Chap. B. Mod%E8les Et Theories en Psychologie Du d%E9veloppement
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Bases de la psychologie du développement et différentielle
Raphaële MILJKOVITCH
Françoise MORANGE-MAJOUX
CHAPITRE B : MODELES ET THEORIES EN PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT
Ce cours a pour objectif de fournir à l’étudiant les concepts de base de la psychologie du
développement. Ainsi, seront successivement abordés l’histoire de la psychologie du
développement (Chap. A), les principales théories et modèles proposés pour expliquer le
développement (Chap. B), ainsi que les principales méthodes utilisées (Chap. C)
TABLE DES MATIERES
B- LES PRINCIPAUX MODELES EN PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT ............................................................ 3
B. 1. LES APPORTS DE LA THEORIE FREUDIENNE A LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT ............................... 3
B.1.1. La psychanalyse freudienne.................................................................................................................. 4
B.1.2. La structure mentale ............................................................................................................................ 4
B.1.3. Les mécanismes de défense .................................................................................................................. 5
B.1.4. Les stades de développement ............................................................................................................... 5
B.1.5. Autres approches psychodynamiques .................................................................................................. 7
B. 2. LA THEORIE CONSTRUCTIVISTE DE PIAGET .................................................................................................. 7
B.2.1. Eléments biographiques ....................................................................................................................... 7
B.2.2. Les influences de Piaget ....................................................................................................................... 8
L'INFLUENCE DE L 'HISTOIRE DES SCIENCES ............................................................................................. 8
L'INFLUENCE DE LA BIOLOGIE ................................................................................................................... 9
L'INFLUENCE LOGICO-MATHEMATIQUE ................................................................................................... 9
B.2.3. Les concepts clefs de la théorie constructiviste de Piaget .................................................................. 10
B.2.4. la méthode clinique de Piaget ........................................................................................................... 11
B.2.5. Les stades ........................................................................................................................................... 12
STADE SENSORI-MOTEUR : DE 0 A 18 MOIS/2ANS .......................................................................................... 13
STADE PREOPERATOIRE OU INTUITIF : DE 2 A 7/8 ANS ................................................................................... 15
STADE OPERATOIRE CONCRET : DE 7/8 A 12 ANS ............................................................................................ 16
STADE DES OPERATIONS FORMELLES : A PARTIR DE 11/12 ANS...................................................................... 18
B.2.6. Discussion ........................................................................................................................................... 19
B. 3. LE MODELE COMPORTEMENTAL ............................................................................................................... 20
B.3.1. L'apprentissage opérant ..................................................................................................................... 21
B.3.2. Le conditionnement classique ............................................................................................................ 22
B.3.3. La théorie de l'apprentissage social (cognitivo-comportementale) ................................................... 23
B. 4. LA THEORIE DE L’ATTACHEMENT .............................................................................................................. 24
B.4.1. Les comportements d’attachement .................................................................................................... 25
B.4.2. Le concept de “ base sécurisante ” ..................................................................................................... 26
B.4.3. Développement des stratégies d'attachement et d'exploration ........................................................ 26
B.4.4. Des repères pour l'avenir : les modèles internes opérants ................................................................. 27
BIBLIOGRAPHIE ................................................................................................................................................. 30
B- LES PRINCIPAUX MODELES EN PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT
En psychologie, modéliser consiste à utiliser des outils logiques ou mathématiques pour se
représenter un phénomène. Bien qu’il ne soit pas un outil explicatif et de généralisation, il joue
un rôle important dans la formulation des théories. Les modèles constituent généralement une
projection d’une théorie, une partie concrète de la théorie. Parce qu’ils font référence à une
gamme plus limitée de situations que la théorie dont ils sont issus, les modèles sont
habituellement d’application plus réduite. Le modèle
Les modèles développés en psychologie permettent d’aider le psychologue à
organiser sa pensée concernant les comportements,
guider ses décisions et ses interventions,
communiquer dans un langage commun et systématique avec les collègues.
En termes scientifiques, les meilleurs modèles sont ceux dont les implications et les
hypothèses peuvent être rigoureusement mises à l'épreuve dans un grand nombre de
contextes. Un bon modèle pour un psychologue doit comprendre un exposé complet et
vérifiable du développement, du maintien et du changement des comportements à la fois
problématiques et non problématiques.
Toutefois, les psychologues qui dépendent trop d'un modèle peuvent en arriver à plaquer les
postulats du modèle sur ce qu'ils observent, même si cela semble requérir un changement de
perspective. Si un modèle permet d'avoir un langage commun avec les autres adhérents de
ce modèle, il peut en même temps créer une barrière de langage entre psychologues de
modèles différents et rendre la communication entre eux plus difficile. Or, comprendre et
apprécier d'autres points de vue peut prévenir le fait d'avoir des visions étroites qui pourraient
être préjudiciables aussi bien pour le psychologue que pour l'enfant ou l'adolescent.
B. 1. LES APPORTS DE LA THEORIE FREUDIENNE A LA PSYCHOLOGIE DU DEVELOPPEMENT
Le modèle freudien repose sur les postulats suivants:
1. Le comportement humain est déterminé par des pulsions, des désirs, des motivations
et des conflits qui sont intrapsychiques et souvent inconscients.
2. Les facteurs intrapsychiques sont à la fois à l'origine des comportements normaux et
pathologiques.
3. Les fondements du comportement sont établis pendant l'enfance à travers la
gratification ou l'insatisfaction des besoins et des pulsions de base. A cause de leur
rôle central dans ces besoins, les relations précoces avec les parents, les frères et
sœurs, les grands-parents, les pairs et les figures d'autorité font l'objet d'une grande
attention. Il y a un aspect développemental dans le modèle psychodynamique en
raison de son intérêt pour les aléas de l'enfance.
B.1.1. LA PSYCHANALYSE FREUDIENNE
Le modèle psychodynamique de Freud (1856-1939) est fondée
notamment sur la notion de déterminisme psychique, c’est-à-dire que
le comportement est lié à des causes que des observateurs
extérieurs tout comme la personne elle-même ne peuvent voir. De
ce point de vue, presque tous les comportements (même les
"accidents") sont considérés comme porteurs de signification étant
donné qu'ils révèlent des motivations et des conflits inconscients
(Freud, 1901).
B.1.2. LA STRUCTURE MENTALE
Dans le système de Freud, les instincts inconscients forment le ça, qui est présent à la
naissance et qui contient toute l'énergie psychique, soit la libido disponible pour inciter un
comportement. Le ça recherche la satisfaction immédiate de ses désirs; c'est pourquoi on dit
qu'il fonctionne selon le principe de plaisir. A mesure que le nourrisson grandit et que le monde
extérieur impose des contraintes grandissantes sur les gratifications du ça, la deuxième
instance, le moi, commence à s'organiser (à environ un an) et commence à trouver des
moyens sûrs pour l'expression des instincts. Puisque le moi s'ajuste aux exigences
extérieures, on dit qu'il opère selon le principe de réalité. Une troisième instance mentale est
le surmoi, autre résultat de l'influence sociale de la réalité. Il comprend tout ce que la famille,
la culture nous a appris
concernant l'éthique, la morale et
les valeurs. Et selon Freud, ces
principes sont intériorisés pour
devenir l'idéal du moi, c'est-à-dire
ce que l'on on aimerait être. Le
surmoi comprend aussi la bonne
conscience, qui cherche à
promouvoir un comportement
parfait, conforme et socialement
acceptable, généralement
opposé au ça.
B.1.3. LES MECANISMES DE DEFENSE
Les trois instances définies par Freud sont constamment mêlées à des conflits internes qui
donnent lieu à de l'anxiété. Le moi tente de garder en dehors de la conscience ces conflits et
le désagrément qui en résulte. Pour cela, il utilise un ensemble de mécanismes de défense,
en général à un niveau inconscient. Un des mécanismes les plus courants, et pour Freud les
plus prototypiques, est le refoulement : le moi garde simplement une pensée, un sentiment
ou une pulsion inacceptable en dehors de la conscience. Cela correspond en quelque sorte à
un "oubli" intentionnel. Il faut noter cependant que le refoulement nécessite un effort important
et constant (comme de garder un ballon sous l'eau), et par moments, la pensée indésirable
peut menacer de faire surface. Pour prévenir cela, le moi emploie des défenses inconscientes
supplémentaires (Annexe 1).
B.1.4. LES STADES DE DEVELOPPEMENT
Freud a postulé que pendant que les enfants grandissent, ils traversent plusieurs stades
psycho-sexuels, chacun nommé d'après la partie du corps la plus associée avec le plaisir du
moment. La première année correspond au stade oral, parce que les activités orales telles
que manger, sucer, mordre ou autres sont les sources de plaisir prédominantes. L'enfant "oral"
est occupé à incorporer le monde extérieur. Si, à cause d'un sevrage prématuré ou retardé du
biberon ou du sein, les besoins oraux sont frustrés ou satisfaits de manière exagérée, l'enfant
peut avoir du mal à traverser le stade oral, se fixant à des comportements qui y sont associés.
Les adultes qui manifestent des comportements oraux de dépendance comme fumer, manger
à l'excès, etc… peuvent être vus comme étant fixés au stade oral. Les adultes crédules ou
passives peuvent aussi être considérées comme ayant une personnalité "orale"1.
La deuxième année correspond au stade anal, parce que Freud voyait l'anus et les stimuli
associés à l'expulsion et à la rétention des fèces comme étant les principales sources de plaisir
à ce moment-là. Cette période est marquée par l'apprentissage de la propreté durant laquelle
il peut y avoir un clivage entre la volonté des parents et celle de l'enfant. La passivité du stade
oral laisse la place au défi de la période anale. La fixation anale résulterait de pratiques
surprotectrices ou laxistes dans ce domaine. Les comportements adultes supposés
révélateurs d'une fixation anale comprennent les comportements contrôlant ou au contraire le
laisser-aller et le désordre. Les personnes qui sont avares, obstinées, très organisées,
concernées par la propreté ou les détails et celles qui sont peu soignées, mal organisées et
1 Freud pensait que plus une fixation à un stade psychosexuel est importante, plus des comportements typiques de ce stade se manifestent plus tard, et plus il y a de chances que la régression à ce stade se fasse sous l'effet du stress. Les cas dans lesquels une personne devient très dépendante des autres ou très déprimée quand ses besoins de dépendance ne sont pas satisfaits peuvent être vus par les Freudiens comme une régression au stade oral.
dépensières peuvent être vues comme manifestant des caractéristiques anales.
L'enfant entre dans le stade phallique à environ trois ou quatre ans, quand les organes
génitaux deviennent la principale source de plaisir. Comme le nom de ce stade l'indique, Freud
s'est plutôt intéressé au développement psychosexuel du
garçon. Selon lui, pendant le stade phallique, le petit garçon
commence à désirer sa mère et veut se débarrasser de son rival
: son père. C'est ce qu'on appelle le complexe d'Œdipe. Parce
que l'enfant craint la punition d'être castré pour ses désirs
incestueux et assassins, le complexe d'Œdipe et l'anxiété qui y
est associée sont résolus par le refoulement des désirs pour la
mère, par une identification au père et la rencontre ultérieure
avec une partenaire sexuelle appropriée.
Freud a abordé le complexe d'Œdipe féminin en stipulant que la petite fille souffre de l'envie
du pénis et d'un sentiment d'infériorité, pensant déjà avoir été castrée. Elle sublimerait ces
sentiments en substituant le désir d'avoir un pénis par l'envie d'avoir un enfant, et ce faisant,
en s'identifiant à sa mère2.
Pour Freud la résolution réussie des conflits du stade phallique est cruciale pour le bon
développement psychologique. La fixation au stade phallique étant souvent invoquée comme
cause des problèmes interpersonnels de nombreux adultes, y compris la rébellion, l'agression,
et des pratiques sexuelles mal perçues socialement à l'époque telles que l'homosexualité,
l'exhibitionnisme et le fétichisme.
Selon Freud, il y aurait une période de latence après le stade phallique. Pendant cette période,
le principe de réalité prendrait plus d'importance dans la vie de l'enfant. Une dissipation du
complexe d'Œdipe permettrait à l'enfant de développer des compétences sociales et
éducatives et ce jusqu'à l'adolescence, quand la maturité physique de l'individu introduit la
période génitale. Dans ce stade final (qui se prolonge dans les années adultes), le plaisir se
situe encore dans la zone génitale, mais si tout s'est bien passé dans les stades précédents,
l'intérêt sexuel n'est pas seulement dirigé vers l'auto-satisfaction comme dans la période
phallique, mais vers la mise en place d'une relation hétérosexuelle stable et durable, dans
laquelle le besoin de l'autre est valorisé.
2 Freud pensait que le surmoi d'une femme était moins développé que celui d'un homme étant donné qu'il ne reposait pas sur une forte angoisse qu'est l'angoisse de castration.
B.1.5. AUTRES APPROCHES PSYCHODYNAMIQUES
Toutefois, plusieurs critiques faites au modèle freudien vont entrainer l’apparition d'autres
théories psychanalytiques, notamment,
l'insatisfaction du rôle central des instincts inconscients dans la motivation,
la reconnaissance grandissante de l'influence des variables sociales et culturelles sur
le comportement humain,
une plus grande prise en compte des aspects conscients de la personnalité, et
la croyance que le développement de la personnalité n'est pas terminée pendant
l'enfance mais qu'elle continue tout au long de la vie.
Dans ces versions contemporaines de la psychanalyse, le moi ne se développerait pas qu'en
fonction du ça et de ses conflits avec l'environnement ; il disposerait de sa propre énergie et
de la capacité de se développer sans être lié aux fonctions défensives inconscientes. Cette
pensée "néo-freudienne" plaît à de nombreux cliniciens d'orientation analytique, car elle fait
un portrait de l'homme comme étant plus positif et moins soumis à ses instincts.
B. 2. LA THEORIE CONSTRUCTIVISTE DE PIAGET
Jean Piaget (1896-1980) a élaboré une théorie qui propose un
modèle cohérent du développement cognitif, applicable de
la naissance à l'âge adulte. Sa théorie a pour but de
déterminer quels mécanismes sont à l'œuvre dans la
genèse et le développement de l'intelligence. Elle
détermine également quelles sont les acquisitions
habituellement réalisées à chaque âge et comment ces
acquisitions s'organisent selon un processus d’équilibration progressive en une suite d’étapes
qui définissent des stades successifs dont l'ordre reste le même pour tous les enfants.
https://www.youtube.com/watch?v=PqO0wZllOKY
B.2.1. ELEMENTS BIOGRAPHIQUES
Né à Neuchâtel le 9 août 1896, sa carrière scientifique commence dès 1907 (11 ans) où il écrit
un article sur l'observation d'un moineau albinos. Passionné d'histoire naturelle, il publie en
1912 un article sur les mollusques d'eau douce vivant dans les lacs suisses. En 1918 il publie
Recherche, un roman philosophique religieux et obtient son doctorat en sciences naturelles.
En 1919 il rejoint le laboratoire d'Alfred Binet à Paris et s’intéresse à la question de la logique
chez l'enfant : il entreprend de comprendre pourquoi et comment le raisonnement de l'enfant
est si différent de celui de l'adulte. Cet intérêt est totalement lié à un autre intérêt celui pour la
biologie et Piaget n’aura de cesse de confronter développement scientifique et développement
de l’enfant. En effet pour Piaget, la logique et le raisonnement sont la forme optimale de
l’adaptation biologique (donc du cerveau). Cette adaptation est possible grâce à l’activité
opératoire du sujet lui-même et des sources d’équilibration qu’elle comporte. Après un stage
à Paris chez Binet, il s’installe, en 1920 à l’Institut Jean-Jacques Rousseau à Genève et se
consacre totalement à l'étude de la pensée enfantine. Sa vie se partage alors entre ses
diverses fonctions d'enseignant, de chercheur, de direction, ses publications3 , sa vie de famille
et l'observation de ses enfants. Il y meurt en 1980.
B.2.2. LES INFLUENCES DE PIAGET
L'INFLUENCE DE L 'HISTOIRE DES SCIENCES
Comment la pensée devient-elle ce qu’elle devient ? Quels sont les mécanismes qui sous-
tendent l’accroissement des connaissances ?
La visée de Piaget est à la base fondamentalement épistémologique : Piaget cherche, à
travers l'étude chez l'enfant de la genèse et du développement des connaissances, à retracer
la genèse et le développement de la pensée au cours des siècles. Cet ancrage le conduit à se
centrer sur les mécanismes généraux (c’est-à-dire communs à tous les hommes)
d'acquisitions et d'accroissement des connaissances : il s'intéresse à un sujet épistémique,
différent du sujet individuel. Son modèle vise donc à mettre en évidence ce qui est
généralisable dans la conduite d'un grand nombre de sujets.
Pour Piaget ces changements ne peuvent être imputés à la seule maturation nerveuse : plus
les acquisitions s’éloignent de leur origine sensori-motrice, plus leur chronologie d’apparition
est variable; ce qui démontre que la maturation nerveuse n’est pas seule à l’œuvre. Il se
différencie donc très clairement de Gesell. L’expérience apparaît également comme un facteur
nécessaire, mais non suffisant, dans la mesure où le structures logico-mathématiques, les
opérations intellectuelles relèvent de la coordination des actions du sujet et non de la pression
du monde physique. La connaissance n’est pas une copie de la réalité, mais un processus
actif qui consiste à assimiler les données de l’expérience aux cadres de connaissances du
sujet.
Ainsi pour expliquer l’évolution régulière et dirigée au cours du développement, Piaget
propose-t-il l’équilibration. Ni l’individu, ni l’environnement n’étant statique, l’état d’équilibre
3 C’est l’œuvre la plus vaste produite au XXème siècle dans le domaine du développement, avec une cinquantaine d’ouvrages et plus de 700 d’articles. Vous trouverez à la fin de ce document une bibliographie succinte.
permanent est impossible; les conduites s’accompagnent donc toujours d’un processus
d’équilibration qui comporte deux pôles : l’assimilation et l’accommodation. L’assimilation
est un processus par lequel un objet du milieu est appréhendé par la structure actuelle du sujet
et l’accommodation est une activité par laquelle la structure actuelle du sujet se modifie pour
s’ajuster à une modification de l’environnement.
L'INFLUENCE DE LA BIOLOGIE
Les mécanismes qui régissent l’évolution des espèces sont-ils semblables à ceux qui régissent
le développement ? Apprendre, grandir, est-ce s’adapter ?
Ayant une formation initiale en sciences naturelles, Piaget est très tôt passionné par l’évolution
des espèces (son travail de thèse porte sur l’évolution des formes des ammonites). Il a été
fortement marqué par la théorie darwinienne et la notion d’adaptation des espèces à leur
milieu pour survivre. Pour Piaget, l’intelligence humaine s’inscrit dans l’évolution générale de
la vie et à ce titre, est le meilleur exemple d'adaptation à la vie, à l'environnement. Comme
Darwin, qui montre qu’au cours de l’évolution, les espèces les mieux organisées survivent à
leur milieu, Piaget considère que les conduites intellectuelles sont le produit d’un organisme
particulier et l’aboutissement de l’évolution biologique. Ainsi pour lui, « l’intelligence constitue
une activité organisatrice dont le fonctionnement prolonge celui de l’organisation biologique,
tout en le dépassant, grâce à l’élaboration de nouvelles structures » (Piaget, 1936, p. 356).
Ainsi, les processus psychologiques apparaissant dès la naissance résultent des processus
biologiques mais suivent ensuite leur propre développement grâce à l’activité opératoire du
sujet, qui assimile d’une part dans sa structure actuelle certains éléments du milieu et
accommode en retour, c’est-à-dire modifie sa structure en raison des influences du milieu.
Cela permet à l’organisme de s’adapter, l’adaptation étant définie comme un équilibre entre
assimilation et accommodation. L’organisation interne (structure) et l’adaptation avec ses deux
pôles d’assimilation et d’accommodation constituent le fonctionnement de l’intelligence,
fonctionnement qui est commun à la vie, mais qui est capable de créer des structures variées.
Ainsi pour Piaget, l’intelligence est adaptation et permet à l’humanité de survivre dans des
milieux qui dépassent les possibilités d’adaptation de l’organisme humain. L'intelligence ne
reflète pas passivement le milieu : elle n'est pas une actualisation spontanée de possibilités
données a priori (innéisme), mais elle se construit au cours des interactions suscitées entre
l'individu et son milieu par l'activité de l'individu.
L'INFLUENCE LOGICO-MATHEMATIQUE
Pour Piaget, l'intelligence la plus aboutie est logico-mathématique. Le développement de
l'intelligence est donc celui des organisations cognitives (structures). Le développement des
structures tend vers le développement des opérations supérieures (c’est-à-dire logico-
mathématiques), qui sont l'aboutissement du développement. Ainsi, se développer consiste à
intérioriser l’action en opération (réversible) ; les opérations sont coordonnables en système
d'ensemble qu'on appelle le groupement. L'intelligence procède de l'action en transformant les
objets et le réel : la connaissance est essentiellement une assimilation active opératoire. Ainsi,
les cadres de connaissance (programmes d’action, structures mentales) assimilent certains
aspects de la réalité et réagissent sous l’influence de ces éléments de la réalité. Dès que
l’enfant (ou le bébé) a acquis un nouveau programme d’actions, il tend à soumettre tous ces
objets à ce programme, encore appelé par Piaget, schème d’action. Ainsi par exemple, le bébé
acquiert vers 5 mois le schème "saisir" et il assimile tous les objets rencontrés à ce schème.
Or certains objets, comme une ficelle, requiert de modifier légèrement le schème "saisir" en
schème "tirer" ; cette modification du programme est une accommodation.
B.2.3. LES CONCEPTS CLEFS DE LA THEORIE CONSTRUCTIVISTE DE PIAGET
Voie médiane entre l’empirisme et l’innéisme, le constructivisme se situe au-delà de ces deux
conceptions radicales; il les dépasse tout en les englobant : les structures de l’intelligence ne
sont pas innées ou préformées dans le système nerveux et elles ne sont pas non plus
préformées dans le monde physique où il n’y aurait qu’à les découvrir. Les structures de
l’intelligence naissent de l’interaction entre le milieu et le sujet, par l’activité du sujet (la
focalisation sur l’assimilation explique le privilège accordée par Piaget à l’action du sujet).
L’enfant est comme un petit savant en herbe qui redécouvrirait les grandes lois qui régissent
notre monde. Piaget rejette l’empirisme car pour lui la connaissance n’est pas une copie de la
réalité. Il en veut pour preuve que les enfants de 5/6 ans ne différencient pas un triangle d’un
carré au cours d’une exploration tactile ; à partir de 6/7 ans, ils peuvent faire la différence et
Piaget observe une augmentation de l’exploration tactile. En d’autres termes, c’est l’activité du
sujet qui détermine sa prise d’informations ; dans cette perspective, cela signifie qu’un bébé
de 5 et 10 mois par exemple ne prennent pas les mêmes informations visuelles (ce qui peut
expliquer l’erreur A non B par exemple).
L'équilibration : l'équilibre cognitif se fait "… à la suite de compensations actives du sujet en
réponse aux perturbations extérieures et d'un réglage, à la fois rétroactif (feedback) et
anticipateur, constituant un système permanent…"
L’assimilation : c’est l’intégration dans la structure actuelle de l'organisme de certains
éléments du milieu. Lorsque l'enfant voit un chien et lui associe le mot "chien", il assimile
l'animal à sa catégorie, ou schème, de chiens.
L’accommodation : c’est la modification de la structure actuelle de l'organisme en raison des
influences du milieu. Un bébé qui a appris à attraper un petit objet qui se trouve à sa portée
tend à soumettre tous les objets à cette structure; en terme piagétien, il assimile les objets à
son schème d’action. Mais il ne peut dans un premier temps attraper des objets volumineux,
car son schème de préhension manuelle n’est pas adapté à ces nouveaux objets : il va devoir
se servir simultanément de ces deux mains pour enserrer l’objet volumineux. Il modifie ainsi
son schème de préhension manuelle par accommodation.
Les schèmes : ce sont les instruments de l'assimilation, ils se définissent comme des
organisations d'actions ou des structures qui se répètent dans des circonstances semblables
et analogues et qui se généralisent. Le schème n’est pas le comportement, il est le
correspondant cognitif non observable.
Selon Piaget, le développement mental est une succession de grandes structurations : le
groupe pratique des déplacements, le groupement des opérations concrètes et le groupe des
opérations formelles. Ces grandes constructions sont des structures, c’est-à-dire un ensemble
d’acquisition organisées, d’opérations qui portent sur un domaine particulier et qui se
définissent par les relations qu’entretiennent entre elles les opérations. Les opérations
mentales regroupées en structures sont plus puissantes que des opérations isolées. Les
structures favorisent donc l’émergence du raisonnement. Elles sont organisées de telle façon
que si on observe une acquisition, on peut en prévoir une autre. Ainsi, la théorie de Piaget est
structuraliste. Les structures de l’intelligence se développent selon un processus d’interaction
entre l’organisme et le milieu. Le point de départ est biologique et l’arrivée est logico-
mathématique, le schème étant l’instrument d’assimilation.
B.2.4. LA METHODE CLINIQUE DE PIAGET
Il faut souligner que l’originalité de Piaget n’est pas de se limiter à une description des
structures mais d’analyser et comprendre l’évolution de ces structures dans le temps. Ainsi,
l’analyse structurale ne considère pas les faits isolément, pas plus qu’elle ne les intègre dans
une chaîne associative. Les faits sont appréhendés en tant que structure d’éléments qui se
déterminent les uns les autres quant à leur nature et leur fonction. Pour comprendre l’évolution
des structures au cours du temps, Piaget développe une méthode, dit l’entretien clinique, qui
consiste en une conversation avec l’enfant, à propos de la tâche qu’on lui demande de faire
et pendant qu’il fait celle-ci. Cette méthode clinique considère deux choses simultanément :
le matériel de la tâche et sa manipulation par l'enfant (le matériel a été choisi de manière à
permettre un constat relatif à une question que l'on se pose) et les verbalisations de l'enfant.
Le matériel et sa présentation sont les mêmes pour tous les enfants (ils sont
standardisés), on observe l'activité de l'enfant au cours des manipulations, les
modifications suscitées dans ces manipulations et dans les jugements auxquels elles
conduisent, par certains changements introduits dans la tâche proposée. La tâche est
présentée comme un jeu. Le jeu est proposé à des enfants d'âges différents car c'est
la comparaison des observations faites à des âges successifs qui constitue le principe
de la méthode.
Dans le même temps, le psychologue s'adapte aux réactions et verbalisations de
chaque enfant. Le but étant de suivre la démarche de l'enfant, son raisonnement, la
structure de sa logique. Qu'il réussisse ou qu'il échoue, que ses réponses soient
exactes ou non, on demande à l'enfant de justifier ses réponses. Pour l'amener à le
faire, on pourra contester ou critiquer ce qu'il dit, invoquer les avis contraires
prétendument fournis par un camarade… : autrement dit on facilite autant que possible
la verbalisation de la démarche.
Le principe de cette méthode est donc un contrôle assez souple du déroulement de
l'expérience, avec des interventions de l'expérimentateur, le recueil et l'interprétation de tout
ce que fait et dit le sujet. Voir cette vidéo sur la méthode piagétienne :
http://www.rts.ch/archives/tv/culture/dimensions/3471374-la-methode-piaget.html
La théorie de Piaget est générale ou universelle : elle postule que tous les sujets construisent
les mêmes structures, selon les mêmes processus et dans le même ordre. Elle préconise un
ordre dans le développement par stades ordonnés. Pour Piaget, l'âge des enfants n'a pas
d'importance, il est donné à titre approximatif. Nous verrons en Licence 3 que certains auteurs
ont vivement critiqué cette position et ont proposé d’adapter la théorie de Piaget à la lumière
des découvertes plus récentes.
Vidéo de Piaget expliquant sa théorie et ses concepts :
https://www.youtube.com/watch?v=0XwjIruMI94
Les structures de l’intelligence se construisent par paliers; chaque pallier correspondant au
stade définis par Jean Piaget. Chaque stade comporte un niveau de préparation et un niveau
d’achèvement. C’est une période clairement objectivable dans le temps et observable chez
tous les enfants. On établit une sorte de bilan des performances normalement possibles à
chaque âge.
B.2.5. LES STADES
La notion de stade est centrale dans l’œuvre de Piaget. En effet, le développement cognitif
d’après la conception de Piaget, est un processus continu et progressif mais qui aboutit à des
constructions cognitives qualitativement nouvelles qui se traduit par des sauts quantitatifs qui
font passer l’enfant par des stades distincts. Chaque stade se caractérise par une structure
d’ensemble, qui, lorsqu’elle est construite, détermine toutes les opérations possibles et
utilisables qu’elle recouvre. L’ordre de succession des acquisitions est constant et les étapes
ne peuvent être inversées. Les structures construites à un âge donné deviennent partie
intégrante des structures de l’âge suivant. Chaque stade comporte un point d’équilibration
atteint à un moment donné (fermeture d’une structure), point ultime avant un nouveau
déséquilibre « reconstructif ». C’est un mouvement continu qui se prolonge indéfiniment. Ce
sont les différentes structures apparues successivement au cours du développement qui
définissent les différents stades et dont les sous-stades marquent le processus de formation
ou genèse.
Parfois il arrive qu’un enfant soit dans un stade mais ne se comporte pas comme attendu.
Piaget parle alors de décalage horizontal qui désigne l’absence de synchronie dans l’accès à
un stade selon les domaines fonctionnels. Ces décalages horizontaux s’expliquent par la
variabilité intra- et interindividuelle
Piaget décrit 4 stades, eux-mêmes subdivisés en différents sous stades :
STADE SENSORI-MOTEUR : DE 0 A 18 MOIS/2ANS
C’est la période de l’'intelligence sensori-motrice c’est-à-dire de "la capacité à résoudre des
problèmes pratiques au moyen de telles activités, avant l'apparition du langage". Ce stade est
caractérisé par la constitution progressive de schèmes sensori-moteurs comme le schème de
l'objet permanent. Il se subdivise en 6 sous-stades, qui vont de l'exercice des schèmes réflexes
à la combinaison mentale des schèmes d'action. Au cours de ce stade, les activités de l'enfant
ne font intervenir que la perception, le tonus et les mouvements. L'enfant n'a pas encore de
représentation; il fait preuve d'une intelligence pratique, agie.
SOUS-STADE 1 : EXERCICES REFLEXES (0-1 MOIS)
Le premier sous stade concerne les réflexes, qui s’organisent et se conservent qu’en
s’exerçant, fonctionnant pour eux-mêmes en incorporant les objets favorables à ce
fonctionnement (assimilation généralisatrice), et en discriminant les situations nécessaires à
certains modes spéciaux de son activité.
SOUS-STADE 2 : PREMIERES HABITUDES OU ADAPTATIONS ACQUISES; REACTION CIRCULAIRE ET
SCHEME PRIMAIRE (1-4 MOIS ET DEMI).
Viennent ensuite les adaptations acquises ou habitudes. Elles se construisent grâce à la
réaction circulaire primaire, qui s’organise en schèmes sensori-moteurs primaires. La réaction
circulaire représente une forme plus évoluée d’assimilation. L’univers de l’enfant procède d’un
égocentrisme intégral et inconscient : il y a autant d’espaces que de schèmes : espace buccal,
espace visuel, …
SOUS-STADE 3 : REACTION CIRCULAIRE ET SCHEMES SECONDAIRES (4 MOIS ET DEMI-8 OU 9 MOIS)
La réaction circulaire secondaire consiste à retrouver les gestes ayant exercé par hasard une
action intéressante sur les choses. Elle prolonge simplement les primaires avec cette
différence que ces dernières portent sur le corps propre tandis que les secondaires portent sur
des objets extérieurs. Ex. des secousses dans le berceau qui déclenchent le mouvement du
mobile
SOUS-STADE 4 : LA COORDINATION DES SCHEMES SECONDAIRES ET LEUR APPLICATION (8/9-11/12
MOIS)
Début de l’intentionnalité qui dissocie dans l’action les buts et les moyens. L’enfant combine
des schèmes pour obtenir des résultats désirés et appliques des schèmes connus aux
situations nouvelles : il y a coordination de schèmes (dissociation et regroupement par
assimilation réciproque. L’accommodation reste subordonnée au jeu de l’assimilation, et ne
progresse qu’en fonction de la coordination des schèmes.
SOUS-STADE 5 : REACTION CIRCULAIRE ET SCHEME TERTIAIRES; COMBINAISON EXPERIMENTALE DES
SCHEMES ET DECOUVERTE (11/12-18 MOIS)
La réaction circulaire tertiaire est une réaction « pour voir », où se manifeste une véritable
recherche intentionnelle de la nouveauté : l’effet nouveau est obtenu dans le but d’en étudier
la nature. L’accommodation devient prépondérante et commande l’assimilation. Dans ce sous-
stade, l’enfant acquiert progressivement le sens des relations spatiales : l’enfant établit entre
les évènements perçus des liens de causalité indépendants de son action propre.
SOUS-STADE 6 : COMBINAISON MENTALE DES SCHEMES; INVENTION ET REPRESENTATION (1,5-2 ANS)
L’invention est une accommodation brusque, une sorte de déduction sensori-motrice. Cette
intériorisation des conduites implique la représentation qui fournit des symboles
accompagnant le processus moteur et permettant aux schèmes de s’appuyer sur eux pour
fonctionner d’eux-mêmes. Le sixième sous-stade marque ainsi l’achèvement de l’intelligence
sensori-motrice et prépare l’intelligence réfléchie. En somme tout devient représentatif,
l’espace, le temps, la causalité avec toute l’évolution que cela comprend.
Vidéo illustrant les différents sous-stades : https://www.youtube.com/watch?v=_4xjChsRPQY
STADE PREOPERATOIRE OU INTUITIF : DE 2 A 7/8 ANS
Ce stade est essentiellement marqué par le développement du langage et de la pensée
symbolique. En effet, le début du stade se caractérise par l'apparition de la fonction symbolique
: représentation d'un signifié au moyen d'un signifiant différencié et ne servant qu'à cette
représentation, la chose représentée pouvant être absente. L'enfant fabrique des signifiants
qui sont stockés, permettant aux opérations de l'intelligence de travailler sur des objets
symbolisés ou mentalement représentés et non plus sur des objets réels.
Lors du passage du plan sensori-moteur au plan opératoire, il y a une augmentation des
vitesses de l’acte intellectuel, une prise de conscience et une multiplication des distances
spatio-temporelles entre le sujet et les objets (Piaget, 1947). Cependant, malgré ces
différences, le fonctionnement, les mécanismes et les lois d’évolution restent les mêmes.
Avant d’atteindre le niveau opératoire, l’enfant doit reconstruire toutes ses acquisitions sensori-
motrices sur un nouveau plan représentatif où il rencontre les mêmes difficultés qu’il a
vaincues au niveau de l’action pratique. Ainsi les schèmes sensori-moteurs ne sont pas
d’emblée traduits en concepts : sa pensée doit se décentrer par rapport aux perceptions et à
l’action pour réaliser la réversibilité opératoire (sortir de son égocentrisme intellectuel et
social).
SOUS-STADE 1 : APPARITION DE LA FONCTION SYMBOLIQUE ET DEBUT DE LA REPRESENTATION (2-4
ANS)
La fonction symbolique (ou sémiotique) est fondée sur l’image mentale. Les premières images
mentales apparaissent seulement dans le milieu de la deuxième année, simultanément dans
l’imitation différée, le jeu symbolique et le langage. L’image mentale qui se forme dans
l’imitation différée est un signifiant constitué par l’accommodation, tandis que le signifié est
constitué par l’assimilation, qui en incorporant l’objet à des schèmes antérieurs lui fournit par
cela même une signification. L’union du signifiant et du signifié donne naissance à la
représentation qui constitue le propre de la fonction symbolique. Le jeu symbolique est la
manifestation de la pensée égocentrique pure. La pensée adaptée (c’est-à-dire la recherche
de l’équilibre entre assimilation et accommodation) apparaît sous la forme d’une pensée
préconceptuelle, où le préconcept est une assimilation à un objet sans accommodation
généralisée à tous, à mi-chemin entre le symbole et le concept proprement dit. Les débuts de
la représentation chez l’enfant sont donc caractérisés par la prépondérance de l’assimilation,
prépondérance qui persiste jusqu’à la naissance des opérations vers 7-8 ans.
SOUS-STADE 2 : ORGANISATIONS REPRESENTATIVES FONDEES SUR DES CONFIGURATIONS STATIQUES
OU SUR UNE ASSIMILATION A L’ACTION PROPRE (4-5 ANS ET DEMI).
L’enfant à 4 ans devient capable de s’expliquer, son langage spontané, ses jugements et
raisonnements relèvent de la pensée égocentrique. Cela signifie que l’enfant ignore les
liaisons objectives au profit des liaisons subjectives, impose des schémas arbitraires aux
choses, assimile incessamment les expériences nouvelles à des schémas anciens (Piaget,
1936).
SOUS-STADE 3 : REPRESENTATIONS ARTICULEES PAR REGULATIONS (5 ANS ET DEMI-7/8 ANS)
Il est caractérisé par une décentration et une régulation des représentations qui deviennent
plus mobiles, qui s’articulent et tendent à se coordonner pour aboutir aux opérations
réversibles vers 7-8 ans. Ex. de la conservation des nombres (annexe 1). La pensée enfantine
reste donc dominée par l’intuition perceptive. Piaget accorde la primauté aux opérations,
primauté qui est celle de l’activité sur la connaissance, du sujet sur l’objet. Elle se rattache à
la primauté de l’assimilation sur l’accommodation.
Absence de conservation :
https://www.youtube.com/watch?v=MawXvXp4n3g&index=10&list=PLOb4GHRy8OYcjC4XKi
YBe52s6-TiEQTy9
STADE OPERATOIRE CONCRET : DE 7/8 A 12 ANS
A partir de 7-8 ans, l'enfant commence à se détacher de la perception immédiate, qui le conduit
à déformer la réalité. Le passage de l'intuition à l'opération (en tant qu'actions intériorisées,
réversibles, et qui peut se coordonner en structure d'ensemble) se fait grâce à la réversibilité.
Toute transformation peut être réversible, c'est à dire on peut retourner à un état antérieur,
avant la transformation. Pour que la réversibilité existe il faut qu'il y ait un invariant. Dans
l’exemple de la pâte à modeler (Annexe 2) c'est la quantité de pâte à modeler qui ne change
pas. Durant cette période il n'y a plus de prépondérance de l'assimilation sur l'accommodation
mais coexistence égalitaire entre les 2 processus. Ainsi, la pensée se libère des servitudes de
l'image : les actions intériorisées deviennent complètement mobiles et réversibles, se
transformant en opérations. Mais les opérations constituées portent sur un plan concret, c’est-
à-dire sur des objets manipulables, soit perceptibles, soit imaginables. Elles ne peuvent être
appliquées ni à tous les contenus, ni à tous les raisonnements. Les opérations restent
attachées au réel.
Une opération est une action intériorisée ou mentale. Elle débute avec l’avènement de la
représentation au début du présent stade, mais ne devient rationnelle, c’est-à-dire
opérationnelle dans le sens strict, que vers 7-8 ans. Une opération rationnelle est une action
susceptible de réversibilité complète en son mécanisme formel et aboutissant en ses résultats,
à constituer des invariants ou à inverser toute variation. L’opération est donc essentiellement
un processus de conceptualisation et de quantification.
SOUS-STADE 1 : OPERATIONS CONCRETES SIMPLES ET ELEMENTAIRES (7/8-9/10 ANS)
Tournant décisif dans le développement de l’intelligence avec l’apparition des opérations
réversibles, avec pour indices l’acquisition des divers principes de conservation.
La classification : elle est un système d’opérations de mise en relation des
ressemblances et des différences, impliquant la saisie des relations d’inclusion.
L’enfant devient capable d’utiliser à la fois la méthode ascendante et la méthode
descendante, c’est-à-dire de comparer le tout et les parties, de comprendre par
conséquent la relation d’inclusion.
La sériation : elle consiste à ordonner des éléments selon une quantité qui varie. C’est
une opération portant sur des relations asymétriques et transitives.
Le nombre : c’est une collection d’unités égales entre elles; il est donc à la fois une
classe et une relation. Il ne se constitue que par l’opération de dénombrement (sériation
des classes). Un nombre cardinal est une classe dont les éléments sont conçus comme
des unités équivalentes les unes aux autres et cependant distinctes, leurs différences
consistant alors seulement en ceci que l’on peut les sérier donc les ordonner.
Inversement les nombres ordinaux sont une série dont les termes, tout en se succédant
selon les relations d’ordre qui leur assignent leurs rangs respectifs, sont également des
unités équivalentes les unes aux autres et par conséquent, susceptibles d’être réunis
cardinalement. Classes, relations et nombre forment un tout psychologiquement et
logiquement indissociable, dont chacun des trois termes complète les deux autres.
https://www.youtube.com/watch?v=gA04ew6Oi9M
SOUS-STADE 2 : OPERATIONS CONCRETES COMPLEXES SPATIO-TEMPORELLES (9/10-11/12 ANS)
Les opérations spatio-temporelles, que Piaget appelle aussi infralogiques, sont des opérations
constitutives des objets eux-mêmes, objets complexes et cependant uniques tels que l’espace,
le temps et les systèmes matériels.
Les opérations physiques : elles portent sur un objet matériel et consistent à diviser
l’objet en partie, à placer et déplacer ces parties, à les réunir de différentes façons,
entraînant des transformations internes de l’objet dont les différents états peuvent être
comparés, sériés et mesurés. Il y a primauté de la déduction sur l’induction.
https://www.youtube.com/watch?v=pGvxgfTpRxs
Les opérations spatiales : elles sont constitutives de l’objet total ou espace, lieu
d’emplacement et de déplacement des objets particuliers.
Les opérations topologiques : l’espace topologique est formé des relations de
voisinage, de séparation, d’ordre, d’enveloppement et de continu, toutes fournies par
la représentation intuitive (opérations de partition et d’addition, d’ordre de placement).
Les opérations euclidiennes et métriques : comme les précédentes elles relèvent de la
structure de groupement avec son caractère intensif; elles expriment les caractères de
l’objet relativement à son emplacement ainsi que ses déplacements.
Les opérations temporelles et cinétiques : Au niveau sensori-moteur, le temps est
pratique, c’est-à-dire spécialisé par rapport à chaque action, et il existe autant de séries
temporelles que de schèmes d’action, sans qu’aucun temps unique les relie les unes
aux autres. Ce temps unique suppose la pensée et nécessite une construction
opératoire.
STADE DES OPERATIONS FORMELLES : A PARTIR DE 11/12 ANS
L’évolution du stade II au stade III concernent essentiellement les opérations qui jusqu’alors
concrètes, c’est-à-dire reposant sur la manipulation des objets, deviennent formelles, c’est-à-
dire reposant sur la manipulation des signes et des symboles.
L'intelligence se dégage du concret et situe le réel dans un ensemble de possibles :
raisonnement hypothético-déductif. Cela signifie que l'enfant devient capable de raisonner sur
des hypothèses énoncées verbalement et de faire des déductions dessus. Les opérations ne
portent plus directement sur des objets. Il y a une différenciation forme/contenu. On arrive
alors aux structures logico-mathématiques.
Au stade formel, l’enfant s’attache à la forme de son raisonnement, quel que soit le contenu
auquel il s’applique : il n’a plus besoin de support concret pour exercer son raisonnement. Il
raisonne sur des propositions : phrases, idées, hypothèses... dont il ne sait pas encore si elles
sont vraies et met en œuvre une pensée hypothético-déductive, c’est-à-dire qu’il va émettre
des hypothèses, raisonner sur ces hypothèses et construire des plans d’expérience pour les
vérifier. Il fait l’inventaire de tous les possibles et le réel qui était le seul possible envisageable
n’est plus envisagé que comme un cas particulier de tous les possibles. Ce raisonnement
hypothético-déductif est sous-tendue par deux structures nouvelles : la combinatoire et le
groupe INRC ou groupe des deux réversibilités.
L’essor affectif et social qui caractérise l’adolescence a comme condition préalable une
transformation de la pensée chez le jeune adolescent. Vers 11/12 ans, l’enfant parvient à se
libérer du concret, à penser le possible et à raisonner abstraitement. Le présent stade débute
donc par un changement de niveau : l’apparition de la pensée formelle et le raisonnement
hypothético-déductif. La pensée formelle opère sur un matériel symbolique, le raisonnement
formel procède par hypothèses et par déductions. « La pensée concrète est la représentation
d’une action possible, et la pensée formelle la représentation d’une représentation d’actions
possibles ». La constitution des opérations formelles nécessite toute une reconstruction
destinée à transposer les groupements concrets sur un nouveau plan de pensée. La pensée
formelle débute par une phase d’égocentrisme métaphysique (cf annexe 4 sur le
développement de la pensée selon Piaget)
SOUS STADE 1 : GENESE DES OPERATIONS FORMELLES (11/12 - 14 ANS)
Début de la structuration des opérations formelles (on demande à un enfant de combiner 2
par 2 ou 3 par 3 des jetons de couleurs différentes selon les ordres possibles.
SOUS STADE 2 : LES STRUCTURES OPERATOIRES FORMELLES (14 - 16 ANS)
Début des opérations : la combinatoire et groupe des quatre transformations INRC.
La combinatoire : système d’emboîtements ordonnés mais bornés. C’est une
généralisation des opérations de classification; sa formation est reconnaissable à
l’apparition d’une combinatoire que l’on voit se manifester dans des conduites variées
portant sur la combinaison des objets ou des facteurs expérimentaux.
Exemple de combinatoire : https://www.youtube.com/watch?v=qI9TZQcV3cg
Le groupe INRC : groupe de 4 transformations réunissant dans un système unique les
transformations par inversion ou négation et par réciprocité, qui restent séparées au
niveau concret. Ainsi, à chacune des opérations propositionnelles I ou opération
identique, on peut associer son inverse ou sa négation N, sa réciproque R et l’inverse
de sa réciproque ou la corrélative C [NR=C, NC=R, RC=N, et NRC=I]
C’est l’exemple de la balance ou l’enfant doit trouver la règle de l’équilibre des bras de la
balance en fonction des poids et des distances des poids du poids au pivot. Il existe une
proportionnalité inverse entre le poids et la longueur que l’enfant doit trouver : diminuer le poids
en augmentant la longueur équivaut à augmenter le poids en diminuant la longueur. Une
synthèse en images : https://www.youtube.com/watch?v=TRF27F2bn-A
B.2.6. DISCUSSION
Ainsi pour Piaget, les enfants sont des apprenants actifs qui construisent du sens et du savoir
pour eux-mêmes. Ils cherchent à s’adapter à leurs environnements et pour cela les individus
organisent leur pensée en structures de connaissance, qui leur permettent un équilibre
cognitif.
Dans sa théorie Piaget cherche à expliquer les fonctions cognitives d'une complexité
croissante par leurs modes successifs de formation : Le développement se déroule en stades,
et trois mécanismes sont fondamentaux dans la mise en place du maniement des opérations
cognitives (ou intellectuelles) : l’équilibration, l’assimilation et l’accommodation.
Toutefois, les critiques à la théorie de Piaget sont nombreuses :
Tout d’abord sur la question de la continuité du développement : les stades décrivent
un développement structural discontinu puisque de nouvelles structures sont créées.
Pour autant, d’un point de vue fonctionnel, Piaget décrit tout au long de son modèle un
seul type de fonctionnement : celui de l’équilibration, possible grâce aux mécanismes
de l’assimilation et de l’accommodation.
La question des mécanismes de développement. Pour Piaget, l’enfant passe d’un
stade à un autre grâce à un processus interne qui l’incite à transformer les formes de
connaissances dans le sens de l’optimisation. Ce processus est l’équilibration des
structures cognitives, manifestation des tendances fondamentales d’assimilation et
d’accommodation qui régissent tout système cognitif. Nous verrons en Licence 3 que
des chercheurs ont tenté de mettre en évidence des facteurs de développement qui
permettent d’expliquer le passage d’un stade à un autre.
Une autre critique porte sur le fait que Piaget s’est focalisé sur les aspects logico
mathématiques tandis que les facteurs affectifs (émotions, motivation, …) ont été
négligés, comme les facteurs sociaux.
Enfin, une question qui anime le débat entre innéistes et constructivistes est le
paradoxe de l’apprentissage : Dans la théorie de Piaget, une structure N peut donner
naissance à une structure d’intelligence supérieure N+1. Nous verrons en Licence 3
comment des chercheurs proposent de répondre à cette question.
B. 3. LE MODELE COMPORTEMENTAL
Ce modèle postule que le comportement est principalement influencé par l'apprentissage, qui
prend place au sein d'un contexte social. Dans ce modèle, les différences individuelles dans
le comportement sont attribuées à l'histoire d'apprentissage unique de l'individu en relation
avec des personnes et des situations spécifiques, et non pas à des traits de personnalité ou à
une maladie mentale. Le milieu culturel de chaque individu est vu comme étant une partie de
son histoire d'apprentissage unique. Les comportementalistes considèrent que la cohérence
comportementale (que d'autres appelleraient "personnalité") résulte d'un apprentissage
généralisé et/ou de stimuli similaires présents dans les différentes situations. Par exemple,
une personne peut devenir calme dans la plupart des circonstances si avant cela, le calme a
été récompensé sur des années, dans de nombreuses situations sociales. Dans ce modèle,
on insiste sur l'importance des influences de l'environnement sur le comportement. Les
facteurs génétiques et biologiques ne sont pas pour autant mis de côté, mais on considère
qu'ils composent la base à partir de laquelle l'environnement va former les comportements. Le
capital génétique peut fixer des limites du potentiel comportemental ou intellectuel d'une
personne, mais on stipule qu'à l'intérieur de ces limites, ce sont les facteurs d'apprentissage
qui déterminent le plus le comportement.
D'après le modèle comportemental, les mêmes principes d'apprentissage déterminent à la fois
les comportements problématiques et non-problématiques. Par conséquent, une évaluation
devrait être conçue pour déterminer comment les difficultés actuelles d'un individu ont été
apprises et comment elles sont maintenues de sorte qu'un apprentissage plus adaptatif puisse
être "administré". La peur d'un enfant de maternelle par exemple, peut être due à un
conditionnement spécifique à une situation particulière, à une réponse d'angoisse généralisée
à toutes les nouvelles situations, à la présence intimidante d'un autre enfant ou à d'autres
facteurs environnementaux.
Dans l'apprentissage opérant, on insiste sur la relation entre un comportement et ses
conséquences environnementales. Dans l'apprentissage répondant, on se centre sur le lien
temporel entre stimuli et réponses. Dans l'apprentissage social ou cognitivo-comportemental,
on met l'accent sur la relation entre le comportement manifeste et la cognition (les pensées)
ou les attentes qu'une personne a à propos de ce comportement.
B.3.1. L'APPRENTISSAGE OPERANT
D'après Skinner (1904-1990), le comportement est appris et les éléments que l'on ne peut
pas observer, tels que le besoin ou la pulsion, ne sont pas
nécessaires à la compréhension de ce comportement. Selon
lui, le fait d'observer des relations entre des stimuli
environnementaux et les comportements manifestes
permet d'avoir une image complète du développement, du
maintien et du changement des comportements humains.
Au lieu de se baser sur des facteurs internes (comme le ça),
Skinner (1953) préconise l'observation et la description des
manières dont le comportement est déterminé par ses antécédents et par ses conséquences.
On appelle cette approche l'analyse fonctionnelle parce qu'elle s'intéresse aux relations
fonctionnelles entre les stimuli, les réponses et les conséquences.
http://www.youtube.com/watch?v=I_ctJqjlrHA
Si le comportement agressif d'un enfant a été et continue d'être récompensé, aucune
explication relative à un besoin interne n'est nécessaire, du moins une partie du temps. On
présume que l'enfant a simplement appris à être agressif.
B.3.2. LE CONDITIONNEMENT CLASSIQUE
Joseph Wolpe (1958, 1982) et Hans Eysenck (1982) se sont intéressés aux applications des
principes de conditionnement classique ou répondant (initialement montré par Pavlov) pour
comprendre et éliminer la détresse humaine, en particulier l'angoisse.
L'importance du renforcement opérant et de la punition dans la
formation des comportements n'est pas niée, mais l'accent est mis
sur l'apprentissage, qui a lieu à travers l'association de stimuli
conditionnés et inconditionnés. Par exemple, un adolescent évite
par peur les événements sociaux à cause d'expériences passées
négatives (i.e. conditionnement opérant : il entre dans la classe et tout le
monde se moque de ses habits), mais aussi parce que le malaise de ces expériences a été
associé aux fêtes (i.e. conditionnement classique : il a soudain mal au ventre après avoir reçu
une invitation à une fête). Ainsi, les conditionnements à la fois opérants et classiques peuvent
être impliqués dans l'apparition de comportements spécifiques. Wolpe et Eysenck ont
complété la position de Skinner en portant leur attention sur le conditionnement classique.
http://www.youtube.com/watch?v=9hBfnXACsOI
Patterson (Patterson & Reid, 1984) a contribué à apporter un éclairage systémique à cette
approche, en décrivant les "pièges de renforcement" (reinforcement traps) typiquement
observés dans les interactions familiales hostiles. Par exemple, une mère demande à son
enfant de ranger sa chambre. Il se plaint, la mère insiste, l'enfant résiste et c'est l'escalade du
conflit. Lorsque le comportement difficile (aversif) de l'enfant devient intolérable pour la mère,
par exemple s'il pique une crise de colère, la mère cède et l'enfant s'arrête. En cédant, la mère
augmente les chances que son enfant recoure à ce même procédé pour échapper à une
corvée (fin de la nécessité de ranger sa chambre : renforcement négatif4). La mère a
également été renforcée négativement (i.e. fin de la crise) dans son comportement et est donc
plus susceptible de céder à l'avenir pour mettre un terme au comportement aversif de son
enfant. Ce pattern de renforcement favorise l'escalade du conflit dans leurs futures
interactions.
4 Le renforcement négatif repose sur la récompense d'un comportement par l'arrêt d'un stimulus aversif.
B.3.3. LA THEORIE DE L'APPRENTISSAGE SOCIAL (COGNITIVO-COMPORTEMENTALE)
Quelques adhérents de la théorie cognitivo-comportementale comme Albert Bandura (1986)
estiment qu'on ne s'est pas assez intéressé au rôle des processus
cognitifs ou symboliques (i.e. la pensée) dans le développement,
le maintien et la modification des comportements. Un des
principaux points de la théorie de Bandura est l'attention qui est
portée sur l'apprentissage par observation et les processus
cognitifs indirects. D'après lui, le comportement se forme non
seulement à travers ce que l'individu apprend directement par
les conditionnements classiques et opérants, mais aussi à travers
l'observation et la représentation symbolique d'autres personnes et
événements.
Bandura a montré que les êtres humains peuvent acquérir de nouveaux comportements sans
renforcement évident et même sans avoir eu l'occasion de l'exercer. Il suffit que la personne
ait observé un autre individu, ou un "modèle" avoir le comportement en question. Plus tard,
surtout si le modèle a été récompensé par sa performance, l'observateur peut aussi avoir cette
même réaction si l'occasion lui est donnée de le faire. Dans une expérience, Bandura, Ross
et Ross (1963) ont fait observer à des jeunes enfants des modèles soit en train d'attaquer
férocement une poupée, soit assis tranquillement à côté d'elle. Après cela, les enfants qui
avaient observé l'agression tendaient à reproduire le comportement du modèle alors que ceux
qui avait vu le modèle passif avait tendance à ne pas être agressifs.
http://www.youtube.com/watch?v=hHHdovKHDNU
D'après Bandura, les effets des processus indirects peuvent être aussi déterminants que les
effets d'un apprentissage direct. Ils peuvent faire apparaître des nouvelles réponses,
l'inhibition ou la désinhibition de réponses déjà apprises (comme quand une personne traverse
au rouge après avoir vu quelqu'un d'autre le faire), et faciliter ou inciter un comportement.5
5 Dans le cas précédemment cité l'adolescent qui a peur des situations sociales, Bandura signalerait qu'il existe au moins deux sources de malaise. L'une est externe et comprend les aspects angoissants des situations sociales elles-mêmes (les autres personnes, les invitations, les rires), alors que la seconde est interne, soit cognitive. Cette seconde source provient des pensées que l'adolescent a à propos des situations sociales (je vais me ridiculiser, je n'arrive pas à me faire des amis) qui servent à maintenir l'évitement. Julian Rotter (1954) pense que les attentes qui influencent le comportement sont acquises au travers de l'apprentissage. Pour avoir une attente de quelque chose, il faut d'abord avoir vécu une expérience directe ou indirecte dans des situations similaires dans le passé.
Plusieurs auteurs, dont Bandura (Ellis, 1962) ont travaillé sur l'influence des cognitions issues
des expériences d'apprentissage, en montrant leur rôle dans la manière d'appréhender les
choses et le comportement qui s'en suit. Par exemple, la confiance en soi (ou "auto-efficacité"
selon Bandura) permet de résoudre des problèmes divers avec moins de difficultés ou de
stress. Quelqu'un qui croit qu'on lui veut du mal sera plus sur la défensive que quelqu'un qui
perçoit les autres comme amicaux et bienveillants (voir Abramson, Seligman & Teasdale,
1978). Ce faisant, il en vient à induire ce qu'il craint. Quelqu'un qui pense avoir échoué à un
examen parce qu'il est nul abordera une nouvelle épreuve d'une manière négative, qui peut
en soi constituer un frein à sa réussite (voir "attributions" de Beck, 1976). Quelqu'un qui a des
attentes irréalistes est plus souvent déçu par la réalité que quelqu'un qui en a des attentes
raisonnables (Ellis, 1962) etc. (pour plus de détails, voir annexe 5 & 6)
B. 4. LA THEORIE DE L’ATTACHEMENT
Le lien au parent a été formalisé par John Bowlby selon une perspective évolutionniste
découlant de la théorie de la sélection naturelle. Pour Darwin (1859),
l'objectif principal d'une espèce est d'assurer sa survie. Au
cours des millénaires, les "programmes" qui augmentent les
chances de survie d'une espèce permettent à celle-ci de
prospérer. Ainsi, les gênes de cette espèce se transmettent
de génération en génération et finissent par l'emporter sur
d'autres gênes qui eux, sont associés à des programmes
moins efficients. D'après cette théorie, les espèces qui ont
survécu au travers des millénaires sont celles qui sont dotées des
schèmes de comportements les plus “ biologiquement avantageux ”, c’est-à-dire de ceux qui
permettent de s’adapter au milieu naturel de façon optimale.
Or, d'après Bowlby (1957), la tendance à s'attacher serait un de ces programmes qui favorisent
la survie de l'espèce. Plus exactement, les "comportements d'attachement" tels que le fait de
pleurer, de s'agripper, de sourire, de suivre ou tout autre comportement favorisant la proximité
d'un adulte donné seraient des tendances innées qui se sont révélées efficaces, à travers les
millénaires, pour favoriser la survie de l'enfant.
Il ne faisait aucun doute pour Bowlby que l’être humain dispose, tout comme les animaux, d’un
répertoire de comportements visant à promouvoir l’attachement à la mère.
http://www.youtube.com/watch?v=eqZmW7uIPW4
http://www.youtube.com/watch?v=OrNBEhzjg8I
Il était conforté dans l'idée que le besoin de proximité constitue une nécessité différente du
besoin d’être nourri par le fait que les bébés humains pleurent parfois, alors même qu'ils sont
repus, et qu'ils ne s’arrêtent généralement de pleurer qu’une fois que leur mère les prend dans
ses bras et leur parle. Si à la naissance un bébé n'est pas suffisamment armé pour survivre
dans son environnement, ses chances d'y parvenir seront fortement augmentées s'il parvient
à obtenir la protection d'un adulte. C'est en cela que l'instinct de s'attacher devient primordial.
Certes, le bébé a besoin d'être nourri; mais même lorsqu'il est repu, il court un risque à se
trouver seul et sans surveillance. Pour cette raison, l'attachement, au même titre que le
nourrissage, constitue un besoin primaire à enjeu vital.
http://www.youtube.com/watch?v=VvdOe10vrs4
Ainsi, Bowlby a tenté de déterminer l'utilité des prédispositions innées de l’être humain, par
rapport à un objectif de survie de l’espèce. La tendance à s’attacher à la mère qui apparaît
dès les premiers mois est aussi, pour Bowlby, une prédisposition innée du bébé qui favorise
sa protection. De ce point de vue, la nature du lien de l'enfant à sa mère apparaît comme une
question essentielle.
B.4.1. LES COMPORTEMENTS D’ATTACHEMENT
C'est principalement au début de la vie, quand l'individu est particulièrement vulnérable, qu'il
a le plus besoin d’être près de sa mère. C'est aussi quand il se trouve dans une situation
alarmante, que l'enfant a besoin de sa présence. Il est sensible à des indices qui provoquent
chez lui des réactions de peur. Certains de ces indices sont transmis par la culture, mais
d'autres, selon Bowlby (1973), seraient propres à l'espèce humaine. Les stimuli non familiers,
les changements soudains de stimulation, l'approche rapide ou menaçante d'un objet ou d'un
être vivant ou encore le vide sont autant de facteurs susceptibles de déclencher la peur.
Bowlby parle d'un système de peur-alarme, dont la fonction est d'identifier les dangers. Le
repérage d'une situation alarmante entraîne l'activation du système d'attachement, destiné à
assurer sa propre sauvegarde. Les réactions de l'enfant constituent alors des signaux destinés
à faire venir la figure d'attachement. Des facteurs de vulnérabilité supplémentaires, tels que la
fatigue ou la maladie peuvent accentuer le besoin de sécurité et ainsi réduire le seuil
d'activation du système de peur-alarme.
Parallèlement au fait d'assurer sa survie, un nouveau-né doit apprendre à connaître son
environnement afin de le maîtriser. Malgré l’aspect inquiétant que peut présenter un nouveau
stimulus, celui-ci éveille en même temps une certaine curiosité chez un enfant. Il est évident
que lorsqu’un jeune est préoccupé par sa propre protection, il n'est pas en mesure de faire de
nouvelles découvertes sur le monde qui l’entoure. En s’inspirant, non plus de l’éthologie, mais
de la cybernétique, Bowlby a conçu les comportements d’attachement et d’exploration de
l’environnement en termes de systèmes antagonistes (annexe 7). L’activation du système
d’attachement serait, d'après lui, incompatible avec l’activation du système d’exploration de
l’environnement.
B.4.2. LE CONCEPT DE “ BASE SECURISANTE ”
Le bébé humain aussi a tendance à se réfugier auprès de sa mère lorsqu’il est confronté à
une situation, une personne ou un objet non familier. Par la suite, il devient plus audacieux et
tente petit à petit d’approcher et d’étudier le curieux phénomène. Mais pour s’assurer qu’il ne
court aucun risque, il veille à ne pas s’aventurer au-delà d’une certaine distance. Il vérifie
régulièrement si sa mère est encore là avant de continuer son exploration. C’est dans ce
contexte que Mary Ainsworth (1913-1999) a introduit le concept de “
base sécurisante ”, développé par Mary Ainsworth, à partir d'une idée
de son professeur William Blatz. Cette notion renvoie au fait qu'une
personne se sent bien et exploite mieux son potentiel lorsqu'elle sait
qu'elle peut compter sur une figure d'attachement en cas de difficulté.
Celle-ci lui sert de base sécurisante, à partir de laquelle elle peut
opérer.
En bref, il apparaît que l'indépendance de l’enfant est étroitement liée aux chances qu'il croit
avoir de bénéficier, en cas de besoin, de la protection de sa figure d’attachement. Ainsi, le
nouveau-né a dès sa naissance un besoin de contact et de rapprochement avec sa mère pour
se sentir bien et, en grandissant, il peut anticiper le type de réponses qu’elle est susceptible
d’avoir et il lui suffit alors d’avoir confiance en sa disponibilité. Ce sont la proximité (physique
et psychologique), puis la confiance en la disponibilité de la mère, qui vont permettre à l’enfant
de se sentir en sécurité et de ce fait, de ne plus devoir activer son système d’attachement.
Cette désactivation laisse place à l’activation du système d’exploration de l’environnement, qui
donne à l'enfant la possibilité de développer ses capacités de façon optimale.
L'exploration est généralement étudiée une fois que l'enfant est en mesure de se déplacer et
de saisir lui-même les objets qui l'entourent. De ce fait, on ne l'envisage qu'à partir du
deuxième semestre de la vie. Pourtant, certains travaux donnent à penser que l'ouverture au
monde extérieur apparaît encore plus tôt, avant même la naissance (Miljkovitch, Gratier &
Danet, 2012).
B.4.3. DEVELOPPEMENT DES STRATEGIES D'ATTACHEMENT ET D'EXPLORATION
En fonction de ce qu'il aura intériorisé, l'enfant adaptera ses comportements spontanés pour
optimiser les soins qu'il reçoit. Dès la naissance, il dispose d’un répertoire de comportements
d’attachement censés faire venir ou faire rester la mère. En fonction de l’efficacité de ces dites
« stratégies primaires » (Main, 1990), l’enfant est plus ou moins enclin à modifier le
fonctionnement de son système d’attachement et ainsi développer des « stratégies
secondaires ». En d’autres termes, l’enfant va adapter son comportement en fonction des
chances qu’il croit avoir de regagner le contact de sa mère. Cette adaptation peut le mener à
inhiber son système d’attachement (Main parle alors de stratégies de « minimisation ») ou au
contraire à l’hyperactiver (stratégies de « maximisation »).
Différentes stratégies ont pu être identifiées grâce à l'observation de comportements d'enfants
durant des séparations d'avec leur mère. A chacune de ces stratégies correspondent des
patterns comportementaux spécifiques. Les observations d’Ainsworth avec la mise au point
de la fameuse “ Situation Etrange ” (Ainsworth et al., 1978) ont permis d’identifier ces différents
patterns. Ce dispositif expérimental permet d’observer les comportements d’un enfant lors de
départs et de retours successifs de sa mère, en présence ou non d’une personne inconnue.
http://www.youtube.com/watch?v=QTsewNrHUHU
A partir des comportements observés chez le bébé, Ainsworth a tenté de rendre compte de
l'expérience et des modèles de relation intériorisés de l'enfant. L’épreuve a initialement été
conçue pour des enfants de 12 mois, âge auquel il semble naturel de réagir au départ de sa
mère. Dans l'étude de validation de la Situation Etrange, Ainsworth a mené des observations
au domicile des familles. Il s'est avéré que les patterns comportementaux révélés lors de la
Situation Etrange étaient associés à des comportements d'attachement spécifiques
manifestés à la maison (Annexe 2).
On conçoit généralement les différentes stratégies d'attachement comme résultant d'une
activation plus ou moins importante du système comportemental d'attachement (Kobak et al.,
1993 ; Main, 1990). Une inhibition du système d'attachement consiste donc à refreiner
l'expression de ces comportements (attachement évitant), alors que son hyperactivation
revient à les accentuer ou les manifester en l'absence de véritable stress (attachement
ambivalent/résistant).
B.4.4. DES REPERES POUR L'AVENIR : LES MODELES INTERNES OPERANTS
A partir des échanges avec son entourage familial, l'enfant développe des modèles de
relations qui, une fois mis en place, l’aident à comprendre et à interpréter le comportement de
ses proches ; ces modèles lui permettent d’anticiper les réactions d’autrui. De ce fait, ils
influencent son comportement dans ses rapports avec ses figures d’attachement.
Bowlby a emprunté au psychologue britannique Kenneth Craik (1943) le concept de « modèle
interne opérant » (internal working model) pour désigner ces modèles mentaux que l’enfant se
forme. Ce faisant, il mettait l’accent sur leur aspect dynamique, en ce sens qu’ils opèrent dans
la vie de l’enfant, en le guidant dans sa manière de percevoir et de se conduire dans ses
relations interpersonnelles. Il formerait simultanément un modèle de soi et un modèle d’autrui.
Le modèle de soi correspondrait à une image de soi comme étant plus ou moins digne d’être
aimé, alors que le modèle d’autrui renverrait à sa perception des autres comme étant plus ou
moins attentifs et sensibles à ses besoins.
Si une personne change d’environnement (ex. un enfant battu par ses parents est placé dans
une famille sécurisante et protectrice), le MIO qu’elle s’est constitué au contact de ses
premières figures d’attachement risque de mal la guider dans ses nouvelles relations. Par
conséquent, il est important que le MIO soit mis à jour au fur et à mesure que de nouveaux
types d’expérience se présentent. Idéalement, cette révision se fait de manière progressive.
Cependant, certains obstacles peuvent venir contrecarrer cette actualisation du modèle. Les
enfants en bas âge peuvent rencontrer des difficultés pour « métaboliser » leurs expériences
émotionnelles car ils sont encore trop immatures pour convenablement se les représenter par
eux-mêmes. En cela, les conversations avec les parents, qu’elles soient médiatisées ou non
par le jeu ou le dessin, participent chez le tout petit à l’élaboration d’un récit sur lui-même, qui
va favoriser l’intégration des nouvelles informations à ses MIO (Bretherton, 1991).
L'influence des MIO est appuyée par des recherches montrant des similitudes entre les
relations avec les parents et les relations amicales (Schneider, Atkinson, & Tardif, 2001), ou à
l'âge adulte, avec les relations amoureuses (Miljkovitch, 2009) et les relations à ses propres
enfants (voir Miljkovitch, 2001).
Bowlby a par ailleurs introduit la notion « d’exclusion défensive » pour désigner le mécanisme
qui consiste à ne pas traiter les informations « gênantes » pour la relation d'attachement et les
exclure de son système de représentation (Annexe 3).
En plus de servir de filtres au travers desquels les nouvelles expériences sont perçues, les
MIO participent à l’élaboration de compétences qui contribuent au maintien des mêmes
modalités relationnelles au fil du temps. Des études suggèrent par exemple que la qualité de
l’attachement précoce conditionne les intentions que l’on attribue à autrui, ainsi que l’image
que l’on a de soi-même (Goodvin, Meyer, Thompson, & Hayes, sous presse). Il va sans dire
que ces MIO de soi et d’autrui influencent à leur tour la manière d’être de l’individu au sein de
ses relations (Cassidy, Ziv, Mehta, & Feeney, 2003), qui elles-mêmes vont venir confirmer les
MIO d’origine, et ainsi de suite. Par exemple, les enfants sécures ont moins tendance à
attribuer des intentions malveillantes à leurs pairs, ce qui les prédispose à de meilleures
compétences sociales (Cassidy, Kirsh, Scolton, & Parke, 1996). De telles tendances vont bien
sûr engendrer des échanges plus favorables, venant corroborer leurs représentations
positives des relations.
Malgré tout, si les MIO, en déterminant les cognitions sociales que l’enfant met en place,
amènent celui-ci à induire un certain nombre de choses dans ses interactions avec son
entourage, il n’en reste pas moins qu’il continue d’intégrer de nouvelles informations émanant
de l'extérieur peuvent aller à l’encontre des modèles initialement établis et modifier sa manière
d’être. Les résultats d'études longitudinales montrent que si les premières expériences ne sont
pas effacées, le devenir de l'individu résulte de l'ensemble de son histoire d'attachement
(Roisman & Fraley, 2013; Sroufe, Egeland, Carlson, & Collins, 2005).
Lectures conseillées
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Annexe 1
L'une d'entre elles est la formation réactionnelle, dans laquelle la personne pense et se
comporte de façon diamétralement opposée à la pulsion inconsciente. Un fils qui déteste son
père peut exprimer un amour débordant envers lui, et beaucoup s'y intéresser. Si le
mécanisme de défense appelé projection est employé, le fils peut attribuer ses sentiments
négatifs aux autres et les accuser de s'en prendre à son père. Le mécanisme de déplacement
permet au ça de s'exprimer en visant une cible moins dangereuse, telle que des collègues ou
d'autres personnes représentant une figure paternelle : la vive critique du fils envers un
collègue plus âgé par exemple, peut être vue de cette façon. Le déplacement a également lieu
dans les rêves. Si le fils exprime des pulsions du ça en critiquant son père, il peut rationnaliser
ou justifier le comportement en prétendant que c'est pour son bien. Le mécanisme de défense
le plus socialement adapté selon Freud est la sublimation. Dans ce cas, l'expression de
pulsions tabous est dirigée vers des canaux productifs et créatifs tels que l'écriture, le peinture,
le théâtre, la dance ou d'autres activités.
Alors que la sublimation peut être une défense quasi-permanente contre l'anxiété, les autres
mécanismes de défense sont moins désirables parce qu'ils gaspillent l'énergie psychique. De
plus, ils peuvent faillir sous l'effet du stress, forçant alors la personne à régresser à des niveaux
de comportement caractéristiques de stades de développement précoces, d'immaturité. La
régression partielle peut provoquer l'apparition de comportements inappropriés pour l'âge et
le statut social de la personne; une régression plus profonde est associée à un comportement
encore plus dérangé. Le niveau de la régression dans un cas donné est en partie fonction de
l'histoire du développement psycho-social de l'individu (voir ci-dessous).
Annexe 2
Conservation de la substance
On présente à l'enfant une boulette (A) en lui demandant d'en confectionner une autre (B) de
même grandeur et de même poids. L'identité étant reconnue, l'expérimentateur transforme la
boulette B en saucisse ou galette, la boulette témoin A restant sur la table. On demande à
l'enfant s'il y a encore dans la boulette B la même quantité de matière que dans la boulette A.
On a trois niveaux de réponses :
- Intuition simple : il y a plus de pâtes parce que c'est plus long.
- Intuition articulée : convient de l'invariance de la quantité que pour certaines transformations
: si la saucisse n'est pas trop allongée et pas dans le cas d'un morcellement.
Annexe 3 :
Conservation du nombre
[rangée de 6 jetons rouges; en mettre autant de bleus : au sous-stade 2 l’enfant construit une
rangée de même longueur sans s’occuper du nb de jetons (intuition primaire, globale, centrée
sur le sujet et son activité), tandis qu’au sous-stade 3, l’enfant utilise la correspondance terme
à terme (analyse des rapports).] Cependant la déformation d’une des deux rangées sous les
yeux de l’enfant perturbe ce dernier qui considère qu’elles ne sont plus égales :
Conservation du nombre : ex des jetons
L'expérimentateur aligne 6 jetons jaunes et demande à l'enfant de placer sur la table autant
de jetons rouges pour former des couples.
Entre 4 et 5 ans, l'enfant ne se préoccupe pas du nombre de jetons. Il dispose les jetons de
telle manière à avoir la même longueur que le modèle. Il s'agit d'intuition simple. Il imite la
perception qu'il a des jetons.
Vers 5-6 ans, l'enfant fait correspondre les jetons termes à termes Il article « spatialement » la
configuration en alignant ses boutons avec les boutons jaunes de l'expérimentateur. IL s'agit
d'intuition articulée. L'enfant admet qu'il y a autant de boutons jaunes que de boutons rouges.
Seulement cette correspondance est fragile car si on éloigne un bouton jaune des autres,
l'enfant va mettre autant de boutons rouges qu'il y a d'espace à compléter. Il affirme que c'est
plus long là et que donc il y en a plus. L'intuition articulée marque un certain progrès. Le
schème est assez souple pour anticiper et s'adapter pour construire une correspondance. La
pensée de l'enfant est prisonnière de la perception de la configuration des objets perçus. Si
on modifie cette configuration, toutes les propriétés de cet ensemble changent.
intuition simple : O O O O O O O O O O O O O O O O
intuition articulée : O O O O O O O O O O O O
O O O O O OO O O O O O O O O
Annexe 4
Les 3 pensées selon Piaget. Entre 2 et 11 ans l’enfant passe par 3 types de pensées :
1- la pensée symbolique :
A l'étape de la pensée symbolique, l'enfant doit commencer par incorporer des données à son
moi. Les débuts de la pensée de l'enfant se caractérisent par l'assimilation égocentrique. La
pensée égocentrique se manifeste dans le jeu symbolique (dînette, jeu de poupée...). Le jeu
symbolique constitue une activité égocentrique de la pensée : l'enfant qui joue à la poupée
refait sa propre vie, en la corrigeant à son idée, il revit tous ses plaisirs ou tous ses conflits en
les résolvant. Donc, le jeu symbolique est bien une assimilation déformante du réel au (besoin
du) moi.
L’égocentrisme cognitif se défini comme l’incapacité à se décentrer, à se mettre à la place
d’autrui et à coordonner le point de vue d’autrui avec le sien propre, il ne peut donc d’une façon
générale coordonner successivement des points de vue successifs et différents. Cette
incapacité est liée à un excès de centration sur le seul point de vue possible : le sien ( ex :
enfant appartenant à une fratrie de 2, as-tu un frère? oui, ton frère en a -t-il un? non)
L'enfant connaît l'autre, mais ne peut se mettre dans la perspective de l'autre. Cet
égocentrisme intellectuel transparaît dans l’égocentrisme verbal de l’enfant. Piaget distingue
l’égocentrisme logique et l’égocentrisme ontologique
L’égocentrisme logique apparaît dans les caractéristiques du raisonnement de l’enfant : le
syncrétisme et la transduction. Le concept de syncrétisme exprime le fait que la pensée ne
peut coordonner les détails à l’ensemble, les parties au tout. Le concept de transduction
exprime le fait que l’enfant associe dans une sorte de logique apparente des éléments qui ne
sont pas liés entre eux, mais qui apparaissent liés (pourquoi il y a la mer ? ...parce qu’il y a
des bateaux..).
L’égocentrisme ontologique exprime la façon dont l’enfant perçoit la réalité, ce qu’il comprend
du monde. Il se manifeste à travers des caractéristiques comme le réalisme, l’animisme ou
l’artificialisme. Le réalisme traduit le fait que l’enfant attribue à la réalité extérieure des
caractéristiques subjectives. L’animisme traduit la tendance qu’à l’enfant de croire que les
choses sont vivantes et douées de conscience (le vent chante, la lune court pour me rattraper).
L’artificialisme traduit la croyance propre au jeune enfant que tout a été fabriqué par les
hommes et pour les hommes (Emmanuel (5 ans) qui a marché longtemps pour grimper en
haut de la montagne s’écrie : je me demande comment ont fait les camions pour apporter tous
ces cailloux ici).
Le déclin de l’égocentrisme est marqué par la décentration vers la pensée intuitive : vers 4-5
ans, le raisonnement de l’enfant se modifie, on observe une diminution des réponses
égocentriques avec une accommodation beaucoup plus forte à la réalité extérieure objective.
L’enfant va se décentrer et ainsi envisager simultanément différents points de vue et se situer
par rapport à l’ensemble des perspectives possibles.
2- La pensée intuitive
Entre 4 et 7 ans se place l’étape de la pensée intuitive préopératoire. L’intuition, dans
l’acceptation piagétienne, est une pensée imagée qui porte sur des configurations d’ensemble.
Cette pensée intuitive va se transformer en passant de l’intuition simple (4 à 5 ans 6 mois) à
l’intuition articulée (5 ans à 7-8 ans). Prenons un exemple qui illustre le passage de l’une à
l’autre.
Conservation de la substance : ex pâte à modeler
On présente à l'enfant une boulette (A) en lui demandant d'en confectionner une autre (B) de
même grandeur et de même poids. L'identité étant reconnue, l'expérimentateur transforme la
boulette B en saucisse ou galette, la boulette témoin A restant sur la table. On demande à
l'enfant s'il y a encore dans la boulette B la même quantité de matière que dans la boulette A.
On a trois niveaux de réponses :
Intuition simple (avant 6-7 ans).: il y a plus de pâtes parce que c'est plus long.
Intuition articulée (vers 6-7 ans) : convient de l'invariance de la quantité que pour
certaines transformations : si la saucisse n'est pas trop allongée et pas dans le cas
d'un morcellement.
Stade opératoire : convient de l'équivalence quelles que soient les transformations.
A cela s'ajoute l'analyse qualitative des arguments. Pour la conservation nécessaire, Piaget
distingue trois arguments :
La réversibilité simple : il y en a autant en B qu'en A parce qu'on peut refaire la boulette
A au moyen de la boulette B.
La réversibilité subtile : elle est fondée sur la compensation, par exemple, l'objet est
plus long mais plus mince.
L'identité : la quantité ne change pas parce que c'est la même pâte, parce qu'on a rien
enlevé, rien ajoutée.
3- la pensée opératoire
Grâce à la décentration progressive et à la coordination de plus en plus poussée des différents
points de vue, l’intuition préopératoire va se transformer en une pensée opératoire mobile et
réversible. Le passage de l’intuition à l’opération (action intériorisée, réversible et qui peut se
coordonner en structure d’ensemble) est la réversibilité. Pour qu’il y ait réversibilité d’une
action, il faut qu’il y ait quelque chose d’invariant qui permette ce retour à l’état antérieur,
quelque chose qui se conserve au cours de la transformation de l’objet, comme par exemple
dans les rangées de jetons, c’est la quantité de jetons qui reste invariante quelle que soit la
façon dont on dispose la rangée. Une action réversible est donc une action qui peut s’effectuer
dans les deux sens.
L'enfant qui maintient de l'équivalence de sa collection malgré la transformation opérée sur la
collection témoin est opératoire au sens piagétien du terme. L'action d'avancer un pion a été
corrigée par la représentation de l'action inverse, ce qui annule le déplacement du jeton.
L'enfant peut dire "c'est pareil, le jeton a changé de place ou tu n'as rien enlevé ni rien ajouté".
Annexe 5
Bandura a insisté sur l'influence d'un autre type d'attente qu'il appelle l'auto-efficacité (self-
efficacy). Alors que Rotter pense que l'attente s'appuie sur ce qui a suivi certains
comportements, les attentes d'efficacité renvoient à la croyance qu'on peut réussir à travers
un comportement donné, quel que soit le résultat de ce comportement. Bandura estime que
le comportement que l'on adopte est déterminé par l'auto-efficacité qu'une personne a : plus
elle se perçoit comme étant efficace, meilleures seront les résultats de ce qu'elle a fait. Par
exemple, l'auto-efficacité perçue peut réduire les réactions de stress, encourager un
comportement courageux dans des situations auparavant redoutées, et mener à un contrôle
de soi vis-à-vis de comportements addictifs.
Alors que les premières tentatives de tenir compte des processus cognitifs portent sur les
attentes concernant les événements futurs, des travaux ultérieurs se sont intéressés aux
appréciations (Beck, 1976) et aux attributions (Abramson, Seligman & Teasdale, 1978) de
comportements contemporains, de même que d'anciennes croyances (Ellis, 1962). Ces points
de vue ont permis d'élaborer des théories et des modes d'interventions pour les troubles
dépressifs et anxieux.
Les appréciations correspondent à la façon dont on évalue son propre comportement et les
actes qui s'adressent à soi. D'après Beck (1976), les appréciations sont les pensées qui
précèdent et qui influencent nos réactions émotionnelles aux événements. Par exemple, les
individus qui trouvent continuellement que ce qu'ils font n'est pas bien, ont tendance à
interpréter les compliments de manière à penser que les autres sont simplement polis. Ainsi,
ils ne bénéficient d'aucune satisfaction d'un renforcement positif. Les individus qui perçoivent
le monde de façon aussi négative se voient comme étant sans intérêt et nuls, ce qui les
prédispose à avoir des pensées et des symptômes dépressifs. D'après Beck, ces pensées
deviennent automatiques au cours de la maturation et de l'expérience, et elles influencent nos
réactions émotionnelles sans qu'on en ait conscience. Ce que vise la thérapie cognitivo-
comportementale de Beck, c'est que le patient prenne conscience de ces pensées
automatiques, pour ensuite pouvoir juger de leur bien-fondé.
Les attributions sont les causes qu'on perçoit des comportements, la manière dont on explique
la survenue de certains événements. Les attributions de comportements se produisent suivant
trois dimensions :
1) L'internalité : on perçoit la cause d'un événement comme étant due à soi ou à quelque
chose d'extérieur à soi ;
2) La stabilité : on perçoit la cause comme étant persistante dans le temps ou bien
transitoire; et
3) La globalité : si on perçoit la cause comme étant spécifique à la situation ou non. Par
exemple, si on pense avoir échoué à un examen parce qu'il était trop difficile, il s'agit
d'une attribution externe, spécifique et instable. Si toutefois, on pense l'avoir raté parce
qu'on est trop bête, l'attribution est interne, globale et stable. Des travaux ont montré
que les individus qui ont tendance à faire des inférences internes, globales et stables
face à des expériences d'échec sont moins enclins à persévérer à des tâches, et sont
plus susceptibles de manifester des symptômes dépressifs.
Ellis s'est intéressé aux croyances bien ancrées des individus et comment des croyances
irrationnelles peuvent engendrer de la détresse. Ces croyances irrationnelles sont souvent
associées à des affirmations avec "devrait" (tout le monde devrait bien m'aimer) et des attentes
aussi élevées et irréalistes font que la personne est vouée à l'échec ou la déception. La
thérapie émotive-rationnelle de Ellis a pour but de remettre en question ces croyances
irrationnelles jusqu'à ce que la personne réalise qu'elles sont inefficaces et qu'elle change sa
façon de voir les choses.
Annexe 6
Avec les catégorisations qu'Ainsworth a établies à partir de la Situation Etrange, trois cas de
figure ont été décrits et mis en relation avec les réponses maternelles. Dans le premier, les
enfants n’ont pas à modifier l’expression de leurs comportements innés parce qu’ils leur
permettent, la plupart du temps, d’obtenir du réconfort lorsqu’ils en ressentent le besoin. Ils
vont tout naturellement protester contre le départ de leur figure d’attachement et cesser une
fois celle-ci revenue. Leurs capacités d'exploration sont optimales en raison de la confiance
qu'ils ont dans leur figure d'attachement et sa fonction de base de sécurité. A moins de se
sentir ponctuellement menacés, ils sont disponibles psychologiquement pour s'intéresser au
monde qui les entoure. Ils parviennent à activer leur système d’attachement de façon optimale,
c'est-à-dire qu’ils l’activent dans les situations de détresse et le désactive lorsque leur parent
est présent ; une activation du système d'exploration devient alors possible. Ces enfants ont
été désignés comme “ sécures ”. Ce terme, repris de l’anglais « secure », fait référence à un
sentiment de sécurité et de confiance dans l’accessibilité de la figure d’attachement.
Mais pour d’autres enfants, réclamer la proximité ne suffit pas toujours à faire venir la
mère. S’ils estiment, au regard de ce qu’il se passe habituellement, qu’il est néanmoins
possible d’attirer son attention, ils apprennent à accentuer leurs manifestations de détresse.
Main (1991) va jusqu'à dire que pour s’assurer de la présence de leur mère, ces enfants
détectent dans l’environnement les stimuli alarmants susceptibles de les effrayer. La détresse
est ostensible. Lors de la Situation Etrange, ils protestent vivement contre le départ de leur
mère et ne parviennent pas à retrouver leur calme lors des retrouvailles. Ils paraissent fâchés
contre elle pour les avoir abandonnés. La colère semble être associée à un désir intense d’être
réconforté, ce qui donne lieu à une attitude résistante où se mêlent recherche et refus du
contact. Ainsworth a nommé ces enfants “ anxieux-ambivalents ” ou “ anxieux-résistants ”.
L'hyperactivation de leur système d'attachement les amène à se focaliser sur le parent, aux
dépens de l'exploration.
Enfin dans le troisième cas, les enfants constatent que leurs appels mènent au rejet.
Alors, pour éviter ce type d'expérience et pour maîtriser la colère que cela suscite, ils n’ont
comme seule alternative que la possibilité de détourner leur attention de leurs besoins
d’attachement et de tout ce qui pourrait venir les réveiller (i.e. la mère). Lors de la Situation
Etrange, on remarque chez ces enfants dits “ anxieux-évitants ” une apparente indifférence au
départ et au retour de la mère, avec parfois un certain évitement de celle-ci. A l’inverse,
l’attention portée aux jouets présents dans la pièce reste constante. L'exploration prend
néanmoins un caractère forcé ; leur manque de sécurité entrave le véritable intérêt qu'ils
peuvent porter pour l'environnement, même s'il sert de distracteur pour les détourner de leur
mère (Sroufe & Waters, 1977). Si leur attitude défensive permet de se ménager, elle
permettrait également, selon Main (1981), de promouvoir l’attachement en autorisant le juste
degré de proximité avec une mère qui ne supporte pas les contacts trop rapprochés.
Il arrive cependant que l’enfant soit dans l’impossibilité de développer une stratégie
d’attachement cohérente et organisée (Main & Solomon, 1986). Les patterns
comportementaux des enfants considérés comme “ désorganisés/désorientés ” sont
inconsistants, voire étranges. Ils ont des attitudes contradictoires ou incompréhensibles qui
semblent révéler un conflit entre la recherche et l’évitement du contact (par ex. : s’agripper au
parent en détournant le regard, pleurer à son départ sans s’en rapprocher) ou un vécu
d’appréhension et de peur (par ex. : rester figé, les mains en l’air). Les enfants désorganisés
semblent perplexes et impuissants dans les situations de détresse. Leur désorganisation se
manifeste tant dans leurs comportements d'attachement que dans leurs comportements
d'exploration.
Annexe 7
Bowlby a par ailleurs introduit la notion « d’exclusion défensive » pour désigner le mécanisme
qui consiste à ne pas traiter les informations « gênantes » pour la relation d'attachement et les
exclure de son système de représentation (Annexe 3). Il identifie deux origines possibles à ce
phénomène. La première correspond aux interdits que les parents transmettent à leur enfant
(plus ou moins implicitement). Par exemple, un père peut se montrer menaçant lorsque son
enfant fait état de quelque chose le concernant dont il préférerait qu’on l’ignore (ex.
attouchements sexuels). Par suite, l’enfant intériorise cet interdit ; il va alors dans le sens des
attentes parentales pour ne pas être confronté à un sentiment de culpabilité et de honte,
d’autant que d’aller à l’encontre des désirs de son père risquerait de menacer sa relation avec
lui. Mais l’enfant peut aussi être amené à recourir à l’exclusion défensive lorsque son système
d’attachement est fortement sollicité, mais que ses appels se soldent par un rejet, une
humiliation ou une punition de la part du parent. Ces aménagements psychologiques
empêchent d’intégrer certaines informations. Ainsi, la personne ne peut correctement ajuster
son MIO à ce qu’elle vit dans le présent.
Cette étanchéité représentationnelle peut venir expliquer pourquoi certaines personnes
parviennent difficilement à s’adapter à un environnement nouveau, quand par le passé, les
expériences qu’elles ont vécues les ont amenées à se construire un modèle de relation d’un
autre type. Elles restent influencées par d’anciens modes d’interactions dans les nouveaux
liens qu’elles tissent ; cela les conditionne dans leurs relations amicales (Schneider, Atkinson,
& Tardif, 2001), ou plus tard, dans leurs relations amoureuses (Miljkovitch, 2009), ainsi que
dans leur rapport à leurs enfants (voir Miljkovitch, 2001). Plutôt que de s’adapter à aux autres
et d’être sensibles à ce qu’ils expriment, elles ont tendance à fonctionner comme elles le
faisaient avec leurs premières figures d’attachement, recréant ainsi les mêmes types
d’échanges que ceux qu’elles ont connus durant la petite enfance.