Caractérisation géochimique des lacs collinaires de la...

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UNIVERSITE MONTPELLIER 1 Unités de Formation et de Recherche Pharmaceutiques CARACTERISATION GEOCHIMIQUE DES LACS COLLINAIRES DE LA TUNISIE SEMI-ARIDE ET REGULATION GEOCHIMIQUE DU PHOSPHORE Thèse présentée pour obtenir le grade de : DOCTEUR DE L'UNIVERSITE DE MONTPELLIER 1 Ecole doctorale : Géosciences Formation doctorale: Hydrologie, Sciences de l'Eau et Aménagement Groupe des disciplines pharmaceutiques du CNU e section Sciences du Médicament (Hygiène - Environnement) par Nathalie RAHAINGOMANANA soutenue le 3 juin 1998 devant le jury composé de : Mme Akissa BAHRL Maître de Recherche, INRGREF, Tunisie M. Jean BONTOUX, Professeur, Université de Montpellier 1 M. André FABRE, Ingénieur CNRS, CNRS-UPR 8211, Toulouse M. Jacques LEMOALLE, Directeur de Recherche, ORSTOM Mme Bernadette PICOT, Professeur, Université de Montpellier 1 M. Michel RIEU, Directeur de Recherche, ORSTOM Examinateur Examinateur Rapporteur Directeur de thèse Examinateur Rapporteur

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  • UNIVERSITE MONTPELLIER 1

    Unités de Formation et de Recherche Pharmaceutiques

    CARACTERISATION GEOCHIMIQUE DES

    LACS COLLINAIRES DE LA TUNISIE SEMI-ARIDE

    ET REGULATION GEOCHIMIQUE DU PHOSPHORE

    Thèse présentée pour obtenir le grade de :

    DOCTEUR DE L'UNIVERSITE DE MONTPELLIER 1

    Ecole doctorale : Géosciences

    Formation doctorale: Hydrologie, Sciences de l'Eau et Aménagement

    Groupe des disciplines pharmaceutiques du CNU 4ûe section

    Sciences du Médicament (Hygiène - Environnement)

    par

    Nathalie RAHAINGOMANANA

    soutenue le 3 juin 1998 devant le jury composé de :

    Mme Akissa BAHRL Maître de Recherche, INRGREF, Tunisie

    M. Jean BONTOUX, Professeur, Université de Montpellier 1

    M. André FABRE, Ingénieur CNRS, CNRS-UPR 8211, Toulouse

    M. Jacques LEMOALLE, Directeur de Recherche, ORSTOM

    Mme Bernadette PICOT, Professeur, Université de Montpellier 1

    M. Michel RIEU, Directeur de Recherche, ORSTOM

    Examinateur

    Examinateur

    Rapporteur

    Directeur de thèse

    Examinateur

    Rapporteur

  • Septembre 1997

    UNIVERSITÉ MONTPELLIER 1FACULTÉ DE PHARMACIE

    UNIVERSITÉ MONTPELLIER 1 : Président. Professeur Y. LOUBATIERESFACULTÉ DE PHARMACIE: Doyen. Professeur Jean-Louis CHANAL

    UNITÉ DE FORMATION ET DE RECHERCHE DES SCIENCES PHARMACEUTIQUES ET BIOLOGIQUESDirecteur: Professeur Jean-Louis CHANAL

    UNITÉ DE FORMATION ET DE RECHERCHE EN MATIÈRE ALIMENTAIRE. ŒNOLOGIQUE -ENVIRONNEMENT

    Directeur: Professeur Jean-Claude CABANIS

    UNITÉ DE FORMATION ET DE RECHERCHE DE PHARMACIE INDUSTRIELLEDirecteur: Professeur Jean-Pierre BALI

    PROFESSElJRS DES UNIVERSITES

    MM.M.M.M.M.M.M.M.MmeM.M.MmeM.M.M.M.M.M.M.M.MlleM.M.M.M.M.M.MmeMmeMmeMlleM.M.M.MmeM.

    ANDARYAUDRANBALIBASTIDEBERLANBONNEBONNETBONTOUXBOUDEVILLEBRESCABANISCANOCASSANASCASTELCHANALCHAPATCROSDELARBREDELONCADOREEESCALEFABREFULCRANDGELISGORENFLOTGRASSYGRIMMONPREZJACOBJULLIENMAILLOLSMALLIEMANDROUMAURYMICHELMODATMONLEAUDPAU

    ClaudeMichelJean-PierreJean-MarieJacquesClaudePierreJeanPhilippeJanineJean-ClaudeJean-PaulGenevièveJeanJean-LouisJean-PierreGérardJean-LouisHenriMarcelRogerHuguettePierreChristianAndréGérardLouisMauriceMagaliHélèneMichèleBernadelteLUCAlainGuyJacquelineBernard

    Botanique et CryptogamiePhysique et BiophysiqueBiochimie générale et CliniqueImmunologie, Parasitologie et Mycologie MédicaleHématologiePhysiologieChimie OrganiqueSciences de l'Environnement et Santé PubliqueChimie Générale et MinéralePharmacocinétiqueChimie Analytique et BromatologieToxicologiePhysique Industrielle et Traitement de l'InformationChimie ThérapeutiquePhysique et BiophysiqueChimie OrganiquePharmacologiePhysique Moléculaire et StructuraleTechnique Pharmaceulique IndustrielleBiologie CellulaireChimie OrganiqueChimie Analytique et BromatologieChimie ThérapeutiquePhysique et BiophysiqueBiologie Cellulaire et MoléculaireChimie OrganiqueBiochimie Générale et CliniquePharmacie GaléniqueMilieux denses et matériauxTechnique Pharmaceutique IndustrielleImmunologie. Parasitologie et Mycologie MédicaleChimie AnalytiquePhysique Moléculaire et StructuralePharmacologiePhysiologieDroÎl et Economie de la SantéImmunologie

  • M.MmeM.M.M.M.M.MmeMlleM.

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    PhannacognosieSciences de l'Environnement et Santé PubliqueSciences de l'Environnement et Santé PubliqueChimie OrganiqueChimie OrganiqueBotanique et CryptogarniePhannacologieBactériologie et VirologieBiochimie Générale et CliniqueChimie Générale et Minérale

    MAITRES DE CONFERENCES

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    ALBEROLAARTISAUSSELAZAYBATAILLEBEGELBELONBERGEBLACHEBLAISEBLANCHINBOMPARTBOUDARDBOURRETBRESSOLLECABANISCARCYCASADEBAIGCASELLASCASTEXCHARLOTCHAUVETCHOQUETCOCIGLIOCOOPERCOSSONCOUDANECRASSOUSCUQDARMANADENDEVOISSELLEDURUDUSARTENGELENJALBERTFABREGUEFENETFLORACFOURCROYFOURNAJOUXGAGNEGALLEYRANDGARREAUGRISGUIBAL

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  • MmeMlleMmeM.MmeM.M.M.MlleMmeMmeMmeM.MmeM.MmeMmeM.M.MmeM.MMmeMlleM.M.M.MmeMineMmeM.M.MmeMMlleMlleMme

    GUIBERTHANSELILLESJEANJEANLACOSTELAGETLARROQUELASSERRELAURENTLlUTKUSMARIONMENAGEMESTRESMESTRESMILHAVETMULLERNIELLOUDPELISSIERPERSONNEPHAMPRECIGOUTPROMRAMBAUDRAPIORRASCOLRAYNAUDSABATIERSALHISOULIESUSPLUGASSUSPLUGASTEISSEDRETEPVALENTINVIANVIEVIVERGE

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    Physique et Biophysique'Pharmacie CliniqueSciences de l'Environnement et Santé PubliqueChimie Générale et MinéraleBactériologie et VirologieTechnique Pharmaceutique IndustrielleChimie Analytique et BromatologiePharmacie GaléniquePhannacologiePharmacologiePharmacognosieBiologie Cellulaire et MoléculaireChimie AnalytiqueTechnique Pharmaceutique IndustrielleChimie OrganiquePhysiologieTechnique Pharmaceutique IndustriellePhannacognosieBactériologie et VirologiePhysique et BiophysiqueBiologie Cellulaire et MoléculaireToxicologieChimie Générale et MinéraleBotanique et CryptogamieBotanique et CryptogamieBiochimie Générale et CliniquePhysique Moléculaire et StructuraleImmunologieBiochimie générale et CliniquePhannacognosiePharmacognosieChimie Analytique et BromatologieToxicologieParasitologie et Mycologie MédicaleToxicologiePhysique et BiophysiqueBiochimie générale et Clinique

  • Avant - Propos

    Avant - Propos

    Je remercie M. Jacques Lemoalle, Directeur de Recherche à l'ORSTOM, qUI a permis la

    réalisation de cette recherche qu'il a dirigé et encadré.

    L'essentiel de ce travail a été réalisé à l'Institut National de Recherche en Génie Rural, Eaux et

    Forêts (l.N.R.G.R.E.F.) de Tunis, au sein du Laboratoire de Chimie des Eaux et des Sols. Je tiens

    ainsi vivement à remercier les personnes qui composent ce laboratoire:

    - Mme Akissa Bahri, Maître de Recherche, qui a mis tous les moyens de son laboratoire à ma

    disposition et qui a toujours tout fait pour que je bénéficie des meilleures conditions de travail

    possibles. Je lui suis infiniment reconnaissante de ce temps si précieux qu'elle a toujours pris

    pour me conseiller et m'encourager de façon très efficace; je l'a remercie d'avoir accepté d'être

    membre du jury;

    - M. Moncef Houidek qui m'a beaucoup aidé, notamment pour les prélèvements d'échantillons

    sur le terrain;

    - Mme Zaâra Chaouch, Mme Fatma Turki, Mme Salha Mokadden et Melle Karima Zaïed qui ont

    assuré la réalisation des nombreuses analyses;

    - M. Mabrouk Khlifi et M. Khelifa Ben Othman pour tous les services qu'ils m'ont rendus;

    - Mme Rafika Takroumi et M. Boubaker Hichri pour leur soutien quotidien.

    Je souhaite aussi remercier.

    - Mme Monia Trad, et le personnel du Laboratoire de Microbiologie qUI ont assuré mes

    premières minéralisations à l'autoclave;

    - Mme Ceci qui m'a donné accès à la balance de précision de son laboratoire;

    - M. Nejib Rejeb, Directeur de l'l.N.R.G.R.E.F., ainsi que le personnel de l'établissement dans

    son ensemble qui fut toujours très chaleureux.

    Au sein de la Mission üRSTOM de Tunis, je remercie:

    - l'équipe chargée du suivi hydrologique des lacs collinaires qui a fortement appuyé et

    encouragé ce travail: M. Henri Camus, M. Jean Albergel, M. Yannick Pepin, Melle Zakia

    Jenhaoui et tout particulièrement M. Noël Guiguen avec qui j'ai pu faire les tournées

    trimestrielles sur les lacs collinaires. ainsi que M. Mohamed Ben Younes qui a entre autres,

    réalisé la collecte astreignante des échantillons d'eau pour la bactériologie;

  • - M. Bernard Dalmeyrac, géologue et M. Patrick Zante, pédologue, qui m'ont aidé à identifier

    l'environnement lithologique des lacs collinaires;

    - M. Saïd Khalfallah et M. Jalloul El Baccouch qui m'ont souvent conduite sur le terrain et

    surtout, efficacement épaulée:

    - M. Rached Nagazi pour les diverses courses menées à bien;

    - Mme Douja Boussetta, Mme Christiane Ouertani, Mme Saïda Boubekri, M. Hassan Ayari et

    M. Amar Saadani pour leur serviabilité et leur soutien;

    - et tous les autres amis rencontrés dans cette maison qui m'ont énormément encouragée.

    Je suis reconnaissante à M. Ivan Caballero et M. Mohamed El Baccouch qui sont venus me prêter

    main forte au labo et sur le terrain, avec beaucoup d'enthousiame et d'efficacité.

    Les analyses bactériologiques ont été réalisées au C.I.T.E.T. à Tunis grâce à Mme Amel Fantar et

    Melle Habiba Makhlouf je les remercie vivement d'avoir accepté la charge de ce travail malgré

    tout celui qu'elles avaient déjà:

    Mes remerciements s'adressent aussi à :

    - M. Taoufik Tnani du laboratoire de Chimie l'I.N.R.A.T. de Tunis qui m'a donné accès à une

    balance de précision;

    - M H. Hamrouni, responsable du laboratoire de Chimie de la Direction des Sols de Tunis qui

    a mis la centrifugeuse de son laboratoire à ma disposition;

    - M. Alain Grasmick et M. Johny Bullon de l'équipe Génie des Procédés de l'USTL de

    Montpellier qui m'ont permis et aidé à réaliser les analyses granulométriques des sédiments au

    granulomètre laser;

    Je remercie pour leurs fructueux conseils:

    - Mme S. Sassi du laboratoire d'Analyses Eau-Sol-Plante de l'I.N.R.A.T;

    - M. Christian Feller, pédologue à l'ORSTOM de Montpellier;

    - M. Han Golterman qui nous a de plus fait don d'une indispensable centrifugeuse;

    - Mme Elena Gomez Courtez du Département Sciences de J'Environnement et Santé Publique

    de la Faculté de Pharmacie de Montpellier:

    - M. Boubaker Houmane, Professeur du Département de Géologie de la Faculté des Sciences

    de Tunis.

  • Avant - Propos

    Je tiens aussi à remercier les personnes rencontrées au G.A.M.E.T. et au Cemagref de

    Montpellier. leur sympathie a énormément facilité mon atterrissage à Montpellier après le dur

    départ de Tunis. Leurs encouragements n'ont ensuite pas manqué durant toute une année de

    rédaction, fastidieuse certes, mais qui s'est déroulée grâce à eux, dans la joie et la bonne humeur.

    Je remercie particulièrement les personnalités du jury que sont:

    - M. André Fabre de l'UMR-CNRS 5552 qui a bien voulu juger ce travail;

    - Mme Bernadette Picot et M. Jean Bontoux, Professeurs du Département Sciences de

    l'Environnement et Santé Publique de la Faculté de Pharmacie de Montpellier.

    J'adresse toute ma reconnaissance à M. Michel Rieu, Directeur de Recherche à l'üRSTüM, qui

    m'a permis de parcourir le fabuleux bout de chemin qui m'a menée jusqu'ici. Je le remercie ainsi

    pour toutes les expériences scientifiques et humaines que j'ai eu la chance de vivre au cours de

    cette thèse et de mes précédents stages, ainsi que pour toutes les rencontres plus enrichissantes les

    unes que les autres, que cela m'a permis de faire. Je le remercie enfin pour les remarques

    pertinentes qu'il a apporté à ce travail et pour avoir accepté d'en être rapporteur.

    Merci à tous les autres amis et parents, qui n'ont jamais cessé de m'encourager.

    Pour finir, je souhaiterais rendre hommage aux fellahs riverains des lacs collinaires qui nous ont

    toujours offert un accueil très chaleureux et leur vive collaboration.

  • Table des matières

    Table des matières

    INTRODUCTION GENERALE 9

    1ère partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    CHAPITRE 1 : PRÉSENTATION DE LA TUNISIE SEMI-ARIDE 13

    1.1. Cadre géographique 13

    1.2. Reliefet lithologie de la zone collinaire 14

    1.3. Climat 14

    1.4. Couvert végétal 16

    1. 5. Ressources en eau 16

    1.5. 1. La répartition des apports 16

    1.5.2. Les eaux de surface 16

    1.5.3. Les eaux souterraines 17

    CHAPITRE 2: LA GESTION DES RESSOURCES EN EAU ET LE RÔLE DES LACS

    COLLINAIRES 19

    2.1. Enjeux et stratégies de mobilisation des ressources en eau 19

    2.1.1. Les besoins en eau de la Tunisie 19

    2.1.2. La lutte contre l'érosion et l'aménagement des bassins versants 20

    2.2. Mobilisation des ressources en eau 21

    2.2.1. Bilan général 21

    2.2.2. La mobilisation des eaux de surface 21

    2.2.3. La mobilisation des eaux souterraines 25

    2.2.4. Conclusion sur la place des lacs collinaires dans la stratégie de mobilisation des

    ressources en eau 26

    2.3. L'exploitation agricole de l'eau 27

    2.3.1. L'importance de l'irrigation 27

    2.3.2. La dominance de la petite hydraulique 28

    2.3.3. L'importance de l'irrigation d'appoint 28

    2.3.4. Situation et perspectives en zone semi-aride 30

    2.4. Remarques et conclusion sur le rôle du lac collinaire en zone semi-aride 32

  • CHAPITRE 3: PRÉSENTATION DE L'ÉTUDE 34

    3.1. Problématique générale de la qualité de l'eau dans les lacs collinaires 34

    3.1.1. Le risque de salinisation 34

    3.1.2. Le niveau trophique 35

    3. 1.3. Les risques sanitaires 35

    3.2. Les objectifs de l'étude 36

    3.2.1. La caractérisation géochimique des lacs collinaires 37

    3.2.2. L'étude du comportement géochirnique du phosphore dans les lacs collinaires 37

    CHAPITRE 4: PRÉSENTATION DES LACS COLLINAIRES ÉTUDIÉS 38

    4.1. Description des lacs collinaires et de leur bassin versant 38

    4. 1. 1. Choix et localisation 38

    4.1.2. Caractéristiques des retenues 39

    4.1.3. Caractéristiques des bassins versants 39

    4.2. Usages de l'eau 42

    4.3. Fonctionnement hydrologique des lacs collinaires 44

    4.3. 1. Principe général 44

    4.3.2. Comportement des lacs collinaires durant la période hydrologique 1994-1996 45

    4.4. Conclusion , '" '" 53

    2ème partie: Caractérisation géochimique des lacs collinaires

    CHAPITRE 1 : INTRODUCTION À L'ÉTUDE GÉOCHIMIQUE DES LACS COLLINAIRES 57

    1.1. Rappel des principaux paramètres d'évaluation de la qualité des eaux à usages agricoles57

    1.1.1. Qualité des eaux pour l'irrigation 57

    1.1.2. Qualité des eaux pour l'alimentation des élevages 59

    1.2. Présentation générale de la salinité des eaux de la Tunisie semi-aride 60

    1.2.1. Salinité des eaux de surface 60

    1.2.2. Salinité des eaux souterraines 61

    1.3. Principaux déterminants du comportement hydrochimique d'un petit barrage en zone

    semi-aride 62

    1.3. 1. Les termes du bilan hydra-salin 62

    1.3.2. Evolution des eaux et salinisation 63

    1.3.3. Conclusion 65

    CHAPITRE 2 : MÉTHODE D'ÉTUDE 66

    2.1. Echantillonnage 66

    2.1.1. Fréquence d'échantillonnage 66

    2

  • Table des matières

    2.1.2. Prélèvements et conservation des échantillons......................................................67

    2.2. Mesures et analyses physico-chimiques 68

    2.3. Modèles d'équilibres chimiques 69

    CHAPITRE 3 : VARIABILITÉ DE LA SALINITÉ DES EAUX DES LACS COLLINAIRES .70

    3.1. Salinité globale des eaux analysées 70

    3.2. Répartition géographique des salinités 72

    3.3. Relation entre la salinité et l'hydrologie 73

    3.4. Variation saisonnière de la salinité 74

    3. 5. Conclusion 76

    CHAPITRE 4 : TYPOLOGIE GÉOCHIMIQUE DES LACS COLLINAIRES 77

    4.1. Caractéristiques géochimiques globales 77

    4.1.1. Composition ionique des eaux étudiées 77

    4.1.2. Relations géochimiques d'ensemble 79

    4.1.3. Faciès géochimiques 79

    4.1.4. Equilibres géochimiques 81

    4. 1.5. Conclusion 83

    4.2. Caractéristiques des eaux de remplissage 84

    4.2.1. Répartition des lacs collinaires par groupe géochimique 84

    4.2.2. Caractéristiques des eaux sulfatées - calciques et sulfatées - mixtes 87

    4.2.3. Caractéristiques des eaux à dominante bicarbonatée - calcique 88

    4.2.4. Caractéristiques des eaux à dominante chlorurée - sodique 90

    4.3. Analyse de l'évolution géochimique des eaux. 90

    4.3. 1. Amplitude de variation des concentrations 90

    4.3.2. Evolutions géochimiques des eaux 96

    4.3.3. Variations du facteur de concentration au cours de l'évaporation 120

    CHAPITRE 5: SYNTHÉSE ET CONCLUSION 126

    3ème partie: Etude de la régulation géochimique du phosphore

    INTRODUCTION . . 135

    CHAPITRE 1 : LE CYCLE DU PHOSPHORE DANS LES ÉCOSYSTÈMES LACUSTRES 136

    1.1. Les formes du phosphore 136

    1. 1. 1. Le phosphore inorganiq ue ..". .. 136

    1. 1.2. Le phosphore organique 137

    1.2. Origine et rôle du phosphore dans les milieux lacustres 138

    3

  • 1.3. Le cycle du phosphore dans les milieux lacustres: principaux mécanismes 139

    1.3,1. Vue d'ensemble du cycle du phosphore 139

    1.3.2. Mécanismes d'adsorption/désorption 139

    1.3.3, Mécanismes de précipitation/dissolution 143

    1.34. Mécanismes biologiques , 145

    1.3 .5. Phénomènes de transport........................................................................................... 147

    lA. Importance relative des mécanismes de rétention et relargage du phosphore du sédiment149

    1A.1. La mobilité du phosphore du sédiment.. 149

    14.2. Mises en jeu des mécanismes d'immobilisation du phosphore 149

    1.4.3. Mobilisation du phosphore du sédiment 15 1

    1.4A. Principaux facteurs déterminant la mobilisation du phosphore du sédiment.. 154

    14. 5. Influence de l'assèchement sur la mobilisation du phosphore du sédiment. 155

    1.4.6, Conséquences pour la mobilisation du phosphore dans les lacs collinaires 156

    1.5. Principales méthodes d'étude de la régulation géochimique phosphore 158

    1.5.1. Méthodes de spéciation du phosphore dans les sédiments 158

    1. 5.2. Les études des équilibres d'adsorption-désorption 162

    1. 5.3. Les études de la (co)précipitation/dissolution des phosphates de calcium 167

    CHAPITRE 2 : DÉMARCHE DE L'ÉTUDE 169

    2.1. Objectifs et lacs étudiés 169

    2.2. Méthode d'évaluation du niveau trophique des lacs collinaires 171

    2.2.1. Mesures et prélèvements sur le terrain 171

    2.2.2. Analyses 172

    2.3. Méthodes d'étude de la précipitation du phosphate de calcium 173

    204. Méthode d'étude du rôle des sédiments dans la régulation du phosphore 174

    2 A. 1. Prélèvements et conservati on des échantillons 174

    2.4.2. Traitement du sédiment 174

    2.4.3. Caractérisation du sédiment 174

    2A.4 Spéciation du phosphore des sédiments " .. , 176

    24. 5. La réalisation d'isothermes d'adsorption " "..... 176

    CHAPITRE 3 : LES INDICES DU FONCTIONNEMENT BIOLOGIQUE DES LACS

    COLLINAIRES .,., , " , ,',........ . , " 180

    3.1. Température, oxygène dissous et transparence dans les lacs collinaires 180

    3.1.1. Rappels sur les paramètres déterminant la structure verticale de la colonne d'eau 180

    3.1.2. Evolution des températures , 182

    3, 1. 3. Les teneurs en oxygène de surface................................................................ 184

    3. 14. Structure verticale des lacs en période estivale 186

    3.1.5. Stabilité des stratifications thermiques à Fidh Ben Ali, Es Seghir et M'Richet el Anze. 193

    4

  • Table des matières

    3.1.6. Relation entre la transparence et la profondeur de la zone mélange 204

    3. 1.7. Principales conclusions sur la structure verticale des lacs collinaires 205

    3.2. Concentrations en phosphore dans l'eau des lacs collinaires 207

    3.3. Teneurs en pigments chlorophylliens 215

    3. 4. Conclusion 220

    CHAPITRE 4 : ETUDE DES ÉQUILIBRES DE RÉGULATION GÉOCHIMIQUE DU

    PHOSPHORE DANS LES LACS COLLINAIRES 222

    4.1. Rôle des équilibres de précipitation des phosphate de calcium. 222

    4.1.1. Situations des eaux des lacs collinaires dans les diagrammes d'équilibre des phosphates

    de calcium 222

    4.1.2. Précipitation du phosphate de calcium dans les eaux de Fidh Ben Ali 223

    4. 1.3. Conclusion 225

    4.2. Rôle des sédiments dans la régulation du phosphore des lacs collinaires 225

    4.2.1. Caractérisation des sédiments étudiés 225

    4.2.2. Les formes du phosphore dans le sédiment des lacs collinaires 230

    -1.2.2.1. Phosphore total. 230-1.2.2.2. Phosphore extrait 234-1.2.2.3. Le phosphore labile 234-1.2.2.4. Le phosphore lié au fer 236-1.2.2.5. Le phosphore lié au calcium 237-1.2.2.6. Le pho.~phore mganiqlle soluble à l'acide 239-1.2.2. 7. Le pho~phore orgamqlle résiduel 239-1.2.2.8. Bilan et mnclusion 2-10

    4.2.3. Etude expérimentale des équilibres d'adsorption du phosphore 243

    -1.2.3.1. Evolution de la capacité d'adsorption des sédiments au cours du temps 2-13-1.2.3.2. b?f1uence du pH sur la capacité d'adsorption des sédiments 251-1.2.3.3. b!f1uence de la température sur la capacité d'adsorption des sédiments 254-1.2.3. -1. Ajustement des isothermes d'adsorption aux modèles théoriques 255-1.2.3.5. Bilan 260

    4.2.4. Conclusion 261

    CHAPITRE 5 • SYNTHÈSE ET CONCLUSION 263

    CONCLUSION GENERALE 269

    REFERENCES BIBLIOGRAPHIQlTES 275

    ANNEXES 287

    Table des illustrations 307

    5

  • Introduction

    générale

  • Introduction

    INTRODUCTION GENERALE

    Au début de la décennie, l'Etat tunisien a entrepris la construction de nombreux lacs collinaires

    avec pour objectif, la réalisation de 1000 de ces retenues à l'horizon 2000. Ce vaste chantier

    s'inscrit dans une politique générale de conservation des eaux et des sols mise en œuvre pour faire

    face à un régime pluviométrique à la fois capricieux et à fort pouvoir érosif. Les lacs collinaires

    devraient contribuer à limiter l'envasement de grands barrages situés en aval, tout en augmentant

    la maîtrise des eaux de surface et notamment la recharge de nappes.

    Bien qu'étant de faible capacité (quelques 10.000 à 250.000 m\ ces aménagements ouvrent des

    perspectives locales de mise en valeur d'une nouvelle ressource en eau, dans des zones souvent

    déshéritées en la matière. Ces retenues sont ainsi plus ou moins mises à profit par les populations

    avoisinantes pour satisfaire des besoins domestiques, l'abreuvement du cheptel et l'irrigation

    d'appoint de petits périmètres. La connaissance de la qualité de l'eau de ces petits barrages

    apparaît alors indispensable pour assurer une gestion optimale de la ressource car son altération

    compromettrait les différents usages qui peuvent en être faits.

    La principale menace pour la qualité de ces eaux provient de la concentration des sels en raison de

    l'exposition à une forte évaporation. L'accumulation de sels peut rendre l'eau impropre à

    l'alimentation du bétail ou surtout à l'irrigation (toxicité pour les cultures, salinisation des sols).

    Ce problème est commun aux zones semi-arides, et une étude sur le comportement

    hydrochimique de ce type de retenue a déjà été réalisée dans le cas des açudes du Nordeste

    brésilien (Laraque, 1991).

    Du point de vue biologique, la présence de nutriments (azote et phosphore) serait favorable à la

    production biologique mais un enrichissement excessif peut conduire à une eutrophisation des

    plans d'eau et aux diverses nuisances que celle-ci engendre : prolifération d'algues indésirables,

    développement de micro-organismes pathogènes, anoxie...

    Le phosphore est souvent le principal responsable de l'eutrophisation des lacs et des rivières, son

    cycle dans les milieux aquatiques est pour cela amplement étudié, en particulier en zone tempérée.

    Dans les lacs collinaires, les mécanismes géochimiques de la régulation du phosphore devraient

    intervenir de façon déterminante. En effet, les phases d'assèchement ou de forte sédimentation qui

    sont liées au régime d'écoulement devraient avoir des conséquences importantes pour les

    échanges du phosphore à l'interface eau-sédiment. Le contexte calcaire devrait, pour sa part, se

    traduire par la mise en jeu des phénomènes de précipitation du phosphore par le calcium.

    9

  • L'objectif de cette étude est donc dans un premier temps, de caractériser la géochimie des lacs

    collinaires et de préciser le risque de dégradation de la qualité des eaux pour l'usage agricole. Il

    s'agit ensuite, d'évaluer le niveau trophique des plans d'eau et d'étudier les équilibres géochimiques

    pouvant intervenir dans le régulation du phosphore. Ce travail porte sur une vingtaine de lacs

    collinaires répartis dans la zone semi-aride de la Tunisie. Ces retenues sont celles qui ont été par

    ailleurs équipées par l'équipe d'Hydrologie de l'Orstom pour le suivi et l'analyse du

    fonctionnement hydrologique des ces aménagements.

    La première partie de ce mémoire dresse le cadre générale de l'étude. La physio-géographie de la

    Tunisie semi-aride est brièvement évoquée et la ressource hydrique est décrite en référence à sa

    répartition à l'échelle nationale. Les enjeux de la politique nationale de mobilisation des ressources

    en eau et les principaux aspects de l'exploitation agricole de l'eau permettent ensuite de préciser le

    rôle du lac collinaire. La problématique de la qualité de l'eau et les objectifs de l'étude sont alors

    explicités et lacs collinaires étudiés sont finalement présentés.

    La deuxième partie est consacrée à la caractérisation géochimique des lacs collinaires. Un chapitre

    introductif rappelle les principaux paramètres d'évaluation de la qualité des eaux à usage agricole

    et fait le point sur la salinité des ressources en eau de la Tunisie semi-aride; les termes du

    fonctionnement hydro-salin des lacs collinaires sont alors précisés. Le deuxième chapitre décrit les

    méthodes d'échantillonnage et d'analyse et les résultats sont exposés dans les chapitres suivants.

    En premier lieu, la salinité des eaux est analysée d'un point de vue global et selon des

    considérations géographiques, hydrologiques et d'évolution saisonnière. La typologie

    géochimique des lacs collinaires est alors abordée : la composition géochimique des eaux est

    analysée, les groupes géochimiques sont identifiés et l'évolution des eaux est finalement

    appréhendée. Un dernier chapitre fait la synthèse des résultats.

    La troisième partie concerne l'étude de la régulation géochimique du phosphore. Un premier

    chapitre bibliographique rappelle les principaux mécanismes déterminant le cycle du phosphore

    dans les milieux aquatiques, il souligne l'importance relative de ces divers mécanismes pour le

    piègeage-relargage du phosphore dans les sédiments. Les méthodes d'étude de la régulation

    géochimique du phosphore clôturent ce chapitre . Le second chapitre présente notre démarche

    d'étude. Le chapitre 3 analyse les indices du fonctionnement trophique des lacs collinaires, à

    savoir : la structure verticale des plans d'eau ainsi que les concentrations en phosphore et en

    chlorophylle a dans l'eau. Le chapitre 4 traite des équilibres géochimiques mis en jeu dans la

    régulation du phosphore dans les lacs collinaires les équilibres par rapport aux phosphates de

    calcium sont considérés et le rôle du sédiment est analysé sur le plan de la spéciation et du point

    de vue des équilibres d'adsorption. L'ensemble des résultats est repris dans un dernier chapitre.

    10

  • 1ère Partie

    Cadre général de l'étude

    et Objectifs

  • lèr~ Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    Chapitre 1 : Présentation de la Tunisie semi-aride

    1.1. Cadre géographique

    La Tunisie est divisée en trois grandes régions géographiques: la Tunisie du Nord, la Tunisie

    Centrale et la Tunisie du Sud. Dans la région Nord, les massifs telliens encadrent la grande vallée

    de la Medjerda. Les reliefs de l'Atlas s'étendent dans la zone Centrale avec les formations de la

    Grande Dorsale et la zone des Hautes steppes, tandis que les Basses steppes forment la région

    littorale du Sahel. La région Sud, présaharienne, est formée d'étendues arides à désertiques.

    La zone semi-aride est délimitée par les isohyètes 250 et 500 mm (figure 1). Elle couvre la pointe

    littorale du Cap Bon, située dans la région Nord, et une partie importante de la Tunisie Centrale:

    elle délimite les reliefs de la Grande Dorsale qui s'étend de la frontière algérienne au Cap Bon et

    inclut la partie nord du Sahel. Les régions administratives (gouvernorats) comprises dans cette

    zone sont celles de Nabeul, Zaghouan, Siliana, Sousse, Kairouan, et Kasserine.

    " ..............'.~

    ,.l.•......~.~ .

    /.'"..'! -- --

    ""

    KASSERINE

    ---

    KAIROUAN

    -~--

    Isohyètes interannuelles..........., Limites de Gouvernorats

    SOkm

    figure 1 - Délimitation de la zone semi-aride de la Tunisie

    13

  • 1.2. Reliefet lithologie de la zone collinaire

    La zone d'implantation des lacs collinaires dans la région semi-aride comprend les reliefs du Cap

    Bon et ceux de la Grande Dorsale.

    La Grande Dorsale est formée d'une série de djebels qui s'alignent sur un axe sud-ouest nord-est

    avec des altitudes supérieures à 1 000 mètres mais diminuant d'ouest en est. Elle comprend le plus

    haut sommet du pays, le Chambi (1571 m), situé dans la région de Kasserine près de la frontière

    algérienne. Les formations, d'origine sédimentaire, sont dominées par la série des calcaires

    (parfois dolomitiques), calcaires-marneux, marno-calcaires et marnes d'âge Crétacé et Eocène.

    Des matériaux détritiques du Miocène constitués de grès, de sables et d'argiles sableuses reposent

    sur ces formations, tandis que les argiles et marnes gypseuse du Trias affieurent ponctuellement.

    Ces dépôts tertiaires sont largement recouverts par des dépôts quaternaires modelés en grands

    glacis d'accumulation, souvent fossilisés par un encroûtement calcaire. Les alluvions et colluvions

    comblent les dépressions et les entailles (DGRE/ORSTOM, 1986).

    1.3. Climat

    Le climat du Cap Bon est sous l'influence de la Méditerranée orientale, celui de la Tunisie

    Centrale fait la transition entre le climat méditerranéen de la région Nord et le climat présaharien

    de la région Sud. L'influence prédominante sur la zone de la masse d'air méditerranéenne ou

    saharienne varie selon les saisons et les années. Les caractéristiques climatiques varient aussi

    localement selon la latitude et la continentalité qui croît avec l'altitude et l'éloignement de la mer.

    Les indications données ci-après font référence aux bassins versants des oueds Zéroud et

    Merguellil situés dans la partie sud sud-ouest de la zone semi-aride (DGRE/ORSTOM, 1986).

    Les températures

    Les températures moyennes annuelles se situent entre 15 et 200 e, elles diminuent d'est en ouest et

    avec l'altitude. A l'échelle mensuelle, le mois de janvier est le mois le plus froid avec une

    température moyenne inférieure à 100 e tandis que le mois plus chaud, juillet ou août, présente

    une température moyenne supérieure à 20°C. L'amplitude thermique saisonnière est importante:

    les maximums mensuels dépassent 300 e en été tandis que les minimums mensuels sont inférieurs à

    7°C en hiver, ils descendent à 3°e en janvier dans les hauteurs de Thala, Makthar et Kasserine

    alors exposées à des gelées permanentes.

    14

  • 1;',. Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    L'humidité

    L'humidité de l'air est aussi fluctuante avec la dominance des masses d'air sahariennes en été et

    celle des masses atlantiques en hiver. L'humidité relative moyenne mensuelle oscille entre 70% et

    55% de septembre à avril, et entre 40% et 55% de mai à août. Par temps humide, l'humidité

    relative peut dépasser 80%, mais elle peut tomber à 10% quand une masse d'air saharienne couvre

    la région. Les déficits de saturation de l'air sont donc très importants en été mais la brise de mer

    reste influente dans la frange côtière.

    Les vents

    Les vents sont fonction des localités, ils sont faibles la plupart du temps. En hiver, le jebbali

    provenant des hautes terres algériennes peut apporter des températures glaciales, tandis qu'entre

    avril et septembre, le sirocco apporte l'air chaud et sec du Sahara.

    L'évaporation

    L'évaporation annuelle est comprise entre 1200 et 2 000 mm selon les sites, mais la moitié de

    cette évaporation se produit entre les mois de mai et août. La pluviométrie de la zone semi-aride

    étant comprise entre 250 et 500 mm, le déficit hydrique annuel apparaît supérieur à 600 mm sur

    J'ensemble de la région.

    La pluviométrie

    La pluviométrie se caractérise par une importante irrégularité des précipitations qui présentent un

    caractère orageux typiquement méditerranéen. Cette irrégularité s'observe à l'échelle inter-

    annuelle avec des années de sécheresse qui apparaissent de façon aléatoire. Ben Osman (1991)

    évoque un bilan fait sur 80 années d'observations, indiquant l'apparition de 28 années de

    sécheresse. survenues de façon isolée dans 51 % des cas puis sur 2 et 4 années successives dans

    respectivement 24% et 13% des cas. Une étude fréquentielle des pluies réalisée sur 9 régions de la

    Tunisie a aussi fait apparaître l'importance de la variabilité inter-saisonnière et spatiale de la

    pluviométrie. cette variabilité est d'autant plus importante que les pluies sont rares.

    Dans la région du Centre, les pluies sont souvent torrentielles. Elles peuvent survenir à toutes

    périodes de l'année mais le printemps et l'automne apparaissent plus pluvieux que J'hiver, tandis

    que les pluies sont souvent nulles en été (Ben Aleya et al., 1989). Localement, J'altitude et

    l'exposition des versants seront des facteurs de variabilité de la pluviométrie.

    15

  • 1.4. Couvert végétal

    Le couvert végétal persistant sur les versants érodés est essentiellement constitué par des

    formations basses ligneuses (garrigue de romarin) et parfois herbacées (alfa); on trouve également

    des forêts plus ou moins denses de pins d'Alep dans les zones non dégradées.

    1.5. Ressources en eau

    Les ressources en eau du pays sont évaluées par la Direction Générale des Ressources en Eaux

    (DGIRE). Dans ce chapitre, elles sont présentées selon leur répartition régionale avec les

    précisions concernant la zone d'étude.

    1.5.1. La répartition des apports

    Sur les 36 milliards de m3 précipités au cours d'une année moyenne, seuls 2,7 milliards de m3

    s'écoulent dans les oueds. Le reste est évaporé ou infiltré vers les nappes souterraines qui

    renferment 1,8 milliards de m3 Les eaux de surface et les eaux souterraines renouvelables

    constituent les ressources en eau potentielles conventionnelles: elles représentent 4,4 milliards de

    nr' an.

    1.5.2. Les eaux de surface

    Les apports de surface sont concentrés dans la région Nord du pays qui bénéficie de 81 % des 2,7

    milliards de m3fan. Ces eaux sont essentiellement drainées par la Medjerda qui est le seul cours

    d'eau pérenne du pays avec un débit de base de 200 millions de m3 . Les unités hydrologiques du

    Centre ne voient s'écouler que 11% des apports de surface. soit environ 290 millions de m3 jan

    (DGIRE in: DG/PDIA, 1996) dont 190 millions de m3 /an dans la partie semi-aride.

    Les apports de base des principaux bassins versants du semi-aride sont les suivants (Ben Osman,

    1991): - Cap Bon: 20 Mm3

    - Nebhana: 55 Mm3

    - Zéroud: 15 Mm3

    - Merguellil: 7 Mm3

    A ces apports, s'ajoutent ceux de l'oued Rmel (Zaghouan), du Siliana et du Haut Mellègue, ces

    deux derniers bassins versants qui se situent dans la partie Nord du semi-aride, font partie du

    grand bassin de la Medjerda.

    16

  • 1;"0 Partie: Cadre général de l'élude et objectifs

    Les crues dans les régions du Centre sont souvent brusques et violentes et s'accompagnent d'un

    transport solide important. L'irrégularité du ruissellement est typique du régime semi-aride: le

    tableau 1 permet d'apprécier les variations des apports en eaux de surface dans la région Centre

    au cours de la décennie 1984-94. Cette période apparaît globalement déficitaire avec des apports

    annuels représentant en moyenne 64% de l'apport moyen, mais avec selon les années entre 13 et

    241 % de l'apport moyen.

    tableau 1 - Variabilité des apports en eau de surface de la région Centre entre 1984 et 1994

    (en millions de m3)

    Annéesannée 84-85 85-86 86-87 87-88 88-89 89-90 90-91 91-92 92-93 93-94 moy.

    moyen. 84-94

    apports 290 153 145 115 120 95 700 205 130 160 337 186Mm'

    ------ ------------------------------------------------% de la /00% 53% 50% 40% 41% 33% 241% 71% 45% 55% 13% 64%moyenne

    apports

    Tunisie 2700 3044 1 363 4319 840 1 121 3 315 3290 1 640 1 240 780 2095

    Mm3

    (d'après DG/RE in: DG/PDIA, 1996)

    1.5.3. Les eaux souterraines

    Les eaux souterraines qui s'élèvent à 1 840 millions de m3 proviennent en majorité (à 64%) des

    nappes profondes (à plus de 50 mètres de profondeur). Elles prédominent dans le Sud qui

    bénéficie de 45% de la ressource, localisée pour 85% au niveau de nappes profondes. Ces

    dernières sont souvent considérées comme fossiles: elles appartiennent dans leur ensemble à des

    structures sédimentaires de l'aire saharienne. Les nappes profondes renouvelables existent dans le

    Nord et le Centre du pays, elles se trouvent en général dans des bassins sédimentaires de

    moyennes dimensions à une profondeur n'excédant pas 500 m. Les nappes phréatiques sont par

    contre plus importantes au Nord qui regroupe 30% des ressources souterraines. La région du

    Centre bénéficie de 25% des eaux souterraines réparties entre les deux types d'aquifères.

    Le tableau 2 précise les ressources souterraines de la zone d'étude. Les eaux souterraines de

    Nabeul sont les plus importantes (196 millions de m3) et formées à 86% de nappes phréatiques.

    Les nappes de Zaghouan et Siliana sont par contre les moins pourvues. Les nappes de Kairouan et

    Kasserine renferment de 140 à 100 millions de m3 avec une dominance des nappes profondes qui

    représentent respectivement 60% et 73% des ressources souterraines.

    17

  • tableau 2 - Ressources en eaux souterraines de la Tunisie

    (1990) Ressources souterraines Mm3/an

    Nappes phréatiques profondes Total

    Nord 362,4 186,9 549,3

    Nabeul 169,4 26,9 196,3

    Zaghouan 10,7 16,2 26,9

    Siliana Il,3 12,7 24,0

    Centre 207,7 254,0 462,7

    Kairouan 58,2 80,4 138,6

    Kasserine 28,2 72,7 100,9

    Sud 94,1 733,8 827,9

    Tunisie 664,2 1 175,7 1839,9

    (d'après DG/RE in: DG/PDIA, 1996)

    18

  • l~U Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    Chapitre 2: La gestion des ressources en eau et le rôle des lacs collinaires

    Le lac collinaire constitue l'un des éléments de la politique nationale de mobilisation des

    ressources en eau. Pour ressituer sa place dans cette perspective, ce chapitre présente les enjeux

    de cette politique (2.1) avec les divers aménagements mis en oeuvre (2.2). Des précisions seront

    apportées sur l'importance de ces aménagements dans la satisfaction des besoins agricoles (2.3).

    2./. Enjeux et stratégies de mobilisation des ressources en eau

    2.1.1. Les besoins en eau de la Tunisie

    La plupart des indications concernant les besoins en eau du pays et la stratégie de mobilisation de

    la ressource ont été tirées du "Bilan, stratégique des ressources en eau" du Ministère de

    l'Agriculture (DGIPDIA 1996).

    La précarité des ressources hydriques de la Tunisie a depuis toujours nécessité le recours à

    diverses techniques de collecte et de valorisation des eaux dont les traces se retrouvent jusqu'à

    l'époque romaine (El Amami, 1984; Pérennès, 1993). Aujourd'hui, le potentiel de mobilisation des

    ressources en eau renouvelables atteint ses limites alors que la demande en eau ne cesse

    d'augmenter avec la croissance démographique et l'amélioration du niveau de vie de la population.

    La FAD fixe le minimum indispensable à la satisfaction des besoins de chaque individu à

    1 000 m3/hab./an et situe ainsi la Tunisie parmi les 10 premiers pays menacés par la pénurie d'eau

    (FAD, 1994). En 1994,75% des ressources conventionnelles étaient déjà mobilisées, donnant un

    ratio de 333 m3/hab./an pour une population de 8,8 millions d'habitants. En 2025, la mobilisation

    de toutes les ressources en eau pour une population de 13 millions d'habitants donnerait un ratio

    de 300 m3/hab./an.

    Le secteur agricole absorbe 80% de la demande annuelle d'eau (tableau 3), le développement et

    la distribution spatiale des ressources en eau apparaissent indispensables pour répondre aux

    principaux objectifs de la politique agricole qui sont:

    - assurer la sécurité alimentaire du pays,

    - augmenter la flexibilité de la production afin de répondre à l'évolution de la demande,

    - stabiliser la population rurale en améliorant ses revenus.

    Dans le mème temps, la demande concurrentielle des secteurs urbains, industriels et touristiques

    s'accroît rapidement.

    19

  • tableau 3 - Demande en eau annuelle par secteur (en millions de m3)(Eau 2000 in DG/PDIA, 1996)

    Secteur 1994 2010

    Eau domestique 308 519

    Tourisme 20 58

    Industrie 109 123

    Irrigation 1 575 2540

    total 2012 3240

    Pour faire face à ce défi et assurer le développement optimal et durable de la ressource, la

    stratégie décennale de mobilisation des ressources en eau définie au début des années 1990 vise:

    - la mobilisation de l'ensemble des ressources en eau identifiées, c.a.d.la mise à disposition de

    100% des ressources souterraines et de 85% des eaux de surface potentielles;

    - la recherche de nouvelles ressources, notamment par la prospection géologique;

    - le développement de ressources non conventionnelles telles que les eaux usées et les eaux

    salées;

    - l'économie d'eau par l'adoption de techniques et de pratiques devant réduire le gaspillage.

    2.1.2. La lutte contre l'érosion et l'aménagement des bassins versants

    L'érosion est un autre grand défi pour le pays puisqu'elle menace 60% des 5 millions d'hectares de

    terres cultivables du pays. Les précipitations sont l'un des principaux agents érosifs et leur

    agressivité augmente du Nord au Sud. La zone semi-aride est particulièrement exposée, avec des

    terres en pente fragilisées par la dégradation du couvert végétal (déboisement, surpâturage) et les

    mauvaises pratiques culturales (morcellement vertical des parcelles). L'érosion entraîne

    l'appauvrissement des sols, elle a aussi un impact sur les ressources hydriques en diminuant

    l'infiltration de l'eau dans les sols et en accélérant le comblement des barrages.

    Dès l'indépendance, un travail de conservation des eaux et des sols a été entrepris pour contrer ce

    phénomène. La lutte contre l'érosion s'est intensifiée dans les années 1980 et, au début des années

    1990, un vaste chantier a été entrepris pour le développement et la généralisation des

    aménagements anti-érosifs. Ainsi, le traitement des terres en pentes par les banquettes, cordons de

    pierre et les bandes végétalisées se multiplie pour réduire le ruissellement à la parcelle.

    20

  • lu Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    Certains petits aménagements hydrauliques traditionnels (meskhats du Sahel, jessours de

    Matmata) qui permettent la collecte des eaux de ruissellement pour l'arboriculture sont restaurés.

    Les lacs collinaires, les barrages de dérivation et de recharge de nappes font partie des ces

    techniques dîtes de conservation des eaux et des sols (CES). Ces aménagements apparaissent

    comme les meilleurs moyens de lutte contre l'envasement des grands barrages, mais ils permettent

    aussi d'allouer une partie de la ressource hydrique aux populations situées en amont des bassins

    versants. Leur rôle socio-économique peut ainsi être important car ils contribuent à la mise en

    valeur de zones rurales reculées souvent désoeuvrées, où la disponibilité en eau est un facteur

    déterminant la fixation des populations (Ben Osman, 1991).

    2.2. Mobilisation des ressources en eau

    2.2.1. Bilan général

    Comme le rappelle le tableau 4, les 4,4 milliards de m3/an de ressources en eau conventionnelles

    du pays se partagent entre 61 % d'eaux de surface et 39% d'eaux souterraines renouvelables. Les

    eaux de surface potentielles sont considérées comme régularisables à 80%, les 20% restant sont

    maîtrisables et plus ou moins valorisables. En 1994, les 2/3 des ressources potentielles étaient déjà

    mobilisées: 60% des eaux de surfaces exploitables et 93% des ressources souterraines étaient

    valorisées avec une surexploitation au niveau des nappes phréatiques.

    2.2.2. La mobilisation des eaux de surface

    En 1994, la mobilisation des eaux de surfaces s'élevait à 1,3 milliards de m3 (tableau 4). La

    mobilisation des 2,2 milliards de m3 de ressources potentielles exploitables est prévue pour l'an

    2000, grâce au développement d'ouvrages d'accumulation (grands barrages et barrages collinaires)

    (DG/PDIA, 1996). Les 540 millions de m3 de ressources potentielles restantes, devraient être mis

    à profit par l'aménagement des bassins versants selon les techniques de conservation des eaux et

    des sols: lacs collinaires, barrages de dérivation et de recharge de nappes, etc...

    21

  • tableau 4 - Bilan des ressources en eau potentielles et valorisées en 1994(DG/PDIA, 1996)

    Ressources potentielles valorisées

    (Mm3/an) totales exploitables (1994)

    Eaux de surface : 2700 2 160 1 300

    Eaux souterraines :

    - nappes phréatiq. 669 669 699

    - nappes profondes 1080 1080 930

    Total: 4449 3909 2929

    Les grands ba"ages

    Les grands barrages assurent l'essentiel de la mobilisation des eaux de surface. Jusqu'au début de

    la décennie, 17 barrages réalisés sur les principaux bassins versants du pays mobilisaient 1,242

    milliards de m3, essentiellement dans la partie Nord du pays. La stratégie décennale prévoit

    l'édification de 21 nouveaux barrages pour une mobilisation totale de 2 milliards de m3, soit de

    94% des eaux de surfaces exploitables (Laroussi, 1991). Dans la région Centre, la mobilisation de

    57% de la ressource est déjà assurée par les barrages de Nebhana (30,2 Mm\ El Haouareb (42,0

    Mm\ Sidi Saâd (93,7 Mm') situés dans le gouvernorat de Kairouan ~Laroussi, 1991). Les

    barrages existants et prévus pour la zone semi-aride sont précisés dans le tableau 5. Ces ouvrages

    devant mobiliser un total de 367,9 millions de m3 sont destinés à:

    - la protection des plaines avales contre les crues,

    - la recharge des nappes,

    - l'irrigation.

    tableau 5 - Répartition des grands barrages réaliséset prévus par régions (Laroussi, 1991)

    Régions nbr Mm3

    gds bar. mobilisés

    Nord dont: 32 1 775

    - Nabeul 7 55,5

    - Zaghouan 1 43,9

    - Siliana 3 82,1

    Centre dont: 6 206,4

    - Kairouan 3 165,9

    - Kasserine 2 20,5

    Tunisie 38 1 981

    22

  • i'" Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    Les principaux problèmes liés à l'exploitation de grands barrages sont (Ben Osman, 1991) :

    - l'envasement des réservoirs qui diminue la capacité de mobilisation de la ressource;

    - les pertes d'eau par évaporation;

    - l'eutrophisation liée aux pollutions d'origines domestiques, agricoles ou industrielles.

    Dans le semi-aride, les deux premiers points sont particulièrement critiques en raison de

    l'importance du transport solide qui accompagne les crues et de la forte évaporation qui prévaut,

    en particulier lors des périodes de sécheresse. Les menaces d'eutrophisation concernent plus

    particulièrement les ouvrages implantés sur les affluents urbains du bassin de la Medjerda, tel que

    le barrage de Sidi Salem (447,8 Mm3/an) qui est l'ouvrage le plus important, contribuant à

    l'alimentation en eau potable de Tunis et des agglomérations du littoral (DG/PDIA, 1996).

    Les barrages collinaires

    Les barrages collinaires (de 0,5 à quelques millions de m3) doivent permettre la mobilisation des

    6% d'eaux de surface exploitables restant (128 millions de m3). A la fin août 95, 61 barrages

    collinaires étaient réalisés sur les 200 prévus pour l'an 2000 (DGIPDIA, 1996). Situés plus en

    amont que les grands barrages, ces ouvrages présentent un coût relativement élevé par rapport

    aux volumes d'eau mobilisés mais leur incidence socio-économique locale devrait être importante

    (Laroussi, 1991). La zone semi-aride est concernée par 85 de ces ouvrages qui mobiliseront 71,1

    millions de m', ils se répartiront dans les divers gouvernorats comme indiqué dans le tableau 6.

    tableau 6 - Répartition des barrages collinaires réalisés et prévuspar régions (Laroussi, 1991)

    Régions nbr Mm3

    bar. collin. mobilisés

    Nord dont: 196 99,5

    - Nabeul 26 14,4

    - Zaghouan Il 12,3

    - Siliana 23 17,8

    Centre dont: 31 28,6

    - Kairouan 12 4,3

    - Kasserine 19 24,3

    Tunisie 227 128,1

    23

  • Les lacs collinaires

    Une cinquantaine de lacs collinaires (5 000 à 500 000 m3) existait depuis les années 60 dans la

    région Centre, mobilisant environ 3 millions de m3fan (Laroussi, 1991). La stratégie décennale

    prévoyant "1000 lacs collinaires à l'horizon 2000", 245 unités étaient déjà recensées fin août 1995

    dans le Nord et le Centre du pays (DG/PDIA, 1996). Ces ouvrages devraient permettre la

    mobilisation de 53 millions de m3fan, soit 10% des ressources potentielles non exploitables par les

    barrages de plus grande taille.

    La petite capacité de ces ouvrages ne leur permet pas d'assurer une régulation inter-annuelle des

    stocks, ils sont par ailleurs très sensibles à l'envasement. En outre, en tant qu'ouvrage CES, le lac

    collinaire peut a priori aussi bien être destiné à la rétention des eaux de ruissellement qu'à celle des

    sédiments pour la protection des grands barrages situés en aval. Dans la zone semi-aride, 500 lacs

    collinaires devraient être implantés selon la répartition indiquée dans le tableau 7, ils

    représenteront une capacité globale de 24,5 Mm3.

    tableau 7 - Répartition des lacs collinaires réaliséset prévus par régions (Laroussi, 1991)

    Gouvernorat nbr Mm3

    lacs collin. mobilisés

    Nord dont: 795 40,4

    - Nabeul 80 4,0

    - Zaghouan 120 6,5

    - Siliana 120 6,0

    Centre dont: 255 12,6

    - Kairouan 80 4,0

    - Kasserine 100 4,5

    Tunisie 1050 53,0

    Les ouvrages de suralimentation de nappe et d'épandage de crues

    Ces ouvrages CES sont spécifiquement destinés à la maîtrise des eaux de surface dans les zones

    sub-arides

    L'épandage de crue est un mode traditionnel d'irrigation basé sur la dérivation des eaux de crues,

    il joue aussi le rôle de protection des zones inondables mises en valeur en aval. La dérivation des

    eaux des oueds s'effectue par l'intermédiaire de brèches à l'entrée desquelles des seuils peuvent

    être construits pour élever le niveau de l'eau dans l'oued. La stratégie décennale prévoit la maîtrise

    de 47 millions de m3 par 2000 de ces ouvrages.

    24

  • };.,. Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    Les ouvrages de suralimentation de nappe freinent la crue de façon à favoriser l'infiltration des

    eaux dans le lit des oueds: 2 000 ouvrages de ce type sont aussi prévus.

    2.2.3. La mobilisation des eaux souterraines

    Les eaux souterraines renouvelables sont estimées à 1,8 milliards de m3 si on ne tient pas compte

    de la qualité saline des eaux qui peut en limiter les usages. Le tableau 8 fait le bilan de

    l'exploitation de la ressource dans la zone semi-aride, en précisant les taux de surexploitation et

    les volumes restant mobilisables.

    tableau 8 - Bilan d'exploitation des ressources en eaux souterraines (Mamou, 1993).

    Régions Nappes phréatiques Nappes profondes

    ( 1990) exploitées % disponibles* exploitées % disponibles*

    (Mm3) sur-exploit. * (Mm3) (Mm3) sur-exploit. * (Mm3)

    Nord 377,4 28% 89,6 74,1 3% 114,8

    Nabeul 226,9 35% 22,0 12,1 0% 14,8

    Zaghouan 6,3 0% 4,5 9,9 8% 7,0

    Siliana 12,5 19% 1,2 7,6 16% 6,4

    Centre 232,9 20% 19,5 178,1 2% 80,3

    Kairouan 58,0 3% 1,8 54,5 0% 26,1

    1 Kasserine 28,5 13% 3,4 55,6 0% 17,1

    Sud 90,5 22% 23,1 598,8 9% 191,5

    (*) les taux de surexplOitation se rapportent aux nappes effectIvement explOItées : des ressources peuvent être

    parallèlement disponibles

    La mobilisation des nappes phréatiques

    Les nappes phréatiques sont largement exploitées à partir des puits de surface disséminés sur

    l'ensemble du territoire. Entre 1980 et 1990 le nombre de puits a presque doublé (110 000

    recensés en 1990) et le volume d'eau exploité a augmenté de 80%, passant de 395 Mm3fan à

    700 Mm3fan (Mamou, 1993). La ressource (670 Mm3) apparaît donc déjà globalement

    surexploitée. Le tableau 8 indique un taux de surexploitation des nappes important dans le

    gouvernorat de Nabeul, certaines nappes (Grombalia, El Haouaria) ont vu leur qualité chimique se

    dégrader de façon irréversible suites aux intrusions salines.

    25

  • Un programme national de recharge induite des nappes phréatiques vise à pallier la

    surexploitation des nappes. Il s'appuie sur les ouvrages de maîtrise des écoulements de surface,

    ces derniers étant sinon à la fois trop violents et aléatoires pour permettre une alimentation

    efficace des nappes. Les lacs et barrages collinaires, autant que les ouvrages d'épandage de crue et

    de suralimentation de nappes, sont mis à profit à cette fin (Laroussi, 1991).

    La mobilisation des nappes moyennes et profondes

    Les nappes profondes sont exploitées à partir de sources et de forages, 2 400 points d'eau étaient

    recensés en 1994 pour l'exploitation totale de 930 millions de m3. La plupart des prélèvements

    s'opèrent dans les aquifères du Sud (tableau 8), une part importante concerne les aquifères

    fossiles. La région du Centre réalise 20% des prélèvements qui sont passés de 156 à 190 millions

    de m3/an de 1980 à 1994 (DGIRE, 1994).

    Les nappes profondes permettent l'approvisionnement en eau potable dans les zones rurales, une

    place importante est donc accordée à la prospection géologique souterraine pour satisfaire les

    besoins en eau des populations (Laroussi, 1991).

    2.2.4. Conclusion sur la place des lacs collinaires dans la stratégie de mobilisation

    des ressources en eau

    La stratégie décennale de mobilisation des ressources en eaux conventionnelles table

    essentiel1ement sur la récupération de l'ensemble des ressources en eaux de surface. Dans le même

    temps, un effort particulier est réalisé pour augmenter la recharge des nappes phréatiques dont le

    potentiel est déjà surexploité, tandis que la prospection géologique vise l'identification de nappes

    profondes.

    L'importance des lacs collinaires dans la gestion des ressources en eau paraît minime à l'échel1e

    nationale. Ils représentent une capacité de mobilisation de 2,5% des ressources en eau de surface

    potentielles. A l'échelle régionale, même si les deux tiers de ces ouvrages doivent être implantés

    dans la région Nord, ils représenteront une part légèrement plus importante des ressources

    mobilisées dans la région Centre (5,3%). En zone semi-aride, les lacs collinaires prévus

    représentent une capacité de mobilisation de 2,3% à 10,5% des ressources en eau de surface selon

    les gouvernorats.

    En tant qu'ouvrage de CES, le lac collinaire est aussi présenté comme un moyen de lutte contre

    l'envasement des grands barrages. Cependant, si l'ensemble des lacs collinaires étaient astreints à

    cette tâche, ce ne seraient à terme que quelques dizaines de milliers de m3 de sédiments qui

    seraient piégés dans les retenues, alors que le volume moyen annuel de sédimentation dans les

    barrages est de 25 millions de m3 (Fauck et al., 1991).

    26

  • J''' Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    L'intérêt de ces ouvrages apparaît essentiellement au niveau local et en terme de décentralisation

    de la ressource au profit des zones reculées. Leur contribution à la recharge des nappes serait, par

    ailleurs, très opportune.

    2.3. L'expLoitation agricoLe de L'eau

    Pour mieux évaluer le rôle du lac collinaire dans l'activité agricole, quelques considérations sur

    l'importance des différentes ressources en eau pour ce secteur, en particulier dans le semi-aride.

    2.3.1. L'importance de l'irrigation

    La production agricole de la Tunisie est assez diversifiée, avec des cultures arboricoles (agrumes,

    dattes, vigne, olivier, rosacées... ), maraîchères (tomate, patate, piment, melon... ) fourragères

    (sorgho, maïs... ) et céréalières (blé). Environ 45% des terres irriguées sont destinées aux cultures

    maraîchères, 34% à l'arboriculture fiuitière, 13% aux cultures fourragères et 18% à la

    céréaliculture et autres cultures. Le secteur irrigué assure en moyenne 32% de la production

    agricole et 13% du PNB de la Tunisie. Vers l'an 2000, le secteur irrigué devrait assurer 50% de la

    production agricole. En effet, du point de vue qualitatif, les sols de la Tunisie présentent une.

    aptitude plutôt favorable à l'irrigation et le potentiel irrigable de ces terres n'est pas encore

    totalement exploité (Ennabli, 1995). Sur une superficie cultivable d'environ 5 millions d'hectares,

    la surface irrigable potentielle représente 570 000 ha (dont 405 000 ha en intensif) répartis à 37%

    dans le Nord et 55% dans le Centre. Au début de la décennie, les périmètres irrigués en intensif

    dépassaient 300 000 ha et se situaient à 57% au Nord, 32% au Centre et 11% dans le Sud (CRDA

    in: DG/PDIA, 1996) (voir chap. 2.3.4).

    Le tableau 9 indique que les surfaces lITIguées en intensif au début de la décennie étaient

    essentiellement alimentées à partir des puits de surface (41%) et des barrages (32%). Au terme de

    la mobilisation des ressources en eau, l'aménagement de l'ensemble des surfaces irrigables

    potentielles résultera essentiellement d'une augmentation des surfaces irriguées à partir des

    barrages (+59%). Les superficies irriguées à partir des nappes phréatiques ne peuvent guère plus

    se développer dans la mesure où la ressource est déjà surexploitée. Les lacs collinaires sont

    implantés chaque fois que cela est faisable pour compléter la mobilisation des eaux de surface,

    mais les surfaces potentiellement irrigables à partir de ces retenues (14900 ha) représenteraient en

    final moins de 4% de la superficie irrigable en intensif Comme nous le verrons plus bas, il est

    prévu d'augmenter de façon importante les superficies susceptibles de recevoir une irrigation de

    complément (+85%).

    27

  • tableau 9 - Superficies irrigables potentielles et effectives en 1990selon la ressource en eau (d'après VIlème Plan (1987-1991),1987)

    Origine Superficie irrigable (ha)

    de la ressource en 1990 Potentiel

    Grands barrages et 98800 157000

    barrages collinaires

    Lacs collinaires 900 14900

    Nappes profondes 57900 61 900

    Nappes phréatiques 125 700 130 100

    Oueds 14300 14300

    Eaux usées traitées 6000 28400

    Total irrigable intensif 303600 406600

    +Irrigation de complément 90700 167700

    Total 394300 574300

    Allocation hydraulique 1 575 Mm3 2450 Mm3

    (millions de m3fan) (1987-91)

    2.3.2. La dominance de la petite hydraulique

    Les périmètres publics irrigués (PPI) à partir des barrages ou des forages profonds sont récents :

    l'irrigation s'est avant tout développée à partir de la petite hydraulique correspondant à

    l'exploitation individuelle des puits de surface ou des oueds. La petite hydraulique a toujours été

    encouragée car les ressources souterraines existent dans une large part du pays, en particulier

    dans le Centre et le Sud. La création et l'exploitation des puits est par ailleurs à la portée du petit

    exploitant. Actuellement, les petits périmètres ainsi mis en valeur représentent 46% de la

    superficie irrigable, les puits fournissant environ 560 millions de m3fan pour l'irrigation. Les

    périmètres d'irrigation traditionnels sont particulièrement nombreux dans le Nord-Est (Bizerte,

    Tunis, Cap Bon) et le Centre (Sidi Bou Zid, Kairouan) du pays (Ennabli, 1995).

    Si l'hydraulique paysanne fait preuve de dynamisme et d'ingéniosité, elle est aujourd'hui

    confrontée aux méfaits de la surexploitation des nappes résultant de l'usage généralisé des

    motopompes. Le déficit en ressource dans les puits et la dégradation de la qualité chimique de

    l'eau menacent en effet sérieusement les plantations en irrigué. Ceci explique l'importance

    accordée à la recharge de nappe évoquée au chapitre 2.2.3 qui apparaît comme une condition de

    sauvegarde de cette agriculture.

    28

  • ji!,. Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    2.3.3. L'importance de l'irrigation d'appoint

    L'irrigation d'appoint correspond aux apports d'eau réalisés sur les cultures pluviales en

    complément des précipitations, elle a toujours existé en Tunisie pour assurer la bonne production

    en olives, céréales ou pâturages. L'irrigation de complément permet surtout de pallier les "trous

    pluviométriques" qui peuvent apparaître même au cours d'une année pluviométrique normale, se

    traduisant par une absence de pluies sur une période d'un mois ou plus. Bien que ponctuel, ce

    déficit pluviométrique peut fortement compromettre les rendements s'il survient au cours d'une

    période sensible du cycle végétatif (mars-avril, novembre). Ces aléas climatiques sont ainsi

    responsables de l'importante variabilité dont souffre la production céréalière. La céréaliculture

    couvre 30 à 40% des terres labourables, l'essentiel de la production nationale est réalisé dans la

    partie Nord du pays, mais aussi dans les régions du Centre (1,6 millions d'hectares). Les besoins

    céréaliers du pays sont estimés à 16 millions de quintaux par an, les rendements enregistrés ont

    été de :

    - 2,9 millions de quintaux en 1988,

    - 25,5 millions de quintaux en 1991,

    - 19,2 millions de quintaux en 1993.

    L'irrigation d'appoint tend donc à être développée par le Programme National d'Irrigation

    d'Appoint initié en 1988. La surface potentielle concernée couvre 167 700 ha, celle effective en

    1994 s'élevait à 90 700 ha. Les épandages de crues assurent une part importante des apports de

    complément, mais ils restent directement dépendants de la survenue aléatoire des crues et sont

    surtout localisés en Tunisie méridionale et centrale.

    tableau 10 - Superficies devant être équipéespour l'irrigation d'appoint à partir des lacs collinaires

    (d'après vnème Plan, 1987)

    Régions Superficie (ha)

    Nord dont: 5770

    - Nabeul 280

    - Zaghouan 465

    - Siliana 1200

    Centre dont: 1 230

    - Kairouan 550

    - Kasserine 500

    Tunisie 7000

    29

  • Les projets d'extension de l'irrigation de complément concernent essentiellement les régions du

    Centre et surtout le Nord céréalier, les lacs collinaires sont alors désignés comme étant les plus

    appropriés à cette fin. Le tableau 10 présente la répartition des superficies (7 000 ha) qui

    pourront être équipées pour l'irrigation d'appoint à partir des lacs collinaires. Les forages, le

    pompage dans les oueds et les barrages doivent aussi être mis à contribution (Ennabli, 1995).

    2.3.4. Situation et perspectives en zone semi-aride

    La répartition des périmètres irrigués dans les divers gouvernorats du semi-aride au début de la

    décennie et la part des diverses ressources dans leur alimentation sont indiquées dans le tableau

    Il. Les superficies irriguées sont les plus importantes dans les gouvernorats de Nabeul et

    Kairouan. Les eaux souterraines alimentent l'essentiel des superficies irriguées de la zone, en

    particulier dans les gouvernorats de la région Centre (plus de 80%). Les puits de surface assurent

    l'exploitation de 51 à 72% des surfaces irriguées, sauf dans le gouvernorat de Siliana (25%) où les

    superficies irriguées par les barrages sont plus importantes. Le tableau 12 donne les surfaces

    irrigables potentielles par les barrages, les lacs collinaires, les puits et forages. Les superficies

    irrigables à partir des eaux souterraines sont déjà maximales.

    tableau Il - Superficies irriguées de la zone semi-aride et parts des différentes ressources en eau

    dans leur alimentation (CRDA, in DG/PDIA, 1996)

    Surface % par +Irrig.

    Régions irriguée barrage forage puits de sources eaux d'appoint

    (ha) surface et oueds usées (ha)

    Nord dont: 171 717 50,9 6,8 31,8 7,6 2,9 22691

    - Nabeul 39800 36,5 3,0 59,6 - 0,9 200- Zaghouan 4400 - 18,2 56,8 25 - 400- Siliana 9250 56,8 8,6 24,9 9,7 - 14820Centre dont: 96772 1 1l,7 20,5 65,6 1,1 1,1 26410

    - Kairouan 448441

    11,9 19,7 1,01 66,9 0,5 1000

    - Kasserine Il 44011 16,3 30,5 51,6 1,6 3 510

    Sud 34233 1 - 77,5 21,9 0,6 - 33120Tunisie 302 722 : 32,7 19,1 41,5 4,7 2,0 + 82221

    1, 384943

    30

  • lÙ~ Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    tableau 12 - Surfaces irrigables potentielles en zone semi-aridepar type des ressources

    Surfaces irrigables potentielles (ha) par

    Régions barrages lacs coll. puits forage

    Nabeul 20297 770 23000 1 200

    Zaghouan 5 190 930 2990 800

    Siliana 6836 2720 2410 800

    Kairouan 5590 1 100 30200 9262

    Kasserine 6011 1 000 5790 3940

    Le CapRon

    Dans le Cap Bon (gouvernorat de Nabeul), l'irrigation est une pratique traditionnelle fort bien

    maîtrisée pour l'agrumicuiture et le maraîchage. Elle s'est originellement développée autour des

    puits de surface qui alimentent aujourd'hui près de 60% des 40 000 ha irrigués. L'extension de

    l'irrigation a été permise grâce à la maîtrise des eaux de surface au niveau des principaux oueds de

    la région et par l'adduction des eaux de la Medjerda via le canal du Cap Bon. Près de 85% des

    surfaces potentielles sont irriguées, et bien que la région couvre moins de 3% de la superficie du

    pays, elle fournit près de 80% de la production d'agrumes, 60% de celle du vin, 40% des cultures

    maraîchères (Ennabli. 1995). Les superficies irriguées achèveront de s'étendre surtout grâce aux

    nouveaux barrages. Le recours aux eaux usées traitées (sur 2 000 ha potentiels) est aussi prévu

    pour la sauvegarde de périmètres irrigués par puits de surface en zone de surexploitation des

    nappes (voir chapitre 2.2.3). Les surfaces potentiellement irrigables à partir des lacs collinaires ne

    représentent que 1,7%.

    Gou vernorat de Zaghouan

    Les surfaces irriguées représentent 4 400 ha, alimentées à 75% par les eaux souterraines.

    L'irrigation d'appoint concerne 400 ha. La mobilisation des eaux de surface permettra d'étendre

    l'irrigation sur 6 000 ha supplémentaires, parmi lesquels 930 ha devant bénéficier de l'eau de lacs

    collinaires. Ces derniers doivent aussi permettre l'irrigation d'appoint sur 400 ha.

    Gou vernorat de Siliana

    Les surtàces irriguées couvrent 24 000 ha mais 62% de ces surfaces correspondent à l'irrigation

    d'appoint des cultures céréalières. Le barrage de Siliana permet l'irrigation de 57% des périmètres

    irrigués qui doivent s'étendre grâce à l'augmentation des ressources en eau de surface.

    L'implantation de nombreux lac collinaires devrait permettre d'équiper 2 700 ha en irrigation

    maîtrisée et 1 200 ha en irrigation d'appoint.

    31

  • Le Kairouanais

    La région de Kairouan est l'un des foyers de l'irrigation par puits de surface: des petits périmètres

    sont disséminés dans la plaine de Kairouan et ses environs. Cette exploitation est renforcée par la

    maîtrise des eaux de surface au niveau des barrages de Nebhana et Merguellil qui assurent la

    recharge des nappes situées en aval, ainsi que par les forages profonds de Sidi Saâd. Ceci a aussi

    permis la création de grands périmètres. Les puits de surface alimentent 67% des 45 000 ha

    irrigués et les forages, 20% de ces surfaces (Ennabli, 1995). L'irrigation d'appoint ne concerne

    qu'un millier d'hectares. La superficie irrigable est déjà bien exploitée. L'implantation des lacs

    collinaires doit permettre l'irrigation maîtrisée sur 1 000 ha et l'irrigation d'appoint sur 550 ha.

    Goul'ernorat de Kasserine

    Les ressources souterraines alimentent plus de 80% des Il 500 ha irrigués (50% à partir des puits

    de surface). L'irrigation de complément est apportée sur 3 500 ha supplémentaires (Ennabli,

    1995). La mobilisation des eaux de surface devrait permettre d'augmenter de façon conséquente

    les surfaces irrigables, les lacs collinaires représentent un potentiel d'irrigation maîtrisée de 1 000

    ha et d'appoint pour 500 ha.

    2.4. Remarques et conclusion sur le rôle du lac collinaire en zone semi-aride

    Diverses fonctions sont assignées au millier de lacs collinaires devant être disséminé dans les

    djébels du Nord et du Centre du pays d'ici la fin de la décennie. En tant qu'ouvrages de

    conservation des eaux et des sols, les lacs collinaires sont considérés selon les cas comme des

    moyens de.

    - lutte contre l'érosion par l'écrêtement des crues et le piégeage des sédiments dans les zones à

    risque érosif afin de protéger les grands barrages situés en aval,

    - collecte des eaux de ruissellement pour la recharge de nappes et/ou la satisfaction de besoins

    locaux.

    Dans un premier temps, les lacs collinaires ont souvent été multipliés sans réelle prédéfinition de

    leurs objectifs: les sites étaient essentiellement choisis d'après des considérations oro-

    topographiques et de fonctionnement hydraulique (Talineau et a/., 1994). Si l'objectif de lutte

    contre l'érosion est mis en avant dans les zones sensibles, les aspects de recharge de nappe et de

    création d'une ressource en eau dans les régions reculées semblent désormais primer. En effet, le

    lac collinaire peut constituer une réserve d'eau saisonnière très opportune pour l'abreuvement du

    cheptel, l'irrigation de petits périmètres ou l'irrigation d'appoint, ainsi que pour certains usages

    domestiques.

    32

  • ]0' Partie: Cadre général de l'élude et objectifs

    Par ailleurs. la mise à profit des aménagements est une des conditions d'adhésion des exploitants

    agricoles censés assurer la maintenance et donc la viabilité des ouvrages (DGIPDIA, 1996b).

    L'eau des lacs collinaires n'est par contre pas destinée à l'alimentation humaine, l'eau potable étant

    presque partout distribuée à partir de forages, puits ou citernes.

    Dans la zone semi-aride, les lacs collinaires offrent des perspectives de micro-développement

    d'autant plus intéressantes que les zones concernées sont particulièrement désoeuvrées et

    confrontées à un sévère déficit de la ressource en eau. La valorisation des retenues déjà créées

    n'est toutefois pas importante (Selmi et al., 1994). Selmi (1996) observe que l'exploitation des

    lacs collinaires peut apporter un supplément de revenu important (notamment par l'introduction de

    cultures maraîchères) mais que seuls 22% des exploitants situés autour des retenues en eau ont

    intégré la nouvelle ressource dans leur mode de production.

    La sous-exploitation des lacs collinaires est liée à des considérations socioculturelles et au manque

    de moyens. elle résulte aussi des incertitudes liées à précarité de la ressource: la violence des

    orages peut provoquer des crues destructrices et/ou l'envasement rapide des retenues tandis que la

    forte évaporation peut conduire à leur assèchement fréquent et plus ou moins long. Ce sont, de ce

    fait. les projets de spéculation à court terme qui sont le plus à même d'être promus autour de ces

    aménagements.

    33

  • Chapitre 3: Présentation de l'étude

    3.1. Problématique générale de la qualité de l'eau dans les lacs collinaires

    La problématique de la qualité de l'eau dans les lacs collinaires se pose par rapport aux divers

    usages qui en sont faits (abreuvement du bétail, irrigation, usages domestiques) ou qui pourraient

    en être faits (pisciculture), ainsi qu'en terme d'impact sur la qualité des eaux souterraines (recharge

    de nappe). La question concerne trois principaux aspects:

    - le risque de salinisation;

    - le potentiel trophique et le risque d'eutrophisation;

    - les risques sanitaires.

    3.1.1. Le risque de salinisation

    En Tunisie, comme dans la plupart des régions arides, la salinité de l'eau est un handicap majeur

    pour l'exploitation de la ressource. La salinité des eaux pose particulièrement problème sur le plan

    ag~'icole car la présence excessive de sels dans les eaux d'irrigation est toxique pour les cultures et

    conduit à une dégradation, voire une stérilisation des sols (salinisation). La salinité limite aussi les

    possibilités d'alimentation animale et humaine. En Tunisie. 50% des ressources en eau ont une

    salinité inférieure à 1,5 g/l et peuvent donc être exploitées sans restriction. La majorité des eaux

    de surface sont considérées comme étant de bonne qualité, mais seulement 16% des eaux

    souterraines ont une salinité inférieure à 1,5 g/l tandis que 30% du potentiel des nappes présente

    une salure supérieure à 4 g/l (DG/PDIA, 1996).

    Les eaux stockées dans les lacs collinaires sont soumises à une forte évaporation, en particulier en

    zone semi-aride. ce qui fait craindre qu'une accumulation de sels se produise dans les retenues. La

    salinisation des lacs collinaires compromettrait leur mise en valeur et pourrait aussi avoir un

    impact sur la qualité des eaux souterraines en relation. Le risque de salinisation dépend

    principalement des apports en sels du bassin versant et du degré d'exposition des eaux à

    l'évaporation. Ce dernier dépend de la dynamique hydrologique des retenues, fonction de divers

    facteurs tels que : les conditions climatiques et de terrain, la morphométrie des ouvrages et la

    gestion de l'eau.

    34

  • lÙ' Partie: CatÜe général de l'étude et objectifs

    Du point de vue chimique, la concentration des sels dans la retenue est influencée par divers

    processus de précipitation chimique, selon la nature et la quantité des espèces dissoutes présentes.

    Des précisions sur les mécanismes déterminant la salinité des eaux des lacs collinaires sont donc

    utiles pour optimiser la gestion de la ressource, en vue de son exploitation directe ou pour la

    réalimentation des nappes.

    3.1.2. Le niveau trophique

    L'implantation d'un lac collinaire s'accompagne de l'apparition d'un écosystème aquatique pouvant

    faire l'objet d'une production biologique plus ou moins importante. Le développement de la vie

    aquatique va dépendre en premier lieu de la disponibilité des éléments nutritifs (azote, phosphore)

    pour la production primaire (algues, végétation de bordure). Ces éléments proviennent du milieu

    naturel, ils ont surtout une origine anthropique suite aux rejets domestiques, à l'entraînement

    d'engrais agricoles, ou des déjections des troupeaux.

    Dans la zone collinaire semi-aride, les apports nutritifs dans les lacs collinaires sont a priori limités

    en raison du faible niveau de l'activité humaine dans les zones d'implantation. L'usage d'intrants

    chimique est en général peu important sur les cultures pluviales en raison du surcoût que cela

    représente pour les petits exploitants alors que les rendements restent dépendants des aléas

    climatiques. Leur usage peut par contre se développer sur les petites plantations irriguées à partir

    du lac collinaire, autour duquel l'activité humaine devrait s'intensifier.

    L'évaluation du potentiel trophique des lacs collinaires est utile pour une éventuelle valorisation

    des ouvrages par la pisciculture, mais il est aussi intéressant de considérer les risques

    d'eutrophisation qui résulteraient d'apports nutritifs excessifs. Le phénomène d'eutrophisation peut

    entraîner diverses nuisances pour les usagers d'un plan d'eau: la prolifération d'algues

    (cyanobactéries en particulier) peut rendre l'eau impropre aux usages domestiques ou à

    l'alimentation du bétail (toxicité) et peut être une gêne pour l'irrigation (obstruction de buses).

    D'autre part, la décomposition massive de la matière organique favorise le développement de

    micro-organismes pathogènes (voir 3.1.3) et provoque des déficits en oxygène néfastes pour

    l'activité piscicole.

    3.1.3. Les risques sanitaires

    Le lac collinaire n'est pas destiné à l'alimentation humaine, les populations rurales disposant en

    général de sources, forages ou citernes, plus ou moins proches pour l'approvisionnement en eau

    potable (AE.P.). Il est cependant important de contrôler la salubrité de ces points d'eau, des

    usages non prévus (alimentation, toilette, baignade... ) risquant toujours d'en être faits.

    35

  • Par ailleurs, des échanges peuvent exister avec des eaux souterraines elles-mêmes en relation avec

    les points d'A.E.P situés en aval.

    Un risque de contamination chimique de l'eau peut résulter de l'usage d'engrais (nitrates) ou de

    pesticides sur des cultures en amont ou à proximité des retenues. Dans les eaux riches en

    nutriments, la prolifération de certaines cyanobactéries (Microcystis, Oscillatoria, Nostoc... ) peut

    entraîner la libération de toxines dans l'eau.

    La contamination microbiologique de l'eau peut provenir en premier lieu des déjections des

    troupeaux qui s'abreuvent autour du lac. Elle peut être liée aux matières transportées par les eaux

    de ruissellement ou résulter des apports souterrains suite à une mise en relation de la nappe

    phréatique avec des puits perdus en amont de la retenue. La prolifération des micro-organismes

    pathogènes peut être favorisée par le caractère stagnant du milieu, les températures élevées et la

    présence de matière organique.

    L'apparition et la propagation de parasitoses doivent aussi être considérées. En particulier, la

    schistosomiase urinaire était signalée en Tunisie par l'OMS en 1985 (in: Birley, 1993) et le lac

    collinaire est susceptible de constituer un habitat favorable au développement de l'escargot

    aquatique vecteur (Bulinus) du parasite (s. haematobium) qui infecte l'homme par voie cutanée.

    Les petites retenues d'eau à usage polyvalent apparaissent comme des sites particulièrement

    favorables à la transmission de ce type de parasitose en raison de la fréquence des contacts des

    individus avec l'eau par rapport au faible volume d'eau (Hunter et al., 1994).

    3.2. Les objectifs de l'étude

    Notre étude a trait à deux principaux points qui sont:

    - la caractérisation géochimique des eaux des lacs collinaires pour l'évaluation de la qualité

    saline de la ressource et la prévision de son évolution;

    - l'étude du comportement géochimique du phosphore dans les retenues, le phosphore étant un

    élément déterminant du fonctionnement trophique des plans d'eau.

    Un contrôle de la qualité microbiologique des retenues a été effectué de façon annexe.

    36

  • lÙ' Partie: Cadre général de l'étude et objectifs

    3.2.1. La caractérisation géochimique des lacs collinaires

    La géochimie des lacs collinaires est abordée de manière exploratoire et prévisionnelle.

    L'étude exploratoire concerne l'analyse des caractéristiques géochimiques des lacs collinaires, en

    terme de variabilité des concentrations et de diversité des faciès, de façon à distinguer les

    éventuelles familles géochimiques présentes. A partir de cette identification, les processus

    géochimiques mis en jeu au cours de l'évolution des eaux peuvent être précisés, en relation avec le

    comportement hydrologique des retenues qui font l'objet d'une dynamique saisonnière rapide.

    La typologie géochimique établie permet dans un second temps d'effectuer une analyse prédictive

    de l'évolution de la qualité de l'eau à l'aide d'un modèle simulant la concentration des eaux par

    évaporation. Les risques de salinisation peuvent ainsi être évalués.

    3.2.2. L'étude du comportement géochimique du phosphore dans les lacs

    collinaires

    La disponibilité du phosphore pour la production primaire est un facteur limitant de cette dernière

    et nous souhaitions analyser l'influence des phénomènes géochimiques susceptibles d'intervenir

    dans la régulation du phosphore des lacs collinaires. En raison de l'importance du transport solide

    qui accompagne les crues, les processus d'adsorption du phosphore sur les particules

    sédimentaires doivent jouer un rôle important, tandis que la précipitation du phosphore par le

    calcium peut se produire dans les eaux calcaires.

    Cette étude est traitée en deux volets :

    1- La détermination du niveau trophique des lacs collinaires

    Afin de préciser l'état trophique des lacs collinaires, quelques indices du fonctionnement

    biologique des lacs collinaires sont examinés:

    - l'évolution des concentrations en phosphore et en pigments chlorophylliens dans l'eau;

    - la structure verticale de la colonne d'eau (température, oxygène, transparence).

    2- L'étude des processus de régulation géochimique du phosphore

    L'étude de la régulation géochimique du phosphore est réalisée à partir de :

    - l'analyse du rôle des équilibres de co/précipitation avec le calcium, considérés en relation avec

    les résultats de la caractérisation géochimique;

    - l'analyse du rôle des sédiments par la détermination des formes du phosphore du sédiment, et

    l'étude expérimentale des équilibres eau-sédiment (isothermes d'adsorption).

    37

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    Chapitre 4: Présentation des lacs collinaires étudiés

    4.1. Description des lacs collinaires et de leur bassin versant

    4.1.1. Choix et localisation

    Les lacs collinaires du semi-aride que nous avons choisi d'étudier correspondent aux 24 unités

    suivies dans le cadre du programme de surveillance hydrologique des lacs collinaires (voir 4.3.2).

    Ces retenues se distribuent de la zone littorale jusqu'aux contreforts de la frontière algérienne,

    dans les principaux bassins versants de la région (figure 2). Le tableau 13 précise la répartition

    des retenues dans les différentes régions administratives (gouvernorats).

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  • lire Partie: Cadre général de l'élude et objectifs

    tableau 13 - Répartition des lacs collinaires étudiés par gouvernorat

    Gouvern. Nabeul Zaghouan Siliana Kairouan Kasserine

    Lacs El Melah Saadine Abdessadok Dekikira Abdeladhim

    collinaires Es Seghir Sbahia El Hnach El Gouazine Araara

    Kamech Hadada El Mouidhi Bawajer

    lannet Fidh B. Ali Brahim Zah.

    M'Richet Fidh B. Nac. Echar

    Sadine 1 Essenega

    Sadine 2 M'Rira 2

    4.1.2. Caractéristiques des retenues

    Le lac collinaire est un petit barrage formé d'une digue en terre compactée de 5 à 12 mètres de

    haut et de 100 à 300 mètres de long. La digue est équipée d'un déversoir latéral pour l'évacuation

    des crues. Une conduite de chasse et de prélèvement branchée à une tour de prise traverse la

    digue d'où elle débouche, munie d'une vann