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Rapport National de Développement Humain SÃO TOMÉ et PRÍNCIPE 2002 Changements de 1990 à 2002 et Développement Humain

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Rapport Nat ional de

Développement

Humain

SÃO TOMÉ et PRÍNCIPE

2002

Changements de1990 à 2002 etDéveloppementHumain

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R A P P O R T N A T I O N A L D E D E V E L O P P E M E N T

H U M A I N S Ã O T O M É E T P R Í N C I P E - 2 0 0 2

Changements de1990 à 2002 etDéveloppementHumain

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Equipe de préparation du Rapport National sur le DéveloppementHumains à Sao Tomé e Príncipe

Sous la supervision du Représentant Résident du PNUD à S.T.P.Marta Ruedas (jusqu'à septembre de 2001)Christian Lehembre (à partir de juillet 2002)

et sur direction technique de l'Assistant du Représentant Résident pour leProgramme

António ViegasConsultants Internationaux

José Maria Caller Celestino - Coordonnateur de la recherche, élaboration del'étude de cas sur "Migrants Santoméens au Portugal" et Rédaction du Rapport

Collaboration du PNUD BolivieJuan Fernando Calderon Calderon - Supervision générale du Rapport

Armando Ortuño - Elaboration du Profil du Développement Humain etPauvreté à S.Tomé e Príncipe

Consultants NationauxNorberto Costa Alegre - Elaboration des Changements Politiques et Economiques

et Coordination de la Publication du Rapport; Paulo Fernando C. Silva Ramalho - Elaboration du chapitre "Identité Culturelle et

Développement Humain" et de l'étude de cas "Stratégies sous-urbaines de luttecontre la pauvreté";

Albertino H. Dos S. S. Bragança - Participation à l'élaboration du chapitre"Identité Culturelle et Développement Humain";

Frederico Gustavo Dos AnjosAssistants travail de terrain

Ana Sofia de Melo Alvim CoelhoAdilson Bil A. Dias da Trindade

Nelma Celina Lopes da SilvaCaustrino Leal de Jusus Alcântara

Cecilia Castelo David ViegasTraduction

Margaita EtxegaraiMaquette e Edition

DoriaDesign - São Tomé

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Rapport National de Développement Humain - STP 3

Le premier rapport national de Développement Humain (DH) de São Tomé e Principe (STP)mettait déjà en évidence la dimension culturelle du développement en évoquant son "par-cours dans le temps, curieusement marqué d'interruptions constantes et par une façon d'êtreen permanence en transition". Bien que ne s'aventurant pas encore sur le terrain de l'anth-ropologie, il incitait le lecteur à chercher des liens entre la "fragilité des institutions et descentres de décision politique" et un joyeux laissez-aller, qualifié pour les besoins de la caused' "indiscipline, anarchie, carence d'autorité et d'orientation", tandis que la société y étaitperçue comme une "mosaïque, polychrome et polyphonique à la fois".

Un autre travail, NLTPS, mené l'année suivante sous la houlette de "Futurs Africains",se basait sur la formulation des désirs et des projections de membres représentatifs de lapopulation, et proposait un facteur de redressement dans la cohésion nationale et dans leressaisissement des individus devenus maîtres de leurs destinées.

C'était l'époque où, après avoir attribué au contexte international la responsabilité de l'é-chec des programmes de développement mis en oeuvre avec l'appui de la coopérationinternationale, l'on commençait à en chercher les raisons chez soi. L'on doutait alors detout et même de l'existence de la solidarité nationale. Ne serait-on pas une société for-mée de pièces rapportées, dépourvue d'éthique et exposée sans aucune protection auxruses des plus malins? Comment affronter puis renverser cette fatalité?

C'est à ce moment-là que le bureau du PNUD à STP a choisi de contribuer à stimuler laréflexion et le débat en s'inscrivant dans la perspective de la culture et du changementpour mieux cerner toutes les questions qui surgissent autour du paradigme de dévelop-pement humain à S. Tomé e Principe.

Il a été nécessaire pour cela de faire appel à des professionnels de l'anthropologie quisavent poser un regard sur la société à la fois distant et pénétrant. Un de ces profes-sionnels a séjourné dans le pays et a formé une équipe aux techniques de l'enquête sur leterrain. Les données ainsi recueillies ont servi à élaborer puis à prouver et enfin à vali-der la théorie du modèle culturel dominant dans le monde des roças dont l'histoire seconfond avec celle du pays (chapitre 2). Modèle tellement dominant qu'il imprègne lesmoeurs, même après le déclin de la ruralité (chapitre 3). Une autre méthode d'enquête apermis de restituer les comportements du monde péri-urbain (chapitre 5) et d'inviter lelecteur à mieux comprendre l'enchaînement sans fin de la pauvreté où l'assujettissementà la fatalité est à la fois cause et effet.

Cependant l'espoir de voir les choses changer existe. Une partie du travail est consacréeaux changements politiques et économiques qui ont déjà eu lieu depuis l'indépendanceet surtout depuis la mutation au régime de multipartisme (chapitre 4) et, une autre a traità la communauté des Santoméens émigrés à Lisboa où un échantillon représentatif d'é-tudiants et cadres a été consulté sur ses dispositions à contribuer à l'introduction de chan-gements dans la société santoméenne (chapitre 6).

L'étude détaillée du développement humain est au centre de l'ouvrage (chapitre4). Ellea aussi été confiée à des spécialistes qui ont tout d'abord calculé l'indice, puis l'ont com-paré à celui des pays d'Afrique subsaharienne ainsi qu'à celui d'autres petits pays insu-laires, avant de l'analyser selon des critères de genre et de régions.

Il est enfin revenu à un consultant national de revoir l'ensemble et d'en souligner la

Préface

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Rapport National de Développement Humain - STP

Préface

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cohésion en formulant des recommandations (chapitre7) qui se profilaient déjà tout aulong de l'ouvrage et qui se concentrent maintenant sur l'amélioration des performancesde développement humain.

Le plus gros de ce travail était réalisé en 2001. Il a ensuite été consolidé, puis certainschiffres ont été mis à jour. Au cours de cet intervalle, les hypothèses sur le potentielpétrolier du pays sont devenues des assurances et le processus qui va faire de STP unpays producteur de pétrole s'est bel et bien engagé.

Mais pour qui et pour quoi ? Les éléments de réponse à cette question cruciale se trou-vent dans ce rapport. On y trouve cette déclaration “Le pays doit décider entre deuxoptions” (cf chap 2 , § quelles options ?):

“Reproduire encore une fois le modèle d'organisation sociale, politique et économiquebasé sur la construction du sens conforme à celui élaboré à partir des roças”.

“Générer les conditions qui permettront une culture ouverte sur la base du développe-ment humain”.

Traduit en termes de gestion de revenus du pétrole, cela signifie soit

que le gros de ces revenus serait monopolisé par quelques privilégiés, avec une crois-sante marginalisation du commun des citoyens; soit

que ces revenus seraient considérés comme une occasion de faire participer toute lapopulation au développement équitable du pays, en termes de genres, de régions et decouches sociales, avec la disparition de la pauvreté comme conséquence logique.

Le PNUD, comme beaucoup d'autres, plaide pour la transparence dans la gestion des res-sources et il s'emploie à orienter la réflexion des autorités et de la société civile vers laphilosophie du développement humain.

Mais ce qui fera la différence c'est la faculté du pays à changer. Il lui faut en effet pour-suivre le chemin engagé depuis l'instauration du multipartisme avec la réforme des ins-titutions et intérioriser l'esprit qui anime toute démocratie. Il semble que cet esprit pré-vale dans certaines couches de la population locale, mais aussi parmi les Santoméensinstallés au Portugal, interviewés pour les besoins de cette étude.

Notre souhait est que ce travail puisse contribuer à une réflexion sur les changements.

Christian Lehembre Marta Ruedas

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Rapport National de Développement Humain - STP 5

ADI - Action Démocratique Indépendante

AFD - Agence Française de Développement

APD - Aide Publique au Développement

BAD - Banque Africaine de Développement

BCE - "Banco Comercial do Equador"

BCSTP - "Banco Central de S. Tomé e Príncipe"

BM - Banque Mondiale

CEAC - Communauté des Etats d'Afrique Centrale

CFA - Communauté Financière Africaine

CST - "Companhia Sãotomense de Telecomunicações"

DH - Développement Humain

PRES - Programme de Réhabilitation Economique et Sociale

RDSTP - République démocratique de S. Tomé e Príncipe

RGDH - Rapport Global de Développement Humain

RNDH - Rapport National de Développement Humain

SAF- Facilité d'Ajustement Structurel (Strutural Adjustment Facility)

SNE - Système National d'Education

SNS - Système National de Santé

STP - São Tomé e Príncipe

SWAP - Approche sectorielle Intégrée

TBM - Taux Brut de Mortalité

TBN - Taux Brut de Natalité

TC - Taux de Croissance

TGF - Taux Général de Fécondité

TMA5 - Taux de Mortalité des Enfants de moins de 5 ans

UNESCO - Organisation des Nations Unies pour l'Education, la Science et la Culture

UNICEF - Fonds des Nations Unies pour l'Enfance

EB - Enseignement de Base

EP - Enseignement Primaire

ES - Enseignement Secondaire

FENU - Fonds d'Equipement des Nations Unies

FENUAP - Fonds des Nations unies pour la Population

FIDA - Fonds International de Développement Agricole

Liste des Abréviations

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Rapport National de Développement Humain - STP

Liste des Abréviations

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FMI - Fonds Monétaire International

HIPC - Initiative pour les Pays Pauvres hautement Endettés

IDH - Indice de Développement Humain

IDS - Indice de Développement Ajusté aux Sexes

INE - Institut National de Statistiques

IPC - Indice de prix au Consommateur

IPH - Indice de pauvreté Humaine

ISP - Institut Supérieur Polytechnique

MEC - Ministère d'Education et Culture

MLSTP - Mouvement de Libération de S. Tomé e Príncipe

MOPIRNA - Ministère des Travaux Publics, Infrastructures, Ressources Naturelles etEnvironnement

MPF - Ministère dela Planification et des Finances

PRES - Programme de Réhabilitation Economique et Sociale

MST- Maladies Sexuellement Transmissibles

MS - Ministère de la Santé

NLTPS - Etudes de Perspective à Long Terme

BGE - Budget Général del'Etat

OIT - Organisation Internationale du Travail

OMS - Organisation Mondiale de la Santé

ONUDI - Organisation des Nations Unies pour le Développement Industriel

PAE - Programme d'Ajustement Structurel

PAM - Programme Alimentaire Mondial

PCD-GR - Parti de Convergence Démocratique - Groupe de Réflexion

PIB - Produit Interne Brut

PNAPAF - Programme National d'Appui à la promotion de l'Agriculture Familiale

PNB - Produit National Brut

PNUD - Programme des Nations Unies pour le Développement

PPADPP - Projet de Privatisation Agricole et Développement des Petites Propriétés

PPC - Parité des Pouvoirs d'Achat

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7Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

Le Changement, considéré dans ses aspectspolitiques, économiques, et surtout socio-culturels, ainsi que dans ses multiples rela-tions et effets sur le DéveloppementHumain (DH), constitue le principal objetde réflexion de ce Rapport 2001 de SãoTomé e Príncipe (STP).

Un regard sur l'histoire de STP nous permetde relever que, depuis sa découverte par lesPortugais au XV siècle jusqu'à sa récenteindépendance en 1975, ce pays s'est carac-térisé par une étonnante continuité dans sesformes de vie et dans sa culture.

Puis, dans un laps de temps réduit, à peine25 ans, la société santoméenne a étéconfrontée à l'émergence d'un pays sou-mis à des modèles économiques, sociaux,politiques et culturels jusque là inconnuspour le commun de ses habitants et mis enpratique à un rythme vertigineux. Lagrande majorité de la population a alorsété mise devant le fait accompli de cetteconjoncture sans être en mesure de l'assi-miler pleinement.

Nous allons exposer sommairement lesprincipaux changements survenus pen-dant cette période, en accordant une atten-tion particulière aux changements socio-culturels, pour mieux comprendre lesdéfis qui s'imposent.

Sur le plan politique, les Santoméens sesont emparés du pouvoir en instaurant,pour commencer, un régime à parti uniqueconforme à l'alignement du pays audénommé bloc socialiste. Sur ce modèle,la première Constitution Politique del'Etat est approuvée avec, comme organes

de souveraineté, la Présidence de laRépublique, l'Assemblée NationalePopulaire, le Gouvernement et lesTribunaux, institués cependant sans sépa-ration de pouvoir. Le Gouvernement estnommé par le Président de la Républiqueet celui-ci par une Assemblée, sur propo-sition du Mouvement de Libération de SãoTomé e Principe (MLSTP). En 1987, estcréée la charge de Premier Ministrecomme chef du Gouvernement.

Ce premier effort d'organisation politiquedu nouvel Etat indépendant donne dessignes d'épuisement vers la moitié desannées 80 et ce régime va définitivementtomber lors de l'effondrement des régimessocialistes de l'Union Soviétique et del'Europe de l'Est. STP opte alors pour l'al-ternative d'une démocratie avec multipar-tisme, ce qui entraîne des changementsinstitutionnels notables dans toute la sphè-re publique.

En 1990 la II République voit le jour etelle est fondée sur une nouvelleConstitution Politique. Les organes desouveraineté s'ajustent à un Etat de Droit,en partant du principe selon lequel la sou-veraineté de l'Etat appartient au peuplesantoméen qui l'exerce par le biais du suf-frage universel.

Des lois qui s'ajustent à la nouvelleConstitution Politique sont publiées,parmi lesquelles se distinguent: Leis deDireito do Sufragio e do RecensamentoEleitoral; dos partidos Políticos; daNacionalidade, do Estatuto dos Titularesde Cargos Políticos; das ComissoesEleitorales e Lei Eleitoral1.

CHAPITRE I

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8 Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

On légifère aussi pour réformer le systèmejudiciaire et l'ajuster à l'Etat de Droit: Leide Base do Sistema Judiciário; LeiOrgánica do Ministério Público eEstatuto dos Magistrados2 .

Et pour garantir l'exercice des droitsciviques et du travail dans une sociétédémocratique sont approuvées: Lei deImprenta; do Dereito de Reuniao e deManifestaçao et les Leis Sindical, de grevee do Régime Jurídico das CondiçoesIndividuais de Trabalho3 .

La nouvelle Constitution permet l'autono-mie du pouvoir local et la décentralisation,ce qui se traduit, en législation, par: LeisElectoral dos Orgaos das AutarquiasLocais; das Finanças Locais; Quadro dasAutarquias Locais e da AutarquiaEspecial designada Regiao do Príncipe 4.

Ces réformes semblent avoir consolidé lesdroits civiques et politiques au long desannées 90. Le principal incident, en ce quia trait à la démocratie, est le coup d'Etatmilitaire manqué de 1995, qui n'ad'ailleurs pas empêché que le transfert depouvoir s'exerce au grès des successivesélections législatives et présidentielles.

Toutefois, des progrès restent à accompliren matière de bonne gouvernance.L'administration décentralisée ne se déve-loppe pas à cause du fait que les pouvoirslocaux manquent à la fois de ressourceséconomiques et du personnel nécessaire ;quant à l'administration centrale, elle estencore loin du point où on pourrait laconsidérer efficiente. L'indépendanceréelle du pouvoir judiciaire est en voie deconsolidation et les institutions de lasociété civile ont besoin de se renforcerpour jouer leur rôle social et politique.

L'économie aussi subit des changementsnotables en cette période d'indépendance.Une fois passé le chaos initial qui accom-pagna le départ massif de la main d'œuvrequalifiée portugaise, STP adapte son éco-nomie au modèle politique en vigueur. Lapolitique de nationalisations qui en découleaffecte les terres, les activités bancaires, lecommerce extérieur, les transports collec-tifs, l'énergie, le courrier et les télécommu-nications. La gestion se centralise et s'ajus-

te aux exigences de l'Etat, désormais char-gé de dynamiser l'économie nationale.

La stratégie de développement s'orientevers la diversification de l'économie pouroutrepasser la dépendance à la quasi mono-culture de cacao. Mais cette ambition n'estpas couronnée de réussite et, au contraire,la brusque chute des prix de ce produitaffecte le pays de plein fouet. Les crédits etaides au développement ne réussissent pasà améliorer substantiellement la situation etla dette externe va en augmentant considé-rablement. A partir de 1987, le pays se voitobligé d'appliquer un Programmed'Ajustement Structurel avec l'appui de lacoopération internationale, et un cycle denégociations pour sortir de la crise estengagé. Après les deux premiers créditsd'ajustement - Facilité d'AjustementStructurel (FAS) - le programme échouepour incapacité de paiement d'une dettedéjà exorbitante.

Les changements de modèle politiquecommencent à se refléter sur le modèleéconomique. Il n'incombe plus à l'Etat dedynamiser l'économie nationale et on pro-cède à la re-privatisation de la terre. Lemodèle des grandes plantations laisse lepas à celui des petites parcelles, dans unetentative de créer un nouveau paysannat,d'augmenter la productivité et de diversi-fier l'économie agraire. Le pays est ouvertaux investissements étrangers et les systè-mes financier et fiscal sont réformés.

Cependant, les réformes entreprises n'at-teignent pas les objectifs escomptés. Ladépendance au cacao continue. Il consti-tue 96% des exportations et l'activité éco-nomique non liée au secteur primairedépend surtout de projets à financementextérieur. La base industrielle est très fai-ble et se limite à quelques entreprises d'é-nergie et manufactures qui génèrent 5,5%du PIB tandis que la construction entrepour 13,8% du PIB. Le commerce, letransport, la banque et le tourisme contri-buent avec 39,3% au PIB et l'administra-tion publique avec 22%.

Le pays supporte une des plus grandesdettes per capita du monde, évaluée à plusde 700% du PIB. Ce à quoi vient s'ajou-ter une progressive dépréciation de la

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9Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

monnaie et un taux de chômage croissant,de l'ordre de 35%.

Les changements sociaux et culturels deces 25 dernières années ne sont pas moinsimportants.

Les politiques éducatives et sanitairesdéployées améliorent notablement lesindicateurs sociaux associés, malgrél'existence de périodes ponctuelles de sta-gnation ou régression.

L'analphabétisme passe de plus de 40% à17%. L'extension de l'éducation scolaireest appréciable, le nombre d'annéesmoyennes de scolarité double dans legroupe d'âge de plus de 25 ans.

Mais pourtant tous les changements ne sontpas positifs. Le budget scolaire est réduitde 40% pendant ces 10 dernières années,conséquence de la dévaluation de la dobra,de la réduction des revenus provoquée parla chute du volume de production et du prixdu cacao, ainsi que des effets d'un ajuste-ment structurel qui ne prévoit pas de pro-gramme social parallèle qui maintienne lesrésultats positifs en éducation.

La continuelle détérioration de la qualitéde l'enseignement est encore plus inquié-tante car il semble qu'on soit entré dans uncercle vicieux. Les dures conditions dumétier d'enseignant (insuffisance de salleset de matériels, bas salaires, etc.) et lesrestrictions budgétaires rebutent les ensei-gnants les plus qualifiés qui sont alorsremplacés par d'autres plus ou moins qua-lifiés, tandis que les élèves en formationsont de moins en moins bien préparés etqu'ils deviennent à leur tour des ensei-gnants encore moins qualifiés qui formentdes élèves de plus en plus mal éduqués. Atout ceci s'ajoute l'insuffisance du niveausupérieur de l'enseignement.

L'espérance de vie continue à être très éle-vée comparée au gros des pays subsaha-riens, mais il reste des problèmes trèsimportants à résoudre, en particulier celuidu paludisme. 72% des patients des cen-tres sanitaires sont atteints de cette mal-adie qui reste la première cause de morta-lité. La tendance à la réduction de la mor-talité infantile est en train de s'inverser

depuis 1996 puisqu'elle est passée enquelques années de 50 à 65 pour mille. Lacouverture en diphtérie et polio est aussien train de rétrograder ces dernièresannées et 17% des enfants de moins de 5ans souffrent de malnutrition, cause sous-jacente du chiffre de 13 pour mille demortalité infantile. L'acquisition et la dis-tribution de médicaments vont aussi enempirant.

Un changement social très notable remo-dèle le vécu des nombreux résidents desplantations qui sont en phase de se conver-tir en petits propriétaires agricoles ou enpopulation urbaine, en laissant encore pla-ner le doute sur leur localisation définiti-ve. De toute évidence, une quantité trèsconsidérable de cette population, autrefoisenfermée dans ces micro-mondes, grossitaujourd'hui le principal collectif qui a pro-voqué une croissance rapide de la capita-le. La tentative de contrôler l'émigrationde la campagne à la ville bute contre lasituation économique du monde rural évo-quée ci-dessus. Ceux qui demeurent dansles anciennes plantations sont en train des'organiser en associations, fréquemmentinduites par la coopération internationaleet les projets appuyés pour viabiliser ledéveloppement rural.

La famille subit un processus de recompo-sition symbolique pour s'adapter aux nou-velles réalités sociales et économiques.S'il est vrai que se maintient le système deparenté traditionnelle santoméen -caracté-risé par la polygamie masculine, une inci-dence élevée des unions de fait et des rela-tions de visite, une grande mobilité dansles unions domestiques et dans la compo-sition des agrégats familiaux-- il n'en restepas moins vrai que les relations de solida-rité et d'entraide qui en découlent se fragi-lisent, conséquence de la pression provo-quée par la crise économique et par la pau-vreté en expansion. Les devoirs et obliga-tions masculins deviennent plus ténus etsimultanément l'importance économiqueet sociale des femmes à l'intérieur desréseaux extensifs de parenté se renforce.

Constituées en leur essence par simplecohabitation (en 1991, à peine 6% de lapopulation de plus de 15 ans était mariélégalement) et sujettes aux effets d'une

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10 Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

polygamie masculine, elle-même sansdoute à la source de l'augmentation dunombre de foyers dont le chef est unefemme, les familles santoméennes sont demoins en moins fréquemment des famillesélargies (les traditionnels quintés glang-jis5 sont en train de disparaître) et de plusen plus souvent des familles monoparen-tales, où l'importance des rôles masculinss'efface peu à peu. Il en résulte que cesont les femmes qui, aujourd'hui, assurentune partie significative des responsabilitésliées à l'éducation et à la subsistance desenfants. Si nous rapprochons cela dunombre élevé d'enfants par femmes (5,4en 1991), nous comprenons pourquoi cesfoyers monoparentaux sont un des sec-teurs les plus vulnérables à la pauvreté.

Le mirage de la ville comme centre favo-risant l'emploi et autres plus-values absen-tes du monde rural contribue aussi à faireperdre de l'importance à la famille tradi-tionnelle, fortement hiérarchisée et inséréedans un système de valeurs liées à laconsanguinité, à la terre et à la tradition.Des individus délocalisés, déracinésaffluent en grand nombre à la capitale et àses alentours (la population urbanisée estpassée de 6% en 1960 à 42% en 1992 et45% en 1998). Le sentiment d'individua-lisme engendré par une conjoncture decrise économique finit par contribuer à l'u-sure du rôle de socialisation et de contrôlequi revenait jusque là à la famille. Lesgens se voient obligés de multiplier leursefforts pour pouvoir assurer leur subsis-tance. Soucieux de trouver de quoi vivre,les parents sont réduits à quitter le foyertoute la journée. En conséquence, ils n'ontplus de temps à consacrer à leur famille,ce qui provoque l'irruption de phénomè-nes nouveaux comme les "meninos darua"6 et l'aggravation d'autres phénomè-nes, comme le travail des enfants ou l'ex-clusion sociale des gens âgés (en 1991, ilsétaient plus de 2000 à vivre seuls et lasituation s'aggrave singulièrement, avecune augmentation découlant des cas d'in-tolérance et d'accusation de "feitiçaria "7).

Le rôle des jeunes à l'intérieur de cesstructures de parenté est également affectépar les changements globaux qui se pro-duisent dans la société santoméenne. Le"sens de la famille", exprimé par un

ensemble de manières d'agir, de penser etde sentir, transmis de génération en géné-ration comme héritage culturel collectif,est, en quelque sorte, ébranlé et les jeunesle ressentent parfaitement. L'altération dusystème de valeurs et des normes deconduite donne ainsi lieu à l'apparitionparmi les adolescents de comportementsnouveaux -individualisme croissant, avecrupture de certains modèles de solidaritéet entraide à l'intérieur des structures deparenté, valorisation de la réussite person-nelle au détriment de la réussite familiale,détachement vis à vis des traditions.

L'indépendance du pays a donc amenéavec elle un changement, lent mais signi-ficatif, dans le statut des divers groupessociaux à STP, en raison surtout de lamassification de l'enseignement et de lareconnaissance de l'égalité des citoyensdevant la loi. Au cours de la dernièredécennie, la privatisation et distributiondes terres aux travailleurs des anciennesplantations, indépendamment de leur ori-gine, contribuent puissamment à minimi-ser le sentiment de mépris pour le travailagricole de la part des forros et à stimu-ler le contact entre les différents noyauxde population. L'exode rural, les migra-tions internes et l'urbanisation croissantede la population accentuent encore pluscette tendance en provoquant une interpé-nétration croissante des diverses commu-nautés qui composent la mosaïque cultu-relle santoméenne. Actuellement, si par-ler d'une communauté "tonga"9 n'a déjàplus de sens, parler d'une "communautécapverdienne" de 2ème ou 3ème généra-tion commence également à en avoir demoins en moins.

Si, en fait, il y a, dans cette dernière décen-nie, un changement culturel qui ait unimpact véritable et manifeste dans le tissuethno-culturel santoméen, on ne peut pasdouter que ce soit l'amortissement presquecomplet du phénomène "gabon" , cette bar-rière qui sépare les Santoméens et renvoieles anciens ouvriers embauchés à l'extérieuret leurs descendants à un statut inférieur.

La grande mobilité sociale engendrée parles facteurs signalés ci-dessus se traduitpar une approche progressive de la com-munauté forra vers les autres communau-

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11Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

tés, fait qui peut, d'ailleurs, être prouvé parle travail commun réalisé au niveau agri-cole et par l'incidence de plus en plusimportante des mariages mixtes.

Accomplissant ainsi son destin de "nationcréole", où se mêlent les sangs de prove-nances diverses, STP se prépare à intégrercomplètement dans sa culture la dernièregrande vague venue d'outre-mer, celle desouvriers des grandes plantations de cacaoet de café jadis embauchés à partir d'autrespays africains.

Un autre aspect du contexte socio-culturelde S. Tomé e Principe, en quelque sorte liéau précédent, et qui mérite d'être considé-ré avec attention au cours de cette décen-nie est l'écoulement migratoire en prove-nance de la côte africaine.

Comme dans une réédition d'un passé degrands contacts avec le continent, despetits commerçants accourent à S. Tomé,attirés par le relatif succès du commerceinformel centré sur le marché "Feira dosPontos" et ses alentours. Ils sont nigé-rians, gabonais, camerounais, ivoiriens,sénégalais et d'autres nationalités. Leurprésence, malgré son expression réduitenumériquement, est à la base de change-ments culturels déterminés dans l'échi-quier sociologique santoméen -dans levestiaire (les pagnes et costumes afri-cains), dans la musique (les rythmes ducontinent), dans l'artisanat (les sculptures,jeux traditionnels), etc. C'est un phéno-mène d'acculturation et "ré-interprétationculturelle" absolument inévitable lors-qu'un peuple démarre un processus d'ou-verture vers l'extérieur.

La même chose se passe avec l'émigrationsantoméenne au Portugal. Sur le plan cul-turel, STP s'est toujours trouvé à mi che-min entre l'Europe et le continent africain;conséquence de la tradition historique, lecontinent européen a toujours servi depont privilégié pour le transfert de valeursculturelles et de modèles de comporte-ment. Or, cette "approche psychologique"de l'Europe est toujours aussi intenseaujourd'hui le jour -non seulement pour lefait que de nombreux membres de l'actuel-le élite politico administrative ont faitleurs études au Portugal, mais aussi à

cause du retour saisonnier croissant desémigrants santoméens fixés à Lisbonne etautres villes portugaises. De nouvellestechnologies, des façons de construire, desmodes, des musiques, des danses et habi-tudes de consommation arrivent dans lesbagages de ces gens qui reviennent detemps en temps pour tuer le mal du pays etrevoir leurs familles.

Un autre changement bien visible apparaîtau cours de ces dernières années. La liber-té et la tolérance découlant du processusdémocratique démarré en 1990 ont eu unerépercussion remarquable dans la pratiquereligieuse à STP, ce qui se traduit par l'ir-ruption de nouvelles confessions religieu-ses, presque toutes d'inspiration chrétien-ne. En fait, outre les confessions catho-lique, adventiste et évangéliste, de longuetradition dans la société santoméenne -cesdeux dernières introduites initialementdans les plantations par des travailleurs deSierra Leone, recrutés après l'émancipa-tion des esclaves affranchis (1875/76) etpoursuivies pendant les premières décen-nies de ce siècle par des ouvriers venusd'Angola- on assiste à une augmentationde la pratique religieuse par l'arrivée denouvelles églises (Maná, NouvelleApostolique, Règne de Dieu, Ba'ha,Approfondissement Chrétien, Témoins deJéhovah, Assemblée de Dieu, Dieu estAmour, etc.) qui, profitant de la liberté deculte, viennent s'implanter dans le payspour offrir une réponse au découragementet aux perplexités provoquées par la criseéconomique et sociale.

Le caractère récent du phénomène et larareté des données disponibles ne permet-tent pas encore de discerner -dans la per-spective des changements de comporte-ment et de leurs implications dans le déve-loppement humain-- quelles seront lesconséquences pour le tissu socio- culturelsantoméen de cette prolifération de culteset messages religieux.

Dans cette société à racine anthropolo-gique européenne et africaine, la pratiquedu catholicisme amenée jadis par les mis-sionnaires européens se confronte, et cedepuis les premiers temps, à la vigueurdes pratiques animistes véhiculées par lesesclaves africains. C'est ainsi que, dès les

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12 Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

premiers temps, la religion catholique est"forcée" de s'adapter à cette réalité, ce quiaboutit à un syncrétisme enrichissant avecd'autres pratiques et cultes de racine typi-quement africaine. Mais, certains aspectsimportants de ce syncrétisme magico-reli-gieux tendent à disparaître, surtout danscette dernière décade, tels que le pagá-devê11 et e flecê12, rituels fortement sociali-sateurs et jouissant d'une grande populari-té dans un passé récent.

On se réfère enfin aux pratiques fétichisteset chamanistes de plus en plus populairesdans le pays et dont la diffusion est alléeen augmentant proportionnellement à laprogression de la crise économique etsociale. En fait, si ces rituels ont toujoursconstitué une pièce importante de l'uni-vers cosmogonique santoméen, il est vraique leur actuelle montée en puissance esttypique d'un contexte socioculturelsecoué par la crise économique et la rapi-de érosion des valeurs traditionnelles. Etsi jadis le recours aux pratiques occultesou la participation au djambi (rituel dechamanisme originaire d'Angola) étaientexclusifs des couches sociales de moindrevisibilité, il est incontestable qu'aujourd'-hui le nombre d'individus appartenant auxéchelons supérieurs de la société deman-deurs de stlijons13 ou de fiticêlos14 ou deplaces de djambi est en train d'augmenter.

La communication sociale a un rôle déter-minant dans les changements survenusdepuis 1990 à STP. On peut même direque la radio et la télévision - si nous consi-dérons le noviciat de la presse écrite san-toméenne comme facteur modelant de lasociété - sont à la base de l'ouverture sur lemonde extérieur, en faisant sentir leurinfluence dans tous les aspects de la viesociale.

Même s'ils subissent les effets de limita-tions humaines et matérielles très pronon-cées qui se reflètent en particulier sur laqualité des programmes, les organes decommunication sociale cités ci-dessuscontribuent puissamment à l'intégrationde STP dans la scène mondiale. En outre,ils s'assument comme véhicules de chan-gement par excellence, en concédant unespace aux idées nouvelles et en motivantla participation des citoyens dans le pro-

cessus de changements politiques et éco-nomiques.

La multiplicité et la diversité des organesde communication surgis dans la phase dedémocratisation encouragent la pluralitéd'opinions dans la société santoméenne.Ils ont aussi favorisé une autre approcheau monde, plus large, ainsi qu'unemeilleure compréhension de la croissanteinterdépendance des peuples et cultures,résultat de l'expansion des technologiesd'information et des réseaux mondiaux decommunication -la mondialisation.

Cette succession de changements pro-voque, outre les réactions concrètes issuesdu fait que les situations dans les diversdomaines s'améliorent ou s'empirent, undegré appréciable de mal-être collectif,issu de la difficulté à assimiler, contrôleret diriger le Changement que tout cecireprésente dans son ensemble. .

Très proche de cet inconfort partagé setrouve l'incertitude sur les attentes pourl'avenir et l'accélération progressive deschangements en cours, puisque STP sevoit plongé, de façon apparemment inévi-table, dans le processus de mondialisationmentionné.

La découverte récente du pétrole et sa pro-chaine exploitation vont encore plusaccentuer les connections avec l'extérieur.L'arrivée des compagnies étrangères, dupersonnel qui fait partie du processus, lesmouvements de capitaux nécessaires etl'ouverture de nouveaux services associésparaissent opérer dans ce sens.

Par ailleurs, la coopération internationalesemble, de son côté, disposée à continuerà ouvrir le pays sur de nouveaux défis,tandis qu'elle va, selon toute prévision,garder une capacité notable et uneinfluence proportionnelle à sa participa-tion-clé dans le développement écono-mique du pays.

Les nouvelles technologies, de plus enplus visibles et en expansion à STP, vontporter à la connaissance de leurs utilisa-teurs un monde plus vaste et avec des pos-sibilité et options méconnues. Leur avan-cée relative par rapport à l'Afrique subsa-

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13Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

harienne marque une différence en faveurdes Santoméens, mais elle va simultané-ment rendre plus conscientes les limita-tions économiques et les difficultés à par-ticiper, dans de bonnes conditions, dans cemonde aux nouvelles opportunités, ce quipeut engendrer des frustrations.

L'intégration régionale prévisible, si onsuit la ligne tracée dans les autres aireséconomiques et si on prétend augmenterles chances de STP, va aussi exiger denouvelles et de meilleures compétences,des capacités personnelles, économiqueset institutionnelles pour répondre conve-nablement à la concurrence, faute de quoil'intégration sera plus profitable aux autresmembres du bloc qu'aux Santoméens inté-ressés.

La constitution d'une zone franche et ledéveloppement à fond du tourisme vontaussi accentuer la vitesse du changementet l'exigence d'en affronter les effets prévi-sibles, si tôt que possible.

Tous ces faits se présentent en ordredispersé et de façon moins contrôlée quevoulu. La grande question qui se posealors est si STP, sa société, ses institutions,ses agents, vont pouvoir affronter les défisissus de tous ces changements ou si cesera la dynamique propre au changementqui transformera la société, l'économie, lapolitique et la culture de STP sans aucuneintervention endogène.

Le présent Rapport de DéveloppementHumain prétend contribuer à la réflexionsur le grande question du Changementdans un pays comme STP, en partant nonseulement de sa conjoncture politique,économique et sociale mais aussi de sonidentité culturelle et des options ouvertesde reconfiguration pour s'ajuster à unmonde globalisé et pour mieux faciliter ledéveloppement humain.

Etant donné que le Programme desNations Unies pour le Développement estle principal promoteur de cette réflexion,les groupes les plus pauvres et plus vulné-rables constituent la priorité maximum,raison pour laquelle l'analyse des "oppor-tunités" qui se présentent et des scénariosoù elles pourront se développer prend en

considération la vision de ces collectifs etles effets sur eux-mêmes de ces processus.

Le Rapport est divisé en 7 chapitres quisuivent un ordre logique, mais qui peu-vent aussi être lus indépendamment.

Le chapitre 1 est la présente introductionqui prétend poser le problème central durapport.

Il part de la position de STP comme paysémergeant, affronté à un processus dechangement général, manifesté en plu-sieurs changements ponctuels, quicontraste de façon très visible avec uneétonnante continuité du commun de sonhistoire antérieure à l'Indépendance. Danscette première présentation des change-ments, les changements socioculturelssont mis en relief en raison du regard pri-vilégié qui leur est accordé dans ce rapportet qui est associé, à notre avis, au poids dela culture dans le problème du change-ment de STP. Cette introduction socioculturelle fournit également une informa-tion de base qui permet d'aborder le chapi-tre 2 centré sur l'identité culturelle.

Après avoir présenté les changements lesplus notables, se profilent ceux qui vontarriver à très court terme, à cause des pro-cessus externes et internes en cours. Sepose ensuite la question de fonds relativeà qui ou quoi va les affronter et essayer deleur donner l'orientation désirée, en sup-posant que cela se passera ainsi, étantdonné qu'existe la possibilité réelle deleurs déclenchements selon des dyna-miques hors du contrôle des Santoméens.

Le chapitre 2 aborde 2 questions essen-tielles:1)La complexité de la tension existantentre une identité culturelle forgée pen-dant des siècles de domination coloniale etdans des circonstances très contraignantespour le commun des santoméens plongésdans le monde des roças et une nouvelleidentité possible à partir des demandesqui surgissent dans la nouvelle conjonctu-re;

2) le pays possible qui peut surgir duChangement et le profil identitaire asso-cié, en partant de l'hypothèse selon laquel-

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14 Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

le existe encore la possibilité réelle deconstruire une nouvelle identité commesociété et comme pays, où le développe-ment humain joue un rôle fondamental;mais on peut aussi penser à un scénarioqui façonne une nouvelle identité fondéesur la profonde inégalité des chances etdes capacités qui a toujours marqué l'his-toire de STP.

Le chapitre 3 se penche sur les change-ments politiques et économiques plusrécents et les approfondit pour pouvoirdisposer d'un cadre objectif à partir d'uneapproche diachronique.

Après une brève référence à la période detransition et à l'évolution de la PremièreRépublique, il analyse en profondeur lesprincipales réformes institutionnelles de laSeconde République, la transformation deSTP en un Etat de Droit et le processusd'ajustement à une économie de marché.Il effectue une revue des principaux pro-blèmes économiques de ces dix dernièresannées et des indicateurs de base etconsacre une attention spéciale à la réfor-me agraire et à ses premiers effets sociauxet économiques sur la population rurale.

Le chapitre 4 présente un profil du déve-loppement humain de STP le plus completpossible si on considère que les donnéesdisponibles sont limitées.

En premier lieu, il expose les caractéris-tiques les plus saillantes de ce développe-ment, en comparaison avec d'autres pays,en le situant, avec les nouvelles mesuresde calcul, à un niveau moyen de DH. Lescomposantes de l'Indice de Dévelop-pement Humain (IDH) sont ensuite dés-agrégées pour mettre en relief les particu-larités de STP. On constatera alors que lepays se trouve dans une situation privilé-giée au point de vue de l'espérance de vie,et de l'éducation, mais qu'il est marginalsur son niveau de vie. En second lieu, leschangements en DH produits durant lesvingt dernières années sont étudiés avecune approche diachronique pour faire res-sortir les tendances les plus nettes. Unetroisième partie est consacrée à l'analysedes disparités et des niveaux de pauvretéexistants dans le pays, en partant de l'im-portance des groupes les plus défavorisés

pour une étude de ces caractéristiques. Lepoint de vue adopté est celui de la pauvre-té en capacités. Enfin, sont tracéesquelques lignes qui devraient être respec-tées pour améliorer le DH et réduire lesdisparités détectées.

Les deux chapitres suivants sont chacunune étude de cas tourné vers la réflexionsur la réalité du changement à partir dediverses positions et perspectives. Sonpoids spécifique vient de la subjectivitédu changement à partir de la vision desacteurs sociaux concernés.

Le chapitre 5 est une étude réalisée à S.Tomé capitale comme modèle du change-ment dans le monde urbain.

On part ici des stratégies populaires delutte contre la pauvreté, sans presqueaucune intervention des pouvoirs publicset en l'absence de coopération internatio-nale, principal investisseur et agent dudéveloppement de STP. L'analyse permetd'approfondir la perception des acteurssociaux sur les changements qui sont entrain de se produire, sur l'avenir qui seprofile et la façon dont on subit une situa-tion d'incertitude aussi marquée; tout cecià partir des positions marginales de cespersonnes.

Dans cette étude, la valeur de la cultureest reflétée en situations réelles. Les pro-blèmes de la bataille au jour le jour asso-ciés au processus de changement sontillustrés par des interviews (par exemplela rapide et désordonnée émigration de lacampagne vers la ville), permettent depénétrer dans les façons de s'y affronter.C'est un bon exemple de l'importance dela culture dans le changement, observée àpartir des personnes affectées.

Le chapitre 6 incorpore dans le rapportceux qui ont émigré de STP aux terresportugaises.

Situer les migrants au centre du DH repré-sente un effort supplémentaire, étantdonné que, si on accepte de transcenderponctuellement le cas santoméen, le déve-loppement humain appartient aux person-nes et est façonné pour elles, indépendam-ment de leur lieu de résidence. Dans un

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15Rapport National de Développement Humain - STP

Introduction

monde où les mouvements de populationsont de plus en plus fréquents, on ne peutpas continuer à présenter le degré de déve-loppement de chacun des pays comme sileurs émigrants ne leur appartenaient plus.

La distance relative de STP nous permetd'aborder le changement sans la pressionimmédiate et visible de ceux qui vivent aupays. D'autre part le poids de l'étuderetombe sur des professionnels qualifiésqui sont plongés dans un monde européen,qui pourraient ouvrir de nouvelles voiesde réflexion en profitant de leur actuelleinteraction.

Ce travail poursuit trois propos de fond:premièrement, connaître la vision sur l'a-venir de STP, en essayant d'apprécier lesacteurs et les facteurs les plus saillantspour le changement et le DH, deuxième-ment, essayer de comprendre leur relationavec d'autres Santoméens et avec STP etleur possible participation à l'avenir, troi-sièmement, mieux comprendre STP et les

Santoméens, surtout leur culture et leurrapport au changement.

Le chapitre 7 réunit une série de proposi-tions à partir des résultats découlant tantdes études générales que des études parti-culières.

On ne prétend pas tirer des conclusionsdéfinitives, vu la complexité des problè-mes que pose le changement, mais plutôtouvrir des espaces et des lignes deréflexion qui permettront de s'affronter àune conjoncture réelle inéluctable qui,selon toute prévision, affectera profondé-ment l'avenir des Santoméens.

Pour clore ce rapport, on trouvera labibliographie et les annexes qui réunissentles détails méthodologiques de chacunedes recherches réalisées ainsi que lestableaux sur les divers indicateurs liés audéveloppement humain (actualisés dans lamesure du possible, quoique soumis auxnombreuses limitations en cours à STP).

1 Lois du Droit du Suffrage et du Recensement Electoral ; des Partis Politiques ; de la Nationalité; du Statut des Titulaires de Charges Politiques, des Commissions Electorales et Loi Electorale.

2Loi de Base du Système Judiciaire ; Loi Organique du Ministère Public ; Statut des Magistrats.3Lois de la Presse, du Droit de Réunion et Manifestation, Lois syndicales de Grève et du Régime

Juridique des Conditions Individuelles de Travail.4Lois Electorales des Organes des " Autarchies " Locales (NDT : proche de municipalité), des

Finances Locales ; Cadre des Autarchies Locales et de l'Autarchie Spéciale de la Région dePríncipe.

5Littéralement :le grand pas de porte. Lieu où se font les réunions de famille.6Gamins de la rue7sorcellerie

. 8La communauté des Forros est formée par les descendants des premiers Africains amenés parles Portugais, puis affranchis et ayant bénéficié d'un statut particulier (" for "). Voir chapitre sui-vant.

9S'applique aux travailleurs sous contrat originaires d'Angola ou Mozambique.10S'applique aux étrangers originaires d'Afrique venus pour travailler dans les plantations.11Rituel individuel conduit par un " curandeiro " (guérisseur) consistant à payer la dette laissée

durant une vie antérieure.12Rituel de femmes pour remercier la Mère de Dieu de son assistance pendant l'accouchement

et lui faire une offrande.13" Facilitateurs " utilisant les connaissances de mèdecine traditionnelle pour accompagner les

grandes étapes de la vie14Sorcier oeuvrant sous l'emprise du diable

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17Rapport National de Développement Humain - STP

Identité Culturelle etDéveloppementHumain

IntrodutionLa conjoncture des successifs et rapideschangements décrits succinctement ci-dessus ne peut être envisagée autrementqu'à partir de la décision des Santoméenseux-mêmes et de la considération de leuridentité culturelle.

Il faut préciser que l'identité culturelle n'estpas perçue comme une exacerbation detraits culturels particuliers attribués à uncollectif qui en aurait besoin pour exister(selon la coutume romantique, datant du19ème siècle, si solidement accrochée auxnationalismes européens). On part aucontraire d'une conception beaucoup plusouverte selon laquelle les peuples construi-sent et négocient en permanence leur iden-tité culturelle, tant et si bien qu'elle peutvarier en fonction de facteurs complexes.On note alors que les images mutuelles(des groupes-peuples impliqués) jouent unrôle prépondérant en fonction des attentesd'interaction et, surtout, des aspirationspour l'avenir. Et ainsi, le fait de vouloirarriver à être un collectif d'une certainefaçon, ou de s'adapter à des modèles don-nés, induit à réduire la visibilité de certainstraits -ceux qui sont un obstacle majeurpour atteindre l'objectif-- tandis que cer-tains autres acquièrent une présence consi-dérable -pour leur concordance avec ce quiest désiré--.

Cette manière de concevoir l'identité fonc-tionne correctement sur les cas appliqués(comme celui qui concerne cette étude).Elle permet en effet une approche partantd'une vision dynamique et s'adaptant avecsouplesse aux modifications qui, en fait,peuvent survenir chez n'importe quelle

identité, sans que cela n'implique forcé-ment une perte. Pour ce Rapport deDéveloppement Humain à STP, nousmaintenons que le fait d'affirmer l'intérêtde prendre l'identité culturelle commepoint de départ pour améliorer le DH nesignifie pas pour autant s'ancrer sur descaractéristiques traditionnelles particuliè-res, mais se raccrocher plutôt à celles queles Santoméens choisissent comme diacri-tiques pour l'identité qu'ils désirent assu-mer. Cette identité là pourra ou non coïn-cider avec telles ou telles des caractéris-tiques du passé sélectionné comme le plusreprésentatif de "'l'authentiquement sien".

Ce qui, en revanche, est important à pren-dre en compte est que l'identité collectiveliée à la culture peut constituer soit unappui-clef, soit un profond problème pouraborder le changement, selon la concor-dance plus ou moins significative entre lesdeux. Si l'identité culturelle, perçue defaçon dynamique, se rapproche du profilrequis par le changement, l'ajustementidentitaire à ce changement ainsi que lesprocessus qui l'accompagnent serontbeaucoup plus plausibles. Si l'identité cul-turelle s'éloigne du sens du changement, ilest prévisible que surviennent des difficul-tés majeures et des conflits de naturediverse qui peuvent réorienter le change-ment ainsi que l'identité.

Et quelle est la situationà STP? Concordance, rapprochement,distanciation, débat?Sans pouvoir encore rien affirmer définiti-vement, étant donné la complexité des phé-

CHAPITRE II

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18 Rapport National de Développement Humain - STP

Identite Cultrelle et Developpement Humain

nomènes et des processus en cours, on peutcependant affirmer que STP subit une fortetension entre l'identité modelée sur unpatron historique de longue durée et uneautre identité, nouvelle celle-ci, induite àpartir de patrons qui remettent en questionla version traditionnelle. Mais il serait pré-cipité de situer ces deux postures en situa-tion de force semblable ou proche l'une del'autre, et donc un conflit ouvert immédiatn'est pas prévisible dans l'immédiat ni laréorientation qui en découlerait, évidem-ment. Vu sous cet angle, le fait de pouvoirposer le problème avec une certaine avanceest un privilège dont on doit profiter, sur-tout si dans quelques années le conflitrisque de devenir virulent et ne laisseraalors que peu d'options pour les réflexions.

Nous allons commencer par exposer lesdeux modèles pour aider à la compréhen-sion des identités en jeu.

Le modèle historique traditionnel est pro-fondément lié au système de "roças" qu'ilfaut rendre plus explicite.

La roça15 est, à l'origine, une unité de pro-duction, mais, en même temps, elle se pré-sente et se développe comme l'espace où seconstruit le système social des nouveauxarrivants dans un environnement étrangerau départ.

Le processus de décadence du système demonoculture du sucre tout au long duXVIII16 siècle et sa substitution par un sys-tème basé sur diverses cultures de subsis-tance font que la roça ne soit plus alors l'an-tique unité de production, mais qu'elle esttoujours le modèle de référence social,même après le processus d'urbanisation duXVIII siècle . La culture du cacao à partirdu XIX siècle lui fait récupérer une foisencore toutes ses valeurs de départ.

La survie de la roça en tant qu'entité deréférence sociale, politique et économiquese manifeste en ultime instance en une cul-ture forgée à l'épreuve de cette très longuetradition. C'est une culture qui n'est paslimitée au milieu rural où elle s'est déve-loppée car elle imprègne l'ensemble desSantoméens, y compris les citadins. Entoute logique, cela n'implique pas forcé-ment que les attitudes et visions sur cette

culture et le système d'origine y-associésoient similaires parmi les divers secteurssociaux et groupes ethniques. Commen'importe où, des façons différentes de sepenser et de réfléchir sur soi- même coexis-tent, bien que soit partagé le même systèmesymbolique qui donne du sens et rend lacommunication possible.

Les caractéristiques saillantes de ce modè-le historique qui sert de référence commu-ne sont:1. La création et reproduction de relations

de solidarité constituées par le biais d'unéchange inégal de faveurs entre lespatrons et les travailleurs, anciens escla-ves tout d'abord, et plus tard salariés.Cette logique de solidarité se trouve, àSTP, étroitement liée à l'établissementd'un système basé sur une main d'œuvrecomplètement déracinée. Lorsque lesesclaves sont amenés de force sur le nou-veau territoire, ils subissent une perte deleurs référents physiques, sociaux etsymboliques, qui se traduit par unedésintégration de leur antérieure identitépersonnelle et collective. Comme l'ex-plique Caldeira17 , les gens qui arrivent àSTP perdent même leur nom et leur lan-gue et on essaie de les acculturer selondes modèles européens, en provoquantune brutale reconstruction de leur identi-té. Les essais de réconciliation sont à l'o-rigine de fuites constantes et de révoltesqui dureront des siècles. Malgré tout,ceux qui demeurent dans les roças n'ontpas d'autre solution que de se reconvertir,en cherchant appui auprès de celui qui ale pouvoir de le concéder. Ceux qui, deleur côté, occupent la position privilégiéedans ce système de roças, qu'ils soientportugais ou métis, peuvent aussi tirer unbénéfice du fait de compter avec unemain d'œuvre stable et contrôlable, voireaugmenter leur productivité et leur pou-voir. Ce patron exerce ainsi la fonctionde bâtisseur et garant de l'ordre social, cequi s'est conservé tout au long du tempset s'est transmis aux secteurs affranchislocaux lorsqu'ils se sont mis à occuperles postes de pouvoir.

2. L'exercice de la médiation de la part deceux qui occupent le pouvoir symboliqueentre la richesse générée et le commundes gens plongés dans l'échange defaveurs.

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19Rapport National de Développement Humain - STP

Identite Cultrelle et Developpement Humain

Intimement liée à l'établissement de cesystème d'appui mutuel mais inégal,apparaît la logique d'admettre l'accumu-lation de la part de celui qui se trouve ensituation de pouvoir. Et on n'évoque pasici les moyens conventionnels d'accumu-ler la richesse dans une économie librede marché, mais on se réfère plutôt aufait de profiter de cette situation privilé-giée pour utiliser des ressources collecti-ves et publiques à des fins d'enrichisse-ment personnel, sans prendre en compteles critères de propriété publique ou pri-vée, ni de productivité, compétitivité,marché, etc. Le pouvoir d'accumuler estinclus dans la position privilégiée quel'on occupe et qui est légitimée sociale-ment par la reproduction de ce rôle et parla fonction re-distributive de ceux qui l'e-xercent. C'est à dire qu'on accumulemais on distribue aussi, de sorte que lestatut augmente au fur et à mesure que sereproduit le modèle social, doté de cohé-sion croissante par l'acceptation de cettelogique. Cette façon de concevoir le rap-port à la chose publique et sa manipula-tion se heurte de plein fouet au conceptd'Etat et de service public en vigueurdans les Etats modernes. Ce n'est cepen-dant pas une particularité de STP, car elles'enracine dans d'autres endroitsd'Afrique et son développement local n'apas dû forcément apparaître étrange àceux qui arrivaient dans ces îles. D'autrepart, le concept d'Etat moderne ne collepas avec les formes politiques existantesen Afrique d'avant l'époque coloniale et ilse peut qu'on y comprenne très différem-ment des Européens la dénommée fonc-tion publique.

3. Le stratagème de constituer des alliancesentre les investisseurs étrangers et lepatronat local avec l'objectif de canaliserles bénéfices propres vers l'extérieur dupays et en générer de nouveaux à partirde l'extérieur. Une grande partie des res-sources que les patrons locaux des paysd'Afrique subsaharienne peuvent obte-nir est très conditionnée par l'interven-tion étrangère, c'est un fait certain. Sicela est confirmé pour la majorité ducontinent, ça l'est encore plus pour STP.A dire vrai, aucun secteur ne pourraitfonctionner actuellement sans cetteintervention extérieure, mais il ne l'au-rait pas pu non plus dans le passé, puis-

que la formation même du pays s'estréalisée pour et par des gens de l'exté-rieur qui n'ont, en outre, trouvé aucunintérêt à doter l'actuel pays d'une struc-ture économique solide et d'une admi-nistration efficiente. Il est évident queni les esclaves ni les ouvriers ne peuventaccumuler quoi que ce soit, mais lescouches privilégiées n'ont pas non plusutilisé leur capital pour diversifier l'éco-nomie, développer un système bancairelocal ou créer une main d'œuvre localequalifiée. Le départ de la main d'œuvrequalifiée portugaise et de son capitalmontre à l'évidence les possibilités pres-que nulles qui s'offrent aux Santoméenspour viabiliser leur pays sans appuiextérieur. Cette évidence favorise lesnouvelles relations et confirme sansambages le poids de l'interventionétrangère dans le développement écono-mique du pays, en même temps qu'elleconsolide le pouvoir de ceux qui pren-nent part aux nouvelles alliances. Undes résultats est un pays très dépendantde l'extérieur, avec la seconde detteexterne per capita du monde, un PIBgénéré pour plus de 90% par l'investis-sement étranger et des patrons qui sor-tent très fortifiés de tout ce processus.

4. Faire du forro le représentant de STP, ens'appropriant de la jouissance de sesdroits historiques, et en le séparant dureste des groupes ethniques qui ont uneassociation univoque avec le travail agri.STP est un pays résultant d'un amalgamede gens venus, surtout, de diverses par-ties d'Afrique, depuis sa découverte jus-qu'à nos jours. Les territoires correspon-dant aux pays entourant le Golfe deBénin, ainsi que l'Angola, leMozambique, le Cap-Vert et le Gabon -pour se référer aux plus connus mais sansaucune prétention exhaustive-- ontapporté un nombre considérable de per-sonnes qui sont devenues partie du tissuethnoculturel santoméen. Mais la logiquede négociation des identités est différen-te de la froide exposition des faits et l'ap-partenance ou non d'un groupe à unecatégorie ne se définit pas en soi, maisplutôt par les rapports entre toutes lesparties impliquées, ainsi que par lesattentes et les images mutuelles et surtoutpar la position par rapport au pouvoirsymbolique. Dans le cas santoméen, les

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20 Rapport National de Développement Humain - STP

Identite Cultrelle et Developpement Humain

Forros s'érigent comme peuple autochto-ne, représentant de STP, en fonctiond'une origine plus ancienne, que certainsarrivent même à situer avant l'arrivée desPortugais, bien que rien jusqu'à présentne démontre, preuve à l'appui, que cepeuplement antérieur ait existé. Ladémonstration a peu d'intérêt pour leseffets identitaires; mais, en revanche, lefait d'exclure d'autres groupes de la con-dition de représentants de STP est à rete-nir. Ce déplacement vers les marges desdénommés "tongas" en particulier -descendants des travailleurs recrutés enAngola et Mozambique-- semble êtreissu du désir des Forros de se démarquerde toute association d'idées possible avecl'esclavage. Le travail agricole des roçasest, dans l'imaginaire forro, lié à l'escla-vage et, fort de cette considération, lechangement juridique d'esclave à ouvrierembauché sous contrat n'annule pas l'as-sociation symbolique d'origine. Cettedigression et réflexion peut permettre decomprendre un peu mieux la significa-tion de cette façon de se poser en repré-sentant de STP, ainsi que la raison histo-rique de cette séparation d'avec tous lesautres groupes.

5. Représenter la virilité par le biais de lapolygénie et du plus grand nombre pos-sible d'enfants. Une des caractéristiquesles plus emblématiques du modèle tradi-tionnel à STP est celui relatif au systèmede parenté. Pour avoir, tout d'abord, étécapable de se maintenir tel quel, indem-ne de tout changement appréciable, jus-qu'à il y a très peu, ce qui a permis sonutilisation comme signe distinctif. Etensuite pour l'étroite connexion établieentre le modèle patron-client et le systè-me de parenté. Vu dans une perspectivedescriptive et expliqué de façon sommai-re, ce système est fondé sur un réseauétendu d'appuis mutuels, construit sur lapolygénie et une famille étendue quiabsorbe une grande quantité de membresqui s'y incorporent par des vecteurssymboliques. Ces vecteurs découlentdes relations de solidarité construitesautour du clientélisme qui, transcendantles échanges simplement matériels, s'é-tend à la représentation symbolique de cequi est à soi et à autrui. C'est à dire queceux qui participent de cette logiquedeviennent des membres, symbolique-

ment, d'une famille à laquelle ils doiventloyauté et coopération, et dont ils reçoi-vent sécurité et prestations spécifiques.La virilité s'insère dans cette logique, enfournissant de nombreux membres à cesfamilles et en reproduisant un modèledéterminé d'organisation sociale, où leshommes s'installent dans les positions depouvoir symbolique et les femmes sesituent en fonction de la relation établieavec les hommes, soit épouse, soit parte-naire d'union de fait ou de relation devisite. Il faut souligner que cette positionsymbolique ne correspond pas forcémentà la position économique puisqu'il arriveque les femmes conservent leur posteéconomique alors que les hommes leperdent dans des conjonctures commecelle qui sévit actuellement. Les foyersentretenus par des femmes sont nom-breux et ils ne reçoivent plus aucunapport des géniteurs des enfants. Cescaractéristiques construites au long dessiècles et restées relativement en vigueurjusqu'à l'heure actuelle semblent repro-duire une culture reposant sur des logi-ques très rigides de relations de pouvoir.Chacune de ces caractéristiques peut êtrelue comme l'expression de relationssociales, politiques, économiques, inte-rethniques et sexuelles de pouvoir.Toutes, considérées dans leur ensemble,forment le système symbolique référen-tiel basé sur la tradition.

Quel avenir ?Face au poids de l'histoire et à la construc-tion traditionnelle du sens, se présententd'autres traits qui le remettent en questionet qui peuvent avoir une incidence sur leschangements en cours, et, surtout, surceux à venir:1. Même les Santoméens qui occupent une

position privilégiée, selon la perspectivesymbolique, sont en train de prendreconscience des problèmes posés par lefait de s'affronter aux changements à par-tir d'une culture qu'on pourrait appelerd'échange inégal du " Monsieur " ou declientélisme. Ce système clientéliste leurparaît peu apte à offrir une solution rai-sonnable à moyen terme, au moins dansles termes actuels. Le système des roças,utilisé pendant tant de temps comme unréférent symbolique de base et commeun espace privilégié d'organisation socia-

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le et économique, subit maintenant deprofonds changements dans ses dimen-sions sociale, économique et politique.S'il est vrai que STP est encore un paysde monoculture, il n'en est pas moins vraique sa viabilité économique est impossi-ble à moyen terme. Ni la structure éco-nomique internationale, ni les prix ducacao n'offrent d'options réalistes de con-tinuité. Le processus de privatisation deterres et les rendements en baisse desanciennes entreprises rurales le corrobo-rent. Mais, en outre, une très forte émi-gration vers la ville s'est déjà produite etil ne semble pas qu'elle doive s'arrêter et,par conséquent, l'ancien modèle d'unegrande majorité vivant dans ses micro-D'autre part, les communications offrentdes possibilités de rupture des espacesles plus clos et la tendance est à leurexpansion, soit pour les infrastructuresroutières, soit pour les réseaux de télé-communications. Déjà, la répercussiondes moyens audiovisuels représente, ensoi, un changement qualitatif fondamen-tal. Il ne semble pas non plus qu'il soittoujours aussi facile de marquer lesbarrières symboliques entre les anciensForros et les travailleurs des roças arrivésau XIXème siècle. Le processus d'urba-nisation et le démembrement du systèmedes roças effacent les vieux contours,tandis que les catégories et activitéssocio-économiques n'induisent pas,aujourd'hui le jour, à l'association avecdes groupes ethniques précis. Tous cesfaits unis à la crise économique que tra-verse le pays et aux exigences des bai-lleurs de fonds ont des retombées quilimitent les marges de contrôle social dejadis, en même temps qu'elles rendentdifficile la médiation dans la logiqueaccumulation-distribution. Cependant,même si la prise de conscience desSantoméens les plus privilégiés va encroissant, il est encore trop tôt pour enconclure qu'ils agiront selon les nouve-aux critères.

2. Il existe un capital social croissant quijoue un rôle de plus en plus notable dansla vie publique. Dans la mesure où lespolitiques ne répondent pas aux défis duchangement, le relais est repris par unesociété civile désireuse de participer dansles processus où STP se trouve impliqué. Ces dernières années sont une période

d'essais de participation sociale, dictéspar la conscience des options d'interven-tion réelle dans les destins individuels etcollectifs. Des Organisations Non gou-vernementales (ONGs) locales surgis-sent et s'ajoutent à celles venues de l'ex-térieur. L'esprit d'associationnisme proli-fère et trouve sa traduction sous forme denouveaux acteurs sociaux dans lesdomaines les plus divers. Des femmes,des commerçants, des pêcheurs ou desintellectuels s'organisent pour conjuguerleurs efforts et défendre leurs intérêts.Les entrepreneurs et la classe ouvrièresont aussi en train de devenir, en tant quecollectifs, de véritables protagonistes,bien que les limitations du développe-ment de l'entreprise privée et l'abondan-ce de main d'œuvre informelle et instablene favorisent pas leur consolidation insti-tutionnelle. La coopération internationa-le les encourage et les appuie, avec l'es-poir de les voir arriver là où les acteurspolitiques conventionnels ont échoué etelle promeut la valeur que la nouvellesociété civile va acquérir. Simultanément,de nouvelles idées et croyances s'intro-duisent au travers de ces organisations.Ce ne sont pas seulement les formessociales liées à des priorités matérielleset sectorielles qui sont épaulées. Mêmel'offre religieuse se multiplie, elle romptles limites et les privilèges antérieurs etelle s'y risque en partant d'une diversitéde nuances propre aux sociétés ouvertes.Les conséquences en sont encore diffici-les à appréhender, mais la seule existencede tous ces acteurs indique une nouveau-té de tendances qui peuvent jouer un rôlenotable dans le changement.

3. La femme santoméenne est en train deprendre conscience de ses possibilités, desa situation et de son rôle croissant dansla vie politique et économique. Simulta-nément, une proportion considérable denouveaux cadres professionnels est cons-tituée de femmes et elles semblent déci-dées à participer activement et à décro-cher des quotas majeurs de pouvoir dansdes milieux encore très fermés. En outre,la coopération internationale se montretrès sensible à la situation de la femme etaux avantages comparatifs d'investir enelles comme agents du changement. Lemodèle de parenté basé sur la polygénie,les unions de fait, un nombre très élevé

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d'enfants éparpillés dans différentsfoyers et le rôle-clef de la femme commechef de famille (un tiers des foyers actue-llement) commencent à faire l'objet dequestionnements essentiels. Si la situa-tion économique générale, de plus enplus critique, met le système patron-client en difficulté, le système de parentéen résulte affecté dans le même sens. Ilest très compliqué pour l'homme santo-méen d'aujourd'hui de garder un certainniveau économique et la stabilité derevenus, suite à quoi sa capacité de con-tribution à divers foyers est menacée.Par conséquent, la femme santoméennesupporte des charges croissantes, ce quise répercute sur la façon de percevoir levieux modèle de masculinité et sur sapropre volonté d'avoir une quantité d'en-fants quasi illimitée, comme autrefois.L'urbanisation opère aussi dans cettedirection, car la valeur de la main d'œu-vre du système des roças est bien diffé-rente de la ville où il est beaucoup plusdifficile d'incorporer les enfants dans lemarché du travail. L'instruction reçue parun pourcentage considérable de femmesdepuis l'Indépendance et leur proportioncroissante par rapport aux hommes dansles universités étrangères, peut jouer unrôle crucial comme facteur de change-ment. De façon générale en effet, l'expé-rience internationale démontre qu'unniveau plus élevé d'instruction chez lesfemmes se traduit en une réduction dunombre d'enfants, un retard à leur donnerle jour et une amélioration économiqueconsidérable. Certes, la participationdans les centres de pouvoir joue un rôleclef, mais, en dépit de leur formationacadémique, les femmes sont souventreléguées au second plan. Toutefois, leschances de changer sont plus grandes siles femmes constituent un creuset demain d'œuvre qualifiée comme ça com-mence à être le cas à STP. Le facteurcoopération internationale peut revêtirune grande importance en la matière, vula très forte dépendance du pays. Dans lamesure où les suggestions de la coopéra-tion incluent la perspective de genre, lesoptions de changement se multiplieront.

4. En dépit de la crise économique et de lagrande mobilité des charges publiques,gouvernementales surtout, la démocratiesantoméenne est forte et soutenue par

l'ensemble de la population. Les risquesd'instabilité graves, si propres à certainsautres pays subsahariens, ont été surpas-sés. Les gens apprécient la paix dont ilsjouissent et cela permet d'affronter deschangements profonds sans craindre defortes réactions, telles que des manifesta-tions violentes ou des coups d'Etat. Dansles publications sur la vie politique deSTP, on cite souvent les changementsministériels et ce qu'on nomme "crise deGouvernement" en Europe. Une revuedes dix dernières années -correspondantau régime démocratique, mais qui pou-rrait aussi bien s'étendre jusqu'àl'Indépendance- permet d'observer qu'ilsont lieu tous les ans. Une fréquenceaussi élevée serait, dans une démocratieconfirmée, considérée comme grave-ment préoccupante, et ferait cataloguer leGouvernement correspondant commetrès fragile et instable, presque incapabled'exercer ses fonctions. Mais cette lectu-re doit être plus attentive dans le cas deSTP. Un système social tel que décrit ci-dessus imprègne pratiquement la totalitédu monde institutionnel. Les obligationsque ce système social contient ne s'annu-lent pas avec l'apparition d'un nouveaumodèle politique. Ce qui semble se pro-duire donc est une adaptation de cet Etat,qu'il soit d'ailleurs appuyé par le partiunique ou par un régime de pluripartis-me. Dans la mesure où les relationssociales, selon le système patron-client,sont dynamiques, les gens sont habituésà des changements ponctuels de référen-ce, mais toujours à l'intérieur des limitesimposées par ces familles étendues.C'est à dire que les personnes peuventchanger, mais pas les unités sociales aux-quelles elles appartiennent. Cette stabili-té de fond contribue à éviter des affron-tements radicaux et le climat de paix ensort renforcé. Une approche positive per-met d'apprécier que, en comparaisonavec beaucoup d'autres espaces africains,STP jouit d'une tranquillité enviable. Etce privilège ouvre des possibilités clairesde réaliser des réformes profondes, ycompris des réformes démocratiques.

5. On peut apprécier une forte exigence d'é-thique dans l'exercice des charges publi-ques, bien au delà de la vieille logiquequi utilisait cet argument seulement pourdisqualifier les adversaires politiques.

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La société en a assez de la corruption etelle le manifeste de plus en plus ouverte-ment. En reliant cela au point antérieur,on comprend que les demandes ne selimitent pas à la réforme légale des insti-tutions, mais à tout leur fonctionnement,conformément à un code éthique. Cescritiques sont lourdes de significationdans un pays où le modèle traditionnelpeut être considéré comme un systèmecorrompu en partant de la perspective del'Etat de Droit puisque, partant de deuxexemples clairs, on considère un délit lefait de s'enrichir avec des ressourcespubliques destinées à d'autres fins oubien le fait de profiter de relations per-sonnelles ou familiales pour gagner unconcours public. L'importance de la coo-pération internationale, si souvent men-tionnée, a servi à ce que les Santoméensutilisent les arguments de l'Etat de Droitcontre certains gouvernements ou per-sonnes sans toutefois partager eux-mêmes la conception de fond. Elle a toutjuste servi d'instrument répondant à descritères d'opportunité et a pu être utiliséeselon les intérêts en jeu. Mais mainte-nant les critiques se sont généralisées, etpas seulement dans les secteurs de l'op-position politique ou de positions socia-les marginales. L'exigence d'éthique estreprise même par des membres de laparenté de ceux qui occupent le pouvoir,sans pour autant y prétendre, et cela indi-que bien une nouveauté significative. Lacrise économique aussi exerce, en uncertain sens, une pression en faveur del'exigence d'éthique puisque, dans lamesure où la pauvreté s'étend et où lesgroupes de pouvoir perçoivent une insa-tisfaction sociale croissante, il leur seraplus compliqué de continuer à ignorercertains principes de l'exercice de lafonction publique.

Quelles options ?On ne peut encore rien augurer des résul-tats des tensions exposées, mais tout sem-ble indiquer qu'on ne dispose pas de tropde temps pour contrôler les changements.Le pays doit en fait décider entre deuxoptions: est-ce qu'il est prêt à participer defaçon active, et non pas comme un agentpassif, à:1. Reproduire encore une fois le modèle

d'organisation sociale, politique et éco-

nomique basé sur la construction du sensconforme à celui élaboré à partir desroças, ou à

2. Générer les conditions qui permettrontune culture ouverte sur la base du déve-loppement humain. Ainsi, et en prenantcompte des aspirations des Santoméens,développer les communications et lesinfrastructures, les accompagner de l'a-mélioration de la santé et de l'éducationet stimuler un tourisme soutenable. Toutcela renforcé institutionnellement et avecune nouvelle éthique de la fonctionpublique.

Le premier modèle semble mener à unenouvelle roça, plutôt orientée sur le touris-me, et avec les revenus du pétrole en plus.L'avenir prévisible est ici la consolidationde quelques rares privilégiés et la croissan-te marginalisation du commun descitoyens.

Le second peut être le commencement de lapleine participation santoméenne à sondéveloppement et l'occasion de décider duprofil du futur STP, sans que les change-ments s'imposent par leur propre dyna-mique.

Chacune des deux options est en mêmetemps un choix sur l'identité collectivequ'on désire construire: doit-elle partir decertaines valeurs du passé et, dans ce cas,de quelles valeurs, ou bien, doit-elle incor-porer de nouveaux principes et commentalors les articuler ; est-ce qu'elle doit rend-re possible l'unité dans la diversité ou bienlaisser chaque groupe exercer l'interactionsans se soucier de rien de plus ; enfin, l'i-dentité culturelle doit-elle appuyer et s'ap-puyer sur le développement humain oudoit-elle laisser encore une fois les critèrespolitiques ou économiques comme seulsfacteurs de pression dans un sens ou l'autre.

Le défi apparaît clairement et la coopéra-tion internationale doit contribuer à stimu-ler la réflexion, le débat, la responsabilitéhistorique.

La culture est, on pourra l'apprécier avecplus de loisir tout au long de ce rapport, unélément crucial pour le développementhumain et, cependant, elle a été la grandeignorée des programmes de développement

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et changement. Peut-être est-ce dû au faitqu'on l'associe aux manifestations littérai-res, artistiques ou au folklore plutôt que dela considérer comme le système qui cons-truit et ordonne la réalité et sans lequel iln'est pas possible de comprendre la singu-larité santoméenne ni, d'ailleurs, aucuneautre.

STP a l'occasion d'ouvrir une voie en par-tant de cette considération, servant ainsipeut-être de modèle à d'autres pays afri-cains et même d'autres continents.

2ème partie

La culture et le systèmeproductif

En nous penchant sur la problématique del'identité culturelle, l'une des questions quenous nous posons est de savoir si lesvaleurs culturelles facilitent ou, au contrai-re, freinent l'innovation scientifique et tech-nologique et la modernisation de la sociétésantoméenne. L'identité culturelle, telleque nous l'entendons, recouvre un ensem-ble de valeurs culturelles de référence surlesquelles reposent, d'une part, la logiquede cohésion sociale de plus en plus étendueet, d'autre part, la construction d'espacesidentitaires résultant de la dynamique desdifférents groupes sociaux.

Eclaircissons la façon dont chaque groupespécifique s'est positionné par rapport autravail agricole, la plus importante sourcede production de richesses tout au long dessiècles. Réalité objective qu'on n'a absolu-ment pas réussi à altérer jusqu'au momentprésent, malgré les vœux réitérés du pou-voir post-indépendance.

A la production de cacao, a toujours étéassociée la présence de travailleurs recrutésà l'extérieur. Cette présence a atteint sonapogée en 1921 avec 38 696 travailleurssous contrat et elle représentait alors envi-ron 65% de la population. Au cours desannées 20, démarre la chute de productiondu cacao qui s'est beaucoup aggravée aucours des années 50 et 60, avec une pro-duction moyenne annuelle entre 10 000 et11 000 tonnes.

La conséquence de cette situation est l'a-bandon progressif des "roças" par les pro-priétaires de l'époque qui réduisent les sur-faces d'exploitation aux aires les plus pro-ductives. S'ensuit un exode rural qui vacontinuer jusqu'à nos jours. Selon lesrecensements de 1981 et 1991, 37 et 38%des habitants d'Agua Grande18 proviennentd'autres districts, tandis que 36% de lapopulation totale vit dans ce district de lacapitale. Une étude plus récente sur le pro-fil de la pauvreté à STP, de mai 2001,indique que 64% de la population habitedans les deux districts centraux de AguaGrande et Mé Zochi, ce qui montre à quelpoint persiste l'abandon de la campagnepour la ville.

Face à la progressive dégradation du systè-me productif du cacao et du café considéréscomme sources principales de recettes, eteu égard aux potentialités du pays, en ter-mes soit de beauté naturelle, soit de locali-sation géostratégique ou d'innovation tech-nologique, on peut se demander quellesalternatives de gestion et quels change-ments sociaux seraient nécessaires pourvoir surgir de nouvelles activités génératri-ces de revenus, notamment dans les sec-teurs des services et du tourisme. Ces acti-vités, complémentaires au cacao, répon-draient à un besoin pressant..

Les groupes sociaux les plusimportants.Nous pouvons considérer qu'actuellementla population est divisée en quatre groupesdistincts: les travailleurs ruraux, lespêcheurs, les Forros et l'élite ; la nouvellepopulation urbaine et les marginalisés.

Les Travailleurs Ruraux Le système de plantation requiert unemain d'œuvre importante dont le recrute-ment se fait à l'extérieur du pays. Audébut cette main d'œuvre provenait essen-tiellement de l'Angola et du Mozambique.Puis, à partir des années 50, Cap vertdevient la source principale de fourniturede cette main d'œuvre, forcée à abandon-ner son pays suite à la sécheresse.Recrutés comme travailleurs sous contrat,on les appelait " gens de service " et plustard " contratés ".

Dans les roças, l'organisation du travail

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était basée sur les relations socioprofes-sionnelles fortement hiérarchisées et spé-cialisées, en complément des distinctionsraciales. Chaque groupe social, même ausein de la population née dans le pays(Forros, Longuias (de l'île de Principe) etAngolars) se caractérise par des trajectoiresprofessionnelles différentes à l'intérieur desplantations. Les Forros et les Longuiasoccupaient des fonctions inférieures dansl'administration coloniale et ils réalisaientdes tâches dans les bureaux, les ateliers, lesécoles et les hôpitaux. Les Angolars réali-saient des travaux occasionnels, commecouper des arbres, transporter du cacao parvoie maritime jusqu'aux quais et assurerl'approvisionnement de la roça en poissonfrais. Les descendants des travailleurs souscontrat nés à STP sont appelés tongas et ilsconstituent aujourd'hui la grande majoritéde la population des roças, dans la mesureoù, même avant l'indépendance, l'arrivée denouveaux travailleurs venant de l'extérieuravait cessé. La distribution de terres a intro-duit une profonde altération du système deproduction du cacao et du café dans lamesure où ceux qui sont devenus déten-teurs de titres de possession des terresétaient d'anciens salariés qui n'avaient pasété entraînés à la prise d'initiatives ni à faireœuvre de paysans, tout ceci devant forcé-ment faire l'objet d'un vaste processus d'ap-prentissage.

Les travailleurs ruraux constituent descommunautés assez fermées, dans lesquel-les, malgré tout, il n'y a pas beaucoupd'esprit de communauté. Comme ces per-sonnes sont issues de lieux et de culturesdifférentes et qu'elles sont obligées de par-tager un espace physique plein à craquer,elles s'efforcent de préserver leur vie privéeet elles évitent ainsi d'avoir des relationstrop étroites avec les voisins. Ce sont despersonnes qui, dans leur majorité, viennentde l'extérieur et ne peuvent pas compter surun appui familial. Elles n'ont pas non plusde grandes relations avec d'autres gens endehors de leur communauté.

Les pêcheursLes Angolars se sont toujours distinguéspar leur grande vocation pour la mer. Iln'est donc pas étonnant qu'ils aient déve-loppé la capacité d'explorer les ressourcesmarines comme moyen de subsistance.

Les hameaux de pêcheurs ont toujoursapparu le long des côtes et petit à petit despopulations d'origine différente s'y sontintégrées. Outre la pêche, ces populationsfabriquent des canots et d'autres ustensilesliés aux arts de la pêche ou de la naviga-tion. Ils utilisent des bateaux à moteur etils s'intègrent comme professionnels dansdes embarcations modernes. Dans cescommunautés, les femmes se consacrentsurtout à la vente et à la salaison du pois-son, mais il arrive aussi qu'elles s'adon-nent à d'autres petits commerces.

Les Angolars représentent dans l'ensembleenviron 9% de la population totale. Ils for-ment un groupe qui a toujours vécu isolé et,lors de la période post-indépendance, ils sesont refusés à grossir les files de fonction-naires publics, préférant ainsi être reconnuscomme des travailleurs indépendants.Raison pour laquelle ils étaient mieux pré-parés à s'adapter aux réformes structurellesintroduites depuis 1987 en vue de permett-re une économie de marché. Suite à lapeste porcine africaine et d'autres maladiesqui ont relativement décimé le bétail natio-nal, ainsi qu'aux limitations financièrespour en importer, l'importance économiquede ce groupe est devenue de plus en plusnotable. En effet, la pêche contribue à laconsommation de protéine animale, avec40kg/habitant/an, alors que la viande nereprésente que 4kg/habitant/an. Parailleurs, les revenus issus de la pêche n'ontpas baissé autant que dans les autres activi-tés économiques, au cours de ces dernièresannées.

Les Forros et l'éliteA partir du XV siècle, STP fut un entrepôtpour le commerce maritime destiné au tra-fic d'esclaves et les Portugais y établirentune économie de plantation en vue de laproduction de canne à sucre. Vu la raretéde colons blancs et la menace de maladiestropicales, les unions inter-raciales entreEuropéens et Africains furent encouragéeset progressivement les mêmes droitsfurent concédés aux noirs libres et auxmétis (Forros), ce qui leur permettait departiciper activement à l'économie et auxaffaires politiques locales. Mais cette élitenée sur place n'était pas unie, elle étaitprofondément divisée en factions rivales.Ces proéminentes familles créoles domi-

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nèrent la municipalité et le clergé catholi-que local et elles étaient en concurrence,d'une part entre elles, et d'autre part, avecles colons et les fonctionnaires coloniauxblancs, pour le pouvoir politique et écono-mique. Le système d'autorité tripartiteentre l'église, le gouverneur et la munici-palité engendrait de continuelles luttespolitiques, dont les effets polarisateursdans une société petite et insulaire contri-buèrent à une constante instabilité dégéné-rant en incertitude de l'administrationlocale. Suite à quoi un important réseaude parenté et de fraternités religieuses sedéveloppa et se structura et devint matiè-re à solidarité et action collective entreForros. Et ce ne fut qu'après la re-coloni-sation des îles, à la moitié du XIX siècleque l'élite née au pays perdit son pouvoirpolitique et économique effectif en faveurdes Portugais qui avaient établi de vastesplantations de cacao et café sur des terresacquises ou extorquées aux Forros et enimportant des milliers de travailleurs souscontrat d'Angola, du Mozambique et plustard de Cap Vert.

Le groupe social le plus nombreux etimportant est celui des Forros. La descen-dance familiale, l'appartenance d'une petiteparcelle de terre (" gleba "), le refus de tra-vailler dans les plantations font partieintrinsèque de son identité et de sa culture,l'affiliation à des institutions catholiques età des associations culturelles sont devenusdes attributs exclusifs de la catégorie forro.Concentrés en agglomérations dispersées,connues comme " luchans ", en quartiers etassociations culturelles et religieuses, leurvie sociale est restée structurée autour deréseaux personnels basés sur la parenté etles liens entre patrons et clients.

Les relations patron-client et les liens fami-liaux sont profondément ancrées dans lasociété santoméenne. Le rôle joué par lesfraternités et les familles est à la base desracines historiques de la logique culturellespécifique qui régit de vastes réseaux desolidarité, et qui contribuent aux pressionssociales actuelles.

Géographiquement les Forros se distri-buent sur tout le pays, avec une incidenceparticulière sur le centre et les alentours dela capitale où sont concentrées les régions

des " gleba " (petites propriétés agricolesfamiliales qui dépassent rarement 1 ou 2 haet qui se transmettent normalement parhéritage) et " quintal " (cour autour de larésidence familiale). Un des indices d'assi-milation dans ce groupe dominant est lapossession d'un type quelconque de pro-priété rurale : glèbe ou quintal. On admetque le groupe forro représente environ 45%de la population.

C'est aussi un groupe stratifié: il comprendune couche instruite et ayant des relationsinternationales, composée par quelquescentaines de familles qui constituent l'élite.Ces personnes ont des parents qui vivent àl'étranger, elles y ont également vécu ou yont fait des études et il est possible qu'ellesaient des moyens investis à l'étranger.Dans cette optique, on ne doit pas ignorerce qu'a signifié, en termes d'améliorationdu revenu global d'un certain nombre deretraités, les pensions payées au Portugalaux anciens fonctionnaires qui avaientservi pendant l'époque coloniale.

Les autres membres de ce groupe sont arti-sans, fonctionnaires, employés d'entrepri-ses publiques et privées et petits propriétai-res.

Les membres de ce groupe partagent engénéral le même système de valeurs et ilspeuvent étendre leurs relations sociales parles liens familiaux, des amitiés fidèles (fai-tes sur les bancs de l'école), le clientélismepolitique, etc.

La nouvelle populationurbaine et les marginalisés

On a déjà vu que les centres urbains, etsurtout les zones périphériques de la capi-tale, sont en train d'être envahis par d'anciens travailleurs agricoles fuyant lesconditions de vie pénibles du milieu rural,des jeunes à la recherche d'emploi et desfemmes de basse condition sociale dési-rant rompre leurs liens domestiques. Cesegment de population, qui a un niveau devie précaire, n'a pas accès aux ressourcesnaturelles, n'a pas non plus la possibilitéde recourir au soutien d'une structurefamiliale qui, éventuellement, n'a jamaisexisté ou qui se défait lorsque ses coûtsfinanciers d'entretien deviennent trop éle-vés. Ces groupes sont les plus vulnérables

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et ils constituent une bonne partie des 54%de la population qui vit au-dessous du seuilde la pauvreté ou des 15% qui vivent dansla pauvreté extrême. Il faut souligner queces personnes ne partagent pas les mêmesvaleurs et qu'elles ne peuvent, en général,compter sur aucun type de soutien.

La Dynamique des groupesSociauxCertains évènements ont été déterminantspour entraîner une profonde mutationdans la logique de la relation sociale. Eneffet, après l'indépendance, s'est déclen-ché un processus qui remettait en cause lesvaleurs du système colonial et qui s'est tra-duit par la généralisation de l'enseigne-ment primaire, la gratuité des servicesmédicaux et pharmaceutiques et l'égalitéeffective des citoyens devant la loi, offrantainsi à chacun la possibilité de participa-tion politique et d'affirmation sociale,indépendamment de son origine. Le serv-ice militaire obligatoire étendu à tous lescitoyens de sexe masculin, de plus de 18ans et aptes, fut un facteur d'intégrationsupplémentaire important.

Ces faits ont permis que les différencessociales s'atténuent, surtout entre les mas-ses de Forros et les travailleurs ruraux.Plus récemment, grâce au processus de dis-tribution des terres, les travailleurs rurauxse sont transformés en petits propriétairesagricoles. Ils sont ainsi devenus aptes àassurer une importante source de revenuspour eux-mêmes et leurs familles, ce quiles met sur une voie d'autosuffisance etd'indépendance auquel ils n'étaient pashabitués, et ils deviennent en outre prêts àune intégration facile à l'économie de mar-ché en devenir. .

Bien que nous nous trouvions dans un paysprofondément religieux, où plus de 90% dela population accepte ou pratique la reli-gion chrétienne, la culture religieuse nesemble pas avoir contribué à des change-ments sociaux dans le sens de plus de justi-ce sociale. On ne peut cependant pas nier

pour autant l'importance et la contributionde la religion chrétienne et des diversesreligions et sectes qui, dernièrement, sonten train de proliférer dans le pays, commefaçon d'assurer une relative paix sociale,laquelle est en passe de faire partie desvaleurs culturelles santoméennes.

Demeurent, entre temps, quelques ques-tions à discuter et débattre, de façon à pou-voir définir plus précisément quelle contri-bution chaque groupe social pourra appor-ter au processus de changement en vue d'unmeilleur développement humain :I) Qu'est-ce qui unit les Santoméens?

II) Quel peut être le rôle de la religion entant que facteur d'unité entre lesSantoméens?

III) A propos de la grave crise d'autoritéque traverse le pays actuellement, est-cequ'elle a à voir avec une orientation etune culture politique inadéquates pourassurer le dialogue entre l'Etat et lasociété ou est-ce qu'elle découle essen-tiellement de l'incapacité de l'Etat àgarantir aux citoyens les moyens de leursurvie, malgré un important soutien de lacoopération internationale.

IV) Face à l'immobilisme séculaire quicaractérise la société et l'économie san-toméennes, sera-t-il possible de conce-voir et dessiner un cadre social qui intè-gre dans un même projet de société dessegments de population que les circuitséconomiques maintiennent encore sépa-rés les uns des autres ?

V) Face aux immenses carences dans les-quelles se débat la société santoméenne,pourquoi ne pas nous appuyer sur lesméthodes participatives de solution deproblèmes (logement, assainissement dumilieu, mobilisation de l'épargne, etc) ensorte que, sur la base d'une division dutravail moins spécialisée et surtout enfaisant appel à des actions de solida-rité/réciprocité (Quitembu, Xiquila)enracinées dans les traditions culture-lles, nous puissions apporter une solu-tion à quelques uns des problèmessociaux graves qui nous affectent.

15 NDT : Traduit par plantation dans le chapitre précédent16Voir Caldeira, 1999:72

17 Voir Caldeira, 1999: 75-7618District où se trouve la capitale, São Tomé, et qui se confond avec elle

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Changementspolitiqueset économiques

IntroductionLes changements survenus pendant lesannées 90 correspondaient à deux revendi-cations du peuple, à savoir la DémocratiePolitique et la Libéralisation Economique.Comme l'une et l'autre sont des processusrelativement lents, nous irons essentielle-ment nous appuyer sur la législation de l'é-poque qui a donné forme aux nouvellesoptions, tout en utilisant aussi les indica-teurs spécifiques susceptibles de traduirel'évolution observée de façon objective.Nous ne pouvons toutefois pas oublier quela plus ou moins grande capacité de ripos-te de l'économie et de la société santomé-enne est intimement associée à la façondont s'est déroulée l'histoire économiquedu pays au cours des derniers siècles.

La capacité de riposte de la société auxchangements est largement liée à la rigiditésociale héritée de l'histoire. Celle-ci a abou-ti à la juxtaposition de groupes sociauxdont le fonctionnement se caractérisait parune économie de rente (orientée sur lamonoculture de cacao et café), une fortedépendance par rapport à l'extérieur, unefaiblesse de l'initiative individuelle et l'ab-sence d'un véritable projet social qui soitagglutinant.

En effet, pendant plus de cent ans, le systè-me de production et d'exportation du cacaoest resté le même pour l'essentiel. Pendantlongtemps il a eu recours à la main d'œuvrevenue de l'extérieur, tout d'abord esclave etensuite recrutée de force dans d'autres paysd'expression portugaise. Les grandes com-pagnies propriétaires des terres qui occu-paient près de 93% de tout le territoire dupays, outre leur manque d'intérêt pour d'au-

tres produits non destinés à l'exportation,firent le nécessaire pour dissuader de leurproduction et développement et concentrè-rent sur leurs territoires non seulement lessièges sociaux des compagnies, mais aussiles demeures des travailleurs et les équipe-ments sociaux, ce qui a mené les expertsqui ont étudié le cas santoméen de produc-tion de cacao à parler d'îles transformées en"usines rurales".

Par ailleurs, les graves faiblesses institu-tionnelles du pays découlent en grande par-tie de l'infime capacité structurelle de l'Etatà gérer les changements sociaux nécessai-res à la diversification des sources derichesse et de créations d'emploi.

Quoi qu'il en soit, le renforcement descapacités de gestion et d'initiative constitueun élément-clef des changements, qu'il s'a-gisse du secteur privé, dont la dynamisationconditionne le développement des opportu-nités de revenu directs et indirects, ou qu'ils'agisse du secteur public pour lequel doi-vent être créées les capacités nécessaires àl'exercice par l'Etat de sa fonction régulatri-ce et de sa mission d'orientation et suivistratégique.

Il faut aussi clarifier ici que l'on est passéd'une fonction totalitaire de départ, où l'Etatse chargeait de tout -produire, contrôler etréguler-, à la phase où nous nous trouvonsen ce moment, de construction d'une autreréalité où sont encouragées l'initiative indi-viduelle et la participation. Ceci se vérifienon seulement du point de vue politique,pour s'efforcer de consolider le processusdémocratique, mais aussi sous l'angle d'uneéconomie de marché ouverte à l'initiative et

CHAPTRE III

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Changements politiques et economiques

à la participation du citoyen. Il s'ensuit for-cément la redéfinition du rôle de l'Etat.

Dans cette optique, le travail ici présentétrace dans ses deux premiers chapitres l'é-volution de la situation politique, économi-que et sociale de la I et II République etdans les deux chapitres suivants, l'articula-tion entre cette évolution et le développe-ment humain.

Evolution de la PremiereRepublique

Evolution politiqueLes idéaux qui conduisirent à l'indépen-dance nationale en 1975 ont animé etdonné corps à une politique sociale extrê-mement volontariste qui a produit desfruits jusqu'au début des années 80. Ilsétaient soutenus, pour l'essentiel, par lesprix du cacao relativement élevés sur lemarché international, ainsi que par uneproduction interne satisfaisante. Le paysavait atteint alors une espérance de vie de67 ans et une mortalité infantile de 84pour mille nés-vivants. Dans le domainede l'éducation, les indicateurs s'amélio-raient sensiblement, tandis qu'on atteignaitun niveau d'alphabétisation de 94% pourles jeunes de 10 à 24 ans, ce qui plaçaitSTP bien au-dessus des autres pays afri-cains du sud du Sahara.

La première Constitution Politique de laRépublique établissait les organes de sou-veraineté -le Président de la République,l'Assemblée Nationale Populaire, leGouvernement et les Tribunaux-- mais enfait il n'y avait pas de séparation de pou-voirs. En effet les membres du BureauPolitique du MLSTP (Mouvement deLibération de São Tomé e Príncipe) fai-saient partie de l'Assemblée Nationale et duGouvernement, ainsi que les dirigeants desorganisations de masses, notamment ceuxde la Jeunesse et des Femmes.

Il était dans la logique du pouvoir de l'épo-que qu'une même personne occupe simul-tanément des fonctions dans différentsorganes de souveraineté. Le Gouvernementn'était pas issu de la victoire au terme d'unprocessus électoral et ses membres étaientnommés et démis selon le libre arbitre duPrésident de la République, même s'il y

avait un Premier Ministre. Le Président dela République était élu par l'AssembléeNationale Populaire, sur proposition duMLSTP et il était en même temps présidentdu parti au pouvoir et chef duGouvernement. Le Premier Ministre étaitun simple coordinateur de l'action gouver-nementale, sous les ordres du Président dela République. C'est seulement en 1987,dans le cadre de la libéralisation politiqueet économique en cours, que fut procédé àun amendement de la Constitution politi-que créant la charge de Premier Ministrequi devenait Chef de Gouvernement.

En Décembre 1989, lors de la phase finalede la "guerre froide", le régime de parti uni-que organisa une conférence nationale àlaquelle furent invités des Santoméens detendances politiques diverses. Les princi-paux problèmes politiques furent identi-fiés, et on arriva à la conclusion que le régi-me devait se démocratiser. Une nouvellerévision de la Constitution fut annoncée etelle finit par être approuvée parl'Assemblée Nationale Populaire en mars1990 et ratifiée par Référendum Populaireen août de la même année.

Politique d'Implication duCitoyen

La crise économique qui débuta en 1981alla en s'accentuant peu à peu et elle s'ag-grava singulièrement avec la sécheresse de1982 et 83. La baisse prononcée des recet-tes empêchait le Gouvernement de réunirles moyens pour importer, régulièrement etdans les délais, les denrées de premièrenécessité, alors que, au plan interne, onassistait à une très forte baisse de la pro-duction alimentaire d'origine locale suite àla sécheresse. La profonde crise économi-que et sociale s'accompagna alors d'unecrise politique, due au réveil des conscien-ces des citoyens, surtout au sein de lasociété civile et du secteur privé national.

Les mauvais résultats de la politique éco-nomique adoptée jusque là contraignirentalors le Gouvernement à doter les institu-tions publiques d'une plus forte capacitéd'organisation et de gestion et cela aboutit àun Programme d'Ajustement Structurel(PAS) adopté en 1987.

Après une longue période de gestion quasi

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exclusive par l'Etat de l'économie nationa-le, le Décret-loi N° 32/87 du 31 décembre,sort dans un contexte marqué par le déma-rrage du PAS et par les premières tentativesde libéralisation économique et, un peuplus tard, d'ouverture politique. Le décreten question "préconise la prise de distancede la part de l'Etat par rapport à la sphèreéconomique, de façon à assurer la réhabili-tation des structures de production et deservices et l'établissement de mécanismesd'encadrement susceptibles d'impliquer etresponsabiliser le plus grand nombre possi-ble de citoyens dans l'exploitation des res-sources et des résultats de leur travail".

Il définit également les modalités dedésengagement de l'Etat de la gestion desunités productives, en soulignant qu'ellesdevaient prendre effet après cession desentreprises, ou d'une entreprise, aux cito-yens pour exploitation et usufruit collectifou individuel. Cette exploitation devaitêtre régie par contrat entre le(s) citoyen(s)et l'Etat, à travers un organisme de tutelle,avec le consentement du Ministère desFinances.

Evolution économiqueLa période post-indépendance a été mar-quée par un grand défi. Il consistait àaccorder une grande attention aux profondsproblèmes structurels qui rendaient l'effortde développement très difficile, notammentl'extrême faiblesse des institutions et lesgrands déséquilibres économiques. Commecela ne s'est pas réalisé, le secteur productifa stagné. Au moment de l'indépendance, lecorps technique et les cadres de l'adminis-tration portugaise avaient abandonné lepays en laissant une capacité administrativefragile, un secteur privé structuré inexis-tant, au niveau national ou étranger, et unensemble d'unités agricoles en déclindepuis plusieurs décennies.

On peut dire que la stratégie de développe-ment adoptée en cette circonstance com-prenait deux phases bien distinctes. Unepremière phase qui démarra juste aprèsl'Indépendance et pendant laquelle l'ambi-tion de diversification de l'économie et l'i-nexistence de dette externe ont conduit àcontracter de gros crédits commerciaux dela part de l'Etat, à un rythme insoutenablepour l'économie.

Les investissements furent réalisés dansdes secteurs où le pays n'avait aucun avan-tage comparatif et ils ne produisirent pasles résultats espérés, tandis que les arriérésde la dette contractée allaient en s'accumu-lant. La situation s'aggrava sensiblementpar la chute brusque des prix du cacao surle marché international au début des anné-es 80, à laquelle vint s'associer une baissegénéralisée de la production et de la pro-ductivité. La production de cacao qui cons-tituait le pilier principal de l'économietomba de 10 000 tonnes en 1975, à 3.900tonnes à la moitié des années 80. Face à lapénurie de recettes, le Gouvernement adop-ta une politique expansionniste de créditvisant à couvrir les déficits des entreprisespubliques d'Etat.

L'inflation partit en flèche, avec un taux dechange nominal fixe, un taux de changeréel apprécié par rapport au dollar, des prixréels au producteur aussi, et la compétitivi-té diminua, aggravant du même coup lasituation de la balance des paiements. Lecadre pour la grave crise économique quiallait marquer toute cette décennie étaitdressé.

La seconde phase de l'effort de développe-ment compte avec l'appui financier de lacommunauté internationale, sous forme decrédits concessionnels et de donations quise matérialisèrent, essentiellement, à partirde 1985. Cette année là, une ligne de cré-dit multisectoriel de la Banque Mondialefut approuvée, elle couvrait les secteurscomme l'agriculture, l'énergie et les infras-tructures, et prétendait apporter une solu-tion aux problèmes auxquels le pays étaitconfronté.

En 1987, il devint clair pour leGouvernement que les politiques économi-ques suivies depuis l'Indépendance ne don-naient pas satisfaction. Le PIB per capitachuta sensiblement des niveaux de ladécennie antérieure, il y avait une énormedette externe et de graves déséquilibres descomptes externes. Le ratio de la detteexterne passa de moins de 1% en 1975 àprès de 100% en 1987. Les recettes d'ex-portation n'avaient augmenté que de 43%durant ce même laps de temps et, en 1987,elles couvraient à peine 35% des coûts del'importation. La différence était financée

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par l'aide externe et l'accumulation d'arrié-rés. C'est dans ce contexte que le Gouver-nement décida d'appliquer un Programmed'Ajustement Structurel (PAS), alors que lepremier Crédit d'Ajustement Structurel del'IDA avait été approuvé en Mai 1987 etqu'il était également soutenu par les appuisà la balance des paiements concédés par laBanque Africaine de Développement (BAD)et par la Suède, outre l'assistance techniquedu Fonds Monétaire International (FMI).

Pendant la période qui va de mi-1987 à mi-1990, le Gouvernement fait de gros effortspour stabiliser l'économie. Il y eut alors unemeilleure discipline fiscale complétée parune politique monétaire prudente qui con-duisit à la réduction de l'inflation. Unepolitique de change plus réaliste fut égale-ment menée et la dépréciation de la dobraen termes réels approcha les 75%.

Parallèlement, le Gouvernement se mit àlibéraliser le commerce et les prix, en cas-sant le monopole des entreprises d'Etat decommerce et en démantelant le système decontrôle des prix. Les subventions auxbiens alimentaires importés furent éliminé-es. Toutefois, les tarifs de l'eau, de l'élec-tricité et du transport ne furent pas ajustésavec la fréquence nécessaire pour garantirla couverture des coûts opérationnels desentreprises respectives. La réforme desentreprises publiques démarra également,elle se traduisit par la liquidation, restructu-ration et privatisation de plusieurs entrepri-ses d'Etat commerciales et industrielles,ainsi que la réforme de l'administrationpublique qui prit le départ en 1988, avecl'appui du PNUD. La médiocrité des résul-tats atteints est en partie due à la mauvaiseconception du projet et à la faiblesse de sonassistance technique.

La conséquence des résultats positifs obte-nus fut que le FMI accorda le premier cré-dit d'ajustement, Facilité d'AjustementStructurel (SAF), approuvé en mai 1989 etcouvrant la période 1989-91. La chute desprix du cacao sur le marché internationalrendit impossible d'atteindre les objectifsprévus en 1989. Se basant sur cela, le FMIremit à plus tard les négociations pour obte-nir un second SAF pour 1990 et il opta pourl'exécution d'un programme-ombrelle avecle pays.

Selon les critères d'éligibilité de l'époque,deux conditions devaient absolument êtreremplies pour que le FMI reprenne le pro-gramme avec STP: assurer la viabilitéexterne de l'économie à moyen terme -i.e.pour 3 ans-- et donner des preuves d'unebonne et continuelle exécution des objec-tifs prévus.

Deux facteurs survinrent alors qui annu-laient complètement la possibilité dereprendre le programme avec le FMI en1991: le premier fut l'emprunt contracté entermes commerciaux, en 1988, pour l'ac-quisition de maisons pré-fabriquées italien-nes, d'une valeur de 13,8 millions de USDà rembourser à court terme, ce qui aggravasingulièrement la situation de la dette exter-ne du pays; et le second fut les dépensesincontrôlées et hors budget réalisées lorsdes élections législatives et pluripartites dejanvier 1991.

Evolution de la SecondeRepubliqueAvec l'approbation par référendum de lanouvelle Constitution Politique en 1990,une rupture est établie avec le système degouvernance en vigueur de 1975 à 1990,résultat de la révision constitutionnelleréalisée. C'est ainsi qu'il fut convenu d'ap-peler II République le nouveau cadre poli-tico-institutionnel créé conformément àl'application de la nouvelle Constitution.

Aux termes de cette nouvelle Constitution,la souveraineté de l'Etat santoméen appar-tient au peuple qui l'exerce à travers le suf-frage universel, égal, direct et secret. LeMLSTP, parti unique au pouvoir de 1975 à1990, ne l'est désormais plus et c'est le mul-tipartisme qui prend le pas.

Quant aux citoyens, la liberté de conscien-ce, de religion, de culte, de création inte-llectuelle, artistique et scientifique, la liber-té d'expression, d'information, de réunion,de manifestation et d'association leur estreconnue, ainsi que le droit à la vie, à l'in-tégrité personnelle, à l'identité et à l'intimi-té. A tous, l'égalité devant la loi en droits etdevoirs est reconnue, sans distinction d'ori-gine sociale, race, sexe, tendance politique,croyance religieuse ou conviction philoso-phique. De même il est établi que lafemme est l'égale de l'homme en droits et

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devoirs et la pleine participation dans la viepolitique, économique, sociale et culturellelui est garantie.

Quatre organes de souveraineté sont entéri-nés par la nouvelle Constitution, à savoir lePrésident de la République, l'AssembléeNationale, le Gouvernement et lesTribunaux.

Le Président de la République est élu, ausuffrage universel, direct et secret pour unmandat de cinq ans. Il est le Chef de l'Etatet le commandant suprême des ForcesArmées, représentant l'Etat, garantissantl'indépendance nationale et assurant lefonctionnement régulier des institutions.

L'Assemblée Nationale composée de 55députés est élue au suffrage universel,direct et secret, pour un mandat de quatreans et c'est le plus haut organe représentatifet législatif de l'Etat.

Le Gouvernement est politiquement res-ponsable devant le Président de laRépublique et l'Assemblée Nationale etc'est l'organe exécutif et administratif del'Etat auquel il incombe de conduire la poli-tique générale du pays.

Les Tribunaux sont des organes de souve-raineté avec compétence pour administrerla justice au nom du peuple, ils sont indé-pendants et ne doivent sujétion qu'aux lois.Les décisions des tribunaux sont obligatoi-res pour toutes les entités publiques et pri-vées et elles prévalent sur celles qui éma-nent de quelque autre autorité que ce soit.

La nouvelle Constitution ratifie le systèmesemi-présidentiel, défini par la coexistenced'un Gouvernement parlementaire et d'unChef d'Etat de type présidentiel.

Changements Politiques dansla Décennie de 90.

Caractérisation de la situationen 1990/91

Le Référendum populaire qui approuva lanouvelle Constitution en août 1990 futsuivi d'une effervescence politique et duréveil de la société civile qui s'organisapour intervenir de façon plus active et par-ticipative dans les actions tendant à définirl'avenir de la nation.

En 1990 encore, fut approuvé et publié unensemble de législation électorale et debase pour la garantie des droits et libertésfondamentales, ainsi que pour la mise enoeuvre de la démocratie représentative.Dans ce cadre, on trouve les Lois de Droitdu Suffrage et du Recensement Electoral,de la Nationalité, des Partis Politiques, duStatut des Titulaires de Charges Politiques,des Commissions Electorales et la LoiElectorale.

La loi du Suffrage et du RecensementElectoral fixe le caractère obligatoire durecensement pour tous les citoyens natio-naux majeurs de 18 ans qui ne sont pasfrappés d'incapacité électorale. Elle ditaussi que les entités du recensement doi-vent, indépendamment de la promotion desintéressés, inscrire dans les cahiers électo-raux tous les titulaires du droit de vote pasencore inscrits et dont elles ont connaissan-ce.

La Loi de la Nationalité définit les condi-tions d'attribution, acquisition, perte et ré-acquisition de la nationalité santoméenne.

La Loi des Partis Politiques définit commepartis politiques les associations qui con-courent, en liberté et égalité, à la formationet expression de la volonté politique dupeuple, dans les termes de la Constitutionet des lois de la République. Elle établitaussi la complète liberté de création de par-tis politiques en indiquant que la formationd'un quelconque parti politique ne dépendpas d'une autorisation. Elle impose quetous les partis aient un caractère et unedimension nationale et elle interdit les par-tis à caractère ou dimension régionale oulocale. Elle établit par ailleurs que seulspeuvent être sociétaires ou militants de par-tis politiques les citoyens santoméens deplus de 18 ans en pleine possession de leursdroits politiques.

Le Statut des Titulaires de ChargesPolitiques fixe le début, la prise de posses-sion, le terme du mandat et les pouvoirs, enplus des droits, devoirs, régales et immuni-tés des titulaires des charges politiques.Elle précise en outre que les titulaires decharges politiques sont le Président de laRépublique, les Députés et les Membres duGouvernement, et, dans des cas dûment

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précisés, les titulaires de hautes chargespubliques, étant considérés comme telsceux dont la nomination résulte de l'appli-cation du principe de la libre désignation,basée sur des raisons de confiance spécialeou responsabilité et, à ce titre, considéréspar la loi.

La Loi Electorale et des CommissionsElectorales établit que le Président de laRépublique et les Députés de l'AssembléeNationale sont désignés au terme de l'élec-tion basée sur le suffrage universel, égal,direct, secret et périodique des citoyens,dans les termes de la loi. Elle indique aussique le suffrage est un droit personnelinaliénable et que son exercice constitue undevoir civique. Elle détermine aussi que leprocessus électoral implique la liberté depropagande, l'égalité des candidatures etl'impartialité des entités publiques et privé-es. Pour assurer que liberté, égalité etimpartialité soient respectées, sont crééesles Commissions Electorales, nationale etdistrictales chargées d'organiser le proces-sus électoral. La Commission ElectoraleNationale exerce sa compétence par rap-port à tous les actes de recensement et d'é-lections pour les organes de souveraineté etde pouvoir local. Par ailleurs, elle indiqueque les Commissions Electorales de dis-trict, chacune dans l'aire de sa juridiction,fonctionneront sur les orientations de laCommission Electorale nationale et accom-pliront les fonctions déterminées par la loi.

C'est dans ce cadre complètement nouveauet contenant de profonds changements poli-tiques que surgirent divers partis politiques,parmi lesquels, le Parti de la ConvergenceDémocratique, Groupe de Réflexion(PCD/GR) qui gagnera les élections légis-latives de janvier 1991, alors que la légali-sation du MLSTP prenait une dimensionconstitutionnelle.

C'est ainsi qu'en 1991 apparaît une vérita-ble alternance politique avec la victoired'une nouvelle force politique aux électionslégislatives et un nouveau Président de laRépublique aux élections présidentielles demars de la même année.

Changements Politiquespendant la Décennie Très rapidement, les effets sociaux décou-

lant des premières mesures macro-écono-miques adoptées par le nouveauGouvernement réveillèrent le mécontente-ment de la population qui, habituée à l'am-biance de l'Etat Providence vécue lors de lapremière République, voyait s'effondrer lesespoirs créés par l'arrivée de l'ouverturepolitique.

On assista ainsi, tout au long de la décennieà la chute successive de Gouvernements,dont l'un après une motion de censureposée par sa propre base d'appui parlemen-taire (le MLSTP/PSD en Septembre 1996).

Cette instabilité se refléta dans le fait que lepays vit défiler sept Premiers Ministres toutau long de cette décennie, à une moyenned'un peu plus que un par an. Ce qui estnaturellement à l'origine des médiocresrésultats atteints tout au long de cettedécennie, tant au point de vue économiqueque par rapport aux indicateurs sociaux.

Le bilan de l'évolution de la situation poli-tique dans la décennie de 90 est cependantpositif, en comparaison avec les évène-ments survenus un peu partout dans le con-tinent où des conflits armés marquent defaçon tragique la situation de dégradationéconomique et sociale.

Malgré l'instabilité en question, la situationn'est jamais arrivée au point de manque decontrôle total, même si nous nous référonsà la tentative de coup militaire survenue le15 août 1995. D'ailleurs certains expertsont préféré le qualifier, au regard de sonallure, de "pronunciamento militaire du 15août".

Les élections législatives (Janvier 1991 et1994 et Novembre 1998) et les présidentie-lles (mars 1991, juin 1996 et juillet 2001)se sont toujours déroulées dans un climatde paix, où chaque citoyen a la possibilitéde s'exprimer librement et sans grande agi-tation. Des alternances significatives ont eulieu, tant au niveau de Gouvernement qu'àcelui de la Présidence de la République oùles élections ont mis récemment un nouve-au titulaire à ce poste.

Pourtant, le cadre des changements politi-ques n'est encore que balbutiant, à cause dela fragilité des institutions autant que de la

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non réalisation totale du processus régulierd'installation et fonctionnement des pou-voirs locaux: municipal et régional.

Système judiciaireLe premier Gouvernement de la IIRépublique fit publier un décret qui trans-férait les compétences de la Policed'Investigation Criminelle du Ministère dela Défense et de l'Ordre Interne auMinistère de la Justice; tandis que la loiorganique de la police allait être publiéeplus tard. Il s'agissait d'une démarcheimportante pour garantir le fait que lesTribunaux soient aptes à accomplir pleine-ment leurs compétences et pouvoirs consti-tutionnels, notamment administrer la justi-ce et assurer la défense des droits et intérêtsdes citoyens.

Dans le même cadre, la Loi de Base duSystème Judiciaire fut approuvée. Le nou-veau pouvoir législatif, en application de lanorme constitutionnelle, établit la sépara-tion de pouvoirs entre les organes de sou-veraineté ainsi que l'indépendance du pou-voir judiciaire. L'indépendance des tribu-naux et leur autonomie financière fut ainsientérinée. Par ailleurs, les catégories destribunaux seront définies, et ils seront hié-rarchisés aux fins de recours; le ConseilSupérieur Judiciaire qui est un organe d'au-to-gouvernement de la magistrature est lesuper-intendant de sa gestion et discipline.

Furent également approuvés la LoiOrganique du Ministère Public et lesStatuts des Magistrats, en sorte que leMinistère Public soit le titulaire de l'actionpénale et l'organe de l'Etat chargé, devantles tribunaux, de représenter l'Etat, défen-dre la légalité démocratique et promouvoirles intérêts placés par la loi sous sa charge.Est aussi entérinée, par la loi, l'autonomiedu Ministère Public par rapport aux autresorganes de pouvoir central et locaux, carac-térisée par son lien à des critères de légali-té et objectivité et par l'exclusive soumis-sion des magistrats et agents du MinistèrePublic aux directives, ordres et instructionsprévus par la loi.

Par le biais de cette législation qui moder-nise le système judiciaire, il est établi queles Magistrats Judiciaires ne peuvent pasêtre responsabilisés pour leurs décisions,

sauf dans les cas spécialement prévus par laloi, et que les effectifs ne peuvent pas êtretransférés, suspendus ou démis, sauf dansles cas prévus par la loi. Les magistraturesJudiciaire et du Ministère Public sont indé-pendantes l'une de l'autre et les Magistratsdu Ministère Public sont responsables ethiérarchiquement subordonnés.

Libertés et DroitsfondamentauxLa Constitution santoméenne considèreque la liberté d'expression et d'informationconstitue un des principes essentiels d'unesociété démocratique et une des conditionsde base pour son développement, ainsi quepour celui de tout être humain. De même,dans le cadre du droit de réunion et demanifestation il est dit que les citoyens ontle droit de se réunir, pacifiquement et sansarme, même dans des lieux ouverts aupublic. Le droit de manifestation est recon-nu à tous les citoyens, aux termes de la loi.

Les lois de la Presse et du Droit de Réunionet de Manifestation, approuvées et publiéesen 1993 viennent réglementer ces droits. Laloi de la Presse réaffirme l'attachement auxprincipes de la libre circulation de l'infor-mation et des idées et de l'indépendance dela communication sociale, au regard de sonimportance pour le développement de laculture et pour la libre formation d'opi-nions, dans des conditions qui permettentde sauvegarder le pluralisme et l'égalité dechances entre tous les groupes et partispolitiques démocratiques. En ce qui con-cerne le droit de réunion et manifestation,la loi fixe les limites immanentes à l'exerci-ce de ces droits fondamentaux , tout engarantissant leur exercice dans la vie réelle,en disciplinant la manière et l'usage et enprévenant les conflits.

La ratification constitutionnelle de méca-nismes d'économie de marché, ainsi que ladiversité de secteurs de propriété demoyens de production exige que se régu-lent les droits, libertés et devoirs des travai-lleurs au compte d'autrui. C'est ainsi quefurent approuvées et publiées en 1992 lesLois Syndicale, de la Grève et du RégimeJuridique, des Conditions Individuelles deTravail.

Il y est établi que tous les travailleurs ont

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Changements politiques et economiques

droit de grève. Le droit de grève est exer-cé aux termes de la loi, qui vise à sauve-garder les intérêts sociaux et professionnelsdes travailleurs ainsi que de l'économienationale. La grève y est définie comme lerefus collectif et concerté de la prestationde travail de la part des travailleurs aucompte d'autrui, en vue de la défense etpromotion d'intérêts professionnels com-muns. Il est dit qu'aucun travailleur ne peutsubir de préjudice pour motif d'adhésion ounon adhésion à une grève. Il est égalementfixé que les travailleurs sont obligés defournir, pendant la grève, les servicesnécessaires à la sécurité et à l'entretien deséquipements et installations, de sorte que, àla fin de la grève, l'activité puisse reprendredans des conditions normales.

Quant aux syndicats, il est établi que lestravailleurs ont le droit de constituer desassociations syndicales pour la défense deleurs droits et la protection de leurs intérêtssocioprofessionnels. La loi entérine aussil'indépendance des syndicats. Les associa-tions syndicales sont indépendantes del'Etat, des partis politiques et des institu-tions religieuses, et toute ingérence de cesderniers dans l'organisation et la directiondes syndicats est interdite, ainsi que leurfinancement réciproque.

Il est consacré par la Constitution que tousles travailleurs ont droit à la rétribution dutravail, en fonction de sa quantité, nature etqualité et en respectant le principe qui veutque à travail égal salaire égal, de sorte qu'u-ne existence digne leur soit assurée. Parrapport au travail des femmes, la loi garan-tit aux femmes l'égalité avec les hommes,en opportunités et traitement, dans l'accès àl'emploi et dans le travail lui-même.

Pouvoir Local et RégionalLa consécration institutionnelle du principed'autonomie du pouvoir local et de ladécentralisation de l'Administration publi-que, dans le cadre global de l'organisationdémocratique de l'Etat, impose que soitdonnée l'importance méritée aux aspectsinhérents à la définition des attributions desmunicipalités, à la compétence de leursorganes, au statut des élus locaux et ausystème de tutelle administrative.

C'est dans ce cadre que furent approuvées

et publiées les Lois Electorales des Organesdes Autarquias Locales, des FinancesLocales, du Cadre des MunicipalitésLocales, de l'Autarquia Spéciale désignéeRégion de Principe et les StatutsRémunératoires des Charges PolitiquesSpéciales et Régionales. Par leur biais, ilest défini que les municipalités sont éluesau suffrage des populations locales et qu'e-lles ont l'autonomie administrative, finan-cière et patrimoniale, qu'elles disposentrégulièrement de leur propre pouvoir, dansles limites de la Constitution, des lois et desrèglements émanant des autorités avec pou-voir tutélaire. La tutelle sur la gestionpatrimoniale et financière des municipali-tés est uniquement inspective et elle ne peutêtre exercée que selon les formes et les casprévus dans la loi, tandis que doivent tou-jours être sauvegardées la démocratie etl'autonomie des organes de pouvoir local.Le mandat des organes des municipalités etde la Région de Principe est de trois ans.

L'organisation des municipalités obéit auprincipe de la division de pouvoirs entre unorgane délibératif, l'Assemblée de District,responsable pour l'approbation des lignesessentielles de la politique municipale et unorgane exécutif qui conçoit et exécute lespolitiques, la Chambre de district. Dans lecas spécifique de la Région de Principe, lesorganes de pouvoir sont l'AssembléeRégionale et le Gouvernement Régional.

Les premières et uniques élections localesdu pays, districtales aussi bien que régiona-les, eurent lieu en décembre 1992 et juillet1995 respectivement. En ce moment-ci, lesmandats des organes des districts et de larégion sont largement dépassés.

Evolution de la SituationEconomique tout au long dela Décennie 90

Caractérisation de la Situationpendant l'Année 1991

Le nouveau Gouvernement installé enfévrier 1991, dans la foulée de la victoireélectorale du mois précédent, avait devantlui une tâche extrêmement difficile. D'unepart, réaliser des actions visant à changerla situation d'extrême misère et les diffi-cultés auxquelles la population était con-frontée, et, en même temps, entretenir et

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fournir un appui à l'adhésion populairepour s'assurer la victoire aux électionsprésidentielles deux mois plus tard, et,d'autre part, donner une réponse aussiurgente que possible au profond mécon-tentement de la communauté des bailleursde fonds qui s'exprimait essentiellement àtravers les représentants des institutionsde Bretton Woods suite au non-accomplis-sement survenu, particulièrement, pendantla deuxième moitié de l'année 1990.

Face à ce constat de non-accomplissementde l'année 1991, la riposte consistait à don-ner des signes non équivoques et urgentsindiquant la volonté politique de remettre lePAS sur les rails. Le dilemme était alors deconcilier des mesures dures et même dra-coniennes pour une population qui était entrain d'en subir justement les effets, sansque les résultats en soient palpables etmême sans y croire et, d'autre part, sollici-ter à cette même population qu'elle votepour le Changement aux élections prési-dentielles deux mois plus tard. L'issue con-sista à prolonger les négociations et à n'as-sumer les engagements que pour la fin dupremier trimestre, c'est à dire, aussitôt aprèsles élections présidentielles.

En effet, l'inflation s'accéléra et le taux dechange qui s'était apprécié de 22% pendantl'année 1990 s'apprécia à nouveau de 15%pendant les 6 premiers mois de 1991. Enmai 1991, la Dobra fut dévalorisée de 21%et les prix du combustible furent ajustés defaçon telle que l'effet de la dévalorisation setransmette aux consommateurs. Mais mal-heureusement, ces mesures furent considé-rées comme faibles et de peu d'effet ; desmesures plus dures et plus convaincantesétaient nécessaires.

En août 91, le nouveau Gouvernement pritdes mesures plus fortes en vue de la stabili-sation de l'économie et de la relance desréformes structurelles les plus importantes.La dobra fut dévaluée encore une fois, de38%, pour retomber au niveau du changede fin 1989. En outre, le gouvernementadopta le "crawling peg", la dévaluationflottante pour la gestion du change et lamise au point d'une réponse mieux rythméesur la montée de l'inflation. Parallèlement,des mesures restrictives en politique fiscaleet monétaire furent adoptées. Les tarifs d'é-

lectricité furent augmentés de près de 50%,tandis que les taux d'intérêt furent aussisérieusement relevés pour devenir réels etpositifs en fonction de l'inflation.

Quant aux réformes structurelles, la législa-tion sur la distribution des terres fut publiéeet le départ fut donné pour une profonderéforme fiscale qui transformait toutes lestaxes spécifiques en taxes "ad valorem", lesbases furent aussi posées pour mener uneprofonde réforme du système financierdont la législation fut publiée l'année sui-vante. Dans le domaine commercial, lesmesures sur les marges de bénéfice quilimitaient encore la commercialisation detrois produits -haricots, riz et huile alimen-taire- furent abolies. Comme on pouvait s'yattendre, l'ensemble de ces mesures et leurdureté eurent un effet politique dévastateursur le Gouvernement récemment installé etcette situation s'aggrava sérieusement suiteaux divergences de vue entre leGouvernement et le Président de laRépublique sur l'urgence des mesuresadoptées par le Gouvernement.

Et était ainsi créée l'ambiance de relationsdifficiles qui allait marquer la cohabitationentre le Président de la République et lepremier Gouvernement de la IIRépublique.

Ces différences de vues notoires entre leGouvernement et le Président de laRépublique sur l'urgence, la profondeur etl'extension des réformes et des mesures d'a-justement provoquèrent la démission desGouvernements du PCD-GR.

Evolution de la Situationpendant la Décennie

Evolution du PIBSi nous évaluons la performance de l'éco-nomie santoméenne, nous sommes forcésde conclure que les résultats sont trèsmédiocres. En effet, au cours des dix pre-mières années qui suivirent l'indépendan-ce, le PIB réel par habitant diminua deprès de 30%. Entre 1986 et 1997, il aug-menta en termes réels de 1,2% à peine,annuellement, mais c'était encore unevaleur très inférieure au taux de croissan-ce annuelle de la population (+2,6%). Ilconvient de signaler que c'est seulementau cours de ces cinq dernières années

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Changements politiques et economiques

qu'on a noté une relative amélioration,chiffrée à: 2% en 1995, 1,5% en 1996,1,0% en 1997, 2,5% en 1998 et 2,5% en1999. Malgré tout, face au contrôle del'inflation qui est restée à un chiffre, lerythme de croissance du PIBB réel, à par-tir de cette année là, a dépassé le rythmede croissance de la population et il s'estsitué entre 3,5% et 4% en 2001. Cetteaugmentation n'est pas due à l'agriculture.A cause de sa faible productivité, sa parti-cipation au PIB, n'a pas cessé de diminuerau cours de ces dernières années, bieenqu'étant la principale source d'emplois dupays. En 1994, sa participation dans lePIB, dominée par le cacao, représentait25,5% et elle était tombée à 20,7% cinqans après. Cette tendance s'est maintenue,surtout avec la chute de la production decacao qui est descendue aux environs de2900 tonnes en 2000. C'est la preuvee quele rythme de croissance de la richesse peutne pas être proportionnel au processus deréduction de la pauvreté qui, elle, se con-centre surtout dans les zones rurales.

Quant au secteur secondaire où la construc-tion a une participation prépondérante(68%), son comportement a aussi été à labaisse. Il avait en 1994 une participation de20,1% et il descendait à 17% en 1999.Devant cette situation, le secteur tertiaireest venu jouer un rôle marquant dans laformation du PIB du pays. En 1994 déjà,sa participation représentait 55,4% et ellearrivait à 58% en 2000. Dans ce secteur,l'Administration Publique est en tête et, de1996 à 2000, elle a eu une participationmoyenne annuelle de l'ordre de 38%.

Encore que marginaux, les autres secteursde service, où se détache le tourisme, ont euun rythme de croissance qu'il importe desouligner. En 1994, ils représentaient 5,9%du PIB et ils ont rpris leur croissance jus-qu'à 7% en 2000.

En conclusion, l'agriculture, en qualité deprincipale source de revenus du pays etmalgré les gros investissements faits dansle cacao (US$ 50 millions) comme signaléplus haut, l'agriculture donc a diminué pro-gressivement sa participation au PIB. Celasignifie que le pays doit trouver avecurgence des alternatives au cacao. Toutsemble indiquer qu'en plus du pétrole qui

changera certainement la physionomie dupays, les alternatives fondamentales sontdans la production de biens alimentaires -pour modifier le cadre des importations dupays--, et le tourisme dont le potentiel n'estpas encore exploité.

Investissements PublicsLes investissements publics constituent,depuis l'Indépendance, un des principauxmoteurs de la croissance. De 1990 à 2001,les dépenses d'investissement publiceffectivement réalisées ont oscillé entre 17et 24 millions de US$, avec une moyennede 20,5 millions de US$ par an. En 2001,pour une prévision de dépenses de 40,70millions de USD, seulement 20,22millions de USD ont été effectués. Il fautrelever l'extrême dépendance du PIB parrapport à l'extérieur. Tout au long de cettedécennie, la situation s'est aggravée nota-blement à cet égard, puisque cette dépen-dance se montait à 84% en 1990 et qu'ellepassait à 95% en 1999. En 2000, le pour-centage de financement externe exécuté aété de 93,5%. Malgré tout, en 2001 etgrâce à la contribution des Fonds HHIPC,la participation interne dans le finance-ment du PIP a été dee 2,4 millions deUSD, ce qui correspond à 11,9% de l'in-vestisseement réalisé. Cela met, en outre,clairement en évidence l'importance desFonds de l'initiative HIPC.

Finances PubliquesPar rapport aux finances publiques, lebilan de la décennie n'est guère meilleur.Après une petite embellie entre 1991 et1993, avec l'entretien d'un solde courantpositif du Budget Général de l'Etat, onobserve une nouvelle détérioration desfinances publiques en 1994, avec un soldedéficitaire de près de 29% du PIB. Aprèsun notable effort de stabilisation, avec desrésultats positifs en 1995, on observe uneautre dégradation en 1996 et 1997, avecdes soldes primaires négatifs, de -4,7% et-0,7% respectivement. La situation achangé depuis 1998, et on doit signalerdes soldes primaires excédentaires de+0,7% du PIB pour cette année là et de+1,3% pour 1999 et de 2,1% du PIB en2001. Mais, à partir du second trimestre2001, à cause surtout de l'instabilité insti-tutionnelle surgie du lancement du proces-sus électoral, d'importants dérapages ont

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Changements politiques et economiques

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eu lieu et ils furent à l'origine du non-accomplissement des objectifs budgétai-res. Ainsi, d'un solde primaire de 2,7% duPIB prévu, on est passé à un déficit de -9,9% du PIB. Voilà pourquoi on peut con-clure en affirmant que STP a un compor-tement oscillant en matière de rigueurdans l'exécution des dépenses publiques.

Balance des paiementsPour ce qui a trait à la balance des paie-ments, son extrême et chronique dépen-dance par rapport aux aides externes estbien connue. La balance commerciale,qui est structurellement déficitaire etdépendante de pratiquement un seul etunique produit d'exportation, a vu sa situa-tion s'aggraver avec la chute des prix surle marché international. La relative embe-llie des prix à partir de 1993 n'a pas eu uneincidence notable sur l'augmentation de lavaleur des exportations qui ont tournéentre 4 et 5 millions de USD. Les expor-tations ont atteint 6,4 millions de US$ en1998 et elles ont augmenté de 10%(d'US$) en 1999. A partir de 2000, on aassisté à une certaine amélioration pouratteindre 17,7 millions de UUSD en 2001,avec le secteur des services qui se détacheavec une participation de 77%. Quant auximportations, elles ont évolué de 28 à 32millions de US$ entre 1991 et 1995.

Il faut signaler une réduction au cours desdernières années, bien que les statistiquesdisponibles ne soient pas toujours très fia-bles. En 1998, les importations se mon-taient à 18 millions de US$ et elles ont aug-menté de 32% en 1999 et elles atteignaientla valeur de 43,4 millions de USD en 2001,dont 46% pour les services non factoriels..De 1991 à 1996, les produits alimentairesreprésentaient 20 à 25% du total des impor-tations, alors que les produits pétroliers sesituaient dans une fourchette de 7 à 15%.La faible couverture de la balance commer-ciale, le peu de poids des recettes provenantdu tourisme et des virements des émigrantssantoméens de l'extérieur, ainsi que lescoûts élevés des transports des produitsdestinés à STP constituent des facteurs depression sur la balance des transactionscourantes.

Cette dernière s'est ainsi détériorés (sauf lesvirements sans contrepartie) tout au long

des ans, passant de -23 millions de US$,soit 37,3% du PIB en 1986, à -37,3 millionsde US$, soit -53,8% du PIB en 2001, pour64,1% du PIB. On constate que ces ratiosdépassent de beaucoup les valeurs norma-lement admises.

Problème de la DetteComme indiqué antérieurement et suite auxemprunts contractés pour financer lesinvestissements publics -lourds et de renta-bilité douteuse- la dette externe du pays afortement augmenté au long des années 80.Elle a même doublé entre 1984 et 1989pour atteindre à ce moment-là les 136millions de US$.

Pendant la décennie des 90, la dette conti-nua à augmenter, particulièrement à causede l'accumulation des arriérés et desemprunts concessionnels atteignant, en fin1999, la valeur totale de 289,3 millions deUS$. La valeur actuelle de la dette est égaleà quatre fois le PIB et plus de quarante foisle montant des exportations annuelles dupays. Le service de la dette externe quant àlui correspond à plus de 60% des recettesannuelles d'exportation et il pèse lourd dansle Budget Général de l'Etat; pour l'exercice2001 il était égal à près de 31% des recettescourantes.

La structure de la dette externe santoméenneest dominée par la part multilatérale (57%)dont les principaux créditeurs sont: la BAD(30%) et la Banque Mondiale (23%), alorsque la dette bilatérale atteint les 47%.

En mai 2000, le pays réussit à obtenir descréditeurs bilatéraux réunis dans le Club deParis un important allègement du servicede la dette échue entre mai 2000 et avril2003, pour 67% précisément. L'allègementobtenu se montait à 26 millions de US$,dont 20 correspondant à des arriérés. Dans

EntrepriseEntreprise d'Etat Bela Vista

Entreprise d'Etat Uba Budo

Entreprise Santa Margarida

Entreprise Monte Café

Total

Montant (US$)10.000,000,00

8,000,000,00

18,000,000,00

14,000,000,00

50,000,000,00

Source:Evaluationdel'Impact desProjets dePrivatisation(AGRO.GES/INFORMA)

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Changements politiques et economiques

le cadre multilatéral, le Gouvernement con-clut des négociations avec le FMI, fort de lastabilité macroéconomique et de l'accom-plissement du plan macro-économique, quiconduisit à la signature d'un Programme deRéduction de la Pauvreté et CroissanceEconomique au premier semestre 2000. Ceprogramme, prévu pour trois ans, devrapermettre à STP de remplir les conditionspour la renégociation de sa dette multilaté-rale dans le cadre de l'initiative HIPC.Mais, comme signalé antérieurement, faceaux dérapages dans la gestion des financespubliques, le programme en question a étésuspendu en 2001 et un programme deréférence a été adopté, qui vise à remettrede la rigueur dans le contrôle des dépensespubliques.

Réforme foncièreA la fin des années 80, tandis que les prixdu cacao atteignaient les prix les plus basdepuis 1975, la situation économique desentreprises devint assez difficile. L'Etat sevit dans l'obligation de reconsidérer lemodèle issu des nationalisations et deprendre progressivement ses distancesavec la gestion des 15 grandes propriétésde l'époque

De cette façon, l'Etat n'aurait plus à suppor-ter la lourde charge de paiement des salai-res et bénéficierait encore, au moins indi-rectement, des recettes issues des nouvellesentreprises qui, en devenant privées,allaient certainement appliquer des systè-mes plus efficients de gestion. Quelquesunes de ces 15 entreprises (les meilleures)bénéficieraient alors d'importants finance-ments destinés à leur récupération. Quatred'entre elles par le biais de contrats de ges-tion et deux avec des contrats de location.Ces contrats furent établis en prenantcomme base les plans de rénovation des

plantations qui étaient couverts par d'im-portants volumes de crédit externe.

Une fois de plus la solution mise en oeuvren'a pas permis de recueillir les fruits dési-rés. La très lourde structure des entrepriseset la continuité de la baisse du prix ducacao provoqua le désintérêt de la part desentreprises gestionnaires qui, dans leurquasi totalité, désistèrent des contrats degestion. Une fois encore, l'Etat " hérita "d'une partie de ses propriétés pour le moinset, naturellement, de leur gestion.

C'est ainsi que le 6 mai 1992, la RépubliqueDémocratique de S. Tomé e Principe etl'Association internationale de Dévelop-pement établirent un accord de crédit dedéveloppement pour financer le Program-me de Privatisation Agricole et Dévelop-pement des Petites Propriétés (PPADPP).La finalité de ce programme était première-ment d'augmenter et diversifier la produc-tion agricole par le biais de la privatisationdes plantations d'Etat et de la promotion dudéveloppement de la petite propriété.

Avec la privatisation, l'efficience de la pro-duction était censée augmenter, et les pertesfinancières des plantations devaient s'annu-ler; on trouverait des stimulations à ladiversification des produits alimentaires etautres productions du secteur privé et despetits propriétaires.

Les objectifs centraux du projet étaient: - Augmenter et diversifier la production

agricole dans le territoire- Alléger la pauvreté rurale- Améliorer la gestion des ressources natu-

relles

Les bénéfices prévus dans la formulationdes projets étaient:

Surfaces distribuées(au 30/6/2000)

Distribution prévue(à la fin du PPADPP)

Total du PPADPP

contenance(ha)

14.616

4.369

18.985

(%)

77%

23%

100%

(%)

23%

77%

100%

contenance(ha)

1.206

3.972

5.179

(%)

65%

35%

100%

contenance(ha)

15.822

8.342

24.163

Petits Agriculteurs

Moyens Agriculteurs

Total

Source: Cabinetde la Réforme

Foncière, Juillet2000

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Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

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- réduction du déficit du secteur étatiqueau moyen de la réduction de l'excès defonctionnaire;

- augmentation de la production alimentai-re nationale et réduction des importa-tions; (augmentation de 65% dans laproduction annuelle d'aliments)

- renversement du déclin continu desexportations (on attendait une augmen-tation de 60% des exportations à la findu projet)

- protection des ressources forestières etenvironnementales.

Les bénéficiaires se verraient accéder à laterre, ne plus être soumis à des salairesinsoutenables et monter dans l'échelon dustatut social.

Jusqu'à Juin 2000, le Cabinet de la RéformeFoncière (Gabinete de Reforma Fundiária- GRF) a pris action sur une superficiebrute de 41 682 hectares (41.681,87 exac-tement), dont 14.617,57 attribuées à despetites entreprises familiales et 4.369,2 ha àdes moyennes entreprises. Etaient inclusdans ces superficies la reconfirmation dessurfaces attribuées dans le cadre du proces-sus d'implication du citoyen.

Globalement, le PPADPP a distribué à cettedate 18.984,77 ha, chiffre très proche des20.000 ha prévues dans l'Accord de Crédit.

Selon les informations de l'Unité deGestion du Projet (UGP), en juin 2000, desterres avaient été distribuées à 6448 petitsagriculteurs, dont près d'un tiers ne rési-daient pas dans les communautés. En con-tenance, ce sont 14 616 ha qui ont été dis-tribuées aux petits agriculteurs. Jusqu'à lafin du programme, près de 1200 ha serontencore distribuées, correspondant à un peuplus de 400 foyers.

Le PPADPP couvrira ainsi une population deplus de 7000 familles (près de 35000 person-nes), soit près du quart de la population de S.Tomé e Principe et la moitié de la populationrurale. En termes de superficie, ces petitesparcelles attribuées représenteront plus de40% de la surface agricole du pays.

L'évolution de la conditionsocialeLe passage de salarié (travailleur agricole

ou pas) à agriculteur a introduit des modi-fications importantes dans le statut despersonnes concernées. Pour ceux quiétaient déjà travailleurs agricoles, et quiétaient donc déjà au courant des tâches àeffectuer et des savoirs-faire par rapportaux besoins des cultures, les nouvellesexigences étaient significatives:- Responsabilité pour la conduite de l'ex-

ploitation et la prise de décisions;- Nécessité d'améliorer les connaissances

sur le cycle des cultures;- Domaine des technologies de produc-

tion;- Notions de planification des activités

(travail, terres, cultures..)- Fin de recettes monétaires régulières et

"garanties";- Capacité financière pour investisse-

ments;- Changement des habitudes de travail.

Même au niveau de la société, c'est tout unsystème d'occupation et organisation duterritoire qui a été remis en cause et qui,encore aujourd'hui, 8 ans après le début duprocessus, n'a pas été normalisé.

En fait toute la structure de la société repo-

1994

76%

8%

6%9% 1%

Cacao

Banane

Taro

Banane plantain

Autres

1998

43%

36%

12%

5% 4%

Importance des diverses cultures pour le revenu de l’ exploitation

Source : Rodrigues, Paulo - GTZ, Jan99

0

20

40

60

80

100

Banana Cacau Matabala Café Milho Outros

Cultures plus intéressantes économiquement

19941998

Fonte : Rodrigues, Paulo - GTZ, Jan99

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42 Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

sait sur les "roças" (d'abord coloniales, puisensuite étatiques après l'Indépendance, et,après 1985, sous gestion privée pour certai-nes). Avec leur démembrement, un vide depouvoir local apparaît et il n'a été que par-tiellement comblé par les associations depetits agriculteurs.

Conditions de vieLa détérioration des infra-structures et desservices d'aide sociale est allée en s'accen-tuant au cours des ans. Cette situations'est en outre aggravée avec le processusde privatisation. La cause en est dans l'a-bandon de la part de l'Etat, qui laissa tom-ber ces infra-structures dans la mesure oùles moyennes et grandes entreprises cons-tituées ne s'intéressaient que rarement àleur entretien qui coûtait, il est vrai, trèscher. Le fait que les petits agriculteursétaient complètement démunis de la capa-cité financière permettant d'assumer cegenre de dépense est une autre cause decet état de choses.

Bien qu'avec une certaine lenteur, quelquesréparations ou remises en état furent effec-tuées, toujours sous la charge de ONGs oubailleurs de fonds internationaux externesau PPADPP. Il faut mentionner ici le PNA-PAF et le programme de Lutte Contre laPauvreté.

Les comparaisons des enquêtes faites en

1997 et 2000 permettent de mettre en évi-dence quelques améliorations des condi-tions de vie des populations rurales consul-tées, quoiqu'une partie de ces indicateursdoive être sans doute attribuée à l'évolutiondes revenus des agriculteurs.

Il faut aussi retenir que, dans le cadre duPPADP et de sa composante relogement,304 maisons furent construites pour juillet2000 (à l'origine il y en avait 400 de pré-vues) destinées aux familles habitant horsdes plantations.

Activités pratiquéesUne partie considérable des agriculteursont reçu des terres qui n'étaient plus culti-vées depuis longtemps et qui étaientretournées au stade de taillis. Cette situa-tion relève au départ de la pression sur laterre et a mené à la distribution de surfacesabandonnées par les roças nationaliséesqui n'avaient pas les moyens économiquesd'entretenir des terres non rentables.

Le programme d'appui au défrichementprévoyait l'"ouverture" de 200 ha, dont 140ont été réalisées à fin juin 2000.

Dans leur majorité, ces parcelles étaientplantées de cacaoyers, mais l'activité initia-le des agriculteurs se centrait sur l'introduc-tion de cultures alimentaires. Cette tendan-ce s'intensifia au cours du processus de pri-

Evolution de la Production de Cacao

0

5000

10000

15000

20000

25000

30000

1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999

année

Surface(ha)

0

1000

2000

3000

4000

5000

6000

produção(ton)

Surface

Production

Source: FAO

Début du PPADPP

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Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

43

vatisation et elle devint plus prononcéeavec la baisse du prix du cacao et les atta-ques du Rubrocintus.

L'importance du cacao dans le revenu desfamilles est ainsi allé en décroissant.

L'intérêt pour les nouvelles cultures estmanifeste dans le graphique suivant:Le café est même devenu la culture indus-trielle qui recueille le plus d'intérêt despetits agriculteurs ; la culture des arbresfruitiers et du piment est en train de lerejoindre depuis peu.

Accès aux marchés etcommercialisationL'augmentation de la production des cul-tures alimentaires a provoqué des symptô-mes de saturation des marchés, tant avecle taro (matabala) qu'avec les produitshorticoles et fruitiers (dont l'aspect saison-nier peut être considéré comme un handi-cap). Les productions sont directementapportées et vendues sur le marché ou parl'intermédiaire d'"opérateurs informels",les "palaies"20 qui les revendent sur lesmarchés locaux.

La transformation des excédents et larecherche de nouveaux marchés (exporta-tion) apparaissent comme les seules possi-bilités de renverser cette tendance, dans lamesure où la croissance du marché internene pourra pas accompagner la croissancede capacité de production. .

Même la production de cacao, destinée aux

grandes et moyennes entreprises de trans-formation a des problèmes, liés à la grandebaisse des prix sur le marché internationalet au peu d'intérêt des opérateurs privéspour aller acheter le cacao dans desendroits très reculés et d'accès difficile.

Montée de productivitéDans la formulation initiale, des augmen-tations significatives de la productionagricole à STP étaient prévues. Nousallons distinguer deux types de situation :- La production de cacao qui est restée

pratiquement au même niveau qu'avant- La production de cultures alimentaires

qui a eu une croissance notable.

La production de cacao a eu quelquesaugmentations initiales, au fur et à mesu-re que les parcelles étaient distribuées etgrâce à un surplus d'efficience dans lacueillette. Mais les années suivantes, defortes chutes se produisirent, à cause deplusieurs facteurs : application déficienteou même parfois absente de produitsphytosanitaires pour combattre le mil-diou et le Rubro-cintus, diminution del'ombrage (par abattage des arbres d'om-brage), prolifération d'autres cultures surla même parcelle de terrain, et enfin nive-au bas de replantation.

C'est ainsi que l'augmentation de productionde 1993/1994 est à imputer à une meilleureattention dans la cueillette (main d'œuvrefamiliale disponible) plutôt qu'à des inves-tissements fonciers ou des progrès dansl'application de produits phytosanitaires.

Evolution du Commerce Extérieur de São Tomé e Principe

0

2

4

6

8

10

12

1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998

anos

millions de USD

Prod. Agríc. Imp.

Prod. Agríc. Exp

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44 Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

En effet, durant la période suivante (1995 etsuivantes), les productions se mirent à bais-ser à cause du manque d'investissements etde soins aux cultures (par manque aussid'appuis des projets d'accompagnement -PNAPAF et LCP/DR (années 95/96) enphase de démarrage) associé à l'inexpé-rience en gestion et organisation de l'activi-té agricole des nouveaux détenteurs deterres agricoles.

En 1997/98, le taux de couverture en assis-tance et les appuis techniques étant enhausse, on a pu enregistrer une légère aug-mentation de la production, quoique encoreen deçà des volumes prévus.

Dans les cultures alimentaires, il n'y a quele maïs qui n'accuse pas de montée de pro-duction, alors que pour la banane et le taro,les hausses de production sont énormescomme illustré par le graphique ci-contre.

En fait, un des problèmes les plus fréquem-ment évoqués actuellement est celui de lacommercialisation des productions de cul-tures alimentaires des petites et moyennesentreprises. Ainsi, suite à l'augmentationgénéralisée de la production, son caractèresaisonnier (pour les produits horticoles sur-tout), les problèmes posés par leur conser-vation, et surtout la capacité d'achat et deconsommation très limitée au niveau inter-ne, apparaissent des excédents de produc-tion qui ne sont pas commercialisés et deschutes de prix notoires.

Impact sur le commerceexterneUn des effets les plus attendus du PPADPétait la croissance des exportations, tantdes cultures traditionnelles que des nouve-lles cultures alimentaires, et une réductionconséquente des importations de biens ali-mentaires.

Nous avons déjà vu que ni la production decacao n'a monté ni les quantités exportées.

Par ailleurs, dans les exportations de cultu-res oléagineuses et huiles, on n'a pas obser-vé de variations notoires tant que fonction-nait le PPADP. En termes d'importationsde cultures alimentaires, la grande dépen-dance vis à vis des céréales importées, riz etblé, continue à sévir, mais elles sont très

liées à la fourniture d'aide alimentaire parl'intermédiaire du PAM. Depuis 1990 l'im-portation des huiles alimentaires végétaless'est maintenue à des niveaux relativementplus bas que ceux observés dans les années80, mais on ne voit pas poindre de signe debaisse. Pour les produits animaux, on relè-ve l'énorme hausse des importations deporc après les épidémies de peste et la bais-se de viande bovine à partir de 1995.

Globalement, le PPADP n'a pas apportépour le moment de changements remarqua-bles au commerce extérieur de produitsagricoles de STP. Ce n'est que la dernièreannée de l'analyse, 1998, qui donne à voirune hausse claire des exportations qui, pourla première fois au cours de cette décennie,s'approchent de la valeur des importations.

Il est sûr et certain que les productions ali-mentaires sont en hausse, mais il a manquéde dynamique et de conditions pour per-mettre l'exportation de ces produits. En fait,l'exportation de produits horticoles et dematabala pour le Gabon a été signaléecomme très prometteuse. Mais les difficul-tés de transport et de logistique ainsi queles barrières douanières très élevées ontempêché que les volumes d'exportationsoient conséquents. Les quantités exporté-es l'ont été surtout de façon informelle etavec des opérateurs non patentés.

Si on savait profiter de ces potentialités(grandes différences de prix entre le Gabonet STP et manque de produits au Gabon), ilest probable qu'on pourrait ouvrir une voiequi permette la croissance substantielle desexportations de cultures alimentaires quidépasseraient ainsi les importations ali-mentaires à STP.

Bilan finalMalgré les aspects négatifs qui ont été sig-nalés, entre 1994 et 1998 ressort un bilanclairement positif, imputable aux petitsagriculteurs, tant sous l'aspect de la haus-se des revenus que sous celui de l'amélio-ration de l'alimentation.

S. Tomé a maintenant près de 6500 famillesbénéficiaires de la distribution de terres.Leur situation économique actuelle, quoi-que difficile, est bien meilleure que cellequ'ils avaient antérieurement comme

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45Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

employés d'entreprises non-viables et avecun salaire très bas. Bien qu'il ne soit paspossible de généraliser ni même de quanti-fier, les contacts pris montrent clairementdes différences dans le degré de satisfactiondes petits agriculteurs. Ces différences ontexactement à voir avec le succès de certai-nes mesures complémentaires appliquées,comme l'assistance technique, l'entretien decertaines mesures de caractère social, leurinsertion dans des associations de produc-teurs, le crédit, etc.

La composante d'échec a, à notre avis, cer-taines causes qu'il importe d'identifier:- Beaucoup de parcelles furent distribuées

en très mauvais état et la situation detotale décapitalisation des agriculteurs aempêché leur mise en culture;

- Les terres sont parfois très éloignées etavec un accès difficile;

- Le titre d'usufruit ne donne pas assezconfiance à l'agriculteur et il ne consti-tue pas un instrument juridique suffisantpour effets de garantie bancaire ouautres; l'objectif de nombreux travai-lleurs bénéficiaires était seulement de seconstituer une réserve de survie à terme.

- Dans certains cas, les bénéficiaires fontpreuve d'un manque de vocation oumême d'intérêt pour travailler les terresdistribuées;

- Certains bénéfices sociaux ont complète-ment disparu;

- La non-existence d'emplois complémen-taires oblige dans de nombreux cas àune option non agricole et est à l'originede l'abandon des terres distribuées.

Ces circonstances sont à l'origine d' aumoins une partie de l'abandon des nom-breuses parcelles de terre distribuées. Celaconstitue, sans aucun doute, un des aspectsnégatifs du projet et il n'est pas possible dequantifier la surface abandonnée ni le nom-bre de bénéficiaires qui n'exploitent pas lesterres qui leur furent distribuées. On esti-me cependant que ce nombre peut s'éleverà 15% du total des bénéficiaires et celaconstitue une préoccupation pour l'avenirde l'agriculture santoméenne.

Un second impact négatif découlant de lafaçon dont les petits agriculteurs ont reçules terres est l'abattage d'arbres qui a immé-diatement suivi la distribution de parcelles.

Cet impact va bien plus loin que les consé-quences pour la production de cacao desparcelles affectées.

Changements Politiques etEveloppement HumainL'ensemble des changements politiquesréalisés au cours de la décennie 90 a misen évidence la maturité du peuple santo-méen. Les chutes successives desGouvernements , la régularité de l'exerci-ce parlementaire malgré l'instabilité politi-que sous-jacente à la succession desGouvernements et au mécontentement dela population manifestée avec vivacité,n'ont perturbé en rien la réalisation desélections qui se sont toujours tenues dansun climat de paix. L'alternance politique aeu lieu sans aucun soubresaut.

Participation Politique desCitoyensEn participant politiquement, en faisantusage des libertés et droits que la constitu-tion lui confère, le citoyen fait, d'un côté,valoir ses droits individuels et de groupeet, de l'autre, il légitime le pouvoir démo-cratiquement constitué. La loi dit quevoter est un devoir civique du citoyen et ilrevient essentiellement aux partis politi-ques, en toute liberté et égalité, de con-courir pour la formation et l'expression dela volonté politique des populations.

Implication des Electeurs dansles Processus ElectorauxIl convient de noter que l'abstention qui tra-duit la volonté ou non de l'électeur de par-

Année

1991

1994

-

1998

-

Législatives

23,2

47,9

-

35,3

-

Présidentielles

40,0

-

1er Tour- 25,2

2ème Tour- 21,3

-

29,3

Année

1991

-

1996

-

2001

Niveau des Abstentions aux Elections (%)

Source: Calculs duConsultant, sur labase des résultatsélectoraux

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46 Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

ticiper aux élections est allée en augmen-tant, bien qu'avec de faibles oscillations. Quant aux élections districtales et régiona-le, elles se sont tenues respectivement en1992 et 1995, et les abstentions ont été de40,6% pour les districtales et de 41,1%pour la régionale. On peut conclure de l'ap-préciation globale de ces résultats que l'abs-tention va en augmentant, reflétant ainsi lepeu d'enthousiasme des électeurs pour lafaçon dont se déroule l'activité politiquedans le pays. On peut aussi dire que lesélections anticipées réalisées en 1994 nerecueillirent pas de grande adhésion.Quant aux présidentielles, elles ont connuégalement une diminution de la participa-tion populaire si l'on veut bien exclure les40% d'abstention des élections présidentie-lles de 1991, liée au fait qu'il y avait un seulcandidat.

Participation Civique desCitoyens

Activité Civique etProfessionnelle

La publication des législations relativesaux lois de la grève, de l'activité syndicaleet du régime juridique des travailleurs aucompte d'autrui a créé l'ambiance et l'en-vironnement requis pour que les citoyensen général et les travailleurs en particuliers'organisent afin de mieux défendre leursintérêts économiques et professionnels.On a vu ainsi, tout au long de la décennie,se multiplier les discussions et les reven-dications pour l'amélioration des condi-tions de vie et de travail, dans presque tousles secteurs d'activité. Cela a marqué leréveil de la société pour l'exercice de l'ac-tivité professionnelle et syndicale, com-plètement différemment de ce qui existaitantérieurement. Peu à peu, d'abord lesautorités, puis ensuite les organisationspatronales se mirent à reconnaître dans lessyndicats, regroupés en 2 grandes centra-les syndicales, l'Organisation Nationaledes Travailleurs de STP (ONTSTP) etl'Union Générale des Travailleurs de STP(UGT), des partenaires avec lesquels il estnécessaire de discuter et d'établir les basespour les actions futures et la réalisationdes questions pressantes et ponctuelles.De toute l'activité syndicale déployée, ilfaut détacher celle de deux professions,celle des infirmier(e)s et des enseig-nant(e)s, largement sinon majoritairement

formées, l'une et l'autre, par la populationféminine.

Organisation Professionnelleet Communautaire

Dans le domaine agricole et dans le cadrede la distribution des terres, aussi, la créa-tion d'organisations professionnelles s'estmultipliée, revêtant plutôt un aspect denature communautaire puisque associantdes petits agriculteurs et des éleveurshabitant dans le même espace physique.Ces associations se sont regroupées et ontensuite pris une dimension régionale pourassumer la forme d'une fédération natio-nale, la Fédération Nationale des PetitsAgriculteurs de STP (FENAPA). Cetteassociation représentative des petits agri-culteurs de toutes les régions du pays afini par être une structure issue des baseset avec une direction démocratiquementélue et mandatée pour parler et discuter aunom de ses associés. Son programmed'action est extrêmement ambitieux et ellecompte, dans son travail de développe-ment communautaire, avec la contributionde Zatona Adil, une ONG nationale spé-cialisée dans le développement commu-nautaire et l'appui technique et financierdu Projet National d'Appui aux PetitsAgriculteurs (PNAPAF).

Développement InstitutionnelSi on veut apprécier l'effet des change-ments introduits pour le développementhumain pendant la décennie, il faut analy-ser, au moins sommairement, l'administra-tion publique du pays. Dans le cadre desactions destinées à "Evaluer l'Enviro-nne-ment Institutionnel" menées à terme en1995 et poursuivies en 1998, on a pu rele-ver l'existence de quatre causes principa-les au faible développement institutionnelà STP. Les voici énumérées ci-dessousavec leur poids relatif :1. Manque de décision politique, avec

32,8%2. Carences en organisation et gestion,

évaluées à 26,2%3. Insuffisance de ressources humaines

qualifiées, avec environ un sixième dupoids total, soit 16,2%

4. Manque de ressources matérielles etfinancières avec seulement 10,8%

Ceci est d'autant plus important que l'on

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47Rapport National de Développement Humain - STP

Changements politiques et economiques

sait que, chargés d'un héritage aussi com-plexe et pesant, les efforts pour le change-ment sont déviés et amoindris par des for-

ces inhérentes au système lui même et desurcroît pas toujours faciles à identifier etdépasser.

20 NDT : A l'origine, marchandes de poisson qui s'approvisionnent directement chez le pêcheur etvendent au marché. Par extension, s'applique à toutes les femmes revendeuses installées aumarché.

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49Rapport National de Développement Humain - STP

L'IDH est une valeur variant de 0 à 1; aufur et à mesure qu'il se rapproche de 1, leniveau de développement humain se rap-proche de l'optimum.

Le concept de développement humain estmis en avant par le PNUD depuis la findes années 80. Ce concept définit le déve-loppement comme la genèse de capacitéspropices à l'éclosion du genre de vie queles gens valorisent le plus pour eux-mêmes. Il trouve son origine dans le désirde dépasser et discuter les visions de bien-être exclusivement associées à des dimen-sions matérielles et économiques21 . Cettenouvelle façon de voir propose une opti-que intégrale et multidimensionnelle pourcomprendre les problèmes de développe-ment tout en suggérant que le bien-êtredes personnes dépend de la création d'op-tions et opportunités dans divers aspectsde l'environnement humain. En outre, detels facteurs de développement humain serenforceraient et complèteraient mutuelle-ment.

Un des premiers soucis méthodologiquesdes chercheurs en ce domaine fut de créerune série d'outils qui permettent de suivreet d'évaluer les avancées des pays en ter-mes de développement humain. Cela a étéet continue à être l'un des principauxsujets de discussion lorsqu'il s'agit de ren-dre le concept opérationnel.

Traditionnellement, la mesure et l'évalua-tion du développement étaient réalisées àpartir d'indicateurs en rapport avec lacroissance économique et la hausse desrevenus des personnes. Bien que le con-cept de développement humain considère

la dimension économique comme trèsimportante pour évaluer le niveau de bien-être, il pose l'existence d'autres dimen-sions à considérer attentivement et qui enoutre reflètent plus directement le bien-être des personnes. On peut ainsi men-tionner des aspects tels que la longévité,l'accès aux connaissances ou les libertéspolitiques.

Donc, un indicateur de niveau de bien-être, considéré dans l'optique du dévelop-pement humain, devrait chercher à refléterle caractère multiple des facteurs qui l'ex-pliquent. En même temps, cet ou ces indi-cateurs devraient être assez simples pourpouvoir être appliqué dans divers contex-tes et pays. A cet effet, le PNUD a créé en1990 un indicateur formé d'agrégats,

Profil dudéveloppement humain et de la pauvrete àSao Tome e Príncipe

CHAPITRE IV

L'IDH cherche à évaluer certaines des dimensions les plus essentielleset mesurables du développement humain. Cet indicateur ne prétendpas épuiser toutes les dimensions qui font le développement. Il estbien connu que les nécessités des personnes sont multiples et changentdans le temps. Il existe cependant certaines conditions de base com-munes à toutes les sociétés et toutes les époques: (1) avoir une vie lon-gue et en bonne santé, (2) posséder les connaissances nécessairespour comprendre et être en relation avec le milieu social et (3) possé-der les revenus suffisants pour atteindre un niveau de vie décent. Cesont ces dimensions-ci qui se trouvent à la base des indicateurs spéci-fiques qui composent le IDH. Les indicateurs servant à mesurer les trois dimensions que l'IDH reflè-te sont les suivants:1. Longévité (Avoir une vie longue et saine): espérance de vie à lanaissance2. Niveau d'éducation (Avoir les connaissances nécessaires):Combinaison du taux d'alphabétisation des adultes (pondération dedeux tiers) et du taux brut d'inscription combinée en enseignement pri-maire, secondaire et tertiaire (pondération d'un tiers).3. Niveau de vie (Avoir des revenus suffisants): PIB réel per capita(PPA en dollars)

Encadré 1-.Indice deDéveloppementHumain

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50 Rapport National de Développement Humain - STP

Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

appelé Indice de Développement Humain,qui a été utilisé dans de multiples étudesau cours de la décennie passée et dont lalogique est décrite ci-dessous22 :

Il prétend être un regard synthétique surle développement humain. C'est la rai-son pour laquelle il résume des dimen-sions vitales en une seule valeur.

C'est un regard par rapport aux résultatsatteints par un pays, relatifs à l'accumu-lation de capacités et opportunités dontdisposent les personnes. L'IDH évaluedes capacités qui sont essentielles et quien se complétant et se renforçant peu-vent engendrer du développementhumain.Par construction, l'indice s'oriente surdes buts définis par rapport à une éche-lle idéale de développement humain.L'IDH montre combien on a avancé etcombien il reste à parcourir pour arriverà une situation optimale de bien-être.

L'indice cherche à refléter les caractéris-tiques structurelles et de long terme dudéveloppement, et il n'est pas aussi sen-sible à des situations ou des change-ments conjoncturels. L'indice capte leschangements structurels dans la créa-tion d'opportunités et capacités pour lespersonnes.Un profil de développement humaind'un pays tient alors l'indice de dévelop-pement humain (IDH) pour un de sesprincipaux outils. Toutefois, commesignalé ci-dessus, l'IDH n'approfonditpas la perspective de développementhumain et, donc, la compréhension desconditions de développement d'un paysrequiert l'analyse combinée de diffé-rents indicateurs dont beaucoup ne sontpas quantitatifs. C'est cette option quiest retenue pour ce travail-ci. Les questions auxquelles ce chapitre-citente de répondre à propos des niveauxde bien-être à S. Tomé e Príncipe sontles suivantes:Quels sont les niveaux de développe-ment humain du pays? Comment pou-rrait-on caractériser le développementhumain?

Comment ont évolué certaines variables-clef de développement humain durantces dernières années?

Du point de vue spécifique de la pauvre-té, quel est le profil de la situation de

São Tomé e Príncipe? ¿Comment lapauvreté a-t-elle évolué durant ces 20dernières années?

" ¿Y-a-t-il des différences entre lesdiverses régions du pays? Yen-a-t-il dansle niveau de développement entre leshommes et les femmes? Quelle est ladimension de ces différences?

Ces point seront développés dans les sec-tions suivantes: la partie 1 qui analyse lescaractéristiques du développementhumain de S. Tomé et sa comparaisonavec divers groupes de pays; la partie 2qui analyse l'évolution du développementhumain de S. Tomé dans certains élé-ments-clefs; la partie 3 qui approfondit lethème de développement humain et pau-vreté dans les différentes régions du payset entre hommes et femmes. Enfin quel-ques conclusions seront tirées.

Caracteristiques dudeloppement HumainD'une manière générale, São Tomé ePríncipe se trouve parmi les pays de nive-au de Développement Humain moyen. Entenant compte des nouvelles estimationsdes variables qui forment l'IDH, calculéespour ce rapport23 (Tableau 1), le paysoccuperait la position 109 dans le rankingélaboré par le PNUD 24 en 2001, amélio-rant ainsi de façon significative sa positiontraditionnelle. Il se situerai parmi despays comme le Guatemala, Honduras, leGabon et la Guinée Equatoriale. Il fauttout de même souligner qu'il continueraità faire partie des pays à la traîne du grou-pe de DH moyen.

Le Tableau 1 montre comment les princi-pales composantes de l'IDH sont sensible-ment supérieures à celles qui prévalent enmoyenne dans les pays de l'AfriqueSubsaharienne; en particulier en ce quiconcerne l'espérance de vie et le taux d'al-phabétisme. La différence en termesd'inscription combinée est moins mar-quée; en ce qui concerne le PIB, STP a unretard évident. L'IDH est cependant supé-rieur à la moyenne régionale.

On peut aussi noter que l'IDH est très au-dessus de la moyenne de l'Afrique subsa-harienne, il dépasse la moyenne de l'AsieMéridionale (Inde, Skri Lanka, etc.) et il

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Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

51Rapport National de Développement Humain - STP

se rapproche de la moyenne de régionscomme les pays arabes et mêmel'Amérique latine (Tableau 2)

Aux fins d'analyse, trois groupes de paysont été choisis pour les comparer avec SãoTomé: i) certains pays voisins (Cameroun,Guinée Equatoriale, Gabon et Républiquedu Congo), ii) un groupe de pays insulai-res africains (Cap-Vert, Comores,Maurice, Seychelles) et iii) un groupe depays insulaires avec une population simi-laire en Europe, Asie et surtout auxCaraïbes.

La conclusion qu'on peut tirer de cettecomparaison est que STP présente desniveaux de développement humain mei-lleurs que les pays africains voisins et quela moyenne de la région subsaharienned'Afrique, mais que, par rapport auxmoyennes des autres pays insulaires de larégion et du reste du monde, son IDH estsensiblement inférieur, et son retard parrapport aux pays insulaires des Caraïbesest notoire, alors que beaucoup de cespays ont des populations similaires ouplus petites. (Tableau 3).

En considérant les composantes de l'IDH(Tableaux 4, 5 et 6) nous constatons que:

Par rapport au groupe de pays de déve-loppement humain moyen, le plus grandretard du pays est en termes de PIB percapita. Ses niveaux de résultat éducatifsont similaires à cette moyenne et lesavancées en espérance de vie sont légè-rement inférieures à la moyenne. Cettetendance se précise dans la comparaisonavec l'Afrique subsaharienne, commesignalé plus haut: en tous les cas et avecla notable exception de la dimensionéconomique, STP a de meilleurs indica-teurs de développement humain que lecontinent.

Si nous comparons l'indice d'espérancede vie avec l'indice du PIB per capita dugroupe de pays analysés, nous voyonsqu'il existe un rapport entre une mei-lleure espérance de vie et de meilleursniveaux de revenus per capita (Tableau5). Cependant, il est manifeste que SãoTomé e Príncipe a de meilleurs résul-tats, au niveau de l'espérance de vie, quedes pays comme le Gabon, leCameroun, la Guinée Equatoriale, la

République du Congo ou les Comores ,bien que ses niveaux de revenus percapita soient similaires ou même infé-rieurs.Dans la comparaison entre l'indice derésultats en éducation et le niveau dePIB per capita, il est également aisé

Indice de Développement Humain 98-2000São Tomé África Subs.

Espérance de vie 64,7 48,9Alphabétisme (%) 83,1 58,5Taux d'Inscription Combinée (%) 57,7 42,0PIB per capita ($PPA) 1469 1607

0,47

0,57

0,69 0,71 0,74 0,74

0,9

0,2

0,4

0,6

0,8

1

Afrique Asie Méridionale Etats Arabes Asie Orientale EuropeOrientale/CEI

Amérique Latine Pays Développés

Valeur Supérieure de la Région Valeur inférieure de la Région Moyenne Régionale

SAO: 0,618

Tableau 2.Position de Sao Tomé en termes d'Indice deDéveloppement Humain

Tableau 1.Indice de Développement Humain 98-2000

Cuadro 3. Comparaison de l' IDH avec des groupes de pays

0.619

0.464

0.545

0.687

0.788

0.673

SAO TOME

Afrique subsaharienne

Pays africains voisins

Pays africains insulaires

Pays insulaires desCaraïbes

Pays à DéveloppementHumain Moyen

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1.95.90.85.80.75.70.65.60.55.50.45.40.35.30

Indi

ce e

sper

anza

de

vida

1.00

.95

.90

.85

.80

.75

.70

.65

.60

.55

.50

.45

.40

.35

.30

Maurice

Comores

Salomon Islands

VanuatuCape Verde

Samoa

Mald ives

St.LuciaSt. Vincent

Seych

Dominica Antigua-Barbados

Bahamas

MaltaIslandia

Rep. del CongoGuinea Ecuat.

Gabon

Camerun

SAO TOME

Indice PIB per capita

1.00.95.90.85.80.75.70.65.60.55.50.45.40.35.30

Indi

ce lo

gro

educ

ativ

o

1.00

.95

.90

.85

.80

.75

.70

.65

.60

.55

.50

Maurice

Comores

Salomon IslandsVanuatu

Cape VerdeSamoa

Mald ives

St.LuciaSt. Vincent

Seych

DominicaAntigua-Barbados

BahamasMalta

Islandia

Rep. del CongoGuinea Ecuat.

GabonCamerun

SAO TOME

52 Rapport National de Développement Humain - STP

Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

Indice deDesarrolloHumano

Indice deesperanza de

vida

Indice de logroeducativo

Indice de PIBper capital

SAO TOMEPaíses DH MedioAfrica Subsahariana

d'observer clairement un rapport positifentre ces deux variables (Tableau 6). Anouveau, bien qu'à un degré moindre, S.Tomé manifeste de plus fortes avancé-es dans cette dimension par rapport àd'autres pays disposant de PIBs percapita similaires ou supérieurs. A noter à ce sujet que le Gabon est uncas emblématique de cette tendancepuisqu'on note que le niveau élevé deson PIB découle dans une grande mesu-re de sa richesse en pétrole, mais quecela ne lui permettrait pas d'améliorerson niveau global de développementhumain. Ce comportement peut servirde référence à prendre à compte dansl'avenir de S. Tomé.

Evolution du DeveloppementHumain a Sao Tome(1981-2000)São Tome et Príncipe a remarquablementaugmenté les valeurs de certains indica-teurs sociaux qui composent l'IDH pen-dant ces 20 dernières années (1981-2000).En particulier, d'importantes diminutionsd'analphabétisme ont été obtenues, puis-qu'il est descendu de 43% en 1981 à moinsde 17% en 2000 (Tableau 8). Ces avancé-es dans la dimension éducative du déve-loppement humain sont confirmées par lahausse des niveaux de scolarité moyennede la population: en 1980, la populationâgée de plus de 25 ans avait une scolaritémoyenne de 2,3 ans et en 2000, cettevaleur est de 5,4, c'est à dire presque ledouble qu'au début des années 80. Demême, la couverture de services d'éduca-tion primaire s'est sensiblement améliorée(Tableau 7).

Bien qu'il y ait de bons résultats dans ledomaine de l'éducation, il faut relever quedes problèmes de qualité persistent en cequi concerne l'enseignement imparti. Auniveau de l'instruction secondaire, la fai-blesse est notoire et les options de forma-tion tertiaire et professionnelles sont qua-siment inexistantes. Ces déficiences sontreflétées par un niveau de taux de couver-ture combinée (primaire, secondaire et ter-tiaire) très en dessous des niveaux quedevrait avoir un pays avec des taux d'al-phabétisme et de scolarité moyennecomme STP. Cela constitue une grandebarrière pour les chances de développe-

Tableau 6.Indice deperformance enéducation par rapportà l'Indice du PIB percapita

Tableau 5.Indice d'espérance de viepar rapport à l'Indice duPIB per capita

Tableau 4.Comparaison decomposantesd'IDH

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Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

53Rapport National de Développement Humain - STP

ment dans le pays et de ses habitants.

Dans le domaine de la santé, dans le longterme, on peut percevoir une légère amé-lioration: l'espérance de vie a un peu aug-menté, ou tout au moins on ne note pas dedétérioration. Cependant, on est interpellépar le recul subi par cette variable dans lesannées 80 suivi d'une très lente remontéedans les années 90. Ceci doit sans douteêtre attribué à une certaine stagnation dansl'éradication de maladies comme la mala-ria. Malgré tout, l'espérance de vie de STPest supérieure à celle qui a cours dansd'autres pays d'Afrique, mais tout demême il est évident qu'on pourrait attein-dre, dans ce domaine, des avancées impor-tantes dans l'avenir.

A propos de la dimension économique dudéveloppement humain, on a déjà pu voirdans le chapitre 1 que l'économie de STPa subi plusieurs changements structurauxdepuis les années 80. Cela n'a pas permisd'accélérer la croissance de l'économie dupays; en outre, elle a continué à endurerdes conditions défavorables à son exercice(par exemple, la baisse des prix du cacao)et enfin de hauts niveaux de coopérationexterne se sont maintenus comme compo-sants importants de l'investissementpublic. En bref, l'économie de S. Tomé estencore hautement vulnérable et par consé-quent ses niveaux de croissance sont peusatisfaisants par rapport aux demandessociales de sa population.

Dans le Tableau 9, on peut apprécier lesniveaux modestes de croissance économi-que du pays pendant la période 86-98: iln'y a que peu d'années où le taux de crois-sance a dépassé 2% et cette valeur estencore insuffisante si on considère que letaux de croissance de la population sesitue aux alentours de 1,9%.

Il faut faire noter que le déphasage entrecertaines améliorations en éducation de lapopulation et l'absence de meilleuresopportunités économiques peut éventue-llement engendrer des niveaux de frustra-tion et de mécontentement susceptibles delimiter les chances de développement etde consolidation de la démocratie dans lepays. Le défi consiste alors à promouvoirune plus forte croissance économique

mettant à profit les meilleurs niveauxd'instruction en place et d'assurer unecorrélation plus étroite des efforts dans ledomaine social avec les progrès en écono-mie.

Disparite Et Pauvrete

Le panorama de développement humainde S. Tomé e Príncipe sera complété parune analyse des disparités et des niveauxde pauvreté existants dans le pays. Troisraisons président à ce choix. Une premiè-

Tableau 7. Scolarité moyenne à STP (chez lesplus de 25 ans)

2,3

5,36

1980

2000

64,662,15

64,7

57,4

73,2

83,1

50

55

60

65

70

75

80

85

1981 1991 1998

Esperanza de vida(años)

Tasa de alfabetismo(%)

0,0%

0,5%

1,0%

1,5%

2,0%

2,5%

3,0%

3,5%

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

2000

Tableau 8.Evolution des indicateursde développement humain81-98

Tableau 9.Croissance du PIB1986-1998

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54 Rapport National de Développement Humain - STP

Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

re justification est d'ordre conceptuel sitant est que la préoccupation à propos descitoyens les plus défavorisés devraienttoujours être au centre du développementhumain. Par ailleurs, il est évident qu'ilexiste d'importantes différences de nive-aux de développement entre les différen-tes régions et les groupes sociaux du pays.En fait, les inégalités sociales expliquenten grande partie les conditions de pauvre-té et d'exclusion sociale de groupes impor-

tricts qui le composent (Lemba, Lobata,Agua Grande, Mé Zochi, Cantagalo, Cauêet Príncipe), et par genre . Nous décrironsci-dessous les caractéristiques et tendan-ces les plus importantes de la pauvreté etde l'inégalité à STP dans leurs différentesdimensions:

Carences et disparités non monétairesNous explorerons ici les inégalités exis-tant dans les dimensions de l'éducation, dela santé et de l'accès aux services de base.

On peut observer dans le tableau 10 que laRégion Centre a les meilleurs indicateursde performance dans l'éducation. En par-ticulier, le district d'Agua Grande, le plusurbanisé et peuplé du pays, a relativementles meilleurs indicateurs d'éducation dupays. A l'autre extrême se trouvent lesrégions Nord et Sud qui affichent des indi-cateurs systématiquement inférieurs à lamoyenne nationale, surtout les districts deLemba, Cauê et Cantagalo. Ces districtslà ont un caractère fortement rural, avecune grande partie de leur population occu-pée à des activités agricoles, jadis spécia-lisés en culture de cacao, et avec des diffi-cultés notoires d'accès par route à leurterritoire. L'île de Príncipe prend uneplace intermédiaire.

En termes d'inégalité, la différence entrele district le plus avancé et le plus reculéest importante: 88% d'alphabétisme contre69% (19% de différence) ou 5,9 années descolarité contre 4,3 à l'autre extrême(presque 2 ans de différence).

Du point de vue des différences de genre,un handicap systématique affecte défavo-rablement les femmes dans les trois indi-cateurs d'éducation analysés. La brèchedans l'alphabétisme est très profonde(91% contre 75%), et un peu moins dansla scolarité (5,7 années contre 4,9 demoyenne). Ces différences sont très sem-blables à celles existant entre la région laplus défavorisée avec la plus avancée(Tableau 10).

En termes régionaux, la brèche entre gen-res s'élargit dans les zones qui ont unmoindre développement relatif de l'éduca-tion, c'est à dire que c'est au Nord et auSud que les différences entre hommes et

Encadré 2Pauvreté selon la

perspective du développement humain

tants de population. Enfin, dans le casspécifique de São Tomé e Príncipe, il esttrès difficile de faire abstraction des pro-blèmes d'exclusion et de pauvreté dansune société où plus de 50% des citoyensn'ont pas les revenus minimums poursatisfaire leurs nécessités de base, en neprenant qu'un seul indicateur de carence.Situation qui nous suggère que quelquestratégie de victoire sur la pauvreté que cesoit devrait forcément s'inscrire dans unplan plus intégral de développementhumain et vice-versa25 .

Dans cette étude-ci, nous adopterons essen-tiellement la philosophie de focalisation surla pauvreté en capacités (voir encadré2), etpartirons de la nécessité d'une analyse inté-grée de la pauvreté et d'un effort pourexplorer les interactions entre différentstypes de carences. Pour réaliser cetteanalyse, nous allons recourir à plusieursindicateurs de privation, à caractère tantmonétaire que non monétaire.

En fonction de la disponibilité d'informa-tion, l'analyse des indicateurs sera réaliséepour les quatre régions du pays (Nord,Centre, Sud et Príncipe), pour les 7 dis-

Notre point de vue pour évaluer la pauvreté est celui défini parAmartya Sen sous le nom de pauvreté en capacités. Elle se définit parla carence ou la privation de capacités et libertés qui permettent auxpersonnes de se développer selon leurs valeurs. En ce sens, la pau-vreté en capacités se réfère essentiellement à l'absence ou à la diffi-culté d'accès des personnes à un ensemble de capacités (actifs, dota-tions ou talents particuliers), qui, en outre, sont souvent associées àcertains droits des personnes (" entitlements ") (par exemple, la capa-cité des personnes à accéder à la connaissance est généralement asso-ciée au droit à l'instruction gratuite pour tous les citoyens, établi surcertaines normes légales). Ces capacités leur permettent en outre demobiliser des ressources et des talents pour faire face à des situationsde vulnérabilité et de privation dans le présent et dans l'avenir.

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Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

55Rapport National de Développement Humain - STP

femmes sont les plus élevées. Et, pourune grande partie, le retard d'éducation deces régions peut être attribué aux niveauxd'analphabétisme féminin très élevés,ainsi que de retard d'éducation des fem-mes de la zone (Tableau 11). Par consé-quent, chercher un développement éduca-tionnel plus homogène entre les régionsimplique d'agir avec plus d'emphase et deconcentration pour augmenter l'éducationdes femmes et des fillettes.

En termes d'accès aux services de santé,d'assainissement et d'énergie, les tendan-ces identifiées en éducation sont ratifiées,avec cependant quelques petites varia-tions: le Centre apparaît comme jouissantglobalement de meilleures couvertures,avec la seule exception relative à l’appprovisionnement d'eau potable, tandis queles régions Nord et Sud ont des taux decouverture plus bas. Toutefois, pour cer-taines dimensions; ces régions présententles couvertures d'accès au service les plusélevées du pays (en ce qui concerne l'eaupotable en particulier). Enfin, Príncipetend à avoir sous cet aspect une positionpire et à se rapprocher du groupe derégions dont les performances socialessont les moins bonnes (Tableau 12). Pardistricts, ce sont à nouveau Lemba, Lobataet Cauê qui ont les indicateurs les plus basde couverture de services de base dans lepays, et Agua Grande celui qui présenteles indicateurs les plus élevés par rapportà la moyenne nationale.

Dans la variable qu'on peut évaluer pardifférences de genre26 (accès aux servicesde santé), la brèche existant entre les hom-mes et les femmes est à nouveau manifes-te. Pour les autres variables, il n'est paspossible de différencier les disparités pro-pres à ces domaines puisque les indica-teurs se basent sur les caractéristiques desfoyers.

Carences et disparités monétairesL'Enquête de Conditions de Vie 2000(ECV-2000) montre que 54% de la popu-lation du pays a des revenus au-dessous dela ligne de la pauvreté, c'est à dire qu'ilsn'ont pas des revenus suffisants pour seprocurer un panier minimum de biens debase (aliments, vêtements, combustiblepour la cuisine, etc.) (pauvreté de reve-

nus). 15% se trouve dans une situationencore plus précaire puisqu'ils n'auraientpas de revenus suffisants pour satisfairemême leurs nécessités alimentaires debase (extrême pauvreté). Ce sont desniveaux élevés de pauvreté si nous lescomparons avec ceux d'autres pays afri-cains (Tableau 13), et encore plus, compa-rés avec le niveau de certains pays dedéveloppement humain moyen comme le

Chili (20% de pauvres).

Selon les études réalisées à partir de la findes années 80 et selon les résultats de laECV 2000, la pauvreté de revenus auraitaugmenté pendant la décennie 90, toute-fois l' " extrême pauvreté " aurait diminuésignificativement (Tableau 14). Cette ten-dance peut s'expliquer par la sensibilitéélevée de l'"extrême pauvreté" à desactions et politiques focalisées de luttecontre la pauvreté, par exemple la distri-

TOTAL NATIONALDistrict/RégionRégion Nord

LembaLobata

Région CentreAgua Grande

Mé-ZochiRégion SudCantagalo

CauêRég° de Príncipe

GenreHommeFemme

Alphabétisme (>15ans) (%)

83,1

76,569,981,586,488,283,778,279,376,080,7

91,175,6

Moyenne scolarité(>25 ans)

5,36

4,884,934,855,725,965,364,534,634,305,02

5,714,97

Tableau 10.Disparités dansl'éducation à STP(2000)

Tableau 11.Alphabétisme (%) parrégion et par genre

87%94%

87% 86%

66%

80%

69%75%

Nord Centre Sud Principe

Homme

Femme

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54%

25%34%

45%55%

63%68% 69%

SAO TOME Y P

RINCIP

E

Zimba

bwe

Benin

Burkina

Faso

Ugand

aNige

r

Zambia Mali

56 Rapport National de Développement Humain - STP

Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

bution d'aliments, les programmes d'assis-tance à des groupes vulnérables lancés parla coopération internationale. Par consé-quent, cette diminution peut coïncideravec la montée d'appui externe à des pro-grammes d'assistance aux groupes les pluspauvres du pays. En revanche, pour rédui-re le niveau de pauvreté, ce ne sont passeulement les actions de l'aide internatio-nale focalisées sur les groupes les plusnécessiteux qui sont nécessaires, il fautcette fois une croissance économique sou-tenue et élevée et une distribution adéqua-te de ses bénéfices dans la population,aspects qui, on l'a vu dans la première par-tie , n'ont pas été résolus dans la décenniedes années 90 28.

En termes de disparité de revenus, l'ECV2000 a estimé l'indice de Gini29 à 49% .Ce niveau est élevé par rapport à d'autrespays africains (Tableau 15) , cependantSTP est encore loin des degrés d'inégalitééconomique existants dans des payscomme le Kenya, le Zimbabwe, l'Afriquedu Sud ou le Brésil 30(pays qui a la plusgrande inégalité de revenus du monde,avec un indice de Gini de 60% pour 1995).

Du point de vue géographique, les plusforts pourcentages de population en situa-tion de pauvreté se trouvent dans lesrégions Nord et Sud. La situation diffici-le des foyers dans les districts de Cauê

TOTAL NATIONALDistrict/Région

Région NordLembaLobata

Région CentreAgua Grande

Mé-ZochiRégion SudCantagalo

CauêRégion de Príncipe

GenreHommeFemme

Couverture de servicesde santé (Taux en %)

79,6

70,368,572,179,874,789,376,174,878,394,8

81,877,8

Couverture de servicesd'eau (eau potable) (%)

73,8

83,197,172,273,390,250,177,383,066,944,4

Couverture de servicesd'assainissement (%)

30,3

23,328,319,635,644,922,821,118,725,323,0

Couverture de servicesélectriques (%)

52,4

41,849,436,162,068,652,934,039,1

Tableau 12.Disparités dans l'accès aux services de santé, assainissementet énergie (2000)

36%41%

48% 46%

54%

15%

35%39%

33%

23%

1987 1990 1992 1994 2000

% Pobl. Pobre

% Pobl. Extrema Pobreza

Tableau 14.Evolution de lapauvreté 1990-2000

Tableau 13.Comparaison de niveauxde pauvreté monétaire27

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Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

57Rapport National de Développement Humain - STP

(82,2% de pauvres dont 44% de pauvresextrême) et de Lobato (77% de pauvresdont 30% de pauvres extrêmes) est mani-feste. La région de Príncipe se place ensituation intermédiaire, et la région Centreprésente les meilleurs indicateurs de pau-vreté du pays, bien qu'il faille relever lesdifférences sensibles entre le districtd'Agua Grande et celui de Mé-Zochi(Tableau 16).

Ce paysage de la pauvreté à STP a beau-coup de similitudes avec le profil descarences non monétaires (en éducation,santé et services de base) exposé antérieu-rement. De façon générale, on peut affir-mer que ce sont les mêmes régions et dis-tricts qui subissent le plus de carences ensanté et éducation qui sont aussi celles quiont les plus hauts niveaux de pauvreté derevenus. Par conséquent, on peut, surtoutdans les régions Nord et Sud, parler deconditions de pauvreté structurale (combi-naison de pauvreté monétaire et nonmonétaire) très marquée. C'est dans ceszones qu'on doit sans doute déployer lesplus grands efforts pour assurer la fourni-ture de services publics. Dans le reste dupays (Centre et Príncipe), les indicateursd'éducation et de santé sont meilleurs maisdes pourcentages élevés de pauvreté derevenus (entre 40 et 50%) persistent et,donc, on y a sans doute besoin d'actionsqui mettent l'accent sur l'amélioration desopportunités économiques.

Pourtant, et bien que les pourcentagesrelatifs de pauvreté nous indiquent quece sont les régions Nord et Sud les plusdéfavorisées, nous trouvons, en raisondu poids démographique de chaquerégion, que 56% des pauvres du paysvivent dans la région Centre (tableau17). Par conséquent, les situations depauvreté dans ces zones doivent êtreenvisagées par le gouvernement entenant cas de leurs propres caractéristi-que (meilleurs indicateurs d'éducation etde couvertures de services).

Bref, la stratégie de réduction de la pau-vreté à STP doit prendre en compte cesprofils de pauvreté différenciés pour pré-ciser les programmes et inversions à réali-ser. Ce n'est pas pareil de lutter contre lapauvreté à Lobata ou Cauê qu'à Agua

Grande.

Si nous analysons maintenant la pauvretédu point de vue du genre et du groupesocio-économique (Tableau 16 et 18),nous voyons que les femmes ont relative-ment un plus haut niveau de pauvreté queles hommes, 56% contre 53%. Cela con-corde avec les tendances identifiées dansd'autres variables sociales.

Enfin, le Tableau 18 illustre l'importancedes problèmes de développement rural etagricole pour réduire la pauvreté (68% desagriculteurs-pêcheurs est pauvre et 29%est en extrême pauvreté). De même, lesniveaux élevés de pauvreté dans le groupe

49

3741 43 46 47

54 57 57 58

SAO TOME Y P

RINCIP

E

Nigeria

Ugand

a

Madaga

scar

Zambia

Guinea

Seneg

al

Kenya

Zimba

bwe

Sudafr

ica

Tableau 15.Disparité de revenus

Tableau 16.Niveaux de pauvreté parrégion géographique

TOTAL NATIONALDistrict/RégionRégion Nord

LembaLobato

Région CentreAgua Grande

Mé-ZochiRégion Sud

CantagaloCauê

Région de PríncipeGenreHommeFemme

Population en situationde pauvreté (%)

53,8

70,676,666,446,439,459,865,158,682,260,1

52,955,7

Population en situationd'extrême pauvreté (%)

15,1

26,729,624,710,87,4

16,719,39,9

43,918,8

14,915,6

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58 Rapport National de Développement Humain - STP

Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

de salariés doivent retenir l'attention.

Analyse de quelques conditions déter-minantes de la pauvreté: salaire et sec-teur informel La difficulté à diminuer la pauvreté à S.Tomé relève de l'évolution des salaires etde la croissance du secteur informel dansle pays.

Une analyse de l'évolution des salairesnous permet de vérifier qu'il y a une bais-se de la valeur des salaires, avec une légè-re remontée de 1998 à 2000. En 1997, ona assisté à une grande remontée de lavaleur des salaires qui a cependant étéannulée par la valeur du taux d'inflationtrès élevée. Quant à la fonction publique,nous voyons que c'est seulement de 1995à 1996 que ses salaires minimums ont étésupérieurs aux salaires moyens enregistrésà la même date.

Par ailleurs, courant 1991, des enquêtesfurent menées sur l'activité informelle.Elles ont montré qu'une partie importantede la population qui travaille dans le sec-teur formel de l'économie cherche dansl'informel une activité ajoutée (52,7%),comme on peut voir dans le tableau sui-vant (Tableau 20).6.

Actuellement, le secteur informel est pra-tiquement le seul qui offre emploi et reve-nus dans les centres urbains, et il repré-sente près de 60% du PIB. Il se composeessentiellement de micro et petites entre-prises qui jouent un rôle important dans lacréation d 'emplois et de revenus.

Selon une étude du CIDR31 , réalisée enjanvier 1997, les micro et petites entrepri-

ses occupaient 15% de la population acti-ve de la capitale (1725 Chefs d'entrepriseset 1425 employés). Elles font vivre un peuplus de 1400 personnes. Les micro et peti-tes entreprises se répartissent essentielle-ment dans le petit commerce, les activitésproductives et les services. Le ratioNombre d'Habitants/MPE est de 169 à l'é-chelle du pays et de 78 au niveau de S.Tomé capitale.

ConclusionsLes conclusions suivantes peuvent êtretirées du profil de développement humainet pauvreté:

STP a des niveaux de développementhumain supérieurs à ceux des paysd'Afrique sélectionnés pour la compa-raison, mais par rapport à un groupe depays insulaires à population semblable,son niveau de développement humainest sensiblement inférieur.

Bien que STP ait des indicateurs d'alpha-bétisme et d'espérance de vie similairesà ceux existant dans les pays de déve-loppement humain moyen, ses variablescouverture scolaire combinée et surtoutPIB per capita sont significativementplus basses que celles prévalant dans legroupe en référence. Si STP arrivait àaméliorer ces deux dimensions, sonIDH le situerait à une place très supé-rieure à l'actuelle, et très loin de lamoyenne des pays de l'Afrique subsaha-rienne. Cela s'explique par le faibledynamisme et la haute volatilité subiepar l'économie santoméenne dans lesannées 80 et 90 (aspect qui a été appro-fondi dans la première partie), ainsi quepar le grand déficit des services éduca-tifs existant au niveau secondaire et ter-tiaire.

L'évolution des indicateurs de dévelop-pement humain de STP dans les années80 et 90 est hétérogène: les avancéesdans l'élimination de l'analphabétismeet l'augmentation de la scolarité sontévidentes, tandis que celles relatives àl'espérance de vie sont très modestes etque la dimension économique stagne.Mais, en dépit des performances de cesdécennies, il y a des déficits très impor-tants dans le domaine de l'éducation(qualité de l'enseignement et enseigne-ment secondaire et tertiaire) et de la

Quadro 17. Total de población pobre por área geográfica

Norte23%

Centro56%

Sud16%

Principe5%

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Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

59Rapport National de Développement Humain - STP

Tableau 20. Secteur Informel de l'Economie Source: Calculé sur la base du recensement de 1991

santé (persistance de certaines maladiescomme la malaria).En termes de développement humainrégional, on a mis en évidence la pré-sence d'importants retards et de faiblescouvertures de services dans les régionsdu Nord et du Sud. Ce sont des zonesqui ont des indicateurs sociaux relative-ment plus bas que la moyenne nationa-le. Cela semble relever des difficilesconditions d'accès à ces zones et de laprésence de populations rurales et detravailleurs agricoles pauvres. Les brèches de développement humaindues à la condition de genre sont trèsimportantes, surtout en ce qui a trait àl'éducation. Ces disparités posent ungrand défi pour les politiques publiquesde développement humain dans le pays,étant donné que les différences régiona-les peuvent être attribuées, en grandemesure, aux brèches sociales entre hom-mes et femmes. Autrement dit: pourrésoudre les inégalités régionales, ondoit agir en priorité sur les conditions devie des femmes, vu que plus une régionest pauvre, plus larges sont les brèches

entre les hommes et les femmes. Du point de vue de la pauvreté de res-sources, le chapitre a montré que lesniveaux de pauvreté et d'inégalité derevenus sont élevés, même au regarddes moyennes africaines. Cela ratifie lafaiblesse de la dimension économiquedans le développement humain de STP.De même, on a pu mettre en évidenceune tendance des années 90 d'aggrava-tion de la pauvreté attribuée à la faibles-se de l'économie et à une réduction del'extrême pauvreté, à imputer sans douteà un plus grand effort de la coopérationinternationale en programmes d'assis-tance. En bref, il ne semble pas possi-ble que la pauvreté diminue uniquement

41%

55%

44%

68%61%

53%

8%13%

8%

29%

19%14%

Salariésdu

secteurpublic

Salariésdu

secteurprivé

Indépendants Agriculteurs-

Pêcheurs

Retraités Chôm eurs-

Inactifs

% Pauvres % Pauvreté Extrême

Tableau 18.Pauvreté par groupesocio-économique

Tableau19.Indicateurs desalaires

Désignation 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 2000Salaire moyen (USD) 62,6 44,5 28,0 21,4 12,4 8,3 5,4 33,3 22,0 21,3 25,9Salaire moyen Fct° Publique (USD) 36,3 30,8 19,4 14,7 8,5 8,9 5,8 8,8 5,8 5,6 28,0Salaire moyen réel (USD)154,5 123,3 102,2 98,2 32,9 28,2 10,4 41,3 105,2 130,4 242,4Salaire minim. réel Fct° Publique (USD) 89,6 85,2 70,6 67,2 22,4 30,3 11,1 10,9 27,8 34,5 261,3Taux de change 143,3 201,6 320,4 429,9 732,6 1420,34 2203,16 4552,51 6884,02 7122,03 7978,2Taux d'inflation 40,5 36,1 27,4 21,8 37,7 29,5 51,7 80,5 20,9 16,3 10,7

en mobilisant de plus grandes ressour-ces de coopération et avec des program-mes focalisées sur les groupes vulnéra-bles, comme suggéré parles donnéespour la période 80-90. Il faut une plusforte croissance économique et unemeilleure distribution au cours des pro-chaines années.Du point de vue géographique, lesrégions Nord et Sud ont les plus hautsniveaux relatifs de pauvreté, mais enpourcentage de la population totale, le

Description

Production de biens non agricoles et réparationsServices personnels (domestiques)

CommerceTOTAL

Personnes avec activités informelles temporelles pour revenu additionnel Total - non secteur informel

Autres actifs seulement dans le secteur formel TOTAL GÉNÉRAL

Chômeurs

POPULATION ACTIVE (POTENTIEL)

Nombre depersonnes

1.070930

2.5004.50023.50028.0006.06834.06810.500

44.568

(Participation enpourcentage)

(86% masculin)(90% féminin)(75% féminin)(64% féminin)

(52,7%)(62,8%)(13,7%)(76,5%)(23,5%)

(100%)

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60 Rapport National de Développement Humain - STP

Profil du developpement humain et de la pauvrete à São Tome et Príncipe

plus grand nombre de pauvres se trouvedans la région Centre.

Partant d'une analyse combinée des défi-cits sociaux et des niveaux de pauvreté enrevenus dans les régions, on peut conclu-re sur la nécessité de définir des stratégiesdifférenciées de lutte contre la pauvreté,étant donné que chaque région a un profilde développement humain et pauvretébien particulier. Les politiques publiquesdoivent s'ajuster sur de telles particulari-tés si elles veulent être efficaces.

% assistance scolaire des enfants (6-14)% Alphabétisés

% qui ne consultent pas pour motifséconomiques ou de difficulté d'accès aux

services% avec accès précaire à l'eau potable% sans services sanitaires adéquats

Pauvre87,977,4

24,8

27,978,4

Non pauvres93,983,4

18,4

22,565,3

Très pauvres86,371,1

34,8

27,684,1

Tableau 21.Carences sociales etpauvreté de revenus

21Pour une révision des origines du concept de développement humain et de son rapport avecd'importants débats sur l'économie du développement, voir Streeten (2000). Pour une discussionsur le bien être en partant de la perspective de l'élargissement des libertés: Sen (1999)

22 S. Tomé e Príncipe été en partie présentés au PNUD- Chili (1998)23En se basant sur les données de l'Enquête de Conditions de Vie 2000 (ECV2000) et d'autres

sources (Banque Mondiale, PNUD). L'espérance de vie et le PIB per capita ($PPA) ont été obte-nus de la Banque Mondiale, l'alphabétisme et le taux d'inscription combinée de l'ECV 2000. Letaux d'inscription combinée est une estimation. La variable "assistance scolaire des personnesentre 6 et 24 ans" a été utilisée comme un proxi de cette variable.

24On doit relever que l'IDH calculé pour ce rapport a utilisé des estimations récentes qui n'ont pasété prises en considération dans le Rapport de DH mondial de 2001, où l'IDH de STP n'a pas étéenregistré.

25 Selon Lok-Desallien (2000), la corrélation entre la stratégie de réduction de la pauvreté et unplan de développement, et donc entre pauvreté et sous-développement, dépend de l'incidence dela pauvreté et du degré d'inégalité dans un pays donné.

26 Une comparaison urbain-rural n'a pas été réalisée, faute de différenciation précise de cette con-dition dans l'enquête qui a servi de documentation de base pour ce chapitre.

27 Les données pour cette comparaison ont été obtenues de l'UNDP (1998) Progress againstpoverty in Africa, elles correspondent à la période 1991-96.

28 Données obtenues de "Le seuil de la Pauvreté à S.Tomé e Príncipe (période 1991-94), PNUD,Mars 1995. Ces données ont des problèmes de comparabilité (différentes lignes de pauvreté etméthodologies) avec ceux obtenus dans l'ECV 2000; on doit alors analyser les comparaisons réa-lisées comme une référence importante de tendances.

29 L'indice de Gini est un indicateur qui mesure l'inégalité des revenus (ou de dépenses de con-sommation) chez les individus ou foyers face à une distribution parfaitement égalitaire. La valeur0 dans l'indice représente une situation de parfaite égalité et 100% représente une situation deparfaite inégalité. Au fur et à mesure que l'indice se rapproche de 100%, l'inégalité des ressour-ces dans le pays est de plus en plus élevée.

...30 Les données pour cette comparaison ont été obtenus de UNDP (1998) Progress against

poverty in Africa, UNDP Afrique. Ces données correspondent à la période 1990-95 31 CIDR : Crédit International pour le Développement Rural

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MéthodologiePour réaliser ce travail, on a opté pour uneméthodologie qualitative, basée sur 45interviews en profondeur, semi-structu-rées, construites autour de certains pointsfixés d'avance mais qui essayaient demener les personnes consultées à relaterleurs expériences de vie, leurs difficultésquotidiennes et leurs espoirs d'avenir. Ona également essayé de former un échan-tillon représentatif de la vie sociale et éco-nomique de Riboque en respectant les cri-tères de base: sexe, âge, profession et zonede résidence.

Le traitement et la divulgation des don-nées personnelles obtenues au long de cesinterviews enregistrées a obéit à des critè-res de confidentialité, ce qui a entraînél'attribution de noms fictifs à chacune despersonnes consultées.

Les réponses des personnes interviewéesne sont pas retranscrites intégralement etde façon linéaire. Un travail de synthèse apermis de réordonner les témoignagesrecueillis en fonction de l'économie inter-ne du texte, mais tout en veillant à enrespecter l'essentiel. Les caractéristiquesdu travail et la spécificité du portugaislocal ont également rendu nécessairequelques corrections grammaticales etlexicales.

Les résultats de la recherche ont permisd'identifier certains modes de vie, patronsde comportement et stratégies adaptativescommunes à une partie significative de lapopulation de Riboque, fournissant ainsides indicateurs fiables sur les divers points

abordés, néanmoins, le traitement, l'analy-se et la présentation des données se baseexclusivement sur des méthodes d'analysequalitative. Certains aspects pourraientêtre aisément quantifiés en partant desdonnées recueillies par les interviews,mais comme toutes les dimensions du pro-blème ne sont pas mesurables quantitati-vement une partie non négligeable de laréalité continuerait à être réfractaire à cetype d'analyse. La pauvreté est multidi-mensionnelle et, comme telle, elle présen-te un versant psychosociologique impor-tant, difficile à aborder par l'analyse statis-tique; de même les valeurs culturelles sontdifficiles à mesurer quantitativement et lesefforts déployés dans ce sens risqueraientde diluer la portée du concept lui-même.

Le caractère qualitatif de cette rechercheest intrinsèquement lié à l'exigence decompréhension -au sens littéral- des signi-fiés: partant de la constatation d'une relati-ve fréquence d'un comportement donné,on essaie -en se basant sur l'intentionnali-té des acteurs sociaux et des influencesauxquels ils sont soumis, en individuali-sant les valeurs culturelles- d'évaluer etd'interpréter les modèles symboliques etles règles sociales qui contribuent, danscette situation spécifique, à la constructionde la réalité de Riboque.

ObjectifsCe travail a été lancé à partir d'une consta-tation de départ, à savoir l'existence dansles zones périphériques de la ville de S.Tomé d'une situation presque généraliséede pauvreté, caractérisée par des condi-tions de vie précaires, de graves insuffi-

Stratégies urbainesde lutte contre lapauvreté - Etude decas dans le quartierde Riboque

CHAPITRE V

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Strategies urbaines de lutte contre la pauvrete - Etude de cas dans le quartier de Riboque

sances de ressources économiques et unchômage élevé. Bien qu'il ait été décidé,pour une question de fiabilité et rigueurméthodologiques, de délimiter une aired'enquête concrète - le quartier deRiboque- l'étude aborde une réalité subur-baine typique. Elle se concentre sur desproblèmes qui, en dépit de quelques sin-gularités non négligeables, sont en grandepartie communs à tous les quartiers péri-phériques de la capitale santoméenne.

La pauvreté est un phénomène complexe,à caractère multidimensionnel, résultantde l'interaction entre des facteurs écono-miques, sociaux, environnementaux etculturels. Ses causes principales, lemanque de ressources et l'absence decapacités individuelles et collectives pourle changement, ont une interaction avec denombreuses autres variables, lesquellescontribuent à leur tour à l'exacerber.

On a ainsi considéré qu'une approche multi-dimensionnelle, susceptible d'aborder lesdivers aspects de la question, serait lameilleure façon de réfléchir sur cette réalité.

Mais la notion de pauvreté n'est pasconsensuelle. Sa définition dépend ducontexte de la recherche et varie en fonc-tion des conditions sociales et écono-miques des communautés et des individus.Il importe donc de circonscrire l'environ-nement du concept.

La pauvreté sera perçue, dans cette étude,comme la négation des conditions néces-saires au développement humain. Lestrois conditions essentielles à ce dévelop-pement sont : avoir une vie longue et enbonne santé, acquérir des connaissanceset des savoirs-faire, avoir accès aux res-sources nécessaires pour un standard devie décent, digne et participatif. Si ledéveloppement humain consiste à étendreces options, la pauvreté consiste à en êtreprivé; elle se manifeste dans la négationde la vie que les personnes pourraient ouaimeraient vivre. La pauvreté implique,non seulement le manque de ce qui estnécessaire pour le bien-être matériel, maisaussi la privation d'opportunités et choixélémentaires.

Nous utiliserons ainsi, en articulation avec

le concept de développement humain leconcept complémentaire de pauvretéhumaine, compris comme appauvrisse-ment multidimensionnel, et non seulementen ce qui concerne juste les revenus et lesbesoins élémentaires. Le manque de reve-nus suffisants et l'absence de moyens poursatisfaire les besoins humains (alimenta-tion, santé, éducation) sont des facteursimportants de privation, mais l'absenced'opportunités et de savoirs ne l'est pasmoins. La preuve en est que la relationentre la croissance économique et le pro-grès humain n'est pas automatique car desniveaux considérables de développementhumain sont possibles même avec desniveaux modestes de revenus.

Les concepts de développement humain etpauvreté humaine reflètent deux façonscomplémentaires de penser la même ques-tion. Les deux approches s'intéressent auprocessus de développement, mais la per-spective conglomérante se concentre surles progrès de tous les groupes de chaquecommunauté, depuis les riches jusqu'auxpauvres, tandis que la perspective de pri-vation juge le développement sur la façondont vivent, dans chaque communauté, lespauvres et les personnes privées de res-sources . La vie et les réussites indivi-duelles doivent compter, mais une partiede l'intérêt général pour le progrès d'unecommunauté se concentre spécifiquementsur la situation des personnes désavanta-gées.

Déterminer l'importance réelle du réseaude relations sociales et de parenté dans lecombat contre la pauvreté; savoir quellessont les principales stratégies d'adaptationdes gens de Riboque; connaître leurs espé-rances quant à l'avenir, percevoir dansquelle mesure les gens se débrouillent pareux-mêmes, avec peu ou aucune aide del'Etat ou des ONGs, créer leurs propreschances de s'en sortir et développer lescapacités nécessaires pour combler leursaspirations; découvrir quels sont les prin-cipaux obstacles à la concrétisation de cesprojets; comprendre, par le biais de certai-nes histoires de vie, quel genre de facteurspeuvent déterminer la réussite ou l'échecd'un petit commerce ou de n'importe quel-le autre initiative individuelle; et enfin,réfléchir sur l'importance du point de vue

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Strategies urbaines de lutte contre la pauvrete - Etude de cas dans le quartier de Riboque

63Rapport National de Développement Humain - STP

de Développement Humain sont les pro-pos de ce travail.

Il ressort donc que l'objet central de larecherche ne consiste pas tellement à faireune analyse exhaustive des causes etconséquences du phénomène de la pauvre-té à Riboque (ceci est juste le point dedépart), mais qu'il cherche plutôt à com-prendre l'importance des facteurs culturels-compris comme systèmes de symbolesqui élaborent des significations- dans lesstratégies populaires de combat à ce typede pauvreté.

Des continuités culturelles déterminéesexistent et sont fondamentales dans cettezone suburbaine de la ville de S. Tomé.Les pages suivantes tâcheront de les préci-ser et de déterminer dans quelle mesureelles favorisent ou empêchent le dévelop-pement humain. Une attention particuliè-re sera accordée à la relation entre les sys-tèmes social et économique et le systèmeculturel/symbolique.

L'hypothèse centrale qui oriente la recher-che est que, à Riboque, certaines logiquessymboliques rendent difficiles les change-ments sociaux et que d'autres, au contrai-re, les favorisent. Modifier ou garder desaspects culturels déterminés -comme il estd'usage dans le domaine de l'économie oude la politique- peut rendre possible ledéveloppement humain.

Caracterisation deRiboqueRiboque est un quartier populaire desalentours de la ville de S. Tomé, habité pardes gens de provenance diverse (desplantations, de l'intérieur, des localités dulittoral) et de différentes origines eth-niques (Forros32, Capverdiens, Tongas33,Angolares34). Une bonne partie de cettepopulation migrante, venue de tous lescoins de l'île à la recherche d'une viemeilleure, s'est établie aux portes de lacapitale au cours de ces 10 ou 15 dernièresannées, dans le contexte du processus deprofondes transformations économiquesqui a accompagné la transition à la démo-cratie. Il s'agit donc, surtout, d'individusdéracinés, sans source de revenu sûre oude travail régulier (tout au moins dans lesecteur formel de l'économie) et qui ont

échangé, en l'espace d'une génération, lemode de vie rural pour un mode de viesuburbain. Il est vrai que quelquesfamilles de la petite bourgeoisie santo-méenne y habitent aussi (il y a une demiedouzaines de demeures avec des signesextérieurs de prospérité relative et mêmeun immeuble d'appartements où résidentsurtout des fonctionnaires), mais les gensde Riboque sont, dans leur immense majo-rité, des gens pauvres ou même très pauv-res.

Le quartier a une forte densité de popula-tion et une grande concentration de mai-sons dans un espace relativement réduit,organisé autour de la rue principale; c'est,en outre, comme toutes les autres zonespauvres des faubourgs, une zone avec descarences énormes d'ordres divers : habita-tion et infra-structures de base, emploi,santé et éducation, assistance sociale, etc.Ces problèmes, quoique communs à tou-tes les localités périphériques, sont, dansce cas, aggravés par le fait que le quartierest l'agglomération suburbaine la plusancienne de la ville de S. Tomé. En effet,si jadis les relations familiales et les rela-tions d'entraide entre voisins constituaientle réseau fondamental de support à toute lavie sociale, culturelle économique etmême politique (à Riboque est associéetoute une histoire de lutte et résistancedurant l'époque coloniale), la pressiondémographique des dernières décennies aintroduit un facteur de conflictualitémajeure dans les relations interpersonnel-les et a fait disparaître les derniers signesde ruralité (les petites cours devant la mai-son, l'élevage d'animaux domestiques).Elle a aussi rendu plus complexe la ges-tion des formes traditionnelles de sociabi-lité.

Malgré cela, Riboque est encore quelquechose de plus qu'un simple dortoir auxportes de la cité: sa rue principale, agitéeet tumultueuse, est traditionnellement uncentre actif de petits commerces où proli-fèrent les postes de vente improvisés, lesquitandas35 , les petits bistrots, les pistes dedanse sur terre battue. Tout ceci confère àce quartier une vie très sui generis, unecertaine "ambiance" qui le différencie desautre zones suburbaines de la capitale.C'est surtout à la tombée de la nuit,

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Strategies urbaines de lutte contre la pauvrete - Etude de cas dans le quartier de Riboque

lorsque les gens reviennent de leurs tra-vails (ou de leurs déambulations pourchercher du travail) que cette atmosphèreparticulière devient plus évidente. Lemouvement de la rue augmente, çadevient fébrile, les boutiques et bars seremplissent de gens, la multitude s'agglo-mère devant les bougies des vendeuses quiexposent leurs produits sur de petitstabourets ou à même le sol -aliments cui-sinés, vin de palme, cacharamba36 , bana-ne, matabala37 , bois de chauffage, char-bon, huile de palme-. Pendant deux outrois heures (un peu plus le samedi) ce vaet vient frénétique ne cesse pas, bruyantemarée humaine qui monte et descend larue, gens qui entrent et sortent des mai-sons, qui se rejoignent dans les coins pourbavarder, jouer aux cartes, voitures qui sefraient difficilement un chemin entre lesgens qui ont trop bu, les couples d'amou-reux et les groupes d'amis. Puis, tout d'uncoup, tout se calme et la nuit tombe surRiboque endormi.

Les gens de Riboque partagent cette viesociale intense (et très souvent conflictuel-le) sur un espace réduit, avec une popula-tion dense, des maisons dégradées, sur desterrains lotis à l'extrême, de part et d'autrede murs mitoyens, et presque toujourstournées sur cette grande estrade qu'est larue principale. Dans ces circonstances, ce

n'est pas seulement l'équilibre entre ledomaine public et le domaine privé qui estdifficile à gérer, mais encore les relationsentre les habitants de la même maison, dela même rue, du même quartier quideviennent très souvent précaires, fragileset volatiles: les vies se croisent et sedécroisent, on se fait et on perd des amiset des voisins, des relations passionnellesse tissent et se déchirent, on vit au sein defamilles en constante recomposition.

Conditions de vieHabitation et infrastructuresde base

L'habitation a, à Riboque, un caractèreextrêmement précaire: la construction enciment est rare et les maisons -presquetoutes en bois et toit de zinc, montées surpilotis- sont pratiquement toujours troppetites pour le nombre de personnes quil'habitent. Elles sont, en outre, très sou-vent, dans un état avancé de détériorationet elles nécessitent de travaux urgentsd'entretien.

Les anciennes cours qui entouraient chaquemaison et délimitaient l'espace privé dechaque famille cèdent du terrain aux nou-veaux bâtiments, à mesure que la popula-tion du quartier augmente. La maille urbai-ne se resserre, la construction devient chao-tique, apparemment anarchique.

Le nombre de personnes propriétaires deleur logement est, dans ces circonstances,relativement réduit. La majorité desfamilles vit dans des pièces louées oualors elles construisent leurs demeures surun terrain loué. D'autres, surtout les plusjeunes, vivent chez leurs parents ou amis.Certaines familles louent des parties de lamaison. Et il y a le cas de ceux qui, encontre-partie d'une location symbolique,vivent chez une "vieille femme" et lui prê-tent appui dans sa vieillesse.

Felícia, si elle le pouvait, ferait des répa-rations dans sa maison et l'agrandirait unpeu: elle lui donnerait une couche de pein-ture, mettrait des latrines. Mais il n'y a pasd'argent. Raison pour laquelle elle doitencore vivre avec six enfants, quelquescousins et neveux (quinze personnes autotal) dans la même vieille maison qui aquatre pièces minuscules.

Vivre sans lumièreVelcy, 41 ans, est séparée de son compagnon et vit avec sa sœur paralliance ("son père nous a abandonnées"). Il leur arrive parfois de n'a-voir plus d'argent même pas pour acheter du pétrole. "Quand c'estcomme ça, nous dormons dans l'obscurité, nous dînons tôt et on va aus-sitôt au lit".Vicência, 36 ans, est tombée veuve il y a 8 mois. Avec 6 enfants à élever,sans travail assuré ni source de revenus régulière, sa situation écono-mique est depuis lors très difficile. Les signes de dégradation de sonniveau de vie sont évidents."L'énergie a été coupée la semaine dernièreparce que je n'avais plus de conditions pour payer",dit-elle en se lamen-tant.

Partager des espaces réduitsJerónimo vit chez une dame âgée, "qui est toujours malade". Il ne paiepas de loyer avec régularité, mais quand il a de l'argent, "il donnequelque chose à la petite vieille". Ils sont treize en tout à partager unespace exigu et assez dégradé: Jerónimo, six frères et sœurs, sa mère, safemme, la femme d'un frère, deux enfants de la sœur plus âgée et bienentendu la patronne des lieux.

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Strategies urbaines de lutte contre la pauvrete - Etude de cas dans le quartier de Riboque

65Rapport National de Développement Humain - STP

La grande majorité des maisons deRiboque n'est pas reliée à l'adductiond'eau ; dans certains cas, il n'y a même pasde point d'eau public dans les parages.L'écrasante majorité n'a pas de salle debains ni même de latrines (quand on leurpose la question, les personnes interrogéessur ce point déclarent qu'elles vont faireleurs besoins "dans la brousse" ou "à lagrotte"38). L'électricité est absente danspresque la moitié des foyers de Riboque.Il n'existe pas dans le quartier d'éclairagepublic, de réseau d'égouts, de systèmepour recueillir les eaux pluviales, deramassage d'ordures.

Si un grand nombre des personnes inter-viewées ressentent certaines difficultéspour régler le loyer de leur logement, lasituation est encore plus grave quand ils'agit d'honorer le paiement des servicesde base. La disparité entre les revenus despersonnes et les coûts de l'eau et de l'élec-tricité, par exemple, constitue un problè-me pour une bonne partie des familles quiutilisent ces services et sont très souventune cause importante d'endettement. C'estainsi que de nombreux foyers de Riboqueoptent pour se passer de ces infrastructu-res. Pour ceux qui n'y ont pas renoncé, lesdépenses mensuelles (surtout d'électrici-té) consomment une tranche significativede leurs budgets familiaux. Certaines deces personnes ont dû apprendre à n'utiliserl'électricité qu'une heure ou deux chaquenuit. D'autres ont permis qu'on leur coupel'électricité pour ensuite se rebrancherillégalement sur le réseau.

Sante et nutritionLa majorité des enquêtés affirme que leursanté et celle des leurs s'est détérioréesuite à l'aggravation des conditions de vie.L'alimentation est devenue plus déficienteet les maladies provoquées, soit par lamauvaise nutrition, soit par les mauvaisesconditions d'hygiène (avec une mentionspéciale pour le paludisme), sont deve-nues plus fréquentes. Tomber malade estégalement perçu comme un problèmeéminemment économique, et en généralles gens pensent que, s'ils ne connaissentpas quelqu'un à l'hôpital ou dans une cli-nique, les coûts élevés des médicaments etdes soins médicaux sont un facteur qui lesempêche d'exercer leur droit à la santé.

Il est toutefois important de faire la dis-tinction entre ce qu'affirment les acteurssociaux et la réalité observable. En effet,les données recueillies laissent penser queles gens de Riboque sont des agents actifsdans l'accès aux soins de santé, et certai-nement beaucoup plus que des bénéficiai-res passifs d'un processus organisé pard'autres. Les enquêtés formulent des stra-tégies pour contourner les difficultés etavoir accès aux soins thérapeutique en uti-lisant des moyens aussi divers que:

Le recours aux réseaux de relationssociales (il est très utile d'avoir unparent ou un ami travaillant à l'hôpital,dans une clinique ou une pharmacie) ;

L'aide des voisins (il y a toujours dansles parages quelqu'un qui s'y connaîtpour aider en cas de besoin) ;L'automédication, soit par la médecinetraditionnelle (presque tous les gens deRiboque ont une connaissance pratiquedes mindjja'n mato, les médicamentsnaturels, composés pour une grandepartie de feuilles, écorces et racinescueillies dans la nature), soit par lamédecine conventionnelle (il est possi-ble d'acheter dans la rue un grand nom-bre de médicaments qui, dans les phar-

Dépendre des amis pour avoir accès à la santé.Isilda a été hospitalisée avec son fils et personne ne l'a aidée. "Moi j'é-tais malade et mon homme ne me donnait pas d'argent pour acheter dumédicament, c'est pour ça que j'ai laissé 30 000 dobras à devoir à l'in-firmier mais comme l'infirmier est ami de mon père, il m'a dit que jepaierai quand j'aurai. ".Quand Firmina a quelqu'un de malade dans la famille, elle va auprèsd'une sœur par alliance qui travaille à l'hôpital et réussit à dévierquelques médicaments. Mais pas toujours:"ces jours ci, elle dit quec'est difficile ".Parfois, aller chez le médecin ne résout rien. Voyez le cas de Filó:"On va passer une consultation, le médecin fait l'ordonnance et nous,nous n'achetons pas, parce que nous n'avons pas les moyens; on restecomme ça même". La solution c'est d'avoir recours à une voisine quiest infirmière et "fait le traitement sans payer, après quand on a del'argent, on paie".

Remèdes traditionnelsQuand il a le paludisme, Idalécio, résout le cas tout seul: "Si la mal-adie commence, je vais en brousse et je mange la feuille; j'amène uneboite de conserve, je fais bouillir le remède, je bois, je me baigne et jedors là même ". Mais il connaît d'autres remèdes efficaces, par exem-ple: "Un grand verre de cacharamba. Je mets du sel, du citron et jemélange bien, quand le sel est fondu je bois et ça y est ; ça passe après5 à 10 minutes".

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Strategies urbaines de lutte contre la pauvrete - Etude de cas dans le quartier de Riboque

macies, ne sont vendus que sur ordon-nance médicale);Le recours aux guérisseurs ("aller voirbrousse" signifie consulter un guéris-seur; de même que dans de nombreuxautres contextes ethnographiques, à S.Tomé ces guérisseurs sont convoquéspour agir sur un ensemble étendu demalheurs, sociaux ou individuels, méta-physiques ou physiques )

Le problème de l'alimentation est peut-être le problème quotidien le plus impor-tant avec lequel se démènent les gens deRiboque car, contrairement à ce qui se

Manger de ce qu'il y a, quand il y a "On ne réussit pas à faire un repas convenable, ni un riz de substan-ce, il manque toujours quelque chose " (Firmina, veuve de 56 ans,quatre fils et cinq petits fils à charge)."Il y a des jours où je sors de la maison avec juste un pain dans le ven-tre jusqu'à l'heure du dîner" (Velcy, 41 ans, pas d'enfant, séparée)."Ca dépend: si je prends le petit déjeuner, je prends le dîner, si je neprends pas de petit-déjeuner, je prends le déjeuner et le dîner. Maisaujourd'hui, les gens de la couche d'en bas, comme moi, ne font pastrois repas, ou alors c'est un repas de jaca ou safú , pour tromper leventre jusqu'au dîner " (Alberto, retraité, 60 ans)."Nous, on fait deux repas, le petit-déjeuner et le dîner. Au petit-déjeu-ner, au lieu du pain, on mange du riz ou de la banane pour tenir jus-qu'à l'heure du dîner. Il y avait un temps où les gens parlaient dedéjeuner et de goûter, mais maintenant il n'y a pas de quoi parler deces choses là " (Felícia, couturière, 46 ans, six enfants mineurs).

Etudier? Pour quoi?!Eduardo est tailleur, mais il pourrait être enseignant. S'il ne le fait pas, c'estparce que le salaire est très bas. "On use les chaussures pour rien", affirme-t-il. Il a fait des études parce qu'il se faisait des illusions, il pensait que l'éco-le était importante pour son avenir. Aujourd'hui, il pense que c'était uneerreur: "avoir un métier est au-dessus de tout".

L'école? Et qui paie?!Anastácia a cinq enfants en âge scolaire, mais seulement trois d'entre euxfont des études: "Un est au compte de la grand-mère et deux à mon comp-te, pour les autres, moi je n'ai pas d'argent.". Contrairement à beaucoup deparents, elle pense que l'école est toujours importante, mais elle a desérieuses difficultés pour assurer l'éducation des enfants: "Moi je n'aijamais été à l'école parce que mon père disait que la femme doit seulementsavoir laver le linge et faire la cuisine, mais j'aimerais beaucoup avoir pufaire des études, tellement que je fais le possible pour mettre mes enfants àl'école; mais maintenant j'ai le problème de la blouse, je n'ai pas d'argentpour la faire, alors j'ai dit à mes enfants d'y aller comme ça même et s'ilsse font gronder, patience".

passe dans d'autres quartiers périphériquesde la capitale, à Riboque presque person-ne n'a de basse-cour et n'élève d'animaux(pour des motifs qui seront expliqués plusloin). Cela signifie que l'alimentation doitêtre acquise par le travail quotidien, ou, sicela n'est pas possible, au travers de n'im-porte quelle autre stratégie informelle (onachète "à crédit", "on prend" prêté, ondemande aux parents, aux voisins, auxamis).

Pour les familles nombreuses et les per-sonnes sans ressources, si elles vivent seu-les, l'aggravation de la situation socio-éco-nomique a signifié une aggravation effec-tive de la situation nutritionnelle: on estpassé des traditionnels trois repas par jourà à peine deux, ce qui fait apparaître unerelative carence alimentaire. Bien que lesdonnées soient différentes de celles enre-gistrées dans d'autres pays africains, il estvrai que la malnutrition tend à s'aggraver,surtout chez les enfants, et on considèreque c'est l'une des causes les plus impor-tantes de la mortalité39 . La situation n'estpas plus grave encore du fait que le régi-me alimentaire santoméen - à base debanane, taro, fruit à pain, poisson sec ethuile de palme- a une valeur nutritive éle-vée et un fort pouvoir calorique.

Education et protectiondel'enfance

La majorité des familles de Riboquedépense une partie non négligeable deleurs budgets dans l'éducation des enfants,réalisant ainsi un investissement productifdans leur formation (quand on envoie lesenfants à l'école, on est très souvent entrain de renoncer à un revenu présent -soità cause du coût de l'éducation, soit à causede la perte du travail des enfants - pourfinancer un revenu futur).

Mais cependant, un nombre considérabled'interviewés pense que, dans les condi-tions actuelles, l'éducation n'est pas parti-culièrement importante pour leurs enfants,parce qu'elle ne les aide pas à trouver unbon emploi. Le sentiment que l'Ecole -envertu de son articulation déficiente avec lemonde du travail-- ne signifie pas, actuel-lement, une plus-value pour le jeune à larecherche d'un emploi est répandu.S'ajoute à cela le fait que les emplois où

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les diplômes scolaires sont encore un cri-tère prioritaire se situent presque tous dansla zone, peu alléchante -parce que très malpayée- de l'administration publique. Lesparents se plaignent aussi que les coûtsrelatifs à l'éducation (matériel scolaire et,très particulièrement, l'uniforme) sont trèsélevés et insoutenables pour le budgetfamilial.

Suite à quoi, un nombre croissant d'en-fants en est venu à abandonner l'écoleavec la complaisance ou même l'appuiexplicite des parents. Ils commencent àtravailler tôt, en échange de la nourriture,comme apprentis dans des ateliers auto-mobiles, menuiseries, etc.

La majorité des enfants, même s'ils conti-nuent à fréquenter l'école, manque beau-coup pour aider les parents et, en outre, ilsdoivent souvent contribuer à l'économiefamiliale en horaire extra scolaire (en ven-dant des poches plastique, des gâteaux etautres pâtisseries fabriquées à la maison,etc.)

Mais si, selon beaucoup de gens deRiboque, l'Ecole échoue, les mécanismesde transmission familière des connaissan-ces et valeurs sont aussi très fragilisés. Lemanque de temps est la principale causede cette vulnérabilité des liens familiaux.Les femmes en particulier, dont la contri-bution à la reproduction sociale est fonda-mentale, manquent de temps suite au faitqu'elles ont une triple charge : avoir et éle-ver les enfants, gérer la vie domestique etse consacrer à des activités productives .

Representationcollectivede la pauvreteQuand elles sont interrogées sur le sensdes changements matériels survenus dansleur vie pendant ces 10 dernières années,la grande majorité des personnes répondque la situation est actuellement bien plusdifficile qu'elle ne l'était il y a dix ans. Lesdifficultés économiques pèsent, le chôma-ge a augmenté, l'inflation est partie en flè-che. Il devient de plus en plus probléma-tique de survivre si on n'accumule pasdivers travaux. Des professions qui aupa-ravant assuraient un certain statut écono-mique et social ont glissé jusqu'au palierde la pauvreté. Des groupes entiers de

personnes plus vulnérables et exposéessont restées complètement en marge duprocessus productif, ou de quelque typed'assistance que ce soit.

Pour la plupart des enquêtés, cette montéede la pauvreté et des difficultés de surviedes familles est une conséquence directedes changements politiques et écono-miques enregistrés à S. Tomé e Principeau cours des douze dernières années. Bienque presque personne ne semble mettre enquestion les transformations politiques

Le fardeau de la pauvretéDamiana a beaucoup plus de diplômes que la majorité des femmes deson âge: elle a fini la 9ème classe. "J'étais arrivée à être professeur deprimaire, mais ça fait plus de 4 ans que je ne trouve plus de place etje suis à la maison ", affirme-t-elle. Comme recours, elle vend, dans larue, de l'huile de palme, du bois de chauffage et des pâtisseries de noixde coco. Elle habite, avec ses trois enfants, sa mère, sa sœur et les deuxenfants de sa sœur dans une petite maison -huit personnes pour troispièces très dégradées, sans eau, électricité ou salle de bains-. Lafamille de Damiana ne se distingue en rien des autres familles pauv-res de Riboque. Les temps où elle était professeur appartiennent aupassé. L'artisanat d'écaille de tortue a été un bon métier, mais maintenant ilest de moins en moins rentable -ce commerce a été interdit et lademande a chuté à pic. Sandrino, qui est né dans une famille d'arti-sans d'écaille de tortue, traverse actuellement de grandes difficultés.Il sait que "à partir du moment où il a été interdit, le travail ne valaitplus la peine ", mais il n'a pas envie d'abandonner l'artisanat et il"persiste seulement pour ne pas rester sans rien faire". C'était uneactivité lucrative, Sandrino avait des employés, beaucoup de clients.Maintenant "la vie est difficile".Vicência est une veuve avec six enfants à élever. La mort de son com-pagnon l'a laissée dans une situation très délicate: "Il était artisanplombier. Des gens l'appelaient, il y allait, faisait son travail, touchaitl'argent, faisait les courses et revenait à la maison. Si maintenant moije ne me débrouille pas, personne ne mange ici. ". Et Vicência sedébrouille en vendant au marché. "Parfois je perds courage", avoue-telle, "mais comme je n'ai pas d'autre moyen, je tiens le coup. Parfois,si je n'étais pas une femme concentrée, la tête éclaterait, petit déjeu-ner, déjeuner, dîner, maladie, école… tout retombe sur moi ". Desaides? "je ne compte sur personne, parce que personne ne me donnerien, ça doit être moi ". Des plans d'avenir? "C'est avec l'argent qu'onfait de l'argent, sans argent, je ne peux pas faire de pas en avant ".Les travaux chez elle ne sont pas terminés: "La salle de bains n'est pasfinie et il manque quatre zincs pour agrandir une autre chambre ". Etencore: "On m'a coupé l'énergie la semaine dernière parce que je n'a-vais pas de quoi payer. ".Capiano, au chômage et malade "d'un abcès à un pied", a vendu sa viepar petites bouchées pour faire face aux difficultés : "Marmite, assiet-te.., quand je sens le manque d'argent, je m'en débarrasse et je l'envoievendre. Pratiquement, ces dix ans passées, j'ai vendu tout ce qui avaitde la valeur ; maintenant je suis déplumé".

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survenues depuis 1989, il est vrai que pra-tiquement tout le monde s'interroge sur lecours pris par l'économie santoméennedepuis lors. Les gens de Riboque ressen-tent le processus de restructuration écono-mique comme le principal responsable del'aggravation des injustices sociales parcequ'il agrandit le fossé entre les plus richeset les plus pauvres D'une façon ou d'uneautre, ils essaient tous de s'adapter auxtemps nouveaux, mais le manque deconfiance et de courage par rapport à l'a-venir sont évidents, surtout chez les per-sonnes de plus de 30/35 ans. .

On peut observer une tendance générale àattribuer la faute de cette situation à l'in-compétence, l'indifférence et la corruptiondes Gouvernements successifs et autresentités publiques; mais il existe aussi,chez ceux qui sont passés par l'expériencetraumatique du changement, la tentationde continuer à cultiver une relation dedépendance par rapport à ce même Etat,en le rendant responsable des échecs indi-viduels et en camouflant l'absence d'initia-tive personnelle derrière le manque d'ap-pui gouvernemental. Beaucoup de gens(surtout les plus âgées) continuent à sevoir comme les bénéficiaires passifs d'unprocessus organisé par d'autres, au lieu dese considérer agents actifs de leur propredéveloppement humain.

Dans quelle mesure les citoyens doivent-ils s'assumer comme principaux responsa-bles de l'amélioration de leurs conditionsde vie et dans quelle mesure les institu-tions (gouvernementales ou non) doivent-elles se constituer comme une partie

importante dans cette tâche ? Quel est lerôle de l'Etat dans la vie économique etsociale des individus ? Ce sont des ques-tions qui, comme l'indique cette étude surRiboque, restent à résoudre au sein de lasociété santoméenne et qui font en cemoment l'objet d'un conflit latent de géné-rations.

Pendant la période antérieure, lesSantoméens étaient convaincus que, d'unefaçon ou d'une autre, leurs emplois étaientassurés, quoique avec des salaires bas.Ces emplois étatiques donnaient malgrétout, même s'ils diminuaient la capacitéd'initiative individuelle, une garantieminimum de sécurité et stabilité. Le col-lapsus de l'économie centralisée a conduità une situation sociale tendue, avec unegrande quantité de gens d'un certain âge,sans aucune ressource propre ou confian-ce en soi pour se lancer dans les affairesou entrer en compétition pour un travail deplus en plus rare, précaire et mal payé. Lavérité, pourtant, est que les emploispublics sont de moins en moins attractifset que la nouvelle génération n'envisagepas l'hypothèse d'un retour à la situationde départ. Des institutions, elles n'atten-dent qu'"un appui" au bon moment.

Il y a deux sentiments que les gens deRiboque âgés de 20 à 30 ans partagentaujourd'hui comme des frères: la cons-cience de leurs limitations économiques etl'ambition de dépasser ces limitations.Cela représente, sans aucun doute, un cli-vage par rapport à la génération antérieu-re: beaucoup de jeunes ne se voient pascomme juste des gens pauvres en attented'une aide mais plutôt comme des pauvresà l'affût d'une bonne occasion.

Le phénomène de la pauvreté est communà presque toute la population de Riboque;ce qui varie est seulement la façon de l'af-fronter. En fait, quelque soit leur âge, lamajorité des adultes de Riboque ne réus-sissent à survivre aujourd'hui que par lebiais d'un ensemble hétérogène de doubleou triple emploi, activités informelles,commerces de coin de rue, aides occa-sionnelles et petits boulots mal payés. Lastratégie consiste à trouver autant de tra-vaux occasionnels que possible, être "unpetit malin", un "connaisseur" dans un

Travailler pour l'Etat?! Chê!-"Travailler pour l'Etat?! Chê! Si celui qui est là depuis 30 ans reven-dique, si c'était moi maintenant ce serait bien pire.".-"Maintenant ce n'est la peine de travailler pour l'Etat parce qu'il n'ya plus d'Etat. L'Etat c'est seulement pour que chacun traite de sa pro-pre vie ". -"Si on me disait de choisir de travailler pour l'Etat et continuer avecmes affaires, moi je choisirais les deux choses, parce que l'Etat paiemal. ".-"Le commerce est quelque chose de différent de travailler pour l'Etat,parce que le commerce je sais ce que je gagne jour après jour, tandisque l'Etat je sais que je dois attendre à la fin du mois et je n'ai pas tou-jours la capacité de supporter un mois ".-"L'Etat!... Etat c'est pour user ton soulier".

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maximum de domaines (l'aptitude à répa-rer n'importe quoi ou à exécuter n'importequelle tâche constitue aujourd'hui uneplus-value considérable) .

Dans ces circonstances donc de crise éco-nomique et dégradation accentuée duniveau de vie, les personnes enquêtéesmettent la pauvreté en rapport avec lesfacteurs suivants d'échec personnel etfamilial:

insuffisance de ressources pour satisfaireles besoins de base (alimentation, santé,scolarité des enfants);

incapacité à acquérir quoi que ce soit deplus que ce qui est strictement nécessai-re à la survie quotidienne.incapacité économique pour constituerune famille ou pour survivre sansdépendre des autres ;

conditions déficientes de logement (mai-sons dégradées, manque d'espace,inexistence d'eau et électricité).

Les principales causes de pauvreté -quiconduisent aux situations déjà décrites-sont, de l'avis des gens enquêtés, les sui-vantes :

chômage ou absence de revenus sûrs ;bas salaires;coût élevé des articles de premièrenécessité;

inflation;manque d'appui aux initiatives entre-preunariales ;

incompétence et corruption des gouver-nements ;

absence d'appui familial;comportements destructifs ou asociaux(alcoolisme, déficiences mentales).

Un nombre minoritaire, mais cependantremarquable, de femmes associe aussi auphénomène de la pauvreté, explicitementou implicitement, le nombre excessif d'en-fants.

Les groupes les plusvulnerables Même si la grande majorité de la popula-tion de Riboque vit en situation de pauv-reté, il existe certains groupes plus vulné-rables à ses effets. Le genre, l'âge, le nom-bre d'enfants, les déficiences physiques etmentales, constituent des handicapsimportants qui aggravent les conditions de

vie et rendent difficile la survie écono-mique des individus et des familles. Enfait, si on se penche sur les caractéris-tiques des personnes les plus affectées parla pauvreté extrême et ses conséquences,on note que, d'une façon générale, ellessont inclus dans les groupes suivants :

Femmes chefs de foyer monoparental (lasituation est d'autant plus grave que lenombre d'enfants est plus élevé);

Femmes âgées, avec peu ou aucun appuifamilial;

Hommes âgés, avec peu ou aucun appuifamilial;

Individus malades, alcooliques, handica-pés physiques ou mentaux

Si les handicaps physiques et mentaux, lesmaladies de longue durée ou l'alcoolismesont bien des situations limites qui se tra-duisent en phénomènes de rupture sociale,en fait, ces cas d'exclusion authentique nefont que potentialiser, dans la plupart desfois, des fragilités qui reposent sur legenre ou l'âge. Analysons donc avec plusde détail, la vulnérabilité à la pauvreté dedeux groupes-clefs: les femmes et lesvieux.

Les femmesIl y a certainement des différences impor-tantes quant à l'impact de la pauvreté surles deux sexes. A Riboque, les problèmeséconomiques et sociaux ont un effet mul-tiplicateur quand ils retombent sur lesfemmes, puisque de puissants mécanismesde discrimination par rapport au genrecontinuent à sévir à STP:

Au travail, les femmes affrontent descontraintes par rapport aux opportuni-tés que les hommes n'affrontent pas: laplupart de leurs activités continuent àêtre non rémunérées, non reconnues etinfra-valorisées; leurs opportunitésd'emploi dans le secteur formel sonttrès réduites;

Les familles monoparentales dirigées pardes femmes font partie des plus forte-ment atteintes par les politiques deréajustement structurel; sous de nomb-reux aspects, le poids de la transitionéconomique porté par ces femmes estplus lourd que celui des hommes: ellessont affectées en tant que mères, chefsde famille et productrices de biens etservices.

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De nombreuses femmes enquêtées notentavec amertume que, sitôt que les hommespeuvent s'offrir le luxe d'esquiver à leursdevoirs envers la famille, elles, elles sonttoujours "obligées", à cause de leursresponsabilités vis à vis des enfants etparce qu'elles ont une plus grande capaci-té d'adaptation aux situations. Un grandnombre d'entre elles (celles qui viventseules et aussi celles qui ne reçoiventaucun appui de leurs compagnons) tra-verse tous les jours des situations difficilespour réussir à donner à manger à lafamille. Les stratégies de recours adop-tées pour atteindre cet objectif sont variéeset fréquemment multiples :

Demander de l'aide aux parents plusaisés;Réaliser toutes sortes de petits travauxrémunérés (nettoyer des maisons, laverdu linge pour des clients, prendre soinde gens âgés, entretenir les jardins);

Placer certains enfants chez d'autres per-sonnes ou leur trouver de bons parrains;

Vendre dans la rue (de la nourriture cui-sinée, du bois de chauffage, du charbon,des légumes et fruits etc.) .

Quand une femme a un enfant, elle consa-cre d'avantage d'heures par jour aux tâches

Le fardeau d'être femmeCamila (39 ans) a vécu avec plusieurs hommes et a eu, fruit de sesrelations, neuf enfants, dont quatre sont encore à sa charge. Il y a unmois que Camila ne travaille pas car elle a été malade, et à la maisonles repas ne sont pas assurés -on mange quand apparaît quelquechose-. Ils habitent dans deux petites pièces d'une maison cédée parune amie qui vit en Angola. De temps en temps, cette amie lui envoie," en partenariat " quelque marchandise (" des bassines en plastique,du bouillon, du sel, du chorizo… ") qu'elle vend à Feria do Ponto. "J'ai aussi vendu du poisson " dit-elle " et aussi je donnais de l'argentà une autre personne pour acheter du vin rouge et après on divisait lebénéfice mais elle a commencé à me tromper et alors j'ai laissé cecommerce ". Parfois, quand elle n'a rien à préparer pour manger, l'ai-de d'une sœur ou du père lui est bonne : "Quelques fois ils me donnentde quoi manger, moi je le donne aux enfants et je vais au lit avec lafaim au ventre, je m'alimente avec seulement du vin de palme et je vaisau lit ". Quant à son actuel compagnon et père de certains de sesenfants, " il n'aide pas du tout: si quelqu'un de ma famille meurt, iln'aide pas, s'il y a une fête dans ma famille, il n'apparaît jamais, moij'ai été malade et il n'a pas donné d'argent pour acheter les médica-ments ". Et Camila conclut: "Je vais laisser cet homme parce qu'ondirait que son autre femme est en train de faire du fétiche avec moi -chaque fois que j'ai de l'argent, je ne sais pas comment, cet argent finitsans que j'aie réussi à faire quelque chose d'important ".

familiales, mais le temps consacré auxactivités rémunérées ou au commerce derue ne diminue pas pour autant. Elle sup-porte ainsi une augmentation considérablede travail. Le temps constituant une res-source rare par rapport aux tâches qui doi-vent être réalisées, l'alternative des fem-mes de Riboque est presque toujoursd'augmenter l'intensité de leur travail. Ensituation de crise, elles achètent moins,produisent plus de biens à la maison etconcilient les activités de l'extérieur avecles devoirs familiaux. Résultat, ce sont lesheures de loisir ou même le temps de som-meil qui diminuent.

Le travail féminin est aussi fortementinfra-valorisé en termes économiquespour la bonne raison qu'il est en grandepartie non rémunéré et non mercantile.Une partie du problème réside dans lanotion de valeur : " (...) pour les objectifsd'évaluation économique, valeur est syno-nyme de valeur de marché. Pourtant,beaucoup de biens et services avec unevaleur économique ne sont pas mis sur lemarché. Une grande portion du travailfamilial et communautaire reste ainsi sansvaleur et les contributions économiquesde beaucoup de gens, en particulier lesfemmes, ne sont ni reconnues ni compen-sées " . En fait, le travail familial des fem-mes transcende la valeur du marché, pourassumer :

Une valeur humaine : une heure de tra-vail mercantile et une heure de travailnon mercantile ont la même valeur s'ils'agit de mesurer le bien-être; pour ledéveloppement humain, le temps passéà élever les enfants, donner à manger etmaintenir la vie humaine a autant devaleur que le temps passé à produire desbiens et services pour le marché;

Une valeur culturelle : le travail familialreproduit et interprète la société; grâce àces activités, les relations communau-taires et les traditions culturelles sontmaintenues et, simultanément, conti-nuellement reformulées à la lumière desbesoins sociaux.

Il en ressort, cependant, que cette discri-mination basée sur le genre finit par (para-doxalement ou peut-être pas) être le prin-cipal responsable du rôle de plus en plusactif des femmes à la recherche de solu-

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tions économiques créatives. En effet,comme ce qui se passe un peu partoutdans la ville de S. Tomé où le gros ducommerce informel est tenu par les fem-mes, à Riboque aussi la contribution éco-nomique des femmes par le biais de leurparticipation à diverses activités informel-les, surtout dans le service domestique etle petit commerce de rue, est relativementimportante.

La population féminine est ainsi, simulta-nément, le principal moteur de l'économiedomestique et un des groupes les plus vul-nérables au phénomène de la pauvreté. Lesprogrès accomplis ces dernières années parles femmes de Riboque se résument en uneexpression: capacités croissantes et oppor-tunités encore limitées.

Les personnes ageesSi la population féminine de Riboque esttrès vulnérable à la crise économique, lasituation prend des allures particulière-ment graves dans le cas des femmes deplus de 50 ans qui vivent seules et, soitn'ont pas de famille, soit ne reçoiventaucune sorte d'aide de la famille. C'estdans ce groupe d'âge que la déprotectionsociale atteint ses valeurs maximum et laprivation devient inquiétante. Pour beau-coup de ces femmes âgées, la principalestratégie de survie consiste à céder unepartie de sa maison à des étrangers -géné-ralement des jeunes de la parenté, avecleurs propres difficultés économiques- enéchange d'aide et sécurité (explicite ouimplicite) dans la vieillesse. On se trouveainsi devant une "cohabitation intéressée",d'autant plus que les locataires finissentsouvent par hériter de la maison à la mortdu propriétaire.

Les hommes aussi, même ceux qui durantleur vie active possédaient une compéten-ce spécifique (un artisanat), traversent degrandes difficultés pendant leur vieillesse.Les retraites -quand elles existent- sontinsignifiantes, ce pourquoi, pour celui quine peut plus travailler, il ne reste qu'unultime recours, dépendre de la solidaritédes enfants. Il est cependant vrai que, dansces circonstances pénibles de manque deprotection extrême, les liens de consan-guinité fonctionnent avec plus d'efficacitépar rapport aux hommes que par rapport

aux femmes, à Riboque au moins, les casd'abandon familial et exclusion socialesont moins nombreux dans la populationmasculine.

Impact de la pauvretedans le reseau derelations socialesLa crise économique et l'exode rural ont euun double effet -contradictoire en apparen-ce seulement- sur le réseau enchevêtré derelations sociales existant dans le quartier:s'il est vrai qu'à eux deux ils ont confirméla capacité des individus à rester insérésdans la trame traditionnelle des relationsde parenté et d'amitié, il est également vraiqu'ils ont été à l'origine d'altérations notoi-res dans certains aspects de la relationentre la structure sociale et l'ordre symbo-lique. Les relations personnelles sont sujet-tes à un processus de révision permanenteet de changement, à la lumière des nouvel-les réalités, même si elles sont relative-ment déterminées par la tradition.

Voyons concrètement comment se déroulece dialogue tendu et créatif entre la tradi-tion et le changement.

La famille et la parenteLe système de parenté santoméen -marquépar une quasi absence de mariage mono-gamique, une haute incidence d'unions defait et de relations de visite, un indiceélevé de foyers monoparentaux dont lechef est une femme et une prévalence desdénommés " enfants illégitimes "-, est à lasource d'une logique culturelle spécifique,forgée dans le temps et qui a déterminé,selon Seibert , un réseau extensif de soli-darité familiale puis a contribué à unepression sociale, dans le sens d'entraide etde redistribution. .

Pourtant, il semble qu'il y ait aujourd'huiune fracture de la continuité dans certainsaspects de cet ordre symbolique, ce quidonne lieu à un processus de révision etchangement culturel, une rupture des rôlessociaux autour de certaines normes etvaleurs liées à la famille.

Il importe pour cela d'identifier les carac-téristiques les plus marquantes du systèmede parenté à S. Tomé, pour pouvoir ensui-te nous pencher sur le cas spécifique de

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Riboque.

Les "unions de fait" en série (serial cus-tomary unions) sont très communes àSTP, particulièrement dans les groupes àrevenus bas. Selon la tradition, quandune fille a un premier prétendant, elledoit le présenter à ses parents. Pour for-maliser une union de fait, le garçon doitfaire une proposition dans ce sens auxparents de la fille. Dans le cas d'uneseconde union, il n'est plus nécessaire dedemander l'approbation des parents, lesdeux partenaires peuvent se mettre d'ac-cord entre eux, sans plus. Une femmequi a sa première relation sexuelle doit,en principe, abandonner le foyer de sesparents. Si son compagnon est encorejeune et sans ressources, elle devra allervivre chez ses parents à lui. Si le parte-naire vit déjà en union de fait (ou unionco-résidentielle) avec une autre femme, ildoit installer sa nouvelle femme dans uneautre maison. Une relation de visite (vis-iting union) s'installe alors entre les deux.

Une grande partie des femmes qui sontdes chefs de foyers monoparentaux (35%en 1991, le pourcentage est de 85% si onconsidère les foyers sans revenus propres)ont des relations de visite avec des hom-mes qui entretiennent ce type de relationen plus de leur union co-résidentielle. Lesrelations de visite sont très communeschez les femmes à revenus bas. Unefemme pauvre qui vit seule peut établirune relation de visite avec un homme etdevient ainsi sa seconde ou troisièmefemme et elle lui concède ses faveurssexuelles en échange d'une contributionen biens ou en argent. Normalement,l'homme n'entretient cette femme et sesenfants que quand la relation dure

Avoir des enfants est le motif majeur defierté des femmes santoméennes. La vieest, selon cette conception nataliste, unacte de procréation continuelle. Féconditéégale féminité et vivre est pareil que don-ner la vie. Une femme qui renonce à laprocréation rompt ce courant vital etdevient suspecte de stérilité ; si elle pré-tend planifier sa fécondité, elle perd l'attri-but le plus important de la féminité. Si unhomme n'a pas d'enfants, il devientsuspect d'impuissance, s'il a peu d'enfants,

on dit de lui qu'il manque de vigueursexuelle .

Dans ce système de parenté, marqué par lapolygynie et par le culte de la fécondité,où les unions domestiques ne sont pas sta-tiques et la composition des familles mueavec fréquence dans le temps, les femmesont tendance à être beaucoup plus mèresqu'épouses. Ce sont elles qui, en fait, doi-vent assumer la principale responsabilitéavec les enfants. Malgré tout, il n'est pasrare de confier cette charge à d'autres élé-ments féminins de la famille -les femmesjeunes, qui n'ont pas de moyens de subsis-tance ou qui démarrent une nouvelle rela-tion, peuvent demander à la mère du "pèrede l'enfant" ou à sa propre mère de prend-re compte d'un ou plusieurs enfants, maisles tout petits restent presque toujoursavec leur mère. Quand l'enfant grandit, sison père est dans une autre union co-rési-dentielle, il peut amener l'enfant à sa nou-velle maison, mais ce n'est pas la règle.Un homme, quand il démarre une relationavec une femme qui a déjà des enfants,doit assurer la subsistance de ses " enfantspar alliance ", dans la mesure où la femmene réussit pas à les placer dans des mai-sons de parents.

Les principales caractéristiques du systè-me de parenté traditionnel santoméenétant identifiées, voyons maintenant cequi se passe à Riboque.

Les entretiens et observations menées toutau long de ce travail suggèrent que:

Le réseau extensif de solidarité familialebasée sur les liens traditionnels deparenté (frères et sœurs et demi-frères etdemi-sœurs, neveux et nièces, oncles ettantes à plusieurs degrés, parents, mèreset grand-parents, frères et sœurs "paralliance") contribue de façon complexeet créative à amortir les conséquencesdu processus d'ajustement structurel et àfaire face aux difficultés économiques ;

Il y a, en même temps, en tant que résultatde ce même processus de changement,une rupture dans la relation rôlessociaux/consensus symboliques autourde certaines normes et valeurs liées à lafamille.

De façon générale, le système de parenté

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et d'alliances consanguines existant àRiboque semble, en fait, continuer àreproduire les caractéristiques les plusimportantes du système de parenté tradi-tionnel santoméen: polygynie, haute inci-dence des unions de fait et relations devisite, nombre considérable de foyersmonoparentaux dont le chef est unefemme, énorme fluidité des unionsdomestiques et dans la composition desménages, taux élevé de natalité.

Pour de nombreux habitants de Riboque,l'expansion de la crise économique acontribué à renforcer, ou pour le moins àgarder, la logique culturelle spécifique deces relations de parenté -les individussavent que, par le biais de leurs relationsde consanguinité et d'alliance, ils sontinsérés dans un réseau extensif de solida-rité familiale qui fonctionne dans le sensde l'entraide (celui qui aide sera, à sontour, aidé demain) et de redistribution (cequ'on a doit être partagé dans le cercleélargi de la famille). Plusieurs personnesenquêtées continuent ainsi à penser qu'ilsréussissent d'autant plus efficacement àfaire face aux difficultés quotidiennesqu'ils sont mieux insérés dans un réseau derelations de parenté.

D'une façon générale les parents sontencore soutenus par leurs enfants lors dela vieillesse, dans d'autres cas, ce sont lesenfants qui, lorsqu'ils traversent eux-mêmes des difficultés, sont appuyés parles parents. Une assistance en argent, enproduits agricoles ou autre, outre l'appuien cas de maladie et l'échange de servicesde divers ordre (éducation des enfants,partage des informations sur les emplois etles petits boulots), sont ainsi fréquentsentre les membres d'une même famille,même si elle semble très dispersée et frag-mentée. Il existe en outre, presque tou-jours une relation privilégiée, plus rappro-chée, avec au moins certains membres dela parenté -la mère, le père, un oncle, lesfrères (les relations de solidarité de la fra-trie semblent assumer une importance par-ticulière dans le contexte des foyersmonoparentaux : en fait, au fur et à mesu-re que l'image du père absent se fait plusnette, l'autorité et la protection du frère leplus âgé tend à surgir comme une nouvel-le référence, susceptible de contribuer à

Vies qui se croisent et se décroisentTelmo, 27 ans, a à sa charge quatre enfants mineurs: un fils d'unefemme avec laquelle il vit en ce moment et trois autres enfants , fruitd'une relation antérieure de sa compagne, " Leur père n'aide pas,mais ma femme est une femme qui se débrouille un peu ", affirme-t-il.Avant cela, Telmo avait vécu en concubinage avec une autre femmedont il a eu un autre enfant. "qui vit loin", avec la mère et son nouveaucompagnon. " J'ai commencé à être père à 22 ans. Au début j'étaisresponsable pour cette famille, mais six mois plus tard la femme quej'avais ne m'allait plus, elle était assez têtue, alors j'ai préféré lui dire,on va arrêter l'histoire et chacun va faire sa vie de son côté. Puis jesuis resté un an et quelque sans femme, et après j'ai eu cette femme quej'ai maintenant ".Camila, 39 ans, a neuf enfants, qui sont le résultat, soit de relations devisite, soit de concubinages; quatre d'entre eux sont encore à sa char-ge. Son compagnon actuel entretient une relation de visite avec uneautre femme, mais la relation entre les trois est très difficile: " Il n'ai-de pas du tout, ça fait 5 ans que nous sommes ensemble, mais il n'ai-de en presque rien . Je vais laisser cet homme parce qu'il semble queson autre femme m'en veut ". Juca, 26 ans, a deux femmes (" une à la maison et l'autre en dehors")et il a un enfant de chacune d'elles. " Je vis bien avec elles, sansconflit, ce qui se met parfois en travers ce sont des problèmes finan-ciers ".Tomé, 43 ans, vit aussi entre deux maisons et deux femmes. De sacompagne il a six enfants et de l'autre -la plus jeune qu'il visite régu-lièrement- il n'a qu'un enfant, " mais elle, elle en a trois autres, pourcela avec le mien, ça fait quatre ". En outre, il faut compter " avecdeux enfants de plus, d'une fille avec laquelle je ne vis plus ".

l'unité de l'agrégat familial).

Mais en dépit du fait que, à Riboque, lesréseaux de parenté continuent à jouer unrôle social et économique important, lesdonnées recueillies semblent indiquerl'existence, sur le plan symbolique, d'unefracture de la continuité entre certainsaspects de ce système et ses acteurs. S'ilest vrai que la culture est un système desymboles qui a construit une significa-tion -ou, dans la définition de TalcottParsons " un sytème complexe et relati-vement cohérent de normes et valeurs quiorientent l'action sociale " - il n'en est pasmoins vrai que, quand une société setrouve plongé dans un processus de chan-gement, un continuel réajustement desformes culturelles à la nouvelle réalitééconomique et sociale devient nécessai-re. C'est la fameuse "fonction intégratri-ce de la culture" . Dans une telle situa-tion, autant l'ordre symbolique que lesstructures sociales se trouvent en trans-formation constante, et ces processus de

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Contrôler la féconditéLúcia, 26 ans et cinq enfants de pères différents, se lamente: "au coursde ces dernières années, je n'ai pas fait autre chose qu'accoucher,accoucher".Adália, 23 ans, étudiante infirmière, a une relation de visite depuisquatre ans. Son compagnon, dont elle a un enfant, vit avec une autrefemme, " qui est son épouse ", mais Adalia n'a pas de raison de plain-dre : " il appuie pour ce qu'il faut ". elle sait que pour terminer sesétudes, elle ne peut pas, pour le moment, avoir plus d'enfant. Elle estdécidée à tenir ferme: "pour rien au monde, ni pour un homme, je n'a-bandonnerai ce cours ".

changement sont interdépendants."Parfois ce sont les transformations desexpressions culturelles qui précédent cel-les du contexte social, d'autres fois cesdernières qui provoquent une réadapta-tion des premières, et dans d'autres casencore les deux niveaux traversent desphases de changements, lesquels peuventagir selon des directions convergentes oudivergentes en donnant lieu à des dyna-miques sociales très diverses".

Une culture donnée peut ainsi couvrir deséléments contradictoires ou donner lieu àdes interprétations différenciées de lapart des membres d'une société, et le pro-blème du rapport entre la culture et l'inté-gration est alors relativement complexe.Bourdieu parle même de "relative auto-nomie de la logique des représentationssymboliques par rapport aux détermi-nants matériels de la condition sociale" .

Les données recueillies à Riboque indi-quent que, malgré l'importance du réseautraditionnel de relations familiales commestratégie adaptative face à la pauvreté et àla crise économique, autant l'ordre symbo-lique que les structures sociales liées à laparenté sont soumises à un processusdynamique, et parfois contradictoire, dechangement et rénovation. Nous en vou-lons pour preuve :

La plus grande complexité et fréquencedes relations d'intimité sexuelle endehors du domaine codifié par latradition (parmi les jeunes, les relationssporadiques sont plus fréquentes, etelles ne peuvent se classer ni comme deco-habitation ni de visite, il semble qu'ily ait également plus de femmes quirompent avec les patrons de monogamieféminine et assument des relationsamoureuses extraconjugales);L'usure de certains codes de conduiteinhérents aux unions de fait (latradition veut que ce soit l'homme quiétablisse une résidence pour le couple,mais cette règle est soumise à desempêchements dus aux difficultéséconomiques -dans la pratique, la co-résidence signifie très souvent que cesoit l'homme qui se déplace chez unefemme déjà établie);L'usure de certains codes de conduiteinhérents aux relations de visite (un

Avoir de la famille est un appuiFabiano est peintre en construction, mais il a été au chômage parmanque de travail. Il vit avec sa femme et trois enfants, " chez la vieille".La mère, à la retraite, n'a pas les moyens de les aider en argent, mais ellea ses moyens qui viennent de l'extérieur, et en outre elle aide en natureavec des produits alimentaires. " Quand elle a, moi je reçois, quand moij'ai, elle reçoit ", affirme-t-il. Mais quels sont ces appuis ? Fabiano adeux frères qui vivent au Portugal. En outre, une autre sœur qui est poli-cier, "elle donne aussi un peu d'appui" .Herculano reconnaît: "Moi je m'en fichais de la famille, mais après uncertain temps, j'ai commencé à grandir et à savoir que "sa lumon n'guê"(les frères sont des parents) et alors je me suis mis à avoir des relationsavec la famille".Bien qu'il n'ait pas encore constitué de famille, Xavier a une charge : éle-ver les trois enfants d'une sœur qui est parti pour Libreville: "Ils étaientavec ma mère, mais elle est décédée et je ne peux pas les abandonner",explique-t-il Mais la mère des enfants aide aussi: "Elle m'envoie parfoisdes aliments, de l'argent, des vêtements, des matériels d'école… certeselle donne un appui ". En outre, il compte avec l'aide d'un frère qui estau Portugal: "Une fois ou autre, il envoie un peu d'argent. En plus,quand il revient, il y a toujours quelque chose pour nous -des vêtements,des chaussures… Il est venu par ici maintenant, moi je n'avais pas deposte de télévision et il m'en a acheté un "

Hommes qui" n'assument pas leur responsabilité" Elle s'appelle Bettina, elle a 22 ans et est de Príncipe. Il y a deux ansqu'elle est à S. Tomé. Quand elle est arrivée à la ville, elle est allée vivreà Riboque, " chez une dame ". A ce moment là, une relation avec unhomme commença. Ils allèrent vivre tous les deux dans la maison oùBettina habitait, mais la relation ne dura pas longtemps : " Quand je suistombée enceinte, il m'a laissée " explique-t-elle et " il ne donne rien pourl'enfant ". Elle connut un autre homme et elle est retombée enceinte. Ilsse mirent à vivre ensemble, encore chez Bettina. "Nous avons vécuensemble après que je sois tombée enceinte mais ce second homme queje pris m'a aussi laissée et maintenant il ne donne rien pour l'enfant".Vicência, 36 ans, veuve, préfère vivre seule, même si elle doit traverserde grandes difficultés, plutôt que d'entretenir une relation de visite avecquelqu'un. A son avis, les hommes n'assument plus leurs responsabilités: "il n'y a plus d'homme maintenant, l'homme ne vient plus que ses deuxjours à lui, puis plus rien40"

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nombre croissant d'hommes concernéspar une relation de ce type ne veulent pasou ne peuvent pas participer aux chargesde l'agrégat familial de leur compagne;

Une plus grande autonomie personnelle etéconomique de certaines femmes parrapport à la domination masculine (pourune femme sans ressource, sa sexualitépeut être un atout qu'elle utilise encalculant au mieux de ses intérêts;l'argent devient alors un agent pourréguler la relation sociale : si l'hommen'est pas en condition de contribuer à lasubsistance de l'agrégat familial, lafemme pourra chercher un meilleurpartenaire);Une tendance à la hausse pour unemeilleure maîtrise de la part des femmesde leur fécondité (ce désinvestissemntsymbolique dans le vecteur entre fertilitéet féminité a été lent, mais même ainsi,le souci de contrôler le nombre d'enfantset l'espacement entre les naissances estnotoire, surtout parmi les jeunes).

En bref, le patron des relations conjugaleset familiales existant à Riboque semblereproduire, pour l'essentiel, les caractéris-tiques les plus marquantes du système tra-ditionnel de parenté santoméen: polygamiemasculine, monogamie féminine, relationsde visite et unions co-résidentielles.

L'ensemble de ces relations d'alliance etde consanguinité se traduit en un systèmesocial avec des caractéristiques spéci-fiques: réseaux familiaux extensifs, gran-de fluidité des unions domestiques, grandemobilité de la composition des agrégatsfamiliaux et nombre élevé de foyersmono-parentaux, avec très souvent unchef de famille qui est une femme.

A cette relation sociale, correspond, sur leplan symbolique, un système de significa-tions reposant, entre autres, sur lesconcepts suivants:

Solidarité familiale (entraide etredistribution au sein de la famille);Valorisation des relations de parentéextensives (oncles, cousins, demi-frèreset sœurs, frères et sœurs par alliance, etc.)

Association fertilité/féminité;Prédominance du rôle de la mère sur lerôle de l'épouse ;

Association polygamie/masculinité.

La pression économique et sociale dans lesens du changement semble soumettrecertaines de ces valeurs à un processus deréorganisation symbolique:

La solidarité familiale devient plusdiffuse, surtout en ce qui concerne lerôle des hommes dans les réseaux deparenté traditionnelle;

Un nombre croissant de femmes essaied'exercer un certain contrôle sur sasexualité, en la séparant de la natalité,et, ce faisant, elles font la promotiond'une rupture symbolique entre laféminité et la fécondité.

Ce que je veux exactement, ce que j'aime-rais avoir, ce serait d'avoir deux ou trois

Une femme indépendante"Je m'appelle Rosario et j'ai quarante ans. J'ai fait des études commeéducatrice d'enfance. C'était en 81. Tout était alors plus facile pourmoi parce que je n'avais qu'un enfant. Après que j'ai commencé àavoir plus d'enfants, je trouvais que je gagnais peu et j'ai démissionnédu jardin d'enfants . J'ai été travailler au jardin d'enfants de l'écolefrançaise, je gagnais un peu plus. Après je me suis mise à faire levoyage pour Luanda. J'amenais de l'huile de palme, des chosescomme ça, là bas, j'achetais des paquets de vêtements que je portaisici et donnais à une collègue pour les vendre. Je gagnais ainsi l'ar-gent pour les enfants. Au moment du jardin d'enfants, j'avais un seulenfant, mais quand je parle u moment où j'allais à Luanda, j'en avaisdéjà quatre. J'ai sauté directement de 1 à 4. Quand j'ai multiplié parquatre, la vie est devenue un peu plus difficile.

Je les ai eus avec des pères différents. Je les ai eus avec des pères dif-férents parce qu'à ce moment-là, j'avais ma propre façon d'être, jen'aimais pas être prisonnière d'un homme. Si l'homme disait ou faisaitquelque chose qui ne me plaisait pas, je me retirais simplement. Je nedisais rien, je ne donnais pas beaucoup d'explication, je ne suppliaispas. Les hommes ne m'ont jamais laissée. Non, mes pères d'enfantsne m'ont jamais abandonnée . Au contraire, c'est moi qui les aban-donnais, moi qui avais cette manie de les laisser pour ceci ou pourcela. Maintenant, je suis toujours avec le même homme que j'ai prisen 95. J'ai trouvé cet homme, mais comme je n'aime pas demanderpour donner à manger à mes enfants, je n'ai pas voulu avoir d'enfantsavec lui. J'ai décidé de faire la planification pour ne pas en avoir plus,rester avec ces quatre enfants seulement. J'ai évité d'en faire cinq,répéter encore la même chose, avec cinq et avec des pères différents,avec la crainte qu'un jour la même chose arrive: avoir ainsi une gran-de contrariété.

Quand j'ai laissé de faire le voyage à Luanda, c'était un peu plus dif-ficile pour moi. A ce moment-là, j'ai réussi à arranger ce mari. Cen'est pas exactement un mari avec lequel je vis, moi je suis plutôt laseconde personne, mais il me traite bien, il traite les enfants comme sic'étaient les siens. Il me donne un peu d'argent et puis je fais des peti-tes choses : de la glace, je vends des vêtements, des choses.

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Vivre sur le dos d'autruiFrancisca dit qu'elle n'élève pas d'animaux "parce que des personnesvolent et tuent"; Firmina a fait de l'élevage dans le temps, mais elle estarrivée à la conclusion que "ça ne vaut pas la peine, parce qu'il y abeaucoup de vol et d'embrouille à Riboque"; Bemvinda n'a pas deplace pour faire de l'élevage, mais même si elle en avait, elle ne leferait pas parce que "on le sait, les gens volent". "Vous savez", dit Xavier, "ici à Riboque, quand on pose quelque chosepar terre, il y a quelqu'un qui vient et qui l'enlève comme si c'était àlui ". Il raconte comment sa volière avec des pigeons a été prise d'as-saut "Ils ont défoncé la porte, mais moi je ne sais pas qui a fait cela,si c'est quelqu'un d'ici ou quelqu'un de l'extérieur. Ca arrive n'impor-te où dans le quartier, mais on n'attrape jamais personne. Moi je nesais pas comment ils peuvent savoir quand c'est le moment de faire ça.Moi je pense que ce sont des gens qui ne sont pas de loin, mais je n'aivu personne, je ne peux pas parler".

commerces à moi, pour me sentir libre,libre, tout à fait libre. Quelques fois jevoudrais voyager à nouveau pour faire ducommerce, c'est l'homme qui ne permetpas. Mais si je trouvais mon occasion, jem'en vais, et s'il ne me laisse pas, lui, ilreste là. C'est que depuis 96, je me suismise à dépendre un peu de lui, beaucoupnon, un peu. Moi je tourne toute seule.Si je le laisse, je réussis à survivre, parceque suis une lutteuse. Mais ça devientpénible encore une fois pour moi, et moije voulais en finir avec çà. D'une certai-ne manière, je suis un petit peu indépen-dante, mais en même temps, plus mainte-nant. Avec l'âge que j'ai, je me sens bienseule. J'ai eu des problèmes graves maisce n'est pas comme maintenant, devoirsupporter un homme à cause de l'argent.Si ce n'était pas pour l'argent, je prendraismes distances. C'est le plus grand pro-

Les voisins? Bonjour, bonsoir"Avec le voisin, c'est chacun chez soi", affirme Vicência, "Si aujourd'-hui je n'ai pas de sel, je vais en demander, demain, je ne peux plus yaller, je dois me débrouiller. Chacun se débrouille. ".

"chacun chez soi, bonjour, bonsoir, sans provoquer de contradiction ",défend aussi Sandrina. Quant à recourir aux voisins pour demanderquoi que ce soit, elle avoue qu'elle préfère le contraire - "que ce soienteux qui viennent me demander". Des conflits? Il y en a bien quelquesuns: "il y a des gens qui jettent leurs ordures n'importe où, et puis il ya le cas de cet égout, là bas en face de ma maison -quand ils avaientfait la route, ils avaient fait cette rigole pour la pluie, mais le voisin ya fait passer un égout et maintenant il y a beaucoup de moustiques ".

"A Riboque, même si on évite les conflits, il y en a qui semblent êtrenés pour le conflit " , dit Adália. Raison pour laquelle elle préfère res-ter dans son coin.

blème que j'ai.

Amis et voisinsUn des résultats les plus évidents de lacrise économique est, de l'avis de la majo-rité des personnes enquêtées, la détériora-tion progressive de l'atmosphère de bonvoisinage à Riboque. Les bagarres de ruese multiplient, les conflits publics, les dis-cussions provoquées par des dettes nonpayées, les cas de rapine augmentent (levol de petits animaux, par exemple,devient tellement fréquent que la majoritédes habitants a renoncé à élever des petitsanimaux) - et un sentiment de méfiances'est généralisé ainsi qu'une insécuritéjadis inconnus dans le quartier.

Le surlotissement du quartier, aggravé parles problèmes sociaux et économiques,provoque ainsi de constants conflits dansla gestion de l'espace et dans le contrôledes ressources communes, rongeant lente-ment les relations antérieures de voisinage-qui reposaient sur la solidarité et l'entrai-de- au point de les transformer fréquem-ment en relations de méfiance, ou tout aumoins, de prise de distance. Par les tempsqui courent, tout le monde se soucie de sapropre vie. Les voisins ? Evidemmentqu'on peut compter sur eux en cas de mal-adie ou d'un petit besoin -du sel, des allu-mettes, des petites choses comme ça-.Mais de l'avis d'une grande partie des per-sonnes interviewées, ce n'est qu'en gardantune certaine distance que l'on réussit à évi-ter les abus et les intromissions.

Les terrasses de danse, les sociétés récréa-tives, les groupes culturels ont aussi perduune grande partie de leur importance entant que locaux de convivialité, reproduc-tion sociale et renforcement de la cohésioncommunautaire.

Cependant, si la pauvreté a un impactnégatif évident sur les relations de voisi-nage, le fait est que les relations d'amitiéjouent toujours un rôle très important dansle quotidien de la majorité des gens deRiboque. Les réseaux et liens de compli-cité entre un individu et ceux qu'il connaîtcontinuent à être déterminants, et un nom-bre très significatif de personnes enquê-tées reconnaissent qu'elles recourent fré-quemment à des aides de ce genre dans

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leur vie quotidienne.

L'appui des amis ne revêt pas toujours laforme d'assistance monétaire ou de presta-tion de services -il peut consister, parexemple, en informations sur un emploi, unpetit boulot ou un négoce quelconque-. Eneffet, de nombreux enquêtés sentent queleur réseau de relations et contacts person-nels constitue, par les temps qui courent, lafaçon la plus sûre de dénicher un travail oude réaliser une affaire profitable.

Mais, étant donné que tous les amis ne sontpas pareils, chaque amitié implique unesorte différente d'entraide. Voyons dans lecas de Xavier: "L'ami qui m'arrange despetits boulots est mon collègue de chantier,mais l'ami à qui je demande de l'argent estun autre, c'est mon "compère" (…) jecompte sur l'appui de certain amis quandj'ai certains travaux à faire -mettre desplants de bananier en terre, couper l'herbedans mon jardin … Tous non, mais un,deux et jusqu'à trois peuvent m'aider ainsi"

Dans de nombreux cas, il devient difficiled'établir une distinction nette, dans lesréseaux de solidarité, entre parenté et ami-tié. En effet, les caractéristiques diffuses etextensives de la parenté font que les rela-tions d'amitié soient fréquemment un pro-longement des liens de sang ou d'alliance -il est toujours possible, en faisant appel àune liaison au deuxième ou troisièmedegré, du côté du père ou de la mère, detrouver des racines communes qui cimen-tent la conjonction d'intérêts ou donnentlieu à une relation d'assistance mutuelle. "Nous sommes tous cousins ", dit-on fré-quemment à S. Tomé -et le quartier deRiboque n'échappe pas à cette règle.

D'autre part, les liens entre individus dedifférentes familles sont très souvent à l'o-rigine d'alliances qui, bien que pouvantêtre de clientélisme, reproduisent pourl'essentiel le discours de parenté et sont àl'origine d'une relation affective qui peutprendre des allures de relation familiale.C'est le cas des relations entre "compères"ou entre parrains et filleuls.

Strategies d'adaptationet modes de vieLes dépenses d'alimentation consomment

Les amis sont pour les occasionsOrlando a quelques amis intimes avec lesquels il peut compter en casde besoin -ils lui trouvent un travail, ils lui prêtent de l'argent, luipayent des bières, etc. En contre-partie, il n'ignore pas qu'il a le devoirde les aider chaque fois que nécessaire. Il donne un exemple: "Si j'aiun ami qui a du travail dans le jardin, une semaine avant il m'avertit,fixe le jour et j'y vais. Nous travaillons tout en blaguant et en riant etquand on a fini, il met la table, on s'assoit, on mange, on boit. Moi jene lui demande rien parce qu'il est ami et qu'il veille à mes besoins.Quand il me demande combien coûte tout ce travail que j'ai fait, je luidis que ce n'est pas la peine de payer".Mais, étant donné que tous les amis ne sont pas pareils, chaque ami-tié implique une sorte différente d'entraide. Voyons dans le cas deXavier: "L'ami qui m'arrange des petits boulots est mon collègue dechantier, mais l'ami à qui je demande de l'argent est un autre, c'estmon "compère" (…) je compte sur l'appui de certain amis quand j'aicertains travaux à faire -mettre des plants de bananier en terre, cou-per l'herbe dans mon jardin … Tous non, mais un, deux et jusqu'à troispeuvent m'aider ainsi"

L'importance d'avoir un bon parrain.Vicência, traverse de graves difficultés pour élever ses six enfants,après être tombée veuve il y a 8 mois. Son mari travaillait commeplombier pour une des entreprises les plus importantes de S. Tomé.L'entrepreneur, qui est aussi parrain de l'une des filles, a depuis lorsprêté une certaine aide à la famille de Vicência. " Il donne cent milledobras, cent cinquante mille... ça dépend " Une des grandes difficul-tés de Vicência est de réussir à envoyer les quatre enfants à l'école:"des difficultés de blouses d'uniforme, cahiers, crayons, cartables,tout. Quelques fois je les envoie là où travaillait leur père pourdemander un appui pour acheter du matériel d'école, parce que moi,je n'y arrive pas ". Le parrain remplit ses obligations et il aide.

une partie importante du budget familialde la majorité des gens de Riboque - il faut"étirer" tous les jours l'argent de façon à cequ'il arrive au moins pour deux repas parjour-. Quand il n'y a pas d'autre solution,il faut compter avec la solidarité familiale,emprunter à quelqu'un ou alors " prendre àcrédit " dans la boutique la plus proche.En pratiquant, dans les limites du possible,cette gymnastique budgétaire compliquée,on arrive encore à mettre de côté pour l'é-lectricité, le matériel scolaire des enfants,le vestiaire. Mais c'est difficile. Arrivetoujours le jour où il faut prendre la duredécision de couper les dépenses d'un côté.Normalement on commence par l'électri-cité.

Certaines personnes font ainsi cette diffi-cile gestion quotidienne de leurs ressour-

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ces en donnant la priorité à certains paie-ments et en éliminant des dépenses préci-ses (les vêtements par exemple, et ellespassent au stade d'acquisition d'occasionau "marché au barda"); d'autres optentpour faire dans le même temps des petitspaiements à plusieurs dettes et "comptes àcrédit"; d'autres font appel aux obligationsd'assistance mutuelle découlant des liensde solidarité extensive; d'autres emprun-tent d'un côté pour payer de l'autre, etd'autres encore accumulent les dettes, enmaintenant les créditeurs dans l'espéranced'une bonne affaire ou d'un travail bienrémunéré qui leur permettra de solder tousles comptes en retard.

L'écrasante majorité des personnes inter-viewées pense que, à cause du coût élevéde la vie, il faut maintenant travailler rela-tivement plus qu'il y a dix ans pour arriverà assurer leur survie économique quoti-dienne.

En fait, avec la crise économique et le col-lapsus des entreprises agricoles étatiques,le chômage est parti en flèche et le marchédu travail dans la capitale est loin de cor-respondre aux besoins d'une populationsuburbaine en croissance. Résultat : l'em-ploi -au moins dans le sens d'emploi sta-ble, avec une relation formelle d'em-ployeur/employé- est devenu rare. Unnombre toujours plus élevé de personnes aessayé de s'adapter à cette nouvelle réalitépar le biais d'une grande variété de straté-gies informelles, comme :

En prêtant des services aux particuliers;En faisant des ménages et autres travauxpour l'extérieur

En achetant, vendant, échangeant toutessortes de choses

En vendant les excédents (surtout ceux

qui ont des glèbes dans d'autresendroits, loin de Riboque );En rendant de petits services deréparation et autres petits boulotsrémunérés;"en se débrouillant " dans un nouvelartisanat (ou, de préférence, plus d'un);

en louant une partie de la maison (ou enla cédant en échange d'une aide);

en confectionnant de la nourriture pourvendre.

La majorité des gens essaie, ainsi, de survi-vre par le biais d'un ensemble très hétéro-gène d'activités informelles, commercesoccasionnels, aides variées et petits bou-lots. La stratégie semble être de trouverautant de travaux que possible, et suppléerainsi à l'absence de travail sûr. Il est impor-tant d'être habile dans un nombre maxi-mum de domaines -réparer n'importe quoi,réaliser n'importe quelle tâche- pour ne per-dre aucune occasion de gagner de l'argent.

Ces boulots et petits négoces de rue, dansleur grande majorité occasionnels et irré-guliers, sont presque toujours trouvés pardes informations de bouche à oreille, rai-son pour laquelle il est fondamental quechaque individu soit intégré dans unetrame serrée et efficiente de relationssociales. Les réseaux extensifs de paren-té, amitié et de compères sont, encore unefois, déterminantes.

Le développement de ces activités infor-melles à Riboque et dans les zones alentourest un bon exemple des stratégies des popu-lations suburbaines pour atténuer les effetsde la pauvreté et diversifier au maximumleurs revenus -le secteur informel est, dansce quartier, composé par des dizaines demicro et petites "entreprises", dont lamajeure partie dans le secteur de la produc-tion de biens et services, avec une inciden-ce marquée sur la construction et le petitcommerce de rue. Les professions les pluscommunes chez les hommes (très souventen accumulation) sont : maçon, peintre,menuisier, charpentier, tailleur, cordonnier,"candongueiro" (vendeur ambulant), méca-nicien. Les femmes sont surtout vendeusesde rue, vendeuses de marché (palaiês),laveuses, couturières, coiffeuses.

Les avantages de ce secteur informel sont

Demander à qui aVicência n'avait pas d'argent pour faire faire au moins un uniformepour chacun de ses quatre enfants en âge scolaire. Elle a résolu leproblème par le parrain de l'une des filles : " J'ai envoyé ma filledemander de l'argent au parrain qui a des biens. Il lui a donné centmille dobras. Avec cet argent, j'ai acheté le tissus pour les quatreblouses. Je l'ai mis chez le couturier et ils m'ont demandé quinze milledobras pour chacun. Alors, j'ai parlé avec une autre personne qui m'adonné quarante mille. Avec ça, j'ai payé trois blouses, je me suisdébrouillée à sortir ce qui manquait. Mais maintenant il manqueencore l'argent d'une blouse de plus ".

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évidents: rapidité d'adaptation aux contin-gences imposées par le marché local, enoffrant de petites opportunités d'emploi etde négoce aux secteurs les plus défavori-sés de la population; grand enracinementdans l'économie locale avec utilisation dela main d'œuvre locale et production pourle marché local.

La majorité des gens de Riboque -bien queproduisant un discours pessimiste par rap-port à leur situation économique- se révèleainsi capable de formuler des stratégiescomplexes et de recourir à un ensembledynamique et diversifié de moyens pourfaire face à la pauvreté et à l'adversité. Unefamille qui perd un emploi, par exemple,peut essayer de récupérer ce revenu par unesérie de moyens alternatifs : louer unechambre dans leur maison, aller chercherdu bois de chauffage pour le vendre, réali-ser de petits travaux rémunérés, s'occuperd'une dame âgée, recourir à l'aide familialeet des amis, etc. Ces activités concernenttous les membres de l'agrégat familial, cha-cun cherchant, de diverses façons et endivers endroits, différentes sources d'ali-mentation, combustible, argent, aide.

Le concept de moyen d'existence (liveli-hood) , plutôt que celui d'emploi, sembleêtre celui qui s'ajuste le mieux au caractè-re pluriel de cette réalité économique. Enpratique, "les concepts de emploi et chô-mage n'appartiennent qu'aux pays indus-trialisés, dans lesquels un travailleur, sou-tenu par les bénéfices de la sécurité socia-le, peut se payer le luxe de passer quelquetemps au chômage. Beaucoup de tra-vailleurs, dans les pays plus pauvres, n'ontpas ce choix. Ils doivent forcément tra-vailler à quelque chose, pour improductifou mal payé que soit leur travail" .

Les moyens d'existence recouvrent toutesles activités qui assurent la survie et lesconditions de vie des familles. L'emploipeut, par lui même, assurer ce mode devie, mais dans la plupart des cas, les stra-tégies d'adaptation des gens de Riboqueconcernent une grande variété d'activitésdes divers membres de l'agrégat familialet ils se basent sur les multiples formesd'accès à des biens, aliments, revenus etsécurité. Par exemple, donner une valeurau seul travail rémunéré n'aurait aucun

sens quand la contribution de la produc-tion domestique non rémunérée (surtoutdes femmes) est d'une extrême importancepour la consommation privée des famillesde Riboque.

Le nombre de personnes qui combinentleurs divers travaux informels avec la cul-ture de petites parcelles de terrain ou l'éle-

Les terres loin de chez soi n'alimentent personne Ilione a quelques petites glèbes, mais elles sont trop loin pour lui êtred'une quelconque utilité. "Nous pouvons y aller en voiture, partiravec la faim et arriver là, ne rien trouver, et revenir ensuite avec plusde faim encore", affirme-t-il. "Quand j'habitais Angolares, je plantaisde la patate douce, du manioc, de la matabala, mais en ville je n'aiplus cet espace, c'est pour cela que je parie d'avantage sur les chan-tiers", conclut-il.Velcy a un terrain à Cova Barro qui ne lui sert pas à grand choseparce que "les choses ne restent pas: fruit à pain, banane, tout est volé". Il a aussi une parcelle à Melhorada, mais ça ne vaut pas la peined'aller jusque là: "j'y vais parfois, et la dame qui prend compte de celame dit qu'il n'y a rien et elle me donne alors un litre d'huile de palme;ça ne vaut pas la peine de payer la course de voiture et me déplacer.

Avec un seul travail, impossible d'y arriver. Ilione est maçon, mais il a de plus en plus de difficulté à s'assurer un

travail régulier -alors qu'il y a deux ans il avait eu six ou sept chan-tiers, l'année passée, il n'en a trouvé que deux; pour cela, il rend aussidivers petits services comme charpentier ou peintre. En outre, il seconsacre au commerce des escargots de mer, il les prépare la nuit pourque sa femme les vende le lendemain au marché -" quand je n'ai pasde travail, je me débrouille avec ce talent ", affirme-t-il.Claustrino vend de la quincaillerie sur un marché de rue, associé avecun ami: "ces choses pour ouvrir et fermer (gonds et charnières) , fer-metures, clefs et verrous… mais chacun d'entre nous a sa partie, sic'est lui qui gagne, c'est à lui, si c'est moi qui gagne, c'est mon argent.". le jour où la quincaillerie ne donne pas de revenu, l'un d'eux doit "s'y prendre à deux mains " et sortir chercher du négoce autre part. "Vendre en marchant, chercher du produit pour l'occasion -tablettes debouillon, spaghettis, margarine, lait en poudre, dentifrice, ou ce quitombe " -la règle est acheter bon marché dans les magasins et reven-dre dans la rue avec une petite marge de bénéfice. Claustrino estinsistant : "si le client traîne, je l'appelle, je m'approche de lui". Pourça la marchandise se vend : " parce que je pousse le client, il faut ven-dre oui". Il y a des personnes, comme Orlando, qui sont toujours prêtes à fairequelque chose. Il ne refuse jamais un service -il est menuisier, mais ilpeut exercer comme charpentier, peintre, maçon, électricie,n en outre,il coud les chaussures, creuse des rigoles, coupe l'herbe… Orlandosait que " le travail sûr et certain est de l'histoire passée". Xavier est du même avis: "aujourd'hui, on ne peut pas s' arrêter àattendre un seul travail, on doit sauter d'un côté à l'autre pour cher-cher ce qui donne".

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vage de petits animaux, bien qu'apprécia-ble, n'est pas aussi significatif que dansd'autres quartiers suburbains de la capitalesantoméenne. Trois facteurs concourent àce résultat : la densité élevée de popula-tion et d'habitations dans le quartier, ce quilaisse peu de terrain libre pour des pra-tiques agricoles ; l'exode rural qui a éloi-gné nombre des nouveaux habitants deRiboque de leurs glèbes ou fermes d'origi-ne ; et, enfin, le vol de plus en plus fré-quent et systématique des produits agrico-les et d'élevage.

Les interviews ont également montréqu'un nombre de plus en plus important defamilles trouve un complément pour leurséconomies domestiques dans les envois

occasionnels -en argent ou en nature- d'unparent qui travaille à l'étranger. Le Gabonet l'Angola et, surtout, le Portugal sont lespays où le flux migratoire d'habitants deRiboque a été le plus intense au cours deces dernières années.

Les aspiration des gensde RiboqueLes gens de Riboque donnent de la valeurà beaucoup d'autres choses qu'un revenuélevé -presque tous désirent avoir un loge-

ment convenable, de la nourriture variée,accès à l'eau et à l'électricité, de meilleursservices médicaux, des écoles plus effi-cientes, une subsistance sûre, des emploissatisfaisants-. Le revenu semble être, pourla majorité des personnes consultées, unmoyen pour atteindre leurs fins et non pasune fin en soi (la preuve en est qu'une par-tie substantielle des plus values réaliséesest redistribuée en activités qui rendent lavie plus digne d'être vécue mais qui n'ontpas de prix -l'entretien des relations avecles amis ou la solidarité familiale, parexemples). Toutes les activités valoriséessocialement et culturellement n'ont pasforcément un prix sur le marché. Enoutre, si le fait de produire un revenu aideà résoudre quelques nécessités de base, ilne garantit pas, à lui seul, la santé, l'édu-cation des enfants, la stabilité familiale oula sécurité sociale.

Il est vrai que lorsqu'ils sont interrogés surleurs aspirations concrètes par rapport àl'avenir, la majorité des gens de Riboquede plus de 35 ans tient un discours pessi-miste. Ils pensent que le manque de reve-nus constitue une puissante barrière à laconcrétisation de leurs rêves et, en ce sens,les limitations économiques sont aussienvisagées comme des limitations d'op-portunités. Ils préfèrent donc ne pas fairebeaucoup de plan à terme et ne pasgaspiller beaucoup d'énergie pour ce quiva au delà du quotidien. Les attentes sont,en général, basses. La déception, leconformisme, le scepticisme sont les sen-timents communs à la grande partie despersonnes qui sont passées par l'expé-rience de la transition à une économie demarché.

On sent cependant que, à mesure que l'ondescend dans la tranche d'âge des intervie-wés, l'inconformisme, l'insatisfaction, et -en même temps- le désir de se fixer desbuts, d'avoir des ambitions, augmentent enraison inverse de l'âge. Il y a un niveaudéterminé, (que nous pouvons situer entre20 et 30/35 ans) où tous les gens deRiboque ont des idées bien définies et pré-tendent à leur " place au soleil ". La majo-rité des jeunes essaie alors de déployer desinitiatives qui leur permettent de concréti-ser leurs rêves (presque toujours de natureprofessionnelle). Pour cela, ils ont surtout

Avoir peur de l'avenirs"Des plans pour l'avenir? Je peux avoir des plans, mais je n'ai pasd'argent, ce qui revient à rien. Moi, je n'ai aucun avenir. Quel avenirj'ai ici ? Pour moi, je pourrais même mourir, si ce n'était pour lesenfants. Je ne veux pas devenir vieille, non !" (Felícia, 46 ans).

De la famille à l'étrangerLe frère de Lucindo vit au Portugal. Cette année, quand il est venu envacances, il lui a laissé de l'argent : "vaille que vaille, avec cet argent,on fait un petit quelque chose".Zé Rocha a aussi un frère au Portugal qui l'aide: "l'appui que j'ai leplus est que lui m'envoie parfois de l'argent; si j'ai besoin de quelquechose et que je ne peux pas l'acheter, cet argent arrive et moi j'achè-te".Vitória a plusieurs frères et soeurs au Portugal et qui l'aident réguliè-rement: "aides matérielles, quelque chose dont j'ai besoin, parfois dumatériel (de coiffure) que je commande -si c'est à leur portée, ilsenvoient; certainement que c'est une grande aide".Adelino a des parents à Lisboa: "vous savez, dans le cas des vêtementset des chaussures, c'est difficile d'acheter ici, parce que c'est très cher,ce sont ces appuis que nous demandons et ils envoient".

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besoin d'occasions à la hauteur de leurscapacités et de capacités adaptées auxoccasions existantes. Les espérances parrapport au futur se rétrécissent forcémentau fur et à mesure que le temps passe sansque ces aspirations se concrétisent -parabsence de capacités ou d'opportunités.

Capacites versusopportunitesL'époque actuelle est universalisante etglobalisatrice. La diffusion d'une cultureinternationale à travers la globalisation estaussi importante que la diffusion de pro-cessus économiques ou politiques. Par denombreux moyens -musique, télévision,mode, commerce-, les idées et valeursexogènes s'amalgament, de toutes parts,avec les idées et valeurs locales. D'autrepart, " la société d 'aujourd'hui est unesociété de changement, risque et incertitu-de ". Tout ce qui, jusqu'à il y a peu, sem-blait immuable est maintenant motif deréflexion critique, depuis les avancéestechnologiques et scientifiques jusqu'auxpratiques culturelles les plus traditionnel-les . Nous assistons à ce que Tourainedésigne par la " rupture entre les acteurs etles systèmes établis". Ces transformationsaffectent les personnes de façon intime,transformant leur subjectivité et produi-sant de nouvelles subjectivités. Il existeune connexion croissante entre lesinfluences universalisant de la société etles dispositions personnelles. Une desconséquences de cela est l'expansion desmécanismes qui extraient les relationssociales et les systèmes symboliques deleurs circonstances locales pour les ré arti-culer dans des contextes plus vastes (ouvice-versa) .

A Riboque, les nouvelles dynamiquesimposées par le réajustement structurel etpar la transition à l'économie de marchéfournissent quelques matières à réflexionsur ce qui vient d'être exposé. En effet, lanécessité d'adaptation des jeunes deRiboque à cette conjoncture de changementsemble être le principal responsable de l'é-mergence de formes d'interaction socialebasées sur la valorisation de conceptsexcentriques à la culture traditionnelle san-toméenne: les vertus de l'épargne, l'espritde risque, l'initiative entrepreunariale, letravail comme une fin en soi.

Les interviews réalisées ont permis dedépister quelques uns de ces modèles decomportement chez un nombre significatif(bien que minoritaire) d'interviewés. Il s'a-git surtout de jeunes du sexe masculin, àl'âge compris entre 20 et 35 ans, avec

Des jeunes avec des rêvesJuca, 26 ans, accumule le travail dans une auto-école avec quelquesautres petits boulots -réparation de bicyclettes, petits services demaçon, etc. " Je dois faire beaucoup de choses pour réussir à ramenerquelque chose à la maison" affirme-t-il. Mais lui aussi a son rêve:acheter un jour un téléviseur avec son lecteur de vidéo et passer desfilms dans les petites places du quartier. " J'essaie de viabiliser l'idée,mais ça ne donne pas de résultat " dit-il en se lamentant. Le problè-me est qu'il n'y a pas d'argent. .

Adália, 23 ans, est étudiante en 2ème année d'un cours d'obstétrique.Ce n'est pas facile pour elle de concilier son rôle d'étudiante avec tousses autre rôles -compagne d'un homme, maîtresse de maison et mèred'un bébé de 4 mois -mais elle est bien décidée à y arriver. "rien aumonde, ni aucun homme", ne l'empêchera d'avoir son diplôme desage-femme. Après, ses plans sont ambitieux : "Vu le style des chosesdans le domaine de la santé, je n'ai pas l'intention de travailler tou-jours pour l'Etat. D'ici cinq ou six ans, j'espère avoir tout ce qu'il fautpour monter une clinique ".

Eduardo a 27 ans. Il est jardinier, mais comme le salaire n'arrive pas,il fait aussi le manœuvre de maçon occasionnel. Toutefois il sait qu'ila un atout en main : le permis de conduire. Il lui faut juste " acquérirplus de pratique en conduite avant de chercher un emploi ". Pour l'a-venir, il espère trouver une place comme taxi ou bien un emploi dechauffeur. .

"L'avenir..., moi je voudrais une vie meilleure: avoir ma propre mai-son, mon propre salon de coiffure …", dit Vitória, 29 ans. Mais elleajoute: "dans ce pays, il vaut mieux ne pas trop rêver, parce que cerêve en reste là, il ne devient jamais réalité". Elle hésite: "bon…, s'il yavait un endroit où on pouvait dire: je vais exploiter à tel endroit, pourvoir si j'obtiens un financement, un appui ou quelque chose, j'irais"

Pour Juvenal (26 ans) les projets relatifs à l'avenir passent par le sec-teur formel: il veut ouvrir son propre atelier de cordonnier: "avecpatente et tout officialisé". Pour le moment, il travaille comme jardi-nier et parfois il arrange des chaussures chez lui, mais tout lui manquepour "parier sur la chaussure" - matériels, outils, un petit espace detravail "Ce que je gagne est pour le quotidien, ça n'arrive pas à résou-dre le problème d'avenir " affirme-t-il, " mais si j'avais un atelier, jesais que la situation se normaliserait ".

Claustrino (24 ans) était aide tailleur à l'atelier de son cousinFernando jusqu'au jour où celui-ci décida d'aller au Portugal. A 20ans, il a hérité d'un petit atelier, avec tous les ustensiles du métier etquelques clients sûrs. Maintenant, son ambition est de donner de l'ex-pansion à l'affaire, de créer des postes de travail, d'aggrandir l'ate-lier : " Sauf que pour ça, mon pouvoir économique est un peu faible "regrette-t-il "J'aimerais qu'il y ait d'avantage d'appuis, des institutionsqui puissent financer des jeunes avec des initiatives sérieuses"avoue-t-il

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presque toujours un parcours assez tour-menté et une personnalité moulée danscette lutte quotidienne contre les adversi-tés. Ayant réussi à grimper dans la vie à laforce du poignet, ils ont atteint desniveaux d'aisance économique inconnusdans la majorité de la population et ils ontune histoire de succès à raconter. Ce sont,aux yeux des autres habitants de Riboque,de petits entrepreneurs qui ont réussi.

Ces personnes ont su interpréter le sensdes changements sociaux et économiquesdes dernières années, en les traduisant enaltérations effectives de comportement.En adaptant leurs habitudes et attitudesaux caractéristiques volatiles d'une sociétéen transition, ils ont réussi à gérer les ten-sions, amortir les chocs culturels etpsychologiques et créer leurs propreschances. Leur capacité à réaliser des aspi-rations et à produire des changementsréels dans la qualité de vie continue, mal-gré cela, à être intimement liée à la capa-cité de convoquer des solidarités à l'inté-rieur des réseaux extensifs de parenté etd'amitié. Il est certain que, en parallèle à lalogique familiale d'accumulation et redis-tribution, se dessine une logique mercanti-liste d'accumulation et investissement,mais l'aide des gens de la famille et desamis est toujours le moyen le plus rapidede réunir les appuis nécessaires à la viabi-lisation d'une entreprise ou d'un commer-ce donné.

Le fait que ces jeunes établissent un lienfortuit entre les capacités et les occasionsest également significatif, ils reconnais-sent ainsi que la possibilité d'explorer unéventail plus varié d'options dans lesdivers domaines de leur vie est lié audéveloppement de leurs aptitudes dans cesmêmes domaines.

Les entrevues réalisées montrent égale-ment que la réponse des femmes aux nou-veaux dynamismes, tensions et conflitsimposés par la libéralisation de l'économiecontinue à être conditionnée par de fortsmécanismes discriminatoires -en grandepartie d'origine culturelle- qui créent uneinégalité de chances et de capacités parrapport aux hommes. Tandis qu'ellesjouent des rôles traditionnels dans unesociété en changement, sujettes à diverses

Saisir les chancesCLors de notre première entrevue avec lui, Lucindo (25 ans) s'est pré-senté ainsi:" Je suis maçon, peintre, plombier…, je m'y entends un peudans chaque chose. Maintenant je me bats pour l'ouverture d'unmagasin, avec l'aide d'un frère qui est au Portugal ". Cinq mois plustard, le magasin était ouvert et le commerce marchait plus ou moins.."J'ai beaucoup souffert",dit-il en se livrant, "ma mère m'a abandonnéet j'ai dû lutter énormément. Je suis entré dans un atelier de couture,je suis sorti de la couture ; ensuite carrossier, mais je n'ai rien appris; après je suis rentré dans un chantier, je me suis consacré à maçon,j'ai appris quelque chose, mais le travail était très dur. Maintenant, cefrère m'a laissé un petit peu d'argent et avec cet appui, j'ai ouvert lemagasin ". Ses plans pour l'avenir : " monter dans la vie en tra-vaillant".

Cesário (30 ans) a une histoire de réussite à raconter: "Ma vie decommerçant est issue du fait que mon père a trouvé des femmes et il aabandonné la maison. C'était l'époque où je terminais la 11ème clas-se, ma mère faisait des gâteaux et elle les mettait ici devant la porte etmes sœurs les vendaient. La vie devint plus difficile et je fus moi aussiforcé à faire du négoce : aller chercher des boîtes de jus de fruits et debières dans les bars, les laver et faire du yaourt. Alors j'ai eu l'idée defaire ce commerce-ci : j'ai commencé par acheter quelques plancheset poteaux et j'ai installé ce kiosque ; j'avais un ami qui à ce momentlà m'a prêté l'argent, mon oncle aussi m'a prêté de l'argent et j'ai réus-si à démarrer. J'ai acheté quelques produits, je me suis débrouillépour trouver un frigo par le même ami et le commerce est allé en évo-luant. J'ai réussi à me marier, j'ai fait faire des meubles et quelquesbricoles en plus. Plus tard, j'ai fait un kiosque tout près de la maison,après j'en ai pris un autre plus loin et plus tard, j'en ai installé encoreun autre ."

La vie de Salvador (29 ans) a été tourmentée: "Pour mes parents, ilfallait que j'ai une carrière de professionnel, vu que j'avais perdu lascolaire. Pour cela, en 85 je suis allé à une menuiserie. J'en suis sortien 87 et je suis allé à une autre. En 87, j'étais un gamin en cours d'ap-prentissage. En 88, je suis allé travailler avec un autre menuisier, j'a-vais d'immenses difficultés mais je savais faire quelque chose pourgagner de l'argent. Jusqu'à ce que j'aie un accident et reste au chô-mage. Je suis alors allé travailler à la campagne, faire la pulvérisa-tion des plantes. Un jour, je suis parti au travail sans petit déjeuner,j'ai travaillé avec un produit très toxique, je me suis évanoui et j'ai étérecueilli par des gens qui me connaissaient. J'ai alors abandonné cetravail. Ensuite, je suis allé aider à faire de l'eau de vie. Fin 89, jetravaillais comme menuisier. De nouveau au chômage. En 90, j'avais19 ans, j'ai commencé à travailler tout seul. Je voulais survivre et j'a-vais une profession, c'est pour cela que je me suis mis à travailler pourdes gens et quand j'avais des difficultés, je faisais des petits boulots.En 92 apparaît la situation militaire. Quand je suis sorti de la troupe,je suis allé travailler comme menuisier pour un monsieur, mais il estparti loin, en voyage, et j'ai eu la vie un peu difficile. J'ai travaillécomme agent de sécurité et j'ai été forcé à être aide de tronçonneur. Ace moment là, j'avais déjà femme et enfants. Je me suis alors renducompte que ce terrain était abandonné et j'ai demandé à son proprié-taire qu'il me laisse un espace pour faire un atelier (de menuiserie) et,grâce à cela, depuis lors, je vis plus ou moins équilibré ".

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sortes d'abandon, discrimination et caren-ces matérielles, insérées aux échelons lesplus bas de la stratification sociale et éco-nomique, c'est en elles que se reflètenttoutes les tensions, tous les conflits entretradition et modernité. A Riboque, ce sontelles qui contrôlent le petit commerceinformel (et, en ce sens, ce sont elles quisont aussi le principal ciment de liaisonentre les dynamiques microéconomiqueset macroéconomiques), mais le poids desmécanismes de reproduction sociale etculturelle liés à la famille et à la maternitéleur interdisent souvent de s'assumercomme des agents plus actifs du change-ment. Pour la majorité de ces femmes, l'é-conomie informelle est surtout une exten-sion de l'économie domestique et, à larationalité productive du marché, ellesopposent un autre type de rationalité quirepose sur l'entraide familiale et la redis-tribution des pus-values.

L'altération des codes de conduite et descomportements associés au phénomène dela pauvreté semble être, pour les femmesde Riboque, un problème d'ordre culturelautant qu'une question sociale ou écono-mique. La capacité de contrôle symbo-lique sur la sexualité et la fécondité estcertainement décisive, mais il existe unautre facteur, non moins fondamental, etc'est la capacité de contrôle et gestion desrevenus gérés. En effet, à mesure que lasolidarité masculine à l'intérieur desréseaux de parenté devient plus diffuse,l'importance économique des réseauxd'entraide reposant sur le travail fémininaugmente -l'argent gagné est obligatoire-ment redistribué dans le cercle élargi desrelations familiales. Il est difficile, dansces circonstances où les revenus sontpresque tous canalisés vers la subsistancefamiliale, de gérer des épargnes qui puis-sent ensuite se traduire en plus de déve-loppement humain.

Pour les femmes de Riboque à revenusbas, la difficulté à faire des économies est,de cette façon, une barrière qui les empê-che d'atteindre leur indépendance écono-mique et d'augmenter leurs chances etleurs capacités. La solution passe peut-être par le crédit populaire, mais les expé-riences dans ce domaine n'ont pas toujoursété concluantes -il existe une certaine

méfiance vis à vis des appuis institution-nels considérés comme trop compliqués etexigeants. Malgré cela, l'expérience denombreuses femmes en initiatives de cré-dit de groupe semble être en train de lais-ser des semences très importantes. Onpeut noter qu'il existe une capacité crois-sante d'auto-organisation et d'entraide, uneplus grande facilité à créer -sans aucunappui extérieur- des schémas originauxd'auto-financement qui se basent sur desprincipes de cohésion corporative et deresponsabilisation collective.

ConclusionRiboque est une agglomération suburbai-ne aux portes de la capitale santoméennehabitée majoritairement par des gens pau-vres ou très pauvres, sans source de reve-nus sûre ni travail régulier dans le secteurformel de l'économie. Le quartier a d'é-normes carences d'ordres divers : loge-ment, infrastructures de base, santé, assis-tance sociale. Sous cet angle, nous pou-

Développer les capacitésAvec la croissance du commerce des Kiosques, Césario a commencé àavoir quelques problèmes de gestion: "Je n'avais aucune comptabilitéorganisée et, comme conséquence, des vols ont eu lieu, desquels je neme rendais pas compte ", affirme-t-il " celui qui s'est rendu comptec'est le fournisseur, parce que je lui laissais beaucoup d'argent etensuite les versements diminuaient. Il m'appela et me demanda ce quise passait. J'ai alors décidé de louer deux de mes quatre magasins ;comme cela, je reçois un paiement en gros, sans problème " Cesáriosent que, pour progresser dans le commerce, il a besoin d'élargir sesconnaissances: "J'aimerais bien faire une formation dans le domaineque je développe, gestion hôtelière ou gestion commerciale, pour pou-voir mieux gérer et rendre mon activité plus lucrative. ".

Salvador est satisfait de sa menuiserie "Depuis que j'ai l'atelier, je visplus ou moins équilibré et je fais en sorte que les autres vivent plus oumoins équilibrés ", affirme-t-il " Parce qu'ici j'ai un individu qui tra-vaille avec moi et qui est chef de famille, et j'en ai deux autres plus jeu-nes qui ne sont pas chefs de famille mais le seront sous peu, parcequ'ils ont déjà 18 ans. Ca veut dire que j'emploie 3 personnes, et quisait, avec le financement qui doit venir pour mon projet, peut êtrequ'un jour j'aurai la possibilité d'en employer quatre de plus " . Leprojet dont parle Salvador est issu de sa participation à un cours degestion pour les petites et micro entreprises : "J'ai profité de tout cequ'il y avait de bon pendant ces trois mois, mais le meilleur profit,celui dont nous avons le plus besoin -qui est le financement- n'est pasencore apparu. La formation s'est terminée avec l'élaboration de cesprojets et la promesse de chercher du financement. Je ne sais pasquelle est la conclusion finale, mais on nous dit que les choses vontpar le bon chemin".

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vons affirmer qu'il possède des caractéris-tiques identiques à celles des autres quar-tiers périphériques de la ville. Mais toute-fois, le fait d'être la plus ancienne deslocalité péri-urbaines lui confère une cer-taine spécificité qui se traduit en unensemble de traits urbains très appuyés,par opposition au caractère semi-rural desautres zones périphériques de la capitale.

Riboque a, en fait, une plus forte densitéde population et une plus grande concen-tration de logements dans un espace rela-tivement réduit -ce qui, en plus d'avoirprovoqué la disparition de certains signesde ruralité (les courettes, l'élevage d'ani-maux), a rendu plus complexe la gestiondes formes traditionnelles de sociabilité,ainsi que la distinction claire entre les

domaines public et privé. Il y a un relâ-chement des liens communautaires, visi-ble dans les relations plus tendues et dis-tantes entre voisins et dans la perte pro-gressive de l'importance de certains lieuxtraditionnels de reproduction culturelle etde convivialité -les sociétés récréatives,les terrasses-dancings, les groupes de tra-gédie 41 ou de socopé42 , etc. Malgré toutcela, Riboque continue à être quelquechose de plus qu'un simple dortoir auxportes de la ville : sa rue principale mou-vementée est un centre relativement actifde petits commerces informels et ses habi-tants mènent une vie sociale intense, repo-sant sur un réseau élargi de relations deparenté et d'amitié, etc.

Les gens de Riboque ont très souvent undiscours pessimiste par rapport au présent.Ils attribuent fréquemment la source deleurs problèmes à des questions politiqueset économiques, externes à leur cercle dedécisions et responsabilités (et, pour cetteraison, virtuellement incontrôlables pareux), comme l'incompétence et la corrup-tion des gouvernements, ou le chômage oules bas salaires. Si on les interroge sur leschangements survenus au cours des der-nières années, la majorité affirme que leursituation est actuellement plus difficilequ'il y a dix ou douze ans. Le sentimentque le processus de réajustement structu-rel a aggravé les injustices sociales et aprovoqué une dégradation du niveau devie est généralisé. L'ouverture sur l'exté-rieur (surtout des moyens audiovisuels) arenforcé la conscience de leur pauvreté.La confiance dans les institutions est trèsfaible, les plaintes par rapport à l'Etat fré-quentes.

Il importe, toutefois, d'établir une distinc-tion entre le discours que les acteurssociaux produisent sur eux-mêmes et laréalité effectivement observable. Lesdonnées recueillies indiquent que les indi-vidus formulent, dans les domaines lesplus divers -santé, alimentation, éduca-tion, emploi - des stratégies complexes etcréatives pour faire face à l'adversité etcontourner les difficultés. Ces stratégiesreposent sur les réseaux élargis de solida-rité familiale et de parenté par alliance(compadreo= " compérage "43)) qui agis-sent dans le sens de l'entraide et de la

C'est difficile d'épargner Cacilda, vendeuse de rue à Riboque, a été liée à "un projet qui prêtaitde l'argent aux palaiês". Le programme avait deux composantes dis-tinctes : une formation socio-économique et un système de micro-cré-dit. Avec huit autres femmes, Cacilda était intégrée dans un " grouped'activité économique ", elles conservaient-toutes leurs petits com-merces dans la rue, mais l'accès au crédit était dépendant d'un princi-pe de responsabilisation collective.

Les choses fonctionnaient de la façon suivante: Cacilda demandait200 000 dobras prêtés; au bout de 15 jours, elle commençait à amor-tir sa dette en versant 20 000 dobras par semaine. Si elle manquait unpaiement, la semaine suivante, elle devait verser 40 000 dobras plusles intérêts pour le retard. La concession d'un nouveau crédit dépen-dait de deux facteurs : la liquidation totale du prêt antérieur et l'i-nexistence de dettes à l'intérieur du groupe -et donc, si l'une des fem-mes avait des dettes accumulées, cela faisait interdire la concession decrédit à toutes les autres. Outre la quantité stipulée pour l'amortisse-ment de la dette, chacune des femmes devait aussi déposer toutes lessemaines 3 000 dobras dans une " caisse d'épargne " ; et si l'intéres-sée n'avait pas de dettes, elle pouvait retirer son épargne quand elle levoulait.

Cacilda pense que c'était très difficile de mettre de côté l'argent néces-saire à l'amortissement de la dette: "cette quantité que nous prenionsprêtée, on devait faire des sacrifices pour payer; or on vit selon lecommerce -si le commerce ne donne pas, on n'a pas d'argent pourpayer ". Elle avouait: "Toute la semaine j'avais la tête en ébullition àcause de l'argent. Je suis encore avec la peur de l'argent ! "

Cacilda de conclure: "je préfère ne pas prendre d'argent et vivre selonce que je gagne -le matin j'achète de la marchandise pour 50 000, sije vends pour au moins 10 000/15 000, j'achète de la banane et dupoisson pour manger; si je vends pour 2000 de plus, j'achète de l'hui-le, si je vends pour 3000 de plus, j'achète du pétrole. Ensuite, ce queje vends est pour acheter plus de marchandise le jour suivant ".

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85Rapport National de Développement Humain - STP

redistribution. Les gens de Riboque saventbien qu'ils arrivent à affronter les difficul-tés quotidiennes avec d'autant plus d'effi-cacité que leur insertion dans une tramecomplexe d'obligations et devoirs mutuelsest plus forte. Le système de parenté,caractérisé par l'aspect transitoire des uni-ons domestiques et par la grande mobili-té dans la composition des agrégats fami-liaux donne ainsi naissance à des compor-tements codifiés qui valorisent la redistri-bution à l'intérieur de réseaux élargis,reposant sur la consanguinité et l'alliance.Les relations d'amitié, de " compérage "etparrainage créent aussi des relations et desliens de complicité qui assument diversesformes d'entraide.

L'importance économique des solidaritésconvoquées à l'intérieur des réseaux derelations est particulièrement évidentedans le cas des stratégies informelles desubsistance (ou moyens d'existence) : lamajorité des gens de Riboque -en l'absen-ce de travail sûr et certain- subsiste par lebiais d'un ensemble hétérogène et irrégu-lier d'activités informelles, commerces derue et services variés; sachant que lesinformations sur ces petits boulots sontpresque toujours passées de "bouche àoreille", il est vital que chaque individusoit inséré dans une maille serrée et effi-ciente de relations sociales. D'autre part,ces activités de subsistance concernentpratiquement tous les membres de l'agré-gat familial, chacun cherchant différentessources d'alimentation, combustible, reve-nus et aide. Le moyen d'existence deRiboque dépend aussi, dans une bonnemesure, puisqu'il couvre toutes les activi-tés qui assurent la subsistance d'une unitédomestique, du bon fonctionnement desréseaux extensifs d'entraide et redistribu-tion familiale.

Mais en dépit de l'importance des codestraditionnels de comportement, le fait estque certaines sociabilités sont devenusplus lâches et ne fonctionnent plus commefilet amortisseur de la crise économique;des groupes jadis protégés par les maillesserrées des attitudes codifiées -lesmalades, les gens âgés, les femmes,- seretrouvent aujourd'hui parmi les plus vul-nérables et les plus exposés à la pauvreté.Le cas des femmes est particulièrement

significatif : à Riboque, les problèmessociaux et économiques ont un effet mul-tiplicateur quand ils tombent sur elles,étant donné qu'il existe toujours de puis-sants mécanismes discriminatoires parrapport au genre. Le fardeau des poli-tiques d'ajustement structurel est pluslourd pour les femmes que pour les hom-mes car ces politiques les affectent à lafois en tant que mères, chefs de famille(c'est elles qui sont, en majorité, les chefsdes foyers monoparentaux), travailleusesdomestiques (ces tâches sont infra-valori-sées, étant donné leur caractère non mer-cantile), et productrices de biens et servic-es (malgré l'inégalité des chances, ce sontelles qui contrôlent la majeure partie ducommerce informel).

La rupture des consensus symboliques etdes rôles masculins autour de certainesnormes et valeurs liées à la famille est undes facteurs responsables du surplus de

Il est possible d'épargner Cacilda, vendeuse de rue à Riboque, a été liée à "un projet qui prêtaitdSami et Alda vendent des vêtements d'occasion au "marché du barda"situé sur l'un des accès à Riboque. Elles pensent qu'il est difficile defaire des économies, parce qu'il y a toujours des obligations moraleset des devoirs de famille qui les poussent à partager les revenus."L'argent qu'on amène à la maison ne fonctionne pas, on dépensetout", explique Sami. Elles ont été toutes les deux intégrées dans unprojet de micro-crédit pour des femmes, mais elles n'ont pas aimé dutout, parce qu' " il y avait beaucoup d'embrouille, beaucoup de direc-teurs " Une de ces semaines, Alda propose que soit organisée une "xiquilá " parmi les vendeuses du marché. La " xiquilá" est une formetraditionnelle d'autofinancement et auto-épargne à nouveau trèspopulaire parmi les palaiês et les vendeuses de rue. " La différencepar rapport aux projets, c'est que xiquilá est notre affaire à nous",affirme Alda.

Sami, Alda, et seize autres vendeuses se sont mises d'accord surle montant à verser chaque jour pour la xiquilá : 25 000 dobras. "Onfait des billets et on tire au sort tous les jours ces 450 000 dobras ",explique Sami: "A chaque fois, l'une d'entre nous reçoit l'argent. Siquelqu'un ne réussit pas à mettre la quantité ce jour là, on arrête et onattend. On attend le temps qu'il faut jusqu'à ce qu'elle mette l'argent,c'est seulement alors que la xiquilá" avance " . Au bout de ces dixhuit jours utiles, si tout se passe bien (c'est à dire si personne ne prenddu retard), le schémas recommence.

Selon Sami, "l'argent est pour acheter chacun ce qu'il veut: deshabits pour vendre, des marmites, matelas, radio, sac pour l'école…; seulement pas de quoi manger ni de quoi boire ". Pour Alda, l'a-vantage de la xiquilá "c'est qu'on a comme cela de l'argent qu'on n'ap-porte pas à la maison ".

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vulnérabilité des femmes face à la criseéconomique: s'il est vrai que les réseauxextensifs de solidarité familiale jouent unefonction sociale et économique importan-te, il n'en reste pas moins vrai que le sys-tème de parenté traditionnelle révèle dessignes de fracture par rapport à ses acteursmasculins -ce qui est particulièrementvisible dans l'usure des codes de conduiteinhérents aux relations co-résidentielles etaux relations de visite. Ce fait accomplireprésente, dans un contexte familial mar-qué par des taux de natalité élevés et ungrand nombre de foyers monoparentaux,une charge supplémentaire de tâches pourles femmes. Elles répondent à cela enaugmentant la quantité de leur travail, endiversifiant les stratégies de subsistance eten renforçant les chaînes de solidaritéféminine dans les réseaux de parentéextensive. Malgré cela, leur vulnérabilitésociale et économique augmente signifi-cativement.

D'autre part, cette multiplication desresponsabilités a un autre volet: elle pro-meut une plus grande autonomie person-nelle et économique des femmes par rap-port à la domination masculine et elle està l'origine d'une recomposition cognitivede certains comportements féminins. Ilest par exemple notoire que la capacitécroissante des jeunes femmes de Riboquede contrôler leur sexualité est en passe deprovoquer un désinvestissement symbo-lique entre fertilité et féminité. Le fait dereconnaître qu'un nombre excessif d'en-fants est un facteur aggravant sur lesconditions de vie et qu'il applique un fac-teur exponentiel à la misère est d'actualité.Un nombre croissant de jeunes essaie ainside gagner le contrôle sur son corps. De cefait, elles sont en train de promouvoir larupture des rôles sociaux et des consensussymboliques dans le cadre du système deparenté traditionnelle.

Tous les gens de Riboque ont leurs aspira-tions, leurs rêves (qui passent par beau-coup d'autres choses qu'un revenu élevé -conditions de logement, santé, stabilitéfamiliale, etc.) mais ces attentes sont plushautes chez les jeunes. La capacité à éta-blir des buts spécifiques et à poursuivredes objectifs définis augmente en raisoninverse de l'âge. Ce sont en fait ceux qui

ont entre 20 et 35 ans et qui n'ont pasconnu les impacts psychologiques desdeux grands événements structuraux del'actuelle société santoméenne -l'indépen-dance et la transition pour la IIRépublique- qui se trouvent dans lesmeilleures conditions pour interpréter lessignes de changement, en les codifiant enaspirations et comportements concrets.Parmi les plus âgés, le sentiment d'êtreorphelin par rapport à l'Etat se traduit fré-quemment en attitudes de conformisme,manque d'initiative et scepticisme par rap-port à l'avenir.

L'altération graduelle des habitudes etmentalités parmi les jeunes Santoméensrépond aux changements politiques et éco-nomiques locaux, et représente un effortd'adaptation de leurs codes de valeurs auxcaractéristiques d'une société en plein pro-cessus de transition. Mais c'est aussi uneréaction aux stimuli et influences qui vien-nent de l'extérieur. Dans une période deplus en plus globalisante, au cours delaquelle on assiste à la diffusion d'une cul-ture mondiale et à la relativisation des dif-férences, des transformations se produi-sent, qui affectent les individus et les com-munautés. Une des conséquences de celaest la co-existence, dans un même systèmesymbolique, de pratiques culturelles tradi-tionnelles et d'influences culturelles exo-gènes. Il existe, en outre, une connexioncroissante entre les tendances de la socié-té allant vers la mondialisation et lesdispositions personnelles : plus de libertéest donnée aux individus, mais un effortconstant d'imagination et de ré interpréta-tion symbolique de leurs rôles sociaux estaussi exigé d'eux.

A Riboque, la nécessité d'adaptation desjeunes à une conjoncture de changementet progressive ouverture à l'extérieur esten train de provoquer l'émergence de nou-velles formes d'interaction sociale baséessur la valorisation de concepts excen-triques à la culture traditionnelle: capacitéd'épargne, esprit de risque, ambition entre-preunariale. L'aptitude de ces jeunes pourconcrétiser leurs aspirations sembledépendre de la façon dont ils arrivent,simultanément, à gérer les solidarités re-distributives dans le cadre des réseaux tra-ditionnels d'entraide et à mettre en pra-

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Strategies urbaines de lutte contre la pauvrete - Etude de cas dans le quartier de riboque

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tique une nouvelle logique mercantilisted'accumulation et investissement.

Chez les femmes, cette capacité de réin-vestir les revenus accumulés est relative-ment moindre. La raison principale decette difficulté à épargner semble être lacroissante importance économique desréseaux féminins de redistribution etentraide. En effet, la contribution du tra-vail féminin pour la subsistance desfamilles augmente à mesure que se fragili-se la solidarité masculine dans le cadre desstructures de parenté traditionnelles; ildevient alors de plus en plus difficile pourles femmes de gérer des plus-values quipuissent se traduire ensuite en investisse-ments productif ou en supplément de bien-être. Malgré tout, quelque chose est entrain de changer -les jeunes femmes deRiboque qui se consacrent au commerceinformel révèlent une capacité croissanted'organisation et elles tentent, par leurspropres moyens, de créer des schémasd'auto-financement qui leur permettent degonfler leurs options de vie.

La pauvreté se manifeste au travers de laprivation de vie que les personnes pour-raient avoir. Elle peut impliquer non seule-ment le manque de biens nécessaires aubien-être matériel, mais aussi la négationdes chances et des capacités pour vivre unevie tolérable. Cela étant posé, leDéveloppement Humain -entendu commeun processus susceptible d'élargir les possi-bilités réelles des individus à réaliser leursaspirations- prend une signification spécia-le en s'articulant avec un autre concept -celui de mode d'existence durable.

Par mode d'existence durable (sustainablelivelihood)34 on désigne toutes les formesde vie qui:

ne compromettent pas la sécuritépersonnelle;sont assez stables pendant un laps detemps significatif (sans, évidemment,aucune garantie);sont bénéfiques pour les individus, lescommunautés et les consommateurs desproduits/services;ne sont pas incompatibles avec laconservation de l'environnement.

A Riboque, le mode d'existence de la plu-

part des familles, bien qu'adapté aux cir-constances, est clairement instable -et, parconséquent, pas durable. Comme nousavons pu voir, il existe des exceptionssignificatives parmi les couches plus jeu-nes de la population, mais la majorité despersonnes est toujours privée des occa-sions et capacités fondamentales. Quoifaire alors, dans ce quartier suburbain,pour promouvoir les conditions nécessai-res au développement humain ? Si la pau-vreté est pour une grande mesure unequestion culturelle, la réponse à cettequestion dépend, entre autres, de l'articu-lation entre la subjectivité des individus etla rationalité symbolique des systèmessociaux et économiques. Le point de ren-contre entre sujet et culture est indiqué,selon Bourdieu, par le concept de habi-tus35.

La notion de habitus couvre toutes lesdispositions persistantes qui sont intériori-sées par l'individu tout au long de sa vie etqui déterminent sa façon de penser et d'a-gir. L'habitus engendre du sens indivi-duel, parce qu'il est incorporé dans chaquepersonne, mais c'est en même temps unproduit social et collectif, parce qu'ilreproduit des pratiques partagées entre lesmembres d'une communauté. C'est dansune certaine mesure un mécanisme défen-sif, étant donné qu'il tend à éluder le chan-gement et à rejeter la différence, mais onne peut pas le comprendre dans un sensdéterministe et immuable -"les disposi-tions collectives qu'il génère sont persis-tantes, de longue durée et lente transfor-mation, mais elles ne sont pas immua-bles"36.

Il est possible de modifier l'habitus si lesperceptions structurées et les systèmessymboliques d'une communauté changentde façon réflexive, en rendant l'incon-scient conscient et en altérant les repré-sentations du monde réel. Cela revient àconvertir les sujets en acteurs, en affir-mant, par un effort d'imagination, chaqueindividu comme un artisan des transfor-mations dans la vie de la communauté.L'habitus peut, dans ces conditions, cons-tituer un mode d'affirmation de l'identitépar le biais d'une action dotée d'un sensindividuel et collectif ; les fractures decontinuité dans les ordres symboliques

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provoquent alors de véritables révolutionsculturelles, qui intéressent la majorité desmembres de la société.

Quand, au contraire, l'habitus agit endéfensive, une rupture se produit entrel'instrumentalité et l'identité, une dissocia-tion entre les conditions objectives duchangement social et économique et lesystème d'échelle de valeur structuré his-toriquement et culturellement par la com-munauté38. Deux choses peuvent alorsarriver: ou la vie de la majorité des per-sonnes devient un ensemble discontinu deréponses à des stimulus externes, ou lafracture de continuité dans l'ordre symbo-lique donne lieu à des comportementsdéviants de la part de groupes spécifiques,sans que la majorité de la population soitconcernée39.

Espace de tensions dynamiques et pulsionsdiverses, scène de conflictualités et dialo-gues, l'habitus de Riboque est un point deconfluence entre la tradition et l'innova-tion, entre le sens individuel et le sens col-lectif. En lui se croisent des continuitésculturelles fondamentales (les réseaux

extensifs de parenté et "compérage", lapression sociale dans le sens de l'entraideet de la redistribution) et des phénomènescomplexes de changement (le relâchementdes liens de convivialité et de voisinage, larupture de certains rôles en rapport avec laparenté ou la sexualité, la valorisationsymbolique de concepts et attitudes exté-rieures au cercle des comportements héri-tés). Dans ces conditions, le développe-ment humain se joue autant dans le cadredu système économique et social que dansle cadre du système culturel et symbo-lique: il est possible - à partir du momentoù l'habitus ne fonctionne pas en défensi-ve- d'altérer des aspects culturels détermi-nés, de même que peuvent se modifier desvariantes économiques et politiques don-nées. Cela passe par la promotion descapacités d'auto-réflexion (individuelles etcollectives) de la société de Riboque pourse pencher sur ce qui conditionne sa pra-tique présente et future. En canalisant lasubjectivité des acteurs sociaux dans lesens de la liberté individuelle et de laresponsabilité collective, des changementsfavorables au développement humain seproduiront certainement.

32Principal groupe ethnique santoméen33Anciens ouvriers des roças, originaires d'Angola et Mozambique 34Groupe ethnique du Sud de l'île35cinq petits magasins construits en bois36eau de vie de canne37tubercule comestible, à la saveur et à la consistance semblables à la pomme de terre38petite vallée ou dépression de terrain39Rapport du Développement Humain STP -1998, Pg 72-74

Fruits courants à S. Tomé40c'est à dire qu'il divise la semaine entre plusieurs femmes.41La Tragédie ou "Tchiloli" est une forme syncrétique de théâtre populaire dont l'origine est dansun texte médiéval européen.42Les Socopé sont des sociétés musicales organisées sur une structure hiérarchique rigoureuse.

Les textes des musiques servent presque toujours à exposer les problèmes de la communauté ou bien à faire une critique sociale ou des coutumes.

43Les compères sont les pères de chacun des membres d'un couple. Ce peuvent être aussi le père et le parrain d'un enfant.

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Rapport Nacional De Developpement Humain - STP 89

IntroductionL'hypothèse centrale qui oriente la recher-che est qu'il existe des logiques culturellesqui rendent terriblement difficiles non seu-lement les changements sociaux désirésmais encore la faisabilité, la praxis deschangements politiques et économiques, enprincipe réalisés pour le DéveloppementHumain.

Dans ce cadre général, l'étude de cas desSantoméens au Portugal signifie qu'on s'estefforcé de situer les émigrants au centre duDH. En effet, si on veut bien aller ponc-tuellement au-delà du cas santoméen, uncertain nombre de raisons voudraient qu'onprenne forcément les émigrants en comptepour analyser le Développement Humain.

Tout d'abord, le fait de se trouver à l'exté-rieur ne les empêche pas de faire toujourspartie de ce pays et ignorer les absentséquivaudrait en fait à exclure une partiedes populations. Le développementhumain appartient aux personnes et il estfait pour elles, indépendamment de leurlieu de résidence. Dans un monde où lesmouvements de population sont de plus enplus amples et fréquents, on ne peut pasprésenter un degré de développement d'unquelconque pays comme si ses émigrantsne lui appartenaient pas.

Deuxièmement, parce que les émigrantsprésentent fréquemment des niveaux dedéveloppement humain très différents deceux qui sont restés au pays et les ignorerpeut signifier une distorsion de certainesparties de la réalité et, par conséquent, del'ensemble. Cela est à souligner quand ils'agit de pays dont les indices d'émigration

de population, soit très marginale soit trèsqualifiée, sont élevés. Dans le premier casles indices de développement humain vontapparaître plus hauts qu'ils ne le sont enréalité et dans le second, c'est le contrairequi va se passer puisque ceux dont l'indiceest le plus élevé ne sont pas présents.

En troisième lieu et associé au point anté-rieur, parce que, si les niveaux de déve-loppement humain sont très différentsentre la population du pays d'origine et lesémigrants, il se peut qu'il soit vital d'inter-venir en priorité sur ces derniers. Dans lecas où ces émigrants présenteraient desniveaux plus bas, cette intervention est eneffet nécessaire et prioritaire parce qu'ilsn'arriveront pas par eux-mêmes à gérerdes capacités pour le changement, étantdonné que les cas d'extrême nécessité nele permettent pas en général. Si l'écart parrapport à la population du pays indiquaitun niveau très supérieur, ils doivent alorsoccuper le centre de l'attention pour desraisons d'effectivité et d'efficience. Le"transfert inverse de technologie" ne peutpas être ignoré si on se réfère à des paysdont la main d'œuvre qualifiée est trèslimitée et où les moyens pour en formerune de rechange sont rares.

Bref, si les arguments ci-dessus peuventpermettre d'apprécier globalement la per-tinence d'inclure les émigrants dans leRDH, dans le cas particulier santoméen,les migrations font partie intégrante del'histoire du pays, lequel pays s'est consti-tuée sur un lieu de passage, comme nousle verrons maintenant

Depuis sa découverte en 1471 jusqu'au

Emigrants santoméensau Portugal: Unecontribution audéveloppement humain

CHAPITRE VI

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90 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

moment présent, S. Tomé e Principe a étéune terre de migrants. Pendant cinq siècleselle le fut comme récepteur et lieu de tran-sit; très récemment comme émetteur. Unrésumé de son histoire peut permettre uneapproche des périodes les plus significati-ves du phénomène migratoire dans ceslieux.

Au XV siècle, les Portugais arriventd'Europe. Ils sont alors en pleine expan-sion outre-mer. Ils font de ces îles un cen-tre de concentration d'esclaves et d'uneagriculture d'exportation basée sur lacanne à sucre.

Bien qu'on observe, tout au long du XVIsiècle, l'arrivée de commerçants euro-péens, selon le récit du chroniqueur connusous le nom du "pilote anonyme"², ce sontles esclaves en provenance de la côte occi-dentale du continent qui forment le grosde la population qui demeure sur les îles.Les immigrants européens, y comprisceux de la métropole portugaise ont tou-jours constitué une minorité. Au début duXVI siècle, on pense qu'ils n'arrivaient pasà un millier, et depuis lors leur nombre esten train de baisser, de façon permanente etprogressive (Caldeira, 1999:45).

Une deuxième arrivée notable d'immi-grants se produit lors de la culture etexploitation du café et cacao pendant lesXIX et XX siècles. En plus des esclavesen provenance du golfe de Bénin dudébut, avec l'abolition postérieure de l'es-clavage sont arrivés des travailleurs,dénommés "serviçais", en provenance deGuinée-Bissau, Angola, Mozambique et,enfin, du Cap-Vert.

Ce caractère de récepteur de migrants a étésubstantiellement modifié avec l'Indépen-dance. C'est alors le départ d'une grandepartie de la colonie portugaise, à laquelles'ajoute, de façon ininterrompue, une por-tion considérable de Santoméens. LeGabon, l'Angola et le Portugal sont, à l'heu-re actuelle, les principales destinations3.

L'existence récente d'une appréciablepopulation émigrante après des sièclesd'immigration devrait justifier en soi soninclusion dans toute étude sur lesSantoméens, puisqu'elle peut constituer un

indicateur de changement très éloquent.

Elle devrait permettre en même temps deréaliser une lecture de STP et du change-ment de cap, orienté vers le DH, en partantd'une situation de contrôle social supposémoins fort que celui sévissant dans les îleset d'une conjoncture économique et poli-tique différente elle aussi. Cette distancepeut aider à l'approfondissement de lalogique culturelle santoméenne, car lescontextes d'émigration -surtout pour lapremière génération- sont fréquemmentprivilégiés pour représenter, reproduire etréfléchir sur sa propre culture.

Elle peut également ouvrir un espace dedialogue entre résidants et émigrants san-toméens et faciliter l'analyse de la partici-pation potentielle des professionnels qua-lifiés , actuels et futurs, dans ce change-ment.

Réaliser une étude relativement approfon-die avec les professionnels qualifiés san-toméens au Portugal est rendu plus aisépar leur nombre réduit et leur localisationdans des zones concrètes mentionnées.

En prenant cet avantage en considérationainsi que le fait d'avoir le changementcomme sujet d'étude, il a été décidé d'in-clure les étudiants universitaires, pièces-clefs en puissance pour l'avenir de STP etpremière référence de comparaison dansle temps. Contrairement aux adultes, cesétudiants ont grandi dans un pays indé-pendant et le régime de parti unique fonc-tionnait déjà quand ils n'étaient encore quedes enfants. Leur formation universitaires'est déroulée dans un contexte démocra-tique dans leur pays d'origine et auPortugal, et dans une économie de marchégénéralisée, ce qui les distingue claire-ment de la génération antérieure qui formeactuellement le gros des professionnelsqualifiés.

Le poids de l'étude sur les professionnelsqualifiés présents et futurs s'est porté surtrois questions fondamentales:

Premièrement, connaître leur vision surl'avenir de STP, en essayant de comprend-re les acteurs et les facteurs les plus mar-quants pour le changement et le DH.

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91Relatório do Desenvolvimento Humano - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

Deuxièmement, essayer de comprendreleur relation avec les autres Santoméens etavec STP et leur possibilité de participa-tion dans l'avenir.

Troisièmement, comprendre mieux STP etles Santoméens, surtout leur culture, et larelation de cette dernière avec le change-ment.

Le début des recherches s'est basé sur demaigres études préalables traitant desimmigrants au Portugal. On trouvera leurdéveloppement dans le point I.

Le point II démarre en abordant la ques-tion du profil des Santoméens qualifiés -les actuels comme ceux à venir-- et, tou-jours en désagrégeant les hommes et lesfemmes, la réflexion porte ensuite sur lesdeux premières interrogations centralesévoquées, c'est à dire celle relative à lavision de l'avenir et aux relations actuelleset possibles entre émigrants santoméens etavec STP.

Le point III tente de mieux cerner la rela-tion entre culture et changement pour lesSantoméens, et ouvre la réflexion sur l'en-semble du Rapport de DéveloppementHumain.

La meconnaissance dessantomeens au PortugalDans le cas de STP, les réflexions sur l'ex-clusion, la distorsion, la nécessité et l'effec-tivité/efficience relatives aux émigrantsoccupent notre point de départ dans un STPémergent qui n'a presque pas été étudié.

Sur l'exclusion et la distorsion, il faut sou-ligner que, bien que le premier Rapport deDéveloppement Humain (RDH) de 1988ait esquissé à grands traits une bonne des-cription de STP, la population émigranten'y était pas incluse ni comme donnéegénérale, ni comme référence spécifiquepour sa caractérisation et possible compa-raison avec les résidents.

Par rapport à l'effectivité/efficience pouraméliorer le DH, l'hypothèse de départveut que l'interaction continue en Europeet la qualification devraient faciliter desvisions plus favorables au changementque l'isolement et la formation acadé-

mique limitée du commun desSantoméens. Si cette hypothèse étaitjuste, certains éléments essentiels des obs-tacles pour le changement de cap vers ledéveloppement humain pourraient êtreabordés avec des garanties plus fortes departicipation des professionnels qualifiésrésidents à l'extérieur et des futurs profes-sionnels qualifiés, actuellement étudiants.

Il faut mentionner que l'importance desprofessionnels qualifiés à l'étranger a étémise en cause à plusieurs reprises.

Tout d'abord par eux-mêmes, au cours dela récente rencontre de professionnelsqualifiés à S. Tomé, organisée pour faireressortir le rôle possible et la contributiondes professionnels qualifiés émigrés.

Au cours de cette réunion à STP, leGroupe de Travail de Santé exprime laréflexion suivante:

Quant au retour des cadres, le groupe tirela conclusion qu'il n'y a pas de politiquesusceptible de tirer profit des ressourceshumaines qualifiées qui travaillent à l'ex-térieur.

Et il introduit comme suggestion: Profiter le mieux possible des ressourceshumaines dans la diaspora, en négociantleur intégration dans des missions tech-niques à l'extérieur

Le Groupe d'Education se réfère aux pro-fessionnels qualifiés, aussi bien dans lesrecommandations spécifiques au secteurque dans les propositions génériques:Des démarches doivent être entreprisesauprès des pays d'accueil des cadres san-toméens avec lesquels STP entretient desrelations de coopération dans le domainede l'éducation, concrètement le Portugal,de façon à mettre en oeuvre dans le paysdes projets de formation continue, c'est àdire de formation de fomateurs, avec lacollaboration de cadres résidents à l'exté-rieur. (...) 1.Création d'une banque de données sur

les ressources humaines santoméenneséparpillées de par le monde, avec spéci-fication de leurs intérêts, pour que lepays puisse, en cas de besoin, recourir àleurs services, particulièrement en ce

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92 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

qui concerne les opinions techniques desoutien à la prise de décision dans lecadre des relations avec les partenairesde développement.

2.(...) b)Quand ont lieu des missions tech-niques à l'extérieur, que cette pratiques'étende aux cadres résidant (à l'exté-rieur), notamment par rapport à leurparticipation dans ces missions ou leuraccompagnement

Enfin, voici ce que recommande leGroupe d'Economie: L'Etat santoméen doit envisager la ques-tion des cadres résidant au pays et à l'ex-térieur comme un facteur fondamentaldu processus de développement de/ S.Tomé e Principe

Deuxièmement, l'Organisation Interna-tionale pour les Migrations (OIM) a étéégalement consciente de l'importance dela démarche consistant à compter avec lesprofessionnels qualifiés à l'extérieur pourle développement de leurs pays d'origine.

Considérant que le fait de réussir à lesfaire participer in situ constitue un point-clef, elle a fait réincorporer, par le biais duProgramme de Retour et Réintégrationdes Nationaux Africains Qualifiés 1995-1999 (RNAQ) , dix sept de ces profes-sionnels qualifiés. Leur grande majorité(94,1%) se trouve dans la fonctionpublique (B. Rocha, 2000:44) .

Troisièmement, même si ici la référenceest plus ambiguë, les professionnels del'extérieur sont mentionnés dans le docu-ment Etude nationale de perspectives àLong Terme (NLSTP), mais ponctuelle-ment seulement, dans l'une de ses aspira-tions: Intégration des émigrants dans l'ef-fort de développement national (NLSTP,1997:19).

Toutefois la volonté d'inclure les profes-sionnels qualifiés de l'extérieur ou l'en-semble des émigrants santoméens estconfrontée à un grave problème demanque d'information.

Il n'existe pas de base de données, montéeavec un minimum de rigueur, qui nouspermette de connaître le nombre et le pro-fil, au moins démographique, de cette

population. Cette affirmation ne s'ap-plique pas seulement aux pays africains,mais elle est également valable pour lavielle métropole. Le Portugal dispose d'unregistre des Santoméens résidant légale-ment- 4795 -, mais il n'offre aucune infor-mation sur les illégaux qui, selon les infor-mations orales recueillies, pourraient mul-tiplier par deux ou même par trois le nom-bre des légaux.

Le registre de l'Ambassade de STP auPortugal compte 14 251 inscrits, maisn'ont pas été rayés des listes ceux qui ontacquis la nationalité portugaise (il n'y apas de traité de double nationalité entre lesdeux pays; celui qui obtient la nationalitéportugaise perd automatiquement la san-toméenne), ni ceux qui ont séjourné pen-dant une époque et ne sont plus là.D'ailleurs, on ne peut pas s'attendre ce queles illégaux soient inscrits dans le Registrede l'Ambassade.

La liste des résidents légaux ne permet deconnaître que l'année de leur enregistre-ment (à partir de 1980), leur lieu de rési-dence, leur profession et occupation (jus-qu'en 1998).

En 1980, 715 Santoméens résidaient léga-lement au Portugal. Depuis lors jusqu'à1991, l'augmentation est presque constan-te et se situe autour de 100-150 personnespar an. La chute du régime à parti uniquecoïncide avec une hausse très prononcée,de sorte qu'entre 1991 et 1995, ils passentde 2183 à 4082. Puis le rythme initial rep-rend jusqu'en 1998 et il semble remonter ànouveau au cours de ces deux dernièresannées: 407 légalisés en 1999 (le totalofficiel passe alors à 4795) et 410 autresdemandes de légalisation depuis août2000.

Les Santoméens occupent ainsi, depuis1999, la quatrième position en nombred'émigrants venus des pays africains delangue officielle portugaise (PALOP),avec le Cap Vert en tête (43 797), suivi del'Angola (17 695) et de la Guinée-Bissau(14 140). Le Mozambique est le dernier(4 503).

Le gros des résidents légaux santoméensest enregistré à Lisboa et Setubal. Le reste

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93Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

est très dispersé dans tout le pays.

Les professionnels qualifiés constituent 10,3% du personnel santoméen classifié par pro-fession par le Service des Etrangers et desFrontières (SEF), ce qui en nombre absoluéquivaut à 199 personnes . Le plus grandnombre de Santoméens en âge de travailler(58,2%) est classifié dans la catégorie des "domaines des industries extractives et detransformation et conducteurs de machinesfixes et de transport " , et ensuite de " person-nel des services de protection et sécurité,

services personnels et domestiques etsimilaires " (22,9 %). Il faut relever queseulement 0,3 % travaille à son compte et6,7 % sont des entrepreneurs.

L'occupation du reste des résidents légauxest, selon le SE , comme suit: domestiques35 %, étudiants 61,7%, retraités 0,9 % etautres 2,2 %. On distingue clairement uncontraste entre le nombre de retraités etcelui des étudiants.

On peut se rendre compte que l'informa-tion officielle est très maigre, et pas seule-ment pour les chercheurs, mais pour lespoliticiens aussi. En outre, on ne trouvepas d'étude qualitative sur les Santoméensau Portugal.

Les professionnels qualifiessantomeens actuels etfuturs Les travaux de recherche ont démarréavec une enquête réalisée pendant le pre-mier trimestre 2001 sur 60 Santoméens,dont 32 étaient des professionnels quali-fiés (sur un total de 199 déclarés) - 19hommes et 13 femmes - et 28 étudiantsuniversitaires (sur 207 enregistrés) - 17hommes et 11 femmes-.

Dans le but de mettre en valeur les diffé-rences possibles selon le sexe, toute l'in-formation a été désagrégée sur ce critère.Quatre sous-groupes ont ainsi été établis,ils servent de référence dans le temps,puisque les uns représentent le présent etd'autres le futur. Nous avons donc desprofessionnels qualifié hommes (PH), desprofessionnelles qualifiées femmes (PF),des étudiants universitaires hommes(EUH) et des étudiantes universitairesfemmes (EUF).

Profil de base desSantoméensLe profil de ces Santoméens, dans leurtotalité, sera déterminé selon six variables: sexe, âge, formation, temps de résidenceau Portugal, état civil et nationalité duconjoint. Nous exposerons cela graphi-quement .

L'échantillon a englobé un nombre defemmes plus élevé que celui représentédans l'univers d'étude, en se basant sur

Sexe

60%

40%MasculinFéminin

Age

38%

41%

15%

3%

3%

Moins de 30Entre 30 et 40Entre 41 et 50Plus de 50NC

Formation

0

10

20

30

40

50

%

DiplômeUniversitaireLicence

Maîtrise

Doctorat

Autre

EtudiantUniversitaire

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94 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

l'intérêt spécifique que ce collectif présen-te pour la recherche.

On peut observer dans ce schémas qu'iln'y a qu'un très faible pourcentage de gensdont l'âge dépasse 50 ans, ce qui s'ex-plique par la quantité très réduite deSantoméens qui possédaient une forma-tion universitaire avant l'Indépendance.

La désagrégation de l'information permetd'obtenir d'autres données significatives :

La population masculine qualifiée estconsidérablement plus âgée que lapopulation féminine. Plus de 60% desPH ont plus de 40 ans alors qu'aucune.

Dans le cas des étudiants, on peut confir-mer que l'âge des femmes est inférieur àcelui des hommes. Elles ont toutes moinsde 30 ans, alors que pour les EUH, 64,7%se trouvent dans la même tranche d'âge.

Ces différences nous amènent à tirer déjàdeux conclusions: tout d'abord, que lafemme santoméenne s'est incorporée plustard à l'Université, et en aucun cas avantl'Indépendance; et deuxièmement quel'homme santoméen passe plus de tempspour finir ses études que la femme, eneffet ce n'est pas parce qu'ils ont commen-cé plus tard leurs études qu'on trouve desEUH de plus de 30 ans. Cette différencedans la durée des études peut indiquer quele besoin de gagner sa vie au Portugal soitassumé par les hommes, mais on ne trou-ve aucun document qui apporte des éclair-cissement sur cette question.

Sans compter les étudiants, on peut rele-ver que 68,7% des professionnels quali-fiés est licencié, et seulement 6,2% ontune maîtrise. Les PH sont dans leurensemble plus qualifiés que les PF. Eneffet, sur tous ceux qui ont conclu leursétudes on trouve plus de femmes dont lecursus n'est que de 3 ans: 38,4% contre15,7% chez les PH, tandis qu'aucune n'a lediplôme de maîtrise.

L'intérêt par rapport à la profession s'estcentré sur le fait de connaître combien deces professionnels font partie du corps desentrepreneurs et si les employés sont pro-fessionnellement insérés dans le secteurpublic ou le secteur privé.

Le soucis de collecter une information de

Profession

13%

49%

19%

19%Entrepreneur

Employé dans lesecteur public

Employé d'entrepriseprivée

NRP

Temps de résidence au Portugal

32%

32%

33%

3%Moins de 5 ans

Entre 5 et 10 ans

Entre 11 et 25ansPlus de 25 ans

Estado civil

58%27%

8%7%

Solteiro/aCasado/aUniao de factoOutro -NC_

Nationalité du conjoint (mariage ou union de fait)

9%

91%

0%

PortugaiseSantoméenneAutre

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95Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

base sur l'existence d'entrepreneurs est liéà la faiblesse de ce secteur à STP et à l'hy-pothèse d'une relation dans l'avenir avecSTP en termes économiques. Le dévelop-pement du secteur privé exige l'engage-ment d'entrepreneurs et il doit égalementêtre aidé par des travailleurs ayant donnéleurs preuves dans une entreprise privée.Cela, si usuel dans les pays capitalistes,ne l'a pas été dans les pays qui étaientauparavant dans l'orbite socialiste -cas deSTP-, ce qui s'avère être un handicap pours'ajuster à l'économie de marché etconcourir dans les meilleures conditionspossibles.

Le pourcentage d'entrepreneurs par rap-port à l'ensemble des professionnels quali-fiés est notable et il faut relever que cesont tous des hommes. Mais, la moitié desfemmes ne se manifeste pas à ce propos,ce qui peut-être signifie qu'elles ne tra-vaillent pas dans des professions en rap-port avec leur formation académique. Ilest aussi intéressant de noter que la moitiéde ces Santoméens travaillent dans le sec-teur public, peut-être par manque d'expé-rience dans le secteur privé, comme évo-qué plus haut.

Seul un nombre réduit de Santoméens estau Portugal depuis avant l'Indépendance.Et depuis lors, une augmentation notables'est produite. On observe que l'établisse-ment de la résidence au Portugal a étéaffecté par le changement de régime departi unique à la démocratie. Presque untiers des Santoméens établit la résidenceentre 1990 et 95. Un autre tiers est arrivéau cours des cinq dernières années, maisdans ce cas, ce sont les étudiants qui fontla différence et on ne peut pas affirmerqu'ils resteront au Portugal après avoir ter-miné leurs études. 63,8% des EUF setrouvent dans cet intervalle.

Il est difficile de discerner si les résidentsau Portugal présentent des différencesnotables avec ceux qui vivent à STP pource qui est du mariage, car les chiffres àSTP ne sont pas assez désagrégés. Noussavons qu'à STP le mariage est l'excep-tion, si nous considérons l'ensemble de lapopulation, mais nous savons aussi qu'ilest beaucoup plus commun chez les forroset surtout chez les gens aisés.

Les professionnels qualifiés hommes semarient beaucoup plus que les femmes(52,7 et 30,7% respectivement). Pourtantaucune PF n'indique d'union de fait, à la dif-férence des PH, dont un quart signale cetteoption. Il est probable que, dans ce cas,l'enquête ne recueille pas la réalité chez lesPF, peut-être parce qu'au Portugal, l'unionlibre n'est pas aussi admise qu'à STP.

Les EUH et EUF partagent un pourcen-tage élevé de célibataires, au-dessus de80% tous les deux. Dans ce cas ce sont lesEUH qui ne signalent pas d'union de fait,alors qu'un petit pourcentage de EUF, lemême que celui des mariées, le spécifient(9%). Très peu de EUH sont mariés, seu-lement 5,8%, ce qui contraste fortementavec les 52,7% des PH. Cette différencene peut pas être attribuée à l'âge exclusi-vement, puisque les deux sous-groupesont un pourcentage élevé de leurs memb-res dans la même tranche d'âge (de 31 à 40ans), sans correspondance en pratiquematrimoniale, ni considération de straté-gie de nationalisation ou obtention de per-mis de résidence pour gens mariés avecdes Portugais, au vu du tableau suivant.La raison en est peut-être le degré de fra-gilité des EUH consécutif au fait de ne pasavoir encore terminé leurs études et ne pasêtre installés, socialement et profession-nellement.

Cette représentation peut avoir une impor-tance clef dans toute l'étude sur lesSantoméens et le changement, encore plusmarqué si on considère que, dans le cas detoutes les femmes -professionnelles, qua-lifiées et étudiantes- et dans le cas des étu-diants hommes, 100% des personnesconsultées ont un conjoint, de mariage oud'union de fait, d'origine santoméenne.Chez les PH, le pourcentage est de 86%,donc très élevé aussi. Chez ceux quienfreignent cette règle, les conjointes sontde nationalité portugaise et la moitié d'en-tre elles ont aussi une autre nationalité. Cequi laisse penser qu'elles sont originairesd'un PALOP qui a un traité de doublenationalité avec le Portugal .

Nous nous trouvons devant un cas d'endo-gamie extrême, avec une populationimmigrante relativement réduite. Ce fait etles relations sociales de ce groupe seront

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96 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

Santoméens déposent leurs espoirs, com-ment ils perçoivent la virtualité du chan-gement, quels facteurs économiques etpolitiques ils considèrent plus significatifspour l'avenir et quels autres facteurssociaux et culturels ils valorisent le pluspour une amélioration de la qualité de vie.

Ce qui revêt aussi une importance particu-lière est de savoir s'il existe des différen-ces sur tout cela entre les professionnelsqualifiés et les étudiants, ou bien entre leshommes et les femmes, ce qui pourraitnous aider non seulement à mieux com-prendre les visions distinctes de ces col-lectifs, mais encore à établir une hypothè-se de changement selon le rôle joué parchacun de ces sous-groupes.

D'où une représentation des totaux et des

analysés en profondeur eu égard à leurprobable importance dans la logique cul-turelle santoméenne.

La vision sur l'avenir deSTP: agents et facteurs pourle changement.La façon de penser sur l'avenir peut ouvrirdes pistes fondamentales pour le diagnosticde la situation présente, la connaissance desdésirs de la population et l'analyse des pos-sibilités de changement, en prenant la sub-jectivité en considération. Par conséquent,la formulation d'une hypothèse de futurimplique une double réflexion: celle de l'a-venir et du présent, toutes les deux impor-tantes pour comprendre le changement.

Dans le cas concret de l'enquête il nousimporte de savoir sur quels agents ces

Agents plus importants pour l'avenir de STP

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

%

Entrepreneurs santoméens

Gouvernement

Citoyens en général

Investisseurs étrangers

Président de la République

Coopération Internationale

Santoméens résidant à l'étranger

Autres

Agents les plus importants pour l'avenir de STP

0102030405060708090

100

Gouve

rnemen

t

Citoye

ns da

ns le

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semble Autr

es

% d

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ans

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optio

ns

Professionnels (PH)

Professionnelles (PF)

Etudiants (EH)

Etudiantes (EF)

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97Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

tionnés par la moitié des femmes (voirci-dessous)

Quant aux agents venus de l'extérieur, leshommes penchent pour les investisseursétrangers alors que les femmes optentpur la coopération internationale. Ladifférence est aussi très marquée parrapport aux Santoméens de l'étranger,presque ignorés par les hommes et iden-tifiés par un quart des femmes.

En faisant la comparaison entre les profes-sionnels qualifiés et les étudiants, on n'ob-serve pas autant de différences.

On peut mentionner que les profession-nels qualifiés se donnent plus de poids àeux-mêmes que ce que leur donnent lesétudiants et que la coopération internatio-nale est plus souvent retenue par les étu-diants que par les professionnels qualifiés.

La lecture obtenue en croisant ces deuxcritères est bien plus significative, carentre les quatre sous-groupes, deux dévia-tions claires se produisent et deux moin-dres:

La valorisation des entrepreneurs santo-méens, agents mentionnés par 72% desEUF et 17,6% des EUH, déforme lesdifférences homme-femme globales, carPH et PF partagent le critère. Le poids donné par les PF auxSantoméens de l'extérieur en comparai-son avec le reste des sous-groupes.Le rôle fort dévolu par les EUF à lacoopération internationale et celuiconcédé au Gouvernement par les PH.

Les différentes lectures des agents susci-tent les premières réflexions sur ce qui estcommun et la diversité interne de cesSantoméens au Portugal.

Le fait de situer les citoyens comme l'a-gent principal est le point de rencontre, etdonc de départ pour penser sur l'avenir deSTP. Cela semble indiquer un parcoursdifférent de celui adopté jusqu'ici, caracté-risé par une participation omniprésentedes agents externes, comme indiqué aupa-ravant.

La valeur du Gouvernement comme agentest aussi une référence commune.Cependant il l'est beaucoup plus pour les

quatre sous-groupes, avec des explicationsséparées, quand cela s'avère significatif,de façon à permettre une lecture différen-ciée.

Le tableau suivant permet d'apprécier lavaleur attribuée à divers agents par rapportà l'avenir de STP

L'identification des citoyens en général sedétache clairement comme l'agent le plusimportant, suivi du Gouvernement. LePrésident de la République se distingueaussi, mais pour son poids très bas.

Au niveau intermédiaire se trouvent lesentrepreneurs santoméens, les investis-seurs étrangers et la coopération interna-tionale.

Cette hiérarchisation permet de compren-dre quelques points très importants pour lechangement:

Selon les personnes consultées, l'avenirdépend, avant tout, des Santoméens etpas tellement des agents externes, endépit du contexte de globalisation danslequel on vit et du fait d'entretenir unetrès forte relation de dépendance vis àvis de la coopération internationale(avec plus de 90% du PIB qui vient dela coopération et une dette exorbitante )

Le rôle principal est dévolu aux citoyenset au Gouvernement et non pas auxagents économiques, malgré la percep-tion généralisée de détérioration écono-mique.

La mention quasi nulle du Président de laRépublique semble retrancher de lavalidité aux hypothèses recueillies àSTP basées sur le renforcement despouvoirs présidentiels. Et même pour leprésent, le fait qu'il ne figure pascomme un agent de poids pour l'avenirdevrait retenir fortement l'attention.

Cette lecture générale doit être nuancéepar la désagrégation de l'information parsexe et par sous-groupe.

En comparant les hommes et les femmes,on observe que:

Les hommes donnent un poids supérieuraux citoyens et au Gouvernement.

Seulement un quart des hommes choisitles entrepreneurs alors qu'ils sont sélec-

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98 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

pour cela qu'on dit "Le peuple a le gou-vernement qu'il mérite". Si le peuple veutbien collaborer, moi je pense que le gou-vernement collaborera aussi. Et quand legouvernement ne collaborera pas, le peu-ple... est souverain, et il peut très bienrésoudre ces problèmes.

Les femmes, à quelques exceptions près,ont été exclues de la prise des décisionspolitiques dans les gouvernements succes-sifs et il n'est pas étonnant qu'une partied'entre elles, surtout les professionnelles,n'entrevoient pas de changements signifi-catifs dans ce domaine.

A ce propos Candelaria dit : Ils considèrent que la femme est... pas unecarpettes, mais presque, tu comprends(léger sourire). Il y a des hommes à STqui pensent ainsi. Même ceux qui ont faitdes études à l'extérieur. Ils pensent que laplace de la femme n'est pas dans la poli-tique, par exemple. Pourquoi est-ce qu'ily a si peu de femmes dans la politique san-toméenne, je ne sais pas si vous avezremarqué? Au Mozambique non, il y a desfemmes dans la politique. Il y a cinq ousix femmes ministres ou secrétaires d'Etatou conseillères. Mais ST non... Au moinspar rapport aux femmes, ils pensent defaçon très... infériorisée. Ils ne pensentpas que les femmes atteignent le sommetque eux peuvent atteindre. Ils voient lafemme comme un objet, certains hommes.Et il y a des femmes qui soutiennent ceshommes. Ca c'est pire encore. Vousvoyez? Moi je ne vis pas là bas, mais j'y

PH que pour le reste, ce qui peut être lié àla forte participation politique de ce sous-groupe en comparaison avec celle destrois autres.

Liberato fait ressortir l'importance duGouvernement et des citoyens:L'avenir de ST peut être souriant... si lesgouvernants le veulent bien. Tout dépenddes gouvernements, du gouvernement quiest élu pour ST. Maintenant, il me semblequ'il y a des élections, je ne sais pas... àST. Ca dépend. Parce que ST a la possi-bilité d'avoir une vie prospère, aisée. Etdonner, fournir un bon environnement auxenfants du pays. Mais il est nécessairequ'immédiatement le gouvernementveuille faire quelque chose pour ST. Vouscomprenez? C'est une petite île avec centet quelque mille habitants. Moi, j'ai été enAngola longtemps. Une toute petite com-mune à l'intérieur de Luanda a plus decent et quelque mille habitants. Parexemple un quartier, le quartier de Golfeou d'autres petits quartiers liés à Luandaont beaucoup plus d'habitants que le paystout entier, à S. Tomé. Et même, soit dit enpassant, il pourrait être gouverné pardeux ou trois demi-douzaines de gens.Qu'est-ce que c'est cent vingt mille per-sonnes? Ou même 130 ou 150, comme ondit, qu'il n'a pas, moi je ne crois pas queST ait 150 mille habitants. Mais même s'illes avait, qu'est-ce que c'est? Pour gou-verner 150 mille personnes... Donc, vousvoyez?.

Tout dépend du gouvernement de ST. C'est

Possibilités d'améliorer la situation économique et sociale à STP

0

10

20

30

40

50

60

70

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Très difficile Difficile Facile Impossible NRP

%

Professionnels (PH)Professiçonnelles (PF)Etudiants (EH)Etudiantes (EF)

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99Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

vais de temps en temps et moi, quand jeme trouve dans ces milieux politiques, parexemple, c'est ce que je ressens.

Les étudiants actuels, dans leur majorité,ne sont pas impliqués dans les continuel-les luttes politiques et ils ne donnent pasde signe d'être disposés à le faire.

L'importance que les EUF reconnaissentau corps des entrepreneurs privés santo-méens peut refléter une double situation:

Tout d'abord, elles notent le rôle croissantdes entrepreneurs dans l'avenir parcequ'elles visualisent la perte relative depouvoir du secteur public face au secteurprivé.

Deuxièmement, elles se voient elles mêmescomme des entrepreneurs potentiels, ce quicorrespond aux études choisies (Droit etAdministration d'Entreprises) et aux per-spectives d'intervention à STP. La diffé-rence avec les autres sous-groupes semble,en ce qui concerne la propre participation,relativement claire et elle se vérifie dans lesrelations avec STP et les espoirs de retour.Les EUH sont moins enclins aux activités àSTP et ils manifestent de sérieux doutes àpropos de leur retour à la fin de leurs études(voir II. 3.).

Les PF ne s'incluent pas non plus parmiles entrepreneurs potentiels ni entre ceuxqui croient au rôle des entrepreneurs desexe féminin. En fait pas une seule desfemmes consultées n'est entrepreneur,

comme déjà signalé.

Les PH n'ont pas une grande confiancedans les entrepreneurs santoméens, et ilssont en outre très critiques par rapport àl'attitude de leurs concitoyens, en particu-lier ceux des groupes de pouvoir, enversles initiatives orientées à la création d'en-treprises.

Par exemple, Juvénal raconte:Quiconque veut aller à S. Tomé, qu'il soitcadre ou détenteur de capitaux, s'il ne col-labore pas avec cette élite, il n'a aucunepossibilité pour rien

Je vais vous donner un exemple:moi, en1900 et... 93, j'ai connu un ami portugaisqui voulait investir à S. Tomé e Principe,pour que nous fassions une promotion d'é-crevisses. Parce que, d'après les étudesque j'avais faites, en termes climatiquesc'est optimum et en termes de nature opti-mum, et ce type de produit pourrait trèsbien se développer à S. Tomé e Principe.Il entra en contact avec moi... moi, je meresponsabilisai de la partie de S. Tomé,faire les démarches et tout ça. Et on y estallé. En une semaine, on a réussi à allervoir la zone et ouvrir le capital de l'entre-prise et toutes ces choses. Mais, pourtant,comme aucun de ces groupes d'élites nefaisait partie de ce projet, le projet esttombé, il s'est terminé... bon, il n'y avaitrien à faire.

Comment ces Santoméens perçoivent-ilsla possibilité d'améliorer la situation éco-

Facteurs politiques considérés d'importance maximum pour l'avenir de STP

0

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20

30

40

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60

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80

%

Réorganistion del'appareil d'Etat

Stabilité politique

Honnêteté dans l'exercice descharges publiquesRenforcement del'autoritédel'EtatConfiance dans les institutionspubliquesRenforcement des pouvoirs duPrésidentPomotion du dialogue et de laconcertation socialeRévision de la Constitution

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100 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

nomique et sociale?

Un consensus apparaît autour de l'existen-ce de la possibilité d'amélioration, bienque quelques observations doivent êtreprises en compte en désagrégeant l'infor-mation. Voyons tout d'abord le graphique.

La vision des femmes est moins marquéepar l'espoir que celle des hommes. Untiers des femmes pense que l'améliora-tion est très difficile, de même qu'unpeu plus du quart des hommes. La faci-lité du changement est perçue par plusdu triple d'hommes que de femmes(13,8 % versus 4,1 %).

En opposant les professionnels qualifiéset les étudiants sans considération desexe, on ne trouve pas de différencesnotables, ce qui est étonnant vu la géné-ration prédominante dans un cas et dansl'autre.

Il faut faire ressortir que sur les quatresous-groupes, dans celui des EUF, pasune seule personne ne considère l'amé-lioration facile. Pourquoi cette unani-mité?

La façon de considérer la situation écono-mique et sociale d'avenir à STP est trèsmarquée, d'une part, par la position relati-ve des hommes et des femmes dans lepassé et, d'autre part, par leur virtuelle par-ticipation à l'avenir, associée à son tour aucontact avec la réalité santoméenne.

La femme santoméenne adopte une per-spective personnelle dans le temps qui nepermet pas d'être aussi optimiste que cer-tains hommes. Elles ont apprécié certai-nes améliorations ponctuelles dans leurconsidération sociale, mais sans que celase traduise en un soutien de la part deshommes envers les changements orientésà créer une meilleure position pour elles.En même temps, elles sont conscientes deleur préparation, les unes comme profes-sionnelles, les autres comme étudiantesuniversitaires qu'elles ne seront plus bien-tôt, et se savent plus formées que leurspropres parents. L'avenir se présente dif-ficile ou très difficile pour la grande majo-rité, mais elles perçoivent des possibilitésde changement si elles luttent pour qu'il seproduise.

Les EUF sont le cas le plus extrême car

elles savent qu'elles vont être affrontées àune société avec des normes de comporte-ment très différenciées par sexe et elles, aumoins une partie significative d'entreelles, pensent participer activement à l'a-venir de STP.

Sur ce problème, il est intéressant derecueillir les dires de Victoria: Et comme femme, je pense aussi que jedois affronter beaucoup de choses. Parcequ'encore la femme est vue comme... unindividu passif dans la société. C'est entrain de s'améliorer. Ca s'est beaucoupamélioré. Je pense que depuisl'Indépendance ça s'est amélioré passa-blement. La femme n'est plus uniquementvue comme... bon, de la façon que lafemme est vue dans les pays africains. Leshommes sont en train de s'habituer à ceque les femmes aient une contribution àdonner, mais ça va très lentement encore.Et je sais bien que cela va être un facteurqui va nous mettre, à moi et aux autresfemmes, dans des situations très difficiles.Et concilier la profession, concilier lamaison... parce qu'on n'admet pas encorede femmes totalement consacrées à la vieprofessionnelle, comme ça se fait enEurope. On ne l'admet pas. Et à S. Tomé,au moins avec un mari santoméen, celan'est pas possible. En ce moment-ci, moije pense que ce n'est pas possible. Le marin'arrive pas à voir la femme en dehors dela maison pendant beaucoup de temps. Lafemme doit son assistance à la maison eten même temps dans sa profession. Poureux, c'est préférable d'avantage à la mai-son. Donc, je vais essayer de concilier.Etre présente à la maison, parce que jeveux vivre à la maison dans une ambiancestable, et en même temps tenter de donnerle maximum à ma profession, et moi jesais que cela va exiger beaucoup de mapersonne, mais même ainsi, j'accepte ledéfi, je vais essayer.

Quels sont les facteurs d'importancemajeure pour l'avenir de STP? Existe-t-ildes divergences notables entre l'ensemblede ces Santoméens? Les hommes et lesfemmes les rangent-ils différemment? Etles professionnels qualifiés et les étu-diants?

On exposera ci-dessous, par facteurs grou-

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101Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

additionnait importance maximum àimportance élevée, signalent la confian-ce dans les institutions publiques.

Le rejet des modèles autoritaires ressortclairement et particulièrement le fait dedonner plus de pouvoirs au Président dela République, ce qui semble confirmerla note formulée à ce propos sur la valo-risation des agents (voir ci-dessus).Moins d'un quart de ces Santoméensconcède l'importance maximum à lapromotion du dialogue et à la concerta-tion sociale pour l'avenir de STP.

Comment se fait-il qu'un rejet de l'autori-tarisme ne trouve pas une correspondancedans la valorisation du dialogue et de laconcertation?

Les discours des acteurs sociaux sur l'hon-nêteté dans l'exercice des charges publi-ques, à laquelle une valeur maximale estdonnée, s'expriment à partir de perspecti-ves différentes mais en même temps con-vergentes. Honnêteté et confiance dansles institutions font partie d'un même dis-cours, dans lequel ce sont les personnesqui occupent la place centrale et les rela-tions entre elles qui posent le profil duproblème. Ses manifestations les plusclaires se produisent dans le milieu de lajustice, mais on peut aussi les observer endehors des tribunaux, jusque dans le com-mun des décisions quotidiennes, commel'illustre Nelma:

pés (politiques, économiques et autresdivers), les graphiques résultants desvaleurs maximums données par l'ensem-ble des Santoméens. Sont ensuite intro-duits les graphiques qui reflètent lesvaleurs maximum des quatre sous-grou-pes, pour faciliter la lecture désagrégéeselon les critères établis. Mais, pourdisposer d'une vision beaucoup plus com-plète et fonder l'interprétation de tout lematériel, il est recommandé de consulterles annexes et revoir les tableaux. Pourune observation des graphiques unique-ment, il faut prendre en compte le fait quelorsqu'on oppose les hommes et les fem-mes les pourcentages considèrent les pro-fessionnels et étudiants d'un même sexe.De même lorsqu'on situe les profession-nels face aux étudiants, les pourcentagessont obtenus par la somme des hommes etfemmes consultés dans ces catégoriesrespectives.

Dans une première approche on peut seposer diverses questions:

L'honnêteté dans l'exercice des chargespubliques constitue le souci majeur,bien au-delà de toute réforme institu-tionnelle. Si on ajoutait les Santoméensqui donnent une valeur 5 à ceux qui ontdonné la valeur 4, on frôle 90% desconsultés.Presque la moitié des consultés identi-fient la stabilité politique comme unfacteur clef et près des deux tiers, si on

Facteurs politiques considérés d'importance majeure pour l'avenir de STP

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102 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

Quand je parle d'injustice je parle de cho-ses aussi simples que ceci: justice par rap-port aux procès qui sont dans le tribunalet justice au quotidien. Dans le quotidien.Moi j'ai, oui j'ai, j'ai des situations parfai-tement aberrantes d'injustice dans le quo-tidien pour lesquelles tout le monde dit:"Ben c'est... ici c'est comme ça" . Mais çane doit pas être comme ça. C'est un paysinjuste. C'est injuste. Toute la journée ilscommentent des injustices et ils pensentque: "Ah, c'est partout comme ça" Non.Ce n'est pas comme ça partout, non. Non,non, ce n'est pas comme ça. J'ai beaupenser que la justice portugaise fonction-ne très mal, la justice portugaise fonction-ne. Il existe une marge de fonctionnement.Que je n'aie pas à recourir à quelqu'unpour que mon cas soit entendu, que moncas aille au tribunal. Ca c'est un autreaspect de la question. Si nous voulons lamoralisation de la justice. Et cette mora-lisation passe par une chose aussi simpleque ceci: c'est que les gens savent... ilssavent, ils ont des données et ils ne saventpas quoi faire avec ce savoir. Les genssavent ce qui se passe, ils ne savent pasquoi faire avec ce savoir. Précisémentparce qu'il existe une toile de fond si... siesclavagiste de relations, à STP, qu'elleempêche que quiconque sanctionne, quequiconque exerce sa charge avec indépen-dance. Et ce n'est pas possible. Parce quela personne est cousine de je ne sais pasqui, qu'elle doit des faveurs à je ne saispas qui. Ca fait une trame tellement, tel-lement, tellement difficile, tellement diffi-cile. (...)

Il n'y a aucune transparence. Et la nonexistence de transparence dans les proces-sus de nomination à STP est une des cho-ses les plus atroces pour la constructionde l'idée de nation... de l'idée de patriotis-me. Les gens ne sont pas patriotes à STP.Ils ne peuvent pas être patriotes à STP(sourire doux), parce que STP est un paysqui traite mal ses enfants. Il traite sesenfants mal. Il traite mal ses enfants pré-cisément à cause de ces réseaux. Les gensne sont pas patriotes. Il n'existe pas detransparence dans les procès, dans lesprocès dont, d'une façon ou d'une autre,on pense qu'ils sont avantageux pour lespersonnes qui travaillent là. Ce qui exis-te est un immense réseau d'intérêts pour

mettre des personnes dans des postesdéterminés... des personnes qui sont demon église. Mais quand je dis église, c'estune métaphore: qui sont de mon groupe.Et cela est lamentable quand on parle dupays.

En parcourant l'information séparée parhommes et femmes, on peut confirmer lesobservations générales, mais des nuancesapparaissent qu'il faut signaler:

Plus d'hommes que de femmes accordentune plus grande importance à l'honnête-té dans l'exercice des charges publiques,et cela se répète avec la confiance dansles institutions publiques. Mais dans lesdeux cas, il existe une distorsion pourles EUF qui trouvera une explicationdans la désagrégation par sous-groupes.Seulement 12,5% des femmes (face à30,5 % des hommes) croit qu'il est d'im-portance majeure de promouvoir le dia-logue et la concertation sociale.

Seulement quelques hommes perçoiventcomme prioritaire le renforcement despouvoirs du Président, option absolu-ment pas partagée par les femmes. A la lumière des valeurs données à laréorganisation de l'appareil d'Etat et à larévision de la Constitution, on peut direque les hommes sont plus partisans desréformes politiques que les femmes.

Le fait que le dialogue et la concertationsociale soient moins valorisées, dans l'en-quête, chez les femmes que chez les hom-mes, et sans avoir été repris par une seuleprofessionnelles, ne signifie pas que lesfemmes méprisent l'importance de ce fac-teur. Au contraire, le traitement en pro-fondeur du problème laisse voir claire-ment que le dialogue doit être créé,comme l'exprime Ana:

A STP, la mentalité qui prétend que l'hom-me politique doit des explications au peu-ple n'existe pas! L'homme politique doitdes explications au peuple. Il est là parceque le peuple existe. Si le peuple n'exis-tait pas, lui, il ne serait pas là. Le politi-cien santoméen pense que lui ne doit d'ex-plication à personne. Lui, il donne seule-ment des explications... et quand il donne,il donne avec une arrogance terrible. Ilappelle les personnes de tous les noms.Qu'est-ce que c'est ça? Quelle sorte de

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103Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

grèves, il se peut que je ne sois pas très aucourant parce que je suis cela à travers laradio et la Télévision? Et qu'est-ce que jevois? Ce que je vois, c'est qu'il n'existepas de dialogue entre les parties enconflit?. Et les parties en conflit sont: lestravailleurs en grève et le Gouvernement.Il n'y a pas de dialogue. Ce qui se passe, ilme semble, est que chacun vient dire à lacommunication sociale ce qu'il pense. Ilsne dialoguent pas. Ils ne dialoguent pas.Chacun vient dire à la communicationsociale ce qu'il pense, n'est-ce pas. Parceque le dialogue est un truc très tendu àSTP, les gens ne savent pas débattre d'i-dées. Les gens n'arrivent pas à débattred'idées pendant une heure. Les gens s'in-sultent, les personnes se traitent de tout,pour la personnalisation et moi je penseque c'est cette mentalité de dialogue qu'ilfaut créer à STP.

Si le dialogue est aussi nécessaire, maispourtant pas signalé comme option priori-taire, peut-être le doit-on au scepticismequ'il suscite, surtout dans la vie politique.Pour les femmes professionnelles, le dia-logue à STP peut être tellement inexistantdans la logique des relations, personnelleset au niveau du collectif, que lui donner lavaleur maximale est preuve de manque desens de la réalité, et cela dans le domainede la politique qu'elles n'occupent parailleurs que très marginalement. Cetteincrédulité peut s'étendre aux réformespolitiques formelles, d'où la valeur limitée

pays démocratique est-ce si moi je nepeux pas critiquer un homme politiquesans me faire insulter en retour ?. C'estimpressionnant que ce pays! C'est de l'ar-rogance parce que lui il pense qu'il n'a pasà... Et cela, ce problème n'est pas demaintenant. Ce problème vient de l'é-poque du parti unique ou Pinto da Costane donnait d'explications à personne. Etcomme on fait faire une démocratie sansdémocrate, voilà le résultat. Certes, jesuis en train de parler de généralités, maisje pense qu'il est très important que nousdiscutions d'abord de principes. Et ce sontles principes qui ne sont pas discutés à ST.(...)

En résumant tout ceci, moi je pense queSTP est une société où manque le dialo-gue. Et je vais vous donner un exempleaussi simple que ceci: quand j'entends cesgrèves continuelles d'enseignants, ça merend triste. Tout d'abord... ce n'est pasque je sois d'avis que les enseignants nedoivent pas faire grève. C'est que leursrevendications... ne sont pas exécutables.Le Gouvernement a beau vouloir, leGouvernement ne peut pas satisfaire cesrevendications. Qui parle des ensei-gnants, parle de la fonction publique. Ilsfont des revendications parfaitement quine peuv... seulement si un Bill Gates sedécidait à injecter son excédent d'argent àSTP. Aucun Gouvernement n'arriverait àsatisfaire ces revendications. Et qu'est-cequi arrive? Il est vrai que dans ce cas des

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Développement du tourisme

Réduction de la dette externe

Création d'un secteur privé fort

Augmentation de la coopérationinternationaleCaptation de l'épargne desémigrantsExploittion du pétrole

Diversif ication des exportations

Attraction de l'investissementétranger

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104 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

qu'elles leur assignent.

Des différences encore plus grandes sevoient quand on oppose les professionnelsqualifiés et les étudiants, surtout en consi-dérant les valeurs haute et maximum destableaux.

Presque deux fois plus de professionnelsqualifiés que d'étudiants donnent lavaleur maximum à la stabilité politiqueet à la confiance aux institutions.Les professionnels qualifiés concèdentbeaucoup plus de poids au renforcementde l'autorité de l'Etat que les étudiants.La promotion du dialogue et de laconcertation sociale est plus importantepour les étudiants que pour les profes-sionnels, mais surtout à cause de lavision des PF déjà commentée.

L'expérience joue un rôle clef pour com-prendre la différente importance accordéeà la stabilité politique et aux institutions.STP s'est caractérisée par une volubilitédans la vie politique très marquée, ce quisemble découler de la personnalisation desliens politiques. Les Gouvernements sedéfont et se refont avec une rapiditédéconcertante, surtout si on fait la compa-raison avec les Gouvernements européensou nord-américains. Il semble donclogique que les professionnels installésdans un pays beaucoup plus stable et quiont observé ou subi les continuels change-ments à STP valorisent plus les effetspositifs de la stabilité, bien que certains deces Santoméens n'arrivent pas à saisir clai-rement comment le système démocratiques'emboîte à STP.

Voici comment João, un de ces profes-sionnels, explique le problème:Mais aussi avec ces changements poli-tiques aussi... Après c'est une des chosesimportantes à São Tomé: stabilité, stabili-té politique. Parce que ce que j'ai vu,après le changement, qu'il y a eu beau-coup de partis, c'est à dire, on n'arrive pasdans un pays. D'abord, c'est une choseque nous avons importée, les modèlesdémocratiques, qu'universellement onprétend que c'est de l'Europe, que trèssouvent ils ne sont pas bien adaptés ànous, car nous, on a... Ce qui est bon dansce truc, c'est qu'il y a les droits de l'hom-me qui est une chose fondamentale pour le

genre humain. Alors, quand il y a eu cechangement, qu'il y a eu un parti qui agagné les élections, ça ne rimait à rienquand il manquait six mois pour qu'unparti termine sa législature, le Présidentde la République, purement et simplement,à son bon plaisir, sans voir l'intérêt dupays, il fait tomber le Gouvernement.C'est à dire qu'il a fait tomber successive-ment des gouvernements qui ou quoi cequi mène le pays en termes économiques,en termes de confiance internationale,c'est tombé dans un discrédit que réelle-ment,, que la plupart des fois la fauteretombe sur nous tous, surtout les person-nes qui sont des représentants. C'est àdire, six mois pour qu'un Gouvernementtermine sa législature il fait tomber leGouvernement. Puis après, une autre foisdes élections, puis une autre fois desconflits. Voilà pourquoi São Tomé ePrincipe est comme cela. Mais qu'il y aitdes possibilités pour ceci ou cela, moi jepense qu'il y en a. Il faut réellement queles hommes changent de mentalité et queles personnes qui sont là veuillent vrai-ment travailler pour le bien de São Tomé ePríncipe.

Encore une fois les sous-groupes présen-tent des singularités remarquables:

En termes généraux, les EUF donnentdes valeurs plus basses que le reste dessous-groupes, ce qui peut-être contribueà expliquer le pourquoi de la si hauteappréciation des entrepreneurs commeagent d'avenir de STP (voir ci-dessus);peut-être mettent-elles d'avantage leurconfiance en eux que dans les acteurspolitiques. . En suivant cette ligne, on remarque lepoids relatif bas que les EUF concèdentà l'honnêteté dans l'exercice des chargespubliques et très bas pour la confianceaux institutions publiques et l'autoritéde l'Etat.

Une fraction de 17,6%, absolument pasméprisable, des EUF perçoit commed'importance maximum le renforcementdes pouvoirs du Président, ce qui estcohérent avec le fait que ce soit ce grou-pe le plus partisan de la réforme consti-tutionnelle.

Aucune PF n'est portée à beaucoup valo-riser le dialogue et la concertationsociale, ce qui a déjà fait l'objet d'une

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105Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

le tourisme. Il y a des conditions excep-tionnelles comme Monsieur a certaine-ment pu observer. Pendant votre séjour àST, vous avez certainement vu ça. Et letourisme n'est pas exploité. Pourquoi?

Les uns disent que c'est par manque d'hô-tel, mais même ainsi, il y a là déjàquelques petits hôtels, pas beaucoup, maiss'ils étaient bien aménagés et avec du per-sonnel à la hauteur, pour les premièresimpressions, le problème des touristes estrésolu.

L'une des entraves est la malaria, le palu-disme. Et aussi, pourquoi est-ce qu'il n'estpas éradiqué. Cela pourrait être éradiquéà ST mais c'est clair, un travail de combatet éradication du paludisme fut démarrémais on ne l'a pas conclu.

Et puis aussi c'est l'absence de propreté.On n'en finit pas avec les marais qui exis-tent encore à ST, en pleine ville, cesrelents: c'est un foyer propice à la prolifé-ration des moustiques. Il n'y a pas de pro-preté, il n'y a rien. Les ordures aussicontribuent à l'augmentation des mous-tiques.

La valeur accordée à l'attraction de l'in-vestissement étranger et à la diversifica-tion des exportations réveille des doutes sion la rapproche du peu de valeur accordéeà la création d'un secteur privé fort, à lacaptation de l'épargne des émigrants et àl'exploitation du pétrole.

Le premier doute que suscite cette échelleest relatif au changement de mentalité éco-nomique depuis le régime de parti unique.Est-ce qu'on penserait que le développe-ment du tourisme, signalé comme premierfacteur économique, revient à l'Etat? Qui,pense-t-on, ira engendrer des richesses sion arrive à augmenter l'investissementétranger? Comment espère-t-on diversifierles exportations sans développement desentreprises privées?

On pourrait formuler l'hypothèse selonlaquelle ce n'est pas tant à cause d'un pro-blème de différences entre une économiecentralisée et une économie de marchéque parce que ces Santoméens confient ledéveloppement du pays dans les mains des

tentative d'explication. Les PF sont celles qui voient dans l'hon-nêteté dans l'exercice des chargespubliques le plus d'importance pour l'a-venir de STP, ce qui contraste singuliè-rement avec les EUF.

Quant aux facteurs économiques, en pre-nant l'ensemble de ces Santoméens, voicila représentation graphique dans laquellela valeur maximale est concédée au regardde leur importance pour l'avenir de STP:Le développement du tourisme et l'attrac-tion des investissements étrangers sontidentifiés comme les facteurs les plusimportants, suivis par la diversificationdes exportations.

Le captage des envois des émigrants quipourraient être utilisés pour des inves-tissements -y compris dans le secteur dutourisme- occupe la dernière place.

Singulièrement, du point de vue écono-mique, seulement un tiers considèrecomme d'importance maximum réduirela dette externe, étant donné son volu-me et le poids de la fragile économiesantoméenne. L'exploitation du pétrole occupe aussiune place très reculée, si on s'aligne surla perspective de richesse qu'il pourraitengendrer.

Dans la ligne des réflexions faites à pro-pos des jugements sur les agents et l'a-venir de STP, le peu de poids relatifattribué aux entrepreneurs du secteurprivé est confirmé.

Le développement du tourisme est un fac-teur mentionné de façon récurrente parbeaucoup de ces Santoméens et les princi-pales conditions pour qu'il soit possiblesont identifiées par une grande majorité:transports, infrastructures, éradication dupaludisme, hygiène et assainissementpublic, etc. Cependant, la connaissancede ces circonstances ne se traduit pas ensolution des problèmes et le discours surles implications qu'aurait le développe-ment de ce secteur finit par être éclipsé parla réalité qui, jusqu'à présent, ne le permetpas.

Liberato expliquePour l'instant, il est à l'état de trace, alorsqu'il devrait être une des principalesrichesses de ST, ce pourrait très bien être

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106 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

étrangers, y compris celui de leur secteurprivé. Malgré tout, cette interprétation estpeu cohérente avec l'identification desagents les plus remarquables pour l'avenirde STP, où il a été mentionné explicite-ment que ce sont les Santoméens qui doi-vent être les principaux acteurs de leurpropre avenir.

Les réponses sont un peu plus complexeset font appel à de nouvelles questions d'oùsurgira une interprétation plus globale.

Il faut essayer de clarifier pourquoi, dansun pays avec un tel manque de capital pro-pre, on ne valorise pas la potentialité del'épargne des émigrants et, en revanche,celui du capital en provenance de l'inves-tissement étranger oui; pourquoi l'exploi-tation du pétrole qui pourrait attirer beau-coup de capital externe et être à l'origined'un capital propre très élevé occupe unpoids aussi bas en comparaison avec lesfacteurs antérieurs.

Voyons ce que disent les Santoméens à cepropos, en commençant par les réflexionsde Sofia sur le pétrole:Moi je pense qu'on n'investit pas dans les

alternatives. On va évidemment me dire"mais ils sont en train d'investir dans lepétrole". Pour moi, quant à moi, person-nellement, c'est un autre malheur qui vaentrer à STP. Mes amis que j'aime beau-coup, ce n'est pas cela qui est en cause,sont tous très heureux à cause du pétrole.Or, le pays… Nous avons en Afrique desexemples de pays producteurs de pétroleoù leurs peuples vivent en dessous du seuilde la pauvreté. Le pétrole en soi, larichesse naturelle en soi, ne résout lesproblèmes de personne ! Et je ne vais pasparler de la Suisse qui n'a aucune riches-se naturelle. Non je ne vais pas vers laSuisse, ce serait pêcher par envie et aspi-rer au top. Voyons à Cap Vert. A CapVert, les gens ne vivent pas si mal qu'à S.Tomé. A S. Tomé, les personnes vivent trèsmal. Ca fait mal à l'esprit des gens. Et ilsn'ont pas d e richesse. Bon, revenons aupétrole, moi je ne pense pas que le pétroleva résoudre notre problème. Le pétrole varésoudre le suivant: Le pétrole va rendreun nombre réduit de gens plus riches àSTP, parce qu' à STP il y a déjà des gensriches. Riches. Des gens riches. Cesgens vont devenir plus riches et le reste dupeuple va continuer comme il est, il va

Facteurs économiques considérés d'importance majeure pour l'avenir de STP

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107Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

peut aider à expliquer le scepticisme dansles attentes devant la future exploitationdu pétrole. Il faut, en outre, relever com-ment on pense à la répercussion de l'acti-vité économique dans le développementhumain, en ne se limitant pas à une simplecritique à l'enrichissement illicite et à larichesse en soi.

A propos des virements effectués par lesémigrés, et de leur importance en tant que

continuer pauvre. Evidemment, cela n'estpas si linéaire que ceci, c'est à dire, cen'est pas si…C'est clair que si lesSantoméens voulaient, si les Santoméensvoulaient ce ne serait pas comme ça.L'argent va se reverser pour, ou il peut sereverser pour des choses, pour des biens,plus collectivisants comme des routes, desécoles, des hôpitaux. C'est évident. Destravaux d'assainissement. C'est clair.Mais à partir de ce que j'ai vu au cours de

Facteurs considérés d'importance majeure pour améliorer la qualité de vie des Santoméens

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Contrôle du paludisme

Salaires plus élevés

Environnement natureléquilibréConditions de logement

Modif ication du comportementleve-leveOffre culturelle

ces 25 ans, ceci ne me semble pas être unavenir. C'est à dire, à cause de ce que j'aivu au cours de ces derniers 25 ans, je suisobligée de dire " j'ai vu l'avenir et il nem'a pas plu". Parce que c'est vrai que çapeut être différent. Il y a des pays, surtoutdes pays arabes où le pétrole a été bienutilisé, certainement beaucoup par l'oli-garchie, qu'elle soit présidentielle oudynastique. Beaucoup par l'oligarchie,mais qui reverse l'argent dans des chosesconcrètes : travaux d'assainissement, rou-tes, écoles, santé. Moi je sais pourquoiSTP est un des pays les plus endettés dumonde. Où est passé l'argent de cettedette? Investi, cet argent est investi dansquoi ? Parce que j'ai fait gaffe s'il sevoyait. Bon, il a été investi mettons dansdes hôpitaux. Mais ce n'est pas ça qu'onvoit..

Cette interprétation de l'appropriation desbénéfices du pétrole par une minorité,sans répercussion sous forme d'améliora-tions pour l'ensemble de la population

facteur économique les Santoméens n'ig-norent pas ce potentiel et ils se référent aucas capverdien comme une réussite.Idalecio raconte:J'ai coutume de dire comment est-il possi-ble que les Capverdiens, par exemple,indépendamment d'avoir beaucoup oupeu, pensent toujours à Cap Vert, veulentretourner au Cap Vert. Ils gagnent bien,ils envoient cinq à Cap Vert. A ST non.L'homme santoméen continue, il continueencore aujourd'hui, s'il a dix, il veut lesdix pour lui, moi j'ai dix, je veux cinq deplus, cinq viennent à moi. Il ne pensemême pas à se dire: "J'ai cinq, mais jevais aider mon pays avec cinq de plus, jepeux", penser un peu plus à son peuple, àson pays au lieu de penser à lui-même. Etcela se voit beaucoup chez les dirigeants.(...)

Et puis c'est une chose qui, je crois, arriveau Cap Vert. Le Cap Vert n'a pas d'eau,c'est un pays extrêmement pauvre où lesgens ont gagné un amour à la famille

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108 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

situer la valorisation si limitée attribuée àla réduction de la dette, en sachant pour-tant que, comme facteur économiqueobjectif, c'est un problème de premièreampleur pour l'avenir de STP. Et non seu-lement on la situe à des niveaux de priori-té très bas, mais encore il semble qu'on nesoit pas très inquiet par le fait qu'ellecontinue à augmenter, puisqu'on insistetoujours sur l'investissement étranger (unegrande partie duquel se produit et se pro-duira au travers de crédits) et non sur lesecteur des entreprises privées.

Toutes ces réflexions devraient permettrede considérer que comprendre la valorisa-tion des facteurs économiques à STP

parce qu'ils sont partis du pays en quêtede mieux et ils savaient qu'ils laissaientd'autres personnes à Cap Vert. Et alors ilssont successivement préoccupés par lespersonnes qu'ils ont laissées là bas. C'est àdire qu'ils comprennent que ce qu'ils ontréussi à ramasser ici, maintenant, ça peutaider énormément au développement deCap Vert et c'est cela qui est arrivé, le paysest en train de se développer. J'ai des collègues capverdiens, je parleavec beaucoup d'entre eux, et j'en connaisbien quelques-uns, et c'est une manièretotalement différente. Je les vois aller à labanque, faire des versements pour ST, pour

Facteurs considérés d'importance majeure pour changer la qualité de vie des Santoméens

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Professionnels (PH)Professionnelles (PF)Etudiants (EH)Etudiantes (EF)

Cap Vert, envoyer leurs conteneurs à CapVert, faire leurs maisons à Cap Vert, trou-ver un terrain à Cap Vert, ou être toujourssur le terrain. A ST, c'est presque impensa-ble, un terrain à ST et avoir ce terrain. Ilsles donnent simplement aux gens dont ilspensent qu'il faut le leur donner. C'est àdire à leurs amis purement et simplement.Et ils ne font pas les politiques parce quec'est comme ça.: cet homme est un inconnu,mais c'est un cadre santoméen qui revient,il va faire une maison, c'est une plus-valuepour le pays, n'est-ce pas? Et ce n'est plusun problème pour le Gouvernement. Maisils ne voient pas ça. Ou autrement, plusnous dépendons de la coopération à ST,mieux c'est pour eux. C'est une façon erro-

née de voir la politique, et d'après moi, àmon avis, très particulière. Mais écoutez,jusqu'à présent, on n'a pas encore réussi àfaire mieux.

Penser à son intérêt personnel au-dessusde l'intérêt collectif, aux relations person-nelles plutôt qu'aux intérêts généraux et àune affirmation sur le bénéfice que lesdirigeants peuvent tirer de la dépendanceélevée vis à vis de la coopération interna-tionale sont les problèmes perçus par cer-tains de ces Santoméens.

C'est sur la même ligne que semble se

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109Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

tissement de capital étranger (59,3 e46,4 %).Les étudiants font des Santoméens legrand protagoniste, aux dépends de cequi vient de l'extérieur et en potentiali-sant ce qui doit se développer à l'intérieur(par le biais des entreprises privées et dela diversification des exportations).

La lecture différenciée par sous-groupespermet de relever la singularité en cettematière des EUF:

Elles situent à la première place la réduc-tion de la dette externe, se différenciantainsi clairement des autres.

Elles valorisent t très peu l'augmentation de la coopérationinternationale et encore moins l'attrac-tion de l'investissement étranger et l'ex-ploitation du pétrole.

C'est le sous-groupe qui valorise le plusla création d'un secteur privé fort, avecses entrepreneurs.

exige un effort pour insérer le discourséconomique dans la logique d'autres dis-cours, puisque qu'il ne semble pas possi-ble de répondre, en termes économiques, àun certain nombre d'interrogations impor-tantes.

Voyons ce que peut apporter la désagréga-tion dans la clarification de ces interroga-tions.

La division entre hommes et femmesdonne à voir quelques points intéressants:

Les hommes signalent une importancemaximum à beaucoup plus de facteurséconomiques que les femmes.

La différence est particulièrement grandeen ce qui concerne l'augmentation de lacoopération internationale (36,1 % deshommes et 8,3 % des femmes) et dans lacaptation de l'épargne des émigrants (25% des hommes et 4,1 % des femmes).

Uniquement pour la réduction de la detteexterne, on trouve un plus fort pourcen-tage de femmes que d'hommes, maispas de beaucoup (37,5 versus 33,5).

Les différences entre professionnels quali-fiés et étudiants sont elles aussi apprécia-bles:

Les professionnels qualifiés donnentmoins d'importance à la réduction de ladépendance externe (28,1 versus 42,8%des étudiants) et beaucoup plus àl'augmentation de la coopération inter-nationale (31,2 et 17,8 % ), à l'épargnedes émigrants (25 e 7,1 %) et à l'inves-

Rythme de voyages à STP 3% 10%

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Plusieurs fois par anUne foispar anTous les deux ansRarementJamaisNRP

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110 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

Les désagrégations successives ouvrentun espace pour le changement en opposantles EUF et les PH.

Les PH semblent être ceux qui reprodui-sent le plus un modèle clairement soutenupar ce qui vient de l'extérieur, au prix d'un

endettement croissant, un développementendogène bas et une accentuation proba-ble des différences sociales par l'appro-priation des bénéfices issus du pétrole oud'autres investissements étrangers.

Les EUF paraissent représenter un modè-le beaucoup plus orienté pour le dévelop-pement des capacités propres, qui doit sefaire à partir d'un assainissement écono-mique mais aussi social. Elles parient surdes alternatives au secteur public et aurôle que joue l'Etat en ce moment, eninsistant sur le corps des entrepreneurs,mais aussi sur le rôle qu'elles mêmesdevront jouer dans l'avenir de STP. .

Outre les facteurs politiques et écono-miques exposés, les Santoméens ont étéquestionnés sur d'autres facteurs liés auchangement de qualité de la vie et le déve-loppement humain.

Voici ci-dessous la représentation gra-phique des valeurs maximums pour l'en-semble de ces Santoméens.

Sans aucun doute, ces facteurs suscitentune coïncidence notable puisqu'ils sontbeaucoup plus valorisés que les facteurséconomiques ou politiques exposés plushaut. Six d'entre eux reçoivent une valori-sation d'importance maximum, au-dessusde 40% (il n'y en avait que deux dans lesfacteurs politiques et trois dans les écono-miques qui atteignaient cette tranche) etuniquement l'honnêteté dans l'exercice descharges publiques se rapproche des pour-centages les plus élevés de ces facteurs.

Le contrôle du paludisme et les infra-structures se détachent clairement sur lereste et, si on ajoute la note maximum àla valorisation haute, nous nous situonsà des niveaux de l'ordre de 90%. Dansle cas de l'éducation, on se rapproche dece degré, mais avec un pourcentaged'importance maximum bien inférieur.

70 % des personnes consultées valorisecomme très importante l'altération ducomportement leve-leve (46,7% avecla notation maximum et 23,3% avec lavaleur suivante)

Si on pense que la rente per capita est lacomposante la plus basse de l'Indice deDéveloppement Humain à STP, on peutêtre surpris par la place occupée par les

Hypothèse de retour définitif à STP

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Problèmes évoqués pour concrétiser le retour

Raisons familiales

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Manque de confianceen l'avenir de STP

Absence de moyenséconomiquesAutres

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111Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

qu'on identifie les problèmes pour maté-rialiser le retour à STP. Dans ce cas, tousles PH placent les carences en moyenséconomiques à la valeur maximum .

Par rapport au dénommé leve-leve sonimportance est reconnue, sans le moindredoute, par ces Santoméens et si on tenaitcompte des résidants qui n'ont jamais été àST, il est fort probable que les valeursrésultantes seraient encore plus hautes. Leleve-leve est associé avec une mentalitésantoméenne et il requiert une réflexionplus nuancée dans l'analyse globale. Nousanticipons avec des références de Maria etJoão:Aussi un tout petit peu de notre leve-leve,et un tout petit peu... c'est à dire, je nesais pas si vous avez déjà été à ST? Parceque très souvent, nous, nous mentionnonsleve-leve: la vie va lentement, on laissepasser, on laisse couler et les personnesne contribuent pas pour grand-chose,

Problèmes pour matérialiser le retour

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Raisons familiales Raisonsprofessionnelles

Manque deconfiance en l'avenir

Absence de moyenséconomiques

Autres

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Professionnels (PH)

Professionnelles (PF)

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Etudiantes (EF)

salaires comme facteur d'amélioration dela qualité de la vie. L'environnementnaturel est le seul qui soit situé en dessouset il est dépassé par l'offre culturelle.

Toutefois, la valorisation du facteur salai-res dans cette partie de l'enquête ne pré-suppose pas que, lors de l'approfondisse-ment de ce thème, les Santoméens mépri-sent son importance. Les différences sala-riales entre STP et le Portugal sont trèsgrandes et le coût de la vie à STP, si onveut garder un standard de vie régi selonles paramètres en vigueur au Portugal, estaussi très élevé. Pour qu'un professionnelpuisse satisfaire ces conditions mini-mums, il faut que les salaires montentconsidérablement à STP.

Mais, peut-être, ces Santoméens préfè-rent-ils montrer l'importance des facteursqui, d'un point de vue social, sont jugésindispensables et sur lesquels on s'attend àune sensibilité unanime. Il ne sembleraitpas très correct que, explicitement, lesprofessionnels jouissant de meilleuresconditions situent les salaires à desniveaux d'importance supérieurs à la santéou à l'éducation. Et, en outre, la majoritéde ces Santoméens ne vont pas retournervivre à STP à court terme, et ils ne ris-quent donc pas de pâtir des salaires actuelsde STP. Il serait très différent d'analyser lefacteur salaire à partir de la perspective dece qu'ils touchent en réalité, comme lors-

Types de contact des Santoméens entre eux

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Familiaux

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112 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

l'environnement naturel, aux conditions delogement, au changement du comporte-ment leve-leve et aux salaires plus élevés.

Le graphique suivant reflète la désagréga-tion:

Relations entre lesSantoméensLa distance permet d'adopter une perspec-tive différente pour aborder les phénomè-nes, les personnes et les institutions, parti-culièrement quand il s'agit de ceux quiaffectent directement l'individu pour labonne raison qu'ils font partie de sa bio-graphie.

Comprendre les relations des Santoméensémigrants entre eux et celles de ces der-niers avec STP peut aider à une meilleurecompréhension entre tous. A partir decette connaissance peuvent s'ouvrir desformes de dialogue et de collaborationliées au changement et au développementhumain à STP.

L'enquête s'est appesantie sur troisaspects: connaître l'attitude des émigrantsface à l'hypothèse de retour à leur paysd'origine, vérifier les contacts entreSantoméens au Portugal et rechercher leurpossible implication dans des activitésconcrètes.

Voici les résultats des enquêtes, en utili-sant encore une fois les représentationsgraphiques comme une première imagepour amorcer la réflexion et en gardant lesmêmes formes de désagrégation.

Vérifier la fréquence des voyages à STPest un premier pas pour comprendre lesrelations avec le pays d'origine et avec lesconcitoyens.

Le graphique permet de voir que seul unnombre réduit de ces Santoméens voyageavec régularité à STP et que trois sur qua-tre ne le font jamais ou presque jamais.

Mais quelques différences internes appa-raissent en désagrégeant l'information.

Un cinquième des femmes va fréquem-ment à STP (une ou plusieurs fois paran), alors que seuls 8,2% des hommes lefont.

parce qu'elles attendent toujours qued'autres le fassent. Elles attendent tou-jours que d'autres fassent et ceux-là necontribuent pas non plus pour grand-chose.

Il faut insuffler chez les gens un esprit decivisme plus fort, un esprit d'amour à saterre elle-même et cela passe par beau-coup de culture, beaucoup d'éducation.Les gens doivent savoir que le pays leurappartient. Qu'il est à eux. Et eux, lesgens, peuvent faire un peu, ils peuvent êtreen train de faire un peu pour leur pays. Etça passe beaucoup par cela.

Et ST vit un .. . pour moi c'est grave, vit dansun état qui est grave. Parce que les genssont accommodés au statut quo, avec ce quiexiste. Les gens ne font pas d'effort pourchanger la mentalité santoméenne. LeSantoméen vit dans cette mentalité leve-leve, je ne sais pas si tu connais l'expressionleve-leve, mole mole ? On mène sa vie... Etça ne marche pas, Ca ne donne pas. J'ai euvu ST mieux qu'il n'est aujourd'hui.

Contrairement à ce qui a été observé surles facteurs politiques et économiquesainsi qu'à propos des agents et des attentesde changement, dans la valorisation de cesfacteurs-ci liés à la qualité de la vie, ladésagrégation ne fait pas apparaître devariations notables, ni entre les hommes etles femmes, ni entre les professionnelsqualifiés et les étudiants, ni entre les quat-re sous-groupes.

Il faut seulement mentionner que les hom-mes présentent des valeurs maximums unpeu plus hautes que les femmes et que lesEUH semblent globalement plus exi-geants que les autres sous-groupes, vuqu'ils accordent l'importance maximum à

Genre de contacts entre Santoméens

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Parents De voisinage D'amitié Associations Autres

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113Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

ternative dans une société aussi compétiti-ve que l'européenne, on comprend qu'onsoit encore moins disposé à faire des expé-riences à STP. Mais continuons à nouspencher sur les questions de base pourmieux lever les doutes.

Quels sont les problèmes qui empêchentde matérialiser le retour?

L'absence de moyens économiques et lemanque de confiance en l'avenir de STPfigurent comme les problèmes les pluscités, tandis que les motifs professionnelset familiaux sont mentionnés par moins depersonnes, bien qu'ils soient fréquemmentliés les uns aux autres. Manuel dit:Mais il y a beaucoup de travail à faire. Ilest clair qu'il y a un second aspect qui estl'aspect socio-financier, c'est sûrement undes aspects les plus difficiles, qui rend dif-ficile le retour. Moi j'ai beaucoup d'inté-rêts à travailler avec ST, travailler pourST, mais pour le moment, je n'ai pas trou-

Les étudiants qui ne vont jamais à STPsont beaucoup plus nombreux que lesprofessionnels qualifiés, probablementà cause du coût élevé du voyage .

Les PH font le voyage plus souvent queles PF et les PF qui ne le font jamais ourarement sont aussi les plus nombreuses.

Les EUF font le voyage beaucoup plusque les EUH et les EUF qui ne font levoyage jamais ou rarement sont aussiles moins nombreuses.

Est-ce que les Santoméens se posent laquestion du retour définitif? Apparem-ment oui, du moins selon la façon directede répondre, et sans qu'il y ait de différen-ce appréciable par sexe ou par âge.

La minorité qui déclare ne pas se posercette question sur le retour définitif avan-ce comme argument central l'absence dequalité de vie à STP.

L'essai de préciser le temps qui s'écouleraavant le retour définitif fait apparaître uneplus grande différenciation interne, maisles Santoméens qui donnent une date pro-chaine sont peu nombreux ( 3,8 %), ce quifait douter sérieusement de la réponse à laquestion centrale initiale. Peut-être laréponse obligée socialement entre eux est-elle de déclarer la volonté de retourner,sans qu'elle ait à voir avec la réalité.

La désagrégation n'aide pas à éclaircir lesréponses relatives aux tendances de con-crétisation du retour, mais elle donne unepiste sur les sous-groupes, ainsi que sur ledélai court et l'incertitude:

Uniquement les étudiants se proposentde retourner à bref délai, ce qui sembleindiquer que leur séjour au Portugal estla conséquence de leurs études. LesEUF entrevoient des délais plus courtsque les EUH.

Le degré d'incertitude parmi les étudiantsest très élevé, et c'est le contraire qui sepasse avec les PH

Il existe une plus grande incertitude parmiles étudiants qu'au sein des professionnelset cela est conforme à ce qu'on peut atten-dre, étant donné le degré différent d'inté-gration sociale et les différentes marges demanœuvre. Si l'âge, le travail et lesenfants ne permettent pas beaucoup d'al-

Possibilités d'activités avec des Santoméens

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Possibilité de collaboration avec des Santoméens

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Au Portugal A STP

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114 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

ment pour quelques années et à mettre aubanc d'égalité l'utilité et la supposéenécessité du téléphone au Portugal et àSTP, en l'amenant même au rang de " bienprimaire ".

Ecoutons par exemple les demandes deJacinta à ce propos : Moi je voudrais beaucoup retourner dansmon pays, c'est à dire... Moi je suis entrain de vivre au Portugal et ça ne meplait pas. Tous les jours je pense à fairemes malles, tout ranger et m'en aller.Mais à chaque fois que je m'en vais envacances et que je vois comment c'est... jen'ai pas envie de rester. Pourquoi cela?Parce que là bas je n'ai pas de maison. Sile Gouvernement santoméen faisaitcomme le Gouvernement capverdien,quand les jeunes finissent leurs études, illeur trouve des maisons. Et ce ne sont pasces maisons préfabriquées. Ils restent làquelque temps, deux, trois ans et après,chacun construit sa maison et va vivrechez lui. Beaucoup de cadres d'ici s'eniraient. (...)

Donc, s'il y avait des conditions de loge-ment, de meilleures conditions salariales,de meilleurs appuis, les jeunes revien-draient presque tous, les cadres.

Et quand on va à l'extérieur pour faire sesétudes, on acquière d'autres habitudes.La qualité de vie est importante pour moi.Je crois que jamais plus je ne pourrai pen-ser "être dans une maison sans salle debains". Etre dans une maison sans lumiè-re, seulement si j'avais un problème desanté assez grave pour ne pas pouvoir tra-vailler. Dans ce cas, quelle solution. Maistant que j'ai des jambes et des bras pourtravailler, je crois que je vais... je doism'efforcer pour avoir de meilleures condi-tions de vie. La qualité de vie pour moi,c'est fondamental. Et avoir un téléphone,par exemple. Moi, quand je vais à S.Tomé, les gens ne rentrent pas en contactavec moi, parce que je n'ai pas le télépho-ne à la maison. Le mobile ne fonctionnepas à ST, par exemple. Ce n'est pas unechose très chère, mais la plupart des gensn'ont pas le téléphone à ST. Au moins,chez moi, nous ne l'avons pas. Ceci est unbien primaire. Les gens ont besoin decommuniquer, mettez des guillemets,

vé les conditions pour retourner. Et je neparle pas seulement de ce qui est basique,avoir un logement; le logement n'est pasun problème. Le problème majeur est detrouver une structure qui convienne pourcommencer une carrière professionnelleau niveau que j'ai ici au Portugal.D'ailleurs le niveau de vie à ST est trèscher et je peux compter avec des fraismensuels autour de 150 mille escudos.Donc c'est sur cette base que je vais pen-ser pour ST. L'aspect fondamental estl'aspect financier.

Au-delà des problèmes explicites signalés,il se produit chez certains Santoméens unchangement de coutumes de consomma-tion et leur niveau d'exigences devient trèsélevé. Ils espèrent recevoir duGouvernement des conditions qu'on n'off-re même pas dans les pays où ils résidentactuellement. Certaines de ces exigencesmènent, par exemple, à réclamer un loge-

Eventuelles collaborations au Portugal

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ManifestationsculturellessantoméennesAssociationssantoméennes

Organisation de débatset rencntres

Aide juridique

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115Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

retourner.

Comment sont les relations desSantoméens au Portugal?

Il faut relever en premier lieu que le nom-bre de ceux qui entretiennent des contactsréguliers est très élevé, supérieur à 90%.Si on compare les hommes et les femmes,on note une petite différence, puisque lepourcentage des hommes est de 88,8% etcelui des femmes de 95,8%. Les deuxchiffres sont cohérents avec le haut degréd'endogamie observé dans le profil desSantoméens et avec les différences mini-mes entre les hommes et les femmes déjàsignalées (voir ci-dessus).

Les types de contact représentés reflètentclairement que:

L'amitié et la famille donnent le tongénéral de la relation .

Les contacts de voisinage sont très bas,ce qui permet d'affirmer que les regrou-pements physiques par quartiers ne seproduisent pas, contrairement à ce quise passe avec les Santoméens immi-grants moins qualifiés.

En désagrégeant l'information, on peutobserver quelques particularités:

Les étudiants présentent des indices unpeu plus élevés que les professionnelsqualifiés par rapport à l'amitié et au voi-sinage.

Les hommes se fréquentent plus au tra-vers des associations que les femmes

Les différences les plus notables dans lescontacts d'amitié se produisent entre lesEUF (100%) et les PF (moins de 60%) .

La différence de pourcentage de contactsvia la famille est notable entre les EUF

n'est-ce pas. Pour moi, entre guillemets,c'est un bien primaire.

Mais en désagrégeant, on peut noter cer-taines déviations qu'il convient de relever,surtout à cause de la distorsion que provo-que le problème économique chez les PH.

On ne discerne pas de différences nota-bles dans l'ensemble entre les hommeset les femmes. Les étudiants accordent moins deconfiance à l'avenir de STP que les pro-fessionnels qualifiés.Tous les PH considèrent le problèmeéconomique, alors qu'aucun des autressous-groupes n'arrive à 40%. Les EUF sont très distinctement cellesqui indiquent les motifs professionnelscomme le problème pour le retour et lesEUH le manque de confiance en l'avenirde STP

On a déjà soulevé la question de l'incerti-tude chez les étudiants et elle s'ajuste bienà ce manque de confiance plus prononcéen l'avenir de STP.

Il est très significatif et cohérent que lesEUF signalent les raisons professionnellescomme le problème qui rend difficile leretour au pays. En effet, si la réincorpora-tion et l'insertion professionnelle sont dif-ficiles pour le commun de Santoméens,elles le sont beaucoup plus pour les fem-mes qui arrivent avec une formation uni-versitaire.

Candelária peut expliquer les problèmesprévisibles, d'autant mieux qu'elle a euune récente expérience sans s'être installéeà STP:

Par exemple, j'ai parlé aujourd'hui avecune amie(...) qui me disait: "Dis donc, sais-tu ce qu'un homme m'a dit? Que la placede la femme est au lit. Ce n'est pas à elleà occuper un espace dans un bureau ", 'tute rends compte ? Et cette personne est auPortugal. Ca veut dire que ça n'a pas chan-gé. Parce que la mentalité du peuple san-toméen, de certaines personnes est unementalité très, très, très… ça laisse beau-coup à désirer. Il faut les connaître. C'estun peuple très hospitalier, très sympa-thique, mais il a quelques idées pré-conçues dans la tête qu'il faut arriver à

Eventuelles activités de collaboration à STP

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116 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

extrême en se déclarant à 100% prêts àcollaborer au Portugal et à moins de30% à STP.

Bien qu'éclipsée par les différences anté-rieures, la distance de près de 20% entreles PF et les PM sur l'option à STP estaussi notoire.

Les hypothèses de collaboration sontreprises à la suite, mais il est important declarifier que les Santoméens se sont incli-nés de façon générale pour les options pré-sentées explicitement (différentes pour lePortugal et pour STP) et qu'ils n'ont accor-dé que peu d'attention aux autres possibi-lités pourtant laissées ouvertes par la for-mulation, mais qui ne peuvent pas êtreexclues.

Les activités auxquelles collaborer tour-nent presque exclusivement autour de cequi se fait actuellement par l'intermédiairedes associations. Ce sont elles en effet quihabituellement appuient les manifesta-tions culturelles santoméennes et elles quiorganisent les débats et rencontres.

On ne peut être que surpris par le peu d'in-térêt suscité par l'appui juridique, sachantque c'est un service de base et nécessairepour les émigrants africains dans l'UnionEuropéenne et, non moins surprenant, laquasi absence de mention à une quel-conque activité économique ou politique.

Voyons les nuances auxquelles conduit ladésagrégation:

Les femmes sont plus disposées que leshommes à collaborer dans l'appui juri-dique aux Santoméens (25 et 6,8 %respectivement).

Les professionnels qualifiés se montrentbeaucoup plus disposés à l'organisationde débats et rencontres que les étudiants. Seules les EUF identifient le domaineéconomique comme de possible colla-boration, bien qu'à 10% seulement.

A propos des domaines de collaboration àSTP, voici les résultats obtenus: L'enseignement et l'organisation de débatset rencontres se trouvent situés en tête desactivités, ce qui semble confirmer les pos-sibilités dans les domaines socioculturelsdéjà mentionnés pour la collaboration auPortugal .

(supérieur à 90%) et les autres, surtoutles EUH (deux tiers).

Mais indépendamment de ces nuances, cequi ressort est le degré d'endogamie déjàmentionné et la très forte interaction entreSantoméens. Les raisons de fond ont uneétroite relation avec la culture santoméen-ne. Voici comment Celia commence àexprimer ce problème central : (...) la majorité des Santoméens, je pensequ'elle fraye, qu'elle a affaire à desSantoméens... Parce que le Santoméen abeaucoup de difficulté à frayer avec d'au-tres cultures... certaine, pas beaucoup,quelque difficulté.

Je pense que même si elle ne le paraît pas,la culture santoméenne est très forte. Elleoccupe une grande partie de la façon d'ê-tre des Santoméens. L'être santoméen estune chose très forte. Et les Santoméens nelâchent pas leur façon d'être, leur façonde vivre et la façon de ne pas lâcher toutcela c'est de se marier aussi entreSantoméens. (...)

Si l'existence de contact est une conditionde base pour les projets collectifs avec lesSantoméens, il est aussi nécessaire decommencer à placer les possibilités decollaboration spécifiques, d'abord à partirde la prédisposition générale et ensuite àpartir de la préférence de lieu et d'activité.

Plus de 90 % de ces Santoméens préten-dent envisager l'hypothèse de collaborer àdes activités qui concernent leurs conci-toyens, sans variation appréciable par sexeou par âge.

Là où apparaissent les différences est aumoment de fixer le lieu de l'interaction, cequi peut se voir dans les graphiques sui-vants:

Si la concordance est générale pour envi-sager de collaborer au Portugal, seulementla moitié est prête à le faire à STP. Dansce cas, la désagrégation est importante:

La rupture claire est représentée par lesEUF qui sont, à 100%, disposées à col-laborer à des initiatives qui se déroulentà STP, position qui les distingue de tousles autres, et en particulier des EUH. Les EUH représentent une position

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117Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

A STP, cependant, des options beaucoupplus liées à l'économie, à l'exercice pro-fessionnel et à l'assistance sociale que cel-les choisies au Portugal ont été ouvertes.Les trois activités marquent une différen-ce substantielle avec celles choisies auPortugal.

Peut-être le Santoméen ne prend-il pas encompte les avantages comparatifs de col-laborer entre eux au Portugal, mais oui àSTP, où les relations peuvent être fonda-mentales pour atteindre la réussite profes-sionnelle ou de son entreprise.

A propos de l'assistance sociale, il sembleque se reproduise la situation habituelle detendance à venir en aide aux populations"sous-développées" plutôt qu'aux rési-dants dans les pays "développés". Il sepeut que cela soit le résultat de la réper-cussion négative, en termes d'intégration,que les immigrants mieux placés perçoi-vent au cas où ils entretiendraient des rela-tions très étroites avec les secteurs d'im-migrants moins bien situés socialement etsymboliquement. En revanche, à STP, ilspeuvent être perçus de façon différenciéeet positive, puisque le fait de prêter assis-tance reproduit une image de sensibilité etbonne volonté pour son pays d'origine, quine remet pas en question, en outre, le sta-tut atteint au Portugal.

La désagrégation fait ressortir des diffé-rences très prononcées entre les groupeschoisis dans cette étude et elle ne contri-bue pas, en principe, à éclairer les diversesinconnues, comme nous verrons plus loin.Observons tout d'abord le graphique:

Les hommes et les femmes présentent lesdifférences suivantes:

Le commerce et les activités libéralessont beaucoup plus choisis par les hom-mes que par les femmes. Uniquement les femmes optent pourd'autres choix que ceux présentés expli-citement et elles montrent un intérêtpour des activités d'assistance socialeou ludiques ignorées des hommes.

Les professionnels qualifiés et les étu-diants se distinguent surtout par:

Les valorisations portées au domainetouristique -beaucoup plus indiqué par

les étudiants que par les professionnels(85 versus 14,2%) - et le commerce(42,8% des étudiants et 14,2% des pro-fessionnels qualifiés).

La plus grande disposition des étudiantspour les activités libérales et l'organisa-tion des débats et rencontres, bien qu'a-vec des distorsions par sous-groupe quenous verrons ci-dessous.

Les résultats par sous-groupes donnent àvoir:

Les très forts pourcentages des EUHprêts à collaborer à STP, arrivant aux100% en tourisme, activités libérales etenseignement et avec des valeurs trèssupérieures aux autres en commerce etorganisation de débats et rencontres.Cela signifie qu'ils sont beaucoup moinsnombreux à être disposés à collaborer àSTP (moins de 30% comme déjà indi-qué), mais beaucoup plus ouverts queceux des autres sous-groupes.

Seulement une toute petite fraction desprofessionnels qualifiés hommes estdisposée à collaborer à des activités tou-ristiques, malgré le fort pourcentage(supérieur à 63%) s'accordant à donnerau développement touristique la notemaximum. .

Les EUF, en revanche, donnaient beau-coup moins d'importance à ce facteur,mais elles sont beaucoup plus disposéesà collaborer (voir facteurs économiquespour l'avenir de STP).

100 % des PF disposées à appuyer desinitiatives se déroulant à STP voient lapossibilité de collaborer dans l'ensei-gnement. Les EUF sont les seules qui déclarentfranchement des options d'assistance

Domaines de collaboration possible à STP

0

10

20

30

40

50

60

70

80

90

100

Tourisme Commerce Activités Libérales Enseignement Débats etrencontres

Autres

%

Professionnels (PH)Professionnelles (PF)Etudiants (EH)Etudiantes (EF)

c

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118 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

sociale, concrètement dans le domainede la santé et de l'enfance.Les PF envisagent des alternativesludiques: promenades et excursions.

La logique culturelle et lechangement de cap vers ledeveloppement humainDévoiler quels agents et facteurs lesSantoméens considèrent comme appelés àavoir un rôle central dans l'avenir de STPet connaître les relations existantes et pro-bables entre eux permet d'identifier lesscénarios où sont en train de se jouer lesprocessus générateurs des changementspossibles.

Chacun de ces processus, qu'ils soientpolitique, économiques ou sociaux, peutêtre analysé comme un discours en soi etpar rapport à chacun des sous-groupessélectionnés, mais pour comprendre sasignification profonde il faut arriver àconnaître la culture dont ils font tous par-tie. Nous partons de l'hypothèse selonlaquelle les Santoméens, résidants dansleur pays ou au Portugal, hommes ou fem-mes, professionnels ou étudiants, parta-gent cette culture et que c'est à partir, et autravers d'elle, que se produit l'échange demots et de faits qui les définit. Cet échan-ge inclut les divergences et conflits qui, enplus de manifester la diversité interneexistant dans toute population, peuventproduire en soi ou avec d'autres facteursexogènes les changements dans la cultureelle-même.

Dans la perspective de la diaspora auPortugal, STP semble être soumis à uneculture remise en question, pour le moins,dans les logiques suivantes:

Une logique des relations de solidaritéqui, au travers de l'échange inégal defaveurs, reproduit les relations socialesde pouvoir. Une logique d'accumulation et redistri-bution qui, au travers de l'appropriationde ce qui est public, de l'Etat, reproduitles relations politiques de pouvoir.

Une logique de relations avec l'investis-seur étranger qui, basé sur la négationd'un secteur d'entreprises privées prop-re, reproduit les relations économiquesde pouvoir.

Une logique d'affirmation de la singula-

rité "forro" qui, partant de la négationdu travail agricole et par extension desAfricains d'origine mozambicaine,angolaise ou capverdienne, reproduit lesrelations inter-ethniques de pouvoir.

Une logique de l'affirmation de la mascu-linité qui, s'appuyant sur la polygynie etle rôle reproducteur de la femme, repro-duit les relations sexuelles de pouvoir.

Toutes ces logiques peuvent aussi êtreinterprétées comme des représentationssymboliques des relations identitaires queles Santoméens du Portugal entretiennentavec ceux de STP, à travers la culture.

Autrement dit, le Santoméen solidaires'interroge non seulement sur la reproduc-tion de relations sociales inégales, maissurtout sur la représentation symboliqued'un Santoméen collectif soumis -celui deSTP- par un modèle de relation obligéequi nie la possibilité d'un Santoméen indi-viduel -celui du Portugal-- soustrait à cettedynamique.

Enrique explique comme suit la tentativede se différencier et l'opposition qu'ellesuscite, en s'appuyant sur le cas des émi-grants:Mais ici, les cadres qui sont ici, peuventdonner une grande contribution, mais ilfaut qu'à São Tomé soit créé un espace àcet effet. Ils... disons, nous voulons, maiscomment? Le grand problème est celui là.Et c'est à dire, et c'est pour cela avec lacréation de... avec une société civile orga-nisée, qui est une des choses dont nous pen-sons qu'elle est possible, soit des associa-tions ou groupes de personnes organiséesqui est pour faire valoir aussi leur voix,parce que nous aussi faisons partie de cepays. Parce que lorsqu'une personne s'enva de São Tomé e Principe pour lePortugal, que ce soit un cadre ou non, ceque voit beaucoup de gens c'est que cettepersonne est un déserteur, qu'elle est par-tie, qu'elle ne veut rien savoir de nous.Quand un étudiant vient aussi et qu'il ter-mine sa formation et qu'il ne retourne pasau pays, il est aussi vu comme un déserteur,vous comprenez? Et cette mentalité prévautdans la tête de beaucoup de dirigeants, dedirigeants avec de la responsabilité à SãoTomé. Et nous devons les toucher, parceque je n'ai encore jamais vu aucun signal

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Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

du gouvernement santoméen disant: " "Ouimonsieur, vous êtes ici, vous êtes des cad-res, nous voulons dialoguer ouvertementavec vous et dans un encadrement institu-tionnel et qu'est ce que vous pouvez réelle-ment donner de votre contribution dans cepays là ". Au contraire, si vous allez à SãoTomé passer des vacances, beaucoup degens sont inquiets "Quand est-ce que vousrepartez? Quand est-ce que vous retour-nez?". Moi, très souvent, je m'interroge "jesuis chez moi, à São Tomé e Príncipe,pourquoi est-ce que vous êtes si pressés deme demander quand je m'en vais? Vous nevoulez pas de moi ici?". Parce qu'il y a tou-jours une espèce d'envie, vous comprenez?Et très souvent quand les gens viennentd'arriver, les autres disent "Un tel est arri-vé et tout ça, mais ils se demandent si ce neserait pas pour?". C'est à dire, moi jeconsidère une question de ce genre commepresque hypocrite, parce que si c'est pourrester, rester, rester vraiment, eux ça ne leurplait pas, parce qu'on dirait- que la per-sonne viendrait là faire de l'ombre, n'est-cepas? Et c'est pour cela, je pense que lasociété civile organisée, par l'intermédiaired'associations ou groupes ou n'importequoi que ferait le Gouvernement de SãoTomé, surtout à la demande que nous, nousne sommes contre rien. Au contraire, nousnous voulons un espace, évidemment, quidit: "Votre participation peut être ici, peutêtre ici, peut être ici, n'est-ce pas?", cer-tains encouragements et quelques manifes-tations d'hostilité, c'est à dire, presque que"Dîtes donc, vous êtes là, vous êtes là".

Le Santoméen patriarche re-distributeurest mis en question, non seulement pour lanégation de l'Etat de Droit et du sens desinstitutions y rattachées, mais aussi parcequ'il représente symboliquement la repro-duction d'un Santoméen soumis aux rela-tions clientélistes, et niant l'option d'unedifférenciation basée sur d'autres critèresétrangers à la logique patron-client,comme ceux d'égalité.

Plusieurs Santoméens saisissent cesaspects liés à des facteurs associés,comme la mentalité.

Rui:Maintenant, après ces quinze années oùnous avons été sous un pouvoir unique,

qui est le MLSTP, tout le changement pourqu'il y ait plus de partis et qu'est ce quiarrive? Ce qu'on voit les personnes quisont (...) de São Tomé e Principe, sont lesmêmes personnes qui ont été quinze ansau pouvoir. Et, pour moi, je pense qu'il estun peu difficile de changer de mentalité dujour au lendemain. Et ceci réellement, enenvisageant la possibilité pour les gensd'améliorer vraiment São Tomé ePrincipe, la première chose est le change-ment de mentalité des hommes santo-méens. Ah, pourquoi a-t-on créé danscette société des groupes qui ont accès àtout et ces groupes ordonnent et désordon-nent !. Et (...) à São Tomé e Principe, quiva au pouvoir. Parce qu'à São tomé ePrincipe, c'est comme ça: pour vivre làplus ou moins mieux, il faut être dans lapolitique. Et pour ce même groupe, quandun sort, un autre rentre, c'est un cycle.Tant qu'on ne rompt pas ce cycle, la possi-bilité pour São Tomé e Principe de chan-ger est assez difficile. Mais, comme jecontinue à dire, la possibilité queSãoTomé e Principe a de changer, maistout dépend des hommes, ces hommes qui,moi je dis ressources humaines, et que ceshommes de formation... Parce que, bon,la plus grande richesse qu'un pays peutavoir sont les hommes formés, qu'il réus-sit à transformer. Mais, et en faisant réel-lement abstraction de ces groupes, parceque ce sont des groupes qui sont installésdans la société et qui ont la possibilitépour tout: c'est le pouvoir économique,c'est le pouvoir politique, avec cette libé-ralisation qu'il y eut.

João:Non, ce sont toujours les mêmes person-nes. Bon, qu'est-ce qu'il se passe? A ST, ily a des familles, non? Comme il y en apartout. Ceux qui ont occupé les chargesde dirigeants en 75 ont ensuite tourné.Mais comment ont-ils tourné? Entrefamilles et amis. Si vous prêtez attention,vous voyez le (...) et ceux qui ont (...)comme nom de famille et aujourd'hui il ya le (...) qui est aussi (...); donc ce sont ouc'est le même ghetto qui s'auto protège.Le (...) est aussi du même groupe. Et ils seprotègent entre eux, encore et toujours. Etils n'ouvrent pas non, pour qu'il puisse yavoir d'autres alternatives dans le pays,ils bouclent. Je pense que ceci est grave.

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Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

On doit... la politique doit être ouverte.

Manuel:Non, quand je dis cadres, ce sont ceuxavec lesquels nous parlons. Ce ne sontpas tous les cadres. Parce que, comme jedisais au début, les cadres, par exemplenos collègues qui sont à SãoTomé, quipour une raison ou une autre occupent descharges politiques, à ST la vision est tou-jours celle de 75, cette vision fermée.C'est séparer pour régner le plus long-temps possible... C'est cette vision là quiest mauvaise. Ce que nous devons faire, etmoi... là, là, là de suite, c'est de tenter aumaximum que les cadres avec de bonsprincipes ne se perdent pas, n'entrent pas,ne fassent pas partie de ce même groupe.Parce que c'est comme ça, mais ils entrentdans ce groupe et puis ils ne veulent plusen sortir. Alors la solution est de les reti-rer le plus possible de cette vision ferméede la politique à ST, les enlever de cegroupe et les laisser avec une visionouverte. Donc, ces personnes comme jedisais existent à ST. Ce sont des cadresqui sont à ST. Elles existent aussi à l'é-tranger et il faut nous donner des condi-tions minima, n'est-ce pas? Et les orienterpour que les choses puissent être faites.Parce qu'autrement non. Autrement c'estla vision totale, total comme en 75 (rires).C'est très compliqué

Le Santoméen dépendant du capitalisteétranger est discuté, non seulement parcequ'il rend l'initiative privée impossible,mais encore parce qu'il représente au plansymbolique la reproduction de l'associa-tion du pouvoir local avec l'étranger, niantla possibilité d'une tension endogène parle modèle économique.

João dit à ce propos:Si quelqu'un essaie de faire quelquechose, travailler, travailler sérieusement,il aura de grandes difficultés à le faire,parce qu'eux... Tout passe par le PremierMinistre, par la Présidence, et cela crééede grandes difficultés. La personne a l'i-nitiative de vouloir, par exemple, dévelop-per le domaine où... Si moi je suisMinistre de la Santé, j'ai un projet que jeveux mener à terme. J'ai de grandes diffi-cultés à le faire, parce que quand les pro-jets atteignent une phase donnée, moi

j'aurais des difficultés à les continuer.Parce que ces gens là ne permettent pasque les choses continuent. C'est à dire, cesont des choses comme celles là, c'estque... Et moi je pense que les NationsUnies ou les institutions internationalesqui veulent aider ST, à mon avis, ellesdevraient parier sur les personnes. Parexemple, imaginons qu'il y ait un individuen France ou en Angleterre, unSantoméen qui ait un projet viable, quiserait, qui lui présenterait le projet et queeux verraient que le projet serait un projetqui tient debout et peut marcher et qu'ilsparieraient sur cette personne. Et pour-quoi? Parce que si tu arrives à ST avec unprojet, si tu n'as pas d'argent, même si leprojet est bien beau et le meilleur dumonde, qu'il peut même apporter au paysdes grands bénéfices en termes de déve-loppement du pays, eux ils ne... Tout d'a-bord, ils pensent à eux, ils disent: "Ceprojet est bon... mais moi aussi je dois enfaire partie, mon nom doit figurer dans ceprojet". Les dirigeants disent "Dis donc, leprojet est optimum et tout ça, mais si ceprojet, si vous voulez que ce projet mar-che, moi je dois... moi je dois faire partiedu projet. Obligatoirement, sinon le pro-jet ne tiendra pas debout pour marcher.".Ceci est une des choses qui limite le déve-loppement de la situation de STP. Ah! Ceque moi je pense c'est que quelqu'un, s'ilavait un bon projet, le présente ici à laCommunauté Européenne ou là où ilveut... Les gens font une évaluation duprojet et voient que le projet est viable, àtravers la Communauté Européennemême, avec quelqu'un de la CE, ou desNations Unies ou d'où vous voulez quiaccompagne directement cela, mais per-sonnellement ou un groupe de personnesqui voudrait faire des choses comme cela.Ce serait un mécanisme pour le dévelop-pement. Parce que moi j'ai l'exemple d'uncollègue. Il a voulu mettre une entrepriseau pays, là-bas, dans mon pays. Mais iln'a trouvé que des difficultés, de grandesdifficultés pour placer ces entreprisesdans ce projet dans le truc. Et il n'a pasréussi encore à ce jour à placer quelquechose et ça fait plus de cinq, six ou septans qu'il est en train d'essayer, de voir s'ilréussit à porter le projet à truc. Mais il neréussit pas parce que les dirigeants nesont pas disposés, ils ne sont pas prêts à

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Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

ce que quelqu'un apparaisse.

Observez l'association de l'investisseuravec la coopération dans cette déclarationd'Ismael:Et puis il y a un point crucial, c'est d'es-sayer de porter le message aux investis-seurs à ST, investisseurs, aux bailleurs defonds, aux coopérants à ST: que coopéreravec S. Tomé, ce n'est pas coopérer aveca, b, ou c, ce n'est pas coopérer avec leMinistre. Parce que ce qui arrive aujour-d'hui est que la coopération est plutôt de...pour résoudre les problèmes de personnesqui sont à ST, d'une personne ou d'uneautre. Non. Nous devons porter le mes-sage, nous devons établir tous les contactspossibles, depuis l'extérieur. Tout appuiou un quelconque appui qui ne soit pas aubénéfice concret du peuple de STP. Parceque c'est comme ça que reste la dette,non? La dette reste pour STP et le bénéfi-ce reste pour une ou deux personnes etc'est cela qui est arrivé. Et nous-mêmes àST avons rendu cela possible. Et ça nepeut pas marcher comme ça. Alors il fautvoir aussi ceci: nous devons savoir négo-cier pour le bien de STP. Et nous ici nouspouvons contribuer, ici au Portugal,Europe, aux EU, en France et tout ça,n'est-ce pas? Nous devons nous mettre àexercer une influence suffisante auprèsdes institutions pour que la coopérationsoit faite sur la base du développement deSTP et non pas du développement de unepersonne ou autre. Un projet doit êtreaccompli et non pas altéré en fonction dea, b, c qui éventuellement se trouve à ST.

Le Santoméen forro, citadin et bureaucra-te, est mis en question, non seulementparce qu'il reproduit les vieilles relationsinterethniques qui empêchent le dévelop-pement, mais parce qu'il représente sym-boliquement la négation d'une identitécollective basée sur le "melting pot" , quidépasse le conflit esclavagiste.

Voici deux déclarations qui exprimentbien ce point, la première est d'Antonia etla seconde de Rosa:Moi, quand j'avais mes 7, 10 ans, je par-lais avec beaucoup de monde et ils me dis-aient toujours que les Santoméens ne sontpas des esclaves. Et si vous faites gaffe,vous verrez qu'aujourd'hui à ST le Forro,

l'homme santoméen, forro, est toujours enguerre... en guerre entre guillemets, avec letravail agricole. Eux, ils ne veulent pasfaire de travail agricole. Parce qu'ils pen-sent que le travail agricole est fait par lesCapverdiens, les Angolais, là-bas à l'exté-rieur. Ce sont les gens qui sont venus et qui(...) pour ST, pour faire ce genre de travail,comme esclaves. Tandis que lesSantoméens, vivaient dans les villes, lesrues et lorsque arrivaient les fins de semai-ne, ils se mettaient leur costume et allaientà des fêtes, dansaient et par là à l'extérieur,n'est-ce pas? Et, réellement, comment ren-tabiliser cet homme, tu te rends compte?Donc, où est-ce que réellement ils peuventvaloir plus? Donc ou même comment lesamener à faire du travail agricole sous uneautre forme? Quel type de travail, com-ment organiser? Il faut bien connaîtrel'homme santoméen pour réussir à faire...Le grand problème de l'indépendance aété, par exemple, qu'en 75 nous, on estpresque tous partis de là, Capverdiens,Angolais et de par là. Et qu'est-ce qui sepasse alors? L'agriculture a automatique-ment baissé. Parce que les hommes santo-méens ne sont pas allés travailler. Ils ontcontinué dans les bureaux, l'administra-tion, n'est-ce pas? Qui ne génère presqueaucune richesse.

Rosa:C'est très général en Afrique et à S. Tométrès caractéristique, parce que nous...Mais ceci s'explique par l'Histoire, parceque c'est ainsi: nous autrefois, à l'époquecoloniale, nous étions des esclaves, disonsdes esclaves privilégiés. Pourquoi?Parce que sur nos terres c'était unique-ment les Mozambicains, Angolais etCapverdiens qui travaillaient. Nous, nousne travaillions pas. Nous étions pour cestravaux légers, s'occuper des colons et jene sais pas quoi et "être là assis et c'esttout "t, et nous commandions des esclavesd'autres terres. Et alors cela a perdurédes années et des années, des décades etdes décades et des milliers et milliers,non, ce sont cinq cents ans. Et alors ça adébouché sur ceci. Aujourd'hui plus per-sonne ne veut travailler. Nous avons uneterre extrêmement fertile et en agriculturec'est très mauvais. La production decacao qui est la matière première quenous avons, mais en quantité, disons. Et

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Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

notre cacao est très bon. Personne neveut produire, personne ne veut travaillerdans les roças, personne ne veut travaillerl'agriculture. Le café qui est exceptionnel,notre café, personne ne veut le travaillernon plus. Tout le monde veut travaillerdans les bureaux ou alors, être dans lafonction publique, être dans les charges,disons, qu'on puisse en faire le moins pos-sible.

Le Santoméen de sexe masculin, polygé-nique et procréateur, est évalué non seule-ment par la revendication d'une sexualitéégalitaire mais par la représentation sym-bolique de la négation de l'indépendanceet la participation des femmes dans tous lemilieux.

Voyons deux références, la première est deCandelaria, simple et directe et la seconded'Ana qui expose la façon dont l'hommesantoméen exprime, à travers les parolesde la musique, comment il désire que soitla femme et comment la femme santomé-enne voit l'homme: Une fois j'ai participé en 98, il y a eu unforum de reconstruction nationale, j'ai étéinvitée... comme diaspora à aller à ST. Legouvernement m'a tout payé pour y aller,il m'a payé les billets, m'a donné de l'ar-gent pour vivre et m'a payé l'hôtel unique-ment pour être avec ma famille. Et alors,quand on m'a laissé la parole pour que jeparle, il y a un collègue qui m'a dit: "Ah,mais toi ici, tu n'as rien à faire, parce queta place c'est à la maison, avoir desenfants et prendre soin du mari et je nesais plus quoi". Et il est licencié.

Ana expliqueLes musiques disent qu'ils ont eu confian-ce en elle et qu'elle, elle n'a pas su, pas suprofiter de cette confiance, qu'ils l'ontabandonnée, après ils l'ont abandonnée,n'est-ce pas? Les musiques disent plus.Les musiques disent qu'ils n'ont pas eu dechance parce qu'ils se sont mariés, inno-cemment, ils se marièrent avec une femmequi ne savait pas faire la cuisine, ne savaitpas laver, ne savait rien faire, ne savaitrien et lui aussi il a dû l'abandonner. Lesmusiques parlent de beaucoup de choses.Je ne sais plus maintenant. Elles parlentde la femme, de ce que la femme pense del'autre femme. Elles parlent beaucoup de

ça, de l'autre femme. Que la femme est entrain de se lamenter parce que l'autrefemme gagne de l'espace, qu'elle gagne duterrain par rapport à elle. Maintenant lesmusiques parlent beaucoup que les fem-mes, que ce n'est pas la peine que les fem-mes aient de la haine pour les maris, eux,ils doivent seulement bien traiter l'u-nique. Les musiques disent que la seulefaçon pour une femme de garder le marine consiste pas à se fâcher, c'est de bien letraiter. S'il arrive tard, elle met la crava-te, va mettre la nourriture sur la table, s'ilamène des amis, lève-toi, va faire la cuisi-ne, s'il arrive fatigué, fais-lui une fête. Cen'est pas en faisant la guerre que tu vasréussir quoi que ce soit. Dans le fond leshommes veulent que les femmes aient cetteposition, c'est la meilleure façon qu'ilaient pour être mieux. Mais même commecela, ça ne signifie pas qu'ils vont resteravec une seule femme. L'homme santo-méen aime avoir plus d'une femme. Et ilsessaient de rappeler que la femme moder-ne n'a pas... la femme moderne ne réussitpas à faire un foyer avec des enfants, ilvaut mieux être une femme traditionnelle.C'est ça.

Et ils ne parlent pas non plus de la nou-velle génération de femmes qu'il commen-ce à y avoir à ST. Ils ne font jamais réfé-rence à cela, jamais... Ils se mettent à par-ler des femmes qui viennent de l'extérieur,ils commencent à peine. Il y a unemusique ou autre: qu'elles arrivent avecles cheveux raides, les ongles peints, quela femme qu'ils ont connue avant de partirà l'extérieur n'est plus celle qu'il retrouveau retour. Oui, ça commence à avoir cegenre de...

Les femmes critiquent... les femmes criti-quent mais les hommes de ST leur plai-sent. Les femmes critiquent... les femmesne sont plus tellement disposées à avoirdes hommes passifs. Les femmes ont aussil'ambition d'un certain statut dans lasociété. Les femmes veulent un hommequi soit actif, qui soit présent dans lasociété, un homme qui ne soit pas accro-ché à la boisson. Ce genre d'hommes, lesfemmes ne les veulent plus. Les femmesn'aiment plus ce genre d'hommes. Lesfemmes veulent des hommes fins, fins(rires). Les femmes critiquent, elles com-

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Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

mencent un peu à critiquer mais dans lefond elles n'arrivent pas à combattre.Même les femmes les plus en vue dans lasociété santoméenne ne réussissent pasencore à faire ce qu'elles veulent des hom-mes. Jusqu'à présent, je n'en connais pasune seule qui arrive à ce que l'homme soitassez présent à la maison, qu'il n'ait pasune maîtresse, qu'il la traite bien. Bien aucontraire, parfois je pense que ce sont lesfemmes, parfois, au statut le meilleur quisont un peu mal traitées par les hommes.Les hommes sentent une certaine rivalitéavec la femme qui a fini ses études univer-sitaires, ils ont une certaine rivalité. Etc'est cela que les femmes critiquent.Parce que maintenant ceux qui plaisentaux femmes ce sont ceux qui ressemblentun peu plus aux hommes européens, unpeu plus. Elles ne veulent plus de cethomme que leurs mères ont eu. Elles neveulent plus ça. Elles veulent des hommesqui se responsabilisent pour la maison.

Toutes les tensions symboliques antérieu-res représentent le conflit existant desSantoméens qui sentent qu'ils font tou-jours partie de STP, mais qui perçoiventqu'on leur permet de participer seulements'ils acceptent toutes les relations inégalesde pouvoir et le modèle culturel associé.

Le changement en direction du développe-ment humain de STP semble exiger unexercice de modification, au moins partiel,vers une logique culturelle plus ouverte àla diversité interne et orientée vers l'inté-gration.

L'émigration de Santoméens n'est pas àproprement parler une nouveauté. Dansde nombreuses familles de cette société,on trouve des parents qui se déplacent àl'extérieur pour faire leurs études ou pourchercher à améliorer leurs conditions devie. Finalement, une partie significativedes enfants de STP se trouvent à l'exté-rieur, sans que cette réalité soit cependantclairement perçue. Tous ceux qui, pourdiverses raisons, se sont vus forcés à émi-grer sont complètement abandonnés à leursort. Il n'y a jamais eu, jusqu'à l'heureactuelle, un recensement quelque peudétaillé qui permette de savoir dans quelspays sont concentrées les plus grandescommunautés santoméennes de l'exté-

rieur, ni de caractériser qui émigre et pour-quoi.

Constatations:L'étude ci-dessus repose sur un échanti-llon représentatif de la communauté santo-méenne au Portugal composé par deuxgroupes : celui des professionnels quali-fiés et celui des étudiants, qui serontensuite désagrégés par sexe. La définitionde l'échantillon obéit au soucis d'identifierles agents et les facteurs qui pourraientcontribuer à permettre la réalisation deschangements sociaux préconisés dans lecadre du développement humain du pays.En l'absence d'études ou de données sta-tistiques qui auraient indiqué précisémentcombien et quels émigrants existent , lenécessaire a été fait pour définir le profildes personnes consultées et on a pu cons-tater que :

Les professionnels qualifiés hommessont plus âgés que leurs collègues fem-mes et que 60% d'entre eux ont plus de40 ans alors qu'aucune des femmes nedépasse cet âge ;

Dans le cas des étudiants, il se confirmeque l'âge des femmes est moins élevéque celui des hommes. Elles ont toutesmoins de 30 ans, alors que les EUH dela même tranche d'âge représentent64,7% de leur ensemble.

Cela a certainement à voir avec le fait qu'ilest beaucoup plus aisé pour une femmed'émigrer tant qu'elle n'a pas constitué sapropre famille. En l'absence d'études plusexhaustives, ces résultats doivent êtrecompris comme rEUFlétant une tendanceparfaitement cadrée dans les habitudesculturelles santoméennes qui accordentbeaucoup moins de liberté et d'initiativeaux femmes après qu'elles aient assumédes engagements familiaux. On voitencore dans cette enquête que plus de 80%des EUF sont célibataires, quoique 9%d'entre elles signalent qu'elles ont uneunion de fait. Il faut enfin signaler que lesEUF constituent le seul sous-groupedisponible à 100% pour collaborer à laréalisation d'activités à STP et à 90% auPortugal.

D'autres résultats permettent de caractéri-ser encore mieux ce sous-groupe :

72,7% des EUF considèrent les entrepre-

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124 Rapport National de Développement Humain - STP

Migrantes são-tomenses em Portugal: uma contribuição ao desenvolvimento humano

neurs du pays comme les agents les plusinfluents pour l'avenir de STP et pourelles, d'autre part, la réduction de ladette se détache en tête des facteurs éco-nomiques d'importance majeure pourl'avenir, estimation où elles ne sontaccompagnées par aucun autre sous-groupe.Par rapport aux facteurs sociaux d'im-portance majeure pour changer la quali-té de vie des Santoméens, ce sous-grou-pe désigne, comme les autres d'ailleurs,les infrastructures publiques, le contrôledu paludisme et un système d'éducationefficace. Dans la logique des réponsesantérieures, les EUF ont répondu positi-vement au retour définitif et elles cons-tituent le sous-groupe qui présente lesplus courts délais pour concrétiser leurretour, démontrant ainsi que la raison deleur séjour au Portugal est la poursuitede leurs études. Toutefois, elles émet-tent beaucoup de doutes sur l'avenir deSTP et déclarent que le problème prin-cipal pour leur retour est d'ordre profes-sionnel. On constate en outre que lesEUF viennent en visite à STP plus fré-quemment que leurs collègues mascu-lins et que leurs contacts au Portugalsont basés surtout sur l'amitié et les rela-tions familiales tandis que leur partici-pation dans des associations est faible ;

En continuant l'analyse des réponses desétudiants, nous constatons que 100% desEUH sont prêts à participer à des activitésavec les Santoméens du Portugal. Mais sil'activité se déroule à STP, cette disponibi-lité tombe au-dessous de 30%. 80% desmembres de ce groupe sont aussi céliba-taires et seuls 5,8% sont mariés. Leursconjointes éventuelles sont dans 100%des cas d'origine santoméenne.

Lorsqu'ils sont appelés à analyser lesagents les plus marquants pour l'avenirde STP, les EUH donnent plus de poidsaux citoyens et au Gouvernement. Surles facteurs politiques auxquels ils don-nent une valeur majeure, le sous-groupeplace en premier lieu l'honnêteté dansl'exercice des charges publiques et ensecond lieu la réorganisation de l'appa-reil d'Etat. Pour ce qui est des facteurséconomiques de majeure importance, lesous-groupe désigne en premier lieu ledéveloppement du tourisme et aussitôt

après la diversification des exportationset l'attrait de l'investissement étranger.

A la question posée pour déterminer lesfacteurs d'importance majeure pour l'a-mélioration des conditions de vie desSantoméens, les EUH, de même queleurs collègues femmes, détachent l'a-mélioration des infrastructurespubliques, le contrôle du paludisme etun système éducatif efficace.

A propos des contacts avec le pays, onnote que les EUH se rendent rarement àSTP. Ils ont répondu positivement à unpossible retour définitif, mais ils ontbeaucoup de doutes sur l'avenir du payset ils envisagent le retour à plus oumoins long terme. Le problème fonda-mental qu'ils évoquent pour leur retourest le manque de confiance en l'avenirdu pays, suivi du manque de moyenséconomiques. Quant à leurs contactsavec les Santoméens, ils se basent sur-tout sur l'amitié et les relations familia-les et leur participation aux relations devoisinage ainsi qu'aux associations esttrès faible.

Il faudra, avant d'analyser les réponses desprofessionnels qualifiés, affiner un peu lescaractéristiques du groupe, en rappelantque 68,7% de ces personnes ont une licen-ce alors que seuls 6,2% ont une maîtrise.Dans l'ensemble, les PH sont plus quali-fiés que les PF. Et sur ceux qui ont termi-né leurs études universitaires, plus de fem-mes que d'hommes ont des diplômescorrespondant à un cursus de 3 ans (38,4%et 15,7% respectivement); aucune d'entreelles n'a de maîtrise. En outre, dans cegroupe de professionnels qualifiés, leshommes se marient beaucoup plus. Maisles conjoints sont de nationalité santomé-enne à 100% pour les femmes et à 86%pour les hommes.

Interrogés sur les agents les plus mar-quants pour l'avenir de STP, les PHidentifient, en premier lieu, les citoyensen général, et aussitôt après leGouvernement et les investisseursétrangers. La vision qu'ils ont, tant les¨PH que les PF, de l'avenir est peuempreinte d'espoir sur les possibilitésd'améliorer la situation économique etsociale qu'ils qualifient de difficile outrès difficile. Quant aux facteurs poli-tiques considérés comme de première

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125Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

importance pour l'avenir de STP, les PHautant que les PF placent en premierlieu l'honnêteté dans l'exercice des char-ges publiques, puis ensuite la stabilitépolitique et la confiance dans les institu-tions publiques. La réorganisation del'appareil d'Etat vient aussitôt après.

En passant aux facteurs économiquesd'importance majeure pour l'avenir, les PHont identifié deux facteurs à égalité, ledéveloppement du tourisme et l'attrait del'investissement étranger, suivis de deuxautres facteurs, à peu près identiques parleur poids relatif, la diversification desexportations et l'augmentation de lacoopération internationale. C'est seule-ment après tout cela qu'arrive la captationde l'épargne des émigrants. La positiondes PF est différente. Ils est vrai qu'ellesmettent à la première place, avec un poidssemblable, le développement du tourismeet l'attrait de l'investissement étranger,mais les facteurs suivants sont l'exploita-tion du pétrole et la diversification desexportations. Suit, avec un poids relatiféquivalent, la création d'un secteur privéfort et la réduction de la dette externe.

A propos des facteurs sociaux qui déter-mineraient une meilleure qualité de viedes Santoméens, nous constatons que:

Les positions des professionnels hom-mes et femmes concordent sur l'identifi-cation du contrôle du paludisme, desinfrastructures publiques et du systèmed'éducation efficace, mais il faut noterque le poids de l'expression des femmesest inférieur dans chacun de ces résul-tats.Les deux facteurs suivants sont diffé-rents en fonction du sexe. Alors que lesfemmes donnent le même poids auxconditions de logement et au comporte-ment "leve-leve ", les hommes ont choi-si les offres culturelles en plus du com-portement " leve-leve ".

Quand le sujet est le retour définitif, il y aencore quelque différence de positionne-ment selon les sexes:

Les PH désignent avec un poids relatiféquivalent l'option de retour à moyenterme et celui à long terme et vient ensui-te, avec moins de poids donc, la possibi-lité de retour après la retraite. Les PF

optent clairement pour le retour à longterme et laissent au second plan la possi-bilité de retour à moyen terme, avec lemême poids relatif que les immensesincertitudes associées au retour. Dans lesproblèmes liés au retour, tous les PHnomment l'absence de moyens écono-miques suivie du manque de confianceen l'avenir de STP. Les PF indiquentdeux autres causes au poids comparableau manque de confiance en l'avenir deSTP, l'absence de moyens économiqueset les raisons familiales.

En analysant le genre de contacts entreSantoméens, on note aussi des différen-ces. Les PH optent pour plus de 80%pour les contacts amicaux, reléguant audeuxième et troisième plan respective-ment les relations familiales et la parti-cipation à des associations. Quant auxfemmes, elles mettent, à plus de 70%,les relations familiales au premier rangpuis les relations d'amitié et enfin entroisième place, et, avec un poids relatifnégligeable, la participation à des asso-ciations.

L'analyse de la possibilité de collaborationau Portugal et à STP fait surgir quelquespetites différences, quoique la tendancesoit la même, c'est à dire plus de 90% sontpour les activités au Portugal, mais parrapport aux activités à STP, ce sont 50%de femmes qui sont pour et 30% d'hom-mes. Enfin, trois thèmes retiennent l'atten-tion des professionnels qualifiés, quoiqueavec des poids relatifs différents : l'ensei-gnement, les débats et les rencontres etactivités libérales.

Conclusions:Notre appréciation des agents et facteursque les Santoméens de la diaspora consi-dèrent importants pour les changementssociaux orientés sur le DH, nous mène àfaire une analyse comparative au sein dumême groupe et entre les groupes(Etudiants et Professionnels) en fonctiondu sexe.

En commençant par les étudiants, noussommes amenés à dire:

Il y a plus d'acharnement et de sens pro-fessionnel et une fin des études plusrapide pour les EUF que pour leurs col-lègues masculins ;

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126 Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

Les EUF ont des contacts plus réguliersavec le pays et elles sont plus sensiblesà la réalité qu'on y vit, elles sont aussiplus prédisposées à contribuer au pro-cessus de changements;

Les EUH ont une vision politique plusprofonde de la réalité que leurs collè-gues femmes et ils ont identifié lescitoyens en général et le Gouvernementcomme agents dont la contributionpourra déterminer les changementssociaux dont le pays a besoin; Leur plus grande lucidité politique lesamène à établir, de façon largementmajoritaire (plus de 70%), comme fac-teur politique prioritaire pour les chan-gements sociaux l'honnêteté dans l'exer-cice des charges publiques, suivie de lanécessité de mettre en marche la réorga-nisation de l'appareil d'Etat et la restau-ration de la confiance des citoyens dansles institutions publiques. Les EUFdonnent moins de poids à l'honnêtetédans l'exercice des charges publiques,bien qu'elle soit toujours la premièreoption et elles désignent la stabilitépolitique, suivie de la réorganisation del'appareil d'Etat.

On peut dire que les hommes sont plusenclins à la réalisation de réformes struc-turelles que leurs collègues femmes;

Quand on passe aux questions écono-miques, on note que les choix indiquésauparavant sont cohérents avec lesoptions dans ce domaine. En effet, lesEUH donnent comme facteurs écono-miques d'importance majeure pour l'ave-nir le développement du tourisme, ladiversification des exportations et l'at-traction de l'investissement étranger, cequi implique des réformes structurellesde façon à créer un environnement propi-ce à de telles initiatives. Les femmesoptent pour la réduction de la dette exter-ne, la création d'un secteur privé nationalfort et la diversification des exportations,ce qui s'articule avec l'effort tendant àl'assainissement de l'économie, la créa-tion de stabilité interne, et le renforce-ment de l'initiative et de l'interventiondes nationaux ; Dans le chapitre de la discussion desconditions de retour définitif, chacun desgroupes s'exprime de façon positive,mais les EUH expriment un grand

manque de confiance en l'avenir de STP.Les EUF indiquent, elles, les raisons pro-fessionnelles comme obstacles majeurs àce retour, alors que leurs collègues hom-mes désignent comme seconde raison lemanque de moyens économiques pourassurer le retour ;

Il n'est donc pas surprenant que les EUFsoient à 90% disponibles pour participerà des activités qui se dérouleraient auPortugal, mais que 100% le soient pourdes activités à réaliser à STP, alors quepour les EUH, c'est l'inverse, disponiblesà 100% pour les activités au Portugal et àpeine à 30% pour celles à STP. Cesoptions tracent la différence de fond dansles options de chacun des sous-groupes,dans un des cas (EUF), il y a un pari decontribuer au processus de changementet tout ce que cela implique, et dans l'au-tre (EUH) il y a une attitude plus timoréed'attendre pour voir.

Il est à noter que seuls les étudiants se pro-posent de revenir à court terme et lesdélais qu'ils entrevoient sous cet aspectsont plus courts que ceux de leurs collè-gues.

Sachant que les contacts entre Santoméens,pour n'importe quel sous groupe, se tissentsur la base d'amitié et de relations familia-les, la possibilité de profiter de cette dispo-nibilité des étudiants reste ouverte pourparticiper, autant au Portugal qu'à STP, àdes domaines spécifiés comme : les mani-festations culturelles et les associationssantoméennes, ou à STP, dans des activitésde tourisme ou d'enseignement, les débatset les rencontres étant des options autantpour STP que pour le Portugal.

Si nous prétendons maintenant faire uneanalyse semblable par rapport aux profes-sionnels qualifiés, nous devons avant toutmieux caractériser le groupe, en se réfé-rant au fait que 68,7% sont licenciés et6,2% ont une maîtrise ; plus concrètementet par sexe, les traits sont les suivants :

Les PH sont dans l'ensemble plus quali-fiés que les PF et ils se marient aussiplus que leurs collègues femmes (52,7%et 30,7% respectivement). Dans n'impor-te lequel des cas, les conjoints sont plutôtde nationalité santoméenne (100% pourles PF et 86% pour les PH) . La vision

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127Rapport National de Développement Humain - STP

Emigrants santoméens au portugal: Une contribution au Développement humain

que les uns et les autres ont du pays estde peu d'espoir quant à la possibilité d'a-méliorer la situation économique etsociale qu'ils classent en difficile ou trèsdifficile. Interrogés sur les agents lesplus marquants pour l'avenir de STP, lesPH pensent qu'il revient en premier lieuaux citoyens en général, ensuite auGouvernement et aux investisseursétrangers de contribuer aux changementssociaux dont le pays a besoin.

Cela montre jusqu'à quel point ces person-nes ont intériorisé le fait que les change-ments sociaux doivent se faire en enrichis-sant toujours plus le processus démocrati-que, d'une part, et d'autre part, en préser-vant la libre initiative.

Quant aux facteurs politiques considérésd'importance majeure pour l'avenir deSTP, les PH autant que les PF placent entête l'honnêteté dans l'exercice des char-ges publiques, désignant aussitôt aprèsla stabilité politique et la confiance dansles institutions publiques. La réorgani-sation de l'appareil d'Etat vient ensuiteavec plus de poids attribué par les PH.

Encore une fois, les possibilités de chan-gement qui assurent le DH peuvent sur-venir seulement dans des conditionspolitiques très clairement définies par lespersonnes consultées, comme l'honnêtetédans l'exercice des charges publiques, lastabilité politique, la confiance dans lesinstitutions publiques et le couragenécessaire pour mener à bout la réorgani-sation de l'appareil d'Etat.Les PH voient les questions écono-miques différemment de leurs collèguesfemmes. Ils identifient le développe-ment du tourisme et l'attraction de l'in-vestissement étranger comme des fac-teurs d'importance majeure pour l'avenirde STP, suivis par la diversification desexportations et l'augmentation de lacoopération internationale.

Ils démontrent ainsi que la récupérationéconomique doit compter essentiellementavec un appui et des activités tournées

vers l'extérieur. Les PF ont une vision unpeu différente, même si elles identifientces mêmes actions comme prioritaires,elles finissent par mettre en exergue lacréation d'un secteur privé national fort etla réduction de la dette externe, ce quidévoile un grand soucis d'assainir l'écono-mie et un pari sur les forces internescomme façon de vaincre les difficultés.

Dans le domaine social, les deux sous-groupes donnent l'importance maxi-mum au contrôle du paludisme, auxinfrastructures publiques et à un systè-me d'éducation efficace, comme façond'assurer des améliorations dans lesconditions de vie des Santoméens. Encontinuant dans l'identification d'autresfacteurs sociaux qui puissent contribuerau bien-être des Santoméens, autant lesPH que les PF renvoient à la nécessitéde changement du comportement "leve-leve ". Les PF donnent plus d'im-portance aux conditions de logement,tandis que les PH attribuent plus depoids à l'offre culturelle.

S'il s'agit du retour définitif, les PF autantque les PH parient sur le retour dans uneperspective de moyen et long terme,aggravée, dans le cas des PF, par lesénormes incertitudes associées au retour;

Quant aux problèmes associés au retour,les PH désignent l'absence de moyenséconomiques, suivie du manque deconfiance en l'avenir de STP, concor-dant, sous cet aspect, avec le principalproblème identifié par les femmes, suivichez elles, des motifs familiaux. ;

Si on analyse la possibilité de participa-tion au Portugal ou à STP, on note unetendance à la diminution de la disponi-bilité dans le cas où l'activité se dérou-le à STP. D'une disponibilité supérieureà 90% pour collaborer au Portugal, onpasse à un peu plus de 50% (PF) et 30%(PH) pour STP. Enfin, trois sujets, aupoids relatif différent, retiennent l'atten-tion des professionnels qualifiés, en tantqu'activités possibles à STP : l'enseigne-ment, les débats et rencontres et les acti-vités libérales.

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Rapport National de Développement Humain - STP 129

S.Tomé e Príncipe (STP) est un paysjeune, émergent, devenu indépendantdepuis seulement un quart de siècle dansdes conditions de précarité politique etéconomique. La relative accalmie qui aduré des centaines d'années est maintenantirrémédiablement altérée par des facteursessentiellement exogènes. Ce n'est plusseulement le passé portugais qui affecteson évolution, mais aussi le processus deglobalisation en cours qui s'insère dansson histoire indépendamment de sa volon-té. S'il s'avère difficile pour n'importequel pays de s'abstraire de ce processus,combien ce ne l'est-il pas pour un pays sifragile et dépendant de l'extérieur, surtoutsous l'angle de son économie.

Il est bien évident que STP devra s'affron-ter aux enjeux issus des incessantes succes-sions de changements qui mettent en jeu saparticipation dans la sphère internationaleet la dynamique de sa propre société. Ledéfi central est d'assumer que le destind'une grande partie des évènements est dela responsabilité des acteurs impliqués. Endéfinitive, il revient aux Santoméens dedécider vers où faire tendre leurs efforts.La communauté internationale en généralet le PNUD en particulier pourront propo-ser des choix, appuyer des initiatives, sug-gérer les meilleures voies, mitiger la fragi-lité d'un petit Etat débutant, offrir la visibi-lité des avantages comparatifs. Mais laparole doit toujours être donnée aux béné-ficiaires potentiels et personne ne peutsubstituer leur volonté ni leurs aspirations.C'est de cette conviction que surgit le déve-loppement humain et ces principesdevraient donc présider à toutes les inter-ventions relatives aux changements.

Le succès de la réalisation des aspirationsest en rapport étroit avec les conditions dedépart et les moyens mis à dispositionpour les atteindre.

En ce qui concerne les conditions, il fautsouligner que STP est un pays qui jouitd'un degré élevé de sécurité, de paix et,par conséquent, un endroit où il est possi-ble de réfléchir à voix haute sur les pro-blèmes et les possibilités de choix.

Ses niveaux de DH, comparés avec lesautres pays du monde, le situent à un nive-au moyen, avec des indices d'éducation etd'espérance de vie considérablement éle-vés, surtout si on les rapproche de ceuxd'autres pays subsahariens. Toutefois, saposition économique, à commencer par lePIB, est bien plus mauvaise et sa vulnéra-bilité est très marquée, ce qui le rend pres-que totalement dépendant de la coopéra-tion internationale. Il serait plus mal situépour ce qui est des principaux indicateurssi la comparaison se faisait avec les paysinsulaires de population similaire.

Ces déficiences proviennent d'une fragili-té institutionnelle flagrante et des iniquitésconsidérables par genre et par régions quifont flancher les niveaux globaux de DH.En outre, tandis que l'extrême pauvreté estatténuée avec l'aide de la coopérationinternationale, la pauvreté dans sonensemble augmente et elle est aggravéepar la crise économique.

Tout ce qui est signalé ici semble être con-sidérablement affecté par une culturereposant sur un modèle historique au longcours lié au système des roças, qui ne faci-

En guise de réflexion:propositions pour lechangement vers ledéveloppement humain.

CHAPITRE VII

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En guise de réflexion: propositions pour le changement vers le développement humain.

130 Rapport National de Développement Humain - STP

lite absolument pas les changements favo-rables pour le commun des Santoméens, eten particulier pour les secteurs les plusdéfavorisés. Mais ce modèle est de plusen plus remis en question par les désirsd'une partie, au moins, des Santoméens etpar les tendances internationales qui tou-chent le pays, de sorte que s'ouvrent desérieuses options pour une révision defond suivie d'une reconfiguration.

Partant de la considération de la situationactuelle ainsi que des aspirations et chan-gements en cours, mais avec la perspecti-ve d'un développement humain équilibréet durable, voici, en gros, nos référencesinitiales sur lesquelles ont été construitesles propositions présentées ci-dessous:

1. Les écarts de développement humainliés à la femme et à la région peuventêtre réduits si on agit prioritairement surles capacités des femmes et les créa-tions d'opportunités pour elles. Pourcela, il est essentiel d'activer des rése-aux et associations de femmes (ou des-tinées à les appuyer), faciliter l'accèsdes femmes aux services financiers et àla création d'entreprises et élever leurinstruction jusqu'aux niveaux atteintspar les hommes.

2. Les ressources humaines sont essentie-lles pour le développement de n'importequel pays. STP n'est pas une exceptionet le pays a besoin de réaliser un inves-tissement considérable pour améliorersa qualification et l'adapter aux nécessi-tés du pays. Générer un fonds de com-pétitivité pour développer les ressourceshumaines et créer un programme d'édu-cation technologique et humaniste sontdes objectifs minimums pour démarrerdans cette voie et offrir des alternativesséduisantes pour les jeunes, les femmeset les entrepreneurs.

3. L'avenir de STP ne devrait pas se limi-ter à ce que réalisent ses résidentsactuels. Beaucoup de Santoméens setrouvent loin de leur pays mais ils sou-haiteraient -et ils pourraient- contribuerà son développement si étaient mises enplace des conditions minimums de con-fiance. Pour que cela soit possible, ilfaut créer des espaces de dialogue, parla voie de la politique officielle aussibien que par celle de la société civile.

Une bonne stratégie de participation àdes projets de développement humainconjoints, indépendamment de la rési-dence, serait aussi bénéfique pour lesobjectifs ad hoc que pour renforcer lesens collectif et reconstruire ainsi uneidentité intégrative en même temps querespectueuse de la diversité interne.

4. La coopération internationale joue unrôle clef dans le présent et l'avenir deSTP. Il se peut qu'elle n'ait pas prêtéune attention suffisante à l'approfondis-sement de la culture santoméenne pourlui permettre de s'imprégner de la philo-sophie du développement humain.Certains comportements culturels s'a-justent mieux au DH et, bien que ce soitles Santoméens qui doivent en décideren dernière instance, on peut générer lesconditions de réflexion qui facilitent ledéveloppement de sensibilités détermi-nées. Il faut ouvrir des espaces de com-munication physique et symbolique, desenvironnements de discussion, de pen-sée, de critique.

5. L'aspect institutionnel est nécessaire etson renforcement est urgent si on veut dis-poser des conditions minimums pouraffronter les changements en cours et ceuxqui pointent à l'horizon. Entrer en compé-tition internationalement, dans n'importequel domaine -soit économique, soit poli-tique, soit intellectuel- sans des institu-tions qui appuient les acteurs santoméensrevient à les mettre dans une position dedépart clairement désavantageuse.Développer le pays sur des critères d'équi-té mais sans un système ordonné et portépar les institutions n'est que chimère.S'ajuster sur ce à quoi rêvent les popula-tions est la meilleure façon d'orienter lechangement dans la direction correcte.Mais pour satisfaire les désirs, il fautcréer, donner du potentiel et développertoutes les capacités individuelles et collec-tives et cela requiert du développementhumain qui, à son tour, rétro alimentera lescapacités. Le sens de l'opportunité estégalement important. Une attente tropprolongée dans un monde de changementsaussi rapides et accélérés peut entraîner laperte de contrôle des ressources propres.Peut-être le moment est-il venu, pour évi-ter que cela n'arrive, d'agir avec détermi-nation et en réunissant tous les efforts pos-sibles.

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131Rapport National de Développement Humain - STP

S.Tomé e Príncipe (STP) est un pays jeune, émergent, devenu indépendant depuis àpeine un quart de siècle dans des conditions de précarité politique et économique. Larelative routine de centaines d'années est maintenant irrémédiablement perturbée et ildevient nécessaire d'affronter les défis provoqués par l'incessante succession de chan-gements entraînée par la participation du pays dans la sphère internationale et par ladynamique de sa propre société.

L'enjeu central consiste à assumer que le cours de la majeure partie des évènements estde la responsabilité des Santoméens et qu'il leur revient de décider vers où diriger leursefforts. Mais les autres acteurs impliqués sont aussi concernés dans la mesure où ils peu-vent faciliter à STP la réalisation de ses aspirations.

Le présent Rapport de Développement Humain prétend couvrir la réflexion sur le pro-blème des changements dans un pays comme STP, en partant non seulement de sa con-joncture politique, économique et sociale, mais aussi de son identité culturelle et desoptions de reconfiguration ouvertes pour s'ajuster à la mondialisation. L'hypothèse dedépart considère que l'identité culturelle peut faire office de médiation pour le dévelop-pement humain et que cette entremise a une valeur fondamentale.

Partant de ces prémisses, le Rapport essaie de:

1. Fournir une vision de la situation de développement humain dans le pays, du point devue aussi bien synchronique que diachronique. Cela mène à une nécessité d'actuali-sation des données et à une analyse du processus aboutissant au profil ainsi représen-té.

2. Connaître et mieux comprendre la culture santoméenne et les identités possibles ajus-tées à la fois à cette société et au développement humain;

3. Contribuer à la réflexion sur Changement, Culture et Développement Humain, ensorte que son utilité théorique puisse s'appliquer à de postérieures recherches dansd'autres pays ;

4. Avancer des propositions susceptibles de rassembler les volontés, de l'intérieur autantque de l'extérieur du pays et surtout des émigrants santoméens.

Synopsis

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Rapport National de Développement Humain - STP 133

Pour réaliser l'étude sur les Santoméens auPortugal, il a été jugé préférable d'arriverà un accord de collaboration avec la prin-cipale association santoméenne dans cepays, Association de la Communauté de S.Tomé e Principe (ACOSP), et d'œuvreravec son appui. On a retenu cette optionpour trois raisons: faciliter le contact etgagner la confiance des Santoméens auPortugal, pouvoir réaliser le travail de ter-rain en un temps raisonnablement court -puisqu'on disposait de leurs ressourceshumaines- et entamer le plus brièvementpossible un dialogue sur de futures actionsconjointes avec des Santoméens de STP etdu Portugal.

La population cible de ce travail a été éta-blie à partir de STP; en fonction de sapotentialité à contribuer au changementvers le développement humain, ce quiétait le thème principal du Rapport duDéveloppement Humain 2001-2001. Cettepopulation a été définie en fonction de sesqualifications académiques -au minimumune carrière universitaire moyenne ou surla voie de son obtention- et sa résidenceau Portugal, pays qui abrite le gros de lamain d'œuvre qualifiée vivant à l'extérieuret qui alimente un système de bourses per-mettant à quelques Santoméens de pour-suivre leurs études universitaires.

On a appelé professionnels ceux qui ontterminé leurs études et étudiants universi-taires ou futurs professionnels ceux quisont en cours d'études en vue d'obtenir untitre universitaire.

Pour garder la perspective de genre, on aessayé de faire en sorte que toutes les

recherches et les données obtenues soientdésagrégées par sexe. Professionnels etétudiants, hommes et femmes formentainsi des sous-groupes dont la référenceest obligatoire tout au long de l'essai etqui sont l'objet de comparaisons entre euxpour apprécier les corrélations positivesou négatives par rapport aux thèmes deréflexion.

Il faut noter que, indépendamment dugroupe-cible ou de quelque autre sous-groupe, le titre de ce travail mentionne leconcept de "migrants", et non pas "émi-grants" ou immigrants".

Il importe en effet de souligner que,méthodologiquement, la vision d'unepopulation est singulièrement affectée parla perspective à partir de laquelle elle estobservée. Il est complètement différent dela considérer à partir du lieu d'où elle estpartie plutôt que de l'aborder depuis l'en-droit qui la reçoit, c'est à dire conceptuali-sée comme immigrante. Le migrant est lerésultat de ces deux perspectives et ilrevient aux acteurs sociaux de réfléchir etd'agir en fonction de l'un ou de l'autre deces regards.

La première étape du travail s'est centréesur la compilation de l'information dispo-nible sur les Santoméens en général rési-dants au Portugal, et, en supposant quecette information existe, sur leurs étu-diants universitaires et leurs profession-nels en particulier.

Face à la quasi inexistence de bibliogra-phie publiée, la base de cette premièreapproche au groupe cible était constituée

Methodologie

ANNEXES

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134 Rapport National de Développement Humain - STP

Metodologia

par les documents fournis par le Ministèredes Affaires Etrangères et Coopération etpar l'Ambassade de STP au Portugal,l'Organisation Internationale pour lesMigrations (OIM), le Haut Commissairepour l'Immigration et les MinoritésEthniques, le Ministère de l'AdministrationInterne -Service des Etrangers etFrontières- et l'ASCOP. Dès les premiersmoments, la faiblesse des rares statistiquesdisponibles sautait aux yeux: impossible des'assurer du nombre des étudiants actuels àl'université portugaise ou du nombre deprofessionnels santoméens vivant auPortugal.

Après avoir pris connaissance de l'infor-mation disponible, on passa à la phase deréalisation du travail de terrain, baséessentiellement sur trois techniques: l'en-quête, l'entretien en profondeur et l'obser-vation participante.

L'enquête fut préparée et soumise à l'é-preuve sur des Santoméens qui s'étaientrendus dans leur pays natal en Décembre2002. Par la suite, elle a été réalisée auPortugal, à Lisboa, Coimbra et Portoessentiellement, au cours des mois de jan-vier et février 2001. On pouvait comptersur l'appui de ASCOP bien implanté danschacune de ces villes, surtout dans l'uni-versité. 60 enquêtes furent réalisées, cequi représente 14,7% des 406 Santoméensdu groupe cible. Quant aux femmes quiconstituaient un objectif prioritaire, etparce qu'on tenait à connaître le mieuxpossible leur diversité interne, elles ont étéplus nombreuses (40%) que ce que lesrègles statistiques auraient fixé. Pour cequi est des pourcentages de professionnelset d'étudiants consultés, il est de 54 et 46,6respectivement, ce qui représente unelégère déviation statistique sans effet surles résultats

L'enquête, semi-ouverte, contient troissections:La première partie cherche à réunirquelques données de base sur le profil deces Santoméens, toujours en relation avecles hypothèses de l'étude générale. C'estainsi que les intervalles d'âge et la duréede la résidence au Portugal sont établis enpartant de la considération des périodesplus significatives de l'histoire récente

santoméenne, pour permettre la comparai-son des effets de chaque conjoncture his-torique sur les migrations avec lePortugal. La profession des personnesconsultées tient compte des oppositions,secteur public versus secteur privé etentrepreneur versus employé, parce qu'ilest intéressant de connaître leur potentiali-té par rapport au changement dans uneconjoncture santoméenne qui semblenécessiter d'un secteur privé fort. Lesliens de parenté induits de l'état civil et dela nationalité du conjoint peuvent permet-tre une première appréciation sur l'in-fluence de l'entourage, portugais comparéau santoméen, et ils orientent donc laréflexion sur les relations intra et inter-ethniques.

La seconde partie est conçue de telle sortequ'on puisse commencer à appréhenderleur vision sur l'avenir de STP. Sous letitre générique de " Aspirations pour STP", est incluse une première approche deleurs attentes sur divers agents, à partird'une sélection de trois d'entre eux sur septpré-déterminés et un ouvert. La sélectionde ces 7 agents fut effectuée pour permet-tre au moins deux lectures.

L'une relative au domaine des catégoriessélectionnées, sachant que deux catégoriessont économiques (entrepreneurs et inves-tisseurs), deux sont politico-institutionnel-les (Gouvernement et Président de laRépublique), et deux sociales (citoyens etSantoméens résidents à l'étranger) et unedernière dont la prétention est plus vastepuisqu'elle couvre des espaces des troisprécédentes, la coopération internationale.L' autre lecture est relative aux catégoriesassociées à ce qui se trouve à S. Tomé paropposition à ce qui vient de l'extérieur:entrepreneurs santoméens versus investis-seurs étrangers, citoyens en général versusSantoméens résidents à l'étranger etGouvernement-Président de la Républiqueversus coopération internationale. On peutainsi évaluer de suite, de façon simple etdirecte leur perception sur les possibilitésd'améliorer la situation socio-économique.

Les trois points suivants tentent de décou-vrir quels sont les facteurs identifiés parles Santoméens pour parvenir au STPdésiré et quelle importance relative ils leur

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Rapport National de Développement Humain - STP

Première partie: Méthodologie

135

accordent par rapport aux autres facteursévalués. En se basant sur le travail de ter-rain préalable effectué à STP et sur ledocument NLTPS, qui recueillait les aspi-rations de l'ensemble des Santoméens, ona sélectionné vingt quatre facteurs qui ontété répartis en trois tableaux. Chacun deces tableaux essaie de couvrir les facteursles plus associés à un pont de vue et, bienque les limites entre l' un et l'autre puissentêtre diffuses, ils sont en étroite relation lesuns avec les autres et un même facteurpeut se retrouver dans l'un ou l'autre(comme la coopération internationale),cependant, l'ensemble de chaque tableaupermet d'apprécier clairement si on seréfère à un point de vue économique, poli-tique ou social, bien qu'il n'y ait pas dansl'enquête d'épigraphe qui l'indique. Onprétend ainsi visualiser l'emphase déposéeà partir de chacune de ces lectures et lacomparer avec les attentes sur les agents.

La troisième partie de l'enquête a étéconçue pour mieux connaître leurs rela-tions avec STP et les Santoméens et entre-voir les premières options de coopérationpossible.

On part d'une question objective -la fré-quence des voyages à STP- pour entrerensuite sur des questions subjectives -hypothèse d'un retour ou les raisons pourlesquelles il ne se fait pas et délai prévu-.Aussitôt après, on cherche à apprécier s'ilexiste des relations et de quelles caracté-ristiques avec les autres Santoméens duPortugal, en partant des divers types decontacts communs (familles, amitié, voisi-nage, etc.). On essaie enfin de connaître laprédisposition pour collaborer à des acti-vités avec des Santoméens au Portugal età STP et dans quels domaines. Le choixdes propositions tente de s'ajuster sur desintérêts déjà connus, en espérant que lespersonnes consultés en ajoutent d'autres,ce qui ne s'est produit que très ponctuelle-ment.

Les premières conclusions de l'enquête ontpermis de mieux orienter les 25 entrevuesen profondeur, semi-structurées et ouver-tes. On a décidé du nombre en cours derecherche et en fonction des nécessités d'in-formation pour appréhender le mieux pos-sible la diversité interne de ces Santoméenspar rapport aux thèmes envisagés et en gar-dant toujours la perspective de genre.L'anonymat a été promis aux Santoméensavec lesquels ce travail a été fait, raisonpour laquelle les noms ont été changés dansles citations extraites des entrevues.

Les interviews ont été transcrites littérale-ment et analysées comme des textes avecdes techniques sémiotiques, en particulierla sémiotique greimasienne et le dénommé"Groupe de Entrevernes". .

Dans les transcriptions pour cet essai, descorrections ont été introduites, mais ponc-tuellement seulement et de façon à en faci-liter la lecture, la priorité étant de garder lelangage ou le style du discours pour per-mettre au lecteur de faire sa propre analy-se des textes originaux et d'avoir une per-ception aussi directe que possible.

Tout en réalisant ces interviews formelles,on a vécu avec les Santoméens pour pou-voir observer et approfondir les principa-les questions en suspens de cette recher-che, surtout celles relatives aux relationsintra-ethniques et inter-ethniques, ainsique les changements précis dans les nor-mes de comportement, comparées aveccelles observées à STP.

Les analyses des enquêtes et des entrevuesfurent débattues, tout d'abord, avec desprofessionnels des sciences sociales et,ensuite, elles furent remises à une sélec-tion de Santoméens au Portugal pourrecueillir leurs commentaires, réfléchirdessus et introduire les modifications endécoulant, avant de débattre sur cet essaiavec l'équipe des Nations Unies à STP.

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Rapport National de Développement Humain - STP 136

Les enquêtes

Annexe 1: Enquête auprès de 60Santoméens

Annexe 2: Enquête auprès des femmesprofessionnelles

Annexe 3: Enquête auprès des hommesprofessionnels

Annexe 4: Enquête auprès des femmesétudiantes universitaires

Annexe 5: Enquête auprès des hommesétudiants universitaires

Annexe 6: Enquête auprès des hommessantoméens

Annexe 7: Enquête auprès des femmessantoméennes

Annexe 8: Enquête auprès des profession-nels santoméens

Annexe 9: Enquête auprès des étudiantssantoméens

Nous traduisons ici l'enquête à laquelle lespersonnes de l'échantillon sélectionnédevaient répondre.

Nous renvoyons le lecteur à l 'origi-nal en portugais pour trouver leschiffres correspondant à chacunedes annexes.

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Les enquêtes

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Annexe

Relatório do Desenvolvimento Humano STP 1

Enquête réalisée en janvier-février 2001 au Portugal. Résultats en pourcentage.

Developpement Humain De São Tomé E Príncipe:Participation Des Cadres Et Etudiants Residents Au Portugal

I – Donnees de l’entrevue

1. Sexe (Cocher La Bonne Réponse Avec Un X) A. MasculinB. Feminin

2. AgeA. Moins De 30 Ans B. Entre 31 Et 40 Ans C. Entre 41 Et 50 AnsD. Plus De 50 Ans

3. Titre Academique A Baccalaureat

B. Licence C Maitrise D. Doctorat E. Autre (Spécifier) …

4. Profession Principale A. Entrepreneur (Spécifier) B. Employe Dans Le Secteur Public (Spécifier) C. Employe Dans Le Secteur Prive (Spécifier)

5. Il Y A Combien De Temps Que Vous Residez Au Portugal?

A. Moins De 5 Ans B. Entre 5 Et 10 Ans C. Entre 11 Et 25 Ans D. Plus De 25 Ans

6. Etat Civil A. CelibataireB. MarieC. En Union De Fait D. Autre (Spécifier) E. Ne Répond Pas

7. Si Vous Repondez B, C Ou D A La Question Precedente, Veuillez Specifier La Nationnalite De Votre Conjoint(E) A. Portugaise B. Santomenne C. Autre

II. Aspirations Pour Stp

8. Lesquels De Ces Agents Auront , Selon Vous, Un Role Plus Important Dans L’avenir De Stp? (Signaler 3 Options) A. Entrepreneurs Santomeens B. Gouvernement C. Citoyens En General D. Investisseurs Etrangers E. President Dela Republique F. Cooperation Internationale G. Santomeens Residents A L’etranger H. Autres (Spécifier) ………………………………………………………………….

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Annexe

Relatório do Desenvolvimento Humano STP 2

9. Considerez-Vous Que Le Fait D’ameliorer L’actuelle Situation Economique Et Sociale De São Tomé E Príncipe Est Une Tache… (Ne Signaler Qu’une Réponse) A. Tres Difficile B. DifficileC. FacileD. Impossible

10. Sur Une Echelle De 1 A 5 (Ou 1 Correspond Au Minimum Et 5 Au Maximum), Classifiez Selon Leur Importance Pour L’avenir De Stp Les Facteurs Suivants:

1 2 3 4 5 Nrp A Reorganisation De L’appareil D’etat B Stabilite Politique C Honnetete Dans L’exercice Des Charges Publiques D Renforcement De L’autorite De L’etat E Confiance Dans Les Institutions Publiques F Renforcement Des Pouvoirs Du President G Promotion Du Dialogue Et Concertation Sociale H Revision De La Constitution

11. Sur Une Echelle De 1 A 5 (Ou 1 Correspond Au Minimum Et 5 Au Maximum), Classifiez Selon Leur Importance Pour L’avenir De Stp Les Facteurs Suivants :

1 2 3 4 5 Nrp A Developpement Du Tourisme B Reduction De La Dette Externe C Creation D’un Secteur Prive Fort D Augmentation De La Cooperation Internationale E Epargnes Des Emigrants F Exploitation Du Petrole G Diversification Des Exportations H Attraction De L’investissement Etranger

12. Sur Une Echelle De 1 A 5 (Ou 1 Correspond Au Minimum Et 5 Au Maximum), Classifiez Les Facteurs Suivants Selon Leur Importance Pour Un Changement De La Qualite De Vie De La Population Santomeenne:

1 2 3 4 5 Nrp A Infrastructures Publiques (Eau, Lumière, Hôpitaux, Etc.) B Systeme Educatif Efficace C Controle Du Paludisme D Salaires Plus Eleves E Environnement Naturel Equilibre F Conditions De Logement G Alteration Du Comportement « Leve-Leve » H Offre Culturelle (Bibliothèques, Cinémas, Salles D’exposition, Etc.)

III. Relations Avec Stp

13. Avec Quelle Regularite Alles-Vous A Stp? A. Plusieurs Fois Par An B. Annuellement C. Tous Les Deux Ans D. Rarement E. Jamais

Nrp

14. Envisagez-Vous L’hypothese De Revenir Un Jour Definitivement A Stp? A. OuiB. Non

Nrp

15. Si Vous Avez Repondu Par B A La Question Precedente, Indiquez Pour Quelle Raison (Signalez 1 Ou 2 Réponses): Raisons Professionnelles

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Annexe

Relatório do Desenvolvimento Humano STP 3

Raisons Familiales Absence De Qualite De Vie A Stp DeceptionPas D’interet Autre (Spécifiez)

16. Sivous Avez Repondu A A La Question 14, Indiquez Quand Vous Pensez Retourner : A. Sous Peu B. A Moyen Terme C. A Long Terme D. Apres La Retraite E. Ne Sait Pas

17. Au Cas Ou Vous Avez Repondu A, B, Ou C A La Question 16 , Indiquez Si Vous Affrontez Un De Ces Problemes Pour Concretiser Ce Retour : A. Raisons Familiales B. Raisons Professionnelles C. Manque De Confiance En L’avenir De Stp D. Absence De Moyens Economiques E. Autre (Spécifier)

18. Est-Ce Que Vous Avez L’habitude D’avoir Des Contacts Reguliers Avec Les Autres Santomeens Qui Resident Au Portugal A. Oui B. Non

Nrp

19. Si Vous Avez Repondu A, Specifiez Quels Types De Contact : A. Familiaux B. De Voisinage C. D’amitie D. Associations E. Autre (Spécifiez) …

20. Considerez-Vous L’hypothese De Collaborer A Des Activites Qui Impliquent Les Santomeens A. OuiB. Non C. Ne Sait Pas

Nrp (Si La Réponse Est A Passer A La Question 21; Si Elle Est B Passer A La Question 24)

21. Si Vous Avez Repondu A A La Question Anterieure, Specifiez (On Peut Signaler Une Ou Deux Hypothèses) A. Communaute Santomeenne Au Portugal B. Initiatives Qui Se Passent A Stp

22. Si Vous Avez Repondu A A La Question 21, Specifiez (On Peut Signaler Une Ou Plusieurs Hypothèses) A. Manifestations Culturelles Santomeennes B. Associations Santomeennes C. Organisations De Debats Et Rencontres D. Appui Juridique E. Autre (Spécifiez)

23. Si Vous Avez Repondu B A La Question 21, Indiquez Le Domaine: A. Tourisme B. Commerce C. Activites Liberales D. Enseignement E. Organisation De Debats Et Rencontres F. Autre (Spécifiez)

24. Si Vous Avez Repondu B A La Question 20, Expliquez Pourquoi: