Boileau, Art poétique, 1674

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Boileau, Nicolas (1636-1711). Art poétique de Boileau. 1881. 1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de la BnF.Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 : *La réutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la législation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source. *La réutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par réutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produits élaborés ou de fourniture de service. Cliquer ici pour accéder aux tarifs et à la licence 2/ Les contenus de Gallica sont la propriété de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. 3/ Quelques contenus sont soumis à un régime de réutilisation particulier. Il s'agit : *des reproductions de documents protégés par un droit d'auteur appartenant à un tiers. Ces documents ne peuvent être réutilisés, sauf dans le cadre de la copie privée, sans l'autorisation préalable du titulaire des droits. *des reproductions de documents conservés dans les bibliothèques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sont signalés par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothèque municipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invité à s'informer auprès de ces bibliothèques de leurs conditions de réutilisation. 4/ Gallica constitue une base de données, dont la BnF est le producteur, protégée au sens des articles L341-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. 5/ Les présentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont régies par la loi française. En cas de réutilisation prévue dans un autre pays, il appartient à chaque utilisateur de vérifier la conformité de son projet avec le droit de ce pays. 6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur, notamment en matière de propriété intellectuelle. En cas de non respect de ces dispositions, il est notamment passible d'une amende prévue par la loi du 17 juillet 1978. 7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute définition, contacter [email protected].

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Œuvre commentée de Nicolas Boileau

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Boileau, Nicolas (1636-1711). Art poétique de Boileau. 1881.

1/ Les contenus accessibles sur le site Gallica sont pour la plupart des reproductions numériques d'oeuvres tombées dans le domaine public provenant des collections de laBnF.Leur réutilisation s'inscrit dans le cadre de la loi n°78-753 du 17 juillet 1978 :  *La réutilisation non commerciale de ces contenus est libre et gratuite dans le respect de la législation en vigueur et notamment du maintien de la mention de source.  *La réutilisation commerciale de ces contenus est payante et fait l'objet d'une licence. Est entendue par réutilisation commerciale la revente de contenus sous forme de produitsélaborés ou de fourniture de service. Cliquer ici pour accéder aux tarifs et à la licence 2/ Les contenus de Gallica sont la propriété de la BnF au sens de l'article L.2112-1 du code général de la propriété des personnes publiques. 3/ Quelques contenus sont soumis à un régime de réutilisation particulier. Il s'agit :  *des reproductions de documents protégés par un droit d'auteur appartenant à un tiers. Ces documents ne peuvent être réutilisés, sauf dans le cadre de la copie privée, sansl'autorisation préalable du titulaire des droits.  *des reproductions de documents conservés dans les bibliothèques ou autres institutions partenaires. Ceux-ci sont signalés par la mention Source gallica.BnF.fr / Bibliothèquemunicipale de ... (ou autre partenaire). L'utilisateur est invité à s'informer auprès de ces bibliothèques de leurs conditions de réutilisation. 4/ Gallica constitue une base de données, dont la BnF est le producteur, protégée au sens des articles L341-1 et suivants du code de la propriété intellectuelle. 5/ Les présentes conditions d'utilisation des contenus de Gallica sont régies par la loi française. En cas de réutilisation prévue dans un autre pays, il appartient à chaque utilisateurde vérifier la conformité de son projet avec le droit de ce pays. 6/ L'utilisateur s'engage à respecter les présentes conditions d'utilisation ainsi que la législation en vigueur, notamment en matière de propriété intellectuelle. En cas de nonrespect de ces dispositions, il est notamment passible d'une amende prévue par la loi du 17 juillet 1978. 7/ Pour obtenir un document de Gallica en haute définition, contacter [email protected].

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BOILEAU

ART

POÉTIQUE

HACHETTK ET G"

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ART POÉTIQUE

DE

BOILEAU

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PARIS.—IMPRIMERIEEMILEMARTINET,RUEMIGNON,2

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BOILEAU

ART POÉTIQUE

HPVg^PE AVECDES NOTES

Ancienprofesseurà laFacultédeslettresdeParis

PARIS

LIBRAIRIE HACHETTE ET C*

79, BOULEVARDSAINT-GERMAIN,79

1881

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CHANT III1

Il n'est pointde serpentni de monstreodieuxQui,par l'art imité, ne puisseplaireauxyeux2:D'un pinceaudélicatl'artificeagréableDuplus affreuxobjet fait un objetaimable.Ainsi,pour nouscharmer,la tragédieen pleurs 5D'fEdipetoutsanglantfit parler les douleurs3,D'Oresteparricideexprimales alarmes4Et, pour nousdivertir, nousarrachades larmes.

Vousdoncqui, d'unbeaufeu pour le théâtre épris,Venezen vers pompeuxy disputerle prix, 10

1.Cechant,quitraitedela tragédie,del'épopéeet de la comé-die,le plusétenduet leplusimportantdupocme,étincelledebeau-tés. L'ordresuivin'estpas rigoureusementméthodique,puisquel'épopéea précédéhistoriquementle genredramatique,et quelesdeuxformesde cegenre,la tragédieet la comédie,devaientêtrejuxtaposées.Boileaua mieuxaiméêtre moinsdidactiqueet pluspoétique: trouvantdemeilleurestransitionsetplusdevariétédanstamarchequ'ilapréférée,onpeut dire qu'il sest décidéenpoèteet en hommedegoût.Commedansleschantsquiprécèdent,l'his-toirelittéraireet lasalifesemêlentauxpréceptes,et lesdéfinitionsydeviennentdespeintureset presquedespersonnages.

2. L'imitationtidèlene suffiraitpaspourproduireceprodige: ilfautencorece queBoileauappelleVarlificeagréabledupinceau,c'est-à-direla puissancede l'expressionet le choixdes traits.C'estainsiqu'unpersonnagenaturellementodieuxpeut devenirdrama-tiquementbeau.L'effetle plussurprenantdecettemagiedel'artestpeut-êtrela Cléopatrede la Rodogunede Corneille.Aristole,quifournitcetteremarqueà Boileau,paraîttrop exclusifenfaveurdel'imitation: « Cequiestimité,dit-il,plaîttoujours.Onenpeutju-gerparlesproductionsdesarts: des objetsque,dansla réalité,nousverrionsavecpeine,parexemplelesbêteslesplushideuses,lescadavres,nousen contemplonsavecplaisirlesreprésentationslesplusexactes.»Trad.deM.Egger,chapitreiv.

3.Dansl'OEdiperoi, de Sophocle,le (ilsde Laïus,aprèss'êtrecrevéet arrachélesyeux,reparaittoutsanglantdevantlesspecta-teurseffrayés,et charmésdu spectaclede sesdouleurset de l'élo-quencedesesplaintes.

4. Eschyle,SophocleetEuiipldeonttoustroismisenscèneOresteparricide,et ontsu lérendreintéressant.

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26 BOILEAU.

Voulez-voussur la scène étaler des ouvragesOù tout Paris en foule apporte ses suffrages,Et qui, toujoursplusbeaux,plus ils sont regardés,Soientau bout de vingt ans encor redemandés1,Quedans tous vosdiscoursla passionémue 15Aillechercher le coeur, l'échaufféet le remue*.Si d'un beau mouvementl'agréablefureurSouventne nousremplit d'une douceterreur,Ou n'excileen notre âme une pitié charmante3,En vain vous étalezune scènesavante: 20Vosfroids raisonnementsne feront qu'attiédirUn spectateur toujoursparesseuxd'applaudir,Et qui, des vainsefforts de votre rhétoriqueJustement fatigué, s'endort, on vouscrilique4.Le secretest d'abordde plaire et de toucher : 25Inventezdes ressorts qui puissent m'attacher8.

Quedès lespremiers vers l'actionpréparéeSans peine du sujet m'aplanissel'entrée.

1. Horace,Artpoétique,vers190:Fabula,quoeposcivult,et speclatareponi.

Idem,ibid.,vers565:Hoecdeciesrepelitaplacebit.

Ceversest imitélibrementdel'épît'reî, livreII, vers211Poctameumquipeclusinaniterangit,Irritât,mulcet,falsisterroribusimplet,Utmagus.

3. Boileaureconnaît,commeAristote,que la terreur et la pitiésontles ressortsde la tragédie.Il ajouteque la terreurdoitêtredouceet la pitiécharmante.Il entendsans,douteque la terreuretla pitié,ainsimodifiées,sontpurgées,et alorsil n'entrepasdanslesensdu philosophegrec,qui, en disant,danssa célèbredéfinition,« quela tragédie,parle moyende la terreuret de la pitié,purgeles passionsdu mêmegenre,» entend,à tort ou à raison,quils'opèreréellementune purgation,une évacuationmoralepar oùl'âmeest soulagée.Aristoteparleen médecinplutôt qu'en philo-sophe.

4. Cettecritiquéporte sur les longueset subtilesdissertations,trop fréquenteschezCorneille,surtoutdanslesoeuvresdesa vieil-lesse.

5. SiBoileauentendparle premierdecesdeuxver»les moeursetles caractèresqui, eneffet,peuventseulsplaireet toucher,et quele second,quiindiqueclairementl'action,soit subordonnéau pre-mier,il a raisoncontreAristote,quiprétendquela tragédie,fondéesurl'action,peutse passerde moeurs.L'expérienceprouve,eneffet,que quelquedramatiqueque soit1la fabled'unetragédie,elle netouchepassilespersonnagesne sontpasintéressantspar lesmoeurset le caractère.—Il y a dansle secondversunesorted'incohérenceassezdifficileà justifier.Desressortsn'attachent.poml.

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ART POÉTIQUE, CHANTIII. 27

le me ris d'un auteur qui, lent à s'exprimer,Dece qu'il veut d'abordne sait pasm'informer, 30Et qui, débrouillantmal une pénibleintrigue,D'un divertissementme fait une fatigue*.J'aimeraismieux encor qu'il déclinât son nom,Et dît : Je suis Oreste,ou bien Agamemnon2,Qued'aller, par un tas de confusesmerveilles, 35Sans rien dire à l'esprit, étourdir les oreilles:Le sujet n'est jamais asseztôt expliqué.

Quele lieu de la scèney soit fixeet marqué.Unrimeur, sans péril, delà les PyrénéesSur la scèneen un jour renfermedesannées: 40Là souventle hérosd'un spectaclegrossier,Enfantau premier acte, est barbonau dernier5.Maisnous, que la raison à ses règles engage,Nousvoulonsqu'avecart l'actionse ménage:Qu'enun lieu, qu'en un jour, un seul faitaccompli 45Tiennejusqu'à la fin le théâtre rempli4.

Jamaisau spectateurn'offrezrien d'incroyable8:

1. Ceverss'appliqueà latragédied'Héraclius,puissantecombinai-sondugéniedeCorneille,maissicompliquée,quel'attentionlaplussoutenuepeutà peinesuivrelesfilsdel'intrigue.

2. Plusieurstragédiesgrecquesdébutentaveccettesimplicité,no-tammentVHècubed'Euripide,oùl'ombredePolydore,(ilsdePriam,égorgéen Thracepar le traîtrePolymnestor,entre en scèneendi-santexpressément: «Je suisPolydore!»

5. Lepoèteexagèreles libertésdu théâtreespagnol,qui d'ail-îeurs sont fort grandes.Lopede Vegaet CaMcrondisposentdutempset de l'espaceà leurgré, maisilssaventy jeter une actionintéressante,denoblessentimentset despersonnagesdramatiques.

4. Onadmireavecraisoncetteexpressionsi préciseet si élégantedela règledestroisunités.Cetterègle,fortdébattue,et définitive-mentétabliesur le théâtrefrançaisau tempsdeCorneille,n'avaitpaslamêmerigueurchezlesGrecs.Aristoteprescritl'unitéd'action,ouautrementl'unitéd'âme,danstouteoeuvrédramatique,quiest,selonsonexpression,un êtrevivant,Çwôvzi.Orl'unitéest l'essencemêmede la vieintelligente.Surcepoint,il n'ya pasdecontroverseraisonnable.Aristoterecommande,en outre,unejusteétendue,etparlà il limiteimplicitementla duréedel'actionet lelieuquidoitla circonscrire;maisil ne déterminepascellelimite.Dansla prati-que,elleétaitfortétroitechezlesGrecs,parla présenceduchoeur,quifixaitle lieu,et par la continuitéde l'action,qui précisaitladurée.Chezles modernes,la suppressiondu choeur,l'interruptionduspectaclecoupéparl'intervalledesactes,permettentde changerle lieude la scèneet d'étendrela durée.L'artdu poêle,dansl'inté-rêt de l'action,seradene pastropdépayserle spectateur,et denepas luiimposerde troplongsni de tropbrusquesvoyagesà traversle temps.Larègleabsoluedesvingt-quatreheureset l'unitédeplacesontdela superstition.

5. Horace,Artpoétique,vers358:Fictavoluptaliscausasiiilproximaveris.

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28 BOILEAU.

Le vrai peut quelquefoisn'être pas vraisemblable*.Unemerveilleabsurdeest pourmoi sans appas:L'espritn'est point ému de ce qu'il ne croit pass. 50Cequ'onne doitpointvoir, qu'un récit nous l'expose:Lesyeuxen le voyantsaisiraientmieux la chose,Maisil est des objets que l'art judicieuxDoit offrir à l'oreille et reculer des yeux3.

Quele trouble, toujourscroissantde scèneen scène, 55A son comblearrivé se débrouillesans peine.L'espritne se sent point plus vivementfrappéQuelorsqu'enun sujet d intrigue enveloppé,D'un secret tout à coupla vérité connueChangetout, donneà tout une laceimprévue4. 60

La tragédie, informe et grossièreen naissant8,N'était qu'un simplechoeur,où chacun, en dansantEt du dieu des raisins entonnant les louanges,S'efforçaitd'attirer de fertiles vendanges.Là, le vin et la joie éveillant les esprits, 65Da plus habile chantre un bouc était le prix6.

i. L'invraisemblancedu vrain'étaitpas pour CorneilleUnmotifd'exclusion: «Lorsquelesactionssonttraies,dit-il,il ne fautpointsemettreen peinede lavraisemblance; ellesn'ont pas besoindesonsecours.Toutce quis'estfait manifestements'estpurfaire,ditAristote,parceque,s'il ne s'étaitpufaire,il ne pèseraitpasfait.»Celaestbonpourl'histoirer maisdansle drame,rihvraisernblaljlcvrai n'en a pas moinslés inconvénientsde l'invraisemblance;desorte que le préceptede Boileauest plus sûr que la pratiquedeCorneille.

2. Hofâce,Art poétique:Qiiôdcumqtieostendismihisic,incredufusodi.

3. Horace,Artpoétique,vers180;SegniusirritantanimosdemissaperaurentQuamquxsuntoculissubjectandelibus,et quailpsesibitraditspectator.NontamenintusDignafjëriprofnesinscenam: multaquetoilesExôcuhsqiuemoxnarretfacundiaprxscns.

i. Cedernierversdéfinitpoétiquementla péripétie,oupassagedubienau mal,et réciproquement,dansla situationdéspersonnages.Laprogressionde l'intérêt,règlefondamentale,est aussifortbienexprimée:

.Quele troubletoujourscroissantdescèneenscène.5. Boileaumêlaavecbeaucoupd'art l'histoirelittéraireauxpré-

ceptes.Aprèsavoirdonnéles règlesgénéralesdugenre,ilonesquissel'origineet lesdestinées-enGrèceet enFrance,et delà ilpasseà unautreordre de préceptesmoinsétendus.Noslecteurstrouveront,dansles bellesÉtudesde M.Patin,sur le»Tragiquesgrecs(i vo-lumes),l'histoirecomplètedela tragédie.

Horace,Artpoétique,vers220:Carminéquitragicovilemcertavitobhucum.

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ART POETIQUE, CHANTIII. 29

Thespisfut le premierqui, barbouillédelie,Promenapar les bourgscette heureusefolieEt, d'acteursmal ornéschargeantun tombereau,Amusalespassantsd'un spectaclenouveau1. 10

Eschyledansle choeurjeta lespersonnages,D'unmasqueplus honnêtehabilla les visages,Sur les ais d'un théâtre en publicexhausse,Fil paraître l'acteur d'un brodequinchaussé2.

Sophocleenfin,donnantl'essorà son génie3, 75

1. Thespisvivaitau sixièmesiècleavantl'èrechrétienne.Horaceadoptelamêmetradition,Artpoétique,vers275:

Ignotuintr.'igicoegenusinvenisscCamoeneBDicilur,et plauslrisvexissepoeinalaThespisQuoeMuèrentugcrcntqueperunctiKccibusora.

«liais,ditM.Patin(tome1,page20),ilne fautpascroiretroplégère-mentà toutcequ'aditHprace,surlafoidequelquesscoliasles,desontombereau,de sesacteursmalornéset barbouillésde lie,decetteheureusefoliequ'ilpromenaitpar lesbourgs,etqu'onareprésentéecommesigrossièreet si barbare: c'estplutôtlà l'histoiredeSusa-rionquel'histoiredeThespis.»

2. Eschyle(525avantJ.-C.477),néà Eleusis,mortenSicile,estlevraipèredelatragédie,Thespisn'enavaitdonnéque l'ébauche.IciencoreBoileausuitlestracesd'Horace,Artpoétique,vers278:

Poslluino,personaipallaïquerepertorhonestaï,jEscliylus.etmodicisinstravitpulpiialiguip.Etdocuitmagmimqueloquinitiquecotliurno.

Habillerlesvisagesn'estpasuneexpressionvulgaire.Il fallaitunecertainehardiessepourla trouveret pourla garder.Maislushar-diessesdeshommesdegoûtsontsi heureuses,qu'àpeineonlesre-marque: aussibienn'ont-ilspasl'intentiondelesfaireremarquer.Onne voitpaspourquoilloiloaudonneunbrodequin{soccus)auxacteursd'Eschyle,quandHoraceleurattribuele cothurne,quiest véritable-mentlachaussuretragique.Lebrodequinappartientà la comédie:

L'aimablecomédieaveclui(Molière)terrasséeEnvaind'uncoupsirudeespérarevenir,Etsursesbrodequinsneputplussetenir.

C'estRoi|cauquile dit, épîtreYH,vers56.3. Sophocle,né au débutduV siècleavantJ.-C,vers495,vécut

environquatre-vingt-dixqns,et, plusheureuxqu'Eschyle,conservajusqu'àla lin de saviela force,desongénieetl'habitudedevaincre.Onsaitcommentil confonditl'ingratitudedosesfils,onlisantdevantses juge?le premierchantdu choeurA'OEdipeà Çolone,Cepoèteprivilégiéportala tragédiegrecqueà la perfection,et soi)QÈdiperoi est encorelechef-d'oeuvredu théâtre.Euripidea étéplusloindansle pathétique; maispourlosautrespartiesde l'artdramatiqueil estrestébienen,deçàneSophocle.C'estpourcelasansdoutequeBoileaune va ppsjusqu'àluidanscellerapideesquissede l'histoiredela tragédie.O'uncit regrettapasmoinscettoomission.AvantSo-phocle,Eschyleavaitintéressélechoeurdans (otitel'Action! l'élogeestd»ttcmat«twttliliesmrt trop raêotett*t«tttttttoIftWMtes»

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30 BOILEAU.

Accrutencor la pompe,augmental'harmonie,Intéressa le choeurdans toute l'action,Desvers trop raboteuxpolit l'expression,Lui donnachez les Grecscettehauteur divineOùjamais n'atteignit la faiblesselatine. 80

Cheznosdévotsaïeuxle théâtre abhorréFut longtempsdans la Franceun plaisir ignoré1.Depèlerins, dit-on, une troupe grossièreEn publicà Paris y monlala première,Et, sottementzéléeen sa simplicité, 85Joua les Saints, la Viergeet Dieupar piété*.Le savoir, à la fin dissipantl'ignorance, ;Fit voir de ce projet la dévoteimprudence3.On chassaces docteursprêchantsansmission;Onvit renaître Hector,Andromaque,Ilion. 90Seulementles acteurs laissantle masqueantique,Le violontint lieude choeuret de musique4.

Bientôtl'amour, fertile en tendres sentiments,S'emparadu théâtre ainsi que des romans.De cette passionla sensiblepeinture 95Est pour aller au coeurla route la plus sûre.Peignezdonc,j'y consens,les héros amoureux;Maisne m'en formezpas des bergers doucereux:

l'enconlred'Eschyle,moinspur que Sophocle,il estvrai,maisplusénergique.

1. M.MagninavaitpromisdedémontrerlecontrairedanssesOri-ginesdu théâtremoderne,ouvrageimportant,dont le premieivo-lumeseula paru.Onsaitdéjàqu'avantlesconfrèresdela Passion,des essaisdramatiquesavaientété tentésen Franceet dansleségliseset dansleschâteaux.Cependantil est vraide direquecelteconfrérie,autoriséeà la findu xiv' siècle,a donnél'essorau genredramatique,longtemps.négligé.

2. L'observationestjuste,et onpeutajouterqu'ellenesentpointle libertinage.Lapiétédesconfrèresdela Passionétaitsincère; leurintentionallaità intéresseretà instruirele peuple.Lesmystères,lesmiraclesqu'ilsreprésentaientétaientun courspopulaired'histoiresainte,et le>moralitésdeschapitresde moraleen action.L'Eglisefavorisacesreprésentations,et vintsouventen aideauxacteurspourlescostumes; elleréglaitaussil'heuredesofficesde manièreà per-mettreauxfidèlesdesuivrelesreprésentationsthéâtrales.

3. L'ordonnancede15-18,quiproscritlesmystères,est uneconsé-quencedescontroversesreligieuses.Cen'est pasle savoir, maisl'hérésie,quia dévoilé imprudencede ce projet,longtempssuivi,sanspéril,en présencede l'orthodoxiegénérale.

4. Ceviolonraclédans les entr'actesest un maigreaccompagne-ment,etsic'estunvestigeduchoeurantique,il estbieneffacé.Racinel'a l'aitreparaîtreavectoutesonimportancemoraleet religieusedansEsihereiAthalie.M,CasimirDelavigneluia aussidonnéplacedansle Paria.

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ART POÉTIQUE, CHANTIII. 31

Qu'Achilleaime autrementque ThyvsisetPhilône;N'allezpas d'un Cyrusnous faire un Arlamène1; 100Et que l'amour, souventde remordscombattu,Paraisseune faiblesseet non une vertu2.

Deshérosde romanfuyezlespetitesses:Toutefoisaux grandscoeursdonnezquelquesfaiblesses.Achilledéplairaitmoinsbouillantet moinsprompt: 105J'aime à lui voir verserdes pleurs pour un affront.A ces petits défautsmarquésdans sa peinture3,L'espritavecplaisirreconnaîtla nature.Qu'il soit sur ce modèleen vosécrits tracé :QuAgamemnonsoitlier, superbe,intéressé; 110Quepour ses dieuxÉnéeait un respect austère.Conservezà chacunson propre caractère.

i, Arlamèneest le nomromanesquedeCyrusdansl'ouvragedemademoiselledeScudéry.Boileaun'oseblâmerce travestissementquedansla iragédie,tantla.voguedesromanset le goûtdusièclede-mandaientencoredeménagements.

c2.Toutce passageesten faveurde RacinecontreCorneille.Cor-neilletraitaitl'amourcommeunevertu,ou.plutôt,dansl'âmede seshéroïnes,il subordonnaiLcettepassionà un desseinhéroïque.Cesamoursdecommande,silégèrementportés,nesontpasdramatiques;maisaussiCorneillen'en fait-ilpointle ressortde sestragédies.Ilcherchemoinsl'émotionque l'admiration: il représentela forcederameet nonsesfaiblesses.Lesfaiblessescombattuespar le remordssontmoralescommele spectaclede la vieréelle; ellesattachentetellesinstruisentsanscorrompre.Racinel'entendet lepratiqueainsi;maisCorneillenesecontentepasdene pointcorrompre,il veuten-nobliret fortifierl'âme;et quandil yajoutel'intérêt,il est incom-parable.

3. Lespetitsdéfautsnesontpaslefaitdel'Achillehomérique; il estprobablenueBoileausongeà l'AchillehumaniséparRacine.DelilleacrayonnéènerRiquement,danslepremierchantdesonpoèmedeVlma-ginalion,l'Achilled'Homère,et caractérisél'effetproduitparcemé-langedegrandesvertus,etde grandsdéfauts:

Maisqu'onmemontreAchille,Achilleâmedefeu,Dontlarageestd'untigreettesvertusd'undieu;D'amitié,defureurhéroïqueassemblage,Sentantprofondémentlebienfaitet 1outrage.Tonnantdanslescombats,cl la lyreà la main.Seulauborddelamer,consolantsonchagrin;l'ourapaiserPatrocleensademeurenombre,Tourmentantuncadavreetpunissantuneombre.EtquandPriamd'Hectorvientchercherlesdébris,Respectantunvieuxpèreet luirendantsonfils;Cegrandtableaum'étonne,et monâmetremblanteFrémittoutà lafoisdejoieetd'épouvante.

Voilàun beaucommentairedecesversd'Horace,Artpoétique,vers120,faiblementimitésparBoileau:

Honoratumsi fortereponisAchïIIem,Impiger,iracundus,dnexorabilis,acer,Jur*negetsibinala; nilûlnonarrogetarmû.

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32 BOILEAD.

Dessiècles,des pays,étudiezles moeurs:Les climatsfontsouventles diverseshumeurs.

Gardezdoncde donner,ainsi que dansClélie, 113L'air ni l'esprit françaisà l'antique Italie,Et, sousdesnomsromainsfaisantnoire portrait,Peindre Catongalant et Brulus dameret1.Dansun roman frivoleaisémenttout s'excuse4,C'estassezqu'en courant la fictionamuse; 120Tropde rigueur alorsserait hors de saisonMaisla scènedemandeune exacteraison;L'étroitebienséancey veut être gardée.

D'un nouveaupersonnageinventez-vousl'idée,Qu'en tout avecsoi-mêmeil se monlred'accord 125Et qu'il soitjusqu'au bout tel qu'on l'a vu d'abord*.

Souvent,sans y penser, un écrivainqui s'aimeForme tous ses héros semblablesà soi-même*:

1. Galonnefigurepasdansla Clélie,maisBrulus,levieuxBrulusyasa place,et commetousleshérosde ce roman,il veuiplaireauxdames: il est dameret,aussibienqu'HoraliusCoclès,quichanteàl'éidiodescoupletslangoureux.

2. Boileaun'excusaitpas,mêmedans un roman,ces démentiseffrontésdonnésà la véritéde l'hisloireet desmoeurs.11le prouvedanssonspirituelDialoguedeshérosde roman: maisil ne voulaitpas affl'germademoiselledeScudéry,ni heurtertropviolemmentlesnombreuxadmirateursqui lui restaient.11protestaitdansl'intimité,et laissaitcourirquelquescopiesdesondialoguesatirique,quinofutimprimequelongtempsaprèsla mortde mademoiselledeScudéry.

5. Horace,Artpoétique,vers125:Siquidînexpertumscenoecommiltis,et audesl'ci'sonamlbrmarenovam,serveturadimumQualisabinceptoprocesscrit,et sibiconslet.

Boileautraduità merveillecestroisvers;maisil nepoussepasl'imi-tationplusloin,et s'arrêtedevantle suivant: Difficileestpropriecommuniadicere,quepersonnen'entendaitde sontemps.D;icieret le marquisdeSévigné,quisesontdisputessurcepassage,voulaienttousdeuxdonnercoursà uncontre-sens.Uumarsaisa compristoutela penséed'Horace,qui entendpar ipropriedicere l'individualitédonnéeauxtrailsgénéraux,communia,lournispar l'observation.Ils'agitrielacréationd'unlype.eequiest le suprêmeeffortdel'art.

4. Soi-même,icicommedanslevers125,est parfaitementcorrect.Larègleélail,auxvnesiècle,demettresoiel nonlui partoutoùlesLatinsauraientmis.lepronomréfléchide la troisièmepersonne.Entraduisant,onvoitdansles deuxpassagesquelepoêleestùl'abridetoutecritique.L'observationexpriméedanscesdeuxversestd'unejustesseparfaite.LepoêledramatiqueouépiquedoitseASprendredesoi-même,pourvivredela viedupersonnagequ'ilmeten scène.Lesuccèsest a ce prix: l'hommede géniequin'a pasce désintéresse-ment,et quitientàsemontrer(commeontfaittropsouventEuripideet VollUirBdansla tragédie,et cedernierconstammentdansla co»UUMlBJi118saut-BitaUefudrelavéritédramatique,

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ART POÉTIQUE, CHANTIII. 53

Touta l'humeur gasconneen un auteur gascon;Calprenèdeet Juba parlent du mêmeton1. 150

La nature est en nous plus diverseet plus sage,Chaquepassionparle un différentlangage :La colère est superbe, et veut des mots ailiers;L'abattements'expliqueen des termes moinsfiers.

QuedevantTroieen flammeHécubedésolée 135Neviennepas pousserune plainteampoulée,Ni sansraison décrire en quelaffreuxpaysPar sept bouchesl'Euxin reçoit le Tanaïs*.Touscespompeuxamas d'expressionsfrivolesSont d'un déclamateuramoureuxde paroles. 14011faut dans la douleur que vousvous abaissiez3 :Pour me tirer des pleurs il faut que vouspleuriez4.Cesgrandsmots dont alors l'acteur emplit sa boucheNe partent point d'un coeurque sa misère touche.

Le théâtre, fertile eh censeurspointilleux, 145Cheznous pour se produire est un champpérilleux.Un auteur n'y faitpas de facilesconquêtes;Il trouve à le sifflerdés bouchestoujoursprêtes :Chacunle peut traiter de fat et d'ignorant;C'estun droit qu'à la porte on achèteen entrant5. 150

1. Jubaestun deshérosdela Cléopatre,romandelaCalprenède.CeGasconn'étaitpassansmérite.MadamedeSévignésereprochait.dele lire,maisellenepouvaits'endéfendre.

2. ÂUusionà ceversdeSénèque,au débutdesTroyennes:.Et qui frigidùm

SeptenaTanaimorapandenlembibit,etc.Ona relevéiciunelégèreerreurgéographique.Cen'estpasl'Euxin

oulamerNoirequi reçoitle Tanaïs;c'estle PalusMéoiideoulamerd'Azof.

S.C'estleprécepted'Horace,Artpoétique,vers97:Projicitampullaset sesquipedaliaverba,Sicurâtcorspectantistetigissequerela.

Eneffet,le langageampoulé,loinde toucherle coeur,disposeà lamoquerie.. ;

4. Ceprécepte,ainsigénéralisé,manqued'exactitude.Niles pleursn'appellentpastoujours.sespleurs,nicessignesdoladouleurn'excitentpas toujoursla pitié.Horaceest bienplusvrailorsqu'ildit, Artpoétique,vers103:

SivismeIlere,dolendumestPrimumipsitibi.

Eneffet,c'estla douleurvraiedupersonnage,et nonseslarmes,qu-émeuventle spectateur.

5. Ceversproverbialnefaitpastoujoursautorité.Denosjours,leprogrèsdesmoeursa introduitunusageopposé:ledroitde sifflereEpayantesttenuenéchecparceuxqui sontpayéspourapplaudir.Au

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34" BOILEAU.

Il faut qu'encent façpns.ppur.plaire,.il.se.-replie,Quetantôt il.s'élève,ét.tantôt,s'-humdlie,;Qu'ennoblessentimentsil.soit partout.fécond;Qu'ilsoitaisé-,solide,..agréable,profond;Quede traits.surprenants.sans.cesseil.nous réveille;, lSâîQu'il coure dansses.vers de..merveille-eniiw-veiUet;.-Etque tout ce qu'il,dit, facile,à.ratrair,Deson ouvrageen nous laissa un.lqng souvenir..Ainsila tragédieagit, marcheset s'expliquel.

D'unair plus grandîenciir,la.poésieépiquei8,, 1G0?Dansle vasie récit,dliip.elongueaction,,Se soutientpar la fable,et,vit de.fiction?.Làpour nous,enchanter.-tout.esttmis;én..usag&;Toutprendun.corps,,une.âme),un esprit,..unvisaget-.Chaquevertu dévient.une,divinité:, . 165-sMinerveest la prudence,-,et.,Vénus:,Ia.beauté*--;;?Cen'esl pins .la.vapeurquipyodultle!tonnerre-,,C'estJupiier armé pour effrayerla,itex!re;.;Unorage terrible aux,yeyx,desmatelots,-.C'estNeptuneen courroux,qçi gourmanderiesflots,6;; 1>70;)

reste,cetusagen'estpasunenouveauté: il est renouvelédeNéron,qui, d'aprèsle témoignagede Suétoneet de.Tacite,a l'honneurdeli»vention>;i. S'éit:pliquetest'ian&*\&sens--dq:l!llinyet'signifié-sedéploiê,--.së-,

dévelnppe.2. Cette-traiisitron'rappelle«ceHes-dn-cKanfsfcoai', d'un tàn un

peu plushaut (vers58),et.l'oede.iavecpiusd'éclat(vers56).11est"biendifficiledevarierlesiformesulut-langage;c-'est-déjû'lieaucoupdepouvoir,lesmodifierde manière,a ne.pasmériter.,tout à.fait |ej:e-pjoeim.rd'"ûnifcirnjit;é:,,0ii-saic,,,eneffet,,iqûe ,

L'ennuinaquitunjourdel'uniformité.3. L'étenduede-1'épopée;désignée'parlcsniotsvaste récit,longue

action,estopposéeauxbornes:élroH<e&de-latragédie?Toutefoisl'éten-duelaissesubsisterl'unité; maiscetteniiité-se-dévelOppepluslibre-mentdansle,tempset lelieu.-.étendusail'imagederai:ti:ous.elli:-mèmet,.Lafableet lafictiondoivents'entendredu merveilleux,qui«stmner,des-condilionsvitaleSL.de4!épppée.v

4*lîsemblequeBoileaivaprèsavoir;àiv,~chaqtte<w8r£u*dcvien4!une>-divinitéf^ui-iii^ù,;dansje>.vers,suivant,..nefpasiatérvertir-.'l'ordrerdesiîidées,et nommerla vertureprésentéeavantla déesseqni;layrepré*-sente,et dire :

LaprudenceestMinerveetVénuslabeauté.Le*eeond%6mi«ttenèaurait"snbsisté,-enpi'ésenlanfcfU'ns»inversifln^qui'}estde droitet d'ornementdanslestylepoétiques-Dansles^trois-disti-qaes-iqqi-iSttivent-,l'ordi?e«inrliqné:ipar'lefvers165;-se'retrouve; itn'y-aercepti'on-quep'otW'le'Vërs'io'6',et"c'-est:potu"celai-que'nousen-faisons».la;-remttiîq«e«

5. Quinzeversplusbas nousretrouvonsNeptuneen courroux.Le

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ART POÉTIQUE, CHANTIII. 35

Echon'est plus un soïrJ^aidàïïVl^n*retentisse;C'estune nympheen plèurs'quTsè"plainVdëNarcisse.Ainsi,dans cet amas de riobïesirctiôris;Lepoëte s'ég"âyéT'en3iiVflleMnvèritiô'nsrliOrne, élève, embellit;agtaftdir toutes choses; lfëEt't/'ouvesousJsVmaindes-flèurSHôûjourséclôsës"2,7

Qu'Énéeet.ses vaisseaux';par lé'vent*écartes,Soientauxbords africainsd'un o~rà£èem'portés, •Cen'est qu'une aventuré ordinaire'-etVôfàmurïé,Qu'un coup peu surprenant dèstraits1de la fortune: 18(TJMais1que Junon,'constanteeri'scfnaversion;Poursuivesur les flots"lés restescflliori;Qu'Éole,en sa faveur',les"chassant-d'Italie,Ouvre auxvents mutinésles prisonsd'Êoïie;QueNeptuneen courroux,s'éîevarït'sùr^arner, 185D*tmmot calmeles flots;mette la'paix'dans l'air,Délivreles vaisseaux;dés syrtes lésarràche5?:C'estlà ce qui surprend; frappe,saîéit, attache;Sans tous ces ornementé;le vers tonïb'éf.'erilân'gùèur;

mot"gourmande,danscevers;paraît,une allusionau rôle'dérfèp-,tunedansla tempètVduprëniierlivre dé VÊiïéide;maisalorsil:gourmandelesflolspour'apaîserTôrage,et il'n'estp«s:laiVp'ërsôhnilî-cationde la tempête.Soulever'auraitété icilé'mot-propre.

1. Cesdeuxversn!ontni l'élégance'nHadarté de ceux'qûipré-cèti^htet de ceux-quisuivent.Onne voir'pas .Moncommentunpoëtes'égayeen inventionsdansun amasde fictions.LesUctions-'étantdonnées,il les emploie,ef"il n'inventerien. U expliquelésfaitsnaturelsparun merveilleuxconsacré.

2. Cesfleursfou/owï's'^cZoseS-seràient'unsimple-ornementpoéti-queassezvulgaire,si1Platon,>dan>l'/onymvparlaitpasdesjardinsdesmusesoùjes pdëtës>vontcueillir1leursfleurs'dont•il;sembellis-sentleursvers?C'est'unprivilègederinspiratidh'divîh^iqueBoileaudésignevaguementau déhutde sonpoèmepar Vin'fluêncesecrète"du ciel;maisqui,chezlephilosophegrec,estunecroyanceréfléchieet une théoriesaientiliqùe.^Ubileaù.n'avaitguèreconsciencedecephénomène,queRégniera^éprouvéret'décriten;beàuxvers,lorsqu'ildit, satirexv : v

C'estalorsqueia-vérve-insolemmentm'outrage,';Quelaraisonforcéeobéità larage,-Etque,sansnulrespectdeshommeset dulieu,IfTaWqu'ë-j'ôbéissèauxFlirétirs'deee-dieu:.;

3. Touscesbeauxv^rssontinspiréspar les passagessuivantsdupremierlivreàeVEnéide:

NecduttietiamcausairarumsamquedoloresExciderantanimo. (Vers50).

Constanteensonaversion,Poursuivesur-lesfiolsles"restesd'Ilion.^

JactatosoequoretoloTrtias,relliquias.Danaunî-alqueïmmitisÀchillci,ArcebatlongeLatio. (Vers33.)

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36 BOILEAU.

Lapoésieest morte, ou rampesans vigueur1, 190Lepoëten'est plus qu'un orateur timide,Qu'unfroid liistoriend'une fable insipide.

C'estdoncbien vainementque nos auteurs âéçus,Bannissantde leurs vers ces ornementsreçus,Pensent faire agir Dieu,ses saints et ses prophètes 195Commeces dieuxéclosdu cerveaudes poètes;MeUentà chaquepas le lecteuren enfer;N'offrentrien qu'Astaroth,Belzébuth,Lucifer8.De la foi d'un chrétien les mystèresterriblesD'ornemeniségayésne sont point susceptibles: 200L'Évangileà l'esprit n'offre de tous côtésQuepénitenceà faire et tourmentsmérités,Et de vosfictionsle mélangecoupableMêmeà cesvérités donnel'air de la fable.Et quel objetenfinà présenter aux yeux 205Quele diabletoujourshurlant contre les cieux,Quide votre hérosveut rabaisserla gloire,Et souventavecDieubalance la victoire!

Le Tasse,dira-t-on, l'a fait avecsuccès.Je ne veux point ici lui faire son procès: 210Mais,quoiquenotre siècleà sa gloirepublie,11n'eût point de sonlivre illustré l'Italie,Si son sage héros, loujoursen oraison5,N'eût fait que mettre enfin Satan à la raison;Et si Renaud,Argant,Tancrède:et sa maîtresse 215N'eussentde sonsujet égayéla tristesse*.

Ouvreauxventsmutinéslesprisonsd'Eoiie.Cavumconversacuspidemontem

Impulitinlatus,acventi,veluLagminefacto,.Quadataporta,ruunt. (Vers87.)

Et pourle rôledeNeptnme:Gravitercommotus,etalto

Prospiciens,summaplacidnmcaputextulitunda....Sicait,et dictocitiustumidaeeqtioraplucat,CollectasqueTufratnubes,solemquereducit.Cymothoe,simuletTritonadnixus,acutoDetruduntnavesscopulo: levâtipsetridenti,EtvaslasapcritSyrtes.

i. Malgrécet arrêt, il peuty avoir,et il y a depoétiquesdescrip-tionsde tempêtessansinterventiond'EoleoudeNeptune.

2. Boileau,quineconnaissaitpasle poëmedeMilton,et qui avaitlu avecdégoûtle Cloviset la Pucelle,était fondéà proscrirelemerveilleuxclirélien.

5. GodefroydeBouillon.4. Lesujetde la Jérusalemdélivréen'estpointtriste.Lesuccès

d'uneg;andeexpédition,suscitéepar l'espritreligieux,et accomplieparl'héroïsme,donneau poëteune matièrevraimentépique.Mais•Boileaua raisondevoirleprincipalintérêtdu'poëmedanslavariété

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ART POÉTIQUE, CHANTIII. 37

Cen'est pas quej'approuve, en un sujet chrétien,Unauteur follementidolâtre et païen1;Mais,dans uneprofane et riante peinture,Den'oser de la Fableemployerla figure, 220De chasser les tritons de l'empire des eaux,D'ôter à Pansa flûte, aux Parquesleurs ciseaux,D'empêcherque Caron,dansla fatalebarque,Ainsique.le berger ne passe le monarque,C'estd'un scrupulevain s'alarmer sottement 225Et vouloiraux lecteurs plaire,sansagrément2.Bientôtils défendrontde peindre la Prudence,Dedonner à Thémisni bandeauni balance,De figurer aux yeux la Guerreau front d'airain,Ou le Tempsqui s'enfuit unehorloge à la main, 230Et partout desdiscours,commeune idolâtrie,Dans leur-fauxzèleiront chasser l'allégorie.Laissons-less'applaudirde leur pieuse erreur :Mais,pour nous, bannissonsune vaineterreur ;Et, fabuleuxchrétiens, n'allonspoint, dans.nos songes, 235DuDieudéméritél'aireun dieu de mensonge.

Lafableoffreà l'esprit mille agréments divers';Là fous les nomsheureuxsemblentnés pour les vers:Ulysse,Agamemnon,Oreste,Idoménce,Hélène,Ménélas,Paris, Hector,Énées. 240

descaractèrestracésparle Tasse,et danslespassionsde sesperson-nages.

1. Boileause refusaità ce mélangedu sacréet duprofane,quiscandaliselegoûtet.la piété,dansle poëmelatin de Sannazar,dePartu Virginis.Onle trouveencoredanslesLusiadesde Camoëns,età uncertain.degrédansle Rolandfurieuxde l'Arioste.

2. Cette.protestationen faveurde la mythologie,employéecommeornementpoétique,se trouvedéjàdanscesversdeCorneille,traduitsdu latindeSanteuil:

Quoi1bannirdesenfersProserpineetPlutonlDiretoujourslediableetjamaisÀlectont.SacrilierHécateelDianeà laLune,EtdanssonpropreseinnoyerlevieuxKeptunei

. Unbergerchanterasesdéplaisirssecrets,S:msquelaU;isteEchorépètesesregrets1*Lesboisautourdeluin'aurontpointdeDryades,L'airserasansZêphyrs,lesfleuvessansNaïades!

Ellea été renouveléeparVoltairedanssonApologiede la fable, etdenos'joursencoredansuneingénieuseépîtreen vers.deM.CharlesdeLacretelle. ; t

3. Boileau,danssa quatrièmeépître,disaitdesnomsdelieuxdelàGrècecequ'ildit ici deseshéros:

Iln'estplaineenceslieuxsisècheetsistérileQuinesoitenbeauxmotspartoutricheetfertile,Làplusd'unbourgfameuxparsonantiquenomVientoffriràl'oreilleunagréableson.

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38 BOILEAU.

0 le plaisantprojet d'un poèteignorantQuide tant de héros v;alch.oisirChildebrand•,ID'un seul nomquelquefoisle.spn.durou bizarreRendun poëmeentier ou.burles.queou barbare2.

Voulez-vouslongtemps,plaire.et1jamajs;/n.e,lisser, 246Faites choixd'un héros^ropreXni'intéresssr,En valeur éclatant, en vertus magnifique,;Qu'enlui, jusqu'aux défauts, tout se.mpnh'e.héroïqueQue ses faitssurprenants sojent:.dignes.d'êtreouïs;Qu'ilsoit tel que.César',.Alexjandre-ou,Louis; ,250Non tel que Pqlynice.etsonperfidefrèref.On s'ennuie aux exploitsd'un conquérantjy,ujgûir,e.

N'offrezpointuri.sùjet.d'incide.nts.JrQPvÇlagrgé.Le seul courrouxd'AçhiUe,:,av.êç,^rt,)ij4nilsé,Remplitabondamment;uné.Iliade..entière*.: .255Souventtrop d'abondanceappauvrit,hi.niatière.

Soyezvif et.pressé dans vos.narration.s;Soyezriche et.pompeuxdans vosdesçr/ipliions.C'estlà qu'il faut desyei'.s;étal.erj'élégànjje:N'y présentezjamais de.bassecirconstances. 2QON'imitezpas ce fou, qui,,décrivantlê.sjners.6,Et peignant, au milieu jJeieiirSjflot.s.gnÇrlo.u^ijts,,L'Hébreusauvédu jougde,ses.injustesmaîtres,,Met,pour le voir passer.,les poissonsaux.fenêtres7t;

4.'Le malencontreuxauteursignaléici est'CareldeSainte-GarUe.Childebrandestundeshérosdu poëmedesSarrasinsc/iossçs,i]iiidevaitavoir.douzechants,et dontquatre.'seùlomerit.'ontétépubliés.

-2.-La-faiblesseou le niérilëd'un'poèmerietientpàsJi uijojyiu.çpde si peud!importanoe.3. Polyniceetsonperfidefrèrefigurent.dans-la-^AJ&dtdeïIe&iççe,

poëmequi n!est-pas'àmépriser,maisoù'aucun des'personnagesn'inspired'intérêt. '

i. Lacolèred'Achilleestle sujetdel'Iliade:MSf/ivitiit, Oià,x. t. -V

Ellefait l'unitédu poëme,où.on la voitcommencer,dureret finir.Toutpart"decepointet -s'yrattache.'Lesoutreshérosnpparaissentsur lepremierplanqueparcequ'Achilleest absent!gt.jSonabsenceest uneconséquencedeson.courroux.

5. L'écoleque.B.oileiru^çpmiiflt/sùhstitu^itil'inventaire.-Xidapeinture,et n'omettaitaucundétail,au lieudechoisirquelquestçajtsjiiropresaéveillerl!imagination.,G'estle vicedesSaint-Amirntj.fre.s.Chapelain,,desScudéry.LusItaliensleuravaientdonnél'exemple^

6. CefouestSaint-Amant,auteurdu Moïsesauvé.Lesdétailspué-rils relevéspar'Boileause trouventdansl'ép.ispdjioùj!as,sage..de)amerRouge.

7. lin ya point.defenêtresdans'Saint-Amont,-niais(l'équivalent:Etta,pi$sdes.remparts,que.l'oeilpeut.transpercer,Lespoissonsébahis.lexeijiU'd.ejit.passer.

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ART POÊTI.QU-E,CHANTIII. 50

Peint le petit enfantqui va, saute,revient, 265Et joyeuxà sa mèrebffre.uncaillouqu'il tient1.Sur-detropvainsobjetsc'estarrêter'la vue.

Donnezà votreouvriigeunejuste.'étendue.Quele début soitsimpleet n'ait rien d'dlfecfé.N'allezpasdès'l'abord,sur'Péga«emonté, '270Crierà voslecteurs"d'unevoixde tonnerre:«Je chanlele vainqueurdesvainqueursde:la,terre'Vï>Queproduiral'auteur aprèstouscesgrandscris?La montagneen travailenfanteune souris13.Oh!quej'aime bienmieuxcet auteurpleind'adresse, *2?5Qui,sansfaire d'abordde si hautepromesse,Medit d'un ton aisé,doux,simple,harmonieux:<tJe chantelescombatset cetihomme.pieux« Qui,desbordsphrygiensconduitdans'1'Ausoriiè,« Lepremierabordales champsde'Laviriie"*.» 280Sa museen.arrivantrne-métpas touten'feu,Et,,pourSonner'beaucoup,ne nous;promet'que.pieu'5;

il.«CettespirituelleparodieTielaisserassoupçonner'toutelaipuéri-litést la platitudedupassagedeSaint-Amant.Voicisesvers.:

iLàPertfîffll*éveiMêtcourant*ouslaiicenoe:Quepermet-àsonâgc>w»e!Jilire,innocence,.Va,r.vienl,lourne„s.'uite,-el.pnrmaintcrijqyâuxiTêmoignanlIeplaisirq-.iereçoivent.-sesyeux,.D'unètningec.-iillouqu'àsespiedsilrencontre'Faitampremier-vemilaprécieusemontre.Ramasseunecoquille,'etd'aisetr-insporte,Laprésenteàsamèreavecnaïveté.

2.Xeversest'le'début'du"poëmea'AfaHc,"épqp'ée'uWScu8éryJeh-flixchants.

3. Horace,Artpoétique,-,voes-i&>,:sN«c-sicineipies,*utscriptortcycticus-olim:,.FeriiinamPriamicantaiû,-etnobitebellum.-Quiddignumtanloferethiu.:promissor'liiatu?.-Pariuriuntmontes,.nascéturridiculusmus.

Nousneretrouvons-dansBoileau-niéic promisse)!,ni-mêmeUantahialu./A.ïlloraee,Artapoétique,ivers\AA-:

•Quanlorei'tiusl-hic,quiniimôlitiirinepte!:Ôicmihi,jUusù,<virum,cajitx-jmttemporavrojm,lQui>mores'1iomi»ummullsrumvidit-ttKrbes.

Horaceprend.pourexempleet traduit,en le simp'liliïllftTinIp'etipourlebesoinde sa cause,le débutde l'Odyssée,'Bdileautelui deKEnéide.

;i.Ce,peuestinexact.'Virgilepromet''beaucoup,,co'nïme~6n:l"a're-marque,maisil promet"avecsimplicité."Voicile "versll'Hoïategtlicorrespondà ceuxdeBoileau.:

.-No>r-fumum-ex?fulftore,-sed-ex"fun]0-dar-e!luce!n-Cogitât.

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40 BOILEAU.

Bientôtvousla verrez, prodiguant les miraclesl,Dudestin desLatinsprononcerles oracles,DeStyx et d'Achéronpeindre les noirs torrents2 2S5Et déjà les Césarsdans l'Elyséeerrants3.

Defiguressansnombre égayezvotre ouvrage4;Quetout y fasseauxyeuxune riante image :Oupeut être à la foiset pompeuxet plaisant0,Et je hais un sublime ennuyeuxet pesant. 2ï)0J'aimemieuxAriosteet ses fables comiquesQuecesauteurs toujoursfroidset mélancoliques,

1. Horace,Artpoétique,vers144:Utspecioaadéhincmiraculapromat.

2. Brossette,quin'avaitni l'oreilledélicate,ni le senspoétique,proposaità Boileaudediredu Styx, de l'Achéron.Boileaupersistaen alléguantquede Styx et d'Achéronest plus soutenu,il n'endonnepaslaraison.Ladifférencetientàl'accentuation.Dansl'hémi-stichede Boileau,deet d'Asontproclitiquesets'unissentrapidementauxsyllabesqui suivent.DansceluiqueproposeBrossette,du et derecevraientl'accentet ralentiraientle mouvementmétrique.Beplus,Styx,n'étantplussuivid'unevoyelle,donneraitdeuxsyllabes.Bros-setteproposeen béotien;Boileaudécideiattiquement.M.Quicherat,danssonexcellentTraitéde versificationfrançaise,oeuvredegoûtdélicatet de profondeérudition,indiqueavecprécisionle rôle del'accenttoniquedanslesversfrançais.Lesrimeursqui se contententde compterles syllabessans les évaluerfont souventdes versfaux.

3. Cebeauversn'a-t-ilpas inspiréRacine,lorsqu'ilfait direàPhèdre,acteIII,scènei :

Etmonâmedéjàsurmeslèvreserrante?4. Lemotégayer,quirevienttropsouventdanscechantde l'Art

poétique,est icimieuxplacéquedansles passagesqui précèdent.Lesliguresdelangageégayeatréellementle style.Ellesanimentl'es-prit, qu'ellesfrappentpar la vue de l'objetqu'ellespeignentouqu'ellesrappellent.L'imaginationen est charmée,commeles yeuxle sontpar lesfleursqui entaillentune prairie.Au vers200»onne comprendpasbienrexpressiond'ornementségayés;ils seraientplutôtégayants,oumêmegais.Auvers216,Renaud,Argant,Tan-crède,Iierminieégayentla tristessedu sujet,c'est-àdire qu'ilsyjettent de l'agrémentet delà variété;mais le sujet n'étant pasIriste,la métaphoren'estpastoutà faitjuste. Quantau vers174,où le poètes*égayéen milleinventions,onpeutdire que le plai-sir d'inventer,qui vajusqu'auxtransportsdel'âme,est faiblementcaractérisépar le motégayer.11y a d'ailleursun inconvénientà ré-péterainsiquatrefois,presquecoupsur coup,uneexpressionqui nepeutpointpasserinaperçue.5. Plaisantsignifiaitencorequiplaît, etnonquiprétendàplaire%ou qui amuse.C'estl'abusdansle désiret danslesmoyeusdeplairequialimitél'acceptiondecemotcommecelledebelesprit.

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ART POÉTIQUE, CHANTIII. 41

Uuidansleur sombrehumeurse croiraient faire affront*,Si lesgrâcesjamaisleur déridaientle.front.

Ondirait que pour plaire, instruit par la nature, 295Homèreait à Vénusdérobésa ceinture2.Sonlivre estd'agrémentsun fertile trésor :Toutce qu'il a touchése convertiten ors;Toutreçoit dansses mainsune nouvellegrâce;Partout il divertit, et jamais il ne lasse4. 300Uneheureusechaleur animesesdiscours:H ne s'égarepoint en de trop longsdétours.Sansgarder danssesversun ordre méthodique,Sonsujet de soi-mêmeet s'arrange et s'explique;Tout,sansfaire d'apprêts, s'y prépareaisément, 305Chaquevers, chaquemotcourt à l'événement5.Aimezdoncses écrits, maisd'un amoursincère:C'estavoirprofitéque de savoirs'y plaire6.

1.Ona remarquéla duretéde cethémistiche,se croiraientfaireaffront; maisonn'arienditde la locutionelle-même,qui manquedenaturelci depropriété.Eneffet,on se déshonore,on s'avilîtpardesactesdonton rougit,maisonnesefaitpasd'affrontà soi-màme.Il'estclairqueBoileau,cettefoisencore,et c'estun péchéd'habi-tude,avaitfaitlesecondversavantlepremier,et quefronta amenédeforreaffront.

2. AlorsHomèreauraitreprissonbien; c'estlui qui avaitdonnéà Vénuscetteceinturesi richeen charmesséducteurs.Iliade,livrexiv,vers215:

"EvOa$1olOiXxtïjpiawàvxaTETUXTO,*EV6'1£VIJJIIVçtXÔTïiç,Iv£"t[ieçoç,tv£'ôaçi<rciiç,nàpçarJiç,5jx'CXXE^ÏvoovTCÛXGCIEIÇfçoveâvTuv.

3. Ovide,Métamorphoses,livreXI,vers102:Quidquïd

Corporecontigero,fulvumvertaturinaurum.C'estunepropriétéfunesteàMidas.LeJoueurdeRegnardse l'attri-bueégalement:

Soussesheureusesmainslecuivredevientor.BansBoileau,l'orn'estpascevil métal,maisla richesseimmortellede la penséeet dulangage.

4. Racines'estsouvenude cesdeuxverscharmantsde son amilorsqu'ilfaitdireà Assuérus,Esther,acteH,scènevu :

Jenetrouvequ'envousjenesaisquellegrâceQuimecharmetoujoursetjamaisnemelasse.

5. Horace,Artpoétique,vers148,signalecetterapiditécommeundestraitsdugénied'Homère:

Seinperadeventumfestinat.6. Boileaudétournesur Homèrel'élogeque Quintilienfaisaitde

Cicéron,Instit.,livreX,chapitrei : ïlleseprofecissesciâtouiCicerovaldeplacebit.-

Page 24: Boileau, Art poétique, 1674

i2 JOILEAU.

Unpoëmeexcellent,oùtout marcheet sesuit,N'estpas «leces"travauxqu'un capriceproduit: 311DIl veut du temps,-dessoins;-et-cepénibleouvrageJamaisd'un'écolierneifutTapprenLiss-age.Maissouventparminoasun^toëte-Mos-art,Qu'unbeaufeuquelffaéfois-échauffepar'lrasart},Enflantd'un vainorgueil^sonespritchimérique, 'WbFièrementpren'denjmam<la'trorapette%éro'ïrpie.-Sa muse,dérégléeen ses"vers'vagabonds,Nes'élèvejamaisquepar -sautset-par'aortels;Et sonl'eu,dépouFW:;desensetitlè'leeture.S'éteintà chaque;pas,-fautedeTiourrHurer1. ^20Maisen vain-le-pu&li.c,prompt'à'le-mépriser,Desonmérite^faux'-te-veHtjàësiabtïser;

*

Lui-même,applàudjssartt*à-son;înà'igre'gïniiç,Sedonnepar-ses'rnBinsVencensqii-onlui dénie':Virgile,au prix deilûi,ni'a-poirttoa'mventi'on; ^555Homère11'enlendpointla noblefiction*.fii•eontee>cetareêt-le•siècle'se«rebelle,A'la-postéi'ilë-d'abord11en anpeile:

'

Maisattendant4u7ici-le.Taonsensd'e:rëlourRamène.'.triompii.anlsses.ouvr.agësajijouç, S3DLeilEStasjtu magasin-,icaêhésàjliJumièie,Combattenttristementles vers et la poussière5,;Laissons-éesdioiicentpe-euï s'escpinierien'-repire,Et, sans-nous'égarer,"suivonsntitre propos-*'.

Dessuccèsfortunésdu spectacletragique 1535

i. Onpeut biendirecd.'unfeu-flti!U>*'ét.eintfaiite.dunoBtjitu*e,parcequ'onnourrit,onalimentele îéu; niaisla ligure"quinouslereprésentedépourvu-tte-senset de lecture,nerinangu.e-t^ellepasdejustesse,et ici,parsurcroît,U'anàlogieî^dlUitréà'fort*]jiendit,sanscoiifusionidiiuiqgss:

L'âmeestunfeuqu'ilfautnourrir,EtquusliUûita^ilme-ts'tutgiaetUe.<8.Toutes-ces-assertions-extravagantessontnel'auteurfle'Clo»f$,DesmaretzdeSaint-Sorlin,qu|dédaignaitles^poëtesdel'antiquitéet

se'meètail=sanstfaçon-au-dessusd'eux.5. L'idéedecette-plaisanterie,atijourd'hùrsiïraimée,est dans'Ho-

race,livreH,épHre-iloraière,«eus12«Auttineaspascestaçiturnusinertes.

Horaceestpluspoétique.La destinéede-<ce(livce,"Silencieusementrongédesvers,estplushumilianteencoreguele combatcontrelesinsecteset lapoussière.tÀ.ïke-dernierthêmisfckhe*de»ce-TOrsrnianqueflUé^éganoeflBt'de«no-

blesse.-C!est.oneoretune-malheureuse-.transition.

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ART POETIQUE, CHANTIII.

DansAthènesnaquit la comédieantique'.l,à le Grec,né moqueur.,par millejeux plaisants'2,Distillale veninde ses traits médisants.Auxaccèsinsolentsd'une'boulfonnejoieLa sagesse,l'esprit, l'honneur,lurent enproie. '540Onvit par le publicun poëteavouéS.'enrichiraux dépensdu méritejoué'5,Et Socratepar lui dansun choeurde NuéesD'unvil amasde peupleattirer les huées4.Enfinde la licenceon arrêta'le cours : 1545Le magistratdes lois empruntale secours,El, rendant par édit les poètesplus sages,Défenditde marquer lesnomsètles visages*.Le théâtre perdit sonantiquefureur;Lacomédieapprit à rire sansaigreur, ^350Sansfielet sans venin.sut.instruireet reprepHre^,Et-plut innocemmentdans'.lesvers de'Mènantire."•Chacun,peint avec.art dans ce nouveaumiroir7,

1. La-comédierft'est.pasnée.dans-Athènes.-.C'est.elle,.et,non latragédie,quifut promenéepar.lesbourgades(engrec,.x4["i),fP-OUrvenirensuite.s'établirrégulièrement,àla ville,sur le théâtre,pen-dantlesfoiesde Bacch.us.C'està Susarion-queremontecelle-'heu-reusefolie.Maislorsquela comédien'étaitencorequ'uneéba.ueliegrossière,amusementdes.campagnesde:l'Atlùjue,le-SicilienEpi-cliarmeavaitdéjàproduitdes.pièces,-régulières,*qui;nefurentpasinutilesauxEupolis,.aux,Cralinus,saux.Aristophane,.lesmailresjleJacomédieantique.

2. LeGrecné moqueurressemblefort au Françaisné malinduvers1S2,chantn, page205.

5. Cecia tout l'ait-d'un anachronisme.Eneffet,onne voitpasqu'Aristophaneait touchédesdroitsd'auteur.

4. LesNuéeseurentun médiocre.succès,,et.elfes.précédèrent,deplusdevingtansla mortde Socrate.Il fautlaisserà Mélituset àAnytustoutela responsabilitéde cemeurtrejuridique.

5. Danscettehistoiredelacomédie,Boileauiï'indiqùepaslapériode,fortcourte-ilestvrai,quiséparela-comédie,ancienne.de;kifcqmédiemoderne.Legenreintermédiairequ'elleproduisits'-appelle.lacomédiemoyenne,qui retientdel'anciennelessujetspolitiquesenrenonçantauxpersonnalités,etquiprépare,aurinoiiisparladécencedu ton,lacomédienouvelle,peintureprêche.dela.vie'jiriyée.

6. Horace,Artpoétique,vers381:Successitvelushiscomoedia,nonsinemUlta.L:tude.:.sfiit.invitiuiïi.hbcrtas.excidit^etvim'Dignamlegerégi: lexestaccepta,chorusqueTurpiter.QblicintîSublatDjurenocendi.

1. Ménandrenousestconnuseulementpardecourts-fragmentsetparsonimitateur.lalin.Térence,,aueCésarappelleun demi-Ménan-dre,dimidiulusMenander..Larportecle,ce,pocte,,;siuniversellementgoûlé,est la plusregrettable.outre,celles,que.déplorent'lesadmira-teursdel'antiquité.

Page 26: Boileau, Art poétique, 1674

¥t BOILEAU.

S'yvit avecplaisir, ou crut ne s'y point voir :L'avare,despreiniers,,rit du tableaufidèle 555D'un avaresouvent tracé sur sonmodèle;Et millefois un fat, finementexprimé,Méconnutle portrait sur lui-mêmeformé.

Quela nature doncsoit votreétudeunique,Auteurs qui prétendezaux honneurs du comique. 560Quiconquevoit bienl'homme,et, d'un esprit profond,De taritde coeurscachésa pénétré le fond,Quisait bien cequec'est qu'un prodigue,un avare,Unhonnêtehomme,un fat, un jaloux, un bizarre,Sur une scèneheureuse il peut les élaler 365Et les faire à nos yeuxvivre, agir et parler.Présentez-enpartout les imagesnaïves;Quechacuny soitpeint descouleursles plusvives.Lanature,,fécondeen bizarres portraits,Danschaqueâme estmarquéeà de différentstraits; 370Ungeste la découvre,un rien la l'ait,paraître :Maistout esprit n'a pasdes yeuxpour la connaître.

Letemps,qui changetout, changeaussinos humeurs;Chaqueâge a sesplaisirs, sonesprit et ses moeurs1.Unjeune homme,toujoursbouillantdansses caprices, 375Est promptà recevoirl'impressiondesvices,Est vaindans ses discours,volageen ses désirs,Rétif à la censure,et fou dansles plaisirs2.L'âgeviril, plus mûr, inspire un air plus sage,Sepousseauprèsdesgrands, s'inlrigue, se ménage, 380Contreles coupsdu sort songeà se maintenir,

1. Horace,Artpoétique,vers156:JStatiscujusquenotandîsunttibimores,Mobilibusquedécornaturisdandusetannis.

2. Danscettepeinturedujeunehomme,Boileaune reproduitpastouslestraitsfournisparHorace,vers161:Imberbisjuvenis,tandemcustoderemoto,Gaudetequiscanibusqueetapricigrammecampi;Cereusinvitiumflecti,monitoribusasper,Dtiliumtardusprovisor,prodigusoeris,Sublimiscupidusque,etamatarelinquerepermx.

NotrevieuxRégnier,satirev, paraphrasecequeBoileaua écourté:Croissantl'âgeenavant,sanssoindegouverneur,Relevé,courageux,etcupided'honneur,Ilseplaislauxchevaux,auxchiens,àlàcampaigne.Facileauvice,ilbaillesvieuxet lesdesdaigne,Rudeàquilereprend,paresseuxàsonbien.Prodigue,dépensier,ilneconserverien,Hautain,audacieux,conseillerdesoi-même,Etd'uncoeurobstinéseheurteà cequ'ilaune.

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ART POÉTIQUE, CHANT III. 45

rôtloindans le présent regardel'avenir1.La vieillessechagrineincessammentamasse,Garde,non pas pour soi, les trésors qu'elleentasse,Marcheen tousses desseinsd'un pas lent et glacé, 385Toujoursplaint leprésentet vantele passé;Inhabile auxplaisirsdont la jeunesse abuse,Blâmeen eux les douceursquel'âge lui refuse2.

Ke faitespointparler vosacteursau hasard,Unvieillardenjeunehomme,unjeunehommeenvieillard5.390

i. Horace,Artpoétiquevers166;Conversissludiîs,oelasanimusquevirilisQuaerUopesetamicilias,inservithonori,Commisisseenvet,quaemoxmutarelaboret.

IciBoileaulutteavecquelqueavantagecontreHorace,qui contientle germede cebeauvers:

Etloindansleprésentregardel'avenir.ÉcoutonsmaintenantRégnier,imitateurnaturelettoujoursheureux:

L'âgeausoinsetournant,hommefaitil acquiertDesbiensetdesamis,siletempslerequiert;XImasquesesdiscourscommesurunthéâtre,"Sublihambitieux,l'honneuril idolâtre;Sonespritaviséprévientlerepentir..Etsegarded'unlieudifficileàsortir.

2. Horacefaitainsi le portraitdu vieillard,Art poétiquevers169:

Multasenemcircumveniuntincommoda,velquodQuteritetinventismiserabstinet,aclimeluti,Velquodresomnestimidegelidequemûristrat,Dilalor,spelongus,iners,avidusquefuturi,DiMetlis,querulus,laudatortemporisactiSepuero,cénsorcastigatorqueminorum.

Letraitpiquantquiterminel'imitationdeBoileau,quel'âgeluire-fuse,n'estpasdansHorace.Régnierpeinten maîtrele mêmepor-trait, et les détailsprécisqu'il y ajouteprouventque sa jeunessedérégléeavaitsouffertimpatiemmentlesleçonschagrinesdesvieil-lards:

Maintsfâcheuxaccidentssurprennentsavieillesse:Soitqu'avecdusoucygaignantdelarichesse,'IIs'endéfendl'usage,etcraintdes'enservir,Quetantplusilena,moinss'enpeutassouvir,Ousoitqu'avecfroideuritfassetoutechoseImbécilie,douteux,quivoudraitetquin'ose,Dilayant,quitoujoursa l'oeilsurl'avenir:Delégeriln'espèreetcroitausouvenir.Ilparledesonlemps,diflfcileetsévère,Censurantlajeunesseusedesdroitsdepère-Ilcorrige,ilreprend,hargneuxensesfaçons;Etveutquetoussesmotssoientautantdeleçons.

3. Horace,Artpoétiquevers176:Neforteseniles

Mandenturjuvenipartes,pueroqueviriles.Semperinadjûnctis«évoquemorabituraptis.

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m BOILEAU.

Étudiezla cour et.connaissezlà ville;,L'uneet l'autre esttoujours enmodèlefertiles.C'estpar là que.Molière-,illustrant,ses écrits,.Peut-êtredé son art, eût remporté lerprix1,Si, moinsami du peuple,,en, ses doctespeintures. 595;Il n'eût point fait souventgrimacer ses figures,,Quitté, pour le bouffon,,l'agréableet le.liaEJ>saiis,lionte-à,.Terenceallié Tabarin2.Dansce sac ridicule où Scapins'enveloppe.3!Je ne reconnais plus l'auteur du Misanllirope. 400

Le comique,ennemi des soupirs1et des-pte-ars^N'admetpoint en ses vers de-tragiquesdouleurs*;*Maissonemploiu'est'pas,id'ïrller>dàus"UneplacerDe mots saleset bas chiarmérlâ'p'opulace:IFifàiïtiqiïè«Jses"acteurs'b"admerrt-noblement'; . 405"-Queson noeudbien formé se dénoueaisément";

\'. Cetétrangepeut-être,quicontestéà'Molièrele prixdé là comé-die,secomprennrait'sil'autéur-'dû'Târtltfé''eût!nlfilé"clilns'seschefs-d'oeuvrelebouffonau-cbmiquéfnoble;maisne l'ayant'pointfait,onnevoitpasparquelleeontâjiiônlésFourberiesdèScapiwjGeorgesDan-din ou la Comtessed'Escarbagnas;'pourraient'aller-corromprelabeautédanslespiècesoùellë-se-irouvé'sans-mélange;et-;ehleverainsiobliquement--à,-Molièrecette supériorité-qu'aucunpoètecomiquenepeutlui disputer.

2. Celleallianee^sej'trouve,reii--effet-,-.dansles'Fourberiesde Sca-

Înn,dontle sujetestitirê'ûo^Phorniion-âp.Térenceeb*où>se trouve

a scènedu sac,empruntébt\sAFroméiaquin'êîfarce'-dê'T.àbarin.LesFourberiesde Scapin'n'çn'sptit-pto-moins'tfnécôméflfdjfortdiver-tissante,queMolièreseul."pouvaitétrire;et,.d'ailleurs,coinmentlestortsdeScapinpeuvent-ilsaltérerla perfectionduMisanthrope?11ya-ddnsïce^passagë'«confusiond'idéés;-

3?Brossette-;'tbùï'en.récormafcsantî'qtteB'ôil'éàùIa"rééllre'mi6at'iécrit'.s'ènvéféppefaul'iit'prêfèlWenfëlbppe?UilcritiqtifftK'-Iiuntt,Obsèr^-vattén's'stir'téHr'àpe'dïé'Vbmuntîqmï'a'pfà'posé;dê'iiBsjoursdê'4iïé';ce passagenonpus'commeBoileaul'a écrit,maisselonla préférefteè*de Brossette,et M?Daunoa"se'Talli'e:àcet"'ameiïaetiient.Cesseraitalorsuneallusionà Molière-ac[éûrj..jôiia.nt;lé;rôfé'dé G'éront'é;,et enfermédansunsacparSca-pinv-ilyranraitdanscette hypothèseunenouvelleconfusiond'idées,parle^brasq'U'e'ipassage:du"poëte'ù-M'àeleûr.Boileaune seraitpasjusliiiéferlèHéKlé-'ehvëlbpperait-d'obscru'rité;une idéedisparate.Ondoitmainlèflir'Ialéçon^autôris'éepar'tourês'léséditionsfaitessouslesyeuxdeBoileau,hé;poëtea vouludire-'quete saccjueporteScapin,et où il-,enfermC''Géronte,n'est pas:un-jeu-descènedi»nede l'auleuràw^Misanihrope'^evW-eût mieûx-'fait-;de-:nepas ledire.Remarquons-'qtfè'rl'héffiis'tichë='oft'Scttpirts'enveloppe"n'a jamaispusignifier,mêmeau figuré,queScapinentrât'dansle sac.L'acteurchargédecerôlejetaitsansdoutecesac,en manièredemanteau,sursesépaulesavantd'yenflrnièrsadupe.

i. Onvoit,parces:vers, que Boileau-se?-déclaré-par.-anticipationcontrela comédielarmoyante,que la Chausséemit plus tard à la

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ART POÉTIQUE, CHANTIII.

Quel'action, marchant où la raison la guide,Nese perdejamais dans une scènevide;Queson style humbleet douxse relève à propos;Que ses discours,partout ferliles*enbons mots, 410Soienlpleinsde passionsfinement-majùeès,Et les scènes toujours l'une à l'autre liées4.Auxdépensdu bon sens gardez de plaisanter :Jamais de la nalure il ne faut s'écarter.Contemplezde quel air un père dans Térence 415Vientd'un filsamoureuxgourmander l'imprudence2;De quel air cet amantsécoute-sesileçonsEt court chez sa maiUressecoiaWiènceseha«sons-;-.Cen'est pas un portrait) une image*serotola-bte:C'estun amant, unûlss^,ura'!pè*e'Véritable'3. 420J

J'aime sur le théâtre*uW'agréabler'aoteurQui, sans se diflan^'-'a«x*yefflx>*diiispe6ta*eu<riPlaît par la raisoff'sewre,-etjamais ne lajchoqiueïMaispour un faux plaisant;à%rossièreéqwivotfiies*,.Qui, pour me dive*tti>;'n'â^qwetesateté,- 425ÎQfe'ils'en aille, s'il veut; sur-deux tréteauîpmontéj'-Amusantle pont Neufde ses sornettes fades,Auxlaquaisassemblésjouer ses mascarades,

m'Odê.Voltaire,,q,ut'a.-céde-«à'lâcontagiondans-N&nmeet'VlSifâni*prodigue,,n'en a.pas.moins,ridiculisé'ce,,genrenn'ite.par.-lès-vérs-suiVanfs;:

Sôiiv.eat^è'i)âtUfimu:--tEagiqufri,houiîgeoi9;',AiiK=vaius.'£ltor'ts,<d'un-auti!ur.aqiiihibiei.Q'ilidéli£ure.ël-,quibravé;àta',fais,ûâhssonjargon,Melpomèiie-elThalië.

t^vfouteKftcee-règlesrdé la*comédietsont^aussi-juslespqae*bien?exprimées?-.

2i-Boileau--!dïsigne*iei.-*le'Simon».de--.l'Aildrienne,et.lè;,Dèmée-das<AdelphssrIfeàranee'pacteausskd'ua*,pèrede*Tér.eiice*.dans^ce-»ver5àeil'Artsppitiqueisi

IratasqoerCnremes-tamittddetuigpff-*ore'i£ Cetteadmiration-pourTérence.nousdonnelé secret"_dér:là~rés,s.

tEi«t.konaque«Boileau,.vientdémettreà.Vélogedé.Molière.Boileaupré-feraitTérenceà notregrand.çomiqué,par,!a!.mêuie.raison.-quiportaitlebonla Fontaineà seplacerau-dessousdéPhèdre..Auxvii"siècle,l'admirationdesancieiis-était-'utr^utte.

4. L'équivoquegrossièreréussissaitencore-dans'lës'-piêcesdeMont-neuryetdel'0i8Bon..C'està<ces-Jeuxauteurs,qu8(Boiléauifaitallusion.

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Tartuffe(Lavigne) 1a»•MONTAIGNE:Extraits(GuillaumeGuizot).. . » ,

\ RACINE:Andromague(Lavigne) > 75o./\ — LesPlaideurs(Lavigno) »

nc,/i\\ 6ÉVIGNÉ:Lettreschoisies(Ad.Régnier),tfr.30c. //\\ THEATRECLASSIQUE(Ad.Régnier).îlr. • II

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