Cahiers Evangile 92

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materiel bibliographique pour le cours d'Ancien Testament, Institute Saint Serge, Paris

Transcript of Cahiers Evangile 92

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Le LtvRE

DES PSNUMES

SERVIoE BtBLteuE ÉunrrtetLg ET vtEÉortoNs Du zERF 33 F" ll[|ililllill[|lllllillll9 "772204"390928

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Pour une 1 " lecture de la Bible (n"10)Une 1o approche de la Bible (35)

ANCIEN TESTAMENTGenèse: 1-1 1 : Homme. qui eslu? (4)Genèse: 12-25: Abraham (56)Le livre de l'ExodeLe DécalogueLe livre des NombresLe DeutéronomeLes livres de Samuel et des Rois (44)Samuel, juge et prophèteLe livre des RoisLes prophètes de l'4. T.lsaTe (1-39) (23)Le Deuxième lsaie (40-55) (20)JérémieEzéchielAmos. OséeJonas

La Palestine au temps de Jésus (27)Les récits de l'enfance de Jésus (18)Le message des Béatitudes (24)Les miracles (8)Parabole (75)Jésus devant sa passion et sa mort (30)Christ est ressuscité (3)

DIVERSUn chrétien lit le Coran (48)L'inspiration et le canon des Ecritures (49)Sémiotique (59)Des livres au service de la Bible (69)Parole de Dieu et exégèse (74)

Jésus: 13 textes du N. T.Marie des évangiles

Actes - Épîtres

La 1" aux CorinthiensLa 2" aux Corinthiens

Une lecture des Actes des Apôtres (21)Mission et communauté (Ac 1-12) (60)L'Evangile aux paTens (Ac 13-28) (67)Saint Paul en son temps (26)L'épître aux Romains (65)Les épîtres aux Corinthiens (22)

(66)(51 )

Proche-Orient ancien l

Sagesses de l'Egypte ancienne (Sup. a6)Sagesses de Mésopotamie (SuP. 85)Lois de I 'Ancien Orient (Sup. 56)La création et le déluge (Sup. 6a)

(Sup. 6s)( S u p . 8 1 )

(50)(77)(54)

(81)(78)(63)

Les derniers prophètes (90)Le livre des Psaumes (92)Pour prier avec les Psaumes (13)Les Psaumes et Jésus (25)Petit dictionnaire des Psaumes ï1\Job (53)Aux racines de la Sagesse (Prov.) (28)Le Cantique des cantiques (85)Le judaïsme, de I 'Exil à Jésus (55)Le l ivre des Chroniques (87)

L'épître aux Galates (34)Colossiens, Ephésiens (82)L'épître aux Phil ippiens. Philémon (33)La 1" lettre aux Thessaloniciens (39)Les épîtres pastorales (Tim, Tite) (72)Vocabulaire des épîtres de Paul (88)L'épître aux HébreuxLa lettre de JacquesLes épîtres de PierreLes épîtres de JeanL'ApocalypsePrier les Hymnes du N. T.

THÈMES BIBLIQUESSelon les Ecritures fi2\Mort et vie dans la Bible QS\La Sagesse et Jésus-Christ (32)L eucharistie dans la Bible (37)L'au-delà dans le N. T. (41)Cæur, langue, mains dans la Bible (46)L'Esprit-Saint dans la Bible (52)De Jésus aux sacrements (57)Dieu, notre Père (68)Le sacerdoce dans la Bible (70)! , ,

Evangile el Tradition d lsraël (73)La violence dans la Bible (76)Bible et royauté (83)Evangile et Règne de Dieu (84)

lsraël et les NationsTraités et sermentsProphéties et oracles - | (Sup. 88)Prophéties et oracles - ll (Sup. 89)

Judaïsme:

Philon d'Alexandrie (SuP. aa)Paraboles rabbiniques (Sup. 50)Les Targoums (Sup. 5a)Qumran (SuP. 61)Récits de miracles

en milieux juif et paTen (SuP. 66)La prière juive (SuP. 68)La Torah orale des Pharisiens (Sup. 73)La Bible grecque. La Septante(Sup. 74)Le Midrash (SuP. 82)Les Fêtes juives (SuP. 86)

Premiers siècles :

Vie et re l ig ions dans l 'Empire romain

Nas Hammadi. Évansite oJTTIofl?"(Sup. 58)

A la naissance de la Parole chrétienne(Sup. 77)

Qohélet. Le SiracideLa Sagesse et Jésus-ChristLa crise maccabéenneLe livre de Daniellntertestament

NOUVEAU TESTAMENTÉvangiles

(8e)(86)(43)

(40)(38)(64)(36)

(e1)(32) .(42)(7e)(14)

(1 e)(61 )(47)(62)( 1 1 )(80)

L'évangile selon saint Matthieu (9)Matthieu le théologien (58)L'évangile selon saint Marc (112)L'évangile selon saint Luc (5)L'évangile selon saint Jean (1i)J..C. dans l 'évangile de Jean (31)Evangiles: origine, date, historicité (45)

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Ln LIVREDES PSIUMES

présenté parMatthieu Cor-r-m

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Il y a vingt paraissait le Cahier n' 13 : Pour prier avec les Psaumes de

u. tr,tnNNnu ; depuis, deux autres cahiers ont abordé |a lecture chré-

tienne des Psaumès (n" 25) et leur vocabulaire (n" 71). Mais il man-quait une présentation d'ensemble du Psautier et sutout un guide pour

ipprendre à lire et à prier ces vieux textes. Nous avons demandé à un

UiUtiste bénédictin, Matthieu CoLLtN, de l'Abbaye Notre-Dame de Lapiene-qui-vire, de nous faire pafiager son amour des Psaumes. Son

expérience quotidienne de cette prière, approfondie par l'enseigne-mént de la gible, l'a amené à voir en eux des échos et un résumé de la

Bible, tollautant que des échos et un résumé de I'expérience humaine.Ces deux approches sont complémentaires, même si chacun peut sesentir plus aïtiré par I'une ou par I'autre.

Certes, on ne peut guère prier les Psaumes Sans un e e l'tain apprentissa-ge, mais tout ôroyant peut devenir cet apprenti : il ltri suffit de se lais-

ier entraîner, patiemment, sur ces chemins que parcourent lescroyants, juifs et chrétiens : ce sont des chemins sûrs qui mènent àDieu. pouiquoi ne pas faire confiance à ces chemins qu'a suivis Jésus

lui-même ?N'a-fil pas faites siennes les plaintes et les louanges de ses

frères d'Israël ? N'a-t-il pas trouvé dans ces Psaumes les mots pour

dire au Père sa confiance, sa joie et sa supplication ? Le Psautier estcité ici dans sa traduction æcuménique et liturgique : celle qu'utilisent

chaque jour tous les chrétiens francophones.

Par suite deperturbationspostales certainsàbonnés n'ont pâsreçu le Cahiern" 91 : Qohé/eth -[e Siracrde. Qu'ilsnous préviennent,nous [e leurenverrons(rér. i/42 22 03 89)

* *

Nos amis lecteurs auront remarqué la nouvelle maquette de couvertu-re ; les abonnés aux Cahiers et aux Suppléments savent que ce petit

changement marque |e début de la nouvelle série des Suppléments.Aprèi avoir présenté des textes de I'Ancien Orient (ou des premiers

siècles), les Supplémer?/s proposent désormais des lectures de tel ou tel

texte biblique faites au long des siècles. Les Nouvelles du Service, enp. 67, vouJ en diront plus long. N'hésitez pas, si vous ne connaissezque les Cahiers, à déCouvrir aussi ces Nouveaux Suppléments. Mercide votre confiance et de votre fidélité.

Philippe GnusoN

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ENTRERDANS LES PSAUMES

Du cri à l'écrit

LE PSAUME, UN CRI UN ÉCRIT POUR MÉMOIRED. Rrueuo, grand connaisseur des psaumes et

poète lui-même, a pu écrire : " Le psaume est uncri avant d'être un écrit ; en lisant le psaume, ilfaut donc retrouver le cri sous l'écrit ". Nombre depsaumes disent cette origine :

" Quand je crie, réponds-moi. " (Ps 4,2)' Ecoute, ô mon Dieu, le cri de ma plainte. "(Ps 64,2)" J'aime le Seigneur:il entend le cri de ma prière :il incline vers moi son oreille. " (Ps I 1 6, 1)

. Quelque chose d'imprévu est arrivé; atteint parl'événement, surpris par l ' inattendu, quelqu'un acr ié . . . E t pu is lu i -même, ou p lus souvent untémoin , a vou lu garder t race de ce c r i , fa i remémoire de ce que l'événement lui avait appris ;alors il a raconté :

" Tu m'as répondu !Et je proclame ton nom devant mes frères ',(Ps 22,23)" Nous avons entendu et nous sayonsce gue nos pères nous ont raconté. " (ps 78,3)

En lsraël comme dans tous les pays de traditionorale, on ne raconte pas pour le plais ir i on racon-te pour témoigner; on ne garde pas trace écr i ted'un réci t pour enrichir le répertoire ou pourfa i re æuvre l i t té ra i re , ma is pour enr ic f r i r lamémoi re de la fami l le , du c lan , du peup le deDieu enf in. Finalement on garde l 'écr i t pour qued'autres apprennent aussi à l i re ce qui leur arrrve,trouvent les mots pour leur propre cri, pour leurpropre pr ière. Le Ps 117 résume parfai tementcette démarche :

" Louez le Seigneur, fous /es peuples ;fêtez-le, tous les pays !Son amour envers nouss'est montré le plus fort;éternelle est la fidélité du Seigneur ! "

Dans son histoire, lsraël a fait l 'expérience del'amour invincible de son Dieu et il invite tous lespeuples à entrer dans cette louange, persuadéqu'ils sont eux aussi concernés par -e qui lui estarrivé.

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Lorsque nous lisons les psaumes, lorsque nousles chantons dans la liturgie, notre acte,de lecturedevrait nous permettre de retrouver le cri, plusencore de faire nôtre I'expérience de vie qui a sus-cité ce cri :

" Seigneuç entends ma Prière.: . .que mon cri parvienne iusqu'à toi !(...)Que cela soit écrit pour l'âge à veniret le peuple à nouveau créé chantera sonDieu. " (Ps 102,2.19)

Si une grande angoisse nous a submergé, sinous avons pu en sortir vainqueur, comment nepas être rejoint par ce cri du psalmiste :'

" D'un grand espoir i'espérais Ie Seigneur :il s'est penché vers moi pour entendre mon cri'tl m'a tiré de I'horreur du gouffre,de la vase et de la boue ;

LITURGIE ET EXPÉRIENCEil m'a fait reprendre pied sur Ie roc,il a raffermirnes Pas. " (Ps 40,2-3)

5i une grande joie survient pour nous, pourquoine pas utiliser |taction de grâce du psalmiste etavec lui élargir et partager son cri de joie :

" Mon cæur est Prêt, mon Dieu,ie veux chanten jouer des hymnes, ô ma gloi--re

I Eveillez-vous, harpe, cithare, que i'éveillel'aurorele te rendrai grâce parmi les peuples, Seigneur,et jouerai mes hYmnes en tous PaYs.Ton amour est p/us grand que les cieux,ta vérité, plus haute que /es nues' " (Ps 108,2-5)

Mais celui dans la vie de qui r ien ne se passe, ouqui laisse tout passer de la vie, trouvera toujoursles psaumes trop concrets et trop radicaux pourlui i iamais i l n 'entrera dans les poèmes des psal-mistês ni dans leurs chants. Seul un vivant peutentendre les cris de joie ou de détresse qu'ont ian-cés d'autres vivants.

biblique, comme toute poésie digne de ce nom,n'est pas d'abord un obiet esthétique, quelquechose pour faire plaisir ou pire encore pour se fairepf aisiç'mais un objetartinnal. La poésie est d'abordLn outil pour aid-er la mémoire, pour conserver latradition. Le psaume est un poème biblique, c'est-à-dire un outil pour faire mémoire de la traditiond'un peuple, de la vie d'un peuple; c'est un outilque tout util isateur reçoit et qu'il doit prendre enmain, avoir bien en main. Comme tout outil, i l fautle prendre comme il est, comme il a été fabriqué,avôc des mots, repris et répétés, avec des phrases,orqanisées en un tout cohérent et efficace. ll fautapÉrendre à lire d'abord la structure des psaumes.

La structure des psaumes

La forme littéraire la plus efficace pour gardermémoire d'un événement et surtout permettred'en faire mémoire, c'est le poème. ll ne s'agit pastant de décrire ce qui s'est passé - langage infor-matif - que de faire entrer en résonance avec cequi s'est passé et de permettre de communier enr jne même expérience - langage de communion.C'est le désir de partagel finalement I'amour, quienqendre le récit poétique. Les psaumes sont despoémes et souvent des poèmes d'amour que lesênfants d'un même peuple, d'un même Père, par-tagent et se transmettent au fil des temps.

Mais ici, i l ne faut pas se tromper ; la poésie

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LES MOTS

Les mofs-c/és sont répétés, et font souventinclusion: ils reviennent au début et à la fin dupsaume. ll faut savoir les repéreç et observer s'ilsne changent pas de sens d'un emploi à l 'autre. LePs 6 nous fourni t un exemple clair ; on trouve auxv.3-4 et 1 1 - début et fin du psaume - la répétitiondu mot'trembler', mais ce tremblement est passé,au f i l du psaume, du psalmiste à ses ennemis :

" Seigneuç guéris-moi !Carie tremble de tous rnes os.De toute mon âme,ie tremble (...)Qu'ils aient honte et gu'ils tremblent, tous rnesennemis,qu'ils reculent, soudain couverts de honte ! "

Le Ps 29 nous offre un jeu plus subt i l : nousavons là une inclusion complexe, répétition symé-trique de mots ou de synonymes aux deux extré-mités du psaume (1-2 et 9.11) :

" Rendez au Seigneur gloire etpuljsance.Rendez au Seigneur /a gloire de son nom,adorez le Seigneur, éblouissant de sainteté(...)Et tous dans son sanctuaire s'écrient; Gloire I(...) Le Seigneur accorde â son peuple la puissan-ee,Ie Seigneur bénit son peuple en lui donnant lapaix. "

On pourrait multiplier les exemples. L'excellentlivre de J.N. Alrrrr et J. Tnuslrr (c't. Pour continuerl'étude, p. 64) en fournit la liste (p.28-33).

Les mots en série sont des répétitions du mêmemot au long du psaume, ou bien des mots syno-nymes. Le Ps 29 en est un exemple-type avec sessept répét i t ions de l 'expression " Voix du Sei-gneur " (v.3.4.4,5.7.8.9). Un autre exemple bienconnu est celui des strophes du Ps 119 qui égrè-nent toutes, en des ordres différents, les huit mots

de la Loi : " loi, exigences, voies, préceptes, com-mandements, volontés, décisions, parole ". Cha-cun des 176 versets (sauf le v.122) cont ient aumoins l'un de ces mots.

Les mots-crochets sont des mots qui reviennenten alternance ; ils instituent des frgures parallèlesq u i s ' a p p e l l e n t l ' u n e l ' a u t r e . L e s m e i l l e u r sexemples se trouvent dans ce que I'on a coutumed'appeler les 'Psaumes des montées' (Ps 1 20 à 134).A ins i le Ps 121 :

" Je lève les yeux vers les montagnes :d'où le secours me viendra-t-i/ 7[e secours me viendra du Seigneurqui a fait le ciel et la terre." Qu'il empêche ton pied de glisseçqu'il ne dorme pas ton gardien.Non, ilne dort pas, ne sommeille pas,le gardien d'lsraë\.

" Le Seigneur, ton gÊIdlÊD,le Seigneuç ton ombrage,se tientprès de toi.le soleil, pendant le jour, ne pourra te frapper,ni /a lune, durant la nuit.

" Le Seigneur te gdISlÊIA de tout mal,il gardera ta vie.Le Seigneur te oardera. au départ et au retour,maintenant, à jamais. "

LES REFRAINS

Des refrains structurent certains psaumes selonle mode de la répétition. lJexemple-type est le Ps46 qui reprend deux fois (v.8 et 12, mais probable-ment aussi entre les v.4 et 5) :

" ll est avec nous, le Seigneur de l'univers ;citadelle pour nous, le Dieu de Jacob ! "

On pense aussi au Ps 42,6.12, qui se poursuit auPs 43,5; au Ps 57,6.12; au Ps 59,7.15 et 10.18, au

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Ps 107,6.13.19.28 et 8.15.21.31, pour ne ci ter quequelques exemples signif icatifs.

Le refrain sera parfois un véritable leitmotivcomme dans le cas du Ps 136 : " Eternel esf sonamour I " Ce sera parfois au contraire une simpleinclusion comme dans Ps 8,2,10.

UNE RECHERCHE MODERNE

Certaines recherches contemporaines ont voulusystématiser cette attention au texte et à ses struc-tures ; on parle volontiers aujourd'hui d'analysestructurelle (ou rhétorique) des psaumes. Uun desmaîtres livres dans ce domaine, celui de J.N. Aurrtet J, TnueLer, déjà indiqué, déf ini t ainsi cetteméthode : " En repérant les répétitions, les accu-mulations et les séries de termes affins ou opposés,en relevant les parallélismes qui balayent un psau-me, on voit presque toujours apparaÎtre une struc-ture de type alterné ou concentrique, avec uneinfinité de variantes " (p.9), Les auteurs croientpouvoir reconnaître cette organisation littérairedans 120 psaumes environ. D'autres n'hésiteraientpas à étendre la formule à tous.

Une tel le méthode est évidemment r iche etfructueuse si elle est pratiquée avec mesure. Pour-tant une des limites de ces recherches - surtout si

elles sont util isées sans retenue - c'est qu'elless'appuient sur des analyses littéraires comme si lespsaumes étaient des textes écrits alors qu'ils sontd'abord des textes oraux. Ces poèmes ont été faitsnon pas comme des textes à lire, mais comme destextes à entendre et à di re. Uécriture en versets, enstrophes, les structures parallèles ou concentriquespeuvent aider l 'ceil et l 'esprit, mais pour qui écou-te, ce sont d'abord les mots qui reviennent, serépètent, se transforment, les refrains qui scan-dent un texte, les images qui courent au long dupoème, qui rythment le récit.

" Dans un texte oral, il n'y a pas de paragraphespour l 'æi l . Mais i ly a des mots-signaux qui se don-nent à entendre et qui annoncent une articulationdu récit ou de la pensée. (...) Dans d'autres cas,c'est une formule qui reviendra comme un leitmo-tiv : 'Oui, mon rempart, c'est Dieu' (Ps 59,10.18).Au début, les /ecteurs que nous sommes par édu-cation chercheront des yeux dans le texte cesrécurrences-repères. ll est bien de les soulignerpour s'y habitueç car ce sont de précieux indica-teurs. Mais il faut habituer peu à peu notre oreilleà les entendre.(...) ll faudra surtout les retrouvergrâce au goût qu'ils prennent dans notre bouche :chacun a sa saveur propre, enrichie par le souvenirdes expériences passées, et sans cesse ravivée parle désir et la faim." (J. Gruruenu, Traité de la psal-modie, p.17-18.)

y a toujours eu des traducteurs attentifs à cet artpoétique - l'écoute de la langue des psaumes resteessentielle à qui veut entrer vraiment dans cespoèmes.

La poésie hébraique

Dans cette même ligne de l'oralité, il faut sou-ligner f importance de la langue despsaumes. Evi-demment seu le une approche dans la languehébraïque peut al ler jusqu'au bout d'une tel leattention mais, même dans des traductions - et il8

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LES SIGNAUX SONORESET LES RYTHMES

" Les moyens sonores dont dispose le poètesont : les allitérations, les assonances, les rirnegl'insistance sur plusieurs sons apparentés ou diffé-rents " (L. ALorrrso-5cHôreL). On peut dire que lesrimes sont inexistantes dans la poésie hébraïque,m a i s l e s a s s o n a n c e s ( r é p é t i t i o n d e s m ê m e svoyel les)et les al l i térat ions (répét i t ion des mêmesconsonnes) sont fréquentes. Donnons-en deuxexemples : le Ps 122,6 joue sur les consonnes sh, /et m quiforment le mot shalom;on entend ainsidans le verset " paix, paix, paix " comme un osti-nato musical :

Shaal ou she I o m Ye ro usha I aimyishlayou ohavaïkh." Appelez le bonheur sur Jérusalem :'Paix à ceux qui t'aiment !'"

Le Ps 140,4 joue, lui, sur les consonnes sh et ndont les sons répétés évoquent le murmure descomploteurs :

Sh ané nou I esho na m ke m o- nabash." ils dardent leur langue de vipère. "

Selon J. GELrrurnu, " le psaume superpose plu-sieurs rythmes : le rythme du verset acccordé à larespiration, le rythme du stique accordé au bi-laté-ralisme du corps, le rythme de la pulsation engen-dré par le regroupement de syl labes en mots-mesures ; le rythme syllabique. " (p.26). Précisonsavec lui chacun de ces rythmes. " Le génie du psau-me, c'est de faire correspondre I'unité poétique debase, le verset, avec la durée d'une respirationtranquille. (...) La récitation du verset se fera sur unsouffle égal et contrôlé, sans secousses, en deuxvagues éga les - les s t iques - avec une pausemédiane, selon la structure poét ique du versetpsalmique " (p.9). De plus " l 'é lément structurantde ces deux rythmes superposés dépend entière-ment de la pause qui sépare - et uni t - deux ver-

sets, deux st iques.(. . . ) Le mouvement du psaumene s 'a r rê te pas . Ma is dans l 'écou lement de ladurée poét ique, les si lences ont autant d ' impor-tance que la parole " 1p.26), ils participent au ryth-me.

" Dans la poét ique du psaume hébraïque, ni ladurée n i le nombre des sy l labes ne para issentdéterminants. En revanche on repère aisément dessuites de mots-mesures dont la succession s'appa-rente à la pulsation. (...) Soit le début du Psau-me 34 : " Je bénirai le Seigneur en tout temps " ;i l est comoosé de trois mesures orqanisées autourdes trois mots principa ux: bénin Siigneur temps.C'est pourquoi nous les appelons mots-mesures.Leur succession évoque trois pulsat ions " (p.12).

A l' intérieur des mots enfin toutes les syl/abesn'ont pas même valeur ; i l y a des /evés et desposés; le posé marque la f in des mots, accent ouappui, le levé permet la relance du mouvement.For tu i tement les accents f rança is , comme lesaccents hébreux sont le plus souvent sur la derniè-re (ou I 'avant -dern iè re) sy l labe des mots , parexempre :

" le bénitai le Seignsat en tout tempssans çgsse sa louange dans ma bouche ".

C'est une coincidence heureuse pour le traduc-teur français. l l est c lair que la qual i té d'une tra-duct ion se marquera d'abord dans sa capacité àgarder ou à recréer ces rythmes sans lesquels lepsaume ni la poésie n'existeraient plus.

Une te l le approche du ry thme des psaumessemble bien conf irmée par ce que I 'on peut savoirde la rythmique ancienne qui t ransparaît dans lesaccents musicaux (les ta'amim) qui ont été ajoutésoar les Massorètes au Vl le siècle de notre ère pourÏ ixer la tradi t ion synagogale de la lecture i i tur-g ique qu i remonte , e l le , au moins au premiersiècle sinon plus haut encore. Par-delà la complexi-té du système, le pr incipe de base est s imple, i ls 'agi t essent iel lement de deux indicat ions :

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- ce qui doi t être dist ingué (signes disjonct i f$ ;- ce qui doit être uni (signes conjonctifs).

On aura remarqué que ces signes restent auniveau des petites unités, versets et strophes. Pource qui est des textes entiers, nous ne connaissonsque la mention se/ah, traduite par 'pause', quiapparaît dans 39 psaumes (44 dans la Septante),par exemple : Ps 3,3.5.9 ; Ps 4,3.5 ; etc. On peutpenser qu'el le indique une pause dans la lectureou le chant.

LES PARALLÉLISMES

Le verse t es t I 'un i té poét ique de base despsaumes ; i l est normalement composé de deux,que lquefo is t ro is membres . Ces membres oust iques sont en général paral lèles et int imementl iés quant au sens. On dist ingue des paral lél ismessynonymiques où le second stique fait écho auo r e m r e r :

" Les cieux proclament la gloire de Dieu,le firmament raconte I'ouvraqe de ses mains. "(Ps 19,2)

Ce paral lél isme peut se redoubler sur deux ver-sets :

" A pleine voix, je crie vers le Seigneur !A pleine voix, je supplie le Seigneur !le répands devant lui ma plainte,devant lui, je dis ma détresse. " (Ps 142,2-3)

On peut avoir des para llélismes antithéfiques oùle second st ique s'oppose au premier :

" Des riches ont tout perdu, ils ont faim ;qui cherche le Seigneur ne manquera d'aucunbien. " (Ps 34,1 1)

On peut avoir enfin des parallèles synthétiquesoù le second st ique reprend une part ie du précé-dent et le complète :1 0

" Chantez au Seigneur un chant nouveau,chantez au Seigneur, terre entière,chantez au Seigneur et bénissez son nom !

De jour en jou4 proclamez son salut,racontez à fous /es peuples sa gloire,à foufes /es nations se s merveilles / " (Ps 96, 1 -3)

A quoi servent ces paral lél ismes ? l ls soul ignentdes thèmes, les développent, les addit ionnentmais en général n 'ajoutent pas au niveau du sens.Les paral lél ismes donnent le temps de l ' imprégna-t ion, de l 'étalement du sens, i ls nous font entrerdans le mouvement même de la méditat ion, de lapr ière. l ls la issent le temps à la parole de produireson effet.

LA LANGUE HÉBRATQUE

fhébreu est une langue concrète, langue deschoses, du réel. Elle se prête de façon remarquableà la narrat ion et se présente comme une admi-rable langue poét ique, pleine de r ichesse et decouleur. Mais el le n'ut i l ise pas habituel lement demots abstraits, les ignore le plus souvent, ce qui nel 'empêche pas d'exprimer les choses les plus pro-f o n d e s e t l e s p l u s i n t i m e s m a i s p a r l e b i a i sd' images et de comparaisons. De quoi déconcerternotre logique occidentale I

La langue hébraïque approche aussi le fempsd'une autre manière. El le n'est pas sensible à ladi f férence du passé, du présent et du futur : el lese f ixe sur le mouvement, et se demande si l 'actions'achève ou ne s'achève pas ; d'où ce sentimentinst inct i f de la durée ouverte à l 'avenir . Pour el le,en el le, le passé n'est jamais abol i , le futur n 'estjamais lointain, tout t ient dans un présent qui sereprend et se renouvelle. Voilà encore bien desdéf is pour les malheureux traducteurs !

J. GEr-rrurnu exprime très bien cela en parlantd'images et de figures dans les psaumes : " Tout

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bouge dans les psaumes. Point de termes abstraitsni de mots morts. Chaque nom est figure, chaquesubstantif est image, chaque verbe est mouve-ment e t dép lacement . ( . . . ) Tantô t des jeuxd' images f igurent à mes yeux l ' invis ible : l 'act ionmême de Dieu, ses interventions en ce monde quel 'on appel le ses jugements :

" Tu as ôté le péché de ton peuple,tu as couvert toute sa faute ;tu as mis fin à toutes tes colères,tu es revenu de ta grande fureur. " (Ps 85,3-a)

" Tantôt les réal i tés les plus int imes, la ren-contre, la réconciliation, les noces de Dieu et deI 'humanité, l ' incarnat ion même seront suggéréespar des gestes de vie et de tendresse :

" Amour et vérité se rencontrent,justice et paix s'embrassent :la vérité germera de la terreet du ciel se penchera la justice. " (Ps 85,1 1-12)

" Le psaume ne nous offre pas des conceptsmais des figures de la relation entre Dieu et leshommes. Si nous voulons bien emprunter son che-min - et non celui de notre raisonnement propre- i l faut nous laisser guider par le déf i lement desimages qui sous-tendent chaque mot, nous laisserprendre à la suggestion du geste évoqué :

" J'enfonce dans la vase du gouffre,rien qui me retienne ;je descends dans l'abîme des eaux,le flot m'engloutit...

Tire-moide la boue...Que /es flots ne me submergent pas ! "(Ps 69,15-16)

" Ce que sont pour moi la vase et la boue, lesflots, le gouffre et l 'abîme, sera découvert par mesrépulsions, mes peurs, mes remords, mes espoirs.Et le salut demandé sera ce que désire mon cæur.l l est vrai que, traduits en français, bien des motsdes psaumes se présentent comme abstraits : véri-té, foi, loi, justice, jugement, esprit, gloire, etc. (...)Mais leur étymologie nous apprend leur valeurconcrète. En hébreu, la vérité (dont la racine estcel le du mot Amen) est sol ide comme un pieuenfoncé en terre, inébranlable comme une mon-tagne ; la foi s 'appuie sol idement sur quelqu'un def iable ; la gloire pèse lourd ; la loi montre lesmæurs de Dieu envers l'homme ; ses jugementssont ses interventions dans notre histoire ; l 'espritest le souffle, etc. (...)

" On s'habituera ainsi au jeu des f igures quejoue le psaume. On part en général des compo-santes du corps humain : les pieds, les reins, lecæur, la bouche, les yeux, les mains ; ce corps estsitué dans la nature, qui offre un chemin tortueuxou une route droi te, un sent iment de surface oude profondeur, des jours et des nuits, du mouvante t de I ' immuab le ; on y rencont re d 'au t reshommes, des bons et des méchants, des puissantset des faibles : tout l 'uniyers où se joue ma desti-nêe. " (Traité de la psalmodie, p.15-16).

La symbolique du PsautierComme dans tout langage poét ique, l 'é lément

symbol ique a une grande importance dans le lan-gage des psaumes. Les mots et les réal i tés dechaque jour sont ut i l isées pour suggérer aussi plusqu'eux-mêmes. On a surtout remarqué jusqu' ic i

que cette réalité symbolique reposait sur des don-nées a nthro po I og i ques u niversel les,sur l ' imaginai-re qui informe tout homme. Toutes les étuoesrécentes s'appuient sur les ouvrages de G. Dunnruo(Les structures anthropologiques de l'imaginaire,

1 1

Page 12: Cahiers Evangile 92

t:Bordas, 1969) quia cherché à décrire les symboleset plus encore à retrouver leurs groupementsspontanés selon " les gestes du corps ".

L. MoNr-ouaou (L' imaginaire des psalmistes.Psaumes et symboles, Lect io Divina 101, Cerf ,1980) pense ce système bien adapté au Psaut ier.l l résume ainsi son propos : " Source du symbo-l isme qui i l lumine le texte psalmique, source pro-fonde et cachée, le corps est bien le point der e p è r e p r i m o r d i a l à p a r t i r d u q u e l I ' h o m m econst ru i t sa représenta t ion du monde, de lasociété.. . de Dieu même. " Et i l conclut par cettebe l le fo rmule : " Ce symbol isme qu i v ien t ducorps | " (p.13a).

Concrètement L. MoNroueou a réduit les caté-gories de G. Dunnno à trois att i tudes anthropolo-giques fondamentales : debout, assis, en marche.L'homme debout apparaît face à son univers,échappant au péri l en se redressant. Lui corres-p o n d e n t l e s s y m b o l e s d e l a m o n t a g n e , d eI 'o iseau e t de la lumière , du so le i l e t du Très-Haut. . . ; cet homme se sépare aussi : ce qui cor-respond à la transcendance, la puri f icat ion, lejugement, la vengeance.. . L 'homme assrs est celuiqu i accue i l le dans l ' i n t im i té e t la quête du repos .Les symboles caractér ist iques sont ceux de la mai-son, de l 'espace sacré, du refuge.. . mais aussi del 'épouse-mère, de la coupe et de la nourr i ture.. .L'homme en marche est celui qui s'avance et ser isque. Les symboles assoc iés se ra t tachent àI'orientation vers un but mais aussi à la maîtrisedu devenir avec ce qu'el le comporte de progrèset de fécondité. . .

Cette approche anthropolog ique et universel leest sans doute importante, mais lorsqu'il s'agit despsaumes i l faut certainement prendre acte queieur symbol ique est surtout une symbol iquebibl ique fondée sur I ' imaginaire d'un peuple mar-qué par une histoire singul ière. Cet imaginaire estenraciné dans la cul ture du Proche Orient ancien,plus encore il est façonné par les expériences his-toriques d'lsraë1. Nous aurons l'ocasion de le redireen parlant des psaumes comme " échos et résuméde la B ib le " (p . 42) . Prenons ic i seu lementquelques exemples :

lhomme dans les psaumes est d'abord " imageet ressemblance " de Dieu, sujet de la promesse etde l 'Al l iance ; i l est le péler in de l 'Exode et duTemple. ll se résume en David, dans le prophète etdans le sage; i l sera un jour le f i ls de l 'homme, Jésus'

La montagne des psaumes est cel le du Sinaiavant d'être cel le du Tabor et cel le de Jérusalem(cf . l 'étude du Ps 68, p. 42) ; elle symbolise I'habi-tat ion de Dieu, la célébrat ion de ses victoires et ledon de sa Loi. El le sera un jour la montagne del 'enseignement du Christ , cel le de sa mort et cel ledes apparitions du Ressuscité.

Les eaux sont celles de I'océan primordial sur quiplanait l 'Espri t , cel les du déluge, cel le de la Merdes roseaux, et du Jourdain ; el les disent ainsi lacréat ion, la l ibérat ion et le passage avant de direle baptême et la vie redonnée.

lJimaginaire des psaumes est un imaginaire uni-verse/ mais il est d'abord et surtout un imaginairebiblique, façonné par l 'expérience d'lsraë1.

1 2

Page 13: Cahiers Evangile 92

DAVID ET LES PSAUMES DANS LA TRADITION JUIVE" De même que Moïse a donné cinq livres de lois

à Israël, de même David a donné cinq livres depsaumes à Israël (et le texte énumère les cinq livresen citant le premier verset de chaque psatme detête)...Bnfin, de même que Moïse bénit Israël avecles mots : 'Béni sois-tu, IsraëI...' (Dt 33,29), demême David bénit Israël avec ces mots : 'Béni soitl'homme...' (Ps 1,2). " (Midrash Tehillim).

Résumons ici la tradition juive (d'après I'intro-duction d'une édition récente de Tehilim, par A.C.Feuen. Colbo. 1990).

Le monde a été créé pour faire monter un chantde joie pour Dieu son créareur (cf. Ps 19,2). Dieuavait nommé Adam maître de chæur de I'universentier, mais Adam se laissa aller au péché et entraî-na I'univers dans sa chute. Dans son repentir, il par-courut I 'Histoire à venir : i l v cherchait l 'âmeunique qui rendrait au monde sa ôapacité de chanterla gloire de Dieu. Il découvrit David.

Il fallut attendre 350 ans, que le prophète Samuelfut envoyé par Dieu pour oindre David. Celui-cin'était pas un homme parfait, mais il était toujoursà l'écoute de la Parole du Seigneur. Le Psautièr estun véritablejournal de guene, rapportant le combatentre le bien et le mal qui se déchaînait en David elautour de lui. Et c'est à cause de cela qu'il est lechant retrouvé de I'humanité

N'importe qui peut célébrer Dieu lorsqu'i lcontemple un miracle ; mais seul un homme excep-tionnel peut continuer à chanter lorsqu'il est écraiéet broyé. Dans I'ensemble des Ecritures, on ne trou-ve personne qui ait subi autant de malheurs queDavid ; et pourtant chaque épreuve faisaitjaillir le

chant de ses lèvres. Plus on pince vigoureusementles cordes de la harpe, plus elle rend un son fort, demême, plus Dieu pinçait le cæur de David par lasouffrance et I'affliction, plus ses chants étaientforts et beaux. C'est là le merveilleux secret despsaumes.

Une des qualités propres de David est d'avoir sureconnaître son péché. Lui seul a su provoquer parson repentir une renaissance spirituelle dans toutIsraëI. Beaucoup d'hommes ont composé de mer-veilleux hymnes pour Dieu, mais leùrs chants selimitent à leur expérience personnelle. David, lui, atranscendé ces étroites limites. Chaque nuance del'émotion humaine s'exprime dans les psaumes.David souhaitait que chacun - y compris parmi lesnations - puisse y trouver une consonance avec lesévénements de sa vie. Ainsi a-t-il donné à I'universentier les chants qui réouvraient le chemin de lalouange du Créateur.

Selon la tradition les trois lettres du nom d'Adam(ADM) résument cette histoire ; elles sont les initiales d'Adam, de David et du Mashiah,le Messie Ice qu'Adam avait commencé, David l'a continué etle Messie I 'accomplira. Avec le Messie, aprèsDavid, la mélodie universelle d'Adam s'élèvera ànouveau en plénitude pour ne plus êtrejamais inter-rompue.

Osons prolonger cette tradition : lorsque Jésus estreconnu comme Messie, fils de David et nouvelAdam, il accomplit I'attente d'IsraëI, il renouvellela création et porte à sa perfection le chant despsaumes, le chant retrouvé de toute I'humanité.

Page 14: Cahiers Evangile 92

4.

MAIS(ils sont) comme la Paille

5 .ne se lèveront Pas

Le Seigneur connaît

mais

balayée par le vent :

au jugement,

au rassemblement

Ie CHEMIN

le cnsltrN

Ithommedes méchantsdes pécheursceux qui ricanent

jour et nuit!

ll est

les méchants

ni les pécheursdes justes.

des justes,des méchants

se perdra

qulqui

LE PSAUME 1

Heureux (est)n'entre pas au conseilne suit pas le CHEMINne siège pas avec

MAISse plaît dans la loi du Seigneur

et murrnure sa loi

comrne un arbre

2.

planté près d'un ruisseauqui donne du fruit en son temps'et jamais son feuillage ne meurt!

tout ce qu'il entrePrend réussira,

tel n'est pas le sort des méchants'

6.

Page 15: Cahiers Evangile 92

Cinq exemples de lecture

LE PSAUME 1

Parcourons le Psaume 1 ci-contre, crayons decouleurs à la main, et soul ignons les mots quireviennent dans le texte : ' les rnéchants' (1.4.5.6),'le cHe vrru' (1.6.6), ' les pécheurs' (1.5), 'mnrs' (2,4.6),'la loi' (2.2),'comme' (3.4), ' les

iustes' (5.6).

Essayons de mettre un peu d'ordre : aux v.1 et6 (début et f in du.psaume) le mot 'cururru' estrepris trois fois ; il nôus offre un type clair d'inclu-sion. Au v.1, il s'agit du 'cueunr des pécheurs', misen parallèle avec le'conseil des rnéchants'; au v.6,il s'agit d'une opposition entre 'cHEMrN desiustes'et 'cHEMrN des méchants'. Et si le v.1 mettait engarde déjà contre ce 'CHEMrN des pécheurs' , laconclusion ne laisse plus de doute : le choix est faitentre les justes qui font leur cHrvrru sous le regarddu Seigneur et les méchanfs qui vont à leur perte.

Mais, on aura noté que le mot-clé : 'cHEMrN',

repris en inclusion, s'imbrique avec les mots-séries :'méchants-pécheurs' et ' justes', qui jouent enopposition. ll faut inclure dans cette thématiquel 'expression : 'ceux qui r icanent ' , mais aussi' l 'homme' (v.1) qui est c lairement du côté des'justes' et sa reprise au v.3 : ' l l est'. D'un bout àI 'autre du psaume, i l s 'agi t bien d'opposer cesdeux types d'humanité.

Les deux comparaisons annoncées par'comme' ,relèvent aussi de cette opposition ; celle-ci est sou-

lignée par les deux conjonctions'mnts'qui structu-rent fortement le texte. Le trois ième 'mais ' denotre texte français (v.6) n'est en hébreu que laconjonction passe-partout avec un sens adversatif;i l n 'a donc pas du tout la même valeur : piège destraduct ions ! Ainsi apparaissent clairement lesparallélismes antithétiques entre les versets 1 et 5,mieux repérables encore en hébreu car les mots'au conseil' (baratsat) et 'au rassemblement' (ba-?dat) se font écho. De même les deux imagesprises s'opposent nettement : ' l 'arbre' et'la paille'.

ConclusionAinsi trouve-t-on au centre du psaume (v.3-4)

I 'opposit ion qui le résume tout ent ier :" Tout ce qu'il (l 'homme juste) entreprend réus-

s i ra,tel n'est pas le sort des méchants " .Elle sera reprise et universalisée dans la conclu-

sion où intervient, comme nous l'avons vu, la rati-f icat ion de ce jugement.

Ainsi, en préface à tout le psautiel nous sontprésentées et la grande opposition qui court à tra-vers tout le livre et tpute l'histoire, et sa solutiondéfinitive, dans la lumière du salut offert par Dieu.Le juste est bienheureux car il est connu de Dieu,le méchant va à sa perte ; le juste tient debout etporte du fruit, le méchant ne saurait tenil i l estbalayé de l 'existence humaine.

1 5

Page 16: Cahiers Evangile 92

I

5. Oui,('ai) toujours

devant

6, Contrece qui est mal

4

AINSI, TU SERAS

7. Voici,

8. Voici,

le

moi.

toi, et toi seul,

tes yeux,

JUSTE

IRRÉPROCHABLE

tu aimes la

tu me fais

3. Aie pitié de moi, mon Dieu, selon taselon ta grande

À

LE PSAUME 51.3-11 (traduction T.O.B.)

fidélité,miséricorde,

EFFACE mes torts.

Lave-moi sans cesseet de mon PECHE.

demafue,

purifïe-moi

reconnais mes torts,

monPÉcnÉ

j'ai rÉcnÉ,

je I'u fait.

QUAND TU PARLERAS,

QUAND TU JUGERAS,

danslafusls,i'ai été enfanté

et dans le PÉCUÉ,conçu des ardeurs de rna mère.

véité

connaîffe la sagesse.

Ote mon PÉCHÉ avec I'hysope,et je rCrai-pur;

lave-moi etje serai blanc,plus que la neige.

devant mes PÉcnÉ|,toutes mes fuute;,

EFFACE-les.

9.

dans les ténèbres,dans ma nuit,

t10l11. Détourne-toi,

Page 17: Cahiers Evangile 92

LE PSAUME 51

La première part ie du psaume 5l développetout le vocabulaire du péché.

La première chose à remarquer est l ' inclusionqui existe entre les deux expressions : 'errncr mestorts' (v.3) et'toutes mes fautes, srrnce-les' (11) quidél imite la première part ie du psaume. On peutremarquer également la correspondance entre lesdeux suppl icat ions'Aie pi t ié de moi ' et 'Détourne-toi' au début des mêmes versets : elle renforceI ' inclusion.

5i I 'on poursuit la quête dans le domaine desverbes, on peut vite repérer des correspondances :'l ave-moi' (4.9),'purif ie-moi' (4) et'ie seni*But' (9),'je reconnais' (5) et 'tu me fais connaître' (8) ; cecidessine déjà une bel le structure concentr ique.

Soul ignons les substant i fs qui se répètent :d'abord'mes torts'(3 et 5), mais surtout 'faute' quirevient t rois fois (4.7 .11) et 'pÉcHÉ' , c inq fois(4.5.7.9.11) plus une fois sous une forme verbale(6). On remarque encore les adverbes : 'voici'(7.8)et 'oui ' (5) qui pourraient se correspondre.

On perçoit sans difficulté les correspondancesdes v.4 et 9 avec trois mots répétés dans un ordredifférent; on peut aussi remarquer la structure desv.5 et 6 avec les parallélismes synonymiques et lesoppositions autour des pronoms personnels, pre-mière personne et deuxième personne (en carac-tères gras dans ces versets) ; on note quelquechose de semblable aux v.7 et 8, paral lél ismessynonymiques (renforcés par les deux " voici ") etopposition du 'moi' et du 'tu'. Ces deux petitesstructures se greffent sur deux phrases qui se cor-respondent:

" Oui, je reconnais mes torts... " (5)" Tu me fais connaître la saqesse... " (8)

Nous avons soustrait à notre texte le v.'10 donton peut constater que le vocabulaire est étrangerà cette première partie du psaume, alors qu'il cor-respond à la seconde (12-19): nous avons ainsiavec ce v.10 rattaché à 12-19 et le v.11 rattaché à3-9, une véritable'agraffe littéraire'entre les deuxparties.

Revenons à cette première partie, nous pouvonsy reconnaître un grand mouvement concentriqueautour des deux derniers stiques du v.6 :

" AtNst, Tu sERAs tusrE eUAND TU zARLERAIIRREPROCHABLE QUAND TU JUGERAS, ,'

ConclusionAu centre, nous avons donc laiustice et leiuge-

ment divins dont la Bible ne cesse de manifester lecaractère eff icace : en jugeant, Dieu just i f ie,donne sa grâce et son pardon au pécheur quil ' implore. C'est ce même Dieu dont on demandaitla fidélité et la miséricorde (3) et dont on nous ditqu ' i l " a ime la vér i té " e t " fa i t connaî t re lasagesse " (8) dans les ténébres du mal. Ainsi , aucæur de cette première partie du psaume, appa-remment dominée par la confession du péché,c'est la victoire de Dieu sur le péché et sur le malquiest mise en exergue, Voi là bien pourquoi cetteconfession du péché débouche sur la louangepour le sa lu t de D ieu , comme le man i fes te laseconde partie tout entière articulée sur les v.14 et1 6 :

" Rends-moi la joie d'être sauvé,et que I'esprit généreux me soutienne ! " (...)" Mon Dieu, Dieu sauveur, libère-moi du sang;que ma langue crie ta fustice ! "

La confession des péchés n'est pas enfermementsur sa misère, elle est chemin de louange vers leDieu qui sauve et qui pardonne : l 'Evangi le ne dirarien d'autre.

1 7

Page 18: Cahiers Evangile 92

r'2.

J .

ÀT .

5 .

6.

7 .

8.

9.

Tu as aimé,tu as fait

tu as ôtétu as couvert toutetu as mis fin àtu es

Fais-nousoublieSeras-tu toujoursmaintiendras-tu

N'est-ce pas

Fais-nous voir,et donne-nous

J'écoute : queCe qu'i l

c'est laqu'i ls ne

toi quiREVIENDRAS nous faire vivre

et qui serasla joie de ton PEUPLE ?

Seigneur, tonton

dira le Seigneur Dieu ?dir,

paix pour son PEUPLE et ses fidèles ;REvIENNENT iamais à leur folie!

LE PSAUME 85

Seigneur, cetteREVENIR les déportés de Jacob ;

le péché de ton PEUPLE,sa faute :

TERRE.

Son salutceux qui le craignent,

et la gloirenotre TERRE.

Amourse renconrent,s'embrassent ;germera de la TERREse penchera la

et notre TERRE

marchera

traceront le chemin.

REVENU

REVENIR,

toutesde

Dieu,

véritépsirvérité

)

Le Seigneurbienfaits,fruit.

devant lui,

tes fureursta grande colère.

notre salut,ton ressentiment contre nous.

irrité contre nous,ta colère d'âge en âge?

amour,salut.

10.

12.

est proche de

habitera

1 1 .

]USTICE ET

et du cielJUSTICE,

I - 1 .

donnera sesdonnera son

14. La JUSrrcE

et ses pas

Page 19: Cahiers Evangile 92

LE PSAUME 85

ll suffit de parcourir rapidement le psaume pourrepérer deux mots qui le traversent et sans douteen donnent la clé : ' rennr' (2.10.12.13) et 'REVENTR'(2.4.5.7.9). On y ajoutera, 'PEIJPL,E' (3.7,9). Onremarquera en f i n l a rep r i se régu l i è re de'Seigneur' (2.8,13), 'Dieu' (5) et 'Seigneur Dieu' (9),avec deux rappels pronominaux'toi qui ' (7).

D'autres mots se retrouvent inégalement grou-pés : 'sa lut ' (5 .8.10) , 'donner ' (8 .13,13) et 'amouf(8, 1 1 ) ;' t usrtcE' (1 1 .1 2.1 4),'co | è re' (4.6),' pdjx' P.1 1)et'vérité'(11.12).

l l faut encore remarquer des groupes de syno-nymes (nous les avons al ignés en colonne lorsquec'était possible); des verbes d'abord : ' tu as ôté',tu as couvert', 'tu as mis fin', 'tu es revenu' (3-4) ;'se rencontrent , s 'embrassent ' (11) , 'marchera ' ,' traceront le chemin' (14), et, en opposit ion cettefois: 'germera, se penchera'(12). Des noms aussi :' fureurs', 'colère' (2 fois), ' ressentiment', ' i rr i té'(4.5,6), 'bienfaits, fruits' (13), et, en opposit ion :'TERRE' et 'ciel ' (12). On peut encore noter deuxexpressions synonymes de' pEr)pLE', ' les déportésde Jacob (2) et 'ceux qui craignent' le Seigneur(10) ; une sér ie de synonymes et antonyme :'péché', ' faute' et ' joie', tous attr ibués au peupled ' ls raë1.

On remarque que le v .2 comprend les t ro isexpressions clés du psaume entier : 'Seigneur','TERRE', 'REVEN|R', et un syno4yme du peuple, 'lesdéportés de Jacob'; ainsi ce verset contient déjàtout le psaume dans son aboutissement (les verbessont tous à l 'accompli).

Les v,3-7 sont pris dans l ' inclusion marquée parles deux expressions : 'le péché de ton PEUPLE' et' la joie de ton PEUPLE'(mot à mot : ' ton peuplese réjouira') ; on y retrouve trois fois 'REVENTR',deux fois pour Dieu et, au centre, pour le peuple ;on a toute la série des mots qui expriment la

'colère' de Dieu et deux fois l ' invocation 'Dieu','toi', en lien avec les deux expressions : 'salut' et' faire vivre' qui sont quasiment synonymes. Lecentre de cette première part ie est de façonsignif icative une prière : 'Fais-nous nevENrR, Dieu,notre salut.. . ' (5)

On hésite pour trouver la conclusion ; en fait, tevocabulaire indique que c'est plutôt le v,9 qui estun oracle en réponse à la prière et où se retrou-vent les mots importants de cette première partie :'Seigneur Dieu','PEUPLÊ', et 'REVENtn'. Mais le v.8reprend cette prière en annonçant la seconde par-tie avec ses mots-clefs : 'Seigneur','amoaltu,'don-ner' et 'Eal_u!', ce dernier mot faisant, avec le nomde Dieu, un l ien entre les deux part ies,

Conclusion

Précisément cette seconde partie reprend enquelque sorte chacun de ces mots pour en appli-quer la grâce à la 'TERRE', Le 'salut ' d'abord, quiest proche d 'un peuple qui cra int Dieu et qu is ' accomp l i ra quand ' l a g lo i re hab i te ra no t reTERRE' (10). U'amoul ensuite, qui se déploie en'vérité', 'Wj-X' el 'Jr.tsncE', pour ensemencer laTERRE, montant d'el le et pourtant venant du ciel(1 1.12). Enf in le'don du Seigneur' qui se manifesteen 'bienfaits' qui font surgir le ' fruit ' attendu decette TERRE sur laquelle on est REVENU après I'exil(1 3) ,

Et dans la conclusion, qui est plutôt une ouver-tu re e t une p romesse , c ' es t l e 'Se igneur ' qu is'annonce et sa miséricordieuse bonté qui ouvrede nouveaux chemins ( '14).

Ainsi, r ien que par le jeu des mots entrelacés,se dit déjà l 'essentiel sur I ' incroyable 'retour' deBabylone et de ce qu' i l signif ie de l ibération àveni r e t de communion avec un Dieu qui a ime etqui donne toujours.

19

Page 20: Cahiers Evangile 92

25.

LE PSAUME LI9.25-32

Mon 4me(est) coLLÉE à

fais-moi vivrela poussière ;

selqn ta parole.

mes Yores: TU me réPondstes commandements.

la voie de tes préceptes,sur tes merveilles.

La tristesse

selon ta parole.

la voie du mensongeta loi.

la voie de la fidélité,tes décisions

tes exigencesSEIGNEUR,

la voie de tes volontés,car TU mets au large

26. J'énumèreapprends-moi

27. Montre-moique je médite

28.m' (àmon âme,)

29,

ARRACHE DES I.ARMES i

Relève-moi

Détourne-moi defais-moi la grâce de

rnon cæur.

30. J'ai choisiJe m'ajuste à

31. Je me tiens cor,r,É à

garde-moi d'êne humilié.

32. Je cours dans

Page 21: Cahiers Evangile 92

LE PSAUME 119,25.32parole' et 'mon âme; ceci nous indique que lestrois versets se répondent dans une progressionthématique :

25 " Mon âme est coLLÉE à la poussière ;fais-moi vivre selon ta parole. "

28 " La tristesse m'(à mon âme) .annacur orsLARMES i

relève-moi selon ta oarole. "

31 " Je me tiens colrÉ à tes exigences;SEIGNEUR, garde-moi d'être humil ié. "

ConclusionAins i ' ce t te s t rophe fa i t passer le psa lmis te

d'une adhésion à la poussière qui s igni f ie humi-l iat ion et écrasement à une autre adhésion, cel lequi uni t sa volonté aux exigences de la Loi du Sei-gneur; et i l n 'est pas étonnant que la pr ière f ina-le soi t de ne plus connaître I 'humil iat ion. Le v.28,au centre, exprime bien l 'angoisse et le désir du'passage'.

La répét i t ion du mot 'voie'(ou 'chemin') n 'estpas sans subt i l i té : i l y a les 'voies' de l 'homme('mes voies') qui sont 'voie de mensonge' ou'voie de f idél i té ' selon le choix de chacun maisnon sans ' la g râce de ta lo i ' (29) ; i l y a les 'vo ies 'du Seigneur : , 'voie de tes préceptes' (27) qui estmontrée et 'voie de tes volontés' (32) qui estchoisie pour la course qui 'met au large le cæur' .l l s ' a g i t b i e n d a n s c e p s a u m e d e q u i t t e r s e spropres voies pour rejoindre cel les de Dieu. Cequi redi t autrement le 'passage' qui est - nousI 'avons vu plus haut - l 'essent iel du sens de cettestrophe.

Reprenons nos crayons et soulignons les motsrépétés :'mon âme' (v.25 et 28 où le mot se cachederrière le pronom 'm" de la traduction du Psau-tier liturgique !) - on peut y joindre peut-être'mon cæur' (32) qui est du même registre -'selonta parole' (25.28), 'mes voies' (26) et ' la voie'(27.29.30.32). D'ailleurs, en hébreu ces v.25-32 (laquatr ième strophe du psaume) commencent touspar la lettre D (daleth) et cinq d'entre eux par lemot voie (derek).

On peut noter les six mots de la loi (outre 'ta

parole') : tous sont précédés du possessif de laseconde personne qui désigne ic i le Seigneur: ' tes

commandements' (26), 'tes préceptes' (27), 'tes

décisions' (30), 'tes exigences' (31), 'tes volontés'(32) ; il faut y joindre : 'sur tes merveilles' (27).Dans le même registre de la seconde personne, ilfaut noter les deux verbes : 'TU me réponds' (26)et'TU me mets au large' (32) auxquels se rapporteaussi le vocatif 'SEIGNEUR' (31). Noter encore lessept impératifs : 'fais-moi vivre' (25), 'apprends-

moi ' (26), 'montre-moi ' (27), ' relève-moi ' (28),'détourne-moi ' (29), ' fa is-moi la grâce (29), 'garde-m o i ' ( 3 1 ) .

Pour les verbes à la première personne, il fautdistinguer les verbes à l'accompli en hébreu (la tra-duction ici nous égare) : ' j 'énumère' (26), ' j 'ai choi-si' (30), ' je m'ajuste' (30), ' je me tiens collé' (31), etles verbes à l' inaccompli : ' je médite' (27), ' je cours'(321.

Les v.25 et 31 emploient tous deux le verbe'cot--l rn à' , les v.25 et 28, les expressions 'selon ta

2 1

Page 22: Cahiers Evangile 92

r

i

LE PSAUME 146

Nous prendrons ici la traduction de la Bible de Jérusalem avec quelques corrections pour traduireles mêmes mots hébreux par les mêmes mots français. Nous avons aussi remplacé 'Yahvé' par'le Seigneur' comme dans la TOB.

1. Alleluia !LOUE,

le2. Je veux LoUER le

Je veux jouer pour mon

3. Ne mettez pas votre foi

il ne peut sauver :

4. il rendil retourne à

et ce jourJàpérissent

5. Heureuxoui a l 'appui duet son espoir dans le

son

6.

,7

mon âme,SEIGNEUR !SEIGNEURDIEU

dans les princes,dans un fils d'homme,

tant que je vis,tant que je dure.

le souffle,sa glaise,

ses pensées.

fait le ciel et la terrela mer, et tout ce qu'ils renferment!

gardelavérité àjamais,

fait justice aux opprimés,donne aux affamés du pain,

délie les enchaînés,rend la vue aux aveugles,redresse les courbés,aime les justes,garde les étrangers.

soutient I'orphelin et la veuve,détourne la voie des impies,

LeLeIeIele

mais

ton

8.

9.

10,

DIEU de Jacob,SEIGNEURDIEU,IL

ILILILSEIGNEURSEIGNEURSEIGNEURSEIGNEURSEIGNEURILILSEIGNEURDIEU,

régneru

ô Sion,

à iamais,

d'âge en âge.

Alleluia !

Page 23: Cahiers Evangile 92

rlFIl l: l

A première lecture, on ne peut qu'être frappépar le nombre de répétitions du nom de Dieu : SEI-GNEUR et DIEU, et aussi par les verbes dont il estle sujet (lL) - en fait des participes dans le textehébreu, Un regard plus atteritif permet de voirque ces noms ne sont pas distribués au hasard ;aux v.1 et 2, on note la succession SEIGNEUR, SEI-GNEUR et DIEU ; au v. 5, DIEU de Jacob (El et nonpas Elohim), SEIGNEUR et DIEU; enfin au v, 10, SEI-GNEUR et DIEU. Incontestablement, voilà déjà unestructure du psaume qui s'impose.

Restent, aux v.5 à 9, la succession de quatre lL,cinq SEIGNEUR et à nouveau deux l l sur laquel leilfaudra revenir. On notera encore quelques motsrépétés : ' louer' (1.2) 'lL fait' (6.7), ' lLgarde' (6.9)et 'â

/'amars' (6.10),

On remarquera la succession des 9 verbes (par-ticipes en hébreu) des v.6-9a et en finale les deuxverbes à l' inaccompli : ' lI soutient'(9b), ' lL détour-ne'(9c) que la traduction ne distingue malheureu-sement pas des participes précédents et auxquelsi l fau t jo indre le ' régnera 'du v .10 qu ies t le mêmeinaccompli en hébreu.

Mais dans ce psaume, ilfaut ne pas négliger nonplus les nombreux synonymes ou les mots appa-rentés. Aux v.2 et 1 0, on a des expressions de duréedeux fois répétées qui soulignent le rapport desdeux versets. Les v,1-2 se structurent naturelle-ment en paral lèles comme invi tat ion à la louange;le v.10 vient en inclusion pour préciser que le Sei-gneur qui est I 'objet de la louange perpétuel lerègne lui aussi à jamais. Les deux 'alleluia' (1.i0)soul ignent encore l ' inclusion, les deux vocat i fs

'mon âme'et 'ô Sion'se répondent: c'est le psal-miste qui est invité à la louange, mais le Seigneursiège au Temple de Jérusalem, lieu de culte pourtous,

Les v.3 et 5 se structurent en parallélismes anti-thétiques. Le v.4 offre trois sticjues parallèles quisoul ignent l ' inani té des hommes ; fussent- i lsprinces, ils sont mortels et même leurs penséespérissent. Ce verset est au centre d'une oppositionnette : les hommes ne méritent pas'notre foi',incapables qu'ils sont de donner le 'salut' (v.3). Teln'est pas le cas du 'SEIGNEUR, DIEU de Jacob', enqui l'on peut trouver'appui' (litt. : secours); ce quirépond au non-salut du v. 3) et mettre 'son espoir'(ce qui répond à l'absence de possibilité de foi duv.3) (v.5).

Les versets 6-9 accumulent les actions du Sei-gneur au profi t de tous les déshérités de sonpeuple, mais le psalmiste semble avoi r voulumettre un certain ordre dans cette litanie. La répé-t i t ion de 'à jamais'aux v.6.10, marque une corres-pondance ; 'lL fait' répété, sert de mot-crochetentre les v.6 et 7 ; la reprise de 'lL garde' (v.5.9)marque aussi une correspondance voulue.

ConclusionSans doute le verset 6 - l 'acte de création de

l'univers joint à la 'garde de la vérité' qui peut êtrele signe même de l 'Al l iance et du salut - est- i l lecentre du psaume. L'énumérat ion des actes deDieu envers ses créatures et ses fidèles suit immé-diatement. La structure quis'impose met parfaite-ment en valeur l 'objet de la louange du psalmisteet du peuple : le Règne de Dieu à Sion. Le SEt-GNEUR DIEU, fait et donne ce qu'aucun homme nepeut donner et faire : la création et le salut.

LE PSAUME 146

23

Page 24: Cahiers Evangile 92

rQUESTIONS

AUTOUR DES PSAUMES

Questions préliminaires

NOMS ET PLACE DU PSAUTIER

L a B i b l e h é b r a ï q u e a p p e l l e c e l i v r e d e 1 5 0psaumes 'Livre des Louanges' (sefer tehill im). Dansles titres des psaumes, le mot tehillah (apparentéà hattetou Yah) n'est pourtant employé qu'une fois(Ps 145), alors que d'autres mots y apparaissentbeaucoup plus souvent : mizmor (psaume), 57 fois,shir (cantique), 30 fois, etc. Ce choix indique sansdoute une volonté dél ibérée de voir dans toutesces pr ières, quel qu'en soi t le contenu, une louan-ge du Seigneur ; le seul fai t que l 'homme se tournevers Dieu est déjà reconnaissance de qui ll est etdonc louange de son Nom. Le v.4 du Psaume 22désigne ainsi Dieu de ce beau nom : " Toi quihabites les louanges d' lsraël " .

La B ib le g recque nomme le l i v re 'Psaumes '

(psalmoi) ou 'Psautier' (psalterion) et les traduc-iions latines et françaises ont repris ces titres. Ellefait ainsi référence à l' instrument à cordes @sallôsignifie : pincer une corde) qui sert à accompagnerle chant. C'est donc plutôt ic i l 'aspect l i turgique,qui a été mis en valeur. 'Psalmos' t raduit sanscioute l'hébreu mizmor (de la racine zamar:laire24

de la musique) et le Talmud lui-même nomme sou-vent les osaumes mizmorot et non tehill im'

Le l ivre des Louanges prend place dans la troi-sième partie de la Bible hébrai'que:les Ecrits, aprèsla Loi et les Prophètes. Avec Job et les Proverbes,i l forme une tr iade dist incte que la tradi t ion mas-sorétique - qui a fixé le texte et ses lois de lectureaux Ve-Vlle s. de notre ère - a dotée d'un systèmespécial de siqnes de ponctuat ion et de psalmodie'L;ordre précis a varié; des sources juives anciennesat tes ten t oue les Psaumes é ta ien t par fo is enseconde position après Ruth, sans doute parce quece dernier l ivre cont ient la généalogie de Davidqui était réputé être I'auteur du Psautier. Dans lesBibles hébraïques imprimées, le Psaut ier est tou-jours en tête des Ecrits, suivi par Job et Proverbes.

La Bible grecque place le l ivre des Psaumes,entre le l ivre de Job et celui des Proverbes, audébut de sa seconde partie qui comporte les Livrespoét iques puis prophét iques, la première étantconsacrée aux Lois et à l'Histoire. Cependant leslistes anciennes et les grands manuscrits des lVe etVe s. présentent une telle diversité dans l'ordre desl ivres - sauf pour le Pentateuque - qu' i l est impos-sible de trancher cette quest ion.

Page 25: Cahiers Evangile 92

LA NUMÉROTATIONDES PSAUMES

La Bible grecque comprend un 151e psaume -on en a retrouvé une version hébraïque à Qumran

- mais pour le reste, elle s'accorde avec la Biblehébraïque sur le contenu et l 'ordre des psaumes.Cependant el le les divise un peu autrement : lesPs 9 et 10 d'une part , 114 et 115 d'autre part , del'hébreu, sont groupés dans le Psautier grec (= p5 9et 1 1 3) ; en revanche les Ps 1 16 et 147 de I'hébreusont divisés en deux dans le grec. Ce qui les décale

LEs PSAUMES EN DEHORS DU PSAUTIER

Les Psaumes ne se trouvent pas seulement ras-semblés dans le Psautier. On peut en rencontrer dis-séminés dans les autres livres bibliques. Ils sontsouvent mis sur les lèvres de personnages impor-tants. Pour les distinguer des Psaumes proprementdits, on a coutume de les appeler : cantiquesbibliques. Deux d'entre eux sont très anciens : laperite Chanson du puits (Nb 21,17-18) et I 'Odetriomphale de Débora (Jg 5,2-31). D'autres sontplus récents : la belle prière d'Anne, la mère deSamuel (1 S 2,1-10), le cantique du roi Ezéchias(Is 38,9-20) et celui attribué par Isare aux gens deJuda (Is 26,1-6).

Parmi les poèmes attribués aux grands person-nages, on peut retenir ceux mis sur les lèvres deMoïse : le cantique de la Mer (Ex 15,1-18) et sesPrières d'adieu (Dt 32 et 33). Ceux attribués àDavid dans les livres de Samuel (2 S 22 = Ps 18 ;23,1-l) ou composés sous sa direction selon le Livredes Chroniques (1 Ch 16,8-36). Il y a encore le can-tique du prophète Jonas (Jon 2) ou ceux de Daniel(Dn 2,20-23 et 3,26-45 en grec), ceux de Judith(Jdt 9 ; l6) et d'Esther (Est 4). Le genre se retrouveencore dans le Nouveau Testament ; on pense biensûr au cantique de Marie (Lc 1,46-55), à ceux deZacharte (Lc 1,68-79) et du vieil lard Siméon(Lc 2,29-32).

Les textes prophétiques sont remplis de poèmesplus ou moins isolés (Is 12,1-6 ; 59 ; Mi 1,18-20 ;

Na 1,2-8 ; Ha 3). Les livres sapientiaux, Job et leSiracide surtout, contiennent aussi de véritablespsaumes (Jb 5,9-16 ;9,2-12 :26,5-14; etc. ; Si 36,1-22 ; 5l ,1-12, sans parler du psaume ajouté en 5 I , l2et cité par la TOB). On peut signaler enfin les can-tiques des différents acteurs du livre de Tobit (3,2-6 .11 -15 ;8 ,5 -1 .15 -17 ; l l , l 4 ; 13 ,1 -15 ) .

Il est sans doute intéressant de relever ici que laBible grecque contieni après le Psautier un recueilappelé Odes qui regroupe précisément 1 3 cantiquesliturgiques ; tous viennent de l'Ancien ou du Nou-veau Testament (sauf la Prière de Manassé qui estun apocryphe) et reprennent une partie des textesque nous venons de signaler.

La Bible grecque contient un autre livre apo-cryphe r les Psaumes de Salomon. A vrai dire celivre n'a été joint à la Septante sans doute quedepuis le Xe s. et seulement dans quelques régions.Il contient 18 psaumes. On admet aujourd'hui qu'ilsont été rédigés en hébreu et traduits en grec enmilieu juif avant la diffusion du christianisme. Onpeut penser qu'ils viennent de milieux pharisiens :ces psaumes font une place importante à la résurrec-tion des morts et aussi au messianisme davidique(surtout les Ps XVII et XVIII dont on trouvera la tra-duction dans le Supplément au Cahier Evangile,n" 32, pp. 84-90). L ensemble est édité et traduitdans J. Vrrsau, Les Psaumes de Salomon, Letouzeyet Ané, 191 1 .

25

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t'presque tous d'une unité. Voici un tableau de cor-resoonoance :

GREC ET LATIN

1 à 89

1 0 à 1 1 21 1 3

1 1 4 e t 1 1 51 1 6 à 1 4 5

Nos Bibles suivent la numérotat ion de I 'hébreu(avec entre parenthèses celle du grec), tandis quele Psautier liturgique, comme tous les livres deprière de l 'égl ise cathol ique, sui t la numérotat iondu grec (avec entre parenthèses celle de I'hébreu).Dans ce Cah ier , nous donnons un iquement lanumérotat ion hébraToue.

147148 à 150

= 1 46 et147= 149 à 150

N E D N E U

1 à 89 e t 101 1 à 1 1 31 1 4 e t 1 1 5116't17 à 146

dans les grottes de Qumran (surtout les grottes 4et 11). C'est le l ivre bibl ique le plus représenté. Acause de sa longueur et de son importance, unrouleau de la grotte 11 méri te une attent ion spé-ciale (11QPsa). l l cont ient 41 psaumes, entre les Ps101 et 1 50, auxquels sont joints 2 Sam 23,1-7 , Si51,13-30 et quatre psaumes non-canoniques (dontle Ps 151 de la Bible grecque) et plusieurs piècesnon-bibl iques. L ordre des psaumes n'est pas celuidu TM; par contre, du point de vue du texte i l y aident i té substant iel le : les var iantes les plus nom-breuses sont simplement orthographiques. On adécouvert, près de la mer Morte, d'autres frag-ments de psaumes : au sud d'Ein Gedi (Ps 15 et 16)et à Massada (Ps 81 à 85 et 150); i ls sont à peineplus tardi fs que ceux de Qumran ; les textes deM a s s a d a s o n t i d e n t i q u e s a u T M j u s q u e d a n sl 'orthographe. Tout ceci témoigne de la profondef idél i té de la tradi t ion manuscri te.

LES VERSTONS GRECQUES

La traduction grecque du texte hébreu a étéentreprise pour la communauté juive d'Alexan-dr ie, sans doute aux alentours du l l " s. avant J.C.

Le texte

LE TEXTE HÉBREU

Comme pour le reste de la Bible, le texte hébreuimprimé des psaumes est le texte dit massorétique(TM), c 'est-à-dire le texte consonnant ique tradi-t ionnel lement transmis et mis en forme par lesrnassorètes ('traditionistes') aux Ve-Vlle siècles denotre ère, selon les règles de la lecture et de lapsalmodie synagogale. Le manuscri t de base de laBible de Stuttgart - l 'édi t ion cr i t ique communé-ment utilisée - est le Codex de Leningrad qui datede 1008. LUniversi té hébraïoue de Jérusalem acommencé une éd i t ion c r i t ique sur la base duCodex d'Alep qui date du début du X" s. mais estd e l a m ê m e t r a d i t i o n t e x t u e l l e ( B e n A s h e r ) .Contrairement à ce que les exégètes croyaientvolont iers jusque vers 1950, ce texte, même s' i ln 'est pas exempt de fautes, est dans l 'ensembleancien et excel lent et ne doit donc être corr igéqu'avec beaucoup de prudence. Les découvertesde Qumran, qui nous font remonter de neuf centsans dans la tradi t ion textuel le, I 'ont absolumentconf irmé.

On a en effet retrouvé environ 30 textes duPsautier (souvent réduits à quelques fragments)26

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On s'accorde à penser aujourd'hui qu'elle a étéréalisée par un unique traducteur sur un textehébreu très légèrement différent du TM. C'est cetexte, transmis par les grands manuscrits des lVe etV" s., qui a été repris par les églises chrétiennes delangue grecque; de ce fait i l a été peu à peu aban-donné par les communautés juives. l l est doncimpossible de soutenir que le Psautier grec est unPsautier chrétien ; c'est une traduction juive d'untexte hébreu. ll faut signaler ici que les églises delangue syriaque ont réalisé assez tôt une versionfaitè directement sur l'hébreu, la Peshitta. C'est uncas unique, car toutes les autres égl ises chré-tiennes ont traduit le texte grec.

conservé lePsautier Romain, de même la liturgielatine a conservé le Psautier Gallican.

LES TRADUCTIONS FRANçAISES

LES VERSIONS LATINES

Au moment où il a fallu éditer un Psautier pourI'usaqe liturqique, le débat sur le Psautier chrétien(Sept-ante oI texte hébreu) a été relancé ; finale-ment le Psautier, officialisé - sans être imposé -dans tous les textes liturgiques francophones, estune traduction faite sur le texte hébreu, avec unregard sur le texte grec pour interpréter dans unsens traditionnel les passages réputés incompré-hensibles de l'hébreu (Le Psautier, Version æcumé-nique, texte liturgique, Cerf, p.343 et 357-360).

Pour les autres traductions françaises, on peut -de façon très subjective - se contenter de signalerquelques bonnes traductions. La première versionmoderne qui a fait date et référence est celle defa Bible de Jérusalem : le Psaut ier, paru en 1953,était le fruit du travail de J. Tounruav et M. ScHwne'Mis en musique par J. Gettruenu, il devint le texteliturgique de tous ceux qui chantaient les psaumesen fiançais (il est encore utilisé à Taizé).

En 1956 paraissaient les Psaumes, traduits etprésentés par A. CnounnQut (aux P.U.F.); traductionfoétique remarquable précédée d'une préface quiieste importante. Uauteur a souvent repr is etmodifié tette traduction, mais c'est sans doute lapremière qui reste la meilleure ! Les traductionsirarues dans la 2e édition de la Bible de Jérusalembt dans la Traduction æcuménique de la Bible,sont évidemment de très bonne qual i té pour letravail biblique; les notes et les références margi-nales sont des outils orécieux. La traduction de laBible en Français courant, réalisée de façon æcu-ménique, est âccessible à tous et de très belle fac-ture.

La première traduction latine, la Vetus Latina (laViei l le Lat ine) a été réal isée par les chrét iensd'Afrique du Nord dès la fin du ll" siècle. Mais lapremière révision systématique sur le texte de laSeptante est l 'æuvre de St Jérôme, sans doute en383; ce texte est connu sous le nom de PsautierRomain. Mais 5t Jérôme reprit son travail en Pales-tine, après 387, pour faire une nouvelle révision dela Vieille Latine à partir des Hexaples d'Origène ;c'est le Psautier Gallican (car d'abord utilisé enGaule) qui est entré dans la Vulgate et est resté lePsautier de la liturgie latine.

5t Jérôme fera finalement, entre 390 et 405 àBethléem, une troisième traduction latine de toutl'A.T. à partir du texte hébreu cette fois. Pour lePsautier, ce Psalterium juxta Hebraeos ne supplan-têra pas le texte précédent de Jérôme ; la raisonla p lus p rob lab le en es t le conserva t ismeliturgique : comme les basiliques de Rome avaient

27

Page 28: Cahiers Evangile 92

La composition du psautier

LES CrNQ LTVRES

Dans son état actuel, le psaut ier hébreu est div i-sé en cinq l ivres ; cette répart i t ion date au moinsdu l le s. av. J.C. puisque le Psaut ier grec la connaît .Les cinq l ivres comprennent les Ps 1-41 ; 42-72 ;73-89; 90-106 ; 107-150. Chaque l ivre se termine parune doxologie; les quatre premières se présententcomme des bénédict ions juives classiques ; la pre-mière par exemple :

" Béni soit le Seigneu4 Dieu d'lsraë\,depuis toujours et pour toujours ! Amen !Amen ! " Psa1,14)

La f inale du psaume 150 se présente tout autre-ment. On peut dès lors se demander si la f in ducinquième l ivre ne serai t oas au Ps 145 :

" Que ma bouche proclame les louanges du Sei-gneur !Son nom très saint, que toute chair le bénrssetoujours et à jamais ! "

Ainsi les Ps '146-150 formeraient une f inale mar-quée par l 'Al le luia. On peut aussi penser que lePs 150, pr is comme un tout, const i tue la louangef inale du cinouième l ivre et de tout le Psaut ier.Cette répart i t ion en cinq l ivres fai t évidemmentpenser aux cinq l ivres de la Loi de Moise;ceci estpeut-être intentionnel mais toutes les tentativespour rapprocher chaque l ivre du Psaut ier d 'unl ivre du Pentateuoue n'ont about i ou'à des l iensa rt i f ic iels.

LES RECUEILS PLUS ANCIENS

La répar t i t ion en c inq l i v res a tou te chanced'être secondaire ; i l est donc plus important pour28

r

comprendre la composit ion du Psaut ier de repérerdes col lect ions part iel les, plus anciennes.

Recueils "Yahviste" et "Elohiste"

On remarque que les Ps 14 et 53 sont à peu prèsident iques mais di f fèrent par les noms divins : lep r e m i e r u t i l i s e l e t é t r a g r a m m e Y H W H , e t l esecond Elohim. Ce qui conduit à s 'apercevoir qu' i lexiste une première col lect ion de psaumes quiemploient habituel lement YHWH, les Ps 3-40, etune seconde qui pr iv i légie Elohim, les Ps 42-83. l lfaut ajouter que les Ps 84 à 89 emploient eux aussiYHWH de façon dominante. Par contre les Ps 90 à150 mêlent les deux noms sans ordre apparent.

D'autres collections

l l existe d'autres sér ies de psaumes regroupéspar thèmes. Ainsi les Cant iques des montées(Ps 120 à 134) d'ai l leurs ident i f iés par leurs t i t res,les Psaumes du Règne (Ps 93-100) et les trois Hal/e/( P s 1 1 3 à 1 1 8 ; P s 1 3 6 ; P s 1 4 6 à 1 5 0 ) .

. . . . . . . . , . . , , i t

LES TITRES DES PSAUMES","r].n',

o. ;";;r;; ;r;-;;;.; ;;;;;.;-aujourd'hui, el les sont comprises dans la numéro-tation des versets - mais trente ouatre d'entre euxen sont déoourvus. Ces titres sont sans doute assezanciens puisque les traducteurs grecs les connais-saient mais souvent n'en percevaient déjà plus lesens exact. A la lumière de ces t i t res ou suscr ip-t ions, on peut découvrir t rois types de regroupe-ment des psaumes en fonct ion des personnagesl i turgiques auxquels i ls sont rat tachés.

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Les Psaumes de DavidOn remarque que 73 psaumes portent le nom

de David. l l s 'agi t d 'abord des Ps 3 à 41, ce quirecouvre la col lect ion 'yahviste' . Mais dans laseconde col lect ion di te 'é lohiste' , on retrouveauss i un groupe de psaumes ra t tachés pourl'essentiel à David (Ps 51 à 72). Uensemble se ter-mine par la suscr ipt ion : " Fin des pr ières de David,fils de Jessé " (72,20) - alors même que ce psau-me 72 est attribué dans son titre à Salomon ! Onretrouve encore quelques psaumes " de David "dans le cinquième l ivre du psaut ier (Ps 108 à 110et 138 à 145).

Les Psaumes d'Asaph, des fi lsde Coré

D'autres ensembles sont rattachés à des chefs deconfréries de chantres du Temple. C'est le cas pourAsaph (1 Ch 6,24) dont Esd 2,41 et Ne 7,44 signa-lent ' les f i ls ' , revenus d'exi l au nombre de 128 ou'148; les Ps 50 et 73 à 83 lui sont attribués. C'est lecas aussi pour les' f i ls de Coré'dont les Chroniques(1 Ch 9,19) nous disent qu' i ls servaient le Templeà l'époque de David ; les Ps 42 à 49,84-85 et 87-88leur sont rattachés. On peut noter que ces deuxcol lect ions ont chacune douze psaumes.

l l es t d i f f i c i le de d i re comment ces d iversgroupes ont été rassemblés et si une logique quel-conque a présidé à leur regroupement f inal telqu'il apparaît dans notre Psautier. A posteriori, onpeut toujours reconstruire un schéma logique (parexemple celui de L. Mor,rlousou dans les Psaumeset /es autres écrits, p.18-20) mais ces reconstruc-tions, presque aussi diverses que les lntroductionsau Psautier, ne reflètent sans doute pas beaucoupplus que les convictions de leurs auteurs ! Nousaurons cependant I'occasion d'y revenir à proposde la dominante royale du contenu du Psautier etde recherches récentes (cf p. 38-39).

LES PSAUjll$f I jilffi irtlwilt,rrllrlril,r,.,lri'

MES ET LA LITURGIE

En tout cas le lieu dernier de ces regroupementsa été la liturgie du Temple de Jérusalem. Les titrescontiennent en effet des indications nombreusespour I 'exécut ion musicale - même si plusieursd'entre elles restent énigmatiques (Ps 4 ; 6 ; 54 ;5 5 ; 6 1 ; 6 7 ; 7 6 ; e t c . ) . l l s c o n t i e n n e n t a u s s iquelques indicat ions l i turgiques (Ps 30 : " Pour laDédicace " | 92: " Pour le jour du Sabbat " ; etc,) .Même si les psaumes ne sont pas pour l'essentield 'or igine l i turgique, i ls ont tous été repris au ser-vice de la l i turgie du second Temple.

L'attribution du psautier à David

l l y a dans le texte hébreu des psaumes, nousI'avons déjà dit, 73 pièces qui portent la mention" Ie-David " (â ou de David). l l est acquisaujourd'hui que cette mention désigne l 'at tr ibu-t ion à un ensemble l i t téraire, ic ià un recuei ldavi-dique, sans que cela impl ique l ' idée d'auteur ( laBible grecque traduit par un dat i f et non un géni-

tif). Pourtant David occupe une place à part parmiles personnages bibl iques qui sont associés auxpsaumes et la tradition, tant juive que chrétienne,f inira par mettre I 'ensemble du Livre sous sonpatronage. Ce fait trouve sans doute sa sourcedans les figures de David décrites dans les textesbibl iques.

29

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f '

*mffi),**Le texte le plus ancien à citer ici est une diatribe

d'Amos contre les chefs de Samarie, David y estpr is comme modèle des chanteurs, mais la compa-raison n'est pas flatteuse : " Allongés sur des litsd'ivoire, vautrés sur leurs divans, ils se régalent dejeunes béliers et de veaux choisis dans les étables ;ils improvisent au son de la harpe, chantantcomme David leurs propres cadences. " (Am 6,4-5)

1 S 16,14-23le présente comme un " bon musi-cien " dans un contexte où la musique joue un rôlemagique et guérisseur (cf . 2 R 3,15), en l ien avecles confréries de prophètes. On retrouve encoreDavid dans ce rôle auprès de Saûl (1 5 18,10; 19,9).Deux textes du second livre de Samuel nous mon-trent David " faisant une complainte " sur Saûl etJonathan (1,17-27) ou surAvnel le chef de l'arméed'lsraël (3,33-34). Selon Jr 9,19 (cf. Ez 19,14 ; 32,16 ;2 Ch 35,25), la complainte est un art musical quis'enseigne et a sa place dans le répertoire classiqued'lsraël ; mais à cette époque - pendant et aprèsl 'Exi l - c 'est un art de femmes.. . Mais i l y a certai-nement eu un usage prophét ique ancien. l l fautencore noter le texte de 2 5 6, où David participeactivement à la liturgie du transfert de l'arche versJérusalem et 2 S 23 où David est présenté commecompositeur devant le Seigneur (sans doute untexte de rédaction tardive).

DAVID ORGANISATEURDU CHANT LITURGIQUE

C'est après l'Exil que s'affirme un autre rôle duroi David, celui d'organisateur du chant liturgique.La mise en place des chantres-lévites lui est claire-ment attr ibuée (1 Ch 15, '16) : i l leur conf ie le soinde composer et d'exécuter psaumes et hymnes,dont plusieurs sont explicitement cités (1 Ch 16,4-30

36). On peut signâler ce passage du livre d'Esdras :" Alors les bâtisseurs posèrent les fondations duT e m p l e d u S e i g n e u l t a n d i s q u ' o n p l a ç a i t l e sprêtres, en costume, avec les trompettes, ainsi queles lévi tes f i ls d 'Asaph avec les cymbales, pourqu' i ls louent le Seigneur d'après les ordonnancesde David, roi d ' lsraë1. Dans la louange et I 'act ionde grâce envers le Seigneur, i ls se répondaient :Car il est bon, car sa fidélité dure touiours pourIsraël " (Esd 3,10-11). Ainsi voi t-on clairement, auf i l des temps, la tradi t ion s 'enr ichir , s 'ampl i f ier etse préciser sur la base, sans aucun doute, d'une tra-di t ion histor ique ancienne l iée aux mi l ieux pro-phét iques.

LES PSAUMESATTRIBUÉS À ORVIO

C'est ainsi , par ampl i f icat ion successive, qu'onen vint à mettre sous le patronage de David 73psaumes (la Bible grecque en connaît douze deplus) et à rattacher à diverses situations de sa viela compos i t ion de 13 d 'en t re eux (3 ; 7 ;18 ;34 ;5 1 ; 5 2 ; 5 4 ; 5 6 ; 5 7 ; 5 9 ; 6 0 ; 6 3 ; 1 4 2 ) .

Le second livre des Maccabées parle de " livresde David " : " Dans ces écrits et dans les mémoiresde Néhémie, i l étai t raconté . . . que Néhémie, fon-dant une bibliothèque, y réunit les livres concer-nant les rois et les prophètes, ceux de David et delettres de rois au sujet des offrandes. " (2 M 2,13).On peut interpréter cette notat ion de diversemanière, mais i l est plausible qu' i l s 'agisse du Psau-tier puisque c'est le seul livre que l'on rattache para i l leurs à Dav id .

Un texte de Qumran, du '1", s. av. J.C., indique :" Et David, le fils de Jessé, écrivit 3.600 psaumes(tehill im) et 364 cantiques (shirim) pour chanterdevant l 'autel lors de l'holocauste du sacrifice per-pétuel quot idien, un pour chacun des jours de

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l 'année; 52 cantiques pour le sacrifice qorban desSabbats ; 30 pour les sacrifices qorban des Nou-vel les Lunes, pour les assemblées solennel les etpour le jour de Kippur ; tous les cant iques qu' i lécrivit étaient au nombre de 446, et les cantiquespour faire de la musique pour les possédés aunombre de 4 ; le total étai t de 4.050." (11QPsa,27,4-5 .9-10) . Une te l le fo rmule témoigne dumême procédé midrashique qui fai t at tr ibuer àSalomon tout ce qu' i l y a de sagesse en lsraël(1 R s ,12-14) .

LE TÉMOIGNAGEDU NOUVEAU TESTAMENT

Le Nouveau Testament cite abondamment lespsaumes (environ un tiers de ses citations expli-cites de l'A.T.) et lui aussi les attribue toujours - s'illes attribue - à David. Ainsi dans une discussionavec les Pharis iens, Jésus ci te le Ps 110 en préci-

sant : " David lui-même inspiré par I'Esprit-Saint,a di t : Le Seigneur a di t à mon Seigneur : Siège àma droite... ", et son argumentation s'appuie surcette paternité : " David lui-même l'appelle Sei-gneur; alors de quel le façon est- i l son f i ls ? "(Mc 12,36-37 et par.). Dans les discours des Actesattr ibués à Pierre, les Ps 109 (Ac 1,16), 16 et 1 10(Ac 2,25-34) sont eux aussi donnés comme écritspar David. De même les chrétiens de Jérusalemplacent le Ps 2 sur les lèvres du roi (Ac 4,25-26).Paul donne également le Ps 32 comme parole deDav id (Ro 4 ,6-8) e t encore le Ps 69 (Ro 11 ,9) ;l 'auteur de I 'Epitre aux Hébreux fai t de mêmepour le Ps 95 (Hb 4,7). Dans plusieurs de ces cas,l 'argumentat ion des textes impl ique que Davidsoit bien I 'auteur du psaume ci té.

La tradition chrétienne des Pères a largementrepris cette attribution collective, même si certains(Hippolyte, Origène, Athanase, Hi laire, Jérôme,entre autres) ont reconnu que David n'était pasl'unique auteur du Psautier.

LE DÉBAT MODERNE

Bon nombre d'auteurs, surtout catholiques, ontinsisté sur le caractère tardif des psaumes dont ilssituent la rédaction au retour de I'exil (fin du Vl" s.)et parfois même à la période maccabéenne (lle s.)." On a vu que ces prières psalmiques n'étaient pasun fai t isolé, mais qu'el les faisaient part ie d'unensemble de textes de même époque : Malachie,Jonas, Job, Abdias, Joël, les additions post-exi-liques aux recueils prophétiques d'/sai'e, de Jéré-

3 1

La datation des Psaumes

Aussi longtemps que l'attribution du Psautier àDavid était comprise dans un sens historique, laquestion de l'origine et de la date des psaumes nepouvait pas se poser. Pourtant dès les premierssiècles, des commentateurs, tant juifs que chré-t iens , on t admis que Dav id n 'ava i t composéq u ' u n e p a r t i e d e s p s a u m e s e t q u e p l u s i e u r sl'avaient été par d'autres personnages bibliques :mais là encore, la question de la datation étaitrésolue avant d'être posée. C'est donc seulementà l 'époque moderne que la cr i t ique bibl ique s'estinterrogée sur la date et l 'origine des psaumes.

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rnie et d'Ezéchiel, deZacharie. Elles rejoignent lesécrits d'inspiration deutéronomique et de la tradi-tion sacerdotale. " (R.J. Tounruay, Voir et entendreDieu avec les Psaumes, coll. Cahiers de la R.B. 24,Gaba lda ,1988, p .184) .

Mais beaucoup d'autres exégètes, surtout al le-mands (H. Gurureç A. Wersen, H.J. Knnus) ou scan-dinaves (S. Mowrrucrrl) sont plus confiants dansl 'at tr ibut ion de nombre de psaumes à l 'époquepré-exi l ique et royale, en part icul ier des psaumesr o y a u x ( 2 ; 1 8 ; 4 5 ; 7 2 ; 8 9 ; 1 1 0 ; 1 3 2 ) . L e b i l a nde ces propositions est finalement assez caricatu-ral : le Ps 68 par exemple est daté par les uns dela période des Juges et par d'autres de l 'époquemaccabéenne; le Ps 29 est d 'or igine cananéennep o u r l e s u n s e t d ' o r i g i n e p o s t - e x i l i q u e p o u rd'autres.. . On peut légi t imement se demander sila quest ion n'est pas tout s implement mal poséeet si ce débat n'est pas d'abord un faux problè-me.

COMPOSITION ET RELECTURESl W ' l b $ i " 4 * l l . À l -

On peut en effet penser que le Psautier est asseznaturel lement un l ivre contemporain de toutel'histoire d'lsraë|, qu'il a 'vécu' au rythme de cettehistoire, l ivre forgé au cours de dix siècles deprières tant personnel les que communautaires,inlassablement reprises, enrichies, réadaptées. Lemaître-mot pour comprendre les psaumes dansleur fabr icat ion ne serai t- i l pas - plus que pourtout autre l ivre bibl ique - le mot de'relectures' ?Cette notion-clef de la compréhension des Ecri-tures n'est pas nouvelle ; elle a été explicitée defaçon géniale par A. Geuru, professeur à Lyon (" Laquest ion des re lec tu res b ib l iques à l ' i n té r ieurd'une tradition vivante " dans Sacra Pagina, t.l,Paris-Gembloux, 1 959, p.303-31 5).

" Qu'est-ce donc qu'une relecture ? Sur un textedéjà existant se greffe l' indication d'une nouvelle32

lecture. Celle-ci est en liaison avec l'évolution spi-r i tuel le de la communauté, est condit ionnée parson progrès, répond à un besoin que Dieu suscite.El le vise - normalement du moins - à approfondirla donnée du texte, à I'achever en tenant comptede ses potentialités premières, à être homogène àson thème de base " (p.304). " L ' intérêt de laméthode des relectures tient à ce qu'elle attirel'attention sur les rapports entre la vie de la com-munauté et le texte qui fixe et entraîne sa marche,sur les rapports entre ce texte et une autor i tédirectr ice, sur la tradi t ion vivante dans laquel le i ls ' insère " (p.314).

PSAUMES DE TOUS LES TEMPS&dsrr?tHfr it&irMrlNNrNlMir$Qrs!SittrrtpiÈ,

Dans le cas des Psaumes, on comprend mieuxencore qu'un poème particulièrement réussi, rédi-gé dans des circonstances données, soit mémoriséet disponible pour une reprise dans des circons-tances analogues ; i l sera alors éventuel lementenr ich i , réac tua l i sé . On comprend b ien auss iqu'un premier recuei l de textes, rassemblés pourtel besoin cul tuel , pour tel le fête famil ia le ou tr i -bale, soi t sans cesse réut i l isé et enr ichi au f i l oeI 'histoire.

Les grandes expériences de la vie humaine, tantpersonnelles que collectives, ont évidemment ten-dance à se répéter : la maladie, la mort ou la gué-r ison, la guerre, la défai te ou la victoire, la suppl i -cat ion ou l 'act ion de grâce.. . Ce qui a été écr i t unepremière fois et reconnu comme bien venu, vanaturel lement être repris. En avançant dans letemps, la l iberté dans i 'ut i l isat ion et la relectures'estompera : on arr ivera ainsi à une quasi canoni-sation des textes et des recueils. Mais avant d'enarr iver à leur statut canonique à l ' intér ieur duLivre, les psaumes ont été pour la plupart le fruitd 'une longue histoire au sein de la tradi t ion vivan-te de communautés priantes.

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Dès lors i l est sans doute impossible et vain dechercher à dater les psaumes ; sans compter quecela n'a pas grand intérêt pour les comprendre,encore moins pour les pr ier, puisqu' i l s 'agi t tou-

jours de refaire siennes les expériences humainesqui leur donnent une constante actual i té et fontleur éternel le nouveauté.

Les genres littéraires

C'est H. Gururr (1862-1932) qui a été le véritableini t iat ieur de l 'études des genres l i t téraires duPsaut ier et de leur mi l ieu d'or igine. Après de nom-breuses études prél iminaires, i l a codif ié les pr in-cipes et les procédés de la méthode des 'formes'

dans son lntroduction aux Psaumes (1928-'1933),complétée après sa mort par J. BEcntcu (2e éd.1966). ll y a vingt ans, E. LrRtrusrt a repris et sytéma-t isé de manière aussi c laire que possible les thèsesgunkéliennes (art. Psaumes, dans 5D8,1973).

Pour Gururel , le genre l i t téraire se déf ini t enfonct ion des ' formes' de langage auxquel les i lrecourt et dont l 'étude relève de la critique stylis-t ique, l l part du pr incipe que la l i t térature d'unpeuple est, à ses or igines, une æuvre communau-taire, l l s 'agi t donc d'abord de reconst i tuer lessi tuat ions communautaires qui ont exercé leurinf luence sur la transmission des ' formes' de lan-gage. Mais auparavant i l faut bien ident i f ier lesdiverses formes littéraires qui sont précisément lesref lets des fonct ions correspondantes de la viecommunautaire. Inf luencé oar l 'Ecole al lemandede I 'Histoire des Rel igions, i l postulai t que touteprière, même individuel le, étai t informée par lal a n g u e d u c u l t e , p a r s o n v o c a b u l a i r e e t s e sconcepts; i l en concluait que les genres l i t térairesdu Psaut ier avaient leur or igine dans la commu-nauté et son culte, au stade le plus ancien de larel igion d' lsraë1. Seuls les psaumes didact iques et

les psaumes de sagesse avaient pour lui une or igi-ne différente.

En fait Gurur* apporta bien des nuances subtilesdans la mise en æuvre de ses pr incipes. En part i -culier, il fut amené à admettre une action diffusedu prophét isme sur la psalmique, qui expl iquait àses yeux les accents de piété personnelle dans lespsaumes. l l admit aussi que les complaintes indivi-duel les, bien que nées en mil ieu cul tuel et commu-nautaire, s'étaient détachées du culte dès avantl 'exi l pour devenir des poèmes rel igieux à caractè-re individuel. l l reconnaissait en outre que les ren-seignements manquent pour reconstituer les céré-monies concrètes et les fêtes au cours desqueitesles divers genres ont pr is naissance. On peut sansdoute dire que c'est cette application souple etintel l igente qui f i t le succès de sa méthode et deses travaux. Evidemment ses émules n'eurent pastoujours le même génie et la même modérat ion.

i,,,ri,i,,:e,,,,,,,,,,c,,r;iirrr.ir:r.,:iàU-ry*çn:,:,E-,y5NJ1iffi,,,i?.,,i,*,':,*,1E. Lrprrusrr résume ainsi la classification de Guru-

rer : " L'examen des formes littéraires amena Guru-reL à dist inguer trois grands genres - les hymnes,les supplications et les actions de grâces - et diversgenres mineurs.

Les Hymnes débutent par une invitation à louerDieu ; le corps de I 'hymne détai l le les moti fs de la

33

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louange, les vertus divines ou les prodiges accom-pl is par Dieu dans la nature et dans I 'h istoire deson peuple; la conclusion reprend souvent la for-m u l e d ' i n t r o d u c t i o n . D a n s l a c a t é g o r i e d e shymnes, Gururt isole les Cantiques de Sion et lesPsa u mes d' i ntro n isatio n. "

" Les Supplications commencent généralementpar une invocat ion à Dieu, qui se double d'unappel au secours, d'une prière ou d'une professionde confiance. Dans le corps du psaume, on chercheà émouvoir Dieu en lui dépeignant la tr iste si tua-tion des suppliants, en protestant de leur innocen-ce ou en insistant sur le regret qu' i ls ont de leursfautes. On rappelle aussi à Dieu ses bienfaits pas-sés et on lui reproche de paraître oubl ieux ouabsent. Ces supplications peuvent être collectivesou individuel les. Parmi ces dernières Gurur* isoleles Psaumes de confiance. "

" Les Actions de grâces sont également collec-t ives ou individuel les. Le peuple ou les part icul iersy louent Dieu pour les prières exaucées et les bien-fa i ts accordés . La s t ruc tu re l i t té ra i re de cespsaumes est proche de celle des Hymnes. "

" A côté de ces trois grands genres, GurureL dis-tingue des Psaumes royaux, qui reflètent le langa-ge et le cérémonial de la cour, des Chants de péle-rinage à Jérusalem, des Psaurnes didactiques quimettent en æuvre des thèmes sapient iaux, desLiturgies, des Psaumes à oracles et diverses compo-sitions mixtes. "

On peut dire que la méthode gunkel ienne a étéà peu près universellement adoptée; elle n'a cesséd'être adaptée et nuancée et E. Lrprrusu pensaitpouvoir écrire en 1973 : " Les genres littérairesconst i tuent la clé qui ouvre à l ' intel l igence dupsaut iel c lé indispensable pour pénétrer dans lapensée des psalmistes. En effet, le genre littéraireest caractérisé par une forme d'expression, adé-quate au contenu qu'el le entend exprimer. On nepeut bien saisir l 'un qu'à travers l'autre, le contenu34

qu'à travers la forme, la pensée du psalmiste qu'àtravers son mode d'expression. "

L. Morllousou, reprenant cette citation dans uneintroduction au Psautieç pouvait ajouter : " Quela méthode de Gururtt soit perpétuellement repriseet nuancée par les divers commentateurs estmoins le signe de ses limites que de sa fécondité...La méthode proposée par Gururer apparaît tou-jours, fût-ce avec l 'apport de compléments ouretouches, comme la voie royale introduisant àune juste compréhension du Psautier " (op. cit.p .41) .

On nous permettra d'être beaucoup plus réser-vé que ne le sont les deux auteurs cités. Certes laméthode est encore largement pratiquée, mais, ilfaut bien le dire, un peu comme un passageobligé, un rite, dont peut-être personne n'oseencore tout-à-fa it s'aff ra nch i r.

DES REMISES EN CAUSE

Dans le Cahier Evangile 13, " Pour prier avec lesPsaumes ", M. MANNATT écrivait : " Les psaumessont d'abord destinés à accompagner des célébra-tions liturgiques... Par structure, on entend ici nonpas la compos i t ion ou la cons t ruc t ion despsaumes, mais l 'organisat ion de ses éléments enfonc t ion de la cérémonie cu l tue l le . A ins i oarexemple la structure des psaumes d'act ion'degrâce épouse les diverses phases d'un sacr i f iced'action de grâce. Et c'est cette structure qui per-met de distinguer les différents genres littérairesdu Psautier. Reconnaître le genre littéraire d'unpsaume est la première démarche à faire pour lecomprendre. Ce n'est pas pour répondre à unbesoin d'ordre, de classement... le Psautier n'estpas un musée de pièces mortes. C'est pour retrou-ver l ' intention du psalmiste, entrer dans son axede vision. " (p.12).

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Dans ce texte de 1975, bien des affirmationsnous semblen t au jourd 'hu i s imp lement in te -nables. La référence aux célébrations liturgiquesdes origines, déjà discutée à cette époque, estaujourd'hui plus que contestée. Même dans leSecond Temple , i l es t c la i r que le chant despsaumes restait marginal. J. Herrurnaaruru, dans songrand livre sur la prière, a pu écrire ceci : " A l'ori-gine, les prières (et la psalmodie) ne faisaient paspartie intégrante du culte du temple, du moins àla période du premiertemple. Quand ces élémentspénétrèrent enfin dans le culte, à la période dusecond temple, i ls demeurèrent encore margi-naux. lls appartenaient à la sphère du culte popu-laire qui se développa en marge du culte sacrificielsacerdotal, à la lisière du culte proprement dit, etne furent jamais mis au même rang que les sacr i-fices. (...) La nature non essentielle de ces hymnese s t é g a l e m e n t i n d i q u é e p a r l e f a i t q u e l e schantres-lévites se tenaient à distance de l'autel,sur les marches qui séparaient le parvis des prêtresdu parvis des israélites. ' (Prayer in the Talmud,1977, p.123-125).

Quant à retrouvel par quelque méthode que cesoit, " l ' intention du psalmiste " pour " entrer dansl 'axe de sa vis ion ", qui le croi t encore aujourd'huipossible ? Tout au plus peut-on espérer donnerune interprétation du psaume autorisée par sontexte, sa composition actuelle. Or ce sont là deuxéléments essentiels du'Sitz im Leben', but de larecherche par les genres littéraires, qui échappent

à nos prises. Dès lors, peut-on voir autre chosedans ces classifications - malgré tout si différentesd'un auteur à l 'autre - qu'une manière commodede classement, de comparaison éventuelle entredes psaumes de fo rmes vo is ines , s i tan t es tqu'aucun psaume, dans son état actuel, représenteun genre pur.

D'ai l leurs la 3e édit ion de la IO8, parue en 1991,écrit dans sa préface aux Psaumes (p.1276) : " Laparenté physique se manifeste par des traits com-muns : ressemblances extérieures du visage, de laphysionomie et de l 'a l lure; s imi l i tudes de langageet d'accent ; communauté de pensées, de senti-ments, de problèmes et de tradi t ion. Entre lesfamilles se nouent des alliances qui créent des affi-ni tés et des mélanges. l l arr ive aussi que desparents ne se ressemblent pas... Ainsi en va-t-il despsaumes. Beaucoup d'entre eux présentent desressemblances de structure, une phraséologie etune tonalité communes, supposent des situationsident iques ou ana logues, t ra i ten t les mêmesthèmes, se mélangent entre eux pour donner nais-sance à des poèmes complexes. Nous parleronsdonc de' famil les'de psaumes en appl iquant cettenotion de parenté avec une grande souplesse. "

Nous serions volontiers encore plus réservé. llest certes tentant et intéressant de mettre un cer-tain ordre dans une collection de textes mais il nefaut pastrop en attendre au niveau du progrès del'interprétation.

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LA PRIERE D'UN PEUPLE

Le Psautier mémorial doun PeuPle

r,r!-,,r;r,rrr,r, i i ,, irr,.. i i i i i l t ..,rrrrrr_lrrrrr:,..1.1:....11*ta.tt it...:::?'...111.ê...

LE PSAUTIER ETrHtsrotRE o'tsRRËt

to ire du peuple. Prenons deux exemples fonda-teurs : l 'Exode et la RoYauté.

A chaque étape de son histoire, au momentmême où les cr ises sol l ic i taient son propre renou-vel lement, lsraël a toujours su trouver dans lamémoire de son passé le dynamisme de son avenir.L 'histoire n'est pas pour lsraël répét i t ion plus oumoins cyclique du passé, elle est, bien au contraire,théâtre-d' intervent ions toujours renouvelées deDieu, auxquel les i l faut apporter à nouveau saréponse : acquiescement ou révolte. Le dialogueentre Dieu et son peuple ne peut se faire que dansla cont inui té des dialogues d'hier qui sont autantd'expériences de rencontres, heureuses ou mal-heureuses, pour des partenaires qui poursuivent lechemin de l 'Al l iance.

Dans la r iche diversi té des témoignages surgisde la foi nous pouvons donc entendre les échosm u l t i o l e s d e l a r e n c o n t r e e n t r e D i e u e t s o npeuple, et, par-delà, de la rencontre entre Dieu eti'huinanité, car cette histoire est bien le modèle etla clé de toute histoire humaine. Dans cette dyna-mique de la tradi t ion, chaque événement de I 'h is-toire bibl ique a pu susci ter un ou plusieurs poèmeset, quand l;événement gardait une valeur to.ujoursactuel le ( l 'Exode, la Créat ion, la Royauté.. . ) i l n 'asans doute pas cessé de provoquer les poètes ins-pirés. Le Psaut ier, comme tout autre l ivre bibl iquemais plus que tout autre, s'est donc tissé avec l'his-

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LE PSAUTIER ET TEXODE

Le séjour d'lsraël en Egypte n'est pris en compteque dans le Ps 105,23-25, écho sans doute deDt 26,5-6. Partout ai l leurs, i l n 'est quest ion que dela sort ie d'Egypte, en commençant par les'plaies'qui sont lesbremiers actes sauveurs du Seigneur,là traversée ôe la mer, la marche au désert jusqu'àl 'entrée en Canaan. En fai t , i l n 'y a que six psaumesqui t rai tent de façon suivie de l 'Exode : les Ps 78 ;105; 106 ;114 135 e t 136. Ma is les a l lus ions sonttrès nombreuses dans I 'ensemble du Livre.

L'Exode est d'abord célébré comme interven-tion de Dleu. C'est Lui qui " a pris lsraël d'Egypte "(Ps 80 ,9) , qu i le " f i t sor t i t en grande fê te "(Ps 105,43), " d 'une main forte et d 'un bras vigou-reux " (Ps 136,12). Cette libération des fils d'lsraëlest reconnue comme un " miracle " (Ps 78,12 ;c f .77 ,15) , fa i t en cons idéra t ion " de la paro lesacrée et d 'Abraham, son servi teur " (Ps 105,42) '

llExode est célébré aussi comme mémorial de laconstitution du Peuple saint, " domaine de Dieu "et son " sanctuaire " (Ps 114,1; cf . Lv 20,26) ' Maiscela n'empêche pas de se souvenir aussi des pre-mières manifestat ions de l ' inf idél i té : " la mécon-naissance du miracle " , " l 'oubl i de l 'abondance des

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grâces " du Seigneur (Ps 106,7 ;78,11); le ps 106raconte toute l'histoire de ces péchés d'lsraë1.

Les événements de I'Exode sont racontés parfoisen détails, parfois seulement évoqués. Lesp/aiesd' E gypte (Ps 7 8,42-51 ; 1 05,27 -36 ; 1 3 5,8-9 ; 1 36, 1 0)sont très présentes. Le repas pascal est curieuse-ment absent, sinon peut-être dans la mention du" mémor ia l de ses merve i l les " (Ps 111,4) . parcontre, le passage de la Mer est amplementorchestré et célébré sous des formes épiques : Dieu" menace la mer Rouge, el le sèche " (Ps '106,9); " l lmène (les fils d'lsraël) à travers les eaux comme audéser t " (Ps 106,9 ;78 ,13 ;77 ,20-21 qu i éc la r re78,52-53) ; " Et les eaux recouvrent leurs adver-saires " (Ps 106,1 1. Cf. Ps 136,15); " Alors i ls croientà sa parole, i ls chantent sa louange " (Ps 106,12).Des rapprochements sont faits entre cette traver-sée de la mer et la création (Ps 104,7 ; 18,16) et,bien sûr, la traversée du Jourdain pour entrer enTerre promise (Ps 114,3-5).

La marche au désert fait l 'objet de bien desreprises dans les psaumes. C'est d 'abord la nuéep a r l a q u e l l e D i e u g u i d e l e p e u p l e ( p s 7 8 , 1 4 ;105,39); l 'eau que le Seigneur donne en " fendantle rocher au désert " (Ps 78,15-16 ;105,4j ; j j4,8),la manne (Ps78,23-25;106,15) e t la v iande (ps78,27) qui devient un piège (Ps 78,30-33). Tous cesdons sont associés à l ' inf idél i té et aux murmuresd' lsraël dont i l est fai t mémoire sans aucune com-plaisance (Ps 78,17-19.32 ; 106,7.14-15.32-33).

La révélation du Sinai est pratiquement absen-te... ce qui n'est pas sans étonner. Le don de la Loiest à peine mentionné en référence à la sort ied'Egypte au Ps 81,5-6.10. D'autres al lusions exis-tent sans doute (Ps 99,6-7 ;103,7-8.18 ; 111,5.9 ;147,19-20) mais c'est peu de chose. Et si la Loi estlonguement méditée aux Ps 19,8-15 et 119 c'estsans référence à l'événement du Sinaï.

Ventrée en Terre promise est surtout célébréecomme le don que Dieu fai t à son peuple (ps 44,2-

4; 47,4-5 ;78,54-55 ; 80,9-12; 105,44; 135,10-12;136,17-22). Mais ce don ne va pas non plus sanstentat ion ni rebel l ion qui sont de nouveau soul i -gnées (Ps 78,56-64; 10634-al.

.,'_:5::**"u_r_r5silf î,**o_y,*_yl5..*Le Cahier Evangile 83 a consacré un chapitre au

Règne de Dieu et à la royauté dans les psaumes, ilnous suffit d'en rappeler le contenu : " Bien despsaumes parlent du roi : cela va d'une simple men-tion dans un verset jusqu'à une prière complète duroi ou pour le roi . Dans certains psaumes, le f idèlequi par le semble être le roi lu i-même (ex. ps 118).On ne ret ient ic i comme 'psaumes royaux' queceux qui se réfèrent directement à une fonctionroyale, en les regroupant suivant les circonstancespour lesquels i ls ont été ut i l isés dans la l i turgie. Ond is t inguera I ' i n t ron isa t ion e t I 'avènemènt dujeune roi (Ps 2 et 110), son mariage (ps 45), sondépart en campagne, son retour victorieux (Ps 20;21) mais aussi sa défai te (Ps 89,39-52), sans oubl ierquelques psaumes sur le gouvernement royal ous u r l a d y n a s t i e ( P s 7 2 ; 1 0 1 ; 1 3 2 ) . ( . . . ) O n a p r i sl 'habitude de regrouper sous le t i t re de 'Psaumesdu Règne' la série des Ps 47 ; 93 et 96-99... Touschantent la royauté du Seigneur " (p.42, 44).

On notera également la mention des événe-ments de la royauté en lsraë|. ll instauration de raroyauté de David, remplaçant celle de 5aû1, men-tionnée auPs78,67-72 est encore célébrée au ps89,20-22. Au v.3-4 de ce Ps et encore aux v.21-38, lareprise de l'oracle dynastique de Natan (2 S 7,8-16)est évidente. Le Ps 132,'l 1-12.17-18 peut par ailleursêtre considéré comme " l 'écho lyrique "de cetteprophét ie, décisive pour la f i l iat ion davidique.

Aucun de ces psaumes royaux ne peut êtreconsidéré à proprement parler comme messia-nique ; mais, ut i l isés après la chute de la monar-chie, i ls n 'ont pu qu'être compris et relus en fonc-

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t ion de l 'a t ten te d 'un Mess ie , descendant deDavid. Le Ps 110 est le psaume le plus ci té dans leNouveau Testament. Le Ps 2 est appliqué au Christen Ac4,27 et ai l leurs; de même le Ps 45 en He 1,8.D'autres psaumes, qui ne sont pas royaux au sensstrict mais qui peuvent exprimer les prières ou lespensées du ro i , son t auss i app l iqués au . Chr is tJésus : ainsi les Ps 16 et 22 ou encore certains ver-sets des Ps 8 ; 35 ; 40 ; 41; 68 ; 69 ;91 ; 102; 118;119. De la même façon les psaumes du Règne deDieu sont, eux aussi, rapportés au règne du Christ.

D'autres notations nous feront revenir à la ques-t ion de la composit ion du Psaut ier. Des étudesrécentes (R. Rreenn-Mnntrur), en effet, ont mis enlumière que le regroupement des Psaumes avaitou se faire autour de ce thème de la royauté. Apartir des titres des psaumes, nous avons déjà rele-vé les grands ensembles davidiques : Ps 3-32 ; 34-41 ; 51-65 ; 68-70 et 138-145.

A l' intérieur des deux premiers liv.res actuels duPsautieL on peut sans doute penser a une coupureaprès le Ps 32, puisque le Ps 33 est le seul non réfé-ré à David dans la sui te 3-41. Les deux psaumesident ioues 14 et 53 sont chacun à une place cor-respondante, la onzième, I 'un à part i r du Ps 3,l'autre à partir du Ps 34. Ces deux constatationsnous poussent à reconnaître comme deux collec-tions davidiques les Ps 3-32 et les Ps 34-41 groupesavec Ps 51-72; la collection des " fils de Coré " etun psaume " d 'Asaph " v iennent s ' intercaler dansla deuxième col lect ion.

La première collection (Ps 3'32)Elle est scandée par deux psaumes alphabé-

t iques :Ps 9-10 qu i n 'es t qu 'un seu l poème ( le 7"de la série) et le Ps 25 après lequel on trouve enco-re sept psaumes iusqu'à la f in de la col lect ion. Onpeut 'au moins faire I 'hypothèse de 4 sér ies de7 psaumes, avec au centre le Ps 18 - si typiquementdàvidique avec son t i t re, l 'h istor ic isat ion du v.1 et

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{,

I 'a l lusion de la pr ière f inale - le Ps 2, psaume royal,servirait de psaume d'introduction ; ce qui donne-rai t le schéma :

Ps 2 ; 3-10 | 11'17 | 18 | 19-25 | 26-32

Ce qui revient à deux sér ies de 14 psaumes. Oçon le sàit, 14 est le nombre obtenu avec les valeursdes lettres hébraÏques du nom de DaViD (4 + 6 + 4)'

La deuxième collection (Ps 34-41 ;51-72)

Elle doit être prolongée jusqu'au Ps 72 à causede la suscr ipt ion' : " Fin des Ir ières de David, f i ls deJessé " (v.20). Elle comporte alors trente psaumes.L'hvpothèse la plus simple est d 'envisager que lefs i+ y joue le rôle d'introduction, comme le Ps 2dans lâ première col lect ion. On a alors.égalementune structure possible de deux fois deux septé-naires séparés par un psaume de caractère parti-culier : le Ps 58 èst en effet un rappel de la Royautéde Dieu, le Juge qui t ranscende le pouvoir desjuges humains, d 'où le schéma :

Ps 34:35-41 | 51-57 | 58 | 59'65 | 66-72

Dans une perspect ive analogue, à l ' intér ieur desdeux premiers livres du Psautier on peut remar-quer que les psaumes royaux iouent un rôle char-nière : le Ps 2 est au début, le Ps 72 à la fin. Certes,en f inale du premier l ivre le Ps 40 n'appart ient pasexplicitement à cette catégorie même si son titrel'v rattache mais il est possible d'expliquer cela parlé fal t que la col lect ion des deux premiers l ivres aété envisagée comme un tout, ce qu'attesterait lasuscription-d uPs72 à laquelle nous avons déjà faital lusion. Dans cette même l igne, on peut encorenoter que le trois ième l ivre actuel se termine luiaussi par un psaume roYal, le Ps 89.

Une dernière collection (Ps 90-150)

l l peut apparaÎtre comme structuré autour de lathéôlogie du Règne de Dieu, ce qui serai t une

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façon de tenir l 'équi l ibre avec la théologie davi-dique si forte dans le premier ensemble (Ps 2-89),comme nous venons de le voir. On peut envisagerla structure suivante. Les Ps 90-92 sont un oro-logue ; les Ps 93-118 forment une première série,inaugurée par les psaumes du Règne (93-100) etc l o s e p a r l e H a l l e l ( 1 1 3 - 1 1 8 ) . L e P s 1 1 9 e s t a ucentre. La deuxième série commence avec les can-tiques des montées (120-134) et se termine avec ladernière col lect ion davidique (138-145); les Ps 146à 150, tous psaumes 'al lé luiat iques' , forment l 'épi-logue doxologique du Psaut ier:

Ps 90-92; 93-118 /'l 'tg | 120-145; 146-150

Les deux séries ainsi isolées comportent chacune26 psaumes, o r 26 es t le ch i f f re des le t t reshébraïques du tétragramme YHWH (10 + 5 + 6 + 5).El les sont donc mises sous le signe du Seigneur quiest le véritable roi d'lsraë1. Les psaumes des deuxextrémités se répondent :

" Le Seigneur est roi...La sainteté emplit ta maison,Seigneur; pour la sui te des temps. " (Ps 93,1.5)

" Je t 'exalterai , mon Dieu, mon roi . . .Son nom très sarnt, que toute chair le bénissetoujours et à jamais | " (Ps 145,1.21)

Dans la première série, le milieu est formé parles Ps 101-110, dont les trois premiers et les troisderniers sont explicitement davidiques; au centredonc deux psaumes d'histoire nat ionale (105 et106) sont encadrés par un hymne au Dieu créateur(10a) et un hymne au Dieu sauveur (107). Dans ladeuxième série, le Ps 132 marque le centre; lanote est ici clairement davidique, mais c'est le Sei-gneur dans son temple qui est célébré commeprotecteur du roi ; les Ps 131 et 133, qui l 'enca-drent sont tous deux des psaumes davidiques parle t i t re, mais i ls célèbrent d 'abord le Seigneur deDavid.

On le voit donc - même si ce parcours est troprapide - la royauté, cel le du Seigneur et cel le deDavid, a fini par remplir tout le Psautier et lui don-ner sa structure et un sens.

Deux langages : la plainte et la louange" Au cours de mes années d'études sur l 'Ancien

Testament, en particulier sur les Psaumes, il m'estapparu de plus en plus clairement que les genresl i t té ra i res , Psaumes de p la in te e t Psaumes delouange, n'étaient pas seulement deux genresparmi d'autres mais les formes littéraires qui carac-tér isaient le Psaut ier dans son ensemble, rel iéescomme deux pôles opposés. Ainsi, ensemble, cesdeux pôles tendent à englober toute l'existencehumaine, sa croissance à part i r de la naissance etson mouvement vers la mort. La louange de Dieudonne corps à la joie d'exister; la plainte donnecorps à la détresse. Comme langage de la joie et

Iangage de la souffrance, louange et plainte sontensemble l 'express ion de l 'ex is tence humainedevant Dieu. " (C. Wesrrnvaruru, Prarse and Lamentin the Psalms, Edinburgh, 1981, p.11 ; excel lentrésumé dans C. DrrrrnlE, Foi etVie, Cahier biblique27 , 1988, p.81 -96).

C'est en approfondissant sa recherche sur lesgenres littéraires et en contestant les découpagestrop subt i ls et les dist inct ions en genres l i t térairestrop nombreux des successeurs de Gururt , queWrsrEnvnruru est amené à revenir aux premièresétudes du maître et à en tirer ces conséquencesnouvel les. Cri t iquant l ' interprétat ion de Gururr l

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selon laquel le l 'homme devant Dieu est d 'abordencl in à demander et oubl ie faci lement de remer-cier, WrsrrnvANN note que la louange se retrouveau cont ra i re dans tou tes Ies ca tégor ies depsaumes même dans les psaumes de plainte indi-viduel le ou col lect ive qui sont les plus nombreux.Non sans paradoxe mais avec raison, i l af f i rmeoue c'est dans les psaumes de plainte que se trou-vent les plus fortes expressions de la louange' l liustifie ainsi, peut-être sans y prendre garde, lei i t re donné au l i v re dans la B ib le hébra ique :Louanges, comme si c'était bien en définitive ledernier mot de tous les Psaumes.

LES PSAUMES DE PLAINTE

temps de la détresse (Ps 30,2-4'8-11)' Ainsi chaquepsaume se trouve quelque part entre plainte etiouange. La louange regarde vers le passé : lesecours venu de Dieu dans le malheur l 'enraclnedans une histoire réel le et sans i l lusion' La plainteaussi regarde vers le passé : le.salut autrefoisdonné pir le Seigneur devient le ressort de laconfiance dans la détresse' Dès lors le dernier motne peut être qu'à la louange ; el le ne peut pluscesier puisqu'elle s'appuie en toute circonstancesur la fbi en un Dieu qui en déf ini t ive ne sai t quesauver.

Les éléments de la plainte. Dans les psaumesl'homme qui souffre est menacé dans son intégritémais aussi 'dans son rapport à la communauté. Lemal lu ia r r i ve par les au t res ; i les t tou jours le fa i tde I 'ennemi. be plus la souffrance est toujoursvécue comme un éloignement, voire une absencede Dieu. La structure d-es psaumes de plainte s'arti-cule donc souvent sur trois motifs : la descriptionde la souffrance, le cri contre les ennemis, la plain-te contre Dieu avec ses questions propres : pour-quoi ? jusqu'à quand ?

Paradoxalement la plainte est une part essen-t iel le de la relat ion de l 'homme à Dieu ; dans lestemps de détresse, et plus encore de catastrophenat ionale, el le devient même le seul moyen pourle fidèle de rester en contact, fût-il conflictuel,avec son D ieu . La révo l te es t le langage del 'homme quand i l croi t que Dieu est à la source deson malheuç mais tant que l 'homme se révoltecontre Dieu, il lui reste encore attaché. On devient" impie " le jour où l'on cesse de s'adresser à Dieu :on est alori tout près de dire : " il n'y a pas deDieu " (Ps 14, ' l ) .

La plainte permet à I'homme de garder sa digni-té d'ihterlocuteur de Dieu; sans renoncer à existerdevant Dieu, elle lui permet de reconnaître sa limi-te et sa finitude, sa rigoureuse dépendance, sonmalheur. La plainte est aussi un langage de protes-tation contre I'oppresseur ; elle est contestation

C ' e s t d a n s l e s p l a i n t e s i n d i v i d u e l l e s q u e l alouange est la plus présente ; dans les psau.mes deplainté collective elle se trouve surtout dans lesintroduct ions (Ps 44, 1-3; 85, 1-3).

La plainte s'ouvre à la louange. Dans les psaumes,lorsqu'un homme ou une communaute cr le versDieu dans une situation désespérée, il sont toujoursamenés à faire mémoire des actes sauveurs de Dieudans le passé : c'est la première forme de la louan-ge, méàorialdu sa/ut (Ps 22,4-6;44,1-9;85,2-4). Laionfiance s'appuie sur ce regard sur l 'histoire et un'væu de louange'suit en général la prière adresséeà Dieu (Ps 26,12; 57,8-9). Certains psaumes sem-blent ne comporter que des éléments de plainte,mais aucun n'est totalement dépourvu de louange(Ps M,27 ; 143,8 sv.) ; même le Ps 88 fait référence,comme en creux, aux 'miracles' (1 1.13), à l"amour'et à la 'fidélité' (12) de Dieu.

La ptainte précède la louange' La louange naîtsouvént simplement de ce que la plainte a étéentendue ; alors, naturellement, celle-ci se trans-forme en louange (Ps 13,5 ;22,24;28,6) ' On peutd 'a i l leurs remarquer , inversement , que lespsaumes de louange font souvent référence au

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du malheur et ainsi el le empêche l 'homme de serésigner à I ' in just ice ; el le le t ient debout dansl'adversité.ri9li:r:rll#rr!9irliiirtrtlrrrrrrrr,.,lltËiii\rrrr.ri:ri:rr@ti:rr:ut8

,,,. *|5s psA u M Es,D F,, fg y â*9,,â'.",,,,

La louange s'enracine dans I'expérience. L'intro-duct ion à la louange rappel le le væu de louangedes psaumes de plainte : le psalmiste peut diremaintenant aux autres ce qui lu i est arr ivé et lesinv i te rà la louange: D ieu a en tendu e t i la dé l i v ré :" Tu as changé mon deui l en une danse, mes habitsfunèbres en parure de joie " (Ps 30,12 ; c|.40,2-4).Souvent ce que Dieu vient de faire est rapproché dece qu' i l a fai t dans le passé et la louange s'ampl i f ie,el le s 'ouvre aussi sur I 'avenir , el le ant ic ipe ce queDieu ne manquera pas de faire à nouveau.

Ainsi certains psaumes de louange dépassent- i lsl ' i n t e r v e n t i o n s p é c i f i q u e e t u n i q u e d e D i e uaujourd'hui, pour parler de Dieu et de son act ionde manière universel le et récapitulat ive. Mais unetel le louange ne devient jamais abstrai te : el lereste enracinée dans l 'expérience et dans l 'h istoirede la relat ion de grâce d' lsraël et de son Dieu.Même les louanges au Dieu créateur gardent cetenrac inement dans une re la t ion h is to r ioue. Unbon exemple en es t o f fe r t par le psaume 113.Après un appel à la louange (1-3), v ient l 'exal ta-t ion de Dieu en lui-même :

" Le Seigneur domine tous /es peuples,sa gloire domine les cieux.Qui est semblable au Seigneur notre Dieu 7Lui, ilsiège là-haut. " (4-5)

mais vient aussi tôt le rappel :" Mais il abaisse son regardvers le ciel et vers la terre. " (6)et les v.7-9 reviennent à I'action concrète d'unDieu qui " relève le faible et ret i re le pauvre dela cendre " s l eui rend féconde " la femme sté-r i le " .

La louange s'authentifie dans la plainte. Là aussile paradoxe est tout proche : la louange ne peutfinalement conserver son authenticité que dans sapolar i té avec la plainte; sans cet enracinement el lese coupe du réel et se pervertit en idéologie. Cou-pée de la plainte, la louange est coupée de I 'h is-toire, el le perd son inscr ipt ion dans la mémoireconcrète des merveilles passées de Dieu. Et perdrecette inscription, c'est finalement perdre la rela-t ion avec le Dieu personnel qui s 'est révélé auxPères. Ainsi la louange n'est jamais plus authen-t ique que dans les temps de détresse; el le peut aucontraire devenir dangereuse dans les temps debien-être, car el le r isqùe de n'être plus que sat is-faction de soi et captation de Dieu.

La louange garde le dernier mot. La louange etla v ie sont ind issoc iab les : (Ps 6 ,6 ;30 ,10 ; 88 ,11-13)mais c 'est le vivant qui est là pour témoigner desbienfaits de Dieu par-delà sa détresse :

" Tu m'as répondu !Et je proclame ton nom devant mes frères.(...)Et moi, je vis pour lui :ma descendance le servira ;on annoncera le Seigneur aux générations àvenir. " (Ps 22,23.31. Cf . 118,17)

Plainte et louange sont donc les deux modesinséparab les e t ind ispensab les du d ia logue del'homme avec son Dieu ; ils sont /es deux rythmesde la pr ière; les psaumes en sont l 'out i l pr iv i lé-g ié . S i l ' une des deux es t oub l iée , c 'es t tourl 'équ i l ib re de la p r iè re qu i es t mis en cause. Sansl a p l a i n t e , l ' h o m m e é c h a p p e à s a c o n d i t i o nd'homme, i l s 'évade du monde réel qui ne peutê t re sans souf f rance pu isqu ' i l n 'es t pas sanspéché. Sans la louange, I 'homme oub l ie qu i es tDieu, son Créateur et son Sauveur ; i l oubl ie quele D ieu de I 'a l l iance donne la v ie jusque sur lacroix, au cceur de toute souffrance humaine, Sei-gneur, vainqueur de l 'Ennemi dont la mort est ladernière signature.

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Écuos ET nÉsuvtÉ DE LA BIBLE

Nous avons déjà eu l'occasion de le dire, le Psau-tier s'est tissé avec l'histoire du peuple d'lsraëldans son dialogue incessant avec son Seigneur.Cette épaisseur biblique des psaumes peut s'ana-lvser sous deux modes essentiels :' -la reprise sous forme lyrique d'un événementraconté ailleurs par la Bible, dans un réciten proseou déià poét ique. A. Cnquor par le d" ' écholyrique ", te qui dit fort bien ce que. nous.visons ici.Éoui'mieux lé montrer, nous prendrons l'exempledu Ps 68.

- fes enracinements qui manifestent que desexpressions, des formules du psaume, sont là pour

ouvrir sur tout un 'arrière-pays' biblique, sur unetradition longue et multiforme qui fait gY.er. parcette formulel est évoqué tout un monde bibliqued'événements mais aussi de symboles. C'est ici qu'ilfaut penser au langage des psaumes comme..à un'lanqaqe-réseau', qui renvoie à toute sorte cl'har-mon'iqles dans toute la Bible et même plus encoredans ie vécu du peuple d' lsraël dont le textebiblique n'est jamais que le dépô1 écrit, forcémentlimitd. Nous piendrons l'exemple du début du Ps23 pour monirer cet effet de résumé qui enrichitchaque psaume de tout un arrière-fond tradition-nel s'ans'lequel on reste à sa surface'

ce verset pouvait correspondre au v.18.de.notrepsaume, dui ainsi évoquerait une formule rituellebour le rétour de I'arche au sanctuaire après sasort ie guerr ière ou., . l i turgique.

Les v. 8-9 sont une citation du début du Can-tique de Débora : " Seigneur, quand tu sortis deSéir, quand tu partis de la steppe d'Edom, la terretremËla, les cieux ont déversé, les montagnes ruis-selèrent devant le Seigneul celui du Sina'r, devantle Seiqneuç le Dieu d-lsraël " (Jg 5,4). Les v.6-7 dece Caitique rappellent les v.10-11 de notre psau-me ; seul'es les allusions à des noms et à des lieuxprécis ont disparu. Nous avons là le signe même dei 'universal isat ion du psaume par 'dés-histor ic isa-tion' du contexte. Le Cantique de Débora et le

L'exemple du psaume 68

Ce psaume a la réputation d'être un des plusdifficiies du Psautier et ce n'est pas une réputationusurpée... lJéclairage biblique n'en sera que plusprobant.

DES TEXTES PARALLELES

Le v. 2 est une citation du livre des Nombres :" Quand l'arche partait, Moirse disait : Lève-toi, Sei-qneur ! Tes ennemis se disperseront, tes adver-iaires s'enfuiront devant toi ! Et quand elle faisaithal te, i l d isai t : Reviens, Seigneur ! . . . Innombrablessont les milliers d'lsraël ! " (Nb 10,35). On n'a passuffisamment remarqué que la seconde partie de

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réci t de la campagne de Taanak qui le précèdevont nous apparaître effectivement comme la cléde référence qui éclaire la plus grande part ie denotre psaume.

Les v.12-17 qui sont les plus obscurs trouvent,pour la plupart , leur expl icat ion dans ce paral lèle.Le v. ' l 2 s 'expl ique comme une al lusion à l 'ordredivin, t ransmis à Baraq par Débora, de rassemblerau mont Tabor une armée pr ise des t r ibus deNephtal i et de Zabulon (Jg 4,6.10.14). Les " mes-sagères " sont sans doute les femmes d' lsraêl quitransmettent la convocation, à moins qu'il ne faillec o m p r e n d r e : " c ' e s t I ' a n n o n c e d ' u n e g r a n d earmée ", ce qui correspondrai t bien aux dix mi l lehommes rassemblés (Jg a,10).

Le v.13a. Nous apprenons par le l ivre des Jugesque le roi Yabîn, Sisera son général et leur arméefurent mis en déroute par les lsraél i tes (Jg 4,15) ;le Cant ique de Débora célébre cela avec une répé-t i t ion de mots qui fai t image : " Alors les sabotsdes chevaux ont martelé le sol du galop, du galopdes coursiers " (Jg 5,22). Le psaume rend cettecava lcade par un procédé ana logue : " Ro i e tarmées détalèrent, détalèrent " .

Les v.13b-14. Les Cananéens pensaient ramasserle but in (Jg 5,19) mais ce sont les femmes d' lsraëlqui partagent les r ichesses conquises. Le début duv.14 s 'expl ique bien à part i r d 'une circonstance dela batai l le : plusieurs clans israél i tes ont préféré nepas venir combattre auprès de leurs frères. Dans leCantique de Débora, c 'est la tr ibu de Ruben quireçoit les plus grands blâmes sous forme sarcastique(Jg 5,15-16). Malgré cette absence, leurs frères ontremporté une grande victoire. La suite du v.14 estassez mystérieuse, mais I' image de la colombe faitpenser à lsraël : c 'est ainsi qu'Osée parle du peuple(7,11 ; 11 1 1 ; cf . Ps74,19). l l s 'agirai t de la descr ip-t ion imagée du but in conquis sur les ennemis, dontles lsraélites oeuvent faire oarade.

Le v.15 célèbre encore cette victoire que le Sei-gneur (Shaddail un titre archaïque) a donnée, en

référence à un prodige : la neige, toujours excep-t ionnel le en ces contrées. On peut penser ic i autexte de )ob38,22-23 qui présente la neige comme'arme' de Dieu dans les combats, de même lesétoi les (Jg 5, 21).

Les montagnes des v.16-17 sont des lieux sacréscomparés à la " montagne où Dieu habite " qui ,dans notre contexte histor ique premier, est lemont Tabor (Jg 4,6.4). On a dû vite comprendre :le mont Sion et son Temple, mais le psaume y asso-cie la montagne par excel lence, le Sinaï (v.18).C'est el le qui donne sens à toutes les autres mon-tagnes sacrées en lsraël : " le Sina[ est au sanctuai-re " puisque " c 'est de Sion que vient la Loi " ( ls 2,3). Nous avons ic i un bel exemple de relecture his-tor ique d'abord, théologique ensuite.

Les v.20-28, l ls célèbrent la victoire dans unel i turgie solennel le au Tabor. Les al lusions précisesà cette victoire, se retrouvent auv.22: c'est évidem-ment Yaël qui a été l' instrument de Dieu pour écra-ser la tête de Sisera, I'ennemi juré (Jg 5,26). Lesv.23-24 célèbrent encore le tr iomphe avec desaccents guer r ie rs comme dans le Cant ique deDébora. Les v.25-28 décrivent la liturgie elle-même.Les tr ibus ci tées, hormis cel le de Juda, sont cel lesqui ont part ic ipé à la batai l le : Nephtal i et Zabulon(Jg 4,6.10) mais aussi Benjamin (Jg 5,1a) appelé le" peup le du Se igneur " (5 ,13 : la p lus anc ienneattestation de cette expression). Ces quelques tri-bus du Nord, d 'Ephraïm et de Yizréel, ont en com-mun I 'expér ience de l 'Exode e t de l 'en t rée enCanaan. L'addit ion de Juda s'est imposée lorsquela montagne a été ident i f iée au mont Sion.

Les v. 29-36. A partir du v.29, la relecture enfonc t ion de Jérusa lem e t de Juda reprend e tampl i f ie l 'act ion de grâces. Les al lusions des v.31-32 semblent à nouveau histor iques : el les dési-gnent sans doute l 'Egypte associée à I 'Ethiopie, orce pays apparaît à I'horizon d'lsraël avec les pha-raons de la dynast ie éthiopienne, al l iés potent ielsface à la menace assyr ienne de Sennachérib; nous

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sommes au Vllle siècle et c'est alors Ezéchias quirègne à Jérusalem. La victoire semble ici plus espé-rée que réelle, elle est célébrée dans une anticipa-tion propre à la foi en Dieu, maître de l'histoireaujourd'hui comme hier.

Les v.33-36 achèvent le psaume comme il a com-mencé (v.4-5) par une grande:invitation à la louan-ge pour le Dieu dflsraë|, lui qui " donne sa forceet sa puissance à son peuple " à partir de " sessanc tua i res " . Ce p lu r ie l a t tes te sans doutel 'ancienneté de la tradi t ion première de notrepsaume : les lieux de culte sont encore légitime-ment nombreux en lsraë|. Le mont Tabor reste unlieu vénéré par les tribus du Nord alors même quele mont Sion devient le lieu central de la célébra-tion avant de devenir le seul sanctuaire légitime !

ESSAI DE SYNTHÈSE

Comment résumer les acqu is de no t rerecherche ? Le Ps 68 nous apparaît d'abord commeune hymne célébrant la victoire de Baraq et Débo-ra sur Sisera et Yabîn lors d'une liturgie au sanc-tuaire du Mont Tabor. Les tr ibus de Nephtal i ,Zabulon, Benjamin sont là après leur victoire. Elles

font mémoire de leur histoire commune : l 'Exodequi les a conduites du Sinail l ieu où Dieu les a ras-semblées comme " son peuple ", par le désert,jusque dans leur pays, la montagne d'EphraTm etla plaine de Yizréel que domine le Tabor. Elles célè-brent ensuite leur victoire d'aujourd'hui. Dans cesdeux événements I'arche de Dieu a joué un rôleessent ie l : e l le a marché en tê te des arméesd'lsraë|. Dans la liturgie, elle marche en tête de laprocession que suivent tous les fidèles au son destambourins et des chants de louange.

Avec le temps, le psaume a été universalisé pourcélébrer toute victoire en lsraël : les allusions à desnoms trop précis ont disparu. C'est ainsi qu'il a puêtre repris dans la liturgie du temple de Jérusalem,sans doute au temps du roi Ezéchias. Le mont Siona remplacé le mont Tabor; les princes de Juda ontpris place dans le cortège. De la victoire célébréeon est passé à la victoire toujours espérée : la forceet la puissance du " Dieu des victoires ", du " Dieudu Sinaï ", du Dieu de I'Exode, a été donnée à sonpeuple. Elles en imposent à tous les royaumes dela terre, jusqu'aux plus grands ; elles sont I'assu-rance des victoires futures sur tous les ennemisd' lsraël qui sont les adversaires mêmes de ce" Dieu qui agi t pour nous ".

rEXPÉRIENCE DE JACOB.ISRAËL

La formule " Le Seigneur est mon berger "affleure plusieurs fois dans les psaumes. Elle setrouve d'abord en référence à des tradi t ions

L'exemple du Ps 23,La :Le Seigneur est mon berger

Nous pouvons entendre cela comme une belleimage bucolique et pastorale, mais il s'agit en faitd'une des figures les plus riches de l'Ecriture (voirPh. de Roeenr, Le Berger d'lsraël. Essai sur le thèmepastoral dans I 'A.T., Cahiers Théologiques 57,Genève,1958).44

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anc iénnes d ' l s raë I , en l ien avec la ma ison deJoseph :

" Berger d'lsraë\, écoute,toi qui conduis loseph, ton troupeau :resp I endis au-dessus des Ké rou b i m,devant Ephraïm, Benjamin, Manassé / " (Ps 80,2_3)

La maison de Joseph, les tribus d'Ephraïm, Ben-jamin et Manassé, semblent donc invoquer le Sei-gneur sous ce titre, Berger d'lsraêl comme un titrepropre. Or on le retrouve dans les bénédictions deJacob-lsraël et précisément dans celle prononcéepar l'ancêtre sur la maison de Joseph : " (lsraël)bénit Joseph en disant : Le Dieu en présence de quiont marché mes pères, Abraham et lsaac, le Dieuqui fut mon berger depuis que j'existe jusqu'à cejour, I 'Ange qui m'a dél ivré de tout mal, qu' i lbénisse ces garçons... " (Gn 48,15. Cf. 49,22.24b).

L'imoortant est ici de retrouver l 'enracinementd'expérience et de vie qui est à la source de cetteinvocation : Jacob-lsraël est un berger habile etexpérimenté (Gn 29-31), c'est au cæur de ce savoir-faire de toute une vie que naît sa 'pomination' deDieu. " Berger d'lsraël ", c'est la tradition d'invo-cation transmise par le père à cette part de sa des-cendance que lu i a donnée Rache l , la femmeaimée : Joseph, Benjamin, puis Ephraïm et Manas-sé. Et cette postérité ne l'a pas oubliée...

du pays d'Egypte, je lui ferai voir des merveilles "(Mi7,14-15. Cf. ls 63,11).

Ainsi s 'est enr ichie et actual isée la tradi t ionancestrale ; la Maison de Joseph a expérimentécomme peuple la conduite de son Berger. Onretrouve cette référence dans un psaume:

" Tel un bergen il conduit son peuple,il pousse au désert son troupeau.Il |es guide et les défend, il les rassure ;leurs ennemis sont engloutis par la mer. "(Ps 78,52-53, Cf .28,9 ;95,7).

Les derniers versets de ce Ps 78 nous indiquentbien qu'il s'agit tout au long de ce texte de la tra-dition de la Maison de Joseph (v.67) qui va êtretransmise à la Maison de Juda, celle dont David estI'héritier. Les mots mêmes sont choisis en fonctionde cette transmission :

" ll choisit David son serviteur;il le prend dans les parcs à moutons;il I'appelle à quitter ses brebispour en faire le berger de Jacob, son peuple,d'lsraë|, son héritage. " (Ps78,70-71)

David est un berger comme Jacob et il devientle berger du peuple, appelé par ses noms de Jacobet d' lsraëI, pour bien marquer qu' i l assume toutela tradi t ion passée de la Maison de Joseph, ettoute l'expérience de Dieu qui en fait le prix.

rEXPÉRIENCE DE TEXODE

L 'expér ience de ces t r ibus s 'es t poursu iv ie .Michée l'évoque en référence à I'Exode où ellesont certainement été, histor iquement, les pre-mières concernées * qu'on songe seulement aurôle de Joseph en Egypte : " Fais paître ton peuplesous ta houlette, le troupeau de ton héritage, quidemeure sol i taire dans un maouis au mi l ieu desvergers. Qu' i l pâture en Bashân et Galaad, commeaux jours d'autrefois. Comme aux jours où tu sortis

LE TEMPS DES ROISVU PAR LES PROPHÈTES

Le texte majeur est évidemment le chapitre 34du prophète Ezéchiel ; i l relit après coup I'histoirede la royauté d'lsraël et de Juda à travers cettef igure du berger ; c i tons-en au moins quelquesversets : " Ainsi par le le Seigneur Dieu : Malheuraux bergers d'lsraël qui se paissent eux-mêmes !N'est-ce pas le troupeau que les bergers doiventpaître ? ( . . . ) Mon troupeau s'est éparpi l lé par

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toutes les montagnes, sur toutes les hauteurs ;mon troupeau s'est dispersé sur toute la surface dupays sans personne pour le chercher. " (E234,2.6)." Car ainsi par le le Seigneur Dieu : Je viens cher-cher moi-même mon troupeau pour en prendresoin. ( . . . ) Je l 'arracherai de tous les endroi ts où i l aété dispersé un jour de brouillard et d'obscurité,(...) Je le ferai paître dans un bon pâturage, sonherbage sera sur les montagnes du haut-paysd' fsraël. " (Ê234,11-13. Cf. Za 11,4-17).

Dieu avait délégué sa charge de Berger aux rois,bergers et guides du peuple à la sui te de David,mais i ls ont fai l l i à cette tâche de façon de plus enplus honteuse. Le Seigneur annonce leur chât i-ment et surtout qu'il va reprendre lui-même cettetâche de Pasteur : c'est I'annonce du retour d'Exildu troupeau dispersé. On retrouve, dans les détailsmêmes, l 'écho du Ps 23 et de ses premiers versets.lJimage sera désormais utilisée par les prophètespour parler du retour d'Exil, ce nouvel Exode, oùDieu reprend comme autrefois la tête de sonpeuple pour le ramener en Terre sainte : " Moi, jerassemble ceux qui restent de mon troupeau, detous les pays où je les ai dispersés, et je les ramènedans leurs enclos où i ls prol i féreront abondam-ment, J'établirai sur eux des pasteurs qui les ferontpaître : i ls n 'auront plus peur, i ls ne seront plusaccablés, plus aucun d'eux ne manquera à l 'appel- oracle du Seigneur. " (Jr 23,3-4. Cf. 3,15 ; 50,19).

On voit ici Dieu, le Pasteur d'lsraë|, s'associer ànouveau des bergers pour paître son peuple etl'on trouve ainsi les racines d'une attente messia-nique puisque le retour d'Exi l n 'amènera pas derestaurat ion de la royauté. Cette attente nes'accomplira qu'à la f in des temps.

Le thème apparaît encore chez les sages mais defaçon universal isée et plus ou moins banal isée ;c'est le signe de sa permanence dans la consciencerel igieuse d' lsraël : " Uhomme a pi t ié de son pro-chain, mais le Seigneur a pi t ié de toute créature ;46

i l reprend, i l instrui t , i l enseigne, i l ramène, tel leberger, son troupeau. " (Si ,l8,13).

LE MODÈLE DE JÉSUS

C'est bien dans cette ligne sapientielle qu'il fautcomprendre les paraboles où Jésus reprendral ' image pour parler de la tendresse et de la sol l ic i -tude du Père qui la isse là 99 brebis pour couriraprès la seule éqarée (Mt 18, 12-14.Cf . Lc 15,3-7),Jèan, dans sonÏvangi le, dans la droi te l igne duprophète Ezéchiel, nous présente en effet Jésuscomme le Berger par excellence, Messie et, plusmystér ieusement, semblable à Dieu, le seul Ber-ger : " Je suis le bon berger; le bon berger se des-saisi t de sa vie pour ses brebis. . . Je suis le bon ber-ger , je conna is mes breb is e t mes breb is meconnaissent, comme mon Père me connaît et queje connais mon Père, Et je me dessaisis de ma viepour mes brebis. " (Jn 10, '11.14-15).

Enf in l 'Apoca lypse nous mont rera , dans unparadoxe bibl ique et théologique admirable, levéri table agneau devenu berger : " l ls n 'aurontplus faim, ils n'auront plus soif ; le soleil et ses feuxne les frapperont plus, car I 'agneau qui se t ient aumil ieu du trône sera leur berger. l l les conduiravers des sources d'eaux vives. Et Dieu essuieratoute larme de leurs yeux. " (Ap7,16-17).

C'est cette longue histoire bibl ique de la nomi-nation de Dieu comme Berger, sans cesse réactua-l isée, que nous faisons nôtre aujourd'hui dans laprière en faisant mémoire de la prière de toutece t te chaîne de témoins . De ce parcours auxracines de ce nom, Berger d'lsraë|, retenons unec lé d ' in te rpré ta t ion qu i vau t pour tous lespsaumes : c'est dans l'expérience d'un homme sin-gul ier puis dans l 'expérience d'un peuple au longdes siècles que s'est forgé le langage des psaumes.

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Une pédagogie de I'expérienceTout homme, s'ilveut faire lui-même l,expérien-

ce authentique de la rencontre de Dieu, ôeut etdoit se mettre " en résonance " avec iei expé-riences bibliques dont l'écho se trouve dans'lesPsaumes, On apprend à vivre et à prier ,, par réso-nance " beaucoup mieux que d,aucune autretaçon, Le Psautier c'est le chemin priviléqié pournous mettre à l'école de tous les ôrantsinsfirés,pour nous identif ier à eux... Le psautier 'nousintègre à ce peuple de croyants à travers les mil-lénaires de I'histoire de Dieu avec les hommes.

Les Psaumes nous font entrer dans I'expériencedu peuple de Dieu.lls nous font particider à unehistoire déchiffrée, comprise comme Alliânce avecDieu à travers la création et le salut. Et ce sont tousles événements de la Bible, dont le psautier se faitf'écho, qui deviennent notre tradition, une écolepour notre.propre vie, notre propre expérience.Reprenons l'exemple du B 68. A travers'ce chantnous apprenons que notre Dieu est un ,, Dieu desvictoires " qui sait marcher avec son peuple au iourde ses combats. Nous apprenons à disceiner la bré-sence de notre Dieu dans le quotidien, à êtreattentifs à ce compagnonage sJr la route de nosexodes. Nous apprenons aussi à célébrer le Sei-

glgur à part ir des réali tés concrètes, dans nosdéfaites comme dans nos victoires.

Les Psaumes nous apprennent les mots de laprière.l ls nous donnent pour notre prière - écou-te et réponse de notre Dieu - des mots charoés del 'expérience de prière de toute une l iqnÉe depriants. Reprenons l 'exemple du ps 23. En-disant :" Le 5eigneur est mon berger ,, , nous trouvonsdes mots pour l ' invocation qui s,enracinent dansl'expérience du patriarche lsraë|, dans sa propreTor ïaçonnêe par toute sa vie, dans l,expériencede tous ses f i ls, De plus, si je peux reprendre sesmots, je peux aussi, à son ex-emple, à sà façon, for-ger les mots de ma propre invôcation : quel nomdonnerais-je à mon Dieu qui soit le frui i de monex.périence personnelle de vie et de dialogue aveclu i ?

Les Psaumes nous garantissent l,authenticité detoutes les expériences dont ils sont tissés, lls onrété triés,.éprouvés au long des siècles par tout unpeuple de.croyants ; ils nous restent irécieux etIn0rspensables parce qu'ils attestent I'expériencedu peuple auquel Dieu a parlé comme à aucunautre pour que tous les peuples apprennent sonlangage,

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ECHOS ETnÉsunnÉ D'HUMANITE

l l suffit de parcourir le Psautier même superfi-c iel lement, pourrencontrer à chaque page unhomme de chair et de sang, affronté à la maladie,à la mort ou sol l ic i té par la joie et la louange, sol i -daire de tout un peuple ou pourchassé par desennemis qui en veulent à sa liberté, à sa vie. Cette

rad ica l i té des s i tuat ions, des expér iences, vajusqu'à l'extrême et peut nous paraître excessive;elle nous semble en tout cas étrange surtout lors-qu'il s'agit des psaumes qui sontdes textesde priè-rb, Pourtant nous avons là une réalité omniprésen-te dans le Psautier : il vaut la peine de l'explorer'

Notons que le mot hébreu traduit par 'âme'estconcret : i 'est la gorge, par laquel le passe lesouffle.

" Je suis comme l'eau qui se réPand,tous mes membres se disloquent.Mon cæur est comme la cire,ilfond au milieu de mes entrailles.Ma vigueur a séché comme !'argile,ma lingue colle à mon palais. " (Ps 22,15-16)Voir aussi Ps 31,10; 38,8-9 ;102,4'

Cette façon de dire met en évidence combien,dans les ps-aumes comme dans toute la Bible, lecorps est Ie l ieu pr imordial où l 'homme existed'abord, où Dieu stéprouve de façon première, oùse joue la rencontre de l'homme et de Dieu.

Le psalmiste et son corps

Le psalmiste parle toujours comme un hommequi "'sait son corps " et c'est dans chaque partiecie son corps qu'ii fait I 'expérience de la détressecomme de la jôie, de la grâce comme du péché, dela vie comme de l'affrontement à la mort. Mais, nel 'oubl ions pas, quand i l par le du corps,. i lyvoi t tou-jours le lieu d'un combat qui dépasse le corps. Lestrovants qui " crient " dans les psaumes intègrentsans cesse'dans leur prière le langage du corps. Lepsalmiste s 'exprime à part i r de son corps, desiymptomes de sa souffrance, de son angoisse. Lesexemples sont innombrables :

" Pitié, Seigneuç ie dépéris !Seigneur, guéris-moi !Car je tremble de tous rnes o5de ioute mon âme, ie tremble. " (Ps 6,3-a)

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t

La prière aussi s'exprime par une gestuelle : lepsalmiste tend les mains, se prosterne...

" Entends la voix de ma prièrequand je crie vers toi,quand j'élève les mainsvers le Saint des Saints. " (Ps 28,2)Vo i r auss i Ps 5 ,8 ;88 ,10-11 ;95 ,6 .

" Dieu, tu es mon Dieu,je te cherche dès I'aube :mon âme a soif de toi;après toi languit ma chair,terre aride, altérée, sans eau. ' (B 63,2 cf. 84,3)

P. Brnucsnvp a su dire l'essentiel en quelqueslignes : " |Jinstrument fragile de la prière, la plussensible des harpes, le plus frêle obstacle à laméchanceté des hommes, tel est le corps. On al'impression que tout se joue là pour le psalmiste ;non que l 'âme lui indi f fère, mais au contraireparce que l'âme ne s'exprime et ne transparaît pasailleurs. Le Psautier est la prière du corps. La médi-tation elle-même s'y extériorise en prenant le nomde " murmure ". Le corps étant le lieu de l'âme, laprière traverse tout ce qui s'y produit. C'est lecorps lui-même qui prie : Tous mes os diront : Sei-gneur, qui est comme toi ?' (Ps 34,'10)." (La prièreà l'école des Psaumes, Concordance des Psaumes,Cerf, 1980, p.X-XX).

LA SOUFFRANCE ET LA MAI.ADIE

Citons encore P. BreucHnvp : " Ce qui fait parlersi fort la souffrance dans le cri des Psaumes, c'estce corps qui rend l'homme vulnérable, justementau niveau de ses désirs les plus simples. Rien n'exis-terait, sans le corps, de ce qui menace la sérénitéde la louange: guerres, pr isons, maladies. "

Dans l 'état de faiblesse, voire d'agonie, quevivent et décrivent les psalmistes, apparaît unesorte de délire où les images affluent pour dire

I 'angoisse indicible. En insistant sur les images debêtes féroces, de cornes acérées qui déchirent, degueules grandes ouvertes, les psalmistes arriventà dire avec des mots concrets ces grandes frayeursqui submergent l 'homme parfois et l 'enfermenten lui-même. Le psalmiste le sait, c'est le silenced'enfermement qui est générateur d'angoisse :

" Je suis resté muet, silencieux;je me taisais, mais sans profit.M on tou rme nt s' exaspéra it,mon cæur brûlait en moi.Quand j'y pensais, je m'enflammais,et j'ai laissé parler ma langue. " (Ps 39,3-4)

LE MAL ET LE PÉCHÉ

Dans l'univers des psaumes - mais c'est encorecelui des évangi les - , la maladie est considéréecomme un chât iment et nécessairement l iée aupéché. l l y a une façon simpl iste, immédiate etinacceptable d'entendre cela (la maladie, consé-quence du péché) mais i l y a aussi à comprendreune vérité profonde pour la foi. l lhomme de laBible affirme ainsi que Dieu est créateuI maître dela vie ; le mal, la souffrance sont une atteinte à lacréation de Dieu et la trace, en l'homme commedans la nature, des forces du mal. La responsabilitéest une autre question - décisive, lancinante - maisc'est le fai t d 'abord qui importe : le mal n 'estjamais le signe de Dieu, i l est le signe de l 'Adver-saire, du Satan. On comprend dès lors que, s ' i lconfesse son péché, le psalmiste le fasse à partir del'expérience concrète du corps :

" Rien n'est sain dans ma chair sous ta fureuLrien d'intact en rnes os depuis ma faute.Oui, mes péchés me submergent,leur poids trop pesant m'écrase.Mes plaies sont puanteur et pourriture :c'est /â le prix de ma folie. " (Ps 38,4-6. Cf. 31,11)

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LA VIE ET LA MORT

Les psaumes nous redisent aussi les grandes véri-tés dè l 'ex is tence avec un réal isme à touteépreuve : que toute vie est marquée par la mort,aifrontée à el le dès maintenant; que la mort estI 'horizon sur lequel se t isse la:vie'. ,

" Ma vie est au bord de I'abîme ;on me voit déià descendre à /a fosse'le suis comme un homme fini,ma place est parmi les morts' " (Ps 88,5-5'Cf.89;48)Et la mort est décrite avec des images concrètes

orises à la nature : la mer ou le monstre marin, lebouffre et la fosse.., Derrière ces images, la mortàpparaît terriblement Présente :'

" Les liens de la mort m'entouraient,le torrent fatal m'éPouvantait,des /iens infernaux m'étreignaienlj'étais pris aux pièges de la mort. " (Ps 18,5-5,c f ,68,16)

LA LOUANGE ET LA JOIE

le dernier mot (Ps 150) ! Et les psaumes nous pro-posent à nouveau d' inscrire cette réali té dansnotre corps :

" Je qarde le Seiqneur devant moi sans relâche ;i/ esià ma droi{e : ie suis inébranlable'Mon cæur exulte, mon âme est en fête,ma chair elle-même repose en confiance'Tu ne peux m'abandonner à la mortni taisser ton amivoir la corruption. " (Ps 16,8-10)Ces versets du Ps 16 seront repris dans les dis-

cours des Actes des ApÔtres, comme preuve de larésurrection du Christ en son corps (Ac 2,27 '31 ;13,34-37).

Nous retrouvons ici la prière gestuelle mais cettefois dans I'expression de la louange et de la fête :

" Pour toi, j'exulterai, ie danserai,ie fêterai lon nom, 6ieu Très'Haut' " (Ps 9,3't t . rt ,e ;86,7 ; 149,3)

" Tous les peuPles, battez des mains,acclamez bieu par vos cris de ioie ! " (Ps 47,2)

" Exaltez le Seigneur notre Dieu,prosternez-vous devant sa salnte montagne,car il est saint,le Seigneur notre Dieu' " (Ps 99,9, Cf ' 132,7 ;138,2)

" Levez les mains vers le sanctuaire,et bénissez le Seigneur. " (Ps 134,2)

Mais il est des éléments tout aussi présents quela souffrance, la maladie et la mort, c'est la louan-qe et l'action de qrâces : I'exubérance de la louan-!e s' impose danitout le Psautier jusqu'à en être

" Voici que |es méchants tendent l'arc :ils aiustent leur flèche à la cordepoirviser dans I'ombre I'homme au cæur droit. "i ps t1 ,2 , c f , 71 ,10 -11 )

Aux prises avec la violence

S' i l est une réal i té omniprésente dans lesPsaumes, c'est celle des ennemls, personnels oucol lect i fs , e t même ennemis de Dieu ' l ls sontdécrits sans comPlaisance :50

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" Garde-moi...loin des méchanB qui m'ont ruiné,des ennemis mortels qui m'entourent.lls s'enferment dans leur suffisance :I'arrogance à la bouche, ils parlent. "(Ps 17,9-10. Cf. 35,15 ;69,20-21).

" Mes ennemrs sont forB et vigoureux ;ils sont nombreux à m'en vouloir iniustement,ils me rendent le mal pour le bien ;quand je cherche le bien, ils m'accusent. "(Ps 38,20-21. Cf. 55,4 ;73,8-9; 143,3-4)

LA PilÈRE,CONTRE' LES ENNEMIS

l l est fréquent dans les psaumes- et ce n'est pasla moindre source de scandale - de 'prier contre'les ennemis (cf. P. Beaucxam% - Molence et Bible.La prière contre les ennemis dans les Psaumes ",Documents Episcopat n'11, l9B6). Le psalmistedemande à D ieu un sor t s in is t re pour lesméchants, pour les impies en général :

" Traite-les d'après /eurs acteset selon leurs méfaib ;traite-les d'après leun æuwetrends-leur ce qu'ils méritenL '(Ps 28,4. Cf. 58,7-1 1)

" Que les pécheurs disparaissent de la terre !Que /es impies n'existent plus ! '

(Ps 104,35. Cf. 140,10-12)

Quant aux peup les ennemis d ' l s raë l on seréjouit de leur défaite que l'on veut sanglante :

" TraiteJes comme tu fis de Madian,de Sisera et Yabin au torrent de Qissôn :ils ont été anéantis à Enn-Dor,ils ont servi de fumier pour la terre. " (Ps 83, 10-1 1 )

" Mais ceux qui pourchassent mon âme,

qu'ils descendent aux profondeurs de la terre,qu'on les passe au fil de l'épée,qu'ils deviennent Ia pâture des loups ! "(Ps 63,10-1 1. Cf . 149,7-9).

Cependant il faut remarquer avec P. BrnucHnvpque " ce qui frappe surtout dans cet ensemble,c 'est la rareté de la qual i f icat ion'ennemis de Dieu'(cf . Ps 68,2.22;74,23 ;78,66). Beaucoup plus sou-vent, le psalmiste demande que soient f rappésceux qu ' i l appe l le 'mes ennemis ' . l l s 'ag i t d 'unconf l i t où est engagée la vie même de celui quiappel le à I 'a ide. Ceci n 'est donc pas à confondre,comme pourrai t le faire un lecteur de la Bible dis-trai t , avec une guerre sainte dans laquel le sontpourchassés ceux qui pensent ou qui croient autre-ment. La racine du conflit est celle de la vie corpo-relle. " (ibid. p.2).

LE CRI CONTRE DIEU

Rechercher Dieu, son visage, sa présence, c'est lademande la plus pure qui puisse jai l l i r du cæur duf idèle ; mais ce désir même doit subir l 'épreuve etc'est l 'expérience d'un Dieu qui se cache :

" Pourquoi, Seigneur es-tu si loin ?Pourquoi te cacher aux iours d'angoisse ? "(Ps 10,1. Cf. 13,2-3)

" Mon Dieu, mon Dieu,pourquoi m'as-tu abandonné ? (...)Mon Dieu, j'appelle tout le iour,et tu ne réponds pas. " (Ps 22,2-3).

C e s e n t i m e n t d e l ' a b a n d o n , d e l ' a b s e n c e ,s'exprime parfois sous forme de quest ions plusradicales qui mettent Dieu en accusation :

" Réveille-toi ! Pourquoi dors-tu, Seigneur ?Lève-toi ! Ne nous reiette pas pour touiours.Pourquoi détourner ta face,oublier notre malheur, notre misère ? "(Ps 44,24-25. Cf. 80,5-7 ; 89,47)

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" Seras-tu toujours irrité contre nous ?Maintiendras-tu ta colère d'âge en âge ? "(Ps 85,6)

Plus encore, le psalmiste peut en arr iver auxaccusations contre Dieu et lui reprocher sa condui-te, sa cruauté même :

" Tu nous traites en bétail de boucherie,tu nous disperses parmi les nations.Tu vends ton peuple à vil Prix,sans que tu gagnes à ce marché.Tu nous exposes aux sarcasmes des voisins,aux rires, aux moqueries de I'entourage. "(Ps 44,12-14. Cf. 69,8-10 ; 88,16-19).

RETROUVER SON ÊTNE CORPOREL

Les véritables expériences que nous faisons nesont jamais purement in te l lec tue l les ou sp i r i -52

tuelles, elles impliquent toujours nos sens et notrecorps qu'elles marquent profondément, définiti-vement par fo is . Souvent d 'a i l leurs , c 'es t la" mémoire du corps " qui nous ramène à ces expé-riences décisives. Cette dimension corporelle denous-mêmes, notre civilisation et nos habitudeschrétiennes nous ont souvent conduit à l 'enfouir,ou oire à la refuser, Les Psaumes nous donnent lachance de la redécouvr i r ; dans leur langageconcret ils doivent être pris à la lettre comme unechance de refaire vivre en nous des pans entiersd'humanité que nous avons laissé scléroser.

Réapprendre son corps pour prier

l l y a un aspec t l ibéra teur de la p r iè re despsaumes qui consiste à vivre les mots du texte enles assumant soi-même. ll faut se laisser entraînerpar leur réal isme ; nous n'oserions pas prononcerspontanément ces mots-là parce qu'ils sont tropfor ts , parce qu ' i l s nous imp l iquent t rop . Lespsaumes sont la chance de reprendre pied dans unmonde censuré ; i ls sont la chance de pouvoir" parler " cela dont précisément nous avons.prisl'habitude de ne pas parler. Car nous ne voulonsplus reconnaître que nous sommes dans un corpsqui nous lie, nous retient, nous écrase parfois, mais

Pédagogie d'humanité

La radicalité des situations, le réalisme jusqu'àl'outrance, voilà de quoi sont faits pour une bonnepart les psaumes qui sont nos " outils de prière ".On peut s'en scandaliser, penser qu'il est impos-sible de garder de tels textes pour la prière chré-t ienne," A quand l 'épurat ion des Psaumes ? N'est-ce pas un malheur pour I 'Eg l i se de pr ie r unerévélation en retard ? " écrivait L. EvtLY en parlantde la prière. Les auteurs de la réforme liturgiqueont voulu tenir compte du sent iment de répu-gnance éprouvé par beaucoup: " Un petit nombrede psaumes et certains versets plus durs ont étéomis à cause des difficultés qui pourraient s'éleverdans la célébration de l'office en langue vernacu-laire, " (cité par P. Benucnnup, ibid. p.2)

On peut penser - et c'est ce que nous allonsessayer de montrer - que ces réactions sont super-ficielles et qu'elles ne font pas droit à la profondehumanité du Psautier, qui est tout simplement lanôtre. Les psaumes nous ramènent sans cesse auxvéritables enjeux de notre existence.

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que ce corps est notre seul lieu de vérité, notreseule chance d'existence et d'exoression vraimenthumaine, vraiment personnel le.

Les psaumes nous proposent aussi de réactual i -ser dans notre corps l 'expérience de la joie et dusalut. Oserons-nous un jour faire simplement ceque disent les psalmistes ? Oserons-nous un jour," lever les mains pour la pr ière ", " battre desmains " pour notre Dieu ? Oserons-nous esouisserun pas de danse et laisser monter en notre coroset en notre cæur cette vibrat ion heureuse d'unel ibérat ion, d 'un salut qui s ' inscr i t aussi dans notrechair ? Les psaumes sont la chance de redonnercoros à notre bonheur.

Réapprendre I 'humanité de Dieu

Les psaumes nous feront redécouvrir aussi desv isages de D ieu que nous n ' imag inons mêmeplus, à force d'avoir entendu dire qu' i ls n 'étaientq u e d e s a n t h r o p o m o r p h i s m e s . Q u a n d l e spsaumes parlent de la miséricorde de Dieu (Ps51,3 par ex.) , i ls le font avec les mots qui disentle sein maternel, donc la capacité d'engendreçde por te r e t de donner la v ie ; i l s met ten t enavant les gestes de la tendresse, le contact del'enfant et de sa mère (Ps 131,2). Les psaumes uti-l isent toutes les possibi l i tés des réal i tés de la viehumaine e t corpore l le pour d i re D ieu . 5 i D ieu aun v isage, des yeux , un nez , des ore i l les , unebouche, c 'est pour montrer ou cacher ce visage,c'est pour voir la misère de son peuple, écoutersa pr ière, lu i répondre et lu i par ler. Jamais lespsalmistes ne sont dupes des mots, mais ils saventb ien que sans eux , sans les réa l i tés humainesqu ' i l s donnent à sa is i r , i l n ' y a p lus de D ieu quedes idées, que des abstract ions.. . et f inalement i ln 'y a plus de Dieu ! Et des chrét iens quicroient àl ' incarnat ion en Jésus ne devraient oas avoir tantde mal à comprendre et à vivre tout cela avec lesosa I m istes.

DE LA VIOLENCE AU PARDON 1

Un premier schéma est c lairement l is ible dansles psaumes, celui de I'ennemi travaillant à sapropre mort:

" Qui ouvre une fosse et la creusetombera dans le trou qu'il a fait.Son mauvais coup lui revient sur la tête,sa violence retombe sur son crâne. " (Ps7,16-17)

" Quand le mal tue le méchant, cela ne vient pasdu dehors comme un coupere t qu i tombe oucomme une intervention du ciel sous forme spec-taculaire. C'est seulement la manifestat ion dansI 'homme mauvais de ce oue le mal est en vér i té. l ly a là comme un respect de l'être : le mal ne peutpas produire le bien. " (ibid. p.7).

Nous pouvons comprendre ainsi l 'un des res-sorts qui sont capables de faire évoluer la violence." Dès le dépar t la p r iè re cont re les ennemisi m p l i q u e c h e z l e s u p p l i a n t u n e p a t i e n c e p a rlaquel le i l met un frein à l ' inst inct de violence,dans un monde où celui-ci se déchaîne quot idien-nement. Dans cette situation dont il est supposéêtre la vict ime. le Psalmiste ne fai t oas bénir sonépée ni son arc ni ses chevaux. Cette prat iqueconnue n'est oas la sienne. l l ne demande oas àdevenir plus fort. Sa prière attend tout de Dieuseul. Bien que ce soi t le méchant qui t ravai l le à sapropre perte, cette issue est demandée à Dieu oubien, après coup, el le lui est at tr ibuée : ' l l retournesur eux leur méfait' (Ps 94,23). " (ibid. p.6).

" Dans cette perspective, la prière contre lesennemis peut garder tou t son sens quand e l ledemande la destruct ion de leur mal, non cel le deleur personne. Les ennemis seront détrui ts quand

1. Nous uti l isons ici différents textes de P. Beaucsnup.cités ou résumés.

53

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i ls deviendront justes ! Ce mot de 'justice', auquelnous a conduits notre réflexion, est au cæur de ceoui nous est demandé dans la lecture du Psau-tier. " (rbid. p.7).

Le combat du Christ et de Satan

Une deux ième remarque s 'enrac ine dans larelecture néo-testamentaire des Psaumes. En effetles premiers chrét iens n'ont pas reculé devantl'emploi de " psaumes de violence " - ceux quenous voudrions expurger du Psautier -, i ls y " ontdécouvert le schéma de la lutte du Christ contreses ennemis. La mort a été engloutie dans la vic-toire (1 Co 15,54) : ce passage de Paul invoqueexplicitement l 'Ecriture, mais la cite d'autant pluslibrement qu'il peut s'appuyer sur de nombreuxtextes (doÀt nous avons ci tés quelques-uns) :l ' imaqe du qouffre dévorateur, se dévorant lui-mêmé " Ubi-d. pJ). Ainsi les ennemis prennent-ilsune autre dimension : ils se révèlent comme lesfigures du Mal.

Le combat spirituel entre le Christ et I'Adversai-re n'est pas dans les idées, il engage des personneset puissances de ce monde. " Dans les psaumes,cette lutte se situe souvent entre le peuple élu etles nations paÏennes, entre le juste fidèle et lesimpies (...) ; les ennemis historiques des Psaumesn'existent plus. Mais il reste des armées en présen-ce et nous sommes dans leurs rangs' La ligne defront passe d'abord au-dedans de nous-même' Lesimprécat ions et malédict ions peuvent toujourstomber sur la part de moi-même qui résiste auRègne de Dieu. Elle passe de même au cæur deceux qui m'entourent, dont je veux le bien et dontje demande que le mal soit extirpé " (Le Psautier,p.35a-355).

Une troisième remarque s'impose encore. ll y aun chemin de conversion qui traverse toute laRévélation et qui a progressé jusqu'à la plénitudedu Christ : de la violence à l'amour, de la 'prière

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contre les ennemis' à la 'prière pour les ennemis'.Nous devons reconnaître que nous avons sanscesse à refaire ce chemin dans sa totalité, depuisson commencement jusqu'à son terme' Certainscris des psaumes sont peut-être d'un homme 'pri-

mitif ', loin encore de l'Evangile, mais reconnais-sons alors aussitôt que cet homme-là est toujoursau fond de nous I Nous préfererons toujours éviterde le voir mais cette reconnaissance-là peut être lepremier pas de I 'humble conversion qui conduiraàu pardôn des offenses. Celui qui n'arrive pas àdire : " Pardonne-nous comme nous pardonnonsaussi " trouve du moins dans les Psaumes les motspour confier à Dieu le jugement des méchants etj lour échapper ainsi au premier mouvement de lavengeance.

APPRENDRE LA SOLIDARITÉ

5i nous y réfléchissons bien, la place de la viole.ncedans les piaumes peut nous orienter vers uneprêreen connivence avec notre monde d'aujourd'hui oùla violence est si présente. " Cet homme violent àforce d'être oppiimé, même si en nous (Dieu leveuille) il est converti, i l existe par masses entièresdans le monde d'aujourd'hui. Est-c.9 qu'il n'y a pas,de partout, une clameur qui mqnte vers Dieu ? Est-ce lu'elle se soucie toujours dlune règle chrétiennede iardon que, si souvent, elle,ignore et qu'elle n'apas vu beaucoup pratiquer ? PÔ-urtant cette clameuràui demande iuitice peut bien, nous semble-t-il,être sans hainé. Quand nous accueillons la prièredes psaumes, nous accueillons en noùs cètte cla-meur que nous appelons souvent ' imparfai te ' .

Clameur contemporaine, clameur non-chrétienneet pourtant clameur juste. "

" C'est là qu'une lecture historienne ne suffiraitpas à tout dire, si elle laissait croire que les Ps.aumesiont à l'heure d'avant Jésus-Christ. Uheure d'avantJésus-Christ sonne encore tous les jours dans notre

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?

monde et Dieu qui a reçu dans son Christ le cri par-fois barbare des psaumes ne I'entendrait pas s'ils'élève à partir de I'humanité qui nous est contem-poraine? Or c 'est ce cr i qu' i l nous est proposéd'assumer, de prendre sur nous. " (Doc. Ep., p.9).

Par ai l leurs, nous pouvons encore nous sent irdépassés par la diversité et la radicalité des situa-t ions humaines décr i tes e t évoquées dans lesosaumes. Comment être tout à la fois cet hommemalade, humilié, confronté à la mort, cet hommeguéri, l ibéré, rendant grâce à haute voix, dansantdevant son Dieu ? Cette diversité et cette radicalitépeuvent nous inviter à retrouver dans les psaumesious /es hommes d'auiourd'hui ; il y a tous lesjours , à chaque heure , de par le monde, deshommes pour qui sont vraies, à la let tre, lesparoles des psaumes. Traqués, affamés, torturés,ces hommes sont multitude bien qu'ils se sententseuls ; quand il s'agit d'eu:ç les pÉaumes n'exagè-rent pas, hélas ! La dramatisataon, la radicalisationdeviennent réal i té quand i ls 'agi t de l 'h istoire deI'humanité, de notre humanité.

Les psaumes nous font accéder à ce niveau depr iè re un iverse l ; au l ieu de nous fa i re p r ie rt' pour ", ils nous font dire 'Je' à la place de... Jesuis devant Dieu cet homme traqué, affamé, je suisl'humanité entière affrontée à la violence et à laréal i té du mal. La pr ière des psaumes est là pourélargir notre pr ière, notre cæur, aux dimensionsdu monde. El le est là aussi pour la mener à sonaccomplissement; tous ces cr is d 'hommes, disper-sés, isolés, ont été un jour rassemblés par Celui quiles a fai t s iens une fois pour toutes' La sol idar i téinscrite déjà dans la prière des psaumes s'accom-plit dans la solidarité dans Ie Christ, dans son corpsiouffrant et mourant sur la croix "pour rassemblertous les enfants de Dieu dispersés ".

" Avant de répondre au cr i du malheur, Dieu l 'afai t s ien. Jésus a scel lé alors l 'uni té de toutes lessouffrances dans la sienne. l l a signé la pr ière desPsaumes comme pr iè re v i r tue l le pour tous les

hommes et il nous donne droit, sans fiction, dedire'Je'à la place des humil iés, d 'apprendre d'euxce que lui-même a porté. " (P. Brnucultttp, Psaumes,nuit et jour, p.25).

Par la louange aussi les psaumes peuvent_nousfaire entrer dans la sol idar i té de la pr ière. Quelsque soient nos propres états d'âme, ne devons-nous pas être câpables, selon le mot de Paul, de" nous réjouir avec ceux qui sont dans la joie ", sur-tout s i léur joie ne sai t pas encore s 'expri .merdevant Dieu. '5 ' i l est un caractère très spécif iqueaux psaumes, c'est qu'ils sont souvent appel à lalouànge, in te rpe l la t ion adressée à d 'au t reshommés pour qu' i ls prennent part à la louange, àla fête :

" Entonnez pour le Seigneur I'action de grâce,jouez pour notre Dieu sur la cithare ! "(Ps 147 ,7 . Cf . 95,1-2; 100,1 -2).

" La relat ion de louange s' instaure ainsi dansl 'espace de trois personnes ou de trois pôles : lepsaimiste invi te quelqu'un d'autre à louer Dieu, unhomme décri t Dieu pour son prochain et I ' invi te àfaire chæur, à faire chorus avec lui. C'est bien cequ' i l faut comprendre dans la formule classique

" Louez le Seigneur " , Laudate Dominum,impéra-t i f p lur iel qui i raduit l 'hébreu hal lelou Yah. Et I 'onajoute : " li est bon ". Dans ce refrain si caractéris-t ique du Psaut ier sont impl iquées trois personnes,trôis pôles : un homme, Dieu et le prochain de cethomme. " (P. Brnu*rave, La prière à l'école desPsaurnes, p.Xll).

Ainsi naît la louange d'un peuple : quelqu'un l 'ae n t o n n é e , e l l e s e p r o p a g e , s e c o m m u n i q u ecomme une onde et chacun apprend de son pro-chain à redire les mervei l les de Dieu. Ainsi avec lePsautier, nous est donnée la chance de faire entrertous les hommes nos frères dans une suppl icat ionet une louange qui osent s 'exprimer devant unDieu qu'ils ne connaissent peut-être pas encore,ou auquel i ls ne savent plus parler.

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LA LECTURE CHRETIENNEDES PSAUMES

Les Psaumes dans le Nouveau Testament

Les Psaumes sont le livre des Ecritures le plus citédans le Nouveau Testament : plus de 360 citationsselon les tables de K. Anruo, environ le tiers descitations du N.T. La raison en est sans doute que celivre est très tôt apparu comme le meilleur 'résu-

mé'de la Bible, contenant en lui l 'essentiel de l'his-toire et de l'expérience du peuple de Dieu. Ajou-

tons à cela qu'il était un livre sans doute très fami-lier à tout juif fidèle, mémorisé et plus facile à uti-liser librement que la Torah, objet de tant de com-mentaires. Dans le Nouveau Testament on peutrepérer une double approche des Psaumes. (VoirJ. Tnuglrr, art, Psaumes, dans Dictionnaire de spi-ritualité, Xll, 1985, col. 2552-59).

LEs PSAUMES A LA SYNAGOGUE

Certains ont voulu voir dans la répartition duPsautier en cinq livres un indice de son utilisationdans le culte synagogal, en correspondance avec lescinq livres du Pentateuque utilisés pour la lecturehebdomadaire. Il y a 153 péricopes réparties surtrois ans auxquelles correspondrait le nombre despsaumes, en tenant compte, dans la collectionactuelle, de ceux regroupés en un seul pour arriverau chiffre de 150. Une telle hypothèse ne repose quesur des indices trop fragiles.

Les Psaumes sont présents dans les prières quo-tidiennes de la synagogue, mais essentiellementdans les prières qui encadrent et préparent la réci-tation des éléments essentiels que sont le ShemaIsraël etla Amidah, les Dix-huit bénédictions (cf.Prières juives, Suppl au Cahier Evangile 68,p.21-22). On ne peut imaginer que les Psaumes aient eu

autrefois une place centrale qu'ils auraient perdueensuite.

Les Psaumes étaient aussi présents dans leshomélies synagogales, comme tous les Ecrits (latroisième partie de la Bible hébrarque). L habitudes'était prise en effet d'ouvrir I'homélie par la cita-tion d'un verset des Ecrits qui en annonçait lethème ; le prédicateur remontait de ce verset au textede la lecture de la Torah éalairée par la lecture desProphètes (Haphtarah). Ainsi était refaite cetteunité des Ecritures si fondamentale dans la théolo-gie et la pratique juives pharisiennes.

Il semble probable que le Psautier ait servi habi-tuellement dans la prière privée personnelle, qu'ilatt étéle livre de dévotion du juif pieux, comme iln'a iamais cessé de l'être par la suite.

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l l s 'agi t d 'abord d'appuyer une aff i rmation, defonder une croyance sur un argument d'autorité ;ainsi en Eph 4, 26 : " Etes-vous en colère ? Nepéchez pas (= Ps 4,5), que le soleil ne se couche passur vo t re ressent iment . " l l s 'ag i t encore dereprendre des idées déjà exprimées dans la Bible;on about i t ainsi à des textes t issés de réminis-cences : le Magnificat (Lc 1,215-55) ou le Eenedictus(Lc 1,68-79) en sont des exemples parfai ts. Onutilise aussi spontanément des expressions ou desmots que tout le monde reconnaît.

L'application au ChrisL Ceci se fera sous deuxmodes : tantôt le psaume est compris comme par-lant du Christ, tantôt Cest h communauté quis'adresse au Christ avec les moB du psaume. Cecipeut se faire très simplernnt en identifiant le psal-miste au Christ dans l'interprÉtation : ' Tout cela,Jésus le dit aux foules en paraboles, il ne leur disaitrien sans paraboles, afin qræ t'acromplisse ce quiavait été dit par le prophète:.t'utwiraila bouchepour dire des paraboleT jepodlinerai des chosescachées depuis la fondation du monde. (= Ps78,2) " (Mt 13,34-35).

HEXEMPLE DU Ps 110,1

" Oracle du Seigneur à mon seigneur :5iè9e â ma droite,et je ferai de tes ennemisle marchepied de ton trône. "

Les chrétiens du Nouveau Testament ont util iséla première partie de ce verset dans une ligne mes-sianique (cf. M. Gouncues, Cahier Evangile25, p.45-a6 ; 48-52), pour exprimer leur foi nouvelle etd'abord la proclamation de la résurrection : " CeJésus, Dieu l 'a ressuscité, nous tous en sommestémoins. ( . . . ) David, qui n 'est certes pas monté auciel, a pourtant dit : Le Seigneur a dit à mon Sei-gneur : Assieds-toi à ma droite jusqu'à ce que j'aie

fait de tes adversaires un escabeau sous tes pieds.Que toute la maison d'lsraël le sache avec certitu-de : Dieu l'a fait et Seigneur et Christ, ce Jésus quevous, vous avez crucif ié. " (Ac2,32-36. Cf . Ep 1,20 ;He 8 ,1) .

La lecture que Pierre fait de ce psaume impliqueplusieurs présupposés : I'application de ce versetau Mess ie , la cer t i tude que ce lu i -c i ne peutprendre place à la droite de Dieu qu'après êtremonté au ciel, lJexpérience pascale ouvre le sensdu texte bien au-delà de sa lecture immédiate ethistorique. C'est cette même expérience que I'onretrouve exprimée par Etienne au moment de sonmartyre : " Mais lui , rempl i d 'Espri t 5aint, f ixa lec ie l : i l v i t la g lo i re de D ieu e tJésusse fenantâ /adroite de Dieu. Voici, dit-il, que je contemple lescieux ouverts et le Fi ls de I 'homme debout â /adroite de Dieu. " (Ac 7,55-56).

l l ne reste du verset de notre psaume que I 'a l lu-sion " à la droite de Dieu ", et son évocation semêle à cel le de la vis ion du prophète Daniel par-lant d 'un mystér ieux Fi ls d 'homme venant sur lesnuées du ciel (Dn 7,13-14). Le rapprochement deces deux textes est un point capital à relever. Lel ien peut sans doute remonter à Jésus lui-même :les évangél istes du moins rapportent ainsi sesparoles au moment de la Passion, en réponse à laques t ion du Grand Prê t re : " De nouveau legrand-prêtre l ' interrogeait ; i l lu i di t : Es-tu le Mes-s ie , le F i l s du D ieu bén i ? Jésus d i t : Je le su is , e tvous verrez le Fils de I'homme siégeant à la droitedu Tout Puissant et venant avec les nuées duciel. " Mc 14,61-62 et par.). Les deux mêmes textessont associés en référence à la glor i f icat ion deJésus et à son dernier avènement. . , nouvel élarois-sement de sens que précisera la deuxième pait iedu verset.

Un dernier pas va être franchi dans I ' ident i f ica-tion de ce mystérieux " Seigneur " auquel s'adres-se l 'oracle divin du Ps 110,1 : de la digni té messia-

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nique, on va passer à la dignité divine. Ce passages'amorce déjà dans la Lettre aux Hébreux : " Etauquel des anges a-t-il jamais dit : Srege à ma droi-te jusqu'à ce que j'aie placé tes ennemis en mar-chepied de tes pieds ? " (He 1, 1 3).

Ma is on ne le t rouvera c la i rement expr iméqu'au l le siècle dans l 'Epître de Barnabé : " Encoreune fois, manifesté dans une préfiguration char-nel le, voi là Jésus qui n 'est pas f i ls d 'un hommemais f i ls de Dieu. Et comme David redoutai t , en lapercevant, l 'erreur des pécheurs qui allaient direque le Christ est fils de David, il fait lui-même cetteprophétie : Le Seigneur a dit à mon seigneur :Assieds-toi à ma droite jusqu'à ce que je fasse detes ennernis ton marchepied. " (Xll,10).

La deuxième partie du verset a fait l'objet, dansle N.T., d'une interprétation aussi riche que la pre-mière. L ' image guerr ière des ennemis sous lespieds est approfondie : le dernier ennemi que leChrist doi t détruire ainsi , c 'est la mort. St Paulécrit: " Ensuite viendra la fin, quand il remettra laroyauté à Dieu le Père, après avoir détruit toutedomination, toute autorité, toute puissance. Car ilfaut qu'il règne, jusqu'à ce qu'i/ ait mis tous sesennemis soussespleds. Le dernier ennemi qui seradétruit, c'est la mort, car il a tout mis sous ses pieds(= Ps 8,7). " (1 Co 15,24-26).

Nous retrouvons dans ce texte, avec Ps 8,7,l'association de deux citations qui s'éclairent l 'unel'autre en éclairant le Mystère du Christ. Paul lesutilise de nouveau dans la lettre aux Ephésiens :" Son énergie, sa force toute-puissante, il les amises en æuvre dans le Christ, lorsqu'il I 'a ressus-cité des morts et fait asseoir à sa droite dans lescieux, bien au-dessus de toute Autorité, Pouvoir,Puissance, Souveraineté et de tout autre nom qui

pu isse ê t re nommé, non seu lement dans cemonde, mais encore dans le monde à venir, Oui, t7a tout mis sous ses pieds et il I'a donné au sommetde tout, pour tête à l'Eglise qui est son corps, lap lén i tude de Ce lu i que D ieu rempl i t lu i -mêmetotalement. " (Ep 1,20-23. C't.1 Pi 3,22).

Pour bien saisir toute la portée de ce rapproche-ment, il faut reprendre les v.5-7 du Ps 8 :

" Tu I'as voulu un peu moindre qu'un dieu,le couronnant de gloire et d'honneur ;tu I'établis sur les æuvres de tes mains,tu mets toutes choses à ses pieds. "

En évoquant la création de l'homme et sa domi-nat ion sur l 'ensemble de l 'univers au commence-ment (Gn 1,26.28),le psaume renvoie évidemmentà la suite, la perte de cette pleine domination parle péché (Gn 3) et en conséquence, la mort (cf. Sg2,23-24). Ainsi le Christ apparaît-il comme le Nou-velAdam restauré dans sa dignité de chef de toutela création : une restauration déjà réalisée par lasession de Jésus à la droite de son Père, mais pour-tant encore à venir ; comme le disai t 1 Co 15,26,car i l y a encore un dern ie r ennemi : la mor t .L 'épître aux Hébreux témoigne aussi de cetteattente : " (Le Christ), après avoir offert pour lespéchés un sacrifice unique, siège pour toujours àla droite de Dieu et il attend désormais que sesennemis en soient réduits à lui servir de marche-pied. " (He 10,12-13).

Cet accomplissement se trouve décrit aux cha-pitres 20 et 21 de l'Apocalypse. Citons seulementles versets qui font directement écho à ce que nousvenons de dire : " La mort ne sera plus. ll n'y auraplus ni deui l , ni cr i , ni souffrance, car le mondeancien a disparu. Et celui qui s iège sur le trône di t :Voici, je fais toutes choses nouvelles. " (Ap 21,4-5).

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Les Psaumes aux trois premiers siècles

l l y a tout l ieu de penser que les psaumes n'ontpas été d'abord psalmodiés dans les églises chré-tiennes des deux premiers sièrles. Mais ils étaientcependant lus dans les assemblées à l'égal desautres livres de la Bible et donc déjà interprétéschrétiennement. C'est seulenænt au second siècleque les sources littéraires deviennent suffisam-ment a bonda ntes pour ærmetùe des conclusionsà peu près certaines. (Voir B. FEq,l-e Christ dansles Psaumes, La Maison Dbun,|95l, p.86-113).Avec r. cELTNEAU (Les Psaulrc à lCgoque patris-tique, la Maison Dieu 135, l9rl p.99t15), onpeut reconnaître à cette p{riodc deux formesd'utilisation : pour les besoûrùfaobgÉtique etde la prédication d'une partdæbpriaVe person-nel le d'autre oart .

-r&{|t$tNrstist,lsll|irÈ:

Utilisés comme lectre+ l€5 P:aumes, dans laligne du Nouveau Testamefit sont alors commen-tés par les Pères pour annoncer le mystère de JésusSauveur. Cette façon de faire se retrouve chez Jus-tin ou chez lrénée, ôez Hippolyte de Rome ouClément d'Alexandrie. Ainsi le Ps 23 est-il comprisdu Christ Bon Pasteur. Ainsi le " soleil " du Ps 19est considéré, depuis Justin, comme le Christ.

B. Ftssrn note aussi que cette lecture chrétiennedes psaumes est volontiers centrée sur la croix glo-r ieuse. Par exemple " les Ps 1-3, indépendants l 'unde I'autre et très différents en eux-mêmes, ren-

LA PRÉDICANOil DT' CHRIST . &' r:-.., . .. ' . :: t....t,..r, r,---t:,: i ,rr!;r, irrr,, i, i)r lrdli i l

dent un son commun, celui de la Croix, pour lapiété afr icaine à l 'époque de la persécut ion deDèce " (v.250). llarbre planté près d'un ruisseau duPs 1 est interprété comme I 'arbre de vie dontdécoulent les eaux bapt ismales. " Moi, j 'a i étésacré roi sur Sion, la sainte montagne " du Ps 2 estcompris comme dit du haut de la croix. I 'arbred'où le Seigneur a manifesté sa royauté à toutesles nat ions ; c 'est sur l 'arbre de la croix que leChrist meurt pour ressusciter v ictor ieux et qu' i lpeut dire : " Je me couche et je dors ; je m'évei l le,le Seigneur est mon soutien (Ps 3,6). On retrouvecette référence provilégiée à la croix jusque dansl e s a d d i t i o n s , t r a d i t i o n n e l l e s e n E g y p t e , a u xPsaumes 51 : " Purifie-moi avec l'hysope par /esang du bois " et 96 : " Le Seigneur règne par /eboiv".

,, - * f rl': î.F, .1_F*_:"_o,""T. * 5 f kI $ s, i,,!sDans la pr ière, dès le l le siècle, on s 'accorde sur

deux pr incipes de base : " le psaume est la voix duChrist vers son Père " et " le osaume est la voix del 'Egl ise s 'adressant au Christ " . Partout où l 'onentend dans les Psaumes une voix isolée, cel le oeDavid, du roi, de l' innocent persécuté ou du justesauvé, les premiers Pères aiment entendre la vorxdu Christ . Là où c 'est le cr i du peuple de l 'a l l iance,i ls entendent la voix de l 'Egl ise. Le génie d'Augus-tin, au Ve s., parviendra à fondre ces deux perspec-tives en une seule et à résumer ainsi : " Le psaume,voix du Christ total, corps et tête ".

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Les Psaumes dans l'Ég[sedes IV" et Ve siècles

Depuis le ll le siècle peut-être, en tout cas à partirdu lV", le l ivre des Psaumes semble s ' imposercomme Ie livre de base de la prière liturgique deschrétiens ; les grandes assemblées, les vigiles dudimanche ou dès fêtes dans toutes les églises ne seconçoivent plus sans le chant des psaumes'

Les Egl ises connaissent alors une formidablemutatioî : les conversions se multiplient, et lesconséquences ne sont pas seulement positives : leniveau moyen des chrétiens s'effondre. Le tempset les moyôns manquent pour éduquer la massedes catéchumènes, trop nombreux I Pour parerau plus pressé, les évêques vont organiser uncatéchudrénat minimum - ce sera le carême -

avec des ex igences l im i tées ' l l s renoncent àdemander aui aspirants une connaissance globa-le des Écritures saintes dans leurs grandes par-ties : le Pentateuque, les grands Prophètes, lesPsaumes et les Evangiles; on se contentera clêsor-m a i s d e l e u r d e m a n d e r d e m é m o r i s e r l e sPsaumes. Concrètement ceci se fit à travers unusaqe mass i f du Psaut ie r dans la l i tu rg ie . Enmêrie temps, les évêques entreprirent de com-menter sysiématiquement les- Psaumes pour lescatéchumènes : nous avons effectivement à cetteépoque une extraordinaire f loraison de recuei lsd'homél ies sur le Psaut ier.

Une seconde raison pour cet'envahissement'dela liturqie chrétienne par le Psautier serait à cher-cher dâns la désaffett ion progressive pour leshvmnes chrétiennes librement composées dans lescômmunautés des premiers siècles et dont lecontenu doctrinal était parfois peu orthodoxe'Nombre d'évêques cherchaient à les remplacer etle Psaut ier apirarut comme un subst i tut idéalparce que bibiique et donc incontestable.60

LES PSAUMES CHEZLES MOINES

A cette même époque, apparaissent dans lescommunautés - les textes sont nombreux qui enfont foi - une catégorie spéciale de fidèles, les'ascètes' et les 'vierges'. La plupart du temps, cesont des hommes ou des femmes qui pratiquentdans la communauté locale une vie évangél iqueen oardant le célibat, en s'adonnant à la pénitenceet 5la prière. lls sont évidemment les plus assidusaux viqiles nocturnes, dominicales et festives, etaux di îerses assemblées ; i ls assurent la bonnemarche de la psalmodie et du chant comme le feraplus tard le 'chceur'.

Evidemment les moines, ermites ou cénobites,des déserts d'Egypte ou de Syrie vont eux .aussifaire grand usiç des psaumès pour leur vie deorière, Les liturqies communes ne sont souventbu'hebdomadai ies mais i l y a un usage pr ivé despsaumes bien attesté parmi eux' La pratique estlelle d'une lecture suivie mais priée du Psautier' Lemoine récite le psaume - il sait le Psautier parcæur - souvent aisis dans sa cellule, puis il s'arrête,se lève et se prosterne pour la prière, e.n généralsilencieuse mais qui deviendra plus tard une véri-table oraison psalmique faite à partir du contenudu psaume. i l es t c la i r .Qu 'u19 te l le p ra t iqueintègre tous les temps de la prière : écoute de laParofe, méditat ion-ruminat ion de ce qui a étéentendu, puis réponse libre au gré {e l'Esprit, laorière proprement dite. Elle a été à la base de la'lectio

divina des siècles suivants. En fait les pra-t iques des communautés locales, dans les basi-liques et les cathédrales, et celles des moines vonts'énrichir l 'une l'autre au cours des siècles suivants'

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UEXÉGESE DES PSAUMESCHEZ LES PÈRES

La lecture chrétienne des psaumes chez les Pèresdes lVe et Ve s. a fait I 'objet d'une étude a peu prèsexhaustive de M.J. Ronoeau (Les commentairespatristiques du Psautier, Rome 1982, 1985). Nousne pouvons mieux faire que de résumer sa métho-de et ses conclusions.

" 'La quest ion capitale, pour comprendre lesPsaumes, c'est de pouvoir discerner au nom de quil'on doit comprendre que les paroles sont dites, oub ien à qu i e l les sont d i tes . ' Cet aver t i ssementd'Hi laire de Poit iers met en valeur ce qui, dans levaste champ de l 'exégèse patr ist ique, dist inguel ' interprétat ion des Psaumes. ( . . . ) El le consiste às' interroger sur I ' ident i té des personnages mis enscène : en part icul ier sur l ' ident i té de celui quiparle et, corrélat ivement, sur cel le du ' tu ' auquelce'je's'adresse et qui est susceptible de lui donnerla répl ique. ( . . . ) C'est dans le Psaut ier que cetteméthode se révèle une méthode à part entière,qui a sa place à côté des autres. Tout comme elles,( . . . )el le suppose que le Christ est le centre, la cléde l 'univers des personnes. " ( ib id. l l , p.7-8). En fai tcette méthode n'est qu'une systématisation d'uneexégèse dé jà courante dans le NouveauTestament ; celui-ci met dans la bouche du Christun certain nombre de versets psalmiques. Sur labase de ces indications, les Pères extrapoleront duverset isolé à tout le psaume, et de proche enproche à tous les psaumes.

" La méthode es t app l iquée de façon t rèsvariable par les divers auteurs, en fonct ion deI'herméneutique de chacun. A Diodore de Tarse età Théodore de Mospueste, qui limitent presquetoujours la portée du prophétisme davidique àl ' intér ieur de l 'ancienne Al l iance, el le sert à recon-naître comme locuteurs David lui-même, parlanten son nom ou au nom du peuple, les Jui fs du

temps de l'exil, ceux du temps de la guerre avec lesAssyriens, ceux du temps de Maccabées. Rien n'estmis dans la bouche du Christ , à l 'except ion dequelques versets du Ps 2. Inversement, Hi laireentend la voix du Christ dans un nombre imoor-tant de psaumes, et qui serait certainement plusimportant encore si nous avions des commentairesde lui sur les Ps 16, 22,31,40,41, 88, 109, tradi t ion-nel lement mis dans la bouche du Christ .

" Eusèbe et Athanase (...) tiennent le Christ pourle locuteur d'un nombre restreint de psaumes,ceux pour lesquels le N.T. offre une suggestionexplicite en ce sens. Didyme élargit cette indica-tion. Augustin, avec sa grandiose conception duChristus tofus, entend le Christ, tête ou membres,ou tête et membres, dans tout le Psautier. En toutcela, la méthode est au service d'une précompré-hension, l iée à I ' idée que chacun se fai t du sens duPsautier; ou plus exactement du mode de présencedu Christ dans I'Ancien Testament. (...) " A l'excep-t ion des ant iochiens (Diodore et Théodore), lesexégètes anciens estiment que cette énonciation(des Psaumes) par le Christ leur donne leur vér i-table sens. l ls doivent donc être lus à la lumière detout ce que nous savons du Christ. En fait, cettelumière est demandée à un pet i t nombre de l ieuxscripturaires, toujours les mêmes.

" Le locuteur qui prononce ces Psaumes est assi-milé au serviteur de Yahvé d'lsaie 53, c'est-à-direqu'on contamine le thème du juste souffrant aveccelui du juste souffrant pour le peuple. ( . . . ) ainsi larelecture chrétienne des Psaumes du juste souf-frant se charge tout normalement d'un supplé-ment de sens fourni par le second lsaïe. Dits par leChrist , ces psaumes ne signi f ient plus simplementque la condit ion de l 'homme est tel le que, mêmeinnocent, il subit I' injustice et le malheur, de sortequ' i l n 'a de recours qu'en Dieu même. l ls s igni f ientaussi que cette souffrance est subie pour le peuplepécheur que le juste récapitule en lui et qu'ainsi i lrachète.

6 1

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" (...) Dans cette perspective s'explique que l'onpu isse met t re dans la bouche du Chr is t despsaumes où le locuteur parle de ses péchés. LeChrist lui-même est parfaitement innocent mais,comme le serviteur de Yahvé dont il accomplit lafigure, il a pris sur lui les péchés du peuple, quisont réellement devenus siens comme le disent lesformules rigoureuses de Paul iouvent invoquéesdans ce contexte, 'Dieu l'a fait péché pour nous,afin qu'en lui nous devenions justice de Dieu'(2 Co5,21. Cf . Ro 8,3 et Ga 3,13), (...)

Nous reprendrons ici les deux principes d'inter-prétation développés plus haut : les psaumes sont" échos et résumés de la Bible ", les psaumes sont" échos et résumés d'humanité ". ll faut les joindreà la confession de la foi chrétienne. D'abord nouscroyons que le Christ est la clé des Ecritures; c'estce dont témoignent aussi bien le récit des pélerinsd'Emmaûs (Lc 24,13-35) que la conception pauli-nienne de l'histoire : la présence du Christ étaitdéjà assurée, sous forme quasi-sacramentelle, dansl 'h is to i re d ' ls raël (1 Co 10,1-11) . Ensui te nouscroyons que le Chr is t récapi tu le en lu i toutel'hùmanité, car il est, toujours selon la théologiepaulinienne, le nouvel Adam.

Parce que les Psaumes sont l'écho de toutes lesexpériences bibliques, ils parlent nécessairement duChrist. fls révèlent le Christ dans leur accomplisse-rnent. Le Christ est présent " en creux " dans toutle tissu biblique des Psaumes, résumé de toute laBible. C'est à partir du Christ manifesté en ce Jésusdont les évangiles témoignent qu'il est Seigneur etcelui que les prophètes avaient annoncé, à partir desa vie et de ses paroles, que les Psaumes s'éclairentd'un jour nouveau, qu'ils révèlent leur vraie profon-deur.qu'on peut véritablement lire en eux le Christ,comprendre qu'ils parlent de Lui (Lc 24,44).62

" Uautre texte fondamental sans cesse invoquépour expliquer les Psaumes mis dans la bouche duChrist est I'hymne de Ph 2,5-11. La contamination,ici, sert principalement à indiquer que le Christ quiest un homme, avec tout ce que cela comported'impuissance à se sauver soi-même et de nécessaireappel au secours divin, puisqu'il s'agit de psaumesde détresse, est néanmoins Dieu. (...) Si le Christ sefait le locuteur de psaumes où s'exprime la piremisère de la condition humaine, cela correspond audépouillement par lequel Dieu se fait homme pourque nous devenions Dieu. " (ibid. ll, p.393-394)

ll ne s'agit nullement de surajouter le Christ auxPsaumes, il s'agit simplement de reconnaître /esens profond, caché dans l 'épaisseur du t issubiblique des Psaumes. Au sens strict tout le Psau-tier raconte le mystère du Christ parmi nous, s'ilest compris et déployé dans toute sa richessebibl ique.

Parce que les Psaumes sont l'écho de toutes lesexpériences humaines, détresse et louange, ils tra-ceirt un portrait de I'homme dans sa plénituded'humanité, et ce portrait se révèle être celui duChrist, vrai homme en même temps que vrai Dieu.Là encore, il ne s'agit pas d'un sens surajouté maisi l s 'agit du sens découvert dans la profondeurd'humanité que disent les Psaumes. 5i l'on entenddans le Psautier tout le cri et tout le chant deshommes, on entend nécessairement la voix duChrist dans sa réponse à son Dieu, dans son dia-logue avec son Père.

Si les Psaumes sont'résumé' biblique et'résumé'd'humanité, c'est bien comme'accomplissement'des Ecritures et'accomplissement' d'humanité',creuset où peut se révéler la plénitude du visagedu Christ ressuscité, clé des Ecritures et modèled'humanité en tant qu'image parfaite de Dieu.

Les Psaumes et le Christ aujourd'hui

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PouR coNTtNUER t'ÉruDt* : Lecture facile** : Lecture moyenne*** : Lecture di f f ic i le

lntroductions*M. Mnruuarr, Pour prier avec les kumes, Cahiers

Evangi le n" 13,1975.Présentation des genres littéraires, avec commen-

taire des Ps 91, 109, 110, 115, 118 et 12G134, 139'Bi bl iog raphie dans l'encart central.

* M. Gouncues, tes Aamer et iÉsus -.Iésus et /esPsaumes, C.E. n" 25, l97f

Les Psaumes dans le ltT. : relrs par les premierschrétiens pour comprenÛe le mystère du SeigneurJésus, et relus par Jéns porr qnprendre et dire samission.

* * P. B tnucunr,t p, errrltrs tuit et lout, Seu il, I 980'254 o.

Sans conteste, le nreilleur liwe en françis sur lesPsaumes. L'étude du È 22 sert de 'récapitulation'.

Lecture dense mais ablle par rapport aux autres livresdu même auteur.

**[es Psaurnes : Paroles sur Dieu, cris ven Dieu, Foiet Vie, Cahier Biblique n'27, 1988, 100 p.

Etudes des Ps 19,22 et 69. Reprise de thèmes géné-raux d'introduction sur Les ennemis, La plainte et lalouange, Qui parle dans les Psaumes ? et Le thème dela créat ion. Bibl iographie commentée.

*J.P. PnÉvosr, Petit Dictionnaire des Psaumes, C.E'n" 71 , 1990.

Présentation de quarante mots importants'*1. Morulougou, Les Psaumes, dans Les Psaumes et

/es autres écrlts, Coll. Petite Bibliothèque des Sciencesbibliques, A.T. 5, Desclée, 1990, p.15-87.

Une bonne introduct ion classique qui cont ienttous les renseignements nécessaires à un travail exé-gét ique sur lei psaumes. l l y a quinze pages sur lathéologie des psaumes : une excel lente synthèse.

*Prier |es Psaumes, Lumière et Vie no 202, 1991 .Excellent recueil d'articles sur I'exégèse des Ps. (E.

Beaucamp, R.J. Tournay, J. Trublet, J. Vermeylen) etsur l 'usage des Ps. dans diverses traditions juives etchrétiennes.

*A. WÉtrtttrt, Clés pour Ie Psautier: l. Poésie etthéo-toqie. Svnthèse ; ll. Du cri à la louange' Lectures,Bùxellds. Horizons de la Foi, no 61 et 62, 1994, 58 et54 p.

Ôes cahiers très pédagogiques pour entrer dans lesPsaumes. Etudes des Ps 1,2,22, 148,149 et 1 50'

Commentaires*A. Mntrot & A. Lertrvnr, Les Psaumes,3 vol., Labor

et Fides, 1962-1969; 309, 293,280 P'Commen ta i re t r ès access ib le , avec des essa i s

d 'actual isat ion pour aujourd 'hui .**M, Marurunl , Les Psaumes, 4 vol., Coll. Les Cahiers

de la Pierre quiVi re, Desclée de Brouwer, 1966-1968'p lus de 300 p. chaque.

A notre av is . un des mei l leurs commentai res enfrançais. L'introduction (présentation des genres l it-téra i ies) est ce qui a le p lus v ie i l l i mais les para l lè lesbibliques et les notes sur chaque psaume sont desminei précieuses. Malheureusement ces l ivres sontépuisés.

**E. Braucavp, Le Psaut ier , 2 vol . , Col l . Sourcesbib l iques, Gabalda, 1976,1979; 331 et 3{0 p.

Unê i ntroduction généra le, une traduction précise,un commentai re et des b ib l iographies pour chaqueosaume. La méthode est celle de l 'exégèse historico-crit ique. A consulter.

*N. Qurssot't, 50 Psaumes pour tous les iours,2vol.,Droquet & Ardant, 1978-1979,345 et 343 p'

1ô0 psaumes, dans leur traduction l iturgique, sontproposés avec des " Jalons pour la prière et la médi-tatiôn quotidiennes ". Chaque psaume est présentéen trois temps : Avec lsraë|, Avec Jésus, Avec notretemDs. C'est une très bonne init iation à la prière tota-le des Psaumes.

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*M. Grlernr, Les Louanges du Seigneur. Commen-taire pastoral et spirituel des psaumes du dimancheef des fêtes, Préface de CL. Wrrnrn, Desclée, 1991,542 p.

Ce livre ne commente que 90 psaumes (pas tou-jours donnés intégralement, hélas). Sur la page degauche, le commentaire exégétique, sur la page dedroite, le texte, précédé d'un commentaire spirituelà partir du N.T. : c'est le meilleur de ce livre.

*R. Mrcueuo, Les Psaumes, Ed. Paulines/Médias-paul, 1993,959 p.

Ce l ivre est une adaptat ion résumée des troisvolumes italiens de G. Ravasi. Le livre de Ravasi étaittouffu mais très riche tant au point de vue de I'exé-gèse que de l'histoire de l' interprétation. Ce grosrésumé ne restitue que partiellement les qualités del 'or iginal .

Études particulières*P.E. Bor'rruano, Psaumes pour vivre, Coll. Cahier de

l'|.C, de Lyon 4, Profac, 1980, 167 p,Neuf articles parus d'abord dans Esprlt et y/e en

1978 et 1979, Commentaires des Ps 22, 49,62,65,80,86, 1 16, 139 et 147. Très accessible et riche.

**J. Ooemrru & R. SÉcurruenu, Concordance de laBible. Les Psaumes, Desclée de Brouweri 1980, 396 p.Préface et liminaire de P, Brnucnnvp.

Concordance établie sur une traduction françaiselittérale faite par les auteurs, autour de 98 thèmes,avec des renvois d'une section à l'autre. La référenceà l'hébreu est bien assurée.

*J. Tnualrr, Créés pour louer. La louange dans laBible, Coll. Vie Chrétienne, Supplément, 1981, 64 p.

Très bonne introduction aux psaumes de louange,resitués dans la Bible,

Analyse rhétorique et structurelle**J.N. Aurrr & J. Tnuelrr, Approche poétique et

théologique des psaumes. Analyses et Méthooes,Coll.lnitiations, Cerf, 1983, 197 p.

Initiation à une méthode qui util ise les sciences dulangage. Analyse des structures de surface de 12064

psaumes (répétitions, inclusions, parallélismes). Lelivre étudie ensuite les codes et messages qui sous-tendent les images et figures des psaumes. Grâce àI'index on peut facilement retrouver les analyses par-ticulières d'un psaume. Livre épuisé.

***M. Grnnno, Les Psaumes. Analyse structurelle etinterprétation, 3 vol., Coll. Recherches, Bellarmin /Cerl 1984 et 1995.

Analyses des procédés de composit ion desPsaumes à part i r de leurs structures, avec destableaux qui visualisent les résultats. Mais les effetsde sens produits ne sont pas développés. Un livreplein de richesses, mais difficile d'accès.

Approche liturgique*D. Rrvauo & J. Geururau, Guide du psautier de la

Bible de Jérusalem, Cerf , 1962,251 p.Au fil des psaumes, quelques notations simples sur

les mots-clés de chacun et des orientations pour lalecture et la prière chrétiennes. Un guide qui n'a pasété remplacé.

*J. Gerrruenu, Traité de la psalmodie. Eglise quichante 256, Supplément, Document no 22, Paris,A.S.A, 1992,72 p.

Un petit l ivret qui peut échapper au bibliste - il estdestiné d'abord à ceux qui chantent - et qui contientpourtant des pages remarquables sur la poétique despsaumes, leur langage symbolique et leur lecturechrétienne.

Les Psaumes et les Pères**A. RosE, Les Psaumes, voix du Christ et de l'Eglise,

Coll. Bible et vie chrétienne, Lethielleux, 1981, 285 p.Ce livre essaie de montrer la place du Psautier dans

la théo log ie néotes tamenta i re e t pa t r i s t ique .[auteur défend des positions personnelles sur la Sep-tante.

*Aucusrrr'r, Prier Dieu. Les Psaumes. Un choix detextes, établi par A.M. BrsrunRo, traduits par J. Penner,coll. Traditions chrétiennes, Cerf, 1982.

Un bon choix des mei l leurs commentaires desPsaumes de St Augustin.

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liîgrr

- - . -I I -I I - I II I I -- r - -- l I -I T I II I I I -- - -- - -

I I - - - - -I I - I - I -- I I - I - I I II I - T I I I II I I - - I -I I I - - - -I I I I I I -I I - - I I I I- I I I I - -- I - I I I -

Pierre GIBERT, Comment laBible fut écrite, Bayard Editions/Centurion, 1995, 17 1 p., 90 F.

L'auteur a repris dans ce livre unouvrage publié dans la col lect ion< Parcours >, chez le même éditeur,en 1989, et intitulé L'Ancien Testa-ment.ll y a ajouté la seconde partieconcernant le Nouveau Testament,sur le même modèle (mais deux foismoins importante). Chaque Testa-ment est présenté en hois étapes : 1)Ayant d'ouvrir le l ivre (une vued 'ensemble e t les p rob lèmes delangues) ;2) Une bibliothèque variée(une présentation sommaire desdivers livres) ; 3) Une partie synthé-tique sur I'histoire de la compositionde chaoue Testament (la formationd'une côllection d'écrits, les grandeslienes de l'histoire de la rédaction etle-s questions de canon). Tout au longdu livre, des petits encadrés propo-sent des conseils et des guides pour lalecture de textes typiques ou impor-tants. En finale, une petite sélectiond'instruments de travail, un glossaireet une chronologie (pas très visuelle).

Finalement, I'ensemble expliquebien, mais de manière assez dense,< Comment la Bible fut écrite >. P.Gibert résume les résultats de sesétudes sur les conditions d'écriture,aussi bien pour les débuts de l 'histoi-re d'Israël et pour les livres histo-

riques (Samuel et Rois) que pour lescommunautés chrétiennes primitives.Il montre bien comment s'est fait lepassage de I'oral à l'écrit, selon lesdivers mil ieux de production destextes : les sanctuaires, la cour royale,le temple et les prêtres, les cerclesprophétiques. Il insiste sur f indépen-dance de ce dernier milieu par rap-port au pouvoir royal et donc sacer-dotal. De même i l soul igne lecontexte culturel et religieux qui arendu oossible la traduction des Ecri-tures en grec, à partir du IIIe s. avantnotre ère. A juste titre il valorise latradit ion juive qui s'y exprime, quiest tout aussi 'biblique' que la tradi-tion hébrarque ; la tradition juive dela Diasoora fut en effet le berceau dela plupart des écrits du Nouveau Tes-tament.

L introduction au Nouveau Testa-ment a quelques formules heureuses,comme celle-ci : < Le Nouveau Tes-tament n'est pas comparable àl'Ancien auquel il ne succède pas etqu'il ne remplace pas > (p. 107). Bienentendu, les informations fourniesv isent p lus la pédagog ie queI'exhaustivité : les exemples choisissuggèrent I'histoire, aident à saisir lesévolutions, même si tout n'est Pasexpliqué et démontré. Par exemple larévision de la Théorie Documentairedu Pentateuque est Présentée encohérence avec I'ensemble de l'4.T.Ou bien l'évolution de I'espérance

eschatologique des premiers chré-tiens, évidente dans les textes, estrel iée à des expériences bienconcrètes, au fil des années et desgénérations.

Cette aptitude à expliquer par desregards synthétiques est certainementune qualité de P. Gibert, de mêmequ'une expression soignée, parfois1éeèrement recherchée. Ce l ivres'àdresse plutôt à des lecteurs déjàinitiés à la Bible ou ayant au moinsune bonne expérience de lecture ; illeur foumit unè synthèse riche et soli-de et leur ouvre d'utiles Pistes deréflexion.

Ph. Gnusott

André PAUL, La bible. Histoire'textes et interprétations' RepèresPratiques, Nathan, 1995, 160 p.,59 F.

Dans une collection de formationeénérale, parmi des ouvrages de droit,à'histoire. de communicâtion ou demathématiques, ce manuel fournitune masse de < Repères pratiques Dsur la Bible. Six grandes Part ies :Bible et bibles (les textes originaux etleurs traductions, anciennes etmodernes) ; Histoire (d' Abraham à laprise de Jérusalem en 70) ; Ancien'Testamenr

: Nouveau Testament (pré-sentation sommaire des différentslivres) ; Textes (16 textes bibliquescités et annotés) ; Interprétations(l'inspiration, la critique moderne).Comme dans toute cette collection,l'ouvrage se lit par doubles pages,bien construites, réhaussées de cou-leur et souvent illustrées en quadri-chromie. A gauche, un texte courantoui donne les informations essen-

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* * . ; s * . : : f l , Æ . . . j * , i T r: ' & ; . f f i & ; ç ; ' , . # : : # - $ Ë

Hugues COUSIN, Le prophèteassassiné. Lecture des récits de laPassion, Mame, 1995, 190 p., 98 F.

On se félicite de la réédition de celivre devenu introuvable. oui est unevéritable initiation à I'exègèse desévangiles. Il reste précieux pour ceuxqui n'ont pas la chance de pouvoirsuivre des cours universitaires. I1commence par expliquer la forma-tion des évangiles à partir de la tradi-tion primitive. Puis il étudie, dans lesquatre évangiles, les récits du tom-beau ouvert et ceux du crucifiementet de la mort. Un autre chapitre ras-semble les résultats de ces analyses etmontre comment on est oassé desévénements aux ouatre rèdactionsévangéliques. L'auteur a ajouté undernier chapitre pour répondre à uneouestion très courante : < Dieu a-rilsàcrifié son fils Jésus ? >. Cette dizai-ne de pages, écrites pour Lumière etVle en 1980, montre clairement com-ment s'articulent, dans la Passion,I'initiative du Père, la liberté de Jésuset la responsabilité des n"it.ê:

' . i ' ' t i . ' * : : F :

Lire fa Bible, La DocumentationCathoLique, Bayard-Presse, 30 F.

En juillet paraît ce numéro hors-série qui rassemble des documents,des analyses et des informations sur lalecture de la Bible aujourd'hui,notamment en France. Cette collec-tion de textes importants et très divers,dont certains difficiles à trouver, inté-ressera les animateurs bibliques sou-cieux de réfléchir à leur actiôn oasto-rale et de bien la situer dans la missionoe I Ésllse.

tielles ; à droite, des explicationscomplémentaires, des cartes, destableaux, des documents anciens etdes représentations art ist iques.L index lexique final permet de trou-ver faci lement I 'expl icat ion d'unterme précis. On regrette la maladres-se du dessin de la couverture.

La orésentation du Nouveau Tes-tament est fortement centrée sur lesproblèmes littéraires (canon, ques-tion synoptique, etc.), si bien qu'ona du mal à comprendre 1'expériencevécue par la communauté primit ive.Le kérygme et la structure de la foin'apparaissent guère : < On désignele Galiléen comme le Christ et, bienplus, le Fils de Dieu, né de la ViergeM a r i e ' p a r l ' i n t e r v e n t i o n d eI 'Esprit-Saint ' et 'ressuscité d'entreles morts' : tel est le noyau de la pro-fession de foi chrétienne , (p. 52).De même les cinq textes choisispour représenter le N.T. ne laissentguère deviner I'importance centraledu mystère pascal : les Mages ; laguérison d'un lépreux ; la paraboledes talents ; la conversion de Paul ;la vision de la Femme et du Drason(Ap 12).

C'est donc une approche nette-ment culturelle de la Bible que pro-pose A. Paul. On est dans l'histoiredes religions et la Bibie est traitéecomme le serait n'importe quel autretexte religieux. Il ne faut pas chercherici une lecture croyante, mais seule-ment des informations sur l'histoire,la littérature, 1'Orient ancien, avecune certaine tendance au comDaratis-me. On peut loutefois se demànder siI'image-donnée de la Bible, commeæuvre littéraire et non comme tradi-t ion rel isieuse. est suff isamment

fidèle à ce qu'en viventjuifs et chré-tiens.

Ph. G.

"u ; . j c \ . *# &* * * &*#

Simon LEGASSE, Le procès deJésus. I. L'histoire. Lectio Divina156, Cerf, 1994,196 p. 125 F.

Ce livre dense est le oremier tomed'une étude approfondiê sur les récitsde la Passion. Il exprime le point devue de I 'historien. Sans orétendrebouleverser la cri t ique historique surun sujet discuté depuis longtemps,I'Auteur reprend, avec nuances, équi-l ibre et comoétence. les élémentsessentiels du Procès de Jésus, enessayant de distinguer ce qui, dansles quatre évangiles, demeure solideau regard de I'histoire (par ex. le pro-cès romain), ce qui demeure douteux,et ce qui relève nettement des inten-tions et constructions théologiques dechaque évangéliste (comme le procèsJulIJ.

Largumentation, souvent subtileet serrée, montre une très bonneconnaissance du dossier et débouchesur des conc lus ions ouver tes e tsouples. En ce qui concerne la valeurhistorique des sources principales,I 'Auteur accorde olus de crédit àMarc et à Jean qu'à Matthieu et, sur-tout, à Luc, en évitant soigneusementd'harmoniser les données de Jn etcelles des Synoptiques. Voilà donc unouvrage de qualité, agréable à lire,qui rendra bien des services aux lec-teurs soucieux de faire la part exacteentre les faits et leurs intemrétationspar les premières communautés chré-tlennes.

Jean CupvlLLano

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o NOUVEI - ,LES o DU o SERVICE o NOUVELLES.

Les nouveaux Supplémentsaux Cahiers Evangile

Comme nous l 'av ions annoncé depu is len' 90 la série des Suppléments aux Cahiers serenouvel le. Au l ieu de présenter des textes del 'Ancien Orient (et des premiers siècles), "enamont" et autour de la Bible, les NouveauxSuppléments vont désormais présenter deslectures de textes bibl iques fai tes "en aval",au long des siècles par les chrét iens - et , pourl 'Anc ien Tes tament , par les ju i fs . Châqueannée seront ainsi commentés un texte'del 'Ancien et un du Nouveau Testament.

L.e premier numéro est consacré à La pâqueet fe passage de la mer (Ex 12-14); celui 'deseptembre à La Samari taine (Jn 4). puis vien-dront Le Serviteur souffrant Les parabolesde Lc 15, Le cycle d'Elie, Les appaiitions duRessuscité, etc. De plus, quel{ùes numérosspéciaux feront connaître ies qiands maîtresou les grandes périodes de lTexégèse chré-t ienne : Origène, Jérome, etc.

Aujourd'hui beaucoup de chrét iens dési-rent découvrir ce trésor des lectures chré-t iennes (et éventuel lement juives, voire cora-n iques) de la B ib le , te l les qu 'e l les é ta ien tfai tes dans les siècles passés. 'Cette nouvel lesér ie des Supp léments leur permet t rad'explorer peu à peu l 'h istoire de l 'exéqèsee t , d ' é l a r g i r l e u r a p p r o c h e d e s t e l t e soroi lques.

R a p p e l o n s q u e ' l ' a b o n n e m e n t B d o n n edroi t chaque année aux quatre Cahiers etaux deux Suppléments, au irrix de 200 F pourla France et l 'Union Européenne (270 F pourl 'étranger).

LISTE DES ENCADRÉSDavid et les Psaumes dans la tradition juive p. 13Les Psaumes en dehors du Psautier o.25Les Psaumes à la synagogue p. 56

REDACTION-ADMINISTRATION :sERVtcE BrBLteuE ÉvaruotLe er vte

8, rue Jean Bart, 75006 Parisr'â.42.22.03.89

Dir de la publication: F. BonnéricDir de la rédaction: Ph. Gruson

Secrétariat de rédaction : A. de Maupeou

N' de Commission oatilaire :57742rssN 0222-971 4 0 CERF/S.B.E.V.

ABONNEMENTSAnnée 1995

Aux 4 cahiers: 110 F (Étranger 1SS F)Aux 4 cahiers + 2 suppléments 200 F

(Etranger 270 F)

Fèglement:. soit par chèque bancaire à

Evangile et Vie. soit par chèque postal (ou mandat

international) à Evangile et VieCCP 391-83 W Paris

76e année - Nouvelle série - N" 92N" d'éditeur 6779

Revue trimeslriellepubliée aux Editions du Cerf,

29, bd La TouÊMaubourg,75340 PARIS Cédex 07

sous la direction du Service BibliqueEvangile et Vie

Directeur Général: Pascal MoityPrincipaux associés : La Province

dominicaine de FranceLes Publications de la Vie catholique,

Couvenl Saint-Dominique

lmpressions DUMAS42100 Sainl-Etienne

Juin 1995N" d'ordre :32366

Page 68: Cahiers Evangile 92

- La structure des Psaumes- La poésie hébraïque - La symbolique- Cinq exemples de lecture: Ps 1;51; 85; 119: '146

- Le Psautier - Le texte hébreu et ses traductions- La composition du Psautier- L'attribution à David- [-a datation des Psaurnes- Les gcnres l i t térr i rcs

- I-c Psautier, ntérnorial d'un peuple : I'Exode ; la royauté- Deux langa-ees : la plaintc et la louangc

Un écho : leUn résumé :

Ps 68Ps 23, I

- Le psaltliste et son corps- La prière contre les cnnemis - Le cri contre Dieu- Réapprendre son corps- De la violence au pardon- Apprendre la solidarité

- Dans le Nouveau Testament ; Ps I 10, I- Aux trois premiers siècles - Chez les Pères - Aujourd'hui

Pour continuer l 'étudeDes livresNouvelles du Service : liste des encadrés

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