Biographie Du Cheikh Abû El Hassan El Châdhilî

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© Le Porteur de Savoir Aucune reproduction, même partielle, de ce document ne peut être faite sans l'autorisation expresse de son auteur Biographie du Cheikh Abû el-Hassan ech-châdhilî Traduction du chapitre premier de Durrat el-asrâr wa tuhfat el-Abrâr Travail réalisé et offert par l’équipe du Porteur de Savoir - Rajab 1434 / 2013 -

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Soufisme

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    Biographie du Cheikh

    Ab el-Hassan ech-chdhil

    Traduction du chapitre premier de

    Durrat el-asrr wa tuhfat el-Abrr

    Travail ralis et offert par lquipe du Porteur de Savoir

    - Rajab 1434 / 2013 -

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    LA PERLE DES SECRETS

    ET LE CADEAU DES PIEUX

    Durrat el-asrr wa tuhfat el-Abrr 1

    dans les vertus (manqib) du dtenteur de la gloire sublime, de

    lhonneur -clatant, le Ple suprme, le Secours manifeste, seyidi Al Ab

    el-Hassan ech-chdhil quAllah soit satisfait de lui,

    compiles par le savant, le puits de science,

    seyid Mohammed ibn Ab el-Qsim el-Himyar,

    connu sous le nom dIbn abbgh

    quAllah lui fasse misricorde.

    1 Edition tunisienne de 1887/1304.

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    Sommaire

    Gnalogie ............................................................................................................................... 4

    Recherche et rencontre du Ple................................................................................................ 4 Auprs du Cheikh Abd es-Salm ibn Machch ...................................................................... 5 Entre Tunis et rencontre avec Sd Ahmed el-Khidr ........................................................... 5 Rencontre avec le Cheikh Ab Sad el-Bj ........................................................................... 6 Rejet de lalchimie ................................................................................................................... 6 Nuit parmi les btes sauvages .................................................................................................. 7 Lhomme dans la grotte ........................................................................................................... 8 Le bcheron de Chdhilah : sd Al el-Hattb ....................................................................... 8 Le premier compagnon du Cheikh : sd el-Habib .................................................................. 9 Sur le mont Zaghouan ............................................................................................................ 10 Descente de Zaghouan ........................................................................................................... 10 Ibn el-Bar et le dpart de Tunis ............................................................................................ 12

    Les deux hommes .................................................................................................................. 14 Limprcation dIbn el-Bar .................................................................................................. 14 La dtention Alexandrie et larrive au Caire ..................................................................... 15 Le retour Tunis et rencontre avec le Cheikh Ab el-Abbs el-Murs ................................ 16 Lordre prophtique du dpart vers lEgypte ......................................................................... 16 La transmission de la fonction polaire (qutbah) .................................................................. 17

    La cape pourpre...................................................................................................................... 17 Lannonce dun bien .............................................................................................................. 18 La situation du Cheikh Alexandrie ..................................................................................... 18 Le juriste Iz ed-Dn et le plerinage ..................................................................................... 19 La main du Cheikh sur Sd Md .................................................................................... 20

    Le voyage nocturne de Sd Md .......................................................................................... 21 Lchoppe dans le dsert ........................................................................................................ 22 Sauv dans le Haram .............................................................................................................. 23 La visite du Prophte quAllah prie sur lui et le salue ..................................................... 24 Sourate ech-chr................................................................................................................... 25

    Livresse du fils du Cheikh .................................................................................................... 25 Chihb ed-Dn scrut par le Cheikh ....................................................................................... 26 Tmoignages propos de Arfat-el Khayr, fille du Cheikh ................................................. 26 Laltercation avec un groupe de Berbres ............................................................................. 27 Le pacte avec Cheikh Slim ................................................................................................... 28 Dispute avec un groupe de Moutazilites ................................................................................ 29 Lascse vritable................................................................................................................... 30 Les deux juristes .................................................................................................................... 30

    Multiplication miraculeuse des grains ................................................................................... 31 Conclusion du chapitre .......................................................................................................... 31

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    Gnalogie 2

    Selon sa noble gnalogie, il est Al fils de Abdallah, fils de Abd el-Jabbr, fils

    de Tamm, fils de Hurmuz, fils de Htim, fils de Quay, fils de Ysuf, fils de Yucha,

    fils de Wrd, fils de Battl, fils de Idrs, fils de Mohammed, fils de Iss, fils de

    Mohammed, fils de Hassan, fils de Al ibn Ab Tlib 3 quAllah soit satisfait

    deux.

    Il naquit Ghumrah, entra dans la ville de Tunis quand il tait encore jeune

    homme, se dirigea vers le Moyen-Orient, accomplit le plerinage plusieurs reprises

    et alla en Iraq quAllah lui fasse misricorde.

    Recherche et rencontre du Ple

    Il raconta quAllah lui fasse misricorde : En arrivant en Iraq, je

    rencontrai le Cheikh pieux Ab el-Fatah el-Wsit, un homme comme je nen ai

    jamais vu de semblable en Iraq. Ma qute tait la recherche du Ple (Qutb). Un des

    saints me dit : Es-tu en train de chercher le Ple en Iraq alors quil se trouve dans

    ton pays ? Retourne dans ton pays et tu le trouveras Il retourna alors au Maghreb

    o il rencontra son instructeur, sd Cheikh, le saint, le connaissant, le sincre, le

    Ple (qutb), le Secours (ghawth), Ab Mohammed Abd es-Salm ibn Machch ech-

    cherf el-Hassan4.

    Le Cheikh Ab el-Hassan quAllah lui fasse misricorde raconte : Il vivait

    Ghumrah dans un lieu de retraite au sommet dune montagne au moment de mon

    arrive. Je procdai la grande ablution (ghusl) dans une source au pied de cette

    montagne, renonai ma connaissance et mes pratiques (ilm wa amal), et

    montai vers lui dans un tat de total dpouillement (faqran). A cet instant prcis, il

    descendit vers moi, vtu dun vtement rapic, avec sur la tte une capuche en

    feuille de palmier et me dit : Bienvenue Al fils de Abdallah fils de Abd el-

    Jabbr , et mentionna ainsi ma ligne jusqu lEnvoy dAllah quAllah prie sur

    lui et le salue . Puis il me dit : Al, tu es mont nous dpouill (faqran) de ta connaissance et de tes pratiques, alors prends de nous la richesse de ce monde et

    celui daprs. Il dit : Jen fus stupfait et restai auprs de lui quelques jours

    jusqu ce quAllah veille ma conscience5.

    2 Les sous-titres sont de nous.

    3 Toutes les versions connues de la gnalogie du Cheikh Ab el-Hassan remontent jusquau Prophte

    quAllah prie sur lui et le salue par Seyidn Al ibn Ab Tlib. La ligne qui est mentionne ici passe par

    Idrs, fondateur du royaume du Maroc et de la dynastie des Idrissides. 4 Cette dsignation indique que le Cheikh Abd es-Salm ibn Machch est lui aussi descendant du Prophte

    quAllah prie sur lui et le salue par Seyidn Hassan. 5 Littralement : ouvre ma capacit introspective (bara).

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    Auprs du Cheikh Abd es-Salm ibn Machch

    Je vis de lui beaucoup de prodiges6. Parmi ceux-ci, un jour alors que jtais assis

    devant lui et quun de ses petits-fils jouait avec lui sur ses genoux, il me vint

    lesprit de linterroger propos du Nom Suprme dAllah (el-Ismu-Llh el-Adham).

    Lenfant vint moi, jeta ses bras mon cou et me secoua, en disant : Ab el-

    Hassan ! Toi qui voulais interroger le Matre quant au Nom Suprme dAllah, en

    vrit la chose nest pas de questionner propos du Nom Suprme dAllah. Ce dont

    il sagit est que tu sois toi-mme le Nom Suprme dAllah, cest--dire que le secret

    dAllah (sirru-Llah) rside7 dans ton cur. Le Cheikh sourit et me dit : Untel ta

    rpondu de ma part (jwabaka fuln ann). Il tait alors le Ple du temps (qutb

    ez-zamn)8.

    Puis il me dit : Al, voyage vers lIfrqiyh9 et demeure dans un endroit

    nomm Chdhilah car Allah quIl soit exalt et magnifi ta nomm ech-

    chdhil. Aprs cela, tu partiras pour la ville de Tunis, o on portera des accusations

    contre toi devant les autorits. Puis tu partiras vers lEst o tu hriteras de la

    fonction polaire (el-qutbah). Je lui dis : mon Matre, conseille-moi et lui de

    me rpondre : Al ! Allah [est] Allah et les hommes [sont] les hommes.

    Empche ta langue de les voquer (dhikr) et ton cur de tincliner devant eux.

    Prends garde prserver tes membres et accomplir les pratiques obligatoires.

    Ainsi, se parachvera en toi la saintet (wilyatu-Allah). Ne te proccupe deux que

    si une obligation divine te limpose (bi wjibi Haqqi-Llah alayka). Ainsi ton

    scrupule (wara) sera parfait. Puis dis : Allahumma, pargne-moi leur souvenir et

    les troubles venant deux. Protge-moi de leur mal, permets-moi de me passer de

    leurs biens travers Ton bien et, par une faveur particulire, accepte de me protger

    parmi eux. En vrit, Tu es Puissant sur toutes choses.

    Entre Tunis et rencontre avec Sd Ahmed el-Khidr

    Le Cheikh Ab el-Hassan quAllah soit satisfait de lui raconte : Quand

    jentrai dans la ville de Tunis, tant encore jeune homme, jy trouvai une grande

    famine et des hommes mourants dans les marchs. Je me dis en moi-mme : Si

    javais de quoi acheter du pain pour tous ces gens affams, je le ferais

    certainement . Alors on minvectiva en mon for intrieur : Prends ce qui est dans

    ta poche . En secouant celle-ci, je dcouvris quil y avait de la monnaie. Jallai donc

    chez un boulanger Bab el-Manra10, et lui dis : Compte tes miches de pain. Il

    6 Littralement : rupture dhabitudes, dordre naturel (kharaqa dt).

    7 Muwadda signifie littralement tre dpos .

    8 Une version moins dtaille de cet vnement est relate dans les Latif el-minan de Ibn Ata Illah ; cf.

    La sagesse des Matres soufis, traduction de E.Geoffroy. 9 A cette poque, lIfrqiyh s'tendait sur la quasi-totalit du territoire actuel de la Tunisie, except les

    parties dsertiques, sur une partie du nord-est de l'Algrie et sur une partie de la Libye (Tripolitaine). 10

    Bab el-Manra est lune des portes louest de lancienne enceinte de la mdina de Tunis.

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    les compta pour moi puis je les offris aux gens qui les prirent avidement. Je sortis

    les pices de monnaie et les donnai au boulanger mais il estima quelles taient

    fausses et dit : Elles sont marocaines, et vous, les marocains, vous pratiquez

    lalchimie ! Alors je lui donnai mon manteau (burnus) et un petit sac en gage du

    prix du pain. Je me tournai vers la porte o se trouvait un homme debout qui me

    dit : Al, o sont les pices de monnaie ? Les lui ayant donnes, il les secoua

    dans sa main puis me les rendit en me disant : Paye ta dette au boulanger, car elles

    sont bonnes. Je payai alors le boulanger qui les accepta en disant : Elles sont

    bonnes. Je rcuprai mon manteau et ma sacoche, cherchai lhomme mais ne le

    trouvai point.

    Je restai plusieurs jours dans un tat de perplexit intrieure, jusqu ce que

    jentre le vendredi suivant dans la mosque de la Ztna, ct de la coupole du ct

    est, o je fis la prire de vivification de la mosque (rakaatan tahiyat el-masjid).

    Lorsque je prononai la salutation, lhomme tait ma droite. Il me salua et me

    sourit en disant :

    Al, tu as dit : Si javais de quoi nourrir ces gens affams, je laurais

    certainement fait. Tu prsumais tre plus gnreux quAllah le Gnreux

    envers ses cratures. SIl lavait voulu, Il les aurait certainement rassasies car Il

    est Plus Savant de leur bien-tre que toi.

    O mon Matre par Allah (y seyd bi-Llah), qui es-tu ?

    Je suis Ahmed el-Khidr. Jtais en Chine, et lon ma dit : Rejoins mon saint

    Al Tunis . Alors je suis venu prcipitamment toi.

    Une fois la prire du Vendredi accomplie, je le cherchai mais ne le trouvai point.

    Rencontre avec le Cheikh Ab Sad el-Bj

    Dans son livre Les vertus de sd Ab Sad el-Bj quAllah soit satisfait de

    lui, le Cheikh Ab Fris Abd el-Azz ibn el-Futh raconte que sd Ab el-Hassan

    quAllah lui fasse misricorde a dit : Quand jentrai dans la ville de Tunis au

    dbut de ma vie spirituelle, jallai voir les Matres qui sy trouvaient car il y avait une

    chose que je voulais prsenter quelquun pour obtenir une clarification. Mais

    personne parmi eux ne put mexpliquer un tat spirituel jusqu ce que jentre chez

    le Cheikh pieux Ab Sad el-Bj. Il minstruisit de mon tat avant que je ne le lui

    rvle, et exposa mes penses intimes. Alors je reconnus quil tait un saint, et je

    restai ses cts, profitant beaucoup de lui.

    Rejet de lalchimie

    Selon le narrateur, et je lai souvent entendu parler de cela, le Cheikh Ab el-

    Hassan quAllah soit satisfait de lui raconta : Au dbut de ma vie spirituelle,

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    javais la volont dtudier la science de lalchimie, et fit une demande Allah ce

    propos. On me dit : Lalchimie est dans ton urine, mets-y ce que tu veux et cela

    deviendra ce que tu dsires. Je chauffai une hache et, lteignant de cette faon,

    elle devint de lor. A cet instant, ma prsence desprit me revint et je mexclamai :

    mon Seigneur, je tai demand une chose mais ne lai obtenue que par le biais de

    moyens impurs ! Or, lutilisation de moyens impurs est illgale . On me dit alors :

    Al, le monde est immondice. Si tu le dsires, tu nobtiendras rien si ce nest

    par la salet.

    mon Seigneur, dlivre men (aqiln) !

    Chauffe la hache et elle redeviendra du fer, me dit-on alors.

    Je la chauffai et elle redevint effectivement du fer.11

    Nuit parmi les btes sauvages

    Il dit quAllah soit satisfait de lui : Lors des prgrinations (siyha) au

    dbut de ma vie spirituelle, je me trouvais une nuit dans un endroit rempli de btes

    sauvages. Comme les btes commenaient grogner aprs moi, je massis sur une

    butte leve et dis : Par Allah, je vais prier sur lEnvoy dAllah quAllah prie sur

    lui et le salue car il a dit celui qui prie sur moi une prire une fois, Allah prie sur

    lui par elle dix fois ; et si Allah prie sur moi, je passerai la nuit sous la protection

    dAllah . Je faisais donc ainsi et nprouvais aucune peur.12 A laube, jallai vers une

    mare deau pour y faire mes ablutions pour la prire de laube (ubh). Des perdrix

    sortirent dun buisson de roseaux qui taient ct dans un bruyant battement

    dailes. La peur me submergea et je revins sur mes pas. Alors on mappela dans mon

    for intrieur : Al, quand tu as pass la nuit dernire par Allah (bi-Llah), tu nas

    pas craint les btes sauvages qui grognaient contre toi. Mais quand tu tes lev

    aujourdhui par toi-mme (bi-nafsika), le seul battement des plumes de perdrix a

    russi teffrayer.

    11

    Gunon rapporte lanecdote suivante, postrieure lpisode relat ci-dessus : on raconte que Seyidi

    Abul-Hassan Esh-Shdhili, durant son sjour Alexandrie, transmua en or, la demande du sultan dEgypte

    qui en avait alors un urgent besoin, une grande quantit de mtaux vulgaires ; mais il le fit sans avoir recours

    aucune opration dalchimie matrielle ni aucun moyen dordre psychique, et uniquement par leffet de sa

    barakah ou influence spirituelle (Aperus sur linitiation, chap. XLI). Il faut en effet noter que celui qui a

    pntr certaines sciences traditionnelles dans leur essence profonde se dsintresse aussi entirement de leur

    application et nen fait jamais aucun usage ; la connaissance pure lui suffit, et elle est vritablement la seule

    chose qui importe, tout le reste ntant que simples contingences. ( Ibid. Le rejet des pouvoirs ). 12

    Une version lgrement diffrente du mme pisode est relate dans les Latif el-minan, bien quil ny

    soit pas prcis que cest la pratique de la prire sur le Prophte quAllah prie sur lui et le salue qui

    prserve le cheikh Ab el-Hassan des lions qui rdent autour de lui jusqu laube. Il dit alors quil croit avoir

    ralis au terme de cette nuit la station spirituelle de lIntimit (maqm el-Uns) ; cf. La sagesse des Matres

    soufis, traduction de E.Geoffroy.

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    Lhomme dans la grotte

    Il raconta quAllah soit satisfait de lui : Une nuit, lors de mes

    prgrinations (siyha), je rentrai dans une grotte pour y passer la nuit. A

    lintrieur, jentendis la voix dun homme qui glorifiait Allah et me dis : Par Allah,

    je ne drangerai pas cet homme cette nuit. Je passai donc la nuit lentre de la

    grotte et lentendis dire ceci vers laube : Allahumma, en vrit certains Tont

    demand que les cratures viennent eux et leur soient soumises. Allahumma, en

    vrit je Te demande quils sloignent et se dtournent de moi afin que je puisse

    navoir de refuge quen Toi. Il sortit quand il fit jour, et je maperus que ctait

    mon instructeur. Je lui dis alors :

    mon matre, je tai entendu dire telle et telle chose la nuit dernire.

    Al, me rpondit-il, quest-ce qui est meilleur pour toi ? Que tu dises : Sois

    moi (kun-l), ou : Soumets-moi les curs de Tes cratures ? Car quand Il est

    toi, toutes choses sont toi.13

    Le bcheron de Chdhilah : sd Al el-Hattb

    Il quitta quAllah lui fasse misricorde son instructeur pour aller en

    Ifrqiyh14 et Chdhilah comme il le lui avait ordonn. Il arriva dans la ville de

    Tunis proximit du lieu de prire des deux ftes (muallah el-dayn).

    L, il rencontra un bcheron (hattb) parmi les gens de Chdhilah. Il sortit avec

    lui en se dirigeant vers le lieu de prire, comme son instructeur len avait inform

    auparavant. Le bcheron, qui avait oubli une affaire au march fit demi-tour pour

    la rechercher et laissa son ne avec le Cheikh. Une fois parti, il se dit en lui-

    mme : Cest un tranger qui va senfuir avec lne et je me trouverai alors

    totalement dpourvu . Le Cheikh linterpella alors et il revint vers lui. Il lui dit :

    mon fils, emmnes ton ne, jattendrai ton retour. Ceci, afin dviter que je ne

    menfuie avec lne et que tu te retrouves totalement dpourvu. Le bcheron se

    mit pleurer et dit : Par Allah, personne ntait inform de cela except Allah

    Exalt soit-Il . Il reconnut sa saintet, lui embrassa les mains et lui demanda de

    prier pour lui. Il retourna ensuite son affaire puis revint vers lui, et ladjura de

    monter lne. Le Cheikh Ab el-Hassan le monta et lui fit faire un tour derrire lui.

    Le bcheron sexclama : Par Allah, lne ne me portait qu grande peine du fait de

    sa faiblesse et du manque de fourrage !

    Le bcheron raconte : Nous avions parcouru environ un mile lorsque le matre

    descendit. Nous nous trouvions sur les berges de la rivire ct de Chdhilah.

    Surpris, je labordais en lui disant : mon Matre, je suis afflig par la pauvret.

    13

    Une autre version du mme vnement est galement relate dans les Latif el-minan. 14

    Cf. note n8.

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    Jai rassembl du bois que jai vendu, et nai russi gagner ma nourriture quavec

    beaucoup defforts . Javais dans mon sac de lorge que javais achet pour faire des

    provisions de nourriture pour ma famille et du fourrage pour lne. Il me dit :

    Donne-moi cette orge. Je dfis alors mon sac et il y plongea sa main, en me

    disant : Mets cette orge dans un panier, ferme-le, plonge ta main et manges-en.

    Tant que tu vivras, tu nauras jamais plus te plaindre du manque de nourriture. Je

    demande quAllah subvienne tes besoins et ceux de ta descendance et aucun

    de ses descendants na t vu dans la pauvret jusqu nos jours . Le bcheron

    poursuit : Je continuais y plonger ma main, en sortais de lorge, le pesais,

    labourais avec lne, en semais et obtenais une excellente rcolte. Puis je louvris, le

    pesai et je le trouvai tel quil tait auparavant. Quand je vins lui, il me dit : Si tu

    ne lavais pas pes, vous en aurez srement mang tant quil vous en serait rest en

    votre possession15 (law lam takilhu la kultum min-hu m dma indakum) .

    Le premier compagnon du Cheikh : sd el-Habib

    Le premier devenir son compagnon Chdhilah fut notre Matre pieux et

    saint, le dvoil (mkachif) Ab Mohammed Abdallah ibn Salmah el-Habib,

    parmi les gens de Chdhilah. A Tunis, il avait lhabitude dassister lassemble de

    notre Matre, le saint cheikh, le Connaissant, lexcellent Ab Hafs el-Jss, qui tait

    envelopp dans un manteau de laine et qualifi par le Cheikh quAllah soit satisfait

    de lui : dhomme lev dans des vtements misrables (el awl f hawl). Il

    [el-Habib] dit : Un jour, je pris sa main en lui disant : sd [Ab Hafs el-

    Jss], je te prends comme Cheikh , ce quoi il rpondit : mon fils, attends ton

    Instructeur jusqu ce quun chrif de la ligne de Hassan faisant partie des plus

    grands saints arrive du Maroc. Il est ton instructeur et tu te rattacheras (tantasib).

    Il lattendait donc et prenait pour compagnon nimporte quel faqr quil voyait

    venir du Maroc, jusqu ce que le Cheikh arrive Chdhilah et quil le rejoigne. Cela

    fut pour lui la marque dune bndiction et lannonce dun bien. Cest ainsi quil

    15

    Ce rcit reproduit le modle prophtique jusque dans la parole du Cheikh Ab el-Hassan (Cf. miracles du

    Prophte quAllah prie sur lui et le salue consigns par le Qadh Iydh dans son Chif, chapitre de la

    multiplication et de la profusion de la nourriture par sa bndiction et son invocation). Il est

    traditionnellement connu que le fait de quantifier une chose a pour effet de lamenuiser. Ren Gunon dit ce

    propos : Il y aurait beaucoup dire sur les interdictions formules dans certaines traditions contre les

    recensements, sauf dans quelques cas exceptionnels ; si lon disait que ces oprations et toutes celles de ce

    quon appelle l tat civil ont, entre autres inconvnients, celui de contribuer abrger la dure de la vie

    humaine (ce qui est dailleurs conforme la marche mme du cycle, surtout dans ses dernires priodes), on ne

    serait sans doute pas cru, et pourtant, dans certains pays, les paysans les plus ignorants savent fort bien, comme

    un fait dexprience courante, que, si lon compte trop souvent les animaux, il en meurt beaucoup plus que si

    lon sen abstient ; mais videmment, aux yeux des modernes soi-disant clairs, ce ne peuvent tre l que

    des superstitions ! (Note 1 du chap. Can et Abel , Rgne de la quantit).

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    devint son compagnon et laccompagna au mont Zaghouan16 . Avec lui, il persvra

    longtemps dans les pratiques dadoration et rapporta de lui beaucoup de prodiges

    (karmt).

    Sur le mont Zaghouan

    Parmi ce quil rapporte son propos : Sur le mont Zaghouan, un jour il rcita

    la sourate el-Anm jusqu la parole dAllah Exalt soit-Il : Offrirait-il une

    ranon quelle serait refuse 17. Un tat spirituel intense lenvahit alors et il se mit

    la rpter en se balanant (yataharrik). A chaque fois quil penchait dun ct, la

    montagne penchait de la mme faon, jusqu ce quelle se calme.

    Descente de Zaghouan

    Le Pieux Cheikh Ab el-Hassan Al el-Ibr, connu sous le nom del-Hattb, nous

    raconte : Un jour, je dis mon Matre Mohammed el-Habib : "Dis-moi quelque

    chose que tu as vu de mon Matre Ab el-Hassan." Il rpondit : Jai vu plusieurs

    choses le concernant, et je vais ten raconter certaines. Je restais avec lui sur le mont

    Zaghouan pendant quarante jours, me nourrissant dherbes des champs et de

    feuilles de laurier jusqu ce que lintrieur de mes joues en devienne douloureux. Il

    me dit alors :

    Abdallah, il semble que tu aies envie dun repas.

    mon Matre, mon regard sur toi men dispense, rpondis-je.

    Demain, in ch Allah, nous descendrons Chdhilah et plusieurs prodiges

    (karmat) surviendront sur le chemin.

    Le lendemain matin, nous descendmes de bonne heure et, pendant que nous

    marchions travers la plaine, il me dit : Abdallah, si je quitte la route, ne me

    suis pas. Un tat spirituel trs puissant lui survint et il quitta le chemin jusqu

    tre loin de moi. Je vis alors quatre oiseaux de la taille dune cigogne descendre du

    ciel et tendre leurs ailes au-dessus de sa tte. Ils vinrent chacun leur tour converser

    avec lui, puis senvolrent. Il y avait galement avec eux des oiseaux de la taille dune

    hirondelle, tournant autour de lui (yatfn hawla-hu), entre terre et horizon, qui

    disparurent ensuite hors de ma vue. Revenant vers moi, il me dit : Abdallah, as-

    tu vu quelque chose ? Je lui racontai ce que javais vu et il mexpliqua : Les

    quatre oiseaux sont les anges du quatrime ciel qui sont venus me questionner

    propos dune science et je leur ai rpondu. Quant aux oiseaux qui avaient une forme

    16

    Le mont Zaghouan est un massif montagneux denviron 1300 m de hauteur situ une cinquantaine de

    kilomtres au sud de Tunis. Ce lieu est notamment connu pour ses grottes ayant abrit les retraites spirituelles

    de plusieurs grandes figures de la saintet islamique. 17

    Sourate 6, verset 70.

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    dhirondelle, ctaient les esprits de saints venus moi pour recevoir une

    bndiction de notre arrive18.

    Il resta sur le mont de Zaghouan pendant un certain temps et Allah fit surgir

    une source de laquelle scoulait de leau douce. Il avait l une grotte dans laquelle il

    rsidait. De nos jours, lappel la prire se fait entendre du pied de la montagne aux

    heures de prire et les gens y montent mais ny trouvent personne, et personne ne

    lhabite except ses compagnons parmi les djinns croyants.

    Le Cheikh Ab el-Hassan raconte galement : On ma dit :

    Al, descends (ihbit) vers les gens afin quils puissent profiter de toi.

    Seigneur, rpondis-je, dlivre-moi des hommes, je nai pas la capacit de

    me mler eux.

    Descends (anzil) ! Car Nous tavons fait accompagner de la scurit

    (salmah) et Nous avons retir de toi le blme (malmah).

    Seigneur, Tu mas laiss (takiln) [aux mains] des hommes, je devrais

    manger de leur pitance !

    Dpense, Al, car Je suis le Pourvoyeur (mal), si tu veux, partir de ta

    poche (jayb), et si tu veux, partir du monde invisible (ghayb).

    Alors il entra dans la ville de Tunis et rsida dans une maison prs de la

    Mosque Balt. Il eut pour compagnons un groupe dhommes nobles dont le Cheikh

    Ab el-Hassan Al ibn Makhlf e-aql, Ab Abdallah e-bn, le Cheikh Ab

    Mohammed Abd el-Azz ez-Zeytn, son serviteur Ab el-Azim Md, Ab

    Abdallah el-Baj el-Khayyt et Ab Abdallah el-Jrih. Tous dtenteurs de

    18

    Ren Gunon dit dans un article intitul La Langue des Oiseaux : Il est souvent question, dans diverses

    traditions, dun langage mystrieux appel langue des oiseaux : dsignation videmment symbolique, car

    limportance mme qui est attribue la connaissance de ce langage, comme prrogative dune haute initiation,

    ne permet pas de la prendre littralement. Cest ainsi quon lit dans le Qorn : Et Salomon fut lhritier de

    David ; et il dit : O hommes ! nous avons t instruit du langage des oiseaux (ullimna mantiqat-tayri) et

    combl de toutes choses (XXVII, 15.) [...] Cest cette communication qui est reprsente par la

    comprhension du langage des oiseaux ; et, en fait, les oiseaux sont pris frquemment comme symbole des

    anges, cest--dire prcisment des tats suprieurs . Gunon dit ensuite propos du verset coranique Wa

    e-ffti affan, Faz-zjirti zajran, Fat-tliyti dhikran ( Par ceux qui sont rangs en ordre, Et qui

    chassent en repoussant, Et qui rcitent linvocation ) (XXXVII, 1-3) : Dans le texte qornique que nous

    avons reproduit ci-dessus, le terme e-afft est considr comme dsignant littralement les oiseaux, mais

    comme sappliquant symboliquement aux anges (el-malakah) ; et ainsi le premier verset signifie la

    constitution des hirarchies clestes ou spirituelles. Le second verset exprime la lutte des anges contre les

    dmons, des puissances clestes contre les puissances infernales, cest--dire lopposition des tats suprieurs

    et des tats infrieurs. Enfin, dans le troisime verset, on voit les anges rcitant le dhikr, ce qui, dans

    linterprtation la plus habituelle, est considr comme devant sentendre de la rcitation du Qorn, non pas,

    bien entendu, du Qorn exprim en langage humain, mais de son prototype ternel inscrit sur la table garde

    (el-lawhul-mahfz), qui stend des cieux la terre comme lchelle de Jacob, donc travers tous les degrs

    de lExistence universelle .

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    prodiges (karmt) et de bndictions (barakt). QuAllah nous fasse bnficier de

    leurs bienfaits tous !

    Ibn el-Bar et le dpart de Tunis

    Il resta l quelques temps jusqu ce beaucoup de gens laient rejoint. Le juriste

    Ab el-Qsim Ibn el-Bar entendit parler de lui celui-ci tait alors chef des juges

    (qd-el-jamah) . Envieux, il lui chercha querelle mais fut incapable de

    lemporter. Il alla dire au Sultan : Il y a ici un homme de Chdhilah, un homme qui

    vole les nes, qui prtend tre un chrif. Beaucoup de gens lont dj rejoint ! Il est

    en train de dresser ton pays en prtendant tre un Fatimide !19

    Le Cheikh quAllah soit satisfait de lui raconte : Jai dit : Seigneur,

    pourquoi mas-tu nomm ech-chdhil alors que je ne suis pas du village de

    Chdhilah ? On me rpondit : Al, je ne tai pas appel ech-chdhil. En vrit,

    tu es chdhdhoun20 (= isol solitaire) l (= pour Moi), c'est--dire que tu es

    ddi exclusivement Mon Service et Mon Amour (l khidmat wa mahabat)21.

    Ibn el-Bar rassembla un groupe de juristes (fuqah) dans le palais (Qasbah).

    Le Sultan qui en ce temps, le Sultan tait alors Ab Zakariy quAllah lui fasse

    misricorde resta labri dune tenture en prsence du Cheikh quAllah soit

    satisfait de lui . Les juristes le questionnrent de nombreuses fois au sujet de sa

    gnalogie et il leur rpondit, tandis que le Sultan coutait. Ils discutrent avec lui

    de toutes sciences et il les vainquit par des sciences qui les rduisirent au silence. Ils

    ne purent, quant eux, lui rpondre sur les sciences sotriques (ulm mawhba).

    Le Cheikh ne conversa donc avec eux que des sciences exotriques (ulm

    muktasba) car, en cela, ils taient sur un pied dgalit. Le Sultan dit alors Ibn el-

    Bar : Cet homme fait partie des plus grands saints, tu nas aucun pouvoir sur

    lui ! . Il lui rpondit : Par Allah, sil sortait maintenant, les habitants de Tunis se

    soulveraient contre toi, et ils te chasseraient. En ce moment mme, ils sont

    19

    Pour bien comprendre linquitude du Sultan devant la menace exprime par Ibn el-Bar, il faut peut-tre

    se souvenir du contexte politique de la rgion cette poque : lIfrqiyh, islamise au cours du VIIe sicle, est

    place par le Calife Abbasside Hrn er-Rachd sous lautorit dun mir local qui fonde sa propre dynastie, les

    Aghlabides. Mais cette dynastie est dtrne au dbut du Xe s. par les Fatimides chiites, qui proclament

    lindpendance de leur nouveau Califat (909) par rapport au Califat central sunnite de Bagdad et sinstallent au

    pouvoir pendant prs dun sicle et demi. Cela ne fait donc, au moment o se droule cet pisode de la vie du

    Cheikh (1243-1244 ?), que deux cents ans que les Fatimides ne sont plus la dynastie rgnante. La calomnie

    dIbn el-Bar apparat ainsi tout fait plausible aux yeux du Sultan : un fatimide convoite le pouvoir en

    exploitant le mcontentement populaire local, selon une modalit analogue celle quavaient jadis mis en

    uvre les Fatimides contre les Aghlabides. 20

    Dans le texte arabe, il est prcis Avec un redoublement de la lettre dhel . 21

    Dans la version manuscrite arabe, les mots chdhdhoun-l et chdhil sont crits de la mme faon

    (.(

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    rassembls ta porte ! Les juristes se retirrent et le Sultan mis le Cheikh aux

    arrts (mara bi-l-juls).

    Le Cheikh ech-chdhil dit : Il se pourrait quun de mes compagnons entre.

    Cest alors quun de ses compagnons entra et lui dit : mon Matre, les gens sont

    en train de parler de toi et disent quils se sont comports de telle et telle manire

    ton encontre , et il se mit pleurer devant lui. Le Cheikh sourit alors et rpondit :

    Par Allah, neut t par convenance par rapport la loi exotrique, je serais

    certainement sorti par ici ou par l , et le mur se fissura dans chacune des

    directions quil avait pointes du doigt. Puis il dit : Apporte-moi une aiguire, de

    leau et un tapis de prire. Salue mes compagnons, dis-leur que nous ne seront

    absents deux quaujourdhui et que nous naccomplirons la prire du maghreb

    quavec eux, in ch Allah. On apporta ce quil avait demand et il fit lablution

    rituelle puis sorienta [intrieurement] (tawajjaha) vers Allah Glorifi et Exalt

    soit-Il.

    Le Cheikh quAllah soit satisfait de lui raconte : Je voulais faire des

    invocations contre le Sultan et on me dit : En vrit, Allah ne sera pas satisfait de

    toi si tu fais une imprcation contre une crature par impatience. A cet instant, je

    fus inspir de rciter : Celui dont "le Trne dborde des Cieux et de la Terre, dont

    la garde ne Lui cote aucune peine. Et Il est le Trs Haut, lImmense" 22. Je Te

    demande la foi, par Ta Protection (hifdhi-Ka), une foi par laquelle mon cur soit

    rassur du souci de la subsistance et de la crainte des cratures. Rapproche-Toi de

    moi, par Ta puissance (qudrati-Ka), dune proximit par laquelle Tu anantisses de

    [devant] moi tous les voiles que Tu as anantis de [devant] Abraham, Ton Ami

    intime : nayant pas eu besoin de Gabriel, Ton messager, ni de Te faire une demande

    (soulihi min-Ka), Tu las protg (voil) par cela du feu de son ennemi. Et

    comment ne serait pas [malgr tout] protg de la nuisance des ennemis celui qui

    Tu as retir le bienfait [normalement d aux] Plus Aims ? Au contraire ! Moi, je Te

    demande que, par Ta proximit de moi, Tu me retires [le bienfait des Plus Aims] de

    telle sorte que je ne voie ou sente plus la proximit ou lloignement de moi de quoi

    que ce soit. "Tu es, certes, Puissant sur toute chose" 23.

    Le Sultan avait une esclave qui tait la plus chre de toutes ses femmes ses

    yeux. Elle fut atteinte dune grave maladie et mourut subitement. Il sen attrista

    profondment. Elle fut lave dans une chambre de sa rsidence et lon procda son

    ablution mortuaire. Ils lenvelopprent puis la sortirent pour la prire du mort. Ils

    avaient oubli un encensoir dans la pice et avant que quiconque ne sen rende

    compte, un feu se propagea et brula tout ce qui sy trouvait ; lits, vtements et autres

    objets de valeur furent consums. Le Sultan sut alors que ce qui tait survenu tait

    li ce saint.

    22

    Extrait du Verset de lEscabeau (Sourate 2, verset 255). 23

    Sourate 3, verset 86.

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    Le frre du Sultan, Ab Abdallah el-Lihyn, se trouvait dans ses jardins

    lextrieur de la ville. Il vint immdiatement lui lorsquil eu vent de la chose car il

    avait une foi intense dans le Cheikh et le visitait souvent. Il dit son frre : Dans

    quelle affaire Ibn el-Bar ta-t-il conduit ? Par Allah, il ta conduit la ruine, toi et

    tous les tiens ! Puis il alla auprs du Cheikh et lui dit : mon Matre, mon frre

    ne sait pas de quoi tu es capable, mais cest Ibn el-Bar qui la pouss de telles

    choses. Il embrassa ses mains et lui demanda pardon pour son frre. Le Cheikh

    Ab el-Hassan lui rpondit : Par Allah, ton frre na aucun pouvoir sur lutile et le

    nuisible, la mort et la vie, ou la rsurrection en ce qui le concerne. Comment en

    aurait-il pour autre que lui ? Ceci est consign dans le Livre.

    Ab Abdallah el-Lihiyni fit sortir le Cheikh quAllah soit satisfait de lui et

    laccompagna sa maison. Il y sjourna quelques jours proximit de la mosque

    Balt. Puis il ordonna ses compagnons de voyager vers lOrient. Il alla voir Ibn el-

    Bar et lui dit : Vois, je te laisse toute la ville de Tunis !

    Les deux hommes

    Le serviteur du Cheikh Ab el-Hassan, le Cheikh Ab el-Azim Md a dit :

    Un jour, le Cheikh rencontra Ibn el-Bar. Il le salua mais ce dernier sloigna de

    lui et ne lui rendit pas la salutation24. Au mme moment, apparut le juriste Ab

    Abdallah ibn Ab el-Hussayn, un chambellan (hjib) du Sultan, qui descendit de sa

    mule et aborda le Cheikh. Il lui embrassa les mains, se mit pleurer et lui

    demander de prier pour lui. Le Cheikh sen alla aprs lavoir fait. Quand il rentra

    dans sa maison, le Cheikh dit : Il vient juste de mtre fait une annonce concernant

    ces deux-l ; on ma dit : " Al, le signe dune personne malheureuse relve de la

    Science dAllah le Vrai, et cette personne est aveugle de sorte quil ny a pas une

    science quil connaisse [vritablement] ; et le signe d'une personne heureuse (abd

    bi-sadah) relve de la Science dAllah le Vrai, et cela se manifeste pour lui en ce

    quil ny ait pas un acte dont il soit le [vritable] agent".

    Limprcation dIbn el-Bar

    Ab el-Azim Md dit encore : Je navais jamais entendu le Cheikh faire des

    prires contre lui ou mme le mentionner jusqu ce que nous fmes Araft25. Il

    nous dit alors : Dites mn ma demande (du) car linstant, il ma t ordonn

    24

    En Islam, rpondre la salutation traditionnelle est une pratique obligatoire (wjib). 25

    Araft est une plaine situe une vingtaine de kilomtres de la Mecque. La station (wuqf) en ce lieu,

    quelques instants entre le coucher de soleil du jour de Arafah et laube du jour suivant, constitue lessentiel du

    plerinage (hajj) selon la parole du Prophte quAllah prie sur lui et le salue : Le Plerinage, cest

    Arafah . Il est traditionnellement recommand dimplorer le pardon et la misricorde dAllah dans ces

    conditions de temps et de lieu tout fait exceptionnelles.

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    de faire des imprcations contre Ibn el-Bar , et il dit : Allahumma, allonge sa

    vie, fait que sa science ne lui soit daucune dutilit, fais que sa progniture soit une

    cause de trouble pour lui, et assigne-le ntre que le serviteur des tyrans la fin de

    sa vie.

    Quand le Cheikh quAllah soit Satisfait de lui se mit en route, le Sultan en

    eu vent et fut jaloux quil quitte son pays. Il mandata quelquun pour le ramener

    mais le Cheikh dit : Je pars avec pour unique intention de faire le plerinage, in

    ch Allah Exalt soit-Il. Mais lorsquAllah aura dcrt ce quil en est de ma

    situation, je reviendrai, in ch Allah .

    La dtention Alexandrie et larrive au Caire

    Ab el-Azim continue : Nous voyagemes vers lOrient et entrmes

    Alexandrie. Ibn el-Bar avait fait une attestation officielle disant : Cet homme qui

    vient vous a mont notre peuple contre nous et en fera de mme dans votre pays.

    Alors le Sultan dEgypte ordonna quil soit dtenu Alexandrie et nous restmes

    donc l-bas plusieurs jours.

    Le Sultan avait charg dun impt les chefs des tribus du pays. Quand ces

    derniers entendirent parler du Cheikh, ils vinrent lui demander dintercder. Il leur

    dit : Demain, in ch Allah, nous irons au Caire et discuterons de votre cas avec le

    Sultan.

    Ainsi, nous partmes en passant la Ville par la Porte du Lotus. Les soldats et les

    gouverneurs taient l et fouillaient chaque personne qui entrait ou sortait, mais

    personne ne nous adressa la parole et ne saperut de notre prsence26.

    En arrivant au Caire, nous fmes conduits lintrieur de la Citadelle27. Aprs

    avoir demand audience au Sultan, celui-ci nous sexclama : Comment cela est-il

    possible ? Nous avions ordonn que tu sois dtenu Alexandrie ? . Alors le Cheikh

    fut introduit devant le Sultan, les juges et les princes, et sassit avec eux tandis que

    nous regardions. Le Sultan le questionna :

    Quas-tu dire, Cheikh ?

    Je suis venu toi pour intercder en faveur des tribus, rpondit-il.

    Intercde plutt pour toi-mme ! Ceci est une attestation officielle quIbn el-

    Bar a envoy de Tunis .

    26

    Cette sortie dAlexandrie nest pas sans rappeler la sortie du Prophte quAllah prie sur lui et le

    salue de La Mecque au dbut de lHgire : alors que des hommes sont posts devant la porte de sa maison et

    attendent quil sorte pour le tuer, celui-ci sort en rcitant la sourate Y-Sn et passe alors au milieu deux sans

    quils ne sen aperoivent. 27

    La Citadelle est une grande forteresse construite sur lunique hauteur de la ville du Caire par Saladin.

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    Il la lui donna et le Cheikh dit : Toi et moi, ainsi que les tribus sommes sous le

    dcret dAllah. Le Cheikh se leva pour partir. Aprs quil ait fait environ vingt pas,

    ils secourent le Sultan, qui ne bougeait et ne prononait plus de son. Ils se

    prcipitrent vers le Cheikh et lui embrassrent les mains en le suppliant de revenir

    vers lui. Il revint alors vers le Sultan et le secoua de la main de sorte quil bougea,

    descendit de son trne, demanda pardon et limplora de prier pour lui. Le Sultan

    crivit ensuite au gouverneur dAlexandrie afin quil lve limpt sur les tribus et

    leur rende tout ce quil leur avait prlev.

    Nous restmes quelques jours avec lui dans la Citadelle et les Egyptiens furent

    profondment mus de notre prsence. Nous nous mmes ensuite en route pour le

    plerinage et revnmes Tunis.

    Le retour Tunis et rencontre avec le Cheikh Ab el-Abbs el-Murs

    Le Cheikh revint dans la ville de Tunis et occupa une maison avec une ouverture

    sur le Nord Bb el-Jadid, dans le quartier de Chariya. Il y demeura pendant un

    longue priode jusqu ce le Cheikh et saint Ab el-Abbs el-Murs se prsente,

    celui-l mme qui hritera de sa station spirituelle et dont nous parlerons plus

    tard, in ch Allah . Il tait venu dAndalousie encore trs jeune avec son frre, Ab

    Abdallah Muhammad, professeur pour garons Alexandrie. Quand le Cheikh le

    rencontra, il le regarda et dit : Personne ne ma fait revenir Tunis si ce nest ce

    jeune homme ! Alors il lduqua, linstruisit dans la Voie et voyagea avec lui vers

    lOrient.

    Lordre prophtique du dpart vers lEgypte

    Le Cheikh quAllah soit satisfait de lui dit : Jai vu le Prophte quAllah

    prie sur lui et le salue en rve et il ma dit : Al, migre (intaqil) vers lEgypte,

    duque y quarante Sincres (arban siddqan). Ctait en plein t alors que la

    chaleur tait intense. Je dis alors : mon Matre, Envoy dAllah, la chaleur est

    intense ! , et il me rpondit : En vrit, des nuages te feront de lombre28 . Puis

    jajoutai : Je crains la soif , et il me rpondit : La pluie tombera pour toi chaque

    jour devant vous. Puis il me promit soixante-dix prodiges (karmah) durant mon

    voyage.

    Aprs avoir prpar ses compagnons pour le dpart, il voyagea vers lEgypte.

    Parmi ceux qui laccompagnaient dans ce voyage, il y avait le Cheikh, le vnrable

    28

    Il est galement possible de relever ici une concordance avec la vie du Prophte quAllah prie sur lui et

    le salue: encore enfant, le jeune Mohammed accompagnant son oncle lors dun voyage en Syrie fut protg

    du soleil par un nuage qui se dplaait basse altitude au-dessus de sa tte. Ce signe miraculeux permit alors

    au moine chrtien Bhira de reconnatre le Prophte arabe dont ses manuscrits prdisaient la venue imminente.

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    Saint Ab Al ibn es-Sammt. QuAllah nous fasse profiter de la bndiction des

    deux, dans ce monde et celui daprs.

    La transmission de la fonction polaire (qutbah)

    Mon pre quAllah lui fasse misricorde me raconta que le pieux Cheikh et

    rcitateur de Coran, Ab Abdallah en-Nsikh lui relata ceci :

    Je voyageais en compagnie dAb Al et du Cheikh Ab el-Hassan au service

    dAb Al. Alors que nous tions sur le point datteindre la ville de Tripoli, le Cheikh

    Ab el-Hassan dit : Nous emprunterons la route centrale mais le Cheikh Ab

    Al, lui, choisit la route ctire. Ce dernier vit lEnvoy dAllah quAllah prie sur lui

    et le salue qui lui dit : Ab Al, tu es un saint dAllah, le Cheikh Ab el-Hassan

    est un saint dAllah, et Allah narbitre jamais entre deux de Ses Saints propos dun

    chemin (sabl). Prends la route que tu as choisie et laisse-le procder le long de celle

    de son choix .

    Nous suivmes alors nos chemins respectifs pour nous retrouver sur la route

    prs dAlexandrie.

    Une fois la prire du matin accomplie, le Cheikh Ab Al alla vers la tente du

    Cheikh Ab el-Hassan, en compagnie duquel nous tions ce moment. Il entra,

    sassit en face de lui et eut un comportement particulirement rvrencieux son

    gard. Il discuta avec lui dun propos dont nous ne comprmes pas un seul mot et il

    lui dit lorsquil fut sur le dpart : mon Matre, donne ta main que je

    lembrasse . Il embrassa sa main puis partit en pleurant. Nous nous tonnmes de

    son attitude vis--vis de lui. Quand le Cheikh Ab Al fut sur la route, il se tourna

    vers ses compagnons et dit : Jai vu hier lEnvoy dAllah quAllah prie sur lui et

    le salue et il ma dit : Ynus, Ab el-Hujjj el-Uqor tait en Egypte et tait le

    Ple du temps. La nuit dernire, il est mort et Allah lui a fait succd Ab el-Hassan

    ech-chdhil. Alors, je suis venu lui pour prter allgeance au Ple 29.

    Quand nous atteignmes Alexandrie et que les gens sortirent la rencontre de la

    caravane, je vis le Cheikh Ab Al frapper avec sa main le pommeau de selle de son

    chameau et dire en pleurant : gens de cette contre, si vous saviez qui se

    prsente vous dans cette caravane, vous embrasseriez certainement son chameau

    misrable ! Par Allah, la bndiction se prsente vous !

    La cape pourpre

    Ab Abdallah Muhammad en-Nsikh dit aussi : Je marchais derrire le

    Cheikh Ab el-Hassan qui tait dans un palanquin, et vis deux hommes marchant

    29

    Plus littralement : pour faire avec lui le Pacte polaire (bayah el-qutbah) .

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    lombre de sa monture. Lun deux dit lautre : Untel, jai vu Untel mal se

    comporter avec toi alors que tu te comportais bien avec lui. Lautre rpondit : Il

    est de mon pays, et je dirai comme le pote la dit (vers) : "Le fou a vu dans le dsert

    un chien envers lequel il se montrait gnreux et manifestait de laffection. Et ils

    lont blm pour ce quil faisait au chien, et ils lui dirent : Pourquoi as-tu t fait

    un don au chien ? Il rpondit : Cessez le blme car mon il la vu une fois dans

    le quartier de Layla" . Le Cheikh sortit sa tte du palanquin et dit : Rpte ce que

    tu as dit, mon fils. Il rpta ces mots et le Cheikh se mit sagiter dans son

    palanquin puis dit : Cessez le blme car mon il la vu une fois dans le quartier

    de Layla ! , continuant rpter cela encore et encore. Puis il lana vers lui une

    cape30 de couleur pourpre31 en disant : Prends-la et mets-la, tu en es plus digne

    que moi. QuAllah te rcompense, mon fils, avec des bienfaits la mesure de ton

    engagement (ahd).

    Je fis un signe vers lui et dis : Donne-la moi ! Je la pris alors et lembrassai,

    puis saisis une importante somme dargent et la lui offris mais il dit : Par Allah,

    mme si tu devais me donner assez dor pour la remplir, je ne le vendrais pas pour

    cette somme. Ceci est, par Allah, un trsor qui mest parvenu et que jutiliserai

    certainement comme linceul. Par Allah, je nai march lombre de cette litire que

    pour quAllah me fasse misricorde en entendant une des invocations du Cheikh. Je

    sais que la misricorde sest dverse sur lui, alors peut-tre en recevrais-je quelque

    chose. Alors, je sus quil le 32 connaissait mieux que moi.

    Lannonce dun bien

    Le Cheikh dit quAllah soit satisfait de lui : Alors que jarrivai en lEgypte,

    on me dit : Al, les jours dpreuves sont rvolus et les jours de bienfaits sont

    arrivs, la facilit succde la difficult, suivant le modle de ton aeul quAllah

    prie sur lui et le salue .

    La situation du Cheikh Alexandrie

    Sa demeure quAllah soit satisfait de lui Alexandrie tait lune des tours de

    flanquement33, consacre une uvre pieuse (habus) par le Sultan, et dont le droit

    30

    Le mot arabe rend possible ghaffrah (chape, cape, connu en Occident comme un long manteau de

    crmonie agraf par devant et que revtent des religieux pour la clbration de certains offices) ou ghifrah

    (pice dtoffe servant envelopper la chevelure). 31

    Litt. : couleur raisin . 32

    La forme grammaticale arabe laisse deux possibilits : soit le narrateur saperoit que le Cheikh Ab el-

    Hassan connait mieux que lui lhomme qui il donne le vtement ; soit le narrateur ralise que lhomme ses

    cts connait mieux le Cheikh Ab el-Hassan que lui. 33

    de lenceinte de la ville dAlexandrie, qui ne comptait alors, selon la description dIbn Battuta, que

    quatre portes dont bb es-sidrah que nous avons dj mentionne plus haut et bb el-akhdar dont il va bientt

    tre question.

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    dusage lui tait attribu ainsi qu ses enfants. Jy suis rentr en lan 715. Dans sa

    partie basse, il y avait un large rservoir et des enclos pour les animaux ; dans la

    partie mdiane, des logements pour les pauvres et une grande mosque ; dans la

    partie haute se trouvaient les pices nobles o taient ses appartements et ceux de

    sa famille. Cest ici quil se maria et eut ses enfants, dont le Cheikh Chihb ed-dn

    Ahmed, Ab el-Hassan Al et Ab Abdallah Mohammed Charaf ed-dn que jai vu

    lorsque je suis all Damanhr34 lorsquil y rsidait. Parmi ses filles, il y avait

    Zaynab qui eut des enfants, dont certains que je vis, et Arfat-el-khayr que jai

    rencontr Alexandrie. Je nen connais pas dautres que ceux-l. Je mentionnerai ce

    que jai appris des bndictions qui leur sont attaches (barakt), si Allah veut

    Exalt soit-Il. Il rsida ici pendant des annes et durant certaines il sabsentait pour

    le plerinage.

    Le juriste Iz ed-Dn et le plerinage

    Quelquun en qui jai confiance me raconta : Lanne durant laquelle il partit

    pour le plerinage fut celle o eut lieu le mouvement des Tartares contre lEgypte.

    Comme le Sultan tait occup par des oprations militaires quil menait contre eux,

    il napprta pas lescorte pour la caravane des plerins.

    Le Cheikh dressa sa tente Birkah et les gens le suivirent. Les gens

    rencontrrent alors le juriste, juge et mufti Iz ed-Dn ibn Abd es-Salm et lui

    posrent des questions concernant le voyage. Il nest pas permis de voyager,

    rpondit-il, de manire tmraire et sans escorte. Quelquun en informa le Cheikh

    qui dit : Laissez-moi le rencontrer .

    Il le rencontra le vendredi la mosque principale alors quune large foule

    stait rassemble autour deux. Il lui demanda :

    juriste, es-tu daccord que si, pour un homme, le monde entier tait rduit

    la taille dun simple pas, il lui serait permis dentreprendre un tel voyage, quil y

    ait des dangers ou non ?

    Celui qui est dans cette situation sort du champ dapplication de lavis

    juridique (fatw), rpliqua le juge.

    Par Allah, en dehors Duquel il ny a pas dautre dieu que Lui, je fais partie de

    ceux pour qui le monde entier a t rduit la taille dun seul pas ! A chaque fois

    que je vois quelque chose qui provoque la peur chez les hommes, je marche avec

    eux vers un lieu sr. Il ny aura pas dquivoque entre nous devant dAllah35

    quIl soit exalt et magnifi., et Il me questionnera sur la vracit de ce que

    je tai dit.

    34

    Ville une cinquantaine de kilomtre au sud-est dAlexandrie, mi-chemin entre Alexandrie et Tanta. 35

    Le jour du jugement dernier.

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    Alors le Cheikh quAllah soit satisfait de lui voyagea et beaucoup de prodiges

    se manifestrent sur la route, dont le suivant : Des voleurs voulurent attaquer la

    caravane de nuit mais ils trouvrent une muraille dresse autour delle, comme si

    ctait une ville. Aprs laube, ils vinrent lui, linformrent de leurs actes puis

    revinrent Allah en se repentant Exalt soit-Il et voyagrent en compagnie du

    Cheikh pour accomplir le plerinage.

    Quand le plerinage fut achev, les premiers hommes rentrrent au Caire et

    informrent les autres des dons quAllah Exalt soit-Il lui avait accords. Alors le

    juge Iz ed-Dn quAllah lui fasse misricorde sortit pour le rencontrer Birkah,

    qui est un lieu environ six miles du Caire. Alors quil entrait en sa prsence, le

    Cheikh lui dit :

    juriste, par Allah, si je navais t duqu par mon aeul lEnvoy

    dAllah quAllah prie sur lui et le salue , jaurais pris la caravane le jour de

    Arafah, et aurai saut dun seul pas avec elle jusqu Araft.

    Je men remets Allah ! sexclama le mufti.

    Contemple donc cette ralit ! lui rpondit le Cheikh.

    Tous les gens prsents contemplrent la Kaabah et pleurrent. Le juriste laissa

    tomber sa tte entre ses mains, puis lui dit :

    Tu es mon matre dornavant.

    Bien plus, tu es mon frre in ch Allah, rpondit le Cheikh.

    La main du Cheikh sur Sd Md

    Le vnr Cheikh Ab el Azim Md quAllah lui fasse misricorde nous

    relata ceci : Alors que le Cheikh quAllah soit satisfait de lui tait en train de

    parler de la ralit du Cheikh avec ses compagnons, il dit : Sa main sera sur eux

    pour les prserver o quils soient mais je my opposai intrieurement en me

    disant : Cela ne peut tre que par Allah quIl soit exalt et magnifi (l takn

    dhalika ill-Allah).

    Quand vint le matin, je fus envahi par une grande tristesse. Je sortis en dehors

    dAlexandrie et massis sur la plage toute la journe. Aprs avoir fait la prire de

    laprs-midi (asr), jenfonais la tte dans le col de mon manteau lorsque quelque

    chose me secoua. Je pensai que ctait un des fuqar qui plaisantait avec moi mais

    quand je sortis ma tte du manteau, il y avait devant moi une belle femme pare de

    vtements et de bijoux magnifiques.

    Que veux-tu ? lui demandai-je.

    Toi, rpondit-elle.

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    Je prends refuge en Allah !

    Par Allah, je ne vais pas te laisser !

    Alors je la poussai pour lloigner de moi mais elle me saisit vers sa poitrine et

    samusa avec moi comme un enfant joue avec un oiseau. Je navais plus aucun

    contrle sur moi-mme. Elle mobligea aller vers elle et ma nafs finit par la

    dsirer. Soudain, une main me saisit par le col et jentendis le Cheikh me dire :

    Md ! Dans quoi es-tu en train de tomber ? , aprs quoi il me chassa loin delle. Je

    supposai que le Cheikh navait fait que passer par l car en levant la tte, je ne le

    retrouvai ni lui ni la femme. Je mtonnai de cela et compris que ctait survenu

    parce que je mtais oppos lui. Alors je demandai pardon Allah, fis mes

    ablutions et la prire du coucher du soleil (maghreb).

    Je me dirigeai vers la Porte-verte (bb el-akhdar, une des portes de la ville),

    mais toutes les portes de la cit avaient t fermes. En mapprochant, elle souvrit

    delle-mme puis se referma une fois que je fus entr dans la ville [de nos jours dit le

    narrateur, cette porte est ouverte uniquement aprs la prire du vendredi quand

    lEmir et le peuple la franchissent pour aller la plage, aprs quoi elle est referme].

    Jallai la Citadelle et rentrai dans ma chambre en me cachant des fuqar.

    Quand le Cheikh eu fait la dernire prire du soir (ich), les gens prirent

    congs. Chaque nuit, il faisait une runion laquelle venaient les gens des environs

    pour couter ses paroles. Il entra ensuite dans sa cellule (khalwa) et demanda : O

    est Md ? , ils rpondirent : Nous ne lavons pas vu aujourdhui . Il ordonna

    alors : Cherchez-le dans sa chambre . Ils vinrent moi et je leur dis : Je suis

    malade et je ne suis pas venu cause de mon tat . [Une fois revenus], le Cheikh

    leur dit : Portez-le entre vous et amenez-le moi. Ils me portrent et me firent

    entrer en sa prsence. Celui-ci leur ayant ordonn de partir, je massis devant lui en

    pleurant et il me dit : Md, quand jai dit telle et telle chose hier, tu tes oppos

    moi. O tait ma main, aujourdhui, alors que tu tapprtais tomber dans la

    dsobissance ? Celui qui nest pas capable de faire cela nest pas un Cheikh .

    Le voyage nocturne de Sd Md

    Sd Md nous dit aussi : Quand nous tions Damanhr el-Wahch, aprs

    avoir fait la prire de laprs-midi (asr), le Cheikh me donna une lettre remettre

    au Cheikh et juriste Fakhr ed-Dn ibn F'iz Alexandrie, propos d'un besoin qu'il

    avait. Je lui dis : mon matre, demain in ch Allah, je partirai tt dans la

    matine, car ce lieu est un jour de cheval mais il me rpondit : Cette nuit, tu

    partiras et tu me reviendras avec la rponse, in ch Allah Exalt soit-Il .

    Je pris donc une dague que je possdais et partis dans cette direction. J'arrivai

    Alexandrie le plus rapidement possible, livrai la lettre et arrivai lui avant laurore.

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    Sur ma route, je passai par les montagnes d'el-Hjiz o j'entendis un son et des

    bruits de pas. Je pensai qu'il y avait l des voleurs qui allaient m'attaquer au point

    du jour. Je saisis alors ma dague et attendis sur mes gardes mais finalement, je ne

    vis personne.

    Quand je m'assis devant lui [le Cheikh Ab el-Hassan], il me sourit et me dit :

    Md, tu as saisi ta dague pour affronter les voleurs mais le son que tu as

    entendu tait le bruit des anges. Par Allah, tu ne tes pas loign de moi (m

    kharajta min bayna yad) sans que quatre vingt mille anges te protgent par le

    commandement d'Allah Exalt soit-Il, jusqu' ce que tu gagnes Alexandrie et que

    tu nous reviennes.

    Lchoppe dans le dsert

    Une autre fois, Md quAllah lui fasse misricorde nous rapporta ceci : Le

    Cheikh quAllah soit satisfait de lui menvoya dAlexandrie Damiette pour

    quelque chose dont il avait besoin. Il y avait avec nous un homme des gens de cette

    ville qui dsirait voyager avec moi. Il demanda la permission au Cheikh qui la lui

    accorda. Alors que nous approchions de la Porte-du-lotus, lune des portes

    dAlexandrie, lhomme sortit de largent pour acheter du pain et de la sauce. Je lui

    dis :

    Tu nas besoin de rien.

    Allons-nous trouver lchoppe de qui que ce soit dans le dsert ? me

    demanda-t-il alors, puis il mindiqua la boutique dun ptissier de la ville

    dAlexandrie

    Nous trouverons quelque chose de mieux, in ch Allah, lui rpondis-je.

    Jtais en effet habitu, lorsque je voyageais, ne jamais prendre de provisions.

    Quand javais faim, jentendais sa parole derrire moi disant : O Md, va droite

    et tu trouveras de quoi manger , et de la mme faon, quand javais soif, je trouvai

    un repas excellent et de leau douce.

    Nous sortmes alors dAlexandrie et marchmes avec hte jusqu ce que le jour

    ft assez avanc. Il me dit alors : O Md, donne-moi quelque chose manger car

    jai faim . Comme dhabitude, jentendis la voix du Cheikh qui me dit : O Md,

    ton hte a faim, va droite et tu trouveras de quoi le nourrir . Quittant la piste du

    ct droit, nous trouvmes un talage rempli de kounafa36 sucrs imprgns de

    musc et deau de rose, et nous en mangemes jusqu tre repus. Lhomme pleura et

    fut surpris de ce quil venait de voir. Je lui demandai : Laquelle des deux est la

    meilleure, cette nourriture ou celle que tu mindiquais dans la boutique du

    36

    Type de gteau base de cheveux danges et de sirop de miel.

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    ptissier ? Il rpondit : Par Allah, je nai encore rien vu de semblable et une telle

    chose naurait jamais pu tre ralise, mme dans le palais du roi des rois ! .

    Il voulut rassembler les restes mais je len empchai et il les laissa comme ils

    taient. Aprs avoir march sur une courte distance, nous emes soif.

    Instantanment, la parole du Cheikh me dit : O Md, va droite et tu trouveras

    de leau . Nous trouvmes un bassin deau douce dans le sable, nous en bmes,

    puis nous nous allongemes pendant un certain temps. En nous levant, nous ne

    trouvions plus une goutte deau. Lhomme demanda :

    O est leau qui tait cet endroit ?

    Je nen sais rien, lui rpondis-je.

    Par Allah, la matrise de ce Cheikh est immense. Par Allah, je ne retournerai

    pas parmi les miens tant que je naurais pas obtenu ce que ce Cheikh a obtenu,

    ou mourrai en Allah Exalt soit-Il .

    Puis il laissa son manteau avec moi et marcha dans le dsert en sexclamant :

    Allah ! Allah ! .

    Quand jeus fini mon voyage et revins auprs du Cheikh ech-chdhil, il me dit :

    Md, tu as gar ton hte.

    Cest toi qui la gar, lui rpondis-je, en le nourrissant de gteaux sucrs

    dans le dsert et en tanchant sa soif avec leau dans le sable.

    Il est pass parmi ceux qui sen sont alls vers Allah Exalt soit-Il .

    Sauv dans le Haram

    Une autre fois, le Cheikh Md quAllah lui fasse misricordenous

    raconta : Une anne parmi dautres, jallai au plerinage avec son autorisation.

    Quand jeus accompli les rites du plerinage et arrivai aux circumambulations du

    Tawf el-Wada37, les gens de la Mecque se levrent contre les plerins qui taient

    encore dans le Haram et les volrent. Comme javais sur moi des objets que dautres

    personnes mavaient confies (amnt li-ns), jentrai dans le hijr et restai debout

    sous la gouttire (mizn). Je me dis alors : Si je sors, je serai dpouill, et si je

    massois, je massois avec les biens des gens . Perplexe dans cette situation,

    jappelai le Cheikh mon secours et soudain, il tait Bb Nadwah38 en train de me

    faire signe. Je me prcipitai vers lui mais il se tourna et sloigna de moi. Je le suivi

    mais fus incapable darriver lui jusqu ce quil entre dans la caravane. Quand

    jentrai dans cette caravane, je le cherchai mais ne le trouvai pas.

    37

    Le Tawf el Wada (Tawf dadieu) est le rite de circumambulation que le plerin accomplit juste avant

    de quitter la ville sainte de la Mecque. 38

    C'est--dire en face et lgrement droite lorsque lon se trouve dans le hijr, dos la Kabh.

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    En regagnant lEgypte, je vins lui et le saluai. Il me questionna sur ma

    situation et me dit : Mad, quand la situation sest empire pour toi et que tu

    nous as appel, nous sommes venus toi et tavons sauv .

    La visite du Prophte quAllah prie sur lui et le salue

    Sd Md me raconta galement ceci : Une anne, je fis le plerinage avec lui.

    A notre arrive dans la ville sainte de Mdine, il sarrta devant la porte de la

    Mosque de lEnvoy dAllah quAllah prie sur lui et le salue et attendit la

    permission dentrer. Il dit alors : Cest un lieu propos duquel Allah a dit :

    vous qui croyez, nentrez pas dans les demeures du Prophte sans y avoir t

    autoriss 39. Il resta ainsi jusqu ce que la permission dentrer lui ft accorde,

    puis il entra et se tint debout devant la face de lEnvoy dAllah quAllah prie sur

    lui et le salue .

    En dcouvrant sa tte, il pronona ceci : Que les prires dAllah, de Ses Anges,

    de Ses Envoys, de Ses Prophtes et de toutes Ses cratures peuplant Ses Cieux et Sa

    Terre soient sur Toi, notre Matre, Envoy dAllah, ainsi que sur tous Tes

    compagnons .

    Il se mit le rpter, encore et encore, jusqu ce quil fut pris dun tat spirituel

    trs puissant (hl adhm) et continua jusqu ce que ce quil sen apaise. Il sassit

    ensuite sur un ct de lenceinte sacre et dit : Quand jtais en train de le saluer,

    jai eu un dvoilement (kachf) de lui dans lequel je le saluais et il me rendait ma

    salutation avec son index .

    A cet instant, Ab Mohammed Abd el-Azz ez-Zaytun, qui tait surveillant de

    la nourriture des fuqar entra et dit : mon matre, un de nos chameaux est mort

    et son chargement gt au sol. . Le Cheikh lui rpondit : Par Allah, sd, je nai cet

    instant ni argent ni or en ma possession et lui ordonna de sassoir.

    Il sassit parmi nous et nous formions un cercle autour de lui. Il mit sa tte dans

    son manteau pendant un temps, puis len sortit et dit : Abd el-Azz, viens prs

    de moi . Nous approchmes de lui et le Cheikh lui dit : Mets ta main dans ma

    poche et prends ce qui sy trouve . Il y introduisit sa main et la ressortit pleine dor.

    Le Cheikh dit : Regardez-les ! Par Allah, aucun batteur ne les a frappes et aucun

    orfvre ne les a faonnes. Il ma juste t dit : Al, prends ce qui est dans ta

    poche . Puis il lui demanda dacheter un chameau et les provisions dont il avait

    besoin pour les fuqar.

    Ab Mohammed Abd el-Azz tait lun des plus illustres de ses compagnons.

    Un jour, alors quil faisait des prires (du) Araft, le Cheikh dsigna

    39

    Sourate 33, verset 53

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    spcifiquement Ab Mohammed, et lui seul, pour dire amn aprs sa prire. Une

    fois celle-ci termine, il dit : Par Allah, jai demand en ta faveur un badal et un

    khalfah. Puis il lui dit : Sd, qui est le badal et qui est le khalfah ? , ce quoi

    le Cheikh rpondit : Tu es le badal et je suis le khalfah.

    Sourate ech-chr

    Le Cheikh, pieux, juriste et mufti Jaml ed-Dn Ysuf lirakien me relata dans la

    ville du Caire en lan 715 : Jentendis sd Cheikh, le saint connaissant par Allah,

    Ab el-Abbs el-Murs quAllah nous fasse profiter de sa barak dire : Je

    faisais la prire de laube (ubh) derrire mon matre, Cheikh et instructeur, Ab el-

    Hassan qui rcitai la sourate ech-chr. Arriv ces mots : Il cre ce qu'Il veut. Il

    donne qui Il veut des femelles et Il donne qui Il veut des mles. Ou bien Il donne

    et des mles et des femelles, et rend strile qui Il veut 40, il survint dans mon esprit

    quelque chose en rapport avec ce sens.

    Quand le Cheikh eut accompli la salutation terminale de la prire, il me dit :

    Ab el-Abbs, "Il donne qui Il veut des femelles", cest--dire des devoirs religieux

    (ibdt) et des actes dadoration (mumalt) ; "et Il donne qui Il veut des mles"

    cest--dire des tats spirituels (ahwl), des sciences ('ulm) et des stations

    (maqmt) ; "Ou bien Il donne et des mles et des femelles", les runissant en celui

    quil veut parmi Ses serviteurs, et Il "rend strile qui Il veut" , cest--dire, sans

    science (ilm) et sans pratiques ('amal). Je mtonnais de cela et il ajouta : Par

    Allah, rien nest survenu lesprit de quiconque durant cet acte dadoration sans

    quAllah ne lait port ma connaissance.

    Livresse du fils du Cheikh

    Le saint Cheikh Ab el Azim Md quAllah lui fasse misricorde me relata

    ceci : Le Cheikh quAllah soit satisfait de lui avait un enfant du nom de Al.

    Une fois, je le rencontrai saoul Alexandrie. Je le ramenai chez lui et le frappai si

    svrement quil saccrocha sa mre. Je le tirai alors vers moi avec une telle force

    quil arracha de ses mains les fils qui tenaient ses cheveux. Celle-ci cria et se mit

    pleurer, si bien que le Cheikh vint elle et lui demanda : Pourquoi est-ce que tu

    pleures ? Elle lui raconta alors lhistoire, mais sans linformer de livresse de son

    fils. En entendant cela, le Cheikh se troubla. En entrant dans la zwiyah, il me

    demanda : Md, pourquoi as-tu fait une telle chose ? Je lui rpondit : Parce

    que je lai trouv saoul. Par Allah, mme sil stait accroch toi, je laurais flagell

    conformment la peine lgale. Il me dit : Cest ainsi , et son visage se troubla.

    Il entra alors dans sa cellule un certain temps puis my fit mander. Quand

    jentrai chez lui, je le trouvai heureux et rjoui. Il me dit : Md, je suis entr ici

    40

    Sourate 42, versets 49 et 50.

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    avec la volont de faire des invocations contre mon fils mais il ma t dit : " Al,

    quest-ce que ceci entre toi et Mon saint ? Laisse-le jusqu ce que Jai dcrt pour

    lui se ralise !"

    Peu de temps aprs, il partit en prgrination (siyha), apparu dans les rgions

    du Maghreb et alors sa saintet se rvla. QuAllah nous fasse profiter de lui et de

    son enfant !

    Chihb ed-Dn scrut par le Cheikh

    Quelquun en qui jai confiance me relata ceci : Quand le fils de Ab el-Abbs

    Ahmad [el-Murs], appel Chihb ed-Dn, eut atteint la pubert, sa mre dit [au

    Cheikh Ab el-Hassan]: Sd, mon fils Ahmed est devenu un homme et il lui dit :

    Amne-le moi que je le conseille et linstruise des obligations qui psent dsormais

    sur lui parmi les droits dAllah.

    Elle fit mander son fils qui sassit devant lui. Il le regarda un certain temps, le

    scrutant, puis dtourna de lui son regard et lui dit : Lve-toi mon fils, quAllah te

    guide et il fit beaucoup de prires pour lui. Une fois parti, sa mre lui dit : sd,

    je ne tai pas entendu le conseiller, ni mme lui adresser le moindre mot. Il lui

    rpondit : Quand il sest assis devant moi, Allah ma permis de voir les secrets de

    sa vie future et je nai rien trouv dans ses uvres qui meut permis de lui faire une

    quelconque recommandation. Alors, devant Allah, jai trouv que je ne mriterais

    pas de lui parler.

    Tmoignages propos de Arfat-el Khayr, fille du Cheikh

    Son petit-fils jai un doute propos de son nom mais il sagit du fils de la fille

    du Cheikh quAllah soit satisfait de lui me raconta dans la mosque del-Azhar

    au Caire : Quand la fille du Cheikh naquit, mon pre, Al de Damanhr, vint

    auprs du Cheikh pour le fliciter de sa naissance. Cest ta femme lui dit-il. Mon

    pre qui tait dj trs g se dit intrieurement : Comment est-ce possible alors

    que jai atteint un tel ge ? . Oui, et natront de vous untel et untel , confirma

    alors le Cheikh en dnombrant pour lui tous leurs enfants. Puis il ajouta : En

    vrit, Allah men a inform. Alors, il lpousa et ils eurent les enfants que le

    Cheikh leur avait annonc. Puis il mourut Alexandrie quAllah lui fasse

    misricorde .

    Lauteur raconte galement : A Alexandrie je rencontrai sa digne et vertueuse

    fille, Arfat-el Khayr, surnomm el-wajhiyah qui tait aveugle cette poque. Je

    linterrogeai propos de son nom : Pourquoi ta-t-on attribu deux noms ? et

    elle me rpondit la chose suivante : Quand je suis ne, mon pre tait au Caire. Il

    crivit ma mre pour lui dire : "Pendant que je priais dans ma cellule (khalwa), jai

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    su que ma fille tait ne et il ma t prescrit de la nommer Arfat-el Khayr." A son

    arrive Alexandrie, il demanda ma mre : "O est ma fille qui vient de natre ? ".

    Ma mre me prsenta lui et Il me plaa sur sa poitrine puis crachota un peu de

    salive dans ma bouche41 en disant : "Bienvenue Wajhiyah (marhaba bi-l-

    wajhiyah)", c'est--dire celle quil a connu pendant quil accomplissait la prire de

    nuit (tawajjuh).

    Cette femme tait une des saintes dAllah auprs de qui on psalmodiait le Coran

    selon les sept modalits de lecture [pour tre corrig], de derrire un voile de

    sparation. Et quelle noble femme tait-elle !

    Le pieux Cheikh Ab Abdallah Mohammed, fils du Cheikh et saint Ab

    Abdallah Mohammed ibn Sultn, me raconta que quelquun dAlexandrie en qui il

    avait confiance, lui dit ceci : Jtais prsent lenterrement de la noble Arfat-el

    Khayr Alexandrie. Quand elle fut descendue dans sa tombe, un de ses parents

    descendit en vue de la placer dans la niche latrale (lahd) et ressortit du caveau en

    souriant : Lorsque jai dcouvert son visage pour la placer dans la niche latrale,

    elle sest tourne vers moi et sest mise rire. Je lui ai demand Quy a-t-il ? . Elle

    ma rpondu : Cest cause de ce que jai vu de la rcompense dAllah Exalt

    soit-Il pour moi, et je tinforme que tu me rejoindras dans trois jours. ; et il

    mourut effectivement trois jours plus tard quAllah lui fasse misricorde .

    Lorsquelle mourut, un hraut annona Alexandrie : Venez faire la prire sur

    la noble et pieuse Arfat-el Khayr qui sortit dans ce bas-monde trois reprises : une

    fois du ventre de sa mre, une fois vers la maison de son mari et une fois vers sa

    tombe .

    Laltercation avec un groupe de Berbres

    Parmi ses compagnons Tunis, il y avait le Cheikh le Connaissant Ab Al, sd

    Slim et-Tabs qui rsidait parmi les gyptiens. Jai entendu le Cheikh Md

    quAllah lui fasse misricorde dire : Sd Slim avait un fils nomm Al. Dans

    le quartier des gyptiens, une altercation clata entre les hommes de la ville et un

    groupe de berbres vivant sous des tentes qui stait tabli non loin de l. Ab el-

    Hassan Al, fils du Cheikh Slim, arriva une canne la main pour sinterposer mais

    la canne entra dans lil de lun des Berbres et larracha. Alors quils se

    rassemblaient autour de lui pour tenter de le tuer, Ab Al, sd Slim, sortit et leur

    dit : Demain matin, in ch Allah, mon frre Ab el-Hassan viendra pour juger

    laffaire entre vous et lui. Le lendemain matin, le Cheikh Ab el-Hassan se

    prsenta eux. Ils lui tendirent un tissu la porte de la chambre o vivait sd

    Slim. Quand le Cheikh sortit vers lui, il dit : Je suis venu pour ton fils Al.

    41

    Pratique prophtique.

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    Alors que tout le monde stait runi devant les deux hommes, sd Ab el-

    Hassan sadressa eux :

    Choisissez si vous voulez prendre mon frre Slim comme tribut (diyah) pour

    lil de votre compagnon ou si vous acceptez cinq cent dinars.

    Nous accepterons les cinq cents dinars, rpondirent-ils, condition que nous

    les ayons entre les mains avant notre dpart.

    Vous parlez comme si vous considriez les fuqar incapables de fournir de

    largent ! rpondit le Cheikh.

    Il mit alors sa main sous le tissu qui tait tendu, et par Allah, et je le vis en

    sortir des pices de monnaie et les leur donner. Ils les comptrent jusqu ce quils

    eurent obtenu la totalit des cinq cents dinars puis partirent.

    Aprs cela, il se tourna vers sd Slim et lui dit : mon frre, ils tont vendu

    pour quelques carats. Sils tavaient choisi, ils auraient obtenu la richesse de ce

    monde-ci et de lau-del. Mais, par Allah, le mois ne se terminera pas avant quil

    aient perdu [cette somme] et quils aient besoin des fuqar.

    Aprs avoir quitt les Egyptiens, ceux-ci furent effectivement pills et revinrent

    pauvres et ncessiteux en implorant de quoi se vtir auprs de la zawiya.

    Le pacte avec Cheikh Slim

    Quand le Cheikh, bni, sd Slim, mourut parmi les Egyptiens, nous sortmes

    en accompagnant le Cheikh quAllah soit satisfait de lui pour assister ses

    funrailles. En entrant dans la maison o il se trouvait, le Cheikh dit : Paix soit sur

    toi . Le Cheikh rpondit de lintrieur du linceul : Et que sur toi soit la paix,

    mon frre, ainsi que la Misricorde et la Bndiction dAllah. Il y avait devant nous

    un petit enfant, le petit-fils du Cheikh Slim qui sortit dehors en disant : Par Allah,

    mon grand-pre est vivant, il a rendu la salutation au Cheikh Ab el-Hassan ! .

    Le Cheikh le lava de ses propres mains, lenveloppa, puis lembrassa entre ses

    yeux et dit : Mon frre par Allah, fais attention ne pas oublier le pacte (ahd)

    pass entre toi et moi . Je jure par Allah que je le vis ouvrir ses yeux et

    rpondre : Oui, mon frre . Quand nous emes rcit la prire des morts sur

    lui et aprs lavoir enterr, je demandai au Cheikh : mon Matre, quel est ce

    pacte entre toi et lui ? . Il me rpondit : Nous avons fait le pacte devant Allah que

    celui de nous qui mourrait le premier serait pour lautre un moyen daccs (wsilah)

    auprs dAllah. Il a t enterr parmi les Egyptiens. QuAllah lui fasse misricorde

    et nous fasse bnficier de leur baraka.

  • Biographie du Cheikh Ab el-Hassan ech-chdhil V3 - Rajab 1434 - 2013

    Travail ralis et offert par lquipe de traduction du Porteur de Savoir | 29

    Dispute avec un groupe de Moutazilites

    Quelquun de confiance me raconta quil a entendu le Cheikh pieux Ab Marwn

    Abd el-Malik, connu sous le nom del-Qasst, dire : Quand je voyageai en Egypte

    et entrai Alexandrie, jallai voir le Cheikh quAllah soit satisfait de lui et le

    trouvai assis avec un groupe de gens. Ils dbattaient propos de science (ilm).

    Quand je leus salu et fus assis devant lui, il me demanda : Quel est ton nom, do

    viens-tu et quelle cole appartiens-tu ? . Je linformai de mon nom, de mon pays

    et que ma proccupation tait le Livre dAllah quIl soit exalt et magnifi. Il me

    dit : Rcite pour moi un verset du Livre dAllah . Je prononai la formule de prise

    de refuge en Allah, et Allah libra ma langue : Mets ta confiance en Allah. Tu es,

    certes, dans la pure Vrit42 jusqu : La Parole tombera sur eux cause de leurs

    iniquits mais ils resteront muets43. Le visage du Cheikh quAllah soit satisfait de

    lui sillumina. Il se tourna alors vers ceux qui taient prsents et dit : Aprs une

    preuve dAllah, plus aucune preuve nest ncessaire . Je sus alors que ctait un

    groupe de Moutazilites et que le Cheikh dbattait avec eux propos de leur systme

    de croyances. Allah avait fait sortir par ma langue, du Livre dAllah, ce qui les avait

    guids vers la Vrit. Ils abandonnrent leur systme de croyances (madhhab), se

    repentant devant lui et retournrent la Vrit et la Sunna.

    Il quAllah soit satisfait de lui me dit : Demande-moi ce que tu veux et je

    lui rpondis trois choses : Que tu me vtisses dun vtement, que tu mindique

    quelquun avec qui je pourrai apprendre psalmodier le Livre dAllah et que tu

    demandes le bien pour moi . Il me donna un vtement neuf, mindiqua un bon

    professeur du nom de Ibn ed-Dahhn et me dit : QuAllah incline vers toi le cur

    des meilleurs. QuIl te bnisse dans tout ce quil te donne et tapporte la flicit la

    fin de ta vie .

    Par Allah, jai vu la ralisation des deux premires demandes et jespre dAllah

    le troisime .

    42

    Sourate 27, verset 79. 43

    Sourate 27, verset 85. Entre ces deux versets, le texte coranique dit : Mets ta confiance en Dieu. Tu es,

    certes, dans la pure Vrit. Tu ne saurais faire entendre les morts ni faire entendre l'appel aux sourds quand ils

    se dtournent. Tu ne saurais non plus tirer les aveugles de leur garement. Tu ne fais entendre que ceux qui

    croient en Nos signes et qui sont soumis Dieu (muslimn). Lorsque la Parole tombera sur eux, Nous ferons,

    pour eux, sortir de la terre une bte qui les interpellera, proclamant que les hommes ne croyaient pas

    fermement Nos signes, le Jour o Nous rassemblerons, de chaque nation, une multitude de ceux qui niaient la

    ralit de Nos signes, ils seront placs en rangs. Quand ils seront arrivs, Dieu leur dira : " N'avez-vous pas ni

    la ralit de Mes signes alors que vous ne saviez rien d'eux ? Que faisiez-vous donc ? " La Parole tombera sur

    eux cause de leurs iniquits mais ils resteront muets.

  • Biographie du Cheikh Ab el-Hassan ech-chdhil V3 - Rajab 1434 - 2013

    Travail ralis et offert par lquipe de traduction du Porteur de Savoir | 30

    Lascse vritable

    Mon Matre Md quAllah lui fasse misricorde me raconta : Le Cheikh

    parlait un jour dans son assemble (majlis) de lascse (zuhd) dans le bas-monde. Il

    y avait dans lassemble un homme pauvre habill de vtements compltement uss,

    tandis que le Cheikh tait vtu de beaux habits. Le pauvre dit alors : Comment le

    Cheikh peut-il parler de lascse en portant de tels vtements ? Cest moi qui suis

    lascte du bas-monde ! . Le Cheikh rpliqua : Toi le querelleur, tes vtements

    sont les vtements de la convoitise de ce bas-monde (raghbah f-d-duniy), et

    tmoignent de la poursuite de la pauvret tandis que nos vtements tmoignent de

    labstinence (taaffuf) et de la richesse spirituelle (ghin) ! Alors le pauvre se leva

    devant les gens et dclara : Par Allah lImmense ! En vrit, je me dis la mme

    chose en mon for intrieur ! Je demande pardon Allah et me repends Lui . Puis

    le Cheikh mordonna de le vtir de beaux vtements.

    Les deux juristes

    Quelquun dautre dont je reconnais lautorit ma racont : Parmi ceux qui

    suivaient son enseignement dans la ville de Tunis, il y avait deux excellents juristes,

    Ibn-Sawdn et Ibn-Rimh. Lun dentre eux tait secrtaire du juge Ab Zayd ibn

    Nafs, chef de la justice cette poque, et se trouvait constamment avec lui. Lautre

    soccupait de la rserve de nourriture qui ncessitait une surveillance quotidienne.

    Quand le Cheikh quAllah