Bugat-Clair Peguy par Eric Chams

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 Jean-Maurice Bu gat - Denis Clair  par Éric Chams Présentation Ce s pages ont été écrites en 2010 à la suite d'un article découvert sur Internet (http://romain.vaissermann.free.fr/03/03C/03C03/marcel-article.htm)  ayant pour objet la postérité des Cahiers de la Quinzaine  de Charles Péguy et intitulé « Jean-Maurice BUGAT : De nouveaux Cahiers de la qui nzaine ? » En mars 201 0 je suis entré en relation ave c l'auteur de cet article, M. Romain Vaissermann, rédacteur en chef du Porche, bulletin de l'  As so ci ati on des Am is de Jeanne d'Arc et Charles Péguy . J'e ntendais lui faire part d'observations sur la personnalité et l'histoire de ce Jean-Maurice Bugat au sujet duquel j'avais mené une enquête assez précise en août-septembre 1992. M. Vaissermann a cru bon de devoir informer de mes remarques les lecteurs de sa revue spécialisée, même si la question d'une éventuelle escroqu erie historico- littéraire de ce J.- M. Bugat et les i mplications polémiques de ses affabulations n'entraient pas dans la ligne éditoriale du Porche. Il ne m'a pas caché que certains, au sein de son comité de lecture, étaie nt défa vorables à la publication de ces révélations — ce que je conçois fort bien sur le plan éditorial, sinon éthique. C'est ainsi que M. Y ves Avril, secrétaire général de la 1

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Denis Clair/Jean-Maurice Bugat & Péguy, par Eric Chams - Travail de recherche littéraire et historiographique sur une falsification, par Eric Chams, paru dans le Porche, bulletin péguiste (2010).

Transcript of Bugat-Clair Peguy par Eric Chams

  • Jean-Maurice Bugat - Denis Clair

    par ric Chams

    Prsentation

    Ces pages ont t crites en 2010 la suite d'un article dcouvert sur Internet (http://romain.vaissermann.free.fr/03/03C/03C03/marcel-article.htm) ayant pour objet la postrit des Cahiers de la Quinzaine de Charles Pguy et intitul Jean-Maurice BUGAT : De nouveaux Cahiers de la quinzaine ?

    En mars 2010 je suis entr en relation avec l'auteur de cet article, M. Romain Vaissermann, rdacteur en chef du Porche, bulletin de l'Association des Amis de Jeanne d'Arc et Charles Pguy. J'entendais lui faire part d'observations sur la personnalit et l'histoire de ce Jean-Maurice Bugat au sujet duquel j'avais men une enqute assez prcise en aot-septembre 1992.

    M. Vaissermann a cru bon de devoir informer de mes remarques les lecteurs de sa revue spcialise, mme si la question d'une ventuelle escroquerie historico-littraire de ce J.-M. Bugat et les implications polmiques de ses affabulations n'entraient pas dans la ligne ditoriale du Porche.

    Il ne m'a pas cach que certains, au sein de son comit de lecture, taient dfavorables la publication de ces rvlations ce que je conois fort bien sur le plan ditorial, sinon thique. C'est ainsi que M. Yves Avril, secrtaire gnral de la

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  • revue, s'est dsolidaris en termes trs vifs de mon article et de ma recherche selon lui digne d'un procureur ou d'un auxiliaire de police . Soit ; il en faut aussi.

    Ce travail que j'ai nanmoins la faiblesse de croire scrupuleux et dnu de passion, mme s'il remue un pass assez nauseux, a t, sur l'insistance de M. Vaissermann et je l'en remercie, publi en septembre 2010 dans le n33 du Porche (pp. 73-80).

    On en trouvera ici la version originale (avec en notes quelques variantes, surtout d'ordre bibliographique, apportes lors de la publication).

    J'ai aussi, dans cette version en ligne, largement complt l'iconographie.

    ric CHAMS, 19 aot 2014.

    N. B.Les notes encadres d'un *astrisque* signalent les variantes apportes par la rdaction du Porche. Les passages [ entre crochets ] signalent des ajouts rcents (aot 2014) l'article initial, faisant suite le plus souvent des recherches ou informations nouvelles.

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  • [Publi dans le n33 dans la revue Le Porche, bulletin de l' Association des Amis de Jeanne d'Arc et de Charles Pguy, Orlans, septembre 2010, p. 73 sqq. (ISSN 1291-8032)]

    PRCISIONS AUX PGUISTESSUR JEAN-MAURICE BUGAT

    par ric CHAMS

    Un article consacr la postrit des Cahiers de la Quinzaine1, mincite complter des informations sur lesquelles j'aurai peut-tre quelques claircissements apporter. Je prcise demble que je ne suis nullement pguiste, mme si, en tant qu'hugolien et stapfrien, cet auteur m'est relativement familier.

    partir de 1958, on assiste une reprise des Cahiers de la Quinzaine par un certain Jean-Maurice Bugat (n en 1921, sept ans aprs la disparition de Pguy). C'est sur la personnalit de M. Bugat que je souhaite apporter un clairage, au nom de la vrit de l'histoire littraire (comme de l'Histoire tout court) que ce monsieur a tendance bafouer. Et lon comprendra vite que ce personnage, loin de se situer dans la ligne des ides gnreuses de Pguy, cherchait simplement, en usurpant le titre d'une revue encore clbre l'poque, bnficier de sa gloire. C'et t l un moindre prjudice (on a vu souvent dans l'histoire littraire ce type de rcupration) s'il ne s'tait agi aussi pour lui d'en dtourner, voire den compromettre et d'en fausser gravement le sens.

    M. Vaissermann relve juste titre, dans le premier numro, une lettre

    1 * Romain Vaissermann, Les reprises non abouties des Cahiers de la quinzaine , BACP 97, janv.-mars 2002, pp. 103-114.*

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  • de Jules Romains qui se montre fort circonspect sur la sortie de cette nouvelle-ancienne revue. Certes, la prsence de Flicien Challaye au sein de ces nouveaux Cahiers est une sorte de garantie d'authenticit de leur orthodoxie ditoriale, si j'ose dire. Mais le Flicien Challaye qui intresse Bugat n'est pas celui du temps de Pguy mais celui qui, revenu de sa visite de 1938 en Allemagne, va se mettre au service du rgime de Vichy et crire dans des journaux collaborationnistes comme Aujourd'hui ou L'Atelier de Georges Albertini avec Marcel Dat, et qui va faire partie avec Paul Rassinier et Jean Madiran des Amis de Robert Brasillach. Je reviendrai sur ces personnages et sur cette poque dans un moment. Du reste, ds ce premier numro dat du 1er janvier 1958, se glissent habilement, parmi des articles signs de Robert Escarpit, Pierre-Henri Simon ou Edgard Pisani, des propos de Bugat lui-mme pour le moins tranges et qui traduisent certaines obsessions :

    [] jai horreur des purations de tous ordres que notre hypocrite socit soctroie de temps autre sous tous les rgimes. [] Il fut dailleurs un temps o jtais lun des rares2 mlever contre les preuves subies par Cline. [] Aprs que le verdict acquittant Cline mait satisfait, je dois reconnatre que les moyens employs par Ferdinand pour y parvenir me plaisent beaucoup moins []. [] Nous naimons gure quun homme se parjure ou veuille chercher tardivement des attnuations ses attitudes passes. [] Si, Ferdinand, tu as dit en dautres temps que les Juifs taient la plaie du monde et que le salut ne pouvait venir que du nazisme. Nous ntions pas toujours de ton avis alors non plus, du reste, quaujourdhui mais nous aimions ta faon de le dire. 3

    Le propos est assez fort et, pour une fois, peu ambigu ; mais il faut dire quil nest pas nouveau. Bugat se contente de recycler mot pour mot un article paru huit ans plus tt dans un journal dont il tait aussi le directeur et rdacteur en chef, Le Citoyen du Monde4 ; mais lpoque, son article tait prudemment sign Cartouche . Larticle avait alors suscit une vive raction dun lecteur : Votre article sur Cline est une infamie, une ordure, une monstruosit, un (ad libitum) . Bugat, sans sourciller, avait embot le pas ce lecteur ulcr en faisant expliquer par son ami Jean-Charles Pichon

    2 Cette clause de style permet Bugat, outre de sriger en rare humaniste, de navoir pas citer des gens comme Maurice Bardche, Paul Rassinier, Albert Paraz et alii, en compagnie desquels son humanisme prendrait une autre teinte

    3 Cahiers de la Quinzaine, n 1, p. 10 ; cote BnF : 4 JO 13350.

    4 Le Citoyen du Monde, n 17, du 3 mars 1950 ; cote BnF : Gr. Fol. JO 5666.

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  • que larticle incrimin, par suite derreurs de mise en page, dinversions de lignes, etc., disait peu prs le contraire de ce que nous voulions lui faire dire . Et Pichon dajouter avec morgue : Nos amis savent bien que lantismitisme et le racisme, ce nest vraiment pas notre spcialit 5. trangement, Bugat resservira pourtant le mme article dans ses Cahiers de la Quinzaine, avec les mmes prtendues erreurs, inversions, etc., qui lui avaient fait dire en 1950 peu prs le contraire de la pense de son auteur ; une manire de ne pas savouer vaincu et de contresigner linfamie Et les futurs numros des Cahiers verront arriver des personnalits beaucoup moins claires comme Jacques Duboin (1878-1976), ditorialiste de La France au Travail dont le secrtaire de rdaction nest autre que le trs antismite et ex-collabo Henry Coston. La mthode, l encore, nest pas vraiment nouvelle chez Bugat. Le Citoyen du Monde6, fond lorigine pour dfendre la position prise par Garry Davis en 1948, aprs avoir permis dobtenir quelques articles de grandes signatures comme celles dHerv Bazin, Andr Breton ou Jean Rousselot, va distiller une pense nettement moins noble au travers de personnages comme Paul Rassinier (1906-1967), le pre historique du ngationnisme7. On retrouvera une dernire fois Rassinier cit en 1967 (il est entretemps devenu le protg dHenry Coston, a t prfac par lantismite Albert Paraz, a t publi en Allemagne par un nazi non repenti, Karl-Heinz Priester)8 dans un nouveau journal de Bugat.

    5 Nos dbats , Le Citoyen du Monde, n 18, 10 mars 1950.

    6 [ Publi Bordeaux puis Paris, Le Citoyen du Monde eut 21 numros, avec une parution bimensuelle puis hebdomadaire du 26 juin 1949 au 24 avril 1950 (dernier numro repr), avec un supplment au n11. ]

    7 Le Citoyen du Monde, n 17, 3 mars 1950 ; n21, 24 avril 1950. 8 Si, lextrme rigueur, on pouvait considrer en 1950 que Le Mensonge dUlysse, premier

    ouvrage rvisionniste, navait pas touch beaucoup de lecteurs, il en allait tout autrement en 1967, lanne mme de la mort de son auteur qui, depuis dix-sept ans, avait suscit une forte polmique alimente, de plus, par des rditions et des prfaces qui ne cachaient plus leur caractre antismite. Rappelons que Rassinier, ds le 3 mars 1950, crivait dans Le Citoyen du Monde, glosant sur Le Gala des vaches paru en 1947 : Albert Paraz conte quelque part quayant dit, dans un cercle de viragos prtentieuses et distingues, quil ny avait pas de chambres gaz Buchenwald, fut proprement injuri. (cf. Paul Rassinier, Le jugement de lhistoire , Dfense de l'homme, 4e an., n 36, septembre 1951). Ainsi, de 1950 jusqu, littralement, sa mort, Rassinier trouva ses cts Bugat ; il eut deux oraisons funbres dont lune fut prononce par mile Bauchet, directeur dune revue dont Jean-Maurice Bugat tait le rdacteur en chef, La Voie de la paix. Dans son n 180, dat daot-septembre 1967, on peut lire cet adieu Paul Rassinier avec cette conclusion : Son uvre dhistorien se chargera de confondre ceux qui laccusrent odieusement dtre un agent de linternationale nazie. Cf. Florent Brayard, Comment lide vint M. Rassinier. Naissance du rvisionnisme, prface de Pierre Vidal-Naquet (Fayard, 1996, pp. 445-446 et note 1, p. 446).

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  • Document n1. Amicale polmique dans le n3 des Cahiers de la Quinzaine du 1er fvrier 1958, p. 6.

    Mais, plus encore que Jules Romains (qui napparatra plus dans les numros suivants), il y a un homme qui, dans les colonnes mmes de ces nouveaux Cahiers de la Quinzaine, va percevoir la vraie nature de son directeur : c'est Vercors ; l'crivain qui a ddi Le Silence de la mer Saint-Pol Roux, le pote octognaire mort de chagrin dans les premiers temps de la terreur allemande qui viola et massacra ses proches9, dira clairement le fond de sa pense indigne Jean-Maurice Bugat qui, tonnamment, le publiera sous le titre bnin d'Amicale polmique avec Vercors (trop heureux, sans doute, d'avoir cette illustre signature dans sa revue) :

    Six millions de Juifs aux fours crmatoires, je vois bien quon y pense dans vos colonnes mais cest sous la plume de ceux qui les y ont envoys, qui ont trpign de joie lodeur de la fume atroce, qui ne regrettent rien et enverraient les rejoindre les quelques rchapps, si loccasion sen prsentait. Ils ont d quelque temps se montrer discrets et cest de cela que vos Cahiers sindignent. [] Que vous le vouliez ou non, votre position est raciste. [] Il [sagit] de savoir si votre revue se rendra ou non objectivement complice de tentatives criminelles au gnocide. [] Quiconque ds [1930] aidait lantismitisme se rpandre dans lopinion franaise a particip davance la livraison et au meurtre des Juifs. 10

    Imagine-t-on une seule seconde un crivain contemporain de Pguy et de la stature de Vercors envoyer au fondateur des Cahiers une telle accusation de complicit de crime contre lhumanit ? Bugat, dans de telles conditions, peut-il, sans contrevenir lhistoire des ides elle-mme, prtendre tre le continuateur des vrais Cahiers de la Quinzaine ?

    9 [ Prcisions ajoutes par la rdaction du Porche dans l'article publi : ] * aprs le meurtre de sa servante, l'attentat contre sa fille, le pillage de sa maison et la dispersion de ses manuscrits. *

    10 Cahiers de la Quinzaine, n 3, 1er fvrier 1958, p. 6 ; cote BnF : 4 JO 13350. La lettre dactylographie et signe de Vercors est date du 16 janvier 1958 ; elle est conserve la Bibliothque Jacques Doucet au fonds Vercors sous la cote Ms 46086.

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  • Document n2. Deux extraits de la lettre de Vercors publie dans le n3 des Cahiers de la Quinzaine sous le titre Amicale polmique

    Vercors, bien que ne disposant pas lpoque de nos informations, avait vu clair comme on va pouvoir en juger.

    J'ai connu M. Jean-Maurice Bugat lhiver 1988-89 alors que sous le nom de Denis Clair il dirigeait une radio sur la bande FM de la rgion parisienne : Radio-Paris. Cette appellation ne manqua pas de m'interloquer mais son directeur-fondateur m'assura qu'elle avait t cre par ses soins avec le soutien de messieurs Max-Pol Fouchet et Luc Brimont, potes issus de la Rsistance, hors de toute contestation possible11. Et il me prcisa que lui-mme avait eu maille partir pendant la Seconde Guerre Mondiale avec les Allemands qui lavaient mme dport en Allemagne pour stre lev contre les lois racistes dans un journal tudiant 12. Cest ce quil prcisait

    11 En revanche, jai su depuis qutait parfaitement contestable la caution apporte par les deux potes ce nom prcis de Radio-Paris et la radio elle-mme qui ne vit le jour quaprs la mort de Max-Pol Fouchet.

    [ Max-Pol Fouchet est dcd le 22 aot 1980. Radio-Paris fut d'abord nomme Radio Thlme puis Radio Mtropole et apparut sur les ondes en juin 1981. Quel fut le rle prcis de Bugat dans cette prhistoire de Radio-Paris ? Nous n'avons pas pu le dterminer avec prcision. Quoi qu'il en soit, Max-Pol Fouchet n'a jamais accrdit le nom sulfureux de Radio-Paris. Moi-mme, afin d'viter de provoquer l'air clbre de la Cucaracha revisit par Jean Oberl et Pierre Dac partir de 1940, je prfrais parler de Radio-Paris FM avant de raccourcir en Paris-FM, nom qui fut d'ailleurs retenu pour le logo de la radio, certainement contre l'avis de Denis Clair, par son fils Stphane Bugat. En septembre 1992, la radio n'a pas t renouvele par le CSA pour des raisons trangres au pass de son fondateur. ]

    12 Liberts, n 1, septembre 1989, p. 8 ; il s'agit, une fois encore, d'un journal dirige par Bugat.

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  • dj dans un petit essai dautobiographie paru en 196613 et o lambigut de lexpression, labsence de dates, de rfrences, le cafouillage chronologique, etc., le disputent lautopromotion Personnage a priori de haute moralit, donc, que ce M. Denis Clair alias Jean-Maurice Bugat (son vrai nom, qu'il ne cherchait d'ailleurs pas dissimuler). Jusqu'au jour o me parvint une vague information sur son ancienne appartenance un mouvement, le Francisme, pendant la guerre de 39-45, mouvement revendiquant ouvertement sa filiation fasciste14 et dirig par Marcel Bucard qui fut fusill en 1946.

    Trs proche lpoque de Denis Clair, je crus dabord une mchante rumeur ne dune confusion entre les noms de Bugat et Bucard ; on me prcisa, sans plus, que ce renseignement n'tait pas infond. Une assez

    13 Denis Clair, La Colre et la Grce (1966) devenu la premire partie de Tmoin de lAube, d. Temps nouveaux, 1977, pp. 16-17 : Il est vrai que javais crit dans un journal de jeunes un article prenant la dfense des Juifs . On nen saura jamais plus sur ce journal de jeunes ou journal tudiant

    [ Prcisons que les ditions des Temps nouveaux sont videmment une cration de Denis Clair (qui vite ainsi de parler d'auto-dition ou dition compte d'auteur) et une reprise inverse des Nouveaux Temps, expression trs en vogue de la Rvolution nationale de la priode 1940-44. Cette remmoration plus ou moins discrte des grands titres de la Collaboration est une constante chez Denis Clair ; tel point qu'on peut s'interroger sur une volont peine masque de commmoration ; difficile en tout cas de ne pas y voir un clin dil. Le serment de fidlit aux ides marchalistes n'est pas aussi clairement avou que chez son coreligionnaire Arfel-Madiran mais on comprend qu'il n'y a aucun reniement sinon du fond, du moins de la forme. Radio-Paris (1981), Temps nouveaux (1960) et Nouveaux Temps, L'Appel (1968) : de Philippe Henriot (modle paternel et clbre ditorialiste de Radio-Paris) Pierre Costantini (du P.P.F., qui dirigeait L'Appel et fut l'un des co-fondateurs de la L.V.F.) en passant par Jean Luchaire (fondateur des Nouveaux Temps, le trs influent journal idologique de la Collaboration), Bugat indique quelques-unes des tapes de son itinraire de jeunesse. En s'appuyant sur ces rfrences bien connues de l'poque (d'autant que Henriot et Luchaire connurent une fin brutale qui marqua les esprits), il sait pertinemment qu'il sera compris par ses compagnons des annes sombres, ceux-l mme auxquels il faisait promettre de rester fidles sa doctrine avant de quitter Bordeaux pour l'Allemagne le 18 mars 1943 la gare Saint-Jean (cf. document n18). Il connat lui-mme tous ces titres mieux que personne pour les avoir abondamment cits et comments dans les nombreuses rubriques intitules La presse et les Jeunes qu'il signait nommment dans les colonnes de llan, Jeune Aquitaine, etc. Un historien cit infra dressait un portrait historique du Bugat de ces annes-l : On ne peut le rduire au seul marchalisme. Son fascisme s'exprime dans ses rfrences livresques et politiques en 1940-1941 mais surtout dans son adhsion mouvemente au Francisme de Bucard en 1941. Son jeune ge, ses parents et le S.T.O. ont limit un engagement qui aurait pu aller encore plus loin (la Milice peut-tre). travers son cas, on dcouvre un courant mconnu de la nbuleuse fascistode ptainiste (bien analys selon moi par Pierre Milza dans Fascisme franais, pass et prsent [Flammarion, 1987]), dont l'antismitisme et l'antirpublicanisme constiturent l'pine dorsale. (Lettre de M. B. Frank Panijel du 22 septembre 1992). ]

    14 Notre Francisme est la France ce que le Fascisme est lItalie. dclare le chef Bucard le 20 aot 1933 dans La Victoire.

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  • longue et laborieuse enqute mene pendant lt 1992 (en un temps o

    Document n3. Rapport n8539 du 16 octobre 1941.

    Internet balbutiait peine) dans les archives de la Bibliothque Nationale Paris, dans son annexe de Versailles et la bibliothque juridique de

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  • Panthon-Sorbonne ainsi que quelques correspondances ou rencontres avec des historiens spcialistes de cette priode et de la rgion bordelaise, dont Jean-Maurice Bugat est originaire, me permirent de vrifier le premier fait le 30 juin 1992 et de mettre au jour des informations jusque-l fort peu connues, voire indites15.

    Document n4. Un extrait de la page 39 de Tmoin de l'Aube (1977) dans sa version non rectifie.

    [ Jusque-l, voici comment se prsentait Denis Clair ; c'est du reste toujours

    15 Que M. Frank Panijel soit ici remerci pour les longues semaines quil a consacres avec moi partir du 20 juillet 1992 ces recherches souvent fastidieuses et pour son clairage de larrire-plan historico-idologique de cette priode de la Collaboration quil connat trs prcisment, comme en a tmoign le professeur Michel Bergs (cf. infra) dans son Vichy contre Mounier. Les non-conformistes face aux annes 40 (Economica, Classiques des sciences sociales , 1997, p. 11) : Frank Panijel [m] a apport des critiques et des complments informationnels dcisifs.

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  • ainsi qu'il se prsente lui-mme la troisime personne, par modestie. On mesurera mieux l'cart qui spare la biographie relle de la fable en donnant un extrait de cette dernire telle qu'elle apparaissait encore le 11 juillet 2011 sur internet.

    Document n5. Copie d'cran du blog http://soleils.hautetfort.com/

    La rfrence Jean Cocteau16, mentionn en dbut de prsentation est, elle aussi, sujette caution ; de mme cette Fdration Nationale des Cin-Clubs, tout comme l'est le Cercle franais de la presse17 parfaitement inconnu

    16 [ Une lettre date du 11 dcembre 1950 crite par des cinastes de renom (dont Ren Clair) Jean-Maurice Bugat qui les sollicitait en se prvalant de Cocteau s'tonne que ce dernier n'ait jamais entendu parler lui-mme de Jean-Maurice Bugat Ce procd d' escroquerie boule de neige est de ceux qu'affectionnera toute sa vie Denis Clair / Bugat. ]

    17 [ Il y eut bien un Cercle franais de la presse trangre, en 1919 Celui que prsida Denis Clair s'illustra de faon quelque peu notable deux reprises seulement : lors d'une campagne polmique contre Radio France et France Inter, campagne personnelle mene par Denis Clair dont le dossier des archives de Mme Jacqueline Baudrier a gard trace au Centre des Archives contemporaines de Fontainebleau dans la priode 1974-1978. Le 10 avril 1979, Le Monde relve une vive raction du Cercle franais de la presse [et de son] prsident, M. Denis Clair propos d'une interview de M. Hoveyda par Christine Ockrent le 29 mars 1979

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  • malgr un nom qui sonne vrai et fleure bon les salons prestigieux. Il s'agit l de simples noms bien trouvs qui n'ont d'autre existence que de papier, parfois assortis d'interminables listes de clbrits auxquelles on a seulement demand (et sans doute pas toujours) si elles acceptaient de se voir attribuer, en compagnie d'autres clbrits de mme acabit, des titres ronflants de Prsidents d'Honneur, de membres de Comit Directeur, etc. Qui refuserait de siger (sur le papier) aux cts de Pierre Boulez, Jean Bernard, Edgar Morin, Franois Jacob, Michel Bouquet, Yves Coppens, Michel Piccoli, Jacques Le Goff, Albert Jacquard, Hubert Reeves, Georges Moustaki, Alain Touraine, Edmonde Charles-Roux, Paul Milliez, Lo Hamon, le Grand Rabbin de Paris, Mgr l'archevque, le recteur de la Mosque de Paris et, accessoirement, M. Denis Clair ? Il convient seulement de veiller remplacer ceux que l'ge a sortis par des entrants au moins aussi illustres l'aide du dernier Who's who ou d'un site mis jour Sont mis contribution le Collge de France, l'Acadmie des Sciences, le Conseil Constitutionnel, l'Acadmie Goncourt, le Snat, les Prix Nobel, les services consulaires, etc. Qui refuserait d'accorder sa confiance, son estime et son respect un homme qui fut l'ami presque intime (le frre parfois) de Jean Rostand, d'Albert Camus, de Bernanos, Bazin, l'Abb Pierre, Cocteau, Andr Breton, Simenon, Boris Vian, Marlne Dietrich, Aim Csaire, Max-Pol Fouchet, Lopold Sdar Senghor, Thodore Monod, etc. ? On a beau faire la fine bouche, il faut reconnatre que le plateau est tentant On notera aussi avec intrt et motion qu'au seuil de leur mort, nombre de ces clbrits ont fait appel l'humble Jean-Maurice Bugat alias Denis Clair pour lui livrer leurs dernires penses sur la marche du monde sous formes d'articles. Il les fera paratre vingt trente fois dans tous ses journaux mais ils garderont cette vertu d'tre chaque fois indits et, le plus souvent, assez logieux l'gard de leur destinataire venu recueillir leur dernier souffle. Ces tmoignages spontans d'illustres amis aident M. Denis Clair diffuser autour de lui une lumire bienveillante sur ceux qui l'approchent et, accessoirement, vendre pour une somme modique, voire un carnet de timbres (cela revient cher d'crire tous ces illustres), des publications alatoires la pagination incertaine. Elles dbordent bien entendu d'indits qui font toute leur saveur mme s'ils n'ont

    (diffuse sur FR3 le 6 avril). Le 12 avril, Mme Ockrent, accuse d'avoir t complice de ceux qui ont excut le 7 avril l'ancien premier ministre iranien, portera plainte en diffamation contre Denis Clair. Pas dupe, l'avocat de Mme Ockrent, Me Georges Kiejman, dira que Denis Clair ne reprsente que lui (Le Monde, 15 juin 1979). L'absence totale des noms d'Ockrent ou d'Hoveyda des mmoires de Denis Clair laisse prsager une funeste conclusion pour l'intress. Deux affaires en 10 ans, cela semble un peu lger. ]

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  • aucun rapport avec l'poque. En dehors, donc, de mettre un peu de beurre dans ses pinards, cela permet aussi M. Denis Clair de faire d'agrables petites tournes en province o il voque, entre autre, ses douloureux souvenirs de rsistant contre l'occupant devant des salles merveilles qui l'coutent entre deux ths dansants

    Dport en Allemagne , n'a et n'a eu aucune activit politique La ralit est assez diffrente comme vont le montrer les informations toutes soigneusement sources prsentes ici. ]

    Voici ces informations, pour l'essentiel encore peu connues de l'historiographie, prsentes avec leurs rfrences bibliographiques donnes en notes.

    Jean-Maurice Bugat appartint en effet au mouvement franciste pendant l'anne 194218 et il en fut radi pour cause d' ambition dmesure 19. Peu auparavant, il avait appartenu au Foyer du Marchal Ptain (dissous en avril 1942) et au Foyer de France20, adhrent n17, (dissous en janvier 1943) tous deux partis marchalistes, sis Bordeaux. Bugat est aussi commissaire national du Mouvement Provinces de Charles Bourgeois21.

    18 Cf. le journal Le Franciste, dition parisienne du 24 dcembre 1942, p. 6, 7e colonne, trois dernires lignes. Cote BnF : Gr. Fol. LC 6813, microfilm D.190.

    19 Communication du commissaire central de Bordeaux au commissaire divisionnaire chef du Service rgional de la Scurit publique, en date du 15 dcembre 1942, transmise au cabinet de l'Intendant rgional, au Prfet rgional et au Prfet dlgu : Bugat, aprs avoir appartenu plusieurs partis de notre ville [] avait en dernier lieu adhr au Francisme. Il sy serait signal par une ambition dmesure et aurait plusieurs reprises tent de crer un mouvement ou plutt une Fdration de jeunes dissidents, dont il serait ou souhaitait dtre le chef. [] Devant cette attitude, les responsables du mouvement Franciste ont prononc doffice sa radiation. Celle-ci doit faire lobjet dune enqute pour ratification et doit tre soumise au chef Marcel Bucard, par les soins de Luques, inspecteur national, qui est reparti hier soir, 14 courant, 17 h 40, destination de Nice. (Lettre rfrence 4450, enregistre sous le n 32/29 lIntendance rgionale de la Police nationale ; une copie s'en trouve ci-aprs).

    20 Ibidem. Ces notes indites nous ont t remises en septembre 1992, M. Frank Panijel et moi, sous forme de photocopies de documents des Renseignements gnraux retrouvs en 1981 par lhistorien Michel Bergs, qui fut lorigine de la dcouverte de trente sacs postaux la prfecture de police de Bordeaux, [ contenant des milliers de comptes-rendus mthodiques sur le rle des prfets, des maires, etc. dans les rafles.] La mise jour de ces documents et leur inventaire permirent entre autre la tenue du procs Papon en 1997.

    21 Cf. Michel Bergs, Le provincialisme ptainiste , Amiras-Repres, Aix-en-Provence, n 3, sept. 1982, pp. 27-51.

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  • Document n6. 15 dcembre 1942.

    Ds 1941, Jean-Maurice Bugat, dcidment actif sur tous les fronts, avait fait paratre aux ditions Junior de l'Office de la Bonne Chanson,

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  • Bordeaux, un hymne : Ptain (paroles et musiques de J.-M. Bugat). Un historien soulignera qu' Bordeaux, en ces annes-l, on ne chantait pas seulement le clbre Marchal nous voil mais aussi l'uvre de Bugat22.

    Document n7. Ptain, Copyright MCMXXXXI by Jean-Maurice BUGAT.Editions Junior de l' OFFICE DE LA BONNE CHANSON

    BORDEAUX, 33 Cours de l'Argonne.

    Mais, dans lenthousiaste effervescence de ses vingt ans, Bugat lance encore et dirige, partir de 1941, un journal publication pisodique (hebdomadaire, bimensuel, etc.), L'lan, qui se transformera en L'lan-Jeune Aquitaine puis en Jeune Aquitaine23. Ce journal, trs rarement recens, est signal comme couvrant les annes 1941 1943 dans une compilation

    22 Pierre Bcamps, Bordeaux sous l'Occupation, Ouest-France, 1983, p. 43. Cet historien, mort en 2004, m'avait fourni en 1992 une photocopie, paroles et musique, de ce petit format introuvable. Cf. Document n7.

    23 Cote BnF : Gr. Fol. JO 2897.

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  • amricaine de 199924. Il se pourrait mme qu'il soit sorti jusqu'au mois de janvier 1944 o un n 36 est signal mais les numros au-del de lanne 1943 demeurent introuvables. Dominique Lormier, dans un ouvrage dont l'orthographe hasardeuse des patronymes ne facilite gure les recherches, Bordeaux brle-t-il ? crit :

    La lgion d'Aquitaine-Jeunesse de France, qui soutient la politique du marchal Ptain, est cre Bordeaux ds novembre 1940, l'initiative de Jean-Maurice Burgat [sic]. Il est assist du docteur Jacques Cougoul et de Jean Arpel [sic], un journaliste de la Libert du Sud-Ouest. 25

    Il faut bien entendu remplacer Burgat par Bugat et Arpel par Arfel ; manifestement ces erreurs ont t recopies dun livre de Ren Terrisse26.

    Document n8. La une du n5 de Llan du 13 dcembre 1941.

    24 Donna Evleth, The authorized press in Vichy and German-occupied France, 1940-1944 : a bibliography, Greenwood Publishing Group, 1999, p.51.

    25 Bordeaux brle-t-il ? La Libration de la Gironde, 1940-1945, Mmoires de France, Les Dossiers d'Aquitaine , 1998, p. 50.

    26 La Milice Bordeaux, Aubron, 1997, p. 45.

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  • Quelques jours auparavant, Ptain appelait officiellement la collaboration (discours radiodiffus du 30 octobre 1940) aprs lentrevue de Montoire avec Hitler (24 octobre). Cette Lgion d'Aquitaine27, un homme qui l'a connue de l'intrieur pour y avoir adhr afin de couvrir ses activits pro-France Libre, Jean Gavard, en dira quelques mots :

    Assez rapidement, le groupe d'une dizaine de lycens dont je fais partie est affili un mouvement ptainiste qui comprend une branche jeunes : La Lgion d'Aquitaine. Cette adhsion une organisation collaborationniste doit servir de couverture l'activit de notre groupe. notre grand dam, la pice principale de l'appartement est pourvue d'une affiche clbrant Le Marchal. Nous sommes aussi amens assister des manifestations de la Lgion d'Aquitaine, et distribuer des tracts qui vantent la collaboration. 28

    Document n9. La une du n 1 du bi-mensuel Jeune Aquitaine du 1er aot 1941. Cote BnF : Gr. Fol. JO 2897.

    Cette Lgion d'Aquitaine-Jeunesse de France fusionnera bientt avec le groupe Les Amis du Marchal, fond aussi par J.-M. Bugat dcidment hyperactif en cette priode, groupe auquel appartint, selon le Comit dpartemental de Libration de la Gironde, Pierre Garat, chef du service des questions juives la prfecture de la Gironde jusqu'en aot 1943, lourdement impliqu dans la Rafle du Vl dHiv.

    27 Un an peine aprs sa cration, un rapport du commissaire spcial Pierre Johannel au commissaire divisionnaire indique que la Lgion dAquitaine-Jeunesse de France compte environ 1000 adhrents rpartis dans les sections de Biarritz, St-Jean-Pied-de-Port, Cadillac, Libourne, Poitiers, Bordeaux et Mont-de-Marsan et ajoute que dautres sections sont en voie de formation Langon et Blaye . (Direction gnrale de la Sret nationale, commissariat spcial de Bordeaux, rapport du 16 octobre 1941, n 8539, avec en marge ces mots : Rpondu M. de Brinon . Cf. document n3).

    28 Une jeunesse confisque : 1940-1945, L'Harmattan, Mmoires du XXe sicle , 2007, p. 25.

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  • Document n10. Rclame parue dans le n1 de Jeune Aquitaine du 1er aot 1941.

    Document n11. Petit format de France, chanson de 1941.

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  • On trouve parmi les journalistes et collaborateurs de L'lan-Jeune Aquitaine certains personnages quon a dj croiss ou qui poursuivront une longue carrire. Le seul survivant, peut-tre, de cette poque est Jean Arfel (n en 1920, alias Jean Madiran), qui sera dcor de la Francisque, deviendra en 1943 le secrtaire de Charles Maurras, et qui dirige encore aujourd'hui le quotidien d'extrme-droite Prsent. Jacques Cougoul (1915-2002), neveu par alliance de l'abb Bergey, sera la fin de 1945 le mdecin du marchal Ptain incarcr au Fort du Portalet ; puis il se fera peu prs oublier dans une carrire de distingu numismate. Jacques Bentgeat (1921-2007) sera le chef de la fusion des Amis du Marchal et de la Lgion d'Aquitaine Jeunesse de France aprs avoir prsid ds 1939 un groupement de la jeunesse universitaire bordelaise attache la Contre-rvolution ; il sera dcor de la Francisque et il tait le pre du futur gnral Henri Bentgeat, chef d'tat-major des armes franaises de 2002 2006.

    Document n12. Annonce parue dans le n 1 de Jeune Aquitaine du 1er aot 1941, p.1.

    Ren Eyquem (1915-2008), sur lequel on a peu de renseignements, avait

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  • une sur, Marie-Thrse (1913-1978) qui laissera un nom pour avoir dirig les sports fminins en France ds aot 1940 dans le gouvernement de Vichy ; elle poursuivra aprs la guerre une carrire parfaitement honorable. Jos Germain (1884-1964), dont les confrences de lpoque taient salues dans LAssaut, organe de la Rvolution nationale et sociale de Jacques Doriot, crivait aussi dans La Gerbe ; il crira notamment sous son nom des monographies de Ptain et de Laval puis une grande quantit dautres ouvrages sous le pseudonyme de Jean-Germain Drouilly ; il sera dcor de la Francisque et incarcr la prison de Fresnes ds la Libration et jusquen 1947 pour son rle important dans les milieux de la Collaboration. Andr Mah (1908-1982), dorigine anarcho-communiste, tait entr au P.P.F. de Doriot puis au M.S.R. de Deloncle (cest cette poque quil crit dans le journal de Bugat) ; deux ans plus tard, il deviendra, lautomne 1943, prsident du comit directeur de la L.V.F. ; la mme anne, il publiera avec Georges Souls (Raymond Abellio) La Fin du nihilisme (d. Sorlot), important ouvrage doctrinal, sans doute louvrage le plus raciste de lpoque [] 50% breton, 50% alsacien, 100% raciste selon Jean Mabire qui sy connat en ces matires. Tels furent quelques-uns des premiers journalistes29 qui mirent leur plume au service du jeune Jean-Maurice Bugat qui les dirigeait30.

    29 On pourrait encore y ajouter Raymond Asso (1901-1968), le clbre auteur de chansons qui introduira le terme zazou dans un article dat du 18 dcembre 1941 du trs collaborationniste journal La Gerbe et rappellera lordre Charles Trenet (29 janvier 1942) suspect un moment davoir chang lordre des lettres de son nom et dtre juif : Netter On y trouvait aussi le nom dAndr Bettencourt (1919-2007) qui signait l, dans Llan du 13 dcembre 1941 lun de ses premiers articles. Je prsentai les documents le 17 fvrier 1995 Edwy Plenel du journal Le Monde qui rvla du mme coup pour la premire fois dans les colonnes de son journal, le 9 mars 1995 (n 15 588), ces premiers crits (les seuls articles collaborationnistes connus dAndr Bettencourt tant jusqualors ceux quil avait crits dans La Terre franaise) et le nom mme de Llan-Jeune Aquitaine.

    30 J'ai pu entrer en relation avec quelques-uns dentre eux par tlphone : le docteur Jacques Bentgeat et le docteur Jacques Cougoul, la mi-fvrier 1995 ; tous deux plaidrent dans un premier temps une confusion homonymique ; quand ils comprirent que ctait le seul Jean-Maurice Bugat qui mintressait, la mmoire leur revint et ils insistrent sur le fait quen dpit de son jeune ge, ctait bien lui le plus acharn en matire doctrinale. Ce genre de tmoignage reste bien videmment trs sujet caution partir du moment o il permet des complices de lpoque de se dfausser sur un seul. Jai vu Jean Madiran le 2 dcembre 1992 qui na fait aucune difficult pour voquer cette poque dont il na rien reni ; le nom de Jean-Maurice Bugat lui tait rest familier malgr les annes mais jappris plus tard de la bouche mme de Bugat quils avaient dn ensemble ces dernires annes avec Jean Ferr et Serge de Beketch, journalistes de presse crite et radiophonique tous deux situs trs droite sur lchiquier politique et rcemment dcds. Jean Madiran me prcisa mme que jobtiendrais sans doute plus de dtails sur Llan en me renseignant auprs de lhistorien Henri Amouroux qui, selon lui, en avait t lun des rdacteurs. Javoue navoir jamais vu le nom dAmouroux dans ce journal (dont beaucoup de numros, il est vrai, sont introuvables). Amouroux a crit dans la Petite

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  • Quelques textes de ce journal ultra-marchaliste, signs de Bugat lui-mme ou des membres de son quipe (lorthographe et la typographie dorigine majuscules et minuscules ont t conserves) donnent le ton :

    Les francs-maons sectaires ne sont pas les plus dangereux ; ce sont simplement les plus agaants, ceux qui lon ira flanquer avec plaisir une paire de gifles lorsquon ne dpendra plus deux peut-tre mme avant ; ceux-l, ils sont reprs ; il est donc facile de les neutraliser. Les plus mauvais, ce sont les mdiocres, les tides, les imbciles ; oh, tu les connais bien ! Ils nosent jamais rien ; ils sont libraux et se croient obligs de sourire paternellement aux juifs et aux communistes. (Jean Le Diable).31

    Ces bonshommes barbichus, bedonnants, combinards et enjuivaills qui nous gouvernaient, taient la reprsentation concrte de lidal des masses. (Andr Mah).32

    Document n13. Rclame parue dans le n6 de Llan du 20 dcembre 1941, p.3.

    Ces vieux trafiquants de la politicaillerie judo-dmocratique ont russi mettre dans leur jeu, par un plaidoyer habile mais truqu, dhonntes et de bons Franais, de sincres nationalistes : cest pour

    Gironde, journal vichyste, et la chose lui a t amrement reproche lors du procs de Maurice Papon. Interrog, Jean-Maurice Bugat ma dit ne pas se souvenir de son ventuelle collaboration Llan. Madiran a-t-il voulu mouiller un historien soucieux de masquer son ancienne appartenance ptainiste ? Peut-tre.

    31 Petit discours universitaire , Jeune Aquitaine, n 2, 15 aot 1941, pp. 1-2. 32 Travail en profondeur , Jeune Aquitaine, n 3, 1re quinzaine de septembre 1941, p. 1.

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  • les dtromper et leur faire voir la vrit que nous crivons. [] Quant notre apparence parfois combative [], elle sexplique par lacharnement que mettent les politiciens francs-maons et philosmites brimer les rvolutionnaires nationaux. (Jean Arfel).33

    Avalanche, triste avalanche, o se mlent la haute solitude de L.-P. Fargue (quil y reste !), les fausses rvlations dAnsaldi et dAudiberti, et jusqu une rapparition de ce Franois Mauriac et de Valry, joies et dlices des petits snobs isralites et des professeurs francs-maons (Jean Arfel).34

    Document n14. Pourquoi collaborer , les Temps nouveaux , extrait de la page 2 du n4 de Llan du 6 dcembre 1941.

    Nous sommes pour la France nouvelle quinstaure chaque jour le Marchal Ptain, une France autoritaire et forte, base sur le travail, la famille, la patrie, une France hirarchise et corporative dpouille de ses vieux cadres poussireux. Nous sommes pour la Rvolution Nationale, qui exige une refonte complte de nos conceptions politiques et sociales. Les mots dmocratie, dictature, rpublique, suffrage universel, proltariat organis, libert, galit ont fait leur temps. [] Nous sommes pour une race forte et purifie. Nous sommes pour un isolement de lemprise juive et franc-maonne, non parce quil est de bon ton de parler en termes aigris des juifs et des francs-maons, mais parce quils ont fait trop de mal notre pays. Et nous le prouverons calmement. (Jean-Maurice Bugat).35

    33 Tribune libre : Unit daction , Llan, n 5, 13 dcembre 1941. 34 La situation littraire , Llan, n 4, 6 dcembre 1941, p. 2. 35 Position , Llan, n 6, 20 dcembre 1941, p. 1. Cf. document n15.

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  • Document n 15. Llan, n 6, 20 dcembre 1941, p. 1. Cote BnF : Gr. Fol. JO 2897.

    Je tiens soumettre mes lecteurs ces lignes que Cline vient de faire insrer par lhebdomadaire de Pierre Costantini, LAppel : Je vous signale que Pguy na jamais rien compris rien, et quil fut la fois dreyfusard, monarchiste et cabotin. Voici bien des titres, certes, lenthousiasme de la jeune France, si niaise, si enjuive. Le jeune Franais catchumne, rageur, ratatin, bougon, dcouvreur de lune, ce Pguy, reprsente admirablement le jeune Franais selon tous les vux de la juiverie. [] Que pensez-vous de

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  • cette citation ? (Jean-Maurice Bugat).36

    Jamais nos juifs et nos francs-maons (vous croyez peut-tre quils sont tous en Angleterre ou mme en zone non occupe) nont t aussi enthousiastes pour nous indiquer le chemin suivre, pour nous vanter les mrites de la Rvolution Nationale, pour nous exalter lhonneur et au courage. Et les vieilles crotes du rgime dfunt simprovisent les porte-paroles de la jeunesse. (Jean-Maurice Bugat).37

    Document n 16. N 6 de Llan du 20 dcembre 1941.

    Si, dans une Europe ferme limprialisme anglais, nous voulons que la France reprenne sa place, o est notre devoir, sinon dans lacceptation de la politique du chef ? Malgr cela, daucuns se scandalisent des mesures extraordinaires prises par le commandement allemand et qui vont frapper les communistes, les gaullistes et les juifs. (non sign).38

    Trs peu de rclames dans Llan, mais des rclames qui restent dans le ton gnral du journal : Pourquoi collaborer, du colonel Edmond Masson (d. du Livre moderne, Paris) et Grammaire allemande, dHenri Billemont (Librairie Fret & Fils, Bordeaux). On le voit : le camp a t clairement choisi.

    36 La Presse et les jeunes , Llan, n 5, 13 dcembre 1941, p. 2. Il est piquant de voir le mme Bugat, dix-sept ans plus tard, reprendre son compte la poursuite des Cahiers de la Quinzaine de Pguy et annoncer, quelque temps aprs, la prochaine naissance dun journal intitul LAppel.

    37 La Presse et les jeunes , Llan, n 7, 10 janvier 1942, p. 2. 38 Point de vue , Llan, n 6, 20 dcembre 1941, p. 1.

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  • Document n 17. En page 4 du n 7 de Llan du 10 janvier 1942 : Arfel (Madiran-Lagor, etc.) sous la responsabilit de J.-M. Bugat.

    Aprs ces extraits darticles divers dats de 1941 1942 et quelques-uns des propos tenus par Bugat lui-mme ou ses collaborateurs dans Le Citoyen du Monde entre 1949 et 1950, faisons encore un saut de quatre ans. Nous retrouvons Bugat Brazzaville o il dirige, une fois de plus, un phmre journal : Paris-Brazzaville 39. En 1954, donc, dix ans aprs la fin de la guerre, lhomme a-t-il chang ? Parmi les signatures de ce nouveau journal, celle dun certain Jean-Louis Lagore (pseudonyme de Jean Arfel alias Jean Madiran rencontr dans Llan-Jeune Aquitaine de 1941 et que Bugat prsente ainsi : Un ami trs cher, un militant du Marchal, qui na jamais rougi de ses attitudes. Et en effet, Lagore-Arfel-Madiran ne rougit jamais :

    Si ctait recommencer, sans hsiter, [les hommes du Marchal] recommenceraient. [] Si lon attend le reniement des ptainistes dhier (qui sont ptainistes aujourdhui et le seront demain) pour les rintgrer dans la vie nationale, on attendra longtemps. 40

    39 Cote BnF : Fol. JO 8119. 40 Paris-Brazzaville, n 3, 29 aot 1954.

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  • Parmi les sujets traits : Ptain tait-il un tratre ? . Ninsistons pas sur certaines obsessions qui ont du mal passer41 Pichon assurait en 1950 que le racisme et lantismitisme ntaient pas du got de Bugat et de ses collgues. Voire. Dans une page du numro 3 de Paris-Brazzaville on ne relve pas moins de sept fois le nom de Mends-France ainsi libell : Pierre-Isaac Mends-France . Au numro suivant, un lecteur sinquite et croit dceler un je-ne-sais-quoi de problmatique. Bugat lui rpond quil sest content de redonner ses vritables prnoms monsieur Mends dit France . On ne saurait tre plus clair. Et Bugat denfoncer le clou :

    Et quelques-uns de crier lantismitisme Cest mal nous connatre. Et cest ignorer que ce journal a quelques bons amis juifs. Mais lagressivit de certains isralites, leurs manuvres sournoises, leur politique ne refusant aucune lchet, aucune compromission, nous semblent aussi dtestables que la haine [] laquelle certains chrtiens vouent les fils dIsral. 42

    Cette allusion lancien antismitisme chrtien nest pas totalement gratuite : dans un autre numro du mme Paris-Brazzaville, Bugat consacre tout un article Mgr Marcel Lefebvre auquel le pape Pie XII a confi la mission dafricaniser lglise en Afrique. On sait lamour que porte Jean Madiran, encore lui ! cet vque qui bientt refusera Vatican II pas seulement par passion de la messe en latin mais parce que ce concile entend, aprs les horreurs antismites de la Seconde Guerre Mondiale, lever laccusation qui pse depuis prs de vingt sicles sur le peuple juif qualifi de dicide Autres rdacteurs de Paris-Brazzaville : Hubert Le Hideux (1909-1984, frre de Franois, lancien ministre de Vichy) et Alexandre Marc (1904-2000, pseudonyme dAlexandre Lipianski) qui publiera le 15 novembre 1933 dans LOrdre nouveau43 dont il est le principal animateur une Lettre ouverte Adolf Hitler On le retrouvera quatre ans plus tard apportant sa caution Bugat dans le courrier des lecteurs des Cahiers de la Quinzaine.

    1940, 1950, 1954, 1958, 1967 : les changements restent discrets. Je dois la vrit de dire que le Jean-Maurice Bugat / Denis Clair que jai connu entre 1988 et 1992 avait tout de mme volu dans un sens nettement plus

    41 ric Conan, alors journaliste LExpress, auquel javais avec M. Frank Panijel prsent [ le 2 octobre 1992 ] nos travaux, devait, avec Henry Rousso, crire le dsormais indispensable Vichy, un pass qui ne passe pas (Fayard, 1994).

    42 Paris-Brazzaville, n 4. 43 N 5, pp. 3-32.

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  • favorable mme si, sans doute, subsistaient de-ci de-l certains rflexes. Et notamment cette volont inflexible non seulement de ne pas reconnatre stre fourvoy, mais de jouer aujourdhui au dport et au rsistant ! Il y a quelques annes encore, lors dune confrence donne dans le sud de la France, il tait prsent comme ancien journaliste et rsistant (Saint-Raphal, octobre 2007). En 2003, un site consacr la griatrie stonnera du ton dun de ses articles mais sera rassur en apprenant (de lui-mme videmment) quil est un ancien dport et quil a t, en outre, un ami d'Albert Camus [ Le 29 juillet 2013, au dtour d'une petite prsentation bio-hagiographique sur internet, il glisse : J'tais frapp par les confidences de certains camarades de dportation 44. ]

    Il appartient dsormais aux vritables pguistes de dcider en connaissance de cause si ces nouveaux Cahiers de la Quinzaine de 1958 de Jean-Maurice Bugat sont les dignes hritiers du titre de Pguy, lequel, certes, avait du got pour la polmique mais, me semble-t-il, dun tout autre style.

    Je livre tous ces dtails au nom de l'historicit des faits en matire littraire, sujet qui me tient particulirement cur. Jcrirai un jour litinraire peu prs complet du personnage et la nature de ses relations avec des gens comme Camus, Breton, Chaban-Delmas, etc., relations qui me paraissent davantage relever de lescroquerie ou de labus de confiance que de la ralit.

    ric CHAMS, mars 2010

    44 http://notrefraternite.canalblog.com/archives/2013/07/29/27745202.html.

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  • ADDENDUM

    On m'a signal la rdition (chez l'Harmattan, en mai 2010) de l'espce d'autobiographie de Jean-Maurice Bugat qui avait paru une premire fois en 1966 (pour sa premire partie) sous le titre La Colre et la Grce ; une seconde partie, Tmoin de l'Aube, y fut adjointe en 1977 qui donna son titre l'ouvrage ainsi complt.

    En 1977 (Jean-Maurice Bugat) - Denis Clair prcisait n'avoir trouv rien y corriger . Je ne puis me porter garant de cette absence de modification, n'ayant jamais eu sous les yeux la premire mouture publie en 1966. En revanche, un examen rapide et compar de la version 1977 et de la rdition 2010 montre des rectifications qui ne sont pas de simple typographie ou de pure forme.

    Ainsi le nom de Maurice Papon (dont il se prvalait en se disant l'ami , cit p. 39 dans l'dition de 1977 ; cf. document n4) a t prudemment retranch dans la version de 2010. La condamnation de l'ancien prfet de police de Bordeaux le 2 avril 1998 pour complicit de crimes contre l'humanit a-t-elle voir avec cette brusque discrtion ? Plus un mot non plus sur sa prtendue dfense des Juifs dans un journal de jeunes ; en revanche, on lit cette phrase hallucinante dans la version 2010 : Si la Shoah avait t connue alors, mes parents, s'ils en avaient eu l'occasion et la possibilit, auraient t les premiers faire chapper des juifs de la chambre gaz. Il oublie de prciser ces deux autres conditions : s'ils avaient t un peu moins amis de Philippe Henriot, et si leur propre fils n'avait pas appel lui-mme publiquement un isolement de l'emprise juive Dans un registre plus lger, ce titre-l, si la fuse Saturne V avait t alors connue, ses parents, s'ils en avaient eu l'occasion et la possibilit, auraient prcd Armstrong sur la Lune ! Tout le reste est de la mme eau Et Bugat-Clair, la veille de ses 90 ans, continue de se dire dport alors qu'il est parti au S.T.O. Au micro de certaines radios il raconte son exprience de rsistant , ajoutant au passage que les nazis ont tent de le liquider pour sabotage d'une usine d'armements45

    45 Il s'agit l d'une des plus rcentes inventions de Bugat-Clair. Il n'en avait jamais parl jusqu'au seuil des annes 2000 semble-t-il. Voyant que personne n'infirme ce nouvel acte d'hrosme (qu'il note avec la simplicit qui sied aux vrais hros), il le rpand un peu partout prsent, notamment ici, en date du 29 juillet 2013 :

    http://notrefraternite.canalblog.com/archives/2013/07/29/27745202.html. Et des dtails de plus en plus prcis lui reviennent en mmoire au fur et mesure que

    disparaissent les ventuels tmoins et contradicteurs : L'horreur est arrive plus tard avec l'infme Milice et son Chef Joseph DARNAND pro-nazi. J'tais alors mineur de fond en Allemagne, ayant cr quelques soucis aux occupants. L-bas avec un camarade lectricien, nous sommes parvenus rompre un filin alimentant l'lectricit d'une usine d'armement voisine. Les S.S. ne l'ont pas apprci et j'ai d me traner ensuite durant plusieurs annes

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  • tonnamment enfin, pas la moindre allusion aux rvlations faites sur son pass par M. Frank Panijel et moi-mme en 1992, poque laquelle nous recevions quasi quotidiennement des menaces comminatoires (jamais suivies d'effets) de lourdes poursuites devant les tribunaux.

    Document n 18. Bugat part au S.TO.

    avec deux cannes. Dans la version 1977 de Tmoin de l'Aube, il crivait (p. 19) : Un jour, voulant se dbarrasser de moi, par ordre ou de sa propre initiative, un gardien laissa sa benne tomber sur moi. La mmoire lui tant revenue plus de trois dcennies aprs sa dernire autobiographie et 70 ans aprs les faits , il crit dans la rdition de 2010 (p. 36) : Un jour, voulant se dbarrasser de moi, par ordre ou parce que j'avais multipli les sabotages plus que de raison un gardien laissa sa benne, l'ascenseur qui montait le charbon la surface, tomber sur moi. (C'est moi qui souligne). On ignorait, jusqu' ces tardives rvlations, que les nazis supprimaient les saboteurs de faon aussi alatoire en leur jetant dessus des bennes On apprciera aussi la multiplication des sabotages plus que de raison Rien n'arrte la fantaisie de notre polygraphe.

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  • Recevant M. Bugat-Clair en 1993, les choses s'tant calmes, celui-ci, auquel nous avions confi copie d'une partie du dossier de nos recherches, nous en avait bien remerci, affirmant que ces archives pourraient l'aider complter l'histoire de sa vie s'il devait un jour rditer son opuscule.

    Document n 19. Le retour de Bugat du S.T.O. est annonc ds le 25 juin. Il y aura pass peu prs trois mois.

    A contrario, je m'aperois aujourd'hui qu'il s'est appliqu gommer jusqu'aux dernires traces qui pouvaient mener s'interroger sur son pass, sinon l'lucider. Ce qui me laisse penser que, bien loin d'prouver cet endroit les moindres regrets ou remords, il souffrirait surtout que l'on en vienne douter de l'authenticit de cette vie de saint plus ou moins lac qu'il s'est construite aprs la Libration et qu'il propose modestement l'admiration de ses contemporains.

    E. C., aot 2014.

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