B-6 LES PAYSAGES DE VIGNES ET VERGERS - Cher · des vins de consommation courante et chaque ferme...

B-6 LES PAYSAGES DE VIGNES ETVERGERS

PAYSAGES DE VIGNES ET VERGERS page 327

RÉPARTITION GLOBALE SUR LE DÉPARTEMENT

Vignes et vergers : les principales implantations dans le département


GRANDES CARACTÉRISTIQUES

Lorsque les vignes et les vergers constituent la principale modalité d'occupation du sol, ils composent unpaysage spécifique, peigné par les rangées de plants ou d'arbres, un paysage abstrait qui révèle par ses

alignements les moindres ressauts du relief. Les unités classées en tant que telles correspondent à de grandessurfaces occupées pour plus des trois quarts par ces cultures. Comme le montre la carte ci-dessous, cespaysages sont localisés sur les reliefs qui séparent les terrains de Jurassique et du Crétacé, dont la vigueur,la nature des sols et l'exposition sud sont très favorables à la vigne ; la seule exception est le vignoble deQuincy-Reuilly, installé sur terrains sans modelé significatif. Les vergers disséminés dans les secteurs debocage se sont considérablement développés au cours des dernières décennies dans la région de Saint Martind'Auxigny (verger Forestin) ; les quelques implantations notables (Ivoy-le-Petit, Nançay, Lugny-Champagne,Le Chautay et Tendron), n'ont pas une taille suffisante pour figurer autre chose qu'un événement particulierdans le paysage qui les accueille.


La vigne : le renouveau après une période de déclin

Carte des communes viticoles réparties par vignoble

"La diminution de la consommation de vincourant, les incitations aux arrachages et ladisparition soutenue des petites unités necommercialisant pas leur production ont induitune diminution des surfaces en vignes (que) lesreplantations en vin d'appellation n'ont pastotalement compensé (…)"4 9. Les vignesoccupaient au début des années 1990 environ1 % des surfaces agricoles, elles ontlégèrement progressé depuis, notamment dansles régions de Sancerre et Quincy. Dans lemême temps l'économie viticole connaissait unspectaculaire redressement, conduitinitialement par la notoriété grandissante desvins d'appellation du Cher, au premier rangdesquels le Sancerre. Le départementcomporte un peu moins de six centsexploitations viticoles qui commercialisentleur production et les deux tiers sont situéesdans l'aire du Sancerre. Avant la crise duphylloxera puis la baisse de consommation devins de table, le vignoble était fort répandu :les vins de qualité, aujourd'hui classés en AOCou VDQS, cohabitaient avec de trèsnombreuses petites exploitations produisantdes vins de consommation courante et chaqueferme avait sa vigne destinée à laconsommation familiale, la majorité desfinages communaux possédaient alors desterres en vigne. Aujourd'hui cetteomniprésence n'existe plus mais la viticultureest devenue une activité économique depremier plan, qui se répartit dans le Cher encinq vignobles : quatre sont classés en A.O.C.,le Sancerre (14 communes), Menetou-Salon(10 communes), Quincy (2 communes), Reuilly(5 communes dans le Cher auxquelless'ajoutent 2 communes de l'Indre) et unvignoble est classé en V.D.Q.S., leChâteaumeillant (4 communes dans le Cher et4 dans l'Indre).

Sancerre est aujourd'hui avec Pouilly-sur-Loire le plusréputé des vignobles de cette région et celui quireprésente l'activité la plus importante et poursuit undéveloppement constant ; Menetou-Salon, qui correspondà une très ancienne implantation d'origine monastiques'est beaucoup développé au cours des dernières années.Le vignoble de Quincy, qui fut le premier du départementà recevoir l'appellation d'origine en 1936, est en phase derenouvellement récent après une période de sénescencedans les années 1990, en partenariat avec son voisin leReuilly. Le vignoble de Châteaumeillant est ancien,relativement morcelé et se renouvelle peu.

Le vignoble Sancerrois

49 In AGRESTE, Recensement Agricole 1988, la viticulture dans le Cher (source : Ministère de l'Agriculture et de la Forêt)

PALETTES CHROMATIQUES


Les couleurs de la vigne

Les ors, les cuivres et les rouges de l'automne, feu fugace avant le retour de l'hiver

La montée progressive des verdures et la ponctuation des fruits

Couleurs d’hiver, de terre et de bois sec

Le verger du Cher est relativement morcelé enpetites et moyennes exploitations dans

lesquelles les fruits ne sont en général pas laproduction unique, avec néanmoins la notableexception de la région de Saint Martin-d'Auxignysituée à la rencontre entre le cœur du Pays Fort etl'arc forestier Vierzon-Bourges. La production dudépartement se fonde essentiellement sur lesfruits à pépins, mais les arbustes à baies et petitsfruits commencent à se développer dans certainesrégions bocagères, où ils peuvent représenter unealternative intéressante pour des parcelles endéprise. Le verger Forestin s'est considérablementétendu au point de devenir une quasi-monoculturelors de la grande conversion de l'arboriculturefruitière qui vit les pommes américaines et enpremier lieu les variétés de golden supplanter lesvariétés traditionnelles.

Arboriculture fruitière à Saint Martin-d'Auxigny

Les vergers, le morcellement et l'exception du verger Forestin


Les couleurs du grand verger

LISTE DES UNITES

6-1 CHATEAUMEILLANT6-2 MENETOU SALON6-3 SANCERRE6-4 QUINCY REUILLY6-5 LE VERGER FORESTIN

Les techniques modernesd'exploitation ont un fort

impact sur l'aspect plastique duverger (voir ci-dessous ladescription du verger Forestin),les couleurs des pommiers et

notamment de leur floraisonprintanière d'un délicat blancrosé étant le plus souventmasqué par les nappes blanchesdes filets de protection contrela grêle.

Les teintes et matièresdominantes sont fonction de

l'occupation du sol par levignoble : la situation n'est pasla même dans le Sancerrois où ilreprésente quasiment unemonoculture et dans la région deChâteaumeillant qui est unemosaïque bocagère et viticole. La spécificité de la palette descouleurs essentiellement

offerte par le dialogue entre lavigne et la terre nue, qui sedécompose en trois séquencesau cours de l'année : l'imagehivernale est dominée par lesteintes terreuses, les beiges etles bruns piquetés de cailloutisblanchâtres du sol jouent avecles nuances des piquets et desceps, gamme des gris des brunset des noirs.

La saison de végétation apportele vert des feuillages, vertstendres de plus en plus saturés àmesure que la belle saisons'avance et bientôt ponctué del'or ou du mauve profond desgrappes, puis l'automne pare lesparcelles de ses infinies nuanceschaudes et rubescentes.

Les floraisons et les verts tendres, toujours partiellement occultés par le blanc des nappes

Couleurs d’hiver, les bois et la terre nue à demi cachés par le blanc des filets

6- 1 CHATEAUMEILLANTLe vignoble dissimulé dans le bocage

Sur un relief rythmé par des ondulations parallèles, le vignoble s'insinue dans une tramebocagère dense qui le dissimule partiellement. Les parcelles de vigne, qui sont souventde taille modeste et entourées de haies, composent un "bocage viticole". C'est unpaysage particulier qui sait cependant s'installer dans la continuité de son entour, auxconfins des bocages de Marche et de Boischaut.


COUPE

A

B

Un relief légèrement ondulé dans lequel s'insère le bourg

Un paysage de mosaïque touffue rythmé par un relief régulier


DESCRIPTION GENERALE

Le territoire affecte uneforme ondulée en une

succession de petits thalwegsséparés par des lignes de crêtesparallèles, de directionnord/nord-est qui rythmentrégulièrement le paysage et sontsoulignées par une occupation dusol qui fait alterner des lignesde haies et les parcellesviticoles mêlées de prairies.

Le chef-lieu de canton occupe lecentre de son finage par uneurbanisation cruciforme qui sedéveloppe sur les deux versantsde la vallée centrale. Le bourgs'insinue dans les plis du reliefdont émergent les toitures detuiles et la silhouette dequelques édifices anciens.

Le "bocage à vigne" de Châteaumeillant

L'unité 6-1 correspond à lapartie du vignoble VDQS de

Châteaumeillant qui occupe lefinage de la commune éponyme.Ce vignoble n'a pas vocation àoccuper tout le territoire, ils'agit plutôt de petitesexploitations polyvalentes et lesparcelles viticoles sont inséréesdans la trame bocagère quihabille ces paysages de confinsentre Marche et Boischaut. Lescommunes de Vesdun, Reigny etSaint Maur, qui sont inclusesdans la zone productrice de VinDélimité de Qualité Supérieurede Châteaumeillant, possèdentune proportion de terresencépagées qui ne leur confèrepas un caractère particulier. Enrevanche, la caractéristique du

paysage de la commune deChâteaumeillant est ce mélangeintime entre vignes et prairiesdans lequel les parcelles

viticoles, souvent encloses dehaies, composent ce que l'onpeut appeler un "bocage à vigne".


Structure du bocage viticole

L'insertion de Châteaumeillant dans le relief

Les extraits cartographiquesci-dessous, montrent le détail

de la répartition des parcellesviticoles et leur insertion dans latrame bocagère. Les terres qui

ne sont pas cultivées en vignesont majoritairement en prairiede fauche ou en pâture avecquelques traces de polyculture.Les haies comportent quelques

bouchures et de nombreusesfigures d'altération : haiesépaissies, bouchures montées,quelques arbres reliques.

Les formes du bocage viticole


LES ENJEUX DU PAYSAGE

LISTE DES COMMUNES

Le construit se répartit en groshameaux inclus dans la tramebocagère, peu visibles ;l'urbanisation s’étire le long des

routes qui rejoignentChâteaumeillant qui tend às'étendre linéairement,essentiellement vers le nord, et

se limite au sud sur la trace de lavoie ferrée et de la déviation dela RD 943.

Châteaumeillant

L'image de ces figures intimesse fonde sur un équilibre

entre deux éléments destabilités différentes : levignoble, bien qu'il ne semblepas destiné à se développer etsoit essentiellement constituépar des plantations anciennes,semble assuré de perdurergrâce à la qualité des "vins gris"qu'il produit, tandis que les

parcelles agricoles proprementdites donnent de nombreuxsignes de régression : montéedes ligneux dans les pâtures,densification des haies quis'épaississent et envahissementfréquent par les robiniers, ycompris dans certaines parcellesen vigne. Cette mixité de l'occupation dusol et l'imbrication entre ses

deux termes rendant difficileune rationalisation du terroirnon viticole, il y a lieu decraindre que la déprise nes'étende. Il est par ailleurs peuvraisemblable que le vignoblepuisse avoir vocation à occupertout le terrain et le principalenjeu est le risque de fermeturedu paysage.

Début d'enfrichement L'épaississement des haies rend floue l'image du paysage

6- 2 MENETOU- SALONLa transition viticole

Le vignoble de Menetou-Salon est disposé sur le dévers de la cuesta du Pays Fort à l'estdu verger Forestin. Ces deux unités expriment le passage entre les massifs boisés duPays Fort et de la Sologne et la plaine ouverte de Champagne Berrichonne. Le paysagede Menetou s'ouvre vers l'aval, figurant le versant extraverti de cette transition.


COUPE


Le vignoble AOC concerne lescommunes de Menetou-

Salon, Quantilly, Vignoux-sous-les-Aix, Pigny, Soulangis,

Aubinges, Morogues, SaintCéols, Parassy et Humbligny. Lestrois premières constituentl'unité de paysage viticole car

ce sont leurs finages quiaccueillent la plus grandeproportion de terres à vignes ;les sept autres coïncident avec

A

B

Ce paysage se situe auvoisinage immédiat du verger

Forestin, avec lequel il composeun couple de paysages dessinéspar ces cultures particulièresqui lui confèrent une certaine

abstraction. Les deux modesculturaux semblent s'êtreréparti les rôles : le verger surle piémont et enchâssé dans lalisière forestière et le vignoblesur le dévers, dans la situation

bien exposée, tourné vers laplaine de ChampagneBerrichonne.


L'occupation du sol et le paysage ouvert

La transition paysagère

un tronçon vigoureux de lacuesta du Pays Fort, dont lamorphologie conduit à les rangerdans les paysages déterminéspar le relief (unité 5-4). Commele fait apparaître la carte ci-dessous, les parcelles de vignessont essentiellement groupéesau sud sur le rebord du versantbien exposé du dernier ressautde la cuesta.

Le vignoble de Menetou qui"représente les restes d'unvignoble très ancien qu'avaientsu mettre en valeur les moinesdu prieuré de Saint Sulpice"50

connaît une expansion régulièrequoique modeste depuis unevingtaine d'années avec unaccroissement de 8 % par an dela superficie classée en AOC.

Le terroir est essentiellementoccupé par des formations

ouvertes, la vigne dont la faiblehauteur offre des profondeursde vues, des parcelles labouréeset quelques prairies ; c'est unpaysage ouvert sur sa frangesud-est qui domine la plaine.Seule la partie nord comportequelques bois qui font partie ducœur du Pays Fort et fondent lalimite septentrionale de l'unité.Des haies et quelques vergers etjardins composent un cadrearboré autour de l'urbanisationde Menetou dont les espaces

publics sont eux-mêmesstructurés par des arbresd'alignement ; cettedensification du paysage vers lenord-ouest participe à l'idée detransition qui est décrite dansl'alinéa suivant.La partie aval, viticole etouverte est un paysage"modernisé" par les pratiquescontemporaines de la viticulture.La mécanisation a engendré unemodification profonde despratiques culturales et lepaysage a changé lorsque les"vignerons" sont devenus des

"viticulteurs" ; la vignetraditionnelle était composée depetites parcelles séparées pardes terres de culture, despetits boqueteaux et desprairies que paissaient chèvreset vaches laitières. Lescontraintes de la mécanisationont conduit à rationaliser lepaysage : les remembrementsont permis de créer desensembles plus vastes, quemontrent la carte ci-dessus(regroupement du foncier à l'estet au sud de l'unité, quasi-absence de haies).

Vignes, bois et vergers alternent avec l'herbe et le labour

50 In AGRESTE, Recensement Agricole 1988, la viticulture dans le Cher (source : Ministère de l'Agriculture et de la Forêt)


La vigne et relief : répartition des parcelles sur le dévers sud

Le vignoble comme un livre ouvert sur les paysages de la plaine

Ainsi le paysage ménage-t'il unesubtile et régulière transitionentre l'épais manteau forestierde l'arc de Vierzon-Bourges etl'ouverture de l'openfield. Amesure que le terrain descend ladénivellation de la cuesta, ontrouve successivement la forêt,sa lisière puis un ordre arboréde moyenne grandeur avec lesvergers, très denses versl'amont et s'émiettant versl'aval (voir carte du verger auparagraphe 6-5) puis uneséquence de marges danslaquelle se mêlent vignes etvergers. Le vignoble, avec lafaible hauteur de ses ceps offreune vision panoptique vers laplaine, au pied de la cuesta,l'openfield totalement ouvertseulement planté de boqueteauxest animé par les rubans vertsdes vallons de l'éventail (unité3-9). Il s'agit donc d'une unitétrès "stratégique" puisqu'elledonne à comprendrel'articulation entre plusieursdes types d'ambiances quicaractérisent le nord dudépartement. Il en est souvent

ainsi des paysages comportantdes panoramas : ils aident à lirele territoire, la charnière deNérondes met en scène lesstades d'évolution des bocagesde l'est, Sancerre donne àcomprendre le Val de Loire et la

relation ambiguë qu'il entretientavec le Cher et Menetou-Salonoffre à la fois la lecture de laplaine et de sa relation avec lespaysages forestiers et le PaysFort.



LISTE DES COMMUNEES

Ces deux photographiesillustrent la situation detransition de ces paysages àpartir du bourg de Menetou lui-

même, paradigme de cettesituation : son cœur s'organiseautour d'un vaste espace publicrectangulaire qui oriente le

regard d'un côté sur lespaysages fermés et sombres dumanteau forestier et de l'autresur le vignoble et la lumière.

La modernisation despratiques culturales dans ce

paysage très ouvert et visible deloin n'est pas sansconséquences. Le site tend versune perte de complexité dans sapartie sud et par ailleursl'extension des exploitationssuppose une modification dubâti. Les chais qui étaientregroupés dans les villages sevoient peu à peu remplacés pardes bâtiments volumineux

disposés en rase campagne, lesmaisons de village ne conservantsouvent que la partiecommercialisation. L'impact deces bâtiments mérite attentionet une recherche des conditionsd'implantation et d'adaptationau terrain, un travail sur laforme les textures et la couleursemblent indispensables. Cetenjeu est commun aux deuxvignobles voisins même s'il estmoins aigu ici que dans certaines

parties du Sancerrois. Laquestion du maintien ou de larestitution de certaines formesde structures arboréesmériterait également d'êtreposée (plantation des bords dechemins, reconstitution partielled'une trame de haies).

Menetou-SalonQuantillyVignoux-sous-Les-Aix

Vue vers le nord-est

Vue vers le sud-ouest

6- 3 SANCERRELe paysage emblème est- il en danger ?


COUPE

A

B


La première appréhension de Sancerre en venant de Bourges : l'oppidum comme une île posée sur un océan de vignes

Sancerre est sans équivoque l'un des sites les plus prestigieux de sa région, que separtagent les deux départements riverains de la Loire. Certes la silhouette del'oppidum encadré par ses deux gardiennes boisées appartient au Cher auquel il offregénéreusement ses coteaux peignés par la vigne, mais la vue la plus noble et la plusinsolite, c'est la Nièvre qui en bénéficie et le Sancerrois est un lieu de promenadeprisé des Nivernais autant que des Berrichons. Quand la nouvelle autoroute A 77passe à proximité c'est cette forme sans équivalent qu'elle utilise comme unesignature pour évoquer les qualités du paysage qu'elle traverse. Sans doute la Loireest elle seule à pouvoir réellement revendiquer Sancerre, figure ligérienne parexcellence. Place aux deux visages, silhouette majestueuse pour la Nièvre qui laisse àpeine deviner le château sur son éperon, elle offre au Cher le double spectacle decette citadelle à l'indicible charme et de l'immense drapé de son vignoble, qui profiteainsi majestueusement de son voisinage avec le Val de Loire.S'il est un paysage d'exception, le Sancerrois n'en est pas moins soumis à despressions qui peuvent mettre en danger son image. La modernisation des pratiques desviticulteurs a profondément modifié le paysage : les conditions écologiques et le visagedu Sancerrois viticole a radicalement changé en moins de trente années. La présencesur le site de figures reliques de la situation passée comme la vallée de Chavignol,véritable "fossile paysager" permet heureusement de prendre la mesure du risque.



Un relief singulier et fondateur

L'unité 6-3 comprend la partieviticole située en covisibilité

avec Sancerre, la butte

couronnée par la cité et sondévers jusqu'à la vallée de laLoire.

Le site est modelé par deuxfailles parallèles entre

lesquelles émerge la série destrois collines de Thauvenay,Sancerre et Saint Satur. Lesfaces orientales des faillesplongent de manière abruptedans la Loire et les facesoccidentales sont des pentesd'éboulis caillouteux et decolluvions creusées de vallonsconcentriques. La pentegénérale s'incline vers l'ouest etcependant est recreusée par lesvallons de deux ruisseaux qui sedirigent vers la Loire, (donc versl'est) qu'elles rejoignent aprèsavoir entaillé par deux cluses laligne des collines. La cluse de laColette au centre sépare labutte de Sancerre et celle deSaint Satur et la cluse de laBalaine se jette en Loire au nordde la colline du bois de Charnes.

Cette disposition paradoxale durelief modelé par des ruisseauxqui érodent à contre pente acréé des vallons quis'approfondissent vers l'aval etcomposent avec leurs affluentstout un système de creuxlinéaires et de crêtes, de formerayonnante au sud de Sancerre(les vallons convergent vers lacluse de la Colette) et dedirection parallèle au cours de laBelaine dans la partie nord. Cerelief très singulier crée ungrand nombre de côtes et devaux que la toponymie souligne :la Rue de Vaux, le Vallon, lavallée de Chavignol pour lesthalwegs, côte de Verdigny, côted'Amigny, côte de Montdamné,côte de Champtin pour lesversants. Cet enchaînement dereliefs multiplie les situationsd'expositions favorables sur dessols de colluvions riches encalcaires, secs et bien drainants

parfaitement adaptés à laculture de la vigne.Singulièrement favorisée parune nature clémente, avec undébouché sur la Loire offert parla cluse de Saint Satur,Sancerre ne pouvait devenirautre chose que ce haut lieu desvins de Loire, le premier sur legrand val.

L'unité de paysage 6-3comporte cette zone de "reliefparadoxal" à laquelle s'ajouteune petite partie viticole duversant du val de Loire situéeau-dessus de Ménétréol-sur-Loire et Thauvenay.

La cluse de la Colette, une fenêtre vers la Loire entre les collines


Le vignoble se déploie égalementplus à l'ouest dans un paysaged'un autre type, qui a été nommé"narthex du Sancerrois" car il

met en scène l'approche deSancerre sans en montrer lasilhouette ; comme il se trouveaux confins imbriqués de la

plaine et de la cuesta il a étéclassé parmi les paysages mixtes(plaine et relief, unité 12-1).

Carte du relief


Les paysages du vignoble, les traits communs

Un subtil dosage d'ampleur et d'intimité

Le paysage du Sancerrois secaractérise par son ampleur,

son échelle et son rapport avecles paysages ligériens. La vigneomniprésente semble partout sedérouler sur les plis du relief. Laterre Sancerroise ressemble àun tissu, serge beige et griseimprimée de fines rayures enhiver, elle devient vert amandeau printemps lorsque ses raiess'estompent puis elle setransforme avec la pleinevégétation des ceps en unvelours vert émeraude qui separera d'ors et de cuivrespendant une courte périodeautomnale.C'est un paysage paradoxal carune unité apparente cache unegrande diversité. Si la vigne etle rapport à la colline coifféepar la citadelle et à la Loire sontomniprésents, nombreuses sontles nuances : le Sancerrois estune succession de lieux,

d’ambiances, de formesextrêmement diverses queréunit un relief puissant et unecommune ouverture vers laLoire. Richesse et diversité dansune ampleur commune.

L'omniprésence des drapés de la vigne qui habillent les courbes du relief

Chavignol, symbole du Sancerrois est l'un des "toponymes de sa notoriété"

C'est en effet un paysage quisait à la fois se donner

entièrement à voir tout enréservant surprises et nuancessubtiles : au détour d'unchemin, dans les replis d'unvallon, tout à coup l'échellechange, on a la sensation de setrouver dans une pièce close. Leparcellaire prend d'autresdimensions, le motif s'enrichitde nouvelles composantes,boqueteaux ou villages dont onne pouvait soupçonner laprésence.

La vallée de Chavignol est leparadigme de ces figures à la

fois intimes, cachées etpourtant emblématiques du site.Elle en exalte lescaractéristiques par son

orientation en fenêtre surl'oppidum (à la naissance duvallon de la Colette l'orientationde ses versants dirige le regard

vers la cluse qui découpe la facenord de l'éperon), samarqueterie de vignes et deparcelles en friche qui lui donne

Les zones remembrées et l'importance de quelques noyers ou d'un bâtiment posé sur une ligne de crête


d'harmonieuses proportions etpar son bâti enfin qui a su

garder presque intacte sonimage originelle, comme le

montre la comparaison avec lesannées 1950.

Cette vallée est par ailleursdoublement emblème puisqueson toponyme est à la source dela deuxième célébrité de cepaysage, due au fameux crottinde Chavignol, indispensablecompagnon des vins blancs deSancerre.La partie orientale sur le déversde la faille en dehors desvallons, et sur le piémont nord

de la butte de Thauvenay, c'est-à-dire les parties amples etconvexes du relief,généralement remembrées sontbeaucoup plus univoques, le"drapé uni" remplace le"patchwork". C'est un autrepaysage, dans lequel chaqueverticale fait événement, c'estune logique paysagèred'openfield viticole. Un noyer

isolé au coin d'un chemind'exploitation prend tout à coupune importance singulière, c'estaussi le cas d'un édifice (quipeut être une cabane devigneron échappée de ladestruction (il en reste peu) ouun bâtiment récent parfois très(trop ?) visible.

Le bâti en vallée de Chavignol en 1950 et en 2001, un site qui a su traverser les décennies


La répartition différentielle du parcellaire exprime l'évolution récente

La carte ci-dessus montre larépartition du vignoble,

c'est-à-dire des parcellescultivées en vigne à l'époque del'analyse des photographiesaériennes qui servirent àactualiser la carte IGN51 qui

sert de référence à cetteétude. On observe que latotalité des reliefs décrits plushaut est pratiquement occupéepar la vigne. Si l'on pouvaitdisposer de relevés plusrécents, on constaterait

certainement une extension dessurfaces d'un seul tenant, unediminution du fractionnement enparcelles, un accroissement dela "marée viticole". Or lasituation était tout autre voiciun peu plus de trente ans,

51 Source: SCANN 25, fin des années 1990


Sancerre, cité et site

Le rapport de symétrie entrele village et le paysage est la

clé du Sancerrois : le village està la fois acteur et metteur enscène du paysage. Acteur car levillage ne cesse de se montrer

sous toutes ses facettes etdepuis tous les points cardinaux,metteur en scène car depuis seshauteurs construites ce que l'oncontemple est un livre ouvertsur le paysage, une vision

panoptique du vignoble, du Valde Loire et de leur intimerelation.

VIGNOBLE SANCERROIS 1950

comme le montre cette image duSancerrois dans les années 50.Le paysage était entièrementfondé sur l'image actuelle deChavignol : bâti groupé dans lesfonds, marqueterie de parcellesde la "culture en damiers" (cf.infra, paragraphe "les enjeux dupaysage").

Comparé à cette image, lepaysage actuel semble s'être"lissé" comme s'il avait perduses aspérités qui se fondaientsur un talus de bord de chemin,un champs broussailleux, unbouquet de chênes torses ou unnoyer isolé. On constate en faitque le vignoble montreaujourd'hui un double visageavec d'immenses surfacesunivoques d'où semble avoirmême disparu le parcellaire etquelques scènes qui peuvent serapprocher de l'image ancienne.Ces figures qui s'opposentmarquent la différence entre lesportions de terroir qui sontremembrées et celles qui ne lesont pas. Le paysage ne perd pasici sa force car le relief en est leprincipal déterminant, parcontre il y laisse un peu de sonâme et de son charme, et hélasaussi à moyen terme une partiede ses potentialités écologiqueset agrologiques (cf. infra:paragraphe enjeux).


Le panorama de Sancerre vers l'ouest, clé de compréhension du vignoble

Le panorama de Sancerre vers le sud, la vigne, la Loire, le Nivernais… Sancerre, paysage charnière.



L'évolution des pratiques culturales peut-elle mettre le paysage en danger?

La culture traditionnelle de lavigne était un système en

damier sur de petites parcellesque résument les illustrations

ci-dessous. Ceci permettait, enfaisant "tourner les parcelles",de réserver des terres à lafriche qui avaient pour effet de

ralentir le ruissellement et delimiter l'érosion des sols sur lessecteurs de forte pente.

Figure d’évolution des techniques de culture : lechoix de la mécanisation et la contrepartie duruissellement

La technique traditionnelle de la culture en damiers ou comment freiner les eaux


Par ailleurs sur les zones deforte pente les rangées de cepsétaient disposées dans le sensdes courbes de niveau ce quiavait également pour effet deralentir le ruissellement. Lessecteurs remembrés sontorganisés selon une logiqueopposée, fille de la modernité,de la rationalisation… et del'économie. Le changementculturel qui fut évoqué dans lecas du vignoble de Menetou-

Salon (la transformation du"vigneron" en "viticulteur", onpourrait écrire aussi du "paysan"en "exploitant"…) prend ici unedimension tout autre entransformant le paysage maisaussi les conditions écologiquessur une grande échelle. Sur unfoncier totalement remanié, lesplantations furent disposées surles lignes de plus grande penteafin que pussent travailler lestracteurs enjambeurs sans

risquer à tout moment d'aller "àverse".Le terroir du Chablisien enBourgogne qui a connu la mêmeévolution au début des années1990 : arasement des murettes,remembrements et encépa-gement sur les lignes de penteest aujourd'hui confronté à degraves problèmes d'érosion etd'inondation. Pour tenter d'yfaire face, d'énormes fossésbétonnés ont dû être aménagés

La technique moderne : l’exemple de la butte qui domine Ménétréol et fait face à Sancerre


Le construit, l'autre enjeu de la modernité

qui transforment radicalementl'aspect du site. Si Sancerren'en n'est pas encore là, on peutcraindre qu’il subisse les mêmesaléas. Un entretien avec unvigneron de Chavignol a laisséentrevoir aux auteurs unepremière conséquence desmodifications subies par lemilieu. Selon cet interlocuteur,les secteurs remembrés fontapparaître de grossesdifférences qualitatives entreles grappes cueillies en tête ouen pied de pente en raison du

lessivage des éléments minérauxdu sol. Ce phénomène oblige àmêler les cuvées, pratiquetotalement nouvelle enSancerrois. Il semblerait doncque non seulement le paysagesubisse les conséquences d'uneévolution régressive(homogénéisation et perte decomplexité) mais que lesconditions écologiquessouffrent aussi de la dynamiqueévolutive qui prévaut… maispeut-être est-ce la conditionindispensable d'une remise en

cause, puisque à terme économieet paysage verront "convergerleurs intérêts". Il ne s'agit pasici de défendre une quelconqueidée nostalgique mais desuggérer que dans un processusde mutation, il n'est jamais bonde ne prendre en compte qu'unseul paramètre, fut-iléconomique…

Corollaire de la dynamiqueprécédemment évoquée,

l'évolution du bâti d'exploitationpose également des questions depaysage. La pratique anciennedes petites parcelles allait depair avec des chais et cavesinclus dans les villages, ce quiexplique les très nombreuxécarts qui composent la strateconstruite du Sancerrois, et laprésence de nombreusescabanes de vignerons en pierrequi abritaient les hommes et lesoutils et ponctuaient le vignoble.La montée en puissance desexploitations, le soucicommercial de l'image, le besoinde place et la recherche d'unconfort des conditions du travailœnologique ont conduit bonnombre d'exploitants à édifierdes bâtiments nouveaux. Grandsvolumes, couleurs et formesarchitecturales parfois bienostentatoires, dispositionsouvent à l'écart des noyauxd'habitat pour des raisons delogistique, réaménagementcorollaire de la trame deschemins en réseau routier. Voiciquelques exemples desprincipales dérives que peutinduire cette dynamique.


L’état actuel des protections au titre des sites: l’oppidum et les versants dela vallée de la Loire

Renforcer les protections ou accompagner le développement ?


LISTE DES COMMUNES

Le site de Sancerre estprotégé au titre des sites et

des monuments historiques.L'oppidum est un site inscrit etles versants vers la Loire sontinscrits52 en partie : la partienord, entre Sancerre et SaintSatur et deux parties surMénétréol… qui évitentsoigneusement les secteursviticoles. Bien qu'il soit difficilede faire admettre des mesuresrestrictives vis-à-vis du droit dusol dans un espace de productioncomme celui-ci, il semble que lagravité des problèmes qui risquede survenir mériterait uneréflexion d'un type nouveau, quiunirait préservation et

évolution, c'est-à-dire qui sesituerait dans la logique dudéveloppement durable. Il n'estpas impossible d'imaginer uneprotection paysagère assortied'un cahier de gestion à la foisstrict et réaliste qui préciseraitles marges de manœuvre,fixerait un certain nombre derègles (équilibre entreparcellaires ouverts etstructures de préservationcontre l'érosion, règlesd'implantation et directivesarchitecturales pour lesbâtiments, étude fine desdessertes etc…) assorties de larecherche d'aides spécifiquespermettant de compenser

d'éventuels manques à gagner.Que cette hypothèse soit ou nonretenue, elle devrait êtreprécédée par la mise en œuvred'une charte, signée par tous lesacteurs de ce paysage (élus,professions agricoles,associations professionnellesdes viticulteurs, associations deprotection, comitédépartemental du tourisme enpartenariat avec lesadministrations compétentes).Cette notion de charte serait entout état de cause un recoursindispensable, que fut ou nonretenu le principe d’uneprotection.

BannayBuéMenetou-RâtelMénétréol-sous-SancerreSaint-SaturSancerreSury-en-VauxVerdignyVinon

52 Rappelons que dans le cas d'un site classé aucune modification n'est possible sans l'accord du Ministre compétent et dans le cas d'un site inscrittoute modification est soumise à l'avis de l’ Architecte des Bâtiments de France.

6- 4 QUINCY- REUILLYLe vignoble extraverti

Ce vignoble réputé installé sur une portion sablo-graveleuse de l'interfluve qui sépareles vallées du Cher et de l'Arnon, récemment rénové semble se montrer fièrement àtravers des marques ostentatoires de son dynamisme. Des parcelles viticoles jardinées,des bâtiments pimpants et de curieux engins de protection contre les gelées donnentune image singulière à ce paysage "extraverti".


COUPE

A

B

Répartition du vignoble et mixité du paysage



Les vignobles de Quincy etReuilly sont installés sur

l'interfluve qui sépare lesvallées du Cher et de l'Arnon etoccupent sur une petite partiedu versant occidental de cettedernière un plateau à faiblerelief, recouvert de terressableuses et graveleuses trèspauvres qui sont issues desdépôts alluvionnaires des deuxrivières. Le vignoble AOC deQuincy intéresse deuxcommunes, Quincy et Brinay, etcelui de Reuilly deux communesde l'Indre et cinq du Cher:Lazenay, Chéry, Cerbois, Lury-sur-Arnon et Preuilly. L'unité 6-4 concerne la partie de cetteaire d'extension qui marque le

paysage de l'empreinte viticole,c'est-à-dire le Quincy et unefraction du vignoble de Reuilly(la commune éponyme se situedans l'Indre) qui met en relationles deux vignobles sans êtreelle-même entièrement orientéevers la viticulture. Au début desannées 1990, le vignoble deQuincy était considéré commeune plantation vieillissante quicependant produisait des vins"très bien classés parmi les vinsfins du Cher" 5 3 image quisemble totalement inadaptéeaujourd'hui. Si cette unité a puêtre qualifiée de vignobleextraverti, c'est parce qu'elles'est profondémenttransformée au cours des

dernières années. Lesplantations ont été renouvelées,le foncier restructuré tandisque les collectivités locales, lecomité du tourisme et lesinstances professionnellesprenaient à l'échelleinterdépartementale desmesures pour promouvoir cevignoble et ses produits. Cettemutation se traduit de diversesmanières dans le paysage,jusqu'à en devenir l'imagemême. La modernisation deQuincy Reuilly se donne à liresous trois aspects : laphysionomie des parcellesencépagées, les rénovations etinnovations en matièred'équipement et la signalétique.

Carte d'implantation du vignoble 54

53 In AGRESTE, Recensement Agricole 1988, la viticulture dans le Cher (source : Ministère de l'Agriculture et de la Forêt)54 Source : SCANN 25, fin des années 1990


La physionomie d'un vignoble jardiné

Comme le montre la carte dela page précédente, la

répartition des parcellesviticoles est inégale surl'ensemble de l'unité, qui se

décompose en trois zones : àl'est le Quincy qui s'étend lelong de la vallée du Cher, aucentre une zone boisée puis àl'ouest une zone de terres de

cultures, qui enserre quelquesparcelles de vignes, se situe encontinuité visuelle avec le cœurdu Reuilly situé dans l'Indre.

Le vignoble de Quincy, bienque situé sur un plateau fort

peu modelé est néanmoins bienen vue. En effet il est longé parla route départementale 27 quidraine l'essentiel de lacirculation de transit le long dela vallée du Cher et se trouveproche de Vierzon et Bourgesdans un des secteurs les plusfréquentés de l'ouest dudépartement ; par ailleurs leterrain qui s'incline légèrement

vers la vallée révèle desprofondeurs de vue vers l'ouestqui montrent les parcellesviticoles dans leur ampleur. Lesconditions initiales sont cellesde la visibilité et les modalitésde culture semblent tout fairepour tirer partie de cettesituation. Il semble que Quincyet Reuilly, ne disposant pas d'unsite théâtral comme Sancerreou Menetou aient décidé decréer le spectacle là où le

paysage ne l'offrait pas ; aussise trouve-t'on ici plus dansl'ordre du jardin que dans celuidu paysage. Les lignes de cepstirées au cordeau, la taillerigoureuse des plants, ladisposition d'un pied de rosieren bout de rangée55 , comme onpeut le voir dans les châteauxbordelais confèrent à cevignoble un "petit air " de jardinà la française.

Les rosiers en bout de rang L'ordonnancement des pieds de vignes

Exploitation rénovée : le pendant construit du vignoble jardiné

La reprise de bon nombred'exploitations et l’émergenced’un dynamisme nouveau s'esttraduit par la rénovation denombreux bâtiments (chais,habitations et partiescommerciales) ; parallèlement audéveloppement de l'imagejardinée, les édifices se sont euxaussi faits propres et pimpants.

55 en Bordelais, cette tradition remplit une fonction sanitaire : les rosiers sont censés détourner de la vigne les attaques de certains parasites

Le "rond-point viticole" de Lazenay Le panneau signalétique, signaturede la zone AOC


Une signalétique spécifique

La question des gelées deprintemps se pose ici commeailleurs mais a suscité enl'occurrence une réponseoriginale et encore sanséquivalent. Le principe deschaufferettes est connu depuislongtemps en particulier enBourgogne : des braseros àpétrole sont disposés à raison deun par are dans le vignoble etsont allumés lorsque latempérature descend endessous du seuil dangereux pourla vigne, causant alors du fait deleur densité une fumée

importante et une véritablepollution. La varianteexpérimentée depuis environdeux ans à Quincy se fonde surle même principe mais enréduisant le nombre de poêlesafin de diminuer la dépense enpétrole, et par là même lapollution : les braseros sontsurmontés d'un éolienne dont lesouffle permet de répartir leflux thermique sur l'ensemblede la parcelle située sous levent. Cela évite la dissipation dela chaleur vers le haut et permetde rentabiliser de façon

beaucoup plus efficace l'apportcalorique et ainsi de diminuerconsidérablement le nombre dechaufferettes.

En deux ans, ces insolites objetssont devenus unecaractéristique forte du Quincydont ils confortent les aspectssophistiqués entrevus dans leslignes qui précèdent. Il a étéqualifié de "vignobleextraverti", il serait possibled'ajouter le qualificatifostentatoire.

Le vignoble de Quincy-Reuillyse montre et veut se faire

connaître : l'aire d'appellationest régulièrement signalée parune signalétique spécifique que

l'on retrouve sur les entréesd'agglomération, le long desroutes et au bord des parcelles.La route participe à cette miseen scène dans ses

aménagements paysagers commeen témoigne le rond-point quemontre la photographie ci-dessous.

Les chaufferettes éoliennes, ces singulières sentinelles dans le paysage de Quincy



Les évolutions récentes ontdéterminé une très profonde

artificialisation du paysage, quise trouve ainsi mis en question.L'aménagement soigné desparcelles viticoles est sanséquivoque une réelle qualité,mais l'aspect ostentatoire decertains aménagements

d'accompagnement peutparaître excessif. Laredondance de la vigne sur legiratoire ou l'aspect trop"léché" de certaines rénovationsde bâtiments donne à ce paysageun aspect un peu artificiel alorsque ses racines rurales sontsuffisamment fortes pour lui

donner un âme.Enfin les éoliennes posent unevéritable question de paysage.Nous vivons une époque quis'interroge sur la légitimité dessignes verticaux de la modernitédans l'espace rural. Lacontestation que suscitent à bondroit les pylônes d'Electricité

Azenay : à l'extrémité occidentale du département jeu des textures dulabour et de la vigne étroitement mêlées

La vigne au pied de lacathédrale de paille

comme un symbole de lamixité de ce paysage

Les autres composants du paysage

Cette unité, bien quefortement marquée par ce

vignoble en démonstrationdemeure un paysage mixte, dontune bonne partie est constituéepar des terres de culture. Lesfigures qui mêlent les images devigne et de labour sontnombreuses et participent à ladéfinition de son identité. Danscet espace ouvert, lescathédrales de paille deschamps moissonnés et quelqueslisières boisées jouent avec lesverticales des éoliennes sur unplan horizontal qui fait alternerles nappes de vignes bien tailléeset les champs de céréales. Enfin la présence du construitdans ce paysage ne se résumepas à quelques bâtimentsrénovés. Les édifices ancienssont des bâtisses aux murs peupercés faits de maçonnerie decalcaire blanc surmonté de tuiled'ocre cuivrée. Souventdisposés le long des lisières(boisement d'accompagnementde la vallée du Cher ouboqueteaux qui émaillent leplateau), ils offrent uncontraste de couleur avec lesfrondaisons qui compose desmotifs d'une belle sérénité…comme une référencerassurante à la ruralité dans cepaysage en transformation.


LISTE DES COMMUNES

de France ou les antennes desopérateurs de la téléphoniemobile ne peut-elle pass'étendre à ces objets. Ils sontaujourd'hui insolites etnouveaux, donc intéressants ;cependant leur généralisationposera les mêmes types dequestion que les autres objetsévoqués. Leur déploiement est àson début, c'est une chance àsaisir pour conduire une étudepaysagère détaillée sur leurimpact et les possibilités de

cohabitation avec divers sites.Si cette technique était amenéeà se répandre, Quincy-Reuillypourrait devenir un fortpertinent paysage laboratoire.Il faut également souligner qued'autres techniques deprotection contre les geléestardives sont enexpérimentation en Champagneet dans le chablisien, qui sefondent sur l'aspersion d'eau àpartir de rampes disposées dansles rangs de vigne, ce sont alors

les cristaux de neige qui seforment sur les bourgeons quiassurent un volant thermiquesuffisant pour épargner lavégétation. Le gros avantage decette technique est qu'ellen'encombre pas le paysage pardes objets érigés et ne polluepas l'atmosphère ; elle nécessiteun abondant approvisionnementen eau, mais n'y a-t-il pas ici leCher à l'est et l'Arnon àl'ouest?

BrinayCerboisLazenayLimeuxPreuillyQuincy

6- 5 LE VERGER FORESTINLa forêt emballée qui se cache


A

B

COUPE

Un verger de basses tiges



La toponymie renseigne surl'un des aspect de ce

paysage, le "Verger Forestin"eût pu s'appeler forestier. Avecplus de 115 exploitationsfruitières produisantessentiellement des pommes etle terroir du canton de SaintMartin-d'Auxigny est désormaisle seul site significatif deproduction dans un départementqui tient son rang à l'échelle de

la Région Centre puisqu'il sesitue, avec une superficie de2171 hectares, devant le Loiretet le Loir-et-Cher et faitpratiquement jeu égal avec laSarthe.Le Verger Forestin est sansdoute l'un des paysages les plusinsolites du département quicomme le vignoble de Quincy-Reuilly (unité 6-4) fonde lasingularité de son image sur une

technique particulièred'exploitation. Lové dans desreplis de forêt entre Pays Fortet Vierzonnais, il ne se découvreque de l'intérieur et offre alorsun spectacle étonnant de nappesde toiles blanches emballant uneforêt de pommiers de bassestiges qui donnent à penser qu'unémule de Christo est venu iciaccomplir une performance.

La rationalisation desexploitations et les

impératifs économiques ont eusur l'arboriculture fruitièredeux conséquences, la

généralisation de l'emploi desbasses tiges, d'entretien et derécolte plus faciles et aisémentmécanisables et lagénéralisation de l'emploi des

variétés américaines. Lesvergers traditionnels de pleinvent, sur herbe pâturée ne sontplus comptabilisés parmi lesvergers mais classés en

Une entrée par l'ouest qui montre l'insertion du verger dans les lisières de la forêt

En pleine expansion depuis une vingtaine d'années, le verger du canton de SaintMartin-d'Auxigny est un site très important de production de pommes. La quasi-monoculture de goldens crée un paysage de forêt de basses tiges, plantées en rangsserrés et que recouvrent périodiquement les immenses nappes blanches de filets deprotection contre la grêle. Le Verger Forestin se met alors à ressembler à un piémontmontagneux au printemps, quand quelques névés s'accrochent encore aux alpages oubien encore à un paysage né de l'imaginaire de quelque artiste contemporain adeptedu Land Art.


Une technique qui "fabrique" un paysage

Modelé du terrain et implantation du verger

"superficie toujours en herbe"dans les catégoriess t a t i s t i q u e s5 6. Le vergerForestin est fait de plantationsde golden en basses tigesdisposées en rangs serrés quiautorisent de hautes densitéset des récoltes abondantes.

La grêle est la principale causede dommages sur les cultures

fruitières. Pour s'en prémunirles exploitants du verger ont misen place un système deprotection qui s'est développésur l'ensemble du territoire.Une résille de câbles d'aciertendu sur des poteaux de boisou de métal galvanisé est tenduau-dessus des parcelles. Desfilets en textile synthétiqueblanc sont disposés sur cetterésille et peuvent trèsrapidement être déployés au-dessus de la cime des arbres. Enposition fermée, les filets sontrepliés au-dessus des rangs.

Le verger a deux aspectspossibles : en position ferméec'est l'alternance de rangéesd'arbres et des lignes blanchesépaissies des filets repliés, enposition ouverte l'ensemble dela parcelle apparaît comme unesurface blanche et brillantelorsque les filets sont étendusau-dessus des pommiers. Leverger est par ailleurs équipéd'un système d'irrigation pardes rampes de tuyauxmétalliques souvent intégrésdans la structure porteuse desparagrêles et équipéesd'asperseurs. Ces installationsinduisent l'image d'une

agriculture technologique etsophistiquée, dont la traductionest un paysage abstrait quicompose des scènes à la limitede l'irréalité.

La plantation des basses tiges en rangs serrés

Vue de détail des paragrêles

Saint Martin-d'Auxigny, vue vers l'est, le verger dans son écrin topographique

56 Source : AGRESTE, le verger dans le Cher


Les nuances

Bien que ce paysage produiseune forte impression

d'homogénéité, son occupationdu sol est inégalement répartieselon un gradient qui correspondà la fois aux disponibilités dessols et au relief et son corollairel'exposition, qui est une donnéeimportante pour la maturationdes fruits… et la précocité de larécolte. La plus forte densitéfruitière est localisée dans letiers sud-est, où se trouventégalement les plus grandessurfaces plantées d'un seultenant. Le concept de forêtfruitière s'appliqueparfaitement à ce secteur. Enpartie centrale, le verger et lesterres labourées occupent à

parts égales un espace agricolepiqueté de nombreuxboqueteaux de taillis plus oumoins broussailleux tandis qu'aunord le verger s'efface

progressivement devant lesboisements.

La disposition du verger sur lesrelief de " l'éventail concave"

Le verger occupe des terrainssitués sur la partie de la

cuesta du Crétacé qui est évaséepar le bassin du Moulon, composéde trois ruisseaux quiconduisent les eaux versl'Yèvre, qui est rejointe àBourges. Ce systèmehydrographique fait exceptionau nord de la cuesta, car laplupart des eaux sont évacuéesvers le nord par le bassin de laSauldre ; l'unité voisine deMenetou-Salon est ainsi isoléedu verger par la ligne de partagedes eaux entre les deux bassins,qui fondent leur limite commune.Ces dispositions composent unrelief en éventail concave quiinduit une forte impressiond'intériorité. Comme le montrela carte ci-contre, les culturesse sont installées sur les partieshautes, c'est-à-dire lesinterfluves et les versantsexternes de la cuvette en écrinqui circonscrit le site.

Vers le nord, les parcellesfruitières s'intercalent dans la

trame boisée


Carte del'occupation du sol

L'urbanisation et le verger dans une intime complicité

L'urbanisation et les voies de communication

Comme l'a montré la descriptiondu vignoble de Menetou cespaysages incarnent la transitionentre les plaines qui s'étendentà l'aval de la cuesta, la cuestaelle-même et les paysages boisésdu bord du département. Ladisposition en creux du reliefprive le verger de la relationavec la plaine ; cependant lagradation du couvert forestierexprime cette transition, danslaquelle la forêt de basses tigesjoue son rôle, et le passageentre vignes et vergers estsymétrique de ce que l'onobserve dans le Menetou :quelques vignes résiduellesponctuent les terres orientalesdu verger comme quelquesparcelles plantées de pommierss'intercalaient entre les rangéesde ceps à l'ouest du vignoble.

L'axe central de l'unité estmatérialisé par la RD 940,

ancienne route royale qui marqueici la trace du méridien deBourges sur un tracé nord-sudparfaitement rectiligne. Cettevoie à grande circulationimplantée sur une ancienne voieromaine a cristallisél'urbanisation sur son axe et àson entour. Quantilly, Saint-Martin-d'Auxigny et St Palaissont implantées non loin de cegrand chemin. La densité duconstruit suit à peu près celle duverger : le tiers sud-est(commune de Saint Martin)

possède la plus forte densité,avec une urbanisation diffusequi se cristallise en trois noyaux(le bourg chef-lieu et deux gros

hameaux au nord et au sud). Lapartie nord renferme uneurbanisation moins dense avecles deux bourgs de Saint Palais

et Quantilly et des petits écartsrépartis dans le finage commedans le cœur du Pays Fort. Ledéveloppement du chef-lieu decanton est induit à la fois parl'effet d'attraction de lapréfecture toute proche et lesdéveloppements induits parl'arboriculture.

En effet, les sièges et lesbâtiments d'exploitations sont

généralement inclus dans leshameaux et dans le bourg. Cetteactivité, forte consommatricede main d'œuvre (pas seulementsaisonnière) s'est traduite parune extension de l'habitat.Le construit est assez homogèned'aspect un peu austère : lesfaçades revêtues de clairsenduits à la chaux, les chaînageset encadrements des ouverturesen calcaire blanc, parfois

éclairés de briques, les toituresgénéralement d'ardoise ou detuiles brun foncé composent desfigures bâties qui s'harmonisentavec le jeu de blanc et desombre du verger entoilé etménagent parfois au détour d'unchemin de belles rencontresavec un édifice ancien commecette tour qui semble s'abritersous son chêne protecteur.

L'intériorité et la singularitédu Verger Forestin créent un

paysage à part, étrange etinsolite dont les qualitésplastiques peuvent susciter desavis divers mais qui possède uneidentité forte et peususceptible de se voir remise encause tant que les goldensgarniront les gondoles deshypermarchés. L'évolutioncontemporaine des grandsvignobles a montré que larationalisation pouvait fort bienà moyen terme mettre lepaysage et l'environnement enpéril et la même crainte peutsurgir face aux conséquencesdes pratiques céréalières ou

l'évolution régressive desbocages. Les choses sont icidifférentes car cette figuren'existe dans le départementqu'en ce lieu et que ce lieu estun contenant étanche. On peutconsidérer qu'il n'y a pasd'enjeu paysager global lié àl'existence de cette"abstraction entoilée", enrevanche l'analyse fine en amontré les nuances et elles sontimportantes. Le verger a sansdoute vocation à s'étendre etcela posera un problème de seuil.Ce sont les effets de contrastequi en révèlent les qualités etune trop grandehomogénéisation serait une

régression. Une réflexion sur ledevenir global incluant l'avenirdes parcelles de culture et lafaisabilité d'une exploitationdes bois et taillis permettraitde définir des scénariid'évolution du verger quimaintiendraient l'équilibreactuel.La seconde question que pose cepaysage, c'est celle duconstruit. Aujourd'hui la plupartdes figures bâties demeurentinscrites dans la logiquetopographique, cependantl'habitat commence à s'étendresur certaines lignes de crêtes,comme le montre cet exemple àSaint Martin-d'Auxigny.

Le jeu contrasté des façades claires et des toituressombres


L'avenir du verger et le rapport au paysage


QuantillySt Georges-sur-MoulonSt Martin d'AuxignySt PalaisVasselay

Il serait souhaitable d'éviterde multiplier ces

implantations quis'affranchissent de la logiqueconstitutive du site. Sur les cinqcommunes concernées, seuleQuantilly ne possède pas dedocument d'urbanisme, ce quis'explique par le niveau dedéveloppement de ces communes

situées dans l'aire d'influencede Bourges. Que ce soit au stadedu suivi des documentsd'urbanisme ou au stade del'instruction des permis deconstruire il est impératif deprendre en compte de manièreprécise les vues et covisibilitésafin de définir des règlesstrictes d'implantation et

d'adaptation au terrain ainsi quedes recommandationsarchitecturales. L'interactionentre les différents sites esttelle qu'une étude visuelle surl'ensemble qui déboucherait surun relevé des crêtes à protégerserait une mesure à la foissouhaitable et aisée à mettre enœuvre.

L'impact du construit "hors site" à Saint Martin d'Auxigny

LISTE DES COMMUNES

Les enjeux de l'urbanisation

PAYSAGES DE VIGNES ET VERGERS page 367PAYSAGES DE VIGNES ET VERGERS page 367

B-6 LES PAYSAGES DE VIGNES ET VERGERS - Cher · des vins de consommation courante et chaque ferme...

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