Ben Laden Le Monde

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7/18/2019 Ben Laden Le Monde http://slidepdf.com/reader/full/ben-laden-le-monde 1/28 Mardi 3 mai 2011 - Algérie150 DA, Allemagne 2,00 ¤, Antilles-Guyane2,00¤, Autriche2,40¤, Belgique 1,50¤, Cameroun 1 500FCFA, Canada 4,25$, Côted’Ivoire 1 500FCFA, Croatie18,50Kn, Danemark 25KRD, Espagne 2,00¤, Finlande 2,50¤, Gabon1 500FCFA, Grande-Bretagne1,50£, Grèce 2,20¤, Hongrie700HUF, Irlande2,00 ¤, Italie2,20¤, Luxembourg 1,50¤, Malte2,50¤, Maroc10DH, Norvège25 KRN, Pays-Bas2,00¤, Portugalcont. 2,00¤, Réunion1,90¤, Sénégal 1 500FCFA, Slovénie2,20¤, Suède30KRS, Suisse 3,00CHF,Tunisie2,00DT, Turquie6,00TL, USA3,95$, AfriqueCFAautres 1500FCFA, L ehasardfait,parfois,bienles choses.L’hommequi aincar- néle djihadismeinternatio- nalmeurtaumomentoùle«prin- tempsarabe» vientde porterun coupà cefantasmetotalitaire. Dèslorsquelespeuplesarabesse révoltentau nomde ladémocra- tieetnondel’islamismeoudu retouraucalifatprônésparAl-Qai- da,OussamaBen Ladenétaitun moribond politique. C’estpresquela deuxième mortdufondateurd’Al-Qaida qu’aannoncéedimanchesoir 1 er maile présidentBarackObama, enindiquantqu’uncommando américainavaittuéBenLadenau Pakistan. Lepremieravisdedécès,politi- quecelui-ci,du dissidentsaou- dien,onpouvaitleliredanslesslo- gansdesmanifestantsdeTuniset duCaire.Ytransparaissaientnon paslahainedel’Occident,«des croisésetdesjuifs»,lahainede l’Amérique,crisderalliement habituelsdeBenLaden,maisun désirdelibertéet dedémocratie, deux«valeurs»abhorréesparle chefdjihadiste. Danslemondearabe,au moins, BenLadenavaitperdula bataille: larévolteen coursne célèbrepas l’islamisme,cetteillu- sionmortellequeportaitle chef d’Al-Qaidaselonlaquellele retour aucalifatet àl’islamdesorigines estlaréponseàtouslesproblè- mesdespaysmusulmans–voire àceuxdumondeentier. BenLadenmeurtaumoment oùla capacitéde mobilisationet d’entraînementde l’islamisme estsurledéclin.Celaneveutpas direqu’iln’yauraplusd’attentats. Nimêmequ’Al-Qaidaetsesfilia- lesmaghrébineet sahéliennene sévirontplus.Il yauratoujours desgroupesse réclamantde la marquepourtueret enlever,iciet là.Le Marocvientd’enfairel’expé- rience. Cecultedelaviolencelaplus aveuglen’estpasle seulhéritage laisséparBen Laden.L’homme quidisparaîtaprofondément marqué–pourlepire– cedébut deXXI e siècle.OussamaBen Laden,cefils d’unerichefamille saoudiennequifitsespremières armesdansla luttecontreles SoviétiquesenAfghanistan,a façonnéle paysagestratégique quiestlenôtre. Parcequ’ilsontcrudevoir répondrepar laguerreauxatten- tatsdu11septembre2001,les Etats-Unissonttoujoursempê- trésdansdeuxconflits:enIraket, surtout,en Afghanistan.Ces aven- tureslesontépuisésmilitaire- ment,budgétairement; ellesont durablementternileurimage danslemondearabo-musulman. M.Obama vapouvoirtirerpro- fitaux Etats-Unisdel’élimination deBenLaden;iln’enrestepas moinsenlisédansl’imbroglio afghan. L’héritageencore:Al-Qaidaa prouvéqu’unpetitgroupepou- vaitperpétrerun crimedemasse. SiBenLaden,dotéd’unearme chimiqueou biologique,avaitpu tuernonpas3000mais3mil- lionsdepersonnesàNewYork,il l’auraitfait. Cetteperspectiveaposéla lut- tecontreleterrorismeenpriorité absolue.Et,au nom decelle-ci,en Amérique,en Europeetailleurs, l’obsessionsécuritaireaconduità limiterleslibertéspubliques. Onn’enapastoutàfaitfini avecBenLaden. p Y van Colonna comparait à partir du lundi 2mai devant la cour d’assises spéciale de Paris. Le nationaliste corse, accusé de l’assassinat du préfet Erignac en 1998, pourrait faire évoluer sa défense.En mars 2009, ilavait été condamné à perpétuité, décision annuléeencassation. Lirepage18 Editorial LamortdeBenLaden «Justice estfaite» Lastratégie d’YvanColonna faceàsesjuges ProcèsClearstream: lesintriguesenappel  Ladeuxièmemortdufondateurd’Al-Qaida t Dimanche1 er mai,23h36,heuredeWashington: leprésidentObamaannonceparcesmotslamort duchefd’Al-Qaida,tuéparuncommandodelaCIA auPakistan t«USA,USA!»ScènesdeliessedevantlaMaison Blanche,etàNewYork,àGroundZeroetàTimes Square tEntrelesEtats-UnisetleréseauterroristeAl-Qaida, quinzeansd’unduelsansmerci tWikiLeaks: lesgrandsprojetsdesdeuxlieutenants deBenLadenpourl’après-11-Septembre,révéléspar lesdocumentsdeGuantanamo Lirepages3à8        *        V      o      u      s      v      o      u      s      a       t       t      e      n        d        i      e      z        à      q      u      o        i        ?  W  h a  t  d i d  y o  u  e x  p e c  t ? * Oussama BenLaden en2001. AUSAF/SIPA Justice Lesprotagonistesdel’affaire Clearstream se retrouventdevant la cour d’appeldeParisdu 2au26mai.Avecl’ancien chefdu gouvernementDominiquede Villepin aupremierplan.Et l’électionprésidentielle de2012 en arrière-plan. Page11         U         K       p       r        i       c       e         £         1  ,         5         0 Leregardde Plantu

Transcript of Ben Laden Le Monde

  • Mardi 3 mai 2011 -

    Algrie 150 DA, Allemagne 2,00 , Antilles-Guyane 2,00 , Autriche 2,40 , Belgique 1,50 , Cameroun 1 500 F CFA, Canada 4,25 $, Cte dIvoire 1 500 F CFA, Croatie 18,50 Kn, Danemark 25 KRD, Espagne 2,00 , Finlande 2,50 , Gabon 1 500 F CFA, Grande-Bretagne 1,50 , Grce 2,20 , Hongrie 700 HUF, Irlande 2,00 , Italie 2,20 , Luxembourg 1,50 , Malte 2,50 ,Maroc 10 DH, Norvge 25 KRN, Pays-Bas 2,00 , Portugal cont. 2,00 , Runion 1,90 , Sngal 1 500 F CFA, Slovnie 2,20 , Sude 30 KRS, Suisse 3,00 CHF, Tunisie 2,00 DT, Turquie 6,00 TL, USA 3,95 $, Afrique CFA autres 1 500 F CFA,

    L e hasard fait, parfois, bien leschoses. Lhomme qui a incar-n le djihadisme internatio-nal meurt au moment o le prin-temps arabe vient de porter uncoup ce fantasme totalitaire.Ds lors que les peuples arabes servoltent au nom de la dmocra-tie et non de lislamisme ou duretour au califat prns par Al-Qai-da, Oussama Ben Laden tait unmoribond politique.

    Cest presque la deuximemort du fondateur dAl-Qaidaqua annonce dimanche soir1er mai le prsident Barack Obama,en indiquant quun commandoamricain avait tu Ben Laden auPakistan.

    Le premier avis de dcs, politi-que celui-ci, du dissident saou-dien, on pouvait le lire dans les slo-gans des manifestants de Tunis etduCaire. Y transparaissaient nonpas la haine de lOccident, des

    croiss et des juifs , la haine delAmrique, cris de ralliementhabituels de Ben Laden, mais undsir de libert et de dmocratie,deux valeurs abhorres par lechef djihadiste.

    Dans le monde arabe, aumoins, Ben Laden avait perdu labataille : la rvolte en cours neclbre pas lislamisme, cette illu-sion mortelle que portait le chefdAl-Qaida selon laquelle le retourau califat et lislam des originesest la rponse tous les probl-

    mes des pays musulmans voire ceux du monde entier.

    Ben Laden meurt au momento la capacit de mobilisation etdentranement de lislamismeest sur le dclin. Cela ne veut pasdire quil ny aura plus dattentats.

    Ni mme quAl-Qaida et ses filia-les maghrbine et sahlienne nesviront plus. Il y aura toujoursdes groupes se rclamant de lamarque pour tuer et enlever, ici etl. Le Maroc vient den faire lexp-rience.

    Ce culte de la violence la plusaveugle nest pas le seul hritagelaiss par Ben Laden. Lhommequi disparat a profondmentmarqu pour le pire ce dbutde XXIe sicle. Oussama BenLaden, ce fils dune riche famillesaoudienne qui fit ses premiresarmes dans la lutte contre lesSovitiques en Afghanistan, afaonn le paysage stratgiquequi est le ntre.

    Parce quils ont cru devoirrpondre par la guerre aux atten-tats du 11 septembre 2001, lesEtats-Unis sont toujours emp-trs dans deux conflits : en Irak et,surtout, en Afghanistan. Ces aven-

    tures les ont puiss militaire-ment, budgtairement ; elles ontdurablement terni leur imagedans le monde arabo-musulman.

    M.Obama va pouvoir tirer pro-fit aux Etats-Unis de lliminationde Ben Laden ; il nen reste pasmoins enlis dans limbroglioafghan.

    Lhritage encore : Al-Qaida aprouv quun petit groupe pou-vait perptrer un crime de masse.Si Ben Laden, dot dune armechimique ou biologique, avait putuer non pas 3 000 mais 3 mil-lions de personnes New York, illaurait fait.

    Cette perspective a pos la lut-te contre le terrorisme en prioritabsolue. Et, au nom de celle-ci, enAmrique, en Europe et ailleurs,lobsession scuritaire a conduit limiter les liberts publiques.

    On nen a pas tout fait finiavec Ben Laden.p

    Y van Colonna comparait partir du lundi 2 mai devantla cour dassises spciale deParis. Le nationaliste corse, accusde lassassinat du prfet Erignacen 1998, pourrait faire voluer sadfense. En mars 2009, il avait tcondamn perptuit, dcisionannule en cassation.Lirepage18

    Editorial

    Lamortde Ben Laden

    Justiceest faite

    LastratgiedYvanColonnaface ses juges

    ProcsClearstream:lesintriguesenappel

    LadeuximemortdufondateurdAl-Qaida

    tDimanche 1er mai, 23h36, heure de Washington:le prsident Obama annonce par ces mots la mortdu chef dAl-Qaida, tu par un commando de la CIAau PakistantUSA, USA! Scnes de liesse devant la MaisonBlanche, et New York, Ground Zero et TimesSquaretEntre les Etats-Unis et le rseau terroriste Al-Qaida,quinze ans dun duel sans mercitWikiLeaks: les grands projets des deux lieutenantsde Ben Laden pour laprs-11-Septembre, rvls parles documents de GuantanamoLire pages 3 8

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    OussamaBenLadenen2001.AUSAF/SIPA

    Justice Lesprotagonistesde laffaireClearstreamseretrouventdevant la courdappeldeParisdu2au26mai.Avec lancienchefdugouvernementDominiquedeVillepinaupremierplan.Et llectionprsidentiellede2012enarrire-plan.Page11

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    Leregard dePlantu

  • LeBrsil,paradisdesjeunesveuvesLhistoire Jean-PierreLangellier (Rio de Janeiro,correspondant)

    Les faits

    Libye Lannonce par le rgimelibyen, dimanche 1er mai, de lamort du plus jeune fils deMouammar Kadhafi et de troisde ses petits-enfants, lissue defrappes de lOTAN dans le secteurde Bab El-Aziziya Tripoli, adclench la fureur des partisansdu Guide, qui ont vandalis etincendi les ambassades dItalieet du Royaume-Uni. Alors quunnaviretentaitde dcharger sacar-gaison, les forces kadhafistes ontbombard la zone portuaire de

    Misrata, provoquant un incen-die. De nouveaux combats ontclat entre les forces rgulireset les rebelles la frontire avec laTunisie.Lire page9

    Syrie Le chef de la diplomatiefranaise, Alain Jupp, a estim,lundi 2 mai, que le rgime du pr-sident syrien Bachar Al-Assadallait tomber sil persvraitdans la rpression violente. Plu-sieurs centaines de personnesont t arrtes dimanche dans

    diffrentes villes, dont Homs(centre) et Lattaqui (nord-ouest) o des manifestationscontre le rgime ont t organi-ses. A Deraa (sud), larme et lesforces de scurit pntrentdans lesmaisons et arrtent cha-que fois une ou deuxpersonnes,selon les militants des droits delhomme.

    Egypte Les Frres musulmans,mouvement islamiste de loppo-sition, ont cr, samedi 30 avril,

    leur propre parti (civil et nonthocratique), avec lambitionde briguer la moiti des sigesaux lections lgislatives pr-vues en septembre.

    Ymen Le mdiateur desmonarchies du Golfe dans la cri-se ymnite, Abdellatif Al-Zaya-ni, a quitt samedi soir Sanaa,aprs avoir chou obtenir lasignature du prsident Ali Abdal-lah Saleh sur un plan de sortie decrise.

    aInternational

    UnprojetdattentatdAl-QaidaauraittdjouenAllemagneTrois membres prsums dAl-Qaida interpells, Bochum et Dssel-dorf (ouest), sontsouponns davoir travaill la fabricationdune bom-be quils comptaient faire exploser dans un lieu frquent de la rgion deDsseldorf, selonles informationsdivulgues, samedi 30 avril,par le par-quet antiterroriste allemand. Le trio tait surveill depuis plusieursmoispar les services secrets allemands, marocains et par la CIA. Le principalsuspect, Abdelakim El-K., un Marocain de 29 ans, avait quitt lAllemagnedbut 2010 pour sentraner dans un camp dAl-Qaida au Pakistan, prsde la frontire afghane. Les deux autres suspects sont des binationaux,allemand et marocain pour lun, allemand et iranien pour lautre.

    HuitFranaistusMarrakechParmi les 16 personnes tues par lexplosion dune bombe Marrakech,jeudi 28 avril, dans un caf de la place Djemaa El-Fna, huit Franais onttrouv la mort, selon un bilan dfinitif fourni dimanche 1er mai par leministre marocain de lintrieur.Trois Marocains, un Britannique, un Canadien, un Nerlandais, un Por-tugais et un Suisse ont galement pri. Les explosifs ont t dclenchs distance et lattentat pourrait tre luvre dAl-Qaida, a dclar leministre de lintrieur, Taeb Cherkaoui.

    UnmilliondepersonnesRomepourlabatificationdeJeanPaulIILa crmonie au cours de laquelle le pape Jean Paul II a t proclambienheureux, dimanche 1er mai, par son successeur Benot XVI, a ras-sembl plus dun million de personnes, masses place Saint-Pierre etdans les rues adjacentes de Rome, selon la prfecture. La proclamationa t retransmise par les tlvisions du monde entier et suivie en directsur cran gant dans de nombreuses villes, dont Varsovie et Lourdes.

    aFranceClearstream:unnouveauprocspourDominiquedeVillepinLancien premier ministre Dominique de Villepin devait comparatre enappel pa rtir du lundi 2 mai pour son rle prsum dans une manipula-tionmeneen2004avecdefauxfichiersdelasocitClearstream,ofigu-raitlenomdeNicolasSarkozy.Enpremireinstanceenjanvier2010,M.Vil-lepin a t relax de laccusation de complicit de dnonciation calom-nieuse, contre lavis du parquet.Lire page11

    Petitsdfilspourle1er-MaiLe 1er-Mai, tombant cette anne un dimanche, na pas fait recette: les sala-risont boudlaclbrationen FrancedelaJourne internationaledes tra-vailleurs,survenantdansunepriodederefluxaprslesgrandesmobilisa-tions de lautomne sur les retraites. La CGT a fait tat de plus de120000manifestants dans lHexagone, o elle organisait avec quatreautres syndicats (CFDT, FSU, Solidaires et UNSA) des dfils dans 173villes.Pour le ministre de lintrieur aussi, le 1er-Mai est en recul: 77000 person-nes ont dfil en France.Lire page12n Sur Lemonde.fr : le blog Droites extrmes: 1er-Mai,Marine LePen, combattante dela France libre

    aEconomieUnedesdeuxbotesnoiresduvolParis-RioatretrouveLe botier contenant les paramtres de vol de lAirbus A330 dAir France,qui sest abm en mer le 1er juin 2009 au large du Brsil, faisant228 morts, dont 73 Franais, a t repch en bon tat physique, aannonc, dimanche 1er mai, le Bureau denqutes et danalyses (BEA)charg de lenqute technique. A ce jour, cet accident reste inexpli-qu.Lire page14

    L es femmes de moins de 40ans qui pour-raient verser des larmes, sincres ou decrocodile, en voquant la mmoire deleurs vieux maris dfunts, sont de plus enplus nombreuses. Leurs chers trs chers dis-parus, anciens retraits, leur assurent depuislau-del de beaux jours en leur permettant depercevoir pendant toute leur vie une conforta-ble pension de rversion.

    En matire de retraite, le Brsil est lun despays les plus laxistes et les plus gnreux aumonde. La somme que recevait le retrait dis-paru est intgralement transfre au profit deses proches: son conjoint, le plus souvent; ou, dfaut, ses enfants de moins de 21ans, sesparents, voire ses frres ou surs mineurs.

    Une fois le dcs attest, cette rversionnest assujettie aucune condition ni restrein-te par aucun critre. Il nest pas ncessaire quele couple ait t mari ; lunion stable suffit.Quimporte si cette union fut phmre ou sila bnficiaire est dun ge trs tendre! Aucu-ne dure minimale nest exige pour la vie

    commune. Nombre de jeunes veuves bn-ficient dune pension aprs avoir seulementaccompagn la fin de vie de leur poux vieuxou malade. Et elles continueront de la rece-voir si elles se remarient.

    Quimporte, si le dfunt, assur dun mini-mum vieillesse, na que peu cotis pour saretraite ou si sa veuve, quelle travaille ounon, possde les moyens de subvenir sesbesoins. L non plus, lEtat nimpose aucuneclause dattribution. Do une floraison demariages arrangs entre vieillards et femmesjeunes.

    Dans le collimateur du Trsor publicSelon des fonctionnaires de la scurit

    sociale brsilienne, certaines quipes davo-cats maraudent dans les hpitaux pour inci-ter des hommes malades, en phase terminale, convoler avec de jeunes promises. Dautresles persuadent dadopter des enfants commepetits-fils ou neveux pour que ces der-niers puissent recevoir un revenu mensuel

    jusqu leur majorit.Dsormais, les jeunes veuves sont dans

    le collimateur du Trsor public. Le gouverne-ment de Dilma Rousseff peaufine un projet deloi qui, comme dans la plupart des pays, enca-drera strictement lattribution des pensionsde rversion en imposant des rgles: dureminimale de lunion et des cotisations, exis-tence dun tat de dpendance conomique,interdiction du cumul dune pension et duneautre retraite.

    Cette rforme soulagera les caisses delEtat. Les pensions de rversion reprsententplus de 3 % du produit intrieur brut, soit troisfois la moyenne internationale. Autant que lebudget de lenseignement primaire et secon-daire, ou plus de la moiti de tout linvestisse-ment public ralis en 2010.

    La future loi prservera les droits acquisdes jeunes veuves. En attendant, celles quiaspirent ce confortable statut doivent sedpcher dpouser avantageusement levieillard de leur choix. p

    Socit ditrice du Monde SAPrsident du directoire, directeurde la publication : Louis DreyfusSecrtairegnral dudirectoire :Pierre-YvesRomainDirecteur du Monde,membre du directoire : Erik IzraelewiczDirecteur adjoint : Laurent GreilsamerEditeur : Michel SfeirDirectrice de la rdaction :Sylvie KauffmannDirecteurs ditoriaux : Grard Courtoiset Alain Frachon.Rdacteurs en chef : Jean-Jacques Bozonnet,Michel Kajman, Franck Nouchi, Isabelle Tals,Didier Pourquery (LeMondeMagazine).Chef ddition : Franoise Tovo.Directrice artistique : Sara Deux.Veille de linformation : Eric Azan.Secrtaire gnral : Jean-Pierre GiovencoMdiatrice :VroniqueMaurusConseil de surveillance : Pierre Berg, prsi-dent. Gilles van Kote, vice-prsidentLeMonde est dit par la Socit ditrice du Monde SADure de la socit : 99 ans compter du 15 dcembre 2000.Capital social : 149 017 497 . Actionnaire principal : LeMonde SA.

    Rdaction :80,boulevardAuguste-Blanqui,75707ParisCedex13Tl. :01-57-28-20-00 ;tlcopieur :01-57-28-21-21Abonnements :partlphone:deFrance32-89(0,34TTC/min) ;deltranger:(33)1-76-26-32-89oupar internet :www.lemonde.fr/abojournal

    Les scores

    Les gens Les chiffrest EmmanuelDemarcy-MotadirigeraleFestivaldautomne

    Le metteur en scne EmmanuelDemarcy-Mota, 41 ans, devrait trenomm, mercredi 4mai, la ttedu Festival dautomne de Paris.Selon des informations obtenuespar LeMonde, les deux tutelles, laVille de Paris et lEtat, ont finale-ment fait consensus sur ce candi-dat aprs diverses pripties: leposte tait vacant depuis le 12octo-bre 2009, date de la mort dAlainCrombecque, fondateur de ce festi-val. M. Demarcy-Mota doit garderparalllement ses fonctions auThtre de la Ville quil dirigedepuis 2007. (PHOTO AFP)n Sur lemonde.fr : larticle deNathanielHerzberg

    t FranoisBlaquartsuspendudesesfonctionslaFFFLe ministre des sports et la Fd-ration franaise de football (FFF)ont annonc, samedi 30 avril, lasuspension avec effet immdiatde Franois Blaquart, directeurtechnique national de la FFF, danslattente des conclusions duneenqute. Cette dcision intervientaprs la rvlation, par le siteMediapart, dun dialogue entreles cadres de la FFF concernantlventuelle mise en place de quo-tas pour les binationaux dans lesfilires de formation, lors dunerunion en novembre 2010.Lire page25

    t CharlesKonanBannyprsideralaCommissionvritdeCtedIvoirePremier ministre de Laurent Gbag-bo de 2005 2007, Charles KonanBanny, 69 ans, dirigera la Commis-sion pour le dialogue, la vrit et larconciliation, charge de tournerla page dun conflit post-lectoralqui a fait prs de 3000morts. Cet-te dcision a t annonce par leprsident ivoirien Alassane Ouat-tara samedi 30avril.

    tFootballLes rsultats de la 33e

    journe de Ligue 1Lens-Lorient ....................................... 2-3Lille -Arles-Avignon ......................... 5-0Rennes-Bordeaux ........................... 0-0Sochaux-Nancy ................................ 1-0Paris-SG-Valenciennes ................... 3-1Toulouse-Lyon .................................. 2-0Marseille-Auxerre .............................. 1-1Montpellier-Brest ............................ 0-0Nice-Caen .......................................... 0-4Saint-Etienne -Monaco .................... 1-1Le classement1. Lille ................................................... 632.Marseille ........................................ 623. Lyon ................................................. 564. Paris-SG ......................................... 565. Rennes ............................................ 526. Lorient ............................................. 477. Sochaux .......................................... 468. Bordeaux ........................................ 459. Saint-Etienne ................................. 4510.Montpellier ................................... 4411. Toulouse ........................................ 4212. Brest ............................................... 4113. Valenciennes ............................... 3914.Monaco ......................................... 3915. Auxerre ........................................ 3916. Caen ............................................. 3917.Nice ............................................... 3918.Nancy ........................................... 3819. Lens ............................................... 3020. Arles-Avignon ............................. 14

    Marseille pitinederrire LilleMarseille a chou rcuprer lapremire place de Lille en tantneutralis par Auxerre (1-1),dimanche 1er mai. De son ct,Lyon a perdu (2-0) Toulouse, etperd donc aussi de vue le titre. Sa3e place est menace par le ParisSG.Arsenal relance la courseau titre enPremier LeagueArsenal a relanc, dimanche1er mai, la course au titre en Pre-mier League en battant le leaderManchester United (1-0) lEmi-rates. Manchester, qui reste blo-qu 73 points, ne possde plusque trois longueurs davance surChelsea, victorieux samedi deTottenham (2-1). Les deux clubs,qui ont la mme diffrence debuts, doivent se rencontrerdimanche 8 mai Old Trafford.

    24heuresdans lemonde

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    Abou Dhabi

    Rabat

    Taz

    Damas

    Amman

    BagdadBeyrouth

    aLesrvoltesdanslemondearabe

    tCatastrophe

    33milliardsdeurospourlareconstructionauJaponLe Parlement japonais a vot lun-di2 mai une rallonge budgtairedenviron 4 000milliards de yens(33milliards deuros) pour finan-cer les besoins de la reconstructiondans le nord-est du pays dvastpar un sisme et un tsunami.

    tAustralie

    500000crationsdemploisprvuesendeuxansLe gouvernement australien tablesur la cration de 500000 emploisen deux ans et un taux de chma-ge 4,5% (contre 4,9% actuelle-ment), a indiqu, dimanche 1er mai,Wayne Swan, ministre du Trsor.LAustralie est le seul grand paysdvelopp avoir chapp larcession car le pays bnficie plein de la forte demande des paysmergents, Chine et Inde en tte,pour les matires premires.

    0123 est dit par la Socit Editrice du Monde (SA).La reproduction de tout article est interdite sans laccord de ladminis-tration. Commission paritaire des publications et agences de pressen 0712 C 81975 ISSN 0395-2037

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    Imprimerie du Monde12, rue Maurice-Gunsbourg,

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    Prsident : Louis DreyfusDirectrice gnrale :Corinne Mrejen

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    NewYorkCorrespondant

    Il est 1 h 40 et les derniersftards de Ground Zero senvont. Combien taient-ils ?Trois mille au plus, dit unpolicier en faction juste enface du site o slevait le

    WorldTradeCenterjusquau 11sep-tembre 2001.

    Lannonce de la mort dOussa-ma Ben Laden a t faite plus de23 h 30 New York, et les Amri-cains sont des couche-tt. Mais,assure Alfonso Lopez, 23 ans,demain, il y aurades clbrationsbeaucoupplusmassives, cest sr.Pourquoi, alors, a-t-il tenu venirimmdiatement ? Javais 14 anslorsque les tours jumelles sont tom-bes. Le propritaire de lapparte-ment de mes parents, dit-il, tra-vaillait pour un cabinet davocats,dans une des tours. Il y est mort cejour-l.

    Lisa Mannaci, 54 ans, repart

    chez elle, la bannire toile lamain. Fire dtre une nativeNew Yorker ( ne New York ),cette femme de 54 ans a tenu venir parce que son mari, StevenVincent, a trouv la mort Basso-ra, en Irak, o il tait journalistefree lance. Elle est l pour lui.

    Prs delle, deux obses se pous-sent du ventre pour se congratu-ler, encore une fois : LAmriqueest la plus forte, lancent-ils tue-tte. Douglas Miller repart, lui aus-si, un peu du dtre arriv unefois la fte finie. Etudiant en urba-nisme, cette soire sera pour lui, jamais, le plus grand jour quillui aura t donn de vivre depuisllection de Barack Obama, pourlequel il a vot en 2008, cela vasans dire. Il a 21 ans. Il a aim, dit-il, lamanire dont le prsident aparl de Ben Laden et de lislam. Il

    a montr que lAmrique ce nestpas Bush. Cest si bien que BenLadensoitmort.Mais jenesuispassr, conclut-il, que son esprit lesoit vraiment.

    Autour de lui, quelques der-niers ftards, tous trs jeunes etdrapeau amricain au vent, hur-lent la ronde que lAmriquevaincra. Direction Times Squa-re, annoncent-ils.

    Sur ce haut lieu touristique dela ville, cur de son image publici-taire, nocturne et scintillante, laquasi-totalit des vhicules depolice se sont retirs. Les automo-bilistes, eux, saluent coups de

    klaxon la centaine de personnesencore prsentes. Deux heuresauparavant, ils taient un oudeux milliers ou deux. TimothyPortalatin, 23 ans, estime quOba-ma a obtenu le plus grand succsmilitaire de lAmrique depuislattaque du 11-Septembre.Depuisce jour, jemesentaisabat-tu, affaibli en tant quAmricain.Aujourdhui, a bat fort dansmoncur.

    Jack Abrams, 23 ans lui aussi,porte la kippa noire. Il est venudepuis Brooklyn pour commu-nier devant Ground Zero, puis il asuivi les autres jusquici, l o,

    disait-on avant que la crise finan-cire ninfirme cette certitude, la ville ne dort jamais .

    Lui savait ! Il savait, clame-t-il,que Ben Laden serait chti. Ala fin, le jugement vient toujours,lance-t-il. Beaucoup dentre nousattendaient ce jour. Maintenant,beaucoup de la peur qui avaitenvahi lesNew-Yorkais vapouvoirtre surmonte. Autour de lui,des jeunes femmes allument deschandelles, chantent en boucleGod Bless America et lhymnenational.

    Jo Brown, 22 ans, corrige un peule tir : Ben Laden avait chang

    ma ville. Oui, depuis les attentats,les gens vivaient dans la peur.Maisdirequelleestpartie estpeut-tre prmatur. La mort de BenLaden, ce nest quun symbole.

    Pour Michael Bloomberg, lemaire de la ville, qui a tant faitpour que celle-ci retrouve la vie et

    ne devienne pas un lieu demmoire ,cestunevictoire cru-ciale qui apportera un peu derconfort tous ceux qui ont per-du des tres chers le 11 septembre2001 et les aidera faire leurdeuil. p

    Sylvain Cypel

    BarackObama: Nous devons restervigilants

    Pagetrois

    ObamaamontrquelAmriquecenestpasBush.CestsibienqueBenLadensoitmort.Maisjenesuispassrquesonespritlesoitvraiment

    DouglasMillertudiant

    Sitt lamort de Ben Laden annonce, les Amricainsont manifest leur joie.Notamment Ground Zero, sur le sanctuairedes attentatsdu 11-Septembre

    NuitdefteNewYork

    Voici les principaux extraits de lallocutionprononce laMaison-Blanche,par le prsident des Etats-Unis, BarackObama,dimanche 1ermai en fin de soire.

    YCe soir, je suis en mesure dan-noncer aux Amricains et aumonde que les Etats-Unis ont

    men une opration qui a tu Oussama BenLaden, le dirigeant dAl-Qaida, un terroriste res-ponsable du meurtre de milliers dhommesinnocents, de femmes et denfants.

    Il y a prs de dix ans, une journe enso-leille de septembre a t assombrie par lapire attaque contre le peuple amricain de sonhistoire. Les images du 11-Septembre sont gra-ves dans notre mmoire nationale : desavions dtourns en plein vol, les tours jumel-les qui seffondrent, la fume noire slevantdu Pentagone, lpave du vol 93 Shanksville,en Pennsylvanie ().

    Nous avons rapidement appris que les atta-ques avaient t menes par Al-Qaida uneorganisation dirige par Oussama Ben Laden,qui avait ouvertement dclar la guerre auxEtats-Unis et stait engage tuer des inno-cents dans notre pays et partout dans le mon-de. Et nous sommes donc entrs en guerrecontre Al-Qaida pour protger nos citoyens,nos amis et nos allis.

    Au cours des dix dernires annes, grce au

    travail inlassable et hroque de nos militaireset de nos professionnels de la lutte antiterroris-te, nous avons fait de grands progrs (). Pour-tant, Oussama Ben Laden parvint schapperpar la frontire afghane vers le Pakistan ().

    Peu de temps aprs ma prise de fonctions,jai demand Leon Panetta, le directeur de laCIA, de faire de la mise mort ou de la capturede Ben Laden la priorit absolue de notreguerre contre Al-Qaida, mme si nous poursui-vions nos efforts visant perturber et dman-teler son rseau. Puis, en aot dernier, aprsdes annes de travail minutieux de notre com-munaut du renseignement, jai t informdune piste pouvant nous conduire vers BenLaden. Il a fallu plusieurs mois pour remonterce fil. Jai rencontr mon quipe de scuritnationale de nombreuses reprises pour ru-nir davantage de renseignements relatifs unelocalisation de Ben Laden dans un complexe debtiments en plein cur du Pakistan. Et, enfin,la semaine dernire, jai dcid que nousavions assez de renseignements et jai autorisune opration pour capturer Oussama BenLaden et le traduire en justice.

    Aujourdhui, sous ma direction, les Etats-Unis ont lanc une opration cible contre sonrefuge Abbottabad, au Pakistan. Une petitequipe dAmricains a men lopration avecun courage et des capacits extraordinaires.Aucun Amricain na t bless. Ils ont pris soin

    dviter les pertes civiles. Aprs un change detirs, ils ont tu Oussama Ben Laden et se sontempars de son corps (). Sa mort ne marquepas la fin de nos efforts. Il ne fait aucun doutequAl-Qaida va continuer poursuivre ses atta-ques contre nous. Nous devons rester vigilants,chez nous et ltranger.

    Nous devons aussi raffirmer que les Etats-Unis ne sont pas et ne seront jamais enguerre avec lislam. Jai dit clairement, toutcomme le prsident Bush a fait peu aprs le11-Septembre, que notre guerre nest pas contrelislam. Ben Laden ntait pas un dirigeantmusulman, il tait un meurtrier de masse desmusulmans. En effet, Al-Qaida a tu des dizai-nes de musulmans dans de nombreux pays, ycompris le ntre. Ainsi, sa mort devrait trebien accueillie par tous ceux qui croient en lapaix et la dignit humaine ().

    Il est important de noter que notre coopra-tion contre le terrorisme avec le Pakistan nousa aids trouver Ben Laden (). Il est essentielque le Pakistan continue nous rejoindre dansla lutte contre Al-Qaida et ses affilis ().

    Nous ne tolrerons jamais que notre scuritsoit menace, et ne resterons pas inertes lors-que nos ressortissants sont tus (). Nous res-pecterons les valeurs qui nous dfinissent. Et enun soir comme celui-ci, nous pouvons dire auxfamilles qui ont perdu des tres chers causedu terrorisme dAl-Qaida: justice est faite ().p

    0123Mardi 3 mai 2011

  • Sur France InfoA la une du mondedu lundi au vendredi 21h25

    avec

    WashingtonCorrespondante

    O ussama Ben Laden naurapas vu le 10e anniversairedes attentats du 11 septem-bre 2001. A un moment de dpri-me nationale, de dsunion, unmoment o ils ne sy attendaientplus, les Amricains ont eu lextra-ordinaire surprise dapprendreque le chef dAl-Qaida, leur enne-mi depuis dix ans, lhomme res-ponsable de tout ce qui avait chan-g dans leur mode de vie, lesfouilles dans les aroports, la peur,les guerres, Oussama Ben Ladentait mort. Justice a t faite, adit Barack Obama.

    Ds que la nouvelle sest rpan-due que le prsident allait faireune dclaration officielle undimanche soir 22 h 30 ! , et queles mdias ont voqu lhypothsede la capture dOussama BenLaden, la foule a commenc serassembler devant la Maison Blan-che avec des drapeaux. La liesse agagn New York et Ground Zero,toujours pas cicatris, et toute lanuit, les Amricains sont descen-dus dans la rue en chantant com-me une quipe qui aurait gagn lacoupe du monde: USA!USA! Le11-Septembre tait veng.

    Aujourdhui, je suis enmesuredannonceraupeupleamricainetau monde que les Etats-Unis ontmenune opration qui a tuOus-sama Ben Laden, le chef dAl-Qai-da, un terroriste qui est responsa-ble de la mort de milliers dinno-cents, hommes, femmes etenfants, a dit Barack Obama. Leprsident amricain na pas mon-tr de triomphalisme mme sil aparl desatisfactionet soulignque cest lui qui avait donn lor-dre aux services secrets de faireporter la priorit sur la capture decelui queGeorgeW. Bushavait pro-mis ds 2001 denfumer. Aucunpays tranger navait t prvenuet mme pas le Pakistan, alors quelattaque sest produite moins de50 km de la capitale Islamabad, Abbottabad.

    Lopration un raid chirurgi-calat menepar uncomman-do hliport qui a attaqu diman-

    che 1er mai au matin le complexeo vivait Oussama Ben Laden aunord dIslamabad. Elle avait tprpare par un lent travail defourmi qui a dur des annes pourremonter la filire jusquau chefdAl-Qaida que les responsables dela scurit nationale disaient rgu-lirement dans les zones tribalesinaccessibles du nord-ouest duPakistan. Lenqute a associ laCIA, la National Security Agency(NSA) et la NGA.

    Le prsident a fourni peu dedtails mais tout de suite aprs lesplus hautsresponsables de la scu-rit nationale ont tenu une conf-rence de presse tlphoniquepourdonnerdesprcisions. Oussa-ma Ben Laden a t tu dune balledans la tte dans la fusillade alorsquil essayait de rsister lassaut.Trois autres hommes adultes ont

    aussi t tus, lesmessagers dOus-sama Ben Laden et probablementlun de ses fils. Une jeune femme atrouv la mort quand elle a tprise comme bouclier par un

    des hommes, a indiqu un officielamricain. Deux autres femmesont t blesses.

    Les hommes ontt 40 minutesau sol. Lun des hlicoptres a tperdudans lattaque,pourdesrai-sons techniques, ont assur les

    conseillersprsidentiels. Lquipa-gela dtruit et lestroupes dassautont t rapatries par un autreappareil. Le corps dOussama BenLaden est en possession des unitsamricaines qui ont respect lespratiques islamiques.

    Oussama Ben Laden logeaitavec safamille danscette zone rsi-dentielle, ultra-slect, qui abritaitdesmilitairespakistanaisenretrai-te. Nous avons t choqus de ceque nous avons dcouvert , aracont un officiel. Construite en2005, sa maison tait huit foisplusgrandequelesrsidencesvoisi-nes. Les murs taient hautementrenforcs. La terrasse au derniertage avait un mur de protectionde 2,17 m. Le btiment, de trois ta-ges, sans fentres vers lextrieur,etdune valeur dun million de dol-lars, ne comportait pas de tlpho-

    ne ou de connection Internet. Lesrsidents brlaient eux-mmesleurs poubelles. Tous ces dtailsont confirm les services secretsdans leur impression quilsavaient t bien aiguills.

    Toujoursselonleshautsrespon-sables de ladministration, lesagents amricains avaient t missur la piste dun courrier de BenLaden, un messager dont un dte-nu de Guantanamo avait donn leseul nom de guerre. Il tait dcritcomme un protg de KhaledCheikh Mohammed, lecerveau desattentats, et un collaborateur deAbu Faraj al-Libbi, lancien num-ro3 dAl-Qaida. Les Amricains onttrouv son identit il y a quatreans, et lont localis il y a deux ans.

    En aot, M. Obama a t infor-m quun renseignement avait tobtenu. Dbut septembre 2010, la

    CIA a commenc travailler aveclui sur une srie dinformationslaissant penser que Ben Ladentait dans cette cachette. Mi-mars,il a dcid de lancer le processusqui a men au raid. Il a tenu cinqrunions du conseil de scuritnationale sur le projet. Il a donnlordre final de mener lattaquevendredi 29 avril au matin.

    Lesecretavaittextraordinaire-ment bien gard. Tout juste diman-che, le prsident a-t-il quitt plustt que dhabitude sa partie de golf,au terrain de la base dAndrews :neuftrousseulementmaislesjour-nalistes qui le suivent avaient miscette interruption sur le compte dutemps gris et pluvieux.

    Avantson intervention, M. Oba-ma a inform George Bush et BillClinton, les deux prdcesseursqui avaient aussi pourchass BenLaden. Il faut revenir lunit du11-Septembre, a-t-il dit. Il nemp-che que cest une victoire person-nelle retentissante qui arrive alorsquil vient de lancer la campagnepour sa rlection. Loprationtait manifestement hauts ris-ques. Le seul fait dentendre le mothlicoptres associ attaquerappelle aux Amricains la dsas-treuse expdition lance par Jim-my Carter pour librer les otagesen Iran. Aussitt, des montagesphoto sont apparus. On y voit unObama souriant, derrire deslunettes de soleil dapparent dilet-tante : Dsol que a ait pris silongtemps pour trouver mon actede naissance. Jtais occup tuerBen Laden. p

    Corine Lesnes

    InternationalLa mort dOussama Ben Laden

    Uneoprationmene par lesforces spciales amricainesNewYorkCorrespondant

    Justice a t rendue, a dclar,lundi 2mai au matin, le prsidentamricain, Barack Obama, dansson allocution annonant la mortdOussama Ben Laden. Avantmme que le prsident nait parl,les experts militaires, pralable-ment briefs par la MaisonBlanche, avaient dsign ceux qui

    avaient excut la sentence : lescommandos amricains du JointSpecial Operations Command leJSOC.

    Chronologiquement, selon lespropos mmes de M. Obama, lapremire information srieusesur la localisation du chef dAl-Qada a t fournie par les servi-ces spciaux pakistanais le 1er aot2010. Le 22 aot, le suivi de trans-ports divers autour dun lieu situ

    80 kilomtres au nord de la capi-tale pakistanaise, Islamabad,confirmait les premiers soup-ons. Un complexe de plusieursmaisons y apparaissait entourpar deux murs spars, dont unhaut de plus de 5 mtres, surmon-ts de barbels. Ses deux entres ytaient protges par de lourdesportes blindes.

    Ni tlphone ni InternetLe cur du complexe tait

    constitu dun btiment huit foisplus grand que les autres et dotde murs intrieurs de 2 mtresdpaisseur. Contrairement unecroyance populaire parfois expri-me aux Etats-Unis, il semblequOussama Ben Laden vivaitdepuis de nombreux mois dansdes conditions confortables,mme si, pour des raisons de scu-rit, il naurait dispos ni de tl-phone ni, consquemment, delien Internet.

    En fvrier, cette piste pakista-naise se serait avre la plus perti-nente jamais fournie depuis queBen Laden avait russi schap-per de Tora Bora, en Afghanistanen 2001. Depuis, le prsident am-ricain aurait particip cinq ru-nions du Conseil national de scu-rit avec les responsables militai-res et civils concerns. Vendredi29 avril au matin, il a donn sonfeu vert pour mener cette opra-tion. Il nest pas clairement tablisi elle visait capturer BenLaden ou le tuer. Lopration acommenc dimanche, aux pre-mires heures du matin.

    Les Etats-Unis nont pas deman-d dautorisation aux autoritspakistanaises avant de menerleur opration. De source officieu-se amricaine, ce sont les Pakista-nais qui, aprs avoir inform lesAmricains de la localisation deBen Laden, auraient demand tre tenus lcart. Les Pakista-nais nous ont dit : cest vous qui yallez, a assur savoir le gnralde rserve Barry McCaffrey. Selonce dernier, le JSOC, auquel ont tconfies la logistique et la mise enuvre de cette opration, seraitconstitu desgens les plus dange-reuxaumonde. Ils regroupentdes lments issus des diverscorps darme (terre, mer, air, ran-gers, communication et rensei-gnement) et sont forms auxsituations les plus extrmes,constituant, selon ce gnral, untrsor national.

    Sur les modalits de lopration,on sait que les forces amricainesauraient perdu un hlicoptre ausol, sans perte humaine, et quilsauraient dlibrment brl lappa-reil avant de repartir. Quelque 40hommes du JSOC y auraient partici-p, disposant de plusieurs hlicop-tres de transport de troupes et delance-missiles. M.Ben Laden, desource officieuse, aurait tent dersister par lusage des armes lorsduncourtaffrontement. Ilaurait t tu daumoinsuneballe dans la tte. Seraient gale-ment morts son fils an, deux gar-des du corps et deux femmes pr-sentes prs de lui.p

    Sylvain Cypel

    LesEtats-Unis se sontfinalement fait justiceUncommandohliporta tuOussamaBenLaden,dimanche,dansuncomplexersidentiel auPakistan

    OussamaBenLadenat tu dune balledansla ttelorsdela fusillade,alorsquilessayaitdersister lassaut

    ImpossiblesanslaideduPakistan

    LEXCUTION dOussama BenLaden, dimanche 1er mai, lve levoile sur le vrai visage de la rela-tion pakistano-amricaine. Hon-nis par la rue pakistanaise et par-fois dfis publiquement par lesautorits dIslamabad, les Etats-Unis taient en ralit engagsdans un proche partenariat avecle Pakistan.

    Voil deux semaines, lamiralMike Mullen, chef dtat-majorinterarmes amricain, avait,dans la presse pakistanaise, pris partie le renseignement militairepakistanais (ISI) laccusant dap-porter son soutien au rseau tali-ban Haqqani dont les liens avecles djihadistes arabes sont avrs.

    Pour leur part, les Pakistanaisavaient dnonc, dbut 2010, lesactivits de la CIA sur leur sol.Lagent Raymond Davis, tra-vaillant pour la centrale amricai-ne Lahore, accus davoir tu, finjanvier, deux civils pakistanais,avait t extrad, le 16mars, au ter-me dun bras de fer diplomatiqueet juridique qui semblait avoir fra-gilis la stratgie de Washingtondans la rgion.

    Les Pakistanais ont toujourst aux cts des Amricains, recti-fie Mariam Abou Zahab, spcialis-te reconnue sur le Pakistan, ilsdpendent deux financirement,mais ils ne peuvent lassumerouvertement vis--vis de leur opi-nion. De fait, Islamabad a laiss,ces dernires annes, sinstaller

    sur son territoire des bases secr-tes do opraient les drones de laCIA. De mme, lISI savait que desforces spciales amricaines, com-poses dAfghans opraient dansles zones tribales semi-autono-mes pakistanaises, la frontireavec lAfghanistan.

    Dans le reste du Pakistan, ycompris Islamabad, le nombredAmricains oprant pour les ser-vices avaient augment depuis lafin de lt 2010, date o le rensei-gnement concernant la possiblecache dOussama Ben Laden taitparvenu entre les mains des res-ponsables de la traque.

    La rvlation de la prsence deBen Laden dans la ville dAbbotta-bad, petite ville chic de montagneprs de laquelle se trouvent lesmeilleures coles militaires dupays naurait pu enfin se fairesans lappui de lISI. Le paradoxerside sans doute dans le fait queBen Ladenne pouvait se trouver cet endroit sans des garanties four-nies par certains lments de lesta-blishmentmilitaire et que les Am-ricains nauraient jamais pu rus-sir sans laide de lISI, assureMme Abou Zahab.

    Interrog par LeMonde, en2010, le major gnral AtharAbbas, porte-parole de larmepakistanaise, avait promis que lePakistan ferait toujours passer sonintrt avant celui des puissancestrangres. p

    Jacques Follorou

    PAK ISTAN300 km Karachi

    Abbottabad

    INDE

    AFGHANISTAN

    TURKM. OUZB. TADJ.CHINE

    P A K I S T A N

    Islamabad

    Quetta

    Zones tribales

    Dansun caf, Kaboul, lundi 2mai, des clients apprennent la nouvelle de lamort dOussamaBenLaden. MASSOUD HOSSAINI/AFP

    4 0123Mardi 3 mai 2011

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    Quinzeans de duelentre le chef dAl-Qaidaetles Etats-UnisBenLadenadclar laguerreauxAmricainsen1996.Depuis sa fuitedeToraBora le 16dcembre2001,on ignorait toutde la traque

    International

    O ussama Ben Laden incar-nait une proposition rvo-lutionnaire globale, celledun califat islamique. Mais,depuis les attentats dAl-Qaida New York et Washington le 11 sep-tembre 2001, la vie du chef djiha-diste se rsumait un duel avec unpays, les Etats-Unis dAmrique.Un duel mort.

    Le duel avait en fait commencplus tt, avec les attentats contreles ambassades amricaines auKenya et en Tanzanie le 7 aot1998. Et mme encore plus tt,avec deux messages, lpoquepassspresque inaperus,dOussa-ma Ben Laden : une dclarationdedjihad contre lesAmricainsquioccupent le pays des deux lieuxsaints (lArabie saoudite) le23 aot 1996, et une dclarationdu Front islamique mondial pourle djihad contre les juifs et les croi-ss le 23 fvrier 1998.

    Aprs avoir revendiqu les atta-ques du 11-Septembre et dclarque leffondrement des tours duWorld Trade Center new-yorkaisavaitdpass tous ses espoirs, lechef dAl-Qaida se terre et attend lariposte amricaine.

    Washington aide les moudjahi-din du Panchir renverser les tali-bans, allis et htes dAl-Qaida,alors au pouvoir en Afghanistan.Kaboul tombe le 13 novembre

    2001, et Jalalabad, la ville o rsi-dait principalement Ben Laden, le14 novembre. Le chef djihadiste etses compagnons darmes se rfu-gient dans les montagnes de ToraBora, dans le Sud-Est afghan.

    Encercl par des moudjahidin etdes soldats des forces spcialesamricaines, qui captent sesconversations sur talkie-walkie,BenLadensubitdintensesbombar-dementsariens.Ilrdigesontesta-ment le 14 dcembre. Lamour dudjihad et de la mort pour la gloire

    dAllahadominmavie, crit-il. Ilcroit que sa fin est proche. Puis, le16dcembre, il disparat.

    Sous la prsidence de GeorgeW. Bush, ladministration amri-caine na jamais tir au clair les rai-sons de cette fuite de Ben Laden deTora Bora, indiquant juste que cer-tains de ses allis afghans de lpo-que auraient jou double jeu.Aprs llection de Barack Obama la Maison Blanche, le Snat am-

    ricain sest en revanche penchsur cette disparition mystrieuse.

    Une commission dirige par lesnateur John Kerry a, au termedun remarquable travail denqu-te, rendu des conclusions cinglan-tes en novembre 2009 : La mis-sion a chou tuer ou capturerBenLaden. ()Cet checet ses nor-mes consquences ntaient pasinvitables. () Ben Laden satten-daitmourir. ()Moinsdecent sol-dats commandos amricainstaient prsents, et leurs appels lenvoi de renforts ont t rejets.() Deux jours aprs avoir rdigsontestament,BenLadenetsesgar-des du corps ont march sans ani-crochehors de ToraBora et ont dis-paruauPakistan. ()Ladcisiondenepasdployerdesforcesamricai-nespour traquerBenLadenoublo-quer sa fuitea tprisepar le secr-taire la dfenseDonald Rumsfeldet le gnral TommyFranks.

    Lchec amricain tuer ou capturer Oussama Ben Laden endcembre 2001 Tora Bora aouvert la voie une dcennie detraque et deux longues guerres,en Afghanistan et en Irak, justi-fies Washington par le combatcontre Al-Qaida. Il a aussi ouvert lavoie une progression gographi-que des filiales dAl-Qaida, de lIrakau Sahel en passant par le Ymenet la Somalie.

    De ce duel mort, le public na,durant dix ans, rien su. OussamaBen Laden se contentait de diffu-ser intervalles plus ou moinsrguliers des messages audio ouvido, rvlant quil tait en vie etappelantles jeunes musulmans dela plante poursuivre le djihad.Washington poussait des cris deguerre, mais ne parvenait jamais expliquer pourquoi la traque taitsi infructueuse. Et le Pakistan, paysdans lequel il ny a aucune raisonde croire que Ben Laden na pasvcu depuis quil sy est rfugi endcembre 2001, a toujours affirmquil tait impossible que le chefdAl-Qaida se cache sur son sol.

    Barack Obama avait annoncen arrivant au pouvoir, parallle-ment sa dcision de retirer lar-me amricaine dIrak et son dis-cours du Caire sur le dialogue avec

    lemonde musulman,quesapriori-t tait la traque de Ben Laden. Lesservices secrets et les forces spcia-les, mobiliss auparavant en Irak,ont t dirigs vers lAfghanistanet le Pakistan, avec des moyensconsidrables. La guerre amricai-ne dans les zones tribales pakis-tanaises sest intensifie, dcapi-tant peu peu ltat-major dAl-Qaida.

    Saura-t-on un jour si cest cetteguerre dObama qui a incit BenLaden peut-tre quitter les mon-tagnes des zones tribales pourse cacher Abbottabad, dans largion de la capitale pakistanaise,Islamabad, o il fut finalementrepr? Ou a-t-il vcu dix ans paisi-blement au Pakistan, protgpeut-tre par les services secretsmilitaires (ISI), ou par son aile pro-djihadiste ?

    Oussama Ben Laden a perdu leduel. Les Etats-Unis lont tu, et lavictoire de Barack Obama est de cepoint de vue clatante.

    La question est dsormais desavoir si Ben Laden va perdrelautre guerre, celle des ides et dudjihad. Il la perdue parce que sarvolution na pas eu lieu, parceque le califat nexiste pas, etque les jeunes Arabes viennent aucontraire,cesderniers mois, delan-cer des rvolutions au nom de lalibert et de la dmocratie.

    Mais il reste des combattantsdjihadistes sur la plante, prts lutter pour les ides de Ben Laden.Ils sont plus nombreux et prsentsdans davantage de pays quen2001. Cest pour linstant la seulevictoirede Ben Laden. Et cest euxdcrire la suite de lhistoire. p

    Rmy Ourdan

    La mort dOussama Ben Laden

    BenLaden aperduleduel. Laquestionestdsormaisdesavoir sil va perdrelautreguerre, celledesideset dudjihad

    BenLadendans la rgiondeJalalabaden 1989; avec sonconseillerAymanAl-Zawahiriennovembre2001; dansdes vidosdiffusesaprs sa fuitedeToraBora. AFP/REUTERS/AL-JAZIRA

    50123Mardi 3 mai 2011

  • Lespaysoccidentaux redoutent des actions terroristesde reprsaillesLesexperts soulignentque lesrvolutionsdans lespaysarabesontdstabilis leurs servicesdescurit chargsde la luttecontre le terrorisme

    International

    POUR UNE organisation repliedsormais dans les zones gri-ses, le Ymen constitue une basede choix. Cet Etat historiquementdpourvu dautorits centralesfortes est dailleurs le territoirechoisi par Al-Qaida pour y instal-ler lune de ses rares filiales,Al-Qaida pour la pninsule arabi-que (AQPA), en fvrier 2009. Deuxlments expliquent cette dci-sion. Dune part, lefficacit de larpression en Arabie saoudite, lepays dorigine dOussama BenLaden, qui a chass vers le Ymenles djihadistes saoudiens lesquelscodirigent sur place AQPA.

    Le Ymen constitue dautre partun terreau favorable qui tient

    lanciennet sur place de la tendan-ce islamiste radicale incarnenotamment par le cheikh AbdelMajid Al-Zindani. Les Ymnitesavaient t nombreux participerau djihad en Afghanistan. Ilsavaient pu compter leur retoursur les faiblesses du pouvoir incar-n par le prsident Ali AbdallahSaleh qui les instrumentalisa lorsde la brve guerre de scession duSud, en 1994, lorsque les anciensAfghans, conduits par TareqAl-Fahdli, firent le coup de feu auxcts des forces rgulires contreles anciens socialistes.

    Cest dans le port dAden, en2000, quAl-Qaida avait port uneattaque spectaculaire contre un

    navire de guerre amricain, leCole. Cest au Ymen galementquun responsable dAl-Qaida,Abou Ali Al-Harithi, avait t tupar un missile tir par un drone,prfigurant les frappes qui ontcours aujourdhui au Pakistan,principalement dans les zones tri-bales qui constituent un repairepour les djihadistes.

    Au fil des mois, le Ymen taitredevenu une source dinquitudepour les Etats-Unis. Le porteur dex-plosif de la tentative dattentatrat de Detroit, le 25dcembre2009, Omar Farouk Abdulmutal-lab, avait sjourn Sanaa. AnouarAl-Aulaqi, prdicateur amricano-ymnite que lon retrouve parmi

    les contacts de Nidal Hasan,lauteur de la fusillade de FortHood (Texas), le 5novembre 2009,est aussi au Ymen.

    Depuis, les Etats-Unis sontconfronts au dilemme que consti-tue laffaiblissement du prsidentSaleh, dans le contexte des prin-temps arabes, alors que ce der-nier a constitu jusqu prsentleur meilleur alli dans la luttecontre AQPA. Nul doute que la filia-le dAl-Qaida profiterait court ter-me du dmantlement de lappa-reil scuritaire et militaire mis surpied par le prsident ymnite sice dernier devait quitter le pouvoirsous la pression de la rue. p

    G. P

    BruxellesBureau europen

    P our une srie dexperts, lamort du leader dAl-Qaidamultiplie les risques dac-tions de reprsailles, notammentenEurope,maisplusgnralementcontre les citoyens occidentauxdans le monde. Mme si lactiondesgroupeslisidologiquementla mouvance quil dirigeait taitdepuis longtemps franchise ,cest--dire largement autonome, ilparat vident ces experts que desactivistes pourraient vouloir ven-ger la mort dun homme qui taitpour eux une icne, selon la for-mule de lESISC, un centre euro-pen spcialis dans la stratgie et

    la scurit, Bruxelles. Il a inspirdes milliers dadeptes et des dizai-nes demouvements, rappelle cet-te organisation.

    Il faut, en outre, souligner queles groupes et les individus associsAl-Qaidataientaussi lis person-nellement son leader en vertu duprincipe du baayt, qui instaurelallgeancelgardduguidespiri-tuel, poursuit lESISC.

    Certains voudront peut-tremontrer leur colre, dautres vou-dront seulement prouver que le dji-hadisme international reprsentetoujoursunemenace, souligne unexperteuropenducontre-terroris-me, sous le sceau de lanonymat.Comme dautres, il estime que lesprincipales zones de risque sont

    dsormais les pays occidentauxmais surtout leurs intrts auMoyen-Orient, en Afrique du Nord,au Sahel ou en Asie centrale. Cer-tains gouvernements jugs ren-gats, ou plus ou moins associsaux actions militaires actuelles enLibye ou en Afghanistan, pour-raient devenir dautres cibles.

    Certains pays, comme le Japon,ont dj annonc le renforcementde la protection de leurs installa-tions stratgiques, notammentmilitaires. Les mesures de scuritseront aussi renforces en Allema-gne, un des pays europens quifigure en tte de la liste des ciblespotentielles des djihadistes en rai-son notamment de son engage-ment en Afghanistan.

    Lundes attentats que lon peutredouter viserait symboliquementun pays qui a abrit, Hambourg,les concepteurs des attentats du11 septembre 2001, souligne unspcialiste du renseignement. Lamort de Ben Laden, cumule auxinterrogationssur lattentatdeMar-rakech ou aux consquences possi-blesde linterventionenLibyesur lespopulations arabes, porte le niveaudalerte au seuil maximal, prciseunexpertdesquestionsdescurit.

    TournantsDivers analystes soulignent que

    les rvolutions survenues en Egyp-te, en Tunisie et au Ymen ont ds-tabilis des structures scuritairesetantiterroristessurlesquellessap-

    puyaient les Occidentaux. On napasencoremesurprcisment lef-fet de ces changements qui pour-raient entraner une diversificationdes menaces, souligne un mem-bre du Service diplomatique dac-tion extrieure.

    Nous allons aborder dautrestournants importants, souli-gne-t-il. Et notamment des lec-tions aux rsultats incertains. Lespremires dentre elles, en Tunisie,pourraient tre marques par unevictoire des Frres musulmans oude leurs affilis avec, l encore, desconsquencesdifficilementprvisi-bles.

    La diplomatie europenne esthsitantefaceauxsuitesdesrvolu-tionsarabesetintgre dsormaisce

    paramtre dans ses valuations durisque terroriste. On peut croire unscnariodmocratique, la tur-queavec des partis islamistes mo-drs comme lAKP; on peut prdi-re des volutions moins rassuran-tes, diagnostique ce diplomate.

    Les capitales europennes scru-tent aussi le rapprochement entreles deux composantes du mouve-ment palestinien. Si la Palestineretrouve un leadership et si Isralprend enfin ses responsabilits, unabcs de fixation sera crev et lamouvance djihadiste aura perdu,en lespace de quelques jours, deuxde sesprincipales rfrences et, cela,cest positif , souligne un autrediplomate. p

    Jean-Pierre Stroobants

    Entretien

    J ean-Pierre Filiu est spcialistedu djihadisme. Il est gale-ment historien, professeurassoci lInstitut dtudes politi-ques de Paris.Dans votre livre, Les neuf viesdAl-Qaida [Fayard, 2009],vous dressiez un constatdchec de lorganisation terro-riste. Que peut-il rester dAl-Qai-da aprs lamort dOussamaBenLadenqui en tait la fois le fon-dateur et son icne?

    Oussama Ben Laden vient detrouver la mort au cours duneopration de commandos amri-cains sur ce mme territoirepakistanais o il avait, enaot 1988, fond Al-Qaida, littra-lement la Base , la premire, eton peut lesprer, la dernire orga-nisation terroriste vocation pla-ntaire.

    Ladhsion Al-Qaida sop-rait sur la base dune allgeancepersonnelle et absolue BenLaden. Aucun mcanisme de suc-cession ntait prvu et lqua-tion personnelle du fondateur delorganisation, en termes de pres-tige mdiatique et de charismemilitant, est unique. Son adjointAyman Al-Zawahiri, de nationali-t gyptienne, na pas la capacitde simposer sur un mode compa-rable.Selon vous, Al-Qaida na doncpas t prpare grer unaprs-Ben Laden. Quels dfisva-t-elle devoir affronter dsor-mais?

    Cette disparition va trs viteencourager les tendances centri-fuges au sein dAl-Qaida, entre un centre de plus en plus pakista-nis et donc tranger aux ralitsarabes, une branche irakiennedsormais identifie au sunnis-me le plus agressif et une Al-Qai-da pour la pninsule Arabique,trs marque par sa dimension

    ymnite et son ambition saou-dienne, qui refusera sans aucundoute de saligner sur un diri-geant gyptien.

    Que signifie cette disparitionpour lautre filiale, Al-Qaidapour leMaghreb islamique(AQMI)?

    Au sein dAQMI, la mort de BenLaden va accentuer les tensionsentre lmir et commandantde lorganisation, AbdelmalekDroukdal, qui avait prt person-

    nellement allgeance BenLaden, et un de ses subordonnspour le Sahara, Abdelhamid AbouZeid, qui dtient toujours cinq ota-ges occidentaux (dont quatre ota-ges franais enlevs Arlit) etaurait des relations directes avecAl-Zawahiri.Lamort dOussamaBen Ladenvalide-t-elle la stratgie amri-caine contre Al-Qaida?

    Sous rserve des prcisions quine vont pas manquer dtre four-nies sur cette opration dans lesprochaines heures, un paralllesimpose avec la mort de [AbouMoussab] Al-Zarkaoui [chef dAl-Qaida pour lIrak] dans un bom-bardement amricain, enjuin 2006. La campagne menepar les drones de la CIA contre les

    refuges jihadistes dans les zonestribales du Pakistan a fini parpayer, contraignant Ben Laden fuir vers la banlieue dIslamabad,o il tait devenu aussi vulnra-ble que Al-Zarkaoui, cinq ans plustt, hors de la province dAnbar.

    Cest un triomphe pour BarackObama, qui a, comme toujours, lavictoire modeste. Sa stratgie delutte cible contre Al-Qaida porteses fruits, en rupture avec la dsas-treuse guerre globale contre laterreur de son prdcesseur,George Bush.

    LAmrique peut enfin, aubout de prs de dix ans de travail,de deuil inachev, tourner la pagedu 11-Septembre.p

    Propos recueillis parGilles Paris

    La mort dOussama Ben Laden

    E n adoptant, en janvier 2007,lappellation d Al-Qaida auMaghreb islamique (AQMI),les islamistes algriens du Groupesalafiste pour la prdication et lecombat (GSPC) ont rig le Sahel ennouvelle terre dlection, attirantde nouveaux djihadistes, notam-ment mauritaniens et maliens.Alors que les liens dAQMI avec la maison mre pakistanaise ontlongtemps t sujets caution, sonchef suprme, lAlgrien Abdelma-lek Droukdal, a obtenu sa conscra-tion le 27octobre 2010, lorsquOus-samaBenLaden enpersonneacou-vert lenlvement de sept Franaissalaris des socits Areva etSatom, enlevs le 16 septembre Arlit (Niger) par la filiale nord-afri-caine de lorganisation.

    Vous tes tus comme voustuezetenlevs commevous enlevez(), dclarait alorsBenLaden dansun message audio adress au peu-ple franais. Le chef dAl-Qai-da accusait la France dopprimernotre communaut musulma-ne, critiquant la loi interdisant leport du voile intgral vote Paris,et demandait le retrait des troupesfranaises dAfghanistan.

    Le parrainage par Oussama BenLaden des enlvements pratiqusau Sahel a t encore renforc le19 novembre, lorsquAbdelmalekDroukdal a renvoy la France surle chef suprme pour toute discus-sion relative aux otages. Touteformedengociation sur ce sujet lavenir sera conduite avec person-nedautrequenotreCheikhOussa-mabenLaden ()etselonsescondi-tions, dclarait alors l mir dAQMI.

    En devenant AQMI en 2007, leGSPC algrien, lui-mme fond en1998, la fin de la dcennie san-glante algrienne, a adopt lesmthodes dAl-Qaida, privilgiantdsormais les attentats-suicides etles enlvements dOccidentaux.Quelques mois plus tard, un grou-pe de touristes autrichiens sontenlevs dans le sud de la Tunisie ettransfrsauMali.Finalementlib-rs, tout comme les responsablesde lONU kidnapps au Niger endcembre2008, ils auront plus dechancequEdwinDyer,unotagebri-tanniquedontAQMIannonalex-cution la premire le 31 mai2009.

    Dsormais, la zone sahlienneva vivre au rythme des attentats(en Mauritanie notamment) et desrapts, au point dtre progressive-ment vide de ses touristes et devoir la scurit des interventionshumanitaires et des activits co-nomiquescompromise. Des libra-tions sont obtenues comme celledu Franais Pierre Camatte, enlev

    au Mali en novembre 2009 par-foismoyennantlalibrationdepri-sonniers islamistes et le paiementde ranons, non reconnu par lesEtats occidentaux qui les acquit-tent, mais dont le montant levpermet AQMI dacheter armes etmatriels et de recruter.

    Avec la mort de lhumanitairefranais Michel Germaneau,annonce par l mir Droukdalle 25 juillet 2010, laffrontementavec la France se prcise puisquedes troupes franaises et maurita-niennes lancent vainement uneopration anti-AQMI destine lelibrer.

    Laprsenceconomiquefranai-se est directement cible, avec len-lvement des sept Franais tra-vaillant pour les mines duraniumnigrienne exploits par Areva.

    Des sept otages franais enlevsle 16 septembre, quatre PierreLegrand, Daniel Larribe, ThierryDol et Marc Feret , sont encore

    dtenus par AQMI, probablementspars et au Mali, depuis la libra-tion de trois dentre eux le26 fvrier. Entre-temps, deux jeu-nes Franais, Vincent Delory etAntoine de Locour, enlevs Nia-mey (Niger), ont t retrouvsmorts le 8 janvier, aprs un assautmen au Mali contre AQMI par lesforces spciales franaises.

    Lirruption des rvoltes arabes asemblprendredecourtlesislamis-tes dAQMI, dont lactivit se faitdiscrte, jusqu lattentat perptrjeudi 28avril contre le caf Arganade Marrakech. Si cet acte qui a tuseizepersonnesntaitpasrevendi-qu, lundi 2 mai au matin, AQMIest souponn den tre lorigine.Dansunevidoattribuelorgani-sation mise en ligne trois joursavant lattentat, AQMI menaait leMaroc. Ce document date de 2007,selon plusieurs spcialistes, maissa diffusion la veille du carnagede Marrakech peut difficilementtre attribue au hasard.

    Relgue au second plan par leprintemps arabe, la menace dA-QMI rapparat cependant tra-vers le soupon selon lequel desstocks darmes prlevs en Libyedans les zones tenues par la rbel-lion seraient tombs entre sesmains. p

    Philippe Bernard

    AuMaghreb,Ben LadenavaitadoubAQMIAttentatsetenlvements:enAfriqueduNord, lesislamistesontadopt lesmthodesde leurparrain

    LeYmen,terre idale de replipour les djihadistes

    Cestun triomphepourBarack Obama,quiacomme toujourslavictoire modeste

    Cette mort va encourager les tendancescentrifuges ausein dAl-QaidaSelon lespcialistedudjihadismeJean-PierreFiliu,professeurSciencesPo, lorganisationterroristeaura leplusgrandmalse remettrede ladisparitiondesonfondateur

    Avecla mort delhumanitairefranaisMichelGermaneau,annoncele 25juillet2010, laffrontementavecParis seprcise

    Descombattants dAl-Qaida auMaghreb islamique, entre leMali et laMauritanie,aprs lenlvement du personnel dAreva en septembre2010. DR

    6 0123Mardi 3 mai 2011

  • OussamaBenLadenen 1998. AP

    Portrait

    A priori, rien ne prdisposaitOussama Ben MohammedBen Awad Ben Laden deve-nir le criminel le plus recherch dela plante, celui qui allait humilierlAmrique, faire exploser lemythe de son invulnrabilit, bou-leverser lquilibre du monde etdclencher deux guerres.

    N le 10 mars 1957 dans le quar-tier le plus chic de Riyad (capitaledu royaume dArabie saoudite),hritier avec ses 53 demi-frres etdemi-surs dune des plus gros-ses fortunes du monde, il auraitpu,comme son pre polygame lavaitfait un demi-sicle plus tt en mi-grant, misrable et illettr, de sonYmen natal sur la terre des deuxSaintes Mosques (Mdine etLa Mecque), consacrer sa vie tra-vailler. A consolider, voire tendrelempire familial. A dfaut, il auraitpu, comme dautres Ben Laden lefont toujours, vivre de ses rentes,entre limousines, jets privs, palaiset jolies filles, car il fut dtenteurdun hritage valu par la famille environ 30 millions de dollars(20,3millions deuros).

    Maistel ntait pas son destin.Lecheikh , comme lappelaient sesthurifraires, a t tu, aprs plusde dix ans de traque, par les forcesspciales amricaines dans la villepakistanaise dAbbottabad (80 km au nord dIslamabad), o ilse terrait. Tous les tmoignages deses comparses capturs laffir-maient : Cheikh Oussama avaitdonn lordre ses gardes du corpsde labattre sil tait sur le pointdtre captur. Il lavait dit lui-mme dans lune de ses nombreu-ses adresses au monde : il taitprt mourir, convaincu que sacause seperptueraaprs lui.

    Dans lune des meilleures par-mi les milliers de biographies quilui ont t consacres Oussama,la fabricationdunterroriste (AlbinMichel, 2004) , Jonathan Randal,journaliste et vtran amricaindu Moyen Orient, prsente unhomme presque ordinaire, certespuritain et intolrant, mais par-faitementhonntedanssesconvic-tions, et logique dans sa dmarchepolitique.

    Ds sa jeunesse Riyad, le jeuneBen Laden joue au foot avec sescopains mais refuse la danse, lamusique, haram (interdit par lareligion) selon lui. Il passe beau-coup plus de temps que les autres la mosque. Lenvironnementpuritain du wahhabisme ambiant,une version ultra du sunnismeen vigueur en Arabie, puis sa ren-contre avec des professeurs de col-lge appartenant aux Frresmusulmans, une confrrie inter-nationale islamique quil rejetteraplus tard parce que trop molle,ont sur lui un impact plus fort quesur dautres. Il est austre, ascti-que. Plus tard, il interdira mme ses diffrentes pouses de repas-ser ses thobes, la large tuniqueblanche saoudienne.

    Quand le royaume dcide, en1979, daider la CIA amricainepour aider les Afghans, alors occu-ps par larme rouge dURSS, selibrer du joug mcrant, cest ce jeune homme bien n, prsumhonnte puisque richissime maisnappartenant pas la famille sou-veraine, quil demande de faire laliaison. A la frontire pakistano-afghane, Oussama Ben Laden cen-tralise les financements saoudienspour la rsistance et soccupe desjeunes guerriers arabes, saoudiensmais aussi jordaniens, gyptiens,palestiniens et tant dautres, qui se

    portentausecoursdesmoudjahidi-nes en lutte.

    A Peshawar (Pakistan), le jeuneSaoudien fait la rencontre, dter-minante pour la suite de sa vie,dun prcheur intellectuel palesti-nien, membre des Frres musul-mans: Abdallah Azzam. Ce dernierorganise, lui aussi, un soutien lacause afghane. Les deux hommesselient au point quOussama BenLaden donnera le prnom de sonami son premier fils et fusion-nent leur action dans le Bureaudes services cr par le prcheur.Toutefois, quand le Saoudien cresa propre base ( Al-Qaida , enarabe) la fin 1988, AbdallahAzzam ne le rejoint pas. LeBureaudisparatra aprsle mys-trieux assassinat de son crateuren 1989, Peshawar.

    Mais ds 1986, Oussama BenLaden est clbr partout. En Ara-biesaoudite,chaquefoisquilyren-tre pour faire le tour des donateursavant de repartir, le cheikh , quiaime bien faire le coup de feucontreles Russes, est adul. La pres-se locale adore ce grand typed1,90m, excellent cavalier et ptridereligion,dontlattitudemodes-te tranche tant avec larrogancedes princes et des hritiers ftardsdu pays. Les mdias lui consacrentde grands articles laudateurs. Il faitdes confrences, il est reu par lesmonarques, il est le hros natio-

    nal qui sexprime toujours avecdouceuretparle unbelarabeclassi-que qui impressionnera si long-tempsceuxquiapprcientlesryth-mes potiques du Coran.

    Fin 1989, les Russes ont quittlAfghanistan, Oussama Ben Ladenrentrechezlui,triomphant.Enqu-te dune nouvelle cause, il sintres-se au Ymen, la terre de ses anc-tres, finance des tribus locales quise battent pour la runification deleur pays et, ce faisant, il se heurtedj la famille rgnante qui, elle,soutient en sous-main la partitiondu voisin. Bientt, il sen prend Saddam Hussein, le dictateur ira-kien, le mcrant, lapostat, quivientdelivrer,aveclesoutienfinan-cier saoudien, une longue guerredehuit ans lIrankhomeyniste. Le2 aot 1990, quand Saddam Hus-sein envahit le Kowet et menacelArabie saoudite, Oussama BenLaden se sent pousser des ailes. Ilest reu par le prince Sultan, minis-tre de la dfense du royaume, quiilproposederecruter100000com-battantsislamiquessouslabanni-re dAl-Qaida, pour dfendre lepays et dfaire laventurier irakien.

    A son grand dam, le rgime pr-frera accepter loffre amricaineddifier des bases militaires danslepaysmme.Laruptureentrelh-ritier et la monarchie est presqueconsomme. Oussama le Croyantne peut se rsoudre accepter une

    prsence si massive dinfidles sur la terre sacre des deux SaintesMosques . Il multiplie les criti-ques contre le rgime, se retrouveprivdepasseport,soussurveillan-ce constante.

    Plus tard, le prince Turki,ancien chef des renseignementssaoudiens qui la bien connu, dira Jonathan Randal comment il aperu le changement radicaldOussama Ben Laden. Lepapillon pris de bonnes actions semtamorphosaitenrvolutionnai-re froce, prt sacrifier des viespoursacause. ()Lindividucalme,paisible,aimable, faisaitplaceunhomme qui se croyait capable derassembler et de commander unearme. Il ne cachait plus sa mor-gue, son arrogance.

    Vers le milieu de lanne 1991, ilest autoris repartir en Afghanis-tan o il veut rconcilier les fac-tions afghanes de la rsistance quise livrent dsormais une vritableguerre civile. Echec sur toute la

    ligne, ce sont les talibans, cinq ansplus tard, qui parviendront met-tre presque tout le monde dac-cord coups de canon. OussamaBen Laden, entre-temps, est partipour le Soudan o une junte isla-miste, conforme ses vues, a prisle pouvoir. L-bas, il investit,construit des routes, des usines, delimmobilier.

    Mais il na renonc en rien sesrves de rtablissement du dfunt califat islamique sur la totalitde loumma, la communaut mon-diale des croyants. Il attaque lamonarchie saoudienne devenue ses yeux esclave des mcrantsamricains.Le5mars1994, discr-tement,Riyadledchoitdesanatio-nalit pour dsobissance au roiet comportement irresponsable. Ilne remettra plus jamais les piedsdans son pays natal. Son combatcontre lAmrique est plus discretmais il se poursuit.

    Enjuin1995,HosniMoubarak, leras gyptien, alli privilgi deWashington et grand pourfendeurdislamistes, chappe de trs peu un attentat au Soudan. OussamaBen Laden a financ la tentative.

    Onze mois plus tard, lAmriqueobtient de Khartoum quelle lex-pulse. Une grave erreur qui se rv-lera lourde de consquences. Lerebelle repart en Afghanistan oles talibans viennent de prendre lepouvoir. La suite est connue. En

    1998, il rencontre l-bas un autrehomme en fuite, le mdecin gyp-tien Ayman Al-Zawahiri, qui diri-geaitdanssonpaysleDjihadislami-que, organisation islamiste extr-mement violente.

    La mme anne, Al-Qaida, qui aavalle Djihad et dautres groupus-cules extrmistes, organise la dou-ble attaque des ambassades amri-caines de Tanzanie et du Kenya. Enaot, Bill Clinton, alors prsidentdes Etats-Unis, ordonne un bom-bardement des bases dentrane-mentdelorganisationenAfghanis-tan. Sans succs. Peu aprs, est cr,avec Al-Zawahiri et dautres, leFront islamique contre les juifs etles croiss.

    En octobre 2000, avec une poi-gne de kamikazes recruts, unhors-bord bourr dexplosifs et unbudget ridicule, Oussama BenLaden manque de couler un des-troyer amricain dun milliard dedollars qui a fait escale Aden, auYmen. Il y a 19 marins tus et250 millions de dollars de dgts.Tout est bientt prt pour la miseen uvre du coup du sicle . Le11 septembre 2001, Oussama BenLaden fait voler en clats le mythede linvulnrabilit de la super-puissance du monde.

    La suite sera une longue traqueconduite par les Etats-Unis aprs lerenversement du rgime de tali-bans Kaboul. Le chef dAl-Qaida,qui a chapp aux forces spcialesamricaines Tora Bora, en Afgha-nistan, semble insaisissable. Lesannes passent, rythmes par lesmessages quil distille depuis sescaches et dans lesquels il menaceinvariablement les Etats-Unis, ins-trumentalise le conflit isralo-palestinienetrcupresonprofit, partir de 2003, linvasion de lIrakpar Washington, qui lui apporteraun apprciable rpit.

    Bagdad sembrase mais cestprincipalement le sang des musul-mans que les djihadistes font cou-ler. Plus tard, lorsque le sol irakiense drobera sous les pas de ses fid-les, il adoubera Al-Qaida pour leMaghrebislamique(AQMI),enAfri-que du Nord, puis Al-Qaida pour lapninsule Arabique (AQPA), auYmen, pour que la Base conser-ve son rang de fer de lance dun ter-rorisme globalis mais cependanten perte de vitesse. Les diatribes deCheikh Oussama perdront au fildes annes en puissance. JusqulannonceparleprsidentdesEtats-Unis, Barack Obama, de sa mort.

    Jamais, depuis Saladin, vain-queur des croiss, un musulmannavait affront le monde occiden-tal dans son ensemble. Maisjamais non plus, un musulmannavaitautant divis loumma isla-mique.p

    Patrice Claude

    Unparcours atypique

    1957Naissance Riyad, enAra-bie saoudite, dOussamaBenLaden, fils dun gant duBTPori-ginaire duYmen.

    1980Aprs lintervention soviti-que enAfghanistan, Ben Ladenmultiplie les sjours la frontirepakistano-afghanepour apporterson aide auxmoudjahidin.

    1991 Lacceptationpar Riyad delaide amricaine aprs linvasionduKowet par lIrak entrane la fui-te deBen Laden auSoudan.

    1998Attentats contre les ambas-sades amricaines auKenya et enTanzanie.

    2001Attentats du 11-SeptembreNewYork et Washington. BenLaden chappe aux forces spcia-les amricaines enAfghanistan.

    2011Mort deBen Ladendans las-saut donn par les forces spcia-les amricaines Abbottabad, auPakistan.

    InternationalLa mort dOussama Ben Laden

    Lepapillon prisdebonnesactionssemtamorphosaitenrvolutionnairefroce

    JonathanRandaljournaliste et crivain

    Le11septembre2001,BenLaden faitvolerenclats lemythedelinvulnrabilit delasuperpuissancedumonde

    Latrajectoire de licne du djihadisme mondialisCestauPakistanque leSaoudienOussamaBenLadenforgesesconvictionscontre lOccident. Il ycre lorganisationAl-Qaida,laBaseenarabe

    70123Mardi 3 mai 2011

  • L a France, nommment dsi-gne plusieurs reprises,depuis 2010, par OussamaBen Laden, comme tant une ciblepour Al-Qaida, a salu, lundi 2mai,la mort du chef de lorganisationterroriste comme un vnementmajeur de la luttemondiale contrele terrorisme, selon un communi-qu de lElyse.

    Justice est faite pour les victi-mes du 11-Septembre 2001 etdautres attaques qui ont fait desmilliers de victimes dans le mondeentier, a ajout lElyse. Le flauduterrorismesubitunchechistori-que,maiscenestpaslafindAl-Qai-da, met cependant en garde cecommuniqu. Le combat contrelescriminelsqui sen rclamentdoitsepoursuivre sans relche.

    Leministre des affaires trang-res, Alain Jupp, avait auparavantdcrit la disparition dOussamaBen Laden comme une victoirede toutes les dmocraties maisqui ne faisait pas disparatre pourautant la menace dattentats.Nous serons plus vigilants quejamais.Lamenaceterroristeestle-ve,onlavu,hlas,encoreMarra-kech, il y a quelques jours, a-t-ilcomment,en mentionnant latta-que lexplosif ayant fait 16 morts,dont8Franais, dansuncafdecet-te ville marocaine le 28 avril.

    TerroristesLe ministre franais de la dfen-

    se, Grard Longuet, a estim que lamort dOussama Ben Laden pour-rait jouer positivement sur lesort des deux journalistes fran-ais, Herv Ghesquire et Stpha-ne Taponier, retenus en Afghanis-tan depuis plus dun an, mais sansfournir de dtails sur le lien entreces deux dossiers.

    Lassassinat du chef dAl-Qaidaintervient alors que les services derenseignements et les militairesfranais sont engags depuis 2010dans une intensification de la lut-te, au Sahel, contre des groupesagissant sous la bannire dAl-Qai-da au Maghreb islamique (AQMI),une nbuleuse qui a fait allgean-ce Oussama Ben Laden en 2007.Signedudurcissement desastrat-gie face ces groupes, la France

    avait lanc en juillet 2010 une op-ration arme sur le territoire duMali, aux cts des forces maurita-niennes, pour tenter de sauverlotage Michel Germaneau, dont lamort a t annonce quelquesjours plus tard par AQMI.

    Quatre otages franais sontaujourdhui toujours dtenus auSahel par AQMI. Lannonce de lamort dOussama Ben Laden inter-vient quelques jours aprs la diffu-sion, le 27 avril, dune vido mon-trant ces quatre otages, enlevs le16 septembre 2010 Arlit, sur unsite dextraction au nord du Niger,relevant dAreva. Ces quatre hom-mes, Daniel Larribe, PierreLegrand, Thierry Dol et Marc Feret,apparaissaient lcran entoursdhommes en armes, et sup-pliaientNicolas Sarkozyderpon-dre favorablement la demandedAl-Qaida de retirer les troupesfranaises dAfghanistan . Le24 fvrier, trois autres otages (uneFranaise,un Togolais et un Malga-che) enlevs galement Arlit,avaient t relchs.

    Nicolas Sarkozy a souvent mislaccent sur la lutte antiterroriste,depuis son lection en 2007, consi-drant,commeil laritrle10jan-vier, lors dune dclaration dans lebureau ovalede la Maison Blanche,au ct de Barack Obama, que, face Al-Qaida, la faiblesse serait pro-fondment coupable, et nousnavons pas dautres choix que decombattre ces terroristes partouto ils se trouvent. Deux jours plustt, deux Franais, Antoine de Lo-cour et Vincent Delory, enlevs Niamey, la capitale du Niger,avaient trouv la mort lissuedune opration arme franco-nigrienne visant les faire librer.

    Le 21janvier, dansun enregistre-ment audio diffus par la chaneAl-Jazira, Oussama Ben Ladenmenaait la France dun cot trslourd si elle ne retirait pas sestroupes dAfghanistan. Il sagissaitdu deuxime message de ce typedepuis un prcdent enregistre-ment datant doctobre 2010, o lechef dAl-Qaida reprochait enoutre la France dempcher desfemmesde porter le voile. p

    Natalie Nougayrde

    Dansle monde, lespoir duncoupdcisif contreAl-Qaida

    La mort dOussama Ben Laden

    Rcit

    R amzi Ben Al-Shibh est arriv Karachi le matin mme du11 septembre 2001, en prove-nancedeHambourg aprsune lon-gue escale Madrid et Duba. A sadescente davion, le jeune Ymni-te est accueilli par Khaled CheikhMohammed quilembarque aussi-tt en voiture pour un lieu sr,dans la maison dAbd Al-RahimGhulam Rabbani, une vieilleconnaissance. Ammar Al-Baluchiet Mustafa Ahmad Al-Hawsawisont dj sur place. Ils attendent.

    Oussama Ben Laden, leur chef,ne viendra pas, mais son ombreplane sur leurs ttes. Cest lui quiles a prvenus voil dix jours delimminence de lattaque.

    Soudain, les quatre hommes,installs devant un poste de tlvi-sion, laissent clater leur joie. Lesimages des tours du Wall TradeCenter frappes par un, puis deuxavions de ligne viennent de creverlcran.Le rve et le travail de tou-te ma vie, dira plus tard CheikhMohammed.

    Le dtail de ce rcit, qui prend sasource au cur mme de ce grou-pe appartenant au noyau dur dAl-Qaida,provientdes rapports dva-luationsecretsrdigspar lesinter-rogateurs de Guantanamo et rv-ls par WikiLeaks. Ils mettent enscnesous la forme dune vastetoi-le daraigne les plus hauts diri-geants du rseau de Ben Laden,dont Khaled Cheikh Mohammed,le cerveau prsum des atten-tats de septembre et leur coordi-nateur, Ramzi Ben Al-Shibh, tousdeux dtenus pendant des annespar la CIA avant dtre transfrs,en 2006, dans le centre de dten-tion amricain sur lle cubaine.

    Prises dans leur ensemble, cesfiches individuelles, souvent trsdtailles, contradictoires aussi etmanquant parfois singulirementde crdibilit, renvoient limagedune organisation terroristedune tonnante vitalit. Commesi ce 11-Septembre navait t quele prlude dune longue srie dat-taques visant affaiblir les Etats-Unis et leurs Allis.

    Dans le mmo de dcem-bre2006,consacrKhaledCheikhMohammed ( KSM , daprs sesinitiales en anglais), il est fait tatdune liste de projets, le plus sou-ventdirectementdiscutsavecBenLaden et dont le dtenu aurait t lorigine, sinon partie prenante.

    Le plus impressionnant dentreeux est certainement lattaquecontre laroport londonien deHeathrow sur le modle du 11-Sep-tembre. Lide aurait germ dansles tout premiers jours qui ont sui-vi leffondrement des tours new-yorkaises, KSM tant devenu,

    selon les documents, littralementobsd par ce mode opratoire.

    Nomm en dcembre 2001, lorsde sa fuite dAfghanistan, chefdesoprationsextrieuresdAl-Qai-da par Ben Laden, il aurait labo-r un scnario prcis et dj bienavanc dbut juin 2002. Le plan,daprs les interrogatoires, consis-tait dtourner un avion aumoment de son dcollage avant dele faire scraser sur laroport enfaisant demi-tour.

    Deux quipes auraient tcres pour lopration. Lunebase en Grande-Bretagne avecpour mission de prendre des coursdepilotagedansunecoledaviati-oncommercialeauKenya. LautreinstalleenArabiesaouditeetchar-gedidentifierdescandidatsmar-tyrsprts participer lattaque.

    Lopration aurait t ardem-ment discute au sein dAl-Qaida,selonlesproposrapportspardiff-rents dtenus tel Walid Moham-mad Ben-Attash, vtran du djihadet lui aussi proche lieutenant deBen Laden. Daprs la fiche de BenAl-Shibh, KSM lui aurait mmedemandson avis sur le projet, pr-cisant que trouver deux ou troispiratesde lair ne serapasdifficile.

    En dcembre 2001, Ben Al-Shi-bh, en planque Kandahar, auraiteu une longue discussion au sujetdes futures oprations contrelOuestavec KSM et Abd Al-RahimAl-Nashiri. Ce dernier, un Saoudiende 46 ans dtenu depuis 2006 Guantanamo, aurait alors t char-g des attaques contre les installa-tionsamricainesenArabiesaoudi-te,dansdebrefs dlais.

    Inculp il y a quinze jours pouravoir particip lattentat contrelUSS Cole au large du Ymen en2000, Al-Nashiri est dcrit dans safiche comme tant lun des mem-bres oprationnels dAl-Qaida les

    plus intelligents et les plus dange-reux faits prisonniers ce jour.

    Selon les documents, Al-Nashiritait tellement contentde lattaquecontre le Cole quil envisagea desen prendre aux sous-marins danslAtlantiqueNord.Ilauraitaussidis-cut, avec dautres membres du

    rseau, de la possibilit dattentatssurlesolamricainavecdesvoitu-resoudescamionspartirdesquelsseraient lances des bombes contrede grands buildings dans le style delattaque du 11-Septembre . Ilauraitgalementretenulhypoth-se de bombes chimiques, parce quefaciles fabriquer.

    Bris par 183 sances de water-boarding (simulacre de noyade) etdiffrentes techniques dinterroga-toire mises en place par les quipesdu gouvernement Bush, KSMaurait, plusieurs reprises, ditavoir envisag des plans, la fin2001, pourdtruire laplusgrandetour de Californie trs certaine-mentla Library Tower (aujourdhuila tour US Bank) de Los Angeles en utilisant au moins deux shoebombs [explosif dissimuls dansses chaussures] pour accder dansle cockpit de lavion.

    Dans un style parfois proche duroman daction pour adolescents,onapprendsouslaplumedesinter-rogateurs quune attaque contreun navire militaire dans le port deDuba avait galement t envisa-ge en dtournant un avion bourrdexplosifs pralablement achemi-ns par la route depuis le Ymen,camoufls sous un lit de poissons.

    Peu avant son arrestation enmars 2003, KSM prvoyait, tou-jours selon les documents, de frap-per les quartiers gnraux de la CIAet du FBI ainsi que des centralesnuclaires amricaines. Il projetaitaussi de hacker des ordinateursde banques amricaines et dedtourner des avions cargos.

    Il voqua encore une srie dex-plosionsaugazquilsouhaitaitpro-voquer Chicago en mettant lefeuunhtelouunestationdessen-ce. A New York, il aurait envisagde dtruire le pont de Brooklynensectionnant les cbles de suspen-sion. Et mme voqu lassembla-gede minibombesactionnes dis-tance et dissimules dans des car-touches de jeu de la marque Sega.

    Ailleurs dans le monde, KSMaurait propos Ben Laden, lt2001, de cibler la Thalande, Singa-pour, lIndonsie et les Maldives.Lecanal de Panama aurait eu droit, luiaussi, son projet dattentat. KSMchargeant Adnan Gulshair elShukrijumah (appel aussi JafarAl-Tayar), membre prsum dAl-Qaida de nationalit amricaine etaujourdhui en fuite, de surveillerle canal afin dy prparer dven-tuelles explosions partir dunbateauoudeux.

    En aot, toujours en pleine pr-paration des attentats du 11-Sep-tembre, KSM eut un entretien avecle chef militaire dAl-Qaida,MohammedAtef,au sujetdestech-niques chimiques utilises pour lafabrication de lAnthrax. Connu

    pour tre un proche de Ben Laden,le responsable dcdera trois moisplus tard lors dun bombardementamricain au sud de Kaboul.

    La fiche du Cheikh voque aussilaffaire Daniel Pearl, le journalistedu Wall Street Journal kidnapp etassassin au Pakistan en jan-vier 2002. Le reporter aurait tlivr KSM qui dirigeait alors uncommando dans la rgion deKarachi. Daprs les documents, unancienresponsablemilitairedelor-ganisation terroriste, Saf Al-Adl,

    aurait dit Cheikh Mohammedque llimination du journalistetait peut-tre une mauvaise ide.Un avis rejet par KSM qui auraitdemand conseil auprs dun autreleader dAl-Qaida, identifi commetant Sharif Al-Masri. Les deuxhommes auraient alors t entotal dsaccord avec Adl. Ensuite,Pearl a t emmen dans la mai-son de SaudMemon, chef financierdAl-QaidaauPakistan, et tu.

    KSMauraitgalementtaucen-tre dun vaste rseau de finance-ment. Il aurait organis des cour-siersafindalimenterles cellulesdurseau en billets verts. En Indon-sie, il aurait fait notamment livrerplus de 300 000 dollars (202 000euros)augroupeJemaahIslamiyahlocal pour lorganisation des atten-tats de Bali en 2002, contre lhtelMarriott en 2003 et lambassadeaustralienne en 2004 Jakarta.

    Dbut2002,ilauraitdonnSai-fullah Paracha, homme daffaireset ancien agent de voyage de NewYork, entre 500 000 et 600 000dollars, placer en lieu sr. Sixmois plus tard, selon les docu-ments, KSM a demand ce mmeParacha derechercherdes compa-gnies offshore afin dy placer lar-gentdAl-Qaida. Arrt Bangkoken 2003 et condamn trente ansde prison aux Etats-Unis en 2005,lhomme aurait propos au rseauson exprience dans le commercemaritimeafindacheminerdespro-duits explosifs sur le sol amricain.Ilvoulaitaiderfairequelquecho-se de grand contre les Etats-Unis,dira, selon sa fiche, AmmarAl-Baluchi, membre du noyau durprsent Karachi, devant la tlvi-sion, ce 11septembre 2001.p

    Nicolas Bourcier

    LA MORT de Ben Laden susciteungrand soulagement, a dcla-r David Cameron, le premierministre britannique, dont lepays avait t cibl en juillet 2005par plusieurs attaques la bombe,faisant 56 morts Londres, reven-diques par Al-Qaida. Cest ungrand succs quil ne puisse plustre enmesure de poursuivre sacampagnemondiale de terreur,a comment M. Cameron.

    Le premier ministre isralienBenjamin Ntanyahou a voqupour sa part un triomphe reten-tissant pour la justice, la libert etles valeurs partages par tous lespays dmocratiques qui luttentcte cte dans leur dtermina-tion contre le terrorisme.

    LAutorit palestinienne a ragien soulignant quele fait dtredbarrassdeBenLaden estunebonne chosepour lapaixdans lemonde,mais ce qui compte, cest devaincre les discours et lesmthodesviolentes, promusparBenLaden etdautres travers lemonde.

    En Inde, le ministre des affai-res trangres a parl dune ta-pevictorieuse, appelantlemon-denepas relcher soneffortconcertpour vaincre le terroris-

    me.Le ministre indien de lint-rieur a, de son ct, comment quele fait que Ben Laden ait t retrou-v non loin dIslamabad venaitconforter linquitude selonlaquelle le Pakistan offreunsanc-tuaire aux terroristes. En novem-bre2008, Bombay avait t le th-tre dune srie dattaques terroris-tes coordonnes, faisant 173 morts.New Dehli avait dsign le Pakis-tan comme pays abritant lesauteurs de ces attentats.

    En Afghanistan, le prsidentHamid Karza, qui tente depuisdes mois de nouer un dialoqueavec des lments de linsurrec-tion talibane en vue de pacifierson pays, a salu unenouvelleimportante. Les talibans doi-vent en tirer les leons, et sabste-nir de combattre, a-t-il dit.

    Le Ymen, pays aux prises surson territoire avec des combatscontre des groupes lis Al-Qai-da, sest flicit de lannonce dela mort de Ben Laden, affirmantquelle constituerait le dbut dela fin du terrorisme, selon unresponsable de la prsidenceymnite. p

    Service International(avec AFP, Reuters)

    International

    Cheikh Mohammedauraitdemand BenAl-Shibhsonavis surleprojet dattentatdeHeathrow, prcisantquetrouver deux outroispirates de lairneserapasdifficile

    Devantla tlvision,lajoie clate. LestoursduWallTrade Centerviennentdtrefrappespar un,puisdeuxavions de ligne.Lerve etletravaildetoute mavie,diraKhaled CheikhMohammed

    RamziBenAl-Shibhavant sonarrestationenseptembre2002etKhaledCheikhMohammed lorsde sonarrestationen2003. AFP/FBI/AP

    Lesgrands projets post-11-Septembre desdeuxlieutenants dOussama Ben LadenLesdossiersdeGuantanamorvlsparWikiLeaksdressentleportraitdeKhaledCheikhMohammed,cerveauprsumdesattentatsdu11-Septembre,etdeRamziBenAl-Shibh, leurcoordinateur

    Cenest pas la findAl-Qaida,selonlElyseParisestimequelecombatcontrele terrorismedoitsepoursuivresansrelche

    8 0123Mardi 3 mai 2011

  • Reportage

    Dehiba et Baouaba(frontire tuniso-libyenne)Envoye spciale

    L e sifflement aigu dchire lair.Grad!Grad!,crientleshabi-tantsdemaisonsperchessurles hauteurs de Dehiba. La premi-re roquette sabat 800mtres, laseconde 500mtres, la troisimetombe encore plus prs, projetantdes clats jusque sur les faades. Amoins de 4 kilomtres, un groupede sept vhicules appartenant auxforces de Mouammar Kadhafi etmunis de lance-roquettes bombar-dedanstouslessens,depuisleterri-toire tunisien, au pied des monta-gnes qui le sparent de la Libye.

    Les combats se sont intensifis,dimanche1er mai,entre forcesloya-les et rebelles libyens, impliquantchaque jour davantage la Tunisie,o se trouve la ville de Dehiba.Dansla soire, lestirs larmeauto-matique se poursuivaient tou-jours proximit de cette commu-ne de 3 500 habitants.

    En pntrant sur le territoiretunisien, larme fidle au colonelKadhafi tente de contourner lesrebelles qui tiennent les hauteurspour prendre le contrle du poste-frontire, ct libyen, de Baouaba,devenu un enjeu stratgique.

    Le pilonnage, accompagn detirslarmeautomatique,estinten-sif sur le sommet des montagnesdo slvent des fumes noires.Au lendemain de lannonce de lamort prsume, Tripoli, dues auxfrappes de lOTAN, du plus jeunefils du Guide libyen, les rebelles,mme sils mettent en doute lavracit de linformation, ne sontpas surpris. De toute manire,toutcequefaitKadhafiestuneven-geance contre le peuple libyen,assure Adel Assa, chef adjoint desrebelles de Baouaba.

    Les militaires tunisiens, quiessaient de ne pas se laisser entra-ner dans le conflit, se sont effacs,vacuant trois de leurs positions.Mais la question de lvacuationde la population de Dehiba se posedeplus en plus. A quelqueskilom-tres, le poste-frontire a t unenouvelle fois ferm dans laffole-ment alors que des dizaines de voi-tures de rfugis libyens se pres-saient encore pour passer en Tuni-sie. A midi, dans une chaleur torri-de, une soixantaine de pick-up sur-chargs taient encore sur place,avec trois ou quatre femmes voi-les de noir larrire, et de nom-breux enfants, parfois en pleurs,

    entasss au milieu de ballots, dematelas et de couvertures.

    Inquiet dune offensive immi-nente, le chef rebelle est venu lui-mme demander la police desfrontires tunisiennes dacclrerle passage des rfugis. En proie de violents combats, la rgionlibyenne du djebel Nafoussa sevide de ses habitants. Nalout, 68 kilomtres, qui compte plus de70 000 habitants, est devenue son tour une ville fantme o il nereste plus que quelques hommes.Deux Algriens, originaires deGhardaa, ont fait partie du der-nierconvoi.Onapatient,patien-t, mais aujourdhui ce nest pluspossible de rester, dit lun deux.Combattants ? Ah non, se rcrielhomme, ouvriers agricoles !

    Longs convois de rfugisBaouaba, ony tientpournotre

    ravitaillement. Pour linstant nousavonsassezdecarburant,mais parprcaution nous allons en cher-cher, explique Haythem, chef desrebelles, vtu dun treillis militai-re, des cheveux noirs mi-longsschappant dun chche. Nousnavons pas besoin dinterventionterrestre, la force morale est avecnous, et tous les rebelles deNafous-sa se sont rejoints pour constituerune unit de combat. Mais nousavons besoin darmes, sinon celarisque de durer, poursuit-il. JedemandesurtoutlOTANdebom-barder la rgion de Sinaoun, trsutilise par les troupes de Kadhafi,qui stend sur 125 kilomtres. Uncombattant de Nalout tient fairepasser son message : Si Sarkozynous donne des armes, en deuxjours nous serons Tripoli !

    Larme du colonel Kadhafiparat dcide reprendre Baoua-ba, transforme en zone majeuredapprovisionnement pour leursadversaires et do senfuient leursfamilles.Lepointde passagene suf-fit plus endiguer le flot de rfu-gis, qui empruntent les pistes lelong de la frontire p