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Bulletin de liaison des établissements d’enseignement secondaire ASSOCIATION DES ECOLES LASALLIENNES Foi Service Communauté Frères des Ecoles Chrétiennes Belgique-Sud CONTACTS N° 118 1 er Trimestre 2012 Editeur responsable : Jean-Louis VOLVERT Avenue d’Huart 156 – 5590 CINEY www.association-ecoles-lasalliennes.be Périodique Trimestriel Imprimé à taxe réduite Déposé au guichet L’école citoyenne selon Jean-Luc Tilmant Des CEFA pour redonner le goût d’apprendre Eduquer à la lumière de l’Evangile Belgique-België P.P.- P.B. 5590 CINEY BC 34347 N° d’agrément : P000524 Leblon Chloé

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Bulletin de liaison des établissements d’enseignement secondaire

ASSOCIATION DES ECOLES LASALLIENNES

Foi – Service – Communauté

Frères des Ecoles Chrétiennes Belgique-Sud

CONTACTS

N° 118 ���� 1er

Trimestre 2012

Editeur responsable : Jean-Louis VOLVERT

Avenue d’Huart 156 – 5590 CINEY

www.association-ecoles-lasalliennes.be

Périodique Trimestriel

Imp

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L’école citoyenne selon Jean-Luc Tilmant

Des CEFA pour redonner le goût d’apprendre

Eduquer à la lumière de l’Evangile

Belgique-België P.P.- P.B.

5590 CINEY BC 34347

N° d’agrément : P000524

Leblon Chloé

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CONTACTS n° 118 – 1er trimestre 2012 Bulletin de liaison des Etablissements

d’Enseignement secondaire

Association des Ecoles Lasalliennes www.association-ecoles-lasalliennes.be

Sommaire « Contacts » 118

Les éditos

Pauv(éri)té ? p. 4

« Quelques grammes de douceur dans un monde de brutes » p. 5

Méditation de la Passion du Christ avec la Croix de Saint-Damien p. 6

Pédagogie et pastorale

L’école citoyenne selon Jean-Luc Tilmant p. 7

Le syndrome d’Harpocrate ou l’école démocratique p. 10

Violence : l’école en cause ? p. 16

C’est arrivé près de chez vous

Un blog au 1er degré p. 19

Brevet d’art des Instituts Saint-Luc p. 20

Des écoles qui cherchent à valoriser les métiers techniques et manuels p. 22

25e anniversaire de la fusion de l’Institut Saint Jean-Baptiste de La Salle

et l’Institut de la Sainte Trinité p. 25

Il va pédaler pour les enfants du Sud p. 26

Lasal-liens

La mixité sociale en France p. 27

Accompagner les jeunes dont le comportement nous perturbe à la lumière de l’évangile p. 29

Nos parcours d’excellence ! p. 32

Tout le monde en parle

Des CEFA pour redonner le goût d’apprendre p. 33

La certification par unités : où en est-on ? p. 37

Association des Ecoles Lasalliennes

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Pauv(éri)té ?

L’hiver a été rigoureux. Je ne vous l’apprends pas. Sans verser dans un misérabilisme à la Zola, certaines réalités qui m’ont été communiquées par les directions de nos écoles m’ont attristé, voire révolté. Ici, un élève a été nourri par une école, car il n’avait pas mangé depuis deux jours. Là, il a fallu que la direction interpelle pour qu’un CPAS aide une famille. A tel autre endroit, un jeune se retrouve seul et il n’y a plus une goutte de mazout dans la cuve. Là, on passe un repas sur deux ou il n’y a plus d’argent à la moitié du mois. Bien sûr, il ne convient pas de généraliser ces cas à tous nos élèves de toutes nos écoles, mais ils existent et chaque cas de crise est sans doute un cas de trop. En Belgique, un enfant sur six (17 %) est confronté à la pauvreté. Et il y a 39,6 % de familles monoparentales en situation de pauvreté en Belgique, ce qui est nettement plus que la moyenne européenne (35 %). En Belgique – un autre chiffre nous l’apprend – le risque de pauvreté dans les familles où les parents ne travaillent pas est de 78,5 %. Ces chiffres abondamment commentés nous ont à nouveau été jetés à la figure lors des grands froids de février. Les discussions dans nos salles de professeurs ont aussi abordé ce que certains trilingues dénomment avec des mots forts arm(w)oede, pauv(éri)té, po(w)erty. Si l’on parle parfois de jeunes dont les familles vivent dans l’« assistanat organisé », si l’on rapporte parfois que certains jeunes dits « précarisés », « démunis », « fragilisés »

disposent du smartphone dernier cri alors que les factures dues par leur famille à l’école restent impayées, chacun se rend compte de l’isolement social croissant des parents et des jeunes concernés. Le repli sur soi constitue pour bien des familles une forme de refuge. Le regard que porte la société sur ces familles renforce sans doute ce phénomène. La toute grande majorité des groupes sociaux les plus défavorisés ne confient pas leur enfant à la crèche ou à l’école maternelle. Le coût des milieux d’accueil n’est pas la seule explication. La peur d’apparaître comme un parent négligent, la hantise du placement le sont davantage. Et dans l’enseignement secondaire, il me semble que la proximité peut être moindre dès lors que certains parents non scolarisés eux-mêmes ont peur de l’école. Sans doute la pauvreté reste-t-elle une notion abstraite pour nombre d’entre nous. Si nous n’y sommes pas directement confrontés, nous en avons une image tronquée, marquée par des généralités et des préjugés. La pauvreté est parfois visible : elle attire alors les regards et provoque la honte. Elle est souvent discrète : nous la croisons à l’école sans le savoir et elle n’en est pas moins difficile à vivre. Faire l’effort de mieux la connaître, de comprendre ce que vivent ceux qui y sont confrontés, n’est-ce pas rendre à ceux-ci un peu de leur dignité ? N’est-ce pas cela l’esprit du renouveau de Pâques ?

Jean-Louis Volvert

Citation en 2

e de couverture « Vivre l’Evangile dans le monde scolaire ». Action Catholique des Membres de l’Enseignement

chrétien (ACMEC) 1936-2011

« [L’Eglise] ne vise qu’un seul but : continuer, sous l’impulsion de l’Esprit consolateur, l’œuvre même du Christ, venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité, pour sauver, non pour condamner, pour servir, non pour être servi. […] Pour mener à bien cette tâche, l’Eglise a le devoir, à tout moment, de scruter les signes des temps et de les interpréter à la lumière de l’Evangile, de telle sorte qu’elle puisse répondre, d’une manière adaptée à chaque génération, aux questions éternelles des hommes sur le sens de la vie présente et future et sur leurs relations réciproques. Il importe donc de connaître et de comprendre ce monde dans lequel nous vivons, ses attentes, ses aspirations, son caractère souvent dramatique. […] Gaudium et Spes, § 3 et 4

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« Quelques grammes de douceur dans un monde de brutes » Voici quelques semaines, à la lecture du dernier numéro d’Entrées Libres, je me suis attardée sur l’article où Brigitte Gérard interrogeait Francis Danemark1. Je ne renie, en effet, ni mes origines, ni mon passé. Mon goût précoce de la lecture, mes études littéraires m’ont façonnée. Une phrase de cet écrivain belge, romaniste de surcroît, m’a frappée : « Les humains, seuls, sont d’un inintérêt total ! La seule chose qui les rend intéressants, c’est leur incroyable tendance à nouer des liens et à les défaire, parfois violemment ». Vous découvrirez, au fil de votre lecture buissonnière de notre revue, toute l’acuité de cette citation. Certes, « Le Christ nous a démontré que l’essentiel, c’est la relation, la bienveillance, l’écoute mutuelle2 », une relation au cœur de notre projet éducatif lasallien. Cependant force m’est de constater que l’idéal se heurte parfois à de dures réalités, que l’enseignant, malgré sa bonne volonté, est confronté plus ou moins régulièrement à des élèves qui cherchent à dénouer des liens par des incivilités, des agressions verbales … Les violences physiques, tellement mises en exergue par les médias, ne sont pas monnaie courante dans tous les établissements, elles existent néanmoins et sont toujours traumatisantes. Dans ce contexte, Francis Danemark interpelle, car, loin d’appeler à la sinistrose, il invite à voir l’envers du décor, l’intérêt d’aller au-delà du simple jugement : « La violence, c’est mal ». Tout comme la haine

n’est pas à l’opposé de l’amour, la violence dans un comportement, si elle reste inacceptable, offre peut-être plus d’opportunités que l’indifférence. Elle laisse peut-être une brèche que nous ferions bien d’explorer. C’est ce que nous invite à faire Jean-Luc Tilmant qui plaide pour une école citoyenne, démocratique, pour une école où existent des lieux de parole : des sas d’écoute et de décompression, des forums pour construire les règles du vivre ensemble, des conseils de citoyenneté où il est question de réparation et de sanction, mais non de punition. Une école « pour que prenne sens ce qu’ils (les jeunes) vivent, mais surtout pour qu’ils vivent avec d’autres un Nous3 ». Le dossier des « Cahiers pédagogiques » présenté de façon succincte va dans le même sens : réfléchir sur la violence, c’est toucher du doigt bien des problématiques, c’est aussi prendre conscience que l’école n’est pas à l’abri de violences institutionnelles, c’est réfléchir sur soi, sur son métier, sur l’éthique qui guide nos propres comportements. Alors, pour reprendre le slogan publicitaire choisi comme titre4 de cet article, cherchons, par ce que nous sommes, par ce que nous faisons, à faire goûter un peu de douceur à ceux qui nous entourent. C’est certes moins facile que d’engloutir une barre de chocolat, mais l’effet est probablement beaucoup plus durable.

Anne Oger 1 F. DANEMARK, « Un livre doit être aussi utile qu’une charrue », dans Entrées Libres, n° 66, janvier 2012 2 Th. D’ANSEMBOURG, « L’essentiel, c’est la relation », dans Entrées Libres, n° 60, juin 2011 3 Ph. ANSELIN, « L’élève acteur », La libre, mis en ligne le 6 février 2012 4 Slogan d’une célèbre marque de chocolat, cité par F. Danemark

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Méditation de la Passion du Christ avec la Croix de Saint-Damien

Vous avez ici sous les yeux une représentation plus contemporaine, de style « bande dessinée ». Observez d’abord la figure centrale du Christ, une figure de lumière, en lien avec cette phrase de Saint Jean : « Je suis la lumière du monde. Celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie. » (Jean, 8,12). Sur la croix, Il est vivant et ses bras grands ouverts semblent accueillir le monde entier. En haut de la croix, une inscription (si vous en ignorez le sens, consultez l’Evangile de Jean, 19,19) et une représentation de l’Ascension : le Christ porte l’écharpe du grand Prêtre qui est aussi celle de la Résurrection et, dans sa main gauche, la croix lumineuse qui signifie la victoire sur la mort. Le

cercle est un symbole de la plénitude, mais aussi une représentation de la terre : Il s’affranchit des limites terrestres. Toujours plus haut, vous voyez une main, celle du Père qui montre son Fils. Les trois doigts repliés nous rappellent que Dieu est un en trois Personnes. Le geste de la main est signe de bénédiction et représente aussi l’Esprit saint donné en cadeau à tous. Au milieu, en plus des anges, messagers de la parole de Dieu, vous remarquez

quatre grands personnages. A gauche, il s’agit de Marie et Jean, en lien direct avec ce passage de l’Evangile : « Jésus, donc, voyant la mère et, tout près, le disciple qu’il aimait, dit à sa mère ‘Femme, voici ton fils.’ Ensuite, il dit au disciple : ‘Voici ta mère.’ » (Jean, 19, 26-27). A droite, deux femmes dont nous parle aussi Jean : Marie-Madeleine et Marie, mère de Jacques. Elles sont accompagnées par un troisième personnage qui, lui, ne porte pas d’auréole : c’est le centurion romain. Il désigne le Christ, celui dont il a dit qu’il était Fils de Dieu … Il ne vous reste plus qu’à vous plonger dans la contemplation et la prière1 …

Anne Oger

1 Si vous souhaitez cependant en savoir plus, vous pouvez consulter les deux sites suivants : http://nostredame.unblog.fr/tag/meditation-de-la-croix http://michel64.over-blog.com/pages/La_croix_de_Saint_Damien-13042.html

Le crucifix original, peint sur bois (190 cm de hauteur et 120 de largeur) par un artiste inconnu, probablement pour l’église San Damiano à Assise, est du 12ème ou du 13ème siècle. C’est la croix la plus représentée au monde. C’est une icône, une représentation du Dieu vivant qui invite à une rencontre personnelle avec Lui. On y trouve ici tout un condensé de la mort, la résurrection et de l’ascension du Christ : il exprime donc le mystère pascal et s’inspire surtout de l’Evangile de Jean.

François d’Assise, en regardant cette icône, y aurait trouvé un sens à sa vie. Le Christ lui aurait dit : « Va et reconstruis mon église ».

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Pédagogie et pastorale

Deuxième réunion trimestrielle

« L'école citoyenne » selon Jean-Luc Tilmant

La citoyenneté, une priorité pour l'école? Elle s'inscrit, en tout cas, dans une volonté politique. Rappelons-nous le Décret de 2007 qui insistait sur la nécessité de for-mer le jeune à devenir citoyen, en souli-gnant le rôle du conseil d'élèves. Plus ré-cemment, la Ministre M.-D. Simonet plai-dait pour une partie commune à tous les cours philosophiques, dont un des axes serait dévolu à la « citoyenneté ». Mais, au-delà des bonnes intentions, com-ment mettre en place une réelle école dé-mocratique ? Nul, mieux que J.-L. Tilmant, fondateur du MIEC1, ne pouvait nous en parler. Lui-même est un homme de ter-rain : il a instauré en 2006 une école ci-toyenne à Saint François de Sales à Gilly où il enseigne, un établissement en enca-drement différencié, avec une forte proportion d'élèves italiens. Le bilan ac-tuel : une diminution drastique du nom-bre de retenues (alors qu'elles étaient lé-gion), une plus grande pacification des jeunes. Par exemple, plus aucun n'est amené à se présenter au conseil de ci-toyenneté à cause d'une infraction com-mise, car tous les filtres en amont ont fonctionné.

Selon notre expert, nos écoles souffrent

d'un syndrome d'Harpocrate2, de tous ces silences qui y détruisent le tissu humain et empêchent de mener à bien le projet d'y être heureux. Quel dialogue sur les va-leurs ? Les conflits, les émotions ... ne sont-ils pas souvent des sujets tabous ? De plus, les enseignants ne préfèrent-ils pas souffrir en silence s'ils sont victimes de chahuts destructeurs ? Et quel débat sur l'absentéisme, le décrochage scolaire, les violences institutionnelles ? J.-L. Tilmant a mené une recherche-ac-tion3 auprès de différents acteurs de l'école ; il leur demandait de compléter la phrase suivante : « Je deviens violent quand ... ». Un premier constat : tous les acteurs ont des valeurs, mais rejettent la responsabilité des manquements sur au-trui. N'appartient-il pas aux adultes de faire le premier pas ? Une stratégie collec-tive pour fonder une école citoyenne per-met de retrouver le plaisir de vivre en-semble dans le respect, de construire des lois, de découvrir, de chercher, de travail-ler ensemble ... Pour démontrer sa thèse, il nous montre un montage PPT concernant l'école profes-sionnelle de Froidmont à Liège. L'atmos-phère y était lourde, pesante, avant l'ins-tauration d'une école démocratique. Des photos défilent. L'année scolaire débute par une mise au vert afin d'apprendre à se parler, puis vient l'organisation de mini-fo-rums en groupes-classe pour débattre de la vie de l'école (« Ce que je ne peux sup-porter, c'est ... ») et pour dégager la base logistique de la loi à installer. La synthèse des 37 productions est effectuée et 4 interdits fondamentaux, présents d'ail-leurs dans le ROI, sont dégagés : le refus de la violence verbale et physique, de la détérioration des objets et de l'environne-ment, pour glisser des droits vers les de-

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voirs ... Chacun est illustré par un logo et des affiches sont placées partout dans l'école. Ensuite, vient le forum, un temps pour célébrer la loi par l'ensemble de la collectivité. Vers la mi-octobre, après des élections, le conseil de citoyenneté per-met, en cas d'entorses graves, de rappeler les règles fixées par tous, lorsque les autres filtres (4 à 6 au total) n'ont pas fonctionné : seul 1 % des élèves est con-cerné. J.-L. Tilmant nous expose alors le système des ceintures, qui permet de valoriser les progrès de l'élève au niveau de son comportement. Mais comment donc cadrer ceux qu’il ap-pelle les « Tedjalas » (formule contractée de « Tu es déjà là ») en zone sensible, ces élèves habitués à l'échec, aux sanctions, qui n'attendent rien de l'école, mais qui ressentent l'évaluation comme une injus-tice et estiment à chaud que les ensei-gnants n'ont pas le droit de punir ... ? Quelques conseils : � Les recadrer via un contrat portant sur

le savoir-être: une évaluation aura lieu chaque semaine lors d'une rencontre entre deux adultes, un homme et une femme, et le jeune.

� Accueillir les nouveaux élèves au con-seil de citoyenneté, leur donner des parrains, des « ceintures noires »

� Permettre tous les matins, en début de journée, aux élèves de s'exprimer du-rant 15 minutes, mais en respectant des règles (le droit de se taire, l'interdiction de couper la parole, de parler des absents ...).

� Créer un sas d'écoute et/ou de décom-pression, des cellules « absentéisme » et « assuétudes ». Des aides pré-cieuses. S'il est impossible d'avoir tout le panel, des priorités seront dégagées.

� Pratiquer la « méthode des incidents critiques » : après avoir écouté l'élève livrer ses émotions, il est possible de retourner aux valeurs ...

� Parfois, recourir à une thérapie de choc, à savoir le placer dans une situation très différente où il a besoin de s'ap-puyer sur les autres (par exemple, la remontée d'un canyon).

� Mener une réflexion sur la pédagogie utilisée avec les élèves eux-mêmes, car « il est inutile de bêcher avec un râ-

teau par temps de gel », les écouter sans pour autant mener un combat. La question « Tu ne comprends pas : pour-quoi? » peut déboucher sur des prises de conscience : certains, par exemple, ne savent travailler qu'avec une seule consigne à la fois.

� Utiliser le système des ceintures pour travailler progressivement et de plus en plus intensément le projet personnel et professionnel du jeune.

� Pratiquer l'évaluation permanente en équipe psychopédagogique. Après avoir identifié des personnes ressources pour mener à bien un projet avec un objectif très ciblé, leur donner une petite formation et des occasions pour échan-ger entre elles.

� Créer, éventuellement, une classe sas, si les autres stratégies sont insuffi-santes.

La parole a ensuite été donnée à des représentants de deux de nos écoles qui travaillent avec J.-L. Tilmant. A l'Institut Saint-Luc de Mons, depuis septembre, on expérimente l'école citoyenne. Les choses ont été rondement menées. Au départ : quelques enseignants, convaincus par une formation sur la violence donnée par notre invité et ressentant un mal-être au 1er degré. Ils parlent du projet à la direc-tion qui embraye immédiatement. Deux jours de formation les 30 et 31 août et c'est parti : organisation d'une mise au vert (une marche avec des activités cultu-relles) pour faire connaissance entre élèves et enseignants de 1ère puis de 2ème, à la fin du mois de septembre, ensuite mini-forums, création de logos et d'affiches, fête-forum, établissement d'un

Carole Cuvelier

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conseil de citoyenneté (un élève élu par classe) ... Le bilan après quelques mois de concrétisation : un seul renvoi depuis le début de l'année, des changements positifs dans le comportement, mais aussi la difficulté de mettre en place les filtres, la résistance de certains enseignants ... Enfin, D. Maurage, directeur de Saint-Luc à Ramegnies-Chin, évoquera à nouveau les neuf ans d'existence du sas d'écoute4. Après ces deux interventions est venu le temps des questions. L'une portait sur la formation. En préalable, plusieurs ren-contres ont lieu entre le MIEC et la direc-tion, afin de mieux mesurer les motiva-tions. Quand les deux parties sont d'ac-cord, le concept d'école citoyenne est pré-senté au personnel et, en fin de séance, chacun est amené à se positionner par écrit : est-il intéressé ou non ? Si oui, est-

il prêt à s'investir ? Après avoir déterminé le taux d'adhésion, l'on décidera ensemble de continuer ou non. A titre indicatif, si on opte pour un sas d'écoute, trois jours de formation seront nécessaires. On retiendra aussi de ce moment d'échange le fait de pouvoir adapter le projet à une seule classe, voire à des individus, avec le risque toutefois d'un choc entre ceux qui dépendent du conseil de citoyenneté et les autres, vu l'absence de jurisprudence. Etablir une école citoyenne dès la mater-nelle ? C'est tout-à-fait possible ... La pos-sibilité de faire évoluer la loi ? Naturel-lement, elle s'affine en fonction du vécu ... Alors, vous êtes convaincus ? Les propos de J.-L. Tilmant étaient, en tout cas, clairs, concrets et percutants : ils donnent ma-tière à penser, à rêver, mais surtout à agir.

Anne Oger

1 Le MIEC est le Mouvement des Institutions et de l’Ecole Citoyenne. Il a succédé en 2010 au GED (Groupe de

l’Ecole Démocratique) fondé en 2007, sous l'influence de la pensée de Jacques Pain, Philippe Meirieu et de Bernard Defrance. Le MIEC compte actuellement 150 sympathisants, 70 membres d’AG et 15 membres de CA. A noter que 1000 dispositifs de ce genre existent déjà en France.

2 C'est d'ailleurs le titre d'un de ses ouvrages : « Le syndrome d'Harpocrate ou l'école démocratique? », éd. Matrice, France, 2008. Vous en trouverez un condensé plus loin ...

3 Pour en savoir plus, lire l’article présentant un condensé de son livre « Le syndrome d’Harpocrate ou l’école démocratique ? »

4 Voir notre numéro de Contacts n° 111

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Le syndrome d'Harpocrate ou l'école démocratique ?

J-L Tilmant1

Il plaide pour une école qui se transforme radicalement, une école « métissée » en lien avec la mondialisation et la transculturalité. Il s'agit de ne plus vouloir d'une école « sanctuaire », une école du silence, une école qui se protège, une école « méritocratique », mais bien une école démocratique, s'appuyant sur le Décret Mission : elle mise sur une construction collective de la Loi, sur l'utilisation de la parole, pour exprimer et dialoguer sur les valeurs, mettre fin au tabou des conflits et des émotions. Il s'agit aussi de rendre du plaisir dans le vivre ensemble, mais aussi dans le travail scolaire.

L'influence de Fernand Oury et de sa pédagogie institutionnelle

Ce dernier a mis en œuvre le conseil d'élèves, comme lieu de recours et de décision, qui vise à responsabiliser, le système des ceintures comme au judo, et l'importance de ne pas transgresser la Loi. Parmi les espaces de parole, signalons « l'entretien du matin » (« Quoi de neuf? »). Les sas de décompression et d'écoute sont aussi deux structures indispensables dans les écoles.

La démocratie et l’école

L'auteur insiste sur l'éthique des droits de l'homme et sur la violation trop fréquente de principes démocratiques fondamentaux à l'école : liberté des individus non res-pectée, règle de la majorité bafouée, ROI imposé par une minorité, absence de séparation des pouvoirs, peu de consultation du « peuple », justice non

indépendante (car rendue par ceux qui sont au pouvoir) et présence de quasi autant de partis qu'il n'y a d'individus. A l'inverse, l'école démocratique vise à promouvoir le sens de la coopération, le respect de l'autre, la pédagogie diffé-renciée, tout en acceptant un contrôle de l'Etat sur les matières à enseigner.

Une éthique partagée

La prise de conscience d'un déficit démo-cratique à l'école après, très souvent, un

ras-le-bol exprimé par la base offre au chef d'établissement une opportunité pour

Le sas de décompression est un local institutionnalisé qui

permet à l'élève d'exprimer sa colère ou sa haine en

présence d'adultes formés. C'est un dérivatif pour la

personne « en adrénaline » meilleur que la fuite, la

destruction du prédateur ou de la proie ou que le refuge

dans une forme de camouflage. Quelques règles simples pour

l'adulte: ne pas faire barrage, se placer à côté de la

personne, utiliser une voix et des gestes calmes, doux mais

fermes, parler peu et à voix basse ... Il s'agira d'inviter

l'élève à entrer, à enlever ses chaussures, puis de

questionner (mais pas trop vite) : « Est-ce que ta violence

est dirigée contre moi ? Est-ce moi qui t'ai fait du mal ? ».

Si la réponse est négative, l'entretien pourra vraiment

commencer. Le jeune sera aussi amené à se défouler sur des

substituts et à travailler sur l'insulte.

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faire émerger une éthique partagée, centrée sur les points suivants :

− La loi est la même pour tous: construisons-

la donc ensemble!

− Nul n'est censé ignorer la loi ... : affichons-

la dans les moindres recoins pour que

personne ne puisse dire qu'il ne la connaît

pas

− Nul ne peut être mis en cause pour un acte

qu'il n'a pas commis ou dont il n'est pas

complice: interdisons les punitions

collectives

− Nul ne peut être mis en cause pour un

comportement qui ne porte tort qu'à lui-

même: ne confondons pas la punition,

résultat d'un comportement illégal ou

irrespectueux, de la sanction qui cherche à

rappeler ou à renforcer un apprentissage

− Toute infraction entraîne punition et répa-

ration : ne soyons pas laxistes et

réagissons face à tout type de violence: sur

les personnes (violence verbale ou physi-

que), sur les objets et sur l'environnement.

Visons d'abord une réparation (face à la

victime ...), voire une punition si l'acte était

intentionnel.

− Le mineur est sujet de droit, mais pas

encore citoyen: laissons-lui le droit à

l'erreur, car il est en phase

d'apprentissage.

− Pour une même infraction, il sera moins

puni qu'un majeur : reconnaissons qu'à

l'école, c'est souvent l'inverse (l'ense-

gnant, par exemple, est souvent moins puni

que le jeune).

− Nul ne peut se faire justice à soi-même :

établissons un conseil de citoyenneté afin

de défendre la victime, mais aussi

d'amener l'agresseur à la réparation ...

Evitons d'appliquer l'adage « œil pour œil,

dent pour dent »

− Nul ne peut être juge et partie :

n'admettons pas que le professeur victime

d'une agression punisse « à chaud » l'élève

− Le citoyen obéit à la loi parce qu'il la

construit avec d'autres: apprenons à

chacun de nos élèves à réfléchir sur ses

droits (ce que je n'aimerais pas qu'on me

dise ou qu'on me fasse), mais aussi sur ses

devoirs (ce que je ne dois jamais dire ou

faire aux autres)

− L'interdit de la violence est un principe qui

ne se discute pas : il est inacceptable de

traiter l'autre en objet, c'est un signe

d'inhumanité

− L'usage de la force n'est légitime que dans

deux cas : l'assistance à une personne en

danger et la légitime défense, si tous les

autres moyens ont échoué. Il est très

difficile dans les faits de maîtriser nos

émotions et notre animalité ... Par la suite, le chef d'établissement restera un moteur : il formulera par écrit son adhésion à un mode de gestion démocratique, il sera partie prenante des conseils de citoyenneté et soutiendra tout projet allant dans ce sens.

Les étapes de la démocratisation

Pour construire et rappeler la loi ... � Construction de groupes de discussions

d'une vingtaine d'élèves (une classe, une option ...) et organisation de mini-forums autour de la question : « Que faut-il faire pour vivre avec les autres dans le respect ? » Ils seront animés idéalement par deux adultes, un homme et une femme, qui distribuent la parole et prennent note, en évitant les commentaires subjectifs.

� Réalisation d'une synthèse de ce qui a été dit dans les mini-forums, mise en évidence de quelques grands dénominateurs communs : le respect

de l'autre (interdiction des violences verbales et physiques), le respect des différences (tolérance), le respect de l'environnement. Ensuite, réalisation d'une charte: les items retenus (peu nombreux et très généralistes) seront illustrés par un logo.

� Organisation de forums, comme des rites pour renouveler et revivifier les valeurs qui portent la communauté. Le premier a lieu en début d'année scolaire, avec tous les acteurs de l'école, mélangés. C'est une occasion pour prendre conscience des règles de vie, mais aussi pour faire la fête : chaque article de la loi est lu, applaudi

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et accompagné de musique; chaque élève reçoit une ceinture blanche, comme marque de citoyenneté ... Par la suite, si l'on juge important de faire un rappel, on recommencera un forum.

� Affichage de la loi un peu partout dans l'école.

� Après un an, évaluation du chemin parcouru et nouveau forum pour célébrer la loi.

Pour mettre en place et gérer le conseil de citoyenneté Constitué d'un membre de la direction, d'un éducateur, de professeurs et d'élèves, élus après appel à candidature, il se réunit une fois par semaine. Ses missions ? En cas d'infraction à la loi, quelle réparation et quelle punition éventuelle ? Comment faire pour l'appliquer le plus rapidement possible ? Quels comportements positifs souligner ? Comment accueillir les nouveaux élèves ? Lors des premières réunions, il ne sera probablement question que du renforcement des comportements positifs. Par la suite, lorsqu'un problème surgit avec un élève et qu'une série de filtres n'a pas fonctionné (par exemple, lorsqu'il n'a pas revu son comportement malgré les conseils de ses pairs, les remarques d'un adulte ...), le jeune sera invité par écrit à se présenter devant le conseil qui ne joue nullement le rôle d'un tribunal. Le rôle de l'animateur est crucial : après

un rappel des faits, il veillera au bon déroulement du débat : chacun a le droit de s'exprimer et le but est d'amener l'élève incriminé à réfléchir sur son comportement, à comprendre les conséquences de ses actes et à chercher lui-même une réparation, voire une punition. S'il ne le fait pas, c'est alors l'assemblée qui décidera. L'animateur veillera à maintenir la sérénité dans les échanges, évitera tout jugement, restera bienveillant et n'aura pas honte à revoir sa position s'il dispose d'un nouvel élément éclairant. Pour permettre la montée de ceinture Comme au judo, il existe 6 ceintures, elles marquent les progrès de l'élève sur le chemin de la citoyenneté, de l'indé-pendance et de la socialisation. C'est le conseil de classe qui propose, chaque trimestre, les noms des élèves qui vont monter, noms soumis ensuite à l'approbation du conseil de citoyenneté. Puis la décision est notifiée dans le journal de classe et le bulletin et la ceinture est remise individuellement. Des conditions indispensables : avoir respecté la loi, le règlement d'ordre intérieur, avoir participé et avoir été attentif aux cours, s'être conduit en citoyen dans et aux abords de l'école. Mais le passage d'une ceinture à l'autre est de plus en plus difficile.

Ceintures LOI Social Scolaire

Blanche - Respect de la loi à

l’intérieur et aux

abords de l’école

- Je dis « Bonjour » à

tout le monde

- Mon banc est rangé

- Mon journal de classe

est en ordre

Jaune - Respect de la loi à

l’intérieur et aux

abords de l’école

- Je respecte la parole de

chacun

- Mes cours sont en

ordre

- Je n’ai pas plus de 4

échecs

Orange - Respect de la loi à

l’intérieur et aux

abords de l’école

- J’aide les autres dans la

classe

- Je suis poli dans la

classe

- Je participe au cours

activement

- Je n’ai pas plus de trois

échecs

Verte - Respect de la loi à

l’intérieur et aux

abords de l’école

- J’aide les autres dans

l’école

- Je suis poli dans l’école

- Je prends des

initiatives positives

- Je n’ai pas plus de 2

échecs

Marron - Respect de la loi à - Je participe à la vie - Je réussis mes stages

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l’intérieur et aux

abords de l’école

communautaire

- Je suis ponctuel

brillamment

- Je n’ai pas plus d’un

échec

Noire - Respect de la loi à

l’intérieur et aux

abords de l’école

- Je suis un exemple pour

tous les autres

- Je parraine des

nouveaux

- Je réagis avec respect

face aux incivilités

- Je suis un exemple

dans les cours et les

activités extérieures

- Je n’ai pas d’échecs

Projet de montée de ceinture, p. 68

Un élève devenu ceinture noire siège de plein droit au conseil et devient un parrain. Il va être formé pour cela. Il rencontrera son filleul, un élève entré depuis peu dans l'établissement, chaque

semaine. Il l'aidera à connaître et à respecter la loi, favorisera son intégration sociale, sa connaissance de l'institution, voire cherchera avec lui des solutions s'il a des difficultés scolaires.

Les onze principes de base d’une école démocratique2

1. Nous plaçons l’élève au centre de nos préoccupations professionnelles. Nous utilisons des

méthodologies et des pédagogies adaptées à ses besoins fondamentaux. Nos écoles forment

des citoyens capables de s’interroger et de s’épanouir dans la société. Toutes nos actions

doivent être porteuses de sens.

2. Dans l’école démocratique, nous sommes tous des éducateurs car nous respectons et faisons

respecter la Loi négociée et construite avec les acteurs. Nous ne cédons pas au laxisme

sociétal.

3. L’évaluation n’est en aucun cas un outil de ségrégation ou de sanction.

4. Les Droits de l’Homme constituent le guide éthique de notre action de terrain.

5. La mise en place d’une équipe pédagogique est garante de la cohérence et de l’efficacité ou

sein de l’école.

6. La communication positive favorise une bonne relation avec l’élève. Cette démarche peut être

individuelle ou institutionnalisée (sas d’écoute ou de décompression ...).

7. Le projet pédagogique se construit avec tous les acteurs de l’institution. Celle-ci doit être

transparente dans sa gestion et ses projets. Le système pyramidal doit laisser place à un

système circulaire où tous les acteurs deviennent un moteur de citoyenneté. Les

responsabilités sont différentes mais chacun est pris en considération dans l’assemblée

démocratique.

8. Le conflit verbal ou non-verbal peut faire grandir et devenir une base du progrès de la

relation.

9. Le contact avec la nature et l’ouverture à l’environnement favorisent la socialisation et

l’intégration.

10. L’école se construit en partenariat avec tous les acteurs psychosociaux et culturels dans le

cadre de réseaux centrés sur l’intégration de citoyens responsables.

11. Les sciences humaines constituent un vivier de ressources et de stratégies pour une

constante recherche-action.

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La violence, une notion complexe

Il est difficile d'analyser les situations de violence, car de nombreux facteurs entrent en jeu. L'homme, beaucoup plus que l'animal, est soumis à des méca-nismes complexes. A travers différentes approches (étymologique, physiologique, sociologique, philosophique, psycholo-gique, mais aussi systémique et histo-rique), Jean-Luc Tilmant démonte des amalgames et des stéréotypes en parcou-rant une bibliographie imposante. Voici quelques éléments épars découverts au fil de la lecture de ces pages. La violence, propre à l'humain, est à distin-guer de l'agressivité, liée à tout vivant; il est « nécessaire de ne pas l'éteindre, puisqu'elle est nécessaire à l'existence, autant qu'il est nécessaire de la contrôler, ce qui est nécessaire à la coexistence. »3 La force ne se confond pas non plus avec la violence. Elle n'est pas plus présente aujourd'hui qu'hier, les médias tendant à entretenir chez les gens un sentiment d'insécurité parfois irrationnel. La violence n'est pas non plus, contrairement aux idées reçues, indissociable d'un contexte de crise économique, même si elle peut être provoquée par des structures sociétales. Dans d'autres cas, la société cherche à la réguler. Elle peut aussi servir de mécanisme de protection pour l'individu qui est dans le déni face à une réalité jugée insatisfaisante. J.L. Tilmant cautionne aussi « le paradigme des douze besoins » de Pourtoit-Desmet (1997), une théorie sur laquelle il appuie son analyse de la violence. Elle proviendrait de la frustration de besoins fondamentaux répertoriés selon quatre axes. � Les besoins affectifs

⋅ L'attachement, un besoin centré sur la

relation privilégiée mère-enfant ⋅ L'acceptation, le fait de reconnaître à

l'enfant le droit à l'existence et de lui donner une place

⋅ L'investissement, les désirs conscients ou inconscients projetés par les parents sur l'enfant

� Les besoins cognitifs ⋅ La stimulation, qui vise à motiver

l'enfant ⋅ L'expérimentation : c'est à partir d'ex-

périences concrètes que l'enfant va dégager des lois abstraites

⋅ le renforcement, une récompense ou une punition pour renforcer « une association entre un stimulus (un bon point, une mauvaise note ...) et une réponse » p. 129

� Les besoins sociaux ⋅ La communication ⋅ La considération, le besoin d'être

reconnu, estimé ⋅ le besoin de structures, de repères, de

balises (psychologiquement, mais aussi spatialement et temporellement)

� Les valeurs : elles jouent un rôle essentiel, car c'est « tout ce qui peut nous mobiliser, tout ce qui mérite qu'on lui prête attention ou qu'on lui sacrifie autre chose »4 ⋅ Le bien et le bon, qui renvoie à

l'éthique et plus particulièrement aux Droits de l'Homme, fondement de l'école démocratique

⋅ Le vrai : certes, nous savons que toute vérité est subjective, mais nous aimerions trouver une vérité uni-verselle. D'où la nécessité, à l'école, de rechercher ensemble ce qui est vrai

⋅ Le beau: ici aussi, nous constatons le même paradoxe. Il est donc impor-tant que les élèves construisent ensemble des œuvres belles

Les fruits d'une recherche-action menée par l'auteur

Elle a commencé en 1995, dans la région de Charleroi et plus particulièrement à Gilly, dans le but de mieux encadrer des adolescents d'une école professionnelle ; elle a débouché, après 6 ans, sur des stratégies susceptibles de prévenir la violence. J.-L. Tilmant a ensuite décidé de l'étendre : il a interrogé 100 élèves de

l'enseignement secondaire, 100 profes-seurs, 100 éducateurs et 100 personnes ayant des fonctions de direction dans des écoles à discrimination positive du Hainaut. Après leur avoir proposé un questionnaire construit sur base de la théorie des 12 be-

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soins dont il a déjà été question, il a classé les items suivant les catégories et les types de besoins, puis les a compta-bilisés et a établi des pourcentages. Un constat essentiel, valable pour tous les sondés : la violence est surtout déclenchée par une frustration au niveau des valeurs, particulièrement celles qui touchent au vrai et au bien. Puis viennent les besoins sociaux : la communication et la considération sont mal prises en compte, semble-t-il, dans le contexte scolaire. Après cette étude quantitative, 10 acteurs de chaque catégorie dont les réponses paraissaient révélatrices de l'ensemble ont participé à un entretien semi-directif qui a duré, suivant les cas, de 7 à 30 minutes. Des points de convergence ont alors émergé. Tous sont attachés aux valeurs et condamnent le mensonge, la délation, les

calomnies et la jalousie, présents au sein de l'école; ils sont également sensibles au respect des lieux et des personnes. En matière d'incivilités, ils se rejettent cependant la responsabilité : c'est toujours la faute de l'autre et c'est l'autre qui doit chercher à changer la situation. Il est aussi frappant de constater que tous dénoncent une violence institutionnelle. Des perceptions divergentes apparaissent quant aux besoins cognitifs : les élèves sont nombreux à affirmer qu'ils s'ennuient à l'école, alors que les adultes, eux, s'expriment peu à cet égard. De plus, ils ne supportent guère les règlements, alors que les autres acteurs voudraient que des règles leur soient imposées : rares sont ceux qui envisagent la possibilité de les négocier avec les jeunes. Dernier constat alarmant : le manque de lieux de communication et d'échanges, de lieux de résolution de conflit en école.

Conclusion

Selon l'auteur, il est urgent de canaliser la violence et de lutter contre une désagré-gation sociétale en mettant en place une école démocratique, qui, outre les prin-cipes déjà cités, doit exploiter des poten-tialités externes : renforcer le lien avec la famille et les quartiers, sans les stigma-tiser, favoriser le contact du jeune avec la nature pour le réconcilier avec lui-même, nouer des partenariats pour que les enseignants comprennent davantage les comportements violents sans les admet-tre, revoir le rôle des inspecteurs et sensibiliser les politiques à ce que vivent les acteurs de terrain.

Dans une société moderne, pluriculturelle, plurireligieuse et multilingue, il n'existe plus de consensus sur les valeurs. Les jeunes eux-mêmes vivent dans plusieurs mondes ... Le rôle de l'école n'est pas de combler tous les manquements de la so-ciété, mais de se focaliser sur les apprentissages de base et sur le vivre ensemble. Au travers d'espaces de paroles et de dialogue, les jeunes et les adultes construiront ensemble des règles de vie, se les approprieront activement, recher-cheront sans cesse un équilibre capable de fonder l'action commune et la cohésion du groupe.

Anne Oger

1 J.-L. TILMANT, Le syndrome d’Harpocrate ou l’école démocratique, éd. Matrice, France, 2008 2 Ibid. p. 71 3 Ibid. p. 104 4 Ibid. p. 131

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Violences : l’école en cause ?

Il n’est pas rare que les médias nous rapportent des faits de violences dans le milieu scolaire. Mais derrière les mots et les images de choc, que se cache-t-il ? Quel rôle l’école peut-elle jouer ? Lui est-il possible de s’occuper de cette problématique, sans remettre en question son mode de fonctionnement ? Ne contribue-t-elle pas elle-même parfois à créer un sentiment d’injustice s’exprimant par des actes violents ? Et si les violences à l’école n’étaient pas seulement une tare, mais aussi une opportunité, celle de nous interroger sur le sens de notre métier qui conjugue éducation et pédagogie, en lien avec des valeurs ? Des questions fondamentales abordées dans le numéro des Cahiers Pédagogiques en mars-avril dernier …

Les violences à l’école Pour sortir d’une vision simpliste, il est bon de se rendre compte que cette dénomination recouvre aujourd’hui des réalités très diverses1. Si le harcèlement entre élèves constitue une question sociale d’ampleur, il est moins lié à des agressions physiques ou à des crimes, qu’à des brimades, des vexations répétées (atteintes verbales, exclusion, vols, rac-kets, attouchements …) dirigées contre des boucs-émissaires : 10 à 20 % des jeu-nes entre 11 et 15 ans en seraient vic-times chaque année. Mais les compor-tements les plus répandus sont ceux qui manifestent une volonté de ne pas se conformer aux règles de fonctionnement d’une école : absentéisme, contestation d’une sanction ou d’un résultat, bavar-dages ou déplacements intempestifs … Cependant l’école n’est pas à l’abri de violences institutionnelles2: « Plus l’enfant est atypique, éloigné socialement, culturellement, psychologiquement, plus il déborde du cadre, plus il est source de stress et à même de provoquer une situation de conflit, voire de violence de la part de l’adulte ». L’enseignant qui sanctionne trop rapidement chez cet élève ses difficultés de mettre les idées en mots, sa méconnaissance de références culturelles jugées évidentes … peut créer de profondes blessures, comme le fait comprendre Sarah Minella, issue d’une famille ouvrière, qui a obtenu un master en sociologie, mais ne s’est jamais sentie à l’aise dans le milieu scolaire : « Impossibilité d’expliquer au professeur que ce qu’il sanctionnait par la note …

était vécu comme une sanction de ce que j’étais. Mais également de lui témoigner mon perpétuel sentiment de trahison que j’éprouvais ou qui m’était renvoyé par mes pairs : dois-je abandonner ma culture et me mouler à celle de l’institution ? … L’école demandait de taire une partie de moi … ». Un regard rapide sur les 40 dernières années3 Si, jusqu’à la fin des années 80, on pensait que la violence chez les élèves était une réaction bien compréhensible, engendrée par une maltraitance vécue au sein même de l’établissement scolaire, la perspective s’inverse depuis les années 90. Les causes sont à chercher en dehors de l’école : le milieu familial, les médias … sont incriminés. Même si des études démontrent qu’il n’y a pas eu une augmentation significative, globalement, de la violence à l’école, les micro-violences qui y sont vécues paraissent annonciatrices de faits plus graves. Pour certains chercheurs, le rôle de l’école est donc de se protéger (d’où, par exemple, le développement des caméras de surveillance …) et de resocialiser les élèves perturbateurs, sans contester l’ordre scolaire et social, jugé légitime, naturel … Mais d’autres analyses se focalisent plutôt sur le sens que revêt cette violence, mettant en lumière la complexité et la spécificité des situations. Ainsi, dans certaines zones urbaines, des jeunes révoltés contre la société et l’absence d’avenir qu’elle leur réserve, ne savent

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exprimer leur rage que par des actes violents. Les écoles, dans ces quartiers, sont perçues comme des lieux de relégation sociale et le moindre incident (l’attribution d’une mauvaise note, par exemple) peut causer un débordement. Chaque établissement scolaire se doit donc d’interroger son mode de fonctionnement, ses pratiques, pour voir à quel niveau il peut agir. Pour passer d’une logique descendante (l’application de textes officiels) à « une logique contextuelle de résolution de problèmes »4 Le rôle du chef d’établissement5 Souvent éloigné de la vie en classe, il n’a pas toujours une perception claire de ce qui s’y passe : il minimise ainsi parfois les « appels au secours » déguisés d’enseignants et, sans être de mauvaise foi, est incrédule quand des faits violents se produisent : « On sait bien que des incidents graves surviennent à l’école, mais quand même pas chez nous … » Lorsqu’un enseignant se fait agresser physiquement par un élève, Philippe Pradel, Principal de collège à Paris, conseille à la direction de se rendre à la salle des profs, d’écouter, de laisser s’exprimer les émotions, tout en évitant qu’elles ne submergent tout et l’emportent sur le professionnalisme, sans dénigrer ou culpabiliser. Face à la question centrale : « L’enseignant doit-il porter plainte ? », le chef d’établissement invitera à la réflexion : un dépôt de plainte, dans quel but ? Pour obtenir réparation ? Alors, pourquoi pas ? Mais n’y-a-t-il pas d’autres motifs moins avouables ? Ce faisant, le professeur ne renonce-t-il pas à une de ses missions, à savoir éduquer le jeune qui lui a été confié ? Au bout de quelques jours, il sera possible de débattre, plus rationnellement. Pour se positionner, lui-même s’interrogera sur l’acte commis : comment les faits se sont-ils produits ? Comment les expliquer ? Certains élèves apparaissent dès le départ comme des perturbateurs : les membres de la communauté éducative les repèrent très vite et tentent par différents moyens (des rustines, selon l’auteur) de les canaliser : élèves exclus du cours et pris en charge par les éducateurs, par exemple. Mais

d’autres ont des comportements imprévisibles, qui transgressent les règles en vigueur à l’école : l’ennui, les échecs répétés, constituent des terreaux favorables. Des solutions ne peuvent-elles donc pas être trouvées par l’enseignant en réfléchissant sur son rôle, la pédagogie utilisée, l’évaluation pratiquée … Si la direction n’opte pas pour le renvoi définitif, la réintroduction de l’élève dans l’école ne pourra se faire que sur base d’un contrat avec lui et avec sa famille. Il y sera, par exemple, question d’une fiche de suivi pour chaque heure de cours, d’entretiens réguliers pour évaluer la situation … Et l’enseignant débutant dans un milieu difficile ?6 Très souvent, il est obnubilé par le contrôle de l’ordre en classe. Face à des élèves perturbateurs, il se sent immédiatement sous tension et perd beaucoup d’énergie à tenter de le rétablir. Très vite, il ne semble plus à même de distinguer les répliques ou comportements d’élèves qu’il serait préférable d’ignorer de ceux qui méritent d’être vraiment sanctionnés, pas plus qu’il n’arrive à se servir de certaines remarques sur le contenu de son cours comme tremplins à des fins didactiques. Il cherche, au coup par coup, des solutions individuelles qui se révèleront souvent sans grande portée. Il serait beaucoup plus efficace de fédérer les élèves autour d’un projet collectif, de leur proposer des défis, des challenges dans leur discipline, afin qu’ils se sentent impliqués et jouent ainsi mieux le jeu scolaire. « Focalisés sur la discipline, les enseignants ne parviennent pas à enrôler les élèves dans un projet d’apprentissage clair et explicite ».

Luc Ria

Des leviers • Une bonne connaissance des facteurs

personnels, familiaux, sociaux et scolaires qui influent sur les comportements agressifs des élèves

• Une formation initiale et continuée solide sur la problématique : des modules de quelques heures ne suffisent pas

• Le travail d’équipe

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• La construction de normes partagées avec les élèves et l’apprentissage de la citoyenneté. S’il est des lois immuables qu’on ne peut enfreindre sous peine de sanctions (comme l’interdit de violence), il existe aussi d’autres règles de vie que l’on se doit de respecter, mais que l’on peut aussi faire évoluer. Enfin, un code de conduite, de politesse et de bienséance, sans être lié à des sanctions, aide au « vivre ensemble »7

• Une réflexion sur le rôle de la sanction Petit clin d’œil

En juillet 2000, en France, paraissaient des décrets et circulaires portant sur les procédures disciplinaires dans le secondaire. Un passage a provoqué un tollé : « Il n’est pas permis de baisser la note d’un devoir en raison du comportement d’un élève ou d’une absence injustifiée … Les lignes et les zéros doivent être également proscrits » Or, depuis 130 ans, les plaignants qui introduisent des recours devant des juridictions administratives pour ces raisons obtiennent généralement gain de cause et les « lignes » comme punitions sont formellement interdites depuis … 18908.

• Une pédagogie soucieuse de l’appren-

tissage coopératif • L’aide aux élèves en difficultés • La variété des procédures utilisées pour

motiver • Des actions reliant l’école à ce qui

l’entoure (famille, quartier), des par-tenariats avec des acteurs extérieurs

• Des jeux pour apprendre au jeune à gérer son agressivité

• La médiation par les pairs … pour éviter à l’enseignant de fuir, de s’humilier ou de chercher à dominer par la violence dans les situations difficiles. Elle s’apprend, par exemple, au travers de trois modules. Le premier, en début

d’année, sert à montrer, à l’aide de témoignages, que le geste non-violent peut être une réponse efficace à l’agir violent ; le second module est consacré à l’apprentissage de quelques techniques (l’écoute active avec reformulation, « le message clair » : l’expression des faits, puis la mise en mots des émotions …) ; le troisième propose des exercices d’entrainement à la médiation.9

• La création d’équipes mobiles de sécurité10 Depuis 2009 en France, ces équipes pluridisciplinaires assument des missions très variées, préventives ou dissuasives, liées tant à l’éducation qu’à la sécurité : appui pour le contrôle des entrées et sorties des écoles, intervention en cas d’agression, animations thématiques dans les classes, prise en charge temporaire des élèves perturbateurs, en collaboration avec les enseignants …

En conclusion Selon les auteurs de l’éditorial, Bruno Robbes et Patrice Bride, « Il semble au final fécond de considérer la question des violences avant tout comme une occasion d’entrer dans d’autres problématiques, comme celles des conceptions du métier et de l’enfance, de la transmission et de l’éducation, de la formation, ou encore des savoirs et des contenus scolaires. Ainsi, les savoirs d’action à l’œuvre sont toujours guidés par une éthique qui témoigne des valeurs de celui qui agit, par exemple à travers le langage tenu aux élèves ou la recherche du juste. »11 Une nouvelle occasion de nous replonger dans notre projet éducatif …

Anne Oger

1 B. GALAND, « ‘le harcèlement entre élèves’, phénomène méconnu ? », Cahiers pédagogiques n° 488, mars-avril 2011, p. 21 2 S. MINELLA, « Violences de l’école », ibid., p. 29 3 C. CARRA, « Derrière l’évidence de la violence à l’école », ibid., p. 11-13 4 L. BERGUGNAT, « La logique des programmes de prévention de la violence », ibid., p. 19 5 Ph. PRADEL, « Peut-on frapper un professeur en toute impunité ? », ibid., p. 30-31 6 L. RIA, « Les stratégies et dilemmes des enseignants débutant en milieu difficile », ibid., p. 47 7 S. CONNAC, « « Vous voulez qu’on vous aide ? » », ibid., p. 51 8 Cl. LELIEVRE, « Textes de référence et pratiques disciplinaires effectives », ibid., p. 35 9 S. CONNAC, id. p. 51-53 10 Entretien avec Bernard Claux, ibid., p. 36-37 11 « Quelle violence ? Quelle école ? », ibid., p. 10

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C’est arrivé près de chez vous Institut Saint-Luc de Ramegnies-Chin

Un blog au 1er degré

C'est durant l'année scolaire 2009-2010 que l'idée de créer un blog pour le 1er degré est née. Ce sont les parents d'un élève en difficulté qui l'ont suggérée. En effet, ceux-ci s'étonnaient de constater que la partie "travaux et leçons" du journal de classe de leur enfant restait étonnamment vide. Désireux de suivre la scolarité de leur fils, ils souhaitaient appuyer les consignes des enseignants. Le journal de classe n'étant pas complété correctement, ils n'avaient aucun moyen d'y parvenir. Imposer à chaque professeur la vérification systé-matique de chaque élève de la classe s'est vite révélé problématique. Calculons rapidement : 1 minute de vérification par élève (ce qui est court), pour une classe moyenne de 20 élèves représente déjà 20 minutes, presque la moitié d'une période de cours.

Internet est apparu comme une bonne

opportunité. Nous avons donc créé un "blog". Ce format est extrêmement simple à mettre en place et à utiliser puisqu'il ne nécessite aucune connaissance particulière et, de plus, est totalement gratuit. D'emblée la consigne était claire : il ne s'agissait nullement de fournir un document qui remplacerait le journal de classe. Celui-ci est une obligation légale, qui a aussi pour fonction d'éduquer l'élève à la tenue et au suivi d'un planning de travail. L'objectif du blog est d'avoir un moyen de communiquer directement aux parents (et indirectement aux élèves) les différents travaux à faire. Grâce aux consignes et aux dates d'éché-ance, ceux-ci peuvent surveiller de près la régularité du travail de leur enfant qui ne peut plus se cacher derrière un simple "non, non il n'y a rien à faire" ...

Progressivement les professeurs se

sont impliqués. Munis du login et du mot de passe, chacun indique à sa convenance

toutes les informations concernant les travaux de son cours. De leur côté, plusieurs parents se sont inscrits à la newsletter du blog. Celle-ci leur permet de recevoir sur leur boîte mail un message d'alerte leur signalant qu'un nouveau message a été publié. Ils ne doivent donc pas systématiquement le vérifier par eux-mêmes.

Très vite et d'année en année, le blog

a étoffé sa fonction. L'éducatrice note maintenant des informations pratiques : jours de congé, heures de retour en classe, matériel à apporter ... De même certaines photographies d'activités scolaires agrémen-tent maintenant l'outil. Mais surtout il est devenu un véritable lieu de communication entre les parents et les professeurs. Fréquemment des parents écrivent par e-mail pour demander une précision pour un travail, s'enquérir d'une information administrative, signaler un problème au sein de la classe ou encore féliciter l'équipe du 1er degré de la mise en place de ce blog ...

Aline Crombez

Professeur de français Institut Saint Luc Ramegnies-Chin

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Brevet d’art des Instituts Saint-Luc Il y a huit ans est née une épreuve appelée « Brevet d'art des Instituts St-Luc ». Cette initiative, fondée sur l'expérience et la tradition des Instituts Saint-Luc, vise à promouvoir la qualité de leur enseignement artistique et à conforter la formation aux arts plastiques dans le cursus secondaire. Créée pour les sections « Arts Plastiques » et « Arts et Structure de l'habitat », elle remplace le traditionnel jury de qualification organisé en fin de la sixième année du secondaire technique et se présente sous la forme d’une épreuve intégrée. Devant un jury de professionnels, les étudiants défendent leurs productions artistiques de façon argumentée suivant quatre critères : parcours et conception, créativité, technicité et oralité. Une mention est attribuée à ceux dont la production a été jugée remarquable. Depuis les débuts de la nouvelle structure en 2004, l’on a souhaité donner aux "Brevetés avec mention" une passerelle vers le futur : cela s’est traduit par la création d'un site appelé www.brevetdart.be et par le projet d’exposer les plus récentes créations des mentionnés. Huit promotions ont déjà vu le jour et aujourd'hui, l'aventure continue. Une première exposition Shed-1 avait été organisée en 2008 à Bruxelles sur le site de Tour et Taxis. Pour sa deuxième édition, l’événement a pris ses quartiers dans le hangar B9 dans l’ancienne caserne Fonck, sur le site de l’Ecole Supérieure des Arts Saint-Luc à Liège, du 3 au 12 février 2012. 47 étudiant(e)s des 4 Instituts Saint-Luc (Bruxelles, Liège, Mons, Tournai), issus des promotions du Brevet d’Art 2008, 2009, 2010 et 2011 et, pour la plupart, encore en formation au sein d'un circuit d'enseignement supérieur artistique, ont ainsi exposé une ou plusieurs de leurs œuvres. Le but

poursuivi ? Offrir une vitrine à ces jeunes créateurs.

De nombreux visiteurs, notamment issus des classes actuelles d’arts plastiques et de l’habitat, ont été invités, au gré de leur curiosité, à découvrir l'univers formel de ces jeunes talents, univers qui touche aussi bien au graphisme, à la bande dessinée, à la peinture, à l'animation, à l'image de synthèse qu’à l'expression tridimensionnelle. Tout

avait été mis en œuvre pour que la richesse de l’inventivité, l'authenticité des personnalités soient valorisées dans une mise en espace de qualité. L’on ne peut que saluer le véritable travail collectif mené pour assurer les conditions de la réussite de l’exposition. Je pense notamment aux étudiants et aux professeurs de la section Bois de l’Institut Saint-Luc/Mons pour la construction des socles de l’exposition, aux professeurs Nicolas Wolkenar (Saint-Luc/Liège) et Sébastien Hutse (Saint-Luc/Mons) pour la scénographie, aux élèves de 5e année de la section « Photographie » (Saint-Luc/Liège) pour le reportage photo, ainsi qu’au professeur Lydie Algrain (Saint-Luc/Mons) pour l’affiche qui a servi de support à l’invitation et au catalogue de l’exposition.

Et un merci particulier aux enseignant(e)s des 4 Instituts Saint-Luc qui ont apporté leur contribution au succès de l’exposition : Amélie Buisseret, Nicolas Crombez, Miguel De Campos, Jean-Pierre Deneubourg, Grazie Gillot, Laurent Gillot, Jean-Pierre Gheys, Samina Ketelbuters, Astrid Lauer, Dominique Lizin, Bernard Louis, Valérie Nottebart, Michel Petitjean, Anne Pierre, Marc Rossignol, Louis

« Notre héritage n’est précédé d’aucun testament »

René Char

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Spinhaeyer, José Strée, Philippe Sucaet. Le travail a com-mencé en octobre dernier par une première sélection en école des œuvres, sur base d’une photo et d’une fiche technique envoyées par l’étudiant. Par la suite, nous nous sommes retrouvés

pour visionner les productions retenues et avoir une vue d’ensemble. Parallèlement une commission « com-munication » s’est créée pour développer une stratégie, afin de faire connaître notre exposition dans et hors des murs des écoles; chacune a pu ainsi exploiter ses propres circuits de diffusion, en lien avec ses relais médiatiques locaux. La réalisation d’un document visuel pour notre campagne publicitaire a été confiée à Lydie Algrain et à ses étudiants en section professionnelle « Assistant aux métiers de la pub » de Mons, le catalogue à Laurent Gillot de Liège, le site et la page Facebook à Nicolas Crombez de Tournai, les cartels de l’exposition à Dominique Lizin et Samina Ketelbuters de Bruxelles. Pour la mise en scène et la préparation du lieu, Nicolas Wolkenar et Sébastien Hutse ont été deux bons compagnons de route. Un bel équilibre entre toutes les forces vives.

Nous avons cependant eu des sueurs froides. Car il faut bien constater que les jeunes ont des difficultés à se projeter

dans le temps. L’engagement, le respect d’un délai, la planification ne sont pas, pour eux, des priorités. Beaucoup d’entre nous se sont ainsi interrogés durant tout le travail : « Jusqu’où aller pour les aider ? » En bref, pourquoi tant d’énergie investie dans ce projet ? Parce qu’elle reflète une discipline qui, par définition, cherche avant tout à favoriser l’expression par tous les moyens possibles pour libérer la personne, lui donner formes et couleurs et valoriser sa personnalité ! Aidés par la pédagogie qui s’y applique, leurs professeurs cherchent à tracer une voie à ces jeunes, un chemin vers leur futur. Plus que de simples pédagogues, ce sont des passionnés convaincus que leur engagement donne sens à leur métier.

Je terminerai en exprimant toute la joie que j’ai eu à travailler avec vous, Dominique, Lydie, Nicolas, Sébastien, Bernard, Laurent, José, Louis, Nicolas. Bien au-delà de la passion, vous êtes des porteurs d’énergie positive. Et je vous fixe déjà rendez-vous en 2015 à Mons, choisie comme capitale culturelle européenne, pour un parcours durant lequel nous mettrons en avant non seulement le Brevet d’art, mais aussi toutes les sections artistiques de nos quatre Instituts Saint-Luc.

Dominique Lannoy,

Accompagnatrice de proximité pour les écoles lasalliennes et commissaire de l'exposition

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Communauté Educative Saint Jean-Baptiste de Tamines Collège Saint-Guibert de Gembloux

Des écoles qui cherchent à valoriser les métiers techniques et manuels

A Tamines, des titulaires du 1er degré, avec l’aide de l’économe, Monsieur Degrande, ont relevé un fameux défi : réaliser avec leurs élèves, dans le cadre d’un concours, plusieurs courts-métrages en lien avec des métiers manuels. Des courts-métrages très remarqués dont un qui a valu à leurs auteurs une belle récompense : celle de pouvoir assister à la compétition mondiale des métiers à Londres (« Worldskills »). Caroline Castille, professeur de sciences en immersion anglaise au 1er degré, était de la partie. Curieuse coïncidence : elle y a rencontré un professeur d’électromécanique de l’Institut Saint-Guibert de Gembloux, Franco Bregge, qui a, lui, décidé de participer avec des jeunes à l’Euroskills 2012.

Les lauréats du concours « Demain je serai … » L’an passé, la province de Namur orga-nisait un concours en partenariat avec l’IPIEQ (l’Instance de Pilotage Inter-reseaux de l'Enseignement Qualifiant), afin de valoriser auprès des jeunes et de leurs familles les métiers techniques, technologiques et manuels. Il était demandé aux jeunes de 1ère secondaire de réaliser un court-métrage démontant les préjugés liés à ces différents métiers. La Communauté Educative Saint Jean-Baptiste de Tamines a ainsi pu inscrire les 5 classes de 1ère année, permettant à une centaine d’élèves de s’impliquer dans ce projet au but louable. Sur les 30 films participants au concours en province de Namur, l’école a remporté deux prix. D’abord, le film « Demain je serai … styliste » a été sélectionné par le jury. Ensuite, le prix du public, votant sur le site internet du concours, a été décerné en septembre au clip « Demain je serai … musicien ». Ce sont donc 40 élèves qui se sont retrouvés gagnants d’un voyage à Londres ! Lors de la remise des prix et du visionnage des 11 films lauréats à Namur en septembre, les élèves ont eu la chance de rencontrer la ministre Marie-Dominique Simonet et de lui expliquer comment s’était déroulée la réalisation de leurs vidéos. Ils ont pu ensuite découvrir le programme de leur voyage, et spécia-lement la visite du Worldskills 2011. Tous les deux ans, une ville accueille le

Mondial des Métiers Techniques, où plus de 1.000 candidats, venus de 54 pays dif-férents, s’affrontent pendant 4 jours autour de 46 métiers manuels. Cette an-née, la Belgique présentait 15 candidats. La mission des lauréats du concours était toute trouvée : encourager nos jeunes lors de cette épreuve stressante ! Après un voyage sans encombre malgré une mer agitée, les élèves sont enfin arrivés au centre ExCel de Londres. Sur place, un énorme palais d’exposition les attendait, avec une multitude d’activités prévues pour leur donner un aperçu des métiers techniques, technologiques et manuels de manière ludique. Alors que les filles prenaient part aux ateliers de poterie, au stylisme, à la peinture ou à la création de bijoux, les garçons ont pu découvrir le carrelage, la peinture automobile ou la fabrication de moules en plastique. Autour de chaque atelier, les véritables professionnels se battaient pour remporter une médaille dans leur catégorie ! Les réalisations des compétiteurs en ont ébloui plus d’un : des coiffures aux confiseries, en passant par les travaux de menuiserie, les montages d’art floral ou la composition de cocktails, chaque épreuve était le fruit d’heures de travail intense. Tout au long du parcours, les élèves ont pu apprécier le travail de chacun, repérer et encourager les candidats belges.

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Le lendemain, ils ont pu sillonner le Mondial des Métiers plus calmement et voir le résultat final de plusieurs tâches commencées la veille. Ce n’est qu’en rentrant que les élèves ont appris les résultats : la médaille de bronze en imprimerie a été attribuée à Olivier Deloge, originaire de … Sambreville ! Ce concours ne leur a peut-être pas

encore fait prendre conscience que ces métiers techniques sont des métiers d’avenir à prendre en considération, mais il leur a en tous cas permis de mieux connaître des métiers inconnus et passionnants. Une graine est plantée… En espérant qu’elle fasse son bout de chemin et fleurisse un jour dans les allées du Worldskills !

« Euroskills 2012 » : les jeunes du Collège Saint-Guibert de Gembloux sont sur les starting-blocks ! Atmosphère magnétisante pour une semaine très exclusive. Enthousiasme débordant chez les enseignants, moti-vation sans faille chez les élèves et organisation minutieuse de la direction. Le Collège recevait des professionnels de l’entreprise pour une semaine de colla-boration fructueuse. L’intérêt était double, conseiller l’équipe pédagogique sur les nouvelles technologies et échanger des pratiques, pour préparer de façon pointue des jeunes à la sélection nationale de « l’Euroskills », la compétition européenne des métiers, qui se déroulera cette année dans les superbes infrastructures de SPA-FRANCORCHAMPS. Portés par le succès de leurs prédé-cesseurs, finalistes deux années consé-cutives au concours national Electro-challenge 2009 et 2010, nos jeunes ont décidé, il y a à peine quelques semaines, de tirer profit des nouveaux équipements industriels ultra-performants de la section, les API S7-300 (Automates Program-mables Industriels SIEMENS de la série S7-300), de se lancer dans de nouveaux projets et de relever ce fabuleux challenge, la sélection nationale pour l’« Euroskills 2012». Inscrits au collège, nos élèves bénéficient d’un cadre de travail rigoureux et ouvert à tous les enfants, comme le voulait Jean-Baptiste de La Salle (1651-1719),

fondateur des écoles lasalliennes. Cet éducateur de l’extrême a accueilli les enfants les plus précarisés, ce professeur de l’impossible a approché chaque jeune là où il était et l’a accompagné dans son cheminement personnel, que nous appelons, aujourd’hui, le projet personnel. En accord avec ces valeurs qui interpellent toujours chacun de nous, le collège Saint-Guibert poursuit cette mission dans ses actions éducatives quotidiennes. Il donne ainsi à nos jeunes le meilleur bagage pour s’insérer dans notre société en constante évolution et en perpétuelle mutation. Consciente de posséder un tel héritage et une infrastructure moderne, l’équipe édu-cative use de toute son expertise péda-gogique sur place pour inscrire les inno-vations techniques dans les pratiques de classe quotidiennes. Celles-ci visent une individualisation dans le parcours pédago-gique, dans le projet personnel, dans l’acquisition de nouvelles compétences et dans la maîtrise des savoirs, tout en laissant une large place aux jeunes pour s’exprimer au travers d’activités scolaires ou extrascolaires, que ce soit en groupe dans nos infrastructures ou de manière individuelle au sein des concours régionaux, nationaux ou européens, comme l’« Euroskills 2012 ». Bonne chance à nos jeunes et que le meilleur gagne !

F. Bregge et V. Heureux

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Axel démonte délicatement les connexions pour déplacer le

pylône

Dylan termine les dernières liaisons électriques avant la mise

en service de l’API

Gaêtan reconstitue des nouvelles liaisons pour exploiter les sorties

des API en direct

Arnaud teste les sorties des nouveaux API vers les

actionneurs du banc Festo

Guillaume modifie la platine de montage pour recevoir un nouvel

API S7-300

Dylan met en service son projet « Barrière automatisée » via API S7-300 et une visualisation PC

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25e anniversaire de la fusion entre l’Institut Saint Jean-Baptiste de La Salle et l’Institut de la Sainte Trinité

Ce vendredi 27 janvier, c’était la fête : plus de 180 membres des communautés éducatives de l’Institut Saint Jean-Baptiste de La Salle (Saint Gilles) et de l’Institut de la Trinité (Ixelles) ont partagé un banquet très convivial à l’invitation du Pouvoir Organisateur commun.

C’est un Président de PO très heureux qui a accueilli les convives de l’école secondaire issue de la restructuration des établis-sements secondaires et des trois écoles fondamentales.

Dans une allocution chaleureuse, Marc Bertrand a rappelé les raisons de la fête voulue par le PO. « En 1894, l’Institut de La Salle (enseigne-ment fondamental et moyen) est créé à Saint Gilles par les Frères des Ecoles Chrétiennes. Une école d’enseignement artistique lui est adjointe : l’Institut Saint-Luc. Quasiment au même moment, les Religieuses Trinitaires fondent l’Institut de la Sainte Trinité à Ixelles. Elles reprendront en 1978 la responsabilité de l’Ecole Cardinal Mercier, l’école paroissiale de Sainte Croix à Ixelles. Le chemin de vie de toutes ces écoles ne sera pas facile. En 1947, les Frères veulent fermer l’établissement de Saint-Gilles. Il faudra une vive réaction des parents et des anciens pour redonner un nouvel essor à l’école qui bénéficiera d’une flatteuse réputation en sciences et en mathématiques. Les transformations sociologiques de la démographie à Ixelles et à Saint-Gilles conduisent à une diminution de la population scolaire dans les deux établissements. Des nouvelles normes de maintien d’établis-sement vont amener progressivement les deux écoles secondaires à vivre des difficultés. En 1985, des visionnaires, tant des membres des PO que des directions vont envisager un avenir ensemble et franchir le pas vers une restructuration. En 2000, un PO unique organisant l’école secondaire restructurée et les écoles fondamentales se

fédère autour d’un projet mobilisateur. Vingt-cinq ans après, selon les termes de M. Bertrand, on peut parler d’une opération win-win. Ensemble, les établissements d’enseignement fondamental et secondaire sont plus forts, le PO a des capacités fi-nancières plus élevées. Les 1800 élèves scolarisés sont encadrés avec dévouement et passion par des enseignants et éducateurs animés par une double filiation spirituelle. Il s’agit de mettre debout, d’aider les élèves à devenir des enfants de Dieu. Il s’agit de conjuguer éducation humaine et éducation chrétienne dans la même démarche péda-gogique. Le projet des écoles répond aux défis de notre temps et de la région de Bruxelles : mixité sociale, ouverture aux autres, notamment à ceux qui ont des convictions religieuses différentes, boom démographique, engagement de chaque enseignant, de chaque éducateur à transmettre un savoir, un savoir-faire, un savoir être. En remerciant les religieuses trinitaires pour leur présence et leur réussite dans le développement d’un centre scolaire inspiré de la tradition fondatrice, M. Bertrand a réaffirmé le partenariat avec l’ensemble des écoles lasalliennes, qu’elles soient de Belgique francophone ou du reste du monde. M. Bertrand a félicité enfin chaque membre du PO et des directions pour leur engagement sans faille. Et sans les enseignants et éducateurs qui accomplissent chaque jour des miracles, rien de tout cela ne serait possible. Un travail collectif fantastique, une mission d’éducation et de développement de la personnalité à renouveler chaque jour … A mon tour de féliciter chacun(e) pour cette belle fête réussie !

J-L Volvert

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Institut Saint-Joseph/Sainte-Julienne Liège

Il va pédaler pour les enfants du Sud

Denis Dropsy prépare un raid de 1450 km pour une œuvre du Nordeste brésilien. En juillet prochain, deux semaines après le départ liégeois du Tour de France, Denis Dropsy donnera les premiers coups de pédale d’un "cyclothon" en solo et

pour une belle cause : le soutien au jardin d’enfants fondé à Propria, dans le Nordeste brésilien, par le père belge Etienne Lemaire. Direction l’Espagne, plus précisément la ville catalane de Rosas, sur la Costa Brava. Professeur de sports à l’institut Saint-Joseph Liège, notre cycliste humanitaire, qui a 50 ans et les mollets bien entraînés, se donne neuf jours pour arriver à destination, à quelque 1450 km, ce qui représente une moyenne quotidienne de 160 km. L’an dernier, il avait mis six jours pour atteindre Fontvieille, près d’Avignon, et précédemment, son record s’éleva à 300 km en une journée au cours d’un Milan-San Remo dilettante. "Liège Expo 2017 me soutient dans mon entreprise, nous dit Denis Dropsy. Et si je suis sorti du lot des demandes d’appui, c’est en raison du caractère humble du projet. Ils vont y mettre du culturel, m’imprimer des maillots pour Liège 2017, mais ce n’est pas du sponsoring. Ils vont associer au marketing du Tour de France, qui est l’infiniment grand, quelque chose qui montre ce que des Liégeois peuvent faire mais qui

est, par contraste, infiniment petit". Les mairies des villes d’étape ont également été contactées dans l’espoir d’un écho médiatique.

Le Brésil, Denis Dropsy connaît. Ses deux enfants adoptifs en sont originaires et lui-même y est allé deux fois. Il a pu se rendre compte du travail accompli par le padre Lemaire, sur place depuis 1974. Plus de 500 enfants parmi les plus pauvres sont nourris, lavés, soignés dans sa crèche et son jardin d’enfants, sans subsides publics. "Le Brésil est un pays émergent, mais tout en s’effondrant, explique l’enseignant. J’ai revu la famille d’un de mes deux enfants. Elle est encore plus pauvre qu’en 1996. Ils sont drogués à l’alcool de canne à sucre pour tenir le coup".

Paul Vaute

La Libre, le 07-02-2012

Compte du padre Etienne Lemaire : BE54 0680 6625 8097 (mention "Cyclothon") Pour déduire fiscalement (dons de 40 € ou plus) : Entraide vincentienne, BE97 0000 9747 0549 (mention "Cyclothon - Lemaire")

Padre E. Lemaire

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Lasal-liens

Les différentes acceptions de la notion de mixité sociale à l’école

dans la littérature institutionnelle française

Frère Josselin Tricou

La CoDiDi (Coordination des directeurs de l’encadrement différencié) est composée – comme le nom ne le dit

pas totalement – de directions d’écoles secondaires dites en ‘encadrement différencié’. Lors de son assemblée

générale annuelle organisée le 25 novembre dernier au Collège Pie X

à Châtelineau, il a été question de la mixité sociale. Un thème, comme

l’a rappelé Marc Verkoyen, directeur à l’Institut Saint Jean-Baptiste

de La Salle à Bruxelles et Président de la CoDiDi, qui est souvent

abordé par les médias et les politiques.

Lors de l’Assemblée Générale de cette année qui a réuni une trentaine

de directions, un intervenant extérieur avait été invité, le Frère

Josselin Tricou, un Frère français des Ecoles Chrétiennes. D’où

l’invitation qui nous avait été faite de venir l’écouter.

Le Frère Josselin Tricou, actuellement professeur de philosophie à Sarcelles, dans un quartier défavorisé où se regrou-pent de nombreuses ethnies, connaît bien le sujet, au centre de la thèse en sociologie qu’il est en train d’élaborer. La mixité sociale à l’école ? Selon lui, un concept souvent un peu creux, formulé récemment, mais aussi une problématique multidimensionnelle.

Il constate, d’abord, en France, que cette nouvelle formulation de la question sco-laire tient à trois facteurs. Le premier vient du glissement dans les années 1980-1990 de l’inégalité sociale à la mixité sociale. Si jusque-là, on pensait que les classes sociales étaient inégales face à la réussite scolaire, l’on en arrive à penser que la tonalité sociale de chaque établissement joue un rôle à ce niveau. C’est le recul de « la foi républicaine » s’appuyant sur 2 piliers : l’insertion de chaque jeune dans la citoyenneté et l’égalité des chances. Lorsque le système était centralisé et que les établissements n’étaient que des exécutants, l’offre scolaire était la même partout. Dans les années 70, chaque élève s’inscrivait dans un établissement proche géographi-quement ; si les parents n’étaient pas d’accord, ils n’avaient comme alternative que de déménager ou de choisir une école privée. Mais, vers 1989, il s’instaure un contrat entre le système éducatif et les parents qui pourront désormais opter pour

l’école de leur choix : avec l’attitude de consommateurs, ils comparent alors les établissements …

Un second facteur tient à la crise de grands ensembles urbains : certains éta-blissements, comme ceux de Sarcelles qui concentrent des populations démunies, sont laids et moins performants, sont soi-gneusement évités par les classes moyennes. Enfin, l’on constate le recul d’une lecture savante de l’espace scolaire en termes d’inégalités sociales et de rap-ports de classes. Dans les années 60, les statistiques nationales laissaient simple-ment à penser que les inégalités sociales étaient en lien avec la réussite ou l’échec scolaire ; des études scientifiques attes-tent aujourd’hui que la mixité sociale fa-vorise la réussite des plus faibles. Ainsi, la réussite ou l’échec scolaire serait dû pour 40 % au milieu d’origine, mais aussi pour 30 % à l’offre scolaire et pédagogique. Les classes de niveaux sont désormais très décriées.

La mixité sociale est aussi une notion très floue. Ce terme, emprunté à la sociologie urbaine, est apparu en France dans les textes politiques en 1987, mais l’expres-sion s’est très vite réduite à un slogan. Comment la mesurer ? Avec quel étalon ? Celui d’un idéal politique ? Mais quel est-il ? C’est aussi souvent une notion en creux : on parle de mixité sociale quand on constate une ségrégation. Et c’est aussi

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très relatif : tout dépend de l’établisse-ment dans lequel on se trouve … Enfin, parle-t-on de mixité sociale au sens ethnique ? Vise-t-on la mixité filles/ garçons ?

Ensuite, l’aspect multidimensionnel de la mixité sociale a été abordé. Lorsqu’on par-court les lois françaises, l’on s’aperçoit, en effet, qu’elle peut prendre 6 sens différents. • L’on peut, au travers de l’expression,

faire allusion à la coexistence entre groupes sociaux et/ou ethniques, ce qui cadre avec l’idéal républicain de la plu-riculturalité. Mais, alors que l’on met l’accent sur le collectif, sur la constitution d’une seule et même cité, l’on reconnaît déjà une certaine altérité. Dans ce cadre, l’école devient un sanctuaire, une sorte d’antichambre idéale de ce que devrait être la société.

• Il peut aussi s’agir de mettre en évidence un enjeu de socialisation : la mixité sociale permettrait par exemple d’apprendre à vivre avec des maghrébins, avec des noirs, d’accepter l’autre avec ses différences. Mais qui accueille l’autre ? Dans la banlieue parisienne défavorisée, quand accueille-t-on des bourgeois ?

• Dans un autre registre, la mixité sociale serait un principe de justice scolaire, un moyen de lutter contre les discrimina-tions, de traiter tous les élèves de façon égale. Mais quand un élève est-il dis-criminé ? Quels sont les critères ? Les établissements les moins performants sont ceux qui regroupent 80 % de maghrébins, où l’on rencontre moins d’agrégés, où le corps professoral est peu stable : ce manque de performances est-il quasi mécanique ou intentionnel ? Ne soyons pas dupes, comme enseignants : très souvent, nous estimons qu’un élève qui a du potentiel est un élève gentil …

• A moins que l’on n’avance l’idée de la qualité de l’éducation reçue, comme le font les célèbres enquêtes Pisa … mais c’est très subjectif. Il s’agit avant tout d’une représentation de ce que nous pensons être la qualité éducative. Aux USA, on a déplacé des élèves noirs dans des quartiers blancs. L’on a alors constaté, qu’au lieu d’aider ces élèves de quartiers défavorisés, cela avait des effets très délétères sur leur estime de soi.

• Pourquoi ne pas également faire un lien

avec les conditions d’apprentissage ? La mixité sociale favoriserait l’acquisition des savoirs scolaires. Mais, même si croire dans l’avenir de chacun des élèves aide à leur réussite, ce n’est pas si simple : encore faut-il ne pas réduire ses exigences et veiller à ce qu’il y ait un réel « panachage ». Une trop forte proportion de bons élèves fera que la minorité d’élèves plus faibles risque de ne pas se sentir bien …

• La mixité sociale peut enfin se révéler être une injonction institutionnelle. Or, elle doit rester un moyen, non une fin.

En conclusion, tout joue contre la mixité sociale, à commencer par nos repré-sentations (celle du bon élève, par exemple). Si on la veut, cela implique pour le chef d’établissement de mener une politique très volontariste, de réunir tous les acteurs autour d’un projet, tout en diversifiant les cursus, et d’être sans cesse vigilant. La force de l’enseignement catholique : valoriser les valeurs qu’elle porte, en faire une « vitrine »

Quelques idées décapantes • « Même si on prend les meilleurs de la

banlieue et qu’on les forme comme élite, ils devront toujours prouver qu’ils sont les meilleurs. »

• « Donner plus à des établissements qui ont moins … cela peut contribuer à les stigmatiser davantage. »

• « Dans des établissements « difficiles », on n’a pas besoin d’enseignants mieux payés, mais de professeurs expéri-mentés (la qualité des enseignants, globalement, s’améliore avec l’âge) ; on a besoin de ceux qui, parce qu’ils connaissent bien la culture des banlieues, peuvent être en empathie, mais aussi de ceux qui ont une autre culture. »

• « Au niveau mondial, différents sys-tèmes éducatifs, plus ou moins libé-raux, existent : évitons là aussi les a priori. Un système très sectorisé comme celui de la Corée du Sud fonc-tionne mieux que celui de la France ; certains systèmes très libéraux, basés sur la libre concurrence, ne fonction-nent pas trop mal … »

Anne Oger

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Journée de ressourcement du 29 novembre 2011

Accompagner les jeunes dont le comportement nous perturbe à la lumière de l’Evangile …

Une seconde édition que cette rencontre entre les profs-relais de nos écoles secondaires lasalliennes, ce mardi 29 novembre au Mont de La Salle, à Ciney. Organisée par la commission pastorale, elle avait à nouveau pour thème une problématique très en lien avec notre projet pédagogique et d’une brûlante actualité : « Comment réagir, dans une école lasallienne, face à des élèves dont les comportements nous désorientent ou nous perturbent ? Comment nouer ou conserver une relation avec ces élèves qualifiés souvent de difficiles, parce qu’indifférents ou hostiles au monde scolaire ? Comment, éventuellement concevoir la sanction ? » Nous avions fait appel à Véronique Sarda, responsable de la pastorale dans les écoles lasalliennes françaises, pour nous livrer son éclairage et nous faire mieux découvrir le vécu d’un pays proche, géographiquement et linguistiquement. Une façon aussi de mieux prendre conscience de la dimension internationale du réseau. Une trentaine de représentants de nos écoles avaient fait le déplacement, y compris des directions qui avaient eu le souhait et l’opportunité de participer.

Le temps du ressourcement

Un premier moment fort, autour d’un passage-clef de l’Evangile : celui de la « brebis perdue » (Luc 15, 1-9) et d’une phrase-clef : « Réjouissez-vous avec moi, car j’ai retrouvé celui qui était perdu » (Mt 18). Quelques phrases fortes recueillies lors du temps de méditation :

Le temps pour mieux se connaître Il avait été demandé à chacun d’amener un objet qui le caractérisait : une occasion de

se dévoiler d’abord en petits groupes, avant un partage en plénum.

Le temps de la réflexion

Selon V. Sarda, le monde réel, celui dans lequel se trouvent les jeunes, est le même dans nos écoles lasalliennes de France et de Belgique, même si le mode de fonction-nement est quelque peu différent en France. Par exemple, à côté des 123 établissements lasalliens, de taille très variable, placés sous une tutelle Frères-laïcs, l’on trouve aussi des centres d’accueil pour des jeunes en rupture. Cependant, nous partageons les mêmes convictions et nous nous demandons comment les faire vivre.

Être en prise avec le monde réel Le monde de Dieu est le monde des hommes. C’est dans ce monde-là que nous avons mission d’éduquer. Il s’agit d’un monde en crise, mais il y a là une opportunité pour redonner du sens à nos pratiques à la lueur de notre foi. Prenons donc acte de la réalité des jeunes, mais acceptons de nous laisser interpeller, bousculer, et d’élargir notre regard, pour pouvoir accueillir, imaginer, innover. Nous ne pouvons changer la situation : elle

Tableau d’Arcabas, La brebis perdue

« Allumer une lampe … recevoir le jeune, l’écouter, écouter sa violence, le reconnaître dans ses blessures. »

« Avec toi, Seigneur, qu’il me soit donné d’être un éveilleur de sens, avec une parole juste et forte. »

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est ce qu’elle est. Nous assistons aujourd’hui à trois grands bouleversements anthro-pologiques. Ce que nous pouvons modifier, ce n’est pas ce donné, mais nos attitudes, notre capacité à accueillir. Des propos interpellants « Le drame du XXI

e siècle, c'est le drame de

l'isolement, y compris dans les lieux collectifs. Nos

systèmes éducatifs ont tendance à protéger leur

confort en faisant en sorte que quand les choses ne

vont pas, on exclut, plus que l'on n'inclut. (...)

Comment éduquer les enfants qui sont en rupture

familiale ? En rupture éducative ? En migration ? En

rupture territoriale, car ils sont dans la rue ? La vraie

question, c'est de savoir si notre système nourrit ces

ruptures ou réduit ces ruptures ? »

Jean-Paul Delevoye, congrès BICE-UNECO, 2011

V. Sarda nous a fait entendre un extrait de l’intervention de J.-P. Delevoye1 lors d’un Congrès de l’UNESCO sur la thématique suivante : « Comment éduquer et accompa-gner des jeunes en rupture sociale et familiale? ». Selon elle, il nous questionne sur le fondement de nos convictions : « Quelles réponses éducatives pour les questions d’aujourd’hui ? Notre système nourrit-il ses ruptures ou les réduit-il ? Que faisons-nous pour optimiser les talents ? Pour montrer à chaque élève de quoi il est capable ? » Selon J.-P. Delevoye, nous avons commis deux grosses erreurs en matière éducative. Nous avons préféré un système concur-rentiel d’acquisition des connaissances, plutôt que de nous centrer sur le « savoir comment connaître » et, nos décisions étant souvent prises dans la dictature de l’urgence et des émotions, nous n’avons pas, à l’école, chercher à développer le sens critique des jeunes pour éveiller leur conscience, aller vers une réelle liberté de choix.

En conséquence, parce que l’accent a été mis sur « Tu dois apprendre », parce que la plupart des élèves sont placés devant leurs échecs, et non devant leurs capacités, ils se sont protégés en dévalorisant la réussite scolaire. Celui qui réussit est pointé du doigt, car inclus dans un système auquel les autres ne veulent plus adhérer. Ce qu’il préconise ? Aider les élèves à retrouver la fierté d’eux-mêmes et inverser le rapport d’autorité : passer du devoir d’apprendre à l’amour d’apprendre. Mais il

faut, pour cela, éviter une confrontation, voire un choc culturel entre la famille et l’école et dialoguer avec les parents. Sinon, le jeune fera souvent le choix de contester le système scolaire et de ne pas s’y intégrer.

Trois bouleversements anthropologiques V. Sarda explicite alors quelques grands changements qui touchent particulièrement les jeunes. 1. Le rapport au temps • Les jeunes sont incapables de considérer

l’avenir : dans une société en crise marquée par le chômage, où l’acquisition de diplômes ne suffit plus à garantir la réussite sociale, comment se mettre en projet ?

• Ils sont dans l’immédiateté. En situation d’échec, ils cherchent à se déplacer dans un autre lieu pour éviter une confrontation directe avec la réalité. Comme ils sont peu capables d’affronter les frustrations, ils les intériorisent.

2. Le rapport à l’autorité • Beaucoup de jeunes ne transgressent

plus rien, car les limites ne sont pas posées clairement. Les paroles ne suffisent pas, sont souvent en contradiction avec ce que la société montre et l’autorité légitime ne vient que de l’expérience.

• Il n’existe plus de différenciation claire entre le jeune et l’adulte. Ce dernier, quand il rentre chez lui après une journée éprouvante, n’a pas envie de donner des balises, d’éduquer, car il craint la confrontation avec le jeune. Ce qu’il recherche ? Le cocon, le fait d’être bien ensemble.

3. Le rapport au réel • Beaucoup de jeunes ont accès à

l’information (Internet), mais quels outils

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ont-ils pour faire le tri ? Comment restituer l’information ? Comment argumenter ?

• L’écran fait souvent écran : les jeunes font peu l’expérience de la vraie réalité, d’autant plus que les adultes essayent de leur éviter tout ce qui fait mal.

Quelques pistes … Comme construire avec les jeunes le Règlement d’Ordre Intérieur, recourir au monitorat/tutorat pour montrer leurs talents, leur donner des responsabilités. Une grille de relecture de nos pratiques à la lumière de l’Evangile V. Sarda avait choisi le passage bien connu des « compagnons d’Emmaüs » (Luc, 24, 13-35). Elle nous a demandé d’oublier ce que nous savions sur ce texte et de porter sur lui un regard neuf, en le découvrant au mot à mot : quelles attitudes du Christ pour éduquer, enseigner ? Que provoquent-elles ? Comme éducateur chrétien, se mettre à l’écoute de la pédagogie du Christ peut être éclairante, tout en gardant à l’esprit les trois changements de paradigme évoqués plus haut. Que découvrons-nous ? Tout d’abord, Jésus se pose là et se met en mouvement ; il n’est pas connu, ni reconnu, il chemine à côté des disciples. Il s’intéresse à ce qui les préoc-cupe, les questionne et leur laisse ainsi un premier espace de liberté, de façon à ce que les deux hommes expriment aussi leur ressenti, leurs émotions.

Certes, à un moment donné, il fait preuve d’autorité, il les recadre …, mais nous sommes à plus de la moitié du texte. Et lorsqu’il se met vraiment à enseigner, il ne cherche pas à livrer des connaissances, mais à mettre en évidence leur sens. Puis il fait signe de partir et les met face à leur responsabilités : les disciples lui deman-dent de rester ; son autorité est désormais reconnue et sa présence légitimée. Après deux heures, suite à un geste et à une parole de Jésus qui font écho en eux, les disciples vont enfin le reconnaître ; ils font alors du lien, relisent leur vécu et lui donne un sens. Puis Jésus devient invisible : l’espace de liberté est complet. Les deux hommes comprennent qu’il n’y a rien à Emmaüs, il leur faut retourner à Jérusalem, pour raconter ce qu’ils savent et faire valider leurs connaissances. En suivant l’exemple du Christ, l’enseignant permettra aux jeunes de s’exprimer, il leur laissera de vrais espaces de liberté, afin qu’ils deviennent autonomes. Et de nous interroger : « Quand prenons-nous ce risque ? » Il aidera également les élèves à donner du sens à leurs savoirs, mais en leur laissant le temps de se l’approprier, de discerner et de comprendre. Des échos de la rencontre lasallienne à Madrid en août dernier Pour rappel, trois de nos jeunes enseignants avaient participé à cette rencontre organisée par la RELEM (Région Lasallienne Europe-Méditerranée), afin de mieux découvrir le charisme lasallien, tout en ayant l’oppor-tunité de participer aux JMJ. Deux d’entre eux ont livré un bref témoignage de ce qu’ils avaient vécu à Madrid. Une expérience très riche qui semble les avoir marqués profondément. Un temps de convivialité La journée s’est achevée par un petit goûter … Un dernier moment d’échanges, pour exprimer la joie d’avoir partagé des moments forts et la promesse de se revoir l’an prochain.

Anne Oger

1 http://www.dailymotion.com/video/xktop3_congres-du-bice-a-l-unesco-partie-1-intervention-delevoye_news

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Nos parcours d'excellence! Nos parcours d'excellence! Nos parcours d'excellence! Nos parcours d'excellence! Voilà une expression que nous rencontrons de plus en plus souvent. Elle est parfaitement claire en français. Elle s'est lentement imposée comme un équivalent traduit d'une expression qui apparaît massivement dans les projets éducatifs, ou ses équivalents, aux États-Unis. Les parents cherchent, et devraient trouver, chez nous bien sûr, une « excellente éducation ». Il est légitime de vouloir atteindre l'excellence : qualité des programmes, bonne marche de l'établissement scolaire, professeurs « performants », 100 % de résultats aux examens. Qui voudrait la médiocrité ? Mais que voulons-nous dire exactement lorsque nous prétendons offrir un parcours d'excellence aux élèves qui fréquentent nos établissements ? Ne tombons-nous pas parfois dans le langage commercial racoleur pour faire impression et remplir les classes ? De quelle excellence s'agit-il ? Parlons-nous d'un programme complet au contenu tellement riche et accessible qu'il conduirait tout droit à la réussite à l'examen final et à un emploi sûr et durable ? Ce ne serait déjà pas si mal dans les circonstances actuelles. Est-ce suffisant dans une école lasallienne ? Notre sensibilité héritée de la vivante tradition lasallienne ne saurait se satisfaire de ce genre de programme ou d'expression. Nous risquerions, en effet, d'oublier, pour un effet de mode, l'at-tention à chaque élève, en particulier au plus faible, la formation du citoyen appelé à vivre en société, la formation du chrétien, appelé à entrer et à s'engager dans ce grand vaisseau qu'est l'Église. Si nous parlons d'excellence, nous devons inclure la dimension morale et spirituelle. Et là aussi, parler de « parcours » signifie

proposer des étapes adaptées, successives et de plus en plus exigeantes. Le cours de morale de base qui en reste au consensus mou de la non-agression est insuffisant. On peut aussi, et c'est déjà mieux, chercher à former une personne sage, et même généreuse, mais qui se garderait de trop s'engager personnellement, craignant de s'y perdre ou de devoir affronter les questions essentielles et l'inconfort de la recherche spirituelle. Il y a enfin un parcours bien pensé, et préparé par l'école et les familles, qui propose d'ouvrir les cœurs et d'y « mettre le feu ». Il ne s'agit pas de sentimenta-lisme romantique, mais de donner l'occa-sion de comprendre ce qui anesthésie ou rétrécit l'homme, en éduquant à la compassion qui conduit à l'engagement en faveur de l'autre, au service. L'école chrétienne, dans la tradition lasallienne, doit aller jusque-là : provo-quer la prise de conscience, puis l'enga-gement solidaire, passer du sentiment de compassion à la passion de l'engagement. Réfléchissant alors avec les jeunes, nos élèves, sur le service dans lequel ils s'engagent, nous pouvons et devons parler de Jésus, afin qu'il ne reste pas le « jamais nommé », le grand absent de nos conversations. Son « parcours », si on peut s'exprimer ainsi en parlant de lui, inclut « la passion ». Notre école La Salle sera excellente si nous rendons les jeunes sensibles aux besoins d'aujourd'hui et si, avec des adultes eux-mêmes passionnés, ils s'en-gagent à y répondre. Prétendre à l'excellence dans les parcours proposés pourrait bien signifier ce que l'on n'avait ni compris ni prévu au commencement !

Frère Claude Reinhardt Conseiller général

de l'Institut des Frères des Écoles Chrétiennes La Salle Liens International n° 78 - décembre 2011

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Tout le monde en parle

Des CEFA pour redonner le goût d’apprendre LES CEFA : des réalités souvent méconnues … A quoi servent-ils ? Quel public accueillent-ils ? Quelles sont leurs réussites ? Leurs difficultés ? … Nous avons voulu rencontrer le 7 février dernier 3 coordinateurs de CEFA en lien avec un PO lasallien (sauf celui de Gosselies dans la zone Hainaut-Sud) et un accompagnateur d’un de ces CEFA. Nous voulions en savoir plus, mieux comprendre ce qu’ils vivent, de façon à pouvoir nous-mêmes mieux vous informer, car l’orientation positive du jeune se construit souvent en conseil de classe. Lors de cette rencontre organisée à St Luc/Mons, nous avons beaucoup appris ou réappris et nos interlocuteurs ont apprécié de pouvoir prendre un moment de recul et d’échanger sur leurs pratiques. Des moments riches, un travail au service des jeunes les plus fragilisés qui mérite d’être salué et reconnu.

Avant de leur donner la parole, un bref rappel de quelques données essentielles …

Les CEFA, toute une histoire …

L’histoire des CEFA est jalonnée de trois moments marquants. En 1984, naissent les Centres d’Enseignement à Horaire Réduit (CEHR). En 1991, un nouveau décret organise les Centres d’Education et de Formation en Alternance : le volet entreprise est devenu indispensable. En 2001, des nouvelles modifications sont introduites visant à l’obtention des mêmes qualifications que l’enseignement de plein exercice ou à l’obtention de qualifications spécifiques à l’alternance. Les CEFA, un dispositif structurel

Le CEFA est une structure commune à plusieurs établissements secondaires organisant de l’enseignement qualifiant (au 3e degré) et/ou professionnel (2e et 3e degrés). Il y a donc un établissement siège et des établissements coopérants (enseignement ordinaire, spécialisé ou promotion sociale). Les différents acteurs de l’alternance

Outre le Conseil de Direction, il y a un coordonnateur, un accompagnateur, le formateur de formation générale, le formateur de cours techniques et de pratique professionnelle, l’agent PMS, le

tuteur en entreprise et, bien sûr, le jeune et ses parents. Le Conseil de Direction est composé du coordonnateur et des directeurs des écoles coopérantes. Il s’occupe de la gestion collective du CEFA, répartit les moyens et prend les décisions concernant toutes les ouvertures, fermetures et maintien d’une formation en alternance dans les écoles coopérantes. Le rôle de l’accompagnateur

L’accompagnateur négocie le contrat entre l’entreprise, le formateur, le jeune et lui-même. Il écrit le cahier des charges avec l’entreprise, le plan de formation, l’horaire, la mobilité du jeune, sa rémunération, les critères d’évaluation. Il évalue le travail en entreprise. Les CEFA, un partenariat dans l’élaboration de la formation

Le législateur a prévu deux journées de formation au CEFA et trois journées en entreprise : soit 600 périodes de cours (FG, CT, PP) auxquelles on ajoute 600 heures de formation en entreprise. C’est un principe général, car on peut aussi partir d’un minimum de 450 heures en entreprise auxquelles s’ajoutent X

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périodes de formation complémentaire à définir. Deux filières

On parle désormais d’Article 49 lorsqu’il est question de certifications et de qualifications identiques au plein exercice et d’Article 45 lorsqu’il est question de qualifications spécifiques. Pour les Articles 49, les intitulés sont les mêmes que ceux des options groupées du plein exercice et on obtient les mêmes certifications (CE2D, CE6P, CESS à la fin

d’une 6 TQ ou de la 7P). Quant aux Articles 45, les intitulés sont différents et les formations débouchent sur l’obtention d’un CQ spécifique. Pour les jeunes qui ne sont pas prêts à entrer en formation, il existe un module de formation individualisé destiné à travailler avec chacun d’eux le projet personnel et professionnel et à remettre à niveau leurs compétences.

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Christiane Bienfait, psycho-sociologue de formation, a assisté à la naissance et à la mise en place des CEFA en 1985 ; elle coordonne aujourd’hui celui de Mons ; Pierre Hardy, un instituteur qui a accumulé des expériences diverses (dans les ateliers marolliens, puis en IPPJ …), s’occupe du CEFA de Tamines depuis 2 ans. Quant à Bruno Galloy, un instituteur lui aussi, il a travaillé dans différents CEFA avant de se trouver à la tête de celui de Gosselies, lié depuis 2001 à d’autres implantations, dont celle d’Erquelinnes, gérée par Laurent Scohy, professeur d’histoire et de français1.

Les CEFA (Centre d’Education et de Formation par Alternance) se répartissent par zones ; créés pour des jeunes de 15 à 25 ans qui veulent très vite apprendre un métier sur le terrain, ils fondent leur enseignement sur 2 jours de cours à l’école et sur un stage de 3 jours en entreprise. Celui de Mons, qui travaille avec 6 autres établissements coopérants de la région, propose 18 options : certains intitulés sont identiques à ceux du plein exercice (les Art.49), par exemple la

formation de vendeur ou d’ouvrier-carreleur ; d’autres, comme « auxiliaire de magasin », visent à donner une petite qualification (les Art.45). A noter l’existence de « Tremplin », un module individuel de formation permettant au jeune de réfléchir pendant 2 ou 3 mois à son projet personnel et professionnel. Sur le site même de Mons, on ne compte pas moins de 165 élèves, répartis en petits groupes (de 8 à 10 élèves) : les sections « maçonnerie » et « vente » ont dû être dédoublées. Le CEFA de Gosselies (130 jeunes sur le site même, 65 à Erquelinnes … sans compter ceux des autres établissements coopérants) propose principalement des Articles 45, plus faciles à ouvrir : c’est ainsi que l’option « Métallier » vient d’être créée à Erquelinnes. Une exception : un Article 49, à Gosselies même, l’option « Vente », au niveau supérieur. A Tamines, le CEFA se trouve sur le site même de l’école secondaire (Communauté éducative Saint Jean-Baptiste) et n’a pas d’infrastructure professionnelle. Le public étant très fragilisé, il n’est proposé que des options Art.45. Ces options sont-elles en lien avec les métiers en pénurie? Non, elles sont souvent le fruit d’un passé. Par exemple, à Erquelinnes, les premières options (électricité, mécanique) permet-taient aux jeunes quittant l’établissement des « Arts et métiers » de poursuivre la formation entamée. D’autres corres-pondent à des profils particuliers : cer-tains, par exemple, aiment se trouver à l’extérieur, d’où des options comme « ouvrier jardinier », « ouvrier en

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implantation et entretien des parcs et jardins » … il est toutefois dommage de constater que des métiers porteurs, comme celui d’ardoisier-zingueur, n’atti-rent pas les jeunes. En bref, les CEFA essayent d’offrir une palette d’options la plus large possible, pour satisfaire un public très changeant et peu sûr de ses choix. Quel type de jeunes rencontre-t-on dans les CEFA ? Le public est différent d’une région à l’autre. La situation est d’autant plus complexe que certains arrivent au CEFA après un premier degré ou après une 3P, tandis que d’autres n’ont fréquenté l’école que quelques mois entre 12 et 15 ans, voire souffrent d’une réelle phobie scolaire … Et si des jeunes arrivent avec un esprit positif, convaincus que le CEFA est la forme d’enseignement qui leur convient pour obtenir une bonne qualification, d’autres sont à socialiser et à scolariser, car victimes de nombreuses blessures familiales (jeunes mis à la rue, parents démissionnaires ou n’apportant aucun soutien) et/ou scolaires (problèmes rela-tionnels avec les enseignants, renvoi d’établissements traditionnels ou désin-tégration lente). Une partie du public vient aussi d’IPPJ : ces jeunes cherchent à gagner rapidement de l’argent, mais sans mesurer les contraintes du monde du travail. En tout cas, l’entrée dans un CEFA se fait de plus en plus tôt, vers 15 ans, ce qui est inquiétant. Quels sont les objectifs poursuivis ? Les CEFA ont vu le jour, au départ, pour garder les exclus du système scolaire jusqu’à ce qu’ils atteignent leur majorité, mais d’autres objectifs visés aujourd’hui sont beaucoup plus constructifs : leur apprendre à renouer une relation, en acceptant une autorité bienveillante ; leur redonner goût à l’apprentissage ; les aider à se construire une identité positive. Quelles sont les principales difficultés rencontrées ? • Comment éviter le décrochage qui

touche 20 % des jeunes des CEFA, comment ne pas y reproduire ce qui existe dans l’enseignement

traditionnel ? • Comment concilier les demandes des

jeunes et celles des entreprises (par exemple, l’obligation d’être ponc-tuel) ? Les professionnels des CEFA se sentent écartelés … d’autant plus qu’ils n’ont que 6 mois pour préparer l’entrée dans l’entreprise.

• Comment articuler le travail en entreprise et à l’école ? Pour ces jeunes, le monde de l’entreprise c’est le vrai monde, alors que l’école, c’est le lieu où on vient jouer et s’amuser avec les copains. Un exemple en ce qui concerne l’utilisation de drogues : selon eux, l’on ne peut être « défoncé » sur un chantier, mais au Centre, c’est différent …

• Face à l’absentéisme, comment réagir ? Les absences doivent être déclarées : c’est facile si le jeune ne s’est présenté ni en entreprise, ni au centre. Mais s’il est allé en stage, faut-il lui enlever sa qualification, parce qu’il n’a pas suivi la formation, alors qu’il a démontré sur le terrain qu’il avait des compétences ?

• Comment ne pas créer « un apartheid pédagogique », selon l’expression de P. Hardy, entre l’enseignement de plein exercice et les CEFA ?

• Comment aider ceux qui n’ont que 15 ans à réfléchir et à choisir un métier dès leur inscription, puis à trouver un lieu et un endroit de stage … ?

• Un CEFA sur le site d’une école secondaire, un avantage ? Cela évite de renforcer l’exclusion, mais comment y faire appliquer un autre règlement, plus large que celui de l’établissement qui l’héberge ?

• Une mise au vert avec ces jeunes est parfois nécessaire, mais elle comporte des risques (vols, détériorations de biens …)

• Comment réagir lorsque la famille casse le jeune, le démotive, par exemple en lui soutirant tout l’argent gagné en entreprise ?

Des réussites … Aller jusqu’au bout de la formation (2 ou 3 ans) constitue un bon passeport pour l’emploi, même si l’euphorie n’est pas toujours de mise : tout dépend de la région et de l’option. A Erquelinnes, la situation est plus favorable qu’à Mons et

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un maçon trouvera plus vite du travail qu’un vendeur. L’on constate aussi, en fin de parcours, une évolution de ces jeunes au niveau relationnel : quand la famille n’a pas joué son rôle, le chef d’entreprise, voire le personnel du Centre peut cadrer le jeune, lui donner des repères. Dans d’autres cas de figure, un accompagnateur va dialoguer sur place avec la famille, avec des résultats souvent encourageants. Faut-il accentuer la formation de base ? Les élèves ne sont pas demandeurs. De plus, les cours ne se déroulent que 2 jours/semaine : la focale est donc placée sur le qualifiant. Enfin, si le tronc commun est essentiel pour la dignité sociale, encore faut-il qu’il soit praticable et qu’il ne soit pas pénalisant. Et qu’en est-il des contacts avec le monde l’entreprise ? Les CEFA disposent de moyens humains pour nouer des contacts avec de nom-breuses entreprises, des PME. Finan-cièrement, engager des jeunes du CEFA est intéressant pour elles : chacun ne leur coûte que 1,20 euro/heure. Il n’en reste pas moins qu’entre le Centre et l’entre-prise, les relations sont généralement bonnes, beaucoup de patrons sont très humains et prennent bien en charge leurs stagiaires. Que penser de la formation continuée du personnel ? La formation à l’accompagnement (coaching, estime de soi) est très bien pensée. Les référentiels pour les art.45 ont été présentés et, au niveau des

pratiques professionnelles, le CECAFOC offre pas mal de possibilités. Ce qui est aujourd’hui en débat … • Les CEFA disposent actuellement de

moyens financiers suffisants, mais qu’en sera-t-il à l’avenir ? Les subsides émanent certes de la Communauté française (pour les élèves), mais aussi de l’Europe (pour le personnel) et de la Région Wallonne (pour les contrats). Or ces deux dernières instances vont diminuer leur aide … alors que, pour « récupérer » certains jeunes, des moyens humains conséquents sont indispensables.

• Les CEFA sont en attente d’un contrat unique pour l’insertion en entreprise, ce qui les mettrait sur un pied d’égalité avec l’IFAPME (où les stages se déroulent sur 4 jours et les cours sur une seule journée)

• La CPU, applicable aux CEFA ? Ce ne serait pas mal venu, car le travail mené y ressemble déjà (utilisation de modules) ; seuls certains profils, trop petits, devraient être revus.

Pour un CEFA idéal … La noblesse du CEFA, c’est de réussir à donner de bonnes qualifications : dans cette perspective, le stage en entreprise avec tutorat devrait être obligatoire. En ce qui concerne les formateurs, il serait bon de penser davantage à leur mobilité : même s’ils sont motivés, la fatigue se fait plus sentir avec le temps. Enfin, tout un travail doit être réalisé en amont, et cela dès la maternelle, pour donner à l’école une identité positive, mettre en place des remédiations efficaces et lutter contre le décrochage.

Anne Oger et Jean-Louis Volvert

1 Pour les contacter : [email protected]; [email protected]; [email protected]

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La certification par unités : où en est-on ?

D’aucuns attendaient une réforme majeure dans l’enseignement qualifiant. Une réforme qui allait donner un regard positif sur cet enseignement et qui allait permettre une lutte efficace contre le décrochage. Aujourd’hui, dans la foulée d’une recommandation européenne qui promeut le système ECVET, il s’agit d’organiser au sein de l’Europe le transfert de crédits, leur reconnaissance et leur capitalisation, afin d’accroitre la compatibilité entre les différents systèmes d’enseignement et de formations professionnels. Au cours des années scolaires 2011-12 et 2012-13, une expérience pilote appelée CPU (Certification par Unités) vient de se mettre en place dans la Communauté Wallonie-Bruxelles. Elle concerne les options de base groupées du 3° degré de deux secteurs professionnels : les métiers de l’automobile (technicien de l’automobile et mécanicien automobile) et le métier de l’esthétique (esthéticien[ne]). Dès septembre, deux écoles lasalliennes (sur 15 de notre réseau) ont adopté les référentiels de formation expérimentaux et préparent un plan de mise en œuvre de la CPU pour le 1er septembre 2012. Lors de la dernière trimestrielle, nous avons demandé aux directions de l’EAME à Erquelinnes et de Saint-Luc à Mons de nous décrire leurs premiers pas dans la réforme. Un tout grand merci pour leur aide.

La CPU : derrière cette abréviation, que se cache-t-il ? Une réalité qui obsède certaines de nos directions, alors qu’elle en intrigue d’autres ? … Pour en avoir une vision plus précise et plus nuancée, lors de notre trimestrielle du 1er février dernier, la parole a été donnée à des représentants de deux de nos écoles qui se sont engagés dans la Certification Par Unités (CPU) : les Arts et Métiers d’Erquelinnes, pour les options « esthéticienne » (enseignement qualifiant) et « mécanicien automo-bile » (enseignement pro-fessionnel), ainsi que l’Institut Saint-Luc, à Mons (mécanique automobile). Eric Debacker, directeur des Arts et Métiers, et Christophe Moreau, un enseignant très engagé dans le projet pilote, nous ont d’abord éclairés sur le concept, à savoir le découpage du 3ème degré en six unités d’acquis d’appren-tissage (UAA), axées chacune sur un module, en lien avec une situation d’apprentissage. L’ordre des modules est déterminé en mécanique automobile, mais ce n’est pas le cas en esthétique. Une évaluation des compétences, avec un jury extérieur, a lieu à la fin de chaque

module ; en cas d’échec, la remédiation est impérative et immédiate … Cependant, si l’échec persiste, cela ne remet pas en cause le passage dans l’année suivante. Chaque établissement peut, s’il le veut, aménager sa grille horaire, une latitude qu’Erquelinnes n’a pas prise.

Entrer dans une telle expérimentation est con-traignant : un dossier d’apprentissage doit être constitué pour chaque élève ; il reprend ce qui est attendu, le planning, le relevé des situations d’apprentissages, les grilles d’évaluation … En parallèle, le jeune constitue son portfolio rebaptisé passeport de compétences,

qui reprend toutes les évaluations, même formatives. Il importe aussi de concevoir des situations d’intégration et de remanier le bulletin … Pourquoi alors l’école s’y est-elle engagée ? Ce sont quelques enseignants qui, après une réunion d’informations à Louvain-la-Neuve, ont poussé la direction à tester la CPU. C’était, pour l’établissement, une manière d’anticiper un mouvement qui se généralisera et de s’y préparer, en profitant d’un accès

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prioritaire aux plans d’équipement, l’assurance de profiter d’une assistance et d’un accompagnement, mais aussi une occasion de redynamiser des options, voire d’augmenter le taux de réussite. Qu’en est-il après six mois ? Eric Debacker met en évidence un découpage précis des matières, d’ailleurs très bien planifiées sur le degré, des compétences et des critères d’évaluation bien détaillés … qui facilitent grandement le travail de l’enseignant. A contrario, leur liberté pédagogique est limitée. La CPU pose aussi beaucoup de problèmes organisationnels (horaires, mise à disposition d’un matériel suffisant, difficultés pour composer les jurys …) ; le travail administratif est ardu, l’accompa-gnement n’est pas à la hauteur des attentes. Thierry Dewaele, de l’Institut Saint-Luc,

qui fait partie d’un groupe de travail à la Communauté française (aujourd’hui appelée Fédération Wallonie-Bruxelles), cherche des solutions au quotidien à ces problèmes. Il constate aussi l’inquiétude de professeurs qui craignent que leurs cours de formation commune ne soient délaissés. Avec son collègue Patrick Deleu, il épingle également la difficulté de pratiquer une remédiation différenciée, celle de trouver des stages de qualité, pour acquérir les compétences exigées à chacun des modules. Et une interrogation reste centrale : les élèves s’accrocheront-ils jusqu’au bout ? Les échéances rapprochées, le fait qu’une réussite à un module est définitivement acquise paraissent actuellement mobili-sateurs. Mais sera-ce suffisant pour éviter que les élèves ne partent avant la fin du cursus ? La vigilance reste de mise.

Anne Oger et Jean-Louis Volvert

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et par associationEnsemble

Un service à rendre, ensemble, aux jeunes sur unchemin de croissance …

Un projet à porter, ensemble, en association sur unchemin de solidarité

Une mission à vivre, ensemble, sur un chemin defraternité selon l’Evangile

Projet éducatif lasallien