Capitale fidèle à elle-même et à la France, a...

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Mairie de Paris/Comité d’histoire de la Ville de Paris Cet ouvrage n’est pas destiné à être commercialisé Christine Levisse-Touzé & Vladimir Trouplin Paris, Compagnon de la Libération Capitale fidèle à elle-même et à la France, a manifesté, sous l’occupation et l’oppression ennemies, et en dépit des voix d’abandon et de trahison, sa résolution inébranlable de combattre et de vaincre. Par son courage en présence de l’envahisseur et par l’énergie indomptable avec laquelle elle supporta les plus cruelles épreuves, a mérité de rester l’exemple pour la Nation tout entière. Le 19 août 1944, conjuguant ses efforts avec ceux des armées alliées et françaises, s’est dressée pour chasser l’ennemi par une série de glorieux combats commencés au cœur de la Cité et rapidement étendue en tous les points de la ville. Malgré de lourdes pertes subies par les Forces Françaises de l’Intérieur levées dans son sein, s’est libérée par son propre effort et unie à l’avant-garde de l’Armée française venue à son secours a, le 25 août réduit l’Allemand dans ses derniers retranchements et l’a fait capituler. Citation de la Ville de Paris à l’Ordre de la Libération, décret du 24 mars 1945 por- tant attribution de la Croix de la Libération. Compagnon de la Libération PARIS Christine Levisse-Touzé & Vladimir Trouplin

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Mairie de Paris/Comité d’histoire de la Ville de Paris

Cet ouvrage n’est pas destiné à être commercialisé

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Capitale fidèle à elle-même et à la France, a manifesté, sous l’occupation et l’oppression ennemies, et en dépit des voixd’abandon et de trahison, sa résolution inébranlable de combattre et de vaincre. Par son courage en présence de l’envahisseur et par l’énergie indomptable avec laquelle ellesupporta les plus cruelles épreuves, a mérité de rester l’exemplepour la Nation tout entière. Le 19 août 1944, conjuguant sesefforts avec ceux des armées alliées et françaises, s’est dresséepour chasser l’ennemi par une série de glorieux combats commencés au cœur de la Cité et rapidement étendue en tousles points de la ville. Malgré de lourdes pertes subies par les Forces Françaises de l’Intérieur levées dans son sein, s’estlibérée par son propre effort et unie à l’avant-garde de l’Arméefrançaise venue à son secours a, le 25 août réduit l’Allemanddans ses derniers retranchements et l’a fait capituler.

Citation de la Ville de Paris à l’Ordre de laLibération, décret du 24 mars 1945 por-tant attribution de la Croix de laLibération.

Compagnon de la Libération

PARIS

Christine Levisse-Touzé & Vladimir Trouplin

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Paris, Compagnon de la Libération

Christine Levisse-TouzéVladimir Trouplin

Comité d’histoire de la Ville de Paris

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Soixante ans après la Libération, alors que les acteurs et les témoins disparais-sent peu à peu, il est plus que jamais nécessaire de transmettre notre patrimoinecommun – celui de la mémoire historique – aux jeunes générations. Dans ce sens,l’initiative prise par la Mairie de Paris de consacrer une brochure pédagogique à Paris,Compagnon de la Libération, doit être saluée.

En attribuant à la ville de Paris la plus prestigieuse décoration de la SecondeGuerre mondiale – la Croix de la Libération – le général de Gaulle a souhaité mettreà l’honneur la capitale “libérée par son peuple avec le concours des armées de laFrance” et de ses alliés dans les difficiles journées du 19 au 25 août 1944, mais aussicelle qui, “fidèle à elle-même et à la France”, a été, dès les débuts de l’Occupation, unfoyer actif de la résistance jusqu’à en devenir le symbole.

La lecture de Paris, Compagnon de la Libération est certainement une occasion pourvous, lycéens d’aujourd’hui, de mieux connaître l’histoire de votre ville mais peut-êtreaussi, en vous interrogeant sur les questions posées par l’Occupation et la Libération –notamment le refus de l’abandon et de la défaite – de mieux vous connaître vous-mêmes.

La “Mémoire de Paris”, dernier chapitre de la brochure, qui nous ramène auParis du XXe siècle, vous permettra de mieux appréhender les traces laissées par lesannées de guerre et, par conséquent, de mieux vous identifier, à travers l’histoire decette période à la fois proche et lointaine, à votre propre ville. Vous qui, demain, àvotre tour, porterez la mémoire de Paris.

Général d’armée Alain de Boissieu (1914 -2006)Chancelier de l’Ordre de la Libération

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“En ce 70e anniversaire de l’appeldu général de Gaulle, j’ai souhaitéque soit rééditée cette brochurecomme un hommage au chef de laFrance Libre qui a remis la Croix de Compagnon à la Ville de Parisle 2 avril 1945.”

Nul, mieux que Camus, n’a dit le sens et l’esprit de cet événement fondateur denotre histoire contemporaine qu’a été la Libération de Paris. Symbole de liberté pourl’ensemble de l’Europe occidentale, moment unique de rassemblement et de liesse, laLibération de Paris, dont nous commémorons cette année le soixantième anniversaire,a incarné la victoire des valeurs universelles de liberté, de tolérance et de justice,bafouées pendant quatre années d’occupation et de collaboration. Combat de lacivilisation contre la barbarie, elle a marqué à jamais l’identité de notre cité.

Fruit de l’action conjuguée de ses habitants insurgés et de ses soldats – les“hommes de Leclerc” – des résistants de Londres et de ceux de “l’ombre”, elle a closle régime de Vichy, complice actif du nazisme, et scellé la reconnaissance définitivedu général de Gaulle ainsi que du rôle du Conseil national de la Résistance. Elle futun moment d’honneur et d’unité restaurés, où la France a retrouvé le sens de sonHistoire.

Pour défendre leur capitale, leur pays et les valeurs essentielles de l’Humanité, desfemmes et des hommes, venus de tous horizons, se sont levés avec courage, jusqu’àl’héroïsme. Des milliers ont péri dans les rues et sur les barricades dressées dans Parisau cours de ce mois d’août 1944. Jamais nous n’oublierons, ni le martyre de nosconcitoyens juifs, ni les souffrances endurées, ni le message d’espoir et de volontélégué par tous ceux qui combattirent. Cet ouvrage est là pour témoigner de notrereconnaissance envers ceux à qui nous devons notre bien le plus précieux : la liberté.

Bertrand DelanoëMaire de Paris

“Il y a six ans, mon prédécesseur et compagnon de la 2e DB, le général Alain de Boissieu, signait pour la parution de cet ouvrage une très belle préface. J’ai souhaité la voir figurer dans cette réédition comme unjuste hommage dû à sa mémoire.”

Pr François JacobChancelier de l’Ordre de la Libération

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Vichy est le siège du gouvernement qui n’estreprésenté à Paris que par un délégué dans lesterritoires occupés. Londres est la capitale de laFrance libre et Lyon devient le siège de la Résis-tance naissante. Paris, désormais à l’heure alle-mande, est réduit à une préfecture régionale oùses hauts fonctionnaires sont au service du com-mandement militaire en France. L’effacement dela capitale est total. Les Allemands prennent pos-session de la Ville. Le 18 juin, ils organisent undéfilé triomphal sur les Champs-Élysées et l’ave-nue Foch. Filmé par les services de propagande,il est présenté comme ayant été tourné le 14. Lemême jour quelques Parisiens captent à la radiol’appel à la Résistance lancé de Londres par ungénéral inconnu, le général de Gaulle. Peu detemps après, Hitler s’offre le plaisir de contem-pler sa plus belle conquête lors d’une visiteéclair. Sa visite est suivie de celles de Goering etGoebbels reçus à l’hôtel Ritz utilisé pendantl’Occupation comme lieu de réception par lesplus hauts dignitaires nazis.

Siège des autorités allemandesL’appareil d’occupation allemand se met très viteen place à Paris. Dès le 15 juin, l’Abwehr, servicede renseignements et de contre-espionnage s’ins-

talle à l’hôtel Lutétia. Le Militärbefehlshaber inFrankreich (MBF), haut-commandement mili-taire en France, autorité principale en zoneoccupée, siège à l’hôtel Majestic, avenue Kléber.Dès sa mise en place, sont jetées les bases d’unepolitique répressive implacable au nom de la“nécessité de guerre” et du “maintien de l’ordreet de la sécurité”, politique qui à partir de 1941,se radicalise. Le MBF met en place simultané-ment une politique anti-juive. Il contrôle l’ad-ministration et l’activité économique. Au total, leMBF compte 1100 employés1. La Luftwaffe et laKriegsmarine, qui échappent à son contrôle,sont respectivement installées au Palais duLuxembourg et au ministère de la Marine. Peu à peu, tous les ministères allemands ontleurs propres services à Paris. Otto Abetz y estnommé ambassadeur en août 1940. À côté duMBF, la Sipo-SD sous la férule de Helmut Knochen, structure communément appelée Gestapo, service exécutant de la Sipo-SD, n’a audébut qu’un rôle marginal mais elle grignote lespouvoirs de police au MBF fin 1941. Knochenmène la lutte idéologique contre les Juifs, lescommunistes et francs-maçons. Il œuvre en liai-son avec la police allemande et la Gestapo et est

Le 10 juin 1940, le gouvernement de Paul Reynaud quitte Paris, qui est déclaré“ville ouverte” le surlendemain pour éviter des destructions. Le 14 juin, lestroupes allemandes entrent dans une capitale vide. Immédiatement, le paysageurbain subit les transformations de l’occupant. Avec ses drapeaux à croix gammée sur les bâtiments publics et ses panneaux indicateurs en allemand, Parisn’est plus la capitale de la France mais devient la capitale allemande de la France.

1. Henri Michel, Paris allemand, Albin Michel, 1981, p. 63.

Panneaux indicateurs

”Paris allemand”(juin 1940 - novembre 1942)

Hitler à Paris

L'effacement de la capitale

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PARIS OCCUPÉ

Dans une capitale où flottait la croix gammée, où l’on côtoyait constam-ment l’ennemi, où la presse, la radio, les affiches n’avaient plus de françaisque la langue, où plus d’un ami était intoxiqué par cette pénible atmosphère,j’ai toujours gardé mes convictions intactes […] j’ai attendu le Grand jour.

Lettre d’adieu de Guy FlavienMort en déportation en Allemagne à l’âge de 24 ans

Hitler à Paris

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territoires occupés, le général SS Carl-AlbrechtOberg. Le contrôle de la police passe du MBF àla Sipo-SD, mais la répression judiciaire du MBFne faiblit pas pour autant Le contrôle allemandest total sur l’ensemble des affaires françaises ycompris celles de la zone sud occupée aprèsnovembre 19423.En dépit de tout cela, la Résistance n’est pasabsente de la capitale malgré le traumatisme dela défaite, les difficultés du quotidien et un atten-tisme axé sur la survie.4

Une Résistance précoce et spontanéeL’omniprésence de l’Occupant, la densité desindustries en Île-de-France travaillant pour le

IIIe Reich explique la précocité et l’intensité de laRésistance. Paris offre aux clandestins, caches etsolidarités. Les voisins se connaissent peu, lesimmeubles à double entrée facilitent la fuite. Lespostes radio, nombreux, permettent d’écouter laBBC. Le téléphone fonctionne et un contrôletotal est impossible. Les liaisons à l’intérieur dela ville sont rapides comme les relations avec lereste du pays. La collecte des informations y estfacile. Au cœur d’un Paris captif à l’atmosphèreoppressante, s’affirment les premières initiativesindividuelles de ceux qui considèrent que laguerre n’est pas finie. Tout converge vers Parissitué au cœur du réseau ferroviaire français. Les signes du refus sont d’abord individuels et

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aussi chargé de saisir les collections d’art appar-tenant à des Juifs. Les services de propagande(Propaganda Abteilung à l’hôtel Majestic et Pro-paganda Staffel du Gross Paris au 52 avenue desChamps-Élysées) contrôlent étroitement lapresse, la culture et la littérature dans le but fixépar Goebbels : anéantir la présence culturelle dela France en Europe. Le commandant du “GrossParis” dispose, pour le maintien de l’ordre, d’unedivision de sécurité et d’un détachement de blindés. La radicalisation de la répression allemande enFrance occupée commence en juin 1941 avecl’agression allemande contre l’URSS. C’est unerupture majeure avec une évolution de la poli-tique répressive fondée sur la lutte

contre “le judéo-bolchévique”. Fin septembre età la suite des directives de Keitel sur ordre d’Hitler, Otto von Stulpnagel (MBF) met enplace le code des otages, ligne de conduite répres-sive dont il ne tarde pas à mesurer les dégâts poli-tiques majeurs sur l’opinion.Il demande doncdébut 1942 les pleins pouvoirs pour le change-ment de méthode dans la lutte contre le terro-risme. Entre temps, il met en œuvre unedéportation massive vers l’Est de Juifs et de com-munistes dans le cadre de la lutte contre “lejudéo-bolchévique” et en guise de représailles.Désapprouvé, il est remplacé par son cousin KarlHeinrich. Mais cela ne change rien au processusenclenché qui aboutit le 1er juin 1942 à l’installa-tion officielle du chef de la police et de la SS en

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2. Membre du CNR interviewé par Philippe Ragueneau (encollaboration avec Eddy Florentin), in Paris libéré, ils étaientlà, France Empire, 1994.3. Gaël Eismann, Le Militärbefehlshaber in Frankreich (MBF)et le maintien de l’ordre en France occupée de 1940 à 1944,séminaire de la Fondation de la Résistance, février 2009. GaëlEismann et Sefan Martens [dir.], Occupation et répression

militaire allemandes 1939-1945, la politique de maintien del’ordre en Europe occupée, collection mémoires/histoire,Autrement 2007. Alrich Meyer, L’Occupation allemande enFrance, 1940 –1944, Éditions Privat, 2002.4. Dir. François Marcot, avec la collaboration de Bruno Lerouxet Christine Levisse-Touzé, Dicionnaire historique de la Résis-tance, collection Bouquin, Laffont, 2006.

La clandestinité…Je me souviens, devant un cinémasur les Champs-Élysées, d’une mainsur mon épaule. Effroyable!… C’étaittout simplement un copain quim’avait reconnu. Mais la main surl’épaule dans ces conditions-là, celafait une drôle d’impression… Toutétait danger.

Daniel Mayer2

Laissez-passer (Ausweis) spécial de médecin au nom deHenry Ingrand permettant de circuler après le couvre-feu

Les Allemands en rangs serrés

Avis d’exécution de José Roig

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Caserne KriegsmarineLycée Jean de La Fontaine

Caserne SSLycée Claude Bernard

Services del’AmirautéBd Suchet

Bureaux de la GestapoRue de la Pompe

Tribunal militaireKriegsmarinePorte de la Muette

Bureaux de la GestapoAvenue Henri-Martin

Caserne du Prince-EugènePlace de la République

Hôpital allemandLariboisière

Ambassade d’AllemagneRue de Lille

Luftwaffe Grand Hôtel

État-Major KriegsmarineRue Royale

Hôpital allemandLa Pitié-Salpêtrière

Contrôle des devisesLocaux Banque Lazard

Service decontrôle des prixRue Velasquez

Mess de la LuftwaffeHôtel de Pontalba

Cercle pour officiersRue du Fbg St-Honoré

Bureau Otto, « Affaires commerciales »Avenue Foch

Hôtel Ritz Place Vendôme

Große Paris Hôtel Meurice

Propaganda Staffel du Große Paris, Bureaux d’achatsAv. des Champs-Élysées

Tribunal militaire Wehrmacht Rue de Varenne

Services d’Etat-MajorInvalides

Services des trois arméesPalais du LuxembourgAbwehr Hôtel Lutetia

PrisonRue du Cherche-Midi

CaserneÉcole Polytechnique

CasernePorte de Clignancourt

MBF Hôtel Majestic

Intendance militaireHôtel Raphaël

GestapoRue des Saussaies

Gouverneur militairede Paris Hôtel de Crillon

Poste militaire de la FeldgendarmerieRue d’Anjou

Gestapo Rue Lauriston

Siège de la GestapoAvenue Foch

CaserneÉcole Militaire

KommandanturPlace de l’Opéra

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Depuis que tu es “occupé”, ilsparadent en ton déshonneur. Resteras-tu à les contempler ?Intéresse-toi plutôt aux étalages.C‘est bien plus émouvant, car, autrain où ils emplissent leurscamions, tu ne trouveras bientôtplus rien à acheter.

Jean Texcier,Conseils à l’Occupé, juillet 1940.

L’implantation des Allemands à Paris

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précoces. Ce sont souvent des actes isolés :dépôts de gerbes à l’Arc de Triomphe le 14 juil-let 1940 et de bouquets de fleurs devant le pre-mier avis d’exécution affiché par l’occupantconcernant Jacques Bonsergent le 23 décembre1940. Le 3 octobre, le premier papillon gaullisteest collé sur les murs de Paris…Les premiersgraffitis (Croix de Lorraine, Vive de Gaulle) fontaussi leur apparition. Les actualités cinémato-graphiques allemandes obligatoires dans lessalles de cinéma sont huées et les autorités d’oc-cupation doivent ordonner le maintien de lalumière. Au sein de l’université parisienne où la Résis-tance est encore une affaire individuelle, l’arres-tation de Paul Langevin le 30 octobre 1940canalise le mécontentement grandissant sousl’égide de François Lescure et Roger Morais, diri-geants respectifs de l’Union nationale des étu-diants et du Centre d’entraide aux étudiantsmobilisés et prisonniers. Des monômes s’orga-nisent. Le 8 novembre, un rassemblement seforme en dépit des interdictions avec le motd’ordre de se rendre le 11 au Rond-Point des

Champs-Élysées pour fleurir la statue de Cle-menceau, “le Père la Victoire” puis gagner l’Arcde Triomphe. Le chiffre 11 en allemand (Elf) estainsi converti “Es Liebe Frankreich” sur lesmurs du quartier Latin. Cette journée du 11 voitla juxtaposition de gestes spontanés : 750 per-sonnes ont déposé des bouquets au pied de lastatue de Clemenceau et 5 600 personnes se sontconcentrées place de l’Étoile. Les étudiants etlycéens majoritaires dont certains portent deuxcannes à pêche “deux gaules” tournent autourde l’Arc de Triomphe chantant la Marseillaise etscandant les cris de “Vive de Gaulle”, “ViveChurchill”. Les Allemands interviennent faisant123 arrestations et 3 blessés légers. Le lende-main, le boulevard Saint-Michel est interdit etl’Université fermée. Danièle Tartakowsky rap-porte que “cette manifestation va s’imposer aunombre des mythes fondateurs de la Résis-tance”5. Le même jour des rassemblements iden-tiques ont eu lieu à Nantes, Brest, Caen etRouen.

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5. Danièle Tartakowsky ”11 novembre 1940 : manifestation àParis” in Dictionnaire historique de la Résistance, op. cit.

La campagne des V, symbole pour Churchill dumot victoire, se répand au printemps 1941. Du24 au 31 mars 1941, la police relève 200papillons et 1 200 inscriptions où figurent desV et des Croix de Lorraine. Le 20 juillet 1941,les Parisiens répondent largement à l’appel dela BBC, de contrer la propagande allemande,par une journée des V. Le mot d’ordre a été trèssuivi avec plus de 4400 inscriptions sur lesimmeubles et 5500 V en papier ramassés surles trottoirs. D’autres variantes apparaissent :“Vive de Gaulle”, “Laval Vendu”, “l’amiral Dar-lan à vendre”, puis le symbole faucille et mar-teau après l’invasion de l’URSS par l’arméeallemande fin juin 19416. Les affiches de pro-pagande de Vichy sont lacérées. Des tractscontre l’occupant sont distribués dans lesboîtes aux lettres. Les Parisiens s’informent parla BBC de l’action du général de Gaulle et descombats que l’Angleterre livre seule. Les filesd’attente permettent la transmission des nou-velles. Certains condamnent aussi les mesures

antisémites et affichent leur solidarité en effec-tuant par exemple leurs achats dans des maga-sins portant la bande jaune “entreprise juive”.Pendant toute l’Occupation, les commémora-tions nationales sont, malgré l’interdiction alle-mande, l’occasion de manifestations patriotiquesplus suivies que partout ailleurs : 10 mai 1941(fête de Jeanne d’Arc), 14 juillet 1941, 1er mai1942. Par la suite, elles sont remplacées par desarrêts de travail et des distributions du journalclandestin comme Défense de la France dans le métro le 14 juillet 1943 avant les grandesmanifestations du 14 juillet 1944. Les “mani-festations de ménagères”, notamment celles dela rue de Buci (31 mai 1942) et de la rueDaguerre (1er août 1942), de portée politique yont un grand retentissement.

Une Résistance qui s’organiseLes métiers de la presse et de l’édition y étant for-tement implantés, les publications clandestinesapparaissent à Paris dès fin 1940 comme Conseilsà l’Occupé distribué dès le mois d’août par JeanTexcier, militant socialiste, aidé de quelques amis

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6. Henri Michel, Paris résistant, Albin Michel, 1982, p.39.

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sonniers de guerre et d’aviateurs alliés vers laBretagne et vers les Pyrénées (Comète dès 1941,Shelburn, Bourgogne etc.) que les filières de sau-vetage mises sur pied par les organisations juivesaprès la rafle du Vél d’Hiv en juillet 19428. Comme les réseaux, les principaux mouvementsde résistance de zone nord voient le jour dansParis et recrutent dans tous les milieux : syndi-caliste et socialiste pour “Libération-nord” quis’appuie majoritairement sur des fonctionnaires ;son fondateur, Christian Pineau, rédige seul 69exemplaires du journal du même nom. “Défensede la France” créé par Philippe Viannay imprimedans les caves de la Sorbonne un journal à largeaudience à partir de juillet 1941. “Ceux de laLibération” (CDLL) fondé par Maurice Ripoche,recrute au sein de l’armée ; “l’Organisation civileet militaire” (OCM) naît de la fusion de mem-bres de la Confédération des travailleurs intel-lectuels avec un groupe d’officiers. Plus tard,“Ceux de la Résistance” (CDLR) se constitueavec les survivants du “musée de l’Homme” sousl’égide de Jacques Lecompte-Boinet. Bienimplantés dans la capitale, CDLR, CDLL etl’OCM ne publient pas de journal et privilégientrenseignement et action militaire (création degroupes francs, sabotage). Tout en ayant desrelais en province, ces mouvements de zoneNord sont un phénomène bien parisien. À lapresse s’ajoute l’édition clandestine. Né le 15 mai 1941 du manifeste lancé par leparti communiste “pour la formation d’un frontnational de l’indépendance de la France”, leFront national s’organise progressivement enzone nord. Le mouvement prend ses distancesavec la lutte armée et cherche à réaliser une trèslarge union entre Français de toutes sensibilitésmême de droite. Jusqu’à l’automne 1942, il

forme des ententes locales ou socio-profession-nelles et se veut un rassemblement à la base pluslarge que le seul parti communiste. Son actionconsiste en contre-propagande, manifestationspatriotiques ou socio-professionnelles voire enactivités paramilitaires avec le ramassage d’armes. Après l’invasion allemande de l’URSS en juin1941, le parti communiste s’engage dans la luttearmée contre les troupes d’occupation. L’atten-tat, commis par Pierre Georges (futur colonelFabien) le 21 août au métro Barbès-Roche-chouart contre l’aspirant Moser modifie lesmodes de répression de l’occupant : l’exécutiond’otages par les Allemands et la mise en placepar Vichy des sections spéciales, chargées dejuger les communistes. Les attentats sont le faitde membres de la Jeunesse communiste et del’Organisation spéciale (OS) du PC clandestinpuis, à partir de février 1942, des Francs-tireurset partisans (FTP). Cette tactique dénoncée enoctobre 1941 par le général de Gaulle parce quetrop coûteuse en victimes innocentes s’intensifieen 1942 et surtout en 1943 avec notamment l’attentat contre Ritter le représentant en Francedu Gauleiter Sauckel chargé de la réquisition dela main-d’œuvre.Profitant du retour au pouvoir de Pierre Laval etde la nomination de Bousquet comme secrétairegénéral de la police, Oberg, par souci d’effica-cité, privilégie la collaboration des polices. PourBousquet et le gouvernement de Vichy, la sou-veraineté française est ainsi affirmée, quitte àfaire le travail de répression de l’occupant. Lapolice française agit ainsi dans une ligne deconduite commune avec la police allemande.C’est l’escalade de la répression. Paris prend pro-gressivement le relais de Lyon.

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pour combattre la censure et “secouer l’apathiegénérale”. En octobre, Raymond Deiss, éditeurde musique et imprimeur, publie Pantagruel,feuille clandestine diffusant les informations dela radio anglaise. À la même époque, des univer-sitaires rédigent le premier numéro de L’Univer-sité libre. En février 1942 paraît Le Silence de lamer de Vercors (Jean Bruller) qui fonde avecPierre de Lescure les Éditions de Minuit, syno-nymes de publications de la Résistance.Premier mouvement parisien de résistance, legroupe du “musée de l’Homme” réunit troissecteurs d’activité essentiels, renseignement,évasion et propagande. Il naît de l’initiatived’un trio du musée à l’été 1940. À cette celluleoriginelle s’agrégent d’autres cellules naissantess’occupant d’évasion formées d’intellectuelsparisiens puis de colonels en retraite. À la finde l’automne, ces trois secteurs se rapprochentet agissent de concert notamment pour le ren-seignement. Le 15 décembre paraît Résistance,Bulletin du Comité national de Salut public sedistinguant des autres publications en “s’ins-

crivant dans une logique organisationnelle”7. C’est à Paris aussi que les réseaux de renseigne-ment français ou alliés naissent, ou installentleur centrale. Dès 1940, le premier réseau fran-çais libre, Duclos-Saint-Jacques côtoie desréseaux de l’Intelligence Service britannique. Leréseau “Nemrod” y collecte des renseignementsmais disparaît très vite avec l’arrestation de sonchef le capitaine Honoré d’Estienne d’Orves exé-cuté le 29 août 1941. La “Confrérie NotreDame” du colonel Rémy y transfère en septem-bre 1941 sa centrale de renseignements deNantes. Surtout à partir de 1943, Paris abrite descentrales des réseaux rattachés au BCRA,notamment ceux issus des grands mouvementsde la zone occupée, Centurie, Manipule, Cohors.Paris est aussi le passage obligé pour la plupartdes réseaux d’évasion, qui y établissent des relaiset y ont des logeurs pour tous les pourchassésaussi bien les grands réseaux d’évasion de pri-

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7. Julien Blanc, “Musée d’ l’Homme” in Dictionnaire histo-rique de la Résistance, op. cit.8. Dictionnaire historique de la Résistance, op. cit.

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L’occupant les oblige à utiliser le dernier wagondu métro…3 000 fonctionnaires parisiens sontrévoqués. Privés de revenus, les exclus ne peu-vent se nourrir que dans les cantines juives. Ilsne peuvent posséder de poste radio, de bicy-clette, de téléphone, ni sortir entre 20 h et 6 h.Ils ne sont autorisés à faire leurs courses qu’entre15h et 16 h. Le décret du 29 mai 1942 oblige lesplus de 6 ans à porter l’étoile jaune. Dès octobre 1940, les Allemands font recenserla population juive de Paris et de sa banlieue :148000 personnes sont concernées, presqueautant de Français que d’immigrés. Dans lacapitale, les mesures antijuives sont d’abordéconomiques : “l’aryanisation”, mot nazi dési-gnant la dépossession des biens des Juifs au pro-fit de gérants “aryens”, est très vite appliquée.Les entreprises, par exemple les GaleriesLafayette passent sous la tutelle d’un adminis-trateur “provisoire”. Les entreprises juivesréquisitionnées sont placées sous la direction decommissaires-gérants puis vendues à des non-juifs. En décembre 1941, l’occupant taxe égale-ment la communauté juive de Paris d’uneamende d’un milliard de francs.La création par Vichy en mars 1941 du Com-missariat général aux Questions juives marquel’essor de la collaboration antijuive et la mise enconcordance des nouvelles lois françaises avecles ordonnances allemandes. Les Allemands ontbesoin de l’appareil administratif et policier del’État français qui est ainsi impliqué aux yeux detous. Cette collaboration se matérialise dans lesrafles : le 14 mai 1941, 4 000 Juifs étrangers sontemmenés dans des camps du Loiret par la gen-darmerie française ; entre le 20 et le 22 août desJuifs étrangers et français sont internés au campde Drancy (93) qui demeure jusqu’en 1943 sous

surveillance française. Ces mesures s’accompa-gnent d’une propagande haineuse véhiculée parla presse antisémite (Au Pilori), des affiches, desfilms (Le Juif Süss) ou des expositions comme“Le Juif et la France” inaugurée à Paris en sep-tembre 1941.De l’exclusion économique et sociale à l’extermi-nation, il n’y a qu’un pas franchi en 1941 - 1942.Le massacre des Juifs d’Europe a commencéavant même l’été 1941 et les tueries massivescommises par les Einsatzgruppen (groupes d’in-tervention mobile) sur le front russe. À l’au-tomne, la décision est prise de construire descamps d’extermination ; elle est concrétisée parla conférence de Wannsee, en janvier 1942, qui met en place la “Solution finale”. En France,son application a pour conséquence le départ du premier convoi de “déportés raciaux” versAuschwitz le 27 mars 1942. À la demande des autorités allemandes et avec

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De 1940 à 1944, les Juifs parisiens sont soumisà la double persécution de l’État français et del’occupant nazi. De sa propre initiative, le gou-vernement de Vichy promulgue, le 3 octobre1940, une “loi portant statut des Juifs”. Ce textedéfinit qui est juif en fonction de son ascen-dance et exclut les Juifs de l’administration et denombreuses professions. En juin 1941, un

second “statut” aggrave ces mesures. D’octobre1940 à septembre 1941, Vichy édicte 57 textesde loi antisémites, “véritable fièvre législative”1

qui vise l’exclusion des Juifs de la communauténationale. L’antisémitisme français existant avant-guerre dans certains milieux devient un antisé-mitisme d’État.Leur sont interdits les professions littéraires etartistiques, l’accès aux bibliothèques, aux sallesde spectacles, aux parcs à jeux pour les enfants.

La persécution antisémite à Paris (1940 -1944)

Parisiens en majorité, les Juifs, français ou étrangers, contraints au recensementpar l’ordonnance allemande du 27 septembre 1940, sont victimes des mesures dis-criminatoires de l’occupant et du gouvernement de Vichy.

1. Adam Rayski, Le Choix des Juifs sous Vichy, Éditions Ladécouverte, 1992, p.18

2. Berthe Auroy, Jours de guerre, Ma vie sous l’Occupation ,présentation et notes par Anne-Marie Pathé et DominiqueVeillon, Bayard, 2008, p. 231.

“Toutes les élèves de seconde du collègeSévigné (5e) sont arrêtées pour avoirarboré une étoile jaune en papier, le 8 juin1942 [..] Les inscriptions ne manquaientpas sur les étoiles de fantaisie portées parles sympathisants : “Auvergnat, Breton,Aryen, Juif d’honneur. Il paraît même que d’audacieux lycéens trouvaient lemoyen d’accrocher des étoiles au dos desAllemands…”2

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elles, les représentants de Vichy mettent aupoint l’opération “Vent printanier”, gigantesquerafle opérée par la police parisienne, les 16 et17 juillet 1942 : la rafle du Vel’ d’Hiv’ au coursde laquelle 12884 juifs immigrés - dont 4051enfants et 5 802 femmes - sont arrêtés. Entas-sés à Drancy - où les conditions de survie sontde plus en plus difficiles - et au Vélodromed’Hiver (boulevard de Grenelle, XVe arrondis-sement), ils ont été déportés. Des fuites ayanteu lieu, 8000 Juifs environ ont pu échapper àl’arrestation, souvent avec la complicité de la

population parisienne qui reste profondémentmarquée par ces journées.Jusqu’au dernier convoi du 17 août 1944, envi-ron 70000 Juifs de toute la France ont transitépar Drancy, antichambre des camps d’extermi-nation. De là sont partis 61 convois de déportés,essentiellement vers Auschwitz3. Parmi les76000 Juifs déportés de France seuls 3% sontrevenus des camps.

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1. Maurice Kriegel-Valrimont, dirigeant national des groupesd’action ouvrière, membre du COMAC, interviewé par

Philippe Ragueneau in Paris libéré, ils étaient là, op. cit., p. 86.

Paris, capitale d’une France engagée(fin 1942 - avril 1944)

La presse collaborationniste, Je suis partout,l’Œuvre, fustige le gouvernement de Vichyqu’elle juge trop timoré à l’égard de l’Alle-magne. Elle prône la croisade antibolcheviqueet salue le départ des contingents de la LVFsous uniforme allemand pour le front de l’Est.Les ultras de la collaboration, Doriot (PPF),Déat (RNP), Bucard et ses francistes agissentdepuis Paris.

Laval, de retour au pouvoir depuis avril 1942,choisit la voie de la collaboration active avecl’Allemagne nazie. Il institue la Relève (cinqouvriers volontaires envoyés en Allemagnecontre un prisonnier) puis le Service du TravailObligatoire (STO) en février 1943. La créationde la Milice (30 janvier 1943) concrétise le dur-cissement de la politique répressive du gouver-nement de Vichy ; elle aide l’occupant dans la

C’est l’heure des choix pour ceux qui ont misé jusque-là sur Pétain : l’Allemagne ou les Alliés, la collaborationou la Résistance. Après l’invasion de la zone sud, les positions se durcissent et la conséquence immédiate estque Paris devient un peu plus la capitale de la Collaboration.

Authentique carte nationale d'identité établie à Paris, utilisée par Serge Ravanel, chef national des Groupes francs du MLN,

sous la fausse identité de Lucien Poisson

Paris était la grande ville où ilétait plus facile qu’ailleurs de secacher, d’être clandestin. Et,pourtant, la répression était toutle temps présente… On ne pou-vait pas prendre le métro sanscraindre un contrôle. Et puis sur-tout, il y avait une cascade depolice : la police elle même, lamilice, la Gestapo, les services desécurité de l’armée allemande…Il fallait faire très attention!

Maurice Kriegel-Valrimont1

Répression et collaboration

3. Serge Klarsfeld, Le Mémorial de la Déportation des Juifs deFrance, 1979, p. 9.

Carl Oberg à gauche et René Bousquet au fond à droite, en civil, devant l’hôtel Majestic en juillet 1942

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2. Henri Michel, Paris résistant, op. cit. p 127. 3. Philippe Nivet et Yvan Combeau, Histoire politique deParis au XXe siècle, PUF, 2000, p.159.

lutte contre la Résistance et la traque des Juifs.Début 1944, sous la direction de Joseph Darnand,elle s’installe à Paris et commet une série d’as-sassinats : Victor Basch et son épouse (janvier)puis Jean Zay (juin) et Georges Mandel (juillet)en représailles à l’élimination par la Résistance,le 28 juin 1944, de Philippe Henriot, secrétaired’État à l’Information et à la Propagande. Levoyage du maréchal Pétain à Paris le 26 avril1944 est organisé avec force propagande exploi-tant les conséquences dramatiques des bombar-dements anglais. Une messe solennelle estcélébrée à Notre-Dame pour les victimes.À Paris, en dépit de leurs moyens et à cause deleurs divisions, les collaborateurs n’ont pasréussi à prendre de solides racines mais ils ontun dénominateur commun avec le régime deVichy : la lutte contre les Résistants. “La colla-boration n’a désormais plus qu’un seul visage,la répression policière”. Le SD et la Gestapodisposent dans toute l’agglomération pari-sienne d’hommes de mains et d’indicateurs (9 à 10 000) mais aussi de précieux auxiliaires(près de 2000) recrutés parmi la pègre et lesdroits communs libérés des prisons à cette fin,et tous motivés par l’appât du gain ; parmi eux,“la Gestapo française de la rue Lauriston” dePierre Bonny et Henri Lafont. Dans ces condi-tions, on mesure que, plus qu’ailleurs, la vie desrésistants est périlleuse.La répression s’est accentuée : au sein du dépar-tement de la Seine, y compris dans les com-munes de la banlieue “rouge” où le mouvementcommuniste était particulièrement implantéavant la guerre, on dénombre 842 arrestationssur flagrant délit et 411 mesures d’internement

administratif au 30 décembre 1940 ; au 28 avril1941, 1491 arrestations et 649 internementsadministratifs ; à la fin de l’année 1941, 2322arrestations et 1560 internements administra-tifs ; en juillet 1942, 3 011 arrestations et 1778internements administratifs2.

L’action immédiateParis offre une structure politique irremplaça-ble pour la lutte armée.En avril 1943, Joseph Epstein (le colonel Gilles),Juif polonais réfugié en France, alors responsa-ble des groupes de sabotage et de destruction del’Union des syndicats de la région parisienne, estnommé à la tête des FTP parisiens. S’appuyantessentiellement sur la branche MOI (Main d’œu-vre immigrée) des FTP, il élabore une tactiquede guérilla urbaine spectaculaire contre l’occu-pant. Les FTP-MOI, dirigés sur le terrain parMissak Manouchian, portent des coups sévèresà l’occupant. En avril et mai, seize détachementsont été attaqués à la grenade, neuf hôtels détruitspar les bombes, quatre officiers supérieurs tués,trois garages militaires incendiés3. Au cours del’été et de l’automne, quelques faits sont mar-quants : l’attaque par une vingtaine de résistants,le 7 juillet, d’un régiment de la Wehrmacht quiremontait les Champs-Élysées ; le 14 juillet, l’at-taque contre un restaurant de l’avenue de laGrande Armée réservé aux officiers allemands ;le 28 septembre, l’exécution rue Pétrarque du SS Julius Ritter, chargé de la déportation en Alle-magne des travailleurs français ; le 6 octobre,l’attaque d’une cinquantaine de soldats alle-mands place de l’Odéon. Près de trente opéra-tions en plein Paris sont accomplies par les

FTP-MOI d’août à mi-novembre 1943. Cesactions ont un fort impact sur l’opinion. À l’issued’une longue traque des brigades spéciales de lapréfecture de police et la Gestapo, Manouchianet vingt deux de ses camarades sont arrêtés, jugéspar un tribunal allemand (procès de “L’Afficherouge”) et exécutés en février 1944.

Paris, cœur de l’unification de la RésistanceLe rôle grandissant de Paris dans la Résistanceest lié directement au processus d’unificationet à l’effacement de Lyon après l’invasion de lazone sud le 11 novembre 1942 en représaillesau débarquement anglo-américain au Maroc eten Algérie le 8 novembre. Les groupements, lesjournaux, les services créés en zone sud sous

l’impulsion de Jean Moulin, délégué du généralde Gaulle pour l’ensemble de la France, s’ins-tallent à Paris qui devient la capitale d’un véri-table État clandestin. C’est à Paris que se jouela question du pouvoir et son rôle politique estessentiel. C’est de là que les résistants veulentrefaire l’unité de la France. Ce tournant de la guerre avec l’émergence d’unpouvoir à Alger sous protectorat américain pré-cipite l’union sous l’égide de Jean Moulin avec lamise sur pied des Mouvements unis de Résis-tance (MUR) le 26 janvier 1943. C’est le résultatde la fusion de Combat, Libération et Franc-Tireur pour la zone sud avec son pendant enzone nord deux mois plus tard, la création duComité de coordination des mouvements,

Tract annonçant la constitution du CFLN, le 3 juin 1943

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l’OCM, CDLL, CDLR, Libération-nord et leFront national par Pierre Brossolette. Paris est aucœur du processus d’unification de la Résistance.

Le Conseil national de la RésistanceInstitution politique par sa représentativité etsa longévité, le CNR est unique dans l’histoiredes pays occupés par le IIIe Reich. C’est la ren-contre entre la volonté du peuple résistant etcelle du général de Gaulle consécutive aux cir-constances de la guerre4.Imposé par les Américains après l’éliminationde l’amiral Darlan le 24 décembre 1942, le géné-ral Giraud, s’il lutte contre les Germano-Italiens, gère les affaires françaises d’Afrique duNord dans la continuité de ses prédécesseurs en continuant d’appliquer la Révolution natio-nale (mesures antisémites, prisonniers poli-tiques dans les camps). C’est une parodie delibération qui révulse les résistants de métro-pole. Dans les négociations entre de Gaulle,chef de la France combattante, et Giraud, lerôle de la Résistance intérieure est essentiel. Le 21 février 1943, le général de Gaulle fait deJean Moulin son seul représentant pour l’en-semble du territoire pour le rapprochement desdeux zones et le charge aussi de concrétiser savolonté : mettre sur pied le Conseil de la Résis-tance intégrant partis politiques et syndicatsaux côtés des mouvements. Quelles que soientles réticences de De Gaulle comme de JeanMoulin et de nombreux chefs de la Résistanceenvers les partis, cet organisme est nécessairepour affirmer la légitimité du chef de la Francecombattante à l’égard des Alliés.Le 8 mai, Jean Moulin adresse un télégramme

au général de Gaulle annonçant sa création. JeanMoulin préside, le 27 mai 1943, la séance inau-gurale du Conseil national de la Résistance(CNR) au 48 de la rue du Four. Sont réunis dix-huit participants dont les représentants desmouvements OCM, CDLL, CDLR, Front natio-nal, Combat, Libération nord, Libération-sud etFranc-Tireur, les partis politiques, communiste,socialiste, radical, démocrate populaire, Alliancedémocratique et Fédération républicaine et lessyndicats CGT et CFTC. Une motion deconfiance est votée faisant du général de Gaullele “seul chef politique”, le général Giraud devantlui être subordonné. L’arrivée de De Gaulle enAlgérie et la mise sur pied du Comité français dela Libération nationale (CFLN) préfigure le gou-vernement provisoire. Jean Moulin charge sonsecrétaire Daniel Cordier d’installer les servicesde la délégation générale à Paris. Ce dernier luitrouve un atelier d’artiste au 12 rue Cassini (14e)qui lui sert de logement et de QG d’avril à juin1943. Moulin fait un dernier séjour à Lyon pourfinaliser le transfert. À la suite de l’arrestation dugénéral Delestraint, chef de l’Armée secrète (AS)à Paris, il réunit à Caluire (près de Lyon) les res-ponsables de l’AS pour proposer des dispositionstransitoires et y est arrêté le 21 juin 1943. Ilmeurt des suites de la torture lors de son trans-fert en Allemagne près de Francfort probable-ment le 8 juillet 1943.Avec la naissance en novembre 1943 de la Fédé-ration de la Presse clandestine (au 37 rue deLille), les journaux de zone sud Libération etCombat (puis Franc-Tireur fin février 1944) quit-tent Lyon pour être imprimés à Paris où les faci-lités sont plus grandes. Paris compte la plusgrande densité d’imprimeries et, avec l’espoir dela Libération, la Résistance, dans sa lutte contre

l’occupant, doit atteindre l’en-nemi à sa tête. À la même époque,le comité directeur des MURs’installe lui aussi à Paris. Début1944, les MUR fusionnent avecDéfense de la France pour formerle Mouvement de Libérationnationale (MLN). La fusion gagneégalement les services de santéavec la création du Comité médi-cal de la Résistance permettantaux Résistants de disposer d’unservice médical dans la capitale.Fin 1943 - début 1944, tous lesorganismes de la clandestinitéœuvrent à Paris. Les arrestationset les difficultés engendrées par le pouvoir bicé-phale à Alger entraînent un flottement démo-cratique. C’est une phase difficile pour le CNRaprès la disparition de Moulin, les mouvementstendant à s’émanciper avec la création duComité central des mouvements. L’élection deGeorges Bidault à la présidence du CNR en sep-tembre et les travaux d’élaboration d’un pro-gramme lui permettent de retrouver sa cohésionet sa place centrale. Diffusé le 15 mars 1944, leprogramme du CNR vise à contrôler l’actionimmédiate et définit les mesures à appliquer dèsla Libération du territoire.La disparition de Jean Moulin entraîne pour desraisons de sécurité la séparation des fonctions dedélégué général de celles de président du CNR.Cette dichotomie n’est pas sans inconvénients ;c’est un handicap pour la prise de décisions.

La Délégation généraleMise sur pied par Jean Moulin en 1942, la Délé-gation générale, du fait de l’arrestation de

son chef, est dirigée à l’été 1943 par Claude Bouchinet-Serreulles puis Jacques Bingen quiassurent l’intérim. Le 25 septembre presque tousles membres de son secrétariat sont arrêtés et lesarchives saisies. Des commissions sont cepen-dant rebâties, (presse, radio, ravitaillement,œuvres sociales) et œuvrent avec efficacité. Entretemps, Émile Bollaert a été nommé déléguégénéral puis rappelé à Londres à l’hiver 1944,avant d’être arrêté avec Pierre Brossolette le 3 février 1944. La phase d’intérims et de dissen-sions prend fin avec la nomination en mars 1944d’Alexandre Parodi*, homme de devoir et grandserviteur de l’État, un des fondateurs du Comitédes experts puis, à l’hiver 1944, du Comitéfinancier de la Résistance. Il réorganise la Délé-gation en y intégrant la délégation militairejusque-là autonome pour en faire une structureunifiée en vue de la libération prochaine. En tantque représentant du Comité français de la Libé-ration nationale d’Alger puis à partir de la mi-août du Gouvernement provisoire, sa

Tract du 11 novembre 1940

4. Claire Andrieu, ”Le Conseil national de la Résistance” inDictionnaire historique de la Résistance, op. cit.

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Pour le Tout-Paris minoritaire, la vie sous l’oc-cupation allemande ne semble pas être syno-nyme de souffrance, bien au contraire. Pour lagrande majorité des Parisiens, les conditions devie s’aggravent avec la guerre qui dure. Blocusanglais et prélèvements allemands créent unevéritable pénurie. Les biens de consommationcourante (vêtements, savon, charbon…) devien-nent vite introuvables. Le rationnement est ins-tauré dès septembre 1940, et il frappe aussi etsurtout les denrées alimentaires. Une classifica-tion selon l’âge et les besoins supposés en calo-ries est établie. Les mairies distribuent des cartesnominatives avec des tickets pour se procurer,selon les jours, du pain, du sucre, de la viande(les jours “avec”), mais aussi des chaussures (àsemelles de bois), du tabac, etc. Le ravitaille-ment devient la première préoccupation desParisiens. Très vite, les queues s’allongent devantles magasins, les rations diminuent et les ersatz(faux café, faux sucre, faux tissu) apparaissent.Le rutabaga, sorte de chou à faible valeur calo-rique, refait surface et devient le symbole dunouveau régime alimentaire.Pour améliorer l’ordinaire il faut recourir au“système D” (grâce à de la famille ou des rela-tions vivant à la campagne où l’on se procureplus facilement le nécessaire) ou au marchéparallèle (et illégal), le marché noir. On peut yobtenir, mais à des prix sans cesse en hausse, ceque l’on ne trouve pas ou plus avec des tickets.D’une manière générale, et même si l’on n’enmeurt pas, on a faim à Paris sous l’Occupation.

Et de plus en plus car les rations baissent régu-lièrement. En 1940, les tickets pour un adultedonnent droit à 500 grammes de matière grassepar mois. Cette ration tombe à 150 grammes en1944.2 Alors qu’avant guerre Paris recevait1200000 litres de lait par jour, il n’en reçoit plusque 220000 en juillet 1944. Nourrissons etadultes seront victimes de carences alimentaires.Mais à la faim s’ajoute aussi le froid. Les hivers del’Occupation furent particulièrement rigoureux(70 jours de gel à l’hiver 1940-19413) alors qu’onne trouve pratiquement ni charbon ni bois dechauffage. Pour se réchauffer, le Parisien se cal-feutre chez lui ou quitte son logement pour fairede la marche ou trouver refuge dans un lieupublic fermé. Les moyens de locomotion se limi-tent désormais au bus à gazogène et au métrotoujours bondés. La bicyclette devient, en raisonde la pénurie d’essence, le moyen de transportindividuel par excellence, et l’on peut l’utilisersous la forme de vélo taxi si l’on en a les moyens.Enfin, la crainte de l’occupant, la multiplica-tion des contrôles, les rafles et l’instauration du couvre-feu génèrent un fort sentiment d’insé-curité dans la capitale. Il est renforcé par lesalertes qui obligent les Parisiens à se ruer auxabris et leur rappellent que la France reste unchamp de bataille possible. Les bombarde-ments alliés font malheureusement des victimes dans la population civile, comme les350 tués et les 500 blessés du premier bombar-dement de l’Occupation, visant les usinesRenault de Boulogne-Billancourt le 3 mars 1942.

“Paris a froid, Paris a faim” (Paul Eluard)1

1. Extrait de Courage, in Au Rendez-vous allemand, 19442. Jean Pierre Azéma,De Munich à la Libération. 1938-1944,Le Seuil, Paris 1979, p. 164.

3. Gilles Perrault, Paris sous l’Occupation, op. cit., p. 260.

mission principale est de superviser les nomi-nations des commissaires de la République etdes secrétaires généraux tout en participant à lacoordination militaire5. Il prépare la venue àParis du gouvernement d’Alger.

Le Comité parisien de la LibérationÀ la fois comité de Paris et du département dela Seine, le CPL voit officiellement le jour le 23 octobre 1943 à l’instigation du communisteAndré Tollet*, membre de la CGT et secrétairede l’Union des syndicats de Paris, un des arti-sans de la réunification syndicale d’avril 1943.Créé à l’échelon local comme tous les comitésde libération sur le modèle du CNR dont ildépend, le CPL comprend dix neuf membresreprésentant les différentes composantes poli-tiques, syndicales et résistantes de la régionparisienne : Communistes, Socialistes, Uniondépartementale des syndicats, Front national,l’Organisation Civile et militaire, Ceux de laRésistance, Libération-Nord. En pratique, c’estle bureau de six membres, comprenant AlbertRigal (PC) puis pendant l’insurrection GeorgesMarrane* (PC), Léo Hamon *(CDLR), AndréCarrel* (Front national, communiste), Marie-Hélène Lefaucheux *(OCM), Roger Deniau(Libération-nord) et André Tollet (CGT), quiprend les décisions6.Il est un des organismes de résistance mobili-sant la base autour de slogans visant l’Occupant,“l’envahisseur boche”, responsable de la pénurieet de la réquisition de main-d’œuvre. Il joueaussi un rôle essentiel dans le déclenchement

des manifestations qui se déroulent les 1er et 14 juillet 1944 à Paris et en banlieue.

L’Organisation militaireCette organisation politique est doublée d’uneorganisation militaire. Depuis Londres, le géné-ral Koenig* commande les Forces françaises del’intérieur (FFI) nées en février 1944 de la fusionthéorique de toutes les formations militaires dela Résistance, c’est-à-dire l’Armée secrète, lesFTP et l’Organisation de résistance de l’armée(ORA). Mais ces deux dernières forces conser-vent une certaine liberté de manœuvre. Le CNRrevendique la direction de l’action militaire parl’intermédiaire du Comité d’action militaire(COMAC) créé en mai 1944 qui commande lesFFI jusqu’au débarquement. Début juin 1944, le colonel Henri Rol-Tanguy*,issu des FTP, prend la tête des FFI de la régionparisienne. À la veille de l’insurrection pari-sienne, cette organisation est structurée certes,mais complexe et source de conflits d’attribution.Le débarquement allié en Normandie le 6 juin1944 précipite les événements. D’après le dis-cours du général de Gaulle du 18 avril 1942, lesParisiens doivent prendre part à leur libérationinséparable de l’insurrection tout en tenantcompte de l’avancement des Alliés. Mais qui tientParis, tient le pouvoir et la libération de la capi-tale est en cela spécifique et cruciale sur le planpolitique. “C’est pourquoi le rôle qu’allait jouerParis dans la dernière bataille de France devaitrevêtir une importance extrême”7.

5. Guillaume Piketty “La délégation générale” in Dictionnairehistorique de la Résistance, op. cit.6 Christine Levisse-Touzé, “Le Comité parisien de la Libéra-tion de Paris” in Dictionnaire de la France libre, [dir] François

Broche, Georges Caïtucoli, Jean-François Muracciole, collec-tion Bouquins, Robert Laffont, 2010.7 Charles de Gaulle, Discours et messages pendant la guerre,1940-1946, Plon, 1970, p. 537.

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Lycéens et résistantsL’occupation allemande ne laisse pas la jeunesseindifférente. Très rapidement, des lycéens pari-siens diffusent des tracts ou des journaux clan-destins. Dès octobre 1940, des élèves de Jansonde Sailly, La Fontaine et Claude Bernard distri-buent la revue Notre Droit rédigée par un de leurprofesseur, Edmond Lablénie1. Au lycée Carnot,des militants de la Jeunesse communiste, menéspar Guy Môquet, impriment tracts et papillons.L’expression la plus spectaculaire du refus del’occupation est la manifestation patriotique du11 novembre 1940 qui mobilise 3 000 lycéenset étudiants place de l’Étoile.En fonction des opportunités qui se présentent àeux, des lycéens intègrent des mouvements derésistance. Ils en forment parfois le noyau. C’estle cas des Volontaires de la Liberté, groupe crééen mars 1941 par des élèves de classe prépara-toire de Louis-le-Grand (Jacques Lusseyran etJacques Oudin) et Henri IV (Jean-Louis Bruschet Pierre Cochery). Ils impriment un bulletingaulliste tiré à 3 000 exemplaires (qui devient Le Tigre en 1942) et paraît jusqu’en août 1944.Les Volontaires de la Liberté entrent en contactavec d’autres mouvements à forte composantelycéenne comme “Résistance”, de Jacques Des-trées (Dr Renet), ou étudiante, comme “Défensede la France” de Philippe Viannay avec lequel ilsfusionnent en 19432. De petits groupes se forment dans différents éta-blissements du secondaire. Au lycée Buffon, cinq

élèves (Pierre Benoît, Pierre Grelot, Jacques Baudry, Lucien Legros et Jean Arthus) organi-sent le 16 avril 1942 une manifestation pourdénoncer l’arrestation de leur professeur, Ray-mond Burgard (co-fondateur du journal clan-destin Valmy). Alertées, les forces de l’ordreencerclent le lycée mais les “cinq” parviennent às’échapper. Contraints d’entrer dans la clandes-tinité, ils rejoignent les FTP. Dans les deux moisqui suivent, ils multiplient les actions de sabo-tage et les attentats contre l’occupant. Quatred’entre eux sont arrêtés en juin, le cinquième enaoût 1942. Ils sont condamnés à mort le 15 octo-bre et fusillés au stand de tir de Balard le 8 février1943. Les deux plus jeunes avaient 17 ans et leplus âgé 20 ans.

Dernière lettre de Jacques Baudry à ses parents,Prison de Fresnes, 8 février 19433

“Mes pauvres Parents chéris,On va m’arracher cette vie que vous m’avez donnéeet à laquelle je tenais tant. C’est infiniment durpour moi et pour vous ! J’ai eu la chance de savoiravant de mourir que vous étiez courageux. Restez-le. Surtout ma petite Maman, que j’embrasse detout mon pauvre cœur. Mes pauvres chéris. J’ai accepté le combat, vous le savez. Je serai coura-geux jusqu’au bout. La guerre sera bientôt finie. Vousserez quand même heureux dans la paix, un peugrâce à moi. […] Exécution ce matin à 11 heures. Jepenserai à vous. À Nicole. Hélas, nos beaux projetsd’avenir ! Qu’elle ne m’oublie pas non plus, ni mesparents. Mais surtout la vie continue pour elle.Qu’elle profite de sa jeunesse. Papa, Maman, meschéris qui m’avez tant aimé. Adieu. Je vous étreinsbien fort tous trois. Courage. Vivez. Je vous embrassele plus tendrement pour la vie. Adieu Papa, Maman.Adieu Nicole. Vive la France!

Votre Jacques”

1. Henri Michel, Paris résistant, op. cit., p. 130.2. Marie Granet, Les jeunes dans la Résistance, 20 ans en1940, France-Empire 1996, p. 40.3. Guy Krivopissko, La vie à en mourir. Lettres de fusillés1941-1944, Tallandier 2003, p. 201.

PARIS INSURGÉ,PARIS LIBÉRÉ

Tireurs à la fenêtre de l’Hôtel de Ville

La grande espérance née avec le débarquement, puis le sentiment que les forces alliéesse rapprochaient chaque jour, que leur arrivée était maintenant imminente, enfin lespectacle quotidien du déménagement des services allemands, avaient créé une fièvrequi grandissait et je faisais de trop longs trajets à bicyclette à travers Paris pour nepas éprouver la sensation physique que Paris était mûr pour un grand soulèvement.

Alexandre Parodi (interview du Figaro du 26 août 1964)

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Pour le chef de la France combattante, il estessentiel que les armes de la France agissent àParis avant celles des Alliés, que le peuplecontribue à la défaite de l’envahisseur, et que lalibération de la capitale porte la marque d’uneopération militaire et nationale. L’insurrectionest politiquement nécessaire pour maintenirl’unité de la Résistance et une administrationnouvelle doit être en place avant l’arrivée desAlliés. Le 3 juin 1944, le Comité français deLibération nationale (CFLN), dirigé par le géné-ral de Gaulle, se transforme en Gouvernement

provisoire de la République française (GPRF), pleinement reconnu par la Résistance intérieure.Les mouvements de résistance et le chef de laFrance combattante s’accordent sur la nécessitéde l’insurrection, à condition qu’elle se dérouledans l’ordre et qu’ils en restent maîtres.

La préparation politiqueLa Résistance intérieure a gagné en autorité. LesParisiens la connaissent surtout par la presseclandestine imprimée en majorité à Paris depuis1944 et compte une bonne centaine de jour-

Les conditions de la Libération

Occupé depuis quatre ans, Paris est le remords du monde libre. Depuis que les combats se sont portés sur le solde France à l’issue de l’opération Overlord le 6 juin 1944, il attend avec impatience l’heure de sa libération. Une fois le front allemand percé en Normandie, la capitale française se retrouve au centre de la stratégie et aucœur de la politique.

Les membres du CPL et Rol-Tanguy (de dr. à g.) : Marrane, Marie-Hélène Lefaucheux, Tollet, Demarre, Carrel, Rol, Hamon, Rigal, Maynial

naux. À l’extérieur et à l’intérieur de la France, laRésistance s’est structurée et tout est prévu pourqu’elle prenne sa place dans l’organisation dufutur pouvoir.À Alger, le pouvoir exécutif est assuré par leGPRF et le pouvoir législatif par l’Assembléeconsultative provisoire, née le 3 novembre 1943.À Paris, le Gouvernement provisoire est repré-senté par le délégué général, Alexandre Parodi.La Délégation comprend diverses commissions,chargées des questions économiques, du ravi-taillement, de la mise en place des comités delibération, de la nomination des préfets et dessecrétaires généraux. Alexandre Parodi dirigetous ces services, mais n’a pas d’autorité directesur les divers groupements de Résistance. Legénéral de Gaulle lui donne le 14 août, le titre deministre délégué dans les territoires non encorelibérés c’est-à-dire de représentant direct de sonautorité pour renforcer ses pouvoirs et contrôlerl’insurrection,Par ailleurs, Georges Bidault qui a succédé à JeanMoulin à la présidence du Conseil national dela Résistance (CNR), est le chef de la Résistance.Durant l’été 1944, pour des raisons de sécuritéseul le bureau du CNR se réunit. Il comprendoutre Georges Bidault, Louis Saillant (CGT),Pierre Villon* (Front national), Pascal Copeau(MUR) et Maxime Blocq-Mascart (OCM).Le Comité parisien de la libération (CPL), quantà lui, œuvre également par son noyau actif, sonbureau de six membres. Il prépare l’insurrectionsuivant les directives du CNR et dispose desmilices patriotiques, sorte de “police populaire”,chargée de missions d’ordre public et de soutienarmé au service des comités locaux de libérationdans Paris et le département de la Seine. En liai-son étroite avec l’état-major régional des FFI, le

bureau du CPL prépare les mesures à prendre lejour du soulèvement pour coordonner actionmilitaire et mouvement insurrectionnel. Sesappels à la population pour participer aux mani-festations et aux grèves jouent un rôle mobilisa-teur et entretiennent un climat propice à lacombativité des Parisiens. Ils suscitent aussi ledéveloppement des sabotages après le débar-quement allié le 6 juin 1944.

La préparation militaireLe général Jacques Chaban-Delmas*, déléguémilitaire national, est le responsable militaire duGPRF, placé sous l’autorité du général Koenig,commandant en chef des FFI resté à Londrespour coordonner les opérations avec celles desAlliés. Il est chargé de subordonner toute l’actionmilitaire de la Résistance au général Koenig. Le Comité d’action militaire (COMAC), orga-nisme de direction de commandement des FFIrattaché au CNR depuis mai, est composé detrois membres : Pierre Villon, du Front national,Maurice Kriegel* (Valrimont) des MUR, et lecommandant Jean de Vogüe* (Vaillant), desmouvements de zone Nord avec un chef d’état-major FFI Alfred Malleret-Joinville.Enfin, Henri Rol-Tanguy*, FTP, élu chef régio-nal FFI de la région P1 (Seine, Seine-et-Oise,Seine-et-Marne) parisienne avec le grade decolonel, à la suite de l’arrestation du comman-dant Lefaucheux en juin, commande les insur-gés. Doté d’un état-major efficace, il dispose d’unadjoint pour le département de la Seine, le colo-nel de Marguerittes, dit Lizé*, officier confirmé.Le COMAC puis les FTP le 8 août, à la demandede leur chef national, Charles Tillon, se placentsous ses ordres. Il prépare et dirige sur le planmilitaire l’insurrection parisienne.

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Pour affirmer la souveraineté française, deGaulle doit entrer dans Paris. L’unité chargéede cette mission est la 2e Division blindée fran-çaise, la 2e DB. Son commandant, le généralLeclerc*, compagnon de la première heure dugénéral de Gaulle, est l’un des chefs les plusillustres de la France libre, l’homme qui a prisl’oasis de Koufra aux Italiens le 1er mars 1941.Il a été chargé par de Gaulle de mettre sur piedla 2e DB. Au noyau originel de Français libres,Leclerc y a adjoint des unités entières de l’ar-mée d’Afrique, des républicains espagnols, des

évadés de France par l’Espagne, des Corses.Formée d’hommes et de femmes de tous hori-zons géographiques – il y a 22 nationalités –,de toutes convictions politiques et religieuses,elle représente pour Leclerc “sa plus belle victoire”, le symbole de cette union retrouvéeque de Gaulle souhaitait instaurer en Francesous son autorité. Equipée et ravitaillée par lesAméricains, elle est placée sous leur comman-dement.Leclerc a été informé par un ordre écrit dugénéral de Gaulle remis par le capitaine de

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Le général de Gaulle à Bayeux le 14 juin 1944

Tract d’appel à la grève des cheminots

Affiche des mouvements de résistance de la Police parisienne

Boissieu, membre de l’État-major de la Divi-sion, le nommant, gouverneur militaire deParis par intérim après avoir libéré la capitale.Le général Eisenhower, commandant en chefallié, a promis au général de Gaulle que lesFrançais seraient les premiers à entrer dansParis. Fin avril - début mai 1944, la 2e DB quitte le

Maroc pour l’Angleterre afin de parfaire son ins-truction. Rattachée à la 3e armée du général Pat-ton, elle est acheminée vers le sud de l’Angleterrepuis embarquée dans la région de Southamptonfin juillet, au moment où la percée du front alle-mand en Normandie se profile. Elle débarque àUtah Beach (Saint-Martin-de-Varreville dans ledépartement de la Manche), le 1er août 1944.

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Organisation politique et militaire de la Résistance à Paris (à partir du 14 août 1944)

Paris n’est pas un objectif pour lesAméricainsPour les Américains qui ont fini par admettrel’autorité du chef du gouvernement provisoire,le général de Gaulle, Paris peut attendre. Ilsredoutent des combats de rue meurtriers si lesAllemands s’y accrochent et prévoient decontourner Paris par Mantes, au nord, et Melun,au sud, convaincus que la capitale tomberad’elle-même. La question du ravitaillement,4 000 tonnes par jour pour nourrir la popula-tion civile, est pour eux un problème dont ils neveulent pas s’embarrasser. La question du pou-voir est pour eux secondaire.À l’aube du 14 juin 1944, le général de Gaullemet le pied sur le sol de France en Normandie etse rend à Bayeux puis Isigny où il reçoit unaccueil chaleureux. Il intronise le premier com-missaire de la République sur le territoire métro-politain, François Coulet et remplace lesous-préfet vichyste par un de ses fidèles, Ray-mond Triboulet. Dans son premier discours enmétropole, il promet de continuer la luttejusqu’à ce que la souveraineté soit rétablie surtout le territoire. Il ajoute “Personne ne nousempêchera de le faire”, mettant en garde lesAméricains contre leur projet de gouvernementmilitaire des territoires occupés : l’Amgot (AlliedMilitary Government of occupied territories).Soucieux de défendre la souveraineté nationale,le général de Gaulle désigne les nouveaux déten-teurs des fonctions publiques, empêchant ainsil’administration militaire américaine de nommerses propres fonctionnaires.

Paris s’impatienteDepuis le 6 juin 1944, les divers organes deRésistance incitent les Parisiens à la révolte. Plu-

sieurs étapes traduisent l’évolution du climatinsurrectionnel. Des manifestations spontanéesse déroulent les 1er et 7 juillet. À la veille du 14 juillet, le CPL et le CNR appellent la popula-tion à une très forte mobilisation, des tracts sontdiffusés en grand nombre dans Paris. L’avancedes armées alliées sur le territoire français accroîtl’aspiration des Parisiens à chasser l’occupant etle régime de Vichy. À l’instigation des syndicats, du Front national etdu Parti communiste, environ 100000 personnesmanifestent spontanément à l’Arc de Triomphe,place de la République et en banlieue en chantantla Marseillaise. Pour la première fois, la policen’intervient pas. Ces manifestations galvanisentles énergies et la Résistance est plébiscitée. L’ini-tiative est audacieuse car c’est la première foisqu’une action collective de cette ampleur est lan-cée contre les Allemands. La répression ne cessepas pour autant : le 16 août, 35 jeunes gens sontfusillés au bois de Boulogne, 7 autres au 10 rueLeroux (16e), d’autres dans les fossés du bois deVincennes, à Romainville ; le 17 août, le dernierconvoi de déportés quitte Drancy. Le CPL, en particulier Carrel et Tollet, estime lemoment propice au déclenchement de grèvesouvrières pour paralyser l’activité économiquede l’occupant prélude à la grève générale insur-rectionnelle. Depuis le 14 juillet, l’agitation n’aguère cessé chez les cheminots. Le 10 août,après une manifestation rassemblant près de1000 personnes à Villeneuve-Saint-Georges,l’Union départementale de la CGT estime lemouvement assez ample pour déclencher lagrève générale des cheminots en région pari-sienne. Le mouvement se situe d’emblée sur leterrain patriotique : “Que la grève généraledevienne effective ! Mort aux boches et aux traî-

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Général de Gaulle

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Comité d’Action en France

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Le 17 août 1944, 1 500 fonctionnaires manifes-tent place de l’Hôtel de Ville. Au sein du CPL,Tollet est favorable à l’appel aux armes. À la Délé-gation générale, Alexandre Parodi et JacquesChaban-Delmas sont très réticents à déclencherl’insurrection parce qu’ils redoutent les destruc-tions et veulent éviter l’hécatombe. De retour deLondres le 16 août, Chaban est porteur desordres du général Koenig de ne pas déclencherprématurément l’insurrection.Mais la situation est tout autre en région pari-sienne où la montée vers un grand soulèvementest irréversible. Le 10 août, les FTP ont lancé un

appel “Tous au combat ! En avant pour l’insur-rection nationale ! Marchez au canon!”. Dansl’après-midi du 18 août, la CGT et la CFTCappellent tous les travailleurs à la grève.Consulté, le CNR décide, sur la proposition deGeorges Bidault, de soutenir ces initiatives. Lesoir, les commandants de la Garde républicaineet de la Gendarmerie de la Seine se placent sousles ordres de la Délégation générale. Dans la soi-rée, le colonel Rol-Tanguy décrète la mobilisa-tion générale en exécution des consignes duCNR et en accord avec les décisions du CPL. Par

L’insurrectionParis se bat aujourd’hui pour que

la France puisse vivre demain.Albert Camus1

Barricades sur le Pont Neuf

1. Combat, 24 août 1944, in Essais, La Pléiade, Gallimard.

Tous au combat

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tres ! Les Alliés doivent entrer dans un Parislibéré”. Le CPL étend le mot d’ordre aux autrescorps de métiers.Réunis le 14 août avec Carrel du CPL et Rol-Tan-guy, les trois mouvements de résistance de lapolice, le Front national, Police et Patrie et Hon-neur de la Police s’entendent pour créer leComité de libération de la police et déclencherl’appel à la grève pour le lendemain en réponseau désarmement par les Allemands de policiersà Asnières et Saint-Denis. Les postiers et les infirmiers se mettent en grèvele 18 août. La BBC encourage le mouvement.L’arrêt des usines, le sabotage des voies ferrées, lenoyautage des administrations paralysent pro-gressivement la vie économique de la capitale : lecharbon manque, le gaz est arrêté, les coupuresd’électricité se multiplient. Paris est au bord del’asphyxie. Les difficultés de transport s’aggra-vent. Les étalages se vident : plus de viande, leslégumes se font rares. Les souffrances des Pari-siens galvanisent les énergies, la colère gronde.

Les soubresauts de VichyPétain envisage une entente avec le général deGaulle et fait prendre contact avec lui. De Gaullerefuse. Laval, chef du gouvernement de Vichy, auquel lemaréchal a abandonné la plupart de ses pouvoirsdepuis 1942 veut éviter l’arrivée du général deGaulle au pouvoir. Pour s’y opposer, il imaginede recourir à Édouard Herriot, président de laChambre des députés jusqu’en juillet 1940, pourformer un gouvernement. Le 12 août, il le faitchercher à Nancy, où il est assigné à résidence, etl’installe à l’Hôtel de Ville chez le préfet de laSeine. Mais l’arrestation d’Édouard Herriot parles Allemands met fin à cette mascarade.

Avant de prendre, le 17 août, le chemin de l’exilvers l’Allemagne, Laval confie aux représentantsdu gouvernement de Vichy à Paris, Bussière etBouffet respectivement préfet de police et préfetde la Seine, le maintien de l’ordre et l’accueil desAlliés. Ils sont assistés de Pierre Taittinger, prési-dent du Conseil municipal et de Victor Constant,président du Conseil général de la Seine. Le 20 août, Pétain quitte la France sous escorte alle-mande à destination de Sigmaringen, où il rejointles membres de son défunt gouvernement. LesAméricains n’ont pas voulu négocier avec le gou-vernement de Vichy.

Les forces allemandesDepuis l’attentat manqué contre Hitler le 20 juil-let 1944, le personnel militaire allemand com-promis à Paris a été renouvelé. Le généralBoineburg-Lengsfeld est remplacé par le généralvon Choltitz* à la tête du Gross Paris. Choisipour son efficacité et sa fidélité absolue au Führer, von Choltitz reçoit le 7 août son nou-veau commandement des mains même de Hitlerà son bunker de Rastenburg. Issu d’une grandefamille de soldats et de propriétaires terriens deSilésie, il a pris part aux campagnes de Pologneet de Russie, où il s’est distingué au siège deSébastopol en juillet 1942. Von Choltitz a com-battu les Alliés en Italie puis en Normandie.Lorsqu’il arrive à Paris, le 9 août, il a cinquanteans. Le nouveau commandant du Gross Parisdispose de troupes de sécurité constituées dequatre régiments de soldats âgés. On lui affecteun détachement de 17 chars de la division Panzerlehr, un bataillon de choc de la 1re arméeet des batteries de la 1re brigade de Défensecontre avions (DCA).

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une affiche apposée sur les murs, ordre estdonné à tous les Parisiens de rejoindre les FFI.

Les décisions d’AlgerIl est certain que le mot insurrection, par saconnotation révolutionnaire, fait peur à beau-coup. Le Gouvernement provisoire à Algerentend contrôler les événements et par sa der-nière instruction de mai, il impose de ne lanceraucune action de masse avant le passage à l’of-fensive des armées alliées. Autre pierre d’achoppement, le CPL, comme tousles comités de Libération, aurait dû désigner lesautorités municipales ce qui supposait de revoir lestatut municipal de Paris. Les précédents de 1830,1848 et 1870 incitent le gouvernement, dont ledélégué général, Alexandre Parodi est à Paris, àcontrôler la situation et rester maître de la capi-tale. Il est décidé que les préfets n’auraient qu’uneautorité administrative et le choix se porte surCharles Luizet*, Français libre de la premièreheure qui a fait ses preuves comme préfet de laCorse libérée pour la Préfecture de police et Mar-cel Flouret*, ancien chef de cabinet de VincentAuriol, pour la préfecture de la Seine. Le CPL quioppose un des siens, Georges Marrane ancienmaire d’Ivry et ancien président du Conseil géné-ral de la Seine, un des fondateurs du Front natio-nal en zone sud, doit s’incliner. Luizet commeFlouret sont placés sous l’autorité de Parodi enprélude à la restauration de l’État.

Le 19 août, premier jour de l’insurrectionL’insurrection se prépare. L’initiative vient de lapolice : le commandement allemand a donnél’ordre aux policiers de reprendre leur service.Prévenus dans la nuit, 2 000 policiers insurgésoccupent la préfecture de police au matin du

19 août. Bussière, le préfet de police est arrêté.Rol-Tanguy se rend sur les lieux pour soutenirles insurgés et leur prescrire le port du brassardFFI. L’ordre général d’insurrection nationale,lancé quelques heures avant, rappelle à chacunsa mission : patrouilles dans Paris, occupationdes bâtiments publics, usines, gares…enfin“ouvrir la voie de Paris aux armées alliées victo-rieuses et les y accueillir”. Les policiers accueil-lent Charles Luizet et hissent les couleurs. Dès l’après-midi, le poste de commandement duchef des FFI d’Île-de-France est transféré du 66 rue de Meaux (19e arrondissement) au 9 rueSchoelcher (14e arrondissement), dans les sou-terrains d’un immeuble du Service de l’Assainis-sement, relié avec les différents postes d’égoutsde la capitale par un réseau téléphonique indé-pendant. L’emplacement choisi tient égalementcompte de la marche des armées alliées atten-dues par le sud de Paris. En effet, en juin, lorsd’une réunion du COMAC, Chaban-Delmasavait signalé à Rol-Tanguy que l’unité pousséeen avant la première serait la 2e DB.Les premières fusillades éclatent. Les milicespatriotiques s’emparent des Halles et de la Postecentrale de la rue du Louvre. Les FFI passent àl’attaque dans les 1er et 13e arrondissements, àSaint-Denis, Neuilly, Vitry et Aubervilliers.Observant les directives du CPL, les comitéslocaux de libération occupent les mairies d’ar-rondissement. Parfois, les choses se passent de lamanière la plus simple : une délégation ducomité local de libération arrive, l’équipe en

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Tract de la Résistance aux Allemands :“Vous ne pouvez plus tenir Paris… Assez de sang, ren-dez vos armes pour que votre vie soit épargnée, évitezdes vengeances [...], toute action est un double crimecontre le peuple français et le peuple allemand”.

Parodi adresse une proclamation aux Parisiens : “L’ennemi qui hier encore, refusait de reconnaîtrenotre armée de l’intérieur a demandé une trêve. Quechacun demeure à son poste et exécute les ordres... Lecombat continue, vive le général de Gaulle...”

exercice lui cède la place de bon gré. Dans le 19e arrondissement, elle se met spontanément àsa disposition. En banlieue Est, les mairies deMontreuil, des Lilas, de Bondy ont été prises dèsle vendredi 18 août par des FTP. L’occupation des édifices gouvernementaux doitêtre exécutée sous les ordres d’Alexandre Parodi.Pour assurer l’intérim avant l’arrivée des minis-tres du Gouvernement provisoire, chaque minis-tère est confié à un secrétaire général, rejoint parun officier de police accompagné d’un détache-ment armé et qui n’a plus qu’à prendre posses-sion de l’édifice déserté. Mais les consignes duDélégué général sont parfois devancées : le palaisde l’ Élysée est occupé par un détachement degardes de la caserne de Penthièvre ; l’hôtel Mati-gnon est libéré par une centaine d’hommes du

groupement spécial de protection chargé de lasécurité de Laval qui ont choisi l’insurrection etqui accueillent Yvon Morandat, collaborateurd’Alexandre Parodi, et son adjointe, venus pren-dre possession du lieu.Le drapeau tricolore flotte à l’Hôtel de Ville.Pierre Taittinger, le président du Conseil muni-cipal, a été consigné dans ses locaux, mais Bouf-fet, le préfet de la Seine, est toujours en place.Le dimanche 20 à l’aube, Léo Hamon, du CPL,et une poignée d’hommes de “Ceux de la Résis-tance” investissent l’Hôtel de Ville sans grandedifficulté, avec l’aide de quelque 200 agentsrésistants. Bouffet est arrêté. La défense estconfiée à Aimé Lepercq* de l’OCM, assisté deRoger Stéphane*. L’après-midi, Marcel Flouret,le nouveau préfet, s’installe.

Voiture de la police équipée d’un haut-parleur informant les insurgés qu’une trêve a été conclue avec le commandant du Gross Paris

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niers politiques. Dans la matinée du 19, il s’en-tretient avec von Choltitz. Les deux hommesévoquent l’occupation des édifices publics par lesRésistants. En fin d’après-midi, Nordling reçoitun appel téléphonique de la préfecture luidemandant de servir d’intermédiaire auprès desAllemands pour obtenir une suspension d’armes.Au soir du 19, une trêve de cinquante minutesest conclue verbalement pour les abords immé-diats de la préfecture ; elle est étendue, dans lanuit, à tous les édifices occupés par la Résistance. Le 20 août en fin de matinée, des tracts annon-çant la trêve sont diffusés par des voitures de lapolice et de la Feldgendarmerie. Mais la trêve estpeu respectée de part et d’autre. En effet, l’en-semble de la Résistance est hostile à cette initia-tive parce qu’elle risque de briser l’insurrection.Rol et Lizé rappellent que “tant que les Allemandsrestent à Paris, le devoir est de les combattre”. Ilsfont placarder un avis selon lequel aucune trêven’a été conclue entre le commandement françaiset le commandement ennemi.Le 20 août toujours, à l’initiative de Carrel, leParti communiste, le Front national, l’Union dessyndicats et les FTP, signent un appel commun :

“Ceux qui se battent depuis trois ans dans lesrangs des FFI, ceux qui se battent depuis plu-sieurs jours, ne sauraient cesser le combat tantqu’un seul boche reste encore en liberté sur lesol de la capitale… Pratiquez la guérilla, atta-quez les boches partout où vous le pouvez”.L’appel porte en exergue une citation du généralde Gaulle lui-même hostile à la trêve, estimanten militaire qu’il faut se battre.Le même jour, Parodi et ses deux adjoints, ÉmileLaffon et Roland Pré, sont arrêtés et conduitschez von Choltitz à qui ils se présentent commeles ministres du général de Gaulle. Convoqué,Nordling s’en porte garant et les trois hommessont libérés. Pour ne pas rompre la cohésion dela Résistance et permettre l’arrivée du général deGaulle dans un Paris libéré, Parodi consent le 22 au matin, à une reprise générale des combats,qui n’ont en fait pas cessé.

Equipe de secours devant l’Hôtel-Dieu

En plein mois d’août un lundi soir de couleur tendre, Un lundi soir pendu aux nues Dans Paris clair comme un œuf frais, En plein mois d’août notre pays aux barricades, Paris osant montrer ses yeux, Paris osant crier victoire, En plein mois d’août un lundi soir.

Paul Eluard2

Et tout à coup, d’un peu partout, on voit sortir desbouteilles incendiaires. C’est un spectacle courant devoir des jeunes hommes qui se lancent sur un charallemand, ouvrent le capot et jettent une bouteille !

Maurice Kriegel-Valrimont3

2. Novembre 1944, in Œuvres complètes, La Pléiade, Gallimard.3. Interviewé par Philippe Ragueneau in op. cit., p. 97.

Dans les premières 24 heures de l’insurrection,les actions de guérilla qui éclatent en diverspoints de la capitale sont menées par les groupesFFI d’arrondissements. Le 19 août reste une jour-née de mobilisation. Mais l’effet de surprise joueà plein. Les insurgés s’emparent des dépôtsd’armes, contrôlent le réseau téléphonique et sesaisissent des Halles grâce à l’action du com-mandant Faucher, le 20 août, pour nourrir lapopulation après que les Allemands ont incendiéles Moulins de Pantin pour affamer les Parisiens.

Août 1944 : presse clandestine, presselibreLa plupart des immeubles destinés à l’Informa-tion sont aussi occupés le samedi 19 et ledimanche 20 août. Les résistants de la Radio setrouvent déjà dans la place, au 37 rue de l’Uni-versité. En effet, dès 1942, Pierre Schaeffer avaitfondé un studio d’essai destiné à tester de nou-velles émissions et former des techniciens. Il aégalement rassemblé pour le jour de la Libéra-tion des disques enregistrés, chants nationaux,musique interdite. Philippe Henriot, ministre del’Information du gouvernement de Vichy, l’avaitrenvoyé, mais son équipe était restée.La presse collaborationniste cesse de paraître le18 août. Le même jour, les sièges des journauxcollaborationnistes (La Gerbe, rue des Pyra-mides ; Je suis Partout, rue de Rivoli ; L’lntransi-geant, rue Réaumur) sont occupés. Le 20 août,les rédacteurs des titres de la Résistance occupentles locaux qu’on leur a attribués. Le Soir, le Frontnational et Libération se partagent l’immeuble deParis-Soir, rue du Louvre ; Combat, Franc-Tireur,et Défense de la France, celui de L’Intransigeant ;Le Populaire et Libération Soir s’installent danscelui du Matin, à l’angle du boulevard Poisson-

nière et de la rue du Faubourg-Poissonnière etL’Humanité dans celle du Petit Parisien, rue d’En-ghien. Les journalistes et photographes installentl’Agence France presse dans les locaux de l’officed’information de Vichy (agence Havas avantguerre) place de la Bourse et s’apprêtent à couvrirl’événement. Dans la presse, le mot d’ordre est :“Typos à vos machines ! Au marbre, rédacteurs !Roulez rotatives ! A vos cycles, camelots ! Et quepartout à travers la ville, les feuilles incendiairesenflamment les Parisiens.”Alexandre Parodi interdit la sortie des journauxet les émissions radio. S’il a accepté le déclen-chement de l’insurrection pour préserverl’unité de la Résistance, il craint, comme sonadjoint Chaban, l’écrasement des insurgés parles Allemands. Chaban presse d’ailleurs le géné-ral Koenig d’obtenir au plus vite l’interventionmilitaire des Alliés. Les Américains n’ont pas l’intention de modifierleur stratégie et de se porter sur la capitale. L’occupant, quant à lui, commence à réagir. LesFFI perdent Neuilly et les mairies des 1er et 20e arrondissements. Les combats s’étendent àla place et au boulevard Saint-Michel. Dansl’après-midi du 19, les Allemands tentent pardeux fois de reprendre la préfecture. Les insur-gés n’ont plus de munitions que pour quatre oucinq heures. La disproportion des moyensinquiète Parodi, Hamon et Chaban.

La TrêveSans consulter Rol-Tanguy, Parodi donne l’ordred’évacuer la préfecture de police, mais le Comitéde libération de la police refuse. C’est à cemoment que Raoul Nordling*, le consul deSuède, entre en jeu. Le 17 août, il avait déjàobtenu la libération de quelques 3 000 prison-

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de mains pour prendre des armes à l’ennemi semultiplient, alternant avec des combats plussévères près du Louvre, aux Batignolles, dans le14e, aux Gobelins, à la préfecture.Les combats de la libération se sont parfoisaccompagnés d’une épuration populaire, dedébordements violents et de règlements decomptes sommaires. On assiste à des scènes oùdes collaborateurs, ou supposés tels, sont bruta-lisés voire lynchés par la foule. Des femmesaccusées, à tort ou à raison, de collaborationsont humiliées en public (tondues ou le corpspeint de croix gammées).

Les intentions allemandesLe 19 août, Hitler a donné l’ordre à von Choltitzde défendre Paris coûte que coûte : “Paris doitcesser d’être la ville des embusqués… Aucunhomme capable de porter les armes ne doit resterà l’arrière... Tous les hommes mobilisables serontenvoyés au front”. Le 22 août, von Choltitz captepar radio un nouvel ordre, tout aussi ferme, duFührer : “Paris doit être réduit en un monceau deruines”. Il doit défendre la ville jusqu’au dernierhomme, “détruire tous les ponts” et, s’il le faut,“périr lui-même sous les décombres”. Mais si Hitler n’a jamais prononcé les fameuxmots “Paris brûle-t-il ?”, il ne souhaite pas pré-server Paris, ni répéter l’exemple de Rome,déclarée ville ouverte le 5 juin 1944 par le maré-chal Kesselring, ce qui eut pour effet de faciliterla progression des Alliés. Le maréchal Model,commandant des forces allemandes de l’Ouest,dont dépend von Choltitz, lui ordonne à sontour de tout mettre en oeuvre pour faire sauterles ponts. Celui-ci lui rend compte le 23 aoûtque les ordres de destruction ne peuvent êtreopérés. La 7e armée allemande, qui bat en

retraite, ne fait donc que traverser Paris.Les forces allemandes sont alors concentrées aucentre de Paris, autour de quelques points d’ap-pui : l’hôtel Majestic, avenue Kléber, siège duhaut-commandement militaire en France ; leshôtels Meurice et Crillon, sièges du comman-dant du Gross Paris et de la marine allemandeenglobant le périmètre de la Concorde et du jar-din des Tuileries où sont stationnés des chars ;l’Opéra pour la Kommandantur ; la caserne duPrince-Eugène, place de la République ; le PalaisBourbon ; le ministère des Affaires étrangères ;les Invalides ; l’École militaire ; le Sénat et laTour Eiffel.

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Barricades et combatsMalgré la trêve, la place Pereire, la place Saint-Augustin, le Sénat sont le théâtre de combats san-glants. Dans la soirée du 21 août, les premièresbarricades sont édifiées, au carrefour Saint-Ger-main-Saint-Michel, dans le secteur entre la Seineet le Luxembourg qui défend l’île de la Cité. Le22 août, Rol fait afficher un ordre pour la défensede la population parisienne, accompagné d’unappel:“Tous aux barricades!”. Le même jour, lapresse, enfin libre de paraître, diffuse des ins-tructions pour les construire. Et ce sont près de600 barricades qui surgissent un peu partout.Parisiens et Parisiennes, jeunes et moins jeunes,font la chaîne pour se passer pavés, grilles, sacsde sable…tout est bon. L’état-major FFI surveilleles travaux. Rol fait même appel au secrétaire dusyndicat des terrassiers. L’objectif du commandement est de réduire lacirculation allemande. Les barricades n’ont paspour effet de libérer Paris, mais elles ont unimpact psychologique très grand : les Parisiensparticipent à leur propre libération. Paris renoue

avec la tradition révolutionnaire de 1830 et1848, dont les barricades sont le symbole.De leur côté, les autorités se mettent en place.Le 22 août, Parodi, en tant que ministre déléguéet, à ce titre, président du conseil provisoire, réu-nit les secrétaires généraux à l’hôtel Matignon.Les problèmes du ravitaillement, de la reprise dutravail et du retour à l’ordre sont évoqués. Lejeudi 23, Georges Bidault, qui rompt ainsi avecl’anonymat de la Résistance, rend visite auxdéfenseurs de la préfecture de police.La bataille fait rage près du Palais-Royal, placedu Panthéon et place Maubert, rue de Seine,place de la Chapelle. Les Allemands ne se hasar-dent plus guère que sur les grandes artères. Aumatin du 23, ils attaquent, avec cinq chars, leGrand Palais où se trouve le commissariat cen-tral du 8e arrondissement. Des obus font explo-ser les stocks de munitions, déclenchantl’incendie. Les Allemands tailladent les tuyauxque les pompiers mettent en position. À11 heures 30, les défenseurs du Grand-Palais nerépondent plus, les FFI sont capturés. Les coups

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Cécile Tanguy au PC de Denfert-Rochereau

Les couleurs hissées à la préfecture de Police lors de la visite de Georges Bidault, le 23 août

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Juin 1944Samedi 3, proclamation à Alger du Gou-vernement provisoire de la Républiquefrançaise.Lundi 5, Rol-Tanguy est nommé com-mandant des Forces françaises de l’inté-rieur d’Ile-de-France.Mardi 6, débarquement allié en Nor-mandie.Mercredi 28, élimination de Philippe Henriot par un groupe-franc des FFI.

Juillet 1944Vendredi 14, manifestations populairesanti-allemandes dans la région pari-sienne, plus de 100 000 personnes sontrassemblées.

Août 1944Mardi 1er, la 2e DB débarque en Nor-mandie et participe à la bataille.Jeudi 10, grève des cheminots.Dimanche 13, grève des gendarmes ;3000 agents de la Compagnie du Métropolitain se mettent en grève, les Allemands désarment 375 gardiens de laPaix. Pierre Laval charge les préfets dela Seine et de police de représenter legouvernement de Vichy auprès des Alliés.Laval quitte Paris à destination de l’Allemagne.Mardi 15, débarquement allié en Pro-vence. Grève de la police décidée par lestrois organisations de policiers résistants.Mercredi 16, massacre par les Alle-mands de 35 jeunes au Bois de Boulogneet sept autres rue Pierre Leroux.Jeudi 17, Radio Paris (collaborationniste)suspend ses émissions. Le dernier convoide déportés part de Drancy.• 12h30 Raoul Nordling, consul deSuède, signe avec von Choltitz, com-mandant du Gross Paris, à l’hôtelMajestic un accord relatif à la libérationde 3 000 détenus politiques.Vendredi 18, matin, grêve des postierset des infirmiers. Les journaux collabora-tionnistes ne paraissent pas. Après-midi,les appels de mobilisation générale ducolonel Rol et des élus communistesappelant le peuple de Paris à l’insurrec-

tion sont apposés sur les murs ; ils sontconfirmés le lendemain par le CNR et leCPL ; appel à la grève générale de la CFTCet de la CGT.Samedi 19, 8h, 3 000 agents de policeoccupent la préfecture de police.Alexan-dre Parodi, ministre du général de Gaulle,met toutes les forces de la Résistance auxordres du colonel Rol. Premières démons-trations allemandes contre la préfecturede police.• 20h40, une trêve est conclue pour lapréfecture de police par Nordling avecvon Choltitz.Dimanche 20, matin, le général deGaulle insiste auprès d’Einsenhower pourqu’il envoie la2e DB sur Paris.• 6h15, occupation de l’hôtel de ville parLéo Hamon (CPL) et quelques résistants.• 8h15, le maréchal Pétain quitte Vichypour l’Allemagne.Extension de la trêve à l’ensemble deParis.• 17h, Marcel Flouret, préfet de la Seinenommé par le GPRF, arrive à l’hôtel deVille.Lundi 21, 12h, Leclerc, commandant la2e DB et, depuis déc. 1943, chargé par de Gaulle de libérer Paris, envoie un déta-chement en direction de la capitale (deGuillebon) ; en fin d’après-midi, les jour-naux de la Résistance paraissent augrand jour.• 19h30, ordre est affiché de dresser desbarricades, renouvelé le 22 par Rol.Mardi 22, Paris se couvre de barricades.• 9h, Gallois, est envoyé par Rol au QGdu général Bradley pour obtenir l’aidemilitaire.• 14h, Parodi préside la réunion dessecrétaires généraux de tous les minis-tères qui représentent le gouvernementdu général de Gaulle à l’hôtel Matignon.• 19h15, Bradley donne l’ordre à Leclercde foncer sur Paris avec l’aide de la 4e division américaine.Mercredi 23, von Choltitz reçoit l’ordred’Hitler d’opérer le maximum de des-tructions. Il menace les résistants d’atta-

quer les édifices publics.• 9h, incendie du Grand Palais.Jeudi 24, 7h, la 2e DB arrive à la Croix-de-Berny à 19h.• 20h, la radio française annoncel’arri-vée de la 2e DB.• Dans l’après-midi un piper-cub lâche untract sur la Préfecture de Police : “Tenezbon, nous arrivons”.• 21h22, le capitaine Dronne arrive àl’hôtel de Ville avec ses RépublicainsEspagnols ; les cloches sonnent. • 21h30, le groupement Langlade atteintle pont de Sèvres.Vendredi 25, 7h45, Billotte entre dansParis. Leclerc arrive par la porte d’Orléanset installe son PC à la gare Montpar-nasse.• 10h, von Choltitz est sommé de serendre.• 14h, le groupement Langlade arriveplace de l’Etoile et obtient la reddition del’hôtel Majestic (siège principal destroupes allemandes).• 14h45, après l’assaut des soldats de la2e DB, von Choltitz est fait prisonnier etconduit à la préfecture de police oùLeclerc lui fait signer la convention dereddition.• 16h15, emmené au PC de Leclerc àMontparnasse, il signe une vingtaine decessez-le-feu pour obtenir la redditiondes points d’appui allemands. Rol signeun des exemplaires de la convention.• 16h30, de Gaulle arrive à la gare Mont-parnasse. La République est de retour.• 17h-20h, les Allemands se rendent.• 19h, le général de Gaulle à l’hôtel deVille.Samedi 26, des éléments de la 2e DB contiennent la contre-attaqueallemande.• 15h-15h45, le général de Gaulle défilede l’Arc de triomphe à Notre-Dame.• 23h45, bombardement allemand surParis.du 27 au 30, la 2e DB repousse les Alle-mands.Mardi 29, défilé des Américains.

Chronologie de la Libération de Paris

Dès le 18 août, Rol-Tanguy a envoyé le com-mandant de Varreux (Brécy), de l’état-majorrégional, établir la liaison avec les Américains.Mais cette mission échoue car, près d’Étampes,sa camionnette est mitraillée par un avion amé-ricain qui la prend pour un véhicule ennemi. Le22, Gallois, adjoint de Rol, réussit, avec l’aide dudocteur Monod, à gagner les lignes américaines.Il expose à Patton la situation dans Paris, insistesur l’urgence d’un soutien allié à l’insurrection,puis obtient de rencontrer Leclerc qui se trouveà Laval avec le 12e groupe d’armées commandépar le général Bradley. Le 20 août, le général de Gaulle qui arrive

d’Afrique du Nord, se rend en Normandie auprèsd’Eisenhower. Celui-ci l’informe du contourne-ment de la capitale par la 3e armée en deuxcolonnes ; l’une a déjà atteint Mantes, l’autrearrive à Melun. À l’ouest, le groupe d’armées dumaréchal anglais Montgomery, refoule la résis-tance tenace des Allemands et progresse lente-ment vers Rouen. Mais, entre Rouen et Paris,c’est le vide. De Gaulle lui rappelle “l’importancedu sort de Paris, qui intéresse d’une manièreessentielle le gouvernement français […]. “Je mevois”, lui dit-il, “obligé d’intervenir et de vousinviter à y envoyer des troupes. Il va de soi quec’est la 2e division blindée française qui doit êtredésignée en premier lieu”.

La Libération de Paris

Place de la Concorde transformée en camp retranché par les Allemands :ici, lors de l’attaque des chars de la 2e DB le 25 août

Missions et pressions auprès des Alliés

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Leclerc rend compte à de Gaulle de son initia-tive. Ce dernier, qui reçoit la lettre au Mans, le22 vers 12 heures, y répond aussitôt, approu-vant son initiative. Il l’informe qu’Eisenhowerlui a promis de fixer Paris comme objectif à la 2e DB et que Koenig est, pour cette raison,auprès du commandement en chef américain.Dès le mercredi 23, à partir de 6 heures 30, la 2e DB est en route vers Rambouillet. Elle estalors organisée en groupements tactiques quicombinent l’infanterie, les chars et l’artillerie.Regroupée dans la nuit, la division s’engage le24, à partir de 7 heures, sur deux axes : le grou-pement Billotte* chargé de l’effort principal surla RN 20, de Longjumeau à la Porte d’Orléans etle groupement Langlade*, chargé d’un itinéraire

plus à l’ouest, qui évite Versailles par la vallée deChevreuse et vise le pont de Sèvres. La progression de la 2e DB est marquée par desévères combats à hauteur de Longjumeau, puisde Massy-Wissous, de la vallée de la Bièvre, de laCroix-de-Berny et de Fresnes. Leclerc rejointArpajon dans la matinée. Il est averti que, deParis, le préfet Luizet veut lui parler. Il lui faitrépondre “Tenez bon, nous arrivons !” et doublela communication d’un message lancé dansl’après-midi sur la préfecture de police par unpiper-club (petit avion de reconnaissance).À la tombée de la nuit, les éléments les plusavancés de la 2e DB, sont à Bourg-la-Reine surl’axe principal (groupement Billotte) et au pontde Sèvres sur l’axe secondaire (groupement

Volte-face américaineLe 22 août, Eisenhower change d’avis. L’insur-rection et la trêve soulignent la faiblesse desAllemands. Les pressions, venues de toutesparts, ont dû jouer : les services secrets alliéssont intervenus pour montrer l’importance deParis et les Français n’ont cessé d’insister surl’urgence de sa libération. Outre ceux avancéspar les différents émissaires, les arguments dugénéral de Gaulle n’ont pas manqué d’ébranlerles convictions d’Eisenhower, compte tenu despromesses qu’il lui avait faites en décembre1943. Et puis la légitimité du général de Gaulle appa-raît plus évidente depuis son accueil triomphalà Bayeux le 14 juin. Dans la soirée du 22 août,Bradley donne l’ordre à Leclerc de foncer surParis : tout doit être réglé avant le 23 à midi, finprévue de la trêve. Cette échéance est fausse,mais c’est celle dont dispose le haut-comman-dement américain pour prendre sa décision.

“Tenez bon, nous arrivons !”Après avoir participé aux opérations de Nor-mandie aux côtés des Américains, la 2e DB passedu commandement de Patton (3e armée) à celuide Hodges (1re armée) et plus particulièrementdu 5e corps d’armée du général Gerow. Du 13 au19 août, la 2e DB opère dans la région d’Argen-tan, tandis que les Américains poursuivent leuravancée vers l’Est. Le 20 août, le 15e corps USfranchit la Seine. On ne comprend que mieux l’exaspération deLeclerc, chargé par de Gaulle de libérer la capi-tale. Sans en référer au commandement allié,Leclerc décide d’envoyer, le 21 août, en directionde Versailles et Paris, un élément léger maiscapable de combattre, aux ordres du comman-dant de Guillebon. Le soir même, il atteintNogent-le-Roi sans combat. Puis, après vingt-quatre heures de reconnaissance, entre Arpajonet la région Nord de Rambouillet, il se heurte, le23, près de Trappes, à des unités de la Luftwaffe.Ayant appris entre-temps son arrivée en France,

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Aux yeux de nos soldats et demoi-même depuis le 25 août1944, le Parisien c’est l’ami ren-contré sur le plus beau champ debataille, ami fidèle d’ailleurs, carbeaucoup ne nous quittèrent pas,libérant avec nous la Lorraine etl’Alsace. Paris, depuis le 24 août1944, cela signifie aussi pournous, la France se redressant etjurant de retrouver sa grandeurquelles que soient les difficultés.

Général Leclerc1

1. Interview du général Leclerc par Manuel Poulet, en 1945.

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Un char français pris par les Allemands en 1940 en surveillance le long de l’Hôtel de Ville

Démontage des panneaux indicateurs allemands place de l’Opéra

La Libération, ce fut assurément lafin d’un cauchemar, c’est aussi lecommencement d’une ère nouvelle,la nôtre. Léo Hamon

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Hôtel de Ville

Préfecture

Ménilmontant

Place de la Nation

Gare de Lyon

Place de la Bastille

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Porte d’ItaliePorte de Gentilly

Porte d’Orléans

Place Denfert-Rochereau

QG de LeclercGare Montparnasse

Hôtel MajesticCommandementMilitaire en FranceAvenue Kléber

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KommandanturPlace de l’Opéra

Hôtel MeuriceCommandement du Groß ParisRue de Rivoli

Caserne du Prince EugènePlace de la République

Hôtel de CrillonGouverneur militaire de ParisPlace de la Concorde

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Carte des barricades et des itinérairesde la 2e Division blindée (2e DB) et de la 4e Division d’infanterie

américaine (DIUS)

21 - 25 août 1944

Barricades

Géneral Leclerc

Capitaine Dronne

Groupement tactique Dio (GTD)

Groupement tactique Billotte (GTV)

Groupement tactique Langlade (GTL)

4e Division d’infanterie américaine (DIUS)

L’affaire était à mes yeux,d’une importance nationale,j’étais prêt à la prendre àmon compte et, si le com-mandement allié tardaittrop, à lancer moi-mêmesur Paris la 2e DB.

Charles de Gaulle2

2. Mémoires de Guerre, l’Unité, 1942-1944, Plon 1971, p. 296

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Langlade). Cette situation ne satisfait pas Leclercqui espérait être dans Paris le soir même.

La colonne du capitaine DronneLe 24 août au soir, Leclerc piétine d’impatienceau carrefour de la Croix-de-Berny et donne l’or-dre au capitaine Dronne* de gagner Paris pourannoncer l’arrivée de la division tout entière lelendemain, vendredi. Le capitaine Dronne a sousses ordres un peloton de chars moyens réduit àtrois unités (le Montmirail, le Romilly, et leChampaubert), deux sections d’infanterie por-tées par 10 half-tracks, dont les noms rappellentla guerre civile espagnole (Guadalajara, Guer-nica) et une section de génie. Les Républicains

espagnols sont la composante principale de la 9e compagnie du 3/RMT, dite La Nueve.Aidée dans sa progression par des FFI, lacolonne se glisse à travers Fresnes, L’Haÿ-les-Roses, Bagneux, Cachan, Arcueil et passe aularge du fort de Bicêtre. Dronne atteint la ported’Italie à 20h45. Ses blindés remontent l’avenued’Italie puis descendent le boulevard de l’Hôpi-tal, soulevant au passage des cris de joie, et attei-gnent l’Hôtel de Ville à 21h22. Georges Bidault,en train de dîner, se lève et crie : “les premierschars de l’armée française franchissent la Seineau cœur de Paris”. Au milieu des ovations et desaccents de la Marseillaise, Dronne est reçu parles états-majors du CNR et du CPL. Depuis la veille, les Parisiens sont informés parles journaux de l’avancée de la 2e DB. Au studiod’essai de la rue de Grenelle, Pierre Schaeffer faitaussitôt connaître la nouvelle aux Parisiens etdemande aux curés de faire sonner les clochesde toutes les églises. La 2e DB, qui veillequelques kilomètres au sud, apprend ainsi queDronne a rempli sa mission.

Des soldats du régiment de marche du Tchad à l’assaut de l’hôtel Meurice Le capitaine Dronne, chef de la Nueve

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Le vendredi 25 août, le soleil succède auxaverses de la veille. La route est libre. Le grou-pement Billotte suit l’itinéraire de Dronne et sedirige directement sur la préfecture avec l’ordred’intervenir aussitôt sur les Tuileries, la Concordeet l’hôtel Meurice. Le groupement Dio* met en route deuxcolonnes: Noiret passe par les boulevards exté-rieurs pour se rabattre sur le Champ-de-Mars. Àmidi, le drapeau tricolore est hissé par un pom-pier sur la tour Eiffel. Rouvillois, qui s’assure aupassage des ponts principaux, converge par lesInvalides vers le palais Bourbon et le quai d’Orsay. Le groupement Langlade atteint l’avenue Victor-Hugo en début d’après-midi et l’action princi-pale se porte sur l’hôtel Majestic, avenue Kléber,dont la garnison allemande finit par se rendre aucommandant Massu. Puis les chars de Langladedescendent les Champs-Élysées et font la jonc-tion avec ceux de Billotte qui les remontentaprès avoir nettoyé la place de la Concorde. Legénéral Leclerc veut d’abord s’assurer de larges

itinéraires et obtenir la reddition de vonCholtitz. La réduction des autres îlots dedéfense allemande viendra ensuite. Pendant ce temps, la 4e division américaine (4e DIUS), aux ordres du général Barton*, entredans Paris par la porte d’Italie et libère l’Est de laville selon une ligne porte d’Italie - place de laBastille et au-delà. Le samedi 26, la 4e DIUS serassemble dans le bois de Vincennes, pourreprendre, dans l’après-midi du 27 août, sa pro-gression vers le nord-est et apporter son aide auxéléments de la 2e DB qui repoussent la contre-attaque allemande.Avec son escadron de protection, suivi du grou-pement Dio prêt à intervenir, le général Leclercs’est réservé la porte d’Orléans et la gare Mont-parnasse. Suivant l’ordre du général Koenig,Chaban se porte à sa rencontre et le guide à bordde son scout-car jusqu’à la gare Montparnasse.Leclerc reporte bientôt toute son attention survon Choltitz.

J’en félicite Leclerc. Quelle étape sur la route dela gloire ! J’en félicite aussi Rol-Tanguy que jevois à ses côtés. C’est en effet, l’action des forcesde l’intérieur qui a, au cours des précédentes jour-nées, chassé l’ennemi de nos rues, décimé etdémoralisé ses troupes, bloqué ses unités dansleurs îlots fortifiés.

Charles de Gaulle3

3. Mémoires de Guerre, op. cit., p. 305

Von Choltitz, le général Leclerc, le général Barton après la signature du cessez-le-feu

Kriegel-Valrimont, Rol, Von Choltiz, Chaban, Leclerc(de g. à dr.) arrivant à la gare Montparnasse

L’arrivée de Leclerc

Les proches de Leclerc l’entendentmurmurer : “Enfin, ça y est !“4

4. Christian Girard, aide de camp du général Leclerc, Journalde guerre.

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À 10 heures, le colonel Billotte envoie un ulti-matum au commandant du Gross Paris par l’intermédiaire du consulat de Suède. Faute deréponse, à midi, il décide d’attaquer son QG del’hôtel Meurice. Au passage, on en profite pourenlever la Kommandantur à l’Opéra. Von Choltitzcapitule. Les lieutenants Karcher et Franjoux etle commandant de La Horie l’emmènent avec sesofficiers à la préfecture de police où Leclerc etChaban les attendent. Introduit dans la salle desbillards, von Choltitz s’assure qu’il est en pré-sence de troupes régulières. Il prend connais-sance des termes de la reddition et ne fait qu’uncommentaire : seuls les hommes de la garnisonde Paris sont sous son commandement. Blême, leregard affolé, il avale une pilule (il est cardiaque)avant de signer, en présence de Chaban, de Rol-Tanguy, de Luizet et de Kriegel-Valrimont, laconvention que lui tend le général Leclerc.La capitulation signée, encore faut-il la rendreeffective. Von Choltitz est transporté, dans lescout-car du général Leclerc, à la gare Montpar-

nasse. Les officiers de son état-major suiventpéniblement dans un camion des FFI, hués parla foule massée le long du trajet. Von Choltitzsigne une vingtaine d’ordres de “cessez-le-feu”destinés aux autres points d’appui allemands. La question militaire est réglée. À la demande deKriegel-Valrimont et sur l’insistance de Chaban,Leclerc accepte que Rol-Tanguy, qui a pris unelarge part aux combats en tant que chef des FFI,signe une des ampliations de la convention dereddition.Des missions mixtes partent alors de Montpar-nasse : un officier allemand accompagné d’unofficier français porte, à chaque réduit, l’ordresigné de Choltitz de rendre les armes et de seconstituer prisonnier. Au Sénat, le colonel Crépinparlemente deux heures face à un commandantà demi-décidé et une troupe de SS à leur postede combat. Le lieutenant Boris, seul avec sonchauffeur, voit sortir de la Kriegsmarine, placede la Concorde, 300 hommes armés qui se ren-dent et à qui il doit faire traverser Paris.

Ordre de cessez-le-feu de von Choltitz

La reddition de von Choltitz

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Il est un peu moins de 17 heures le 25 aoûtlorsque Leclerc accueille, avec le colonel Rol-Tan-guy, le général de Gaulle à la gare Montparnasse.Il n’y aura pas eu de vacance du pouvoir… DeGaulle se rend au ministère de la Guerre, qu’ilavait quitté en 1940, rue Saint-Dominique,accompagné d’André Le Troquer, commissairepour les territoires libérés, et du général Juin,chef d’état-major de la Défense nationale. Il yreçoit le préfet de police Luizet, puis Parodi,représentant l’un et l’autre l’ordre public et leGouvernement provisoire. Les deux hommessont chargés du maintien de l’ordre et du ravi-taillement. Ensuite, de Gaulle se rend à pied àl’Hôtel de Ville où Flouret, Bidault et Tollet l’ac-cueillent au nom du CNR et du CPL réunis.

Georges Marrane traduit dans son discours sonémotion des termes républicains : “Après avoirété le symbole de la Résistance, vous êtes devenu,mon général, le chef du gouvernement de laRépublique qui a tenu haut et ferme dans la tem-pête notre drapeau tricolore. La population pari-sienne tout entière a depuis longtemps ratifiévotre gouvernement comme le seul gouverne-ment légitime du pays…”. De Gaulle voit en cetélu de la Seine la continuité de la Républiquedont il avait été le représentant depuis juin 1940. C’est un moment d’émotion intense. Le chef duGouvernement provisoire prononce ces paroleshistoriques : “Non, nous ne dissimulerons pascette émotion profonde et sacrée. Il y a là desminutes, nous le sentons tous, qui dépassentchacune de nos pauvres vies. Paris outragé!1. Mémoires de Guerre, op. cit., p. 306.

De Gaulle à Paris

De Gaulle à Montparnasse, accueilli par le général Leclerc et le colonel Rol-Tanguy

Rien n’y manque, excepté l’État, ilm’appartient de l’y remettre.

Charles de Gaulle1

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Bloch-Dassault et Chaban-Delmas. Juin est làaussi pour rappeler l’existence d’une autre com-posante des forces armées nationales, celled’Afrique du nord. Arrivé place de la Concorde, le général de Gaullemonte dans une voiture, passe devant l’Hôtel deVille et parvient sur le parvis de Notre-Dame.L’arrivée à la cathédrale, interdite au cardinalSuhard, féal de Vichy, est perturbée par une fusil-lade. Un Te Deum était prévu, mais l’absence decourant empêche de faire donner les orgues ; leGénéral entonne alors le Magnificat.Le défilé aura été émaillé de tirs sporadiques. Desmiliciens sont arrêtés, même s’ils ne sont plus trèsnombreux à cette date. Des officiers allemandsrécalcitrants sont également pris. La fusillade dela Cathédrale reste un mystère. Son origine acci-dentelle a été maintes fois soulignée et il paraîtévident au général de Gaulle qu’il s’agissait-là

“d’une de ces contagieuses tirailleries que l’émo-tion déclenche parfois”. Mais les tirs y ont tout demême fait des victimes. Une psychose s’emparealors des Parisiens, qui en attribuent la responsa-bilité à une “cinquième colonne” ennemie vou-lant attenter à la vie du général de Gaulle.

La guerre continueMais la guerre n’est pas terminée. Elle se rappelletrès vite aux Parisiens aux environs de minuit lesoir même du défilé. Pour la dernière fois sur lefront Ouest, la Luftwaffe mène une action d’en-vergure. Environ 150 appareils de la 3e Flotteaérienne allemande bombardent Paris. Untémoin relate l’horreur : “Les sirènes hurlent :l’ennemi revient une dernière fois semer la mort.De nombreux quartiers sont touchés, les 4e, 5e,13e et 18e arrondissements (huit infirmières tuéesà l’hôpital Bichat), Saint-Denis, Saint-Ouen, Ivry,

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Paris brisé ! Paris martyrisé ! Mais Paris libéré,libéré par lui-même, libéré par son peuple, avecle concours des armées de la France, avec l’appuiet le concours de la France tout entière, de laFrance qui se bat, de la seule France, de la vraieFrance, de la France éternelle”.Il associe à ce succès les Alliés et les troupesfrançaises de la 1ère armée commandée par legénéral de Lattre de Tassigny, qui a débarqué le15 août en Provence et remonte alors la valléedu Rhône. Mais il rappelle aussi la Nation audevoir de la guerre et à l’unité nationale.

À Bidault, qui lui demande de proclamer laRépublique, de Gaulle répond : “Non, la Répu-blique n’a jamais cessé d’être. Vichy fut toujourset demeure nul et non avenu”.

Le défiléLe 26 août est le jour du défilé triomphal du géné-ral de Gaulle devant les Parisiens. Malgré la pres-sion ennemie au nord de Paris (la 47e divisionallemande prend position au Bourget) et les ordresdu général Gerow prescrivant à la 2e DB de ladéloger, de Gaulle conserve Leclerc et ses hommesauprès de lui. Juste récompense ou mesure desécurité ? Luizet a signalé quelques incidentsimputables à des tireurs isolés. Seul un groupe-ment tactique se porte en couverture vers le nord,aidé des fractions des FFI dans ce secteur. Le restede la division est, pendant le défilé, réparti en troisautres groupements qui se tiennent en alerte àl’Arc de Triomphe, au Rond-point des Champs-Élysées et devant Notre-Dame. Au besoin, ils seporteront au devant de toute action offensiveennemie. Leclerc, marchant derrière le général deGaulle, reste en communication constante avecses divers éléments. Gerow interdit vainementtoute participation de la 2e DB au défilé. Vers 15 heures, au milieu de la liesse populaire,de Gaulle descend les Champs-Élysées, accom-pagné des membres du gouvernement, du CNR,de Georges Bidault, du CPL, d’Alexandre Parodi,des préfets de Paris, des officiers généraux FFLou FFI, Koenig, Leclerc, d’Argenlieu, Valin,2. Mémoires de Guerre, op. cit., p. 307.

Défilé du 26 août 1944 sur les Champs-Élysées

Parcourant du regard cette assemblée vibrante d’enthou-siasme, d’affection, de curiosité, je sens que, tout de suite,nous nous sommes reconnus, qu’il y a entre nous, com-battants du même combat, un lien incomparable.

Charles de Gaulle2

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Vitry, etc. Le dernier bilan connu donne: 189 morts, 890 blessés, 372 immeubles détruitset 395 endommagés”. La capitale n’est pas encoreà l’abri des injures de l’ennemi.Le vendredi 25 août en fin d’après midi, le géné-ral Leclerc est informé par des appels à l’aide desmunicipalités au nord de Paris que l’ennemi serenforce. La 47e Division d’infanterie allemande,forte de trois régiments de grenadiers et d’unitésqui n’ont pas été engagées dans les combats deNormandie, participent à la défense de l’aéro-drome du Bourget. Le passage livré aux Alliés parles ponts de Paris oblige les Allemands à assurerleur couverture au nord. Les forces ennemiescontrôlent toutes les routes vers l’est, le nord-estet le nord au départ de la capitale. Le 26 au matin,Leclerc donne l’ordre au groupement tactiqueRoumiantzoff d’assurer la couverture de Paris etse dirige vers Saint-Denis, Enghien, Aubervilliers

et le Bourget pour prendre contact avec l’ennemi.En même temps, le colonel Billotte détache deuxgroupements, Dio et Langlade. Les combats sontrudes. Les deux groupements attaquent les 27,28, 29 et 30 août vers Montmorency et Gonessepour sortir des agglomérations et conquérir unenouvelle base de départ. La guerre se porte à l’est et c’est une nouvellemission pour Leclerc et ses hommes, auxquelsse sont joints des combattants des FFI.

Le retentissementLe 28 août, les troupes américaines défilent surles Champs-Élysées. La visite du général Eisen-hower au général de Gaulle symbolise l’indépen-dance retrouvée. La libération de Paris est unevictoire militaire, mais les pertes sont lourdes.

Pour la France, c’est une victoire politique de pre-mier ordre, fruit de l’action conjuguée de la Résis-tance intérieure et de la Résistance extérieure. Les FFI ont assisté bravement les troupes régu-lières dans le nettoyage des réduits allemands.Le 26 août, le peuple de Paris a acclamé le géné-ral de Gaulle comme son libérateur et le chef dugouvernement provisoire. Personne ne peut plusdouter de sa légitimité, ni en France, ni à l’étran-ger. Sur le plan diplomatique, le Gouvernementprovisoire est enfin reconnu par les États-Unisle 24 octobre 1944. L’événement a un retentis-sement considérable. À la nouvelle, les clochessonnent dans les capitales non contrôlées parl’Axe : Paris debout, le monde retrouvait le sym-bole de la liberté.

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Bombardement de la Halle au vin, 26 août

Défilé des Américains sur les Champs-Élysées le 29 août

Bilan des combats

Tués Blessés PrisonniersFFI 900/1 000 1 5002e DB 130 225Population civile 582 2 000Allemands 3 200 12 800

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Barton, Raymond, major general(1889-1963), officier sorti de Westpoint, commandant la 4e Divisionaméricaine depuis 1942. Il accom-pagne la 2e Division blindée sur Paris.Discret, il laisse à la 2e DB la gloire dela Libération.

Bidault, Georges (1899-1983), his-torien, journaliste, il rejoint la Résis-tance en 1941. Proche de Jean Moulin,il lui succède à la tête du Conseilnational de la Résistance en septem-bre 1943. Homme politique après laguerre. Ministre. Compagnon de laLibération.

Billotte, Pierre, général (1906-1992),Saint-Cyrien, il commande en 1944 legroupement tactique de la 2e DB quienvoie un ultimatum à von Choltitzpour qu’il se rende. Il continue unecarrière militaire et politique après1945. Compagnon de la Libération.

Carrel, André (1917), journaliste,entre en résistance dès fin 1940. Il estmembre de la direction du Comitéparisien de la Libération. Après laguerre, il poursuit sa carrière de jour-naliste à L’Humanité.

Chaban-Delmas, Jacques (1915-2000), inspecteur des Finances, il estun jeune général de 29 ans, déléguénational le 1er mai 1944. Il est l’ad-joint militaire de Parodi, ministre desterritoires occupés. Premier ministreet président de l’Assemblée nationaleaprès la guerre. Compagnon de laLibération.

Choltitz, Dietrich von, général(1894-1966), nommé par Hitler à latête du “Gross Paris”, le 7 août 1944.Réputé dur et fidèle à Hitler, il est faitprisonnier à l’issue de l’assaut de l’Hô-

tel Meurice par les soldats de la 2e DBle 25 août. Il est libéré en 1947.

Dio, Louis, général (1908-1994),Saint-Cyrien, sous les ordres deLeclerc dès août 1940. Il commandeun groupement tactique de la 2e DB. Ilsuccède à Leclerc à la tête de la Divi-sion en juin 1945. Compagnon de laLibération.

Dronne, Raymond (1908-1991),rejoint Leclerc en août 1940. Il entredans Paris le 24 août et participe avecles FFI à la prise du Central télépho-nique, rue des Archives. Parlemen-taire. Compagnon de la Libération.

Flouret, Marcel (1892-1971), Poly-technicien, il entre à la Cour desComptes. Il est nommé Préfet de laSeine par Alexandre Parodi. Il poursuitsa carrière de haut-fonctionnaireaprès la guerre.

Hamon, Léo (1908-1993), Résistantdès 1940, il détruit le fichier du Ser-vice du Travail obligatoire en février1944 à Paris. Membre du CPL, il est àl’origine de la prise de l’Hôtel de Villele 20 août. Ministre après la guerre.

Koenig, Pierre-Marie, général (1898-1970), a rallié de Gaulle dès juillet1940, se couvre de gloire comme hérosà Bir Hakeim (1942). Il est ensuite gou-verneur militaire de Paris. Parlemen-taire. Compagnon de la Libération.Maréchal à titre posthume.

Kriegel-Valrimont, Maurice (1914-2006), Alsacien, d’origine juive, syn-dicaliste à la CGT, entre dans laRésistance à Lyon. Arrêté, évadé, il estmembre du Comité d’action militairedu CNR. Parlementaire.

Langlade, Paul Girot de (1894-1980), militaire de carrière, il com-mande le groupement tactique “L” dela 2e DB, il obtient la reddition duMajestic, siège du haut commande-ment allemand. Après guerre, il pour-suit sa carrière militaire.

Leclerc de Hauteclocque, Jacques-Philippe, général (1902-1947),Saint-Cyrien, officier brillant, se batvaillamment en 1939-1940. Rallié àde Gaulle le 22 juillet 1940, il entameson épopée, du ralliement du Came-roun à la formation de la 2e DB. Fidèleau chef de la France libre, il estchargé de la libération de Paris. Laréussite le fait entrer de son vivantdans la légende comme le libérateur.Compagnon de la Libération. Maré-chal à titre posthume.

Lefaucheux, Marie-Hélène, (1904-1964), Résistante depuis 1940. Elleest membre du bureau du CPL qui està l’Hôtel de Ville à partir du 22 août1944. Elle fait après guerre, une car-rière politique.

Lepercq, Aimé, (1889-1944), Poly-technicien, haut fonctionnaire dansl’industrie, il est démis de ses fonc-tions par Vichy. Membre fondateur del’OCM, il commande les forces char-gées de la défense de l’Hôtel de Ville.Compagnon de la Libération.

Lizé, colonel Teissier de Margue-rittes, dit (1882-1958), officier decarrière, il dirige les FFI de la Seine en1944 sous les ordres de Rol-Tanguy.Après la guerre, il entre dans lesordres.

Luizet, Charles (1903-1947), Saint-Cyrien, rallié à de Gaulle en 1940, ilest préfet de la Corse libérée en 1943.

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Dictionnaire des principaux personnages de la Libération de ParisDe Gaulle le désigne comme préfet depolice. Il entre en fonction dès le 19 août 1944. Il poursuit sa carrièrecomme gouverneur de l’AOF. Compa-gnon de la Libération.

Marrane, Georges (1888-1976),mécanicien, responsable du Parti com-muniste, il est maire d’Ivry et Présidentdu Conseil général de la Seine. Il orga-nise le mouvement le Front nationalpour l’indépendance de la France enzone sud. Il est vice-président du CPL.Parlementaire et maire d’Ivry.

Nordling, Raoul (1882-1962), né enFrance, consul de Suède. Il négocieavec von Choltitz la libération de3 000 prisonniers politiques puis luitransmet la proposition de trêve et, le25 août, l’ultimatum de Billotte. Ildemeure à son poste jusqu’en 1959.

Parodi, Alexandre (1901-1979),haut-fonctionnaire, résistant, il intè-gre un service créé par Jean Moulin.En mars 1944, il est nommé déléguégénéral et, le 18 août, ministre desterritoires occupés. C’est la plus hauteautorité civile de la Résistance aumoment de l’insurrection et il saits’entendre avec Bidault. Ministre.Compagnon de la Libération.

Pisani, Edgard (1918), membre dunoyautage des administrationspubliques (NAP), il prend part à laprise de la Préfecture de police. Chefde cabinet de Charles Luizet, puisdeux jours après, de Marcel Flouret.Ministre.

Priou-Valjean, Roger (1912-1999),membre du comité directeur régionaldu mouvement Libération-nord, ildevient ensuite chef national adjointdu noyautage de la police notamment

de “Police et Patrie” dont il organiseles groupes francs ; il est un desacteurs du déclenchement de l’insur-rection de la Préfecture de police le19 août 1944. Il est élu conseillermunicipal après-guerre.

Pronteau, Jean (1919-1984), étu-diant en droit, il est responsable desForces unies de la jeunesse patrio-tique, au titre de l’Organisation civileet militaire. Durant l’insurrection, ilcommande le secteur Saint-Michel àla tête du groupe franc Cévennes.Représentant son mouvement à l’As-semblée consultative, il fait ensuiteune carrière politique. Ancien député.

Rol-Tanguy, Henri (1908-2002),ouvrier métallurgiste, puis syndicalistecommuniste. Il s’engage dans les Bri-gades internationales en Espagne. Ilépouse Cécile Lebihan en 1939. Clan-destin de 1940 à 1944, responsable del’OS et des FTP. Chef FFI de la région Ilede France, il mobilise les Parisiens le18 août 1944. Aidé de sa femme, mem-bre de son état-major, il est le chef del’insurrection. Il signe, en accord avecLeclerc, un exemplaire de la conventionde reddition le 25 août 1944. Après laguerre, il choisit la carrière militaire.Compagnon de la Libération.

Stéphane, Roger, Worms Roger dit(1919-1994), journaliste, membre dumouvement Combat, interné une pre-mière fois au camp d’internement deFort-Baraux, s’en évade, est repris le 17 mars 1943, emprisonné à Evaux-les-Bains et participe à la libération ducamp le 8 juin 1944. Il prend part auxcôtés de Léo Hamon à l’occupation del’Hôtel de Ville dont il assure la défenseavec Aimé Lepercq, délégué militairerégional. Après guerre, il est un desfondateurs du Nouvel Observateur.

Tillon, Charles (1897-1993), ajusteur,syndicaliste, conseiller général de laSeine en 1935 puis député communisted’Aubervilliers en 1936, participe àl’aide à l’Espagne républicaine. Clan-destin après septembre 1939, il lanceun appel le 17 juin 1940 refusant quele pays soit “livré au fascisme”. Il pré-side le comité militaire national desFrancs-tireurs et partisans français.Partisan de l’action immédiate, il metses forces sous la tutelle de Rol-Tanguy, chef des FFI en Ile de France.Ministre de l’Air après-guerre.

Tollet, André (1913-2002), tapissier,syndicaliste communiste, il adhère auxjeunesses communistes puis au parti.En 1936, il devient permanent, puissecrétaire de l’Union des syndicats.Après la défaite, il met sur pied descomités populaires. Arrêté en octobre1940, il s’évade en juin 1942. A la fin del’année, il prépare la réunification syn-dicale concrétisée par les accords duPerreux en mai 1943. En septembre, ilmet sur pied le Comité parisien de laLibération qui joue un rôle importantdans l’action immédiate et le déclen-chement des grèves. Après la guerre, ilpoursuit son action de militant.

Villon, Pierre, de son vrai nom Gins-burger, Roger, dit (1901-1981),architecte, communiste et membre duKomintern. Il édite clandestinementL’Humanité, membre du CNR et duCOMAC. Parlementaire.

Vogüe, Jean de (1898-1972), mem-bre du CNR en 1943 au titre de Ceuxde la Résistance, est à l’origine dudéveloppement du NAP. Il est pourl’insurrection de Paris, suite naturellede toute l’histoire de la Résistance etdes résistants. Il poursuit ensuite sacarrière d’industriel.

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L ’ORDREDE LA L IBÉRAT ION

En octobre 1940, le général de Gaulle effectue sapremière visite en Afrique française libre. C’est àDouala, au Cameroun, qu’il confie au capitainede frégate Thierry d’Argenlieu son intention decréer une décoration pour récompenser ceux quise distingueront dans la lutte pour la libérationde la France : “Notre entreprise est hérissée dedifficultés. Les Français seront lents à nous ral-lier. Le risque leur fait peur. Ils ont besoin d’êtreencouragés, stimulés. Je suis décidé à créer uninsigne nouveau face à l’imprévisible conjonc-ture”2. Ce sont des circonstances particulières quidictent cette décision.

La France libre, qui se donne pour but de conti-nuer la guerre, est née de l’appel à la résistanceprononcé cinq mois plus tôt à la radio de Lon-dres par un général inconnu. Spécificité de laFrance libre, ses personnels militaires sont tousdes volontaires (militaires d’active, réservistes etjeunes engagés), mais les ralliements sont peunombreux et les débuts difficiles. Le 3 juillet1940, l’affaire de Mers El-Kébir, où la flotteanglaise bombarde la marine française d’Afriquedu Nord, porte un rude coup à la France librenaissante. Finalement, un mois après l’Appel,moins de 3000 hommes se sont engagés dansles Forces françaises libres (FFL).

En novembre 1940, le général de Gaulle, chefdes Français libres, crée à Brazzaville (Congo)l’Ordre de la Libération. Il s’agit de distinguerles hommes et les femmes et les collectivitésciviles ou militaires, qui se “seront signalésdans l’œuvre de la libération de la France etde son Empire”1. L’insigne de l’Ordre est laCroix de la Libération ; elle sera attribuée àseulement 1038 personnes, 5 communes et 18 unités combattantes, ce qui en fait la plusprestigieuse décoration française de la SecondeGuerre mondiale. L’Ordre de la Libération estaujourd’hui le second ordre national françaisaprès la Légion d’Honneur. Ses membres por-tent le titre de Compagnons de la Libération.C’est parmi les quelques milliers de volontairesqui, au cours de l’année 1940, ont rejoint legénéral de Gaulle que sont nommés les pre-miers Compagnons.

Création de l’Ordre

Ordonnance n°7 créant l’Ordre de la Libération

1 Ordonnance n° 7 créant l’Ordre de la Libération, Journalofficiel de la France libre, n° 2, 10 février 1941, p. 7.

2 Amiral Georges Thierry d’Argenlieu, Souvenirs de Guerre.Juin 1940 - janvier 1941, Plon, 1973, p. 197-198.

Remise de la Croix de la Libération à Rol-Tanguy (18 juin 1945)

Un contexte exceptionnel

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Mais, entre-temps, le général de Gaulle a étéreconnu comme chef des Français libres par legouvernement britannique et, à la fin du moisd’août 1940, le ralliement sans combat de laquasi-totalité de l’Afrique équatoriale française(AEF) et du Cameroun est un premier grandsuccès. En revanche, la tentative, un mois plustard, de débarquement devant Dakar, visant àfaire basculer l’Afrique occidentale française(AOF) dans la guerre, est un échec brutal. C’estdans ce contexte difficile, et au moment où lescombats s’engagent pour rallier le Gabon fidèle àVichy, que le général de Gaulle ressent la néces-sité de récompenser ceux qui auraient travailléd’une façon particulièrement remarquable à lalibération de la France et de l’Empire colonial.

Le chef des Français libres, qui considère que lalégitimité des institutions françaises est en sus-pens, se refuse à décerner des décorations exis-tantes. Il n’envisage pas d’ailleurs de créer unesimple distinction mais, avec elle, un Ordre, àl’image de celui de la Légion d’Honneur. Son butest non seulement de récompenser des méritesexceptionnels manifestés dans une conjonctureelle-même exceptionnelle, mais aussi d’encou-rager par l’exemple ceux qui n’ont pas hésité àtout risquer pour le suivre sur un chemin, detoute évidence, long et aléatoire.

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Charles de Gaulle (1890-1970)Né à Lille dans une famille catholique et patriote,Saint-Cyrien, Charles de Gaulle se distingue pen-dant la Grande Guerre dans l’infanterie. Spécialistedes chars, le colonel de Gaulle s’illustre de nouveauen 1940. Appelé au gouvernement en juin, il refusela défaite et quitte la France pour Londres, d’où illance, le 18, son appel à la Résistance. Chef de laFrance libre, il en dirige le combat militaire et poli-tique aux côtés des Alliés jusqu’à la capitulationallemande. Président du Gouvernement provisoire,il démissionne en 1946 et crée un mouvement poli-tique : le Rassemblement du peuple français (RPF).Rappelé au pouvoir en 1958, il fonde la Ve Répu-blique dont il devient le premier Président. Il mèneune politique étrangère volontaire passant par ladécolonisation. Désavoué par référendum en 1969,il se retire à Colombey-les-Deux-Églises.

Le général de Gaulle porte la Croix de la Libération, 14 juillet 1943, Brazzaville

Il faut maintenant trouver un nom et une orga-nisation à cet ordre. Les premiers projets propo-sent le nom d’“ordre de la Libération”, dont lesmembres s’appelleraient les “croisés de la Libé-ration”. Cette appellation de “croisés” témoigneparfaitement de l'idée qui était à l'origine de l'Or-dre : celle d'une nouvelle chevalerie, regroupant,comme au Moyen-âge, les serviteurs d'une causeet d'un idéal, presque religieux. Le 16 novembre1940, le général de Gaulle signe à Brazzaville,capitale de la France libre, l'ordonnance n° 7,créant l'ordre de la Libération. Sur le texte origi-nal figure encore le terme de “croisés”. Le pro-fesseur de droit René Cassin, chargé de rédigerles statuts de l’Ordre propose le terme plus laïc,de “compagnon” qui est accepté par de Gaulle etqui figure en définitive sur l’ordonnance publiéeau Journal officiel de la France libre le 10 février1941. Le mot de compagnon (littéralement “celuiavec qui on partage le pain”) que le général

de Gaulle utilisera dans d’autres contextes3, a unsens fort, celui de l’unité et de la cohésion dugroupe.L’Ordre est né avec les premières institutions dela France libre. Le Conseil de Défense de l’Em-pire, organisme politique consultatif formé degouverneurs, chefs militaires et personnalités(Félix Eboué, Philippe Leclerc, Edgard de Lar-minat, René Cassin, Georges Catroux, etc.) estinstitué le 27 octobre 1940. C’est la premièreétape vers la constitution du Comité nationalfrançais (CNF). Quelques jours plus tard, laDéclaration organique du 16 novembre 1940démontre sur le plan juridique l’illégalité dugouvernement de Vichy et la nécessité de placerl’ensemble des forces françaises sous “une auto-rité centrale provisoire”, celle du général deGaulle. En créant l’Ordre de la Libération lemême jour, le général de Gaulle montre l’im-portance qu’il lui accorde et affirme ses “préro-gatives régaliennes”4.

La Croix de la Libération Réalisée par Cartier à Londres fin 1940, la Croixde la Libération est très sobre. C’est un écu debronze rectangulaire portant un glaive, dépas-sant en haut et en bas, surchargé d’une croix deLorraine, emblème de la France libre. Au revers,est inscrite en latin la devise de l’Ordre :“Patriam servando victoriam tulit” (“En servantla Patrie, il a apporté la Victoire”).Les couleurs de l’Ordre, le vert et le noir, expri-ment à la fois le deuil de la France et l’espérance.

3. Dans plusieurs de ses discours de guerre et ensuite aumoment du Rassemblement du peuple français (RPF)4. Jean-Louis Crémieux-Brilhac, La France libre. De l’appel du18 juin à la Libération, Gallimard 1996, p. 140

Croisés de la Libération

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Le Conseil de l’OrdreL’Ordre devient réalité le 29 janvier1941 avec la nomination de cinq pre-miers Compagnons de la Libéra-tion qui deviennent en même tempsles premiers membres du Conseil del’Ordre de la Libération. Le capitaine de vaisseau GeorgesThierry d’Argenlieu, blessé par balledevant Dakar en dirigeant la délégationdes parlementaires gaullistes, estnommé chancelier. Les autres membres sont FélixÉboué, le gouverneur général de l’AEF, principalartisan du ralliement du Tchad le 26 août 1940 ;le lieutenant Emmanuel d’Harcourt qui, bienqu’ayant perdu une jambe pendant la campagnede France, a tenu à s’engager dans les FFL ;Edmond Popieul, officier de marine marchande,ancien combattant de la Guerre 14-18 et HenryBouquillard, adjudant dans les Forces aériennesfrançaises libres qui vient de prendre brillammentpart à la bataille d’Angleterre. Un moine, un Guyanais, un noble, un officier demarine, un sous-officier, tous sont représentatifsdes volontaires engagés derrière le général deGaulle, sans distinction de classe ni d’origine.Le rôle du Conseil consiste principalement àétudier les nominations pour l’accession dansl’Ordre et à rendre un avis - favorable ou défa-vorable - qui est ensuite soumis à la signature dugénéral de Gaulle. De lui dépend, en dernierlieu, la nomination par décret des Compagnonsde la Libération.

Le Conseil doit en principe, “si les opérationsmilitaires le permettent”, se réunir une fois partrimestre pour délibérer sur les propositions quilui parviennent. Il n’est pas sédentaire, surtoutdans les premiers temps ; ses membres sont dis-persés au gré de leurs fonctions civiles ou mili-taires. Ainsi, le gouverneur Éboué réside àBrazzaville et Thierry d’Argenlieu remplit plu-sieurs missions diplomatiques (au Canadanotamment) ; quant à d’Harcourt, Popieul etBouquillard, ils partiront en mission respective-ment en France, sur mer et dans les airs.En janvier 1946, le général de Gaulle signe undécret qui met fin à l’attribution de la Croix dela Libération. Depuis, la mission du Conseil del’Ordre, constitué d’une quinzaine de membres,est essentiellement de prolonger et de maintenirla tradition et l’idéal voulus par le général deGaulle et d’assurer la discipline de l’Ordre.

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5 Mémoires de Guerre, l’Appel, 1940-1942, Plon 1971, p. 142

Le Conseil de l’Ordre de la Libération en 1944

Les nominations dans l’Ordre de la Libérationaccompagnent l’histoire de la France libre, puisde la Résistance, au cours des années de guerre.Les compagnons sont nommés après présenta-tion au Conseil de l’Ordre puis au général deGaulle d’un mémoire de proposition établi par lechef de corps (pour les Français libres) ou par lechef de mouvement ou de réseau (pour les Résis-tants). Ce mémoire de proposition comporte leplus souvent un bref rappel des services de l’in-téressé depuis son ralliement ou son entrée enrésistance, ainsi qu’un motif de proposition.Presque les trois-quart des Compagnons sontdes Français libres, plus proches du général deGaulle et mieux identifiés que les résistants. Parailleurs, il était techniquement plus facile pourun chef de corps d’établir des mémoires de pro-position dans le cadre militaire des unités com-battantes de la France libre. En métropole, lecombat dans l’ombre s’y prête peu. Et dans leur

ensemble, les chefs de la Résistance ne com-menceront à établir des propositions qu’aumoment de la Libération.En 1941, hormis la ville de Nantes, un seul com-pagnon de la Libération n’est pas issu des rangsde la France libre : François Péron, pêcheur bre-ton et exemple d’une forme de résistance spon-tanée. Arrêté après une bagarre avec des soldatsallemands, il est condamné à mort et est exécutéen février 1941, après avoir tenté de s’évader.Suivront, en octobre 1942, sur le même décret,Jean Moulin et Pierre Brossolette puis, en 1943seulement, les responsables des grands mouve-ments de zone Sud : Henri Frenay (Combat),Emmanuel d’Astier (Libération) et Jean-PierreLévy (Franc-Tireur).Jusqu’à la fin 1944, cette décoration est très sou-vent décernée sous pseudonyme ou identité deguerre pour des raisons de sécurité. C’est le casde Jean Moulin, qui est fait compagnon de laLibération le 17 octobre 1942, sous le nom de

Les CompagnonsL’Ordre de la Libération que j’avais institué à Brazza-ville et organisé à Londres suscitait, parmi les Françaislibres, une émulation de la plus haute qualité.

Charles de Gaulle5

Remise de la Croix de la Libération devant l’École des cadets de la France libre

Les nominations

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“Caporal Mercier”.La remise de la Croix se fait généralement aucours d’une prise d’armes. Le général de Gaulle- ou tout autre membre de l’Ordre désigné -remet l’insigne en prononçant les paroles sui-vantes : “Nous vous reconnaissons comme notrecompagnon pour la libération de la France dansl’honneur et par la victoire”.

Une “chevalerie exceptionnelle”Les nominations dans l’Ordre restent volontai-rement limitées : le nombre restreint des Com-pagnons souligne leur valeur exemplaire. Legénéral de Gaulle précise dans une note manus-crite pour le Conseil de l’Ordre, en décembre1945, le caractère hors norme de l’attribution dela croix de la Libération : “On me propose descandidats qui, bien que très dignes et vaillantscombattants, ne répondent pas aux conditionstout à fait exceptionnelles1 qui justifient l’accession dans l’Ordre.”Au-delà de la condition d’entrée dans l’Ordre quifigure dans le texte de l’ordonnance n° 7, c’est-à-dire s’être signalé “dans l’œuvre de la libéra-tion de la France et de son empire”, il existe descritères non écrits : la date et les conditions duralliement à la France libre ou de l’engagementrésistant. Par exemple, avoir fait preuve d’initia-tive et de courage dans les circonstances diffi-ciles de l’année 1940. La caractéristique desCompagnons est aussi la précocité leur entréeen résistance qui fait d’eux une avant-garde de lalibération. C’est à l’occasion de la remise du collier degrand-maître, dans les locaux de la Chancellerieà Paris en août 1947 que le général de Gaulle

définit l’ordre comme une “Chevalerie excep-tionnelle […] fidèle à elle-même, solidaire dansle sacrifice et dans la lutte”2. Par les circonstances de sa création, l’Ordre estcomparable à certains ordres de chevaleriemédiévaux. Il se rapproche de l’Ordre de Saint-Michel, créé par Louis XI en 1469 dans un butprécis : encourager ses vassaux à rejoindre soncamp et l’aider dans sa lutte contre Charles LeTéméraire, duc de Bourgogne. Des points com-muns soulignés par les spécialistes de la Cheva-lerie : le collier de Grand-maître de l’ordre de laLibération, réalisé en 1947 pour le général deGaulle s’inspire en effet du collier de l’Ordre deSaint-Michel.En quittant le pouvoir, le général de Gaulle signele 23 janvier 1946 un décret qui met fin à l’attri-bution de la croix de la Libération. Le but de lalibération étant atteint, l’Ordre est donc forclos.Il y aura pourtant deux nouvelles nominationsaprès cette date : Winston Churchill en 1958 etle roi d’Angleterre George VI, à titre posthume,en 1960. Depuis, le nombre des Compagnons estdéfinitivement fixé à 1038 personnes, 18 unitéscombattantes et 5 communes.

Des origines diversesIl y a donc au total 1 061 membres dans l’Ordrede la Libération.L’Ordre est composé d’une somme de destinsindividuels dont le dénominateur commun estle refus absolu de la défaite et la valeur exem-plaire de l’engagement dans la France libre etdans la Résistance.Aucun critère d’âge (60 années séparent le Com-pagnon le plus jeune du plus âgé) de sexe, de

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grade, d’origine, ni même de nationa-lité, n’est exigé. Seules comptent lavaleur et la qualité des services rendusdans l’œuvre de la libération (qui nesont d’ailleurs pas exclusivement desservices combattants).Dans ce panthéon de la Résistance fran-çaise, certains noms sont célèbres :grands chefs de guerre (les générauxLeclerc, de Lattre de Tassigny, Koenig),personnalités centrales de la Francelibre (René Cassin, Georges Catroux,Félix Éboué, René Pleven), hauts res-ponsables de la Résistance en France (Jean Moulin, Pierre Brossolette, Jacques Bingen).Mais il reste composé d’une large majorité“d’anonymes”. Toutes les formes de résistanceactive sont représentées dans l’ordre de la Libé-ration où le sacrifice joue un rôle important.André Malraux a dit de l’Ordre qu’il était “uncimetière”. En effet, parmi le millier d’hommeset de femmes compagnons de la Libération unpeu plus de 700 ont survécu à la guerre et 271ont été fait compagnon à titre posthume. C’est d’abord chez les cadres militaires de laFrance libre que sont nommés les Compagnons(119 Saint-Cyriens ont reçu la croix de la Libé-ration). Parmi eux, l’armée de terre fournit leplus gros contingent (543 Compagnons issusdes rangs de la 1ère Division française libre et dela 2e DB) ; on compte également 175 aviateurs et48 marins.On trouve pourtant parmi les compagnons de laLibération des gens de différentes origines : étu-diants, paysans, hommes de lettres, diplomates,ouvriers, membres du clergé, tirailleurs africains,magistrats ou encore médecins. Mais les élites, àl’image de la composition socioprofessionnelle

de la France libre et même de la Résistance, sontlargement peu représentées dans un ordre quicompte peu de notables et encore moins de res-ponsables politiques.

Les communes Compagnon de la LibérationL’ordonnance n° 7 prévoit que la croix de laLibération peut être également attribuée à des“collectivités civiles” : c’est le cas de 5 com-munes françaises.La première de ces communes est Nantes. Ellereçoit la croix dès novembre 1941, pour avoir“opposé une résistance acharnée à toute formede collaboration avec l’ennemi”3 et pour en avoirpayé le prix. Le 20 octobre 1941, le Feldkom-mandant de Nantes, le lieutenant-colonel Hotz,est abattu dans le centre-ville par des résistantsparisiens de l’Organisation spéciale (OS) : Marcel Bourdarias, Gilbert Brustlein et SpartacoGuisco qui regagnent ensuite la capitale. Le sur-lendemain, 43 otages sont fusillés en représailles

Diplôme de Compagnon du général Koenig

3. Citation de la ville de Nantes à l’Ordre de la Libération,décret du 11 novembre 1941.

1. Souligné par le général de Gaulle. 2. Allocution du général de Gaulle lors de la remise du collier deGrand-maître de l’Ordre, le 31 août 1947. Archives de l’Ordre.

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à Châteaubriant et à Nantes, et cinq résistantsnantais subissent le même sort au Mont Valérien.En mai 1944, Grenoble, “ville héroïque à lapointe de la résistance française et du combatpour la libération”5, devient à son tour compa-gnon de la Libération. Siège d’une importanteactivité résistante dès 1940, la ville connaît le11 novembre 1943 une grève quasi générale dou-blée d’une manifestation populaire. En repré-sailles, 500 patriotes sont déportés. La résistancegrenobloise fait alors sauter le parc d’Artillerie duPolygone, provoquant chez l’ennemi un violentchoc psychologique. La répression s’accentueencore mais, le 2 décembre 1943, la caserne deBonne, qui sert de nouvel arsenal aux Allemands,saute à son tour et les sabotages se multiplientjusqu’à la libération. Paris, “exemple pour la Nation tout entière”6,est la troisième ville à recevoir la croix de laLibération par décret du 24 mars 1945. Vassieux-en-Vercors (Compagnon par décret du4 août 1945) est un village de la Drôme, situésur le plateau du Vercors, où se développe, début1943, un maquis qui prend rapidement un essorimportant grâce à l’afflux de réfractaires au STO.Devenu un symbole de la résistance, le Vercorsest attaqué à plusieurs reprises par la Milicefrançaise et les forces allemandes. La populationdu village participe activement aux opérationsde parachutages jusqu’à la destruction complètedu maquis. Violemment bombardé, détruit à97%, Vassieux voit 72 de ses habitants massa-crés par les Allemands dans des conditionsépouvantables en juillet 1944.Enfin, en janvier 1946, le général de Gaulledécerne la croix de la Libération à l’Île de Sein

(située au large du Finistère) dont la quasi-tota-lité des hommes valides a fait le choix remar-quable fin juin 1940 de rejoindre, sur leursbateaux de pêche, les FFL en Angleterre pourpoursuivre le combat.

Les unités Compagnon de la LibérationAu titre des collectivités militaires, 18 unitéscombattantes des Forces françaises libres ontreçu la croix de la Libération (9 de l’armée deterre, 6 de l’armée de l’air et 3 de la marine).Pour l’armée de terre, ces unités sont issues desdeux grandes divisions françaises libres “histo-riques” : la 1re Division française libre (1re DFL)et la 2e Division blindée (2e DB) : le Bataillon demarche n°2, la 13e Demi-brigade de légion étran-gère, le Bataillon d’infanterie de marine et duPacifique, le 2e Régiment d’infanterie colonialeet le 1er Régiment d’artillerie coloniale (1er DFL)et le 1/3e Régiment d’artillerie coloniale, le 1er Régiment de marche de spahis marocains, le501e Régiment de chars de combat et le Régi-ment de marche du Tchad (2e DB).Au sein des Forces aériennes françaises libres(FAFL, l’armée de l’air de la France libre), la1re Escadrille française de chasse, le Groupe dechasse Normandie-Niemen, le 2e Régiment dechasseurs parachutistes de l’armée de l’air, leGroupe de bombardement Lorraine, le Groupede chasse Île-de-France et le Groupe de chasseAlsace sont compagnon de la Libération.Dans les Forces navales françaises libres (FNFL,la marine de la France libre), le sous-marinRubis, la corvette Aconit et le 1er Régiment defusiliers marins ont été décorés de la croix de laLibération.

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L’Ordre et les étrangersLe décret du 29 janvier 1941 prévoyait la possibilitéd’octroyer la croix de la Libération à des étrangersayant rendu des services importants à la cause de laFrance libre. Au total, 60 étrangers, représentant22 nationalités différentes, auront été faits Compa-gnon de la Libération. Parmi eux : six Belges, cinq Russes, cinq Britanniques,cinq Tchadiens, quatre Tchèques, trois Italiens… Lamoitié d’entre eux a combattu dans les rangs de la13e Demi-brigade de Légion étrangère qui, en juillet1940, représentait le plus gros contingent des troupes

ralliées au général de Gaulle. D’autres ont servi dansla Résistance, comme Jan Doornik, hollandais etmembre fondateur du réseau Nemrod, exécuté avecHonoré d’Estienne d’Orves au Mont Valérien en août 1941.Quelques-uns des Compagnons étrangers sont despersonnalités de premier plan :- Le général américain D. Eisenhower - Le Sultan du Maroc Mohammed V - Le Premier ministre britannique Winston Churchill - Le Roi d’Angleterre George VI

Il faut dire, répéter, proclamer, que l’Ordre de laLibération n’est pas formé d’hommes qui se sontséparés des autres par leur courage, mais biend’hommes à qui leur courage a donné la chancede représenter tous ceux qui, le cas échéant,n’avaient pas été moins courageux qu’eux. Iln’est pas une hiérarchie dans l’Ordre de la Libé-ration. Il est le symbole de la Libération.

André Malraux1

Dominique Kosseyo, premier Africain Compagnon de la Libération

4. Citation de la ville de Grenoble à l’Ordre de la Libération,décret du 4 mai 1944.

5. Citation de la ville de Paris à l’Ordre de la Libération, décretdu 24 mars 1945.

1. Texte transcrit par Madame Michelle Michel, avec l’accordd’Albert Beuret (exécuteur testamentaire d’André Malraux),d’après l’interview accordée à Madame Anglade (émissiontélévisée du 17 juin 1971).

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L’Ordre et les femmesSeules six femmes ont reçu la croix de la Libéra-tion : - Berty Albrecht, co-fondatrice du mouvementCombat en zone Sud, morte à la prison de Fresnesle 31 mai 1943.- Laure Diebold, agent de liaison du réseau Mithri-date puis secrétaire de Jean Moulin et de la Délé-gation générale à Paris, déportée à Ravensbrück.- Marie Hackin, organisatrice du corps des volon-taires féminines de la France libre, chargée de mis-sion avec son mari, disparue en mer en février 1941.- Marcelle Henry, chef de bureau au ministère duTravail à Paris, opposée à la collaboration dès 1940.Membre du réseau d’évasion VIC, morte à son retourde déportation.- Simone Michel-Lévy, membre de la résistance PTTà Paris ; déportée en Allemagne, elle sabote avecdeux camarades leur chaîne de production de muni-tions et est pendue au camp de Flossenburg.- Émilienne Moreau-Evrard, héroïne de la guerre1914-18, agent de renseignement et de liaison duréseau Brutus.

L’Ordre et les JeunesLa jeunesse est également une des caractéristiquesde l’Ordre : 10 % des compagnons de la Libérationn’ont pas encore 20 ans en juin 1940. Parmi ceux qui ont fait le sacrifice de leur vie onpeut citer :- Henri Fertet, résistant, membre du corps-franc“Guy Môquet”. Condamné à mort par un tribunalmilitaire allemand, il est fusillé à 16 ans, à Besan-çon, en septembre 1943.- Georges Taylor, évadé de France. Engagé à 16 ansdans les FFL. Devenu parachutiste, il est tué dans lescombats de Hollande en avril 1945.- Pierre Ruibet, résistant de 18 ans. Engagé volontairecomme ouvrier sur un chantier militaire allemand,réussit à saboter le dépôt de munitions le plus impor-tant de France à Jonzac (Charente-maritime). Il pré-fère, alors qu’il est sur le point d’être découvert, sefaire sauter avec le dépôt plutôt que de s’enfuir.- David Régnier, du mouvement “Défense de laFrance”. Blessé au combat dans un maquis de larégion parisienne en juin 1944, il est pris les armesà la main et fusillé par les Allemands à 18 ans.

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David RégnierMaria Hackin

Fin janvier 1945, le général de Gaulle, présidentdu Gouvernement provisoire de la Républiquefrançaise et Grand-maître de l’Ordre de la Libéra-tion, annonce au Conseil de l’Ordre de la Libéra-tion son intention de remettre la croix de laLibération à la ville de Paris. Le rôle importantjoué par la population de la Capitale lors de l’in-surrection nationale et celui, glorieux, des FFI qui“menèrent avec grande décision et grand couragel’attaque contre l’occupant” justifient ce choix3.Le 2 avril 1945, Paris reçoit la croix de la Libé-ration des mains du général de Gaulle. AprèsNantes en 1941 et Grenoble en 1944, la capitalerestée “fidèle à elle-même et à la France” est latroisième ville à devenir ainsi compagnon de laLibération, pour avoir “manifesté, sous l’occu-pation et l’oppression ennemies, et en dépit desvoix d’abandon et de trahison, sa résolution iné-branlable de combattre et de vaincre”4.La cérémonie, annoncée depuis plusieurs jourspar voie de presse et d’affiches, se déroule Placede l’Hôtel de Ville. Des gradins accueillant les

La cérémonie du 2 avril 1945

Capitale fidèle à elle-même et à la France, a manifesté, sous l’occupation et l’oppression ennemies, et en dépit desvoix d’abandon et de trahison, sa résolution inébranlable de combattre et de vaincre. Par son courage en présencede l’envahisseur et par l’énergie indomptable avec laquelle elle supporta les plus cruelles épreuves, a mérité de rester l’exemple pour la Nation tout entière. Le 19 août 1944, conjuguant ses efforts avec ceux des armées alliéeset françaises, s’est dressée pour chasser l’ennemi par une série de glorieux combats commencés au cœur de la Citéet rapidement étendue en tous les points de la ville. Malgré de lourdes pertes subies par les Forces françaises de l’Intérieur levées dans son sein, s’est libérée par son propre effort et unie à l’avant-garde de l’armée française venueà son secours a, le 25 août réduit l’Allemand dans ses derniers retranchements et l’a fait capituler.2

À la Libération de Paris, en vérité, rienn‘a manqué de ce qu’il fallait qu’ellefut pour être digne de la France.

Charles de Gaulle1

Affiche réalisée pour l’événement

1. Discours du général de Gaulle, 2 avril 1945, Place de l’Hô-tel de Ville. In BMO de la ville de Paris, n°96, 25 avril 1945.2. Citation de la Ville de Paris à l’ordre de la Libération,décret du 24 mars 1945 portant attribution de la Croix dela Libération.

3. Procès-verbal du Conseil de l’Ordre de la Libération du12 mars 1945, archives de l’Ordre.4. Citation de la ville de Paris à l’ordre de la Libération,décret du 24 mars 1945 portant attribution de la Croix dela Libération.

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invités ont été installés face à l’édifice devantlequel sont placés les chœurs et fanfares ainsique des gardes républicains à cheval. Au centrede la façade, pavoisée de nombreux drapeauxtricolores et alliés, se trouve la tribune d’hon-neur abritant les autorités civiles, militaires etreligieuses, d’où le général de Gaulle doits’adresser à l’immense foule venue de tout Pariset de sa banlieue et massée autour de la Place.Des “remous dans la foule, une immenserumeur”5 annoncent son arrivée, à 16 heures,accompagnée du cortège officiel. Il est accueillipar un comité représentant la ville de Paris et parle président du Conseil municipal, André Le Tro-quer. Le Général signe le livre d’Or de la Ville deParis dans la salle des Prévôts, puis prend placedans la tribune d’honneur. Il apparaît ainsi auregard des Parisiens au nom desquels le prési-dent du Conseil municipal prononce un discoursde bienvenue. Se souvenant des souffrancesendurées, André Le Troquer déclare : “Paris asouffert, mais avec hauteur, mépris, colère,

dignité. Paris vous aime, Monsieur le Président”6.Puis, le président du Gouvernement provisoire,visiblement très ému par les démonstrationsd’enthousiasme de la foule, prononce son dis-cours, entrecoupé de nombreuses ovations. Ilrappelle l’importance de Paris dans toutes lesbatailles de l’Histoire de France et le regard dumonde entier fixé sur la ville, attendant uneaction d’éclat. “Et cette action d’éclat, Paris l’aaccomplie. Ce fut sa libération, entreprise de sespropres mains, achevée avec l’appui d’unegrande unité française et consacrée par l’im-mense enthousiasme d’un peuple unanime”7.Mais il insiste également sur la nécessité dereconstruire le pays et son unité politique, en necomptant sur aucun appui extérieur.Le Général termine par la formule consacrée :“Paris, nous vous reconnaissons comme notrecompagnon, pour la libération de la France,dans l’honneur et par la victoire”8, tout en épin-glant la Croix sur le panneau armorié de la villede Paris. Dans le même temps, une croix de laLibération géante, illuminée par des projecteurs,est dévoilée sur le fronton de l’Hôtel de Ville. LeGénéral entonne alors la Marseillaise, reprise enchœur par la foule avant de quitter les lieux sousles acclamations.L’événement aura duré une heure, à l’issue delaquelle le peuple de Paris peut admirer les déco-rations de sa ville sur le panneau armorié placéen bas de l’escalier menant à la tribune d’honneuret gardé par six compagnons de la Libération9.

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5. Bulletin municipal officiel de la ville de Paris, op. cit. 6. Discours d’André Le Troquer, 2 avril 1945, Place de l’Hô-tel de Ville. In BMO de la ville de Paris, op. cit.7. Discours du général de Gaulle, 2 avril 1945, Place del’Hôtel de Ville. In BMO de la ville de Paris, op. cit.

8. Idem.9. Philippe Kieffer (Commandos de marine), Jacques Mansion(parachutistes), John Hasey (Légion étrangère), Marcel Albertet Roland de la Poype (armée de l’air), Stanislas Mangin(résistance intérieure).

Le général de Gaulle, André le Troquer, amiral Thierry d’Argenlieu

La ChancellerieDepuis 1945, l’Ordre de la Libération est installéà Paris et, depuis 1967, dans le cadre prestigieuxde l’Hôtel national des Invalides, boulevard deLa Tour-Maubourg, dans le 7e arrondissement.Bien sûr, depuis 1946 et la forclusion de l’Ordre,le Chancelier et le Conseil de l’Ordre n’ont plusà assumer leur mission première qui consistait àétudier et donner un avis sur les dossiers de pro-position. Depuis, le rôle de la Chancellerie consiste àassurer le maintien d’un lien avec les Compa-gnons de la Libération et leurs familles et àapporter un soutien moral et financier aux Com-pagnons et aux familles qui se trouvent dans dessituations délicates. La Chancellerie est égale-ment chargée de veiller sur les services de laMédaille de la Résistance.Le Chancelier participe chaque année à de nom-breuses manifestations commémoratives (inau-gurations de rues, d’établissement publics) etscientifiques (colloques et congrès). Et l’essen-tiel de l’activité de l’Ordre est, aujourd’hui, tournévers la préservation de la mémoire, notamment

par le biais de son site Internet (www.ordredela-liberation.fr) et surtout du Musée de l’Ordre dela Libération.

Le Mont ValérienChaque année, l’appel du 18 juin est commé-moré par une cérémonie officielle. La Chancel-lerie en est elle-même le maître d’œuvre. Depuisla fin de la guerre, cette cérémonie a lieu au fortdu Mont Valérien, à Suresnes (Hauts-de-Seine).C’est là en effet que les Allemands ont fusillé,sous l’occupation, de 1940 à 1944, plus d’unmillier d’otages et prisonniers. En 1960, leMémorial de la France combattante y est inau-guré par le général de Gaulle.La cérémonie du Mont Valérien regroupe les plushautes autorités de l’État, les Compagnons de laLibération, leurs familles, les représentants descommunes et des unités Compagnon et un largepublic. Son déroulement est immuable : le Prési-dent de la République passe les troupes en revue,avant d’être accueilli par le Chancelier qui ravivealors la Flamme. Après une minute de silence, le texte de l’Appel du 18 juin est lu. Ensuite,

L’Ordre aujourd’hui et demain

Le ChancelierLe responsable de l’Ordre est le Chancelier. Assisté du Conseil de l’Ordre de la Libération, il veille aubon fonctionnement de l’institution. Depuis la mort du général de Gaulle, en 1970, il est le premierpersonnage de l’Ordre. Proposée par le Conseil de l’Ordre, sa nomination, pour quatre ans renouve-lable, est ratifiée par décret du Président de la République.Depuis l’origine, sept chanceliers se sont succédés : – Amiral Georges Thierry d’Argenlieu (1941-1958) – Général d’armée Alain de Boissieu (2002-2006)– Général Joseph Ingold (1958-1962) – Monsieur Pierre Messmer (2006-2007)– M. Claude Hettier de Boislambert (1962-1978) – Professeur François Jacob (depuis 2007).– Général d’armée Jean Simon (1978-2002)

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le Président de la République, accompagné duChancelier, va se recueillir dans la crypte puissigne le Livre d’or et se retire. La cérémonie estsuivie d’une réception à l’Hôtel de Ville de Paris.

Le Conseil national des communesUne des spécificités de l’Ordre de la Libérationest le non renouvellement de ses membres.Après sa forclusion, il semblait donc destiné às’éteindre en même temps que les derniers Com-pagnons de la Libération. Mais il est apparunécessaire d’en assurer l’avenir et ce à doubletitre : non seulement il est le deuxième ordrenational français mais il est le seul qui incarneles valeurs de la Résistance et de la Libération.Parmi l’ensemble des Compagnons, seules lescinq communes titulaires de la Croix de la Libé-ration (Nantes, Grenoble, Paris, Vassieux-en-Vercors et l’Île de Sein) sont assurées de ne pasdisparaître. Il était donc logique de se tournervers elles pour assurer la pérennité de l’Ordre dela Libération.Pour ce faire, la loi 99-418 du 26 mai 1999 pré-voit la création du Conseil national des com-munes “Compagnon de la Libération”. CeConseil sera composé des maires en exercice descinq communes, des Compagnons de la Libéra-tion et d’un délégué national. Il aura pour mis-sion d’assurer les traditions de l’Ordre de laLibération, d’en conserver la mémoire, de veillersur le Musée de l’Ordre de la Libération, d’orga-niser les cérémonies commémoratives de l’appeldu 18 juin, de participer à l’aide morale et maté-rielle apportée aux Compagnons de la Libéra-tion, aux médaillés de la Résistance et à leursfamilles et d’assurer le service de la médaille dela Résistance française.La loi entrera en vigueur au plus tard le

16 novembre 2012, 72e anniversaire de la créa-tion de l’Ordre. C’est ainsi que pourra se perpé-tuer la mémoire du dernier ordre de chevaleriefrançais, créé dans des conditions particulière-ment exceptionnelles, et qui témoigne par sonexemplarité du combat mené par l’ensemble desFrançais libres et des Résistants dans un despires moments de l’histoire de France.

70

La médaille de la Résistance françaiseLa médaille de la Résistance est une décora-tion instituée en février 1943 par le généralde Gaulle. Elle est “destinée à reconnaître lesactes remarquables de foi et de courage qui,en France, dans l’Empire et à l’étranger, ontcontribué à la résistance du peuple françaiscontre l’ennemi et ses complices depuis le 18 juin 1940”. Cette distinction a été décer-née à près de 64000 résistants dont un tiersà titre posthume.

LA MÉMOIRE DE LA GUERRE À PARIS

Les dix plaques de la place de la Concorde

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Tollet, Tillon, Chaban-Delmas ont été attribués.Le 18 juin 2004 a été inaugurée sur le quai Henri IV l’esplanade des Villes Compagnon dela Libération. Peu après, ont été apposés douzemédaillons sur les bâtiments jouxtant l’itinéraireemprunté le 24 août 1944 au soir par les pre-miers éléments de la 2e DB, La Nueve (en majo-rité des Espagnols) du capitaine Dronne, de laporte d’Italie à l’Hôtel de Ville. Depuis 2010, surcette esplanade une plaque rappelle la mémoiredes six femmes Compagnons, une Française libreet cinq résistantes : Marie Hackin, Berty Albrecht,Laure Diebold, Marcelle Henry, Simone Michel-Lévy et Émilienne Moreau-Evrard.

Cérémonies et hommages : une mémoirevivanteLa cérémonie publique est aussi un moyen de sesouvenir de notre histoire. Dès 1945, deux céré-monies sous la présidence du général de Gaulle,chef du gouvernement provisoire traduisent lesacrifice de ses combattants et résistants. Le 2 avril 1945, le général de Gaulle décerne à Parisla croix de la Libération. Le 27 mai 1945, ildévoile une plaque à la mémoire de Jean Moulinqui avait présidé la séance inaugurale du CNR au48 rue du Four (6e). Lors du 5e anniversaire del’Appel du 18 juin (le 18 juin 1945) et à la suitede la capitulation allemande a lieu un granddéfilé : le défilé de la Victoire. Le général deGaulle remet à cette occasion les croix de Com-pagnon de la Libération au colonel Rol-Tanguy etle lendemain à Sidi Mohammed Ben Youssef, sultan du Maroc, pour l’engagement de ses conci-toyens. De nos jours, chaque 25 août, la villecommémore sa libération. Enfin, des monumentsparisiens rappellent l’histoire de la SecondeGuerre mondiale (voir la carte pages 74-75).

Très vite apposées sur les murs de la capitale, lesplaques commémorent des faits de guerre, desactes de résistance, des rafles, des déportations etactions liées à l’insurrection et à la Libération deParis. Elles honorent le souvenir des disparus.

Les plaquesDès la libération, des plaques ont été installéespour rendre hommage aux résistants mais aussiaux victimes du nazisme et de la collaboration.Aujourd’hui, dans Paris, on dénombre 1190plaques dont plus d’un tiers correspond à lasemaine de l’insurrection et à la Libération de lacapitale (voir la carte p. 74-75). Les premiershommages (une croix improvisée à l’endroit oùest mort un insurgé) ont été spontanés.Aujourd’hui encore, des associations, des orga-nisations professionnelles (RATP, SNCF), fontdes propositions d’hommages. Ces demandessont soumises à un vote du Conseil d’arrondis-

sement puis au Conseil de Paris. Lorsque le pro-jet est voté, les plaques sont apposées et entre-tenues par les services de la Mairie de Paris et,depuis 1954, elles sont fleuries lors des commé-morations. Elles rendent hommage aux Juifs déportés (surles murs des écoles), aux résistants (Pierre Brossolette, Jean Moulin, Missak Manouchiansur les immeubles où ils ont habité ou agi), auxmartyrs (à la Cascade du Bois de Boulogne où 35 résistants ont été assassinés le 16 août 1944),aux lieux de combats lors de la semaine insur-rectionnelle à Paris fin août 1944 comme auxlieux de commandement (gare Montparnasse,PC du général Leclerc ou Denfert-Rochereau, PCdu colonel Rol-Tanguy).

Les ruesDes noms de résistants et de résistantes ont étédonnés à des rues avant même la fin de la guerre.Georges Mandel, ancien ministre de l’Intérieurdu gouvernement de Paul Reynaud, assassinépar la Milice le 7 juillet 1944 donne son nom àun boulevard (16e arrondissement) en septem-bre 1944. En octobre 1944, le Conseil de Parisattribue à deux rues le nom de deux femmesrésistantes : Danielle Casanova, résistante com-muniste morte à Auschwitz (1er et 2e arrondis-sements) et à Berty Albrecht, co-fondatrice dumouvement de Libération nationale, compa-gnon de la Libération (8e arrondissement). Lors du 60e anniversaire de la Libération de Parisen 2004, les noms de Priou-Valjean, Rol-Tanguy,

72 73

Impacts de balles et d’obus sur la façade de l’École militaire

Les lieux évoquant la guerre

Soixante-cinq ans après la Libération, la capitale porte encore lestraces des combats et garde la mémoire des années d’occupation etde libération : noms de ses rues, de ses stations de métro, plaquescommémoratives sur ses monuments, cérémonies organisées pour nepas oublier cette époque à la fois terrible et glorieuse.

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Les monuments, plaques commémorativeset stations de métro

Monuments, statues et stèles(sculpteur et année)

Nombre de plaques commémoratives par arrondissement

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1 - Bir-Hakeim : position dans le désert de Libyetenue héroïquement pendant 15 jours par la 1ère Brigade française libre dugénéral Koenig en mai-juin 19422 - Charles Michels : fusillé comme otage à Châteaubriant le 22 octobre 19413 - Pierre Georges, dit Colonel Fabien : militantcommuniste, animateur des bataillons armés de lajeunesse, partisan de l’action armée contre l’occupant4 - Corentin Cariou : conseiller municipal du 19e arrondissement fusillé comme otage le 7 mars19425 - Corentin Celton : résistant, fusillé au Mont Valé-rien le 29 décembre 19436 - Gabriel Péri : Député communiste fusillé commeotage le 15 décembre 1941 au Mont Valérien7 - Guy Môquet : fusillé comme otage à Château-briant le 22 octobre 19418 - Jacques bonsergent : fusillé au bois de Vincennesle 23 décembre 19409 - Max Dormoy : ancien ministre de l’Intérieur duFront populaire, assassiné par des militants d’extrême-droite le 26 juillet 194110 - Honoré d’Estienne d’Orves : officier de marine,Français libre, exécuté le 29 août 1941 au MontValérien11 - Stalingrad : ville russe et bataille décisive rem-portée par les Soviétiques en janvier 1943 après un ande siège12 - Franklin Delano Roosevelt : président des Etats-Unis (1932-1945)

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qui surmonte l’entrée de la crypte aménagéepour recueillir les 16 corps. Un caveau videattend le corps du dernier compagnon de laLibération. Près de la chapelle où étaient enfer-més les résistants avant d’être fusillés dans laclairière toute proche, a été érigée, une clochede bronze, œuvre du sculpteur Pascal Convert.Y sont gravés les noms des 1014 fusillés. Elle aété inaugurée le 20 septembre 2003. Chaqueannée, une cérémonie est organisée par lachancellerie de l’Ordre de la Libération, en pré-sence du président de la République et desCompagnons, pour commémorer l’appel du 18 juin.

Mont Valérien 92150 Suresnes est ouvert au public tousles jours de l’année. T. 0149743400

Musée de l’ArméeLe 18 juin 2000, Jacques Chirac, président de laRépublique a inauguré l’espace (3000 m2)consacré au général de Gaulle, aux forces fran-çaises libres et à la Seconde Guerre mondiale.

129, rue de Grenelle 75007 Paris. T. 0144423877.www.invalides.org

Historial de GaulleEn février 2008, l’Historial de Gaulle a été inau-guré par Nicolas Sarkozy, président de la Répu-blique. À partir des technologies audiovisuellesles plus modernes, sont présentés la vie, l’action, la pensée militaire, l’engagement duchef de la France libre et de l’ancien présidentde la République française.

Entrée des visiteurs par le Musée de l’Armée, 129, ruede Grenelle 75007 Paris. T. 08 10 11 33 99.www.invalides.org

Musée de l’Ordre de la LibérationLe Musée de l’Ordre de la Libération est installéaux Invalides dans le 7e arrondissement. Il estconsacré aux compagnons de la Libération et àleur parcours dans la France libre et la Résis-tance intérieure. Une partie du musée évoqueaussi la Déportation. On peut y voir notam-ment la tenue de sous-préfet de Jean Moulin,des uniformes de combattants, les armes de laRésistance, des dessins originaux réalisés dansles camps de concentration. Le Musée com-porte également une salle d’honneur consacréeau général de Gaulle. On y voit ses 80 décora-tions, sa dernière tenue militaire et des objetspersonnels. Le Musée est aussi un centre dedocumentation avec des archives, une biblio-thèque (4000 titres) et une photothèque(18 000 photographies).

Entrée des visiteurs par le Musée de l’Armée, 129, ruede Grenelle 75007 Paris. T. 0147 050410www.ordredelaliberation.fr

Musée de la Résistance nationaleIl a pour origine l’initiative d’André Tollet, pré-sident et fondateur du Comité parisien de laLibération. Il a été inauguré le 11 mai 1985. Luia été adjoint en novembre 1994 un centre dedocumentation et de recherche, implanté aupa-ravant à Ivry, et conservant les archives du CPL,du COMAC et de la presse clandestine.

88, avenue Max Dormoy 94500 Champigny-sur-MarneT. 0148815378. www.musee-resistance.com

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Le 18 juin 1948 un monument aux morts de laFrance Libre est inauguré à Paris sur l’esplanadedu musée d’Art moderne. Un an plus tard, l’ave-nue de la porte d’Orléans prend le nom du géné-ral Leclerc (mort en 1947) en hommage auLibérateur entré par cette voie le 25 août 1944. Le18 juin 1961, est inaugurée la place du 18 juin1940 face à la rue de Rennes. Le matin mêmeavait été inauguré le pont Bir Hakeim. Le 18 juin1969 est inauguré le monument de Leclerc parGeorges Pompidou, président de la République.

Les musées et mémoriauxDes musées et mémoriaux font œuvre d’his-toire en rappelant ce qu’a été la Seconde Guerremondiale.

Mémorial du Maréchal Leclerc de Hau-teclocque et de la Libération de Paris -Musée Jean Moulin de la Ville de ParisIls ont été inaugurés à l’occasion du 50e anni-versaire de la Libération de Paris par le maire deParis Jacques Chirac et le Premier ministreÉdouard Balladur. Ils sont situés dans un lieusymbolique : Montparnasse. C’est dans la Gareque le général Leclerc a installé son poste decommandement le 25 août 1944 et où a été ren-due effective la capitulation des Allemands. C’estla première étape du général de Gaulle dans lacapitale le même jour. C’est aussi un lieu fré-quenté avant guerre par Jean Moulin, résistant,également dessinateur et amateur d’art. Cesdeux musées présentent l’action de ces deuxhommes, Philippe Leclerc de Hauteclocque etJean Moulin, tous deux engagés aux côtés dugénéral de Gaulle grâce à des images d’archives,des objets, des uniformes dans le contexte del’époque. Une salle est consacrée à Paris, ville

Compagnon : y sont exposés la croix de Com-pagnon et le rapport du général de Gaulle. Unmur d’images audiovisuelles présente l’insurrec-tion et la Libération de Paris. Un centre de docu-mentation et de recherche conserve les archivesde Leclerc et de Jean Moulin.

23 allée de la 2e DB / Jardin Atlantique 75015 ParisRenseignements : 0140643944 Fax : 0143212830 Site web : www.paris.fr/musees/memorial/index.html

Le Mémorial de la ShoahLe Mémorial de la Shoah a été inauguré dans saforme actuelle fin janvier 2005. À l’entrée, setrouve un “Mur des noms” comportant les nomsde tous les Juifs déportés de France. Ce mémo-rial a pour origine le Centre de documentationjuive contemporaine créé en 1943 dans la clan-destinité par des Juifs pour rassembler destémoignages sur les crimes perpétrés par lesnazis avec l’aide du gouvernement de Vichy. Il aintégré les locaux du Mémorial du martyr juifInconnu inauguré le 30 octobre 1956.

17, rue Geoffroy-l’Asnier 75004 Paris. T. 01 48 77 44 72www.memorialshoah.fr

Mont ValérienAu Mont Valérien à Suresnes, de 1940 à 1944,plus d’un millier de résistants, de Juifs etd’otages a été exécuté par l’Occupant nazi. C’estaujourd’hui – selon la volonté du général deGaulle – le Mémorial de la France combattante.Le 11 novembre 1945, les corps de 15 combat-tants symbolisant tous les aspects de l’engage-ment dans la guerre sont déposés rejoints peuaprès par un seizième corps. Le 18 juin 1960, le général de Gaulle devenu président de la Ve République inaugure le Mémorial : mur degrès rose avec au centre une Croix de Lorraine

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Page 41: Capitale fidèle à elle-même et à la France, a …w81-api.apps.paris.fr/images/102747.pdf(Propaganda Abteilungà l’hôtel Majestic et Pro-paganda Staffeldu Gross Parisau 52 avenue

par Jacques Doriot en 1936. Il compte100 000 adhérents à la veille de laguerre. Violemment anticommuniste,antisémite et antirépublicain, il faitparaître en zone nord Le Cri du peuple.Il entre, après l’invasion de l’URSS,dans l’ultracollaboration et fournit denombreux éléments à la LVF.

Propaganda Abteilung : service depropagande allemand en France inté-gré à l’administration militaire etdépendante du Ministère de la Propa-gande du Reich, installé à Paris àl’Hôtel Majestic.

Propaganda Staffel : échelon régionalde la Propaganda Abteilung, installé àParis au 52, av. des Champs-Elysées.

RNP (Rassemblement national popu-laire) : mouvement politique collabo-rationniste fondé en février 1941 par

Marcel Déat, ancien député socialisteexclu de la SFIO, et Eugène Deloncle,fondateur de la Cagoule, une organi-sation terroriste d’extrême-droite. LeRNP s’aligne sur l’Allemagne nazie etse définit comme un mouvementsocialiste national et autoritaire.Anticommuniste, antisémite, anticlé-rical et anticapitaliste, ses effectifs nedépasseront pas les 20 000 adhérents.

SD (Sicherheitsdienst) : service desûreté du parti nazi, organisé par Hein-rich Himmler en 1935. Formé de SS, leSD est le cerveau de la police secrèted’État (Gestapo). Composante de l’Office central de sécurité du Reich(RSHA) que dirige Reinhardt Heydrichdepuis 1938, le SD est chargé de larecherche et de l’arrestation des sus-pects, il opère souvent dans l’ombre (àla différence de la Gestapo).

SS (Schutzstaffeln) : sections d’élite,littéralement “échelons de protec-tion”, au départ, garde personnelled’Adolf Hitler. Véritable ordre chargéde développer et préserver le régimenazi, la SS, avant-guerre, absorbe lapolice allemande qui devient unepolice politique. La SS, dirigée par unReichsführer (Himmler), comprendaussi des unités de combat (Waffen-SS) et d’autres chargées de l’adminis-tration des camps de concentration.Synonyme de terreur dans toute l’Eu-rope occupée, son représentant enFrance est Carl Oberg.

Wehrmacht : ensemble des forces del’armée allemande (air, terre et mer),placé sous le commandement suprêmed’Hitler. Les troupes SS n’appartien-nent pas à la Wehrmacht.

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Armée secrète (AS) : fusion des forcesparamilitaires des trois grands mouve-ments de zone Sud : Combat, Libéra-tion et Franc-Tireur ; créée à l’automne1942 sous les ordres du général Delestraint, remplacé après son arres-tation par le colonel Dejussieu-Pontcarral. L’AS, avec les FTP et l’ORA,forme les FFI en février 1944.

Brigades spéciales : services derépression de la préfecture de Police,réactivées par le gouvernement deVichy, chargés de la lutte contre lesrésistants et travaillant en équipeavec les agents de la Gestapo.

Comité d’action militaire (COMAC) :organe du CNR composé de troismembres : Pierre Villon* (Front natio-nal), Maurice Kriegel-Valrimont*(MUR) et Jean de Vogüe* (mouve-ments de zone Nord) ; il est chargé ducommandement des FFI jusqu’audébarquement de Normandie.

Comité national français (CNF) :“gouvernement” de la France libre ins-titué le 24 septembre 1941. Le CNF,constitué d’un chef, le général deGaulle, et de huit commissaires (minis-tres) exerce provisoirement les pou-voirs publics (exécutif et législatif) dela France.

Forces françaises de l’intérieur (FFI) :formation militaire de la Résistancecréée en février 1944 par la fusionentre les forces paramilitaires de l’Armée secrète (AS), des FTP et del’ORA. Le commandant des FFI est legénéral Koenig*.

France combattante : terme qui rem-place celui de France libre à partir du 14 juillet 1942 pour bien marquerqu’elle représente aussi bien les résis-tants de l’intérieur que ceux de l’ex-térieur.

Francs-tireurs et partisans (FTP) :branche armée de la résistance com-muniste, rassemblant les différentséléments d’action du Parti commu-niste français (OS, Bataillons de lajeunesse, groupes de la MOI). Créés enfévrier 1942, les FTP sont placés sousla direction du Front national et com-mandés par Charles Tillon*. Ils intè-grent les FFI en février 1944 maisconservent leur autonomie.

Front national (Front national delutte pour la liberté et l’indépendancede la France) : mouvement de résis-tance initié par le Parti communistefrançais en mai 1941. Seul mouve-ment implanté dans les deux zones, ilrecrute dans tous les milieux sociaux,professionnels et politiques.

FTP-MOI : branche des FTP composéede militants communistes étrangers(main-d’œuvre immigrée)

Gestapo (Geheime Staatspolizei) :police secrète d’État créée par Hermann Goering et composée de SStriés sur le volet ; la Gestapo est placéesous le contrôle du SIPO-SD (Sicher-heitspolizei-Sicherheitsdienst). Elle dis-pose de pouvoirs très étendus etpratique des méthodes expéditives(exécution, torture). Son action seconcentre sur la chasse aux opposants(politiques, résistants) et aux Juifs.

Gross Paris (en allemand “GrandParis”) : zone du commandement mili-taire allemand qui englobe Paris et larégion parisienne

Internement administratif : place-ment en prison ou résidence spéci-fique de personnes sans justificationnécessaire. L’internement administra-tif, qui touche souvent des opposantspolitiques, est décidé par le ministrede l’Intérieur ou par le préfet.

Kriegsmarine : marine de guerre alle-mande

Luftwaffe : armée de l’air allemande

LVF (Légion des volontaires françaiscontre le bolchevisme) : organe de lacollaboration militaire avec l’Alle-magne créé en août 1941 à Paris. Diri-gée par Deloncle, Doriot, Déat, Bucart,la LVF recrute des contingents devolontaires pour servir sous l’uniformeallemand sur le front de l’Est. Intégréeà la Wehrmacht puis, à la fin de laguerre, à la Waffen SS, elle a enrôléenviron 4 500 volontaires français.

Milice française : Police politique dugouvernement de Vichy créée en jan-vier 1943 et commandée par JosephDarnand. Sa branche armée, la Franc-garde, devient fin 1943 une force depolice supplétive des Allemands. LaMilice sera impitoyable dans la luttecontre la Résistance et la traque desJuifs.

Organisation de résistance de l’ar-mée (ORA) : mouvement de résistancemilitaire créé fin 1942 au sein de l’ar-mée d’armistice. Proche du généralGiraud, l’ORA fusionne en février1944 avec l’Armée secrète (AS) et lesFTP pour former les FFI mais gardeson autonomie.

Organisation spéciale (OS) : structuredu PCF clandestin chargée de la pro-tection des militants. L’OS devientune force armée dans la lutte contrel’occupant après l’invasion de l’URSS.

Papillons : tracts de la résistance,manuscrits ou imprimés, collés sur lesmurs ou les vitrines des magasins.

PPF (Parti populaire français) : partipolitique fasciste prônant la collabo-ration avec l’Allemagne nazie, fondé

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Roger Bourderon, Henri Rol-Tanguy, Taillandier, 2004André Carrel, Au Cœur de la Libération de Paris, Éditions

sociales, 1994.Jacques Chaban-Delmas, Les Compagnons, Albin

Michel, 1986.Adrien Dansette, La Libération de Paris, Fayard, 1947.Gaël Eismann et Sefan Martens [dir.], Occupation etrépression militaire allemandes 1939-1945, la politique de maintien de l’ordre en Europe occupée,collection mémoires/histoire, Autrement 2007 .

Guy Krivopissko, Christine Levisse-Touzé, Vladimir Trouplin, [dir.] Dans l’Honneur et par la victoire, lesFemmes Compagnon de la Libération, Tallandier,2008.

Christine Levisse-Touzé, Paris libéré, Paris retrouvé,Découvertes Gallimard, 1994.

Christine Levisse-Touzé, Jean-Louis Goglin et Marie-Andrée Corcuff, Paris insurgé, Paris Libéré, Paris-Musées, 2005.

Christine Levisse-Touzé (sous la direction de), Paris1944, les enjeux de la Libération, Albin Michel, 1994.(actes du colloque organisé par le Mémorial Leclercet de la libération de Paris et le Musée Jean Moulinsous l’égide de la Ville de Paris, en février 1994).

François Marcot [dir.] avec la collaboration de BrunoLeroux et Christine Levisse-Touzé, Dictionnaire histo-rique de la Résistance, coll. Bouquins, Laffont, 2006.

Alrich Meyer, L’Occupation allemande en France, 1940– 1944, Editions Privat, 2002.

Henri Michel, La Libération de Paris, Éd. Complexe, 1981.Jean-Christophe Notin, 1061 Compagnons. Histoire des Compagnons de la Libération, Perrin, 2000.

Colonel Rol-Tanguy, Roger Bourderon, Libération deParis. Les cent documents, Hachette, 1994.

François Thesmar, 1061 Croix de la Libération ou entre-tiens sur la pluralité des refus, Châtillon, 1999.

Vladimir Trouplin, Dictionnaire des Compagnons de laLibération, Elytis, 2010.

Lexique

Repères bibiographiques

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Préfaces 2, 3

Paris occupé“Paris allemand” (juin 1940 - novembre 1942) 5La persécution antisémite à Paris 14Paris, capitale d’une France engagée (fin 1942 - avril 1944) 17“Paris a froid, Paris a faim” 23Lycéens et résistants 24

Paris insurgé, Paris libéréLes conditions de la Libération 26L’insurrection 33La Libération de Paris 41De Gaulle à Paris 49Dictionnaire des principaux personnages … 54

L’Ordre de la LibérationCréation de l’Ordre 57Les Compagnons 61La cérémonie du 2 avril 1945 67L’Ordre aujourd’hui et demain 69

La mémoire de ParisLes lieux évoquant la guerre 72Les musées et mémoriaux 76

AnnexesLexique 78Repères bibliographiques 79

Table des matières

Les termes en gras dans le texte renvoient au Lexique, page 78.Les astériques renvoient au Dictionnaire des principaux personnages de la Libération de Paris, page 54.

Edité par le Comité d’Histoire de la Ville de Paris. Secrétaire général : Frédéric Tristram©2010 - CHVP - Tous droits réservés pour tous pays.

Secrétariat d’édition : Stéphane RouelleCartographie : Frédérique Duboscq