B. Brecht Inter-Peuples - ciip.fr fileAu plan financier, la capitalisation boursière des 100 plus...

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ÉDITO p. 2 AGENDA p. 3 QUOI DE NEUF AU CIIP ? p. 3 NOS MOBILISATIONS … dans la communauté Emmaüs p. 4 En solidarité avec les migrant.e.s p. 5 Contre les violences policières INTERNATIONAL Haïti, des élections pour quoi faire ? p. 6 Lutter contre… la famine p. 8 La politique de Netanyahu… p.10 Appel d’Angela Davis p.11 VOYAGER AUTREMENT p.12 CULTURES p.15 NOUS AVONS AIMÉ p.16 Sommaire INTER-PEUPLES n°253 février 2017 Prix : 1, 50 € ritimo = Réseau d’information et de documentation pour le développement durable et la solidarité internationale www.ritimo.org "De qui dépend que l'oppression soit brisée ? De nous !" B. Brecht Inter-Peuples T T RUMP RUMP : U : U N N AUTRE AUTRE MONDE MONDE EST EST - - IL IL POSSIBLE POSSIBLE SOUS SOUS L L ' ' EMPIRE EMPIRE ÉTATS ÉTATS - - UNIEN UNIEN ? ? Haïti ... des élections pour quoi faire ? Sac au dos en Palestine Photo: P. Savoye

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ÉDITO p. 2

AGENDA p. 3

QUOI DE NEUF AU CIIP ? p. 3

NOS MOBILISATIONS … dans la communauté Emmaüs p. 4 En solidarité avec les migrant.e.s p. 5 Contre les violences policières

INTERNATIONAL Haïti, des élections pour quoi faire ? p. 6 Lutter contre… la famine p. 8 La politique de Netanyahu… p.10 Appel d’Angela Davis p.11

VOYAGER AUTREMENT p.12

CULTURES p.15

NOUS AVONS AIMÉ p.16

Sommaire

INTER-PEUPLES n°253 février 2017 Prix : 1, 50 €

ritimo

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"De qui dépend que l'oppression soit brisée ? De nous !"

B. Brecht

Inter-Peuples

TTRUMPRUMP : U: UNN AUTREAUTRE MONDEMONDE ESTEST--ILIL POSSIBLEPOSSIBLE

SOUSSOUS LL ''EMPIREEMPIRE ÉTATSÉTATS--UNIENUNIEN ??

Haïti ... des élections pour quoi faire ?

Sac au dos en Palestine

Photo: P. Savoye

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Éditorial

Un autre monde est-il possible sous l'empire états-unien ?

Donald Trump succède à Barak Obama. Faut-il en atte ndre des change-ments structurels significatifs dans le rôle et la stratégie des USA sur la scène mondiale ou même en politique intérieure ?

Barak Obama a dû gouverner avec un Congrès dominé p ar les Républi-cains, eux-mêmes subissant l'influence du mouvement ultra réactionnai-re "Tea party". Au plan intérieur, son projet de pr otection sociale "Obamacare" a laissé de nombreux pauvres sur le tap is en se transfor-mant en machine à cash pour les assurances privées. Les discrimina-tions et les inégalités sociales qu'il prétendait r éduire se sont aggravées et au sortir du krach de 2008 il soutenait avec des fonds publics les grandes banques (comme Goldman Sachs) et certaines grandes indus-tries (comme General Motors), il laissait les couch es moyennes et pau-vres ruinées par les subprimes.

Sur la scène mondiale, il a retiré l'armée étatsuni enne d'Irak et partielle-ment d'Afghanistan où elle s'était enlisée sans pou r autant résorber le chaos créé par les guerres de George Bush dans ces pays, mais il a poursuivi des interventions militaires en Libye, en Syrie et au Yémen avec la complicité des autres pays "occidentaux" (d ont la France) qui manifestement ont prolongé les désastres subis par les populations. Plus globalement, le réseau des 750 bases militaire s est toujours en pla-ce et Barak Obama n'a même pas eu le courage de fer mer le centre de torture de Guantánamo comme il l'avait promis. Il a signé le traité de la COP21 censé combattre le réchauffement climatique m ais qui peine à se concrétiser. Il a aussi tenté de normaliser ses rel ations avec Cuba, mais le Congrès s'est obstinément refusé à lever l'embar go contre ce pays.

Au plan financier, la capitalisation boursière des 100 plus grandes fir-mes mondiales (dont 54 sont étatsuniennes) est à 62 % entre les mains d'actionnaires étatsuniens (contre 38% en 2008). Ce processus de concentration du capital se poursuit donc et consol ide la puissance im-périaliste, commerciale et financière des État Unis .

Donald Trump et le groupe de milliardaires et de mi litaires qu'il a nommé pour gouverner ne vont sans doute rien changer de f ondamental dans les structures profondes du pays. Ils serviront enc ore mieux les intérêts des plus riches et pour cela ils renforceront les a lliances et les moyens militaires extérieurs. Le nouveau Président produir a des tempêtes avec Twitter pour affoler la sphère médiatique, dans son style vulgaire, provo-cateur et raciste mais ne changera rien à un systèm e qui sert si bien ses intérêts et ceux de ses complices.

Un fait nouveau important doit être signalé dans ce contexte : l'émergen-ce du mouvement qui a soutenu Bernie Sanders contr e Hillary Clinton. Avec son programme donnant la priorité au progrès s ocial, à un ensei-gnement supérieur gratuit, à la création d'emplois, à une fiscalité plus juste, il a attiré 83% des électeurs démocrates ent re 18 et 29 ans, est ar-rivé en tête dans de nombreux États, avec un score global très proche de celui d'Hillary Clinton. C'est avec eux que nous devrons développer des relations de solidarité.

Ce mouvement de jeunes constitue le cœur des résist ances contre l'élec-tion de Donald Trump, affaibli d'avoir été élu grâc e au système électoral indirect des États-Unis mais avec près de deux mill ions de voix en moins que son adversaire. Si l'on ajoute l'abstention de 46%, cela signifie que Donald Trump a été choisi par environ 25% des élect eurs potentiels !

INTER-PEUPLES n°253 février 2017

Créé en mai 1980, le CIIP est un centre d’information, de documentation, de solidarité interculturelle et internationale qui a pour objectifs essentiels :

• Faire mieux connaître les réalités, les cultures, les droits des peuples et des m i n o r i t é s d e s c i n q continents (y compris en France)

• Lutter contre les atteintes aux Droits de l’Homme et des Peuples, contre toutes les formes de racisme et de domination.

• Promouvoir un monde solidaire et durable, sans famines, sans guerres, sans oppression.

Imprimerie Euro’Prim 47, Avenue Alsace Lorraine

38000 GRENOBLE

Réseau associatif de près de 80 lieux dans toute la France Ritimo a pour objectif d'in-former le public pour renfor-cer la solidarité internatio-nale . Ses membres rendent accessible et diffusent une information spécialisée sur les causes du mal dévelop-pement, les inégalités Nord Sud, les droits de l'Homme. Ils veulent participer à la mo-dification de nos choix de dé-veloppement et agir pour une autre mondialisation .

Papier recyclé

Inter-Peuples

Publication mensuelle du CIIP

Maison des Associations 6, rue Berthe de Boissieux

38 000 GRENOBLE Bureau 114

Tel : 04.76.87.59.79 Courriel : [email protected]

Site web : www.ciip.fr

PERMANENCES DU CIIP Mardi au vendredi, 13h30-18h

CREDITCOOP GRENOBLE n°41020019703

ISSN: 0999-7830 Commission paritaire

n° 0517 G 86569

Directeur de publication Jo BRIANT

Rédaction Jo BRIANT

Catherine GRUNWALD Marc OLLIVIER

Philippe SAVOYE Roseline VACHETTA

Maquettiste Catherine GRUNWALD

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Agenda

INTER-PEUPLES n°253 février 2017

QUAND ? FEVRIER

2017 OÙ ? QUOI ?

Jeudi 2 19H30

Centre culturel juif 4 bis rue des Bains Grenoble

Rencontre : "Agir pour l’accueil des migrants" avec Bd Pouyet (Apardap), Michel Benichou. Animateur : Fernand Garnier

Du 3 au 8 Monciné 10 av. Ambroise Croizat St Martin d’Hères

Rendez-vous des Cinémas d’Afrique (voir ci-après…) : co-organisation : L’ACRIBA, Raccords, Ansera, Amal 38, AlterE-gaux, Coup de Soleil, Survie Isère

Samedi 4 À partir de 16H30

Monciné 10 av. Ambroise Croizat St Martin d’Hères

3 films du Burkina Faso : 1- "La sirène de Faso Fani", de Michel Zongo 2- "Twaaga", de Cedric Ido, avec Harouma Oueadrogo 3- "Demain dès l’aube", de Lotfi Achour. 3 films qui évoquent de nombreux aspects humains, sociaux, éco-nomiques burkinabés.

Samedi 4 14H30-17 H

Place Félix Poulat Grenoble

Stand et Info de l’AFPS (Association France Palestine Soli-darité), sur les banques qui financent la colonisation.

Dimanche 5 à partir de 14H30...

Monciné 10 av. Ambroise Croizat St Martin d’Hères

14H30 : "La petite vendeuse de soleil ", 1999, Sénégal : Djibril Diop Mambety. 16H : "Mille soleils, Sénégal, Mati Diop, 2013. 20H Sénégal, "Touki Bouki, le voyage de la hyène", Djibril Diop Mambéty

Lundi 6 19H

Maison des Associations Grenoble

Assemblée générale du CADTM (Comité pour l’Annulation de la

dette du Tiers-Monde) : bilan année 2016, projets, perspectives.

Mardi 7 19H30

Maison du tourisme Rue de la République Grenoble

Rencontre-débat du Collectif pour la gratuité des transports dans l’agglomération grenobloise. Org. Collectif pour la gra-tuité...

Mardi 7 20H

Cinéma Le Club Rue du Phalanstère Grenoble

Projection-débat : "Les migrants ne savent pas nager", do-cumentaire de J. P. Mari et Francis Delhens.

Mercredi 8 18H30

Maison des Associations Grenoble

Réunion du CTNE (Comité Traite négrière esclavage) : prépa-ration des 13° rencontres en mai 2017

Mercredi 8 20H

Maison des Associations Grenoble

Assemblée générale de Maison Latina

Vendredi 10 18H30

Maison des Associations Grenoble

Réunion du Comité Traite négrière esclavage

Dimanche 5 17H

Petit Théâtre du Créarc 8, Rue Pierre Duclot Grenoble

Lecture de poèmes "Exode, exil et poésie" de et par Fer-nand Garnier, + échanges. Réservation 04 76 01 01 41

N ouveau dossier du CIIP ! Y sont abordées suc-cessivement : qui sont-ils ? Les causes et res-

ponsabilités. Qui en tire profit ? Les politiques migratoi-res européennes (dont française) et leurs conséquen-ces. Les résistances. Ce que nous voulons. Un dos-sier de synthèse composé de textes originaux du CIIP

et d’articles de presse, avec une partie pour aller plus loin, s’informer et agir (sélection de sites, de lectures, et de films). Vous pouvez vous procurer ce dossier au prix de 6 € soit en passant au local du CIIP (Maison des Associations- 1er étage- bureau 114) soit en le commandant (+ 3 € frais de port).

Quoi de neuf au CIIP ?

"Migrants et migrantes : Solidarité !" CIIP, janvier 2017, 68 p.

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Nos mobilisations

INTER-PEUPLES n°253 février 2017

Migrants : expulsions, arrestation dans la communau té d’Emmaüs…

L e 2 novembre dernier Bernard Cazeneuve, Mi-nistre de l’Intérieur, envoyait une lettre à tous

les préfets – jointe au rappel de la Loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers - leur deman-dant de "renforcer l’efficacité de la lutte contre l’im-migration irrégulière", visant tous les migrants dé-boutés de leur demande d’asile et de séjour, c'est-à-dire des centaines de milliers de personnes sur l’ensemble du territoire. En leur demandant de mul-tiplier les "contrôles", d’enquêter sur les migrants en cherchant des informations auprès des organismes publics ou privés… En outre, Bernard Cazeneuve demande aux mêmes préfets de délivrer sur le champ des OQTF (Obligation de Quitter le Territoire français) dès qu’une demande de titre de séjour est refusée, de procéder à des assignations à résiden-ce et de prononcer des interdictions de retour (un an, voire deux ans…) en France suite au renvoi dans le pays d’origine. Une Circulaire qui marque une aggravation plus qu’inquiétante voire scélérate.

En Isère, ce durcissement s’est concrétisé ces der-nières semaines de multiples façons. Deux exem-ples parmi tant d’autres. D’une part, Berhan Demi-rowski, Macédonien, père de deux enfants scolarisés (en moyenne section et en CE 2), intégré dans la société française depuis 6 ans, engagé au sein du CCAS de Grenoble puis à l’Arche de Seyssinet-Pariset, détenteur de plusieurs promesses d’embau-che, et très fortement soutenu notamment par RESF, a été renvoyé en Macédoine où sa communauté est persécutée, laissant seuls sa femme et ses deux pe-tits enfants. Une grave atteinte à la Convention inter-nationale des droits de l’enfant qui stipule notam-ment qu’un enfant doit être "effectivement protégé contre toutes formes de sanction motivées par la si-tuation juridique de ses parents… et que pour son épanouissement il a besoin de grandir sous la sau-vegarde et la responsabilité de ses parents".

Une autre atteinte - gravissime autant qu’exception-nelle : l’arrestation de 3 sans papiers dans la com-munauté d’Emmaüs de La Mure. Le 18 janvier 2017, les militaires de la gendarmerie de La Mure investissent l’antenne de la Communauté Emmaüs de La Mure. Après avoir entamé une fouille en règle des locaux et des chambres, Ils arrêtent trois Com-pagnons - des migrants - en leur délivrant aussitôt une OQTF sous trente jours. Une Première… Un choc énorme au sein de la Communauté d’Emmaüs qui appelle aussitôt à un rassemblement Place de Verdun le vendredi 22 janvier. Près de 200 person-nes répondent à cet appel. Le Préfet prétend que cette arrestation n’est pas de son fait, mais celui du Procureur… Et qu’il attendra quelques semaines avant d’exécuter ou non cette OQTF… Les Compa-gnons d’Emmaüs et les nombreux manifestants présents se sont promis de rester très attentifs et mobilisés.

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Berhan sera-t-il expulsé ? (Dauphiné libéré 01/01/17

Manifestation des compagnons d'Emmaüs à Grenoble Photo France3 Grenoble 20/01/17

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Nos mobilisations

INTER-PEUPLES n°253 février 2017

Samedi 21 janvier : Manifestation régionale en solidarité avec les migrant-e-s…

1 000 manifestants !

D es délégations d’Annecy, de Chambéry, de Valence, de Romans, de Roussillon, de Vien-

ne… 1 000 manifestants. Une grande première que cette manifestation régionale : des manifestants – jeunes et âgés, hommes, femmes - que rien ne pou-vait arrêter malgré une température négative et qui tenaient absolument à faire entendre leur voix, à la fois pour affirmer fortement leur solidarité déterminée avec tous les migrant-e-s quelle que soit leur situa-tion, et pour dénoncer une politique de non accueil et de rejet massif des demandes d’asile et de séjour.

Une manifestation vivante, colorée, rythmée par la Combatucada et la Batukavi de la Villeneuve (Place de Verdun), avec des prises de paroles.. et une soupe chaude très appréciée à l’arrivée, cuisinée et servie par l’Assemblée des Mal logé-e-s. Après une escale symbolique devant le Tribunal Administratif pour rappeler que chaque jour des expulsions y sont prononcées.

Assurément, un grand moment de solidarité…

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Contre les violences policières : le témoignage de la famille Traoré…

S amedi 21 janvier, en fin d’après midi, se déroula à l’Engrenage - nouvelle salle Rue

Jean Prévost - une soirée très émouvante et solidaire, dans le cadre d’une Journée nationale contre les violences policières, avec la famille Traoré dont l’un des membres, Adama, a été tué par la police à Beaumont-sur-Oise le 19 juillet 2016. Plus d’une centaine de personnes se pressaient pour écouter le témoignage de membres de cette famille et visionner un film sur les violences

policières. Un véritable assassinat. Et l’on vient d’apprendre qu’un ami, Youssouf, et un frère d’Adama, Bagui, viennent d’être incarcérés pour avoir protesté avec véhémence contre ce meurtre ! Une revendication centrale : la demande de mise en examen des gendarmes auteurs du meurtre d’Adama Traoré, et pour la justice et la vérité. A suivre…

"Il n’y a pas d’étrangers sur cette Terre, Solidarité avec tous les migrants "

"Nous sommes tous des réfugiés"

Photos Dauphiné libéré, 22/01/17

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International

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Haïti... des élections pour quoi faire ?

A près différents reports, ce 3 janvier, Léopold Ber-langer, président du conseil électoral provisoire

(CEP) proclame officiellement le résultat du premier tour des élections présidentielles qui se sont tenues le 20 novembre. Jovenel Moïse du Parti haïtien Tèt Kale (PHTK), est élu avec 55,6 % des suffrages exprimés, suivi du candidat de la Ligue alternative pour le progrès et l’émancipation haïtienne (LAPEH), Jude Célestin, avec 19,6 %. Il succède à Michel Martelly (également connu sous son nom de chanteur "Sweet Micky"). L’arrêt des juges électo-raux signale "qu’il n’y a pas eu de fraudes massi-ves, mais des irrégularités qui ne sauraient affecter le processus" (note d’information du CEP).

Un résultat en trompe l’œil !

Le taux d’abstention de 79 % des inscrits (et tous les Haïtiens ne le sont pas !), atteste du peu d’es-poir que les Haïtiens portent dans ce scrutin. Il s’a-git d’une élection en trompe l’œil. En effet, le pre-mier tour s’est tenu le… 25 octobre 2015 (!) où Jo-venel Moïse, candidat du pouvoir (un président ne peut effectuer deux mandats successifs), est décla-ré en tête avec 32,8 % des suffrages et Jude Céles-tin en seconde position (25,2 %). Un second tour est prévu le 27 décembre 2015. Ces résultats sont contestés (certaines sources "sérieuses" annoncent que Moïse aurait eu moins de 10 % des suffrages) mais aucun recomptage n’est autorisé. Des milliers d’Haïtiens manifestent durant plusieurs semaines, dénonçant les fraudes massives et un "coup d’Etat électoral" par le pouvoir en place. Le second tour est reporté, puis le 7 février, face au mécontente-ment populaire, le président sortant Michel Martelly est contraint de quitter le pouvoir. Après la signatu-re d’un accord de sortie de crise, le parlement dési-gne Jocelerme Privert président du sénat, président provisoire d´Haïti, afin de combler le vide laissé par ce départ et mettre un terme à la paralysie politique du pays. Il aura fallu plus d’une année pour qu’un nouveau président soit élu !

Une dépendance extérieure

Lors de la commémo-ration du 213ème anni-versaire de l’indépen-dance haïtienne, ce 1er janvier, le prési-dent provisoire Joce-lerme Privert déplore l’image de marque de son pays qui est pas-sé du statut de "Perle des Ant i l les" à "l’étiquette honteuse" de pays le plus pauvre des Amériques. "Nous sommes toujours incapables de nourrir notre population, d’éduquer nos enfants, d’assurer les soins de santé à nos compatriotes et de construire des infrastructures nécessaires à no-tre développement économique". Et critique l’ingé-rence étrangère, via la présence de la Minustah : "il existe encore des soldats étrangers en Haïti".

Selon le Nouvelliste (quotidien haïtien), l’économie haïtienne est marquée par une triple dépendance. Dépendance budgétaire : 50 % du budget et 80 % des investissements proviennent de l’aide extérieu-re. Dépendance énergétique : importation de la to-talité des hydrocarbures. Dépendance alimentaire : importation de 60 % des besoins alimentaires en dépit d’un fort potentiel agricole. Sur la dernière décennie, le taux de croissance annuelle moyenne du PIB par habitant est négatif : -0,9 % ! Le trans-fert financier de la diaspora (un Haïtien sur cinq vit à l’étranger, dont 80 % des cadres) représente 52,7 % du PIB (AlterPresse). Dans un tel contexte, où l’état de droit n’est qu’un vain mot, l’insécurité et la violence sont omniprésentes. Selon la Commis-sion épiscopale Justice et paix "au moins deux as-sassinats par jour sont enregistrés dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince", bien qu’ils aient diminué d’un tiers ces deux dernières années.

Et le quotidien des Haïtiens ?

Dans ce pays le plus pauvre des Caraïbes, plus de 60 % des habitants survivent avec moins de 2 dollars par jour. Sept ans après le séisme qui a tué plus de 200 000 personnes, 55 000 Haïtiens vivent toujours dans des camps de fortune, selon l’Organisation internationale des migrations. Le Pro-gramme alimentaire mondial de l’ONU donne des chiffres accablants :

• 2 500 000 Haïtiens vivent dans l’extrême pauvreté,

La Minustah à Point-à-Pitre

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Haïti … / …

• les 10% des Haïtiens les plus riches possè-dent 70% de la totalité des revenus.

• dans les villes, 50% des Haïtiens sont au chômage.

• 100 000 enfants de moins de 5 ans souf-frent de malnutrition aiguë et 1 enfant sur 3 souffre de retard de croissance.

• moins de 50% des foyers ont accès à l’eau potable…

Nos amies haïtiennes de Symbi roots, accueillies en novembre dans le cadre du Fita et de la Semai-ne de la solidarité internationale du Grésivaudan témoignent de cette réalité et la resitue dans son contexte historique avec une grande lucidité : "nous sommes un peuple issu de l’esclavagisme, puis du colonialisme. La population a ses origines lointaines en Afrique qu’il a quittée sous la contrainte. L’escla-vagisme a formaté les Hommes, les a fait renier leur identité ancestrale, intégré leur déracinement. Les gens ont intériorisé qu’ils sont des descendants d’esclaves analphabètes. Dans l’inconscient, cela demeure présent quelque part dans notre identité individuelle et collective".

Elles apportent un regard critique sur leur classe dirigeante : "Quand les personnes finissent leurs études supérieures, la meilleure chance de faire fortune, c’est de se faire élire. Les élections sont du cinéma. Quand tant de personnes sont au chômage - le ministère annonce un taux de 27 % -, mais en réalité deux Haïtiens sur trois sont touchés par le chômage ou le sous-emploi et sont dans une dé-

marche de survie, des élections ne représentent pas un espoir… Et de toute façon le président ne décide pas, les décisions sont imposées de l’exté-rieur. Le peuple a peur et n’a pas confiance !".

Conscientes, qu’un véritable changement ne pourra s’opérer sans une politique où l’éducation devien-drait une priorité absolue (aujourd’hui, le système éducatif est à plus de 80 % aux mains du secteur privé et selon l’Unicef, un enfant sur quatre n’est pas scolarisé, les cours secondaires n’accueillent qu’un jeune sur quatre) : "le premier problème est celui de l’éducation : la majorité des populations ne parlent pas le français qui est la langue dominante dans le pays au niveau de la classe dirigeante. L’é-ducation est de très mauvaise qualité, mais les éli-tes, inscrivent leurs enfants dans des écoles coû-teuses et renommées".

Cependant, malgré les difficultés (dernier exemple en date l’ouragan Matthew qui a fait près d’un mil-lier de victimes, a anéanti 80 % des récoltes du "grenier" du pays, plus de 800 000 personnes sont menacées par une "insécurité alimentaire extrê-me"… l’ONU révèle que le budget de 139 millions de dollars dont elle a besoin pour venir en aide aux victimes est sous-financé de 38 % (!), le peuple Haïtien demeure debout, cherche avec force et foi une issue pour que le quotidien soit porteur d’un avenir.

La présence de ces femmes, leurs témoignages, parmi d’autres, attestent que le peuple haïtien est source d’une énergie exceptionnelle. La seule fa-çon pour que ce pays s’ouvre un horizon de justice sociale, crée les conditions d’une véritable démo-cratie et d’un développement économique et envi-ronnemental équilibré, est de rompre avec l’attitude néocoloniale étrangère qui s’autoalimente avec la main mise d’une petite caste oligarchique, et de laisser le peuple réellement maître de son destin, de ses choix vitaux. A suivre donc…

Philippe Savoye

Un camp aux environs de Pointe-à-Pitre

Un point d’eau à Vallue

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INTER-PEUPLES n°253 février 2017 8

Lutter contre ce "génocide silencieux" qu’est la fa mine

S oyons clair : la famine n’a rien d’une malédic-tion, d’un accident ou d’une fatalité. C’est bien

le produit d’une construction humaine, d’un systè-me alimentaire, économique, social, géopolitique…Autant dire que la faim est un phénomène politique. Elle est la conséquence de l’ignorance, des guer-res, des déficiences des pouvoirs publics et des conflits ayant pour enjeu l’accaparement des terres et des ressources naturelles par les multinationales, les fonds de pension, les Etats.

État des lieux

1er constat : un constat d’échec. Adoptés en 2000 par 193 Etats, les Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), qui visaient, entre autres, à "réduire de moitié, entre 1990 et 2015, la proportion de la population qui souffre de la faim" (objectif 1, c), n’ont pas été remplis. On a certes progressé en pourcentage, mais pas en valeur absolue. D’après l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), il y aujourd’hui dans le monde 800 millions de personnes sous-alimentées – c'est-à-dire des personnes qui ne mangent pas assez en quantité. Soit autant, en termes absolus, qu’en 2000, en 1950 et en… 1900 ! A cela s’ajoute un milliard de malnutris - ceux qui ne mangent pas de manière assez diversifiée et dont la santé est gra-vement détériorée par des carences (vitamines, protéines, éléments minéraux, etc.).

Même si les deux phénomènes sont souvent liés, la faim étant de plus en plus utilisée comme arme de guerre (voire Syrie…), on peut affirmer que la faim tue dorénavant beaucoup plus que les conflits ar-més. Toutes les dix secondes, un enfant meurt de faim. Pour comprendre la mécanique de la faim, résistons d’abord à deux idées reçues. La première veut que la faim soit la conséquence d’une démo-graphie incontrôlée : pour combattre la faim il suffi-rait de limiter les naissances. Si certains pays où l’on souffre de la faim sont effectivement surpeu-plés, comme le Bengladesh, d’autres sont des pays sous-peuplés, où la densité de la population est faible. Ce n’est pas à cause de la surpopulation qu’on a faim en République démocratique du Congo (43% d’enfants malnutris), mais à cause des conflits incessants pour s’approprier ses richesses naturelles. Ce n’est pas tant le nombre de bouches à nourrir qui pose problème que les processus poli-tiques, économiques et sociaux qui empêchent de les nourrir tous et toutes.

La second idée reçue est d’ordre sociologique : contrairement à ce que l’on croit généralement, la faim est un phénomène rural. La moitié des gens

qui ont faim sont des paysans pauvres qui n’ont accès à aucune ressource pour produire (semences, engrais, mécanisation, irrigation, forma-tion, assurance, crédit, capacité de stockage, etc.), même s’ils veulent s’orienter vers l’agro-écologie. Si on ajoute 20% de paysans sans terre, à l’emploi précaire et mal rémunéré, et 10% de chasseurs, cueilleurs, pêcheurs et éleveurs nomades directe-ment menacés par l’expansion des sociétés indus-trielles, cela signifie que 20% des affamés seule-ment sont des urbains. Ces derniers sont en géné-ral des gens qui ont fui la faim sévissant dans les campagnes pour tenter de trouver emploi et subsis-tance dans les immenses bidonvilles des grandes métropoles du Sud. De cette observation, on peut tirer déjà un enseignement : au lieu de proclamer que l’agriculture des pays riches a vocation à "nourrir ceux qui ont faim", commençons par arrêter d’empêcher les paysans du monde de se nourrir eux-mêmes !

Certains pays ont déjà obtenu des résultats, mais d’autres…

En matière de lutte contre la faim, certains pays ont déjà obtenu des résultats spectaculaires. En Chine, on mange beaucoup mieux sous Xi Jinping avec 1,3 milliard d’habitants que sous Mao Zedong du temps où il n’y avait que 700 millions de Chinois. D’autres bons résultats ont pu être observés au Vietnam, qui exporte désormais régulièrement du riz, ou au Brésil, grâce au programme "Faim Zéro". Plus généralement, le continent américain, hormis Haïti, a pratiquement résolu le problème de la faim, du nord au sud. Mais la situation stagne voire empi-re dans d’autres régions du monde. La faim se concentre progressivement dans deux zones géographiques : l’Afrique subsaharienne, où le nombre de sous-alimentés est passé de 87 mil-lions à 234 millions entre 1970 et 2010, et la pé-ninsule indienne où il reste désespérément sta-ble, autour de 220 millions.

A noter que le nombre absolu d’affamés reste sta-ble dans le monde, alors même que la quantité de richesses produites mondialement a été multipliée par 4 entre 1960 et 2015. C’est là que réside le scandale. Notre planète compte actuellement 5,4 milliards d’habitants de plus qu’au début du XX° siècle. C’est donc qu’on a réussi à les nourrir ! Mê-me avec 2 à 2,5 milliards d’habitants additionnels d’ici à 2050, il devrait par conséquent être possible de supprimer à jamais la faim. Alors, que faire pour nourrir tous les habitants de la planète ?

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INTER-PEUPLES n°253 février 2017 9

Lutter… … / …

Produire suffisamment, produire partout, produire mieux…

Halte aux accaparements de terre !

Produire suffisamment : pour que tous mangent, il faut déjà produire assez à manger. Selon la FAO, il faudrait augmenter de 70% la production agricole mondiale d’ici à 2050. Ce chiffre s’explique par la combinaison de deux facteurs : l’augmentation de la population mondiale qui devrait atteindre 9,7 mil-liards en 2050 (33% de plus qu’en 2015), et l’évolu-tion des habitudes alimentaires, en particulier celles des classes moyennes. Ces dernières, consom-mant de plus en plus (et beaucoup trop) de viande et de lait, ponctionnent indirectement une quantité croissante de ressources alimentaires végétales : en 2015, près de la moitié de la production mondia-le de blé et les ¾ de celle de maïs et de soja auront servi à nourrir le bétail… pour toujours plus de vian-de pour les classes moyennes occidentales. Souli-gnons le défi posé par l’Asie qui accueillera proba-blement un milliard d’habitants supplémentaires d’ici 2050 et dont les classes moyennes s’étendent rapidement.

Produire suffisamment, en tenant compte des habi-tudes culturales locales. En évitant les productions superflues et les gaspillages. La FAO estime qu’en-viron 1,3 milliard de tonnes d’aliments sont jetés par an, soit près du 1/3 de la récolte mondiale. Une priorité absolue : dans les pays du Sud, on perd essentiellement à la récolte, faute d’équipements de stockage et de transports adéquats. Dans les pays du Nord, c’est le mode de vie qui provoque ce gaspillage, à toutes les étapes : de la fourche à la fourchette ! A cela s’joutent d’une part la concur-rence – provoquée par les multinationales agro-industrielle - entre la production de nourriture et celle de produits industriels (textiles, huile de pal-me…). Et l’accaparement scandaleux d’un nombre croissant de terres aux dépens de l’agriculture fami-liale et des besoins alimentaires.

Produire partout : Pour que tout le monde mange, mieux vaut que les lieux de production se rappro-chent des lieux de consommation. Un commerce international doit bien sûr perdurer, mais ce n’est pas sur lui qu’on doit compter pour nourrir la planè-te. Le "libre-échange", qui met en concurrence des partenaires inégaux – voir les échanges inégaux entre l’agriculture européenne et l’agriculture afri-caine - est inévitablement un jeu de dupes, fondé sur le fameux échange inégal. En matière agricole et alimentaire, les dogmes libéraux ruinent tout sim-plement les agriculteurs familiaux des pays du Sud.

Au lieu de promouvoir l’ouverture des frontières, mieux vaut mettre au premier plan la modernisation maîtrisée et économe des agricultures des pays no-tamment d’Afrique et d’Asie. Comme l’ont relevé l’O-NU et la FAO en décrétant l’année 2014 "année de l’agriculture familiale", cette agriculture familiale est la seule à même de nourrir sur place ceux qui ont faim… Produire partout… et local. Autre priorité ab-solue : maintenir des campagnes productives autour des villes, où vit désormais plus de la moitié de la population mondiale. Développer le maraîchage "doux", voire des élevages de volailles et de lapins…

Produire mieux… et surtout développer une au-tre agriculture agro-écologique et familiale… Et donner à chaque personne le pouvoir économi-que d’accéder à la nourriture

Il y a bien un choix fondamental à opérer : ou bien on continue à privilégier une agriculture productivis-te, agro-industrielle, à base d’intrants, de pesticides, d’outillages sophistiqués, de semences sélection-nées… Un type d’agriculture qui épuise littéralement la terre, qui peut permettre - et encore ?- de nourrir les classes moyennes solvables du monde, mais certainement pas les masses affamées et insolva-bles. Ou bien on choisit la voie de l’agro-écologie. Les agronomes montrent qu’il est aujourd’hui possi-ble d’atteindre, par des méthodes naturelles, la mê-me productivité que l’agriculture chimique (par exem-ple 8 tonnes de blé, 10 tonnes de maïs ou 50 tonnes de pommes de terre à l’hectare). Mais il ne suffit pas de produire, encore faut-il permettre à chacun de manger, y compris dans les bidonvilles et dans les campagnes les plus reculées. Ce fut l’objet des cam-pagnes dites de "Faim zéro" initiées au Brésil avec le président "Lula" da Silva au pouvoir en 2003. Des campagnes similaires sont lancées au Mexique et surtout en Inde avec sa Loi sur la sécurité alimentai-res (National Food Security Bill).

Terrasser la faim n’est pas hors de portée.… Mais on n’y parviendra que si une volonté économique, sociale, politique - constante et déterminée - se ma-nifeste. A nous de peser sur nos gouvernements et

les institutions internationales concernées.

Jo Briant

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INTER-PEUPLES n°253 février 2017 10

La politique du gouvernement Netanyahu condamnée à l'ONU

Extraits de la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU adoptée le 23/12/2016

Le vote de cette résolution par le Conseil de sécurité de l'ONU le 23 décembre 2016 a été possible dès lors que les États-Unis n'ont pas exercé leur droit de veto, comme ils le faisaient pendant des années pour s'opposer à toute condamnation d'Israël.

Suite à l’adoption de la résolution, Israël a vivement critiqué cette démarche du Conseil de sécurité. "Israël rejette cette résolution anti-israélienne honteu-se des Nations unies et ne s'y conformera pas", ont affirmé dans un communiqué les services du premier ministre Benjamin Netanyahu cités par l’AFP.

De son côté, le président élu des Etats-Unis Donald Trump, qui avait appelé Obama à utiliser le droit de veto, a déclaré qu’après son investiture "tout chan-gerait en ce qui concerne l’Onu" .

Position immédiatement suivie par une motion adoptée par 342 voix contre 80 par la Chambre des représentants des Etats-Unis, critiquant l’attitu-de du président sortant Barack Obama à l’égard d’Israël et décrivant la résolution du Conseil de sé-curité comme un "obstacle à la paix anti-Israël". La

motion recommande aux prochains gouvernements américains de "s’opposer et [de] mettre leur veto aux futures résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies qui […] sont partiales et anti-Israël".

Le vote du Conseil de sécurité de l'ONU, libéré de l'entrave habituelle du veto états-unien, a démontré que la grande majorité des pays membres de ce Conseil (dont la France) reconnaissent et soutien-nent les droits du peuple palestinien et condamnent la politique du gouvernement israélien. Le gouver-nement de Nettanyaou et celui que va installer Do-nald Trump se préparent donc à être quasi totale-ment isolés sur le terrain international.

Le CIIP quant à lui, se félicite de la résolution votée au Conseil de sécurité de l'ONU et pour-suivra ses efforts (notamment en soutenant le mouvement BDS) pour dénoncer la politique d'occupation et de colonisation du gouverne-ment d'extrême droite israélien à l'encontre du peuple palestinien.

« […] Condamnant toutes les mesures visant à modifi er la composition démographique, le caractère et le statut du Territoire palestinien oc cupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, notamment la construction et l’expansion de colonies de peuplement, le transfert de co-lons israéliens, la confiscation de terres, la dest ruction de maisons et le déplacement de civils palestiniens, en violation du droit international h umanitaire et des résolutions pertinentes, »

« Constatant avec une vive préoccupation que la pou rsuite des activités de peuplement israéliennes met gravement en péril la viabilité de la solution des deux États fondée sur les frontières de 1967,

[…] Réitérant sa vision d’une région où deux États démocratiques, Israël et la Palestine, vivent côte à côte, en paix, à l’intérieur de front ières sûres et reconnues,

[…] Soulignant que le statu quo n’est pas viable et que des mesures importantes, c ompati-bles avec le processus de transition prévu dans les accords antérieurs, doivent être prises de toute urgence en vue de 1) stabiliser la situati on et inverser les tendances négatives sur le terrain, qui ne cessent de fragiliser la solutio n des deux États et d’imposer dans les faits la réalité d’un seul État, et 2) de créer les condi tions qui permettraient d’assurer le succès des négociations sur le statut final et de faire pr ogresser la solution des deux États par la voie de négociations et sur le terrain, »

« 1. Réaffirme que la création par Israël de coloni es de peuplement dans le Territoire pales-tinien occupé depuis 1967, y compris Jérusalem-Est, n’a aucun fondement en droit et constitue une violation flagrante du droit internat ional et un obstacle majeur à la réalisa-tion de la solution des deux États et à l’instaurat ion d’une paix globale, juste et durable ;

2. Exige de nouveau d’Israël qu’il arrête immédiate ment et complètement toutes ses activi-tés de peuplement dans le Territoire palestinien oc cupé, y compris Jérusalem-Est, et res-pecte pleinement toutes les obligations juridiques qui lui incombent à cet égard ; […]

4. Souligne qu’il est essentiel qu’Israël mette un terme à toutes ses activités de peuple-ment pour préserver la solution des deux États, et demande l’adoption immédiate de mesu-res énergiques afin d’inverser les tendances négati ves sur le terrain, qui mettent en péril la solution des deux États [...] »

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INTER-PEUPLES n°253 février 2017 11

Angela Davis appelle à la résistance collective Allocution d'Angela Davis à la Marche des femmes du 21 janvier 2017

Le 21 janvier, la Marche des femmes a répondu en si x cents points du globe, à l’investiture du 45 e président nord-américain, Donald Trump : une foule écrasante. Aux États-Unis, on dénombra plus de deux millions de manifestant.e.s : le milliardai re fait en effet l’objet de plusieurs accusations d ’a-gression sexuelle et s’est vanté de pouvoir "tout f aire" sur les femmes, sans souci de leur consen-tement, du fait de sa célébrité médiatique. La mili tante féministe Angela Davis, figure du Mouve-ment noir de libération des années 1970 en était. " Les prochains 1 459 jours de l’administration Trump seront 1 459 jours de résistance", a-t-elle l ancé. Nous reproduisons ici le discours qu’elle a prononcé à Washington traduit pour la revue Ballast .

À ce moment dé-cisif de notre

histoire, rappelons-nous que nous tou-tes et tous qui som-mes ici — ces cen-taines de milliers, voire de millions de femmes, de per-sonnes transgen-res, d’hommes et

de jeunes —, à la Marche des femmes, représen-tons les puissantes forces du changement : nous sommes déterminés à empêcher que ces vieilles cultures racistes et hétéro-patriarcales reviennent au devant de la scène. Nous considérons que nous sommes des agents collectifs de l’Histoire et que celle-ci ne peut pas être effacée comme on efface une page Web. Nous savons que nous nous ras-semblons cet après-midi sur des terres indigènes et nous suivons l’exemple des peuples des premières nations — qui, malgré la violence génocidaire mas-sive qu’ils ont connue, n’ont jamais renoncé à la lutte pour leur territoire, pour l’eau, pour la culture et pour leur peuple. Nous saluons particulièrement aujourd’hui les Sioux de Standing Rock. Les luttes pour la liberté des Noirs, qui ont façonné la nature même de l’histoire de notre pays, ne peuvent être supprimées d’un simple revers de la main. On ne peut pas nous faire oublier que les vies des Noirs comptent réellement [référence au mouvement Black

lives matter, ndlr]. L’histoire même de ce pays est ancrée dans celles de l’esclavagisme et du colonia-lisme — ce qui implique, qu’on le veuille ou non, que les États-Unis sont une histoire d’immigration et d’esclavage. Propager la xénophobie, crier au meurtre et au viol et construire des murs n’efface-ront pas l’Histoire. Aucun être humain n’est illégal.

La lutte pour la planète — contre le dérèglement climatique, pour garantir l’accessibilité à l’eau des terres sioux de Standing Rock, de Flint, du Michi-gan, de la Cisjordanie et de Gaza, pour sauver no-tre faune, notre flore et l’air — est le cœur de la lut-te pour la justice sociale. Ceci est une Marche des femmes et cette Marche des femmes représente la

promesse d’un féminisme qui se bat contre les pou-voirs pernicieux de la violence étatique. Un féminis-me inclusif et intersectionnel qui nous invite toutes et tous à rejoindre la résistance face au racisme, à l’islamophobie, à l’antisémitisme, à la misogynie et à l’exploitation capitaliste. Oui, nous saluons la lutte pour un salaire minimum à 15 dollars. Nous nous dédions à la résistance collective. Nous résistons face aux millionnaires qui profitent des taux hypo-thécaires et face aux agents de la gentrification. Nous résistons face à ceux qui privatisent les soins de santé. Nous résistons face aux attaques contre les musulmans et les migrants. Nous résistons face aux attaques visant les personnes en situation de handicap. Nous résistons face aux violences étati-ques perpétrées par la police et par le complexe industrialo-carcéral. Nous résistons face à la violen-ce de genre institutionnelle et intime — en particu-lier contre les femmes transgenres de couleur.

Lutter pour le droit des femmes, c’est lutter pour les droits humains partout sur la planète ; c’est pour-quoi nous disons : liberté et justice pour la Palesti-ne ! Nous célébrons la libération imminente de Chelsea Manning et Oscar López Rivera. Mais nous disons aussi : libérez Leonard Peltier ! Libérez Mumia Abu-Jamal ! Libérez Assata Shakur ! Au cours des prochains mois et des prochaines an-nées, nous serons appelés à intensifier nos deman-des de justice sociale, à devenir plus actifs dans notre défense des populations vulnérables. Que ceux qui prônent encore la suprématie de l’homme blanc hétéro-patriarcal se méfient de nous. Les pro-chains 1 459 jours de l’administration Trump seront 1 459 jours de résistance. Résistance sur le terrain, résistance dans les salles de classe, résistance au travail, résistance par notre art et notre musique. Ceci n’est que le commencement, et, pour repren-dre les mots de l’inimitable Ella Baker, "Nous qui croyons en la liberté, nous ne nous reposerons pas avant qu’elle n’advienne". Je vous remercie.

Traduction de l’anglais pour Ballast www.revue-ballast.fr/angela-davis-appelle-a-

resistance-collective/

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Voyager autrement

INTER-PEUPLES n°253 février 2017 12

Sac au dos en Palestine

Cinq amies iséroises, proches du CIIP, sont parties en octobre dernier sac à dos en Palestine. Nom-breux contacts, constats amers et révoltés face aux confiscations de terres et à une politique ultra-violente de domination, de colonisation, d’expulsio ns… Un témoignage sensible mais écrasant.

N ous étions 5 iséroises débarquées le 18 octo-bre à l’aéroport de Tel Aviv, avec le projet de

parcourir durant 17 jours la Palestine au contact de sa population et de relier les villes de Jérusalem, Jéricho, Hébron, Bethléem, Ramallah, Naplouse, et Sabastia en bouquet final.

Arrivées en pleines fêtes juives, nous avons connu la vieille ville de Jérusalem-Est confrontée aux traversées incessantes de familles juives, en majo-rité orthodoxes, vers le Mur des Lamentations et à la militarisation accrue et permanente pour leur soi-disant mise en sécurité ! Malaise devant ces dépla-cements jours et nuits, à vive allure, qui parais-saient nier de façon évidente la population palesti-nienne et affirmaient la volonté d’évoluer en terrain plus que conquis…

Nous avons vu de quelle manière Israël s’approprie non seulement le sol de Jérusalem-Est, mais aussi la terre sur plusieurs mètres de profondeur, dans des fouilles sans cesse développées. Ces recher-ches archéologiques visent à réécrire l’histoire en la falsifiant pour prouver l'appartenance de la terre d'Israël au peuple juif "élu de Dieu", et d'appuyer ainsi l’idéologie sioniste. Le but est d’occuper l’en-semble de la terre de Cisjordanie, de s’approprier l’espace, de déterritorialiser l’identité palestinienne. A cette fin, le gouvernement israélien vise à faire venir le plus de familles juives de l'étranger et no-tamment de France où, suite aux attentats et actes antisémites, un sentiment de peur s’est développé chez des personnes de cette confession.

Notre voyage en cars, navettes et à pied, s’est en-suite déroulé dans les superbes paysages de colli-nes et de terre brun-rouge, au milieu des oliviers.

Nous avons très souvent dormi, aux étapes pré-vues, dans les centres d’accueil de camps de réfu-giés1 où des contacts se sont liés. Nous avons été confrontées à la violence qui s’y vit en permanence. Violence de l’armée israélienne qui rentre dans les camps et n’hésite pas à tirer et tuer, exposant les enfants à un jeu très dangereux (les enfants palesti-niens de moins de 18 ans représentent 45,8 % de la population, et 340 d’entre eux se sont trouvés dans les prisons israéliennes en 2015). Violence à l’intérieur des camps entre bandes rivales, due à la folie de cet enfermement, à l’absence d’avenir pour les jeunes qui ne veulent pourtant pas partir des camps, aux multiples formes que prennent les pro-blèmes de santé mentale.

Violence du mur d’apartheid, en particulier à Be-thléem où la présence monstrueuse et le tracé en tous sens dans le nord de la ville, divise, sépare, militarise, vole les terres. Violence des check-points où les militaires humilient et tuent.

Un jeune travailleur social du camp de Bethléem nous a dit : "On ne veut pas la paix, pas peace and love, on veut la justice. Je reste car si je pars je ne reviendrai plus et je dois, à mes père et grand-père, de rester pour le droit au retour dans nos villes et village qui nous a été accordé en 1949".

Une psychiatre franco-américaine rencontrée dans le camp de Naplouse où elle est volontaire, nous expose les multiples souffrances des enfants et des adultes, le besoin permanent de parler, le manque criant de moyens et de personnel. Elle nous parle aussi de ces femmes du camp qui font un travail remarquable auprès des enfants, des femmes.

De fait, nous avons croisé dans ces divers camps des personnes portant à bout de bras des infras-tructures : équipements, services et projets ; cen-tres d’accueil et d’hébergement pour les personnes de passage (le mot accueil prend ici toute sa gran-deur), cantines scolaires et portage de repas aux enfants des familles bédouines voisines, coopérati-ves artisanales, jardins d’enfants, animation auprès des jeunes (sport, musique, dessin et peinture…),

Soldats israéliens à l'intérieur du camp d'Aïda (nord de Bethléem)

Préparation des repas pour la cantine

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Voyager autrement

INTER-PEUPLES n°253 février 2017 13

En Palestine … / …

rencontres de femmes, projet de création d’un cen-tre pour jeunes autistes…

Nous avons rencontré à Hébron des responsables de travaux de réhabilitation (HRC, Hebron Rehabili-tation Committee), en termes de rénovation de l’ha-bitat et de réfection des réseaux d’eau et d’électrici-té, aidés de jeunes volontaires européens ; l’opéra-tion concerne des maisons de la vieille ville, aban-données après l’entrée des colons en 1994 (actuellement 900 colons y vivent entourés de 2000 militaires !!)2

Tous les projets et réalisations bénéficient de finan-cements de divers pays européens, des USA, du Japon, de l'Arabie Saoudite, du Qatar. Hypocrisie de ces pays qui envoient des subventions3 (bien sûr nécessaires), pour se dédouaner auprès des Pales-tiniens de leur absence de condamnation de la poli-tique d’occupation d’Israël, depuis près de 70 ans.

Il n’est pas possible de nier le développement des colonies et des zones industrielles israéliennes, dont les chantiers disent l’expansion.

Comme à Nahalin (entre Hébron et Bethléem) où les propriétaires d’une exploitation agricole (la Ten-te des Nations) se débattent pour conserver la terre qui leur appartient et ont vu se construire, l’enser-rant dans une tenaille, en quelques dizaines d’an-nées, cinq gigantesques colonies israéliennes4 illé-gales puisque en territoire palestinien, dont deux de 40000 à 50000 habitants. Actuellement propriétai-res et volontaires internationaux assistent à la créa-tion d’une très grande école juive avec réseaux de ponts et de routes à la limite de leurs terres, met-tant en péril leur propre chemin d’accès.

Et encore à Hébron, où la pernicieuse avancée des colons dans la vieille ville (création et installation au 3ème étage des maisons, pourtant interdites par l’ad-ministration du patrimoine) a pour but de relier les colonies qui l’entourent par son centre. La résistan-ce se vit au quotidien dans cette ville où les habi-tants sont confrontés aux passages des check-points5, aux assassinats par l’armée, où des com-merçants situés en zone occupée refusent de partir

bien que les habitants aient été chassés et que les touristes désertent ce quartier sinistré.

C'est ici que Djawel nous explique comment l’asso-ciation Youth Against Settlements (Y.A.S)6 a repris une maison palestinienne occupée et saccagée, entourée de l’armée israélienne et de familles de colons. 50 personnes la gardent jour et nuit et orga-nisent, à partir de ce centre, la vie du quartier, en particulier la défense juridique, le portage d’achats à pied à plusieurs (les automobiles ne peuvent pas approcher, et les ânes sont interdits dans la partie de la ville colonisée…), le jardin d’enfants, la cueil-lette des olives (cette année l’armée a limité à 3 jours l’ensemble du ramassage dans cette partie d’Hébron). L’appel aux volontaires est très important pour soutenir et aider. "Une loi civile pour les colons, les militaires pour les Palestiniens », dit Djawel.

Ici, sur les pentes des collines, face au couchant, Et à la béance du temps, Près des vergers à l'ombre coupée, Tels les prisonniers, Tels les chômeurs,

Nous cultivons l'espoir.

"Etat de siège" poème de Mahmoud Darwich (2002)

Difficile pour nous d’accepter les mots sympathi-ques "Welcome France", besoin de répondre que nous sommes en total désaccord avec la politique pro-israélienne que mène le gouvernement de notre pays. Un monsieur nous dit : "J'aime bien les fran-çais, mais je n'aime pas Hollande ni Valls".

Les Palestiniens vivent tous les jours sous la violen-ce d'une armée d'occupation, à laquelle il faut ajou-ter la violence des colons. Ce sont des humiliations, des spoliations, des contrôles permanents, des meurtres.

Il est important de comprendre que ce conflit est territorial, et uniquement territorial.

La maison Youth Against Settlements (Hébron)

Les rues vidées de leurs habitants (Hébron)

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INTER-PEUPLES n°253 février 2017 14

En Palestine … / …

Le sioniste israélien utilise la religion à des fins poli-tique et militaire ; l’idéologie des colons est que cet-te terre leur a été donnée par Dieu, qu’ils sont le "peuple élu" et s’approprient le judaïsme pour faire peur. Les extrémistes religieux sont très présents dans l’armée israélienne et, pour eux, une vie pa-lestinienne ne vaut rien et n’a pas d’existence ac-ceptable.

Une députée du Likoud (Mme Tzipi Hotovely) a dif-fusé dernièrement le message de son gouverne-ment à la communauté internationale : la Cisjorda-nie n’est pas occupée, mais fait partie intégrante de la "terre d’’Israël" : "Il est important de répéter que cette terre nous appartient. Elle est entièrement à nous…." (Le Monde diplomatique, mars 2016).

Tant que le but est de prendre le plus de terres possi-ble il ne peut y avoir de frontières avec l’Etat d’Israël.

Nous remercions vivement toutes les personnes rencontrées, en particulier les femmes de Jéricho, Djawel, les guides Hijazi et Sabri, Amal, Brooke, Pablo, Ahmad de Bethlehem, Abib commerçant d’Hébron.

Anne, Anne-Marie, Claire, Jocelyne et Martine.

↑ Le mur à Bethléem

↓ Consignes à l'entrée des check-points

1/ Les camps de réfugiés se sont bâtis sur des parcelles de terre (publiques ou/et privées) mises à la disposition de l’UNRWA (Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Moyen-Orient), en 1949, par les autorités d’accueil pour y secourir les plus démunis des réfugié.e.s. C’est la seule agence de l’ONU qui soit consacrée à un groupe spécifique de réfugiés. Ces lieux de vie se voulaient temporaires mais l’attachement des réfugiés à leur "droit au retour" (symbolisé par une clef à l’entrée de certains camps) en a fait un symbole de la préser-vation d’une identité palestinienne en exil, fondée sur la mémoire de la terre perdue.

2/ 11000 Palestiniens sont partis depuis cette date, 7500 sont revenus après ces réhabilitations, payant un loyer très ré-duit, l’eau et l’électricité leur étant fournies gratuitement.

3 / L’absence de perspectives de paix rend la situation économique de la Palestine et de Gaza non viable (taux de chô-mage à 27 % en 2016 et de 42 % dans la bande de Gaza). "Plus de la moitié de la terre de Cisjordanie, dont une bonne partie riche en agriculture et en autres ressources, est inaccessible aux Palestiniens" (source Banque Mondiale – 2016).

4/ Cette ferme agricole est située en hauteur et intéresse particulièrement Israël qui cherche à occuper en priorité les points culminants des territoires palestiniens, pour mieux prendre le contrôle du reste.

5/ Israël ne permet pas la liberté de mouvements de Palestiniens qui vivent en Cisjordanie, Gaza ou Jérusalem-Est. De nombreux check points (postes de contrôle), fixes ou mobiles, dans des endroits stratégiques, à l’entrée des grandes villes ou des routes importantes, règlent leurs déplacements, contrôlent leurs mouvements. Ils sont mis en place par les Forces de Défense Israéliennes et tenus par des soldats, filles ou garçons, armés et parfois très jeunes (18 ans). Hébron compte 12 check points permanents ; on en compte une centaine entre Israël et la Cisjordanie.

6/ Initiée par des habitants d’Hébron cette association (Les Jeunes contre les colonies) vise à dénoncer les violences et abus commis par l’armée israélienne et les colons dans cette ville et sont à l’initiative de campagnes politiques inter-nationales.

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Cultures

INTER-PEUPLES n°253 février 2017 15

Les bateaux ivres

J ean-Paul Mari, après avoir été kinésithérapeute est devenu

grand reporter au Nouvel-Observateur durant une trentaine d’années. Il a ainsi effectué des reportages dans le monde entier, principalement dans des zones de conflit (Érythrée, Afghanistan, Timor, Bolivie, Rwanda…). Sen-sible à ce qui se passe près de chez nous, il a publié "Les ba-teaux iv res " , sous- t i t ré "L’odyssée des migrants en Méditerranée" !

Cet ouvrage, se lit "comme un roman", avec la passion, de connaître "la suite", comment "les aventures se terminent". Mais il ne s’agit pas de fictions, mais bien de drames humains de mi-grants qui ont quitté leur village, leur famille, leurs amis pour vivre (ou survivre), chercher un espoir (ou fuir le désespoir), ou tout simplement ne pas mourir. Robiel l’Erythréen, Zachiel l’Afghan ou en-core Mahmoud le Syrien, (et bien d’autres), sont là présents, nous pensons les croiser, les voir à tra-vers leur quotidien au fil des mois, au rythme des épreuves, au tempo des tragédies. Parcours de migrants dans une réalité aride, mais retracés avec une émotion à fleur de peau, un sentiment de com-passion, une humanité qui interpelle notre regard.

« Trente-cinq ans que je cours le monde et ses tourments. La première fois que j’ai vu l’exode d’u-ne population, en dehors d’une guerre, c’était les

boat-people qui fuyaient le régi-me d’Hanoï. Mais ces migrants étaient des réfugiés politiques et le monde les regardait d’un œil b i e n v e i l l a n t . Avec le temps, l’opinion s’est las-sée. J’ai suivi les barques, qui affrontaient le détroit de Gibraltar, les pirogues de la mort pour les Canaries, les zodiacs de Turquie vers l’île grecque de Lesbos, le flot des épaves vers le Canal de Sicile. Jusqu’à Lampedusa. J’ai suivi le sillage de ces bateaux ivres, sur mer et sur terre. Je vou-lais faire le récit de ces hommes et femmes qui ne voient qu’une

seule issue : partir.

Nous, Européens, nous hésitons toujours, entre aveuglement volontaire, compassion et répression. Sans parvenir à définir une attitude réaliste, une politique commune. Pendant ce temps-là, ils par-tent. Avec la force des désespérés ou des conqué-rants. Et rien ne les arrêtera. » (Jean-Paul Mari)

Un creuset pour se forger une soif de solidarité, une envie de se dépasser, une révolte d’humanité !

Philippe Savoye

* Ed. Jean-Claude Lattès, Essais et Documents, septembre 2015, 278 p.

Page 16: B. Brecht Inter-Peuples - ciip.fr fileAu plan financier, la capitalisation boursière des 100 plus grandes fir-mes mondiales (dont 54 sont étatsuniennes) est à 62% entre les mains

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INTER-PEUPLES n°253 février 2017

D’où es-tu ? − D’où es-tu ? − De Syrie. − De quelle ville en Syrie ? − Je suis née à Dara. J’ai grandi à Homs. Je me suis

épanouie à Lattaquié. J’ai rajeuni à Banias. J’ai fleuri à Jesr Alshhogor. J’ai brûlé à Hama. Jesuis entrée en éruption pour Edleb. J’ai tonné à Déralzur et j’ai été éclair à Qamishli. Et massacré à Daraya.

− Qui es-tu ? − Je suis celle qui leur fait peur

Je suis celle qu’on emprisonne je suis celle qu’on brûle Je suis celle qu’on tue.

C’est moi… qui fait fleurir les arbres du cœur quand je passe qui fait tomber les montagnes de leur hauteur qui fait revenir l’histoire sur ses pas et qui colore la terre de mon soleil. C’est moi… celle qui crie à la face du dictateur. Celles qui vit seulement dans les esprits nobles celle que connaissent seulement les cœurs des héros celle qui ne marchande pas et qui n’est pas à vendre.. Je suis le pain de la vie et son lait Mon nom est Liberté.

Maram al-Masri in "Elle va nue la liberté"

traduit de l’arabe (Syrie) par l’auteure Editions Bruno Doucey, 2013