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5.1 Principes de base La curiosité humaine, insatiable au sujet de l'univers et de la place que nous y occupons, est le creuset de l’astronomie et de l’astrophysique. Par conséquent, tout plan de développement viable de ces sciences doit s’appuyer sur la ferme volonté d'en explorer les frontières nouvelles et fascinantes. Dans ce chapitre, nous présentons les recommandations du CPLT pour le développement de l'astronomie au Canada au cours des 10 à 15 prochaines années. Notre vision se veut globale et plaide en faveur d'une augmentation substantielle des investissements canadiens dans ce domaine, afin de combler en partie l’énorme fossé qui nous sépare, en termes d’investissements par habitant, des autres nations scientifiquement développées avec lesquelles nous collaborons et commerçons. Comme nous le démontrons dans les pages qui suivent, ces dépenses ont de multiples retombées pour le Canada : scientifiques, culturelles, technologiques. Le plan du CPLT se fonde sur les principes de base suivants : • Recherche fondamentale : Le grand thème mondial de l’astronomie et de l’astrophysique, à l’aube du XXIe siècle, est l’origine des structures dans l'univers (voir le chapitre 2). Pour les années à venir, les principaux axes de recherche seront fort pro-bablement la formation des planètes et des étoiles, la formation et l'évolution des galaxies, la cosmologie. Il importe de cibler nos efforts scientifiques si nous voulons réaliser des progrès tangibles et de haut niveau dans ces domaines fondamentaux. En définitive, la recherche astronomique est mue par le sens d'émerveillement et de mystère que nous inspire l'univers. Tout au long de l'histoire, et particulièrement dans la deuxième moitié du XXe siècle, l’astronomie et l’astrophysique ont fortement sti-mulé le développement des autres branches des sciences fondamentales, des mathématiques et du génie. En plus de constituer un volet captivant des programmes scolaires et universitaires, ces sciences sont un moteur de croissance des technologies et des industries les plus diverses. Vu l'impact considérable - autant potentiel que réel - de l'astronomie sur la science, la technologie et la culture, tout plan d'excellence en astronomie doit d’abord définir les questions les plus primordiales, puis tenter d’y trouver réponse. 59 C H A P I T R E 5 Plan pour l'astronomie et l'astrophysique au Ce qui est maintenant prouvé ne fut jadis qu’imaginé. William Blake

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Page 1: C H A P I T R E Plan pour l'astronomie et …casca.ca/lrp/pdf/fr-chap5.pdf5.1 Principes de base La curiosité humaine, insatiable au sujet de l'univers et de la place que nous y occupons,

5.1 Principes de base

La curiosité humaine, insatiable au sujet de l'univers et de la place que nous y occupons, est le creuset de l’astronomie et de l’astrophysique. Par conséquent, tout plan de développement viable de ces sciences doit s’appuyer sur la ferme volonté d'en explorer les frontières nouvelles et fascinantes. Dans ce chapitre, nous présentons les recommandations du CPLT pour le développement de l'astronomie au Canada au cours des 10 à 15 prochaines années. Notre vision se veut globale et plaide en faveur d'une augmentation substantielle des investissements canadiens dans ce domaine, afin de combler en partie l’énorme fossé qui nous sépare, en termes d’investissements par habitant, des autres nations scientifiquement développées avec lesquelles nous collaborons et commerçons. Comme nous le démontrons dans les pages qui suivent, ces dépenses ont de multiples retombées pour le Canada : scientifiques, culturelles, technologiques.

Le plan du CPLT se fonde sur les principes de base suivants :

• Recherche fondamentale : Le grand thème mondial de l’astronomie et de l’astrophysique, à l’aube du XXIe siècle, est l’origine des structures dans l'univers (voir le chapitre 2). Pour les années à venir, les principaux axes de recherche seront fort pro-bablement la formation des planètes et des étoiles, la formation et l'évolution des galaxies, la cosmologie. Il importe de cibler nos efforts scientifiques si nous voulons réaliser des progrès tangibles et de haut niveau dans ces domaines fondamentaux.

En définitive, la recherche astronomique est mue par le sens d'émerveillement et de mystère que nous inspire l'univers. Tout au long de l'histoire, et particulièrement dans la deuxième moitié du XXe siècle, l’astronomie et l’astrophysique ont fortement sti-mulé le développement des autres branches des sciences fondamentales, des mathématiques et du génie. En plus de constituer un volet captivant des programmes scolaires et universitaires, ces sciences sont un moteur de croissance des technologies et des industries les plus diverses. Vu l'impact considérable - autant potentiel que réel - de l'astronomie sur la science, la technologie et la culture, tout plan d'excellence en astronomie doit d’abord définir les questions les plus primordiales, puis tenter d’y trouver réponse.

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Plan pour l'astronomie et l'astrophysique au

Ce qui est maintenant prouvé ne fut jadis qu’imaginé. William Blake

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• Complémentarité : Pour comprendre en profondeur l'origine et l'évolution des structures dans l'univers, les astronomes doivent travailler simultanément à plusieurs longueurs d’onde. Aucun télescope ne peut, à lui seul, être l'instrument complet qui permettrait de répondre à toutes ces questions essentielles. Tout plan astronomique ambitieux doit plutôt reposer sur un ensemble bien conçu d'observatoires et d'installations au sol et dans l'espace, chacun offrant des possibilités scientifiques complémentaires à celles des autres.

Ainsi énoncés, les objectifs de l'exploration astronomique présentent des défis colos-saux pour la conception des nouvelles installations de recherche. Les structures cosmiques sont complexes, et on ne peut bien en comprendre les propriétés physiques par des observations dans une seule plage étroite de longueur d’onde. Du domaine des planètes à celui du cosmos, la formation des structures repose sur l'organisation de la matière – d’abord à partir d’éléments infimes, pour aboutir à une myriade de structures adultes. L’étude de ces questions fondamentales nécessite un ensemble intégré d'observatoires et d'instruments.

Impact : Afin de maximiser les retombées scientifiques, technologiques et culturelles du plan, nous devons nous assurer que notre engagement intellectuel envers tout projet de partenariat international est sans faille. Il est donc essentiel, pour tout projet auquel nous participerons, de disposer des ressources financières et humaines suffisantes qui permettront aux astronomes et astrophysiciens canadiens d'influer sur l'orientation de ces projets et d'être à l'avant-garde de leurs domaines.

Le défi ultime pour notre communauté est de créer à la fois la vision et les outils qui nous permettront de réaliser des découvertes majeures en astronomie et en astrophysique dans les décennies à venir. Mais un bon plan doit aller plus loin : il doit favoriser le développement technologique et la participation du secteur privé, conditions d’une croissance économique saine, et il doit offrir des programmes de vulgarisation et d'éducation scientifiques permettant aux citoyens et citoyennes d'apprécier et de mieux connaître l'astronomie.

5.2 Initiatives

Entre septembre 1998 et juin 1999, le CPLT a étudié de nombreuses propositions de projets en astronomie. Nous n’avons pu malheureusement en retenir qu’une partie. Ces propositions, des plus valables pour la plupart, portaient sur de nouveaux instruments, de nouvelles installations, voire la création d'instituts. Outre les principes susmentionnés, le choix du CPLT a été guidé par le soutien des astronomes canadiens à chacune des propositions, et par l'existence et l’importance des infrastructures et des effectifs requis pour assurer la viabilité d’une proposition particulière. Nous ne décrirons pas dans ce rapport les initiatives que le CPLT n'a pas retenues. Par conséquent, nous insistons sur le fait que toutes les recommandations formulées dans ce rapport sont jugées essentielles pour l'astronomie et l'astrophysique canadiennes. Le CPLT a divisé cet ensemble de programmes essentiels en plusieurs sous-groupes de projets dont le non-financement aurait des conséquences particulièrement graves et permanentes sur l'avenir de l'astronomie et de l'astrophysique au Canada. Ces sous-groupes, indiqués par un astérisque dans le tableau 1, forment la catégorie « haute priorité ».

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Un couple de nuage gazeux en expansion autour de l’étoile super-massive Eta Carinae, dans le ciel de l’hémisphère sud. Cette image prise par le HST montre des détails fins des poussières et des gaz éjectés à proximité de cette jeune étoile.

Image de John Morse (University of Colorado) et de la NASA

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Nos recommandations tiennent compte du fait que les nouveaux observatoires mondiaux et les nouvelles installations internationales requièrent un niveau de financement qualitativement différent des projets, études et instruments de plus petite taille, mais souvent extrêmement importants. C'est pourquoi nous divisons toutes les recommandations (résumées dans le tableau 1) en deux catégories distinctes : les installations de grande taille, et les installations et projets de taille moyenne. Outre les nouvelles installations, notre plan formule des recom-mandations touchant le financement d'autres domaines cruciaux : les ressources humaines; l'informatique; la vulgarisation et l’éducation scientifiques.

Les observatoires dont les astronomes canadiens auront besoin au cours des 10 à 15 prochaines années se divisent en trois grandes catégories : mondiaux, internationaux, nationaux. Chaque catégorie joue un rôle stratégique dans le plan d'ensemble. Avant les années 1980, l’astronomie était plutôt dominée par les observatoires nationaux que possédait chaque pays. Mais au cours des 20 dernières années, nous avons assisté à l’émergence de collaborations internationales regroupant un nombre restreint de pays pour la construction d'observatoires, comme le TCFH et le TJCM, dont le succès est incontestable. L'astronomie connaît actuellement une « transition de phase » : la communauté astronomique mondiale regroupe pour la majeure partie ses ressources afin de construire un nombre restreint d'observatoires mondiaux à « exemplaire unique ». Chaque observatoire servira à étudier une plage précise du spectre électromagnétique. Grâce à la complémentarité de ces nouvelles installations, les chercheurs pourront se pencher sur des problèmes à l’extrême frontière de l'astro-nomie. Le nouveau paysage astronomique sera dominé par ces observatoires véri-tablement mondiaux. Si le Canada n’y participe pas, notre pays sera relégué aux « ligues mineures » de l'astronomie. Il est donc crucial que le Canada joue un rôle prépondérant dans les observatoires de la première génération et fasse, dès maintenant, tous les efforts possibles pour s’assurer une participation importante dans les observatoires de deuxième génération qui se profilent à l’horizon.

De manière générale, le CPLT conclut que si le Canada ne participe pas à la construction et à l’exploitation de ces nouveaux observatoires mondiaux, notre excellente réputation en astronomie et en astrophysique fondera comme neige au soleil en une décennie, et notre pays perdra de nombreuses possibilités économiques et retombées sociales.

A.1 Observatoires mondiaux : Première génération (2000-2010)

• Le CPLT recommande fortement que le Canada se joigne rapidement au projet Atacama Large Millimeter Array (ALMA). Ce projet devrait recevoir la plus haute prio-rité du Canada pour la participation à un grand observatoire au sol.

L'ALMA sera l'un des principaux instruments astronomiques au siècle prochain. Planifié au cours des années 1990, ce projet requerra la participation de la majeure partie des astronomes européens et américains, et le Japon s’y joindra probablement. Le réseau ALMA effectuera des observations extrêmement sensibles aux longueurs d’onde millimétriques. Il aura une résolution spatiale 10 fois supérieure à celle du HST, ce qui en fera un outil de recherche inégalé pour les astronomes travaillant dans des domaines très divers. L'ALMA les aidera grandement à élucider toutes les questions scientifiques décrites dans notre plan. Il leur permettra d'étudier une foule de domaines, depuis la formation des planètes jusqu’au rayonnement de fond cosmique. Ce réseau sera un outil exceptionnel pour sonder les mécanismes de formation des étoiles et des planètes, car il pourra cartographier les conditions qui prévalent dans les disques protostellaires, à une précision de 1 UA près pour les systèmes peu éloignés.

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Avec ce télescope, on pourra étudier les propriétés des gaz et des poussières dans l'univers proche, comme dans les parties du cosmos fortement décalées vers le rouge, ce qui nous permettra de mieux comprendre l'émergence des galaxies et de comparer leurs propriétés gazeuses sur de vastes étendues de l'univers. Le réseau ALMA repoussera de beaucoup les limites observables du cosmos, et nous fera remonter jusqu'à l'époque où la formation des galaxies était le mécanisme prépondérant.

Les astronomes canadiens appuient vivement et en grande majorité la participation du Canada au projet ALMA. Le CPLT l’a bien constaté. Peu importe leurs domaines de recherche ou les longueurs d’onde qui les intéressent, nos astronomes estiment que notre participation à ce projet est cruciale. Leur opinion reflète celle de leurs collègues étrangers. Le projet ALMA arrive en tête de liste chez les principales nations actives en astronomie. Les astronomes européens lui donnent la plus haute priorité, et il en a été de même dans le plan décennal américain de 1991 (le rapport Bahcall). Le rapport du sous-comité de la radioastronomie (voir le volume II, A.1) appuie fortement notre participation à ce projet au cours de la prochaine décennie.

Grâce aux compétences exceptionnelles de l'Institut Herzberg d'astrophysique (IHA) du CNRC, notamment dans le domaine des récepteurs submillimétriques et millimétriques et dans celui des technologies connexes (p. ex., les corrélateurs), les astronomes canadiens pourraient jouer un rôle important dans la construction de ces nouveaux observatoires. Le partenariat étroit qui existe déjà entre le CNRC et les radioastronomes universitaires se raffermira davantage si notre pays participe à ce projet. Selon les prévisions, notre participation au projet ALMA favorisera l'embauche non seulement de nouveaux radioastronomes travaillant dans les plages d’onde millimétriques, mais aussi d'autres observateurs et théoriciens dans toutes les universités du Canada au cours de la prochaine décennie. De plus, les projets ALMA et SKA offriront des débouchés des plus intéressants pour la société AGRA-Coast, fabricant des dômes des télescopes Gemini et constructeur reconnu de radiotélescopes. • Le CPLT recommande que l'on prenne des mesures appropriées afin d’assurer, dans les meilleures conditions possibles, la participation rapide du Canada au projet ALMA. Si nous voulons y prendre part, nous devrons respecter certains calendriers internationaux. Par exemple, le CNRC pourrait étudier activement la possibilité de tisser des liens de collaboration, solides et mutuellement avantageux, avec le National Radio Astronomical Observatory (NRAO) des États-Unis. • Le CPLT recommande fortement l’élargissement des groupes de recherche sur les cor-rélateurs et les récepteurs au CNRC. Cette recommandation devrait être l'une des principales priorités, parmi les projets de taille moyenne.

Ces groupes joueront un rôle crucial dans la participation du Canada aux projets ALMA et Square Kilometre Array (SKA), au cours des deux prochaines décennies. Le groupe des corrélateurs participera au projet d'agrandissement du Very Large Array, prévu par le NRAO. Ce sera une excellente façon d'utiliser nos compétences dans ce domaine, et cela ouvrira la voie à notre participation au projet ALMA.

• Le CPLT recommande fortement que le Canada se joigne rapidement au projet Next Generation Space Telescope (NGST), par l'intermédiaire de l'ASC. Ce projet devrait être la priorité première du Canada pour la participation à un grand observatoire spatial.

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L'astronomie a considérablement progressé au cours de la dernière décennie grâce aux résultats obtenus avec les observatoires spatiaux. Le plus connu est assurément le télescope spatial Hubble (HST), qui a enflammé l'imagination du public et a alimenté le développement de nouvelles technologies à une échelle jamais vue. Les possibilités du NGST seront complémentaires à celles du réseau ALMA (voir le volume II, C.2). De nouveau, le CPLT a constaté un large soutien pour le NGST, dans toutes les sous-disciplines de l'astronomie canadienne. Les astronomes canadiens jugent le NGST aussi prioritaire que l'ALMA. Ce soutien s'explique aisément : le NGST accroîtra la sensibilité des observations dans l’infrarouge (entre 1 et 30 microns) d’un facteur de 10 à 1 000, par rapport aux télescopes au sol actuels. Il permettra d'étudier la formation des planètes et des étoiles, la nature de la fonction de masse initiale stellaire, la formation des galaxies jusqu'à des décalages vers le rouge atteignant 20, voire 30, la distri-bution de la matière sombre (par l'effet de lentille gravitationnelle) et la géométrie de l'univers (par la recherche systématique des supernovae). Jumelées à la cartographie de l'évolution du gaz moléculaire par l'ALMA, ces études entraîneront une véritable révolution de nos connaissances sur la formation des structures dans l'univers, à plusieurs échelles différentes.

Le CPLT tient à souligner que les astronomes canadiens n’ont pas pu participer par le passé à la construction des grands observatoires scientifiques spatiaux. Ils ont donc perdu toute influence sur les orientations scientifiques et le développement technologique de ces projets, sauf en archivage des données. La recherche astrophysique à partir de l'espace a donné un essor scientifique et technologique énorme à des organismes comme la NASA, l'Agence spatiale européenne (ASE) et la NASDA japo-naise. Une occasion unique s’offre à nous de corriger le tir et de mettre à profit les talents canadiens dans les domaines scientifiques, instrumentaux et technologiques afin de participer aux projets de futurs observatoires spatiaux, dont le NGST.

A.2 Observatoires mondiaux : Deuxième génération (2010-2020)

Le radiotélescope Square Kilometre Array (SKA) et le Très Grand Télescope Optique (VLOT) sont les deux autres observatoires mondiaux dont la construction commencera probablement après le parachèvement des observatoires ALMA et NGST. À l'heure actuelle, les études techniques et conceptuelles du projet SKA sont beaucoup plus avancées que pour le projet VLOT. Ces observatoires de la deuxième génération seront aussi cruciaux pour l'astronomie dans la deuxième décennie du prochain siècle, que les projets ALMA et NGST le seront dans la première.

• Le CPLT recommande fortement que le concept canadien Large Adaptive Reflector (LAR) aille de l'avant, et que l’on construise des prototypes pour l'étude des principales composantes (phase B). Cette étude devrait être l'une des principales priorités parmi les projets de taille moyenne. On pourrait ensuite réaliser (dans cinq ans environ) un examen rigoureux des résultats de cette étude, des objectifs scientifiques et de l'état de la conception du projet SKA.

• Le CPLT recommande fortement qu'un fonds de développement soit établi pour financer la construction d'un prototype LAR, si telle était la recommandation de l’examen de la phase B.

• Le CPLT recommande fortement que le Canada prévoie dès maintenant sa participation au projet SKA.

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Le télescope SKA fonctionnera à des plages du spectre électromagnétique que ne couvrent pas les télescopes ALMA et NGST. En cosmologie, le SKA nous permettra de remonter encore plus dans le temps, pour étudier la formation des étoiles alors que l’univers était encore jeune, voire l'apparition des toutes premières étoiles. Les astronomes canadiens ont élaboré ce qui pourrait bien être le concept le plus économique et le plus intéressant pour l'observatoire SKA : celui-ci fonctionnerait à de plus hautes fréquences et consisterait en un réseau de 30 grands réflecteurs adaptatifs. Chaque réflecteur serait en lui-même un superbe radiotélescope, c'est-à-dire une antenne orientable de 200 mètres au sol et un ballon, maintenu par des haubans à 500 mètres au-dessus de l'antenne, qui transporterait les récepteurs radio. La poursuite des objets dans le ciel se ferait par déplacement des ballons-récepteurs.

Le CPLT conclut que le potentiel scientifique du SKA est très élevé, comparable à celui du projet ALMA. De plus, si le concept LAR pour le SKA est adopté, cela vaudra au Canada un rôle prépondérant dans ce projet. Le SKA comptera probablement parmi les plus importants observatoires mondiaux de deuxième génération après 2010. Les concepts du SKA et du LAR en sont encore au stade expérimental, et des travaux de développement et des tests s'imposent. L'ensemble de la communauté astronomique soutient ce projet. Par conséquent, il faut lui allouer les ressources requises pour d’abord étudier les différents concepts et, selon les recommandations de l’examen de la phase B, construire un prototype autonome de ce télescope (projet CLAR, voir le volume II, A.2 et A.3). • Le CPLT recommande fortement qu'une équipe soit rapidement mise sur pied pour étudier les concepts d'un Très Grand Télescope Optique (Very Large Optical Telescope - VLOT). Cette étude devrait être l'une des principales priorités parmi les projets de taille moyenne. Le Canada devrait se joindre à une équipe internationale à cette fin. Un examen rigoureux des résultats, des objectifs scientifiques et de la conception du VLOT devrait ensuite avoir lieu (dans cinq ans environ).

• Le CPLT recommande qu'un fonds de développement soit établi pour financer la construction des prototypes du système VLOT, si telle était la recommandation d'un examen rigoureux de mi-parcours.

• Le CPLT recommande que le Canada prévoie dès maintenant sa participation aux projets SKA et VLOT.

Tant que le NGST ne sera pas placé en orbite, la situation de l'astronomie optique au sol restera incertaine. Néanmoins, un télescope au sol d'au moins 25 mètres de diamètre pourrait jouer un rôle complémentaire au NGST, un peu comme le télescope optique Keck de 10 mètres le fait actuellement avec le HST. Bien que le concept d’un éventuel VLOT en soit encore aux toutes premières étapes, il faut réfléchir sérieusement, et dès maintenant, à cet observatoire mondial qui pourrait devenir réalité vers la fin de la deuxième décennie du prochain siècle.

Comme nous venons de le mentionner, la planification d'un observatoire VLOT mondial débute à peine au sein de la communauté astronomique internationale. Cette situation avantage grandement le Canada, car nous avons l'occasion d'y participer tôt. La construction d'un VLOT ne commencerait probablement pas avant le milieu de la deuxième décennie du siècle prochain, et ce télescope pourrait entrer en service vers 2020 (voir le volume II, B.1). Différents concepts sont possibles, et le CPLTrecommande que l’on étudie le concept d’un télescope de 25 mètres. Un VLOT de ce diamètre aurait la taille minimale requise pour jouer un rôle complémentaire au NGST, tout en représent-

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ant l'étape naturelle et logique après l'actuelle génération des 8 mètres. La haute résolution du NGST et la surface collectrice de lumière du VLOT seraient des compléments naturels.

De par ses compétences en astronomie optique et infrarouge, le Canada pourrait prendre part de manière importante à la conception d'un VLOT. Nos astronomes devraient être prêts à jouer un rôle prépondérant dans ce type d'installation; pour ce faire, il faudra investir dans des études techniques de base et participer à la construction d'un prototype. Le CPLT recommande que la planification d'un VLOT se fasse indépendamment de toute utilisation éventuelle du site du TCFH. L'avenir à long terme de ces deux installations dépend de plusieurs facteurs dont nous ignorons pour le moment les tenants et les aboutissants.

Les télescopes ALMA, SKA, NGST et VLOT constitueront une tétrade d'instruments complé-mentaires et extrêmement puissants, qui accroîtront la sensibilité des observations d'un facteur de 100 à 1 000, sur une immense plage de longueurs d’onde.

B. Observatoires internationaux

Par installations internationales, nous entendons les observatoires construits dans le cadre de partenariats regroupant un nombre restreint de pays. Ces installations ont joué un rôle important en astronomie au cours des 20 dernières années. Les observatoires Gemini, TCFH et TJCM sont les principales installations auxquelles nous parti-cipons de façon importante. Comme nous l'avons déjà mentionné au chapitre 3, les deux télescopes Gemini de 8 mètres ouvriront de nouvelles avenues exaltantes aux astronomes canadiens au cours de la prochaine décennie, dans toutes les grandes sous-disciplines dont nous traitons dans notre plan. Toutefois, il est impératif de planifier le rôle du TCFH et du TJCM pour la prochaine décennie.

• Le CPLT réitère fermement l'engagement du Canada envers le projet Gemini au cours de la prochaine décennie. Le projet Gemini devrait recevoir la plus haute prio-rité pour ce qui est des subventions d'exploitation et de soutien pour nos observatoires internationaux.

Les télescopes Gemini, membres de la nouvelle classe des 8-10 mètres, offriront des pos-sibilités fascinantes au cours des prochaines années. Leur construction a grandement fait appel à nos compétences instrumentales dans l'optique et l'infrarouge. Les astronomes sont sur le point de faire des découvertes scientifiques extraordinaires à l’aide de ces jumeaux.

• Le CPLT recommande que les astronomes canadiens obtiennent rapidement une par-ticipation importante (40 %) à la construction et à l'exploitation d'un nouveau télescope optique/infrarouge de 8 mètres. La priorité devrait être accordée à un télescope à grand champ.

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Notre participation aux télescopes Gemini, appréciable mais tout de même relativement faible, ne peut régler deux problèmes cruciaux et constants de l'astronomie optique infrarouge au Canada, à savoir :

1. Le nombre total de nuits d'observation dont les astronomes canadiens peuvent disposer avec les télescopes Gemini ne représente qu'une maigre fraction des besoins à venir. Alors que nos astronomes ont pu, au cours de la dernière décennie, travailler 150 nuits par année avec le télescope CFH, l'un des meilleurs de sa génération, nous ne disposerons, avec l’entente actuelle, que de 90 nuits pour les deux télescopes Gemini combinés. Cette réduction du temps d'observation des Canadiens avec des télescopes de pointe menace sérieusement la viabilité de notre communauté, et une solution rapide s’impose.

2. Le télescope CFH cessera d'être un instrument de pointe, fort assurément après 2006. Par rapport aux télescopes de 4 mètres, les nouveaux instruments de 8 mètres sont plus performants d’un facteur de 10 environ, en raison de leur plus grande surface collectrice de lumière et de la meilleure qualité des images qu’ils produisent. Par ailleurs, les coûts d'exploitation par mètre carré de miroir sont beaucoup plus faibles pour un télescope de 8 mètres que pour le TCFH.

Dès la conception d'un nouveau télescope optique de 8 mètres, on devrait prévoir l'utilisation d'instruments spectroscopiques à haute résolution. Ces instruments sont essentiels si nous voulons atteindre bon nombre des objectifs scientifiques présentés dans notre plan, notamment en astrophysique stellaire.

Les objectifs scientifiques poursuivis avec un télescope de 8 mètres à grand champ (WF8m) sont fort complémentaires aux travaux scientifiques qui seront réalisés avec les télescopes Gemini. En effet, ces derniers permettent à nos astronomes d'étudier avec une grande résolu-tion des objets bien précis, dans un faible champ de vision. Le télescope optique WF8m pro-posé serait un instrument à grand champ, optimal pour certains types de relevés - cosmologie, formation des galaxies, formation des étoiles - car l'avancement des connaissances dans ces domaines nécessite l'acquisition d’un grand nombre d’objets.

L'ensemble des astronomes canadiens soutient largement le projet WF8m. C’est le constat du CPLT. Les préalables scientifiques et les concepts préliminaires d’une telle installation sont présentés dans un document de travail (volume II, B.2). Il est essentiel que le Canada, dans un tel projet international, obtienne un nombre important de nuits d’observation s'il veut encore compter parmi les principales nations en astronomie optique et infrarouge. De plus, il est impératif que ce projet démarre rapidement, car les astronomes canadiens ont instamment besoin d’un nombre accru de nuits d'observation sur un télescope de 8 mètres.

• Le CPLT recommande le financement de la caméra MegaPrime et de la caméra infrarouge à grand champ WIRCAM, ces deux instruments étant destinés au TCFH. Les ressources actuellement investies dans ce télescope devraient être réaffectées, au besoin, au nouveau télescope de 8 mètres après 2006.

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Les plans d'exploitation et d'instrumentation du TCFH, pour la prochaine décennie, prévoient l'installation des nouvelles caméras susmentionnées, afin d'obtenir des images de haute qualité à grand champ. Le MegaPrime est un instrument optique qui sera mis en service en 2002. Le WIRCAM est un imageur qui fonctionne dans le proche infrarouge, et que l'on devrait construire au cours des trois prochaines années. Ces deux instruments nous permettront d'effectuer des relevés de grande qualité pour divers programmes scientifiques, jusqu'au milieu de la prochaine décennie. Il n'y a actuellement aucun financement disponible pour le projet WIRCAM, et cet instrument est requis de toute urgence si l'on veut que le TCFH demeure concurrentiel, même au cours des prochaines années.

Les astronomes canadiens reconnaissent d’emblée que la collaboration pour le TCFH a été un franc succès. Toutefois, nous n'avons pas les ressources nécessaires pour exploiter en même temps le TCFH et un nouveau télescope optique de 8 mètres. Bien que le premier choix des astronomes canadiens soit de perpétuer « l'esprit du TCFH » dans un nouveau projet de collaboration pour un 8 mètres, la France fait face à des contraintes financières qui rendent ce projet peu probable. Par conséquent, le CPLT recommande que la communauté astronomique canadienne maintienne ses engagements actuels envers le télescope TCFH, y compris le soutien aux projets MegaPrime et WIRCAM. S’il existe un conflit entre les ressources requises pour poursuivre l'exploitation du TCFH au-delà de 2006 et celles dont aurait besoin le Canada pour un nouveau télescope de 8 mètres, la priorité doit alors être accordée à ce dernier.

• Le CPLT recommande que lorsque nos divers engagements techniques et scientifiques envers le TJCM prendront fin, la priorité soit de réaffecter, s’il y a lieu, au projet ALMA les ressources présentement accordées au TJCM.

Le TJCM est actuellement équipé du SCUBA, un détecteur qui permet des avancées majeures grâce à l’observation systématique de jeunes galaxies lumineuses et de régions de formation d'étoiles. À de nombreux égards, c’est au cours des 5 à 10 prochaines années que le TJCM produira ses résultats les plus remarquables, comparables en importance aux résultats scienti-fiques obtenus avec le TCFH au cours de la dernière décennie. Les astronomes canadiens ont apporté des contributions exceptionnelles au projet TJCM. Et des découvertes de premier plan seront faites avec ce télescope, jusqu'à ce que le réseau ALMA devienne opérationnel. Ce dernier supplantera alors le TJCM en termes d'impact scientifique. De nouveau, s’il y a concurrence entre les ressources pour l'exploitation du TJCM après 2009 et celles qui sont requises pour que le Canada joue un rôle dans le projet ALMA, il faut alors accorder la priorité à ce dernier afin d'assurer une forte participation intellectuelle du Canada à ce projet.

· Le CPLT recommande que le Canada, par l'intermédiaire de l'ASC, participe à la mission spatiale FIRST/Planck.

Le satellite Planck mesurera des paramètres cosmologiques cruciaux qui feront progresser davantage notre compréhension du cosmos et de la formation des galaxies. Ces mesures permettront notamment de déterminer la constante de Hubble et la densité de l'univers. Quant à la mission FIRST, elle fournira aux astronomes de nouvelles vues en profondeur des étoiles et des galaxies en formation, ainsi que des gaz interstellaires, dans l'infrarouge. Toute cette information sera importante pour l'éta-blissement de modèles de la formation et de l'évolution des galaxies (voir le volume II, C.3). Cet observatoire fournira des données cosmologiques essentielles, complémentaires à celles que l’on obtiendra avec le NGST. Compte tenu des compétences canadiennes en cosmologie théorique et observationnelle, les astronomes canadiens ont tout intérêt à participer à cette mission.

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• Le CPLT recommande que le Canada maintienne une présence constante dans les pro-grammes VLBI spatiaux, par l'intermédiaire des programmes de l'ASC.

La technique de l'interférométrie à très longue base (VLBI) permet d'observer les sources radio dans le cosmos à des résolutions spatiales qui sont des milliers de fois supérieures à ce qui est possible aux longueurs d’onde optiques. Les interféromètres VLBI spatiaux seront des outils de choix pour la poursuite d'excellentes études sur les trous noirs au centre des noyaux galactiques. Grâce à ses compétences techniques et à son industrie, le Canada pourra également jouer un rôle important dans des projets internationaux de ce genre. C. Observatoires nationaux

Les observatoires nationaux sont ceux qui sont exploités uniquement par le Canada. Dans le présent rapport, nous nous intéressons aux deux laboratoires du CNRC, soit l'OFRA et l'OFA. Ces observatoires offrent des possibilités exceptionnelles pour la formation des étudiants des cycles supérieurs en astronomie optique et radio, pour la conception et l'essai de nouveaux instruments et pour la réalisation de programmes scientifiques particuliers de haute qualité.

• Le CPLT recommande que le Relevé canadien du plan galactique, à l'OFRA, soit prolongé jusqu'en 2005.

Le Relevé canadien du plan galactique est un projet exemplaire à maints égards : pour son apport scientifique à notre compréhension du milieu interstellaire galactique, pour les liens étroits de collaboration qu'il a rendu possibles entre le CNRC et les universités, et pour la formation d'une nouvelle génération de radioastronomes au Canada, comme en fait foi le nombre important de thèses de doctorat rédigées dans le cadre de ce projet. Le CPLT constate que de nombreux astronomes et étudiants des cycles supérieurs soutiennent avec enthousiasme ce relevé du plan galactique (voir le volume II, A.4).

L'OFRA est également vital à notre participation aux projets ALMA et SKA.

• Le CPLT recommande que l’on accorde une aide à l’exploitation des deux télescopes de l'OFA (1,2 et 1,8 mètre) pendant la prochaine décennie. On devrait assurer à ces deux installations le personnel et le soutien additionnels requis pour en maintenir la productivité scientifique.

L'OFA est un rouage essentiel de l'astronomie optique et infrarouge au Canada. Les frais d’exploitation de ses deux télescopes sont faibles, et ils sont donc extrêmement rentables pour la formation des étudiants et la conception des instruments, tout comme le télescope à synthèse de l'OFRA l’est pour la radioastronomie centimétrique canadienne. De plus, les télescopes de l'OFA sont un apport indéniable pour divers programmes : étude des orbites des astéroïdes qui passent près de la Terre, spectroscopie solaire, veille des noyaux galactiques actifs (voir le volume II, B.3).

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D. Les ressources humaines

Dans les universités ou les instituts, les groupes de recherche qui connaissent du succès sont composés de chercheurs aux compétences complémentaires et qui en sont à différents stades de leur carrière. Et tant dans les universités que dans les instituts, les scientifiques chevronnés ont besoin de ressources et d’un environnement approprié pour mener à bien un travail de premier plan : établissements adéquatement pourvus en personnel, laboratoires universitaires dynamiques, bassin d'étudiants talentueux aux cycles supérieurs, boursiers postdoctoraux accomplis, accès à des installations informatiques modernes et puissantes avec un excellent personnel de maintenance, programmes vivants de vulgarisation. En outre, les groupes spé-cialisés en instrumentation ont besoin d'un soutien technique de haut niveau.

Le CPLT constate que les conditions idéales, propices au développement de groupes de recherche de premier rang, sont rarement présentes au Canada, même dans nos meilleurs établissements.

D.1 Instituts

Au Canada, il existe un partenariat étroit entre le CNRC et les astronomes. Ceux-ci dépendent entièrement des compétences du CNRC pour concevoir, construire et maintenir nos téle-scopes, nos instruments et nos observatoires. Or, le personnel de l'IHA suffit à peine pour assurer le respect de nos engagements envers les observatoires Gemini, TCFH, TJCM et les observatoires nationaux. Même en transférant du personnel d'autres installations - ce qui en provoquerait la fermeture et se traduirait par la perte immédiate de capacités de recherche durement acquises - les effectifs actuels sont probablement insuffisants pour participer à une nouvelle installation mondiale. De plus, bon nombre des meilleurs experts de l'IHA dans ces domaines prendront leur retraite dans cinq à dix ans, ce qui n’est pas sans causer certaines préoccupations.

Tout comme on l’a souligné dans les évaluations qui ont récemment porté sur l’IHA, le CPLT a lui aussi constaté que les effectifs de l'IHA sont à peine suffisants pour respecter nos engage-ments internationaux actuels. Il sera alors très difficile d'entreprendre de nouveaux projets d’envergure, comme les observatoires mondiaux, sans améliorer grandement la situation à ce chapitre. Le CPLT constate également que cette préoccupation est généralisée au sein de la communauté astronomique cana-dienne.

• Le CPLT recommande fortement que l’IHA engage au moins six astronomes additionnels de fort calibre, tout en recrutant de nouveaux techniciens. Ces postes constituent l'une des priorités du financement des ressources humaines. Il faut rebâtir de manière concertée les effectifs à l'IHA, afin de faciliter la participation du Canada aux futurs observatoires mondiaux et de respecter nos engagements internationaux actuels. L'IHA doit accroître son leadership scientifique afin de jouer un plus grand rôle en recherche de pointe.

Il faut également tenir un concours international de très haut niveau afin d'attirer à l'IHA les meilleurs talents mondiaux en astronomie. Ceci est essentiel si l'on veut que l'Institut remplisse efficacement ses mandats fort exigeants au cours de la prochaine décennie. L'IHA devrait recevoir un soutien généreux, à titre d'établissement de premier rang en astronomie.

• Le CPLT recommande que l'ICAT reçoive les ressources financières, humaines et informa-tiques requises pour rehausser sa position de centre de recherche en astrophysique comptant parmi les principaux au monde.

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Un des instituts internationaux les plus visibles dans toute l'astronomie est assurément l'Institut canadien d'astrophysique théorique (ICAT). C'est l'un des cinq grands instituts d'astrophysique théorique au monde, et il a largement contribué à la réputation dont jouit actuellement le Canada en astronomie. Il est donc essentiel que l'ICAT puisse continuer de s'épanouir.

Autre constat du CPLT : tous les astronomes canadiens appuient l'ICAT et sa mission. On l'a décrit comme un modèle pour les autres instituts, même pour les mathématique et la physique. L'ICAT a joué un rôle très visible dans nos efforts nationaux en astronomie, par le financement d'un programme de bourses nationales, par la tenue de conférences et par le soutien qu'il offre à tous les astronomes canadiens qui y séjournent à titre de chercheurs invités. L'Institut a noué des liens avec de nombreuses universités canadiennes. Ses grandes compétences dans certains domaines, dont la cosmologie, en font un allié naturel pour les projets scientifiques de l'ASC et les programmes d'astronomie au sol. Le CPLT encourage fortement le CRSNG, l'ASC et le CNRC à soutenir l'ICAT.

D.2 Universités

Le CPLT ne peut qu'appuyer le sentiment profond qui prévaut chez les astronomes canadiens : des partenariats plus étroits entre le CNRC, le CRSNG et l'ASC et les universités sont des plus souhaitables. De tels liens encouragent les groupes universitaires dans leur mission première : la recherche fondamentale en astronomie et la formation de la prochaine génération de chercheurs exceptionnels. Le CPLT constate que les groupes universitaires ont presque atteint un seuil critique, car ils sont de moins en moins capables de former les constructeurs d'instrument qui seront pourtant essentiels à la participation du Canada aux nouvelles installa-tions proposées.

Le CPLT estime que la quasi-disparition des laboratoires d'instrumentation dans les universités est un autre élément préjudiciable à l'astronomie canadienne.

La réduction de l'aide à la recherche universitaire a eu un effet catastrophique sur les groupes qui construisent de petits instruments et des modules. Aucun laboratoire universitaire au Canada n’a plus dorénavant les ressources financières et le personnel requis pour entreprendre des projets d'instrumentation de l'ampleur de ceux de l'IHA. Même si notre plan à long terme prévoit que l'IHA sera encore le principal constructeur des instruments et installations d'importance, les universités devraient rebâtir leur capacité de concevoir et de construire de petites composantes ou des instruments astronomiques complets, et d’assurer une formation dans ce domaine.

• Le CPLT recommande fortement que l'on crée des laboratoires universitaires en astrophy-sique expérimentale. Cette recommandation est l'une des plus prioritaires pour ce qui est des projets de taille moyenne. Ces laboratoires pourraient être soutenus par le CRSNG et par d'autres organismes. Les universités hôtes devraient s'engager à fournir l'infrastructure requise et à créer des postes de professeur.

Le CPLT recommande que l'on établisse un plan pour la création de groupes d'instrumentation dans les universités (voir la proposition du volume II, G), plan qui serait conçu et financé par l'intermédiaire du CRSNG. Ces centres seraient établis dans des départements universitaires, et leur financement devrait se faire par voie de concours nationaux rigoureux. Ces groupes

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universitaires seraient tout désignés pour établir des liens plus étroits avec le CRSNG et l'ASC, afin de créer un large bassin de compétences dans l'art de construire des instruments perfectionnés pour les observatoires spatiaux et au sol. Toutefois, ces centres ne devraient pas drainer une part importante des effectifs et des ressources du CNRC. On devrait envisager l'établissement d'au moins un centre, au plus trois. Ces laboratoires construiraient de petits modules d'ins-trumentation pour l'astronomie optique/infrarouge, la radioastronomie et l'astro-nomie spatiale. On pourrait y effectuer de la recherche fondamentale dans les nouvelles technologies, si importantes pour la conception d’instruments perfectionnés. Ils seraient le lieu de prédilection pour la formation des jeunes astronomes de talent désireux de concevoir et de construire des instruments pour les observatoires au sol et dans l'espace. En outre, ces groupes prépareraient les étudiants canadiens au marché du travail dans des domaines de haute technicité. De tels centres pourraient être établis dans des universités du Québec, de l'Ontario, de l'Alberta ou de la Colombie-Britannique.

Le CPLT suggère que le CRSNG et l'ASC accordent des fonds pour quelques bourses en ingénierie et en recherche postdoctorale, en plus des postes ouverts par les universités.

D.3 Bourses de recherche postdoctorales

Il est impératif que le Canada accroisse ses investissements tant dans les ressources humaines que dans ses installations. Un moyen manifeste de rehausser l'efficacité des groupes de recherche canadiens est de donner la possibilité à nos astronomes réputés d'employer des boursiers postdoctoraux dans leurs groupes. À cette fin, deux avenues principales s'ouvrent à nous :

· Le CPLT recommande fortement que soient établies des bourses postdoctorales internatio-nales de haut niveau, un peu comme les bourses Hubble Fellows de la NASA. Cette recom-mandation est l'une des plus prioritaires pour le financement des nouveaux chercheurs. On pourrait établir deux nouveaux programmes de bourse :

1. Le CRSNG et l'ASC devraient établir conjointement un nouveau programme postdoctoral offrant au moins six bourses d'une durée de trois ans, attribuées à l'issu d'un concours interna-tional de très haut niveau, ouvert aux Canadiens et aux étrangers. Ces bourses devraient être détenues dans toute université canadienne ou à l'ICAT.

2. Parallèlement, le CNRC devrait établir un nouveau programme de bourses Herzberg, offrant en tout six bourses de recherche postdoctorales d'une durée de trois ans, devant être détenues dans tout observatoire ou laboratoire astronomique du CNRC.

• Le CPLT recommande que le CRSNG continue de soutenir l'excellent programme postdoc-toral de l'ICAT, qui a fait ses preuves. Le CRSNG devrait également accroître les fonds totaux alloués à son programme de subventions de fonctionnement, afin de permettre aux astronomes canadiens de premier plan d’embaucher un stagiaire postdoctoral dans leurs groupes de recherche.

Les astronomes canadiens l’ont fermement indiqué au CPLT : les scientifiques de premier plan au Canada devraient pouvoir embaucher des chercheurs postdoctoraux au sein de leurs groupes.

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La création de programmes prestigieux de bourses serait un autre moyen, excellent, de permettre à des boursiers postdoctoraux talentueux de travailler au sein de groupes de recherche universitaire au Canada. De tels programmes donneraient à l'ASC, au CRSNG et au CNRC une grande visibilité en astronomie, au Canada et dans le monde. De plus, ils favoriseraient le renforcement des liens entre ces organismes et les universités. La compétition pour attirer les chercheurs talentueux est féroce. Il est donc essentiel que les programmes de bourses proposés (ASC/CRSNG et Herzberg) soient dotés de fonds suffisants pour être concurrentiels, en termes de salaire et de soutien à la recherche, avec ce qu'offrent les grands établissements américains. Notre budget prévoit des salaires annuels de 50 000 $ CAN en 1999, mais on devrait s'assu-rer que le financement soit toujours de même niveau que celui des autres grands concours de bourses postdoctorales dans le monde.

Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que grâce à ces dépenses, relativement faibles au demeurant, pour attirer au Canada de jeunes scientifiques comptant parmi les meilleurs au monde, nous accroîtrons sans commune mesure le rendement scientifique de nos investisse-ments dans les installations.

E. Informatique

L'informatique est au cœur même de l'astronomie moderne, que ce soit pour la commande des grands télescopes, la collecte, l'archivage et le traitement des données, ou encore la simulation et la validation des idées théoriques. Les astrophysiciens et les astronomes effectuent depuis longtemps des travaux novateurs et de pointe en informatique. Leurs connaissances ont eu des retombées importantes sur l'âge de l'information. Un bon exemple est celui de Netscape, le navigateur bien connu utilisé par de nombreux internautes : il a été mis au point par des spécialistes de l’astrophysique informatique à l'U.S. National Centre for Supercomputer Applications (NCSA), en Illinois.

Le CPLT constate que l'absence de ressources informatiques de haute performance est un autre élément préjudiciable à l'astronomie canadienne.

En informatique de pointe, le Canada est beaucoup moins outillé que les autres pays dévelop-pés, et il ne peut offrir à ses astronomes théoriciens la capacité de calcul re-quise pour les simulations très poussées et le travail avec des ensembles de données toujours plus complexes. Cela s’explique surtout par l'absence d'ordinateurs parallèles de taille moyenne, suffisamment puissants. Bien que les Canadiens excellent dans ce type de travail, ils doivent faire leurs calculs sur des installations à l'étranger, tellement nous sommes mal équipés dans ce domaine. Comme le démontre l'étude du sous-comité de l'informatique (voir le volume II, D.1), les astronomes canadiens ont le sentiment généralisé que les ressources en informatique et les spécialistes dans ce domaine sont à un niveau inacceptable au Canada.

Le CPLT demande instamment que l'astronomie et l'astrophysique au Canada soient pourvues de ressources informatiques suffisantes, à divers paliers. Pour l'observation, la manipulation des données et la simulation théorique, notre plan décrit les besoins informatiques à plusieurs niveaux - des ordinateurs personnels aux superordinateurs.

• Le CPLT recommande fortement que le Centre canadien de données astronomiques (CCDA) archive les données qui seront produites par les futurs observatoires spatiaux et au sol, et qu'il implante des techniques novatrices et puissantes d'extraction des données. Ce projet est l’un des plus importants en astronomie informatique.

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On devrait financer la mise au point de techniques novatrices d'extraction des données, dans le but de maximiser l'utilité scientifique des observations astronomiques faites à de multiples longueurs d’onde (voir le volume II, D.2). Les ensembles de données sont maintenant énormes. Une image optique occupant 300 Mo et plus en mémoire, une séance d'observation peut facile-ment générer de 10 à 50 Go de données brutes : les besoins informatiques de l'astronomie sont désormais d’un tout autre ordre de grandeur. Une deuxième révolution informatique est l'archivage et l'extraction des données recueillies avec de nombreux et différents télescopes. Le Centre canadien de données astronomiques (CCDA), au CNRC, est un leader mondial dans ce domaine.

Le CCDA étudie actuellement une nouvelle façon, brillante, de travailler avec les bases de données, le but étant de permettre aux chercheurs d'extraire de l'information provenant de nombreux ensembles de données afin de solutionner divers problèmes en astronomie. Le CPLT recommande également que l'ASC soutienne une partie de ces initiatives au CCDA, du moins pour l'archivage des données qui seront captées par le NGST et les autres observatoires spatiaux. Le leadership actuel du CCDA dans les techniques d'extraction de données pourrait avoir des retombées majeures pour notre société de l'information. De plus, ces techniques feraient avancer l’idée voulant que l’on intègre dès la conception initiale des nouveaux téle-scopes des fonctionnalités de base pour l'archivage des données. C'est pourquoi le CPLT recommande que l'on mette en œuvre, et avec vigueur, le plan du CCDA visant à implanter de telles possibilités sur la caméra MegaPrime qui équipera le TCFH (projet Terapix).

• Le CPLT recommande fortement que des fonds soient alloués à l'utilisation et à la mise à niveau d'un ordinateur parallèle de taille moyenne, et à l'embauche d'une personne-ressource chargée d'aider les utilisateurs locaux. Ce projet est l’un des plus importants en astronomie informatique. De plus, cet ordinateur devrait être installé dans les locaux de l'ICAT, et offrir des ressources nationales en informatique haute performance pour la modélisation et la simulation.

Dans la plupart des pays développés, les astrophysiciens effectuent couramment des travaux d’envergure visant à simuler numériquement une foule de phénomènes astrophysiques - explosions de supernovae, formation des étoiles et des planètes, mécanismes à la base même des structures dans l'univers. Mais le Canada possède relativement peu de chercheurs qui travaillent à ce niveau. La raison principale est l'absence d'installations de calcul haute performance (CHP) au pays. Au Canada, on trouve un seul ordinateur universitaire qui figure sur la liste des 500 plus gros ordinateurs universitaires au monde, le « Top 500 ». Aussi bien dire que les capacités canadiennes en astronomie informatique sont négligeables par rapport à celles des nations comparables à la nôtre. Des correctifs s’imposent donc.

L'ICAT est le lieu idéal pour établir une telle installation, car on y retrouve déjà des compé-tences importantes en informatique, et c'est le foyer de l'astrophysique théorique au Canada depuis près de 15 ans. De plus, le CPLT recommande que le soutien d'une telle installation, p. ex., par l'intermédiaire du CNRC et du CRSNG, favoriserait l'établissement de liens étroits et hautement souhaitables entre la modélisation théorique au Canada et les vastes programmes observationnels proposés dans notre plan. L'établissement de tels liens entre le CNRC et l'ICAT permettrait de rapprocher ce dernier du CCDA, à l'avantage mutuel de tous.

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Il est essentiel également de créer un poste d’informaticien expert qui aidera les astronomes à utiliser ce système, et à traduire en algorithmes leurs problèmes de calcul astronomique. Ce poste d’informaticien expert est très important. Il ne saurait être occupé par des étudiants de cycles supérieurs ou des boursiers postdoctoraux.

• Le CPLT recommande que les subventions d'appareillage au Canada soient fortement accrues. Les chercheurs doivent être en mesure de traiter les volumes énormes de données qui deviendront d'ici peu la norme en astronomie et en astrophysique, et ils doivent pouvoir réaliser les calculs connexes.

On estime que le soutien à l’astronomie informatique au Canada est déficitaire d’un facteur de plus de 2. Le CPLT insiste sur l'importance d'accroître le financement de ce secteur, que ce soit par les subventions d'appareillage du CRSNG ou par des pro-grammes comparables.

• Le CPLT recommande qu'un réseau CHP multidisciplinaire, durable et financé par les organismes nationaux, soit établi dans le cadre des programmes de la Fondation canadienne pour l'innovation (FCI).

Les astronomes profiteraient avantageusement d’une installation de calcul haute performance établie par les mécanismes ci-dessus. En ce qui concerne l’accès aux superordinateurs, le con-sortium national C3.ca pourrait répondre aux besoins des astronomes et des astrophysiciens. L'établissement d'un programme national, subventionné par la FCI, rendrait possible la mise en place d'un superordinateur dont le Canada a un besoin pressant. Une telle installation permettrait d'effectuer ici même des simulations numériques sophistiquées dans tous les domaines de l'astrophysique, ce qui éliminerait notre dépendance à l'égard des ressources informatiques étrangères. F. Vulgarisation

La vitalité et la croissance durable de l'astronomie sont étroitement liées à l'intérêt soutenu du public envers celle-ci. L'astronomie et l'astrophysique passionnent le pu-blic, et les nouvelles découvertes - systèmes planétaires, trous noirs, cosmologie, pour n'en nommer que quelques-unes - ont un grand écho dans la population. Il est donc fort surprenant de constater que très peu d'efforts et de ressources ont été consacrés à la vulgarisation de l'astronomie auprès des Canadiens et Canadiennes. Le succès de la NASA, dans ses efforts de diffusion des découvertes du HST auprès du public américain, n'a aucune contrepartie au Canada. Cette absence d'information sur l'importance de la contribution canadienne en astronomie donne l'impression que l'on fait peu dans ce domaine, ce qui nuit gravement au développement et au financement continus de l'astronomie au Canada. Nous négligeons l'intérêt que porte le public à l'astronomie, et nous récoltons ce que nous semons : un niveau de soutien pour l'astronomie qui est presque cinq fois moindre par habitant que dans bon nombre des autres pays développés; l'absence quasi complète de l'astronomie dans les cercles gouvernementaux; l’inexistence de sites Web canadiens sur l’astronomie, passionnants et aisément accessibles, s’adressant aux médias et au public; et enfin, la perte conti-nue de nos étudiants universitaires les plus brillants au profit des établissements américains, car, pour poursuivre leurs études et trouver des postes de recherche, ces étu-diants vont là où l'astronomie semble dynamique.

• Le CPLT recommande fortement qu'environ 1,5 % du budget de tout projet soit alloué à des activités connexes de vulgarisation. Cette recommandation est l'une des plus prioritaires pour les initiatives de vulgarisation. De plus, le CNRC et l'ASC devraient créer des centres modernes de vulgarisation qui contribueraient aux acti-vités d'éducation et s'adresseraient autant au public qu'aux médias.

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Nous proposons qu'environ 1,5 % du budget alloué à tout grand observatoire international ou mondial (par exemple, ALMA, NGST, etc.) servent à des activités de vulgarisation.

• Le CPLT recommande fortement que l'on déploie des efforts concertés et soutenus afin d'établir un programme efficace et multiniveau de vulgarisation s'adressant au public, aux écoles, aux groupes d'astronomes amateurs, aux planétariums, aux gouvernements et aux médias. La Société canadienne d'astronomie (CASCA) et le CNRC devraient créer un site Web à la fine pointe de la technologie, consacré à l'astro-nomie. Cette recommandation est l'une des plus prioritaires en fait de vulgarisation.

Il est vital de créer un site Web canadien traitant d'astronomie, qui serait le fruit de la collabora-tion entre la CASCA, le CNRC et l'ASC. Ce site devrait fournir à toute per-sonne intéressée une information abondante sur l'astronomie, dans le contexte tant international que canadien. On pourrait y présenter de l'information à jour sur les activités de toutes les installations et de tous les observatoires auxquels les Canadiens contribuent, et sur les découvertes des astronomes canadiens. Le CPLT recommande également que les annonces de découvertes récentes soient diffusées régulièrement à de nombreux groupes intéressés : écoles, astronomes amateurs, journalistes, médias.

• Le CPLT recommande que la CASCA joue un rôle directeur dans les activités d'éducation s'adressant aux écoles. La CASCA devrait donc disposer des ressources lui permettant de présenter des ateliers et d'offrir aux enseignants des outils pédagogiques, de maintenir un site Web sur l’astronomie, et d'engager un agent d'information qui coordonnerait ces activités.

On peut éveiller l'intérêt envers l'astronomie et la science chez les jeunes dès l’école primaire, de manière fort efficace. Comme l'avenir de l'astronomie repose sur l'intérêt soutenu et le talent des garçons et des filles, la CASCA doit avoir une présence visible dans l'éducation scientifique de nos écoliers. En donnant aux enfants un aperçu de ce qu’est véritablement l’astronomie et en leur transmettant la passion de la découverte, nous contribuerons également à mieux faire connaître la science en général. Ces activités sont cruciales si nous voulons que le Canada joue un rôle prépondérant en cette ère de culture technologique fondée sur l'information, où les frontières entre les sciences s’estompent.

• Le CPLT recommande que le CRSNG maintienne et élargisse son programme de stages d’été en recherche pour les étudiants du premier cycle.

Ce programme offre aux étudiants doués du premier cycle la possibilité d'acquérir une expéri-ence pratique en recherche astronomique et astrophysique. Ce contact direct avec la recherche incite souvent ces étudiants à poursuivre leurs études aux cycles supérieurs

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3. Résumé des priorités

Le plan décrit diverses initiatives, nécessitant des engagements financiers fort diffé-rents. C'est pourquoi nous résumons les priorités pour l'astronomie canadienne en fonction de ces différentes catégories. Il existe deux niveaux de priorité pour les projets au sein de chaque catégorie, et pour un même niveau, les projets ne sont nullement présentés dans l’ordre. Le CPLT est catégorique : les projets du deuxième niveau de priorité doivent être financés. Un projet classé au deuxième niveau ne signifie absolument pas que cette activité scientifique ou son impact soit de deuxième ordre. Le premier niveau de priorité désigne plutôt les projets pour lesquels nous avons des compétences particulières. Ne pas participer à ces projets porterait gravement préjudice à l'avenir de l'astronomie au Canada. De plus, ces projets ont reçu un fort appui de tous les secteurs de la communauté astronomique canadienne.

• NOUVELLES INSTALLATIONS MAJEURES

1. La principale priorité de l'astronomie canadienne est notre participation à deux nouveaux observatoires mondiaux de première génération : l'ALMA et le NGST.

2. Les observatoires WF8m et la mission FIRST/Planck sont également très importants. De plus, le Canada doit déjà prévoir sa participation future aux observatoires mondiaux de la seconde génération que sont le SKA et le VLOT.

• PROJETS ET INSTALLATIONS DE TAILLE MOYENNE

1. Les principales priorités sont les études LAR (phase B), les études conceptuelles sur le VLOT, l'élargissement des groupes des corrélateurs et des récepteurs au CNRC, et le maintien de nos engagements envers le projet Gemini.

2. Le soutien du TJCM jusqu'en 2009, la prolongation du Relevé canadien du plan galactique jusqu'en 2005, et l'exploitation du télescope CFH jusqu'à un moment opportun (après 2006), pendant la mise en œuvre du projet WF8m – tous ces engagements sont importants. Le Canada devrait investir dans les projets MegaPrime et WIRCAM pour le TCFH. Il importe également d’exploiter davantage les télescopes de l'OFA.

• INSTITUTS

1. La principale priorité est d'accroître le nombre de postes d'astronome permanents à l'IHA du CNRC (au moins 6 postes), afin de soutenir les travaux d'instrumentation, et la conception et l'exploitation des installations. Il faut également renforcer le leadership de l’IHA et sa participation à la recherche scientifique. Il faudrait également établir un programme de bourses Herzberg de très haut calibre

2. Il est très important de soutenir l'ICAT, car il s'agit de l'un des principaux instituts de recherche au monde.

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• UNIVERSITÉS

1. La principale priorité est de créer des laboratoires universitaires en astrophysique expéri-mentale, et un programme de bourses CRSNG/ASC de haut calibre.

2. Autres programmes importants : le soutien à la recherche universitaire grâce à l'augmentation des subventions de recherche accordées aux chercheurs, la possibi-lité d'engager des stagiaires postdoctoraux, ainsi que l'octroi de subventions du CRSNG pour les stages d'été et aux étudiants des cycles supérieurs.

• INFORMATIQUE

1. La principale priorité est l’expansion constante du CCDA et la mise en place d’un ordinateur haute performance de taille moyenne pour l'astrophysique théorique et informatique.

2. Autres programmes importants : la participation des astronomes à un réseau national de calcul haute performance et l'accroissement de l'aide du CRSNG, par l'intermédiaire des subventions d'appareillage.

• VULGARISATION

1. Les principales priorités sont la création d'un site Web national CASCA/CNRC, et l'affectation d'environ 1,5 % du budget de tout projet à des programmes de vulgarisation s'adressant au public et aux médias.

2. Autres programmes importants : la CASCA devrait être le chef de file dans les activités de vulgarisation et d'éducation s'adressant aux écoles et aux enseignants.

4. Budget

· Le tableau 1 résume les projets recommandés et les dépenses qui devraient relever du budget du CNRC au cours de la prochaine décennie pour l'astronomie et l'astrophysique au Canada. Les projets marqués d’un astérisque sont ceux qui sont jugés les plus prioritaires. Les dépenses additionnelles totales de 147 millions de dollars, sur 10 ans, ne sont pas frivoles. Nous en récolterons largement les fruits au Canada, que ce soit en science, dans la culture ou dans l'économie, comme nous le décrivons dans les chapitres qui suivent.

• Le CPLT recommande fortement que l'ASC investisse 50 millions de dollars ($ US) au cours de la prochaine décennie dans le projet NGST, afin d'assurer au Canada des retombées scientifiques et technologiques maximales. L'ASC devrait également financer notre participation à la mission spatiale FIRST/Planck. Nous recommandons aussi que l'ASC investisse dans les projets du CCDA en analyse des données, et qu'elle fournisse la moitié des sommes requises pour le prestigieux programme de bourses ASC/CRSNG que nous proposons. Nous estimons que ces dépenses totaliseront 100 millions de dollars ($ CAN) au cours de la prochaine décennie.

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• Le CPLT recommande fortement que le CRSNG soutienne les centres universitaires d’astrophysique expérimentale proposés dans ce rapport. Le coût de l'aide accordée aux chercheurs postdoctoraux et au soutien technique serait de 350 000 $ par année, par centre. Le financement d'au moins deux centres nécessitera 7 millions de dollars environ au cours de la prochaine décennie. Le CRSNG devrait également financer la moitié du programme de bourses ASC/CRSNG, que nous recommandons dans le rapport, soit un total de près de 2 millions de dollars pour la décennie à venir. Le CRSNG devrait doubler les sommes qu'il alloue aux subventions d'appareillage, en les augmentant de près de 5 millions de dollars au cours des 10 prochaines années. Enfin, le CRSNG devrait accroître les subventions de recherche octroyées aux chercheurs de premier rang, afin de leur permettre d'engager des stagiaires postdoctoraux; nous proposons à cette fin une augmentation de 3 millions de dollars du budget pour ce poste. Par conséquent, nous soutenons que le CRSNG devrait augmenter son financement de l'astronomie, au cours de la prochaine décennie, d'environ 17 millions de dollars.

• Les investissements totaux recommandés pour les trois organismes contribueraient à réduire l'écart qui sépare les astronomes canadiens de leurs collègues des autres pays industrialisés, en termes de dépenses par habitant en astronomie et en astrophysique. L’effet multiplicateur direct des investissements prévus dans notre plan est de deux environ (voir le chapitre 8), ce qui se traduira par des retombées de l’ordre d’un demi-milliard de dollars pour l'économie canadienne. Les retombées indirectes, sous forme d'avantages technologiques pour l'industrie et les entreprises cana-diennes, seront beaucoup plus grandes.

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Sur cette image de deux galaxies spirales en collision (paire dite Antennae), on a superposé les isolignes d’émission radio qui indiquent les régions de gaz moléculaire. L’image optique a été prise par le HST.

Gracieuseté de Christine Wilson, Université McMaster

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