après switch artériel non Syndrome de Marfan excessif si aorte asc > 45 mm oui 50% opéré: risque de dissection Canal artériel bas non Coarctation de l’aorte bas si opéré non élevé si HTA membres sup variable D’après références 11, 162, 187.

Coarctation de l'aorte: maintenir la tachycardie et les résistances artérielles (RAS élevées). Anesthésie générale recommandée pour la césarienne; l'anesthésie péridurale est éventuellement possible pour un accouchement par voie basse; la rachi-anesthésie est contre-

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indiquée à cause de la baisse des RAS. Prévoir un cathéter artériel post-ductal pour surveiller la pression artérielle distale à la coarctation, puisqu’elle détermine la pression du système utéro-placentaire.

Bicuspidie et anévrysme de l’aorte (syndrome de Marfan) : la poussée hypertensive du travail fait courir un grand risque de rupture ou de dissection. Prévoir une césarienne sous AG pour stabiliser la pression artérielle.

Cardiopathies congénitales et grossesse

Facteurs de mauvais pronostic - PAPsyst > 50 mmHg (PAPmoy > 35 mmHg) - Cyanose : SaO2 < 85% au repos

- Hb > 160 g/L avant la grossesse - Dysfonction ventriculaire - Obstruction à l’éjection Préférence pour l’anesthésie

- Shunt G-D : anesthésie rachidienne (rachi ou péridurale) - Shunt D-G : anesthésie générale - Shunt palliatif G-D : anesthésie générale, éventuellement péridurale avec bloc lent - HTAP : anesthésie générale avec hyperventilation - Sténose aortique, coarctation : anesthésie générale, péridurale avec bloc lent possible - Maintien d’une précharge adéquate.

Risque d'endocardite Les patients souffrant de certaines cardiopathies congénitales sont à risque d'endocardite et doivent être mis au bénéfice d'une prophylaxie antibiotique lors d’intervention où la contamination bactérienne est certaine. Après avoir été très largement prescrite pendant de nombreuses années, la prophylaxie antibiotique est actuellement restreinte aux situations à haut risque, vu le peu d’évidence de son efficacité [195]. Les risques sont les plus élevés chez les malades porteurs de matériel prosthétique (patch, valve, conduit), et chez ceux qui ont des lésions comportant des jets à haute vélocité: CIV, tétralogie de Fallot, canal AV, insuffisance valvulaire [45]. En effet, les jets de haute vélocité sont une cause de lésions endothéliales occasionnant le dépôt de plaquettes et de fibrine; lors d'une bactérémie, des organismes peuvent facilement coloniser ces lésions et développer un foyer d'endocardite [128]. Le risque est moindre lorsque les lésions comportent des flux de basse vélocité (CIA, FOP), mais il est faible pour les CIV isolées, ou lors de correction chirurgicale avec du péricarde autologue [162]. Dès que le matériel implanté est complètement endothélialisé, soit en moyenne après 6 mois, le danger bactérien devient très faible. La prophylaxie de l’endocardite est actuellement recommandée dans les situations suivantes [11,128,187].

Prothèse valvulaire ou matériel prosthétique utilisé dans la réparation valvulaire; Cardiopathies cyanogènes non-opérées ou avec lésions résiduelles après opérations, shunts

palliatifs ; Matériel prothétique implanté chirurgicalement ou par voie percutanée pendant les 6 premiers

mois après l’implantation; Matériel prothétique avec lésion résiduelle persitant après l’implantation; Anamnèse d'endocardite.

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Ces recommmandations sont limitées à la chirurgie septique et à la chirurgie dentaire avec effraction de la gencive ou de la région péri-apicale. La prophylaxie antibiotique n’est pas recommandée de routine pour les interventions digestives, respiratoires, neurologiques, génito-urinaires, dermatologiques ou orthopédiques, sauf si l’état infectieux ou la contamination locale le réclament [11]. Le type d'antibiotique prescrit dépend du type de contamination bactérienne. Les recommandations sont explicitées dans les Tableaux 15.11, 15.12 et 15.13.

Indications à la prophylaxie de l’endocardite chez les congénitaux

La prophylaxie antibiothique est recommandée dans les situations suivantes - Prothèse valvulaire - Cardiopathies cyanogènes non-opérées, cyanose persistante - Matériel prothétique implanté depuis < 6 mois ou avec lésion résiduelle - Anamnèse d’endocardite

D'après: BERNASCONI E, FRANCIOLI P. Recommandations pour la prophylaxie antibiotique péri-opératoire. Swiss-NOSO 2000; 7(2): 9-16

Tableau 15.11

Bactéries les plus relevantes à différents sites

Nez: Staphylococcus aureus, Streptococcus pneumoniae Bouche, pharynx Streptococcus pneumoniae, divers streptocoques, E. coli, Bacteroides,

Fusobacterium, Peptostreptococcus, Actinomyces Colon, rectum E. coli, Klebsiella, Enterobacter, Bacteroides fragilis, Peptostreptococcus Enterococcus Voies biliaires Escherichia coli, Klebsiella, Proteus, Clostridium, Enterococcus Voies urinaires Escherichia coli, Klebsiella, Proteus, Enterobacter, Enterococcus Peau Staphylococcus aureus, Staphylococcus epidermidis, Propionibacterium,

acnes, diphteroides

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 83

D'après: MOREILLON P. Endocarditis prophylaxis revisited: experimental evidence of efficacy and new Swiss recommandations. Schweiz Med Wochenschr 2000; 130:1013-26

Tableau 15.12

Prophylaxie antibiotique en cas de chirurgie en milieu infecté

Chirurgie ORL et pulmonaire amoxicilline (Clamoxyl) po: 3 x 750 mg 1 heure préop + 750 mg 6 heures postop

iv: 2 gm 30 minutes préop + 1 gm 6 heures postop ou clindamycine (Dalacin) po: 600 mg 1 heure préop iv: 600 mg 30 minutes préop ou vancomycine (Vancocin) iv: 1 gm 1 heure préop (perfusion sur 1-2 heures) Chirurgie bilio-digestive et urinaire amoxicilline (Clamoxyl) po: 3 x 750 mg 1 heure préop + 750 mg 6 heures postop iv: 2 gm 30 minutes préop + 1 gm 6 heures postop + gentamycine (Garamycin) iv: 1.5 mg/kg chez patients à haut risque ou vancomycine iv: 1 gm 1 heure préop (perfusion sur 1-2 heures) + gentamycine iv: 1.5 mg/kg chez patients à haut risque Chirurgie en cas d'infection cutanée / tissus mous flucloxacilline (Floxapen) po: 2 gm 1 heure préop + 500 mg 6 heures postop iv: 1 gm 30 minutes préop + 1 gm 6 heures postop ou céfuroxime-axétil (Zinacef) po: 1 gm 1 heure préop ou céfazoline (Kefzol) iv: 1 gm 30 minutes préop vancomycine iv: 1 gm 1 heure préop (perfusion sur 1-2 heures) teicoplanine (Targocid) iv: 400 mg 1 heure préop

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 84

D'après: BERNASCONI E, FRANCIOLI P. Recommandations pour la prophylaxie antibiotique péri-opératoire. Swiss-NOSO 2000; 7(2): 9-16

Tableau 15.13

Choix de l’antibiotique lorsque la prohpylaxie est indiquée

Chirurgie "propre" céphalosporine 1ère ou 2ème génération (CCV, OTR) Neurochirurgie cefuroxime ((Zinacef) Chirurgie ORL céphalosporine 1ère ou 2ème génération Urologie ciproflaxine (Ciproxine) Chirurgie pulmonaire céphalosporine 1ère ou 2ème génération Chirurgie oesophagienne céphalosporine 1ère ou 2ème génération Chirurgie gastro-duodénale céphalosporine 1ère ou 2ème génération Chirurgie des voies biliaires céphalosporine 1ère ou 2ème génération, ou amoxicilline – acide clavulanique (Augmentin) Chirurgie colo-rectale céphalosporine 1ère ou 2ème génération + metronidazole, ou cefoxitine (Mefoxitin) ou amoxicilline – acide clavulanique (Augmentin) ou néomycine + erythromycine Appendicectomie céphalosporine 1ère ou 2ème génération + metronidazole, ou cefoxitine (Mefoxitin) ou amoxicilline – acide clavulanique (Augmentin) Chirurgie gynécologique céphalosporine 1ère ou 2ème génération ou cefoxitine (Mefoxitin) ou amoxicilline – acide clavulanique (Augmentin) Césarienne céphalosporine 1ère ou 2ème génération Interruption de grossesse 1er trimestre pénicilline ou doxycycline 2ème trimestre céphalosporine 1ère ou 2ème génération ou amoxicilline – acide clavulanique (Augmentin)

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 85

Conclusions La prise en charge périopératoire des adultes souffrant de cardiopathie congénitale est un défi pour l'anesthésiste. La grande variété des pathologies, les corrections et les palliations chirurgicales de types différents, et la longue évolution de ces maladies rendent chaque cas très particulier. La priorité pour l'anesthésiste est une compréhension claire de la physiopathologie et de l'hémodynamique de chaque patient. A partir de là, il pourra choisir la technique la plus appropriée. Même si ces cas ne sont pas fréquents, leur nombre s'accroît d'année en année; de plus, la proportion des cas complexes augmente. Si bien que tout anesthésiste peut en rencontrer dans son activité professionnelle, particulièrement pour de la chirurgie non-cardiaque. Comme les connaissances et le savoir-faire sont essentiellement concentrés dans les hôpitaux qui ont un programme de chirurgie cardiaque congénitale pédiatrique, les patients adultes sont en général suivis dans des centres qui ont une consultation pluridisciplinaire de cardiologie et de chirurgie congénitale. Les cas complexes devraient y être transférés pour toute intervention chirurgicale. Toutefois, ceci peut être difficile à justifier pour les cas simples ou à risque intermédiaire, ou peut être impossible en cas d'urgence. En effet, un de ces malades peut être victime d'un accident ou d'une urgence chirurgicale ou obstétricale qui empêche tout transport. Dès lors, il est capital pour chaque anesthésiste-réanimateur d'avoir des connaissances de base de ces pathologies, car il va se trouver dans la position cruciale de prendre en charge la réanimation de ces malades, et de décider qui et quand transférer dans un centre spécialisé.

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Précis d’Anesthésie cardiaque 2012 – 15 Cardiopathies congénitales chez l’adulte 86

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Auteurs Pierre-Guy CHASSOT Ancien Privat-Docent, Maître d’enseignement et de recherche,

Faculté de Biologie et de Médecine, Université de Lausanne (UNIL), CH - 1005 Lausanne Ancien responsable de l’Anesthésie Cardiovasculaire, Service d’Anesthésiologie, Centre Hospitalier Universitaire Vaudois (CHUV), CH - 1011 Lausanne

Dominique A. BETTEX Privat-Docente, Faculté de Médecine, Université de Zürich

Cheffe du Service d’Anesthésie Cardiovasculaire, Institut für Anästhesiologie, Universitätspital Zürich (USZ), CH - 8031 Zürich