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Emplacement de la première aérogare. T oulouse fait connaissance avec l’aviation dès 1913 et 1914, sur le terrain militaire du « Polygone » route de Bayonne, où sont présentés les ap- pareils du moment. Dès janvier 1920, un projet d’aérogare desservant Tou- louse est envisagé à Blagnac. Mais, au lendemain de la Grande Guerre, le village de paysans et de pêcheurs pro- teste et ne veut pas sacrifier les terres de bonne qualité à ce projet, qui est abandonné. C’est la proposition d’un Muretain influent, le Général Édouard Barès, admirateur de Clément Ader qui est retenue : l’aérodrome civil de Francazal est construit. Le trafic s’in- tensifie, la Compagnie Air France s’y installe. Mais en 1937, la situation de- vient préoccupante quand un groupe de bombardiers s’implante à son tour. L’aviation militaire se développe et veut être chez elle, à Francazal. Mais où loger l’aviation civile ? À Mon- taudran ? C’est trop petit. À Balma ? C’est le domaine des ballons. Retour à la case départ : Blagnac ! Dix-sept ans après la première tenta- tive avortée de 1920, notre commune va désormais occuper malgré elle une place dans l’aéronautique toulousaine. Le 30 décembre 1938, l’ordonnance d’expropriation des parcelles concer- nées par la construction de l’aérodrome est prononcée. Opérations à l’amiable ou plus conflictuelles, défense nationa- le oblige, les terrains sont réquisition- nés. Les travaux d’équipement de cet aérodrome civil et industriel démarrent très vite malgré les difficultés financiè- res. des conditions locales favorables Au mois d’août 1939, l’aérodrome réservé à l’aviation civile n’est pas encore prêt alors que les terrains, les infrastructures, les usines sont réqui- sitionnés par le Ministère de la guerre. En novembre 1942, l’armée allemande occupe la zone sud… Blagnac et son aérodrome, utilisant usines, pistes et terrains avoisinants pour la fabrica- tion et l’entrepôt des munitions et des avions de guerre. À partir d’avril 1944, malgré les énor- mes dégâts causés par les bombar- dements, les conditions favorables au développement d’une activité aéronau- tique existent toujours à Blagnac : un vaste terrain plat et bien orienté, des usines performantes avec une main- d’œuvre très qualifiée, des équipages de valeur pour les vols d’essais et d’entraînement au service d’appareils conçus et réalisés sur place. En 1945, les services de l’aérodrome civil : ra- dio, météo, contrôle aérien, douane, police et contrôle sanitaire occupent des baraquements. Enfin, le 1 er juin 1951, commencent les travaux de construction du bâtiment en dur des- tiné à accueillir neuf cents passagers par jour et cette aérogare (Blagnac 1) s’ouvre à la circulation publique le 30 mai 1953. Puis viendra, en avril 1978, l’actuel Blagnac 2. Le développement du trafic aérien (plus de 6 400 000 passagers en 2010) et de l’industrie aéronautique (programme d’Airbus) nécessitent très vite de nou- velles structures aéroportuaires, de nouvelles routes d’accès, de nouveaux plans d’urbanisme, de nouveaux ter- rains, de nouvelles expropriations… faisant de la petite bourgade rurale de 1920 le Blagnac à vocation aéronauti- que d’aujourd’hui. n Association «Blagnac, Histoire et Mémoire» De l’aérogare à l’aérodrome jusqu’à l’aéroport Comment Blagnac s’est découvert une vocation aéronautique dès les années 20. D’hier à aujourd’hui Le n°42 de la revue « Blagnac, Questions d’Histoire » est en vente dans les kiosques et librairies de Blagnac. blagnac questions d’histoire n°42 * Caouecs est le nom donné aux anciens Blagnacais et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac. 28 HIStOIRE dE CaOUECS *

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Emplacement de la première aérogare.

Cécile trocmé« Ce qui sauve dans la vie : le bénévolat ! »

Cécile Trocmé est une figure de la vie locale. A 92 ans, elle continue de cultiver son jardinet et les relations avec ses copines du centre ancien

Installée à Nohic, dans le Tarn-et-Ga-ronne, la famille de Cécile Trocmé tient

dans les années 30 une épicerie. Très tôt, la jeune fille et son frère doivent faire face à la disparition de leur père. Aux côtés de leur mère, ils passent alors l’essentiel de leur adolescence à sillonner les rou-tes du Tarn-et-Garonne pour faire vivre le commerce familial. Cécile se souvient avec émotion de chaque détail de la vie de l’épicerie : « Sur le long comptoir en buis de notre épicerie, on trouvait de tout : mercerie, bonneterie, du choco-lat Menier ou Révillon, une seule marque de lessive, des moulins à café, à poivre, des bougies… La vie était certes dure, mais nous étions solides ». Elle a 24 ans lorsqu’elle rencontre Paul Trocmé, son époux. Originaire de la ban-lieue lilloise, qu’il a quittée lors de l’exode de 1939, Paul « ne veut pas faire l’épi-cier » ; tous deux sont alors employés à l’usine de Villemur, la CGE (ex-Molex), qui fabrique des pièces pour l’aéronau-tique. Durant la guerre, Paul est interné

au camp de Noé, réquisitionné dans le cadre du STO (Service du Travail Obliga-toire), il parvient à s’évader et rejoint le maquis comme résistant. De cette pério-de de guerre, Cécile garde notamment le souvenir douloureux d’avoir vu l’épicerie familiale saccagée sous ses yeux. A la Libération, Paul Trocmé entre dans la gendarmerie. Une autre page s’ouvre.Petits gestes du quotidien « Nous sommes restés 14 ans à Castelnau Magnoac,dans les Hautes-Pyrénées, lieu de la première affectation de mon mari avant de rejoindre la Brigade de Recher-ches de Toulouse à Saint-Michel. Ainsi, j’ai connu pendant plus de 25 ans la vie en brigade de gendarmerie. Nous étions en famille ! », se souvient Cécile. C’est à la retraite que Cécile et Paul s’installent à Blagnac d’abord rue Pasteur puis rue de Bûches. A Blagnac, les membres de la famille Trocmé deviennent d’authenti-ques Caouecs. « Pendant 20 ans, j’ai fait le catéchisme aux petits Blagnacais », précise Cécile. Un bouquet de camélias

de son jardin, un petit bout de tarte, un paquet de bonbons devant la porte, Cé-cile est très attachée à ses relations de voisinage, « parce que ce sont tous ces petits gestes qui illuminent le quotidien », confie t-elle simplement. Des petits moments de bonheur et des rencontres qui construisent de belles amitiés. « J’ai rencontré à Blagnac une élue au grand cœur, Madame Barthès, c’était une ma-man pour nous tous ! ».Pendant 20 ans, Cécile donnera égale-ment de son temps aux malades des hôpi-taux toulousains. Car, « ce qui sauve dans la vie, c’est le bénévolat ! », martèle Cécile, forte de l’expérience d’une vie dense.A 90 ans, Cécile n’arrête toujours pas : « Tous les jours, je vais voir quatre ou cinq copines pour leur remonter le mo-ral », dit-elle. Dans le centre ancien, il n’est pas rare de croiser Cécile en par-tance pour ce qu’elle appelle son « 3 étoiles », le restaurant de la maison des aînés. L’occasion de lancer en occitan, un tonique : « adishatz ! ».n

T oulouse fait connaissance avec l’aviation dès 1913 et 1914, sur le

terrain militaire du « Polygone » route de Bayonne, où sont présentés les ap-pareils du moment. Dès janvier 1920, un projet d’aérogare desservant Tou-louse est envisagé à Blagnac. Mais, au lendemain de la Grande Guerre, le village de paysans et de pêcheurs pro-teste et ne veut pas sacrifier les terres de bonne qualité à ce projet, qui est abandonné. C’est la proposition d’un Muretain influent, le Général Édouard Barès, admirateur de Clément Ader qui est retenue : l’aérodrome civil de Francazal est construit. Le trafic s’in-tensifie, la Compagnie Air France s’y installe. Mais en 1937, la situation de-vient préoccupante quand un groupe de bombardiers s’implante à son tour. L’aviation militaire se développe et veut être chez elle, à Francazal. Mais où loger l’aviation civile ? À Mon-taudran ? C’est trop petit. À Balma ? C’est le domaine des ballons. Retour à la case départ : Blagnac !Dix-sept ans après la première tenta-tive avortée de 1920, notre commune va désormais occuper malgré elle une place dans l’aéronautique toulousaine. Le 30 décembre 1938, l’ordonnance d’expropriation des parcelles concer-nées par la construction de l’aérodrome est prononcée. Opérations à l’amiable ou plus conflictuelles, défense nationa-le oblige, les terrains sont réquisition-nés. Les travaux d’équipement de cet aérodrome civil et industriel démarrent très vite malgré les difficultés financiè-res. des conditions locales favorablesAu mois d’août 1939, l’aérodrome réservé à l’aviation civile n’est pas encore prêt alors que les terrains, les

infrastructures, les usines sont réqui-sitionnés par le Ministère de la guerre. En novembre 1942, l’armée allemande occupe la zone sud… Blagnac et son aérodrome, utilisant usines, pistes et terrains avoisinants pour la fabrica-tion et l’entrepôt des munitions et des avions de guerre.À partir d’avril 1944, malgré les énor-mes dégâts causés par les bombar-dements, les conditions favorables au développement d’une activité aéronau-tique existent toujours à Blagnac : un vaste terrain plat et bien orienté, des usines performantes avec une main-d’œuvre très qualifiée, des équipages de valeur pour les vols d’essais et d’entraînement au service d’appareils conçus et réalisés sur place. En 1945, les services de l’aérodrome civil : ra-dio, météo, contrôle aérien, douane, police et contrôle sanitaire occupent des baraquements. Enfin, le 1er juin 1951, commencent les travaux de construction du bâtiment en dur des-tiné à accueillir neuf cents passagers par jour et cette aérogare (Blagnac 1)

s’ouvre à la circulation publique le 30 mai 1953. Puis viendra, en avril 1978, l’actuel Blagnac 2.Le développement du trafic aérien (plus de 6 400 000 passagers en 2010) et de l’industrie aéronautique (programme d’Airbus) nécessitent très vite de nou-velles structures aéroportuaires, de nouvelles routes d’accès, de nouveaux plans d’urbanisme, de nouveaux ter-rains, de nouvelles expropriations… faisant de la petite bourgade rurale de 1920 le Blagnac à vocation aéronauti-que d’aujourd’hui. n

Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

De l’aérogare à l’aérodrome jusqu’à l’aéroportComment Blagnac s’est découvert une vocation aéronautique dès les années 20. D’hier à aujourd’hui

Le n°42 de la revue « Blagnac, Questions d’Histoire » est en vente dans les kiosques et

librairies de Blagnac.

blagnac questions d’histoire n°42

* Caouecs est le nom donné aux anciens Blagnacais et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.

29-28 HIStOIRE dE CaOUECS*

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Le « train noir » en gare de Blagnac.

extrait de plan de 1809 – Archives Municipales de Blagnac.

* Caouecs est le nom donné aux anciens Blagnacais et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.

J usqu’à la fin du XVIIIème siècle, seuls d’étroits chemins de terre relient les villages d’un même

diocèse. Un seul d’entre eux permet aux voyageurs de quitter Blagnac par le Nord. Le Grand chemin de Toulouse à Grenade, au parcours sinueux, part du pont du Touch, suit les rues de Malard, des Mines, le vieux chemin de Grena-de, puis traverse Beauzelle et Seilh. Arrivé à Toulouse en 1763, l’archevêque Loménie de Brienne fait construire de vraies routes entre la grande ville et les localités environnantes. Celle vers Grenade, alors port important sur la Ga-ronne, concerne Blagnac.

Cette voie rectiligne, tracée au milieu des terres, évite les villages et remplace l’ancien chemin de Toulouse à Grenade. Elle enjambe le Riou grâce à un pont appelé par nos aînés le pont d’Astre du nom du propriétaire des terrains et d’une vigne longeant le ruisseau. Phi-lippe Astre et son fils Amans habitent Toulouse où ils occupent la fonction de procureur au Parlement avant la Révolu-tion de 1789. Cette dénomination a sur-vécu jusque dans les années 1950.Financée par les communautés riverai-nes et surtout par le diocèse, la réalisa-tion de la route, commencée en 1776, s’achève en 1784. Les frais s’élèvent à près de 130 000 livres. Ce chantier em-ploie et sauve de la misère de nombreux ouvriers sans travail grâce aux « ateliers de charité ». Blagnac profite de ces tra-vaux en raccordant le Plan du Port et la rue Coucourou à cette nouvelle voie.Sur la ligne du train toulouse-CadoursSous Napoléon 1er, une borne indica-trice est implantée à l’ancien carrefour du pont du Touch (Jean-Maga). Elle voit passer les troupes du général anglais Wellington s’apprêtant à livrer, le 10 avril 1814, la bataille de Toulouse contre l’ar-mée du maréchal Soult. Au sud, cette route s’anime à la fin du XIXème siècle avec l’arrivée du train Tou-

louse-Cadours et la construction de la gare, le va-et-vient des briquetiers face à la rue Pasteur actuelle et celui des charrettes transportant les briques. Par contre, vers le nord, en particulier de la ferme de Bosc (boulangerie Au feu de bois) jusqu’au rond-point de Buxtehude et même au-delà, c’est le grand « dé-sert » : pas une seule construction, pas d’éclairage sur cette route étroite et peu fréquentée. Le fouillis végétal, les ronciers près du pont sur le Riou encadré d’énormes platanes, servent de dépotoir d’où se dégage une odeur pestilentielle. Pourtant, sur ce long ru-ban rectiligne, le pont est un point de repère pour les jeunes gens. Longtemps limite entre les espaces bâtis et les exploitations agricoles, la route de Grenade s’intègre totalement aujourd’hui dans le tissu urbain de Bla-gnac. n

Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

Pour en savoir plus, lire nos revues n° 13, 18, 32, 33 et 41.

Route de Grenade, le pont d’Astre, vous souvenez-vous ?

Le n°41 de la revue « Blagnac, Questions d’Histoire » est en vente dans les kiosques et

librairies de Blagnac.

blagnac questions d’histoire n°41

D’une époque à l’autre, la route de Grenade a toujours été un axe entre toulouse et les communes qui l’entourent. Même un train y circulait

30 HIStOIRE dE CAOUECS*

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blagnac questions d’histoire n°38d histoire n 388d

Le n°38 de la revue « Blagnac, Questions d’Histoire » est en vente dans les kiosques et

librairies de Blagnac.

L es réfugiés espagnols arrivent à la fi n des années 30 à Blagnac avec un

contrat de travail en poche et y réunissent enfi n leur famille. Les femmes sont de bon-nes couturières, les hommes font des tra-vaux d’appoint dans le village et dans les fermes environnantes, certains s’installent parfois comme travailleurs indépendants et d’autres sont embauchés par les entre-prises locales ou dans l’aéronautique.Au début, les premières familles habitent rue Saint-Exupère et rue des Nobles (ac-tuelle rue Bacquié-Fonade) mais le déve-loppement d’une entreprise de travaux pu-

blics et la construction du nouveau cinéma vont les faire se regrouper dans des loge-ments plus modestes autour de l’église (rue du Vieux-Blagnac, rue des Remparts, rue de l’Eglise…).Retrouvailles aux Ramiers Une grande solidarité s’instaure entre eux et ils organisent des fêtes aux Ramiers de Bla-gnac ou à la Bourse du Travail à Toulouse, le dimanche matin : on y parle politique, on dé-guste la paëlla et on chante des chansons es-pagnoles pour oublier les mauvais moments et chasser la nostalgie car on espère encore « faire la valise et rentrer chez soi ! ». C’est compter sans le maintien de la dictature de Franco alors que beaucoup de réfugiés en attendent la chute après celle de Mussolini et de Hitler !Alors, astreints à rester, leur intégration doit se faire le plus rapidement possible. Même si, chez eux, ils s’expriment en es-pagnol, conservent un fort accent quand ils parlent français ou gardent le contact avec l’Espagne, les parents mettent un point d’honneur à faire instruire leurs enfants à l’école communale. Les adultes font partie des équipes sportives blagnacaises, les pe-tits se baignent dans la Garonne et, au bal du dimanche, les jeunes gens pleins de vie se mêlent aux autres. A la fi n de la guerre, ils se présentent sur le marché du travail et, mal-gré leurs diplômes, certains vont se heurter à des discriminations : des quotas d’étran-gers sont établis dans les usines d’aviation,

par exemple. A la recherche d’emplois in-téressants, quelques-uns se lancent alors dans les grandes migrations internationales comme en Amérique du Sud…Ces familles réfugiées à Blagnac ont réussi peu à peu leur assimilation mais n’oublient pas l’épisode douloureux de la Retirada. Ces événements sont relatés en détail dans le numéro 38 de la revue « Blagnac, Questions d’Histoire ». ■

Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

Témoignage d’un réfugié, un garçon de 8 ans à l’époque, raconte : « Après deux mois passés au camp de Cognac, j’arrive à Blagnac avec ma mère et ma sœur fi n 1939 et je retrouve mon père qui travaille déjà aux Ateliers Industriels de l’Aéronautique. Nous logeons d’abord dans un petit appartement rue Bacquié-Fo-nade puis derrière l’église. Je me fais très vite des copains espagnols et blagnacais. Je suis enfant de chœur et je vais à l’école avec eux. J’ai connu tous les instituteurs, mais c’est M. Weidknnet qui m’a le plus marqué avec ses méthodes pédagogiques très concrètes. Je me souviens encore des poésies qu’il nous a apprises et des surnoms qu’il nous donnait.En 1942, lorsque les Allemands occupent Blagnac, mon père ne peut plus travailler à l’AIA ; il gagne un peu d’argent en aidant les Blagnacais : il décharge des camions, transporte du bois… Parfois, de peur d’être arrêté comme “ rouge ”, il s’enfuit à la campagne. Avec mes copains, inconscients des conséquences, nous crevons les pneus des Alle-mands quand ils font la fête dans les restaurants. Un jour, nous sectionnons même un câble télé-phonique tendu par les Allemands, entre Toulouse et le Ferradou. Malgré tout, je garde un très bon souvenir de mon enfance et de mon adolescence à Blagnac.»

Les réfugiés espagnols à BlagnacLa n de la guerre d’Espagne va amener, à Blagnac, un ot de réfugiés, durablement

condamnés à l’exil

Pique-nique dans les Ramiers de Blagnac.

Une française, deux réfugiées espagnoles,trois amies en promenade.

26 HISTOIRE DE CAOUECS

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blagnac questions d’histoire n°37

Le n°37 de la revue« Blagnac, Questions

d’Histoire » et ses numéros spéciauxsont en vente dans

les kiosques et librairies de Blagnac.

L e télégraphe optique, inventé par l’in-génieur français Claude Chappe (1763-

1805) est mis à l’essai en 1793 puis pro-gressivement mis en service sur un réseau en étoile à partir de Paris vers les frontières et les ports de guerre. En 1834, une ligne transversale entre Bordeaux et Avignon est projetée. Blagnac est alors sur le trajet.Le principe du télégraphe Chappe est de transmettre un signal codé par un appareil à trois bras mobiles installé sur un point haut. Les postes situés à une distance moyenne de 10 km permettent, à l’aide d’une lunette, d’acheminer de jour et par temps clair un message, en deux ou trois heures selon la

distance. Ce service de transmission d’in-formation est alors réservé au gouverne-ment et à l’armée.Pétition Le 13 février 1834, le préfet de la Haute-Ga-ronne avise le maire de Blagnac du projet d’installer le télégraphe sur le clocher du village, projet nécessitant la démolition de la flèche. Les Blagnacais s’opposent au projet et le 16 mars 1834, une pétition des habitants de Blagnac, approuvée par le conseil municipal, est remise au préfet qui n’en tient pas compte. Le 2 avril, il signe l’arrêté autorisant l’installation du télégra-phe sur le clocher. Une violente réaction du conseil de Fabrique (chargé de l’entretien de l’église) est calmée par la menace de l’envoi d’un bataillon d’infanterie. Une subvention de 2 000 francs fi nit d’arranger les choses et le télégraphe est installé.En 1853, les techniques évoluent, le télégra-phe électrique remplace le télégraphe Chap-pe et l’administration rend le clocher à la

municipalité avec une subvention de 1150 francs pour reconstruire la fl è-che.Et reconstruction

de la fl èche Mais, s’il n’a fallu que peu de mois pour la démolir, quatre ans seront nécessaires pour la reconstruire. Les démêlés de Jean Rocolle, maire de l’époque, avec l’administration, ont laissé beaucoup de traces dans les archives. Son premier projet, d’un montant égal aux 1150 francs de la subvention, est refusé par l’architecte départemental. Sur ses conseils, Jean Rocolle s’adresse alors à Auguste Virebent, célèbre architecte toulousain qui lui propose un devis de 3 280,53 francs aussitôt refusé, les fi nances de la commune ne le permettant pas. Après 3 ans de discussions, le conseil municipal accepte un devis de 1 683,48 francs

qui sera ramené à 1 204,54 francs. Pour ce montant, Jean Carrière, maçon charpen-tier blagnacais effectue la restauration de la fl èche. Tel qu’il le rétablit, le clocher est parvenu à nos jours sans grandes modifi ca-tions. ■

Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

Le télégraphe et le clocher

Projet d’Auguste Virebent pour la reconstruction de la fl èche.

Un télégraphe optique de Claude Chappe.

Le clocher de l’église Saint-Pierre a accueilli un télégraphe au XIX ème siècle. Retour sur ce pan d’histoire locale mouvementé

28 HISTOIRE DE CAOUECS

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blagnac questions d’histoire n°37

La revue n°37 et son n° spécial

«Les Blagnacais pendant la Grande Guerre» sont en vente dans

vos kiosques et librairies de Blagnac.

andré mot Un ancien résistant discret

André mot nous livre quelques récits d’un tempsoù la prudence était de rigueur

P lus de 60 ans après les faits, le Bla-gnacais André Mot déflore toujours

avec beaucoup de retenue les arcanes de la Résistance. A 95 ans, cet ancien de la Car-toucherie cultive la discrétion, la première vraie arme des Résistants. « Nous vivions dans la clandestinité et par mesure de pru-dence, j’ ignorais souvent le nom même de mes responsables », explique André. Ce n’est que bien plus tard, après la Libération, qu’il connaîtra l’identité de certains de ces héros avec qui il partagea notamment le menu mémorable de cette soirée d’hiver 1943. André Mot rassemble pour nous ses souvenirs : « C’était bien après le cou-vre-feu, la rue Bacquié-Fonade à Blagnac s’ était animée d’ombres furtives. Notre chef et ami qui n’était autre que Jean-Louis Puig, nous ne le sûmes que plus tard, convo-qua ses amis à son domicile. Il était difficile de reconnaître parmi ses convives André Costes, Jean Duf faut, Rober t Rabary,

Paul Ricard, Aimé Pied-de-Vache, Bernard Guimbaud, Sempé Honoré Duffour… Nous passâmes à table avec au menu un arse- nal agrémenté de pains de plastic, tablet-tes de Nobel (recommandé pour détruire les ponts), cordon de brickford (combustion 1ère seconde), cordon détonnant, détonateurs, crayons à retardement». André s’arrête là, nous n’en saurons pas plus sur les enjeux de cette soirée.Entre petite et grande Histoire « Il faut toujours rester en accord avec sa conscience et faire son devoir envers ses semblables », résume André Mot. Après la Libération, André n’a jamais cherché à se mettre en avant, il fut pourtant un ardent défenseur des libertés. Il a laissé quelques récits à ses petits-enfants pour qu’ils n’oublient pas. André nous livre l’un d’entre-eux. Le 14 août 1944, en début de matinée, au cours d’une visite de routine, André aperçoit sous deux grands platanes

à l’intersection de la route de Cornebarrieu et du chemin de Bordebasse un bombardier de la Luftwaffe un peu spécial ... « Je prends mon vélo et fonce chez mon chef du réseau Nana de la France-Combattante, je lui des-sine alors le croquis suivant : un bombardier « Heinkell 111 » surmonté d’une sorte de pe-tit avion aux ailes tronquées et surmonté lui-même d’une sorte de réservoir. » André ne sait pas alors que cette information va faire l’effet d’une bombe jusqu’à l’état major d’Al-ger. Le soir même Blagnac va subir son der-nier et son plus intense bombardement de la guerre par les Anglais et les Américains, détruisant ainsi les forces ennemies. Ce même soir, les unités de la France libre vont pouvoir débarquer sur les côtes de Provence et demain Toulouse n’aura qu’à regarder fuir ses ennemis. Ce soir là ne fut pas un soir comme les autres. n

D epuis toujours, les hommes communi-quent entre eux. A la fin du XVème siècle,

Louis XI ressuscite le système des Romains à la fois rapide et régulier : pour acheminer les dépêches à destination, des messagers à cheval empruntent des parcours bien définis et jalonnés de relais où cavalier et monture sont changés. C’est «La Poste aux lettres». Au XIXème siècle, ce service s’améliore avec les « malles-poste », les diligences et la « cré-ation » des facteurs.Celui qui, avant 1870, dessert le petit village de Blagnac et les communes environnan- tes vient de Toulouse et effectue une tour-née très longue. Dès 1869, les Blagnacais se plaignent « de la lenteur du courrier qui met, quelquefois, jusqu’à 26 heures pour aller de Toulouse à Blagnac ». Aussi, de-mandent-ils un bureau de Poste à Blagnac même. Pour justifier cette implantation, l’enquête préalable menée conjointement, en 1870, par le Maire et par le Receveur

Principal des Postes de Toulouse fait état d’une population de 1.729 habitants à pré-dominance rurale. Il y est fait mention éga-lement « de plusieurs officiers en retraite, de trente fort imposés, de religieux dont qua-tre-vingts religieuses au Couvent des Trappis- tines situé à un kilomètre du centre, de nom-breuses maisons de campagne d’agrément habitées seulement dans la saison d’été ». Les Blagnacais obtiennent satisfaction.le 6139ème bureau Dans le « Bulletin mensuel des Postes » n° 33 du mois de décembre 1871, 1ère Divi-sion, 2ème Bureau, Organisation du Service Postal, Création d’Etablissements de Poste, décision ministérielle du 2 décembre 1871, page 412, nous trouvons à son rang :

HAUTE–GARONNE – BLAGNAC – DISTRIBUTION – 6139

Ainsi, le bureau de Poste de notre petit vil-lage est le 6139ème ouvert en France. Opérationnel début 1872, ce bureau de Poste

se situe près de la place des Passementiers actuelle. Mais, pour la commodité du public, il change plusieurs fois d’emplacement.Un bail, signé le 18 décembre 1889, entre le Directeur des Postes et Télégraphes et le maire de l’époque le positionne dans « un immeuble de la Grande Rue près de l’église, à l’arrêt des omnibus et des voi-tures publiques desservant Toulouse » (ac-tuellement boulevard Jean Rivet).Au début du XXème siècle, il occupe un local attenant à la mairie (entrée de notre « Hôtel de Ville »). En 1955, il est transféré boule-vard Jean Rivet à l’emplacement des Ate-liers d’Art. C’est là qu’est accueilli le premier central téléphonique automatique à six chif-fres (85.80.00 et suite).actuellement rue Pasteur Devenu trop exigu, il est depuis 1973 rue Pasteur dans des locaux que nous connais-sons aujourd’hui.Il est à signaler que pour des raisons d’ex-ploitation administrative, les services du courrier avec trente facteurs ont un bâ-timent plus fonctionnel dans la zone de Fontgrasse.En 1967, est ouvert un bureau annexe dans l’enceinte de l’Aérogare de Blagnac I et , en 1993, un t roisième bureau de Poste voit le jour dans le centre commer-cial du Grand Noble.Avec le tramway de la ligne E, peut-être en verrons-nous prochainement un qua-trième dans la zone d’Andromède ? n

Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

la Poste est présente à Blagnac depuis 1871

la Poste place de la mairie, en 1930.

la Poste rue Pasteur, en 1973.

2726 HIStOIRE DE CaOuECS

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Samuel et Marie Gaussens65 ans de vie simple et sereine

Samuel a traversé à pied l’Europe du Nord en temps de guerre pour rejoindre Marie, celle qui allait devenir son épouse

L a première grande histoire de sa vie, c’est son évasion pendant la guerre. A

90 ans, Samuel, ce Blagnacais d’origine marmandaise, se souvient du moindre détail de cette évasion à pied, depuis un camp de prisonniers de guerre, en Westfalie. «On crevait de faim. Je n’avais qu’une idée, rejoindre les forces libres françaises », résume Samuel. Un samedi matin de juin 1942, il s’évade avec un autre prisonnier, pendant le trajet qui les conduit à la ferme où ils travaillent pour les Allemands. Les quinze premiers jours furent très difficiles : il y a d’abord la pluie battante qui les fouette inlassablement. Et cette peur au ventre qui les tenaille. « Nous marchions la nuit à la boussole, nous nous cachions le jour dans les meu-les de foin », confie t-il pudiquement. Ils ont alors pour seule pitance le lait des vaches qu’ils traient en cachette au petit matin et les biscuits de guerre

mis de côté. Ils survivent. Samuel et son compagnon d’infortune ont aussi la chance de rencontrer sur leur chemin des mains tendues, les passeurs, sauvant des vies au péril de leur propre existence. Sans compter cette bonne étoile toujours au dessus de leur tête...Dans un bal clandestin Samuel a traversé au péril de sa vie les frontières de Hollande, de Belgique. Il a ensuite traversé la zone occupée, avant de gagner la zone libre de la France pour aller rejoindre celle qui allait devenir la grande histoire de sa vie : Marie. A peine rétabli de son évasion, c’est dans un bal clandestin -les bals sont alors interdits- qu’il tombe amoureux. «C’était dans une grange. Marie était bonne danseuse, j’ai-mais la danse, j’ai eu le coup de foudre !». Malgré la guerre, Samuel et Marie déci-dent de se marier, quelques mois plus tard. « En 1943, c’était le marché noir : le

boucher vendait des souliers, le cordon-nier des biftecks ; tous les week-ends, la gare de Toulouse était noire de monde, les gens se ravitaillaient à la campagne». Samuel et Marie vivent alors dans la cam-pagne marmandaise, à Birac-sur-Trec. Samuel fait ensuite toute sa carrière dans la police comme gardien de la paix. Arri- vé à Blagnac en septembre 1963, le cou-ple s’intègre très vite dans sa nouvel- le commune, notamment en participant à la vie sportive. Samuel sera pendant 25 ans dirigeant du club de rugby bla-gnacais. Samuel mais aussi Marie y ont marqué les Blagnacais : Marie à la buvette et Samuel à la caisse. Samuel et Marie continuent de vivre le grand amour : soixante cinq ans de vie commu-ne, simple et sereine, passés auprès de leurs quatre enfants, cinq petits enfants et quatre arrière petits enfants.n

Donner à des personnes un sobriquet correspondant à une de leurs particu-

larités physiques ou intellectuelles est une coutume très ancienne. Ces sobriquets à la fois descriptifs et péjoratifs peuvent également s’appliquer à une communau-té, aux habitants d’un village.Ainsi à Blagnac, les habitants s’appellent les Caouècs. D’où vient cette appella-tion ?Chouette alors ! «Caouècs» vient du gascon «Caouèca», peut-être dérivé du latin populaire «cava» et signifie en français « Chevêche », nom donné à des chouettes. Mais alors que le nom français désigne uniquement l’oi-seau, le mot occitan pris en tant qu’adjec-

tif désigne, au figuré, une personne niaise et un peu sotte. Est-ce à cause de leurs gros yeux ronds, rappelant les yeux éba-his des humains ? Blagnac, sur la rive gauche de la Garonne, est en zone linguistique gasconne ; sur la rive droite, en zone linguistique languedo-cienne, «Caouèca» devient «Caveca».Si la prononciation diffère, le sens reste le même dans une grande partie du domai-ne occitan. Les jeunes Blagnacais étaient toujours accueillis comme des «demeu-rés» dans les fêtes locales en pays lan-guedocien comme en pays gascon. Ras-surez-vous : ils savaient répliquer. C’était une façon de perpétuer les traditionnelles «guéguerres» entre villages…A quelle époque remonte ce sobriquet ? Il n’existe, à notre connaissance, aucun document en faisant état. L’Histoire de Blagnac, de Bertrand Lavigne n’y fait pas référence, soit que le mot ait fait son ap-parition après 1875, soit que l’auteur n’ait pas cru utile de le mentionner.Diverses hypothèses Quant à la rumeur publique qui l’a attribué à nos ancêtres, d’où peut-elle bien prove-nir ?Ici encore, point de réponse sûre. Les Tou-lousains n’auraient-ils pas appelé ainsi les paysans du petit village de Blagnac, lieu de leurs promenades, pour se moquer

d’eux et de leur façon de parler, comme ils le faisaient d’une manière générale des paysans gascons de la rive gauche ?Est-ce un épisode de l’ancienne rivalité entre Blagnac et Colomiers qui, à la Ré-volution Française, aurait voulu être chef-lieu de canton ? Chaque commune aurait-elle, par la suite, attribué aux habitants de l’autre un sobriquet peu aimable : «Despendja-lunas» pour les Columérins, c’est-à-dire «décrocheurs de lunes» ? Les maraîchers de Blagnac transportant leurs légumes à Toulouse essentielle-ment de nuit, n’ont-ils pas été comparés à ces oiseaux nocturnes, certains ajoutant même que les lanternes équipant leurs charrettes pouvaient faire penser aux yeux des chouettes ?L’explication que l’on entend souvent et qui ferait venir «Caouec» du gascon «Qu’auetz» (en français : «Qu’avez-vous» ?) pourrait également convenir : les Toulousains ayant voulu se moquer des paysans de Blagnac qui pronon-çaient «quauètz» (kaouèts) en gascon alors qu’eux prononçaient «qu’avetz» (kabèts) en languedocien.Quoi qu’il en soit, les Blagnacais d’origine ou d’adoption ont hérité de ce sobriquet. C’est un témoignage parmi d’autres des liens que Blagnac a su garder avec ses racines. La rue des «Caouècs», au centre-ville, est là pour le rappeler. n

Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

Aussi loin que remontent les souvenirs de nos aînés, les Blagnacais portent le surnom de «Caouècs». Explications

blagnac questions d’histoire n°36

La revue n°36 et son n° spécial

«Les Blagnacais pendant la Grande Guerre» sont en vente dans

vos kiosques et librairies de Blagnac.

«Caouèc, qu’es aquò ?»Place de la Mairie : le long du mur, début de la future rue des Caouècs.

2726 hISTOIRE DE CaOuECS *

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HISTOIRE DE CAOUECS*

Au fil du Canalet, un moulin

T out commence au temps où laGaronne coulait encore au pieddu petit village de Blagnac, à la

fin du XVIIIe siècle. Là, sur les rives dufleuve capricieux, on se souvient descrues de 1835 et de 1855.En 1780, un arrêt royal programme ladémolition du moulin à nef de Blagnacqui gêne la navigation des bateaux quiallaient à Bordeaux ou qui en revenaient.Malgré les suppliques de la population,sa disparition est inévitable. En 1802, lepropriétaire du château (aujourd’huimonastère), le marquis de Maniban, faitcreuser le bras de Garonne nommé plustard le Canalet , sur une largeur de huitmètres et établit un moulin terrier, achevéen 1803, au bas de son jardin anglais(plan p.35, revue n°19). Le marquis faitune faveur aux Blagnacais en leurpermettant d’y venir, sans toutefoispasser «dans les prairies, allées ou jar-din», sous peine d’une amende ! Cepremier chemin qui débutait aux Placettesa servi durant plus de 50 ans.

Moulin à vendreEn 1810, le général Compans devientpropriétaire de ce vaste domaine et doncdu moulin qu’il fait passer de trois àquatre meules. Après son décès, sa filleéchange, en 1848, le château et son parccontre une maison à Paris. Elle vend lemoulin et son canal aux Blagnacais, Jean-Michel Lavigne et Jean-Pierre Debax.

Ces derniers le revendent peu après àde véritables meuniers, Jacques etRaymond Richou. Durant les basseseaux, le moulin ne peut fournir, en quan-tité suffisante, la farine nécessaire auxhabitants de Blagnac et des communesvoisines. Aussi, les frères Richou, pouréviter un tel désagrément, décident, en1853, d’augmenter la force de l’eau ducanal d’amenée, en déplaçant le moulind’environ 600 mètres en aval, à l’endroitoù se dessine encore sa forme.En 1897, le moulin change encore depropriétaire : Paul Gramont et ses des-cendants lui ajoutent un étage et le fontfonctionner jusqu’à ce qu’il s’endormedéfinitivement en 1935, dévoré en gran-de partie par un incendie

Et aujourd’hui De nos jours, la rue du Moulin présenteune longueur supérieure à celle d’au-trefois. De la descente du Ramier au basde la côte de l’Abbé Cazeneuve, ellen’était qu’un petit chemin de service etun chemin de halage. Les riverainsn’avaient qu’à traverser ce tranquille«carrelot» pour exploiter leur jardin.Toute la circulation – charrettes et plus

tard camions- se concentrait dans lapartie allant de la côte de l’Abbé Ca-zeneuve au moulin.Après la Libération, la Ville prend en charge cet étroit chemin privé,simplement empierré. Elle le fait gou-dronner après y avoir amené l’eau. Parla suite, le Canalet ne cesse de s’enva-ser et devient, malheureusement, unnauséabond «égout à ciel ouvert». Lesmunicipalités successives, soucieusesd’hygiène et de salubrité publique, s’en inquiètent. Après l’avoir acheté,Jacques Puig et ses conseillers le fontcombler en avril 1968.La longue histoire du Canalet s’arrêtelà. Aujourd’hui, le nom de l’allée quisubsiste dans l’aménagement des Ra-miers, rappelle seul l’existence de l’ancienbras de la Garonne.Le bâtiment du moulin revient à lacommune en 1976. Il accueille de nosjours des associations sportives etculturelles. �

Association “Blagnac Histoire et Mémoire”

Pour compléter ce bref résumé, consul-ter les numéros 19, 20 et 28 de la revue«Blagnac, Questions d’Histoire».

En bordure du parc des Ramiers,l’allée du Canalettémoigne d’uneriche paged’histoire locale...

* «Caouec est le nom donné aux anciens Blagnacais, et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

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HISTOIRE DE CAOUECS*

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ERRATUMUne erreur d’impression s’est glissée à la page 28 du FORUM n°115 : le personnage de la photo du haut n’est pas Pierre LAVILLE mais Bertrand LAVIGNE, maire en 1848.

Le n°35 de la revueBLAGNAC QUESTIONS

D’HISTOIRE, est en vente dans vos kiosques

et librairies de Blagnac.

En 1807, Blagnac compte 1327habitants qui vivent regrou-pés autour de l’église, dans

un espace clos par la Garonne et desremparts. La campagne couvre alorsla quasi-totalité du territoire com-munal.Blagnac conserve son caractère rural jusqu’au lendemain de laSeconde Guerre mondiale mais cette permanence n’exclut pas lechangement car de 1800 à 1940,d’importants progrès s’inscriventdans le paysage de la commune.L’agriculture s’y développe rapi-

dement comme en témoignentla hausse des rendements et ledéveloppement des culturesmaraîchères. Les moyens detransport facilitent les échan-ges entre Toulouse et Blagnac:

le 1er pont sur la Garonne est ouverten 1843, un service de diligencesfonctionne de 1870 à 1914, remplacéalors par un tramway, le train Tou-louse-Cadours dessert Blagnac àpartir de 1903. Le commerce etl’artisanat en sortent revigorés et lapopulation grandit et se diversi-fie. Le village s’ouvre : les rempartsdisparaissent aux alentours de 1830, les fossés deviennent desboulevards. Le village s’étend,essaimant le long des chemins qui partent du centre. En 1870, lanouvelle mairie-école abandon-ne l’antique «grand’rue» (rue duVieux-Blagnac) pour la place ac-tuelle tandis que l’église est mise en valeur par un vaste parvis. LeRamier, longtemps réservé à l’ex-ploitation du bois ou pour les blan-chisseuses, devient un espace deloisirs. Le village se modernise avec l’adduction d’eau, l’éclairageet le bitumage de la voirie.

Blagnac, ville de l’aéronautiqueLes années 30 sont un tournant oùse dessine l’avenir de Blagnac : lapopulation, dopée par les fluxmigratoires, dépasse le seuil de 2000 habitants. En 1938 est prise la décision de doter Toulouse d’unaérodrome civil digne de ce nom.Le site retenu se déploie en grandepartie sur le territoire de la com-mune blagnacaise. Enfin, la guerreprovoque l’installation à Blagnac

même de l’Atelier industriel de l’Air.Blagnac est partie intégrante du pôle aéronautique toulousain et vaainsi bénéficier de la politique d‘amé-nagement du territoire lancée parl’Etat dans les années 60. Caravel-le, Concorde, l’installation d’ATR, l’A380 sont quelques-uns des grandsjalons de cette aventure indus-trielle. La population passe de 2754 habitants en 1946 à 20 856 en1999. La ville se développe entre le centre ancien et la route de Gre-nade, puis entre celle-ci et l’aéroportavec les aménagements des quar-tiers du Ritouret, du Grand-Nobleet d’Andromède. Entreprises indus-trielles, établissements commerciaux,équipements scolaires, culturels etsportifs enrichissent le tissu urbain.La nature a toujours sa place dansla ville, comme en témoigne l’exis-tence de la zone maraîchère desQuinze-Sols ; la Garonne, ses ber-ges et les nombreux parcs urbainsoffrent toujours un cadre de vieverdoyant dans lequel Blagnacconjugue le passé et le présent.L’exposition a pour ambition de lefaire découvrir. �

Association Blagnac, Histoire et Mémoire.

A la découverte de «Blagnacd’hier à aujourd’hui»

Odyssud accueilledu 9 au 21septembre, uneexposition intitulée«Blagnac d’hier àaujourd’hui». A travers denombreuses sourceshistoriques. Récit.

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AU CŒUR DE L’ACTUALITÉ

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Dominant les rives de la Garon-ne toute proche, l’église Saint-Pierre est l’un des plus beaux

édifices de la ville. Un bâtiment chargéd’histoire qui élance son haut clocherà travers le ciel. C’est au pied de cetimposant clocher que se lovent les an-ciennes maisons villageoises qui ontlongtemps composé ce petit bourg. Ilsuffit de flâner un instant sur le par-vis de l’église pour goûter au charmedu lieu. Tout autour de l’église, desmaisons à colombage ou en briqueenserrent l’édifice comme pour mieuxfaire palpiter le cœur villageois. «C’estune église très chaleureuse et convi-viale», confie volontiers le père Philip-pe Chapoton, prêtre de la paroisse. A l’intérieur de l’édifice, tout invite aurecueillement. L’observateur attentifpourra découvrir sur les murs patinéspar le temps, mosaïque et sculptures,comme autant de témoignages de lalongue histoire du site. Car une descaractéristiques de l’église Saint-Pierreest d’avoir été modelée, voire remode-lée, au fil des siècles. L’édifice connaîtrades modifications importantes entreles XIV et XVIème siècles avec, notam-ment, la construction de la chapelleSaint-Jacques et du chœur. Les cha-pelles de la Vierge et du Sacré-Cœur

Remodelée aufil des siècles,l’église Saint-Pierre, classéemonumenthistorique,poursuit sacure dejouvence.

L’église Saint-Pierre poursu

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viendront encore plus tard, au XIXème

siècle.

Douceur et lumièreInscrit aux Monuments historiquesdepuis 1926, l’édifice a pour vocationd’être préservé. A cette fin, plusieurschantiers de rénovation ont été en-gagés par le passé. Le piquetage desmurs, la réfection du sol et l’installa-tion du chauffage ont ainsi permisd’assainir l’édifice. Toutefois, une étude récente menée sous la houlettede l’architecte des Bâtiments de Francea posé un diagnostic précis sur les diffé-rentes interventions restant à effectuer.Le nouveau programme de rénovationde l’église démarrera dans le courantde l’année 2008, entraînant des travauximportants destinés à consolider lastructure du bâtiment notamment lescharpentes de la nef et du chœur quivont être remplacées. Dans la foulée dece chantier, les enduits intérieurs serontréalisés pour recouvrir les murs de galetset brique, mais sans masquer les tracesde l’évolution du bâtiment au fil dessiècles. La luminosité intérieure de l’égli-se sera revisitée avec le remplacement des vitres de la nef par des vitraux etpar la restauration des vitraux duchœur, œuvre d’un maître verrier du

XIXème siècle. Les travaux seront confiésà des entreprises spécialisées en restau-ration de bâtiments historiques. Enfin,l’électricité sera à son tour remise auxnormes.La seconde tranche des travaux, pré-vue pour 2009, se consacrera à la réno-vation des peintures sous lesquelleson a pu déceler ici et là quelques pein-tures plus anciennes qui resterontprotégées.

Organisation pratiqueDurant les travaux, l’église restera fer-mée au public. La vie de la paroisse seraquant à elle réorganisée provisoire-ment. Explications du Père PhilippeChapoton : «Les offices auront lieu dans la chapelle Saint-Gabriel située près de l’école de l’Aérogare ou à l’égli-se Sainte-Marguerite, dans le quartiervoisin d’Ancely, ou bien encore dansl’église de Saint-Martin du Touch. Quant aux communions, elles serontcélébrées dans la chapelle Sainte-Ca-therine de Sienne, au monastère.» �

rsuit sa rénovation Concert aux chandellesSous les voûtes de l’église Saint-Pierre, l’acoustique estparticulièrement adaptée pourécouter de la musique. Lieu de culte, l’église accueilleaussi occasionnellement desmanifestations à vocationculturelle. C’est notamment le cas, chaque fin d’année, avec le concert aux chandelles.L’occasion pour les élèves et lesprofesseurs du conservatoiremunicipal de musique de seproduire devant un publicmélomane. Pour parfaire la magie de ce moment, l’église est éclairée par unemultitude de chandelles. Concert aux chandelles, spécial «musiques de films»,lundi 17 décembre à 20h30,église Saint-Pierre. Entrée gratuite

BibliographiePour en savoir plus sur l’église deBlagnac et sur l’histoire locale,des ouvrages à consulter auxarchives municipales, 34 ter, rue Pasteur :

Bernard LAVIGNE, «Histoire de Blagnac, sa baronnie,ses barons, ses châteaux, sonprieuré, ses églises» – Toulouse.

Daniel BONZON,«Rapports de fouillesarchéologiques».

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HISTOIRE DE CAOUECS*

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De Blagnac à Toulouse, il faut passer LE PONT DU TOUCH !

La Garonne et le Touch forment leslimites naturelles entre Blagnac etsa grande voisine toulousaine.

Aussi, pour aller de Blagnac à Toulouse,il faut nécessairement franchir l’un de ces deux cours d’eau. Un pont semblele moyen le plus sûr. Pourtant, seul, celuidu Touch en a la primeur bien des sièclesavant celui de la Garonne*.En effet, dès l’époque romaine, du Ier auIVe siècle, un habitat se développe le longde l’importante voie qui relie Toulouse àEauze. De nombreux vestiges en témoi-gnent, tant sur le plateau de l’ArdenneHaute (actuelle cité d’Ancely) que sur leterritoire de Blagnac. Un passage sur leTouch s’avère alors indispensable. Les Romains, grands bâtisseurs, ne secontentent pas d’un simple gué, ils

établissent alors un pont vraisembla-blement situé en amont du pont actuel.En 1478, un pont est attesté dans lecadastre de l’époque. Une gravure duXVIe siècle le représente avec ses sixarches et son tablier en dos d’âne. Cesuccesseur du pont romain restera enl’état jusqu’au XVIIIe siècle.En 1776, Joseph-Marie Saget, architectede la province de Languedoc, dresse lesplans d’un nouvel ouvrage mis en serviceen 1781. Ce pont à arche unique, enforme d’anse de panier est construit enbriques, avec les armes du Languedocsculptées sur la pierre de la clé de voûte.

Rive gauche de la Garonne

Bien plus tard, en 1903, le petit traindépartemental qui relie Toulouse àCadours le traverse. Et en 1914, c’est autour du tramway d’emprunter cetteinfrastructure qui permet de rejoindreToulouse à Blagnac. La circulation rou-tière augmentant, en 1976, son tablierdoit être élargi de chaque côté parl’adjonction d’une poutre en béton de 5mètres de large.Ainsi, ce pont assure, depuis plus de

deux siècles, la liaison de Blagnac àToulouse par la rive gauche de laGaronne. Pour être tout à fait précis, le pont au-toroutier reliant la rocade ouest àl’aéroport a une petite partie de sontablier au-dessus du Touch sur la com-mune de Blagnac, en contrebas de labutte où s’élevaient l’église et le châ-teau de Saint-Michel du Touch.A deux reprises, le 11 décembre 1974 etle 16 février 1975, le pont s’est effondrélors du démontage de l’armature qui lesoutenait.Malgré ces péripéties, il a été livré à lacirculation le 18 janvier 1977. �

Association “Blagnac Histoire et Mémoire”

* Prochain forum : les ponts sur la Garonne.

La revue «BLAGNAC, QUES-TIONS D’HISTOIRE» n°33,mai 2007, est en vente dansvos kiosques.

L’histoire du pontdu Touch prend sasource dèsl’époque romaine.Explication.

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HISTOIRE DE CAOUECS*

28 * «Caouec est le nom donné aux anciens Blagnacais, et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

Autrefois place de la «Fontcouverte»,son nom actuel est dédié à JeanAmouroux, curé de Blagnac à

partir de 1928 qui mourut dans un tragi-que accident en 1937. Jean Amourouxnaît à Saint-Léon, le 3 mai 1876. Ordonnéprêtre en 1900, il dessert plusieursparoisses à Toulouse et dans le dépar-tement avant d’arriver à Blagnac en 1923comme procuré. Conscient de sa mis-sion, il exige le respect des préceptesreligieux. Il annule les communionssolennelles quand, d’après lui, les enfantsne sont pas prêts, refuse de remarierun divorcé devenu veuf…Sa légère claudication ne l’empêche pasd’aller de maison en maison pour exhorterles Blagnacais à ne pas manquer la messedominicale. Ce qui ne plaît pas à tous.

Dramatique accident de bus

Le dimanche 19 septembre 1937, il or-ganise le pèlerinage à Sainte-Germainede Pibrac. La journée se déroule dans

la joie mais le malheur guette lespèlerins au retour. Vers 17h15,au pont du Touch, l’accident seproduit. Les trois autobus sesuivent. Le chauffeur du derniervéhicule dans lequel est assisl’abbé Amouroux, ne peutéviter une camionnette. Lebus heurte violemment unacacia et le mur du châteaud’Ancely. Sur les trente-huit occu-pants, la plupart peuvent regagnerleur domicile après quelques soins.Cinq dames sont hospitalisées à l’Hôtel-Dieu pour des blessures assez graves.Le corps déchiqueté de l’abbé, écrasédès le premier choc entre un arbre etson siège, est retiré des débris infor-mes avec beaucoup d’émotion et de

tristesse. Les obsèques ont lieu le22 septembre dans l’église deBlagnac en présence de la quasi-

totalité de la population, du conseilmunicipal, de nombreux prêtres

et de Mgr l’archevêque quipréside cette boulever-

sante cérémonie. Aprèsl’office, un long cortège suit

le char funèbre et se rend aucimetière où, selon son désir, le dé-funt est inhumé.Les Blagnacais émus par la mort hor-rible de l’abbé Amouroux, oublientson rigorisme et, en souvenir de sondévouement, inscrivent son nom surla plaque de la place. �

Association “Blagnac Histoire et Mémoire”

La fontaine «destrois cannelles»,récemmentrestaurée,s’appelait, aumoment de saconstruction vers le XVIIe siècle, «la Fontcouverte».Aujourd’hui, laplace attenanteporte le nomd’abbé Amouroux.

Autour de la Fontcouverte, la place de l’abbé Amouroux

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HISTOIRE DE CAOUECS*

* «Caouec est le nom donné aux anciensBlagnacais, et aujourd’hui, par extension, à

tous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

L’avenue du 11 Novembre 1918,nommée ainsi en 1975, a changéau moins trois fois d’appellation.

«Chemin du Port» avant le percementde l’avenue du Général Compans vers1800, puis «chemin de Rouaix», elle estmieux connue de nos aînés sous levocable «chemin de la Gare». En l’em-pruntant puis en suivant la route deLectoure (actuelle rue Servanty), lesBlagnacais parvenaient à la route deGrenade et à la gare.

En 1901, la Compagnie des chemins defer du Sud-Ouest, répondant ainsi audésir des Blagnacais de profiter de cemerveilleux moyen de transport, décidede créer une ligne à voie étroite Toulouse-Grenade-Cadours avec arrêt à Blagnacet la réalise dès 1903.C’est un succès bientôt perturbé par laguerre de 14-18. La paix revenue, le réseause réorganise, le trafic augmente, la vitesseaussi atteignant 31 Km/h grâce au «trainblanc» automotrice à accumulation d’é-nergie électrique qui remplace le «trainnoir» et sa locomotive à vapeur. En 1936,apparaissent les autorails au diesel.

Que d’animation !Dès le début, sont organisés trois voya-ges quotidiens aller-retour avec servicesspéciaux les jours de marché. Que d’ani-mation dans le chemin !Tous les jours, les commerçants, bou-chers, cafetiers, épiciers… prennent

livraison de leurs marchandises à lagare. Le facteur y vient aussi chercheret déposer le courrier. Le mercredi, jourde marché à Cadours, vers 8h30, c’estl’affluence ! Sur ce chemin sinueux,bordé de fossés, grossièrement em-pierré, des femmes chargées de paniersremplis de légumes et de volailles, deshommes conduisant quelques têtes debétail se hâtent pour ne pas rater le trainde 9h45. A la gare Mme Messal, la gardestation, les accueille dans l’unique pièce,vend les billets, enregistre les colis,achemine le bétail vers le quai spécial,manœuvre les aiguillages. Le train arrive

après avoir grimpé péniblement la côtevenant du pont du Touch. Les passagerss’installent. Le train démarre. Parfois,trop lourdement chargé, il doit reculerjusqu’à la route de Grenade où MmeMessal arrête la circulation, prendre del’élan, gravir une petite rampe et s’élancervers Cornebarrieu.

Trafic ralentiL’électricité n’est jamais arrivée jusqu’àla gare ni l’eau potable. Un poêle à bois,une lampe à huile ou à carbure, le puitset les bosquets voisins faisaient l’affaire !Pendant la guerre de 39-45, avec la raré-faction de l’essence et les difficultés deravitaillement, le trafic un peu ralentireprend de la vigueur. Équipé de gazo-gène, le petit train aide la population àlutter contre la pénurie. Avec la paix,reviennent les carburants, les véhiculesà moteur. Le petit train s’endort. Le traficest définitivement interrompu en 1947.Les paysans des années 30 ne recon-naîtraient plus leur chemin. Devenu «ruede la Gare», élargi, aligné, goudronné,bordé de maisons et même de «rési-dences», il a gagné le titre d’Avenue du 11 novembre 1918 et la gare a l’honneurd’être inscrite au Patrimoine. •

Association Blagnac Histoire et Mémoire

Pour en savoir plus sur le petit train, lire«Blagnac Questions d’Histoire n° 13».

J ulio Kermel a toujours cultivé lesbonnes manières. En guise d’accueil,dans son appartement de la rue

Fonsorbes, il offre systématiquement àtous ses invités un petit verre de Ti-punchmartiniquais ou guyanais… Il n’est pasloin le temps où l’on croisait Julio dansles rues de Blagnac saluant les damesd’un baise-main sans avoir omis préa-lablement d’ôter son couvre-chef defeutrine…Voilà près de 80 ans que Julioa quitté sa ville natale de Saint-Georges.«Je suis né au bord du fleuve l’Oyapockqui sépare la Guyane française du Brésil.La Guyane est un pays spécial. Peu decaractères supportent le chaud et l’hu-midité de ce pays…». Et il rajoute : «Jedois à un père missionnaire, le Père Gros

originaire de Tarbes, l’apprentissage dufrançais». Julio obtient son bac MathElem. en Guyane. C’est Cupidon, poèteguyanais, qui l’incite à faire des étudessupérieures en France. Il décroche alorsson Certificat supérieur de mathéma-tiques générales et de calcul différentielet intégral à la Faculté des Sciences deToulouse. «J’aurais aimé devenir officierde marine. Je suis devenu instituteur…Marié, j’ai interrompu mes études poursubvenir aux besoins de ma famille…Nous avons eu 7 enfants… Je ne compteplus mes petits-enfants». Julio a eu lebonheur de faire quelques croisières,une manière de combler «son manquede mer». Aujourd’hui, son état de santéne lui permet plus de sortir mais il serappelle avec nostalgie : «Durant cescroisières, je passais mes nuits sur lepont, la pleine mer, la phosphorescencede l’écume, le balancement du navire…C’est comme une musique».

Tôt ou tard, le travail paye«J’aimerais m’instruire un peu plus, j’ai-merais aller au-delà de ce que je sais…».A 97 ans, Julio Kermel garde intacte sasoif de savoir. Instituteur de 1938 à 1969,il a partagé avec plusieurs générations

d’écoliers blagnacais ses connaissancesen mathématiques, histoire et géographieavec, pour violon d’Ingres, les filiationshistoriques des Grands de ce monde. C’était un instituteur aimé de ses élèvesmais jamais chahuté. «Je les laissaisrigoler puis on travaillait. Et quand il lefallait, je tirais les oreilles». Ses anciensélèves sont quasi unanimes : «Julio étaitun instituteur sévère mais plein detendresse». Nombre d’entre eux conti-nuent de venir le voir. Ils sont aujourd’huiboulanger, boucher, médecin, pharma-cien à Blagnac… Julio se souvient de la difficile périodede l’Occupation : «La journée, j’ensei-gnais, le soir, j’aidais les paysans… enéchange, j’avais du saucisson, un peu deviande pour moi et mes petits». JulioKermel, c’est l’instituteur formé sous laIIIe République. «Je n’ai jamais été relé-gué à cause de la couleur de ma peau.Je me suis trouvé en face d’une Francegénéreuse qui reconnaissait mon tra-vail.». Et lorsqu’on demande à Julio cequ’il souhaite dire aux nouvelles géné-rations de Blagnacais, Julio lance unmessage optimiste : «Le travail payetoujours, tôt ou tard, le travail paye. Qu’ilsne désespèrent pas !». •

Le chemin de la gare Julio Kermelprofondémentcourtois et humain

Julio fait partie de ces instituteurshumanistes qui ont marqué à jamais des générationsd’écoliers. Allons à sa rencontre !

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HISTOIRE DE CAOUECS «Caouec est le nom donné aux anciens Blagnacais, et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

Au Salon de l’Aéronautique de Toulouse en 1966. Le stand des pionniers de l’Aéronautique. De g. à dr : MM. H. Castarède, J. Ferrand ; derrière lui : H. Galeppe, P. Mesmer, ministre des Armées, J. Dufour, D. Daurat, Morris, I.G.A.M.E. de Midi-Pyrénées, E. Dewoitine.

«Réclame» des Etablissement J. Dufour vers 1930.(coll. R. Espanol).

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J ean Dufour, petit-fils du maireJean Rivet, voit le jour le 7 mai1899. Ses parents, Bernard

Dufour et Marguerite Rivet, boulangersrue du Vieux Blagnac, l’encouragent àpoursuivre des études à l’ÉcoleSupérieure Berthelot de Toulouse. Mais,le vent de l’Histoire bouleverse lebonheur tranquille de la familleDufour : Guillaume, le fils aîné, esttué en 1916, à Vaux dans la Meuse.En 1917, Jean est mobilisé dans l’a-viation comme il le souhaitait. Brevetépilote en octobre 18, il est aussitôt envoyéà Verdun, sur le front. L’armistice, déclaréquelques jours plus tard le renvoie àla vie civile, enrichi d’une véritablepassion pour l’aviation. Il a dix-neufans.

De retour dans sa région natale, il faitla connaissance de Didier Daurat. Cedernier est chargé de réaliser l’ambi-tieux projet, imaginé par l’industrieltoulousain Pierre-Georges Latécoère :la création d’une ligne postale aériennereliant Toulouse à l’Amérique du Sud,via l’Espagne et l’Afrique. Grâce aucourage des membres de l’équipe denavigants et au prix du sacrifice desoixante-quatorze d’entre eux, cetteépopée entrera dans la légende sousle nom de «Ligne Aéropostale».

Ami de Didier Daurat

Une solide amitié lie Jean Dufour àDidier Daurat et c’est avec enthou-siasme qu’en 1920, le jeune Blagnacaissonge à rejoindre l’équipe des pilotes.Il en est dissuadé par ses parents,bouleversés à l’idée de le voir choisirune activité aussi périlleuse.Il décide alors de créer une entreprisede fabrication de chaussures. Aveccompétence, il gère une première usineà Blagnac avant d’en créer une secondeà Villefranche de Lauragais. Il innoveen utilisant la matière plastique. Enoctobre 1940, il fait confectionner, àses frais, soixante et onze paires depantoufles pour les prisonniers deguerre blagnacais. C’est avec ses talents d’organisateurqu’il décide de servir «La Ligne».Collaborateur bénévole et efficace de

Didier Daurat, il consacre, pendantonze ans, une grande partie de sontemps à l’héroïque aventure collective.De plus, il met au service de ses amisses nombreuses relations dans lesmilieux économiques, politiques etfinanciers. La réussite du projet dePierre-Georges Latécoère doit proba-blement beaucoup à ces précieuxsoutiens.

Hommage aux héros

Lorsqu’en 1964, «l’Amicale des Pion-niers de l’Aéronautique des LignesAériennes Latécoère et Aéropostale»est créée par Didier Daurat et d’an-ciens de l’aviation, il fait partie desadministrateurs.Durant les dernières années de sa vie,Jean Dufour oeuvre pour donner auxhéros de l’Aéropostale la place qu’ilsméritent dans la mémoire collective.Grâce à lui, de grandes avenues deToulouse et de Blagnac portent leurnom. C’est à son initiative que le nomde «Henri Guillaumet» est donné aupremier collège de Blagnac.Il s’éteint le 25 février 1981, à Toulouse,et repose au cimetière Saint-Éxupèrede notre commune. Mais, grâce à «sa»rue, il reste près de ses glorieux amiset, en particulier, de son cher DidierDaurat. •

Association Blagnac Histoire et Mémoire

Jean Dufour, passionné d’aviationEn juin 1982, les conseillers municipaux donnent le nom de«Jean Dufour» à unerue située dans la zone aéroportuaire.Ce «caouec» mérite pleinementcette décision.

UNE RUE

L es cheveux blancs par-faitement coiffés, unepetite veste blanche

faite au crochet, une robe àpois blancs sur fond noir, dedélicates perles de culture desoreilles au bout des doigts, etsurtout derrière ses lunettesfines des yeux grands écar-quillés, un air malicieux ettendre. A 89 ans, MargueriteCalac est pétillante de vie. Ellepartage avec générosité, sansdétour, l’expérience de sa vie,particulièrement sa vision desrelations entre les femmes etles hommes. «Je me suis mariéeà 18 ans (la majorité était alorsà 21 ans). J’allais alors chercherla saucisse, le jambon, dans laboucherie en face du salon decoiffure de maman. Son patronsavait que Pierre était amoureuxde moi, alors il le faisait venirpour me servir… Moi, j’étaisattirée par lui mais vouscomprenez, je pesais à peine42 kg, lui était un bel hommecostaud de 23 ans qui pesait 86kg». Parce qu’il savait tout fairede l’utile à l’artistique, un donhérité de son grand-père paternelqui avait pour sobriquet «Riquet»comme le concepteur du Canal,Pierre Calac, tour à tourcharcutier à Toulouse puis àAgen, puis de retour à Blagnac,«nid familial des Calac», magasi-nier à l’Aérospatiale, allait ainsipartager 70 ans de sa vie avecMarguerite. «Rien que du bon-heur», résume-t-elle. Cependant, pendant près de 50 ans,Marguerite conservera discrètementla douleur d’une cicatrice qui ne s’estrefermée que très récemment.

Revoir le Nom de son père

Marguerite a deux ans, lorsque sonpère, Louis Bonin, adjudant au 14e RI

meurt le 13 juillet 1918 des suites deses blessures. Il est alors inhumé dansle Carré des Soldats au cimetière deSalonique à Toulouse. «Avec maman,nous sommes venues nous recueillirplus d’une fois sur ce carré», se re-mémore Marguerite. En 1945, Marguerite quitte Toulousepour Agen où elle résidera avec Pierre

pendant 5 ans. Maislorsqu’elle revient à Toulouse,le Carré des Soldats a disparu.Personne ne sait où il est…Pendant près de 50 ans,Marguerite demandera, cher-chera à comprendre maisrestera plongée dans l’igno-rance et surtout une terribletristesse. En 1998, tout lemonde parle de l’Armistice,c’est la Commémoration. Marguerite en a gros sur lecœur. Dans un dernier espoir,elle frappe à la porte de LaDépêche du Midi et deman-de de l’aide à un journaliste,Dominique Delpiroux. Marguerite et le journalistese rendent au cimetière Sa-lonique. Marguerite est sur lepoint de repartir quand lejournaliste, en investigateuraverti y regarde de plus près,se met à quatre pattes et re-père des irrégularités sur desdalles au pied du Monumentaux Morts. Le temps, les intem-péries ont presque effacé lesinscriptions. Et pourtant,Marguerite et le journalistefinissent par déchiffrer cer-taines lettres… Louis Bonin,14e RI. Marguerite voit le nomde son père et se met à pleu-rer…

En 2002, Marguerite a eu uneseconde surprise. Son petit-fils a découvert par hasard,sur une des routes près duLac de Sesquières (Toulouse)

le panneau «Rue Louis Bonin, mortpour la France, 1892 – 1918». L’élu toulousain Jean Diebold qui a lul’article de La Dépêche du Midi contantcette belle histoire est à l’initiative decet hommage posthume rendu à LouisBonin.•

Marguerite Calac:du cœur et de la ténacité

PORTRAIT DE CAOUEC

L’histoire de la vie de Margueriteest tout simplement celle de

chacun mais elle reste étonnante. Allez à sa rencontre !

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PROMENADE HISTOIRE DE CAOUECS*

* «Caouec est le nom donné aux anciensBlagnacais, et aujourd’hui, par extension, àtous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

E n avril 1914, le tramway quiremplace enfin l’omnibusinconfortable et poussif, a m -

plifie la venue des Toulousains àB l a g n a c .Ce village, proche de la ville, les séduitpar sa beauté naturelle dûe essen-tiellement à la Garonne qui, en déviantson cours, a déposé une île merveil-leuse couverte de grands arbre s .

Déjà, sous le Second Empire ,A m b roise Thière surnommé« B a r t h è s »( 1 ), sans doute à causede ses cheveux (ou de sa barbe)en broussaille, profite de la pro -ximité du fleuve pour attirer lesp romeneurs dans son café-restaurant doté de « jardins, de

salons avec pianos, de salle de billard ,d’escarpolette…».Cet ancien menuisier adopte son so-briquet «Barthès» comme enseignede son établissement car le rappro -chement de «Café-Thière» se prête àtrop de plaisanteries !Sa «publicité», mise sous forme d’af-fichette en métal dans les omnibustoulousains, allèche de nombre u xclients : les plus fortunés venant encalèche, les autres à bicyclette et mê-me à pied, la promenade étant «sansfatigue pour un bon marcheur».

BaignadesLes guides touristiques de la fin du1 9è m e siècle et surtout du début du2 0è m e vantent Blagnac «le site pit-

t o resque de ce coquet village, lesbeaux ramiers sur les berges de laG a ronne, rendez-vous des pêcheurs».Les familles des villes, poussées parles hygiénistes de la Belle Époque «àp re n d re l’air de la campagne», selaissent tenter et s’offrent la baladedevenue peu coûteuse avec le tram-way.Aussi, le dimanche, le boulevardFirmin Pons et le Ramier s’animentmêlant la foule des «étrangers» auxBlagnacais.Après la descente et le joli pont del’abattoir ou de l’Arignée qui enjambele Canalet, les piétons découvre n tdeux belles allées de platanes, desacacias, des peupliers et surtout laG a ronne. Une agréable pro m e n a d ecommence sous les ombrages.Beaucoup ne résistent pas aux joiesde la baignade. Les plus jeunes sedonnent rendez-vous au pied du«piboul», grand peuplier dre s s émajestueusement sur la berge faceau monastère, les autres partent desrochers à l’entrée du Canalet et les

Les dimanches d’antanen été au Ramier

>>>

La fête des écoles (après la guerre 39-45) au Ramier.

7 8

>>> suite Plus grande que la commune deBlagnac avec ses 2500 hectares, laforêt de Bouconne s’étire sur

plusieurs communes dont celle deMondonville à son extrême ouest.

Il s’agit d’une forêtdomaniale, d’où une n t retien permanentet très sérieux par lesservices de l’Officenational des forêts(ONF). Cette forêt a laparticularité d’être ledernier témoin de laforêt du quaternairequi, en ces lointains

temps de glaciation, couvrait toute la région.Ici, l’arbre - roi est le chêne. Il se déclineen chêne ro u v re, pédonculé et même liège.Mais, la taille des chênes dépasse rare -ment les 20/25 mètres. La raison tient à laqualité du sol, acide et sensible aux tasse-ments. Si le chêne occupe largement l’espace,on trouvera aussi des pins maritimes, despins Laricio, des charmes, des tilleuls etdes châtaigniers. En raison de sa localisa-tion, aux portes d’une grande agglomé-ration, Bouconne a une double vocation :l’accueil des promeneurs, cavaliers et scolaire smais c’est aussi une zone de production debois. Ces deux exigences doivent se conci-l i e r. Pour cela, le promeneur doit re s p e c t e rle lieu : ne pas quitter les sentiers, ne pascueillir de fleurs, tenir les chiens en laisse…

Circuits balisés : Les itinéraires pédestre ssont très nombreux. Des circuits de touteslongueurs sont proposés sur place. Parailleurs, divers guides bien documentésp roposent des circuits balisés. Vous ent ro u v e rez chez votre libraire et aussi à lamédiathèque d’Odyssud.

La tour de Chappe. Il ne reste plus quequelques tours dites de Chappe dansn o t re région. Pourtant, construites sousNapoléon, elles étaient implantées tousles 10 km et servaient à transmettre desmessages codés ! Elles cesseront d’êtreutilisées avec l’avènement du télégraphe.La micheline To u l o u s e / A u c h t r a v e r s etoujours la forêt de Bouconne et sait sef a i re entendre .Stèle François Ve r d i e r. Le corps duchef de la Résistance fut re t rouvé dansla forêt. Une stèle a été édifiée à cete m p l a c e m e n t .Le lac de Bordette est situé dans lapartie la plus fréquentée du bois, àp roximité du parking situé sur la D24,reliant Lévignac à Pibrac.•

B o u c o n n e ,une histoire

de chênes

7 : Arrivée à Mondonville.

8 : Arrivée à Bouconne.

Curiosités et autres sites

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Jean-Louis Rocolleun érudit bien enraciné

ses bacantes coupées avec beaucoup de soin frémissent à chaque fois que Jean-Louis Rocolle évoque ses nombreuses passions

L es racines de Jean-Louis Rocolle dans le terroir Caouec sont nombreuses et

trouvent des traces historiques identifiées jusqu’au XVIIème siècle. Il y aurait de quoi écrire un livre… C’est d’ailleurs à cette tâche ardue que Jean-Louis et son épouse Michèle se sont attelés, depuis plus de 30 ans, au fur et à mesure qu’ils dépoussièrent et surtout décryptent les manuscrits rangés dans des caisses d’archives familiales entassées dans leur grenier. Un fonds historique dense qui leur permet de remonter petit à petit l’arbre gé-néalogique familial. Un arbre généalogique où sont d’ailleurs répertoriés pas moins de trois maires blagnacais : Jean Rocolle, Jean Exu-père et François Cantayre. Même sa maison construite rue du Vieux Blagnac raconte un pan de l’histoire locale puisqu’elle appartient à la famille de Jean-Louis depuis 1692 (pre-mier achat attesté). Depuis, des générations de Rocolle s’y sont succédées : un fournier

(qui louait le four pour faire cuire le pain), un géomètre arpenteur, un chargé des contribu-tions indirectes, un pharmacien…Et c’est ainsi que Jean-Louis Rocolle est tombé dans la marmite des traditions et des anecdotes. Jean-Louis reconnaît : « Je suis profondément attaché à l’histoire de la fa-mille, aux traditions de ce terroir. Je respecte beaucoup ce qu’ont fait les anciens souvent avec très peu de moyens mais surtout avec beaucoup d’ imagination et de sueur. »Fondateur de l’union philatélique blagnacaise Dès l’âge de 7 ans, il se découvre une pas-sion pour les timbres. Une passion qui, de-puis, ne l’a jamais quitté. Au point que cette même passion unira plus tard Jean-Louis à Michèle. « Les timbres nous ont tellement rapprochés que la colle a pris », note-t-il. Pendant plus de 20 ans, il présidera aux des-tinées de l’Union philatélique blagnacaise qu’il a fondée. « J’aime les timbres avec leur

cachet d’origine. Ils ont accompli leur travail, ils ont circulé, ils ont parcouru le globe », pré-cise Jean-Louis. Apprenti dès l’âge de 16 ans à La Poste, il y consacrera toute sa carrière. « Aux PTT, j’avais l’amour de mon métier ; je me sentais utile en rendant des services aux gens. Je garnissais les imprimés des person-nes qui ne savaient pas écrire ». Quand il s’agit d’évoquer la période de la guerre, il en parle avec douleur : « J’habitais alors rue de la Colombette à Toulouse, pas loin de la synagogue. Les Allemands étaient partout… » Jean-Louis reprend le sourire quand il indique ses autres passions : ses trains électriques comme une vieille revanche sur une enfance modeste, ses bidouillages avec des radios amateurs pour voyager à travers le monde, ses discussions à n’en plus finir avec Suzan-ne Béret et les autres membres de l’associa-tion Mémoire et Histoire pour voyager cette fois à travers le temps. n

L e marquis Joseph Gaspard seigneur de Maniban acquiert, en 1748, le château

construit un siècle plus tôt en bordure de Garonne et qui deviendra un monastère un siècle plus tard. L’homme est né à Toulouse le 2 juillet 1686, à l’Hôtel des Pins, dans le capitoulat de la Daurade, quartier riche et

recherché par les parlementaires. Sa fa-mille est issue de la noblesse de robe.Les Maniban, originaires du Bas-Armagnac où ils possèdent le château du Busca-Ma-niban, près de Condom, s’enrichissent de génération en génération. Héritier de cette considérable fortune, Joseph Gaspard de Maniban fait aussi un riche mariage à Paris, en 1707, en épousant Jeanne-Christine de Lamoignon, sœur d’un « chancelier du Roy ». Deux filles naîtront de cette union. L’ascension du marquis est rapide. En 1705, il obtient une licence en droit civil et cano-nique à l’université de Toulouse et devient conseiller au Parlement. L’homme n’a pas 20 ans. En 1721, à l’âge de 35 ans, il devient Premier Président du Parlement de Toulou-se, fonction qu’il occupera jusqu’à la fin de sa vie. Lieu de pouvoir local, ce tribunal pro-nonce des sentences, enregistre les édits royaux, veille à leur application et entre

souvent en conflit avec les autres pouvoirs régionaux (Archevêque, Capitouls…). Face à eux, le marquis joue un rôle de concilia-teur et de médiateur tout en réussissant à préserver la prééminence du Parlement.Au calme, à Blagnac Il doit aussi tenir son rang dans la vie lo-cale, en menant grand train de vie à l’Hôtel des Pins. Il appartient aux sociétés les plus huppées de la région et sait se montrer gé-néreux envers les pauvres et les malades : le legs à l’Hôtel-Dieu Saint-Jacques et à l’hôpital Saint-Joseph de la Grave lui vaut le « droit au portrait » au titre de bienfaiteur. L’achat du château et de son parc, appelé plus tard domaine de Maniban, est la der-nière « fantaisie » du marquis. Il obéit ainsi à la mode de son époque : les parlementaires se doivent de posséder des demeures près de la capitale régionale. Mais surtout, lassé des contraintes de la vie publique, il recher-che dans ce cadre agréable, le calme et la détente. Pendant 14 ans, le Premier Prési-dent du Parlement mènera une existence bien rodée : à Toulouse, une vie publique, faite de contraintes et de représentations ; à Blagnac une vie privée simple, où il s’en-toure d’amis choisis. Il décède le 31 août 1762 et est enseveli en grande pompe, dans le cloître de l’église Saint-Étienne, à Toulouse.Aujourd’hui à Blagnac, un passage entre la rue de la Libération et la Garonne perpétue le souvenir de Joseph Gaspard de Maniban, figure caractéristique du Siècle des Lumiè-res. n Association «Blagnac, Histoire et Mémoire»

sous l’Ancien Régime, de nombreux notables toulousains apprécient les charmes de Blagnac et y possèdent une résidence secondaire. Voici l’histoire de l’un d’eux, le marquis Joseph Gaspard de Maniban

blagnac questions d’histoire n°36

La revue n°36 et son n° spécial

«Les Blagnacais pendant la Grande Guerre» sont en vente dans

vos kiosques et librairies de Blagnac.

qui était Joseph Gaspard de Maniban ?

un bienfaiteur des hospices « donnait droit au portrait » - Musée de l’Histoire de la Médecine, Hôtel-Dieu, Toulouse.Photo Ph. Garcia (BHM)

2726 hISTOIRE DE CAOuECS

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Un Poilu de Blagnac, Antoine Pagès.

Carte postale du front

27HISTOIRE DE CAOUEC*26

Aline CamboulivesLe sourire d’un enfant

Mère au foyer, choriste, pianiste, poétesse, Aline Camboulives porte sur le monde un regard bienveillant

«Mon âme est paysanne», aime à souli-gner Aline Camboulives. Aline est née il ya 85 ans à Port Sainte-Marie dans le Lot-et-Garonne dans une famille partagée entre la terre et le petit commerce. «Cette plainede la Garonne était un véritable pays deCocagne… J’aimais m’allonger dans le vert des prairies, humer l’air pur, me laisserréchauffer par les tendres rayons du prin-temps …». Cinquante-sept ans plus tard et les trois en-fants élevés, son besoin d’écriture devientirrépressible. Trop d’émotions contenues,trop d’espoirs à partager, Aline prend laplume et ne la quittera plus. Elle écrit aujour le jour l’histoire de sa vie en poésie et compte aujourd’hui plus de quatre centspoèmes rassemblés en huit recueils.

«Ma tante Lucie était directrice d’école,explique-t-elle, elle m’a donné très tôt legoût de la lecture et de l’écriture». Sa pas-sion, naturellement, Aline a voulu la com-muniquer à travers ses livres et la fairepartager au plus grand nombre. Aline a ainsi présidé pendant sept ans le concoursde poésie de la Ville de Blagnac avec sonamie Gabrielle Mezeix. Elle est devenue la poétesse attitrée et reconnue desBlagnacais. Régulièrement, des associa-tions ou des particuliers lui demandent despoèmes.Une écriture fleurie«Je ne veux pas dire que dans ce mondetout est beau, mais je fais en sorte que cequi est moche se termine toujours par unmessage d’espoir», plaide Aline. Douée d’untempé-rament optimiste et communicatif,son regard romantique se pose sur le mondequi devient plus beau, plus rieur.

A la recherche du temps perdu, elle plongedans l’enfance, enchante ces petits rienset donne du baume au cœur. «La jeunesse est choyée ainsi que l’âgemûr, une petite ville est un lieu de rencontre,et son aéroport où les rêves s’exportent,dessine un relief de fierté et d’azur. Auprèsde la Garonne sereine et alanguie, appor-tant à chacun un charme indéfini, voguepetite ville mais garde ta candeur, ton es-prit, ta beauté et préserve ton cœur ». Cetextrait d’un poème intitulé Bonjour ma ville* fait l’éloge de Blagnac, «un remercie-ment aux réalisations présentes ». Alinerecherche dans ses rimes la musique et surson cahier d’écolier à petits carreaux, cha-que ligne devient portée et chaque mot note d’amour. n

* du recueil Itinéraire

L undi 11 novembre 1918. Il y a tout jus-te 90 ans. Une Blagnacaise alors âgée

de 5 ans se souvient précisément. « Il étaitpresque 16 heures, ce lundi 11 novembre,les cloches ont sonné à toute volée pourannoncer l’armistice signé à Rethondes,dans la forêt de Compiègne. » Comme danstout le pays, les habitants ont ressenti unejoie grave, eu égard aux sacrifices consen-tis. Les trois cents poilus de Blagnac nesont plus là pour témoigner de l’enfer qu’ilsont vécu. Les uns dont les noms sont gravés sur le mo-nument aux morts, sont tombés au Champ

d’Honneur, d’autres souvent mutilés, tou-jours traumatisés ont essayé de survivre.Pour ne pas les oublier, pour leur rendrehommage, un numéro spécial de la revue«Blagnac Questions d’Histoire» va leur êtreconsacré à partir de témoignages, notam-ment de lettres évoquant, avec beaucoupde retenue, le quotidien de ces hommespartis en plein été 1914, laissant femmes,enfants et vieillards seuls face aux travauxdes champs. Des documents d’archivesrendent compte du parcours de tous cesmobilisés.Dans ce Blagnac de 1914 qui vient de fêterl’arrivée du tramway tant attendu, qui sontdonc ces soldats, presque tous paysans,instruits à l’école de la IIIème Républiqueglorifiant la Patrie ?52 mois de combatNous essaierons de les suivre dans la diver-sité de leur itinéraire : combattants sur lefront français depuis la mer du Nord jusqu’àla Suisse et sur le front d’Orient ou affec-tés à la production industrielle, agricole… Pendant leur absence, comment s’organi-se la vie des Blagnacais restés au village ?

Perturbés par les réquisitions, ils accueil-lent malgré leur peine et leurs difficultésdes réfugiés venus des régions du nordbombardées et fournissent en literie et enproduits alimentaires l’hôpital militaire ins-tallé au couvent.Très choqués par les vingt-et-une morts quis’échelonnent d’août à septembre 1914, ilss’attendent chaque jour à recevoir « lamauvaise nouvelle » apportée par le mai-re, Charles Toulouse. Les permissionnairesleur décrivent la cruelle réalité de la guer-re et les Blagnacais s’efforcent d’apporterun peu de douceur aux soldats, par leurscolis.Le bilan du conflit ? Nous pouvons mesurerà quel point il a marqué les générations quiont vécu ces terribles années. Aujourd’hui, le monument aux morts, œuvredu sculpteur Abel Fabre, né à Blagnac en1846, symbolise ces cinquante-deux mois de combats, avec le nom des princi-pales batailles et surtout les noms de ceuxqui ont donné leur vie pour la France : 23en 1914, 19 en 1915, 14 en 1916, 10 en1917 et 7 en 1918.Nous souhaitons, avec ce numéro spécial,rappeler aux Blagnacais et notamment auxplus jeunes, un moment important de leurHistoire déjà lointain mais qui doit resterprésent. n

Association Blagnac Histoire et Mémoire

Première Guerre mondiale,de sang et de larmes

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HISTOIRE DE CAOUECS*

28 * «Caouec est le nom donné aux anciens Blagnacais, et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

Les armoiries, dont l’origine remon-te au XIe siècle, sont des emblèmespropres à des souverains, à des

personnages nobles et influents ou auxcommunautés leur appartenant. Par exemple, les armoiries des de Voisins,barons de Blagnac du XIVe au XVIIIesiècle, figurent à plusieurs endroits, àl’intérieur de l’église Saint-Pierre.(2)

Les premières armoiries D’après Bertrand Lavigne*, «un écussonbâti dans le mur de la première croiséedu clocher, derrière la statue de la Vierge,nous porte à croire que cette communautéavait des armes dès le XIIe siècle. Cetécusson porte d’un côté, la croix deToulouse (rappelant l’appartenance deBlagnac au comté de Toulouse), de l’au-tre, trois barres en travers et deuxpoissons affrontés (symbole chrétien).»Cette pierre a été scellée à cet endroitlors de la construction du clocher auXIVe siècle. Il est évident que ce n’est pas son empla-cement d’origine. Mais nous ne pouvonspas dire avec certitude si elle se trouvaità l’intérieur de l’église ou sur l’ancienclocher-mur, situé au-dessus de l’absideactuelle.(3)

Le blason fixé sur le mur de l’Hôtel deville de Blagnac est la reproductionexacte de celui du XIIIe siècle. Il portedeux écussons séparés par une clé àdouble panneton. Cette clé symbolisele pouvoir d’ouverture des portes duparadis, attribué à Saint-Pierre, donton a donné le nom à l’église blagna-caise. A gauche de la clé, nous retrouvonsla croix de Toulouse déjà présente surl’écusson le plus ancien et, à droite, lesarmes d’Alphonse de Poitiers, connu

sous le nom d’Adolphe II. Ce dernier créeses armoiries à partir des blasons de sesparents : les fleurs de lys pour son pèreLouis VIII, roi de France de 1223 à 1226,et les gueules semées de châteaux d’or,pour sa mère, Blanche de Castille.De nos jours encore, le courrier admi-nistratif municipal porte le sceau repré-sentant ce blason.(4)

Armoiries avec la couronne C’est à la fin du XVIIIe siècle que la cou-ronne murale apparaît. Napoléon Ier enréglemente le port, le nombre de créneauxindiquant le rang et l’importance de la vil-le.(5)

Le dernier logo en date, tout en gardantles symboles anciens très stylisés, faitétat de l’importance de la Garonne et dela vocation aéronautique de Blagnac.�* Maire de Blagnac sous la Seconde République et auteur de«Histoire de Blagnac».

Association “Blagnac Histoire et Mémoire”

Depuis peu, un blason sculptévers la fin du XIXe

siècle orne le mur de briques de l’Hôtelde ville. A lui seul, ilraconte notre histoire.(1)

La revue «BLAGNAC, QUESTIONS D’HISTOIRE» n°32,décembre 2006, est en ventedans vos kiosques

Les origines du blason de Blagnac

(3) Ecusson en pierre, composé d’une croixet de poissons.

(4) Sceau.

(5) Ecusson avec couronne.

(2) Eglise Saint-Pierre, détail d’armoirie.

(1) Blason à l’Hôtel de ville.

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HISTOIRE DE CAOUECS*

Rue Félix Debax,du château à la République

* «Caouec est le nom donné aux anciens Blagnacais, et aujourd’hui, par extension, à tous ceux qui ont grandi à Blagnac.»

Les Blagnacais entre 1939 et 1945

Des mois de recherches, d’interviews, deconsultation d’archives, de dépouillementde journaux de l’époque ont été nécessairespour finaliser une revue fort documentée

racontant la vie à Blagnac pendant la période 1939- 1945. La déclaration de guerre,l'armistice, Vichy, les réquisitions, les bombardements, la Résistance, la Libération :tout y est ! En vente dans vos kiosques. 5€

Cette voie, en angle droit, tracéeà l'emplacement d'allées du parcdu château, relie la place Jeanne

Hérisson à la rue du Dr Guimbaud. Sonappellation rend hommage depuis unesoixantaine d'années à Félix Debax,maire de Blagnac de 1884 à 1900.Jusqu'au milieu du XIXe siècle, tout cequartier dépend du château dont le parcborde la Garonne et le village. Le paysa-ge change en 1845, à la mort du généralDominique Compans. Sa fille LouiseAdolphine échange en 1847 le châteauet son parc attenant au village contreune maison à Paris. Les nouveaux pro-priétaires, Monsieur et Madame Azam,se défont rapidement d'une partie duparc.

Le chemin des CasernesTout naturellement se dessine un chemin,ébauche de la rue actuelle, longtempsconnu sous le nom de “chemin desCasernes”. En effet, en 1823, à la suitede la guerre d'Espagne, des bataillonsd'artillerie ou des compagnies devoltigeurs se succèdent dans les famillesblagnacaises jusqu'en 1852. En 1848-1849, Charles Azam les loge dans unecaserne donnant sur le chemin enquestion. Sur le plan de 1868 - le châteauétant devenu monastère - apparaît le“chemin du Couvent ou des AnciennesCasernes”. Après l'échange de 1847,Mme Ternanc-Compans vend le restedu domaine proche de la Garonne avecle moulin et son canal d'amenée et defuite à Jean-Pierre Debax. Celui-ci, grâceà plusieurs acquisitions, va jusqu'en1872 agrandir ses propriétés qui irontdu fleuve presque jusqu'à la rue du DrGuimbaud.

Un pur BlagnacaisSon fils Félix en hérite en 1881. Félix,Antoine, Cyrile Debax naît à Blagnac le28 janvier 1830. Il descend d'une longue

lignée de Blagnacais, pour la plupartpatrons de barques sur le Canal du Midiou mariniers sur la Garonne. Son père,Jean-Pierre, quitte Blagnac fin 1830. Ils'installe à Toulouse comme passemen-tier. Félix Debax embrasse le mêmemétier. Veuf rapidement, sans enfant, ilpartage son temps entre Toulouse etBlagnac dont il devient maire à l'una-nimité en 1884. Pendant 16 ans, lesBlagnacais accordent leur confiance àcet homme profondément républicainet humain. C’est que Félix Debax, avecles Conseillers municipaux, se préoccu-pe de la qualité de vie des administrés :amélioration de la voirie, installation

d'un château d'eau, d'abreuvoirs, defontaines, développement de l'éclairageau gaz, construction d'une école defilles…Avant de décéder en 1901, Félix Debaxvend toutes ses possessions blagnacaisesà Augustine Bousquet, veuve d'HenriMaigné. Le petit “chemin des Casernes”,en très mauvais état au début du XXesiècle, bordé de ronces et de plantesdiverses, prendra logiquement le nomde “Félix Debax” en l'honneur de ce mai-re fort apprécié. �

Association “Blagnac Histoire et Mémoire” Pour en savoir plus sur Félix Debax, lire “Blagnac,

Questions d’Histoire” n° 16, 19, 20 et 30.

Le couvent des Trappistines, le château et les anciennes casernes d’artillerie au début du XXe siècle.

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H I S T O I R E

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C’est vers 1650 que Marc Antoined’Aldéguier, trésorier payeur généraldu royaume, édifie à Blagnac sur

un terrain longeant la Garonne et s’étendantdu village (actuelle place Jeanne Hérisson)au Port, un château entouré d’un parc.Divers propriétaires, tous riches notablestoulousains, la plupart parlementaires commeJoseph Gaspard de Maniban, se succèdentdans cette belle demeure, lieu de repos, dedétente, de fêtes… La partie centrale denotre actuelle rue de la Libération emprunteapproximativement le tracé de l’allée bordéed’ormes qui conduisait jadis les visiteurs auperron du château.Après la période révolutionnaire, parcouruesans incident majeur, le domaine est achetévers 1810 par le comte Dominique Compans,général d’Empire, qui y séjourne de 1816jusqu’à sa mort en 1845, puis par unecommunauté de Cisterciennes-Trappistines.Les religieuses s’installent dans le châteauet bientôt édifient l’église et les bâtimentsque nous voyons encore aujourd’hui.Dans les années 1930, les Trappistinesdécident de quitter le monastère, désormaisoccupé par des Dominicaines, et auparavantmettent en vente, sous forme de lotissement,les terrains situés au sud du domaine.Quand la guerre éclate en septembre 1939,malgré de très nombreuses difficultés desmaisons se construisent peu à peu et unerue, appelée “rue du lotissement” ou “ruede Maniban”, devient nécessaire.En novembre 1942, l’armée allemande occu-pe le Sud de la France. La Luftwaffe, installéeà Blagnac, réquisitionne de nombreusesmaisons, une partie du monastère, élèvedes baraques Adrian dont une dans cetterue.1942, 1943, 1944, la guerre fait rage sur tousles fronts. Dans notre village, les contraintesliées à l’occupation se multiplient : difficul-tés de ravitaillement, couvre-feu, contrôlesfréquents d’identité, parfois nécessité d’un“laissez-passer”, censure dans tous lesdomaines, presse, radio… et bombardementsalliés à partir d’avril 1944… L’inquiétude, lapeur règnent.

Après le débarquement allié du 6 juin 1944en Normandie et celui du 15 août en Provence,les troupes concentrées dans notre régiondoivent s’enfuir au plus vite pour échapperà l’étau qui va se refermer sur elles.

A Blagnac, dans l’après-midi du 19 août1944 tout évolue très vite, le tramway necircule plus, les Allemands abandonnent lesmaisons occupées, en incendient certainesdont une avenue du Général Compans.La nuit approche. Venus des environs, d’in-terminables convois de camions bourrés desoldats l’arme au poing traversent le village. Cette nuit-là, Marceau Cartelle, rentrant àbicyclette de son travail, rencontre, pourson malheur, une de ces colonnes en fuite.Il est abattu face à l’entrée de la rue deManiban.Les Blagnacais se terrent dans leurs maisons.Pas une lumière ne brille. Pourtant, personnene dort pendant cette longue nuit lourde demenaces. A de nombreux tirs isolés, succè-dent des fusillades de plus en plus nourries,accompagnées d’explosions particulièrementviolentes sur l’aérodrome (un train demunitions) ou en bordure de l’avenue duGénéral Compans (un stock très important

de bouteilles d’hydrogène). Le 20 août, aumatin, le calme est revenu. Les habitants,timidement, sortent de chez eux. C’est bienvrai, plus de troupes occupant Blagnac. C’estla “Libération” !Pourtant la guerre continue et une nouvellevie s’organise…

Le 17 novembre 1945, après la réceptiondu tracé définitif de la rue du lotissementManiban, Monsieur le Maire propose auConseil municipal de la dénommer “Rue dela Libération (…) pour commémorer le dé-part des envahisseurs”. Ce vœu est adoptéà l’unanimité.Implantée dans un ancien domaine presti-gieux, cette rue rappelle surtout une journéecapitale chargée d’espoir, mais aussi despériodes sombres de notre histoire dignesde rester gravées dans la mémoire de tous.n

Association Blagnac Histoire et Mémoire.

La rue de la Libération - 19 août 1944Bien que relativement récente sous sa forme actuelle – un “U” à partirde l’avenue du Général Compans – cette rue, ou plutôt son emplacement,a une très longue histoire intimement liée à celle de notre commune.

Plan du XVIIIe siècle avec le château et l’allée d’ormes.A l’arrière-plan, la partie centrale de la rue de la Libération.

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HISTOIRE DE CAOUECS*

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est supportée de chaque côté par qua-rante suspentes qui transmettent lesefforts à quatre câbles s’appuyant surdeux portiques construits sur les deuxculées et parementés en briques foraines.Le tablier en bois a une largeur de 4,20mètres entre les garde-corps : 2,20 mè-tres pour la voie charretière et 1 mètrepour les trottoirs de chaque côté. Pourse croiser, les charrettes devaient uti-liser des refuges aménagés à la placedu trottoir. Malgré ses performancesassez limitées, ce pont résiste à la cruede 1875 et assure vaillamment son ser-vice jusqu’en 1923.Dès 1885, les élus blagnacais de l’épo-que étudient le projet de reconstruc-tion du pont. Ils envisagent alors de leremplacer par un pont métallique, à lacondition que les communes l’utilisanty participent. Devant leur refus, ce pro-jet tarde à voir le jour. Il n’aboutiravraiment qu’en 1923, après la PremièreGuerre mondiale, avec la constructiond’un autre pont suspendu d’une lon-gueur identique au précédent, mais

soutenu par deux piles implantées dans le fleuve. Le trafic automobile toujours plus dense amenuise sa capacité et sarésistance. Grâce au délestage appor-té par un nouveau pont en bétonprécontraint, construit en 1977 en amont pour desservir l’aéroport, il n’estdémoli qu’en 1983 et remplacé par unpont en acier conservant les culées etles deux piles de l’ancien.Ce pont mis en service en mai 1984,d’une hauteur de 10 mètres au-dessusde l’étiage, large de 11,50 mètres avectrottoirs et pistes cyclables, assureaujourd’hui encore la traversée de laGaronne. Il est appelé couramment,ancien pont de Blagnac. �

Association “Blagnac Histoire et Mémoire”.

(1) Voir Forum de juin 2004.

La revue «BLAGNAC, QUESTIONS

D’HISTOIRE» n°33 est en vente

dans vos kiosques.

Des ponts sur la Garonne

Jeter un pont sur la Garonne ne seconçoit pas aussi facilement quesur le Touch. Pourtant pour aller

de Blagnac à Toulouse par la rive droi-te, il faut traverser ce large fleuve. Depuis 1339, un bac assure le passagedes personnes et des animaux (1). Il fautattendre le XIXe siècle pour qu’un pontremplace ce moyen de communicationpeu commode.La construction d’un pont à péage est envisagée dès 1839. Sa réalisation,permise par l’ordonnance du roi Louis-Philippe en date du 7 avril 1841, se faitrapidement pour l’époque puisque lepont est ouvert au public le 28 mars1844. Jacques Quenot, ingénieur civilà Paris, devient le concessionnaire dupéage jusqu’en 1878.

Résistant à la crue de 1875Ce pont suspendu suivant le systèmede Marc Seguin appelé «pont fil de fer», enjambe la Garonne d’une seuletravée longue de plus de 140 mètres.Le tablier est établi à huit mètres au-dessus de l’étiage. Sa partie centrale

Construit à hauteur du Plan du Port, à deuxpas du quartier des Sept Deniers,l’ancien pont deBlagnac a touteune histoire.