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L’Encéphale (2007) 33, 724-9 REVUE DE PRESSE Chefs de rubrique : D. Gourion Ph. Gorwood Avancées et recherches D. Gourion (1) Le type d’événement de vie influence-t-il la sémiologie de l’épisode dépressif majeur ? Association of Different Adverse Life Events With Distinct Patterns of Depressive Symp- toms Matthew C. Keller, Ph.D., Michael C. Neale, Ph.D. and Kenneth S. Kendler, M.D. Am J Psychiatry 164 : 1521-1529, 2007 CONTEXTE La clinique de la dépression est hétérogène : c’est un fait unanimement admis. Les multiples tentatives de clas- sification en témoignent : endogène- réactionnelle, impulsive-ralentie, mélan- colique-atypique… Mais la validité discu- table de ces modèles théoriques a fina- lement cédé le pas à une nosographie descriptive et athéorique. À l’aide de vastes études de cohor- tes, des auteurs américains de renom- mée mondiale (Keller et Kendler) propo- sent de revisiter cette conception. Reprenant l’idée de Birnbaum (1923), ils se proposent ici d’explorer s’il existe un lien entre l’événement de vie qui précède l’épisode dépressif majeur et la sémiolo- gie particulière de ce dernier. OBJECTIF Les auteurs ont tenté de déterminer, en population générale, si le type d’évé- nement de vie stressant vécu détermine d’une manière ou d’une autre le profil sémiologique de l’épisode dépressif con- sécutif à ce dernier. MÉTHODOLOGIE Un total de près de 5 000 individus (53 % de femmes) ayant présenté des symptômes dépressifs (syndromiques ou sub-syndromiques) au cours des douze derniers mois fut suivi longitudina- lement sur un maximum de 12 années consécutives. Quatre vagues d’évalua- tions successives furent réalisées durant cette période. Au cours de chacune des vagues d’évaluation, les sujets rappor- taient le type et la sévérité de leurs symp- tômes dépressifs (selon les critères du DSM III-R). Ils devaient également préci- ser si un événement de vie stressant était survenu récemment. Neuf catégories dif- férentes d’événements de vie étaient uti- lisées. (1) CH Sainte-Anne, Paris.

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L’Encéphale (2007) 33, 724-9

REVUE DE PRESSE

Chefs de rubrique : D. GourionPh. Gorwood

Avancées et recherchesD. Gourion (1)

Le type d’événement de vie influence-t-il la sémiologie de l’épisode dépressif majeur ?

Association of Different Adverse Life EventsWith Distinct Patterns of Depressive Symp-tomsMatthew C. Keller, Ph.D., Michael C. Neale,Ph.D. and Kenneth S. Kendler, M.D.Am J Psychiatry 164 : 1521-1529, 2007

CONTEXTE

La clinique de la dépression esthétérogène : c’est un fait unanimementadmis. Les multiples tentatives de clas-sification en témoignent : endogène-réactionnelle, impulsive-ralentie, mélan-colique-atypique… Mais la validité discu-table de ces modèles théoriques a fina-lement cédé le pas à une nosographiedescriptive et athéorique.

À l’aide de vastes études de cohor-tes, des auteurs américains de renom-mée mondiale (Keller et Kendler) propo-sent de revisiter cette conception.Reprenant l’idée de Birnbaum (1923), ilsse proposent ici d’explorer s’il existe unlien entre l’événement de vie qui précède

l’épisode dépressif majeur et la sémiolo-gie particulière de ce dernier.

OBJECTIF

Les auteurs ont tenté de déterminer,en population générale, si le type d’évé-nement de vie stressant vécu détermined’une manière ou d’une autre le profilsémiologique de l’épisode dépressif con-sécutif à ce dernier.

MÉTHODOLOGIE

Un total de près de 5 000 individus(53 % de femmes) ayant présenté des

symptômes dépressifs (syndromiquesou sub-syndromiques) au cours desdouze derniers mois fut suivi longitudina-lement sur un maximum de 12 annéesconsécutives. Quatre vagues d’évalua-tions successives furent réalisées durantcette période. Au cours de chacune desvagues d’évaluation, les sujets rappor-taient le type et la sévérité de leurs symp-tômes dépressifs (selon les critères duDSM III-R). Ils devaient également préci-ser si un événement de vie stressant étaitsurvenu récemment. Neuf catégories dif-férentes d’événements de vie étaient uti-lisées.

(1) CH Sainte-Anne, Paris.

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Revue de presse 725

RÉSULTATS

Les profils de dépression étaient

significativement différents en fonction

du type d’événements de vie rapportés.

La catégorie « perte d’un être aimé » et

« rupture sentimentale » était caractéri-

sée par un profil dépressif associant de

hauts niveaux de tristesse, d’anhédonie,

de perte d’appétit et de culpabilité. Les

sujets ayant rapporté la catégorie

« stress chronique » souffraient essen-

tiellement de fatigue et d’hypersomnie.

Enfin, les personnes qui n’identifiaient

pas d’événement de vie stressant se plai-

gnaient surtout de fatigue, de ralentisse-

ment psychomoteur, d’idées suicidaires

et d’une augmentation de l’appétit.

CONCLUSIONS

Selon les auteurs, la dépression est un

« syndrome pathoplastique ». Le type

d’événement de vie serait déterminant

dans la sémiologie de l’épisode dépressif.

La matière grise des psychopathes et des schizophrènes violents

Regional Cortical Thinning in Subjects With

Violent Antisocial Personality Disorder or

Schizophrenia

Veena M. Narayan, B.S., Katherine L. Narr,

Ph.D., Veena Kumari, Ph.D., Roger P. Woods,

M.D., Paul M. Thompson, Ph.D., Arthur W.

Toga, Ph.D. and Tonmoy Sharma, M.D.

Am J Psychiatry 164 : 1418-1427, Sep-

tember 2007

CONTEXTE

La violence peut-être considérée

comme un paramètre transnosographi-

que, présent dans différents états psy-

chopathologiques comme la personna-

lité antisociale ou la schizophrénie. Des

études précédentes avaient suggéré

l’existence d’anomalies frontales et tem-

porales chez les psychopathes et chez

les schizophrènes violents.

Le contexte préfrontal est particuliè-

rement relié à la survenue de comporte-

ments violents puisqu’il est responsable

du contrôle de l’inhibition comportemen-

tale, de la planification de l’action et des

fonctions exécutives de haut niveau.

OBJECTIF

Comparer l’épaisseur corticale région

par région cérébrale en comparant diffé-

rents groupes : psychopathes et schi-

zophrènes violents et non violents et

sujets sains.

MÉTHODOLOGIE

Un nombre total de 56 sujets droitiers

appariés sur des variables démographi-

ques fut inclus dans l’étude. Les mesures

furent réalisées en IRM.

RÉSULTATS

Le critère violence (antisociaux et

schizophrènes) était associé avec un

amincissement du cortex frontal inférieur

et du cortex sensori-moteur latéral, en

particulier au niveau de l’hémisphère

droit, sur les aires associatives. Seuls les

sujets violents antisociaux présentaient

un amincissement du cortex préfrontal

médian.

COMMENTAIRE

Pour conforter les résultats, les auteurs

ont réalisé trois analyses complémentai-

res : une analyse « between-subjects »

(entre les sujets), « within-subjects » (ana-

lyse intra-sujets : chaque sujet est com-

paré à lui-même au cours du temps), et

enfin, une analyse sur le sous-groupe de

sujets ayant tous les critères de l’épisode

dépressif majeur selon le DSM.

Les trois analyses différentes retrouvaient

le même profil de résultats, confirmant la

validité et le lien de causalité entre événe-

ment de vie et type de dépression. En

effet, la dimension longitudinale de l’étude

montrait que la variabilité sémiologique

pour un même individu était identique à

celle entre individus : autrement dit, les

caractéristiques individuelles étaient

moins importantes que la situation vécue.

Ces résultats vont à l’encontre des théo-

ries actuelles – en particulier des concep-

tualisations les plus « biologisantes » – et

reviennent vers des modèles stress-dia-

thèse plus anciens. Finalement, le con-

texte psychologique, environnemental et

culturel pourrait jouer un rôle majeur dans

la phénoménologie dépressive.

COMMENTAIRE

L’amincissement cortical reflète en géné-

ral du nombre, de la taille et de la densité

des neurones, ainsi que de l’intégrité du

neuropile. Il peut également s’avérer lié à

des anomalies de vascularisation, des

cellules gliales ou de la myélinisation. Les

facteurs en cause sont inconnus (protéi-

nes neurotrophiques ? facteurs nutrition-

nels ? hypoxie cérébrale néonatale).

L’apport de cette étude est de spécifier

les deux types d’atteintes corticales et de

montrer la spécificité de l’atteinte corticale

préfrontale médiale chez les sujets anti-

sociaux les plus violents.

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726 D. Gourion

La première tentative de suicide : déterminants personnels et familiaux

Familial Pathways to Early-Onset Suicidal

Behavior : Familial and Individual Antece-

dents of Suicidal Behavior

Nadine M. Melhem, Ph.D., M.P.H., David

A. Brent, M.D., M.Sc., Melissa Ziegler,

Ph.D., Satish Iyengar, Ph.D., David Kolko,

Ph.D., Maria Oquendo, M.D., Boris Birma-

her, M.D., Ainsley Burke, Ph.D., Jamie Zela-

zny, B.S.N., Barbara Stanley, Ph.D. and J.

John Mann, M.D.

Am J Psychiatry 164 : 1364-1370, Sep-

tember 2007

OBJECTIF

Les auteurs ont tenté d’identifier les

predicteurs cliniques du premier geste

suicidaire chez des enfants de parents

ayant une histoire de trouble de l’humeur

ou de geste suicidaire.

MÉTHODE

Dans une étude prospective de

parents souffrant de troubles de

l’humeur, 365 de leurs enfants (âge

moyen 20 ans) ont été suivis sur une

durée de 6 ans.

RÉSULTATS

Les fils et les filles de parents ayant

réalisé un geste suicidaire, comparative-

ment aux enfants de parents souffrant de

troubles de l’humeur mais n’ayant jamais

commis de TS, présentaient un risque

plus élevé de tentative de suicide (8,3 %

versus 1,9 %, risk = 4,4). L’existence

d’un trouble de l’humeur, d’un geste

auto-agressif impulsif chez l’enfant et

d’une histoire d’abus sexuel et de

dépression chez le parent prédisait un

âge de début précoce de geste suici-

daire.

CONCLUSIONS

Les déterminants d’un geste suici-

daire précoce sont chez le jeune l’exis-

tence d’un trouble de l’humeur et d’un

geste agressif impulsif et chez ses

parents, une histoire d’abus sexuel, de

tentative de suicide ou de dépression.

Ces données fournissent des pistes pour

la mise en place d’interventions de pré-

vention focalisées sur les populations à

haut risque.

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Revue de presse 727

Clinique et thérapeutiquePh. Gorwood (1)

Faut-il arrêter de prescrire des antidépresseurs chez le bipolaire déprimé ?

Effectiveness of adjunctive antidepressant

treatment for bipolar depression.

N Engl J Med. 2007 Apr 26 ; 356 (17) :

1711-22.

Sachs GS, Nierenberg AA, Calabrese JR,

Marangell LB, Wisniewski SR, Gyulai L,

Friedman ES, Bowden CL, Fossey MD,

Ostacher MJ, Ketter TA, Patel J, Hauser P,

Rapport D, Martinez JM, Allen MH, Miklowitz

DJ, Otto MW, Dennehy EB, Thase ME.

CONTEXTE

Le fait qu’il existe des risques de

virage maniaque lors de la prescription

d’antidépresseurs chez les sujets souf-

frant de trouble bipolaire est connu, de

même que le risque d’accélération des

cycles voire de cycles rapides. Les étu-

des portant sur les virages pharmaco-

induits puisque plusieurs études ne

trouvent en effet pas plus de virages

sous antidépresseurs de type sérotoni-

nergique que sous placebo. Dans un

même registre de remise en question de

quelques principes de base peu soute-

nus par des données scientifiques, on

pourrait dire que l’efficacité des antidé-

presseurs dans le trouble bipolaire reste

bien peu validée. Les antidépresseurs

sont donc rarement proposés en pre-

mière intention dans les nombreuses

recommandations internationales (gui-

delines). Un des problèmes avec ce type

d’argument est que les études faisant

fonction de preuves peuvent être absen-

tes par manque d’études suffisamment

puissantes, et non faute de cohérence.

Le STEP-BD, large consortium de

22 centres experts américains s’est

attaqué au problème…

MÉTHODE

Il s’agit d’une étude multicentrique,

en double aveugle, randomisée, avec un

bras placebo, évaluant l’intérêt des anti-

dépresseurs chez des sujets souffrant de

trouble bipolaire et consultant pour un

épisode dépressif majeur. Les patients

étaient traités par Bupropion ou Paroxé-

tine (donc sans tricycliques ni IMAO) ver-

sus placebo, en plus du thymorégulateur

(prescrit en ouvert ou maintenu). Sur les

4 360 sujets repérés par ce consortium,

366 ont été inclus dans l’étude avec un

suivi de 6 mois. Le taux de perdus de vue

et de sorties d’essai est comparable

dans les deux bras.

RÉSULTATS

Du fait de la randomisation, les carac-

téristiques cliniques, thérapeutiques et

socio-démographiques sont similaires

dans les deux groupes. L’échantillon est

marqué par des bipolaires plutôt de type I

(67 %), urne forte comorbidité anxieuse

(45 %) et addictive sur la vie (60 %). Leur

histoire est relativement chargée (plus de

10 épisodes maniaques pour la majorité),

avec un quart de cycles rapides. Ces

sujets sont pour la plupart déjà traités par

thymorégulateurs en entrant dans l’étude

(pour 85 %).

Comme le montre le tableau joint,

aucun argument n’est à retenir en faveur

des antidépresseurs dans la dépression

du sujet bipolaire. Le placebo fait plutôt

(1) Hôpital Louis Mourier, Colombes.

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728 P. Gorwood

mieux que les antidépresseurs, que l’on

considère la rémission transitoire, stable

ou de tous types. Dans un même ordre

d’idée, le concept de virage de l’humeur

pharmaco-induit est à remettre en ques-

tion, puisqu’il se retrouve un peu plus

chez les sujets traités par placebo. Les

différences ne sont pas significatives, ce

qui revient à dire qu’il n’existe aucun

impact à la prescription d’antidépresseur

chez les sujets bipolaires.

CONCLUSIONS

Le seul traitement validé dans la

dépression bipolaire reste, pour les

auteurs, le thymorégulateur. La taille de

l’échantillon, le fait qu’il s’agisse de

patients assez proches de ce que l’on

observe en clinique quotidienne (l’étude

est randomisée, mais tous les sujets sont

traités) et que l’étude se limite à deux anti-

dépresseurs spécifiques permet de porter

des conclusions relativement précises.

Oui, prescrire un antidépresseur chez

un patient bipolaire est une pratique la plus

souvent inutile, et parfois délétère, y com-

pris pour les antidépresseurs fréquem-

ment utilisés dans le trouble bipolaire pour

leur bonne tolérance théorique. Le thymo-

régulateur (ou son équilibration s’il n’est

pas bien toléré ou en dosage incorrect)

doit être la priorité.

Non, le virage pharmaco-induit n’est

pas un risque propre à tous les antidépres-

seurs. Il semblerait concerner les tricycli-

ques, les IMAO et peut être les bi-aminer-

giques, mais pas les monoaminergiques,

de type IRS et Noradrénargiques.

Le risque suicidaire théoriquement accru par les antidépresseurs concerne-t-il les sujets souffrant de trouble bipolaire ?

Bipolar pharmacotherapy and suicidal beha-

vior Part 2. The impact of antidepressants.

J Affect Disord. 2007 Nov ; 103 (1-3) : 13-21.

Yerevanian BI, Koek RJ, Mintz J, Akiskal HS.

CONTEXTE

Beaucoup d’informations ont circulé

sur le risque suicidaire qui serait accru

sous antidépresseurs. Cela est particu-

lièrement étonnant étant donné que la

dépression est le facteur principal de

mortalité suicidaire, et que les antidé-

presseurs luttent efficacement contre

cela. Le fait qu’il existe une période à ris-

que à l’instauration du traitement n’en est

pas moins une réalité, période pendant

laquelle l’intensité est souvent maximale

(puisqu’elle amène le patient à consulter

pour un traitement) sans aucun bénéfice

thérapeutique pendant les deux premiè-

res semaines (délai d’action), voire quel-

ques effets indésirables. Le Food and

Drug Administration (FDA) n’en a pas

moins pris une décision ferme de faire

rajouter des étiquettes de prévention sur

les boîtes d’antidépresseurs, et de

recommander une grande prudence,

voire un évitement, pour la prescription

chez les enfants, adolescents et jeunes

adultes. Ces données concernent elles

aussi les sujets bipolaires, considérés

comme plus directement du ressort des

psychotropes ?

MÉTHODE

Yerevanian, de l’équipe d’Akiskal, a

repris les dossiers de 405 vétérans bipo-

laires qui ont été suivis 3 ans, au mini-

mum, avec des évaluations mensuelles.

Cette cohorte (analysée de manière

rétrospective) permet donc une appro-

che assez fine et puissante du type de

traitement pris par ces sujets et de

l’émergence dans le mois qui suit de ten-

tative de suicide. Ont été comparés trois

groupes de sujets, traités par antidépres-

seurs seuls (probablement avant que leur

diagnostic de trouble bipolaire ne soit

diagnostiqué si l’on respecte les princi-

pes de l’article précédent…) versus sous

TABLE I. — Outcomes According to Treatment Group.

Outcome

Mood Stabilizer + Antidepressant

(N = 179)

Mood Stabilizer + Placebo(N = 187)

P value

number (percent)

Transient remission 32 (17.9) 40 (21.4) 0.40

Durable recovery (primary outcome) 42 (23.5) 51 (27.3) 0.40†

Transient remission or durable recovery 74 (41.3) 91 (48.7) 0.23

Treatment-effectiveness response 58 (32.4) 71 (38.0) 0.27

Treatment-emergent effective switch 18 (10.1) 20 (10.7) 0.84

Discontinuation of study medication because of adverse event 22 (12.3) 17 (9.1) 0.32

COMMENTAIRE

Les longues habitudes sont les plus diffi-

ciles à changer, mais les ordonnances à

rallonge incluant antidépresseurs, neuro-

leptiques, thymorégulateurs et benzodia-

zépines ne devraient plus avoir lieu d’être.

On veillera à ne pas jeter le bébé avec l’eau

du bain, et les antidépresseurs peuvent

avoir une utilité par exemple dans les

mélancolies sévères ou les sujets ne

répondant pas à l’introduction (ou à

l’équilibration) des thymorégulateurs.

Néanmoins considérer les antidépres-

seurs comme traitement de deuxième (ou

troisième, derrière les sismothérapies)

intention a de plus en plus de sens.

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Revue de presse 729

thymorégulateurs seuls versus sous anti-

dépresseurs et thymorégulateurs.

RÉSULTATS

Les tentatives de suicide sont plus fré-

quentes chez les sujets traités par antidé-

presseurs en monothérapie (26 TS par

patients × ans), sont nettement moins éle-

vées chez les sujets traités par thymorégu-

lateurs seuls (3 TS par patients × ans), alors

que pour les sujets traités par antidépres-

seurs et thymorégulateurs, la fréquence est

intermédiaire (10 TS par patients × ans).

De manière intéressante, l’effet sujet

a pu être isolé de l’effet groupe, en ne

basant les analyses que sur un groupe de

sujets ayant reçu, dans le temps, les trois

types de stratégie. On arrive alors à la

même conclusion, amenant à penser

que le risque d’augmentation des TS

chez les sujets bipolaires ne concerne

pas qu’un sous-groupe spécifique de

sujets, mais que tous les patients sont

concernés.

Enfin, les idéations suicidaires et les

tentatives de suicide pourraient être plus

spécifiquement concernées que la mor-

talité suicidaire.

CONCLUSIONS

Les thymorégulateurs seuls sont

associés à moins de risque suicidaire que

les antidépresseurs seuls. L’association

des deux ne ramène le risque au niveau

le plus bas, mais plutôt de manière inter-

médiaire entre les deux stratégies précé-

dentes. Il faut éviter les antidépresseurs

chez le sujet bipolaire… autant que faire

se peut.

Suicidal behavior during mood stabilizer monotherapy compared with antidepressant monotherapy

MedExposure Suicide events Rate per 100 years Chi2

Months (years) SA Hosps SA Both All events

On Li 1930 (160.83) 0 4 0 2.49 19.14 ; df = 1 ; p < .0001On AD 1250 (104.17) 7 20 6.72 25.92On DVPX 1540 (128.33) 0 6 0 4.67 14.4 ; df = 1 ; p = .0001On AD 1250 (104.17) 7 20 6.72 25.92On CBZ 315 (26.25) 0 1 0 3.80 3.55 ; df = 1 ; p = .06On AD 1250 (104.17) 7 20 6.72 25.92On MS MONO 3785 (315.41) 0 11 0 3.48 29.87 ; df = 1 ; p < .0001On AD 1250 (104.17) 7 20 6.72 25.92

Suicidal behavior event rates during antidepressant and/or mood stabilizer in bipolar patients who received all three tratments (N = 24)

Exposure period Months (years) A H All Rate(all events/100 pt. years)

On MS MONO 179 (14.92) 0 2 2 13.41On MS + AD 253 (21.08) 1 4 5 23.72On AD ALONE 220 (18.33) 3 4 7 38.18

COMMENTAIRE

Ce type d’étude a la force d’être prospec-

tive sur un grand échantillon suivi sur une

longue durée, mais souffre d’une non ran-

domisation. On pourrait penser que les

sujets mis sous antidépresseurs sont

peut être les plus suicidaires (car peut être

les plus déprimés) et que l’on ne fait fina-

lement qu’observer un biais d’échantillon-

nage. Il semble néanmoins difficile de limi-

ter les résultats de cette étude à un tel

biais, qui ne doit expliquer qu’une petite

partie des résultats.

De manière fortement convergente avec

l’étude précédente, l’aspect inutile voire

toxique de la prescription d’antidépres-

seurs seuls chez le sujet bipolaire (c’est-

à-dire sans couverture de thymorégula-

teurs) pourrait être considéré comme

acquis.