[Cartapanis] Les Marchés Financiers Internationau(BookZZ.org)

128

description

ghf

Transcript of [Cartapanis] Les Marchés Financiers Internationau(BookZZ.org)

  • Andr Cartapanis

    Les marchsfinanciers

    internationaux

  • ISBN : 2-7071-3355-8

    Le logo qui figure au dos de la couverture de ce livre mrite une explication. Sonobjet est dalerter le lecteur sur la menace que reprsente pour lavenir de lcrit, toutparticulirement dans le domaine des sciences humaines et sociales, le dveloppementmassif du photocopillage.

    Le code de la proprit intellectuelle du 1er juillet 1992 interdit en effet express-ment la photocopie usage collectif sans autorisation des ayants droit. Or, cettepratique sest gnralise dans les tablissements denseignement suprieur, provo-quant une baisse brutale des achats de livres, au point que la possibilit mme pour lesauteurs de crer des uvres nouvelles et de les faire diter correctement est aujourdhuimenace.

    Nous rappelons donc quen application des articles L. 122-10 L. 122-12 du Codede la proprit intellectuelle, toute reproduction usage collectif par photocopie, int-gralement ou partiellement, du prsent ouvrage est interdite sans autorisation duCentre franais dexploitation du droit de copie (CFC, 20, rue des Grands-Augustins,75006 Paris). Toute autre forme de reproduction, intgrale ou partielle, est galementinterdite sans autorisation de lditeur.

    Si vous dsirez tre tenu rgulirement inform de nos parutions, il vous suffitdenvoyer vos nom et adresse aux ditions La Dcouverte, 9 bis, rue Abel-Hovelacque,75013 Paris. Vous recevrez gratuitement notre bulletin trimestriel la Dcouverte.Vous pouvez galement retrouver lensemble de notre catalogue et nous contacter surnotre site www.editionsladecouverte.fr.

    ditions La Dcouverte, Paris, 2004.

  • Introduction

    Linstabilit financire internationale est au cur des interro-gations que suscite la globalisation. Pourquoi les taux de changesont-ils si instables, et surtout si imprvisibles, comme onlobserve pour leuro vis--vis du dollar ? Les investisseurs inter-nationaux participent-ils effectivement une rpartition effi-ciente de lpargne lchelle mondiale ? Comment expliquer ledclenchement chronique des crises financires internatio-nales, du type de celles observes en Europe au dbut desannes 1990, au Mexique en 1994-1995, en Asie en 1997-1998,puis en Russie, au Brsil, en Turquie, en Argentine ? Dans cesconditions, faut-il poursuivre la libralisation des marchs finan-ciers ou bien doit-on introduire de nouveaux contrles, on pense la taxe Tobin, ou des rglementations assurant une meilleuregouvernance financire internationale ?

    Toutes ces questions relvent du fonctionnement et de ladynamique des marchs financiers internationaux : marchsinternationaux de capitaux, marchs des changes, marchs degestion des risques internationaux. Mieux connatre leurs fonc-tions et leur organisation, mieux apprcier les effets des innova-tions dont ils ont t lobjet, surtout depuis une quinzainedannes, mieux comprendre les mcanismes de linstabilitfinancire internationale, tels sont les principaux objectifs de cetouvrage.

  • Les dfis de la globalisation financire

    La globalisation des marchs financiers ne mrite ni excsdhonneur, ni excs dindignit. Cest un processus, sans douteimparfait et en mme temps irremplaable, dallocation desressources lchelle mondiale, mme si la rationalit grgairede certains agents conomiques vient souvent perturber leurfonctionnement. En ouvrant le jeu conomique parmi les paysmergents, la globalisation financire a offert des opportunits des conomies, des hommes qui en avaient peu. Aux avantagesque procurait dj la spcialisation internationale sajoute donc,dsormais, la possibilit de lisser au cours du temps les dsajus-tements entre pargne et investissement que provoquent danschaque pays ltat des finances publiques, limpratif du dve-loppement des infrastructures ou les spcificits dmogra-phiques. Et dans un monde de plus en plus incertain,linnovation financire ouvre des possibilits de couverture et detransfert des risques qui nexistaient pas dans le pass.

    Mais on sait dsormais que la libralisation financirenapporte pas seulement les bienfaits quont longtemps mis enavant, souvent de manire univoque, certains conomistes. Lesmouvements internationaux de capitaux ont emprunt deschemins imprvus en finanant dans la dernire dcennie, etencore aujourdhui, les dficits vertigineux de lconomie amri-caine (dficits budgtaires, dsquilibres de la balance des paie-ments courants) bien plus que le dveloppement des paysmergents. Et ils ont suscit une fragilit accrue et une instabilitchronique sur les marchs financiers internationaux.

    En effet, dans un contexte dinformation imparfaite et demyopie des horizons dcisionnels, les investisseurs internatio-naux ne se comportent pas toujours de faon rationnelle, enchoisissant les placements les plus porteurs ou les pays les plusprometteurs sur le plan de la croissance conomique. Ils rpon-dent aussi, parfois, des modifications endognes des anticipa-tions, refltant des sauts dans linscurit perue. Ces pisodessont de nature perturber la dtermination des prix sur lesmarchs financiers et lallocation de lpargne lchelle interna-tionale, et ils dbouchent sur des crises systmiques, source decots sociaux considrables : selon certaines analyses du Fondsmontaire international (FMI), les crises de change des

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX4

  • annes 1990 auraient cr des dficits cumuls de production,relativement la tendance, de 4 7 %, et les crises jumelles,combinant crises bancaires et crises de change, auraient suscitdes pertes de production de lordre de 15 %.

    Ds lors, le triomphe du march et de la globalisation nesignifie nullement que les tats doivent se retirer de la scnefinancire internationale. Plus quune mise en cause de la globa-lisation, cest dailleurs une demande de rgulations internatio-nales qui sous-tend implicitement, dsormais, le mouvementdaltermondialisation. Mais comment aborder lanalyse de cesmarchs ?

    De la macroconomie financireaux marchs financiers internationaux

    Lorsque les conomistes sintressent lorigine et aux effetsdes carts de taux dintrt entre diffrentes conomies natio-nales, ou bien aux dterminants des taux de change, ils sesituent assez naturellement une chelle globale, en exami-nant les comportements agrgs des investisseurs et des par-gnants, en valuant les carts de comptitivit ou de croissancedune conomie vis--vis de ses concurrents, en tudiant la situa-tion de sa balance des paiements courants ou celle des mouve-ments internationaux de capitaux, en discutant des choix depolitique conomique qui soffrent alors aux banques centralesou aux gouvernements selon le rgime de changes, fixes ouflexibles. Ce faisant, ils se rfrent ncessairement une descrip-tion relativement stylise des marchs sur lesquels sexprimentces comportements ou ces ajustements. Ils se situent alors dansle domaine de la macroconomie financire internationale. Lestaux dintrt et les taux de change relvent de la macroco-nomie et se trouvent au cur dun ensemble dajustements quisoprent une chelle agrge, celle des interdpendancesmacroconomiques internationales. Il nen est pas moins vraique ces deux variables se dterminent sur des marchs spci-fiques, les marchs de capitaux ou le march des changes, surlesquels interviennent des agents spcialiss et o sexprimentdes mcanismes de coordination et des techniques financirestout fait spcifiques. Aussi, ct des dmarches plus

    INTRODUCTION 5

  • thoriques de lconomie montaire [Lavigne et Pollin, 1997]*ou de la macroconomie financire [Aglietta, 2001], il convientgalement de se pencher sur lorganisation et le fonctionne-ment des marchs financiers internationaux. Dabord parce queles microstructures de ces marchs (types dintervenants, actifsfinanciers utiliss, organisation centralise ou dcentralise destransactions et du mode de formation des prix, fonctions spci-fiques des oprateurs) exercent des effets sur la dynamique descours de change ou des taux dintrt. Ensuite parce quilimporte galement de connatre les instruments ou les produitspermettant de financer les activits internationales et de grer lesrisques qui y sont associs [Eiteman, Stonehill et Moffet, 2004].

    Plan de louvrage

    Le chapitre I permet de comprendre le rle spcifique desmarchs financiers internationaux et brosse un tableaudensemble des trois grands types de marchs qui fonctionnent lchelle internationale : les euromarchs, le march des changeset les marchs drivs. Les fonctions que chacun deux permetdassurer sont analyses : les prts-emprunts en euromonnaies ;les achats-ventes de devises ; la couverture des risques de changeou des risques de taux dintrt.

    Dans le chapitre II, il sagit de mieux apprhender les opra-tions de financement bancaire en eurodevises et lorganisationdes marchs euro-obligataires, avant dexaminer les produitsdrivs permettant notamment de grer les risques de tauxdintrt.

    Le chapitre III est consacr au march des changes. Cela exigeun examen dtaill de lorganisation de ce march, le plusimportant du monde au regard des volumes de transactions, enmettant laccent sur la dynamique du march interbancaire etle poids des facteurs psychologiques dans la dtermination destaux de change trs court terme. Les oprations de change terme et les marchs drivs de change sont galementprsents.

    * Les rfrences entre crochets renvoient la bibliographie en fin douvrage.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX6

  • Enfin, dans le chapitre IV, linstabilit financire internatio-nale fait lobjet dune analyse de caractre plus conomique, endressant un bilan de la globalisation financire et, surtout, enapportant un clairage sur les mcanismes de dclenchement etde propagation des crises de change et des crises financiresinternationales qui ont marqu, lchelle plantaire, lesannes 1990-2000. Do lexamen des efforts que fournissent lesgouvernements et les banques centrales afin de consoliderlarchitecture des marchs financiers internationaux dans le butde prvenir et de grer les crises financires internationales dedemain

    INTRODUCTION 7

  • This page intentionally left blank

  • I / Le rle des marchs financiers lchelle internationale

    Les marchs financiers internationaux recouvrent divers typesde marchs : les marchs internationaux de capitaux, le marchdes changes, les marchs de gestion des risques internationaux.Mais avant dexaminer leur organisation, notamment au regarddes innovations auxquelles ont procd les oprateurs, surtoutdepuis une vingtaine dannes, il convient de rappeler, dans cepremier chapitre, ce que sont les fonctions des marchs finan-ciers, avant de prciser, ensuite, les principales caractristiques etles spcificits des marchs financiers internationaux.

    quoi servent les marchs financiers ?

    Mme sils prsentent des particularits notables, lies notam-ment la multiplicit des monnaies utilises, les marchs finan-ciers internationaux assurent lextension lchelleinternationale des fonctions assumes par les marchs financierssur le plan domestique.

    Capacits de financement versus besoins de financement

    Si les agents conomiques (mnages, entreprises, tats) assu-raient en totalit le financement de leurs activits courantes oudinvestissement partir de leurs ressources propres, les systmesfinanciers nauraient aucune raison dtre. Ds lors que tel nestpas le cas et que coexistent, au plan macroconomique, desagents capacit de financement dont les ressources courantes

  • dpassent leurs plans de dpenses, un horizon donn, et quedes agents besoin de financement se trouvent dans la situa-tion inverse, alors sexprime la ncessit dajuster et de coor-donner ces deux types de situations. La justification premiredes marchs financiers, et plus encore des intermdiaires qui enassurent le fonctionnement, est donc de remplir cette fonction.

    Il ne sagit pas seulement dorganiser le transfert des fondsprtables, mais aussi de rendre compatibles les motivations quisexpriment aux deux ples du circuit financier. Car lesexigences de ces deux catgories dagents conomiques ont toutechance de savrer, ex ante, peu conciliables. Du ct des prteursventuels, se combinent le souci dobtenir le rendement le pluslev, lobjectif de minimiser les risques, de conserver une relleliquidit en privilgiant, par exemple, des placements courtterme. linverse, du ct des emprunteurs potentiels, prdomi-nent lobjectif de minimiser les charges de remboursement et desendetter moyen ou long terme, le souci daccder des finan-cements non rversibles. Quant la prise de risque, elle est inh-rente la plupart des investissements, alors que les pargnantsprouvent une certaine aversion pour le risque. Do la nces-sit dun ensemble dinstitutions et de mcanismes de marchaptes assurer la conciliation de ces antagonismes qui touchentles prix et les rendements des actifs, les chances, la liquiditdes engagements, les prises de risque Ainsi, partir des dpts vue ou court terme de leurs clients, les banques peuventaccorder des crdits long terme ou raliser des investisse-ments de portefeuille. La transformation financire porte sur leschances mais aussi sur la nature des risques assums vis--visdes emprunteurs. Le rle essentiel des institutions financires,les banques en particulier, mais aussi de lensemble des marchsdactifs montaires ou financiers, est de redistribuer les attributsdes capacits et des besoins de financement.

    Cette allocation des ressources est assure selon deux moda-lits, lorigine dune distinction cl entre la finance indirecte etla finance directe.

    Finance indirecte et finance directe

    La fonction financire peut exiger une transformation deschances, des montants unitaires ou des risques qui ncessite

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX10

  • lentre en scne non pas dun interface mais dun intermdiairequi dcompose le circuit financier : lagent ayant des capacits definancement lui confie ses avoirs, indpendamment de laffecta-tion finale que lintermdiaire jugera bon de leur accorder, etce dernier assurera le financement des emprunteurs. Il y a l unprocessus de finance indirecte qui superpose deux relationscontractuelles et assure une fonction dite de transformationfinancire. Cette activit permet de dgager une marge dinter-mdiation pour loprateur qui se livre ces oprations, unebanque le plus souvent. La marge dintermdiation financiredpend videmment des taux dintrt pratiqus avec lesprteurs et les emprunteurs, mais elle est affecte par lincerti-tude. Dabord, parce que les taux dintrt pratiqus ne sont pasncessairement fixes et peuvent voluer au gr des conditionsmacroconomiques. Mais aussi parce que lon est dans uncontexte risqu et que les emprunteurs peuvent savrerdfaillants.

    Les prteurs potentiels et les candidats au financementpeuvent aussi confronter directement leurs exigences sur unmarch en changeant des liquidits contre des actifs finan-ciers qui prennent la forme de titres de proprit sil sagitdactions, ou de reconnaissances de dettes si des obligationsmatrialisent la transaction. Dans les deux cas, le fournisseur deliquidits percevra une rmunration, soit fonction de la renta-bilit future de lentreprise par le jeu du versement de divi-dendes, soit fixe de faon contractuelle en termes dintrts.Pour autant, les dtenteurs de ces titres conservent la possibi-lit de se dfaire de leurs avoirs financiers en les revendant ult-rieurement. Cette confrontation directe des agents capacit et besoin de financement ncessite linterface doprateurs spcia-liss qui fournissent de linformation et assurent la ralisationdes changes. Ce service est rmunr au moyen dune commis-sion, mais contrairement lintermdiation bancaire la rela-tion contractuelle nengage pas, alors, linstitution financire, enparticulier en cas de dfaut de lemprunteur.

    Sur les marchs dactifs, on distingue habituellement lesmarchs montaires, qui traitent des oprations financires chance courte, dont le remboursement doit intervenir au plustard douze mois, et les marchs financiers proprement dits,sur lesquels les engagements vont bien au-del dune anne et

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 11

  • concernent le long terme. Deux compartiments coexistent :dune part, un march primaire, sur lequel sacquirent des titresnouvellement mis, actions ou obligations, des conditions desouscription explicitement dfinies au moment de la mise surle march ; dautre part, sur le compartiment secondaire, lestitres pralablement acquis peuvent tre revendus tout au longde leur dure de vie et font lobjet dune cotation. Sur le marchsecondaire, les variations du prix des titres, et donc les tauxdintrt pour les obligations, expriment les tensions entre loffreet la demande, et ltat gnral de lconomie.

    La figure 1 synthtise le rle des marchs financiers et lesmcanismes respectifs de lintermdiation bancaire et de lafinance de march.

    Figure 1. Une schmatisation de la finance directeet de la finance intermdie

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX12

  • Il faut cependant noter que cette distinction binaire entrelintermdiation bancaire et la finance de march ne corres-pond quimparfaitement la ralit daujourdhui. Les banquesont diversifi leurs ressources en mettant elles aussi des titres,les certificats de dpts, qui alimentent leurs crdits ou leursinvestissements financiers. Elles peuvent galement crer de lamonnaie en accordant des crdits, non pas en les adossant mca-niquement aux dpts disponibles, mais en octroyant des prtsex ante, avant de rechercher ex post les ressources en trsorerieque ces crdits peuvent exiger. Et surtout, sont apparus desinvestisseurs institutionnels (SICAV, fonds communs de place-ments, hedge funds lchelle internationale [Boubel etPansard, 2004]) qui collectent de lpargne par mission de titresavant de rallouer ces ressources en acqurant dautres actifsfinanciers, des actions ou des obligations. Cest l, en quelquesorte, une intermdiation de march.

    Tant la finance indirecte que la finance directe assurent unefonction dallocation des fonds prtables en arbitrant entre desrendements et des risques, et en donnant un prix cet apparie-ment en fonction de la raret des capacits de financement, delampleur des besoins de financement et des risques de recouvre-ment des crances que suscite chaque relation contractuelle.

    Choix financiers individuelset allocation efficiente des ressources

    Si lon se situe maintenant sur un plan microconomique, etdonc du ct des agents individuels, quils soient prteurs ouemprunteurs, les marchs financiers permettent dassurer lagestion de leur patrimoine, autrement dit de leur portefeuillefinancier.

    Les choix de portefeuille des agents conomiques

    lactif du portefeuille financier de chaque mnage figurentdes liquidits, des placements court ou moyen terme sous laforme de livrets dpargne, dactions, dobligations, de produitsfinanciers collectifs de type SICAV Au passif apparaissent lesdiverses formes dendettement vis--vis des organismes de crdit

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 13

  • ou encore, pour les entreprises ou les tats, sous la forme de titrescomme les obligations, les bons du Trsor, ayant fait lobjetdune acquisition par un tiers sur les marchs financiers. Quantaux critres qui expliquent la composition des portefeuilles, ilsrecouvrent les prfrences de chaque agent en termes de matu-rit, de liquidit et, surtout, ils rvlent un arbitrage entre rende-ment et risque, autrement dit un choix de portefeuille.

    En se portant acqureurs dun actif financier, les mnagesrecherchent en effet une rentabilit venant compenser la pertedusage, ou le pouvoir dachat immdiat, de leurs liquidits. Maisen mme temps ils assument un risque de rendement car lavaleur de march dune obligation et donc le taux dintrt relqui lui est attach peuvent voluer. Quant au rendement duneaction, il dpendra des cotations futures mais aussi des divi-dendes qui seront verss en fonction de la profitabilit veniret de la sant financire future des entreprises. En revanche, enconservant leurs avoirs sur un compte bancaire ou sur un livretdpargne, les pargnants minimisent ce risque tout en accep-tant un rendement plus faible, voire une rmunration nomi-nale nulle, le plus souvent, pour les avoirs montaires vue.

    Ce raisonnement peut tre tendu aux engagements sous-crits par les emprunteurs. En sendettant taux fixe et courtterme dans un contexte de taux relativement bas, les entreprisesminimisent leurs charges financires immdiates mais encou-rent le risque de voir les taux futurs augmenter et de devoir serefinancer des taux plus levs. Quant aux mnages, dsireuxdinvestir dans limmobilier par exemple, ils ont le choix entredes emprunts taux fixes, dont le cot direct ne variera pas toutau long de la priode damortissement, et des emprunts tauxdintrt variables, indexs sur les taux futurs, dont le niveaupourra ventuellement augmenter.

    En ce sens, toutes les dcisions financires des agents cono-miques sapparentent des arbitrages entre, dune part, le cotdes financements ou le rendement des placements et, dautrepart, tout un ensemble de risques ou dopportunits : risque dedfaut, risque de taux dintrt, risque de prix de march Plusles risques seront levs, plus les rendements devront ltre gale-ment en intgrant ce que les conomistes appellent une primede risque.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX14

  • Engageant lavenir, les choix financiers des agents cono-miques mettent ncessairement en jeu des relations deconfiance, quassurent partiellement ltablissement de contratsou lintroduction de garanties, et, surtout, qui dpendent deleurs anticipations. Celles-ci rpondent de multiples dtermi-nants et portent tout autant sur la conjoncture macrocono-mique de demain, linflation future, le climat boursier que sur lasolvabilit escompte des emprunteurs ou la capacit des tats rpondre leurs engagements Do limportance de la liqui-dit des titres ou des marchs, qui nest rien dautre que la capa-cit des dtenteurs dactifs financiers de rcuprer sans dlai etsans perte en capital leur mise initiale.

    Ainsi, la multiplicit des instruments et des marchs finan-ciers rpond la diversit des critres retenus par les agentsconomiques dans leurs choix de structures de portefeuilles, tant lactif quau passif. Dans le mme temps, ces choix individuelsinfluencent la dtermination des taux de rendement et partici-pent lallocation des ressources au sein de lconomie.

    Taux dintrt et allocation des ressources

    Les dcisions financires individuelles suscitent des tensionsque les marchs doivent ajuster en faisant varier les prix desactifs changs ou les taux dintrt pratiqus. Placs gale-ment sous linfluence des politiques montaires menes par lesbanques centrales, les taux dintrt refltent en effet la raretrelative des fonds prtables et la prise de risque des investisseurs.Mais, ce faisant, les marchs financiers participent lallocationdes ressources et influent sur lactivit conomique.

    En arbitrant entre les rendements et les risques, tant sur lesmarchs dactifs, via la finance directe, qu travers lintermdia-tion financire, les systmes financiers slectionnent les affecta-tions de fonds prtables en fonction des anticipations deremboursement et donc sur la base de la fiabilit conomiquedes oprations ou des agents qui en bnficient. Fondes sur unerationalit individuelle, ces dcisions prennent, in fine, unedimension plus globale en privilgiant tel ou tel secteur dacti-vit jug porteur, telle ou telle entreprise dont la stratgiedinvestissement fait lobjet dune valuation positive de la partdes marchs, et, linverse, en dcourageant celles ou ceux jugs

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 15

  • financirement moins fiables ou moins prometteurs. Celasopre en imposant des spreads (carts de taux), en loccur-rence des taux dintrt plus levs, voire en rationnant laccsaux financements pour certains agents conomiques.

    Dans ces conditions, le fonctionnement efficient des marchsfinanciers, leur capacit traiter linformation pertinente et la traduire en taux de rendement ou dintrt, tout ceci estsuppos contribuer lefficience de lallocation des ressourcesdont dispose une conomie. La libralisation ayant touch lesmarchs financiers, depuis une vingtaine dannes, a dailleurst justifie par le souci dassurer une allocation optimale desfonds prtables vers les usages conomiquement les plus appro-pris, les marchs tant supposs arbitrer au mieux entre lesopportunits dinvestissement et les alas de la vie cono-mique, contribuant ainsi la croissance. On verra plus loin quecette hypothse est loin dtre toujours avre lchelleinternationale.

    Enfin, en participant la dtermination des cours boursiersou des taux dintrt, mme si ces derniers rpondent aussi auxorientations des politiques montaires, tout au moins courtterme, les marchs financiers interfrent avec la dynamiquemacroconomique densemble, tant par les effets directsquinduisent le volume et le prix de largent sur les dcisions deconsommation et dinvestissement, que par linformation queces prix vhiculent auprs de lensemble des agents conomiquesqui les intgrent dans leurs anticipations.

    Les spcificits de la finance internationale

    premire vue, les marchs financiers internationauxsemblent constituer une simple extension internationale desmarchs financiers domestiques, en permettant de collecter etdallouer les capitaux disponibles lchelle de la plante, et nonplus lintrieur des frontires nationales. Peut-on dire, alors,que louverture des marchs financiers domestiques des opra-teurs trangers constitue le seul caractre distinctif des marchsfinanciers internationaux ? En apparence seulement.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX16

  • Les raisons de la coexistencede lintermdiationet de la finance de march

    Le clivage entre finance directe etfinance indirecte a t introduit parGurley et Shaw [1960] qui distinguaientde faon tranche les financements parle crdit bancaire et les financementspar mission de titres. Cette classifica-tion binaire est sans doute moins perti-nente aujourdhui car on est enprsence dune double forme dinter-mdiation : dune part, lintermdia-tion bancaire traditionnelle, partransformation dactifs et crationmontaire ; mais, dautre part, linter-mdiation de march qui superposechez les mmes intermdiaires unemission dactifs, souscrits par les par-gnants, et lacquisition dautres actifs,mis par les investisseurs finals, entre-prises ou Trsor public, par exemple.Dans cette intermdiation de march,dont lexpansion depuis une vingtainedannes a t beaucoup plus soutenueque celle de la finance directe strictosensu, les banques commerciales nesont plus les seules intermdier lesfinancements. Elles doivent dsormaisassumer la concurrence, dans ce rle,des banques daffaires, des compa-gnies dassurances et des organismesde placements collectifs, de type fondsde pension ou hedge funds lchelleinternationale. Lintermdiation demarch permet toujours aux par-gnants primaires de satisfaire leursexigences de liquidit, soit en acqu-rant des titres trs court terme (certi-ficats de dpts, billets de trsorerie),soit en recourant en cas de besoin auxmarchs secondaires sils dtiennentdes actifs financiers plus long terme.Quant aux banques, elles conserventune fonction de garantie de liquidit en

    jouant souvent, pour les plus impor-tantes dentre elles, un rle de teneurde march pour tout un ensembledactifs, ce qui les conduit se portercontrepartie oblige en cas de ventesmassives.

    Quoi quil en soit, cest en rfrenceaux fonctions et aux critres defficiencegouvernant les systmes financiers quedoit tre explique la coexistenceactuelle de lintermdiation et desmarchs de capitaux : raliser une allo-cation efficace des ressources en mini-misant les cots oprationnels, assurerla compatibilit intertemporelle desdcisions dpargne et dinvestisse-ment, produire une assurance de liqui-dit malgr les alas de la conjonctureconomique, permettre une redistribu-tion des risques en fonction des prf-rences et des aptitudes des agentsconomiques.

    Si lon se trouvait dans un universconomique de concurrence pure etparfaite, dnu de cots de transac-tion, pleinement prvisible, ce que lesconomistes appellent une situation demarchs complets, les intermdiairesfinanciers nauraient aucune raisondtre. Il serait plus simple et surtoutmoins onreux pour les prteursprimaires dacqurir directement auprsdune infinit demprunteurs finals lestitres qui correspondent leurs prf-rences en termes de rendements,dchances, de risques, de liquiditEt les agents besoin de financementse trouveraient dans une situationsymtrique, certains de trouver desinvestisseurs jugeant attractives leurspropres exigences dendettement et lespotentialits de leurs investissementsMais la ralit conomique est bien pluscomplexe et lexistence de lintermdia-tion financire rpond justement unensemble dimperfections, en particu-lier dans le domaine de la distribution

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 17

  • de linformation et de la rpartition desrisques ou des attributs de la liquidit[Plihon, 1998 ; Scialom, 2004].

    Parmi les facteurs justifiant linterm-diation financire figure dabord la mise profit dconomies dchelle. En trai-tant de volumes financiers trs levs enprovenance ou destination de clientsen grand nombre, les banques acc-dent des cots unitaires de collecte oude prts (cots oprationnels, cots dengociation ou de recherche dinforma-tion) plus bas que ceux qui simpose-raient aux agents individuels, quilssoient prteurs primaires ou emprun-teurs finals, dans des contrats bilat-raux nous sur des marchs. De mme,grce leur taille, les intermdiairesfinanciers peuvent plus facilementdiversifier leur portefeuille, tant lactifquau passif, et donc mieux rpartirlensemble des risques (risque decontrepartie, risque de taux, risque deprix dactifs) inhrents lactivitfinancire.

    Ensuite, au cur des contrats finan-ciers figure la gestion des asymtriesdinformation, lies au fait que lesagents besoin de financement ontgnralement plus dinformation surleur propre situation, et sur leurspropres intentions, que nen possdentles cranciers ventuels. Selon les tho-riciens des asymtries dinformation,cela peut avoir deux consquences : desslections adverses, conduisant choisirex ante les metteurs les plus risqus enfixant les primes de risque des niveauxtels que seuls les dbiteurs poursuivantles projets les plus aventureux, ou ceuxdont la situation financire est la plusdgrade, sont prts les accepter ; dessituations dites dala moral condui-sant certains emprunteurs, ex post, dcider de ne pas pleinement respecterleurs engagements contractuels, ce quiexige un surcrot de contrle et de

    surveillance aprs que le financement at accord ou lacquisition dun actifralise. Or, les banques disposent icidun avantage comparatif vis--vis desmarchs financiers dans la mesure oelles grent les moyens de paiements etaccdent une information prive tout fait privilgie, en temps continu, surla situation financire de leurs clients, cequi permet de rduire les asymtriesdinformation, de crer des relations deconfiance mutuellement profitables etsexprimant dans la dure.

    Sur un autre plan, les banques ontun avantage concurrentiel danslattribut de liquidit quelles offrentaux prteurs primaires, la fois causede lassurance sur les dpts quellessont statutairement tenues de sous-crire et en raison de leur appartenance un systme bancaire hirarchis qui,dans chaque conomie, se trouvechapeaut par une banque centralepouvant exercer, si ncessaire, unefonction de prteur en dernier ressorten prsence dune panique ou dunefaillite bancaire.

    Enfin, lintermdiation financire estseule mme de rpondre auxexigences de transformation des carac-tristiques des fonds prtables, sur leplan des montants unitaires, deschances, des types de taux (fixes,variables), tout en rendant possible lefinancement de certains agents cono-miques dont le poids global dans uneconomie peut savrer tout fait signi-ficatif sans atteindre individuellementune taille critique, sans prsenter unelisibilit ou une fiabilit suffisantes, lesrendant ligibles aux financements demarchs.

    Chaque modalit de financement adonc ses avantages et ses inconv-nients, et il semble bien que lesmarchs et les intermdiaires soient

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX18

  • aujourdhui bien plus en symbiosequen comptition.

    Les marchs offrent la possibilit deplacer facilement des titres pour lesmetteurs dont la signature estreconnue et qui rpondent desexigences de taille ou de risque relative-ment standardises. Mais cela exclutobjectivement nombre demprunteurs,notamment en labsence dun marchsecondaire dactions ou dobligationsdune certaine profondeur et de nature assurer une liquidit minimale. Enrevanche, les intermdiaires peuventrpondre des besoins spcifiques enassurant du sur-mesure, tant du ct desdposants que sagissant des emprun-teurs. Les marchs offrent trs certaine-ment des rendements financiers pluslevs que les intermdiaires, neserait-ce quen raison de labsencedinfrastructures et de charges dinter-mdiation. Mais ils peuvent savrerdfaillants dans lvaluation et le moni-toring des risques de dfaut, tout enlaissant planer un risque dilliquidit oude dvalorisation dun portefeuille detitres pour les investisseurs, face lcla-tement dune bulle spculative ou enprsence dun krach.

    Ces facteurs expliquent que, dansune ralit financire infiniment pluscomplexe que lunivers thorique desmarchs complets de concurrence pureet parfaite, on observe de faoncombine, des doses diffrentes selonles pays, une intermdiation bancaire

    stricto sensu, une intermdiation demarch et une finance de march. Dansle paradigme dominant des systmesfinanciers, selon lexpression de Allen etGale [2000], les mnages richesse peuleve confiaient plutt leurs actifs des intermdiaires, qui eux-mmestaient plutt spcialiss dans le finan-cement des firmes de taille moyenne,tandis que les mnages les plus aiss oules entreprises les plus importantesaffectaient plutt leurs capacits finan-cires sur les marchs, l o les grandesentreprises et les tats avaient lhabi-tude de placer leurs titres. En revanche,dans le paradigme mergent dessystmes financiers, la plupart desmnages transfreront leurs avoirs toute une palette dintermdiairesfinanciers (banques, compagniesdassurances, fonds de placements)qui investiront sur des marchs (actions,obligations, drivs) o les grandesfirmes placeront leur papier, seules lesentreprises de petite tail le et lesmnages continuant bnficier descrdits bancaires.

    En permettant aux intermdiairesdlargir leurs sources de financementet leurs opportunits de placements, lesmarchs financiers sont devenus pourlessentiel des marchs dintermdiairesfinanciers, bien plus que des marchsde finance directe o se trouventconfronts les prteurs primaires et lesemprunteurs finals.

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 19

  • Les euromarchs

    Ds la fin du XIXe sicle, et au dbut du XXe, la place de Londres,la City, tait au cur de trs importants mouvements interna-tionaux de capitaux, en or et surtout en livres sterling, aveclEurope continentale ou le reste du monde. Mais au sens propre,il ne sagissait pas doprations seffectuant sur des marchsfinanciers internationaux mais plutt sur des marchs domes-tiques ouverts des oprateurs trangers. En revanche, compter des annes 1960, apparaissent des marchs de capitauxspcifiquement internationaux, mieux connus sous le vocabledeuromarchs.

    Cest notamment la suite de ladoption par les tats-Unis,entre 1963 et 1965, dune srie de mesures rglementairesdestines limiter la rmunration des dpts terme en dollarset, surtout, freiner les sorties de capitaux hors du territoireamricain, que se dveloppent en Europe de nouveaux marchsfinanciers, les euromarchs. Des oprations de prts-empruntsen dollars peuvent ds lors tre assures par des banquesinstalles lextrieur des tats-Unis. La spcificit des euro-marchs repose donc sur la dissociation entre la monnaie utiliseet la localisation de linstitution bancaire qui assure le prt oureoit le dpt. Ainsi, un eurodollar nest-il rien dautre quundollar dpos hors des tats-Unis.

    Ces marchs, initialement limits lEurope, do lexpres-sion deuromarchs, ont ensuite essaim dans le monde entier,en Asie ou au Proche-Orient notamment, mais ils fonctionnentdirectement lchelle mondiale par lintermdiaire dun rseaude communications lectroniques entre les banques spcia-lises dans cette activit, qualifies deurobanques, permettantla confrontation instantane de lensemble des oprateurs de laplante. Quant la ralisation des changes, elle intervient aumoyen de jeux dcritures, de transferts scripturaux entre lesplaces financires o se ngocient ces oprations euromontaireset le pays dmission de la devise utilise. Un eurodollar dposauprs dune banque de la City aura ncessairement une contre-partie auprs du systme bancaire amricain, sous la forme dunavoir chez une banque implante New York par exemple.

    Les euromarchs se prsentent en consquence comme desmarchs spcifiquement internationaux en ce sens quils se

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX20

  • superposent aux marchs domestiques et obissent des rglesde fonctionnement propres, mme si des interdpendancessubsistent en matire de formation des taux dintrt. Les opra-tions deurodpt ou deurocrdit chappent en effet la plupartdes contraintes rglementaires (rserves obligatoires, assurancessur les dpts) qui simposent aux oprateurs sur les marchsdomestiques, principalement parce quelles nexercent aucuneinfluence directe sur la masse montaire locale.

    Notons que lon regroupe sous le vocable deuromarch deuxtypes dactivits, les unes relevant de la finance indirecte etmettant en uvre un processus dintermdiation bancaire inter-nationale, les autres engageant un processus de finance directepar le jeu de lmission deurotitres.

    Toutefois, des oprations de financement peuvent treralises lchelle internationale hors des euromarchs. Tel estle cas si une banque accorde des crdits en sa propre monnaie des non-rsidents, donnant ainsi naissance des transfertsinternationaux de fonds. Il sagit l du segment tranger desmarchs domestiques, distinct des euromarchs. Il en est demme pour les financements titriss lorsquun pays mergent,par exemple, place des obligations en dollars New York ou eneuros Francfort.

    Mais la spcificit des oprations financires internationalesne tient pas seulement aux caractristiques propres des marchssur lesquels elles sont ralises. Les mouvements de capitaux, quien quelque sorte transitent sur les marchs financiers internatio-naux, ont galement pour fonction de financer les dsqui-libres de balances de paiements et de pallier, dans chaqueconomie, les carts entre les niveaux dpargne et dinvestisse-ment lchelle macroconomique.

    Au-del des marchs, les mouvements internationaux de capitauxet lquilibre macroconomique

    En prsence dobstacles aux transferts dpargne lchelleinternationale (situation dautarcie, rglementations restrictivesou contrles des changes ou des capitaux), seuls les marchsfinanciers domestiques pourraient assurer lajustement entre lescapacits et les besoins de financement dune conomie natio-nale. En revanche, ds que la mobilit des capitaux est autorise,

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 21

  • des dcisions de transfert dpargne ou dendettement peuventtre prises, soit sur les segments trangers des marchs finan-ciers domestiques, soit encore sur les marchs internationaux decapitaux.

    Ces flux internationaux de capitaux rpondent lvidence des dterminants microconomiques, de type rendementsescompts ou risques encourus, auxquels ragissent les emprun-teurs ou les investisseurs intervenant sur les marchs internatio-naux. Mais dans le mme temps ils contribuent lquilibremacroconomique en conomie ouverte en relchant lgalitncessaire entre lpargne et linvestissement domestiques ausein de chaque conomie. Essayons de le montrer partir de lamodlisation schmatique dune conomie nationale.

    On dfinit dabord les composantes du produit national, Y :Y {* C + I + X + G (1)Pour une anne donne, Y est le produit national, qui se

    dcompose en C et I les biens de consommation et les biensdinvestissement produits lchelle domestique, X les biensdomestiques exports et G les biens et services faisant lobjet dedpenses publiques.

    On dfinit ensuite la structure daffectation du revenunational R :

    R { C + S + M + T (2)R est le revenu national issu de la rmunration du facteur

    travail et du facteur capital, affect C et S la consommationet lpargne, M la dpense affecte aux importations, et T lesimpts prlevs par ltat.

    Pour des raisons comptables [Piriou, 2004], le produit nationalquivaut ncessairement au revenu national :

    Y { R (3)Donc, selon (1), (2) et (3) :C + I + X + G = C + S + M + T (4)Do lon tire :(X M) = (S I) + (T G) (5)Autrement dit, le solde de la balance des paiements courants

    est ncessairement gal au cumul de lexcs de lpargne surlinvestissement et du solde budgtaire.

    * Le signe { signifie quivalent .

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX22

  • Par ailleurs, lquilibre comptable de la balance des paiementsdune conomie scrit :

    (X M) (X K M K) DR { 0 (6)O XK reprsente les sorties de capitaux (augmentation des

    avoirs des rsidents sur les non-rsidents), MK les entres decapitaux (augmentation des avoirs des non-rsidents sur les rsi-dents) et DR la variation des rserves de change. En changesfixes, les interventions des banques centrales expliquent quecelles-ci augmentent en prsence dun excdent courant oudentres nettes de capitaux, et diminuent dans le cas inverse.

    Si lon raisonne, pour simplifier, en changes flexibles, il ny aplus dintervention de la part des banques centrales, DR = 0, etlon a :

    (X M) (X K M K) { 0 (7)Par consquent :(X M) { (X K M K) (8)Et donc :(X M) > 0 B (X K M K) > 0 (9)Autrement dit, en changes flexibles, un excdent courant est

    ncessairement combin des sorties nettes de capitaux. De lamme manire, un dficit courant doit ncessairement trefinanc par des entres nettes de capitaux :

    (X M) < 0 B (X K M K) < 0 (10)Si lon revient lquilibre macroconomique en conomie

    ouverte et en changes flexibles, selon (5) et (8), on a :(X M) = (S I) + (T G) = (X K M K) (11)Par consquent :(S I) + (T G) > 0 B (X M) > 0 B (X K M K) > 0 (12)Un excdent dpargne se traduit ncessairement par un exc-

    dent des paiements courants qui saccompagne de sorties nettesde capitaux. Inversement, un dficit dpargne correspond undficit des paiements courants qui exige des entres nettes decapitaux pour assurer lquilibre global des paiements avecltranger :

    (S I) + (T G) < 0 B (X M) < 0 B (X K M K) < 0 (13)En changes fixes, ou en changes flexibles impurs, selon (5) et

    (6), on aura :(X M) = (S I) + (T G) = (X K M K) + (DR) (14)

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 23

  • Et donc :(S I) + (T G) > 0 B (X M) > 0B (X K M K) + (DR) > 0 (15)(S I) + (T G) < 0 B (X M) < 0B (X K M K) + (DR) < 0 (16)Un excdent courant peut se traduire par des sorties nettes

    de capitaux et/ou par une augmentation des rserves tandisquun dficit courant peut tre financ par des entres de capi-taux et/ou une diminution des rserves.

    En changes fixes, on peut toutefois avoir des combinaisonsparadoxales si un excdent courant est associ des entresnettes de capitaux, ce qui se traduit alors par une augmenta-tion accrue des rserves, ou bien si un dficit courant saccom-pagne de sorties de capitaux, ncessitant alors des ponctions plusimportantes sur les rserves de change. En effet, selon (5) et (6),on peut crire :

    (S I) + (T G) > 0 B (X M) (X K M K) > 0B (DR) > 0 (17)(S I) + (T G) < 0 B (X M) (X K M K) < 0B (DR) < 0 (18)Cette schmatisation des conditions dquilibre macrocono-

    mique en conomie ouverte permet de comprendre pourquoi lesmouvements de capitaux obissent en fait deux logiques. Ilstraduisent videmment, dans une statistique de balance despaiements, les innombrables dcisions individuelles de prts etdemprunts qui sexpriment sur les marchs financiers interna-tionaux et qui rpondent des choix de portefeuille. Mais dansle mme temps, les entres ou les sorties nettes de capitaux sontindissociables de la situation macroconomique externe dunpays ou dune zone montaire dans le cas de lEurope, ce quijoue travers le taux de change, les taux dintrt, le niveaudactivit conomique, ou bien les anticipations sur ces mmesvariables, autant de dterminants qui influencent les investis-seurs et les emprunteurs internationaux dans leurs dcisions.

    Une double spcificit doit donc tre retenue propos desmarchs internationaux de capitaux. Dune part, on ne sauraitles confondre avec le segment tranger des marchs financiersdomestiques. Les euromarchs ont dvelopp des produits finan-ciers spcifiques. Ils disposent dune vritable autonomie etchappent largement au contrle des banques centrales ou des

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX24

  • carts entre pargneet investissement,dsquilibres courantset mouvements internationauxde capitaux :la situation des principalesconomies dveloppeset des pays mergentsdans les annes 1990-2003

    On peut vrif ier sur la srie degraphiques regroups ci-dessous larelation qui stablit entre lcartpargne-investissement et le solde despaiements courants (en % du PIB),pour un ensemble de pays ou dezones, de 1990 2003 : tats-Unis,Japon, zone euro, Chine, pays mer-gents hors Chine et Japon, et, enfin,Amrique latine hors Mexique.

    Le cas de lconomie amricaineest videmment le plus frappant : saufen 1991, le taux dpargne (pargne/PIB) amricain est systmatiquementinfrieur au taux dinvestissement(investissement/PIB), et cet cartcroissant se traduit par une aggrava-tion constante du dficit courant, quiatteint prs de 5 % du PIB en 2003.

    Pour des raisons symtriques, lessurplus dpargne du Japon engen-drent des excdents courants tout aulong de la priode (de lordre de 3 %en 2003), tandis que la zone euro setrouve, le plus souvent, proche delquilibre pargne-investissement,avec cependant trois annes de dficitdpargne, synonymes de dsqui-

    libres courants : en 1991, 1992 et2000.

    En ce qui concerne la Chine,au-del des niveaux dpargne oudinvestissement tout fait excep-tionnels, puisquils avoisinent les 45 %du PIB contre seulement 15 25 %pour les tats-Unis, le Japon et la zoneeuro, le taux dpargne est excden-taire depuis 1994. Sy ajoutent desentres de capitaux sous la formedinvestissements directs, pourenviron 46 milliards de dollars en2003, et conformment aux condi-tions dquilibre macroconomiqueen conomie ouverte, cette situation,en changes fixes, suscite des augmen-tations de rserves de change, hauteur de 117 milliards de dollars en2003.

    La situation des pays mergentsdAsie ou dAmrique latine est pluscontraste : la crise asiatique, aprs1997, se traduit par une chute destaux dinvestissement qui engendrednormes excdents courants, de8,5 % du PIB en 1998, et de 5 % 6 % dans les annes 2000 ; pour lesmergents latino-amricains, horsMexique, de 1992 2001, lpargnedomestique ne permet pas definancer la totalit de linvestissement,ce qui se traduit par des dficits rcur-rents des paiements courants, avantque la situation ne sinverse en 2002et 2003, grce une forte remontedu taux dpargne, de 14,9 % en2001 plus de 20 % en 2003.

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 25

  • Graphique 1. tats-Unis : Investissement, pargne et solde courant(en % du PIB)

    Sources : OCDE, CDC IXIS

    Graphique 2. Japon : Investissement, pargne et solde courant(en % du PIB)

    Sources : OCDE, CDC IXIS

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX26

  • Graphique 3. Zone euro : Investissement, pargne et solde courant(en % du PIB)

    Sources : OCDE, CDC IXIS

    Graphique 4. Chine : Investissement, pargne et solde courant(en % du PIB)

    Source : EIU

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 27

  • Graphique 5. mergents dAsie hors Chine et Japon :Investissement, pargne et solde courant(en % du PIB)

    Source : EIU

    Graphique 6. Amrique latine hors Mexique :Investissement, pargne et solde courant(en % du PIB)

    Source : EIU

    Les trois graphiques suivants illus-trent le mode de financement externedes conomies dficitaires ainsi que letype dallocation de lpargne dispo-nible quassurent les mouvements inter-

    nationaux de capitaux partir des paysexcdentaires.

    On observe clairement la captationde lpargne mondiale quoprelconomie amricaine, grce aux afflux

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX28

  • dinvestissements directs entre 1997et 2001, et surtout, sans interruptiondepuis 1994, sous la forme dinvestisse-ments nets de portefeuille (de lordre de300 400 milliards de dollars en2002-2003), ce qui permet de financerle gigantesque dficit courant amricain.

    Tout au long de la priode, la Chineet les pays mergents latino-amricainsbnficient des investissements directstrangers parmi les plus importants, suivispar les mergents asiatiques entre 1997et 2001. Du ct des exportateurs decapitaux long terme, on retrouve leJapon, mais aussi la zone euro.

    Sagissant des investissements deportefeuille, cest lensemble de laplante, en dehors de lAllemagneen 2001 et 2002, qui finance lconomieamricaine et sa croissance, avec une

    place toute particulire occupe par lespays asiatiques disposant dexcdents debalance courante, le Japon bien videm-ment, mais aussi les mergents asiatiquesdepuis 2000.

    Enfin, on peut observer sur le derniergraphique limportance des rserves dechange, pour lessentiel en dollars,quaccumulent, nouveau, les pays asia-tiques excdent dpargne, en loccur-rence le Japon et la Chine, mais aussi lesconomies mergentes dAsie aprs lacrise de 1997.

    Telle est donc la fonction des marchsfinanciers internationaux, mais aussi desmarchs de capitaux domestiques acces-sibles aux investisseurs trangers, quedassurer lquilibre pargne-investisse-ment lchelle mondiale par le jeu destransferts internationaux de capitaux.

    Graphique 7. Investissement direct net(en milliards de dollars)

    Source : FMI

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 29

  • Graphique 8. Investissement net en portefeuille(en milliards de dollars)

    Sources : FMI, EIU

    Graphique 9. Variations des rserves de change(en milliards de dollars)

    Sources : OCDE, CDC IXIS

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX30

  • gouvernements. Dautre part, les mouvements internationaux decapitaux, dont une large proportion transite sur ces marchs, nersultent pas seulement des stratgies de portefeuille des inves-tisseurs internationaux. Ils rpondent galement des dtermi-nants macroconomiques et lon ne saurait les dissocier de lacarte des dsquilibres des paiements courants au sein delconomie mondiale.

    Oprations de changeet gestion des risques internationaux

    La fonction particulire du march des changes

    Les oprations financires voques jusquici relvent toutesdune logique de prt-emprunt. Cest videmment le cas delintermdiation bancaire mais on retrouve cette caractristiquesur les marchs dactifs. Quand les agents capacit de finance-ment acquirent un titre, de fait ils prtent des liquidits pourune priode donne, qui peut tre illimite sil sagit duneaction, tandis que les metteurs de ces actifs, de leur ct,empruntent ces liquidits. Au sein dun pays donn, toutes cestransactions mobilisent les moyens de paiement usuels et sontrgles en monnaie nationale, par virements bancaires, et doncpar de simples jeux dcritures. Si ces oprations mettent enprsence des agents conomiques appartenant des zonesmontaires ou des pays distincts, et qui disposent, ds lors,davoirs liquides ou de besoins de financement en diffrentesmonnaies, alors des conversions sont ncessaires par le jeudachats et de ventes de devises.

    Telle est la fonction spcifique du march international deschanges que dassurer ces oprations dachat-vente de devises,tant pour permettre la ralisation doprations financires inter-nationales que, tout simplement, pour assurer les rglementsissus du commerce international. La matrialisation des paie-ments seffectue par le jeu de virements internationaux, partransferts scripturaux sur des comptes bancaires localiss ltranger. Du coup, les banques occupent un rle fondamentaldans le fonctionnement du march des changes. Cest auprsdelles que les agents conomiques (entreprises, investisseurs

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 31

  • internationaux, tats) transmettent leurs ordres dachats ou deventes de devises, quelles que soient leurs motivations. Ce sontles banques qui organisent et animent le march des changesstricto sensu, qui est un march interbancaire fonctionnant lchelle de la plante et sur lequel les cambistes (les traders) necessent de passer des oprations pour des montants consid-rables, soit pour le compte des banques qui les emploient, soit aunom de leurs clients. Ce sont les banques, enfin, qui assurent,en quelque sorte, la livraison des devises en crditant (pour ladevise achete) et en dbitant (pour la contrepartie vendue, enune autre monnaie) les comptes bancaires, en monnaie natio-nale et en devises, de leurs clients ou de leurs partenairesbancaires lchelle internationale, que lon dnomme lescorrespondants. Le dnouement des oprations intervient deuxjours plus tard pour les transactions au comptant, et au-del, trois mois, six mois, voire plus, pour les oprations dites terme,mme si toutes les conditions (taux de change, montant, locali-sation des crdits et des dbits) sont fixes initialement.

    Ce march, qui est trs certainement le plus important dumonde au regard des volumes changs chaque jour, na pasdquivalent au plan national ou au sein dune union montairergionale comme la zone euro. Cest un march spcifiquementinternational.

    Le prix auquel se ralisent ces changes nest rien dautre quele taux de change et, l encore, la tension entre les achats et lesventes de devises, par exemple de dollars contre euros, donneranaissance des fluctuations sur le march des changes. Mais cetaux de change prsente un statut tout fait particulier. Cest la fois un prix de march, issu chaque instant des ordresdachats et de ventes transmis par une infinit dagents cono-miques lchelle plantaire, et cest en mme temps unevariable macroconomique essentielle qui met en jeu la compti-tivit dune conomie ou lemploi. Les discussions sur lvolu-tion du taux de change de leuro vis--vis du dollar, depuis lacration de la monnaie europenne en 1999, en tmoignentaisment. Cela explique en tout cas que les pouvoirs publics(gouvernements, banques centrales) ne puissent se dsint-resser de ce march et quils y interviennent, en achetant ouen vendant des devises par lentremise de leurs proprescambistes, afin dinfluencer la dynamique des taux de change.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX32

  • Ces interventions de soutien des banques centrales peuventprsenter un caractre obligatoire, par exemple au sein dunemarge de fluctuation, comme tel fut le cas dans le systmemontaire europen, ou relever de dcisions discrtionnaires.

    Les marchs de gestion des risques internationaux

    Toute activit conomique se trouve expose des risquesquand les consquences dune dcision, en matire dinvestisse-ment ou de choix financiers par exemple, sexpriment dans ladure et sont fonction de variables qui ntaient pas connuesau dpart. Il faut donc se livrer des prvisions, susceptiblesdtre dmenties par les alas de la vie conomique, qui se trou-vent alors la source de gains inattendus ou au contraire depertes imprvues. Tel est particulirement le cas linterna-tional car les entreprises doivent alors affronter des situationsbien plus complexes que sur le march domestique, autant dansle domaine du commerce international quen ce qui concerne lesplacements ou les financements internationaux.

    On distingue ainsi plusieurs types de risques internationaux.Le risque de dfaut, ou le risque de crdit pour les tablisse-

    ments bancaires, rsulte de lincapacit dans laquelle peut setrouver un partenaire tranger dhonorer ses engagements ou derespecter les dlais contractuels dune transaction commercialeou financire. Au-del dune dfaillance microconomique, cettesituation peut aussi rsulter dun choc macroconomique oupolitique lchelle dune conomie tout entire, par exempleen prsence dune crise financire grave suscitant une pnurie dedevises. On parle alors dun risque-pays.

    Le risque de taux dintrt nest pas spcifiquement un risqueinternational, mais il le devient lorsque des investisseurs grentun portefeuille multidevises ou si des emprunteurs sadressentaux euromarchs et sendettent en devises. Les variations de tauxdintrt sur les marchs internationaux peuvent en effet crerdes pertes en capital (encadr), des charges financires suppl-mentaires ou, linverse, engendrer des cots dopportunit,selon que les engagements contractuels des cranciers ou desdbiteurs portent sur des taux dintrt fixes ou variables, etselon que les taux montent ou diminuent.

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 33

  • Variation du taux dintrt et cours des obligations

    Une obligation est un titre de crance qui donne le droit de recevoir un revenu,sous forme dintrts, pendant sa dure de vie. Soit une obligation X, achete1 000 euros, qui donne le droit de recevoir 100 euros chaque anne pendantquinze ans. Le taux dintrt attach cette obligation est donc de 10 %.Supposons que le taux dintrt augmente. Par exemple, les nouvelles obliga-tions Y, prsentant les mmes caractristiques (chance, risque), rapportent200 euros pour un investissement de 1 000 euros. Cela signifie que le tauxdintrt attach cette nouvelle mission est de 20 %. Si le dtenteur de lobli-gation X cherche la revendre sur le march secondaire, il ne trouvera personnequi accepte de lacheter plus de 500 euros : en effet, cette obligation procuretoujours un flux annuel dintrts de 100 euros, et le seul moyen pour que le tauxdintrt que procure X ne soit pas infrieur celui quassure Y est que le droitde percevoir ce revenu sachte 500. Ainsi, X et Y ont le mme taux dintrt de20 %.

    Cet exemple simple montre que le cours des obligations sur le march secon-daire varie en sens inverse du taux dintrt sur le march primaire : lorsque letaux monte, le cours baisse, ce qui induit une perte en capital pour les dten-teurs dobligations qui avaient t mises pralablement. Inversement, le coursdes obligations monte quand le taux dintrt baisse.

    Le risque de change rsulte des consquences que les varia-tions de taux de change peuvent induire sur la valeur enmonnaie nationale des actifs et des engagements en devises quepossde une entreprise ou une institution financire. Si lamonnaie nationale sapprcie, le poids en monnaie nationale delendettement en devises se trouvera allg, mais linverse ilsera accru en prsence dune dprciation. En revanche, le dten-teur dactifs en devises verra saccrotre la valeur relle de sonportefeuille si sa propre monnaie se dprcie, et enregistrera uneperte de change si elle sapprcie. La position de change, quinest rien dautre que la diffrence entre crances et engage-ments en une certaine devise pour une chance donne, doitdonc tre gre, surtout dans le contexte des changes flottantsqui prvaut entre les grandes monnaies depuis plus de trenteans. Cette gestion du risque de change peut videmmentsexprimer de faon dfensive en recourant systmatiquement une facturation en monnaie nationale, condition de pouvoirlimposer aux partenaires trangers, mais elle se traduit surtoutpar une politique de couverture contre les effets des variations detaux de change.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX34

  • Ainsi, ct du march des changes et des marchs interna-tionaux de capitaux, se trouvent adosss des marchs o lesrisques de taux dintrt ou de taux de change se grent encontinu, soit en utilisant des techniques usuelles, sur le marchdes changes terme ou en recourant des clauses dindexa-tion par exemple, soit encore en faisant appel des produitsfinanciers sophistiqus, tels les futures, les swaps de taux ou lesoptions (toutes ces techniques sont expliques dans les chapitressuivants). Ce qui schange alors nest rien dautre que le risquede variation dun cours ou dun taux, des conditions prd-finies, indpendamment des obligations contractuelles issues desoprations financires initiales. Ces marchs sont qualifis demarchs drivs car la valeur des actifs qui sy trouvent changsdpend, ou drive, du prix dun autre actif, appel le sous-jacent.

    Typologie des marchs financiers internationaux

    Au terme de cette prsentation liminaire du rle des marchsfinanciers lchelle internationale, il nest pas inutile deproposer une caractrisation de lensemble de ces marchs. Letableau 1 distingue les trois grands types de marchs financiersinternationaux, en loccurrence les euromarchs, le march deschanges et les marchs drivs, et les associe aux fonctions quechacun deux permet dassurer : les oprations de prt-emprunten euromonnaies ; les achats-ventes de devises ; la couverturedes risques de change ou des risques de taux dintrt.

    Tableau 1. Les diffrentes catgoriesde marchs financiers internationaux

    Types doprations Catgories de marchs

    Prts et emprunts internationaux Euromarchs

    Achats et ventes de devises March des changes

    Gestion des risques de change ou de taux Marchs drivs

    Dans le tableau 2, on dcline les divers types de crdits quepeuvent accorder les banques internationales en fonction de la

    LE RLE DES MARCHS FINANCIERS LCHELLE INTERNATIONALE 35

  • monnaie utilise et selon que les emprunteurs sont des agentsconomiques rsidents ou non rsidents. Ce double critrepermet dtablir la distinction entre les crdits domestiques, lescrdits trangers et les eurocrdits, ces derniers tant les seuls relever de la catgorie des marchs de capitaux internationaux.

    Tableau 2. Les divers types de crdits bancaires internationaux

    Emprunteur rsident Emprunteur non rsident

    En monnaie nationale Crdits domestiques Crdits trangers

    En devises trangres Eurocrdits

    Enfin, sur le tableau 3, apparaissent les trois compartimentsdes marchs internationaux de titres en fonction des mmescritres, la devise utilise et lorigine des metteurs de titres. Tantles rsidents que les non-rsidents peuvent procder des euro-missions obligataires ds lors quelles seffectuent en eurode-vises, et donc en monnaie trangre sur une place financiredonne, en dollars et Londres, le plus souvent.

    Tableau 3. Les diffrents segments des marchs internationauxde titres

    Emprunteur rsident Emprunteur non rsident

    En monnaie nationaleMarchs des missionsdomestiques

    Marchs des missionstrangres

    En devises trangres Marchs des euro-missions

    Le prochain chapitre va nous permettre daller au-del de cesconsidrations gnrales en prsentant de faon plus dtaille lefonctionnement des marchs internationaux de capitaux.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX36

  • II / Les marchs internationaux de capitaux

    Depuis une vingtaine dannes, les innovations ont tnombreuses sur les marchs financiers internationaux et ellesont trs certainement attnu la porte des clivages tradi-tionnels entre les financements intermdis et la finance demarch, entre le court et le long terme, entre les emprunts tauxfixes et les crdits taux variables Dautant quune trs largepart des financements internationaux se trouve aujourdhuiadosse des swaps ou des oprations lies de couverture oudassurance qui transforment les conditions initiales de prts oudemprunts. Toutefois, la distinction de base entre lintermdia-tion bancaire internationale et les missions deurotitres resteoprationnelle, et nous la retiendrons ici.

    Dans cette prsentation des marchs internationaux de capi-taux, on sintressera principalement aux euromarchs, lesegment tranger des marchs financiers domestiques noffrantquassez peu dlments distinctifs. Lobjectif nest pas doffrirune analyse technique des pratiques financires internationales,mais de prsenter au non-spcialiste le fonctionnement de cesmarchs et des produits financiers utiliss, tant pour assurer lestransferts dpargne que pour couvrir les risques de taux ou derendement.

  • Finance indirecteet intermdiation bancaire internationale

    Les ressources des eurobanqueset le march des eurocrdits

    Les eurobanques fondent leur activit sur la collecte de liqui-dits en euromonnaies qui leur permettent daccorder des euro-crdits. Examinons par consquent les produits financiers offertspar lindustrie eurobancaire.

    Sagissant tout dabord des ressources euromontaires, deuxinstruments sont utiliss du ct des dposants. Les dpts terme sont caractriss par une maturit dtermine ex ante, deun jour cinq ans en thorie, mais ils recouvrent pour lessen-tiel des oprations de sept jours six mois. Cet instrument estdsormais supplant par les certificats de dpts euromon-taires qui se prsentent comme des titres mis par les euro-banques pour une srie dchances, tout en restant ngociables chaque instant sur un march secondaire. Cette liquidit descertificats de dpts justifie dailleurs que les taux dintrt versssoient lgrement infrieurs ceux des dpts terme. Les certi-ficats de dpts sont mis au coup par coup, ou bien partranches de 15 100 millions de dollars, pour une valeurunitaire moyenne de 20 000 dollars, pouvant aller jusqu50 000 dollars. Au total, 50 % des ressources des eurobanquesont une chance infrieure six mois.

    Du ct des emprunteurs, les eurocrdits syndiqus (offerts pardes syndicats de banques) ont longtemps constitu linstru-ment principal de financement international moyen ou longterme (pour une dure suprieure dix-huit mois, pouvant allerjusqu quinze ans). Sur la base des eurodpts, ou encore enempruntant des ressources auprs des autres eurobanques, lesprts sont accords par des syndicats bancaires pouvantcomporter jusqu une centaine de banques sous la directiondun chef de file. Dune dure moyenne de cinq ans et dunmontant typique de 500 millions un milliard de dollars,pouvant mme atteindre 10 milliards de dollars dans des casexceptionnels (jumbo euro-loans), les eurocrdits syndiqus sontaujourdhui principalement accords des socits multinatio-nales ou des emprunteurs venant des pays les plus dvelopps,

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX38

  • notamment loccasion du financement des fusions-acquisi-tions. Diffrentes formules sont utilises, allant des eurocrditstraditionnels, pouvant inclure des diffrs damortissement, auxeurocrdits renouvelables court terme (revolving credit, stand-bycredit) qui sapparentent des autorisations de dcouvert eneurodevises.

    Les eurocrdits sont lorigine de plusieurs types de risquespour les eurobanques, au-del des problmes traditionnels dedfaillance ventuelle des dbiteurs, dnomms risques decontrepartie. Ils exigent en effet, le plus souvent, un processusde transformation dchances qui suppose que les euro-banques puissent rgulirement attirer des dpts court terme,ce qui nest jamais garanti, et surtout quelles puissent le faire des conditions comparables celles accordes aux emprunteurs,ce qui, l encore, nest nullement assur.

    Ce double risque de liquidit et de taux dintrt justifie lexis-tence dun trs important march interbancaire des eurodevises,connu galement sous le nom de march montaire interna-tional (IMM, international money market).

    Le march montaire internationalet les taux dintrt directeurs (LIBOR, LIBID)

    Les eurobanques interviennent en permanence sur le marchmontaire international, multipliant les transactions de prts etdemprunts en eurodevises pour diverses chances. Ce marchinterbancaire reprsente ainsi prs de 50 % du total de lacti-vit en euromonnaies. Il permet aux eurobanques de disposerdune liquidit garantie dans le cadre de leurs oprations detransformation au profit de la clientle demprunteurs et de grerleurs positions de trsorerie en devises au gr de lvolution destaux dintrt ou des taux de change. Une prsence de tous lesinstants est dailleurs indispensable, pour les eurobanques, sielles souhaitent rester informes et, surtout, tirer profit des varia-tions extrmement rapides des taux dintrt pratiqus sur cemarch.

    LIMM fonctionne de gr gr et les ngociations respectentdes rgles trs prcises : en contactant un confrre, une euro-banque nindique pas si elle souhaite prter ou emprunter maisprcise seulement la devise et lchance qui lintressent ; son

    LES MARCHS INTERNATIONAUX DE CAPITAUX 39

  • interlocuteur lui rpond sous la forme dune fourchette de deuxtaux dintrt, lun sur les dpts (bid rate), le second sur les prts(offer rate), qui lengagent pour un montant unitaire, le plussouvent dun million de dollars, pendant quelques minutes ;cest linitiateur de cette confrontation qui dcide alors si unetransaction est noue ou non, aux taux annoncs, en indiquantsil est prteur ou emprunteur. Les taux varient ainsi tout au longde la journe en fonction de la pression relative des dpts et desprts interbancaires.

    Le march interbancaire international assure en fait unedouble fonction : il participe la redistribution des risques detaux dintrt ou de liquidit quassume chaque intermdiairebancaire lorsquil se livre un processus de transformation ; cestgalement sur ce march que se dterminent les taux dintrtdirecteurs de lensemble des transactions sur eurodevises, et enparticulier le fameux LIBOR (London interBank offered rate), quiexprime, pour une srie dchances, le taux auquel soprentchaque jour les emprunts entre eurobanques.

    la fin 2002, la Banque des rglements internationaux (BRI)valuait environ 12 000 milliards de dollars les encours brutsdtenus par les eurobanques sur les euromarchs, dont6 500 milliards correspondaient des positions interbancaires.

    Le rle du LIBOR, et de son pendant pour les dpts, le LIBID(London interBank interest deposit), sest entour dun relief toutparticulier lorsque se sont dvelopps une vaste chelle leseurocrdits syndiqus taux flottant. Le taux dintrt de ceseurocrdits est alors recalcul chances donnes, sur la basedu LIBOR affrant leurodollar trois mois par exemple, auquelsajoute un pourcentage supplmentaire, appel la marge, ou lespread, en fonction de la cote de lemprunteur et donc desrisques de dfaillance assums par leurobanque. Les spreadspeuvent aller jusqu 500 points de base (+ 5 %) pour lesemprunteurs les moins fiables, mais reprsentent seulement10 points de base (+ 0,10 %) pour ceux bnficiant des meilleursratings de la part des agences de notation (le fameux AAA).

    Cette formule permet aux eurobanques de transfrer le risquede taux aux emprunteurs. Une telle technique peut entraner desconsquences dsastreuses sur le service de la dette des paysmergents en priode de forte hausse des taux dintrt, on la vuau dbut des annes 1980 au moment de la crise de la dette des

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX40

  • pays latino-amricains, et plus rcemment lors de la crise mexi-caine de 1994-1995.

    Sils fonctionnent de faon autonome, les euromarchs restentcependant relis aux marchs domestiques par le jeu des arbi-trages auxquels se livrent nombre doprateurs. Ainsi, les tauxdintrt amricains conservent un rle directeur dans la dter-mination des taux pratiqus sur leurodollar. Les carts quisubsistent rpondent des obstacles la libre circulation descapitaux, des cots de transaction non identiques et, surtout,aux diffrences de contraintes rglementaires pesant sur les euro-banques, dun ct, et les banques domestiques, dun autre ct.

    Toutefois, sauf cas exceptionnel, les eurobanques offrenttoujours des taux de dpt et de prt sur leurodollar plusattractifs que les banques amricaines, mme si ces cartssamenuisent.

    Autant dire que les marchs deurodevises, malgr leur spci-ficit, constituent les segments extraterritoriaux de lensembledes prts-emprunts en une certaine monnaie, le dollar occupantencore, aujourdhui, un rle dominant, suprieur la moiti dutotal des encours.

    Finance directeet marchs internationaux des euro-obligations

    ct des marchs deurodevises, sur les marchs euro-obli-gataires se ngocient, smettent et schangent des titres obliga-taires en euromonnaies, autrement dit auprs de centresfinanciers distincts de lespace de circulation de la devise utilise.Cela permet l encore de se soustraire lessentiel des rglemen-tations, par labsence de prlvement la source sur les intrtsverss par exemple.

    Les euronotes

    On distingue plusieurs catgories deuro-obligations, souventdnommes dans les milieux financiers sous leur vocable anglo-saxon deurobonds ou encore deuronotes pour les chances lesplus courtes.

    LES MARCHS INTERNATIONAUX DE CAPITAUX 41

  • Les euro-obligations taux constant, pour lesquelles lescoupons verss par les metteurs afin de rmunrer les investis-seurs restent constants tout au long de la dure de vie des notes,jouent un rle dominant, de lordre de 70 % du total. lorigine,ces euro-obligations correspondaient des maturits leves, dequinze ans en moyenne. Dsormais, les maturits moyennes deseuro-missions taux fixes sont de lordre de six ans et leurmontant est habituellement de lordre de 300 millions dedollars. Des euronotes sont galement mises pour des chancescourtes, allant de sept trois cent soixante jours, sans impli-quer, le plus souvent, aucune garantie de placement de la partdes oprateurs qui assurent le montage de lmission. Ces euro-notes sapparentent aux billets de trsorerie ou au papiercommercial amricains dont lusage sest dsormais gnralis.

    Il est galement possible dmettre des euronotes taux flot-tants. Ces euro-obligations taux variable, les floating rate notes,ou encore les FRNs, sont indexes sur un taux de base, le LIBORpar exemple, auquel sajoute une marge, et portent le plussouvent sur une chance de cinq sept ans. Ces obligationssont mises en petites coupures pour des montants unitaires delordre de 15 000 dollars et ont connu un vif succs dans lesannes 1980. On a mme vu se dvelopper les notes perp-tuelles taux flottants. Il sagit l dobligations sans chancede remboursement, linstar des actions. Lavantage de cetinstrument tenait au fait que dans certains pays on lassimilait des capitaux propres condition que les coupons puissent ne pastre verss si le paiement de dividendes ntait pas assur.

    Citons galement les missions dobligations dites couponzro qui noccasionnent aucun versement dintrts. Les fluxdintrts sont en fait actualiss la date dmission et dduitsdu prix de lancement, le remboursement seffectuant au pair, lchance. Ce type de produit intresse principalement lesinvestisseurs originaires de pays o les intrts perus sontdavantage imposs que les plus-values en capital, au Japon parexemple.

    On utilise aussi les euro-obligations convertibles qui combi-nent deux volets : une reconnaissance de dette portant intrt,fixe ou variable, et le droit de convertir ce titre en actions ordi-naires de la socit mettrice, voire en obligations taux fixe,ce qui permet de limiter le risque de taux pour lacqureur

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX42

  • deuro-obligations taux variable. En fait, ces euro-missionspeuvent inclure les options les plus diverses, quil sagisse deprvoir des remboursements anticips, au gr de lemprunteurou de linvestisseur selon les cas, de laisser le choix de lamonnaie de remboursement ou de multiplier les options deconversion, par exemple avec les euro-obligations avec warrantsconvertibles en actions de la socit mettrice, voire en obliga-tions dautres socits. Certaines euro-missions prvoientmme que lon puisse ngocier sparment les titres reprsen-tatifs de lemprunt et les coupons. Tel fut le cas de certainsmontages assurs par Merril Lynch et connus sous le nom deTIGRs, les treasury investment growth receipts, et de leurs quiva-lents de Salomon Brothers dnomms, non sans humour laussi, les CATS, les certificates of accrual on treasury security.

    Sy ajoutent les obligations trangres lorsque les missionssont proposes en monnaie nationale sur un march financierdomestique par des non-rsidents. On parle de yankee bonds siles titres sont placs aux tats-Unis ou de samoura bonds silssont mis au Japon. Mais les obligations trangres restentsoumises aux rglementations nationales et ne relvent donc pasde la catgorie des eurotitres.

    Les emprunteurs privs qui se livrent lactivit dmissionproviennent essentiellement des pays de lOCDE, hauteur de90 % des encours, et sont constitus de trs grandes entre-prises, multinationales ou nationales, et aussi, plus rcemment,de certaines banques internationales qui y ont trouv une sourcede financement compltant utilement les apports traditionnelsdes eurodpts ou du march montaire international. Il sagitdonc dexcellentes signatures prsentant des risques de dfail-lance tout fait limits. Sy ajoutent dsormais les empruntsmis par des tats mergents, ou bien par des metteurs privsbnficiant de leur garantie, et lon parle alors demprunts souve-rains. Lorigine des investisseurs est plus difficile dterminer.Au-del de certains gestionnaires de fortune ou des socitsmultinationales, les investisseurs institutionnels, dont les hedgefunds et les mutual funds, jouent un rle croissant et mnent unegestion trs active de leurs eurotitres, faisant rgulirement appelaux marchs secondaires pour recomposer la structure de leursportefeuilles lchelle internationale.

    LES MARCHS INTERNATIONAUX DE CAPITAUX 43

  • Les programmes dmission deurotitres

    Dans la vague dinnovation financire des annes 1980-1990,on a vu apparatre de nouvelles formules de financement, sortesdhybrides entre les eurocrdits et les eurotitres, avec lesprogrammes dmissions, connus galement sous le nom de faci-lits dmissions, instruments hybrides entre leurocrditsyndiqu et lmission deuronotes chance courte.

    Connues parmi les spcialistes sous divers acronymes, les NIFs(note issuance facilities), les RUFs (revolving underwriting facilities),ou les MOFFs (multiple option funding facilities), ces facilits recou-vraient des procdures permettant un emprunteur dmettrependant une priode dtermine, de cinq sept ans, des obliga-tions court terme (de trois mois un an) sur les euro-marchs, tout en bnficiant dun filet de scurit sous la forme,par exemple, dun accord de crdit renouvelable, un crditstand-by, venant se substituer au programme dmission si lepapier ntait pas souscrit, faute dinvestisseurs intresss, enprsence dune hausse des taux dintrt par exemple. Dansdautres formules, le syndicat bancaire qui assurait le montage delopration tait tenu dacqurir les euronotes. On parlait alorsdun engagement de prise ferme. Le cot de lemprunt augmen-tait cependant en fonction des difficults de placement rencon-tres sur le march.

    Qualifis, en franais, de facilits renouvelables prise ferme,ces programmes dmissions deurotitres avec garantie de sous-cription se sont fortement dvelopps dans les annes 1980, aubnfice le plus souvent demprunteurs souverains des pays lesplus dvelopps, avant de marquer le pas. Ils sont dsormaissupplants par les programmes dmission non garantis deuro-papier commercial court terme (dune chance de sept jours un an, pendant une priode de trois cinq ans) ou deuro-billets de trsorerie (dune chance dun an environ). Celaassure aux metteurs une trs grande souplesse dans la gestionde leurs besoins de trsorerie en devises, les programmes dmis-sions ntant pas ncessairement confirms, sans multiplier lesprocdures confies aux syndicats dmission et donc lescommissions qui leur sont associes.

    Dans cette formule, les banques internationales jouent nouveau un rle de syndication, cest--dire dinterface et

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX44

  • dingnierie financire, en recherchant pour le compte des met-teurs les investisseurs susceptibles dacqurir ces titres. Lavan-tage pour les emprunteurs est daccder, un horizon deplusieurs annes, des financements court terme en eurode-vises quils peuvent renouveler loisir, obtenant par l mmedes conditions moins onreuses, les taux dintrt court termetant infrieurs aux taux longs, sauf situation exceptionnelle.

    Notons que le fonctionnement technique des marchs deuro-titres est assez comparable celui des eurocrdits. Le placementdes obligations est assur par un syndicat dmission o inter-viennent dans un cadre trs concurrentiel les banques daffairesinternationales (investment banks, merchant banks). Tout en assu-rant lanonymat des souscripteurs, ces missions peuvent seffec-tuer sur plusieurs places financires en mme temps. Pour toutesles catgories deuro-obligations, la coexistence dun comparti-ment primaire, o sont mis et souscrits les nouveaux titres, etdun compartiment secondaire, qui fonctionne de gr gr,permet aux investisseurs, sils le souhaitent, de revendre leurstitres des oprateurs spcialiss, les market makers, qui seportent systmatiquement contrepartie et assurent ainsi la liqui-dit de tels placements. Il sagit l de traders spcialiss apparte-nant aux trs grandes banques daffaires oprant lchellemondiale : Barclays Capital Securities Ltd, Citigroup GlobalMarkets Ltd, Goldman Sachs International, Merril Lynch Inter-national, J.-P. Morgan Securities Ltd

    Fin 2002, les encours sur les eurotitres taient de lordre de9 200 milliards de dollars, dont 440 milliards pour les titres court terme et 8 760 pour les euro-obligations.

    Enfin, ct des marchs euro-obligataires, on doit voquerlexistence des marchs deuro-actions qui permettent des non-rsidents dmettre des actions libelles en eurodevises sur desplaces off-shore, assurant l encore une immunit fiscale ou rgle-mentaire aux metteurs. Mais ce segment ne reprsente quunepart encore secondaire, quoique fortement croissante, des finan-cements internationaux.

    LES MARCHS INTERNATIONAUX DE CAPITAUX 45

  • Les marchs dassurancecontre le risque de taux

    Lessentiel des changements intervenus sur les marchs inter-nationaux de capitaux depuis une vingtaine dannes a rpondu la volont des emprunteurs de sendetter aux conditions lesmoins onreuses tout en bnficiant dune flexibilit accruegrce aux financements courts renouvelables. Mais les risques detaux dintrt ont galement provoqu lapparition de nouveauxmarchs, organiss au sein dune Bourse ou fonctionnant de gr gr, sur lesquels ces risques font lobjet de garanties ou encorebnficient de couvertures dissocies des engagements souscritsau pralable. Paralllement cette vritable titrisation desrisques sont apparus des marchs tout fait singuliers, lesmarchs de swaps, o deux emprunteurs peuvent changer leursobligations contractuelles.

    FRA, forward-forward et drivs de taux

    Parmi les instruments dassurance contre le risque de tauxfigurent en premier lieu les contrats de garantie de taux,proposs exclusivement de gr gr. Un FRA (forward rate agree-ment) est un accord par lequel lune des deux parties sengage garantir la seconde un taux dintrt fixe, dans un avenirdonn. Ce nest pas un engagement de prt ou demprunt maisune assurance contre les fluctuations possibles de taux dintrt,disjointe dun acte demprunt taux flottant. Seule la diff-rence entre le taux garanti par le FRA et le taux du march pourrafaire lobjet dun paiement. Tout en rpondant au mme but,le forward-forward est un contrat demprunt (ou de prt) quipermet de fixer lavance le taux auquel cette opration seraralise avec une banque, dans trois ou six mois.

    Parmi les instruments optionnels, un cap, au sens littral, enanglais, une casquette et, par extension, la limite la plus haute,est un contrat permettant un emprunteur taux variable nonpas de fixer mais de limiter le taux dintrt effectivement versdans lhypothse o celui-ci viendrait slever. Moyennant unpaiement initial, la prime, ou le prix du cap rgl titre dfinitif,lacheteur dudit contrat dispose dune garantie contre la haussedu taux dintrt de rfrence au-del dun taux plafond, auquel

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX46

  • cas le vendeur du cap devra fournir la diffrence. En revanche, sile taux du march lchance contractuelle reste infrieur autaux plafond, aucun paiement ninterviendra. Fort logique-ment, plus le taux plafond est proche du taux courant aumoment de la ngociation, plus la prime sera leve. Un floorassure une fonction symtrique en permettant un investisseurdtre couvert contre une baisse des taux dintrt. Le collar, ausens littral, le collier et, par extension, lintervalle de variationdes cours ou le tunnel, obit au mme principe que le cap, une diffrence prs : cest une garantie, pour un emprunteur taux flottant, de payer un taux dintrt non pas infrieur ougal un taux plafond, comme prcdemment, mais comprisentre deux limites : si le taux flottant dpasse le taux plafond,lmetteur du collar versera la diffrence ; mais dans le casinverse, si le taux est plus bas que le taux plancher, cest lache-teur qui devra rgler lcart.

    Ces techniques sont coteuses et impliquent le versement decommissions ou de primes dautant plus leves que lincerti-tude est grande et que les spreads sur les emprunts sous-jacentssont eux-mmes importants. Mais elles ont connu un vif succs.

    Les marchs de contrats terme sur actifs financiers, lesfutures, rpondent aux mmes motivations. Initialement limitsaux marchs de matires premires, ces instruments ont ttendus aux marchs financiers internationaux dans lesannes 1970.

    Formellement, un contrat terme sur instrument financier estun engagement vendre ou acheter un montant dtermindun certain actif (devises, bons du Trsor, eurodollars, parexemple) une date et un prix fixs lavance. Dans le cas dela livraison future dun dpt deurodollars, le prix correspond un taux dintrt. Il sagit de contrats standardiss changsde gr gr, mais aussi sur des Bourses spcialises o rgne unedontologie trs prcise dfinie par une chambre de compensa-tion. Contre le versement dun dpt de garantie, un emprun-teur peut ainsi sassurer des conditions dune mission futuredeuronotes, quels que soient les taux pratiqus alors, envendant un contrat de livraison des actifs.

    Sur les marchs de contrats terme schangent des promessesde livraison future dactifs financiers des conditions fixes aumoment de la ngociation : montant, taux dintrt implicite,

    LES MARCHS INTERNATIONAUX DE CAPITAUX 47

  • chance standardise Lacheteur du contrat est un prteurpotentiel, le vendeur tant quant lui en position demprun-teur potentiel. Paradoxalement, si ces contrats permettent dedterminer lavance le taux dintrt dun placement ou dunendettement futur, la quasi-totalit des acheteurs ou desvendeurs de ces contrats nont aucune intention de satisfaire cet engagement, en prenant effectivement livraison de lactiffinancier concern. Leur seul objectif est de raliser une diff-rence de prix, une date future, en dnouant la vente ou lachatinitial au moyen dune opration en sens inverse qui seffectueraalors au prix dudit contrat cette date. Le profit, ou la perte,ralis loccasion de cet aller-retour rpond directement lvolution du taux dintrt enregistre dans lintervalle, etpermet de compenser le cot ou le gain dopportunit que lavariation du taux dintrt engendre sur le placement ou lendet-tement initialement projets.

    Ce rsultat sexplique par le fait que le prix dun contrat terme sur actif financier varie, par construction, en fonctioninverse du taux dintrt de lactif sous-jacent. Ce prix se dfiniten effet par la diffrence entre un indice 100 et le taux dintrtsur le sous-jacent, exprim sur une base annuelle. Ainsi,lorsquun contrat sur leurodollar trois mois, livrable parexemple en juin 2004, est cot sur le march des futures au prixde 96,45, cela signifie quil comporte implicitement un tauxdintrt annuel sur leurodollar trois mois de 3,55 %. Le prixdu contrat quivaut donc lindice 100 diminu du tauxdintrt sur leurodollar trois mois. En consquence, il importedacqurir un contrat si lon souhaite se prmunir contre unebaisse du taux dintrt. Cette baisse entranera en effet unehausse du prix du contrat et la revente de celui-ci dgagera unprofit permettant de compenser leffet de la baisse du tauxdintrt. De faon symtrique, on devra vendre un contrat afinde se protger dune hausse du taux dintrt, celle-ci signifiantune baisse du prix du contrat, et lachat de celui-ci produira unprofit de nature, l aussi, compenser leffet de la hausse du tauxdintrt. Le prix des futures variant tous les jours, il est cepen-dant procd des appels de marge correspondant aux pertes ouaux gains enregistrs au cours de chaque session par les dten-teurs de contrats.

    LES MARCHS FINANCIERS INTERNATIONAUX48

  • La couverture du risquede taux dintrtsur les marchs de futuressur eurodollars :un exemple

    Supposons quune entreprise anticipeen janvier 2005 un besoin de finance-ment en dollars pour le mois demai 2005. Le taux sur leurodollar estalors de 3 % mais on craint unehausse de nature renchrir le cotde lemprunt projet. Le chef dentre-prise peut en fait fixer le cot de sonemprunt en faisant appel au marchdes futures sur eurodollars. Il vend auprix de 97, soit 100 3, un ouplusieurs contrats si lemprunt envi-sag est un multiple de un million dedollars, dont lchance est au moinsgale mai 2005, soit, en loccur-rence, chance fin juin