Billard Cm Paleopathologie 2010

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  • MASTER 1 HISTOIRE, PHILOSOPHIE ET DIDACTIQUE DES SCIENCES OPTION : PHILOSOPHIE DU SOIN ET ANTHROPOLOGIE MEDICALE

    (Anne 2009-2010)

    Premire partie

    PALEOPATHOLOGIE : PRINCIPES ET METHODES

    Dr Michel Billard La connaissance de lanatomie est essentielle pour la comprhension de lhistoire biologique humaine. Que ce soit lhistoire de lvolution de notre espce, ou la connaissance de notre relation nos environnements passs et prsents, nous devons tudier lhistoire biologique des restes humains anciens que nous dcouvrons. A partir de leur squelette, il est possible de dterminer le sexe des individus, leur ge au moment du dcs, une approche particulire de leur tat de sant, et de reconstituer une certaine ide de la qualit de vie de ces populations anciennes. A ce titre, la palopathologie (de paleos ancien , pathos maladie , et logos science ) est la discipline scientifique situe justement au carrefour de la mdecine, de lhistoire, de larchologie et de la gologie. Elle se dfinit comme la recherche et ltude des traces de maladies sur les restes fossiles humains et animaux au mme titre que lanthropologie mdico-lgale le ferait sur les restes rcents. Les restes osto-archologiques provenant des fouilles ou des collections musographiques constituent son abondant matriel dtude. 1. OBJET ET BUTS DE LA DISCIPLINE Si lorigine, les travaux en palopathologie ntaient que des descriptions de cas individuels, cherchant tablir un diagnostic daffection spcifique et son anciennet, les dernires dcades ont mis laccent sur ltude des populations anciennes. La rflexion scientifique sest ainsi oriente dune dimension mdico-historique une dimension plus organise autour de problmatiques archologiques et pidmiologiques. Le thme dominant la recherche palopathologique est prsent dvaluer la frquence des maladies lchelle des populations en fonction de leurs caractristiques culturelles, socio-conomiques et dmographiques apportes par les sources archologiques ou historiques. 2. HISTORIQUE DU DEVELOPPEMENT DE LA DISCIPLINE Le terme de palopathologie apparat en 1892 avec Schufeldt, mais cest ds la fin du 18me sicle la premire moiti du 19me sicle, que sont publies les premires descriptions sporadiques daffections osseuses (traumatologie, rhumatismes) sur des animaux fossiles (Esper, 1774 ; Cuvier, 1820), posant dj la problmatique du diagnostic rtrospectif (Schmerling, 1835), et la rvision critique des cas recenss (Mayer,1854). La seconde moiti du 19me sicle voit les premires tudes sur lhomme prhistorique , qui constatent que les lsions sur los ancien ressemblent celles des patients en clinique ou des muses danatomie pathologique : fractures et caries chez lhomme de Nanderthal (Schaafhausen, 1858), premire description des trpanations prhistoriques, distinguant trpanations chirurgicales et posthumes (Broca,1874), tude des lsions pathologiques des

  • animaux quaternaires dEurope Centrale (Wirchow, 1895), premire thse de mdecine sur la pathologie de lhomme prhistorique (Le Baron, 1881), premier essai de radiographie de momie (Knig,1896). Les trente premires annes du 20me sicle constituent lge dor de la palopathologie, avec le dveloppement des techniques radiographiques, srologiques, histologiques (palopathologie organique). Les tudes de momies et squelettes gyptiens (Elliot-Smith, Wood-Jones, 1910) et prcolombiens (Hrdlicka,1914 ; Mc Curdy,1923) se multiplient, ainsi que la premire compilation de la connaissance palopathologique de lpoque (Moodie, 1923). Cest avant le premier conflit mondial que la palopathologie devient vritablement une discipline mdico-historique avec Ruffer qui fixe les limites de son champ daction, et plus tard avec Pales (1930), qui tudie lvolution des pathognies par lapproche historique des maladies et la pathologie comparative. Les annes dentre-deux guerres voient les premires tudes palopathologiques de populations, avec linfluence de lenvironnement, de lalimentation et de la culture (Hooton, 1930). De 1930 1960, il ny a rien eu dinnovant mis par les travaux de Mller-Christensen (1953) sur les lsions osseuses palopathologiques de la lpre qui ont permis une avance dans la connaissance de cette affection, et ceux de Hackett (1963) sur les trponmatoses. Avec les annes soixante, linvestigation palopathologique de masse va stendre avec une dmarche mdico-historique et lanalyse statistique de caractristiques physiologiques et daffections mineures, pour connatre le mode de vie des populations anciennes lexemple de Wells (tude diachronique dun peuplement sur les les britanniques), qui dcrira galement la pseudopathologie (1964), et contribuera au dveloppement de la palopathologie en France. Angel dveloppera une approche palopidmiologique des pathologies dans leur contexte social. Cest aussi la publication douvrages de synthse palopathologique de Jarcho (1966), Wells (1964) et Brothwell & Sandison (1967). Les annes soixante dix ont vu le dveloppement des deux composantes de la palopathologie : lostoarchologie et sa dmarche palodmographique et statistique de grandes sries dossements: les squelettes deviennent des archives biologiques tmoignant du pass dmographique, social et conomique des populations anciennes historiques, pouvant tre compares aux textes (Angel, 1971). Et la palopathologie organique avec Cockburn (1973) qui codifie lautopsie et les protocoles pluridisciplinaires dtude des momies. Il fonde la Paleopathology Association aux USA. La palopathologie commence a tre rgulirement enseigne en France : de Lumley Marseille, Dastugue Caen, Grmeck Paris, Enselme, Morel et Perrot Lyon (o se tiendra le premier Colloque Franais de Palopathologie en 1973). Les principales publications sont des aides au diagnostic interprt sur les bases de la pathologie clinique (Steinbock, 1976 ; Ortner & Putschar, 1981), une approche bio-culturelle (Armelagos & McArdle, 1975 ; Cohen & Armelagos,1984) ; les plus rcentes synthses sont dites avec Aufderheide & Rodriguez-Martin (1998), Rothschild & Martin (1993), Dastugue & Gervais (1992), Thillaud (1994) et Charlier & al. (2008). Tous les quatre ans se tient le Congrs Europen de lAssociation de Palopathologie ; Lyon la accueilli en 1988. Tous les ans se runissent les membres du Groupement des Palopathologistes de Langue Franaise (GPLF) dans une ville universitaire o la discipline est enseigne.

  • 3. MATERIEL DETUDE EN PALEOPATHOLOGIE Le matriel dtude le plus abondant est constitu des tissus calcifis de lorganisme (os et dents), et plus rarement de tissus mous secondairement calcifis (sreuses, ganglions, fibromes, kystes) ou des lithiases rnales, vsicales ou vsiculaires. Il peut sagir de restes humains conservs naturellement ou momifis, ou de coprolithes (dont ltude relve de la palopathologie organique et de mthodes drives de lanatomie pathologique et mdico-lgales), ou dempreintes corporelles (mains, pieds). Ce cours ne traitera que des restes squelettiques, et des os en particulier.

    3.1. Morphologie osseuse macroscopique Chez l adulte, los se prsente sous trois aspects : long, plat et court : Los long : Le modle classique de description est celui des os longs des membres

    (ex : humrus, fmur, tibia) qui est constitu dune partie centrale cylindrique (diaphyse) et de deux extrmits largies et arrondies (piphyses) o se situe la surface articulaire : los sous-chondral (recouvert de cartilage hyalin chez le vivant); la zone conique runissant lpiphyse la diaphyse est la mtaphyse. La forme particulire des os longs leur confre la capacit de rsister aux forces de tension, de torsion, de traction et de cisaillement. On observe des reliefs (apophyses, tubercules, crtes,) et des creux (gouttires, fosses, chancrures,) correspondant des attaches musculo-tendineuses ou ligamentaires, ou au passage de paquets vasculo-nerveux ou de structures tendino-ligamentaires. Macroscopiquement sur une coupe longitudinale ou transversale de la diaphyse, on distingue los cortical ou compact (compos dos haversien, cf. infra) dlimitant au centre une cavit mdullaire ; au niveau mtaphysaire et piphysaire, los compact des parois samincit (os priostique, cf. infra) et la section est compose par los trabculaire ou spongieux. Chez le vivant lensemble est recouvert de prioste (sauf au niveau de los sous-chondral et des insertions tendineuses et ligamentaires). Le degr de porosit permet de distinguer los cortical (5-30%), constituant principal de los compact des parois diaphysaire, de los trabculaire (30-90%), situ au centre de la diaphyse et surtout dans la mtaphyse et lpiphyse, ainsi que les os courts et plats.

    Los court : il possde une mince couche dos priostique en guise de corticale, un

    centre entirement fait dos spongieux et des facettes dos sous-chondral (ex : os du carpe, du tarse).

    Los plat : la couche interne est faite dos spongieux, limite par des couches externes

    dos priostique (ex : diplo des os de la vote du crne et ses tables interne et externe).

    3.2. Le tissu osseux Le tissu osseux est un constituant essentiel de lappareil squelettique, important pour lorganisme sur le plan biomcanique et mtabolique. Il est compos de cellules incluses dans une matrice organique fibreuse dont la rigidit est assure par un dpt de sels minraux.

  • Cette rigidit confre au squelette une fonction de soutien du corps, de protection dorganes vitaux, de support aux muscles, tendons et ligaments permettant les mouvements grce aux articulations. Il constitue une rserve de sels minraux (calcium) indispensables lhomostasie. Le tissu osseux est une structure dynamique en perptuel remaniement durant toute la vie (produit par les ostoblastes, modifi par les ostocytes et dtruit par les ostoclastes). Il est capable de sauto-rparer, dadapter masse, forme et proprits intrinsques aux sollicitations biomcaniques. Pendant la croissance, le remaniement a une fonction structurale et morphologique ; plus tard, il adapte larchitecture osseuse aux stress biomcaniques. La croissance en longueur seffectue au niveau des mtaphyses : lpiphyse est spare de la mtaphyse par une plaque cartilagineuse lactivit cellulaire intense qui est remplace chez ladulte par de los spongieux provoquant une soudure entre piphyse et mtaphyse. La croissance en paisseur seffectue par une ostoformation sous-prioste (ossification priostique ou prichondrale). On dcrit deux catgories de types cellulaires dans le tissu osseux: Les cellules ostoformatrices : elles ont des aspects morphologiques correspondant

    des tats fonctionnels diffrents dune mme cellule :

    o les cellules souches ostoprognitrices (drivent du msenchyme, prsente au niveau du prioste, de lendoste, cellules bordantes entre tissu osseux et conjonctif ; ce sont des ostoblastes inactifs pouvant tre activs).

    o les ostoblastes (fabrication du collagne et de la substance fondamentale

    ostode, production denzymes pour la minralisation).

    o Certains ostoblastes semmurent progressivement par leur production pour devenir des ostocytes jeunes communiquant entre eux par des prolongements fibrillaires abrits dans des canalicules permettant au sang dapporter ses substances nutritives (rle dans la maturation de la substance ostode pr-osseuse et sa minralisation, et dans lhomostasie calcique).

    Les cellules ostorsorbantes : ostoclastes ont un rle de rsorption osseuse (lacunes

    de Howship) en sparant la fraction minrale des fibres collagnes par scrtion dacides organiques (citrates lactates), et digestion enzymatique de la matrice organique (hydrolases acides) ; les ostocytes possdent aussi un pouvoir rsorbant localis autour de leur loge (ostoplaste) qui peut slargir dans certaines pathologies (hyperparathyrodie).

    Le tissu osseux comprend une matrice extracellulaire o on distingue : une matrice organique compose de collagne et de substance fondamentale

    protinique osteode. Si la synthse dostode est incorrecte, lostoclasie nest pas contrebalance par lostoformation ce qui entrane une rduction quantitative de masse osseuse par unit de volume, los est normalement constitu mais en quantit insuffisante (cest une maladie de lostoblaste) : ostopnie quantitative (ostoporose, maladie de Cushing).

    une matrice inorganique rservoir de sels minraux (27% de calcium, 12% de

    phosphore) qui remplacent leau de la substance ostode au cours de la

  • minralisation. Ces sels minraux prcipitent en cristaux dhydroxyapatite fixs le long des fibres collagnes [Ca10 (PO4)6 (OH) 2]. Si la phase de minralisation est anormale, los nest pas correctement minralis, il est plus mou et mcaniquement peu rsistant : cest lostopnie qualitative (ex : hyperparathyrodie secondaire) ; dans certaines circonstances, certains lment comme le strontium et le plomb peuvent se substituent au calcium.

    Il existe une classification histologique du tissu osseux selon la dispersion des fibres collagnes : tissu osseux immature (os fibreux rticul): os de faible rsistance mcanique daspect

    microscopique anarchique, fibres paisses irrgulirement agences, ostocytes nombreux dans de vastes loges communicantes, multiples zones de production et de rsorption traduisant une intense activit du tissu osseux jeune (os ftal et aussi au cours de circonstances pathologiques : cal de fracture, priostites, tumeurs ostogniques).

    tissu osseux fascicul : les fibres collagne sentremlent aux fibres ligamentaires qui

    sattachent los (os alvolaire des maxillaires). tissu osseux lamellaire mature : fibres conjonctives organises en lamelles spares

    dostocytes. On distingue le tissu osseux compact des adultes jeunes (80% du squelette) constitu en systme haversien avec agencement lamellaire cylindrique concentrique de fibres collagnes parallles parcourt arciforme hlicodal altern dune lamelle lautre centr sur un canal de Havers (lensemble constitue les ostons) et des canaux transversaux de Volkman. Le tissu spongieux est constitu de faisceaux de lamelles limitant des espaces trabculaires abritant la moelle osseuse hmatogne produisant les globules sanguins ; ces traves osseuses sont orientes par les forces mcaniques exerces sur los (ex : extrmit proximale du fmur). Ces systmes haversiens sont aligns paralllement au grand axe de los et rpartissent les contraintes mcaniques subies par los.

    On distingue deux types dos selon son origine embryologique (il sagit toujours du remplacement dun tissu conjonctif prexistant par du tissu osseux): os endochondral (calcification dune bauche cartilagineuse remplace

    progressivement par du tissu osseux, elle assure la croissance en longueur) : os spongieux et os longs.

    Os membraneux (tissu osseux form de novo sur le tissu msenchymateux

    environnant) : os plats (vote du crne), clavicule. La couche interne du prioste (prioste cellulaire) contient des ostoblastes et ostoclastes assurant la croissance en paisseur, la formation des apophyses, la formation des tables interne et externe du diplo, lentretien des couches osseuses haversiennes sous-jacentes et leur remodelage en cas de fracture (cal osseux). Lendoste tapisse los compact adjacent la cavit mdullaire (endoste cortical), les traves dos spongieux (endoste trabculaire) et les canaux de Havers (endoste ostonien) en relation avec le prioste et lendoste cortical par les

  • canaux de Volkman. Les surfaces osseuses peuvent tre alternativement en phase active (formation, rsorption) ou quiescente (cas le plus frquent).

    3.3. Les facteurs de modification du tissu osseux Le remaniement osseux est sous linfluence de facteurs gntiques tablissant les limites de taille et de forme (anomalie morphologiques), et de facteurs mcaniques et gravitationnels dterminant les variations structurelles: lactivit physique stimule les ostoblastes, linactivit entrane atrophie et ostoporose (loi de Wolff), lhyperactivit stimule la rsorption osseuse. On y ajoute des facteurs lis lge et au sexe (chez ladulte la rsorption lemporte sur lapposition sur la face mdullaire de los cortical : le diamtre mdullaire augmente avec lge ; aprs 50 ans, los cortical samincit et los spongieux se rarfie. La rsorption est plus prcoce et plus intense chez la femme). Il y a une important influence des facteurs alimentaires : les carence en acides amins et en vitamine C entranent un dficit de synthse de lostode ; un dficit calcique (et de vitamine D) entrane une moindre minralisation et un ramollissement osseux (rachitisme chez lenfant, ostomalacie chez ladulte) ; la carence en vitamine A ralentie lostoclasie, son excs laugmente (induisant chez lenfant une ossification prcoce des cartilages de conjugaison et un arrt de croissance). A ces facteurs, il faut ajouter linfluence des hormones (parathyrodienne, thyrodiennes, somatotrope, calcitonine, oestrognes, andrognes, cortisol, anabolisantes, leur excs ou leur dfaut entranent des troubles profonds du remaniement physiologique), et celle de la circulation sanguine et de la composition du sang (lhyperhmie dminralise, la stase vasculaire stimule la formation osseuse, lischmie entrane une ncrose). Les dsordres pathologiques peuvent entraner une modification des structures osseuses qui peuvent laisser des altrations visibles sur los sec ne permettant pas toujours un diagnostic rtrospectif (certaines pathologies ont des consquences similaires sur les modifications osseuses). On distingue les traumatismes, les maladies infectieuses, les troubles circulatoires, les affections sanguines, les anomalies congnitales, les dysplasies et malformations, les tumeurs, les maladies endocrines, les troubles nutritionnels, les affections articulaires. 4. METHODES DANALYSE DES RESTES OSSEUX Trois dmarches fondamentales constituent larchitecture de cette discipline sur laquelle se construit lapproche diagnostique en palopathologie : Connatre les biais et limites de lidentification et de lenregistrement des donnes

    causs par ltat de conservation des ossements et les facteurs qui le conditionnent : la connaissance des facteurs agissants sur la dcomposition du squelette dans le sol (taphonomie) et des mcanismes modifiant sa composition (diagnse) sest accrue ces quinze dernires annes grce lapplication de techniques physico-chimiques et microscopiques sur los ancien.

  • Dcrire avec prcision les lsions observes afin den dterminer le processus causal avant dtablir un diagnostic rtrospectif daffection spcifique ou non spcifique : le simple examen macroscopique est habituellement suffisant, mais parfois les techniques dimagerie mdicale, danalyses microscopique et biomolculaires sont dun apport complmentaire, et dans certains cas indispensable. Linterprtation des lsions observes et le diagnostic rtrospectif sont facilits en fonction de lge des individus concerns, de la topographie des lsions, de leur association entre elles, et de leur caractre spcifique ou non une maladie particulire.

    Quantifier rigoureusement la frquence des lsions et des affections observes sur du

    matriel fragmentaire et incomplet : lenregistrement des donnes sur des populations archologiques, aux squelettes souvent incomplets et aux os fragmentaires, fait lobjet de rflexion sur ladaptation des mthodes pidmiologiques aux restes humains anciens. Pour approfondir la connaissance de ltat pathologique des sries de squelettes tudies, lenregistrement des taux de prvalence doit sapprcier ltat de svrit des lsions observes ainsi que leur tat actif ou non au moment du dcs de lindividu.

    4.1. Protocole dexamen dun squelette Etablir les donnes anthropologiques (ge, sexe, taille des individus), dcrire les lments fondamentaux de lostoarchologie (tat de conservation du squelette, observation directe de la modification de la structure osseuse, approche globale de linterprtation tiopathognique des stigmates osseux). La conduite de lanalyse pathognique rtrospective se fait avec le dossier de fouille archologique, les donnes anthropologiques, la morphologie des lsions lmentaires sur os sec. La dmarche diagnostique gnrale se droule en quatre tapes : Description de laspect des altrations constates, les localiser sur los (topographie articulaire, juxta-articulaire, piphysaire, mtaphysaire,

    diaphysaire, exo- endocrnienne),

    rechercher leur distribution sur lensemble du squelette dun individu (extension localise ou gnralise) et sur lensemble de la population tudie,

    et interprter selon le contexte anthropologique, archologique et palo-environnemental. Cette dmarche est importante, certaines affections ont une localisation prfrentielle (ex : la zone privilgie de latteinte lpreuse au niveau des os longs est piphysaire et sur la diaphyse, tandis que les trponmatoses pargnent les piphyses). La localisation dune fracture permet de reconstituer le mcanisme traumatique.

    La localisation des altrations sur lensemble du squelette de lindividu doit tre recherche, elle rpond quatre questions : - Sur les os pairs, quel ct est atteint ? - Laltration est-elle bilatrale sur les os pairs ? - Existe-il des altrations similaires ailleurs sur le squelette ? - Existe-il des altrations diffrentes sur le squelette indiquant une condition prdisposante

    ou une complication ?

    Cela impose dorienter la pice osseuse dans lespace (exemple dun os long):

  • - Avec une face antrieure et une face postrieure selon un plan frontal (faces palmaire et dorsale pour la main, faces plantaire et dorsale pour le pied).

    - Avec une face externe (latrale) et interne (mdiale) selon un plan sagittal.

    - Avec une face suprieure (crniale) ou infrieure (caudale) pour certains os : clavicule, scapulum , vertbres, talus, calcaneus).

    - Selon une extrmit proximale (dirige vers la ceinture) ou distale (dirige vers lextrmit du membre).

    Et de prciser la position sur los lui-mme (exemple dun os long de membre):

    Surface articulaire proximale

    Epiphyse proximale

    Mtaphyse proximale

    Tiers proximal de la diaphyse

    Tiers moyen de la diaphyse

    Diaphyse complte

    Tiers distal de la diaphyse

    Mtaphyse distale

    Epiphyse distale

    Surface articulaire distale

    Ensemble de los affect

    Certains processus pathologiques infectieux ou certaines arthropathies ont des localisations multiples, qui sont pathognomoniques (ex : les atteintes articulaires de la polyarthrite rhumatode sont habituellement bilatrales, symtriques et multi articulaires, ciblant particulirement les mtacarpo-phalangiennes et les inter-phalangiennes proximales). Une fois la topographie lsionnelle tablie, on dispose de trois mthodes danalyse des lsions observes : macroscopique, microscopique et biochimique

    4.2. Lanalyse macroscopique Lanalyse descriptive macroscopique doit rpondre sur la nature et ltat de la lsion (solitaire ou dissmine? artificielle ou naturelle?), et sur le caractre significatif ou quivoque dune altration naturelle pathologique significative. Elle se fait par lobservation visuelle, limagerie radiographique, lendoscopie.

  • 4.2.1. Lobservation visuelle :

    Elle est de description relativement aise, mais la distinction de la cause est parfois impossible (dcrire la raction osseuse en traumatisme , arthrite ou infection peut tre tent, mais avec plus de 200 types darthropathies et autant de varits dinfections spcifiques ou non observes en clinique mdicale, un diagnostic plus dfinitif est souvent impossible). Par contre, une description prcise et clairement dtaille des lsions permet dautres chercheurs dvaluer le diagnostic ; une documentation photographique est indispensable (surtout avec les cas difficiles prtant confusion). On dispose de plusieurs protocoles (cf annexes) de description visuelle macroscopique (Buikstra & Ubelaker, 1994 ; Thillaud, 1994) qui doivent permettre de rpondre aux questions suivantes :

    - Comment est laltration ? - Forme-t-elle un processus de prolifration, de rsorption, ou des deux runis ? - Son aspect voque-t-il un processus lent ou rapide ? - Son aspect voque-t-il un processus ltat actif, en cours de gurison, ou entirement

    guri au moment du dcs? Los ne ragit un processus pathologique que de deux manires (isoles ou intriques en proportions variables) : la production ou la rsorption de tissus osseux (on oppose ainsi dans la terminologie, la lsion qui fabrique de los (ostoplastique, ostosclrose) celle qui le dtruit (ostolyse, ostopnie, ostoporose) : - Une prolifration dense et rgulire indique un processus chronique, de constitution lente,

    tandis quune prolifration poreuse ou fibrillaire indique un processus plus rapide, voire trs agressif si laspect est spiculaire.

    - Une rsorption aux parois rgulires et recouvertes dos compact indique un processus lent et chronique, labsence dos compact un processus plus rapide, et des parois et rebords mal dfinis, irrguliers, un processus actif et agressif.

    4.2.2. Limagerie :

    La radiographie est la mthode non destructrice permettant de prciser la densit osseuse de laltration (transparence, condensation), les limites de celle-ci, les modifications de los compact et trabculaire, la prsence de corps trangers. Les premires radiographies datent des dbuts de la radiologie avec Knig, Holland (1896), et Culin (1898) sur des momies gyptiennes et pruviennes.

    - Radiographie simple : classique, par projection : utilise dans tous les cas, elle est cependant peu prcise pour des anomalies mal distingues par superposition des structures osseuses (priostoses, synostoses, ankyloses, dformations crniennes, modifications de densit pri-lsionnelles). On perd de linformation sur lpaisseur lsionnelle (paisseur et composition minrale dterminent la densit de limage) ; on peut faire varier lintensit des rayons X (kV et mAs) et utiliser des filtres. Un film de faible contraste (ex : radio thoracique) offre une chelle de densits importante; un film de fort contraste (tissu osseux) a une chelle de densit moindre. Le contraste peut tre accru en augmentant le temps dexposition ; les crans et filtres amliorent la sensibilit des films permettant de rduire le temps dexposition chez le vivant, mais avec une perte en rsolution et de clart des dtails (ou dfinition de limage). Plus la source de rayons X est de petite dimension, et la distance source-objet courte, meilleure est la dfinition (ex : radios

  • dentaires). Le centre de la lsion doit tre perpendiculaire la source X pour viter toutes distorsions (ce qui se passe avec de gros objets de formes irrgulires). Le film mammographique est de sensibilit suprieure, et donne une meilleure dfinition. Sur le terrain peuvent tre utiliss des appareils portables (type vtrinaire) et des films polaroid.

    - Xerographie : utilise dans les annes 1970 sur les momies pour mettre en vidence la structure des tissus mous et les objets contenus dans les bandelettes. Cette technique a t supplante par limagerie digitalise et le scanner.

    - Tomodensitomtrie : elle permet lapproche en coupes sries (tude des momies, reconstitution tridimensionnelle, cavits et base crniennes). Elle prcise les rapports entre les structures anatomiques et la lsion et les ractions du tissu osseux son contact sans destruction de la pice, et saffranchit des images de superposition pour les gros objets examiner. Le cot est plus lev que la radiographie simple, elle nest pas transportable.

    - Imagerie par rsonance magntique : elle nest pas utilisable sur les tissus secs mais uniquement sur du matriel hydrat ou congel (il faut des protons issus datomes dhydrogne, et donc de leau). Elle nest pas applicable en palopathologie.

    - Endoscopie :exploration visuelle et photographique des cavits (crniennes) et des corps momifis par introduction de fibres optiques (ex : endoscope ORL) ; elle permet de faire des biopsies diriges sur les momies, dobserver la surface endocrnienne (microcamra couple un cran dordinateur).

    4.3. Lanalyse microscopique

    Technique destructrice, ltude du tissus osseux, en coupe mince non dcalcifie et polie aprs inclusion au methyl-mtacrylate ou une rsine epoxy, permet dapprcier le rsultat de lactivit cellulaire osseuse (production et rsorption osseuse), de prciser la nature ractionnelle inflammatoire, infectieuse, ou cicatricielle daltrations indiffrencies macroscopiquement. Cette technique est ancienne avec les techniques de rhydratation de tissus momifis (Ruffer, Shatlock, 1909) et le tissu osseux (Weber, 1927). Lhistomorphomtrie permet de confirmer ou dinfirmer une diagnose macroscopique (ex : cribra orbitalia) ; son analyse est base sur la connaissance de lactivit des cellules osseuses qui varie en fonction du degr de maturation osseuse (ge), de la vitesse de dposition osseuse, et du type de maladie : les dsquilibres des fonctions cellulaires qui en rsultent ont des rsultats prvisibles : Rsorption Formation Consquence Ostoporose normale diminue Rsorption relativement plus forte Hyperparathyrodie accentue normale Rsorption plus forte Ostoptrose normale accentue Formation plus forte

    4.3.1. Microscopie optique par transmission lumineuse

    Technique destructrice (fines sections dos montes sur lame, grossissement 20x 200x) permettant de voir les diffrences entre os mature et immature, laugmentation dos minralis (sclrose) ou sa diminution (rarfaction). Elle permet ltude de lostoporose, de lostopnie

  • gnralise, et des lsions localises. La lumire polarise permet dapprcier plus prcisment laspect structurel de los (birfringence des fibres de collagne). La fluorescence de certaines substance naturelles ingres par les individus dans certains aliments comme le grain conserv en rserves (ttracycline-like, fluorochrome) peuvent tre mis en vidence avec des ractifs et une source lumineuse approprie. Les colorants permettent dapprcier lactivit ostoblastique et ostoclastique des maladies mtaboliques (mthode de Goldner).

    4.3.2. Microscopie par transmission dlectrons

    Utilise de fines sections de tissus momifis, mise en vidence dagents viraux et de noyaux cellulaires impossible observer en microscopie optique et colorations (grossissement 300000x et plus).

    4.3.3. Microradiographie

    Radiographie de contact dune lame mince osseuse observe sous microscope optique. Elle prcise la distribution minrale dans los (maladies mtaboliques) et les altrations taphonomiques.

    4.3.4. Stromicroscopie

    Du type microscope dissection binoculaire ; permet ltude des surfaces osseuses et dentaires sans destruction de la pice, et distance de celle-ci. (40x 400x).clairage par lumire rflchie de type halogne ou fibres optiques souples. Observation des variations microtopographiques des lsions.

    4.3.5. Microscopie lectronique balayage (MEB)

    Cest un examen de surface ; la pice doit tre recouverte sous vide dune couche atomique dor ou de carbone (lutilisation de rpliques en rsines lastomres ou poxy vite daltrer loriginal). Etude des surface dos, de dents, microfractures, lacunes de Howship, (1000x 40000x).

    4.3.6. Microsonde lectronique

    Permet dtudier les surfaces sous pression atmosphrique et temprature ambiante (pas de prparation sous vide) ; permet de dterminer la composition chimique de la surface de lchantilon (pas dutilisation courante en palopathologie !).

    4.4. Lanalyse biochimique On en distingue trois types : lanalyse lmentaire et isotopique, la palosrologie histochimie, et ltude de lADN ancien (ADNa).

    4.4.1. Analyse des lments-trace

    Les lments-trace sont essentiels pour le dveloppement normal des animaux et des humains (catalyses). Leur tude ncessite une destruction osseuse et une analyse en spectromtrie. Recherchs surtout dans la structure minrale de los constitue de phosphate de calcium (hydroxyapatite) o stablissent des phnomnes de substitution ionique (notamment des

  • ions calcium avec dautres lments-trace comme le strontium ou le plomb). Dautres lments comme le fer, le zinc ou le cuivre sont recherchs. Les facteurs biogniques in vivo influencent les concentrations dions (absorption digestive, excrtion, grossesse, lactation, croissance). Les effets de la diagnse post-mortem sont distinguer des effets in vivo recherchs, particulirement dans les reconstitutions palo-nutritionnelles :

    Strontium : herbivores > carnivores Rapport strontium /calcium : racines et graines > feuilles

    os maternel >nourrisson

    Rapport baryum / strontium : ressources marines < terrestres Zinc : chasseurs-cueilleurs > agriculteurs

    (antagonisme entre phytates des crales et le zinc) Plomb osseux: utilisation de vaisselle et tuyaux en plomb

    Ces applications sont trs rduites par les transformations diagntiques (apport dans los dlments provenant du sol, diffusion dlments hors de los). Ltude des lments-trace ncessite une connaissance fondamentale de la physiologie humaine et des rponses chimiques du tissu osseux aux affections : - Le fer nest pas un bon lment dvaluation de lanmie partir de los (importantes

    variations inter- et intra-populationnelles, faible concentration dans los). - Le zinc est plus intressant (30% dans los !), son taux est en relation avec la croissance et

    le dveloppement osseux : le zinc augmente dans les zones de formation osseuse (cal de fracture, rponse une inflammation), le dficit en zinc sobserve dans les retards de croissance. Dautres travaux nont cependant pas observ de variation du zinc osseux dans les maladies nutritionnelles, ou on constat sa variation au sein dun mme os et entre individus. On connat encore mal la physiologie du zinc et sa mesure prcise.

    - Le plomb se retrouve 95% dans los et daccumule avec le temps. Les effets de diagnse sont importants (ex : cercueil en plomb).

    4.4.2. Les analyses isotopiques

    Contrairement laltration taphonomique et diagntique post mortem de la concentration des lments-trace, les caractristiques chimiques du collagne sont trs stables et sa composition post-mortem est son reflet per vitam sauf en cas de cuisson ou de crmation. Les isotopes qui sont recherchs sont des atomes dun mme lment, avec mme nombre de protons, mais nombre diffrent de neutrons, de masse diffrente, et stables dans le temps. Leur tude ncessite une destruction osseuse et une analyse en spectromtrie. Ils sont tudis dans la reconstitution palonutritionnelle :

  • Les rgimes alimentaires des individus peuvent tre abords par lanalyse des isotopes stables de lazote (15N/14N) et du carbone (13C/12C) prsent dans le collagne dentaire et osseux : - les variation du 13C varient en fonction des types de vgtaux qui ont un marquage

    isotopique propre, et qui se retrouve chez les animaux qui sen nourrissent quelque soit leur niveau dans la chane alimentaire.

    - Il existe par contre, un enrichissement en 15N chez lanimal chaque niveau hirarchique dans la chane alimentaire.

    La composition isotopique en carbone des vgtaux dpend de son type de photosynthse utilis : - Les plantes terrestres des milieux temprs (avoine, bl, riz, herbes et arbustes) rduisent

    le carbone atmosphrique en empruntant le cycle de Calvin-Benson (photosynthse en C3).

    - Les vgtaux des milieux tropicaux (mas, millet, sorgho, canne sucre) utilisent le cycle de Hatch-Slack (photosynthse en C 4).

    Lanalyse des compositions isotopiques du carbone permet de prciser la nature des vgtaux consomms et lenvironnement dont ils proviennent (Les abondances isotopique en 13C sont plus importantes dans les vgtaux en C 4 quen C3, de mme que celles des plantes aquatiques marines et terrestres). Sur des momies naturelles de Nubie, lanalyse disotopes du carbone sur les cheveux a permis dvaluer les variations annuelles de lalimentation et des priodes de disette (aliments absorbs juste avant la mort : information sur la saisonnalit des dcs). La composition isotopique en azote des vgtaux dpend de la manire dont ils le fixent en fonction du milieu ; on distingue : - Les plantes fixant lazote atmosphrique par leurs racines (lgumineuses). - Les plantes non fixatrices utilisant une forme drive dazote atmosphrique produite par

    les bactries du sol partir des nitrates ; les nitrates sont plus abondants en milieu aquatique.

    Les valeurs isotopiques en 15N des plantes fixatrices sont plus faibles que celles des plantes non fixatrices et aquatiques. Les mangeurs de plantes terrestres ont des valeurs isotopiques infrieures aux mangeurs de plantes aquatiques, avec un enrichissement des valeurs entre la proie et son prdateur (plus la chane alimentaire est longue, plus la teneur en 15N est leve en fin de chane). Lanalyse des compositions isotopiques en azote permet dapprcier la nature des vgtaux et leur milieu de dveloppement, et destimer la part de protines animales consommes (distinction des espces vgtariennes et carnivores ou piscivores). Los rcemment dpos peut tre distingu de los plus ancien sur la variation des ratios des isotopes stables de lazote (utile pour comprendre le mtabolisme protique en rponse aux affections).

    4.4.3. Palosrologie histochimie

    Durant les annes 1970, Cockburn a suggr que la prsence danticorps dans lorganisme au moment de la mort pourrait tre un indicateur des maladies infectieuses contractes au cour de la vie si ont pouvait les dtecter sur les restes anciens ; les essais sur des restes de sang et de tissus momifis naturellement furent prometteurs (malaria, cancer) ; mais les protines spcifiques non collagniques sont dgrades sur los sec ancien. Lidentification de rsidus

  • dimmunoglobulines IgG serait une voie de recherche (les IgG mettent deux semaines apparatre dans le sang aprs contact avec lantigne, et leur taux augmente chaque nouvelle exposition : lindividu na pas besoin dtre infect au moment du dcs pour crer une raction Ag-Ac. La mthode de dtection des Ac sur los sec se fait par test ELISA (Enzyme Linked ImmunoSorbent Assay) ou par test dimmunofluorescence (ex : trponme sur tissus momifis). Ces techniques sont difficiles, mal values, la prfrence est donne ltude de lADN.

    4.4.4. Lanalyse de lADN ancien (ADNa): La molcule dADN est une succession de quatre nuclotides diffrents composs chacun dun sucre (dsoxyribose), dun acide et dune base ; il existes deux bases puriques A et G (Adnine, Guanine) et deux bases pyrimidiques T et C (Thymine, Cytosine). Linformation gntique dpend de lordre de succession de ces quatre bases sur la molcule dADN. On distingue : - un ADN nuclaire, structure en double hlice, contenu dans les chromosomes et li au

    sexe (le chromosome Y est transmis par les pres). - Un ADN mitochondrial (ADMmt), structure annulaire, contenu dans les mitochondries

    (organites cellulaires), et transmis par les mres.

    Ltude de lADN permet lanalyse des diffrences accumules au cours des gnrations: relations de parent, histoire des peuplements ( polymorphisme gntique ). Elle permet galement lanalyse de mutations ponctuelles par substitution dune base par une autre ( polymorphisme de squences ) sur l ADMmt (rgions hypervariables HVR-1 et HVR-2), et sur lADN nuclaire (microsatellites STR Short Tandem Repeats ). La technique est dlicate, onreuse, les rsultats soumis aux alas des contaminations et de la dgradation de la molcule dADN. La molcule dADNa est fortement altre et subsiste en quantits infimes ; elle doit passer par une tape de multiplication par PCR (Polymrase Chain Reaction) qui amplifie une portion dacide nuclique afin dobtenir des millions de copies accessibles lanalyse. Les cueils sont nombreux :

    Impossibilit damplifier des squences suprieures 400pb (paires de bases). On amplifie des marqueurs gntiques courts et informatifs (utilisation damorces encochant de petites rgions nuclotidiques des STR ou de lADNmt).

    Les contaminations sont frquentes, surtout avec du matriel humain (traces dADN moderne) : ncessite un prlvement strile du matriel osseux et dentaire sur le site de fouille, une organisation particulire du laboratoire, une dcontamination et des contrles chaque tapes, une vrification des analyses sur deux laboratoires diffrents.

    La dgradation de lADNa entrane des artfacts de lecture : la putrfaction du cadavre provoque une autolyse qui fragmente lADN, puis sensuit une hydrolyse de la jonction base-sucre, et surtout une oxydation qui endommage les bases.

    Les conditions de conservation de lADNa sont exceptionnelles (glace, dsert, tourbires, grottes). Il en rsulte trop peu de spcimens tudis pour une interprtation correcte sur lvolution, lisolement ou la disparition despces (ex : nanderthaliens). LADN peut tre extrait des tissus mous (prservs dans leau, gels, ou desschs), les os, la racine des dents, les coprolithes, les graines et autres vgtaux conservs (il est mieux conserv dans les dents que dans los ou les tissus mous, basse temprature, en milieu pH neutre ou faiblement alcalin, et surtout en milieu sec) :

  • - Les dserts sont chauds, secs, et basiques (lhydrolyse est ralentie, la dessiccation limite laction des bactries de putrfaction, et lautolyse).

    - Les grottes ont des fluctuations climatiques rduites, les tempratures basses protgent lADN (une phylognie de lours des cavernes a pu tre tablie).

    - Le permafrost et les glaciers ralentissent ou stoppent la dcomposition (absence dautolyse) et donnent les meilleures conditions de conservation de lADN (mammouths de Sibrie, tzi)

    - Lenlisement dans lasphalte entrane une dgradation des tissus mous mais prserve lADN contenu dans les os (milieu anarobie).

    - Les tourbires ont un pH neutre, sont pauvre en oxygne (peu doxydation). - La conservation dans lthanol de matriel organique prserve mieux son ADN

    quavec une conservation avec le formol.

    Le choix des marqueurs tudis ne concerne quune seule rgion du gnome, ce qui ne permet pas de conclure sur lvolution de tout le gnome.

    Lanalyse de lADNa est utilise pour tablir le sexe biologique des individus, des relations de parent entre sujets dune ncropole, lorigine des migrations humaines, lhistoire de la domestication animale et des plantes, les relations phylogntiques entre espces modernes et teintes (homme de nanderthal et homme moderne). Cette technique peut tre utilise en palopathologie la recherche de maladies gntiques ou de germes pathognes, par exemple:

    - Identifier une mutation thalassmique sur un squelette prsentant des signes danmie svre (pouvant tre cause par des conditions gntiques et environnementales, comme une malnutrition, une drpanocytose, une thalassmie).

    - Identifier lagent microbien lorsque linfection ne laisse pas de trace osseuse comme avec la peste (yersinia pestis), ou quand plusieurs maladies infectieuses donnent des altrations morphologiques squelettiques semblables ou atypiques, on a ainsi identifi le bacille tuberculeux (mycobacterium tuberculosis), le germe de la syphilis (treponema pallidum), le germe de la lpre (mycobacterium leprae).

    5. PSEUDOPATHOLOGIE Sont pseudo-pathologiques toutes lsions post-mortem observes sur les ossements anciens (survenues entre le dcs et lexhumation) pouvant mener un diagnostic rtrospectif abusif (Wells, 1964). Il sagit de traces anormales qui simulent une lsion du tissus osseux, mais qui ne concernent pas les traces osseuses dintervention humaine intra-vitam (trpanations, abrasions artificielles des dents, mutilations) qui rsultent de pratiques socio-culturelles ou thrapeutiques, les actions ncropsiques et rituelles extra-vitam (fragmentation des ossements, prlvements slectifs dossements, dcarnisation, cannibalisme, crmation,), et les variations anatomiques. Le squelette ( lair libre ou dans le sol) est tributaire des variations de son potentiel de prservation (degr de porosit) et surtout de son environnement (taphonomie): diffrents agents taphonomiques peuvent altrer la surface et la structure osseuses et dentaire ainsi que leurs composition chimique. Les restes osto-dentaires sont soumis des modifications avant et aprs enfouissement :

  • 5.1. Avant enfouissement Exposs lair libre, les restes osto-dentaires subissent laction danimaux (atteinte prcoce) : - prdateurs carnassiers et charognards : impacts de dents, fracturations, effets de la

    digestion (destruction des reliefs saillants osseux et de lmail par lacidit des sucs gastriques, diminution des taux dlments comme le phosphore et le calcium sur les zones priphriques de los).

    - Les herbivores peuvent mastiquer des os comme source de minraux et de calcium en particulier ; les rongeurs laissent leurs traces de dents (sillons parallles fond plat) sur les reliefs osseux pour un apport minral ou limiter la croissance continue de leurs incisives.

    Plus tard interviennent les invertbrs et surtout les bactries qui colonisent los (non pralablement brl) : modifications histologiques et chimiques par dissolution du phosphate de calcium (production dacide carbonique, denzymes), et entranant des modifications chimiques par diagnse (teneurs en sels minraux et lments-trace modifie par introduction ou disparition). Les lichens, les algues et les champignons microscopiques peuvent dj agir ce stade ; certaines diatomes deau douce sont recouvertes dun mucus visqueux contenant un acide corrosif ; les champignons creusent des microtunnels de 8 environ (genre Mucor qui mtabolise le phosphate des os, genre Fusarium qui creuse des tunnels centrifuges. Ces organismes peuvent ainsi introduire des lments (Sr, Zn, Ba, Mg) qui sont notamment analyss dans les tudes palodittiques. La dsagrgation par les conditions gnrales du milieu ambiant et du climat se manifeste au dbut par de fines craquelures et fissurations de surface, et plus tard, des fentes et fractures compltes ; los devient de plus en plus fragile et peut totalement disparatre. Cela est la consquence des variations climatiques (temprature et humidit) et des UV (qui ont la particularit de fractionner les fibres collagnes). Le taux de strontium, les altrations cristallographiques et protiniques saccroissent en surface des os. Ces craquelures et fissuration de la surface osseuse peuvent voquer une priostite ; le plus souvent, cest le risque dune destruction de vraies lsions pathologiques de surface qui survient! Les os exposs de trs basses tempratures (gel) prsentent de microfissures au niveau des ostons (visibles en microscopie lectronique), la microstructure osseuse reste intacte ; le gel naltre pas les tudes histomorphomtriques. Les os brls sont habituellement trs fragments en cas de crmation, leur forme et leurs dimensions sont modifies. La contraction de los ne survient quentre 700 et 900, associe une coloration passant du noir au gris-bleu, puis au blanc (cette coloration correspond une contraction suprieure 25%). La crmation entrane une fracturation de los qui diffre selon son tat pralable (os sec ou os frais entour de chair) : - Un os brl sec a des craquelures et fendages longitudinaux, mais sans torsion ni

    courbure. - Un os brl frais a des fractures courbes, concentriques, un fendage irrgulier transversal,

    et une torsion marque.

  • 5.2. Aprs enfouissement Si los est au contact dun substrat de pH
  • - Les variations qualitatives (ou discrtes, ou non-mtriques) : elles correspondent un trait ou caractre observ (particularit, structure, disposition)

    Parmi les variations qualitatives on distingue deux aspects : - Les caractres binaires ( deux tats) : prsent / absent - Les caractres multiples (plus de deux tats) : prsent / incomplet / absent ou classes de

    formes

    6.2. Variabilit de frquence des caractres qualitatifs

    6.2.1. Selon le ct droit ou gauche (caractres pairs):

    - Latralisation (droite ou gauche) : tendance dun caractre exprim unilatralement tre plus frquent dun ct que de lautre,

    - Symtrie : tendance dun caractre tre identique des deux cts.

    6.2.2. Selon le sexe masculin ou fminin (dimorphisme sexuel):

    - La variabilit de frquence na pas t dmontre pour les caractres qualitatifs

    6.2.3. Selon lge :

    - Cela dpend des stades dossification

    6.2.4. Selon lhritabilit :

    - On peut observer des concentrations familiales de caractres (hrdit dterminisme multifactoriel)

    - Possibilit disolats gntiques (variations gographiques) Ces caractres dterminisme gntique ont un intrt osto-archologique, car ils peuvent apparatre comme des marqueurs de regroupements dindividus apparents dans les ncropoles (organisation de lespace funraire), ou encore des marqueurs de mobilit populationnelle.

    6.2.5. Selon lpoque :

    - On peut observer des diffrences de frquences entre populations (prhistoire, antiquit, priodes modernes)

    6.3. Les types de variations qualitatives (liste non limitative)

    6.3.1. Numriques (contrle gntique de segmentation ou mtamrisation) :

    - Vertbres lombaires : 4 6 - Sacrum 4 ou 6 vertbres (3 5 foramens sacrs)

  • - Ctes surnumraires (cte cervicale en C7)

    6.3.2. Dfaut de fusion (entre points dossifications primitifs normaux) :

    - Dhiscence de larc postrieur vertbral (spina bifida) : C1, L5, sacrum - Sternbres spares (gladiola), foramen sternal - Os odontodien (C2), os acromial (scapula), os hamuli proprium (hamatum), os trigone

    (talus), os de vsale (MT5),

    6.3.3. Dfaut de synostose (entre points dossifications primitifs normaux) :

    - Suture mtopique (mtopisme), os lambdatique (os pactal, os des incas), sutura mendosa.

    6.3.4. Excs de fusion:

    - Synostoses congnitales au carpe (luno-triqutrale), au tarse, aux orteils (biphalangie)

    6.3.5. Dfaut de segmentation :

    - Occipitalisation de latlas, sacralisation de L5

    6.3.6. Orifice(s) surnumraires :

    - Ossification de structure fibreuse (ponticules postrieurs de latlas, processus supra-condylien humral)

    6.3.7. Os accessoires surnumraires :

    - Os suturaux (os wormiens)

    6.3.8. Os ssamodes :

    - Radial externe (prepollex), genou (fabella, cyamella), cubode (os peroneum), naviculaire (os tibiale)

    6.3.9. Variations de surfaces articulaires :

    - Facettes daccroupissement (tibia, talus), masses latrales dupliques (atlas)

    6.3.10. Variations de pneumatisation :

    - Sinus frontaux

    6.3.11. Variations dentaires :

    - Absence de M3, racines multiples, cuspides surnumraires (tubercule de Carabelli)

  • 6.4. Autre classification des variations qualitatives

    6.4.1. Caractres hypostotiques : - Insuffisance ou rduction dossification, persistance dtat infantile

    6.4.2. Caractres hyperostotiques :

    - Ossification augmente 7. CONCLUSION La quantification des lsions et la frquence des maladies parmi les ensembles ostoarchologiques continuent tre un challenge relever et amliorer. La comparaison des donnes entre chercheurs reste difficile (manque de prcision sur la mthodologie, critres diagnostiques et descriptions). Malgr leurs biais mthodologiques, histologie et analyses biomolculaires sont appeles un rle accru dans le futur. La collaboration entre disciplines aussi diverses que lpidmiologie, lhistoire, larchologie, la mdecine, les statistiques, est plus que jamais indispensable au dveloppement et lvolution de la palopathologie.

  • 8. ANNEXES a. Principalesmodificationsosseuses(Dastugue&Gervais,1992) QUANTITATIVES:- absence anormale dun lment du squelette (aucun stigmate de connexionanatomiquesurleslmentsanatomiquementvoisins).

    - anomaliesparexcs(lmentosseuxnonthmatique).- anomalies dimensionnelles (hypotrophiehypertrophie: asymtrie ou hors normesstatistiques).

    STRUCTURALES:- poidsosseux(dfaut,excs).- paisseurs de parois corticales dos longs et crniennes(amincissement,paississement).

    - diamtresdecanaux,conduitsouorifices(largissement,retrcissement).QUALITATIVES:

    - forme gnrale modifie (os labile: modifications non systmatiquementpathologiques).

    - aspectdesurfacemodifi(pertedos,apportdos).- perturbationsmorphologiques(construction,destruction,tatsmixtes).- altrationdessurfacesarticulaires(rosion,polissage,calcifications,ostophytose).CONNECTIVES:- dsunions(pseudarthroses,luxationsinvtres).- unions(congnitales,inflammatoires,infectieuses,traumatiques).- rapportsinterosseuxanormaux(angulations).CORPSETRANGERSINTRAOSSEUX:- lithique(armaturedeflcheensilex)- mtallique(fragmentdelame,deflche,balle)

  • b. terminologiemacroscopiquedesaltrationslmentairessurossec:(Thillaud,1994)

    x Erosion(pertedesubstancesuperficiellenedpassantpaslacorticale)x Cavit(pertedesubstanceaudpensdutissusosseux)x Perforation(troutransfixiantauseindunepiceosseuse)x Ostolyse(pertedesubstanceavecdisparitiondunepartiedelos)x Fissurationcorticale(solutiondecontinuitlinairedelacorticale)x Priostose(ostoformationmodifiantlasurfacedelacorticale)x Ostophytose(productionosseuseauxbordsdunesurfacearticulaire)x Exostose(excroissanceosseuselocaliselasurfacedelacorticale)x Eburnation(surfacearticulaire:osdensifi,compact,avecpolissage)x Ostopnie(volumeosseuxrduitauprofitdesespacesmdullaires)x Dformationaxiale(parangulation,incurvation,dviationdelaxedelos)x Dformationvolumique(longueur,calibre,paisseur)x Pseudarthrose(articulationaccidentellesurunosouentredeuxos)x Ankylose(soudureparossificationentrelesdeuxosdunearticulation)x Corpstranger(dansunpointdelos,venududehors)Qualificatifsspcifiquescertainesaltrationslmentaires:Altrationlmentaire Aspectsparticuliers Qualificatifs Texturedelos Qualitdelos

    bordrgulierirrguliermoussvif

    EROSIONCAVITE

    PERFORATIONfond,surface

    rgulierirrgulier

    homognehtrogne

    compactcribltrabculaire

    volume

    rgulierirrguliersystmatis

    PERIOSTOSE

    surfacergulireirrgulire

    homognehtrogne

    compactcriblnodulairespiculporeux

    EBURNATION rgulireirrguliresystmatise

    DEFORMATIONAXIALE

    angulationincurvationdviation

    DEFORMATIONVOLUMIQUE

    longueurcalibrepaisseur

    localisegnralisergulireirrgulire

    Emouss:rendumoinstranchant Vif:tranchant,aiguRgulier:uniforme Irrgulier:quinestpasuniformeHomogne:lmentsdemmenature Htrogne:lmentsdissemblablesSystmatis:organisselonsystmeanatomiqueouanatomopathologiqueidentifiableLocalis:limitsegmentoupartiedelos Gnralis:tendulensembledelosCompact:structuredeloscortical Trabculaire:structure=osspongieuxCribl:percdetrous(grosnombreux) Poreux:trabculaireserr,rgulierNodulaire:compactrseaucavitaireserr,dlimitparnodositsserpigineusesdensesSpicul:compact,ractionnel,spiculesirrguliresordonnesenfaisceauxrayonnants

  • MASTER 1 HISTOIRE, PHILOSOPHIE ET DIDACTIQUE DES SCIENCES OPTION : PHILOSOPHIE DU SOIN ET ANTHROPOLOGIE MEDICALE

    (Anne 2009-2010)

    Deuxime partie

    PALEOEPIDEMIOLOGIE : PRINCIPES ET METHODES Dr Michel Billard

    Aprs deux sicles dtudes principalement descriptives, des progrs ont t entrepris en direction de meilleures approches mthodologiques de ltude des maladies des populations du pass partir des restes ostoarchologiques. La Palopidmiologie en fait partie en tant quapproche multidisciplinaire cherchant dvelopper des mthodes pidmiologiques plus adaptes afin de pouvoir les appliquer couramment dans la recherche des causes des maladies dans le pass de lhumanit. La dfinition de la sant pour les populations du pass comme pour celles du prsent dpend troitement des aspects culturels qui sont insuffisamment connus pour les groupes humains tudis par larchologie. Cependant pour toutes les socits humaines connues, maladie, dficience et incapacit sont des concepts intimement lis au concept de sant.

    A. INTRODUCTION

    a. Dfinition La palopidmiologie est ltude de la rpartition des maladies dont souffrirent les populations dans le pass. Elle cherche en cerner lorigine et lvolution en fonction des facteurs environnementaux et socioculturels dans lesquels elles volurent. Cette approche de lancien compare aux donnes actuelles peut permettre de mieux comprendre les mcanismes dmergence de maladies nouvelles ou la rapparition de plus anciennes. Ltude morphologique des ossements anciens limite le diagnostic rtrospectif aux seules affections produisant des lsions osto-articulaires (observation macroscopique, radiologique, histologique et biochimique), la paloparasitologie et les techniques de biologie molculaire permettent den largir le champ de recherche.

    b. Champs dtude et dapplications Les grandes sries dossements (ncropoles) constituent le matriel dapplication des mthodes palopidmiologiques comme tant les archives biologiques de laction du milieu sur lindividu et des conditions sanitaires anciennes (en labsence ou en complmentarit avec les archives historiques que constituent les textes) ; plusieurs mthodes abordent des aspects indissociables comme autant de marqueurs biologiques dvolution socio-conomique et culturelle qui permettent une certaine approche de ltat sanitaire de ces populations : - La taille des individus, leur sexe, et leur rpartition en groupes dge au dcs informent

    sur leur dveloppement et leur longvit (palodmographie).

  • - Les lsions traumatiques et marqueurs dactivit informent sur leur mode vie (volution chronologique au sein dune mme population, comparaison entre populations).

    - Les stigmates vnementiels au cours du dveloppement (stress biologiques, maladies aigues, pisodes de sous-alimentation, stigmates danmie et de carence vitaminique, tat de sant bucco-dentaire) mettent en vidence les crises conomiques, les disparits sociales entre individus.

    Tout diagnostic rtrospectif nouveau prcise le pass biologique de lHomme, les affections les plus banales, comme celles ayant un impact social et communautaire plus marqu (tuberculose, lpre, syphilis). La palopathologie organique et losto-archologie sont deux approches de la connaissance mdico-historique. Ltude des relations entre les pathologies dans une aire gographique et une priode donne constitue ltude des pathocnoses (Grmeck, 1983).

    B. PRINCIPES

    a. Les biais prendre en compte La palopidmiologie nest pas lpidmiologie des populations anciennes mais celle de populations de squelettes constitues dchantillons osto-archologiques (population inhume) gnralement non reprsentatifs des populations inhumantes dont ils sont issus.

    Il est indispensable de matriser lensemble des biais qui les constituent et qui conditionnent les prvalences calcules (Signoli M. et al., Peste: entre pidemies et socits, Firenze University Press, 2007).

    - La reprsentativit des sries ostoarchologiques

    1. Recrutement funraire La source dinformation unique est faite des restes osseux humains que seules des pratiques funraires conservatoires (inhumation) autorisent linverse des pratiques dabandon, dexposition ou dimmersion des cadavres.

    Les principaux lments perturbateurs sont les facteurs sociaux (slection des individus linhumation selon leur ge, leur sexe, leur rang social, etc) et les facteurs biochimiques de conservation diffrentielle.

    La structure de lchantillon conditionne les prvalences : des zones spares dinhumation pour les enfants et les adultes modifiera la prvalence daffections touchant prfrentiellement les plus jeunes (tuberculose) ou les plus gs (arthrose) selon la partie de la ncropole tudie.

    2. choix des indicateurs dge et de sexe Le sexe des adultes sera dtermin de prfrence sur le bassin, ventuellement sur la crne. Certains caractres sont sexuellement plus ou moins discriminants, la validit des rsultats

  • dpendra de ltat de conservation de ces caractres. Le sexe des enfants reste encore impossible dterminer.

    Quand on dtermine lge des enfants, il faut tenir compte des conditions sanitaires (malnutrition, maladies, pidmies) qui influent sur le dveloppement. Cette influence sexprimera moins pour les immatures provenant dun mme contexte socio-conomique et sanitaire, que si on compare des immatures de divers sites ; le choix de la population de rfrence pour tablir les indicateurs dge est donc trs sensible.

    Les modifications du dveloppement osseux et dentaire surviennent un moment prcis sur un laps de temps court, avec une erreur moyenne de 2 36 mois selon lge.

    Chez les adultes, la dtermination de lge est base sur des critres de vieillissement biologique trs variables dun individu lautre ; aucun dentre eux na une bonne corrlation statistique avec lge biologique (ne dpasse pas 0.7). La synostose des os du post-crne est acheve aprs 25 ans, mais est encore inacheve aprs 70 ans sur les sutures du crne. La mthode base sur la synostose des sutures crniennes est la plus utilise avec les erreurs systmatiques (influence de la composition par ge de la population de rfrence, attraction de la moyenne).

    - Les processus taphonomiques et indices de conservation

    Le mauvais tat de conservation rduit les possibilits de recherche palo pidmiologique. Chaque srie ostoarchologique a ses propres caractristiques de conservation concernant lensemble des lments constitutifs du squelette, ou une partie de ses os (surfaces articulaires, surface corticale).

    Au regard des divers indices de conservation utiliss, des conservations diffrentielles sobservent entre individus dune mme srie et entre des sries diffrentes, en fonction de la localisation anatomique, de lge ou du sexe. Les squelettes dimmatures et fminins, les os des extrmits, les vertbres sont souvent les plus fragiles, et les moins reprsents.

    Comparer des sries entre elles impose quelles aient le mme profil de conservation.

    - Les conditions de fouille ; de prlvement et de conservation des ossements

    La taille et la nature des sites funraires sont variables ; la fouille peut en tre exhaustive ou partielle ce qui dtermine leffectif de lchantillon : il pourra manquer certains lments squelettiques fort intrt anthropologique (bassin, os longs, crne). Une tude palo pidmiologique idale rclame une fouille exhaustive de la ncropole, avec des squelettes complets et trs bien conservs, et non slectionns.

    - La rsolution chronologique des donnes archologiques

    Les affections peuvent survenir de faon chronique ou selon un mode pidmique aigu sur des dures particulires courtes au cours des priodes dutilisation des ncropoles. De la prcision des donnes archologiques permettant dattribuer un squelette une priode dutilisation de

  • la ncropole dpendra la qualit de linformation palopidmiologique. Ce nest pas souvent le cas et on a un effet de prvalence moyenne forcment loigne de la ralit car gommant les pics de prvalence ou les priodes de disparition de certaines affections (notamment les infections).

    b. Implications en palopathologie

    - Sries ostoarchologiques particulires Un calcul de frquence de maladies sur un chantillon de morts est diffrent dun calcul sur une population vivante car la structure en ge et sexe des morts est diffrente de la structure dmographique des vivants: dans les pays non dvelopps, la courbe de mortalit (en U) est linverse de celle de la distribution dmographique (forte mortalit des 0-5 ans et des plus de 55 ans). La transposition de cette correspondance inverse aux populations anciennes reste valable tant quil ne sagit pas de populations favorises, car lamlioration des conditions socio-conomiques et sanitaires rduit la mortalit des plus jeunes et accrot lesprance de vie. Lidal serait lidentit structurelle entre lchantillon dinhums et la population inhumante. Cela sobserve lorsque un vnement brutal fait disparatre une partie non slectionne de la population : catastrophe naturelle (ex : sries ostoarchologiques de Pompi et Herculanum), pidmie de peste. Certains biais sont vits (rsolution chronologique et du recrutement des individus).

    - Nature des maladies

    La prvalence dune maladie dans une population dcde sera prcisment le reflet de la prvalence dans la population vivante correspondante, seulement en cas daffections non lthales (ou qui ne sont pas associes dautres qui le sont) ; lexemple typique est larthrose.

    Les caractristiques des maladies infectieuses sont importantes car elles rduisent plus ou moins directement lesprance de vie, et leurs taux de prvalence chez le vivant seront sur- ou sous-estim selon leur taux de cas mortel (pourcentage dindividus malades qui vont mourir), nous navons quune faible ide de ce quils auraient pu tre, et nous ne pouvons que tcher de deviner le facteur de correction appliquer :

    Pour la tuberculose, le taux de cas mortels a toutes les chances davoir t lev jusquau milieu du XIX sicle.

    La lpre na pas eu un grand taux de mortalit par elle-mme, mais plutt celui des infections des extrmits engendres par les troubles neurotrophiques, et lostracisme excluant ces malades.

    Lostomylite se situe entre ces deux cas, bien quune dure de vie puisse tre longue avec ce type daffection, il peut y avoir des complications septicmiques volution rapide.

    La poliomylite peut se reconnatre sur les squelettes dindividus ayant survcu assez longtemps (ayant chapp aux formes asphyxiques thoraciques) ; la sous-estimation de la vritable prvalence est invitable.

    Les traumatismes prsentent plusieurs difficults dinterprtation, avec un seul exemple, la fracture du crne : celle-ci peut tre la cause immdiate du dcs (cest assez ais de le vrifier sur los) ; ou bien la mort survient dans un dlai plus ou moins long (et des traces de rparation cicatricielle apparaissent sur les bords de la fracture) ; ce type de blessure peut tre associ dautres lments responsables du dcs (hmorragie crbrale et paralysie

  • confinant limmobilit et la mort par infection intercurrente, malgr une bonne cicatrisation de la fracture) ; il est donc impossible de discerner les deux types dvolution sur fracture cicatrise, et aucune extrapolation ne peut se faire partir des taux de dcs, aux taux chez le vivant. Mme si la lsion est immdiatement fatale, le numrateur de lquation de prvalence doit tre trouv parmi les dcds, et le dnominateur doit tre le nombre total de la population risque (qui nest pas dterminable partir dune population archologique).

    Les taux de prvalence selon lge ne peuvent pas tre calculs pour les fractures non mortelles ; il est impossible de dater une fracture cicatrise (un individu casse son radius 25 ans et survit encore 25 ans : la fracture de cet os avec son cal ne doit pas tre date comme tant survenue la cinquantaine), et le taux brut de prvalence semble tre le meilleur moyen dexpression en attendant dautres solutions

    - Tester les hypothses Lhypothse dcoulant de ces tentatives dutiliser les ensembles dfunts pour extrapoler chez le vivant, tient dans le fait que la population squelettique est reprsentative, ou typique de la population vivante do elle dcoule. Il sagit plus dune approximation, du fait des lments non lis au hasard qui rgissent le type de dpt funraire, la conservation des ossements, et les conditions de fouille ; et au pire, les deux populations nont aucune relation pidmiologique.

    Il est donc indispensable de savoir o se situe un groupe dindividus sur ces donnes, surtout si celles-ci doivent servir tablir des tables de mortalit, ou faire des dductions sur des possibles volutions des caractres de la maladie, ou tirer des conclusions dordre dmographique.

    Avec la connaissance de la prvalence, on peut tester les donnes dun site avec diverses hypothses priori, afin de vrifier si elles saccordent bien avec celles qui avaient t prvues. Par exemple, laffection couramment observe sur les squelettes est larthrose ; si ce nest pas le cas dans une srie, , cela signifie en soi, que ce groupe dindividu est inhabituel (il peut sagir denfants et dadolescents). ; un caractre primordial de larthrose, outre sa prvalence croissant considrablement avec lge, est quil ny a pas beaucoup de diffrence entre les taux masculins et fminins ; si cela nest pas retrouv dans les taux de prvalence dune srie, celle-ci est atypique, et ces rsultats ne peuvent tre extrapols la population vivante ( si laugmentation des taux avec lge nest pas observe, il peut sagir aussi dune erreur de dtermination de lge des individus ; de mme, si les signes darthrose sont eux-mme utiliss comme critres dge, la prvalence de larthrose augmentera bien videmment avec lge ; les signes darthrose ne doivent pas tre utiliss comme critres dge)

    - Problme des donnes manquantes

    Elles sont la plaie des palopathologistes, dautant plus que trs souvent les os les plus intressants pathologiquement sont frquemment les plus incomplets ! Ainsi, le calcul du taux de prvalence require que soit fait le dcompte des os et articulations prsents, et pas simplement le nombre dindividus, car le dnominateur sera difficile tablir.

    Lidal est un systme par lequel le nombre dos ou darticulation, la fois normaux et pathologiques puissent tre enregistr ; en prsentant les taux de prvalence, il est important dtablir le nombre de donnes manquantes et de prciser le dnominateur dans chaque cas.

  • C. METHODES Comme en palopathologie on tudie gnralement les affections sur de longues priodes (celle dutilisation dune ncropole), il sagit dtudes transversales et la frquence calcule dune affection est le taux de prvalence : nombre total dindividus atteints de la maladie dans la population totale en un temps donn (le terme de population correspond leffectif de lchantillon ostoarchologique).

    a. Taux de prvalence

    - Taux de prvalence brute

    Dans le calcul du taux de prvalence brute, lensemble de leffectif de la population tudie est utilis au dnominateur (Waldron, 1994) :

    Prvalence = nombre total de cas / effectif total

    Les taux bruts doivent tre compars entre diverses sries osto-archologiques avec beaucoup de prudence (ils ne tiennent pas compte des diffrences de la structure dge au dcs de ces groupes) ; il est prfrable de calculer les taux bruts par classe dge, qui pourront tre compars ceux dautres groupes de classes dge respectives.

    - Taux de prvalence corrige

    Les donnes manquantes rendent difficile la comparaison entre groupes ; si on considre quelles taient exemptes de laffection considre, la frquence de celle-ci correspond au taux brut calcul prcdemment ; si elles taient toutes atteintes, elles sont ajoute au numrateur (lsions observes), la frquence obtenue constitue un maximum. La frquence relle doit tre entre taux brut minimum et maximum .

    On fait lhypothse que la distribution de laffection sur les donnes manquantes est la mme que celle observe sur les os prsents ; on utilise alors au dnominateur, le nombre total des pices prsentes moins celui des manquantes, le taux de prvalence calcul alors est dit corrig . Cest le seul mode de calcul prfrable de prvalence dune affection dans une srie ostoarchologique :

    Prvalence corrige=

    Total des individus atteints / (population totale individus aux pices manquantes)

    En cas dabsence dune pice squelettique sur deux symtriques (articulation des membres par exemple), le dnominateur correspond au nombre dindividus avec la paire dos symtriques prsente, plus le nombre dindividus avec un seul des deux os symtriques restant pathologique :

    Prvalence corrige dune atteinte X=

    Total dindividus atteints / (individus paire dos symtriques + individus un seul os prsent atteint)

  • b. Comparaison entre sries ostoarchologiques

    Elle nest envisageable que si leurs effectifs, structures dge au dcs, et indices de conservation sont similaires.

    c. Les indicateurs de ltat sanitaire en palopathologie Selon la classification de Cohen, Armelagos, Martin et Clark (1984) on distingue quatre grands groupes dindicateurs osto-dentaires de stress biologiques sur les populations du pass:

    - Indicateurs de stress biologiques gnraux cumulatifs

    Longvit, croissance et statut nutritionnel sont estims partir de lge au dcs, la hauteur de la base du crne et la stature :

    1. dure de vie des individus

    Cest le plus simple des indicateurs de sant gnrale dune population mais donner lge au dcs prcis dun squelette dadulte est pour linstant impossible. La longvit moyenne dcrot lentement durant les premiers millnaires aprs lintroduction de lagriculture (la part rserve la consommation de vgtaux devient progressivement plus importante que celle de viande) ; la baisse de longvit ne serait pas directement lie au taux de consommation de protines animales : plus tard, lors du dveloppement des civilisations, il apparat que les facteurs sociaux ont un plus grand impact sur la longvit, la longvit moyenne na pas dpass 45 ans pour descendre plus bas au cours des sicles jusquau XXs., et pour doubler depuis. Lalimentation nest quun facteur associ au dterminisme de la dure de vie.

    2. stature et hauteur de la base du crne Elles sont dautant plus leves que les conditions sanitaires et nutritionnelles sont bonnes. La hauteur de la base du crne (reflet de la qualit de croissance du jeune enfant) diminue de la fin du Nolithique la priode classique de 15% de sa valeur au Palolithique. Depuis la fin du Palolithique occidental on note deux phases daltration sanitaire diffres dans le temps : un dclin marqu de croissance staturale et des conditions nutritionnelles au cours des premires expriences agricoles (de -10000 BC -5000 BC), suivi dun rtablissement lAge du Bronze et dune relle amlioration lpoque grco-romaine (longvit accrue de 7 11 ans) ; puis nouveau dclin avec progression irrgulire des pathologies de la fin de lempire romain jusquau 18 sicle. Le dveloppement de lagriculture a rduit la diversit nutritionnelle pour sorienter vers une utilisation quasi-exclusive de certaines plantes comme riz en Asie, bl en Eurasie, millet et sorgho en Afrique et mas dans le Nouveau Monde. Consommes en grande quantit, ces plantes offrent un faible apport nutritionnel. Dans le mas, la prsence de phytates rduit la biodisponibilit du fer et des minraux contenu dans les aliments, et son dficit en acides amins essentiels (lysine, isoleucine et tryptophanne) entrane une faible croissance des individus ; les populations fortement dpendantes de cette plante prsentent une forte proportion danmies par carence en fer et une faible stature.

  • - Indicateurs de stress biologiques gnraux pisodiques Ils laissent des traces sur les os (lignes de Harris) et sur les dents (Hypoplasies et micro dfauts de lmail dentaire) :

    1. lignes de Harris

    Elles sont des densifications osseuses linaires visibles en radiographie, transversales au grand axe de la diaphyse, orientes paralllement la plaque mtaphysaire de chaque extrmit dun os long. Elles matrialisent chez lenfant (au cours des cinq premires annes) un redmarrage de la croissance momentanment stoppe par un vnement biologique unique ou pisodique (pisodes de famines, carences vitaminiques, sevrage, maladies ruptives infantiles) auquel elles sont faiblement corrles (peuvent apparatre sans raison particulire, leur absence ne peut exclure des vnements pathologiques de lenfance, car elles peuvent tre rsorbes par lostoporose lie au vieillissement) ; elles ne sont pas spcifiques dune cause particulire, toutefois dans une mme population (o tous les individus sont supposs tre soumis aux mmes contraintes environnementales), une plus grande frquence de lignes de Harris permet denvisager lhypothse de stress vnementiels plus importants ou plus nombreux (ncessitant dtre confirme par lanalyse dautres marqueurs biologiques) ; la comparaison entre populations sera difficile si les contraintes msologiques et courbes de mortalit sont trop diffrentes.

    2. hypoplasies de lmail dentaire Elles sont des dfauts du dveloppement de lmail au cours de la formation de la couronne dentaire (dysfonctionnement des amloblastes avec formation incomplte ou dfectueuse de la matrice) ; elles apparaissent sous forme de sillons ou bandes horizontales et circulaires, une hauteur coronale identique pour un mme type de dent sur une mchoire. Il peut sagir aussi de dfauts ponctus, daltration de surface voire de malformation coronale. Ces hypoplasies peuvent tre dorigine hrditaire ou dorigine environnementale. Dans ce cas elles correspondent un vnement biologique de courte dure dans lenfance : problme dinfection (fortes fivres, infections aigus), maladie ruptive exanthmateuse (rougeole, scarlatine, rubole), dficience nutritionnelle (vitamines A, C et D), syphilis congnitale, hypocalcmie, traumatisme la naissance, traumatisme local, prmaturit, maladie hmolytique, exposition au fluor. Le nombre de dents atteintes varie selon la cause : lhypoplasie ne peut toucher quune seule dent (traumatisme local), ou bien concerner lensemble de la denture ou un groupe de dents (facteur tiologique agissant de manire gnralise). Localisation, aspect et svrit de latteinte sont variables et dpendent de lorigine de la lsion, de la dure dexposition llment causal, et du stade de dveloppement de la dent au moment de latteinte (les hypoplasies dorigine environnementale sont gnralement lies des vnements ayant eu lieu pendant la premire anne delenfant. Une grande frquence de ces hypoplasies affecte les populations ayant dvelopp lagriculture sur diffrents continents.

    - Indicateurs de stress li un tat morbide Ils sont associs des tats morbides (infectieux et alimentaires) :

  • 1. hyperostose spongieuse (ou poreuse) du crne Elle sobserve sur plusieurs sries de crnes nolithiques (bassin mditerranen, Nubie, rgions Est et cte Pacifique de lAmrique du Nord, Amrique Centrale, Asie du Sud) : aspect cribl de la vote du crne caus par lhyperplasie de la moelle hmatogne du diplo, en rponse au stimulus chimique de production dhmaties en cas de perte globulaire chronique (perte de sang ou destruction globulaire). Les pathologies responsables sont des anmies hmolytiques gntiques (dficit en G6PD et favisme), des hmoglobinoses (thalassmies et drpanocytose), des affections parasitaires entranant une perte sanguine par hmolyse (paludisme), ou une consommation de globules rouges (ankylostomiase), ou de vitamine B12 (Diphyllobothrium, parasite de certains poissons) provoquant une rythropose inefficace au transport doxygne. Lors danmies par carences martiales, lhyperostose spongieuse est plus rare, sauf si lindividu a de faibles rserves en fer du fait dune perte globulaire chronique au dpart ; le rle des phytates alimentaires vient renforcer cette carence dapport.

    Lhyperostose spongieuse apparat dans un complexe multifactoriel de misre alimentaire (carence en fer, diarrhes parasitaires, carence protique, rachitisme, malnutrition maternelle durant la grossesse, naissance prmature). Lobservation dune hyperostose spongieuse sur un crne dadulte traduit une hyperplasie hmatogne dbute dans lenfance (une affection dbutant lge adulte ne donne pas d hyperostose spongieuse, la moelle tant plus graisseuse quhmatogne), la prvalence d hyperostose spongieuse des non adultes ne reflte pas la frquence relle danmie de la population (la prvalence chez les adultes nest pas connue, car non manifeste sur los). Si une hyperostose spongieuse est observe chez un adulte, cest quil y a eu anmie dans lenfance : la cause de lanmie est rechercher dans la population denfants, et il est impossible de connatre limpact vritable de la maladie dans le pass (sous-reprsentation frquente des sujets immatures dans les sries osto-archologiques). Autrefois considre comme rponse ngative de lindividu, l hyperostose spongieuse est actuellement considre comme une rponse positive : la carence martiale nest pas toujours prjudiciable (stimule les dfenses immunitaires contre linfection: les agents microbiens ont besoin de fer pour le fixer sur les protines quils produisent, lhyposidrmie avantage lhte). Lhyperostose spongieuse est une rponse adaptative un fort environnement pathologique mme si lalimentation est riche en fer , mais lquilibre entre le rle du fer dans le systme de dfense et les besoins corporels en fer peut tre rompu par une exposition prolonge un grand nombre dinfections, ce qui entrane une carence martiale (dans les rgions forte proportion de pathologies infectieuses). Lhyperostose spongieuse apparat ds le Nolithique (regroupement des populations), sa prvalence est plus forte dans les rgions tropico-quatoriales (plus de pathologies infectieuses). Elle est plus frquente en plaine quen altitude, elle a diminu l poque moderne en Europe du nord. Elle rsulte de linteraction entre culture, alimentation, hygine, parasites, et maladies infectieuses. Les crnes porteurs des signes dhyperostose spongieuse appartiennent des sujets mieux adapts et plus ractifs au pathologies que ceux qui sont morts avant davoir pu ragir ; ladaptation lenvironnement est encore meilleure si la fertilit et la longvit sont accrus.

    2. cribra orbitalia Parmi les phnomnes porotiques osseux, lanmie et la carence martiale (dveloppes dans un contexte infectieux bactrien ou parasitaire) se sont imposes comme tiologie lhyperostose poreuse du crne. Il nen est pas de mme pour les cribra orbitalia, pour les quelles on admet trois types de lsions lmentaires distinctes, et ne pouvant pas reposer sur le seul principe physiopathologique dhyperplasie mdullaire :

  • - Lrosion par ostolyse conscutive lagression directe de los cortical (inflammation de la glande lacrymale, hmatome sous-priost traumatique ou scorbutique, granulome cholestrolique, abrasion taphonomique). La lsion progresse de lextrieur vers lintrieur (concavit) en exposant les espaces diploques.

    - La priostose par formation ostoplastique conscutive une inflammation du prioste (priostite) et/ou de los sous-jacent (ostite) suite un traumatisme ou une infectieuse des structures orbitaires. La surface de lapposition prioste (relief convexe irrgulier) a un aspect cribl inhomogne.

    - La dformation volumique o prdomine lhypertrophie du diplo conscutive une hyperplasie mdullaire, gnralement attribue certaines anmies et carences en fer. La corticale est rode de lintrieur, la lsion progresse vers lextrieur faisant merger la structure spongieuse et rgulire du diplo (convexit homogne).

    A ces lsions sajoute un aspect physiologique (non ractionnel) de los immature qui prsente temporairement une surface naturellement crible (ni convexit ni concavit de la surface poreuse). La distinction macroscopique est parfois difficile, et il ny a aucune rfrence contemporaine (physiopathologique, radiologique, pidmiologique). Lanalyse histologique sur os sec ancien reste imprcise. Les orbites denfants et dadolescents sont les plus touches.

    3. priostoses Une dmographie plus importante et une concentration dindividus plus sdentaires chez les peuples agriculteurs ont conduit maintenir et accrotre les maladies infectieuses. Des comparaisons diachroniques de lsions inflammatoires et infectieuses osseuses non spcifiques appeles priostites montrent une augmentation de leur prvalence en relation avec des modifications des conditions de vie. A ces lsions non spcifiques, sajoutent les ostopriostites et ostoarthrites daffections communautaires plus spcifiques : tuberculose, lpre, trponmatoses.

    4. pathologie bucco-dentaire La pathologie bucco-dentaire est observe sur la prsence de caries de lmail (dont la frquence augmente avec le dveloppement de lagriculture et la consommation dhydrates de carbone), et des pertes dentaires ante-mortem (indicateur datteinte priondontale). Les rgions pri apicale, alvolaire, palatine peuvent tre le sige dostolyses en rapport avec des infections dorigine dentaire ou gingingivo-buccales.

    - Indicateurs de stress dactivits Ils refltent certaines contraintes biomcaniques environnementales et dactivit: robusticit et adaptation structurale, macrotraumatismes accidentels, microtraumatismes rpts :

    1. robusticit et adaptation structurale Ce sont des marqueurs des conditions environnementales sociales, conomiques ou gographiques (recherche de nourriture et de matires premires, travail physique). Les populations forte activit physique ont des os de plus grand format et plus robustes que dans des populations peu actives. Les chasseurs-cueilleurs ont un squelette plus robuste. La distribution de los (observe sur des sections transversales de diaphyse dos long) est fortement influence par le type et le degr de contrainte mcanique :

  • - les stress mcaniques les plus forts sexpriment sur les systmes haversiens situs le plus lextrieur de la diaphyse, ce qui confre un os long une plus grande rsistance la flexion et la torsion lors defforts prolongs (marche, course) ; les os longs de section large sont plus aptes rsister ce type de contraintes que les os troits ; un plus grand nombre dostons intacts avec de plus petits canaux de Havers et un volume osseux accru peuvent rsulter dun plus fort niveau de stress biomcanique.

    - Les populations physiquement plus actives avec stress de torsion antro-postrieure ont au

    milieu de leur diaphyse fmorale un allongement relatif antro-postrieur, et un retrcissement relatif mdio-latral : les populations mobiles de rcolteurs (pr-agriculteurs) ont des diaphyses fmorales compresses latralement (chez les agriculteurs sdentaires elles sont arrondies, avec un diamtre sous-priost et une circonfrence plus petits). Ces modifications diaphysaire sont mesurables par le calcul de lindice de platymrie (portion proximale sous-trochantrienne) et de lindice diaphysaire au milieu.

    - Lindice de platymrie est significativement plus faible gauche qu droite (le ct

    dominant) ; la musculature tant plus faible gauche, les contraintes biomcaniques (activit et nature du terrain) y sont moins attnues qu droite: les indices de platymrie gauches sont plus levs dans les rgions au sol mou (sable, marais) et plats, que pour les sols rocheux durs et accidents (ce qui signifie que les stress biomcaniques faibles tendent arrondir la section tranversale sous-trochantrienne). Les indices de platymrie des nolithiques avoisinent 85, voire moins, traduisant une platymrie marque.

    - Lindice diaphysaire au milieu varie moins que lindice de platymrie, il a une plus forte corrlation ngative avec le diamtre maximum de la diaphyse (qui dpend du sexe). Au niveau du tibia, lindice daplatissement au milieu de la diaphyse est plus faible au Msolithique quau Nolithique (diaphyse aplatie transversalement) ; la tendance est larrondissement diaphysaire entre 7000 et 6000 BP, tendance qui saffirme lpoque romaine. Laplatissement transversal confre une meilleure rsistance la torsion.

    2. traumatismes

    Etudier les traumatismes marqueurs dactivit cest rechercher sur los ancien les traces engendres par les contraintes biomcaniques par la rptition dun geste dans une activit donne, et tablir un lien entre lactivit et ses consquences anatomiques sur la base de rfrences mdicales (sport et travail), et remonter (en thorie) de la trace sur los au geste responsable et sa finalit : de la trace de sur-fonction (altration de la forme par la fonction = marqueur dactivit) la reconstitution de la fonction (Kennedy, 1989; Dutour, 1992).

    La reconstruction des gestes et activits des populations anciennes se heurte un certain nombre de difficults : la fiabilit du marqueur dactivit (sensibilit, spcificit), la validit du modle actuel de rfrence (mdecine sportive et du travail), leur compatibilit avec les donnes archologiques. Les activits anciennes sont hypothtiques, les actuelles sont connues, et les deux a priori ne sont pas superposables (leur finalit peut tre diffrente pour un mme retentissement osseux). Si les donnes archologiques montrent une activit corrle avec le marqueur observ sur los, et que les lsions sur los ancien et los actuel sont identiques et bien dfinies, le problme dans ce cas est labsence de rfrences actuelles corrles au marqueur osseux (aucune pathologie sportive ou professionnelle ntaye lhypothse formule archologiquement ; ex : los acromial et la pratique de larcherie, non valids actuellement). Sil faut dvelopper des rfrences ethnoarchologiques et

  • exprimentales, il restera le problme de lidentit du mouvement entre activit reconstitue et activit du pass, en sachant que la biomcanique du geste reste invariante au sein dune mme espce.

    Parmi ces traumatismes marqueurs dactivit, on distinguera :

    - Les macro-traumatismes, avec les fractures (on notera : frquence topographie, latralit, consolidation, prdominance sexuelle), les luxations et les entorses (ossifications ligamentaires: exostoses).

    - Les micro-traumatismes, avec les fractures de fatigue (spondylolyse isthmique), les arthroses secondaires extraspinales (critres topographiques : coude, poignet, cheville), les exostoses (ex : col astragalien et os trigonum par hypersollicitation du pied, flexions plantaires forces ou syndrome de la queue de lastragale ), et les enthsopathies (ossification des insertions tendineuses et ligamentaires).

    Quelques aspects particuliers pour certains dentre eux :

    Les arthroses s