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fiche film SYNOPSIS Un homme, sa femme et leurs deux enfants, quittent une cité industrielle pour la campagne d’où est originaire le mari et s’installent dans la vieille maison du père de celui-ci. En contraste avec le lieu d’avant (la ville qui enjolive les rapports entre les personnages), le nouveau lieu est donc la Nature, une nature envoûtante. Et person- ne ne retiendra la main du père levée sur son fils. Aucune voix ne sera entendue, le fils ne sera pas remplacé par l’agneau. Car celui qui brandit le couteau n’entend pas, ses yeux ne voient pas, son coeur est sec. Mais sa foi en la «loi» de la fierté humaine est aussi violente qu’insatiable. CRITIQUE Avant Le Bannissement , il y eut Le Retour. C’est avec ce premier film qu’Andreï Zviaguintsev sidéra la criti- que internationale en 2003. Le jeune auteur russe se fit connaître cette année-là en décrochant le Lion d’or à la Mostra de Venise. Depuis, Le Retour, œuvre de toute FICHE TECHNIQUE RUSSIE/BELGIQUE/FRANCE - 2006 - 2h30 Réalisateur : Andreï Zviaguintsev Scénario : Andreï Zviaguintsev, Artom Melkumjan & Oleg Negin d’après une nouvelle de William Saroyan Image : Mikhaïl Kritchman Montage : Anna Mass Musique : Andrei Dergachev & Andrei Ponkratov Interprètes : Aleksandr Baluyev (Mark) Konstantin Lavronenko (Alex) Maria Bonnevie (Vera) Alexeï Vertkov (Max) Dmitry Ulianov (Robert) Katya Kulkina (Acteur) LE BANNISSEMENT Izgnanie DE A NDREÏ Z VIAGUINTSEV 1

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  • che

    lm

    SYNO

    PSIS Un homme, sa femme et leurs deux enfants, quittent une

    cit industrielle pour la campagne do est originaire le mari et sinstallent dans la vieille maison du pre de celui-ci. En contraste avec le lieu davant (la ville qui enjolive les rapports entre les personnages), le nouveau lieu est donc la Nature, une nature envotante. Et person-ne ne retiendra la main du pre leve sur son fils. Aucune voix ne sera entendue, le fils ne sera pas remplac par lagneau. Car celui qui brandit le couteau nentend pas, ses yeux ne voient pas, son coeur est sec. Mais sa foi en la loi de la fiert humaine est aussi violente quinsatiable.

    CRITIQUE

    Avant Le Bannissement, il y eut Le Retour. Cest avec ce premier film quAndre Zviaguintsev sidra la criti-que internationale en 2003. Le jeune auteur russe se fit connatre cette anne-l en dcrochant le Lion dor la Mostra de Venise. Depuis, Le Retour, uvre de toute

    FICHE TECHNIQUE

    RUSSIE/BELGIQUE/FRANCE - 2006 - 2h30

    Ralisateur : Andre Zviaguintsev

    Scnario :Andre Zviaguintsev, Artom Me lkumjan & O leg Neg in daprs une nouvelle de William Saroyan

    Image :Mikhal Kritchman Montage :Anna Mass

    Musique :Andrei Dergachev & Andrei Ponkratov

    Interprtes :Aleksandr Baluyev(Mark)Konstantin Lavronenko(Alex)Maria Bonnevie(Vera)Alexe Vertkov(Max)Dmitry Ulianov(Robert)Katya Kulkina(Acteur)

    LE BANNISSEMENTIzgnanie

    DE ANDRE ZVIAGUINTSEV

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  • beaut voquant la qute du pre, a reu une pluie de distinctions dans les festivals du monde entier. () Applaudi dix minutes par le public lissue de la pr-sentation du Bannissement en comptition officielle (Cannes), Andre Zviaguintsev a dores et dj montr que la russite du Retour ntait pas quun heureux hasard. Le cinaste, 43 ans, signe nouveau une uvre sublime. Dune matrise formelle poustou-flante, dune grande profondeur de questionnement, ce film, ample par sa dure et son propos, a tout coup lev le niveau du festival en mme temps que son public.Le Bannissement est dabord un choc visuel. Comment voquer ce nouveau long mtrage sans clbrer la force de ses images magnifiquement composes, de ses dplacements de camras aussi prcis que subtils, de ses choix de paysages et de dcors mus par un principe de sobrit absolue, de ses lumires juste assez irrelles ? ()Librement adapt dune nouvelle de William Saroyan, Matire rire, le film met en scne un couple et leurs deux enfants, quittant la ville pour un sjour la cam-pagne. L, au milieu des collines paisibles, entre ltre et le broc, sbauche une harmonie familiale aussitt brise par une rvlation. () Dvoiler plus avant le rcit serait faire injure ce film exi-geant, qui se dploie lentement. Guid par une constante recher-che d universa l i t , Andre Zviaguintsev, qui a tourn en Moldavie, en Belgique et dans le

    nord de la France, a voulu effa-cer les rfrences gographiques, envisageant mme un moment de faire dire les dialogues dans une langue morte plutt quen russe !Tourn vers la mythologie et les grands textes fondateurs, il ins-talle dans cette maison du bout du monde, pose en surplomb dun ravin, une impressionnan-te tragdie, nourrie dvidentes rfrences bibliques. Amour, filia-tion, fatalit, faute, vie et mort... Le Bannissement entrane peu peu le spectateur jusquau noyau dur de tout questionnement spi-rituel : lesprance, la foi, la transcendance ou non du cycle naturel de la vie.On ne stonnera pas quAndre Zviaguintsev avoue tre inspir par le cinma de son compatrio-te Tarkovski : Mes racines, mon sang, avoue-t-il. La lourde tche du cinaste, du crateur en gn-ral, consiste essayer de rendre visible linvisible, confie-t-il. Ce qui se voit est temporel. Ce qui ne se voit pas est ternel. Pour ren-dre les choses visibles, il faut les dvelopper, comme on rvle une pellicule en la plongeant dans un bain chimique. Et de citer Robert Bresson : On ne peut pas voir le vent, mais on peut sentir quil existe en observant la surface de leau ou les feuilles de larbre.

    Arnaud Schwartzhttp://www.la-croix.com

    () Par son histoire, en somme, le lm ne surprend gure et savre, dun point de vue scnaristique, trs classique et coutumier de tant

    de drames familiaux mis en place au cinma. Et pourtant cest par ce biais justement que Le Bannisse-ment fait soprer pour le spec-tateur, un changement tout aussi brutal dans sa continuit et telle-ment compassionnel dans son d-roulement. Le cinaste va en effet rechercher le point de rupture de la relation et nous la faire expri-menter par le biais du con it et le truchement des amis qui viennent les visiter. De fait, lloignement servira la fois de huis clos tout en permettant une catharsis plus radicale et une prcipitation ac-crue des motifs de sparation et de con it.Mais le plus intressant dans la dmarche pourtant sche et nan-moins incroyablement recherche dun point de vue esthtique, cest dans la forme que le ralisateur russe llabore. Tout dabord, dans le traitement de cette sparation, Andre Zviguintsev choisit dintro-duire des lieux spci ques au d-roulement du drame a n de cons-truire sur un mode dual tout son lm et ses pripties. Ainsi, opte-t-il pour une dichotomie ville - cam-pagne qui appelle une opposition entre lunion et la rupture, lamour et la n de la con ance, laccep-tation de la situation ou lacc-lration brutale et expditive de sa n. Puis il dcide de dilater au maximum un temps quil va choisir de manipuler et de mler. Impres-sion de boucle et entremlement des squences temporelles dans le dernier tiers vont permettre au Bannissement de perdre volontai-rement son spectateur pour ensui-te mieux le confronter la ralit 2

  • de cette relation. Limpression est alors grande de ressentir et vivre par empathie le trouble radical de Alex, le mari tromp et amer. Cest par son point de vue que se narre lhistoire, la plupart du temps.Le dispositif mis en place fait donc du Bannissement, un lm la forme recherche et lesthtique extrmement travaille ; la photo-graphie est ici dune rigueur ab-solue et la recherche du cadrage idal, une qute de chaque plan un point que lon se demande o sarrtera la dmonstration tech-nique -. Nombreux sont les plans xes la composition parfaite et la lumire soigneusement ob-tenue voire ltre, de mme, fr-quents sont les mouvements dap-pareils et autres travellings qui suggrent les vellits narratives du cinaste et sa recherche de la profondeur de champ. Tout cela pourquoi ? Pour toucher et ten-ter de nous faire entrer en plein dans cette comprhension dun couple qui se perd et se ment au point daboutir sa propre n. Ce-pendant, malgr toute la tradition cinmatographique russe de ldi- cation qui pse sur le mtrage, Le Bannissement peine nous int-resser par son temps et plus en-core son rythme mal matriss. Su-perbe objet lmique digne par sa virtuosit des plus belles heures du cinma iranien de Kiarostami pour sa recherche du dispositif ou des uvres magistrales ser-vies par le cinma sovitique des sixties, le dernier lm de Andre Zviaguintsev ne gote pas assez la simplicit, laissant une double impression : celle de linachev et

    plus redoutable, celle dun temps qui se fait plus que sentir.Typiquement destin aux festivals, Le Bannissement est donc un lm lintrt narratif somme toute li-mit mais qui prsente lavantage de vouloir chercher et atteindre par la forme une autre densit. Hlas, pour le spectateur moyen et malgr la sublime partition photo-graphique et technique que joue, lennui sera vite au rendez vous et il vous faudra tre bien accroch pour aller jusquau bout. A rser-ver aux seuls amateurs de cinma auteuriste et revendiquant.

    Jean-Baptiste Guganhttp://www.dvdrama.com

    ENTRETIEN AVEC ANDRE ZVIAGUINTSEV

    Parlez-nous de votre exprience du deuxime film aprs le triom-phe du Retour. Il y a une croyance selon laquelle le deuxime film est toujours un chec, comme une sorte de baisse dnergie. Mais il suffit de se met-tre travailler pour que tous ces signaux et ces peurs reculent. Le syndrome du deuxime film est un mythe et il faut sen dbarras-ser. La seule chose qui puisse te rendre justice est ce que tu fais, cest--dire le film. Cest trs exactement pour cette raison que le film est un but et non le moyen de prouver quelque chose.

    () Une nouvelle de William Saroyan, Matire Rire, est lorigine du Bannissement. Quelle

    est limportance de cette uvre littraire et vous en tes-vous trs loign ? Je men suis beaucoup loi-gn : il suffit de dire quaucun des protagonistes de la nouvelle de Saroyan ne reste en vie. Jai dabord dcouvert le scnario quArtur Melkoumian avait adap-t de cette nouvelle, qui est peu connue dans luvre de Soroyan. Jai ressenti alors quelque chose dextraordinaire. La langue tait trs particulire, avec des phra-ses lourdes, caractristiques de cette poque qui nous ramne au milieu du sicle dernier. Parfois, les deux frres Mark et Alex (qui se prnomment diffremment dans la nouvelle) parlaient dans une langue incomprhensible. Ctait de larmnien, mais jtais gn par le fait que, si la langue tait dfinie, on dcoderait tout trs prcisment. Une ide mest alors venue lesprit, celle de les faire parler dans une langue morte de celles que reconstrui-sent les linguistes spcialiss. Mais cela aurait pu crer une artificialit exagre lintrieur du film, et nous avons renonc cette ide.

    () Comment, en vitant le dco-dage, avez-vous construit les-pace et le temps du film ? Le monde des hros de Saroyan se visitait comme du rtro : ce ntaient que chapeaux melons, locomotives vapeur et parfum dune Californie dautrefois. Nous avons tout ramen une poque plus proche de nous. Nous avons gomm les traces didentifica- 3

  • Le centre de Documentation du Cinma[s] Le France, qui produit cette che, est ouvert au public

    du lundi au jeudi de 9h 12h et de 14h30 17h30et le vendredi de 9h 11h45

    et accessible en ligne sur www.abc-lefrance.com

    Contact : Gilbert Castellino, Tl : 04 77 32 61 26 [email protected]

    tion : lordinateur nous a permis deffacer les criteaux franais dans le bar ; nous avons imit les billets de banque finlandais de sorte que ces coupures aient lair abstrait ; nous voulions mme retirer la croix sur lglise pour viter toute allusion la confes-sion religieuse, mais lavons fina-lement garde. Larchitecture, les panneaux, les numros dimmatri-culation et les marques des voitu-res : tout cela revtait une impor-tance allant mme jusquaux fentres et leurs chambranles. Nous avons achet des accessoi-res en Allemagne, sur des mar-chs aux puces... Malgr tout cela, il est trs difficile de recrer au cinma un monde universel. La culture matrielle porte forcment le sceau du temps et du lieu.

    () Jai entendu parler de dissen-sions propos de la fin du film, certains estimant mme quil fal-lait la supprimer. Comment ra-gissez-vous la manire quont les gens de recevoir ce que vous leur montrez ? Je pense que chacun interprte-ra le film sa manire, et cest bien son droit. Je me souviens dun commentaire dune scne du Retour : Un Russe ! Qui rentre chez lui aprs douze ans et qui boit du vin ! Pas de la vodka ! Jy crois pas ! Ce regard est le rsultat dune interprtation directe, sans dtours. La vodka relve de la vrit du quotidien ; le vin, dune vrit dune signi-fication diffrente, une signifi-cation mythologique. Il en va de mme ici. Daucuns ont vu dans

    la scne finale avec les paysan-nes dans le champ le sens sui-vant : la Russie survivra tout, surmontera tout. Cela me semble bizarre car la Russie nexiste pas dans ce film. En revanche existe le mythe de lternel retour, celui du cycle de la vie, du cycle natu-rel et chrtien. En nous focalisant sur des opinions particulires, nous nous assimilons ces tu-des pratiques sur les groupes-tests. Il faut rester fidle au film et non des opinions entendues. Cest comme dans la vie : mme un sage, on peut ne pas lcouter. On doit agir de toute faon en accord avec soi-mme. Pour changer le film, je dois sentir cette ncessit de lintrieur. ()Traduit du russe par Jol Chapron

    Dossier de presse

    BIOGRAPHIE

    N le 6 fvrier 1964 Novossibirsk. Il termine ses tudes dacteur en 1984 linstitut de thtre de Novossibirsk (atelier de Lev Belov), puis monte Moscou et est diplm, en 1990, du clbre ins-titut moscovite de thtre GITIS (atelier dEvgueni Lazarev). Il tra-vaille comme acteur dans deux projets thtraux indpendants : en 1993 dans La Marelle de Julio Cortazar (le rle de lauteur) et, en 1997, dans Un mois la campa-gne dIvan Tourgueniev (le rle de Beliaev). De 1992 2000, il inter-prte des rles secondaires dans des sries tl (Goriatchev et les autres en 1992-1994, Faisons con-

    naissance en 1999, Kamenskaa en 2000), ainsi que dans des films de cinma (Le Chaton en 1996 et Chirli- Myrli en 1999).En 2000, Andre Zviaguintsev passe la mise en scne en ra-lisant trois courtes nouvelles (Boussido, Obscure, Le Choix) dans le cadre dune srie de la chane REN-TV intitule La Chambre noire. En 2003, il ralise son premier film de cinma, Le Retour, qui cre lvnement, tant invit aux festivals de Toronto, Montral et Locarno et slectionn en comp-tition au festival de Venise. Cest l que ce premier film (qui tait le premier pour une grande partie de lquipe de tournage) rempor-te le Lion dor, ainsi que le Lion du meilleur premier film assorti de la mention suivante : Un film trs subtil sur lamour, la perte et le passage lge adulte. Le Bannissement est son deuxime long-mtrage.

    www.russomania.com

    FILMOGRAPHIE

    Srie TV :Black Room 2000

    Longs mtrages :Le Retour 2003Le Bannissement 2007

    Documents disponibles au France

    Revue de presse importanteFiches du cinma n1867/1868

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