auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et...

10
j i ^ auriane sexy liss Suisse nme vous ne r ez jamais vue Marathon des Sables Avec les Romands dans l'enfer du Sahara

Transcript of auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et...

Page 1: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

ji ^

auriane sexyliss Suisse

nme vous nerez jamais vue

Marathon des SablesAvec lesRomands dansl'enfer du Sahara

Page 2: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

E N° 16-19 avril 2006

SPholos de couverture"Remû Wageli, sear* Nemethet Kurt Wildbolï/Schweizer illustrierte

gens de la semainepetite entrepriseouverturepe de Suisse: le triomphe du FC Sion.lages spéciales sur les supporters, les joueurs,ncontre avec le président, Christian Constantin 10

xntraftiano Prodi, surnommé le Professeur Mortadelle.•aire d'un sage qui partage une complicitéectuelle de trente-six ans avec son épouse .. 22

émoignage:elée par un internaute éconduit: elle s'étaitite sur un site de rencontres pour trouver 'amour.: le cauchemar qui était au rendez-vous.. 28

eportagelarathon des Sables: avec les Romandsnt couru 231 km dans 'enfer du Sahara 30

iharmeiane Gilliéron prend la pose erotique:Suisse commente ses photos glamour 38

trtguey, officier mais pas gentleman, ou la suiterasques du terrible petit prince . 42

:erviewde Ruey, président du parti libéral suisse:mensonges sur l'asile me choquent» . 44

toint de vue 48;rand reportagelouette chevêche, oiseau rare et étonnant . 60

locumentnots drôles des grands acteurs.... 86

OO Reportage avec les Romands du Marathon des Sables: 231 kilomètresOU dans l'enfer du désert, ici, le Neuchâtelols Christian Fatton.

/cnLaeOU d'oi

La chouette chevêche, un drôleoiseau rare.

oo Romano Prodi, portrait£-£- du Professeur Mortadelle.

.51cois Gay, ou les secrets de formeax-Mr. Univers

plein d'idéestes ours, une recette fraîcheuralement vôtre, l'horoscope d'Elizabeth Teissier

52

698285

semaine TV fr o Jessica Sbaraglla, la plus belleDo Jurassienne.

~7Q Le nouvel Espace de Renault:/ O la classe.

I2006 L'ILLUSTRÉ

Page 3: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

Le reportage

Grand Sud saharienParcourir 231 kilomètres en six étapes, entre dunes et djebelsavec un sac de 10 kilos sur le dos par 40 degrés à l'ombre:c'est le Marathon des Sables, dans le Sud marocain. Huit Romandsont tenté cette exaltante mais impitoyable aventure. Récit.

i*.»- '~-

r

Page 4: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

Grandeur et solitudeLe coureur du Marathon des

Sables traverse à son allure desdécors majestueux. Comme

beaucoup, le NeuchâteloisChristian Fatton a puisé son

énergie dans la magie du désert.

Du sablej perte de vueUn vaudois sur la lune?

Non, Rolf Vetter arpentantun plateau dominant une partie

du Grand Sud saharien.

*fL

*TpMSt iWV

V ,*

Page 5: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

.-i,f V ,J

"%fsp^/?r*

W*Pft«i«t&esäA£js

i i L _ L. ;_—, ^mr-.-^ L- r ,-- ' -M -- t ' • • ,TT • \*n -J— ' ^ ^ ' •' -

|-|e MAHATttO>|Z P D€S SABL€S

K ftAOTORS

C est reparti!Départ 4|yne étape avec,en queue de peloton,te ça mi on-balai versionMarathon des Sables:un dromadaire.

Tous le disent: c'est la tête qui fait avancei

Page 6: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

*Hi

Des pieas aux petits soinsQuarante kilomètres par jour durant six jours.La réussite de l'épreuve repose essentiellementsur l'état des pieds des coureurs. Quarante Amédecins et infirmières veillaient surla santé des forçats du désert.

-.

3S jambes. On se transcende ou on craque^^ •r

>in» .,-*«>

•al %

Jlin regard quien dit long

Le Frlbourgeois Patrickc nennet avoue avoir mal

estimé les difficultés.Il jettera l'éponge

à la deuxième étape,les pieds meurtris par

les ampoules.

19 avril 2006

Page 7: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

flflfiA tëoSI/f

- ,EftÄP 'T"'5»" »"«WO

Une auberge dans le désertAu bout de l'horizon et de la terre aride, un peu d'humanité. «C'estencore loin le repos?" «Tais-toi et marche!»

5 heures du matin

Texte: Christian RappazPhotos: Sedrik Nemeth

Le vent du sud. Le vent dudésert. Pas une brise quirafraîchirait dans la cha-leur saharienne, non: unevraie tempête, lourde,

poisseuse. Trois jours à sentir surle visage les milliers de piqûresd'abeilles du sable qui vousfouette en permanence. Le désertcomme un four aveuglant, où l'onne distingue plus rien que lebeige de la terre mélangé à celuidu ciel. Ne croyez pas au désertromantique, à la carte postale si

pittoresque, entre Petit Prince etFort Saganne, des dunes et deschameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et àdes hommes qui courent dedans.

Ce soir d'avril, ils en revien-nent. Ils ont rallié Cointrin dansl'anonymat le plus complet. Pasde comité d'accueil, pas de flon-flons et encore moins de partiesofficielles. Juste leur famille etquelques amis heureux de lesretrouver, amaigris, mais sou-riants et en bonne santé. Ce sontpourtant des héros qui ont débar-qué de Casablanca mardi soir.

A l'aube, on lève le camp. Le Genevois Eric Grant s'étire face à l'astredu jour. Et c'est le départ pour de nouvelles aventures.

Des héros fatigués, laminés, cra-mes, mais heureux et fiers de cequ'ils ont accompli. Leurs nomsne vous diront pas grand-chose.Pas grave. Christian Fatton, deNoiraigue (47 ans), Daniel Cot-ting, de Praroman (39), Rolf Vet-ter, de Cortens (41), Patrick Cuen-net, de Fribourg (42), Laurent Kel-ler (45), André Frei (40), EricGrant (34) et Cyril Hirnmer (35),tous de Genève, ne cherchent nila gloire ni la notoriété. L'exploitqu'ils ont signé, ils voulaientavant tout l'accomplir pour eux,disent-ils. Pour tester leurs

limites, apprendre encore sureux-mêmes, vider le trop-plein deleur quotidien, se sentir en har-monie avec la nature, se lancer unultime défi, pour le bonheur devivre une magnifique aventurehumaine aussi ou encore pouraider son prochain en faisantoffrande de sa souffrance. Etpuis, fantasme suprême, il y a ledésert, cette étendue de sable ocrequi garde tout son mystère et sus-cite autant de crainte que de fas-cination. Un lieu grandiose,magique, qui appelle au défi,comme l'océan.

HuitRomandsqui sontallésjusqu'auboutd'eux-mêmes

«C'est uneaventurede fou,trop pourmoi!»

Patrick Cuennet, 42 ans,typographe, Fribourg

«Mon pèreserait fierde moi»

Eric Grant, 34 ans (à dr.),rédacteur en chef, Genève,

accompagné parCyril Himmer, 35 ans,

antiquaire, Genève

«H me restel'immensebonheur del'avoir fait»

Rolf Vetter, 41 ans,ingénieur,

Cottens (VD)

34 L'ILLUSTRÉ

Page 8: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

1Perdus dans Immensité L'eau, l'or du désertLa longue file s'étire à travers les grandes plaines surchauffées duSahara. Avec un seul objectif commun qui tourne à l'obsession: finir.

Ils sont ingénieurs, typo-graphe, poseur de sol, antiquaire,rédacteur en chef, enseignant etemployé de commerce, confes-sent tous être un peu masos,beaucoup baroudeurs, adeptesde raids aventure, de coursesextrêmes, de journées sansdouche et de nuits sans sommeil.Mais sous le soleil saharien, plusquestion de grade, de couchesociale, de fortune, de hiérarchie.Juste un objectif commun quitourne très vite à l'obsession:finir. Car ainsi va le Marathon desSables, épreuve mythique de

course à pied en allure libre et enautosufEsance alimentaire à tra-vers les ergs et les oueds asséchésdu Sud marocain. Epreuve ausens premier du terme puisquejugée comme la plus difficile et laplus éprouvante du monde, oùl'acte de bravoure finit toujourspar supplanter la performancesportive.

Et pour cause, chacun de cesîiaufragés volontaires porte lepoids de sa survie sur ses épaules,entendez l'intégralité de sesmoyens de subsistance pour lasemaine. En clair, au minimum

Au cours des trois premières étapes, la température a souventdépassé les 50 degrés. L'eau, si rare, devient un luxe inestimable.

2000 calories par jour complétéespar 6 bouteilles d'eau (9 litres),servant aussi bien à assouvir lasoif qu'à son hygiène. Pour sonrepos, le nomade des tempsmodernes se contente de deuxmètres carrés de terre caillou-teuse sous une toile de tente ber-bère occupée par huit personneset ouverte à tous les vents,

7700 km d'entraînement!Participer à des courses de ce typeexige évidemment un entraîne-ment de fer et un mental d'acier.Car chacun le reconnaît, c'est

finalement la tête qui fait avancerles jambes: ou on se transcendeou on craque. A moins que ce nesoit le corps qui n'en veuille plus,qui rien puisse plus. ChristianFatton, le plus cape de l'hétéro-clite octuor, en sait quelquechose, lui qui a subi une déshy-dratation carabinée à mi-par-cours lors de l'édition 2005, sevoyant recalé en quelques kilo-mètres de la 2O à la 205' place dugénéral. Implacable châtiment;malgré la magie de ses paysages,le désert ne pardonne ni faiblesseni improvisation. Le Neuchâte-

«J'ai la douceimpressiond'avoir vécuun trucénorme»

Laurent Keller, 45 ans,prof de gym, Genève

«Une foisc'est beau,deuxce seraittrop»

André Frei, 40 ans,ingénieur, Genève

«Je mesuisdécouvertun peuplus»

Daniel dotting, 39 ans,poseur de sol,praroman (FR)

«Je suis alléjusqu'auboutdémonrêve»Christian Fatton, 47 ans,employé de commerce,

Noiraigue (NE)

19 avril 2006 L'ILLUSTRÉ 35

Page 9: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

Le reportage

lois a vu, s'est aperçu et estrevenu, fort de sa mortifianteexpérience et de... 7700 kilo-mètres dans les jambes, avaléspar monts et par vaux, le plus sou-vent avec armes et bagages. Sonacharnement, à la limite de l'aber-ration, a fini par payer: 24( en2006, mais à six heures du vain-queur, Lalicen Ahansal, l'extrater-restre marocain.

Pour André Frei et Laurent Kel-ler, qui ont arpenté le Salève enlong, en large et en travers duranttout l'hiver, sac au dos et danstoutes les situations, cette assi-duité névrotique n'est pourtantpas une garantie de réussite. «Onpeut imaginer toutes sortes deméthodes, rien ne ressemble audésert, à sa touffeur, à sa façonunique d'oppresser les orga-nismes, de nous tétaniser»,confient-ils, eux qui, comme les731 gladiateurs des dunes, ontsouffert le martyre au cours desdeux premières étapes, les plusmeurtrières de la riche histoiredu marathon: une centained'abandons après seulement63 kilomètres. Du jamais vu. Lafaute à la tempête de sable, dou-blée d'une hygrométrie trois àquatre fois supérieure à lamoyenne (Î8%), transformant lepensum des valeureux combat-tants en véritable torture.

Payer pour souffrirDe ce défi à la limite de l'endu-rance humaine, personne ne sortindemne. Arrivé avec les rêves lesplus fous, les plus inconscients,les plus beaux, le FribourgeoisPatrick Cuennet s'en est retournédégoûté à jamais, les jambes siendolories qu'il avait du mal à res-ter debout, les pieds couvertsd'ampoules, ensanglantés eï pan-sés d'un bout à l'autre. Après deuxjours de course, il jura, mais unpeu tard, qu'on ne l'y reprendraitplus.

Dans cette aventure au longcours, la souffrance est équitable-ment distribuée. A l'instar de tousces marcheurs de l'impossible,Laurent Keller rien est pas accromême s'il avoue, un brin confusmais avec une sincérité qui l'ho-nore, s'être acquitté de ses 2530euros de finance d'inscription -voyage compris - pour endurerces heures douloureuses quenotre société occidentale en géné-ral et helvétique en particulier ne

36 L'ILLUSTRÉ

«C'est ceque j'ai faitde plusdifficile dansma vie. C'està la foispathétiqueet enivrant»

Christian Fatton

permet plus de vivre. Payer poursouffrir, pour se mettre dans lamouise. Mais pas sans limite. «Semettre au taquet une fois OK,c'est bon pour la fierté, pour lareconnaissance des autres. Maisvivre son agonie avant l'heure,non merci! Très peu pour moi.»Las pour lui, le Sahara se rit de vosétats d'âme. Ainsi, trois joursdurant, la meute des morts defaim dut affronter le souffle puis-

II faudra quelquessemaines de soins

pour que ceconcurrent retrouve

tout son aplomb...

sant chargé de sable et de chaleur,cet incessant et déprimant ventviolent, rafales qui transformentle désert en un énorme feu donton distingue à peine l'entrée. Dessables de fin du monde qui vousbrûlent les yeux et cingle la peau.Ajoutez à cela les ampoules, lescrevasses, les bleus au corps et àl'âme, et vous comprendrez pour-quoi le plaisir se fit longtempsdésirer.

ALe 21e Marathondes Sables, c'était..231 km parcourus en 6 étapes731 concurrents en 2006 dont 102 femmes19 ans le plus jeune, 69 ans le plus âgé32 nationalités représentées22 Suisses dont 8 Romands1100 personnes au total40 médecins, infirmières et auxiliaires100 véhicules 4x4100 000 I d'eau125 I de désinfectant5 km d'Elasto, 2700 Compeed, 15 ooo compresses2800 paires de gants, 2300 antibiotiques, 5300 analgésiques1 site internet {www,darbaroud.comi

II fallut attendre la grandeétape, à trois jours de l'arrivée(raccourcie de 72 à 57 km à causedes conditions dantesques), pourqu'enfin les visages profondé-ment marqués sourient d'un bon-heur silencieux, pour qu'enfin laplénitude occulte les tourbillonsde sable, pour qu'enfin l'hospita-lité aride du désert plonge les res-capés dans une sorte de béatituderéconfortante.

Marathon de la vie,marathon du cœurPour Eric Grant et Cyril Hirruner,unis pour le meilleur et pour lepire, l'effort ne fut jamais triste e\surtout pas vain. Engagés dansl'épreuve pour rendre hommageà Cédric, le père d'Eric, qui bouda le marathon à sept reprisesavant d'être emporté par un cancer, les deux amis suèrent sang eeau pour aider. Une nobltdémarche pour soutenir umnoble cause: la Ligue genevois!contre le cancer*. Qui recevra lisalaire de leur sueur, sous fonnid'étapes ou de kilomètres payé:par des supporters sensibles à ciformidable don de soi.

Parole de participant, aucuniaventure jusque-là n'avait implique leur corps et leur esprit autanque le Marathon des Sables. Uipériple de fous furieux, assènenles dubitatifs. «Au boulot, au bistrot, certains rriont baptisé Christian le Fou, le Cinglé, le Barjos'épanche Christian Fatton, coireur impénitent. Ils n'ont pas conrpris que c'est ma normalité. Suitout, ce sont des gens frustré!incapables d'aller au bout de leuirêves. Personnellement, c'est eabsolu ce que j'ai fait de plus dUÏeue dans ma vie. C'est à la fo:

pathétique et enivrant.» Unsorte de jusqu'au-boutistrteinté de rêve et de cauchem;comme la poétiquemeidécrit Le Clézio dans Le déseï«Le vent passait sur eux, à tr

vers eux, comme s'il n'y avapersonne sur les dunes. La séchresse avait durci leurs lèvres et leilangue. La soif les tenaillait, lirongeait... Ils étaient devenudepuis longtemps, muets comnle désert, pleins de lumière quarle soleil brûle au centre du civide, et glacés de la nuit aux étoilfigées.» c. R,

* [email protected],CCP 12-380-8.

Page 10: auriane sexy Marathon des Sables - Christian Fatton L' ILLUSTRE.pdf · Fort Saganne, des dunes et des chameaux en silhouettes touris-tiques. Ne croyez qu'à l'enfer. Et à des hommes

( - tow^

Le reportage

lois a vu, s'est aperçu et estrevenu, fort de sa mortifianteexpérience et de... 7700 kilo-mètres dans les jambes, avaléspar monts et par vaux, le plus sou-vent avec armes et bagages. Sonacharnement, à la limite de l'aber-ration, a fini par payer: 24e en2006, mais à six heures du vain-queur, Lahcen Ahansal, l'extrater-restre marocain.

Pour André Frei et Laurent Kel-ler, qui ont arpenté le Salève enlong, en large et en travers duranttout l'hiver, sac au dos et danstoutes les situations, cette assi-duité névrotique n'est pourtantpas une garantie de réussite. «Onpeut imaginer toutes sortes deméthodes, rien ne ressemble audésert, à sa touffeur, à sa façonunique d'oppresser les orga-nismes, de nous tétaniser»,confient-ils, eux qui, comme les731 gladiateurs des dunes, ontsouffert le martyre au cours desdeux premières étapes, les plusmeurtrières de la riche histoiredu marathon: une centained'abandons après seulement63 kilomètres. Du jamais vu. Lafaute à la tempête de sable, dou-blée d'une hygrométrie trois àquatre fois supérieure à lamoyenne (18%), transformant lepensum des valeureux combat-tants en véritable torture.

Payer pour souffrirDe ce défi à la limite de l'endu-rance humaine, personne ne sortindemne. Arrivé avec les rêves lesplus fous, les plus inconscients,les plus beaux, le FribourgeoisPatrick Cuennet s'en est retournédégoûté à jamais, les jambes siendolories qu'il avait du mal à res-ter debout, les pieds couvertsd'ampoules, ensanglantés et pan-sés d'un bout à l'autre. Après deuxjours de course, il jura, mais unpeu tard, qu'on ne l'y reprendraitplus.

Dans cette aventure au longcours, la souffrance est équitable-ment distribuée. A l'instar de tousces marcheurs de l'impossible,Laurent Keller rien est pas accromême s'il avoue, un brin confusmais avec une sincérité qui l'ho-nore, s'être acquitté de ses 2530euros de finance d'inscription -voyage compris - pour endurerces heures douloureuses quenotre société occidentale en géné-ral et helvétique en particub'er ne

«C'est ceque j'ai faitde plusdifficile dansma vie. C'està la foispathétiqueet enivrant»

Christian Fatton

permet plus de vivre. Payer poursouffrir, pour se mettre dans lamouise. Mais pas sans limite. «Semettre au taquet une fois OK,c'est bon pour la fierté, pour lareconnaissance des autres. Maisvivre son agonie avant l'heure,non merci! Très peu pour moi.»Las pour lui, le Sahara se rit de vosétats d'âme. Ainsi, trois joursdurant, la meute des morts defaim dut affronter le souffle puis-

sant chargé de sable et de chaleur,cet incessant et déprimant ventviolent, rafales qui transformentle désert en un énorme feu donton distingue à peine l'entrée. Dessables de fin du monde qui vousbrûlent les yeux et cingle la peau.Ajoutez à cela les ampoules, lescrevasses, les bleus au corps et àl'âme, et vous comprendrez pour-quoi le plaisir se fit longtempsdésirer.

Le 21e Marathondes Sables, c'était..231 km parcourus en 6 étapes731 concurrents en 2006 dont 102 femme19 ans le plus jeune, 69 ans le plus âgé32 nationalités représentées22 Suisses dont 8 Romands1100 personnes au total40 médecins, infirmières et auxiliaires100 véhicules 4x4100000 I d'eau125 l de désinfectants km d'Elasto, 2700 compeed, 15 OQO compresses2800 paires de gants, 2300 antibiotiques, 5300 analgésiques1 site internet iwww.darbaroud.cornj

II fallut attendre la grandeétape, à trois jours de l'arrivée(raccourcie de 72 à 57 km à causedes conditions dantesques), pourqu'enfin les visages profondé-ment marqués sourient d'un bon-heur silencieux, pour qu'enfin laplénitude occulte les tourbillonsde sable, pour qu'enfin l'hospita-lité aride du désert plonge les res-capés dans une sorte de béatituderéconfortante.

Marathon de la vie,marathon du cœurPour Eric Grant et Cyril Himmer,unis pour le meilleur et pour lepire, l'effort ne fut jamais triste elsurtout pas vain. Engagés dansl'épreuve pour rendre hommageà Cédric, le père d'Eric, qui bou-cla le marathon à sept reprisesavant d'être emporté par un cancer, les deux amis suèrent sang eeau pour aider. Une nobltdémarche pour soutenir un*noble cause: la Ligue genevoisicontre le cancer*. Qui recevra Itsalaire de leur sueur, sous formid'étapes ou de kilomètres payé:par des supporters sensibles à ciformidable don de soi.

Parole de participant, aucunaventure jusque-là n'avait implique leur corps et leur esprit autanque le Marathon des Sables, Uipériple de fous furieux, assènetiles dubitatifs. «Au boulot, au bistrot, certains m'ont baptisé Chri;tian le Fou, le Cinglé, le Barjos'épanche Christian Fatton, coireurimpénitent. Ilsn'ontpascorrpris que c'est ma normalité. Su:tout, ce sont des gens frustré:incapables d'aller au bout de leuirêves. Personnellement, c'est eabsolu ce que j'ai fait de plus difïeile dans ma vie. C'est à la fo

pathétique et enivrant.» Ursorte de jusqu'au-boutisrrteinté de rêve et de cauchem;comme l'a poétiquemeidécrit Le Clézio dans Le déseï«Le vent passait sur eux, à tr

vers eux, comme s'il riy avipersonne sur les dunes. La séchresse avait durci leurs lèvres et leilangue. La soif les tenaillait, 1rongeait... Ils étaient devenudepuis longtemps, muets comnle désert, pleins de lumière quaile soleil brûle au centre du civide, et glacés de la nuit aux étoilfigées.» C. R.• [email protected],CCP 12-380-8.

36 L'ILLUSTRÉ