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    Les Annales politiques et littraires : revue populaire paraissant le

    dimanche / dir. Adolphe Brisson

    http://gallica.bnf.fr/http://www.bnf.fr/
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    Les Annales politiques et littraires : revue populaire paraissant le dimanche / dir. Adolphe Brisson. 1883-1939.

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    20 ANNE 1er

    Semestre)

    N

    983

    27

    AVRIL

    1902

    SOMMAIRE

    Chronique

    Politique

    de

    la

    Semaine

    :

    Marchand..

    Georges

    D ESPARBS

    Etudes

    et

    Portraits

    :

    Jules Dalon

    l Artiste)

    ARSNE

    ALEXANDRE

    Jules

    Dalou

    l Homme).... ADOLPHE

    BRISSON

    Les Petites Comdies

    :

    Leur

    Matre...

    ALFRED

    CAPUS

    Les

    Echos

    de Paris

    :

    Franois

    d Assise

    Cuisiniers

    franais.

    Quel-

    ques

    lgendes

    d Albert

    Guillaume.

    Triolet

    Edmond Rostand.

    Candidatures

    fantaisistes.

    Lais-

    ss-pour-compte

    .

    Ingres

    can-

    Nos

    Concours

    SERGINES

    Vieux

    Murs

    Parisiens

    :

    Le

    premier

    E.

    voyage

    de

    Bonaparte

    Paris

    G.

    LE

    NTRE

    Les

    Prit

    des

    Annales

    :

    Conte

    d une

    Grand mre

    ses

    petits-enfants..

    GEORGES

    PICARD

    Posies

    :

    A

    Erasme

    PIERRE

    DE

    NOLHAC

    les

    Moulins

    Chapron

    de Chateaubriant

    Les

    Nids

    et

    les Fruits

    L.-L. RGNIER

    Sonnet

    gourmand

    RAOUL

    P0NCH0N

    Causerie

    Thtrale

    :

    Rostand

    et Musset EMILE

    FAGUET

    Bulletin

    Thtral

    Pages

    Oublies

    :

    M.

    et

    Mme

    Charles

    Nodier

    LORDAN

    LARCHEY

    Le Chapitre

    du

    Chic

    NESTOR

    ROQUEPLAN

    Revuedes

    Livres

    :

    L OEuvre

    historique

    de

    M.G.

    Lenotre

    ADOLPHE

    BRISSON

    Examen

    des

    Manuscrits

    GEORGES DERVILLE

    Mouvement

    Scientifique

    :

    Lampes

    incandescence

    et

    incendies

    .....

    HENRI

    DE

    PARVILLE

    La

    Science

    en

    Action

    :

    La

    Lgende

    et

    EMILE

    GAUTIER

    Actualits

    Scientifiques

    :

    Le Roi

    des

    Phares

    MAX DURAND

    Pages Etrangres

    :

    Le

    brigand

    Muso-

    lino

    XXX

    LesConseils de

    la

    Cousine

    :

    Ce

    qui

    fait

    et

    Ce

    qui

    ne

    se

    fait

    pas

    COUSINE

    YVONNE

    :

    LaJeune

    Fonctionnaire

    suite)

    GUSTAVE

    GUICHES

    SUPPLM NT

    ILLUSTR

    :

    Jules

    Dalou

    dans

    son

    atelier.

    Mirabeau

    aux

    Etats-Gnraux;

    le

    Triomphe

    de

    Silne;

    Monument

    de

    Delacroix,

    par

    DALOU.

    MILITAIRES

    :

    Quatre

    dessins d ALBERT

    GUILLAUME.

    DE

    LA

    SEMAINE

    :

    Avant

    le Salon;

    le

    Banlit

    Musolino;

    le

    Phare de

    l le

    Vierge;

    Don

    Franois

    d Assise;

    la

    Priode

    lectorale Paris.

    MUSIQUE

    :

    Le

    Dernier

    Epi. Paroles

    de

    ANTOINE

    ROULE;

    musique

    de

    EDOUARD

    FLAMENT.

    CHRONIQUE

    POLITIQUE

    INTRI UR

    C est aujourd hui

    que

    les

    lections

    com-

    mencent

    et

    que

    le

    suffrage

    universel, ob-

    jet

    d une

    si

    douloureuse agitation

    dans

    un pays

    voisin,

    se

    prononce

    entre

    tous

    ses

    sont

    exactement

    deux

    mille

    quatre

    cent

    trente,

    soit

    une

    moyenne

    de

    quatre

    candidats

    par

    circonscription.

    Dans

    les

    circonscriptions

    o

    l ouvrier domine,

    dans

    la

    Seine

    ole chiffre

    des

    candidatures d-

    passe

    trois cents

    pour

    cinquante

    siges)

    et

    dans

    les

    Bouches-du-Rhne,

    cette

    est

    encore

    suprieure.

    C est

    insi

    que,

    dans

    la

    premire

    circonscrip-

    de Marseille,

    le dput

    sortant

    n a

    pas

    moins

    de

    sept

    concurrents

    devant

    lui,

    t

    qu Paris,

    dans

    le

    onzime

    arrondis-

    sement,

    M.

    Allemane

    devra,

    pour

    tre

    rlu, faire

    toucher

    les

    paules

    dix

    ad-

    versaires.

    Jamais aussi,

    les opinions

    n avaient t

    si

    diverses.

    Bien

    que

    ces

    deux

    mille

    qua-

    tre

    cent

    trente

    candidats

    aux

    cinq cent

    quatre-vingt-onze

    siges

    de

    dputs

    mar-

    chent

    au

    scrutin

    en

    deux armes

    distinc-

    tes

    les

    ministriels

    et

    les

    antiminist-

    riels,

    l opposition

    et

    la

    concentration,

    les

    opinions

    varient

    l infini.

    Il

    y a

    des

    modrs,

    des

    libraux

    ;

    des

    progressistes

    nuance

    Mline

    et

    des

    pro-

    gressistes

    nuance

    Barthou; des

    radicaux

    nuance

    Bourgeois et

    des

    radicaux

    nuance

    Brisson;

    des

    radicaux

    socialistes

    et

    des

    socialistes

    radicaux;

    des dmocrates,

    des

    socialistes

    rvolutionnaires,

    qui

    se

    subdi-

    visent

    en

    communistes,

    blanquistes,

    alle-

    manistes

    purs

    et

    dissidents.

    Il

    y a

    des

    li-

    bertaires,

    des

    plbiscitaires,

    des

    nationa-

    listes, des

    antismites,

    des

    partisans

    de

    la

    royaut

    et

    des partisans

    de

    l empire,

    des

    catholiques,

    comme en

    Belgique,

    et

    des

    socialistes

    chrtiens.

    Il

    y a

    les

    candidats du

    bouleversement

    gnral

    et

    de

    l anarchie,

    les

    indpendants,

    les fantaisistes.

    On

    en

    connat

    dj deux

    parmi

    ceux-l

    :

    le

    candidat

    tricolore

    et

    le

    candidat des

    gens

    de maison,

    qui rsume

    dans

    la

    langue

    des

    dieux

    les

    devoirs

    respectifs

    des matres

    envers

    les servi-

    teurs

    et

    des serviteurs

    envers

    les matres

    ;

    il

    y

    en a

    d autres

    :

    le

    candidat humain,

    le

    candidat

    des

    camelots,

    le

    citoyen

    Biche-

    bois,

    camelot

    lui-mme;

    il

    y

    a

    le

    candidat

    de la

    vieille

    gaiet

    franaise,

    le

    citoyen

    F-

    nlon Hgo, qui

    demande

    le

    prolonge-

    ment

    du chemin

    de

    fer

    de

    ceinture

    et

    la

    suppression

    du

    gaz

    .

    Bref,

    il

    y

    en a

    pour

    tous

    les gots.

    X

    Les amateurs

    de statistique

    lectorale

    ont

    galement

    calcul

    qu il

    y

    a

    quatre

    cent

    vingt-sept

    dputs sortants qui

    solli-

    citent

    le

    renouvellement

    de

    leur

    mandat,

    cinquante-quatre

    dputs

    qui

    ne se

    repr-

    sentent

    pas,

    cinquante-cinq

    dputs

    an-

    ciens

    qui

    se

    reprsentent.

    Beaucoup,

    parmi

    les

    dputs

    sortants,

    changent

    de

    circonscription

    ou

    se

    prsen-

    tent

    dans

    une

    des

    treize

    circonscriptions

    nouvelles. On

    sait,

    en

    effet,

    que

    le der-

    nier

    recensement

    a

    entran

    un

    remanie-

    ment et

    une

    augmentation

    desdites cir-

    conscriptions,

    que

    la

    Seine

    en

    gagne

    quatre

    et que les

    Alpes-Maritimes,

    l Aude,

    les

    Bouches-du-Rhne,

    la

    Gironde,

    l H-

    rault, le. Finistre,

    le Nord,

    le

    Pas-de-

    Calais,

    le

    Rhne

    en

    comptent

    chacun

    une

    de plus.

    Parmi

    les dputs

    qui

    abandonnentl charpe,

    il

    n y

    a

    pas

    que

    de

    nobles

    in-

    connus.

    On

    y

    trouve

    M.

    Castelin, M.

    Wil-

    son,

    le prince

    d Arenberg.

    La

    plupart des

    dputs

    anciens

    qui

    se

    reprsentent ont

    galement marqu

    dans

    les fastes

    parlementaires.

    Ce

    sont

    MM.

    Flourens, ministre

    des affaires

    trangres

    au

    temps

    de l incident

    Schnaebel

    ;

    Fab-

    rot,

    Andrieux,

    Chaudey,

    Michelin,

    Mau-

    jan,

    Chauvin, J.

    Reinach,Turrel, qui

    eut,

    un

    moment,

    le

    portefeuille

    des

    travaux

    publics

    ;

    Delafosse,

    Delpeuch,

    qui

    oc-

    cupa

    le

    sous-secrtariat

    d Etat au

    minis-

    tre

    des

    postes;

    Gavini,

    Peraldi, Jules

    Guesde

    et

    Jean

    Jaurs,

    les deux

    grands

    chefs

    de

    file

    du

    parti

    socialiste;

    Th-

    venet,

    ancien

    garde des

    sceaux;

    Mau-

    rice et

    Andr Lebon, Georges

    Laguerre,

    Vacherot,

    Grault-Richard,

    Yves

    Guyot,

    le

    marquis

    de Vog,

    et

    les docteurs

    Fr-

    bault

    et

    Grenier,

    le dput

    musulman.

    X

    Il

    va

    sans

    dire

    que ce

    premier

    scrutin

    sera

    trs disput.

    Il

    y

    aura

    Paris,

    dans

    le

    Nord, dans

    le Rhne,

    Remiremont,

    des

    luttes

    piques.

    Les ministres,

    tout

    les

    premiers,

    ont

    se

    dfendre.

    A

    Langrs,

    M. Mougeot

    se

    heurte

    un

    libral

    ;

    Belley,

    M.

    Baudin

    a

    quatre

    candidats

    de-

    vant

    lui;

    Mamers,

    M.

    Caillaux

    lutte

    con-

    tre

    un

    modr;

    Villeneuve-sur-Lot,

    M. Georges

    Leygues

    le dispute

    un

    radi-

    cal

    et

    un

    nationaliste; Paris,

    enfin,

    dans le

    douzime

    arrondissement,

    M.

    Mille-

    rand

    se

    heurte

    une

    vritable

    nue

    de

    socialistes.

    A

    l heure

    o

    nous

    crivons,

    il

    n est

    plus

    une

    muraille

    qui

    n ait

    son

    affiche.

    C est

    le

    parti

    rpublicain

    radical qui

    a

    cltur

    la

    srie

    des

    grands

    manifestes

    lectoraux.

    Le sien est

    une

    rplique

    ceux

    qui

    con-

    damnent

    en

    bloc

    l oeuvre

    de

    la

    Rpubli-

    que.

    Peut-tre

    mme

    a-t-il

    revendiqu,

    dans

    cette

    oeuvre,

    une

    part

    qu il

    ne

    mrite

    pas

    entirement.

    Le

    meilleur de

    l oeuvre

    r-

    publicaine,

    c est

    le parti

    libral

    auquel

    il pose

    des

    conditions

    qui

    l a

    surtout

    ac-

    compli.

    Ajoutons

    que

    le

    scrutin

    s ouvre

    sur

    un

    gros

    incident.

    Le

    gnral de

    Galliffet, mis

    en

    cause

    par

    M.

    Jules

    Lemaitre

    propoa

    de

    sa

    dmission,

    refuse

    de

    rouvrir

    la

    po-

    lmique

    ce

    sujet et

    de

    devenir

    l accu-

    sateur

    du

    ministre

    dont

    il

    a

    fait

    partie

    .

    Mais

    il

    ne

    dment

    pas

    expressment

    les

    rvlations

    de M.

    Jules

    Lemaitre.

    TR NG R

    Malgr de

    nouvelles

    et

    de

    terribles

    fu-

    sillades

    Louvain,

    devant

    la maison

    mme

    du

    prsident

    de

    la

    Chambre,

    que

    la

    foule

    menaait

    de

    mort, et

    le

    refus

    du

    parti

    catholique

    de

    passer

    la

    discussion

    de

    la

    revision

    de

    la

    Constitution,

    la situa-

    tion

    politique s est

    plutt

    dtendue

    en

    Belgique.

    Sansrien

    abandonner

    de

    leurs

    revendici-

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    LES

    ANNALES

    POLITIQUES

    ET

    LITTRAIRES

    tions, puisqu aux

    obsques

    des

    malheu-

    reux

    tombs

    sous

    les balles

    de la

    garde

    civique,

    M.

    Vandervelde

    a

    dclar

    que

    le

    suffrage

    universel

    serait

    le loyer du

    sang

    rpandu

    ,

    le

    parti

    socialiste

    et

    le

    parti

    libral

    les

    ajournent.

    Aprs avoir

    conseill

    et

    foment

    la

    grve

    gnrale,

    les chefs

    du

    parti ouvrier

    demandent

    leurs

    camara-

    des

    de

    reprendre

    le chemin

    de la

    mine

    et

    de

    l atelier.

    C est

    vers

    la

    dissolution de la

    Chambre

    que

    les

    uns

    et

    les

    autres

    tour-

    nent

    maintenant

    leurs efforts.

    a jeune reine

    Wilhelmine, l amie

    cou-

    rageuse

    et

    dvoue du peuple boer,

    est

    gravement

    malade

    et tous

    les

    yeux se

    tournent

    avec

    anxit

    vers ce

    chteau de

    Loo o

    les mdecins

    la

    disputent

    on

    de-

    vine

    avec

    quel dvouement

    aux

    dieux

    et

    la

    mort.

    Ils

    esprent

    la

    conserver

    son

    peuple; mais

    si

    la

    chre

    petite

    souveraine

    mourait,

    si

    ce

    coeur

    de femme

    ouvert

    toutes

    les

    ides

    gnreuses

    cessait

    de

    battre,

    que

    de

    regrets,

    que

    de

    difficults

    ce

    serait

    aussi

    Le

    principe

    de

    la

    non-in-

    tervention, n

    des

    vnements

    de 1830,

    et

    qui

    semble

    tre incorpor

    au

    droit

    pu-

    blic,

    serait-il

    respect

    ?

    u

    Transvaal,

    lord

    Milner

    et

    lord

    Kit-

    chener

    ont

    eu

    deux confrences

    avec

    les

    dlgus boers,

    et,

    sur

    la

    demande

    de

    ces

    derniers,

    le gnralissime anglais,

    tout

    en

    refusant

    un

    armistice,

    leur

    donn

    des

    facilits

    pour

    examiner

    la

    situation

    de

    concert

    avec

    les

    commandos

    et organiser

    entre

    eux,

    ce

    sujet,

    une

    sorte

    de

    plbis-

    cite.

    Ils

    ont

    trois semaines

    pour

    confrer

    ensemble.

    On

    se

    montre

    naturellement

    trs

    optimiste

    Londres.

    Peut-tre

    mme

    exagre-t-on

    un peu

    le

    rsultat

    acquis

    et.

    donne-t-on

    de simples nouvelles,

    telles

    les commandes

    de

    vtements

    et

    d picerie

    faites

    Pretoria

    par

    les Burghers,

    une

    si-

    gnification

    qu elles

    n ont

    pas.

    Prire

    d adresser

    toutes

    les

    communi-

    cations

    relatives

    la rdaction des

    Annales

    M.

    ADOLPHE

    BRISSON,

    rdacteur

    en

    chef.

    Les autres

    communications

    (abonne-

    ments

    et mandats)

    doivent

    tre

    adresses

    M.

    l Administrateur

    des

    Annales.

    NOTES

    DELA

    SEMAINE

    MARCHAND

    E

    vainqueur

    de Fachoda

    est

    revenu

    de Chine

    par

    la Russie

    dont il dsi-

    rait

    tudier

    de

    prs l organisation

    militaire; et

    c est

    plus qu une visitede soldat,

    c est

    une

    mission

    de

    philosophe

    qu il

    vient

    d accomplir.

    Ecoutez

    comment

    il

    s exprime

    sur

    l tat

    d me

    de

    nos

    allis

    :

    Il n y

    a

    rien

    d apprt

    dans

    leurs

    sym-

    pathies

    notre

    gard.

    C est

    un

    sentiment

    qui

    jaillit de leur

    coeur comme

    une

    source

    d eau frache

    et

    limpide

    des

    flancs

    de

    la

    montagne,

    et

    alors, devant

    la

    constatation

    de

    cette

    double

    force,

    l arme

    russe

    et

    l ar-

    me

    franaise,

    appuyes

    l une

    sur

    l autre,

    vivant

    pour

    le

    mme

    but,

    agissant pour un

    idal identique, je crois

    pouvoir

    me

    permet-

    tre

    de

    dire

    que nous

    n avons

    pas

    choisir

    un

    ennemi

    plutt

    qu un

    autre, mais

    que

    nous

    sommes

    prts

    accueillir

    tous ceux

    qui

    se

    prsenteront

    pour

    s opposer

    l ac-

    complissementde

    la

    mission

    qui

    incombe

    aux

    peuples.

    Que de fois

    j ai

    eu

    l honneur

    d entendre

    cette

    voix

    loquente,

    alors

    qu aprs

    son

    re-

    tour

    de

    Fachoda

    le hros

    promenait

    dans

    Paris

    sa

    gloire

    et

    ses

    inquitudes.

    Car je

    m honorerai

    jamais

    d avoir

    t

    l un

    des

    premiers

    le

    connatre.

    Voici de

    quelle

    faon,

    et

    cela

    est

    prsent

    en

    moi

    comme

    si

    c tait

    d hier.

    Nous

    cau-

    sions

    du colonel,

    un

    soir,

    entre amis,

    dans

    l atelier d un

    peintre

    d histoire,

    et

    chacun

    racontait

    de

    lui

    ce

    qu il savait.

    Mais,

    cette

    poque, bien

    peu

    lui

    avaient

    parl.

    Il

    tait

    le

    hros

    d une lgende,

    un

    homme

    encore

    mystrieux.

    Ah

    dis-je

    mon

    voisin, tout

    ce que

    je

    viens

    d entendre

    me

    donne

    des

    remords

    et

    des

    regrets.

    J tais

    en voyage

    quand

    Mar-

    chand

    revint

    de l Abyssinle.

    Vous

    qui

    l avez

    vu,

    indiquez-moi

    donc

    un moyen

    de l entre-

    voir,

    seulement

    une

    seconde. O demeure-

    t-il ?

    Dans

    quels endroits

    va-t-il:

    se

    prome-

    ner

    ?

    J appris alors

    que

    le colonel

    habitait

    une

    petite

    villa

    de l avenue

    Malakoff.

    Puis,

    quel-

    ques-uns

    citrent

    les

    routes

    de

    Boulogne o

    il galopait

    avec

    son

    ami

    Baratier ; d autres,

    dans le

    mme

    temps,

    nommaient

    les cafs

    o il

    prenait

    ses

    apritifs

    ;

    celui-l

    lui

    avait

    serr la

    main

    sur

    le

    quai

    de

    la

    gare

    de Lyon,

    celui-ci

    avait

    ramass

    sa canne

    ;

    la

    plupart

    l avaient

    suivi

    et

    coudoy,

    ici

    et

    l,

    peut-

    tre,pensai-je,

    en

    mme

    temps...

    Tout

    le

    monde s expliquait

    la fois;

    je

    n y

    recon-

    naissais

    plus

    rien.

    Une

    semaine

    aprs, l un

    des

    invits,

    peintre

    comme

    notre

    hte,

    m aborda

    au

    coin

    de la

    rue

    Richelieu.

    Je

    suppose

    que

    vous avez

    toujours

    grande

    envie

    de

    connatre Marchand,

    me

    dit-il,

    et

    je vais

    bien

    vous

    faire

    plaisir.

    II

    y

    a

    huit

    jours,

    au

    Concert-Bal

    des

    sous-offi-

    ciers, quelqu un

    vous

    ayant nomm, le

    com-

    mandant dit qu il voulait

    vous

    voir.

    En racontant

    le fait,

    peu

    de

    temps

    aprs,

    j appris

    avec

    motion

    que

    le

    mme

    soir,

    la mme

    heure o

    j avais dsir

    connatre

    Marchand,

    lui

    tant

    un

    bout

    de

    Paris

    tan-

    dis

    que

    j tais

    l autre,

    il

    avait

    prononc

    mon

    nom.

    Je

    ne

    suis

    pas

    superstitieux

    et

    la chose

    est

    sans

    importance;

    mon

    coeur,

    seulement,

    lui

    en

    donne

    une.

    Ds

    lors,

    rencontrant

    les

    admirateurs

    qui

    m avaient

    si

    tumultueusement

    renseign,

    je

    pus me

    vanter

    dans leur

    oreille

    que

    je

    con-

    naissais

    mon

    tour

    le

    commandant;

    aussi

    bien,

    disais-je...,

    sinon

    plus.

    Les

    illustrationsdes

    revues

    ont

    popularis

    cet

    homme

    admirable.

    Le

    colonel

    est

    de

    taille

    moyenne.

    Il

    a

    la

    peau

    dore,

    de

    beaux

    yeux

    doux

    et

    profonds,

    niais

    toujours

    fixs, dilats

    mme

    sur

    celui

    qui

    il parle,

    ou

    sur un

    rve. Malgr

    son.

    teint

    brun

    et

    sa

    barbe

    noire,

    l ensemble

    de

    la

    figure

    est

    baign

    de

    lumire

    ;

    elle

    resplen-

    dit

    surtout

    dans

    son

    regard.

    Des qu on

    l a

    vu, on

    l aime

    irrsistible-

    ment.

    O

    qu il

    entre,

    il

    marche

    trs

    vite,

    le

    corps

    tout

    droit.

    Beaucoup

    d hommes,

    qui

    ne

    le connaissaient qu en

    image,

    furent

    pris

    d une

    sorte

    de

    vertige

    en

    l apercevant:

    Aus-

    sitt,

    on

    se

    taisait

    ;

    on

    ne

    regardait

    plus

    que

    lui,

    on

    n coutait plus

    que

    lui

    et

    on

    ne vou-

    lait

    plus

    connatre

    que

    lui.

    On

    apprenait

    alors

    que

    ce

    monsieur

    qui

    venait

    d entrer

    s appelait

    Marchand

    :

    Eh

    bien

    disait-on,

    je

    m en

    serais

    dout.

    Sans

    savoir

    son

    nom,

    rien

    que

    de le

    voir,

    cela m a fait

    quelque chose

    l

    Ainsi,

    premire

    vue,

    tous avaient

    t

    subjugus.

    Phnomne

    d lectrisation.

    Si

    un

    homme

    lui plat,

    il

    s avance

    rapide-

    ment

    vers

    lui,

    les

    yeux

    dans

    les

    yeux,

    s ar-

    rte

    tout

    coup

    et

    lui

    serre

    la

    main

    avec

    vigueur.

    Alors, il

    parle

    on

    libert,

    et

    c est

    un

    enchantement.

    Dans

    ces

    heures-l,

    si

    une

    chose l gaie,il

    clate

    de

    rire

    d une voix

    aigu,

    eniantine,

    quand

    mme

    trs

    douce.

    Malgre sa force,

    il

    est

    mince

    et

    fin,

    l-

    gant.

    Il

    a

    le

    geste

    rare,

    vertical,

    serr,

    vif.

    Il lance

    l ide

    avec

    impatience

    et

    rejette

    tout

    ce

    qu il

    sent

    d inutile

    dans

    les phrases.

    Il

    vo-

    que

    les

    choses

    d un

    simple

    mot;

    purs,

    il

    vous

    regarde... Et

    cela

    est

    impressionnant.

    C est

    un

    synthtique.

    Qu on

    parle

    de

    phi-

    lospphie

    ou

    d histoire,

    il

    ramasse

    bientt la

    discussion,

    l treint

    et

    en

    fait

    jaillir

    des

    lueurs,

    cela

    en

    quelques brves

    paroles.

    Comme

    son

    ami Baratier, le

    colonel

    est

    un

    silencieux

    et

    un

    solitaire.

    Avantage

    et

    vertu

    inestimables.

    Ainsi places, les ides

    s aiguisent, les

    facults

    se

    groupent,

    se

    pr-

    parent,

    et

    le

    coeur,

    s il

    est

    consult,

    rpond

    avec

    d autant

    plus de force

    qu il

    retentit

    dans

    plus de silence.

    La foi

    patriotique, le

    sentiment

    du devoir

    et le

    mpris

    de

    la

    mort

    :

    voil les

    qualits

    suprieures

    qui

    firent

    de

    cet

    homme

    un

    pro-

    dige

    humain.

    Au

    point

    de

    vue

    intellectuel,

    c est

    un

    esprit qui

    s claire

    lui-mme,

    tan-

    dis

    que

    la

    plupart des

    hommes

    cherchent

    autour

    d eux

    leur

    clart.

    Dans

    le

    vrai

    sens

    du

    mol,

    c est

    donc

    un

    homme

    naturel,

    mais

    un homme

    qui

    voit

    loin,

    et

    fond.

    D ailleurs,

    jeunes

    gens,

    allez

    son

    cole,

    lisez-le,

    cou-

    tez-le,

    essayez

    de le

    pntrer,

    vous

    verrez

    en

    lui

    une

    figure d airain

    comme

    l antiquit

    nous en

    prsente,

    une

    de

    ces

    mes de

    hros

    qu on

    ne

    retrouve

    plus

    que

    dans

    les livres

    et

    qui

    ne

    palpitent

    plus

    que

    dans

    vos

    ver-

    sions.

    Vers la fin de

    l Exposition

    de

    1900,

    au

    Champ-de-Mars, des

    tonneaux

    devant

    une

    auberge, des

    paysans

    d opra

    monts

    sur

    les

    tonneaux,

    un

    air

    de

    musette dans

    la lu-

    mire lectrique,

    une

    table

    toute

    blanche

    sous

    des feuillages,

    et assis

    autour

    de

    cette

    table,

    Marchand,

    Baratier,

    le pote Mariton

    et

    moi.

    C tait la dernire

    soire

    que

    le

    co-

    lonel

    passait

    en

    France.

    Il

    ven i d tre

    malade

    et

    souffrait

    encore.

    Debout

    seulement

    depuis

    la

    veille,

    il

    n avait

    eu

    que

    le

    temps

    de

    faire

    ses

    bagages.

    Il al-

    lait

    partir

    le

    soir mme

    et

    nous

    lui faisions

    nos

    adieux.

    Je

    me

    souviens

    que

    Baratier

    tait

    trs triste,

    il

    avait

    demand

    suivre

    son

    compagnon d armes

    et

    on

    lui

    avait

    r-

    pondu

    en

    l envoyant

    Compigne.

    Nous tions

    servis,

    ce

    soir-l,

    par

    un

    garon

    de

    caf

    dangereusement enthou-

    siaste.

    Il

    portait

    et

    remportait

    les

    plats

    en.

    faisant

    un

    bruit

    du

    diable.

    Vers

    la

    fin

    du

    dner,

    je

    ne

    sais

    comment,

    il renversa

    une

    carafe

    sur

    le

    pantalon du

    colonel.

    Maladroit

    e

    malheureux

    tait

    dsespr.

    Notre ami

    Mariton,

    quiplaisante

    froid,

    lui

    dit

    en hochant

    la

    tte

    :

    Vous

    le

    voyez, mon

    ami,

    il

    faut

    vous

    marier.

    Me

    marier, monsieur,

    pourquoi

    ?

    Parce

    que

    vous

    n tes

    pas

    fait

    pour

    rester

    garon.

    Allons,

    dit le

    colonel

    en

    voyant

    la

    peine

    du

    pauvre

    homme,

    ce ne sera

    rien.

    Nous

    nous

    levions

    pour

    partir

    quand

    le

    garon

    apparut

    encore.

    Il

    tait

    tard,

    il

    vou-

    lait

    nous mener

    un

    guichet.

    Mais,

    cette

    fois, il n avait plus

    sa

    serviette,

    et

    sa

    veste

    montrait

    ostensiblement

    un

    ruban, celui

    de

    la mdaille

    coloniale.

    Mon colonel

    ne

    m en

    veut

    plus?Si

    mon

    colonel

    savait...

    Maintenant

    que

    j ai

    ma

    boutonnire

    ,

    je

    peux bien lui

    dire...

    J ai

  • 7/25/2019 bpt6k5709821d

    5/18

    ANNALES

    POLITIQUES

    ET

    LITTERAIRES

    259

    sous ses

    ordres dans

    les

    marsouins.

    Et

    une

    larme d confusion

    et

    d'orgueil

    sur

    sa

    jou.

    Le colonel

    offrit d'abord

    sa main,

    puis

    il

    porta

    machinalement

    sa

    poche.

    Ce

    geste

    n'eut

    pas

    le succs

    du

    premier

    le

    garon

    s'esquiva.

    Mais

    peinetions-

    dehors

    qu'une

    voix

    terrible

    se

    fit

    enten-

    elle

    criait

    de

    la

    terrass

    de

    l'auberge

    :

    Il m'a

    serr

    la

    main

    Il m'a serr

    la'

    Vive Marchand

    nfin,

    le

    voici

    revenu parmi

    nous.

    Maigre

    longue anne

    de

    guerre

    sous

    un

    dur

    et

    climat,

    le colonel

    nous

    revient

    tou-

    urs le

    mme.

    Les

    lignes

    de

    son

    visage

    d

    changer

    qu'en

    prenant

    plus de

    no-

    encore,

    et quant

    son

    me,

    la plus

    que

    je

    connaisse,

    elle

    est

    trop

    sur

    depuis

    longtemps,

    pour

    avoir

    perdu

    horizon.

    Je

    sais

    sa

    simplicit

    charmante,

    et

    que

    refusa

    des

    invitations

    impriales,

    il

    volontiers

    la

    mienne,

    que

    je

    lui

    ds

    mon

    retour

    Paris.

    Ce

    sera

    seconde

    fois,

    et

    ma

    maison

    en

    sera

    moins

    te et

    j'en

    serai, moi,

    plus vaillant.

    Et

    puis, je veux que

    mes

    fils

    le

    voient

    en-

    Comme ces

    doux

    songes

    de la nuit

    on:

    se

    souvient

    au

    rveil,

    plus

    tard

    a

    besoin de

    se

    rappeler

    son

    me

    et

    ces

    impressions

    d'enfance,

    deviennent

    le meilleur

    de lui.

    Donc,

    ils

    savent dj

    tous

    les

    trois

    que

    le

    est

    revenu,

    et,

    comme

    autrefois, ils

    avaient alors cinq

    ans,

    trois

    ans

    et

    un

    J'avais

    cart

    le. plus

    petit

    et

    ordonn

    deux

    autres

    de

    bien

    se

    tenir

    chacun,

    que

    le

    commandant

    arriverait.

    Roland

    et

    Robert

    deux

    malins quand

    sont

    ensemble,

    deux

    bons

    garons

    si

    on

    spare

    avaient

    publi dj

    qu'un

    an

    ils

    taient

    marmots et

    disaient

    derors

    pour

    dehors

    et

    pipaillons,

    papillons.

    Ils

    prirent

    un

    air

    important:

    Tu

    verras,

    papa

    Aprs

    diner, voil

    le commandant

    qui

    em-

    le plus

    petit

    et

    se

    tourne

    vers

    les

    autres:

    Comment

    t'appells-tu,

    toi

    qui

    as

    les

    si

    bleus?

    Robert.

    Et

    ta

    sant

    ?

    a va bouin.

    Et

    toi, ton

    nom

    ?

    Roland,

    mon

    commandant.

    Roland

    C'est

    beau

    de s'appeler

    ainsi.

    qu'il

    a

    fait,

    Roland

    ?

    C'tait le

    neveu de Charlemagne.

    Comment

    est-il

    mort

    ?

    En

    sonnant

    du

    cor

    de

    chasse.

    C'est les

    qui

    l'ont

    tu

    Parfait.

    Qu'est-ce

    que

    tu

    veux

    devenir,

    tard?

    Je serai

    tailleur.

    Et dire

    que

    je

    lui

    avais

    fait

    la

    leon

    Tailleur,

    dit le

    colonel, tailleur

    quand

    s'appelle

    Roland

    ?

    t

    il

    ajouta,

    avec

    son

    sourire

    qui

    restait

    mlancolique

    :

    Oh

    je

    comprends,

    tailleur

    de

    crou-

    conserve

    prcieusement

    une

    malhabile

    d'amateur,

    un peu

    brouille,

    quand

    mme

    resplendissante

    mon

    o le colonel

    est

    reprsent,

    debout,

    deux de

    mes

    enfants,

    une

    main pose

    l'paule

    du

    plus

    menu,

    de

    mon

    Jeannot.

    sens

    que

    cela

    leur

    portera bonheur.

    Avec

    simple

    images

    que

    j'ai

    mise

    sous

    verre

    et

    suspendue

    dans

    leur chambre,

    je possde

    le

    plus

    nergique

    et

    le plus doux

    moyen

    de

    les corriger,

    quand ils ferontdes

    fautes.

    Du doigt,

    sans

    rien

    dire,

    je

    leurmontrerai

    la

    photographie...

    GEORGES

    D'ESPARBES.

    Dans

    le prochain

    Numro

    :

    NOTES

    DE

    LA

    SEMAINE,par Le

    Bonhomme

    CHRYSALE.

    TUDES

    PORTRAITS

    JULES

    LOU

    I.

    L'ARTISTE

    Il

    y a

    de

    cela

    une

    douzained'annes

    ;

    je

    lui

    demandais,

    durant

    la belle

    saison,

    comment

    il n'avait

    pas encore

    quitt Pa-

    ris. Avec

    un

    vif

    mouvement de la

    tte,

    le

    sourire

    pas

    mal

    railleur

    et cet accent

    la

    fois

    tranchant

    et

    grasseyant qui

    caract-

    rise

    le

    faubourien

    de

    race,

    il

    me

    rpondit

    une

    fois

    pour

    toutes

    :

    Quitter Paris

    Et

    pourquoi

    faire?

    Des

    vacances

    ?

    des

    congs?

    Mais

    j'ai

    pass

    l'ge

    Et puis,

    on ne

    quitte

    pas

    Paris

    quand

    on

    a

    travailler

    et

    qu'on

    aime

    ce

    qu'on

    fait. En

    t,

    les

    journes sont

    beau-

    coup

    plus longues

    ;

    c'est

    trs

    agrable,

    on

    a

    plus de

    temps

    soi.

    En

    effet,

    plusieurs annes

    encore

    il fut

    fidle

    ce

    systme

    qu'il

    considrait

    comme

    le meilleur

    pour

    sa

    sant

    et

    pour

    son

    repos

    puis

    vers

    1893,

    je

    crois,

    il tomba

    malade,

    trs

    malade. Aprs avoir

    dit

    adieu

    ses

    amis,

    il

    fit,

    je

    ne

    sais

    com-

    ment,

    un

    nouveau

    bail

    avec

    la vie, trs

    long

    ternie.

    Seulement,

    il

    prit

    la rsolution

    la

    plus

    hroque

    peut-tre

    d

    toute

    son

    existence

    :

    chaque anne,

    il

    passerait

    six

    semaines

    aux

    champs.

    X

    endant

    trente

    ans,

    cette

    activit

    se

    nourrit

    d'elle-mme,

    cette

    rage

    de

    travail

    enfanta

    des

    oeuvres

    solides,

    dfinitives,

    longuement

    cherches.

    Ce

    petit

    homme

    maigre,

    nerveux,

    la physionomie

    rava-

    ge,

    a

    empli la

    Ville

    d'images

    robustes

    et

    plantureuses.

    Le

    seul

    regret

    qu'on

    puisse

    prouver;

    c'est

    que

    le

    peuple

    s'intresse

    d moins

    en

    moins

    un

    tel

    art,

    qui

    sort

    directement

    de la

    race,

    et

    o

    elle

    se

    serait,

    de

    tout'

    autres

    poques,

    reconnue

    avec

    joie.

    Mais,

    baste

    cela lui reviendra

    peut-

    tre

    un

    jour...

    et

    les

    oeuvres

    de

    Dalou

    se-

    ront

    encore

    l.

    Peu

    s'en

    est

    fallu,

    pourtant,

    que

    cette

    gloire

    nous

    chappt,

    et

    que

    Paris

    in-

    diffrent

    l'art

    panoui

    et

    populaire

    d'un

    Dalou

    en

    ft

    rduit

    aux

    images

    bcles

    et

    ridicules

    qu'on

    rencontre

    si

    (Souvent-

    dans

    nos

    carrefours

    et

    sur nos

    difices.

    Pendant la Commune,

    Dalou

    avait

    t

    compromis, et.

    aprs,

    il fut

    condamn.

    Il

    avait t

    dlgu

    la

    conservation

    des

    muses

    :

    on

    pronona

    contre

    lui

    une

    peine

    aussi

    svre

    que

    s'il

    avait t

    charg de

    leur destruction

    Il

    avait

    pu,

    Heureuse-

    ment,

    se

    rendre

    Londres. Il

    y

    vcut

    et

    y

    travailla pendant

    plusieurs

    annes.

    Le-

    gros

    qui

    aura

    t

    si mconnu

    de

    ses

    contemporains

    lui donna

    le

    coup

    d'-

    paule

    fraternel, lui

    procura

    des

    relations

    et

    ds

    travaux,

    et

    Dalou

    tait

    fort

    got

    quand

    arriva

    l'amnistie.

    Alors, il

    aurait

    trs

    bien

    pu se

    faire

    qu'il

    et trouv

    s'tablir d-

    finitivement

    l-bas,

    et qu'il

    n'et

    point

    envie

    de

    revenir.

    Du moins,

    ces

    quelques

    annes

    d'exil

    lui

    furent profitables

    :

    elles

    l'entretinrent

    en

    indpendance,

    et

    en

    labeur exempt

    de

    tout voisinage

    officiel.

    Dalou

    revint

    Pa-

    ris

    un

    puissant

    matre,

    et

    sa

    rentre

    frappa des

    coups

    retentissants.

    C'tait,

    vous

    vous

    en souvenez,

    une

    Glorification

    du

    Travail,

    quitait

    comme

    du Rubens

    dmocratique

    en

    sculpture,

    et

    surtout

    ce

    Mirabeau

    aux

    tats-G-

    nraux,

    que

    l'on

    dtachera

    un

    jour

    de

    la

    muraille

    obscure

    ou

    il s'ennuie,

    dans

    quelque salle d'attent

    du

    Palais-Bour-

    bon.

    Il

    sera

    enlev,

    sans

    douleur

    et

    sans

    regret,

    aux successeurs,

    mais

    non

    aux

    remplaants

    de

    Mirabeau,

    et

    aux

    vi-

    siteurs

    qui viennent

    dans

    cet

    endroit

    avec

    la

    proccupation

    de

    bureaux de tabac

    bien

    plus

    que

    de

    bronze

    et

    d'histoire.

    On

    le placera

    dans

    le

    muse

    dont il

    est

    digne.

    Ce fut

    encore

    le superbe

    et entranant

    Monument

    Delacroix,

    qui

    est

    certaine-

    ment

    une

    des plusbelles

    oeuvres,

    qui aient

    surgi

    du

    sol

    de

    Paris

    dans

    ces

    cinquante

    dernires

    annes.

    Puis,

    quantit

    de

    statues,

    celle de Victor Noir

    est

    un

    chf-d'oeu-

    vre

    de drame

    et

    de simplicit

    moderne,

    de

    bustes, serrs et expressifs;

    de

    hauts-reliefs,

    parfois

    un peu

    ronflants,

    mais

    pleins de

    joie

    vermeille

    ;

    de

    fontai-

    nes

    qui,

    malheureusement,

    n'ont

    pas

    t

    toutes

    ralises,

    je

    le crains pour Paris.

    Enfin,

    les

    deux

    monuments

    dont l'inaugu-

    ration

    a

    t

    prcde,

    pour

    l'un,

    de

    quinze

    ans,

    pour

    l'autre,

    de

    six

    huit

    ans

    de

    travail.

    Le colossal bronze du Triomphe de la

    Rpublique (1)

    demeurera le

    souvenir

    d'une

    poque

    qui

    parat

    dj

    bien

    loin-

    taine,

    car, avec

    un

    artiste

    comme

    Dalou,

    les

    oeuvres

    s'difient lentement, tandis

    que

    les ides

    passent.

    C'est

    un peu

    comme

    un

    discours d

    Gambetta,

    mais mieux

    crit,

    et

    dont

    la

    forme

    mriterait d'tre

    conserve.

    Je ne sais pas, ne connaissant

    pas

    grand'chose

    la politique,

    si

    la R-

    publique

    triomphe

    encore,

    prsent

    que

    le bronze est

    achev

    et

    rig;

    mais,

    ce

    qui est

    certain,

    c'est

    que

    l'art

    triomphe

    dans

    l'oeuvre

    de

    Dalou.

    Et c'est l

    une

    compensation

    considrable

    bien

    des

    illu-

    sions

    perdues

    De

    mme,

    les

    artistes

    admirent

    les

    ma-

    gnifiques

    dons

    qui

    clatent

    dans le

    monu-

    ment d'Alphand,

    plus qu'ils

    ne

    s'inclinent

    devant

    l'homme

    mme

    de

    qui

    ce monu-

    ment

    perptuera

    la

    mmoire.

    Alphand

    a

    beaucoup

    fait

    pour

    l'embellissement du

    Paris

    moderne,

    et

    il

    a

    t

    impitoyable au

    Paris

    ancien

    :

    il

    a

    beaucoup

    cr et

    beau-

    coup

    dtruit.

    L'hygine

    lui

    est

    reconnais-:

    sant

    et

    l'archologie

    le

    maudit.

    De

    toute

    faon, le

    moment

    o

    ces

    deux

    oeuvres

    capitales furent dcouvertes ne

    fut peut-tre

    pas

    absolument

    une

    fte

    pour

    la

    pense;

    mais

    ce

    fut

    une

    vraie

    et

    belle fte

    pour

    l'art.

    En

    somme,

    c'est Dalou

    comme

    Ro-

    din

    que

    Rude

    et

    Carpeaux

    ont

    transmis

    l'hritage

    qu'ils tenaient

    de Houdon,

    Hou-

    don de

    Coysevox

    et

    de

    Puget,

    ceux-ci

    de

    Jean Goujon,

    d

    Germain

    Pilon

    et

    de Bar-

    thlmy

    Prieur,

    et

    ceux-ci

    encore

    des ima-

    giers

    du quinzime

    sicle, hritiers

    des

    admirables

    tailleurs

    de

    pierre

    du

    trei-

    zime. Ils

    auront;

    l'un

    et

    l'autre,

    empch

    notre

    grande

    cole

    statuaire

    de

    tomber

    dans

    le

    puril

    et

    dans

    le

    vide

    :

    Rodin,

    avec

    ce

    qu'il y

    en lui

    de

    gnie,

    aura

    conquis

    (1)

    Voir

    les

    Annules

    du

    19

    novembre

    1809

    (n 856).

  • 7/25/2019 bpt6k5709821d

    6/18

    260

    LES

    ANNALES

    POLITIQUES

    ET

    LITTRAIRES

    des liberts

    nouvelles

    pour

    le

    mouvement

    et

    l expression

    ;

    Dalou,

    avec son

    admi-

    rable volont,

    aura

    maintenu

    les

    grandes

    traditionsdu

    volume

    et

    de

    la

    forme

    ;

    sui-

    vant

    l antique

    allgorie,

    l un

    aura

    sculpt

    l idal

    et

    l autre le

    rel.

    ARSNE

    ALEXANDRE.

    II.

    L HOMME

    Ce n tait

    pas au

    Salon,

    entour

    d une

    pompe

    officielle,

    qu il

    fallait

    le

    voir, mais

    dans

    l atelier o

    s coulait

    sa

    vie

    labo-

    rieuse

    et

    solitaire.

    J allai

    l y

    visiter,

    il

    y

    a

    quelques

    mois.

    La

    nuit

    commenait

    tomber

    sur

    le

    fau-

    bourg

    populeux

    ;

    Dalou,

    vtu

    de

    ses

    habits

    de travail,

    se

    reposait

    devant la

    tche

    ac-

    complie,

    comme

    un

    bon

    artisan

    qui

    a

    gagn

    son

    pain

    quotidien

    ;

    je

    lui

    deman-

    dai de

    me

    raconter

    les

    dbuts

    de

    sa car-

    rire

    et

    quelles

    influences

    avaient

    dter-

    min

    sa

    vocation.

    Il

    me

    fit

    ce

    rcit

    qui

    me

    toucha

    profondment. En

    voquant

    les

    lointains

    souvenirs

    de

    son

    enfance, il

    tait

    mu;

    je

    ne

    l tais

    pas

    moins

    en

    l cou-

    tant.

    Je

    vais

    essayer

    de

    reproduire

    ici

    ses

    paroles;

    mais

    pourrai-je rendre

    le

    charme

    dont

    elles

    taient empreintes

    et

    leur

    exquise

    simplicit

    ?

    L auteur du

    Mirabeau

    est

    issu

    d une

    petite

    famille d ouvriers

    ; son

    pre

    exer-

    ait

    la

    profession

    de

    gantier

    ;

    chaque

    ma-

    tin,

    l aube,

    il descendait de

    Montmartre,

    se

    rendait

    l usine

    et

    rentrait

    le

    soir

    exac-

    tement,

    sans

    jamais

    s arrter

    dans

    ces

    cabarets

    et

    ces lieux de

    perdition,

    o

    le

    peuple,

    trop

    souvent,

    s abrutit et se

    ruine.

    C tait

    un

    honnte homme, ponctuel

    remplir

    ses

    devoirs,

    et

    les

    accomplissant

    bravement et gaiement,

    heureux de

    son

    sort

    modeste.

    Il avait

    de la

    joie

    rega-

    gner

    son

    logis

    ;

    car

    ce

    logis

    tait

    bien

    tenu

    et

    embelli

    par

    cette

    propret

    mticuleuse

    qui

    est

    le

    luxe des

    pauvresgens.

    Il

    y

    trou-

    vait

    une

    mnagre

    vaillante

    et

    des

    en-

    fants,

    une

    fille

    et

    deux fils, levs

    par

    son

    exemple

    dans

    l activit

    et

    le

    courage.

    La

    fillette

    et

    l an

    des

    garons

    taient

    en

    apprentissage;

    le

    cadet, d une

    complexion

    plus

    dlicate,

    suivait

    les classes d une

    cole de dessin

    :

    c tait

    le

    futur

    grand

    homme. On

    se

    runissait

    l instant

    du

    souper

    ;

    on

    lisait,

    on

    causait

    autour

    de

    la

    lampe,

    on

    bauchait

    des

    projets

    d avenir.

    Toi,

    mon

    petit

    Jules, disait la

    ma-

    man

    Dalou,

    il

    ne

    te

    faut

    pas

    de

    gros ou-

    vrages

    ;

    tu

    as

    les

    mains

    fines,

    tu

    seras

    un

    excellent

    horloger.

    Le

    petit

    Jules

    ne

    protestait

    pas

    ;

    mais,

    au

    fond

    de

    sa

    cervelle,

    il

    agitait

    des

    rves

    plus

    ambitieux

    :

    il n tait

    pas encore en

    tat

    d analyser

    ses

    sensations;

    pourtant,

    il

    tait

    invinciblementsduitpar la beaut

    plastique

    des choses. Il

    copiait

    avec

    ravis-

    sement

    les modles

    proposs

    ses

    efforts ;

    mais

    il allait

    au

    del,

    il tait

    impatient

    de

    s instruire,

    son

    imagination

    inventive

    lui

    faisait

    concevoir

    des formes nouvelles

    qu il traduisait gauchement

    et

    non sans

    grce.

    Le dimanche,

    il

    se

    rendait

    au

    Mu-

    se

    du

    Louvre,

    et

    demeurait

    en

    extase

    devant

    les

    chefs-d oeuvre de

    la

    peinture

    et

    de la sculpture. Il dclara

    ses

    parents

    qu il voulait

    apprendre modeler

    :

    ils

    furent alarms

    de

    ce

    caprice.

    Ce n est

    pas

    un

    tat,

    cela, de

    patau-

    ger

    dans

    de

    la

    terre

    et

    du

    pltre

    Autant

    t

    faire

    maon.

    Cependant, le

    gamin tmoignait

    d une

    rsolution

    si

    nergique

    qu on n eut

    pas

    la

    barbarie d y

    rsister.

    Sa

    mre

    le

    prit

    part :

    Nous

    ne

    sommes pas

    riches

    ;

    tu

    vas

    sur

    tes

    douze

    ans.

    C est

    bientt

    le

    moment

    de

    gagner

    ta

    vie.

    J ai

    peur, mon

    petit

    Jules,

    que

    tu

    n aies

    des ides de l autre monde..

    Sois

    tranquille,

    maman,

    s cria

    le

    petit

    Jules.

    Et

    il l embrassa

    sur

    les deux

    joues.

    X

    n

    le plaa dans

    une

    institution

    o

    l on

    enseignait

    les

    principes

    de

    l art

    dcoratif.

    L illustre Carpeaux

    y

    dirigeait

    un cours.

    Il

    apportait

    ses

    lves des

    projets

    de

    l Ecole

    des beaux-arts

    et

    les leur donnait

    excuter,

    pour

    exercer

    et

    former leur

    got.

    Il

    ne

    tarda

    pas

    remarquer

    les

    dis-

    positions

    et

    le zle du

    jeune

    Dalou,

    qui

    ne

    se

    bornait

    pas,

    comme ses

    camarades,

    imiter

    platement

    le modle,

    mais

    mon-

    trait

    de

    l initiative

    et

    raisonnait

    ses

    ides.

    Et

    si

    vous

    saviez

    comme

    il s appliquait

    sa

    besogne

    Il

    en

    perdait

    le

    sommeil

    et

    l apptit.

    On

    lui

    avait

    interdit d introduire

    dans

    le logis paternel

    ses

    bauchoirs,

    ses

    mottes

    de

    glaise,

    et

    toutes

    ces

    matires

    salissantes

    que

    la

    maman

    Dalou,

    ordon-

    ne et

    soigneuse,

    dvisageait

    avec

    ter-

    reur.

    Il

    s installait

    sur

    le palier,

    et

    les

    locataires

    taient

    trs

    tonns

    de

    voir

    cet

    enfant

    silencieux

    qui,

    au

    lieu

    d aller

    jouer

    dans la

    rue,

    travaillait obstinment

    entre

    deux

    portes,

    parmi

    les

    courants

    d air,

    la lueur

    terne et

    grise

    d une

    lucarne

    pa-

    reille

    un

    soupirail

    de

    prison.

    Quand

    il

    avait

    fini

    sa

    maquette,

    il

    allait

    la

    soumet-

    tre

    son

    professeur.

    Celui-ci

    avait

    auto-

    ris

    ces

    visites.

    Il rsidait

    trs

    loin

    de

    Montmartre,

    au

    dernier

    tage

    d une

    vieille

    maison

    de la

    rue

    de l Abbaye,

    contempo-

    raine

    du

    roi

    Louis XIII.

    Surtout,

    disait-il,

    ne

    viens

    pas

    trop

    tard. J aime

    me

    lever

    matin.

    Dalou

    prenait au

    pied

    de

    la lettre

    cette

    recommandation.

    A

    l aube, il dgringo-

    lait

    de

    la Butte;

    six

    heures

    prcises,

    ayant

    travers

    Paris, il

    sonnait

    la

    porte

    du

    professeur.

    Mais

    aucun

    bruit

    ne

    rpon-

    dait

    son

    appel,

    sinon

    quelquefois

    un

    ronflement

    sonore.

    Carpeaux,

    qui

    menait

    une

    existence

    ingale

    et

    passionne,

    avait

    des

    nuits agites,

    auxquelles succdaient

    des

    matines

    paresseuses.

    Alors, l colier

    s asseyait

    discrtement

    sur une

    marche

    de

    l escalier

    et

    tendait

    l oreille, cherchant

    deviner,

    quelque indice,

    si

    son

    matre

    tait

    enfin veill

    et

    en

    tat

    de le

    rece-

    voir.

    Parfois,

    il

    restait

    ainsi,

    immobile

    et

    re-

    cueilli,

    pendant

    deux

    heures, trois heures

    d horloge,

    son

    petit

    paquet

    sur

    les

    ge-

    noux,

    et la

    tte

    dans

    ses

    mains.

    Oh

    le

    gentil tableau

    Que

    d illusions,

    de

    chim-

    res,

    de

    glorieux

    desseins,

    s agitaient

    sous

    le

    crne

    de

    ce

    gamin

    des

    faubourgs, dont

    le

    gnie,

    obscurment,germait

    Carpeaux

    ne

    pouvait

    tre

    insensible,

    tarit

    de

    pa-

    tience

    et

    d ardeur.

    Un

    jour,

    il

    lui

    dit,

    avec sa

    brusquerie

    affectueuse

    :

    Je

    veux

    parler

    ton

    pre.

    Je l at-

    tends.

    Ds

    le

    lendemain, le

    papa

    Dalou

    se

    pr-

    sentait

    rue

    de l Abbaye.

    Il

    avait

    manqu

    son

    atelier,

    ce

    qui

    ne

    lui

    tait

    pas

    arriv

    depuis bien

    longtemps.

    Que

    comptez-vous

    faire

    de

    cet

    en-

    fant? demanda Carpeaux.

    Le

    brave

    gantier

    retournait,

    d un

    air

    embarrass,

    son

    chapeau entre

    ses doigts.

    Je

    me

    charge

    de

    lui, poursuivit

    le

    sculpteur.. Dans

    six mois,

    je

    saurai

    ce

    qu il

    a

    dans

    le

    ventre.

    En

    tout

    cas,

    je

    le

    mettrai

    en

    tat

    de

    se

    suffire.

    A

    dfaut

    de

    mieux,

    il

    sera

    ornemaniste

    ;

    il

    excutera

    des ptisseries,Et

    peut-tre

    tirerons-nous

    de lui

    autre

    chose. a

    vous

    va-t-il

    ?

    Le

    pre

    se

    confondit

    en

    remerciements.

    Une

    joie

    profonde

    rayonnait

    dans

    les yeux

    du fils.

    Le pre

    s en

    retourna

    gravement

    son

    labeur

    ;

    l

    fils demeura dans

    cet

    atelier

    poudreux qui

    tait

    pour

    lui

    le

    plusmagnifique

    des

    temples.

    Une

    troite intimit

    attacha

    dsormais

    le

    professeur

    au

    disciple.

    Non

    pas

    qu elle

    s pancht

    en

    de

    douces

    effusions.

    Car-

    peaux

    avait

    dans

    son

    coeur

    des

    trsors

    de

    tendresse,

    mais

    il

    les dissimulait

    sous

    des

    dehors abrupts

    et

    maussades,

    qui

    fai-

    saient

    mal

    augurer

    de

    son

    caractre,

    Il

    tait

    heurt,

    violent,

    rageur,

    avec

    de

    d-

    licieux

    retours

    de

    tendresse

    et

    d incroya-

    bles envolements de

    gaiet.

    Sa

    sculpture

    lui ressemble

    :

    elle

    est toute

    en

    saillies

    et

    en

    contrastes.

    La

    dlicatesse

    et

    la

    gran-

    deur s y

    unissent

    la

    fougue

    intemp-

    rante.

    Le

    jeune

    Dalou

    puisa dans

    son

    com-

    merce

    les ides

    et

    les

    rgles

    qui

    l ont

    tou-

    jours

    gouvern

    et,

    particulirement,

    cette

    indpendance d humeur

    qui

    l a

    port

    mdire de

    l art officiel

    et l a loign de

    l Institut. Les rvoltes

    intermittentes

    de

    Carpeaux

    avaient

    pass

    dans

    ses

    veines.

    Joignez-y

    l impression

    persistante

    de

    son

    milieu

    d origine,

    de

    cet

    intrieur probe

    et

    austre,

    o

    il

    s est d abord

    form,

    et

    vous

    connatrez

    les

    principaux

    ressorts

    de

    son

    me.

    Mon

    pre

    et

    ma

    mre,

    me

    rptait-il,

    n ont

    jamais

    su

    ce

    qu tait

    une

    dette. Ils

    n ont

    pas

    dpens

    plus qu ils

    ne

    gagnaient,

    et

    ils

    ont

    toujours pay

    leur

    terme.

    Tandis

    que

    Dalou

    me

    faisait

    ces

    naves

    confidences,

    une

    trange

    fiert vibrait

    dans

    sa

    voix.

    J ai

    compris

    pour

    quelles

    raisons

    il

    adorait le peupl

    et

    avait

    une

    foi

    si

    absoluedans

    ses

    destines

    :

    c est que,

    pendant

    les

    quinze

    premires

    annes de

    sa

    vie,

    il n avait

    voulu

    voir

    que

    ses

    ver-

    tus...

    ADOLPHE

    BRISSON.

    LES

    PETITES

    COMDIES

    LEUR MAITRE

    Chez le

    mastroquet du coin

    :

    LE

    GARON,

    au

    candidat, assis

    une

    table.

    Vous

    dsirez

    ?...

    LE

    CANDIDATAUX

    LECTIONS

    LEGISLATIVES.

    Qu est-ce que

    vous

    me

    conseillez,

    mon

    ami

    ?

    LE

    GAEON.

    Je

    vous

    conseillerai

    un

    el...

    par

    exemples.

    LE

    CANDIDAT.

    C est cela, donnez-moi

    un

    ml-cassis... (Baissant

    la

    voix.)

    Dites-moi...

    de

    quelle

    humeur

    est

    le

    patron,

    aujourd hui

    ?

    LE GARON.

    Hum

    E

    CANDIDAT.

    Mauvaise

    ?

    E

    GARON.

    C est le

    moment

    des

    lec-

    tions...

    Il

    ne

    sait plus

    o

    donner de la

    tte.

    Toute

    la journe,

    ce

    sont

    des candidats qui

    viennent

    le

    voir, des

    lecteurs qui viennent le

    consulter...

    Pendant

    la priode

    lectorale,

    le

    mastroquet

    est

    le matre,

    le

    personnage

    le

    plus influent...

    Alors, dame

    LE

    CANDIDAT.

    Savez-vous

    s il

    est

    bien

    dispos

    pour

    moi?

    LE GARON.

    Il

    se

    rserve...

    LE

    CANDIDAT,

    navr.

    Il

    vous

    l a dit ?

    LE GARON.

    Il hsite...

    il

    n a

    pas

    encore

    choisi

    son

    candidat... Tenez,

    regardez-le,

    au.

    comptoir,

    comme

    il

    a

    l air

    proccup...

    LE

    CANDIDAT,

    saluant

    respectueusement

    le

  • 7/25/2019 bpt6k5709821d

    7/18

    LES

    ANNALES POLITIQUES ET

    LITTERAIRES

    261

    y

    mastroquet

    qui

    le

    regarde

    peine.

    Il

    a

    d-

    la

    tte...

    je

    suis

    flamb...

    LE

    GARON.

    Mais non...

    mais

    non...

    ne

    vous

    dcouragez

    pas...

    Vous

    devriez prendre

    un

    mel,

    LE CANDIDAT.

    Oui...

    encore

    un

    et

    un

    autre

    que

    vous me

    ferez

    l amiti

    d

    boire...

    LE GARON.

    Deux

    mls, alors

    ?...

    Deux

    LE

    CANDIDAT,

    se

    penchant

    vers

    le

    garon.

    Un

    louis

    pour

    vous

    si le

    patron

    veut accepter

    quelque

    hose...

    LE

    GARON.

    Je

    vais

    voir...

    (Il

    s loigne.)

    LE

    CANDIDAT,

    seul.

    S il n accepte

    pas...

    mon

    lection

    est

    fichue....

    GARON,

    revenant,

    rayonnant.

    Sau-

    vs

    LE

    CANDIDAT.

    Ah

    LE

    GARON.

    Le

    patron

    a

    dit

    comme

    a

    de

    servir deux

    anisettes...

    il

    va

    venir

    boire

    avec

    VOUS.

    LE

    CANDIDAT. Je

    suis

    nomm

    LE

    GARON.

    Ah

    j ai

    eu

    du

    mal...

    LE

    CANDIDAT.

    Tenez,

    voil

    quarante

    francs...

    LE

    MASTROQUET,

    arrivant.

    Deux

    anisettes,

    et

    plusvite

    que a

    LE CANDIDAT,

    rouge

    de

    joie

    et

    d motion.

    Merci,

    mon

    chermatre, merci de

    cette

    bonne

    parole...

    (Il

    lui

    serre

    la

    main

    avec

    effusion.)

    CAPUS.

    Les

    Echos

    de

    Paris

    Le

    roi

    Franois d Assise, poux

    de

    l ex-

    reine

    d Espagne

    Isabelle II,

    vient de

    mourir.

    Il

    vivait isol

    dans

    sa

    proprit

    d Epinay,

    prs

    d Enghien,

    tandis

    que

    la reine,

    qui

    lui

    servait

    une

    pension

    viagre,

    continuait

    de

    mener une

    existence

    quasi-royale dans

    son

    palais

    de

    l avenue

    Klber,

    Paris.

    Rome

    n est

    pas

    dans Rame, elle est toute

    o

    je

    suis,

    pourrait-elle dire

    plaisamment

    ;

    et,

    de

    fait,

    le

    palais

    de

    Castille

    est

    vraiment devenu

    terre

    espagnole,

    lieu

    d amical asile

    et non

    d exil,

    grce

    la

    souveraine

    pour

    qui

    l amertume

    d un

    renoncement volontaire fut

    un

    fleuron

    de

    plus ajout

    la

    couronne

    qu elle

    fit, si

    ar-

    tiste, si

    librale

    et

    si

    gnreuse.

    Son

    avnement

    et

    son

    renoncement

    au

    qui

    furent

    bien

    les

    faits

    les plus parti-.

    y

    culiers

    de

    l histoire

    contemporaine

    de

    l Espa-

    gne,

    mettent

    en

    pleine lumire

    toute

    sa

    relle

    valeur

    et

    la

    fixent

    jamais

    inoubliable

    dans

    l me de

    l Espagne.

    Les

    causes

    de

    sa

    chute

    furent

    toutes

    poli-

    tiques

    et ne

    la privrent

    pas

    d une

    amiti,

    et

    c est

    ainsi qu on

    peutdire

    qu elle

    tait la

    seule

    souveraine

    qui

    n avait

    pas

    d ennemis.

    Sans

    rien abdiquer de

    son rang,

    ni

    de

    ses

    prrogatives,

    ne

    traduisant

    ses

    aspirations

    que

    juste

    ce

    qu il

    faut

    pour

    un

    trait

    d esprit,

    elle

    a su

    frayer

    avec tous

    les

    partis,

    sans

    s at-

    tacher

    aucun.

    Elle

    a

    protg

    ouvertement

    des

    rpublicains,

    tout

    en leur

    refusant

    l ac-

    cs

    au

    pouvoir, alors

    qu ils

    taient

    libraux

    ;

    souveraine

    toujours

    et la

    plus indulgente

    des

    femmes,

    on

    l voit

    mettre

    l aise

    ses

    servi-

    teurs

    les plus

    humbles.

    Elle

    embrasse

    ceux

    qu elle

    reoit,

    elle

    tutoie volontiers

    ses fami-

    liers

    et

    c est bien

    toujours

    la

    reine,

    accoutu-

    me,

    aux

    exubrantes

    ovations,

    qui

    riait

    au

    peupl qu elle

    saluait des

    yeux,

    de

    la tte, des

    paules,

    des

    bras,

    de

    la

    main,

    avec son

    mou-

    choir,

    son

    ombrelle

    ou

    son

    ventail.

    A

    Paris,

    elle

    frquentait

    le

    noble

    faubourg,

    o

    le

    grand

    respect

    qu on

    lui tmoignait

    ne

    l aveuglait

    pas au

    point de

    lui faire oublier

    se

    devait aussi

    ses

    cousins,

    les prin-

    ces d Orlans,

    et

    aussi,

    avant

    la loi d exil, au

    prince Napolon.

    Et

    ce

    fut elle,

    comme

    le

    rappelait

    son

    bio-

    graphe

    A.

    de Croze,

    la premire Majest qui

    consentit

    se

    plaire

    ;

    l Elyse

    ;

    aussi,

    M.

    Grvy

    tait-il

    pour

    elle

    plein de dfrences,

    et

    les

    visites,

    l occasion

    ou

    jour

    de l an,

    d-

    passaient

    avec

    Mme

    Grvy

    l honnte

    longueur

    prvue

    par

    le

    Protocole,

    car

    la

    simplicit

    de

    la

    reine

    et

    les

    qualits

    d intrieur de la

    prsi-

    dente

    permettaient

    d aborder

    tous

    les sujets.

    Nous donnons, dans

    le

    Supplment,

    le

    portrait

    du

    mlancolique

    Franois d Assise;

    le

    seul homme qui

    eut

    se

    plaindre d Isa-

    belle ...

    L exposition de cuisine vient de s ouvrir

    aux

    Tuileries.

    Le

    prsident.

    Marguery

    a

    souhait

    la bien-

    venue

    au

    prsident

    Loubet.

    Et

    le

    prsident

    Loubet

    a

    clbr,

    en mots

    onctueux,

    le mrite

    lgendaire des cuisiniers

    franais.

    A

    quoi tient

    cette supriorit

    traditionnelle

    de

    nos

    matres-queux?

    Nous

    n avons

    pas,

    en

    France,

    d enseignement thorique

    de

    la

    cui-

    sine;

    les

    rares

    coles

    qui furent fondes

    cet

    effet

    n ont

    mme

    point

    eu

    d heureuses

    desti-

    nes.

    Les matres de

    l art

    semblent,

    peu sou-

    cieux

    de crer des

    lves.

    Contrairement

    aux

    peintres,

    ils

    ne

    cherchent

    pas

    : revivre

    dans

    leurs

    disciples,

    et

    on ne

    citerait

    pas,

    dans

    tout

    Paris,

    un

    atelier de

    marmitons.

    Chaquegn-

    ration

    devrait donc

    emporter

    ses

    secrets

    dans

    la tombe.

    Au

    lieu de cela,

    nous

    voyons

    des

    promotions

    de plus

    en

    plus

    florissantes

    de

    cuisiniers

    mrites.

    Heureux

    pays

    omment,

    dans

    la

    pratique, l tranger

    re-

    crute-t-il chez

    nous

    ses

    Vatels ?

    Gnralement,

    en

    crivant

    la

    Socit

    des

    cuisiniers

    franais, dont

    le sige

    est

    rue

    de

    Turbigo et

    qui, forte de

    quatre

    mille

    mem-

    bres,

    fonctionne

    depuis

    1848

    avec

    un

    succs

    toujours

    croissant.

    La

    Socit

    prsente,

    par

    ordre

    d inscriptions,

    une

    liste

    de

    candidats,

    avec

    leurs

    antcdents

    et

    leurs

    tats

    de

    ser-

    vices;

    puis,

    les

    engagements

    se

    traitent de

    gr

    gr.

    C est

    l Angleterre

    et

    la

    Russie

    qui

    adressent

    le

    plus

    grand nombre de

    demandes.

    Le

    salaire

    mensuel d un

    cuisinier franais,

    en

    Angleterre,

    est

    de

    400

    francs

    au

    minimum

    et

    monte

    frquemment

    600

    et

    700

    francs.

    Encore

    ne

    s agit-il

    que

    d un

    bon

    ouvrier,

    et

    non

    d un

    artiste

    cot,

    possdant

    une

    rputa-

    tion

    individuelle. Le traitement

    lui-mme

    n est

    qu une

    part

    des

    bnfices

    du cuisinier.

    A

    sa

    solde s ajoutent

    les

    remises

    des

    fournis-

    seurs, un

    sou

    du

    franc,

    s levant

    15

    o

    20

    0/0

    du

    prix des

    denres,

    la libre disposition

    des

    restes

    de

    la

    table,

    etc.,

    etc.

    Ah

    on gagne

    puis dans

    ce

    mtier-l que dans

    la

    diplo-

    matie.

    Un

    exemple

    :

    Le

    chef

    des

    cuisines

    de

    M.

    de

    Rothschild,

    de

    Londres,

    a

    achet

    dernirement,

    Paris,

    un

    tablissement

    qu il

    a

    pay

    comptant

    5oo,ooo

    francs. Il

    avoue

    avoir,

    pendant

    toute

    la dure

    de

    son

    service, gagn annuellement

    de

    40

    50,000

    francs. Pourtant,

    il.

    conquit

    sa

    place

    la

    faveur

    de

    son

    honntet

    et

    grce

    aux

    prodigalits

    de

    son

    prdcesseur. Ce

    der-

    nier

    ralisait

    des

    bnfices

    bien

    autrement

    Considrables

    et

    possdait des

    quipages

    aussi

    correctement

    attels

    que

    ceux

    de son

    patron.

    Un

    jour,

    celui-ci

    le

    fit

    appeler

    et

    lui

    dit

    :

    Mon

    ami,

    je

    veux

    bien

    que

    vous

    fassiez

    vos

    petites

    affaires

    chez moi,

    mes moyens

    me

    le

    permettent

    ;

    mais

    je

    ne veux pas que

    vous

    me

    rendiez ridicule

    :

    vous

    aurez

    l obligeance

    de rendre

    votre

    tablier.

    Et,

    dans

    les

    vingt-quatre heures,

    il

    le

    con-

    gdia.

    est

    l,

    en

    effet,

    le

    revers

    de

    cette

    belle

    mdaille, qu on

    puisse tre

    renvoy

    du jour

    au

    lendemain.

    Les

    domestiques

    ont

    leurs

    huit

    jours

    ,

    les

    cuisiniers

    ne

    les

    ont

    pas;

    ainsi le

    veut

    l usage.

    Les

    rcentes

    ftes de

    Gavarni

    ont

    mis

    les

    caricaturistes

    la

    mode.

    L aimable

    et spirituel Albert

    Guillaume

    en

    a

    profit

    pour

    organiser

    dans les

    Galeries

    de

    Charpentier,

    104,

    boulevard

    Haussmann,

    une

    exposition

    de

    ses

    dessinshumoristiques.

    Nous

    lui

    avons

    demand

    quatre

    de

    ces

    aquarelles,

    que

    nous

    reproduisons

    dans

    notre

    Suppl-

    ment

    illustr. Ce

    sont

    des

    scnes militaires

    de

    vrais

    petits

    chets-d oeuvre

    d humour

    et de

    fantaisie.

    Guillaume

    excell

    en

    ce

    genre

    o

    sa

    verve,

    joyeuse

    et

    sans

    amertume,

    s panouit.

    Ce

    sont, d ailleurs,

    des pages

    dtaches

    de

    son

    album.

    t

    je

    ne

    sais

    ce

    qu il

    faut admirer

    le plus

    en elles

    ;

    de la

    grce

    du

    coup

    de

    plume

    ou

    de

    la

    finesse

    du

    coup

    de

    pinceau.

    Albert

    Guil-

    laume

    et

    Georges Courteline

    ont

    peu prs

    la

    mme

    manirede

    caractriser

    l arme fran-

    aise.

    Ils

    l aiment

    en

    la blaguant,

    ils la

    bla-

    guent

    en

    l aimant.

    Et,

    pour

    eux,

    les

    gestes

    du

    pousse-caillou

    sont

    une source

    de

    drleries

    perptuelles. M.

    Guillaume

    a

    relev

    quelques

    notes

    dans

    le

    cahier

    de

    son

    sergent

    et

    il

    les

    a

    illustres:

    Deux

    jours

    de

    consigne

    au

    soldat

    Lepin-

    tard

    pour

    avoir

    cri

    comme

    un

    ne

    en

    imi-

    tant

    la

    voix

    de

    son

    capitaine.

    Lanternois,

    deux

    jours

    de

    salle

    de

    police.

    A

    pris le

    pain

    d

    son

    camarade

    et

    est

    all

    manger

    ce

    dernier

    dans

    les.

    cabinets,

    sous

    prtexte

    que

    le sien

    ne

    lui tait

    pas

    suffi-

    sant.

    Quatre

    jours,

    a;

    salu

    cet

    officier

    avec sa

    pipe

    dans

    ses

    dents.

    e

    sais bien

    ...

    On

    peut

    en

    inventer,

    comme

    cela, la

    douzaine.

    Mais

    M. Guillaume

    a

    cueilli

    des

    mots

    plus profonds.

    Par

    exemple,

    cette

    rflexion

    de

    l adjudant

    qui

    rappelle

    un

    bleu

    au

    sentiment

    du

    res-

    pect:

    D abord,

    on

    doit se taire

    quand

    on

    parle un suprieur.

    Et

    cette

    dfinition

    du

    caporal

    charg

    d ap-

    prendre

    son

    escouade

    la

    thorie

    :

    Nous

    allons

    faire le

    mouvement

    de

    marquer

    le

    pas.

    C est

    comme

    si,

    une

    supposi-

    tion,

    on

    marcherait

    en

    restant

    sur

    place,

    sans

    bouger,

    mais

    tout

    en

    faisantmarcher

    lesjam-

    bes

    nanmoins.

    Je

    vous

    dis qu Albert Guillaume

    est

    un des

    hommes

    les plus

    gais

    de

    Paris...

    Il

    croque

    aussi

    gentiment

    les

    petites

    femmes

    que

    les

    militaires.

    Allez

    feuilleter

    ses

    dessins

    chez

    Charpentier.

    La

    vue

    n en

    cote

    rien

    ...

    Dans

    la bote des

    Annales,

    nous

    trouvons

    cette

    amusante

    fantaisie

    propos

    de la

    reprise

    de

    Cyrano

    de

    Bergerac:

    Rostand, tes

    Cadets de Gascogne

    Sont

    bellement pharamineux

    ;

    Ils

    sontardents

    la

    besogne,

    Rostand,

    tes

    Cadets de

    Gascogne.

    Qu on

    aime, qu on

    boive

    ou

    se

    cogne,

    Grandiloquents

    et valeureux,

    Rostand,

    tes Cadets de Gascogne

    Sont

    bellement pharamineux.

    Le

    joyeux verbe

    de

    Gascogne

    Est

    chaud,

    vibrant

    et

    gnreux

    ;

    l

    scintlle,

    il

    abonde,

    il

    rogne,

    Le joyeux varbe deGascogne.

    Le

    rire

    du

    Cadet,

    ivrogne

    Mme,

    clate

    en

    traits

    valeureux

    ;

    Le

    joyeux

    verbe

    de

    Gascogne

    Est

    chaud,

    vibrant

    et

    gnreux.

    Rostand,

    le

    chemin de Gascogne

    ...

    Qui

    mne

    Rome

    les

    musards,

    Arrive

    l Htel

    de Bourgogne,

    Bostand,

    le chemin

    de

    Gascogne,

    Et,

    s loignantde

    la

    Dordogne,

    Par la

    grand route

    des

    hasards,

    Rostand,

    le

    chemin

    de

    Gascogne

    T aura

    conduit...

    au

    font des

    Arts.

    CYRANO (de

    Paris).

    Pas

    mal

    trouss,

    le

    triolet, pour

    un

    triolet

    d amateur

    Toujours

    les

    candidats fantaisistes.

    Il

    n y

    en

    a pas

    qu enprovince.

    J en

    sais plus

    d un

    Paris.

    e

    candidat

    photographe,

    par

    exemple,

    qui

    opre

    sur

    la rive

    gauche.

    Il

    a

    imagin de

    tirer

    ceux

    qui

    se mon-

    trent ses

    partisans

    rsolus.

    Ils

    vont

    poser

    et,

    quelques

    jours

    aprs,

  • 7/25/2019 bpt6k5709821d

    8/18

    262

    LES

    ANNALES

    POLITIQUES ET

    LITTRAIRES

    leur

    candidat

    leur

    offre

    deux

    ou

    trois

    preuves,

    pas

    davantage.

    Seulement,

    comme

    ils

    sont

    assez

    ressem-

    blants,

    comme

    les

    prix

    du

    photographe

    ne

    sont

    pas

    trs levs, les

    lecteurs

    lui

    com-

    mandent

    qui

    une

    demi-douzaine,

    qui

    une

    douzaine

    de portraits-cartes,

    qu il

    ne

    leur

    offre

    pas,

    par

    exemple. Et le

    tour

    est

    jou.

    La

    priode lectorale

    aura

    t,

    pour ce

    can-

    didat-l,

    une

    srie d heureuses

    preuves.

    Nul

    plus

    que

    lui

    ne

    souhaite

    un

    second

    tour

    de

    scrutin.

    Donc,

    sur

    le champ

    de

    la bataille

    lectorale

    gisent

    de nombreux

    laisss-pour-compte

    ,

    rvrence parler.

    Voici quelques

    noms

    de

    quelques

    appels

    clbres qui,

    eux non

    plus,

    ne

    furent

    pas

    lus

    :

    Il

    y

    eut

    jadis M.

    Ingres lui-mme

    un

    vio-

    lon

    Puis

    MM.

    J.

    Claretie,

    qui

    se

    prsenta

    en

    871

    dans

    le dpartementde

    la Haute-Vienne;

    Louis Asseline,

    Louis Ulbach,

    Gilbert-Mar-

    tin,

    le

    caricaturiste

    ;

    Ernest

    Renan,

    qui

    se

    prsenta

    aux

    lections gnrales

    de 1869

    dans

    un

    arrondissement

    de Seine-et-Marne.

    En

    1848,

    s taient

    ports

    dans

    diffrents

    dpartements,

    comme

    reprsentants

    l As-

    semble nationale

    :

    L artiste

    dramatique

    Bocage,

    l ancien pu-

    bliciste Cauchois Lemaire,

    l architecte

    Csar

    Daly, le sculpteur

    Etex, le peintre

    Jeamon,

    l historien Philippe

    Lebas,

    le

    critique

    d art

    Thophile

    Tor,

    le pote

    Lefvre-Deumier,

    le

    docteur

    Giraudeau

    Saint-Gervais

    ;

    Alphonse

    Karr,

    qui

    ne

    faillira

    pas

    au

    mandat

    dont il

    comprend

    la gravit,

    mais

    qui

    n osera

    d au-

    cune

    manoeuvre,

    mme laplus

    innocente,

    pour

    se

    faire lire

    ;

    Louis Ulbach,

    le

    romancier

    Paul

    Fval,

    le bibliophile

    Jacob.

    En

    1885,

    M.

    Ferdinand

    Dugu,

    l auteur

    des

    Pirates

    de la

    Savane,

    se porta

    candidat

    au

    Snat.

    Enfin,

    un

    artiste

    lyrique

    connu,

    Char-

    les Bataille,

    de l Opra,

    qui cra

    le Val d An-

    dorre

    et

    l toile

    du

    Nord

    et

    qu on

    porta,

    en

    1871,

    sur

    la liste

    de l Union

    dmocratique,

    aux

    lections lgislatives

    de

    la

    Loire-Inf-

    rieure,

    y

    obtint

    moins de

    succs

    qu au th-

    tre.

    X

    Les peintres

    sont

    l ordre

    du jour.

    Je

    rap-

    pelais,

    tout

    l heure,

    qu aux

    lections

    de

    1848

    Fauteur de la Source fut

    candidat...

    malgr

    lui,

    comme en

    fait

    foi

    ce

    passage

    d une

    lettre

    son

    ami; le

    graveur

    Paulin

    :

    Effectivement,

    ce

    n est

    pas sans

    surprise

    que

    je

    me

    vois

    dsign

    comme

    candidat l Assemble

    constituante;

    mais

    tout

    en

    tant

    on

    ne

    peut

    plus

    flatt

    de

    cette

    distinction,

    je

    ne

    crois

    pas

    pouvoir

    l accepter, ni,

    par

    consquent,

    devoir

    me

    prsen-

    ter

    la runion de la

    Socit

    des

    Artistes

    indus-

    triels,

    attendu

    que

    moi, simple

    artiste,

    quoique

    tout

    dvou

    la

    Rpublique,

    je

    n ai

    nullement

    l habitude de

    parler

    en

    public,

    que

    je

    suis

    trs

    peu

    vers dans les choses

    de haute

    lgislation,

    que

    j ai

    l ouie fort dure,

    et

    que,

    de

    plus,

    mes

    oc-

    cupations

    d art

    et

    mes

    devoirs

    de professeur

    ne

    me

    laisseraient

    pas

    le

    temps

    de

    satisfaire

    un

    tmoignage

    aussi

    clatant

    de

    la

    confiance de

    mes

    concitoyens.

    Dans l intrt

    de

    l art,

    Ingres

    a

    bien

    fait

    de

    ne

    pas

    dlaisser

    la

    palette...

    et

    le violon.

    C et

    t de l Ingr...

    atitude.

    Nous

    donnons

    plus loin

    les

    derniers

    r-

    sultats

    du

    Concours

    de Printemps

    :

    le Conte

    d une grand mre

    ses

    pe