Brun - Saint Augustin & Pascal

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7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal http://slidepdf.com/reader/full/brun-saint-augustin-pascal 1/12 Saint Augustin, ascal et notre temps Le seulrapprochement esnomsde saintAugustint dePascal évoquePort-Royal t l'atmosphère 'une époque où domine 'ou- vrage de Jansen. aire l'histoire 'une telle période mpliquerait que l'on abordât es délicats roblèmeshéologiques e la Grâce, que l'onétudiât'influencee saint Augustin urPascalet que l'on accordât ne place mportante ux critiques e l'auteur esPensées qui, on le sait, avaitécrit u dos de sa Bible « Toutes es fausses beautés ue nous rouvonsans aintAugustinntdesdmirateurs, et en grand ombre. De nombreuxravaux ntété déjà consacrés à ces questions t il ne saurait tre uestion e les reprendre. ais le philosopheeut demander l'histoireoutautre hose que des indications ermettant e reconstituer es filiations'influences si, comme e dit Hegel, en regard e ce qui est l'essencentime de la philosophie l n'y a ni prédécesseurs i successeurs , es diffé- rents emps u'affrontent es philosophes ébouchenturunau-delà des périodes urant esquelles lsontvécu c'estencela précisément que l'éternité e la penséed'Augustin, omme ellede la pensée de Pascal, pénètre ans cesse dans notre ontemporanéité. our différentes ue soient es circonstances ui ont présidé ux événe- ments marquants e la viede cesdeux philosophes, eux-ci emeu- rentdes témoins 'un même ontinentnfoui celuioù l'homme, se penchant ur sa condition ar-delà es coordonnéesistorico- géographiquesui la limitent,e posele problème e son senset, parconséquent, elui du Sens ui-même. Il est,certes, oujours ossible de trouver uelque biais pour rapprocher es époquesque tout sépare, mais l demeuredifiant de rechercherommentten quoi la permanenceurgit anscesse dans 'historique. 'est pourquoi n peut dire ue le hasarddeleurs naissances espectives fait urgir ugustin tPascalà deux poques qui présententiendespoints ommuns. ux ive-ve iècles omme au xviie quelque chose meurt, vec tousles pénibles oubresauts quiaccompagnent es dislocations, t quelque hose 'autre 'efforce

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Saint

Augustin,

ascal

et

notre

temps

Le seulrapprochementes nomsde saintAugustint dePascal

évoque

Port-Royal

t

l'atmosphère

'une

époque

domine 'ou-

vrage

de

Jansen. aire

l'histoire 'une telle

période

mpliquerait

que

l'on

abordât

es

délicats

roblèmes

héologiques

e

la

Grâce,

que

l'on étudiât 'influence

e saint

Augustin

ur

Pascal

et

que

l'on

accordât

ne

place

mportante

ux

critiques

e l'auteur es Pensées

qui,

on le

sait,

avait

écrit

u dos de

sa

Bible

«

Toutes

es fausses

beautés uenous rouvonsans aintAugustinntdes dmirateurs,

et en

grand

ombre. De nombreux

ravaux nt

été

déjà

consacrés

à

ces

questions

t il ne saurait tre

uestion

e les

reprendre.

ais

le

philosophe

eut

demander

l'histoire out autre hose

que

des

indications

ermettant

e

reconstitueres filiations 'influences

si,

comme

e

dit

Hegel,

en

regard

e ce

qui

est

l'essence

ntime

de la

philosophie

l

n'y

a

ni

prédécesseurs

i

successeurs

,

es diffé-

rents

emps u'affrontent

es

philosophes

ébouchent

urun

au-delà

des

périodes

urant

esquelles

ls ontvécu c'estencela

précisément

que

l'éternité e

la

pensée

d'Augustin,

omme elle

de

la

pensée

de

Pascal,

pénètre

ans cesse

dans notre

ontemporanéité.

our

différentes

ue

soient

es circonstances

ui

ont

présidé

ux

événe-

ments

marquants

e

la vie

de

ces

deux

philosophes,

eux-ci

emeu-

rentdes témoins

'un même

ontinent

nfoui celui

l'homme,

se

penchant

ur

sa condition

ar-delà

es coordonnées

istorico-

géographiquesui la limitent,e posele problèmee sonsenset,

par conséquent,

elui

du Sens ui-même.

Il

est,

certes,

oujours ossible

de trouver

uelque

biais

pour

rapprocher

es

époques

que

tout

sépare,

mais

l

demeure

difiant

de rechercher

omment

t

en

quoi

la

permanence

urgit

ans

cesse

dans

'historique.

'est

pourquoi

n

peut

dire

ue

le hasardde

leurs

naissances

espectives

fait

urgir

ugustin

t Pascal

à

deux

poques

qui présententiendespoints ommuns. uxive-ve iècles omme

au xviie

quelque

chose

meurt,

vec

tous

les

pénibles

oubresauts

qui

accompagnent

es

dislocations,

t

quelque

hose

'autre 'efforce

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REVUE

PHILOSOPHIQUE

de naître.

C'est

précisément

ntre ette

brisure

t

cette

gestation

que

vient 'insérer

'inquiétude

e

ces deux

témoins

e l'homme.

L'époque

de saint

Augustin

oitmourira Pax Romana

t

agoni-

ser le monde ntique Alaric, oi des Visigoths,rendRomeet

saint

Augustin

meurt

n

430 au

coursdu

sièged'Hippone

par

le

roi

des

Vandales. a

langue

recque, ui

constituaitn

des

aspects

les

plus

mportants

e

la

culture,

a tomber ans

'oubli

petit

petit

e

constitueront

es

cultures ationales

ans

cesse

menacées

par

es

Barbares. a dislocation e

'Empire

omain,

'oublidu

grec,

les

menaces

perpétuelles

es

invasions

onsommenta

rupture

du nomos t de la polis,tout un ordre ommence e s'effriter.

Mais,

travers

e

monde

ui

meurt,

n autre e dessine

l'Eglise

catholique

ortdes limbes t un

dogmatisme

cclesial

st en train

de se

constituer.

Lorsque urgit

ascal,

e

monde

ui

est

en voie de

désagrégation

est

précisément

elui

qui

était

né du

temps

e saint

Augustin

le

monde

e

la

catholicitéomaine

disloquée

ar

a

Réforme,

'Eglise

catholique

oit elle-même

ompter

vec

ses

propres rotestantsles jansénistes. n outreun nouveaudivorce ntre e nomos t la

polis

se

précise

ce

que

l'on

appellera

lus

tard

'Ancien

Régime

voit

es bases

menacées t 'idéed'un

nomos refaire

t

d'une nter-

nation

constituerinit

ar

prendre orps.

Si

le

grec

entre n

agonie

à

l'époque

d'Augustin,

n

assiste,

au

moment

ù écrit

ascal,

à

un recul

du latindevant es

langues

nationales,

andis

ue

l'autoritarisme

cclésial ommence e

céder

la placeà un dogmatisme'untypenouveau celuide l'autori-

tarisme

u vrai

où s'illustrerontes

Torquemada

u

concept

t de

la

logique

prenant

a relève

des

Torquemada

e la

théologie.

Ainsi

aint

Augustin

t

Pascal sont u

carrefour'un monde

n

agonie

t

d'un

univers n

gésine.

Mais

ls

demeurent

es

témoins,

non

des

témoins

ous ncitant

des

regrets

yriques

u

à des

espé-

rances

aciles,

mais

des

témoins e

ceci

que

l'homme,

n tant

que

créature,merge oujoursdes nappesde charriage e l'histoire

qui

veulent e

défaire

our

e refaire.

'œuvrede

saint

Augustin

et

celle

de

Pascal

constituent,

n

effet,

n seul

et

même

ri

celui

de

l'intériorité

ue

des

changements

e

coordonnées,

i

novateurs

qu'ils

oient,

e

peuvent

amais

refaire.

e cri

aillit

e a

profondeur

lancé

dans e

monde,

l

monte ers

une

verticalité.

Il

est

maintenant

ssentiel,

our

notre

propos,

de

préciser

en

face

de

quoi

retentit

n tel

cri t

de nous

demanderuelles ontles déchirures

ui

le motivent.

On sait

qu'une

nterprétation

omantico-hégélienne

e

la

civi-

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J.

BRUN.

-

SAINT

AUGUSTIN,

PASCAL ET NOTRE

TEMPS

397

lisation

recque

'attacha faire e cettedernièrea

manifestation

essentielle e l'unité e

quatre

notions le

νομός,

a

πόλις,εθος

t

la

φύσι£.

l

est certes

possible,

t

même

probable, u'une

telle

conception uised'abordses racinesdans une vision du monde

tendant fairede la

Grèce

e

pays

exemplaire

ar

excellence

il

n'en demeure

as

moins

ue

la

convergence

u

la

divergence

e

ces

quatre

otionsont u

principe

ême

e biendes

ignes

e

forces

déterminantes

événements

ulturels,

es

situations

écues t des

efforts

e

recherchese

la

plus

haute

mportance.

Nousavons

ouligné ue,

à

l'époque

de saint

Augustin

omme

celledePascal,un divorcentree nomos t a polis tait ncours e

consommation,

orsqu'il

n va ainsion

se

complaît

t

l'on

se

réfugie

volontiers ans

une

exploration

e l'horizontalité

n inventoriant

les relations

ntre

es

deux

autres

ermes

la

phusis

t Velhos. n

s'applique

lors éclairer

es mœurs

ar

a nature

partir

e trois

attitudes

celle de

la

constatation

eutre,

elle

de

l'approbation

confianteu

cellede

l'action

militante. n

se trouve

insien

face

de

formes

lus

ou

moins arvées

du

scepticisme,

'une

part,quiinsiste ur e caractère

multiple

t

fuyant

e la nature,ffirme

u'il

n'y

a

pas

de

vérité,

ous

nvite u

relativisme

t s'achève

insidans

unedéroute

ui

veut

e

faire

rendre

our

neroute

tune

agesse,

du

stoïcisme,

'autre

part,

enseignant u'il

faut uivre

a nature

qui

est bonne

t

providentielle,

ypostasiant

a nature

our

prêcher

un salut

par

e

savoir,

du

pélagianisme,

nfin,

ui

affirme

ue

les

mœurs

doivent

éformer

a nature

qui

elle-même

éformeraos

mœurs tqui proclameue le salutnepeutvenir ue des œuvres.

Saint

Augustin

t

Pascal

se sont

précisément

rouvés

ux

prises

avec

ces

perspectives

ésiduelles,

risonnières

'une

horizontalité

elles

s'aplatissent.

Saint

Augustin

onnaît

bien

le

scepticisme,

u'il

s'agisse

de

celui

remontant

Pyrrhon

u

de celui

de la

Nouvelle

Académie

de

Carnéade.

aint

Augustin

eproche

u doute

des

Académiciens

de nepasprendreonscienceelui-mêmear 'expérienceudoute

implique

nevérité

ur

e fond

e

laquelle

llese

définit

omme

ne

absence

«

Si tu

ne

vois

pas

bience

que

je

dis

et

si tu

doutes

de

la

vérité

e

mes

paroles,

emarque

u moins

ue

tu

ne

doutes

as

de ce

doute

et,

s'il

est certain

ue

tu

es en train

e

douter,

emande-toi

d'où

vient

cette

certitude.

...]

Tout

homme

ui comprend

u'il

doute

omprend

uelque

chose

de

vrai

et il est

certain

e ce

qu'il

comprend.l estdonc ertain 'unevérité (1).Augustinousmet

(1)

De vera

religione,

XL,

74.

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REVUE

PHILOSOPHIQUE

en

garde

ontree doute

dans des

ignes ue

Ton a souvent

appro-

chées

des Méditations

e

Descartes

«

Nous n'avons

pas

à

craindre

d'être

rompés

ar

quelque

vraisemblance,

ar il est certain

ue

celuiqui esttrompé it.[...] C'estparuneconnaissancentérieure

que

nous

savons

que

nous

vivons,

t

pas

mêmeun

Académicien

ne

pourrait

ire

«

Peut-être

ue

tu dors

ans e

savoir,

t

que

c'est

«

en

songe ue

tuvois

qui

gnore,

n

effet,

ue

es

visions u

sommeil

«

sont outà

fait emblables cellesde

la

veille

»

Mais

celui

qui

est

certain

e

savoir

u'il

vit ne

dit

pas

:

Je sais

que je

veille

,

mais

«

Je

sais

que

je

vis.

»

Qu'il

dorme u

qu'il

veille,

l

vit. l ne

peutdansce savoir trevictime e songes car mêmedormir t

voir en

songe

c'est

le

propre

'un homme

ui

vit.

[...]

Que

l'on

objecte

mille

xemples

e visions

rompeuses

celui

qui

dit

«

Je

«

sais

que

e

vis

»,

l n'en

redouteraucune

uisque

même elui

ui

est

trompé

it

1).

Ainsi

qui

douterait

u'il

vit,

e

souvient,

omprend,

veut,

pense, git,

ait et

juge

car,

même 'il

doute,

l

pense

s'il

doute,

l sait

qu'il

ne sait

pas

s'il doute l

sait

qu'il

ne

faut

as qu'il

consente

la

légère (2).

Par

conséquent

e

sceptique

e

comprendpas le doute dont il est le

champion.

Une énormedifférence

d'allure emeurentre es

analyses 'Augustin

t

celles

e

Descartes.

Descartes

herche'évidence

ar

e doute t

veut

être

un héros

u

savoir

Augustin,

ui,

découvre'intérioritéù

viennent

'enraciner

la

présence

t

l'absence e Dieu.

L'expérience

u

doute

nous

mène

ainsi

à

comprendre

u'il

faut sortir

'une

série

pour

parvenir

saisir elle-ci

t sa raison

le doute

ébouche ur

a

découverte

'une

transcendancemmanente,'estpourquoia desperatioerumnve-

niendi ait

place

à la

certitude*

erum

nveniendi.

Quant

u

stoïcisme,

l

estune

orte e

scepticisme

nversé. éfinir

le

sage

commee savant

apable

de

vivre

onformément

la

nature

et assezfort

our

e suffire

lui-même

ansune

autarcie

ui

fait

a

force,

'est

penser

ue

la liberté

'a

pas

de

fondementt

que

pour-

tant

cette iberté st

fondement.

ci aussi

on

oubliede

sortir

e la

série t de poser e problème e l'origine, 'où la superbia t un

évident

ontentemente soi.

Je

veux,

ertes,

mais

e

ne

puis

vouloir

ce vouloir

je

ne

peux

vouloir

'origine

e ce

vouloir

ce

n'est

pas

à moi

que e

dois es

circonstances

e ma vie ni

moi-même

«

Quid

habes

uod

non

ccepisti

»

Dans

ma iberté

e

suis

'œuvre e

Dieu

et 'amour

ue 'ai pour

moi

n'est utre

hose

ue

de

la

perversion

«

Des bas-fonds

e

mon œur u as

dragué

a vase

de

la

corruption.

(1)

De

trinilale,

V, XII,

21.

(2)

Loc.

cit.,

X, X,

14.

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J.

BRUN.

-

SAINT

AUGUSTIN,

PASCAL

ET NOTRE

TEMPS

399

II ne mereste

lusqu'à

ne

plus

vouloir

e

que e

veuxet

qu'à

vouloir

ce

que

tu veux.

»

Enfin,

aint

Augustin

connu

a

grande

entation u

pélagia-

nisme laquelle, u fond,e stoïcismet l'autarcie,e stoïcismet

la

liberté,

e stoïcismet a maîtrise e soi conduisent

ndirectement.

On

peut

établir

ne filiationntre a notion 'autarcie

t

celle

de

libertas rbitrii

ffirmant

ue

l'homme

la

possibilité

e

pécher

ou de

ne

pas pécher, ue,

même

'il

a

envie e

pécher,

l

peut

revenir

en arrière

t ne

pas

pécher.

'il

en

était

ainsi nous n'aurions

lus

besoin

e la

Grâce

t l'homme

erait

apable

de faire on

salut

par

sonentendement,a volonté t ses actes.SaintAugustin e cessa

de lutter

ontre e

pélagianisme

pour

ui

l'homme

eut

faire e

malmais

non e bien

«

Le

bien

n

soi

estton

ouvrage,

on

présent

le

mal en

moi,

ma

faute,

a condamnation. Car

saint

Augustin

a vécu la douloureuse

t

significative

xpérience

e

connaître

a

loi et de

ne

pouvoir

'accomplir

saint

Paul

lui donna

à réfléchir

sur

cette

volonté

mpuissante

ans

des

termes

u'Augustin

e

pouvait ublier

«

Car e

ne fais

pas

le

bien

que e

veux

et

e

fais e

mal

que e

ne veux

pas.

Et si

e

fais e

que

je

ne veux

pas,

cen'est

plus

moi

qui

le

fais,

mais 'est

e

péché

ui

habite

n moi.

Je

trouve

donc n

moi ette

oi

quand

e

veux

faire

e

bien,

e mal

est attaché

à

moi.

Car

e prends

laisir

la loi de

Dieu

selon 'homme

ntérieur,

mais

e

vois

dans

mes

membres

ne

autre

oi,

qui

lutte ontre

a loi

de

mon ntendement

t

qui

me

rend

aptif

e

la

loi

du

péché

ui

est

dans

mesmembres

1 Ainsi

a volonté

esaurait

uppléer

la

Grâce

et il fautrecevoire que l'on nepeutdonnericiparconséquent,

la

psychologie

st

mpuissante

expliquer

uoique

ce

soit

«

Donne-

moi ce

que

tu

exiges

t

exige

ce

que

tu veux

»

(2).

Ce

n'est

donc

pas

à

la

Nature,

la

Loi ou

aux

Mœurs

ue

nousdevons

ous

ttacher

mais

la

Grâce

«

Ni la connaissance

e la

loi

divine,

i

la

nature,

ni

la seule

rémission

es

péchés

ne constituent

a Grâce

mais

elle

nous est

donnée

ar

Jésus-Christ

otre

eigneur

fin

ue,

par

elle, a loisoit ccomplie,a nature élivréet epéché aincu» (3).

Ce

n'est

pas

davantage

e la Cité

ue

nous

pourrons

ttendre

n

extraordinaire

ecours

«

Deux

amours

ntfait

deuxcités

l'amour

de

soi

usqu'au

mépris

e

Dieu,

a cité

errestre

l'amour

e

Dieu

jusqu'au

mépris

e

soi,

a cité

éleste.

'une,

dans

es chefs

t

à

pro-

pos

des

nations

u'elle

soumet,

st

dominée

par

la

passion

de

(1)

Epure

aux

Romains,

VII,

19-23.

(2)

Confessions,

X,

19,

40.

(3)

De Gratia

et

Libero

arbítrio,

XIV,

27.

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400 REVUE

PHILOSOPHIQUE

dominer

l'autre

voit ses chefs

décider t

ses

sujets

obéir

ou se

dévouant

es

uns

aux autres

ar

charité.

'une,

en ceux

qui

la

gou-

vernent,

imesa

propre

orce,

'autre

dit

à son Dieu

Je

t'aimerai

Seigneur,oiqui es ma force (1). Ainsidonc a Grâcen'implique

pas

quelque

autoritarisme

ncompréhensible,

lle

préserve

'homme

des

tyrannies

e l'action

ar,

en étant

erviteur e

Dieu,

'homme

devient e

serviteur

e l'autre.L'homme

eut

acquitter

u

amnis-

tier

mais

l

n'a

pas,

à

la

lettre,

e

pouvoir

e

faire

Grâce la

Grâce

nous

nvite insi devenir

n

témoin,

épositaire

'un

dépôt

acré,

et non

un

agent,

util 'une

puissance ui

ne

cherche

u'à

s'assouvir.

Onpeutdire uePascal vécutunesituationoisine e celle ueconnut aint

Augustin.

e

Nomos

t

a

Polis se

dissociaientt

Pascal

formulavec

ucidité e

que signifiait

ette

upture,

l la

provoque

même

pour

faire essortir

oute a

différence

ui

sépare

a

loi

des

hommes e la loi de Dieu.

C'est

ainsi

que

Pascal

prend

ien

soin

de

distinguer

es

grandeurs

'établissement

es

grandeurséelles,

et

il

le

faitd'une

façon

out

particulièrement

emarquable

ans es

Discours

sur

la condition

es

grands.

Une telle

distinction

e

double

d'uneautrenonmoins apitale cellequ'établitPascal entre a

condition

e

l'homme

t

son

état.

Qui

dit

conditionit

données

socio-historiques,

ui

dit

état it

situation

xistentielle

e

l'homme.

Or

tout e

drame e

l'homme

onsiste

prendre

a

condition

our

l'état,

à

oublier on

état en

s'attachant

sa

condition,

oublier

l'être

pour

ultivere

paraître.

n

confondant

es

grandeurs

éelles

et

es

grandeurs'établissement,

'état

t a

condition,

ous

prenons

la citédeshommes our a citéde Dieu,nousoublions ue le roi

n'est

qu'un

roi

de

concupiscence.

Et

nous

allons

retrouver

insi le

scepticisme,

e

stoïcisme

t

le

pélagianisme

maischez

Pascal ces trois

octrines

rennent

ne

dimension

ouvelle

due au

développement

e

la

science

t

à

la

naissance

'une

technique.

On sait

que,

dans

'Entretien

vec

M.

de

Saci,

Pascal a

insisté

surcette déeque le specticismevaiteu le tortdenevoirque la

faiblesse

e

'homme

commee

lui

avait

déjà

reproché

aint

Augus-

tin,

e

sceptique

e

prend

pas

conscience e

son

doute.

Or,

nous

disent

es

Pensées,

i

«

nous

avons

une

impuissance

e

prouver,

invincible

tout e

dogmatisme

nous

vons

une

dée

de

la

vérité,

invincible

tout

e

pyrrhonisme

(2).

Quant

u

stoïcismel

a

bien

vu la

grandeur

e

'homme

mais l

lui

manque

'avoir

u a

faiblesse

U)

La

citéde

Dieu, XIV,

28.

(2)

Pensées,

395

(éd.

Brunschvicg).

Page 7: Brun - Saint Augustin & Pascal

7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal

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J. BRUN.

-

SAINT

AUGUSTIN,

PASCAL ET NOTRE

TEMPS 401

de celui-ci

en

prêchant

'autarcie

t

'autonomie

e

'homme

riom-

phant

il ne

s'apercevait

as qu'il

n'est

pas

en notre

ouvoir

e

régler

e cœur

(1),

le stoïcisme

st demeuré

ourd

u

problème

e

la Grâce.C'estpourquoil conduit une nouvelle orme epéla-

gianisme

on

sait,

en

effet,

ombien

e

stoïcisme eu

d'influence

sur la

pensée

de

Descartes,

r

il ne seraitnullement

xagéré

de

parler

'un

pélagianisme

artésien,

'ailleurs e

son

vivant,

Des-

cartes aillit tre a victime

'unetelle ccusation. e

pélagianisme

est

contemporain

e la

naissance e

a

science

t

de

la

technique ui

se

proposent

e

«

nous

rendre

omme

maîtres t

possesseurs

e la

nature ; etle moment 'estpas loinoù l'onpensera ue l'homme,

en modifianta

nature,

e modifie

ui-même

t

que,

en se

modifiant

lui-même,

l modifie

a nature.

e fameux

il

suffit

e bien

uger

pour

ien

aire

mplique

ue

a Grâce

it été

mise ntre

arenthèses

et

suppose

u'un

salut

par

e

jugement

t

par

les œuvres

oit

pos-

sible il n'estdonc

pas

exagéré

e

dire

que

nousnous trouvons

à

en

face

d'une

sortede

pélagianisme

ntellectualo-techniciste.

r

Pascal

ne cesse

de

dénoncer

a

«

superbe

e la

raison

,

non

pointau nom de

quelque

irrationalismeuspectmais

parce

qu'il sait

fortbien

que

«

l'homme

'agit

point

par

la raison

qui

fait

son

être

(2).

Par à

Pascal

nous

fait

oucher

u

doigt

e

grand

aradoxe

humain

il

est de la

nature

e

l'homme

e

ne

pas

être

conforme

à

sa nature

'être

aisonnable

t c'est

pourquoi

la raison beau

crier lle

ne

peut

mettre

e

prix

ux

choses

(3).

Ce

prix

'est

trop

souvent

'infrarationnel,

savoir

'imagination,

ui

l'impose

la

raisonmais,même i araison 'était asvaincue ar 'imagination,

le véritable

rix

des choses

ui

échapperait

ar celui-ci

'appartient

qu'au

cœur,

'est-à-dire

la Grâce.

Ainsi

'homme

st

non seulement

itué

ntre

eux

nfinis,

ais

il

peut

tre

la

fois e

sujet

de tous

es délires

t

le

dépositaire

'un

message

e venant

as

de

ui.

L'homme

st donc

une orte

e

mons-

tre

ncompréhensible

ue

Pascal

s'ingénie

vanter

t

à

abaisser

sans cessede façon le contredireoujours.Par conséquenta

nature,

u'il

s'agisse

e

celle

es

choses

u de celle

ui

nous

onstitue,

n'est

pas

uniquement

e

dont

nous

pouvons

nous

rendre

maîtres

et

possesseurs

«

La

nature

st

telle

u'elle

marque

artout

n

Dieu

perdu,

t

dans l'homme

t

hors

de

l'homme,

t une

nature or-

rompue

(4).

(1)

Loc.

cit.,

467.

(2)

Pensées,

n° 439.

(3)

Loc.

cit.,

82.

(4)

Loc.

cit.,

n° 441.

Page 8: Brun - Saint Augustin & Pascal

7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal

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402

REVUE

PHILOSOPHIQUE

Saint

Augustin

t Pascal se sont

insi

rouvés n facedu

monde

de l'extérioritét l'expérienceu'ils ont faite d'une intériorité

frustrée

ravite

utourd'un

cri,

toujours

résent

t

toujours

u,

le cri

fondamentale l'homme

ui

appelle

«

A

moi

»

Un tel cri

implique

n

refus,

u tout au

moins

ne

dénonciation

e

l'objec-

tivité et c'est bien

l'attitude

ue

l'on rencontre

hez saint

Augustin

t

qui,

chez

Pascal,

se

précise ar

une

critique

u ratio-

nalisme

artésien

ous

montrant

ue

la

connaissance es choses

extérieurese nous consolera as dans les moments 'affliction.

Ce

refus e

l'objectivité

t de

l'extériorité,

enues,

la

lettre,

our

insignifiantes,

e

prolongear

un

approfondissement

e 'intériorité

c'est de lui

que

naît ce

qu'il

est convenu

'appeler

«

angoisse

et

que

saint

Augustin

ésigne

u nom de

«

stupor

et

Pascal de

celui

d'

«

effroi. Dans unetelle

xpérience

e

questionnant

ui-même

est

mis n

question,

st

oumis la

question

c'estbien e

que

traduit

Augustin

ui

s'écrie

«

Je

suis

devenu

our

moi-mêmene

grandequestion. Toutes es interrogationsruciales ravitentutourde

ce moi

qui

s'interroge,

on

pour

se

livrer

quelque description

caractérologique

isant

préciser

a

condition,

ais

pour

pprofon-

dir

onétat

propos

es

nterrogations

ondamentales

Quisuis-je

d'où

viens-je

suis-je

vais-je

C'est

ainsi

que

Pascal,

dans

un

passage

rès

existentialiste

met es

questions

uivantes

dans

a bouche

d'un ibertin

«

Je

ne

sais

qui

m'a mis

au

monde,

nicequec'est ue emonde, iquemoi-mêmeje suisdansune gno-

rance

errible e

toutes hoses

je

ne

saisce

que

c'est

ue

mon

orps,

que

mes

ens,

ue

mon

me

et

cette

partie

même e moi

qui

pense

ce

que

je

dis,

qui

faitréflexion

urtout

et

sur

elle-même,

t ne se

connaît

non

plus

que

le

reste.

Je vois

ces

effroyables

spaces

de

l'univers

ui

m'enferment,

t

je

me

trouve

ttaché un

coin

de

cette

aste

étendue,

ans

que je

sache

pourquoie

suis

plutôt

lacé

en ce lieuqu'enun autre,ni pourquoi e peude temps ui m'est

donné

vivre

m'est

ssigné

ce

point

lutôt

u'à

un autrede

toute

Téternité

ui

m'a

précédé

t de

toute elle

qui

me

suit.

Je

ne

vois

que

des

nfinitése

toutes

arts,

ui

m'enferment

omme n atome

et

comme

ne

ombre

ui

ne dure

qu'un

instant

ans

retour. out

ce

que e

connais st

que

e

dois

bientôt

mourir,

ais e

que 'ignore

le

plus

est

cettemort

même

ue

je

ne

saurais viter.

Gomme

e

ne

sais

d'où

e viens,

ussi

e

ne

sais

e

vais

»

(1). L'effroiontnous

(1)

Loc.

cit.,

194.

Page 9: Brun - Saint Augustin & Pascal

7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal

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J.

BRUN.

-

SAINT

AUGUSTIN,

PASCAL ET

NOTRE TEMPS

403

parle

Pascal

est

celui

que

connaît 'homme

ui,

réfléchissant

ur

son

état,

e

trouve omme

uelqu'un qu'on

aurait

porté

ndormi

dans

une

le

déserte

t

effroyable,

t

qui

s'éveillerait

ans

connaître

où il est, t sansmoyen 'ensortir (1). L'homme beau nterroger

le

monde,

'univers

este

muet t les

espaces

nfinise taisent

'un

silence

ternel.

aint

Augustin

vait

connu a même

xpérience

«

J'ai

questionné

e

ciel,

a

terre,

e

soleil

t a lune t

chacun isait

Je

ne suis

pas

ton Dieu

»

(2).

Pascal,

se

situant

ar-delà

e conflit

entre

e

géocentrisme

t

Γ

héliocentrisme

ffirme

«

Je

trouve

on

qu'on

n'approfondisse

as

l'opinion

de

Copernic

mais ceci...

Il importe toute a vie de savoir i l'âme est mortelle u immor-

telle

»

(3).

Ainsi,

face au

monde,

'homme e

peut

que

se sentir

injustifié

ar l

ne

sait

pas

«

par

'ordre t a

conduite

e

qui

ce lieu

et ce

temps

lui ont

été destinés

4).

L'effroit

le

cri

qui

le

prolonge

onduisent

un

approfondisse-

ment

de

l'intériorité

ontrant

aradoxalement

ue

celle-cinous

déborde les

coordonnées

e nos

îles laissent

aché

le

continent

perdu uquel

elles

ppartiennent

t

«

toutes hoses ont

des voiles

qui

couvrentieu»

5).

Telle taitbien

'expérience

uesaintAugus-

tin

vait

également

écrite

ans

es

Confessions

«

Je

ne

puis

conce-

voir

ntégralement

e

que

e

suis.

L'esprit

stdonc

rop

troit

our

e

contenir

ui-même

Alors

ù reflue

e

qu'il

ne

peut

ontenir

n ui?

Serait-ce

orsde

lui

et non en

lui ?

et

comment

e le contient-il

pas

?

Cette

pensée

me

confond

'étonnement

t

je

me sens saisi

d'une

tupeur

(6).

Ainsi

es coordonnées

e ituent

ansmedéfinir

et ma condition e me dit rien sur mon état. Par conséquent

l'hommest

lui-même,

la

fois,

'être

e

plusproche

t le

plus

oin-

tain

«

L'homme e sait

à

quel rang

e

mettre.

l est visiblement

égaré

ttombé

e son

vrai

ieu ans

e

pouvoir

etrouver.

l

le cherche

partout

vec

nquiétude

t sanssuccès

dansdes

ténèbres

mpénétra-

bles

7)

en ui

'amorce

e

qui

ne

'y

achève

pas

et

que

le

lien nter-

humain

e saurait

rocurer.

ous

nous

trouvons

onc

n face

d'une

« aborieuset haletanteénurie evérité 8)etnous ommes our

nous-mêmes

une

terre

e difficultés

t de sueurs

ccablantes

(9).

(1)

Loc.

cit.,

693.

(2)

Confessions,

,

6.

(3) Pensées,

218.

(4)

Loc.

cit.,

n° 205.

(5)

Lettre

Mlle de

Roannez,

ind'octobre1656.

(6) Confessions,,

8.

(7) Pensées,n° 427.

(8)

Confessions,

II,

6,

11.

(9)

Loc.

cit.,X,

16,

25.

Page 10: Brun - Saint Augustin & Pascal

7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal

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404 REVUE

PHILOSOPHIQUE

L'approfondissement

e l'intériorité

mplique

une soif

et

se

traduit

ar

un

cri,

récisément

arce

ue

celle-ci éborde anscesse

sur

ce

qu'elle

peut

rouvern

elle-même,

utrement

it,

u cœur e

l'immanenceît a découvertee la Transcendance.'est equedit

saint

Augustin

«

Tu

étais

plus

ntérieur

moi

que

monfonds e

plus

ntime,

lus

levé

ue

es

plus

hautes

arties

e moi-même

1).

C'est

aussice

que

découvre ascal

«

II faut imer

n être

ui

soit

en nous t

qui

ne

soit

pas

nous.

...]

Or

l

n'y

a

que

l'Etre

universel

qui

soit tel. Le

royaume

e

Dieu est en

nous

(Luc,

XVII,

29)

:

le

bien

universelst en

nous,

st

nous-mêmet n'est

pas

nous

(2).

Telleest a raison our aquelleAugustinous nvite la démarchesuivante « Ne

t'en va

pas

dehors,

entre

n

toi-mêmeau

cœur

de

la créature

abite a

vérité t une

fois

reconnue'instabilité

de ta

nature

dépasse-toi

ncore

oi-même

(3).

Ainsidonc aint

Augustin

t

Pascal

nous

ncitent

comprendre

que

l'intériorité

'a rien

voir

vec a

subjectivité,

ue

la véritable

dimensione

l'homme e

se

trouve

as

dans

ses

coordonnéesocio-

logiques

u

géographiques,ue

le

problème

'est

pas pour

ui de

découvrir es vérités u'il

comprenne

i de se soumettre des

vérités

ui

le

dépassent,

mais

que

la

grande

uestion

st

qu'il

ait

accès

des

vérités

ui

e

comprennent.

'est

pourquoi

aint

Augustin

nous

dit

«

Quand

tu

parviens

le

concevoir

l

n'est

pas

Dieu

»,

et

il

précise

«

Tout

peut

êtredit

de

Dieu et

rien

d'adéquat

n'est

jamais

ditde

Dieu.

»

Et

Pascal

proclame

son

tour

«

On

peut

bien

connaître

u'il

y

a

un

Dieu sans

savoir

e

qu'il

est.

»

Ainsi

'homme

plonge ansun sensqu'il décrypteans 'épuiser,ar c'est e Sens

qui

fait

'homme t

non

pas

l'homme

ui

fait

e

Sens. Dieu

se ren-

contre,

l ne

se

dévoileni

ne

se

prouve.

*

Un

regard

ritique

orté

ur

notre

poque

nous

montrerait

ue

nous

vivons

nous

aussi

dans

la

dislocation

u

Nomos, e VEthos,de la Phusis et de la Polis en outrenousavonsdénoncé e vers

quoi

Augustin

t

Pascal

faisaient

onverger

es

quatre

notions,

à

savoir

Dieu.

Différentes

ntreprises

xorcisant

es

arrière

mondes

nous

ont

conduit

liquider

'intériorité

de

plus

toutes

es

courses

visant

opérer

a

synthèse

u

frui

t

de

Vuti nt

eu

pour

orollaire

un

déferlement

'érotisme,

ne

perte

du

respect

e la

personne

(1) Loc. cit., III, 6, 11.

(2)

Pensées,

485.

(3)

De

Vera

religione,

XXIX,

72.

Page 11: Brun - Saint Augustin & Pascal

7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal

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J.

BRUN.

-

SAINT

AUGUSTIN,

PASCAL ET

NOTRE

TEMPS

405

humaine t

une

réductione l'autre une

machine,

un

partenaire

ou à

un élément e

combinaisons.

ujourd'hui,

'interiort

le

supe-

rior

ont enus

pour

de

pseudo-notions

t

on ne

nous concède

lus

queceschamps istoriques,ociologiques,ulsionnels,inguistiques,

épistémologiques

ue

privilégient

es

différentstructuralismest

les

chantres u

«

ça

»

pour

nnoncer inalement

a

mort e l'homme.

De là

est née une sorte e

scepticismecientifique

e bornant

faire es nventairesu donné

naturel

ans

se

soucier e

rechercher

quelque

référence

émantique.

ne

telle

attitude a de

pair

avec

un

ludisme

rotique

ur

lequel

débouchent ous ces esthétismes

de l'inventaire1). D'où toutes esinvocations Sade ou à Sacher

Masoch enant esnouveaux

chorèges

e 'existence

pour

esquels

la

vie et

la

connaissance

e

proposent

mutuellement

es aventures

nouvelles.

e telles ttitudes

'accompagnent

'un

aplatissement

de la notion e modèle

2)

que

l'on réduit u

rôled'une

grille er-

mettant e

déchiffrerne

cryptographie

t de

préférer

u d'exclure

des ensembles

ans

que

cela

implique

u

nécessite n

jugement

de valeur

quelconque.

Derrière

e telles

conceptions

e retrouve

finalemente

sophiste

ue

pourchassait

latonet pour equelil

n'y

a ni vrai

ni

faux,

i haut

ni

bas,

ni

copie

ni modèle.

Ainsi ont

de

pair

les formalisations

onceptuelles

es

plus

abstraites

t les

fureurs

ionysiaques

es

plus

échevelées.

Pascal

nous

mettait

n

garde

ontre

e telles ttitudes

«

Les

logiciens.

l semble

ue

leur icence

oive

tre

ans aucunes

ornes

ni

barrières

oyant

u'ils

en

ont

franchi

ant

de si

ustes

et de

si

saintes (3).

Mais,

à

côté

des

scepticismes

sthétiques,

ous retrouvons

aujourd'hui

es

nouvelles

ormes

e

stoïcisme

t de

pélagianisme

que professent

nconsciemment

es

ingénieurs

e

la Polis. Faisant

du

sage

le

savant

qui

connaît

t

applique

es

lois de

l'histoire

t

qui

acquiesce

u

sensde

celle-ci,

ls attendent

n salut

des

œuvres

dont

a

technique

t l'histoire

ont

es artisans.

insi

'homme

st

agi,su,possédéparunNomos ui s'incarne ansla Polis et qui

donne

l'homme

ne

Phusis

ui

fabriquant

n

mondede

YEthos.

(1)

On

sait

que

Lévi-Strauss

e

plaît

à

dire

qu'il

étudie

es

hommes

omme

s'ils

étaient

des

fourmis

il

est

significatif

e

remarquer ue

saint

Augustin

reprochait

éjà

à Garnéade

e

franchir

n

tel

pas

:

«

En disant

qu'on

ne

peut

rien

avoir

n

philosophie,

n ne

pourrait

avoir

d'un

homme,

isait

Augustin,

s'il

est

un

homme

u

une

fourmi.

(2) On

trouvera

ne

interprétation

tructuralisante

u

modele

hez

Pascal

dans 'article e LouisMarin,Réflexionsur a notionde modèle hezPascal,

in

Revue

de

Métaphysique

et de

Morale,

1967,

1.

(3)

Pensées,

393.

Page 12: Brun - Saint Augustin & Pascal

7/23/2019 Brun - Saint Augustin & Pascal

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406

REVUE

PHILOSOPHIQUE

*

Saint

Augustin

t

Pascal nous

ont transmis

n

message ui

devrait ous nciter méditerur esscepticismes,es axismes,es

divertissements,

es

autoritarismest les

dogmatismes

ui

visent

guérir

'homme e

lui-mêmet

qui

ne

font

ue

le

dissoudre ans

es

frénésies,

es

planifications

ntellectuellest

les

océansde

tous es

opiums

ossibles.

aint

Augustin

t

Pascal

sont

des

penseurs

ra-

giquesqui

nous

nvitent

comprendre

u'il y

a

un

malheur

e la

consciencet

pas

seulement

es

consciences

alheureuses,

ue

par-

delàlessolutions écessairesemeurene nterrogationondamen-tale.

Aujourd'hui

outeses

entreprises

e

libération

ous

amènent

à

penser

ue

nous

pouvons

ous

dispenser

e

nous

demander

n

vue

de

quoi

nous

devenons

ibres. ar

elles

risquent

ort

e

devenir

aliénantes.

aint

Augustin

t

Pascal

font e

la

liberté

e

qui

doit

être

u

service e ce

qu'aucun

cte,

ucune

parole

ne

peuvent

aire

ni

dire,

ls

la

mettent

u

cœur

de

l'approfondissement

e

cette

détresse

ue

suscitent

e

«

que

faire

»

et

e

«

quisuis-je

».

Si

l'autre

et moi nousnous retrouvonsans un tel questionnement'est

parce

que

nous

sommes

ous

deux

en

chemin

ers

un

portque

le

Monde

ne

saurait

nousoffrir.

l

faut

ue

l'homme

oit

vaincu

pour

qu'il

accède,

ar-delà

es

conquêtes

ont

l

est

'artisan,

l'idée

même

de

Victoire.

Jean

Brun.