Cabaret des Poètes · 2016. 8. 13. · Muere lentamente - Falso Neruda es de Martha Medeiros M...

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Programme Vendredi 10 Juin 2016 à Sainte—Alvère Cabaret des Poètes LES MOTS POUR VIVRE LAS PARAULAS PER VIVRE AMAJAMBO ABESHAHO LE PAROLE PER VIVERE LIVE THANKS WORD PALABRAS PARA VIVIR

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Programme

Vendredi 10 Juin 2016 à Sainte—Alvère

Cabaret

des Poètes

LES MOTS POUR VIVRE

LAS PARAULAS PER VIVRE

AMAJAMBO ABESHAHO

LE PAROLE PER VIVERE

LIVE THANKS WORD

PALABRAS PARA VIVIR

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LES MOTS POU R LE VIVRE INTRODUCTION

L e Cabaret des Poètes vous invite cette année à fêter tous

les irréductibles, les enfiévrés, les radicaux de la beauté,

la liberté, d’ici et d’ailleurs.

Nous avons plus que jamais besoin de la parole libre des

poètes qui portent

Cette indépendance d’esprit toujours intacte et qui recher-

chent, comme l’écrivait Marina Tsvetaeva,

« l’impossible qui émane du domaine des mots ».

Au moment où la création peut sembler menacée dans ce

qu’elle a de plus fondamental, il nous faut réaffirmer et dé-

fendre avec force la liberté de création et d’expression qui est

au coeur du geste poétique. La poésie fait surgir des rappro-

chements inattendus, dirige l’attention vers les choses les plus

humbles comme vers les aspirations les plus élevées.

L’image poétique suscite un nouvel espace mental, les jeux

avec la langue déplacent les points de vue, l’expression des

émotions fondamentales nous relie les uns aux autres.

Quoi de plus exaltant, époustouflant, flamboyant que la liber-

té, ce sentiment grisant qui redonne espoir aux plus opprimés

d'entre nous, qui nous permet de vivre ensemble. C’est dans

cette optique que cette anthologie aux couleurs de la liberté a

été créée. De célèbres poètes ont su faire passer ces émotions

que tout homme a connu dans sa vie un jour ou l’autre, et ils

ont su par la même occasion nous conforter dans l’idée que la

liberté est un luxe qui n’est pas inaccessible et au nom de la-

quelle il faut se battre.

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« Ne te laisse pas mourir lentement !Ne te prive pas d'être heureux ! »

Je m'en allais, les poings dans mes poches crevées ;

Mon paletot aussi devenait idéal ;

J'allais sous le ciel, Muse ! et j'étais ton féal ;

Oh là là ! que d'amours splendides j'ai rêvées !

Mon unique culotte avait un large trou.

Petit-Poucet rêveur, j'égrenais dans ma course

Des rimes. Mon auberge était à la Grande-Ourse.

Mes étoiles au ciel avaient un doux frou-frou.

Et je les écoutais, assis au bord des routes,

Ces bons soirs de septembre où je sentais des gouttes

De rosée à mon front, comme un vin de vigueur ;

Où, rimant au milieu des ombres fantastiques,

Comme des lyres, je tirais les élastiques

De mes souliers blessés, un pied près de mon cœur !

« Changer la vie ». Rimbaud

LES MOTS POU R LE VIVRE

EVE GUILLOU

Les poèmes seront lus dans les langues d’origines et traduits en Français pour la majorité d’entre eux.

Donnons la parole aux poètes et laissons les mots comme les oiseaux s’envoler.

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LES MOTS POUR LE VIVRE

Sommaire

PARTIE 1

1- « Désembourbez l’avenir » Vladimir Maïakovski,

2- « Le Loup et le Chien », Jean de La Fontaine

3- « Poesia », Marcela del Pastre

4- « Hirondelle », Louise Michel

6- « Que la vie en vaut la peine », Louis ARAGON

7- « Freedom », Ambrose Bierce

8- « Bread and roses »

9- Poème arménien

10- Extrait de « Oeuvre Sur l'Eau », Erri de Luca

11- « Toucher la lumière », Adonis

5- « Il meurt lentement », Martha Medeiros

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ENTRACTE

1- « Un portrait », Petru Romosan

2- «Trois ethnies », Ketty Nivyabandi

3- Romance Somnambule, Federico Garcia Lorca

5- Fuoc de Paraulas

6- « Voyage a Barcelone sur le bateau de… » Nazim Hikmet,

7- « La batailla del verso », poemas fidedignos

8- « Vertical »

9- « La cravate », Jacques Charpentrau

PARTIE 2

4- « Etat de marche » Laurence Vielle

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1- « DESEMBOURBEZ L’AVENIR » Vladimir Maïakovski, -extraits du recueil Ecoutez, Si on allume les étoiles, écrit entre 1914 et 1925, publié aux éditions Le Temps des Cerises

É coutez !Puisqu'on allume les étoiles, c'est qu'elles

sont à quelqu'un nécessaires? C'est que quelqu'un désire

qu'elles soient? C'est que quelqu'un dit perles ces cra-

chats? Et, forçant la bourrasque à midi des poussières, il

fonce jusqu'à Dieu, craint d'arriver trop tard, pleure, baise

sa main noueuse, implore il lui faut une étoile! jure qu'il

ne peut supporter son martyre sans étoiles

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Ensuite, il promène son angoisse, il fait semblant d'être

calme. Il dit à quelqu'un :" Maintenant, tu vas mieux, n'est-

ce pas? T'as plus peur ? Dis ? "

Écoutez ! Puisqu'on allume les étoiles, c'est qu'elles sont à

quelqu'un nécessaires ?c'est qu'il est indispensable, que tous

les soirs au-dessus des toits se mette à luire seule au moins

une étoile?

(Suite)

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2- «LE LOUP ET LE CHIEN », Jean de La Fontaine (Fable I, IV, 1668)

U n loup n’avait que les os et la peau,

Tant les chiens faisaient bonne garde,

Ce loup rencontre un dogue aussi puissant que beau,

Gras, poli, qui s’était fourvoyé par mégarde.

L’attaquer, le mettre en quartier,

Sire loup l'eût fait volontiers.

Mais il fallait livrer bataille ;

Et le matin était de taille

A se défendre hardiment.

Le loup donc l’aborde humblement

Entre en propos, et lui fait compliment

Sur son embonpoint qu’il admire.

« Il ne tiendra qu’à vous, beau sire,

D’être aussi gras que moi, lui répartit le chien.

Quittez les bois, vous ferez bien :

Vos pareils y sont misérables,

Cancres hères et pauvres diables,

Dont la condition est de mourir de faim.

Car quoi ? Rien d’assuré ; point de franche lippée :

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Tout à la pointe de l’épée.

Suivez-moi : vous aurez un bien meilleur destin. »

Le loup reprit : » Que faudra-t-il faire ?

-Presque rien, dit le chien, donner la chasse aux gens

Portant bâtons et mendiants ;

Flatter ceux du logis, à son maître complaire ;

Moyennant quoi votre salaire

Sera force reliefs de toutes les façons :

Os de poulets, os de pigeons ;

Sans parler de mainte caresse. »

Le loup déjà se forge une félicité

Qui le fait pleurer de tendresse.

Chemin faisant il vit le col du chien pelé.

« Qu’est-ce là ? lui dit-il-Rien-Quoi rien ?-Peu de chose.

-Mais encor ?-Le collier dont je suis attaché

De ce que vous voyez est peut-être la cause.

-Attaché ? dit le loup ; vous ne courez donc pas

Où vous voulez ?- Pas toujours, mais qu’importe ?

-Il importe si bien que de tous vos repas

Je ne veux en aucune sorte,

Et ne voudrais pas même à ce prix un trésor. »

Cela dit, maître loup s’enfuit, et court encor.

(Suite)

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3- « POESIA », Marcela Delpastre

' Na rauba de fum, un chapeu de lum, 'na manta de saba en

lo ciau de junh, l'aubre que s'esgaia...Que t'ai cerchada,

poesia ! E sens jamai veire ta facia, onte que sias.

Que l'ai jugada a crotz o facia, ma vita paubra, zo sabes !La

t'ai jugada a crotz o facia. E sens jamai veire ta facia, ai tots

los jorns portat ma crotz. Onte ses ? Onte Eras ? Per te saber,

segur ! Mas per te dire...- Un chapeu de fum, un manteu de

lum, 'na rauba de saba...au ciau de junh, l'aubre s'esgaia.

3bis- traduction

U ne robe de fumée, un chapeau de lumière, une mante

de sève...dans le ciel de juin, l'arbre qui s'amuse...Je

t'ai cherchée, poésie ! Et sans jamais voir ta face, où que tu

sois. Je l'ai jouée à pile ou face, ma pauvre vie, tu le sais

bien ! Je te l'ai jouée à pile ou face. Et sans jamais voir ta

face, j'ai tous les jours porté ma croix. Où es-tu ? Où étais-

tu ? Pour te connaître, oui ! Mais pour te dire… Un chapeau

de fumée, un manteau de lumière, une robe de sève… au ciel

de juin, l'arbre s'amuse.

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4- « HIRONDELLE », Louise Michel (1871)

H irondelle qui viens de la nue orageuse,

Hirondelle fidèle, où vas-tu ? Dis-le moi.

Quelle brise t’emporte, errante voyageuse ?

Ecoute, je voudrais m’en aller avec toi,

Bien loin, bien loin d’ici, vers d’immenses rivages,

Vers de grands rochers nus, des grèves, des déserts,

Dans l’inconnu muet, ou bien vers d’autres âges,

Vers les astres errants qui roulent dans les airs.

Ah ! laisse-moi pleurer, pleurer, quand de tes ailes

Tu rases l’herbe verte et qu’aux profonds concerts

Des forêts et des vents tu réponds des tourelles,

Avec ta rauque voix, mon doux oiseau des mers.

Hirondelle aux yeux noirs, hirondelle, je t’aime !

Je ne sais quel écho par toi m’est apporté

Des rivages lointains ; pour vivre, loi suprême,

Il me faut, comme à toi, l’air et la liberté.

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5- « IL MEURT LENTEMENT », Martha Medeiros

Muere lentamente - Falso Neruda es de Martha Medeiros

M uere lentamente quien no viaja,quien no lee, quien no

escucha música, quien no halla encanto en sí mismo.

Muere lentamente quien destruye su amor propio; quien no

se deja ayudar.

Muere lentamente quien se transforma en esclavo del hábito-

repitiendo todos los días los mismos senderos, quien no

cambia de rutina, no se arriesga a vestir un nuevo color o no

conversa con quien desconoce.

Muere lentamente quien evita una pasióny su remolino de

emociones; aquellas que rescatan el brillo de los ojos y los

corazones decaídos. Muere lentamente quien no cambia la

vida cuando está insatisfecho con su trabajo, o su amor,

quien no arriesga lo seguro por lo incierto para ir tras de un

sueño quien no se permite, por lo menos una vez en la vida,

huir de los consejos sensatos...Vive hoy! ¡Arriesga hoy!

¡Haz hoy! No te dejes morir lentamente !

¡NO TE OLVIDES DE SER FELIZ !

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5bis- traduction

I l meurt lentement

Celui qui ne voyage pas, Celui qui ne lit pas, Celui

qui n’écoute pas de musique, Celui qui ne sait pas trou-

ver Grâce à ses yeux.

Il meurt lentement

Celui qui détruit son amour-propre, Celui qui ne se

laisse jamais aider.

Il meurt lentement

Celui qui devient esclave de l'habitude Refaisant tous

les jours les mêmes chemins, Celui qui ne change ja-

mais de repère, Ne se risque jamais à changer la cou-

leur De ses vêtements Ou qui ne parle jamais à un in-

connu

Il meurt lentement Celui qui évite la passion Et son

tourbillon d'émotions Celles qui redonnent la lumière

dans les yeux Et réparent les cœurs blessés

Il meurt lentement Celui qui ne change pas de cap

Lorsqu'il est malheureux Au travail ou en amour, Celui

qui ne prend pas de risques Pour réaliser ses rêves, Ce-

lui qui, pas une seule fois dans sa vie, N'a fuit les con-

seils sensés.

Vis maintenant !

Risque-toi aujourd'hui !

Agis tout de suite !

Ne te laisse pas mourir lentement !

Ne te prive pas d'être heureux !

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6- « QUE LA VIE EN VAUT LA PEINE », Louis ARAGON Les yeux et la mémoire – Chant II – 1954

C 'est une chose étrange à la fin que le monde

Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit

Ces moments de bonheur ces midis d'incendie

La nuit immense et noire aux déchirures blondes.

Rien n'est si précieux peut-être qu'on le croit

D'autres viennent. Ils ont le cœur que j'ai moi-même

Ils savent toucher l'herbe et dire je vous aime

Et rêver dans le soir où s'éteignent des voix.

D'autres qui referont comme moi le voyage

D'autres qui souriront d'un enfant rencontré

Qui se retourneront pour leur nom murmuré

D'autres qui lèveront les yeux vers les nuages.

II y aura toujours un couple frémissant

Pour qui ce matin-là sera l'aube première

II y aura toujours l'eau le vent la lumière

Rien ne passe après tout si ce n'est le passant.

C'est une chose au fond, que je ne puis comprendre

Cette peur de mourir que les gens ont en eux

Comme si ce n'était pas assez merveilleux

Que le ciel un moment nous ait paru si tendre.

Oui je sais cela peut sembler court un moment

Nous sommes ainsi faits que la joie et la peine

Fuient comme un vin menteur de la coupe trop pleine

Et la mer à nos soifs n'est qu'un commencement.

Mais pourtant malgré tout malgré les temps farouches

Le sac lourd à l'échine et le cœur dévasté

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Cet impossible choix d'être et d'avoir été

Et la douleur qui laisse une ride à la bouche.

Malgré la guerre et l'injustice et l'insomnie

Où l'on porte rongeant votre cœur ce renard

L'amertume et Dieu sait si je l'ai pour ma part

Porté comme un enfant volé toute ma vie.

Malgré la méchanceté des gens et les rires

Quand on trébuche et les monstrueuses raisons

Qu'on vous oppose pour vous faire une prison

De ce qu'on aime et de ce qu'on croit un martyre.

Malgré les jours maudits qui sont des puits sans fond

Malgré ces nuits sans fin à regarder la haine

Malgré les ennemis les compagnons de chaînes

Mon Dieu mon Dieu qui ne savent pas ce qu'ils font.

Malgré l'âge et lorsque, soudain le cœur vous flanche

L'entourage prêt à tout croire à donner tort

Indifférent à cette chose qui vous mord

Simple histoire de prendre sur vous sa revanche.

La cruauté générale et les saloperies

Qu'on vous jette on ne sait trop qui faisant école

Malgré ce qu'on a pensé souffert les idées folles

Sans pouvoir soulager d'une injure ou d'un cri.

Cet enfer Malgré tout cauchemars et blessures

Les séparations les deuils les camouflets

Et tout ce qu'on voulait pourtant ce qu'on voulait

De toute sa croyance imbécile à l'azur.

Malgré tout je vous dis que cette vie fut telle

Qu'à qui voudra m'entendre à qui je parle ici

N'ayant plus sur la lèvre un seul mot que merci

Je dirai malgré tout que cette vie fut belle.

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7- « FREEDOM », Ambrose Bierce (1892)

as every school boy knows,

Once shrieked as Kosciusko fell;

On everywind, indeed, that blows I hear her yell.

She screams whenever monarchs meet,

And parliaments as well,

To bind the chains about her feet

And toll her knell.

F reedom

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And when the sovereign people cast

The votes they cannot spell,

Upon the pestilential blast

Her clamors swell.

For all to whom the power's given

To sway or to compel,

Among themselves apportion

Heaven

And give her

Hell

(Suite)

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8-« BREAD AND ROSES »

we come marching, marching in the beauty of the

day,

A million darkened kitchens, a thousand mill lofts gray,

Are touched with all the radiance that a sudden sun dis-

closes,

For the people hear us singing: "Bread and roses! Bread

and roses!"

As we come marching, marching, we battle too for men,

For they are women's children, and we mother them again.

Our lives shall not be sweated from birth until life closes;

Hearts starve as well as bodies; give us bread, but give us

roses!

As we come marching, marching, unnumbered women

dead

Go crying through our singing their ancient cry for bread.

Small art and love and beauty their drudging spirits knew.

Yes, it is bread we fight for , but we fight for roses, too!

As we come marching, marching, we bring the greater

days.

The rising of the women means the rising of the race.

No more the drudge and idler - ten that toil where one re-

poses,

But a sharing of life's glories: Bread and roses! Bread and

roses!

Il l’a dédié aux « Femmes de l’ouest », des ouvrières de l’industrie textile qui avaient manifesté pour dénoncer leurs conditions de tra-vail.

Chant écrit à partir d’un poème de James Oppenheim, USA 1911, qui reprend la phrase de la syndicaliste Rose Schneiderman.

A s

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8bis—Traduction « DU PAIN ET DES ROSES »

T andis que nous marchons, marchons dans la beauté du

jour,

un million de cuisines sombres, un millier de mornes gre-

niers de filatures, s’illuminent, révélés par l’éclat d’un soleil

soudain,

car on nous entend chanter : « Du pain et des roses ! Du pain

et des roses ! »

Tandis que nous marchons, marchons, nous nous battons

aussi pour les hommes, parce qu’ils sont les enfants des

femmes et que nous prenons à nouveau soin d’eux.

Nous ne suerons pas la vie entière, de la naissance jusqu’à ce

que s’éteigne la vie ; les cœurs tout comme les corps meu-

rent de faim :

« Donnez-nous du pain mais donnez-nous aussi des roses. »

Tandis que nous marchons, marchons, d’innombrables

femmes mortes,

à travers notre chant, pleurent leur éternel cri pour du pain.

Leur âme de trimardes connaissait l’art modeste, l’amour et

la beauté.

Oui c’est pour le pain que nous nous battons, mais nous nous

battons aussi pour les roses.

Tandis que nous marchons, marchons, nous amenons des

jours meilleurs.

Le soulèvement des femmes signifie le soulèvement de la

race humaine. Plus de trimards ni d’oisifs, dix qui peinent

pendant qu’un se repose,

mais le partage des beautés de la vie: « Du pain et des roses,

du pain et des roses ! »

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9- Poème arménien—Yéghishé Tcharents (1897-1937)

Ե ղիշե Չարենց «Ես իմ

անուշ Հայաստանի»

Ես իմ անուշ Հայաստանի արևահամ բարն եմ սիրում,

Մեր հին սազի ողբանվագ, լացակումած լարն եմ սիրում,

Արնանման ծաղիկների ու վարդերի բույրը վառման

ՈՒ նաիրյան աղջիկների հեզաճկուն պարն եմ սիրում:

Սիրում եմ մեր երկինքը մուգ, ջրերը ջինջ, լիճը լուսե,

Արևն ամռան ու ձմեռվա վիշապաձայն բուքը վսեմ,

Մթում կորած խրչիթների անհյուրընկալ պատերը սև

ՈՒ հնամյա քաղաքների հազարամյա քարն եմ սիրում:

ՈՒր էլ լինեմ – չեմ մոռանա ես ողբաձայն երգերը մեր,

Չեմ մոռանա աղոթք դարձած երկաթագիր գրերը մեր,

Ինչքան էլ սուր սիրտս խոցեն արյունաքամ վերքերը մեր,

Էլի ես որբ ու արնավառ իմ Հայաստան յարն եմ սիրում:

Իմ կարոտած սրտի համար ոչ մի ուրիչ հեքիաթ չկա,

Նարեկացու, Քուչակի պես լուսապսակ ճակատ չկա,

Աշխարհ անցիր, Արարատի նման ճերմակ գագաթ չկա,

Ինչպես անհաս փարքի չամփա` ես իմ Մասիս սարն եմ սիրում:

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9bis—traduction anglaise

O f my motherland Armenia, its sun-soaked word I

adore,

Of our old, mourning saz, the deep, moving string I adore,

The radiant scent of blood-red roses and sun-dipped flowers

I adore,

And the humble, graceful dance of women of Nairi I adore.

I love our sky – deep blue and high, the waters – clear, and

the lucent lake,

The sun in summer, and the winter’s ferocious frost

outbreak,

The black, dreary walls of the old huts – drowned in the

dark,

And the thousand-year-old, tattered stones of the ancient ci-

ties I adore.

Never will I ever forget the mournful tunes of our songs,

Will not forget the iron-script books that have become

prayers long,

However deep my heart is hurt by our blood-drained wounds

of fate,

Still, time and again, though orphaned, weak, but my Arme-

nia I adore.

For my homesick, yearning soul there is no better tale told,

Than Narekatsi’s and Kuchak’s, there are no brighter shining

thoughts.

Cross-pass the world, yet Ararat is the whitest peak to be

sought,

As an everlasting walk to fame, my Mount Masis I adore!

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10- Extrait de « OEUVRE SUR L'EAU », Erri de Luca, éditions poésie Seghers, traduit de l'italien par Danièle Valin

C onsidero valore ogni forma di vita, la neve, la fragola,

la mosca. Considero valore il regno minerale, la repub-

blica delle stelle. Considero valore il vino finché dura il pas-

to, un sorriso involontario, la stanchezza di chi non si e ris-

parmiato, due vecchi que si amano. Considero valore quello

que domani non varrà piu niente e quello che oggi vale anco-

ra poco. Considero valore tutte le ferite. Considero valore

risparmiare acqua, riparare un paio di scarpe, tacere in tem-

po, occorrere a un grido, chiedere permesso prima de sedersi,

provare gratitudine senza ricordare di che. Considero valore

sapere in una stanza dov'è il nord, qual è il nome del vento

che sta asciugando il bucato. Considero valore il viaggio del

vagabondo, la clausura della monaca, la pazienza del con-

dannato, qualunque colpa sia. Considero valore l'uso del ver-

bo amare e l'ipotesi che esista un creatore. Molti di questi

valori non ho conosciuto

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10bis- traduction

J 'attache de la valeur à toute forme de vie, à la neige, la

fraise, la mouche. J'attache de la valeur au règne animal et

à la république des étoiles. J'attache de la valeur au vin tant

que dure le repas, au sourire involontaire, à la fatigue de ce-

lui qui ne s'est pas épargné, à deux vieux qui s'aiment. J'at-

tache de la valeur à ce qui demain ne vaudra plus rien et à ce

qui aujourd'hui vaut encore peut de chose.J'attache de la

valeur à toutes les blessures. J'attache de la valeur à écono-

miser l'eau, à réparer une paire de souliers, à se taire à temps,

à accourir à un cri, à demander la permission avant de

s'asseoir, à éprouver de la gratitude sans se souvenir de quoi.

J'attache de la valeur à savoir où se trouve le nord dans une

pièce, quel est le nom du vent en train de sécher la lessive.

J'attache de la valeur au voyage du vagabond, à la clôture de

la moniale, à la patience du condamné quelque soit sa faute.

J'attache de la valeur à l'usage du verbe aimer et à l'hypo-

thèse qu'il existe un créateur. Bien de ces valeurs, je ne les ai

pas connues.

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11- « TOUCHER LA LUMIÈRE », Adonis (Syrie)

P ar une nuit de pleine lune essaye de fixer la galaxie

Tu verras qu’elle est cours d’eau avec tes bras pour af-

fluents

ta poitrine pour estuaire

Aujourd’hui le ciel a écrit son poème à l’encre blanche

Il l’a appelé neige

Ton rêve rajeunit tandis que tu vieillis

Le rêve grandit en marchant vers l’enfance

Le rêve est une jument qui au loin nous emporte sans jamais

se déplacer

Le nuage est las de voyager

Il descend à la plus proche rivière pour laver sa chemise

A peine a-t-il mis les pieds dans l’eau que la chemise se dis-

sout

et disparaît

Une rose sort de son lit prend les mains du matin pour se

frotter les yeux

Le palmier parle avec son tronc la rose avec son odeur

Le vent et l’espace vagabondent main dans la main

Arc-en-ciel ? Unité du ciel et de la terre tressés en une seule

corde

Il marche sur les versants de l’automne appuyé au bras du

printemps

Le ciel pleure lui aussi mais il essuie ses larmes avec le fou-

lard de l’horizon

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Quand vient la fatigue le vent déroule le tapis de l’espace

afin de s’y allonger

Dans la forêt de mes jours aucune place sauf pour le vent

Pour toucher la lumière tu dois t'appuyer sur ton ombre

Je sens parfois que le vent est un enfant qui crie porté sur

mes épaules

Comment décrire à l’arbre le goût de son fruit ? A l’arc le

travail de la corde ?

Telle une main la lumière se déplace sur le corps des té-

nèbres

C’est l’épaule de l’espace qui s’effondre là-bas sous les

nuages noirs

L’espace dans l’œil de la guillotine est lui aussi tête à cou-

per

Tu ne peux être lanterne si tu ne portes la nuit sur tes

épaules

Je conclurai un pacte avec les nuages pour libérer la pluie

Un autre avec le vent pour qu’il nous libère les nuages et

moi

La parole est demeure dans l’exil chemin dans la patrie

Qu’il est étrange ce pacte entre les vagues et le rivage –

le rivage écrit le sable les vagues effacent l’écriture

Mémoire – ton autre demeure où tu ne peux pénétrer

qu’avec un corps devenu souvenir

Adonis, in Toucher la lumière, Ed. Fata Morgana, 1 997. Ou-vrage d’artiste en édition limitée à 30 exemplaires, comportant cha-cun une peinture originale de Farid Belkahia. Texte traduit de l’arabe par Anne Wade Minkowski.

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1- « UN PORTRAIT », Petru Romosan (Roumanie), publié dans « les cahiers de l'Est » n°17, traduit par Sanda Stolojan

C 'est moi qui écrit les vers dans les vécés

à la craie

Dans les vécés du quartier que j'ai appelé Ithaque

j'écris à la craie rouge Dans les vécés du quartier que j'ai appelé Ithaque

j'écris à la craie verte Dans les vécés du quartier que j'ai appelé Ithaque j'écris à la craie blanche

la nuit j'entends par la ville des femmes et des hommes

clamant mes poèmes

il y en a un qu'ils ont chanté à l'église à ce qu'on dit

un poème à la craie blanche

un acteur célèbre l'a récité à la télévision

la milice me recherche

mais moi je vais d'un vécé à l'autre

j'écris un poème rouge

un poème vert

j'attends que ma photo paraisse dans les journaux

« 100 000 lei à celui qui attrapera

le poète des vécés »

salut ! Je m'en vais de ce pas écrire un poème à la craie verte

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T rois ethnies Trois jolis sourires, Trois jeunes destins. Trois petites filles, Trois éclats de rires qui cha-touillent les manguiers… Elles jouent en cercle en se tenant la main, Sandales et peurs au vent... Trois rêves ludiques, Trois chansons. Un, deux, trois, elles sautil-lent, Et petites nattes se hissent à l’horizon. Un, deux, trois, elles sautil-lent, Six petits pieds se posent sur la terre fébrile; Fraîchement violée par ses fils, Féconde et porteuse en son sein de l’Infâme. Un, deux, trois, et la terre minée s’ouvre. Rugissante et béante, Purulente de petits monstres, Elle avale les trois chan-sons.

2- « TROIS ETHNIES », Ketty Nivyabandi (Burundi), Texte composé pour l’exposition 'Recyclage d’armes en œuvres d’art’ Maoni (Collectif d'Art)/Bujumbura, Janvier 2010

Trois petits bouts d’enfance s’envolent en éclats. Trois rêves déchiquetés, trois rires muets. Trois destins étouffés, trois boutons de fleurs écrasés. Trois chants inachevés… Un, deux, trois pleurs iden-tiques s’élèvent dans un ciel désastré. Trois silhouettes vêtues d’imvutano noirs s’allon-gent, cheveux rasés, âmes calcinées. Trois mères. Trois plaies. Trois cœurs fendus à ja-mais. Hutu. Tutsi. Twa. Trois ethnies. Une seule agonie. Un seul fleuve de larmes qui s’écoule et s’écoule, à l’infini. Et ce silence… Le silence lourd et écarlate du sang des innocents.

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3- extrait de « EL ROMANCERO GITANO »Federico Gar-

cia Lorca, Traduction Jean Prévost

V erde que te quiero verde. Verde viento. Verdes ramas. El barco sobre la mar y el caballo en la montaña. Con la sombra en la cintura ella sueña en su baranda, verde carne, pelo verde, con ojos de fría plata. Verde que te quiero verde. Bajo la luna gitana, las cosas le están mirando y ella no puede mirarlas.

Verde que te quiero verde. Grandes estrellas de escarcha, vienen con el pez de sombra que abre el camino del alba. La higuera frota su viento con la lija de sus ramas, y el monte, gato garduño, eriza sus pitas agrias. ¿Pero quién vendrá? ¿Y por dónde...? Ella sigue en su baranda, verde carne, pelo verde, soñando en la mar amarga.

Compadre, quiero cambiar mi caballo por su casa, mi montura por su espejo, mi cuchillo por su manta. Compadre, vengo sangrando, desde los montes de Cabra. Si yo pudiera, mocito, ese trato se cerraba. Pero yo ya no soy yo, ni mi casa es ya mi casa. Compadre, quiero morir decentemente en mi cama. De acero, si puede ser, con las sábanas de holanda. ¿No ves la herida que tengo desde el pecho a la garganta? Trescientas rosas morenas lleva tu pechera blanca.

Tu sangre rezuma y huele alrededor de tu faja. Pero yo ya no soy yo, ni mi casa es ya mi casa. Dejadme subir al menos hasta las altas barandas, dejadme subir, dejadme, hasta las verdes barandas. Barandales de la luna por donde retumba el agua.

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Ya suben los dos compadres hacia las altas barandas. Dejando un rastro de sangre. Dejando un rastro de lágrimas. Temblaban en los tejados farolillos de hojalata. Mil panderos de cristal, herían la madrugada.

Verde que te quiero verde, verde viento, verdes ramas. Los dos compadres subieron. El largo viento, dejaba en la boca un raro gusto de hiel, de menta y de albahaca. ¡Compadre! ¿Dónde está, dime? ¿Dónde está mi niña amarga? ¡Cuántas veces te esperó! ¡Cuántas veces te esperara, cara fresca, negro pelo, en esta verde baranda!

Sobre el rostro del aljibe se mecía la gitana. Verde carne, pelo verde, con ojos de fría plata. Un carámbano de luna la sostiene sobre el agua. La noche su puso íntima como una pequeña plaza. Guardias civiles borrachos, en la puerta golpeaban. Verde que te quiero verde. Verde viento. Verdes ramas. El barco sobre la mar. Y el caballo en la montaña.

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3bis- traduction

V ert et je te veux vert. Vent vert. Vertes branches. Le

bateau sur la mer, le cheval dans la montagne.

L'ombre autour de la ceinture, elle rêve à son balcon, chair

verte, verts cheveux avec des yeux d'argent froid. Vert et je

te veux vert. Dessous la lune gitane, toutes les choses la re-

gardent mais elle ne peut pas les voir. Vert et je te veux vert.

De grandes étoiles de givre suivent le poisson de l'ombre qui

trace à l'aube son chemin. Le figuier frotte le vent à la grille

de ses branches et la montagne, chat rôdeur, hérisse ses durs

agaves. Mais qui peut venir? Et par où? Elle est là sur son

balcon, chair verte, cheveux verts, rêvant à la mer amère.

L'ami, je voudrais changer mon cheval pour ta maison, mon

harnais pour ton miroir, mon couteau pour ta couverture.

L'ami, voilà que je saigne depuis les cols de Cabra. Si je le

pouvais, petit, l'affaire serait déjà faite. Mais moi je ne suis

plus moi et ma maison n'est plus la mienne. L'ami, je vou-

drais mourir dans mon lit, comme tout le monde. Un lit

d'acier, si possible, avec des draps de hollande. Vois-tu cette

plaie qui va de ma poitrine à ma gorge? Il y a trois cents

roses brunes sur le blanc de ta chemise. Ton sang fume

goutte à goutte aux flanelles de ta ceinture. Mais moi je ne

suis plus moi et ma maison n'est plus la mienne.

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Laissez-moi monter au moins jusqu'aux balustrades hautes.

De grâce, laissez-moi monter jusqu'aux vertes balustrades.

Jusqu'aux balcons de la lune là-bas où résonne l'eau. Ils

montent déjà, tous les deux, vers les balustrades hautes.

Laissant un sentier de sang. Laissant un sentier de larmes.

Sur les toitures tremblaient des lanternes de fer-blanc. Mille

tambourins de verre déchiraient le petit jour. Vert et je te

veux vert, vent vert, vertes branches. Ils ont monté, tous les

deux. Le vent laissait dans la bouche un étrange goût de fiel,

de basilic et de menthe. L'ami, dis-moi, où est-elle? Où est-

elle, ta fille amère? Que de fois elle t'attendait! Que de fois

elle a pu t'attendre, frais visage, cheveux noirs, à la balus-

trade verte! Sur le ciel de la citerne la gitane se berçait. Chair

verte, cheveux verts avec ses yeux d'argent froid. Un petit

glaçon de lune la soutient par-dessus l'eau. La nuit devint

toute menue, intime comme une place. Des gardes civils

ivres morts donnaient des coups dans la porte. Vert et je te

veux vert. Vent vert. Vertes branches. Le bateau sur la mer,

le cheval dans la montagne.

(Suite)

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4- « ETAT DE MARCHE », Laurence Vielle, « Ouf »,

O n peut être assis, on peut être debout.

On peut rester sur place,

On peut être en mouvement.

On peut rester sur place en étant assis

Ou rester sur place en étant debout.

On peut être en mouvement pour avancer

Ou être en mouvement pour bouger sur place.

On peut avancer en étant assis,

On peut avancer en étant debout.

On peut avancer assis lentement,

On peut avancer assis à très grande vitesse.

On peut avancer debout sans bouger les pieds,

On peut avancer debout en marchant.

Tout homme véritable respire par les talons,

a dit Tchouang Tseu.

On peut marcher vite,

On peut marcher doucement.

On peut marcher avec des chaussures ou sans chaussures,

à l'intérieur ou à l'extérieur, tout nu ou habillé.

On peut marcher avec un sac à dos un sac à main ou sans

sac.

On peut marcher seul ou accompagné, avec un but ou sans

but, avec un domicile fixe ou sans domicile fixe, avec des

papiers ou sans papiers, avec une carte ou sans carte, en étant

joignable avec un portable ou sans être joignable sans por-

table.

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On peut marcher en prenant le chemin le plus court entre

deux points ou en prenant le chemin le plus long entre deux

points.

On peut marcher pour flâner

On peut marcher pour rêver

On peut marcher pour rire

On peut marcher pour pleurer

On peut marcher pour prier

On peut marcher pour marcher

On peut marcher pour rien.

Quand je suis morte je ne marche pas.

Quand je marche je ne suis pas morte.

Quand je marche je défie l'attraction terrestre :

entre deux pas je flotte un tout petit moment c'est vrai.

Je peux marcher en Asie en Afrique en Amérique en Austra-

lie en Patagonie au Mexique. Je peux marcher sur le bitume

sur la poussière sur la terre sur l'eau sur le verre sur le plastic

sur le feu dans le vent sur la lune, depuis 1969 je peux mar-

cher sur la Lune. Quand je marche dehors je suis en relation

avec l'univers.

(Suite)

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5- « FUOC DE PARAULAS »

Q ual fuoc brusla dins mon silenci,

quala esbaudada dins ma nuèt ! Cor-pres vos gaiti, nècias paraulas, vos torcer vivas dins la flambada. O poderosa volup-tat

de nonmàs bufar sus la brasa

per qu'espelissan las flors

de la papieralha cussonada. Amaras de sens, paraulas

pesugas, orbas, paraulas baujas,

fonsalhas de la votz, paraulas polsosas,

n'ai pro de vos, vos escupissi,

perqué me rimariatz las potas,

perqué me fariatz crasenar las dents ?

Vos sètz pro garçadas de ieu,

quantas fèures m'avètz donadas !

Uèi vos crami al vostre torn dins un grand revol d'alas rojas

bronzinantas, que lor rebat

dança dins lo blu de mos uèlhs.

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5bis-traduction (non lue)

Q uel feu brûle dans mon silence,

dans ma nuit quel flamboiement !Le cœur serré, je

vous regarde, mots stupides

vous tordre vivants dans les flammes.Ô puissante volupté

de n'avoir qu'à souffler sur la braise

pour que s'épanouissent les fleursde la paperasse mangée

des vers.Mots d'un sens amer,Pesants, aveugles, mots dé-

traqués,tartre de la voix, mots poussiéreux,

j'en ai assez de vous, je vous recrache,pourquoi gerceriez-

vous mes lèvres,pourquoi me feriez-vous grincer les dents ?

Vous êtes-vous assez moqué de moi,

que de fois m'avez-vous donné la fièvre !Aujourd'hui, c'est

à vous de brûlerdans un grand vol d'ailes rouges

et bourdonnantes, dont le refletdanse dans le bleu de mes

yeux.

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6- « VOYAGE A BARCELONE SUR LE BATEAU DE... »

"Sur la vie", "De la vie", du poète turc Nazim Hikmet, extraits

du recueil Il neige dans la nuit et autres poèmes, publié chez Gal-

limard (1999)

E n prison, sur la pierre de la fontaine Yousouf l’Infortu-

né a dessiné son bateau. Un prisonnier qui boit à la fon-

taineRegarde la proue effilée du bateau Glisser sur des mers

sans murs.

Près de la fontaine un arbre tout blanc Un prunier.

Ouvre encore une voile, Yousouf l’Infortuné Attire vers toi

le port où tu vas Et arrache une branche au prunier Pour que

les pigeons de la prison suivent ton sillage.

Prends-moi aussi Yousouf Sur ton bateau. Mon bagage n’est

pas lourd: Un livre, un cahier et une photo.

Allons-nous-en, frère, allons-nous-en Le monde vaut la peine

d’être vu.

La mer s’est calmée Rougeurs dans le ciel C’est l’aurore La

nuit qui nous semblait infinie Est finie. Voici devant nous la

Barcelone du Frente popular Fini notre voyage

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Amenez les voiles, l’ancre à la mer! Les pigeons qui sui-

vaient notre sillage s’en retournent dire aux copains que

nous sommes arrivés à bon port.

Et Yousouf, envoyant un juron magnifique Aux fers et aux

murs de là-bas Agite vers la ville qui nous fait face Sa

branche fleurie de prunier. Mon regard va de lui à Barce-

lone: Et sur la ville, là-bas, tout au fond Je vois des

flammes se tordre là-bas je vois côte à côte Lénine, Bakou-

nine, Robespierre et le paysan Mehmet qui gît à

Doumloupinar…

C’est ainsi que Yousouf et moi Passagers d’un bateau Né de

la fontaine d’une prison Nous avons vu à Barcelone dans

l’aurore La liberté se battre en chair et en os Nous l’avons

regardée les yeux en flammes Et comme la peau brune et

chaude d’une femme De nos mains d’hommes affamés

Nous avons touché la Liberté.

(Suite)

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7- « LA BATALLA DEL VERSO », poemas fidedignos,

1967

C on un verso,

es verdad,

no botas a un tirano. Con un verso no llevas pan y techo

al nino vagabundo,

ni llevas medicinas

al campesino enfermo. Sobre todo, no puedes

hacerlo ahora mismo. Pero, vamos a ver :Un verso bien naci-do y vigoroso,

y otro màs encendido, y otro màs desvelado,

y otro màs fuerte y màs veraz,

le dan vida

a un sueño que recogieron tierno,

y este sueño de mucho, ya nutrido,

se vuelve una conciencia,

y esta conciencia, una pasion, un ansia...Hasta que une dia,

Todo -sueño, concienca, anhelo-,compacto se organiza...Y entonces

viene el grito,

y el puño,

y la conquista...En la esfigie de la conquista

brilla un diadema : el verso.

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7bis– traduction « LA BATAILLE DU POÈME »

Traduction Julio Fausto Auguera (Guatemala, 1929)

A vec un poème,

C’est vrai,

Tu ne chasses pas un tyran.

Avec un poème tu n’apportes ni pain ni toit

À l’enfant vagabond,

Ni remèdes

Au paysan malade.

Surtout, tu ne peux pas

Le faire à l’instant même.

Mais…Nous allons voir.

Un poème

Bien né et vigoureux,

Et un autre plus enflammé,

Et un autre plus vigilant,

Et un autre poème plus fort et plus véridique,

Donne vie

À un rêve qu’ils ont cueilli tout tendre,

Et ce rêve de beaucoup d’hommes, une fois nourri,

Devient une conscience,

Et cette conscience, une passion, un désir angoissé…

Jusqu’au jour où,

Tout -rêve, conscience, désir-

s’organise, compact…et alors vient le cri,

et le poing, et la conquête…

Dans l’effigie de la conquête

Brille un diadème : le poème.

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8- « VERTICAL »

W ho told me my place ? It takes generations

To breed such true believer, Centuries to produce Someone who instinctively knew

The only movement possibleWas up or down. No space-For me on the earth's surface :

Horizontal equates with delusive

When only the vertical Remains open to my use. But I am released by language, I escape through speech : Which has no dimensions,

Demands no local habitation Or allegiance, which sets me free From whomsoever's definition : Jew. Woman. Poet.

8bis- traduction « VERTICALITÉ »

Q ui m'a dit ma place ?Il faut des générations

Pour engendrer un tel véritable croyant.

Il a fallu des siècles pour produire

Un être qui savait d'instinct

Que le seul mouvement possible Etait vers le haut ou le bas.

Pas d'espacePour moi à la surface de la terre.

Horizontal égale illusoire

Quand le seul vertical Reste ouvert à mon usage.

MaisJe me libère par le langage,

Je m'évade par le discours, Qui n'a pas de dimensions, N'exige pas de localisation

Ni d'allégeance, et me libère

De toute définition :Juive. Femme. Poète.

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9- « LA CRAVATE », Jacques Charpentreau (2015)

j’ai découpé la cravate

De mon père,

J’ai brûlé la robe écarlate

De ma mère.

J’ai décousu le grand rideau

Du salon,

J’ai rempli de deux litres d’eau

Le violon.

J’ai mis de l’encre rouge dans

L’aquarium,

J’ai passé tous les cure-dents

Au minium.

J’ai frotté le chien à la crème

Chantilly,

J’ai fait cuire les chrysanthèmes

En bouillie.

J’ai décoré notre loggia

De boudins,

J’ai piétiné les hortensias

Du jardin.

J’ai peinturé tous les portraits.

Et alors ?

Je croyais qu’en France on était

Libre encor !

O ui,

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Remerciements

LECTRICES

Monique BURG Liliane BODIN

Eve NUZZO Marta SANTA PAU

INVITES

Venant NZOJIYOBIRI Mahalia

MUSIQUE

PAPILLON « Raphael CARTON »

ORGANISATION

Eve GUILLOU

RESTAURANT LA P’TITE FACTORY

ASSOCIATION SESAM

COMMUNE DE SAINTE-ALVERE-SAINT-LAURENT LES BÂTONS

La collation qui vous a été proposée a été réalisé MAISON par des petites mains bénévoles et celles expertes de La P’tite Factory.

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CONTACT

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22 Rue de la République, Sainte-Alvère

24510 Sainte-Alvère-Saint-Laurent Les Bâtons

Tél. : 05.53.73.55.85

Courriel: office –[email protected]

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