Carnet d'Iran 2007 V 2

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Claire Afsâneh MARDOMI En chemin CARNET D’IRAN 2007 Éditions Déracontés

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CARNET D’IRAN 2007 Claire Afsâneh MARDOMI Éditions Déracontés 2 Aux chères âmes rencontrées sur mon chemin Regorgeant d’amour 3 4 CARNET D’IRAN 2007 Claire Afsâneh MARDOMI Éditions Déracontés 5 Illustration de la couverture : ? crédits ? Toutes les photos ont été prises par l’auteure. 6 Je suis Claire, je suis Afsâneh Afin de vous donner Là-bas un aperçu d’Ici. ! Je suis française, je suis iranienne J'ai décidé d'envoyer par mail 7

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Claire Afsâneh MARDOMI

E n c h e m i n CARNET D’IRAN 2007

Éditions Déracontés

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Aux chères âmes rencontrées sur mon chemin

Regorgeant d’amour

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Claire Afsâneh MARDOMI

E n c h e m i nCARNET D’IRAN 2007

Éditions Déracontés

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Illustration de la couverture : ? crédits ?

Toutes les photos ont été prises par l’auteure.

© Éditions Déracontés, 2010Déraconté[email protected]

ISBN :

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Je suis Claire, je suis Afsâneh

Je suis française, je suis iranienne

Lors de mon premier long voyage en Iran,

J'ai décidé d'envoyer par mail

mon carnet de voyage

Afin de vous donner Là-bas un aperçu d’Ici.!

La présente édition rassemble la série des mails envoyésdepuis l'Iran en France, à une liste de diffusion amicale,lors d’un séjour de 6 mois, du 2 février au 3 août 2007(sizdah e bahman 1385 tâ davazdah e mordâd 1386). Lesmails et leurs pièces-jointes ont été remaniés et mis enpages, avec le souci de garder l'esprit fraîcheur du texteécrit au fil de la frappe.

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Quel est ton métier ?

C'est un métier à tisser de tout petits liens!

Histoires de dire

Se tisse, s'y tisse, s'y trame tous les tissus

Couche de voile à effleurer

Mon travail entre trame et chaîne

Faire la navette d'Ici à Là-bas

Tisser de voix en récits

Mettre en tension les extrémités

Connecter à la soie d'araignée

Broder l'entre deux corps

Faire l'éloge de la couture, de la suture

Et file entre les doigts

L’anthropologie a été un des multiples points de départ demon chemin. Une pensée particulière aux « tout petitsliens » initiés par François Laplantine, lors de ces annéesde formation des perceptions. Une pensée également àtoutes les intenses rencontres entre humains curieux quim’ont portée et qui m’accompagne à chaque instant.

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Gourmandise essentielle

Je suis figue française. Je suis raisiniranien. Mi-figue, mi-raisin, je vis entièrementde figue et me nourris de raisin imaginaire.L'Iran ne m’a jamais été donné, ne m’estaucunement familier. Tout mon désir se tendvers ce fruit rêvé. Le jus de la vigne, vin etvinaigre m’enivre. Je suis gourmande desplaisirs de vie, parfois ponctués de pépinsquotidiens. L’appréhension de la découvertereste présente. Le raisin sera t'il réellementdifférent de celui de mes grappes de pensées ?

Mosaïque de soi

Au bord du premier long voyage dans lepays de mon père, j’ai le sentiment d’avoir par-couru mon chemin de vie à cloche-pied. Jesonge à une assise ancrée sur deux jambes, àune démarche traversant le monde, construisantmon ambivalence dans l’équilibre. Maman m’avait déjà portée en Iran dans sonventre gonflé. Et pourtant, je m’en vais denouveau vers l’inconnu. Ce désir de construirel'entre-deux a mis vingt-sept ans à seconcrétiser. C’est une renaissance Là-basmaintenant que je pousse. J’emmènerai en monsein l’amour maternel, en retour du paternel.

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SOMMAIRE

Vendredi 26 janvier 2007, 17h06Mail 0 _ Départ en Iran

Vendredi 9 février 2007, 10h55 Mail 1 _ Premiers pas

Samedi 3 mars 2007, 16h29Mail 2 _ Salam de Rasht

Samedi 17 mars 2007, 18h46Mail 3 _ Salam rashti

Lundi 19 mars 2007, 15h58 Mail 4 _ Campagne iranienne

Lundi 16 avril 2007, 8h27Mail 5 _ Nouvelle Claire en Iran

Mardi 15 mai 2007, 13h15Mail 6 _ Depuis les rizières

Lundi 18 juin 2007, 12h59Mail 7 _ Nouvelles du Gilân

Vendredi 29 juin 2007, 8h53Mail 8 _ Détails de la capitale et tendres visions

Lundi 16 juillet 2007, 12h43Mail 9 _ Gilân, Gilân, Gilân

Mardi 8 août 202007, 10h00Mail 10 _ Gilân et Iran, fin de ce voyage

Épilogue : Avant _ Pendant _ Après

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Je voyagerai principalement à Téhéran, la capitale del’Iran, ainsi qu’à Rasht, la capitale de la province du Gilânsituée au nord de l'Iran et au sud de la mer Caspienne.

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Date : Vendredi 26 janvier 2007, 17h06

Objet : Mail 0 _ Départ en Iran

Bonjour les amis,

Dans une semaine, je pars en Iran poursix mois. Je suis enfin prête à découvrir le paystant fabulé de mon père, à vivre une vieiranienne, avec ses odeurs, ses sons et sesfrissons.

Fil de trame

Vous êtes inscrits sur la liste de diffusionpar laquelle je donnerai de mes nouvelles dubord de la mer Caspienne. Vous constituez monfil d’Ariane, ma soupape virtuelle, un retourpossible du labyrinthe de vie. Je nouds monfoulard d’un double nœud, pour m’assurer queje n'échappe qu’à moi-même. Merci pour tousvos témoignages d'amour et d'attention, je voussens présents à mes côtés.

Bonne vie à vous en attendant de vous revoir.

Claire

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Dernier essayage dans la salle de bain, de ma « tenuede camouflage ». C’est la première fois que je me sensainsi désignée comme « femme ». Le hejâb m’enveloppede cette signification. Ce voile me collera t’il à la peau ?

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Date : Vendredi 9 février 2007, 10h55

Objet : Mail 1 _ Premiers pas

Kler ya Afsâneh ku ? Dar iran astand !

Où est Claire ou Afsâneh ? Elles sont en Iran !

- Téhéran est situé à 1148 m d'altitude, c'est uneville de douze millions d'habitants + UNE

- Un cinquième de la population iranienne amoins de trente ans + UNE

- 60 % de la population est citadine + UNE

Bise saveur pistache et eau de roses.

Claire pour vous. Ici c'est Afsâneh.

L'une ou l'autre me ressemble et me rassemble

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Dans le quartier où je réside, entre les mosquées sedressent des tours immenses… Image des quartiers richesdu nord de Téhéran.

La place de la révolution au centre de la ville, se réveilleaprès une nuit fraîche.

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Pause thé et pistaches avant de continuer à arpenter latentaculaire Téhéran.

En famille au restaurant proposant de la cuisinetraditionnelle. Nourriture de corps qui tient à cœur.

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Un « tapis repas » du vendredi, jour de repos, avec lesspécialités du nord : poisson blanc, légumes macérés dansle vinaigre, riz en gâteau gratiné, ragoût de plantesaromatiques, sauce à la grenade.

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Date : Samedi 3 mars 202007, 16h29

Objet : Mail 2 _ Salam de Rasht

Salam. Hâl e tun chetor ast ?

Santé. Comment est votre âme, votre être ?

Me voici dans le Nord de l'Iran pourquelque temps. Ma vie iranienne a réellementcommencé. Les démarches pour concrétisermon projet de recherche anthropologiquecommencent timidement à porter leurs fruits.

À Rasht, je loge dans un petitappartement de la famille. J'y habite presqueseule car « vivre seule » ici n'a pas le mêmesens que là-bas. Les voisins, l'épicier, lesconnaissances, la famille entière, via letéléphone et les visiteurs... tout le monde ici aune attention soutenue sur les faits et gestes decette fille non mariée qui a émit l'idée incongruede venir seule ici pour vivre et travailler. Pourl'instant j'arrive à trouver le côté positif d'un telsystème de surveillance, et j'espère que cela vadurer.

J'apprécie comme jamais les rares mo-ments où je peux -en guise dedéfoulement- danser la bourrée à trois temps surle tapis persan industriel du salon. Du métissagegrandeur nature entre espace et temps.

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Sur certains magasines étrangers pour Ici, lespages contenant des figures féminines ont étéméticuleusement recouvertes de marqueur noir,avant qu’ils puissent être diffusés ici.……..……

« La Liberté guidant le peuple » de Delacroixn’y a pas échappé. La Marianne révolutionnaire,la poitrine recouverte de feutre noir, branditbien haut son étendard...……………...………...

Je me demande qu’elle est la différence entreces caches misère et le foulard que je porte auquotidien.……………...……………………..…Pourrai-je me servir de ces voiles sans m’ydissimuler, pour me révéler à moi-même ?

………….………………………………………J’apprends que les voix chantées des femmessont également « à couvrir » en public. Le chantd'amour de ma cousine, murmuré dans lacuisine, ne sortira pas de la marmite de hash(préparation de soupe cérémonielle). Lors d’unevirée en voiture en famille, nous chantons NamNam (goutte à goutte), une chanson gilaki, dunord de l'Iran. La voiture m’apparaît soudaincomme un espace de liberté jusqu’alorsinsoupçonné. Au cœur de la ville, le chœur desfemmes de la famille y chante à TUE-TÊTE, lesvitres bien fermées.

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Pensées iraniennes

Quand vous vous déchaussez ou quevous vous rechaussez, si l'une de vos chaussuresest accidentellement posée sur l'autre, celasignifie Ici que quelqu'un pense à vous.

Je ne manque donc pas à chaque foisque j'ôte ou que j’enfile mes chaussures, de lesmettre l'une sur l'autre. Comment pourrai-jefaire autrement alors que je sais que vouspensez à moi ?Prenez bien soin, vous aussi, de vos escarpins.

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Tempête de neige et vendeurs d'oranges. Aujourd'hui ilfait grand soleil.

De la boutique de pâtisseries, je vous lance monbonjour sucré.

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Au bazar de Langarud, les hommes vendent le poissondebout en ligne. En face, hors champ, les femmes assisesvendent les légumes de leur jardin.

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Date : Samedi 17 mars 2007, 18h46

Objet : Mail 3 _ Salam e rashti

La vie dans cette grosse ville deprovince est devenue plus facile qu'elle nel'était dans la mégalopole de Téhéran. Ici onprend plus le temps d’être. les habitants sourientde mon accent.

Bien entendu, tout le quartier est aucourant de ma présence. Je suis la nesfeh-yekhâreji (l'étrangère à demi). Les habitantssourient de mon persan. Les chauffeurs de taxime prennent souvent pour une azerbaïdjanaise,soit disant à cause de mon accent, de ma peau etde mes yeux plus clairs. Il est étrange de voircomment les gens essayent de me définircomme venant d'un extérieur pas si éloigné queça, un ailleurs encore connu.

Malgré tous mes efforts, je ne passejamais inaperçue. J'ai même osé acheter unfoulard noir, croyant ainsi pouvoir me fondredans la foule des femmes citadines, très souventvêtues de couleurs sombres. Mais mon mètrequatre-vingt, mon imperméable trop grand, meschaussures rouges, mon foulard qui vire etchavire, me désignent comme un MonsieurHulot au féminin, en voyage en Iran. Aprèsavoir pris conscience d'une partie de l'ampleur

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de mon décalage vestimentaire et culturel,j'essaie d'en jouer comme je peux.

Les filles et les femmes me mangent duregard. Les hommes jeunes sont plus distants.Les femmes et les hommes plus âgéss'empressent de me poser question sur questionet de plaisanter avec moi.

Je ne réponds pas aux canons dela femme occidentale, tels que lesadolescents du quartier peuvent se la représenteret je sens un certain sarcasme des jeunesgarçons à mon égard. Cette perception estsûrement aussi déroutante pour eux.

Khodâ hafez azizam, Au revoir mes chers amis

Ghorban-e shoma! Je suis toute entière à vous.

J'espère qu'avec ces petites impressionsiraniennes vous arrivez vous aussi à voyager.

Formule de politesse, qui signifie littéralement « je mesacrifie pour vous ».

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De nombreuses blagues persanes serient des gilaks!, qui « sont ainsi la cibleprivilégiée dans l'espace iranien des blaguesethniques, comme le sont les Belges dans notretradition nationale. »!

Un Rashti! rentre chez lui et trouve sa femmenue. Il s'indigne.– Pourquoi es-tu nue ?Sa femme lui répond. – Tu ne me donnes pas d'argent pourrenouveler ma garde-robe. – Comment ? Réplique t-il, ta penderie estremplie de vêtements. Suis-moi. Il ouvre la penderie et en fait l'inventaire : unerobe, une robe, bonjour Monsieur, une robe,une robe, une robe.

Avec un père rashti [originaire du nord del'Iran] et une mère ch'timi [originaire du nord dela France] me voilà bien trop au nord de toutpour être sujet aux railleries, n'est-ce pas ?

Terme qui désigne les habitants de la région du Gilân.! Christian Bromberger, Récits facétieux, in Cahier de lalittérature orale n°20, 1986.!! Terme qui désigne les habitants de la ville de Rasht etpar extension, tous les habitants de la région du Gilân.

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Sur la carte du Gilân, la figue situe la ville de Rasht. Lapistache, la noix de cajou, le pois chiche etl'amande localisent quelques villages dans lesquels je suisallée voir des maisons traditionnelles construites en terre eten bois. D'un côté à l'autre de la région l’architecture, lesvêtements, la cuisine, les langues, ou la musique sont trèsdifférents.

Un peu d'amour. S'il n est pas vraiment possible del'exprimer publiquement, il est bien là. Sa présence se tracesur les murs.

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Prière du soir dans le salon pour la mère, pendant queles filles confectionnent des ballotins de fruits secs àdistribuer lors d’une cérémonie de la Nappe verte. Cettecérémonie donnée en l'honneur de l'Emâm Hossein,permet d'exaucer des voeux de santé, de bonheur, deréussite.

Châhâr shanbe suri : une semaine avant le nouvel an,les habitants allument des feux le soir, dans la cour desmaisons ou dans la rue. Ils sautent au dessus du feu pourchasser le mal accumulé durant l’année précédente etacquérir la force du feu pour l'année qui s'annonce.

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Sacrifice en remerciement à Dieu. Abattage et dépeçagedu mouton dans une cour d'immeuble de Rasht.

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Date : Lundi 19 mars 2007, 15h58

Objet : Mail 4 _ Campagne iranienne

Dobareh salam

Re-Bonjour

Je ne peux pas résister à l'envie que j'ai

de vous envoyer un peu de campagne. La natureest encore endormie, seuls les premiersbourgeons de cerisiers et de forsythias pointent.Bientôt ce sera l'explosion de couleurs. Tout lemonde attend maintenant le printemps avecimpatience et me promet que je vais voir leparadis.

Je vous donne à voir ces quelquesphotos pour que -comme moi- vous puissiezvous étonner du décalage saisonnier, visibleainsi seulement dans le nord de l'Iran… Et quevous puissiez aussi goûter à ce petit bout deparadis.

Mibusametun très très fort.

Je vous embrasse kheily kheily ziâd.

ClairAfsâneh

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Visions hivernales. Rizières au repos.

Une grand-mère du village de Lasheh prépare le thé.

Je vous envoie peu de photo de personnages car jetrouve toujours délicat de prendre des photos, alors que jene fais que passer. Heureusement cette grand-mère sait quesa photo sera admirée par mes amis de France.

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Une des nombreuses maisons traditionnelles,aujourd’hui délaissée, dans le village de Lasheh aunord-est du Gilân.

Une maison reconstruite et restaurée dans le site del'Écomusée du Patrimoine Rural du Gilân. Elle mesureenviron quinze mètres de hauteur.

Les architectures de la région sont spécifiques, ouvertespar des coursives, et des terrasses. Elles sont construitesuniquement en matériaux végétaux (bois et torchis).

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Je vous laisse deviner laquelle de ces deux jeunes fillesdu musée a revêtu des vêtements traditionnels et laquelletravaille en ville…

En êtes-vous bien sûr ?

Solution de l'énigme : Les vêtements traditionnels ne sont plus portés au

quotidien par les jeunes générations, mais seulement lorsde certaines occasions festives. Ces deux jeunes filles sontcitadines.

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Date : Lundi 16 avril 202007, 8h27

Objet : Mail 5 _ Nouvelle Claire de l’Iran.

Eyd shoma mobarak !

Bonne nouvelle année iranienne !

Ici nous sommes passés en 1386 depuis le21 mars dernier. Comme la plupart des Iraniens,je passe Noruz en famille. Pendant unesemaine, la frénésie des activités du pays seracomme suspendue. Les universités, lesinstitutions, les entreprises seront pour laplupart fermées. Il s'agit donc pour moi d'arriverà m'organiser de telle sorte que je puisse memettre à l'heure iranienne et profiter aussi decette faille spatio-temporelle !

Je me suis gardée pour l'instant, de parlerdes passages douloureux de mon voyage.J'essaie aujourd’hui un peu d'écrire pour lesdécrire. Deux mois et demi d'Iran déjà et je suisencore en permanence décontenancée par lequotidien d'Ici ! Comme prévu je vis unmoment de transition, de vide. Je m'attendais defaçon théorique à ce creux de vague, mais levécu pratique est plus difficile à traverser que sapensée.

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En Iran, je trouve un univers, une culture,une immense famille, des racines, une identité,dont je ne soupçonnais pas même l’existence.Ce pays me renvoie à des souvenirs qui ne sontpas miens, ce qu’aurait pu vivre mon père. Mavision, ma culture est celle de Là-bas. J'ai dumal à partager l'enthousiasme des gens qui Icime reconnaissent comme « fille de mon père »,me disent fille du pays et trouvent la raison demon soi-disant rapide apprentissage du persandans un patrimoine génétique iranien. Je pensealors aux heures passées à recopier les motsentendus, à essayer maladroitement de me fairecomprendre, à faire contresens sur contresens età me perdre à vouloir expliquer, avec mes troismots de persan que je ne préfère pas plus laFrance que l'Iran, pas plus Là-bas qu'Ici.

La concrétisation d’un projet derecherche est logiquement lente et dure à mettreen place et à réaliser. Impossible à l'heureactuelle, d'acquérir une certaine indépendancequi me permettrait de travailler de façonautonome. Personne ne s'attend à ma venue etencore moins les villageois. Personne ne veutprendre la responsabilité d'une fille non mariée.Personne ne comprend cette idée semble t’ilfarfelue de venir d’on ne sait où « de l’autrecôté », s’intéresser au quotidien rural d’Ici.Mais pas à pas sur mon chemin, je constaterétrospectivement que je ne recule pas, c'est

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déjà ça. Après moult tractations etpérégrinations, me voici autorisée à séjournerdans un village du centre du Gilân. Je meprépare à m’y acheminer dans quelques jours,pour une période d’un à deux mois. Enperspective : plantation du riz, cueillette du thé,élevage des vers à soie, dans un village de cinqcent habitants, relativement facilementaccessible en transport depuis Rasht.

Un rhume carabiné, attrapé à l’arraché, aparadoxalement fait baisser l'ampleur de monaccent et facilite pour mes interlocuteurs lacompréhension de mon persan. Je peux en effetenfin prononcer des  différemment des A, unpoint essentiel en persan. J'apprends des chansons pour m’imprégner demots. Lorsque je trouve le courage de chanteren persan à des persans, ou en gilaki au Gilân,je passe instantanément du statut d'invitée àcelui de fille de la maison. Ces espaces-tempsfulgurants remplis de grâce, me donnentl’énergie de la suite.

Je vous envoie à tous des bouquets depensées iraniennes printanières.

ClairAsfâneh

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Une nappe des sept signes est dressée dans chaquemaison à l'occasion de la nouvelle année. Les sept signessont symbolisés par des objets dont le nom commence enpersan par la lettre S : Sir ail, Sib pomme, Somagh épice,Samanu pâte à base de blé, Senjeh dattes chinoises, Sabzitouffe de graines germées (souvent des graines de blé),Sekkeh pièces de monnaie. Des œufs colorés y sontsouvent ajoutés, ainsi que des poissons rouges, un miroir,des bougeoirs, un exemplaire du Coran… Même si lesobjets se retrouvent, chaque nappe est particulière à unefamille. Certaines nappes sont très simples, d'autres plussophistiquées jusqu'à parfois être très « hétéroclites ». Aumoment de la nouvelle année, la famille se réunit autour dela nappe. Les visites se font en chassé-croisé entre jeuneset aînés. Ces derniers se doivent d’offrir des étrennes auxplus jeunes, des billets neufs dédicacés qui pourront êtreconservés en souvenir.

Sisdabedar : treize jours après la nouvelle année, toutela famille passe la journée hors de la maison pour chasserle mal accumulé pendant l'année. Les pousses de bléfraîchement germées sont nouées par les filles qui ont lesouhait d’être mariée dans l’année, avant d’êtres jetéesdans l'eau courante. Cette coutume se perpétue en ville etje vous laisse imaginer l'embouteillage de touffes deverdures qui encombrent les canaux le long des rues. Jevous laisse également apprécier la poésie de ces deuxcorps flottants dans un canal téhéranais.

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Une nappe de mariage très simple mais non dénuée decharme : avec pain de sucre, sucre cristallisé, miel, painsangak cuit sur lit de pierres, fromage de brebis, miroir,pièces de monnaie, petites sucreries, fruits secs,bougeoirs… Elle symbolise l'union dans la durée d'unhomme et d'une femme. Le mariage est un des temps lesplus forts de la vie iranienne. Il est difficilementcompréhensible Ici de pouvoir vivre une vie d'amourslibres comme Là-bas, ou d’être encore célibataire à latrentaine.

Un petit coucou de la balançoire, sur laquelle il fautruser d'astuce pour ne pas se laisser dévoiler de façonimpromptue, par le vent dans les voiles. Les superpositionsde tissu font baisser le seuil de mon audition, toujoursparasitée par les frottements des diverses couches sur lesoreilles.

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Toilettes pour femmes voilées. C'est écrit sur la porte.

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Date : Mardi 15 mai 2007, 13h15

Objet : Mail 6 _ Depuis les rizières

Bishim bijâr !

Allons aux rizières ! En gilaki

De retour en ville pour une petitesemaine, j'en profite pour vous envoyerquelques nouvelles. Je peux assez facilementavoir accès à Internet au village, mais j'aipréféré oublier pour quelques semaines latechnologie virtuelle.

Je suis accueillie au village chez unefamille. Le père et la mère sont agriculteurs, lessept enfants habitent en ville. Les fils travaillenten tant qu’ouvriers non qualifiés. Les filles sontmère au foyer. Pendant les périodes d'activitésintenses comme pour la plantation du riz, lesfilles de la maison et les belles-filles viennent àtour de rôle aider la mère et le père au travailagricole, suivant des tâches réparties enfonction des genres. Au Gilân, le repiquage duriz est effectué exclusivement par les femmes,alors que dans les provinces voisines leshommes repiquent aussi le riz. C’est notammentcette particularité qui m’attire ici.

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Vous devinez le décalage de toute mapersonne avec les gens du pays. Tout, depuismon habillement, jusqu'à ma façon de me tenir,de rire tout fort, de montrer sans le vouloir queje suis mal à l'aise, me désigne comme Pas-d'Ici.

J'ai dû acheter avec l'aide des filles de lafamille une jupe longue, une blouse à mancheslongues, et un pantalon lèger sous ma jupemettre, comme toutes les femmes. Ce qui n'estpas possible de faire deviner ici c'est le haut ducorps à partir des poignets et l'entre-jambeféminine qui va de la cheville jusqu'auxhanches. Considérez donc avec quelle liberté jesuis autorisée à remonter mes manches et monpantalon de façon parfois impudique Ici. Noussommes entre femmes, dans les rizières pourplanter le riz. Lorsque nous prenons le chemindu retour pour rentrer à la maison, je réajustemes vêtements de façon à ce que seule la peaude mes mains, de mes pieds et de mon visagesoit visible. L'habitude est vite prise et jemesure la chance que j'ai de pouvoir me baladerseule dans le village, dans cette tenue Icicorrecte. Ce qui ne serait peut-être pas possibledans tous les villages du reste de l'Iran.

Me voilà repartie pour un séjour de deuxà trois semaines dans ma famille d'accueil avantde vous donner d'autres nouvelles. Merci pourtoutes vos lettres qui m'attendent pour lemoment à Téhéran et qui ne sauraient tarder àtrouver leur destinataire.

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Je vous embrasse tous kheily ziâd.

Afsâneh pour IciClaire pour Là-bas

ouAfsâneh pour Là-basClaire pour Ici

Un petit coucou avec les enfants du village. (Le mondedes femmes et des enfants m’est accessible.)

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Autour d'un thé, les femmes découpent les sabzi :mélange de persil plat, de coriandre, de ciboule, d'ailet d'autres herbes du jardin, qui sont ciselées trèsfinement. Revenu dans l'huile, ce mélange seconserve plusieurs semaines et sert à la préparationd'omelettes aux herbes, de « ragoûts acides » etd’autres mets succulents.

Triage et épluchage des bâghâli : fèves, demultiples sortes et de multiples couleurs, servant à lapréparation de nombreux plats succulents.

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Voici une image de la plantation du riz telle qu'elle esteffectuée en ce moment quotidiennement, par une grandepartie des femmes des villages du Gilân. Si j'aieffectivement planté le riz en touriste pendant seulementdeux grosses heures, c'est pour me rendre compte combience travail est pénible. Les femmes sont toute la journée lespieds dans l'eau, le reste du corps courbé, exposé au soleil,à la pluie, au froid. Je ne m'étonne plus maintenant de voirnombre de vielles femmes courbées à l'équerre marcherainsi dans les rues de la province sans pouvoir se redresser.

La vie dans le village est loin d'être facile, sans être nonplus exempte de très bons moments. Le paradis que l'onm'avait promis avec l'arrivée du printemps au Gilân estune explosion de couleurs et de verdures. Un paradisfaçonné jour après jour et pousse à brin de riz par seshabitants.

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Date : Lundi 18 juin 07, 12h59

Objet : Mail 7 _ Nouvelles du Gilân

Saaaaalaaaaaaam !

Après une plus longue absenceépistolaire, voici enfin quelques nouvellesécrites et photographiques. « Tout va pour lemieux dans le meilleur des mondes possibles »(merci Voltaire), mais j'ai de plus en plus de malà supporter le poids des codes de conduitesd’Ici, qui lorsque je les ignorais ne m'affectaitmoins, ou pas de la même façon. Celasignifirait-il que j'ai dépassé le statut de touristeou d'invité ? Heureusement, je vis aussi desmoments de vie quotidienne au goût de"revenez-y". Les quelques moments de vie sélectionnés dansce carnet sont en partie représentatifs d'une vieauX quotidienS Ici. Ce point de vue donné àvoir ne peut reflèter toute la complexité et lesnuances de la vie sur place. Ce sont deséchantillons discutables et à discuter d'unevision de l'Iran, construite et déconstruitechaque jour.

Boos torsh o shirin Bises acides et sucrées

La typographie vous sonne un aperçu de l'accent rashti.

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Voici quelques activités effectuées par des hommesdans le Gilân, en équilibre de mon précédent mail quimontrait des activités féminines.

Récolte du thé avec la machine. Au contraire de lacueillette à la main plutôt féminine, la cueillette à la ma-chine est exclusivement masculine. La machine est portéede chaque côté des plants afin de couper la partie haute desarbustes de thé, c'est-à-dire les premières feuilles pousséesdans l'année ; les feuilles coupées sont ensuite souffléesdans deux énormes sacs de quatre à six mètres de long quisont vidés régulièrement. La récolte est ensuite vendue laplupart du temps à l'usine de transformation.

Boutique de Rudbâr au sud du Gilân : olives marinées,huile, torshi (légumes marinés dans du vinaigre).Lesboutiques d'olives se font le reflet du paysage de la région :des kilomètres carrés d'oliviers.

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Réalisations artisanales de tapis et nappes de feutre. Lemotif de laines colorées est recouvert de laine cardée. Letout serra ensuite mouillée d'eau bouillante, serrée dans untissu et tassé au pied pendant deux à trois heures.

Sieste après le repas du midi. Ici sur une chaise et unbanc, parfois à même le sol, sur la bande herbée deséparation des voies de circulation, dans les parcs, ouderrière un étalage… Cette forme de sieste publique estexclusivement masculine.

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Scène de plage au port d'Ânzali : les enfants se baignentensemble, les adultes se regroupent par famille ou pargenre sur la plage. L’espace de la plage me donne àressentir une sensation de liberté telle je n'en ai pas vécuailleurs depuis toutes ces semaines iraniennes : pouvoirtremper mes pieds dans la mer en remontant mon pantalonjusqu'à mi-mollet et rire à pleins poumons en faisant leclown. Dans quelle mesure n’ai je pas pu jusqu’ici faire lechoix d’être ainsi ?

Homme, femme, moto et thé.

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Marchand de fruits de saisons au stand côté rueprincipale.

Marchandes de plantes de saison et de préparationsculinaires au stand côté trottoir, en deçà de la rueprincipale.

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Chariot à ramasser les ordures et tout objet pouvant êtrerécupéré dans la rue. En arrière plan, une femme est assiseet un homme debout.

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Date : Vendredi 29 juin 2007, 8h53

Objet : Mail 8 _ Détails de la capitale & Tendresvisions

Voici quelques nouvelles extra fraîches :Mon passage au Musée du Patrimoine rural duGilân construit une autre facette del’expérience. J’essaye particulièrement decomprendre d’un point de vue interne, lefonctionnement du musée : depuis l'acquisitionde maisons traditionnelles souvent en état dedégradation avancée, la prise de mesures,l'étude de l’environnement géographique,historique, social, jusqu'au transport des élé-ments de la structure, la reconstruction sur lesite du musée, les animations proposées pourmettre en valeur les pratiques locales, lesexpositions, les projets de constructions et derecherches futures, etc. La patrimonialisationdes objets, des savoir-faire, du vivant nécessitedes choix judicieux. La question est alors : enquoi ce processus de patrimonialisation estspécifique au contexte de la région du Gilân ?

Dans quelques jours, je repars auvillage, dans ma famille d’accueil. Le villageest encore riche d’une dizaine de maisonstraditionnelles construites en terre et en bois.Nombreuses sont inoccupées ou modulées avecdes matériaux industriels. Les fonctionshabituellement imparties aux espaces ont étémodifiées. Le salon pour les invités devient parexemple salle d'ordinateur.

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Une étudiante en anthropologie qui tra-vaille au musée, me demande si j’ai préparétoutes mes affaires pour aller au village. Je luiconfirme que mon sac à dos est prêt. La voilàbien surprise, elle me demande si je ne devraispas acheter des meubles et s'inquiète de savoirsi au moins j'ai déjà une télévision. Le momentle plus impressionnant est de constater sasurprise quand je lui dis qu'en France je nepossède pas ce genre d’appareil.

L'accès du village en voiture étant plusdifficile qu’il n’y paraît pour une « étrangère »,on m’a recommandé de choisir de « bons chauf-feurs » de moto, à savoir, des hommes « biens »ou à défaut des chauffeurs âgés. La veille dudépart, je m'imagine sur la moto me cram-ponnant au (vieux) chauffeur, slalomant entreles nids de poules remplis d'eau. Je coince latélé sous un bras et un parapluie dans l’autrem’aide à passer entre les gouttes de pluieintarissables.

Cette anecdote est la cerise sur le gâteaudes fraîcheurs locales, qui pourrait tout aussibien se retrouver en France, ou ailleurs. Le resteest bien trop proche d'une anthropologieclassique pour prêter ainsi à sourire. « Mais quediable suis-je venue faire dans cette galère ? »(Merci Molière !) Cette citation est mon credodu moment. Pauvre esseulée, sans mari, neparlant pas la langue selon le point de vued’Ici, tout est potentiellement dangereux pourmoi. Je dois être protégée. Je me sens étouffer.

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Impossible de présenter la situation selon unpoint de vue externe. Bien sûr j'ai bien comprisque ce jeu avec mes nerfs fait aussi partie duterrain et je suis contente de cette issue. À voirmaintenant les suites de l'aventure. L’angoisseest j’espère, passagère. Il y a souvent desnoeuds de vie qui s’ouvrent dès lors que l’onprend de la distance.

Boos et re-boos à tous

Bisou et re-bisou barâye hameh

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Détails de la capitale : Voile et voile et structure enmétal de futures constructions.

Embouteillages habituels, drapeaux, publicité. Vousn'avez ni le son ni l'odeur.

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Bâtiment en construction. Imaginez tout un quartier enchantier.

Maison crème pâtissière. Logement tendance desquartiers riches. Des quartiers entiers sont construits enpâtisseries. Cerises sur les gâteaux, d’énormes et rutilants4x4 sont posés devant chaque habitation à la crème.

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Papa, bébé et poussette ; petites filles et femmes.

Maman, bébé et poussette. L'utilisation de la poussetten'est pas très fréquente, plus à la mode chez les jeunescouples de la capitale, sa conduite en ville demande uneadresse incroyable.

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Pliage crépusculaire de la poussette.

Papa et enfants, en brochette sur une moto.

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Papa et bébé sur la moto attendent presque au milieu dela route.

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Date : Lundi 16 juillet 2007, 12h43

Objet : Mail 9 _ Gilân Gilân Gilân

Dans le village d'Ambouh au sud-ouestde la région du Gilân, les femmes sont toutesvêtues des vêtements traditionnels. Il sembleque ce soit le seul village du Gilân, où l'habittraditionnel est encore porté quotidiennementpar les vielles femmes, comme les plus jeunes.Précisons que les parentes habitant dans lesgrosses villes voisines ou à Téhéran, viennentrendre visite à leur famille restée au village, entroquant leurs jeans et leurs foulards copie deVuitton, pour revêtir le vêtement traditionnel letemps de leur séjour.

Je viens d’avoir un premier véritable fourire, après cinq mois et demi de vie Ici, à caused'un foulard sans gène qui ne se tient pas tran-quille. Premier fou rire et slave de regardsréprobateurs retournés par l'assistance, qui n'ontfait que renforcer cet état euphorique.

Il me reste encore deux grosses semainesà vivre à l'heure iranienne.

À très bientôt donc.

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Un mariage traditionnel dans le village de montagned'Ambouh. Les femmes attendent l’arrivée de la mariéepour la cérémonie du henné. Le vêtement dit traditionnel aété sérieusement modifié, particulièrement depuis unetrentaine d’années. Les plus vieilles portent des motifsfloraux que ne portent pas les jeunes femmes.Actuellement il y a une tendance à une harmonie descouleurs dans les tons rouges. Le choix se porte sur unejupe à fleurs, une blouse rouge bordeaux, un petit giletnoir, un sous-voile bordeaux et un voile en crochet ou entissu blanc. Les tissus utilisés sont aujourd’hui, sont laplupart du temps, fabriqués en matières synthétiques. Leshommes portent chemises ou et tee-shirt et pantalonsdroits, ou jeans.

À l'aide de plateaux posés sur la tête, les femmes portenten procession, les objets achetés par la famille de la mariéejusqu'à la maison du marié. C'est-à-dire surtout de lavaisselle, des ustensiles de cuisines (depuis la petitecuillère jusqu'à la poubelle en plastique). L'électroménageret les meubles seront achetés sur place car les futursmariés s'installent à Téhéran.

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Le lendemain, tout le village participe à la fête. C'estdepuis le toit des maisons qu’il est possible d’assister àl'arrivée de la mariée. Les habitations sont construites àflancs de montagnes. Le toit des maisons du dessous est lacour des logements du dessus.

Lors de la dernière étape symbolique du mariage, lamariée, montée sur un cheval est amenée jusqu'à la maisonde son mari. Elle est protégée des regards et du mauvaisœil par une série de voiles superposés.

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À la fin de la journée, après l'arrivée de la mariée, leshommes ferment symboliquement l'accès de la route quimène à la maison du mari.

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Date : Mardi 8 août 202007, 10h00

Objet : Mail 10 _ Gilân et Iran, fin de ce voyage

Bonjour,

Je vous écris ce premier mail de retour enterre maternelle, après un mois de retour devoyage en terre paternelle.

Jusqu’à la dernière minute, des soucisavec mon billet d'avion, ont installé chez moiune angoisse montante. Cet état a été renforcépar le fait que la loi actuelle Ici m’autorise unséjour de six mois fixes. Mon départ prévu estle dernier jour possible. Un retard me conduiraità un dédale administratif. Les situationsrocambolesques ont fini au mieux, dans lemeilleur des mondes voltairien possible. J’aitraversé.

Si j'ai pu craindre d'idéaliser le pays demon père, je reviens au contraire avec encoreplus de questions et le goût amer du « cul duconcombre » dans la bouche!. L'Iran a été unesérie d'épreuves ressenties parfois avec* Cette expression est reprise de l'écrivain iranien SadeghHeddayat dans La chouette aveugle décrivant la bouche dela bien-aimée.

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violence, qui a vite effacé les premièrespromesses de « beau voyage ». J'ai pour lemoment, du mal à formuler le désir d'y retour-ner. Mais je sens que ma démarche a porté sesfruits, le raisin me paraîtra sûrement moinsamer avec le temps. Je ne me sens plus « nifigue ni raisin », mais tout autre.

C'est seulement trois semaines avant derentrer en France que j'ai plongé dans un espacetemps plus clément pour moi, baigné demusique, de rires et de vie intérieure moinsétouffés. Tout se construisant fil à fil, il aeffectivement fallu du temps pour que je tire, ouque je sois tirée par le fil de « l'image dans letapis »! qui me fasse toucher la trame et lachaîne. Il a fallu que ma carapace de peurss'assouplisse et que ma consistance d'épongeabsorbante retrouve un peu de chair et d'ellemême, pour se laisser toucher par deséchantillons de bonheur inoubliables.

Merci à tous pour vos pensées qui m’ontportée tout au long de ce chemin initiatique.

Bises sonores

Voir la nouvelle d'Henri James, L'image dans le tapis.

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Je vous offre un dernier thé sur motifs persans,accompagné de savoureuses pâtisseries.

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La ville de Rasht un instant bucolique avec boulevard,arbre en fleurs, voiture rouge et coq noir.

Avant de partir du village, je prendsphotographiquement, une dernière vision des rizières.Dans une semaine arrive la période des moissons.

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Autre animal des rizières. Après les serpents, lesgrenouilles, les tortues, les araignées d'eau, les sangsues ettoutes les bêtes non identifiables et qui piquent, voici unchapeau de paille d'Italie à la Feydeau ou un crapaud depaille gilaki et la reine des mots tordus.

Moment de la « restitution au terrain » suivant le jargonanthropologique. Je présente l’état de mes recherches à lafamille chez qui je suis restée un mois et demi, aux villa-geois et au personnel du bureau du musée. Au fond, leshabitantes du villages et les employées du Musée duPatrimoine Rural du Gilân. Hors champ, les habitants etles employés du musée.

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Tableau arboré. Paysage du Gilân et sigle végétal de larépublique islamique.

Téhéran vu de ses montagnes au petit matin.

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Partage d'une boisson, sans faire de bruit avec la pailleSVP.

Les petits plaisirs au quotidien : c'est celui qui finira leplus vite. Il est sous-entendu que j'ai un lien de filiationclair avec mon cousin pour jouer les belles et le clocharden hedjâb.

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ÉPILOGUE

Traversée

Toi le voyageur ! Vers où marches-tu, vers où ?Où que tu ailles, tu resteras assis en notre cœur. Tel un poisson, tu désires tant la merQue de tes sèches lèvres jaillissent des perles marines!

En chemin, une partie de mon être m’arencontrée. La différence que je cherchais audébut m’est apparue point de vue. Peut importeau fond, identité et papier.

Je ne suis pas chrétien, pas juif, pas mazdéen, pasmusulmanMon lieu est le nulle part, mon signe est le non-signe…Je ne suis pas occidental et pas oriental, je ne suis nide la terre ni de la merNi du royaume d’Irak, ni du pays du Khorâsân!

L’initiation me mène jusqu’aux confinsdes mondes. Cet engagement travaille mon êtreà cœur. La quête de l’origine me fait renoncer àêtre, mourir à moi-même. Le cœur meurtri etépanouit de bonheur, me traverse d’amour.

Poème de Djalal Al Din Rumi tiré des Robâ’î, cité parLeila Anvar-Chenderoff, Rûmi, Éditions Médicis-Entrelacs, Paris, 2004 : 218.Poème de Djalal Al Din Rumi, cité par Jean During,Quelque chose se passe. Le sens de la tradition dansl’Orient musical. Lagrasse, Éditions Verdier, 1995 : 197.

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C’est la douleur qui guide l’homme en toutechose. Tant que l’on ne souffre pas du désir et del’amour d’une chose, on ne forme pas l’intention del’accomplir. Et sans douleur, on ne peut rienaccomplir, que ce soit dans le domaine matériel ouspirituel, qu’il s’agisse de commerce ou de royauté,de science ou d’astronomie, etc. Tant que Marien’éprouva pas les douleurs de l’enfantement, elle nese dirigea pas vers l’arbre du bonheur (…) !

Dans ce carnet de voyage, j’ai fait lechoix de conserver l’anonymat. Claire etAfsâneh ont été adoptées et me collentconsciemment à la peau. « Légende deshommes », « légende humaine », AfsânehMardomi en persan, reflète de façon juste unefacette de mon être exploré pendant cettetraversée de vie. Le voile de la face, sur lesphotos, élargit également les possibilités dupersonnage. Il semble nécessaire de m’effacer,pour vous laisser la liberté de m’incorporer etde voyager. Bonne traversée à vous.

Poème de Djalal Al Din Rumi tiré de Fîhe mâ Fîh, citépar Leila Anvar-Chenderoff, Rûmi, Éditions Médicis-Entrelacs, Paris, 2004 : 188.

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Photo et droit de regard

En Iran, j'ai réappris à prendre desphotos. Appris à rendre bien visible le geste desortir l'appareil de son étui. Appris à laisser untemps de suspension avant de faire la prise, àattendre les réajustements des positions, laremise en place des foulards qui ont glissé surl'arrière de la tête, des jupes, des pantalons dedessous bien tirés sur les bas de jambes. Apprisà accepter les mises en scène étudiéesspécialement pour moi par les sujets-acteurs.

Je prends des photos du quotidien et jesuis désignée comme « photographe de lafamille ». Ce que je vais donner à voir enFrance ou ailleurs en Iran, doit montrer lemeilleur aspect de la vie d'Ici. Ma façon deprendre des photos sur le vif est donc parfoiscritiquée gentiment sous forme de plaisanteries.

En fonction des actions effectuées par lespersonnes et en pensant à ce que je vais donnerà voir, j'ai parfois construit un hejâb pour monregard. J'ai appris à prendre des photos defemmes non voilées, en cadrant sur les mains,les pieds, les vêtements. Sachant que jerespectais le non dévoilement de leurs corps les

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femmes ont peu à peu appris à me faireconfiance en oubliant l'appareil. Le droit deregard sur mes photos restait cependantsystématique. Il est arrivé parfois qu'une desfemme photographiée s'effraie de sa tenue,d'une cheville trop découverte, d'un foulard nonserré. Cette photo était alors à effacer et àreprendre. L'appareil numérique permet tous ceschangements et ces hésitations.

Après avoir mesuré l'importance de laprise de vue, j'ai pu également mesurerl'importance de l'acte de montrer une image :que laisser voir et à qui ? Car le fait même de« prendre des images » implique leurintroduction dans un autre contexte, leur visionpar des regards extérieurs à la scènephotographiée. Une image prise, par exemplesans présence masculine, peut-elle être donnée àvoir à des hommes et à un public ne faisant paspartie du réseau de connaissance de la famille ?Les personnes photographiées, conscientes dene pouvoir totalement contrôler la vision de leurimage, tiennent à avoir un droit de regard sur ceque je prends et sur ce que je montre. Lesimages que je choisis de présenter dans cecarnet sont donc validées par les membres dema famille d'accueil. Les protestations de départ

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et l'effervescence d'abord suscitées devant monintention de vouloir prendre des photos sont parconséquent, plutôt dues au fait que je demandeun droit de regard qui puisse dépasser l'espacedes regards permis (mahram). Le fait de prendreune photo n'est pas visé en tant que tel, puisqueles personnes acceptent d'être ou/et se font lessujets de ma curiosité photographique et meremercient à chaque fois chaleureusement.

Ayant appris à ma famille d'accueil lemaniement de l'appareil numérique, les femmesavant les hommes s'en sont saisies pour meprendre en photo, puis pour prendre leursparentes et leurs parents. Un des fils de lafamille a également retourné les regards, en mephotographiant et en me filmant à mon tour àl’aide de son téléphone portable.

Collection de liens

Je tiens à vous rendre hommage, enpubliant à la suite de cet épilogue, des extraitsde vos écrits virtuels. Merci pour vostémoignages, ainsi que vos soutiensrespectueusement silencieux.

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L'image dans le tapis.

Motif gourmand.

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AVANT

– Le grand jour approche, j'imagine que tu espartagée entre l'euphorie du départ, impatiente d'yêtre et les doutes ou l'appréhension quant au bondéroulement de ce séjour, souvent invités de dernièreminute. Sache que je pense bien fort à toi même s'ill'on s'est peu vues ces derniers temps. Admirative,envieuse mais aussi curieuse de savoir ce qui peutpousser à renoncer à des libertés bien écrites dansnotre pays pour peut-être en trouver d'autres, plusintimes, plus fortes dans un pays que l'on dit« dictatorial ». Peut-être auras-tu davantaged'éléments de réponse dans quelques mois ? Quoiqu’il en soit, je te souhaite de belles rencontres, avecdes lieux, leurs habitants et peut-être avec toi-même... Que les contes et la musiquet'accompagnent sur ce bout de chemin !

– Bon il ne me reste alors plus qu'à te souhaiter devivre de très belles expériences autantprofessionnelles que personnelles. Et du courageaussi il va-t’en falloir des tonnes miss !!!! Même sion ne se voit pas, nous pensons à toi et toi penseaussi à nous et à tes autres amis lorsque le bonheurou la tristesse sera trop lourde et que tu voudras lespartager. Bonne route.

– Je te souhaite de faire un beau voyage et que tonséjour en Iran soit épanouissant. Ta tenue demoudjahidin te va comme un gant ! Il ne te manqueque la couscoussière... Reviens-nous vite et enpleine forme. Je compte sur toi pour enseigner labourrée et la mazurka à tes collègues iraniens. Jejoins à ce message une valise de bises pour six mois,que tu mettras avec tes bagages. Bon vent !

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Berceuse.

Fleurs sucrées.

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PENDANT

– Je me régale à lire tes mails en ces débuts dejournées au bureau !

– C'est une belle idée, ces mails, je les ai lu avecbeaucoup d'intérêt et je vais les montrer aux gens demon équipe qui me bombardent de question sur cemystérieux pays d'Iran qui n'est pas un désert remplid'usines interdites !

– J'imagine que tu dois être un peu déboussolée.C'est normal ! Les choses se mettent en place petit àpetit et les gens avec qui tu vas discuter vont tepermettre de te poser dans ce nouvel univers. Etsurtout n'oublie pas de t'écouter toi, ne t'oublie pas,c'est ton projet, ton envie ! Qui est-ce qui m'a dit unjour de ne pas baisser les bras, que c'est toujoursdans les moments difficiles qu'il faut s'accrocher etque ça finira par se débloquer ? C’est toi. Donne moide tes nouvelles dès que tu peux !

– Comme je suis contente d'avoir de tes nouvelleset de constater que tu as l'air d'être satisfaite de tonséjour. Merci pour les photos. Ici ? Eh bien la viecontinue sans toi et ta franche gaîté, avec en cette finmars, une arrivée de giboulées après un hiver plusque printanier. Nous aurons plein de chants àt'apprendre lorsque tu rentreras.

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Petits poissons fris.

Jeu de jambes.

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– Je suis bien rentrée d’Iran et j’ai replongé dansma vie strasbourgeoise. Le Gilân me paraît bienirréel ! Je suis vraiment très contente de ce voyage,de ces rencontres et d'avoir entrouvert une fenêtrevers un monde complètement inconnu. Je te remerciebeaucoup pour ton « initiation » au B A BA de la vieiranienne, vu du coté des femmes. Ce qui estsensiblement différent de ce que pouvaient me direles hommes. Je reviens la tête pleine d'image, etj'espère qu'il y aura une suite à tout ça. Je meretrouve en débardeur et tête nue avec un grandsoulagement !

PS : Je mets le marchand d'olive en fond d'écran,ce sera mon petit lien quotidien avec vous !

– Te voilà à un mois de la fin de ton périple et c'estmaintenant que je me manifeste ! Ne crois pas que jet'ai oubliée au contraire nous suivons avec beaucoupd'intérêt ton voyage à travers l'Iran et c'est toujoursavec un réel plaisir que nous découvrons tes photosaussi insolites que surprenantes pour nous bonsFrançais bien installés dans notre confort quotidien !Tu en vois des choses mais quel enrichissement per-sonnel ! En tout cas merci de prendre du temps pournous faire partager ce que tu vis là-bas et bravo pourtes photos qui nous plongent dans ton quotidienactuel ! Termine bien ton séjour garde de bonssouvenirs que tu pourras partager à ton retour . Allezbon courage pour la fin de ton aventure.

– C'est vraiment magnifique ces photos, j'espèreque tu vas bien, fais-moi signe à ton retour.

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Tombe aux fleurs.

L'eau à la bouche.

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APRÈS

– Bon atterrissage…

– Je voulais tellement te dire ce qui me touchait aufur et à mesure des envois. C’était très frustrant etj'attendais ton retour. J'espère te voir bientôt en chairet en os pour partager à nouveau cette intensitébouleversante. Quelles images ! Quelles musiques !et tout ce que tu portes en toi à présent...

– Bon retour ! Tu rentres juste à l'heure pour lasortie du film « Persépolis ». Merci en tout cas pourtes cartes postales en mots, en sons, et en images.

– Si tu savais comme je pensais à toi... C'est superce lien que tu as établi entre toi, l'Iran et nous, leschanceux de ta liste ! J'adore le morceau que tu asenregistré pour cette fête où les enfants gueulentcomme des perdus ! Je regarde parfois tes photosavec ma famille ou des amis et c'est comme si moiaussi, j'étais un peu passeur ! J'ai hâte d'entendre tesrécits et tes musiques !

– Bienvenue ma belle Claire sur ta terrematernelle. Merci pour tous les superbes messagesque tu m' (nous) as fait parvenir et qui m'ont permisde t'accompagner dans ton périple. J'espère que trèsbientôt j'aurais l'occasion de te voir afin que de vivevoix tu me (nous) fasses partager ton « bilan » !

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Yes

Manifestation à Téhéran.

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– Merci pour cette longue saga de ta quêteiranienne, Je ne me suis pas longtemps posé laquestion de savoir si j'étais ou non un destinataireaccidentel ! J'ai été touché par la spontanéité et laprofondeur de tes annotations, derrière ton habituelle(je crois) façade ironique. J'avais déjà suivi, sur cemode des mails circulaires, l'année d'une amie dansla brousse malgache. C'est un contact prodigieux deproximité et de distance mêlées ; quelque chose quiressemble aux récits anciens de voyageurs quifaisaient parvenir de loin en loin des bribes de leursavancées. La proximité temporelle, ici, n'y changerien, abolie qu'elle est par la distance« géoculturelle ». Tu étais dans un autre monde, d'oùta voix lointaine parvenait. Merci encore. Le retourne doit pas être simple. Que comptes-tu fairemaintenant ?

– Maintenant que tu as retrouvé ce que certainsappellent la civilisation… En tous cas des accès sansdoute plus faciles à Internet, je t'envoie enfin cesquelques lignes pour te remercier de tes messages etphotos. Grâce à cette merveille technologique, j'ai pudécouvrir un peu ton pays et ton travail, et c'estvraiment un plaisir renouvelé à chaque fois. Te voilàrentrée en France depuis presque un mois : j'espèreque le retour n'a pas été trop difficile et que tu as purécupérer doucement de toutes ces émotions. Etpeut-être même commencé à imaginer d'autresprojets ?

– Belle Claire, ce carnet est magnifiqued'humanité et aussi de savoirs. J'ai tant le sentimentd'avoir fait ce chemin avec toi, que j'y retrouve messouvenirs de voyage ! Incroyable, non ? Je l'ai faitpartager à ma fille et quelques amis au fur et àmesure… Mais quel voyage non de D'là !

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Baudruches.

Mille et un rêves d'ailleurs.

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– Merci de m'avoir inscrite sur votre liste de diffusion,j'ai reçu avec beaucoup d'émotion vos fragments derécits et trouvé votre démarche impressionnante desincérité et de courage, ethnographique et humain. J'aiarchivé aussi en pensant que de tels carnets de voyageseraient des documents de grande qualité à mettre enpartage sur une plate-forme numérique : unespace expérimental autour des traditions orales (oùnos chemins se croisent). Vos documents sont sur monbureau, comme des signaux. Comment vous envisagezles suites, la suite ? En tout cas je vous souhaite un bonatterrissage en douceur, il est des voyages initiatiquesqu'il faut digérer et vous avez fait une sacréeexpérience.

– Quelle chouette idée ! J'ai toujours lu avec plaisir tesmails, et beaucoup apprécié surtout tes photos. Tesimpressions me renvoyaient à plein de souvenirs, à mespropres débuts [anthropologiques]. Que d'émotions !Heureuse de savoir que tu sembles être sortie indemneet plutôt positive de l'expérience. [Moi aussi] je n'oubliepas l'Iran.

– Merci pour ton carnet. J'ai ouvert avec plaisir tes« petites fenêtres » ces derniers mois, et je retournais detemps en temps prendre une bouffée d'air. J'y aidécouvert un monde inconnu (bien que ce que tuillustrais se rapporte beaucoup à ce que me raconte uneamie afghane de son ancienne vie) et très attachant. J'yretrouvais un peu ce que je retrouve « au pays » unefaçon de vivre en évolution lente, dans une autredynamique que celle de nos sociétés deconsommation… Merci pour ton Carnet d’Iran.

– Merci de m'avoir fait partager ainsi ces instantspassés Là-bas... C'est avec beaucoup de plaisir que j'aiparcouru tes lignes. Je te souhaite tout le meilleur etbonne route.

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Cette carte du XVIIe siècle localise le paradis « ici ou àpeu près ». La soif de découverte a laissé place à un tendrelâchez-prise. Le chemin m’anime. La cartographie de monterritoire est vaine. À deux pas du paradis, ou en pleindedans, je suis habitée d'une volupté d'être à tête reposés.

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– J'ai tout lu de ton périple au pays des Mille et unenuits. J'aime ces photos, des clichés d'un instant devie partagée, moult fois plus intéressantes que desphotos de monuments que tous les touristes visitentet qui sont dans tous les guides touristiques !

– Merci beaucoup de m'avoir donné à lire tonCarnet d'Iran. J'ai passé un très bon moment au fil detes impressions. Cette lecture m'a accompagnéeplusieurs jours, j'entends par là qu'elle m'a quelquepeu secouée, dans le sens « donné à mâcher »,réfléchir et encore davantage et apprécier notre belleliberté d'ici. Non mais quelle chance quand même,on ne se le dira jamais assez !

– Merci beaucoup pour ce carnet qui m'a fait un peurattraper mon retard sur le fameux voyage en Iran.C'est vrai que les mails c'est un peu comme unephoto, c'est chargé. Tu es forte d'arriver à écrirecomme ça, sur ce que tu vis. Même si ce qu'on vitc'est surprenant, fou, passionnant, terrible, fort,émouvant remuant, difficile... Ce n'est pas faciled'écrire, je trouve ! Mais ça fait tellement plaisir delire les récits des autres que ça finit par donner envieaussi d'essayer. Alors à quand le prochain voyage ?

– Plein de joie, de bonheurs, d'amour, de folies, desourires, de rires et de fous rires (sous le voile) !

– Merci pour cet envoi que je prendrais le temps desavourer…

– À bientôt. Prenez le temps. On se téléphonera pourun thé ?

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E n c h e m i nCARNET D’IRAN 2007

Éditions Déracontés

Automne 2010

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Quatrième de couverture

E n c h e m i nCARNET D’IRAN 2007

Je suis Claire, je suis Afsâneh

Je suis française, je suis iranienne

Lors de mon premier long voyage en Iran,

J'ai décidé d'envoyer par mail

mon carnet de voyage

Afin de vous donner Là-bas un aperçu d’Ici

Bonne lecture, bon plaisir

Et au prochain voyage

ClairAsfâneh

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